5. Audition de M. Francis DELON, Secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale
M. Francis Delon - Je commencerai par vous présenter la méthode suivie pour cette étude, tout en vous indiquant que le contenu de celle-ci n'est pas encore arrêté et que cette audition pourra sans doute nous aider à le préciser davantage.
S'agissant de la méthode, je vous rappelle que le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2008 avait prévu une révision régulière tous les quatre ans, la première devant donc intervenir en 2012. Etant entendu qu'il ne serait pas raisonnable de procéder à cette révision avant les élections présidentielle et législatives, il y sera procédé au cours du deuxième semestre de l'année.
Il convient de garder à l'esprit que ce deuxième semestre devrait aussi donner lieu à l'élaboration d'un nouveau budget triennal pour la période 2013-2015, ainsi que d'une nouvelle loi de programmation militaire applicable de 2013 à 2018, puisque, bien que couvrant une période de six années, ces lois sont élaborées tous les quatre ans, afin de permettre une programmation dite « glissante » de notre effort de défense.
Nous savons donc d'ores et déjà que nous serons confrontés à une difficulté : devoir mener ces différents exercices de façon séquentielle, la révision du Livre blanc devant par définition intervenir avant l'élaboration de la loi de programmation.
Aussi, afin d'alléger ce calendrier particulièrement tendu, le parti a été pris de réfléchir dès maintenant sur les évolutions du contexte stratégique depuis 2008, dans un travail qui sera rendu, non pas en décembre 2011 comme initialement prévu, mais en janvier 2012.
Le Président de la République m'a donné pour mandat de mener cette réflexion au sein de l'administration et dans un cadre interministériel, c'est-à-dire sans la participation de membres du Parlement ou de personnalités de la société civile, cette approche, différente de celle adoptée pour le cadre de la commission du Livre blanc, se justifiant, d'une part, par la moindre ambition du présent exercice et, d'autre part, par des contraintes de calendrier.
En revanche, la méthode de travail appliquée au sein de la commission du Livre blanc de 2008 devrait être appliquée pour la révision de celui-ci au cours du second semestre 2012.
Je précise que, si les travaux ont effectivement été conduits entre les représentants des Affaires étrangères, de la Défense, de l'Intérieur et de Bercy, des experts extérieurs, français et étrangers, y ont toutefois été associés, non seulement au sein des groupes de travail, mais aussi dans le cadre d'un séminaire organisé à Paris à la fin du mois d'octobre, qui a permis d'avoir un regard extérieur sur nos réflexions.
Nous avons également consulté nos partenaires européens les plus proches, à savoir les Allemands et les Britanniques, sur la base d'un questionnaire et de rencontres qui nous ont permis d'échanger nos visions respectives du contexte stratégique, et de réaliser qu'elles sont en fait très voisines.
Nous avons procédé à l'analyse des événements intervenus depuis 2008 dans les domaines de la défense et de la sécurité, ou ayant eu un impact significatif sur ceux-ci et, d'autre part, essayé d'identifier les enjeux structurants de notre politique de défense et de sécurité nationale d'ici 2020, horizon fixé par le Livre blanc de 2008.
Il ne s'agit donc pas, à quelques mois de l'élection présidentielle, de formuler des recommandations ou d'influencer des décisions stratégiques, mais simplement de définir l'environnement dans lequel s'inscrira la révision proprement dite.
Cette réflexion a, dans un premier temps, été conduite au sein de quatre groupes de travail présidés par des personnalités de cultures et d'horizons différents, traitant respectivement des recompositions géostratégiques en cours, des architectures de sécurité collective et des outils de gestion de crise, des risques et des menaces auxquels sont confrontées nos sociétés, et enfin des enjeux économiques et sociétaux pour le quatrième.
Ce dernier groupe est une innovation liée à la crise économique et financière, qui a des incidences en matière de défense et de sécurité, mais aussi sur l'évolution de l'équilibre des puissances.
Sur la base des travaux de ces groupes de travail, nous avons engagé un travail de rédaction pour produire un document de synthèse d'une cinquantaine à une centaine de pages, destiné à être rendu public comme l'avait été le Livre blanc de 2008, ce qui rend la tâche encore plus délicate ; nous devons veiller à ce que rien ne soit écrit qui puisse mettre la France dans l'embarras vis-à-vis de ses grands partenaires.
Ce document de synthèse devra enfin être approuvé par un conseil de défense et de sécurité nationale, qui se tiendra vraisemblablement en janvier prochain.
En dépit du caractère interministériel de cet exercice, le Président de la République m'a demandé d'y associer le Parlement au travers d'auditions réalisées par les commissions compétentes, ce qui m'a déjà donné l'occasion d'être entendu par la commission de la défense et celle des affaires étrangères de l'Assemblée nationale.
S'agissant du contenu de nos travaux, il est parti d'une première constatation selon laquelle l'analyse stratégique effectuée en 2008 était largement confirmée.
La mondialisation, présentée en 2008 comme le thème nouveau et central du Livre blanc, demeure un paramètre essentiel de la situation stratégique mondiale, et ses revers - car ils existent - constituent des sources d'incertitudes stratégiques et d'inquiétudes pour nos intérêts.
Le Livre blanc avait identifié quatre zones critiques pour la France constituant un « arc de crise » allant de l'Afrique de l'Ouest à l'Océan indien, une zone aujourd'hui toujours en proie à nombre d'incertitudes. L'analyse demeure donc pertinente, en particulier pour la zone sahélienne, le Pakistan, l'Afghanistan et le Maghreb, où se font sentir de fortes tensions,
Les vulnérabilités que nous présentions en 2008 comme nouvelles, telles que le terrorisme, la menace balistique, la menace électronique dite cyber, les grands trafics criminels et les risques naturels, technologiques ou sanitaires, demeurent d'actualité, ce Livre blanc ayant été le premier consacré aux enjeux non seulement de la défense, mais aussi de la sécurité nationale.
L'idée d'une continuité entre la sécurité intérieure et la sécurité extérieure, et de l'interconnexion croissante des menaces et des risques est également tout à fait pertinente aujourd'hui.
L'intérêt du concept de stratégie de sécurité nationale est confirmé, en particulier quant à ses finalités que sont la défense de la population et du territoire, la contribution à la sécurité internationale et la défense des valeurs du pacte républicain.
Si l'analyse stratégique de 2008 demeure donc fondamentalement valable, encore faut-il y intégrer les événements importants intervenus depuis.
Il s'agit, premièrement, des évolutions politiques et stratégiques majeures du monde arabe, compte tenu des liens de la France avec les pays concernés. Facteur d'espoir, cette recomposition constitue aussi, aujourd'hui, une source d'incertitudes quant à la façon dont les équilibres régionaux de cette partie du monde vont se redéfinir : la nature des relations que les nouveaux régimes entendront entretenir avec les pays occidentaux, et la façon dont celles-ci évolueront. Toute analyse définitive est d'autant plus difficile que ces évolutions sont encore en cours, ne serait-ce qu'en Syrie, mais aussi ailleurs.
Le deuxième élément que nous avons identifié comme important est la modification accélérée de l'équilibre des puissances sous l'effet de la crise économique.
La dynamique chinoise, déjà mise en évidence très nettement par le Livre blanc de 2008, s'est renforcée, ainsi que d'autres puissances comme l'Inde ou le Brésil, qui ont su profiter du nouveau contexte pour améliorer leurs positions par rapport aux pays occidentaux, notamment européens.
Quant à l'Afrique à laquelle beaucoup ne prédisaient pas d'avenir, elle bénéficie en fait d'une réelle croissance économique, plusieurs signes encourageants laissant penser que ce continent sous-peuplé commence à se sortir de certaines de ses difficultés. La démographie, qui pose un problème dans certaines grandes villes africaines, est en passe de devenir un atout pour ce continent en réalité sous-peuplé ; en outre certaines difficultés, comme celles liées à l'épidémie du sida, méritent aujourd'hui d'être relativisées.
Ainsi, la place de ce continent dans les grands déséquilibres stratégiques doit-elle être désormais observée avec davantage d'attention.
Le troisième élément d'évolution concerne les États-Unis où une nouvelle séquence stratégique américaine semble se dessiner, au moment où s'achève une décennie d'interventions militaires contre-insurrectionnelles. D'une part, l'Amérique se tourne vers le Pacifique ; d'autre part, elle s'apprête, du fait de la crise, à diminuer son budget de défense de plusieurs centaines de milliards de dollars. Cette baisse doit toutefois être relativisée dans la mesure où elle ne fait que ramener les dépenses militaires à leur niveau des années 2000, au moment même où les coûts liés à l'engagement en Afghanistan et en Iraq vont disparaître. Elle ne sera toutefois pas sans incidence pour l'Europe. Notons enfin qu'en raison d'une sorte de lassitude liée à l'engagement militaire en Irak et en Afghanistan la classe politique américaine éprouve une certaine répugnance à l'égard de ce type d'interventions extérieures, comme ce fut le cas, de façon cyclique, après la guerre du Viêtnam ou d'autres conflits.
La guerre contre le terrorisme, quatrième élément de ce contexte, a été théorisée par l'administration américaine sous la présidence de Georges W. Bush ; elle connait une nouvelle phase caractérisée par l'affaiblissement de la structure centrale d'Al-Qaïda, lié à la mort de son chef Oussama Ben Laden qui incarnait le djihad global et la guerre des civilisations et qui avait été capable d'organiser les attentats du 11 septembre 2001. La menace terroriste n'a toutefois pas disparu, surtout pour notre pays, notamment dans la région du Sahel avec la présence Al-Qaïda au Maghreb islamique. Ces observations doivent nous amener sans doute à remettre en perspective la centralité stratégique du terrorisme qui avait été mise en évidence à la fois par les Livres blanc sur le terrorisme de 2006 et de 2008.
Le cinquième et dernier élément marquant depuis 2008, c'est la catastrophe de Fukushima dont les conséquences sont d'ores et déjà visibles en matière d'énergie nucléaire dans le domaine civil, puisqu'elle a commencé à orienter les décisions des États en la matière ainsi que le débat public, que ce soit en Allemagne, en Autriche ou encore en France, étant entendu qu'il faudra également s'interroger sur son impact dans le domaine du nucléaire militaire. Ces conséquences doivent toutefois être relativisées car, malgré les débats et les incertitudes, la politique des grands États nucléarisés n'a pas été modifiée, que ce soit en Chine, aux États-Unis ou encore au Royaume-Uni. La situation extraordinaire à laquelle le Japon a dû faire face en déployant des moyens considérables - la mobilisation de 100 000 hommes des forces de défense japonaises - doit nous permettre de tirer des enseignements quant à la gestion de crise - aspect essentiel de la sécurité nationale que nous avions identifié dans le Livre blanc - et nous amener à réfléchir sur la notion de protection du territoire et des populations.
Dans ce contexte global, les enjeux structurants pour notre politique de défense dans les années à venir s'articulent autour de plusieurs axes. La ligne directrice majeure de cette politique est le maintien de notre autonomie stratégique qui se décline à plusieurs niveaux.
Au niveau militaire d'abord : alors que l'effort de défense de la plupart des pays européens diminue en valeur, absolue et relative, nous avons fait le choix, comme le Royaume-Uni, de maintenir notre effort, au point d'arriver à une situation dans laquelle la capacité d'intervention européenne repose pour l'essentiel sur les forces françaises et britanniques.
Au niveau économique ensuite, l'internationalisation croissante des marchés faisant peser sur nous de nouvelles vulnérabilités. Nous devons veiller à l'équilibre entre la nécessaire attractivité à l'égard des capitaux étrangers qui peuvent soutenir notre croissance économique et l'impératif de préserver notre autonomie dans les domaines de souveraineté, en protégeant notamment notre patrimoine scientifique et technique. Sur ce point les dépenses de défense et de sécurité peuvent agir comme un outil de politique industrielle sélective et ciblée en soutien aux secteurs où l'autonomie stratégique revêt un caractère essentiel. A cet égard, les secteurs de la défense, de l'aéronautique et du spatial, ces deux derniers secteurs ayant une dimension duale évidente, représentent 4 000 entreprises fortement exportatrices, qui emploient 165 000 personnes et portent aujourd'hui l'industrie de notre pays, alors même que beaucoup d'autres secteurs sont en recul.
Notre politique devra ensuite s'exprimer en cohérence avec un cadre multilatéral qui se transforme en raison de la modification de l'équilibre des puissances. Ainsi en est-il des nouvelles revendications des pays en développement au sein du Conseil de sécurité de l'ONU, qui aspirent au statut de membre permanent, mais dont le rôle, pour certains d'entre eux, ne sont pas sans susciter des interrogations, comme nous le voyons aujourd'hui, notamment dans le cas syrien. Toutefois, l'ONU et plus spécifiquement le Conseil de sécurité doivent rester l'instance de production de légitimité capable de prendre les décisions nécessaires. Nous avons également pu constater une montée en puissance d'autres organisations régionales, notamment la Ligue arabe ou encore l'Union africaine, dont le rôle peut être important dans les crises actuelles.
Un autre enjeu structurant pour concevoir notre politique de défense et de sécurité est de prendre en compte les risques et les menaces qui affectent les territoires et les populations. Il s'agit de la montée en puissance évidente, depuis 2008, de la « cyber menace » ; de la menace terroriste qui, malgré la mise en perspective de sa centralité stratégique dont j'ai parlé, doit nous conduire à maintenir notre effort de renseignement ; de la menace balistique aujourd'hui essentiellement iranienne ; des trafics illicites et de la criminalité organisé, phénomènes en expansion très déstabilisants pour des États d'Amérique centrale ou d'Afrique occidentale, qui ont été parfois transformés en véritable narco-États et qui sont devenus des zones de non droit pesant sur la sécurité de leur région ; des risques naturels et technologiques, enfin.
La prévention des conflits et l'action en faveur de la sécurité internationale seront également un enjeu structurant de notre politique. Sur ce point, je voudrais rappeler en premier lieu que le dispositif militaire français déployé à l'étranger a été substantiellement réaménagé depuis 2008, en particulier en Afrique. La prévention des conflits c'est aussi une action résolue contre la prolifération et l'approfondissement d'une approche conjuguant la sécurité et le développement pour laquelle l'Union européenne dispose d'atouts indéniables, notamment au Sahel.
Enfin, la construction de la politique de défense et de sécurité européenne est le dernier élément structurant de notre politique. En la matière, force est de constater que les avancées obtenues à l'issue de la présidence française fin 2008 n'ont pas permis d'enclencher la dynamique attendue, notamment en raison des réserves de certains pays, mais également du contexte budgétaire et financier actuel. Sans doute, sommes-nous entrés dans une phase de pause, mais notre volonté de poursuivre la construction de la défense européenne reste intacte. Les partenariats binationaux ou multinationaux constituent un volet important de la défense européenne, comme en témoigne l'action engagée avec les Britanniques dans le cadre du traité de Lancaster House, qui doit nous permettre de rapprocher nos politiques de défense, notamment dans le domaine capacitaire, mais également dans le cadre du triangle de Weimar, qui nous permet de maintenir un lien avec les Allemands et les Polonais à l'Est de l'Europe. L'Alliance atlantique constitue le dernier volet de cette politique, notre retour dans la structure intégrée pouvant être considéré comme un succès, comme l'a démontré le récent engagement de nos forces en Libye sous l'égide de l'OTAN. Nos positions sont désormais mieux comprises dans cette enceinte sans que nous ayons dû concéder pour autant des abandons de souveraineté pour l'emploi de nos forces. Nous sommes d'ores et déjà rentrés dans une nouvelle phase de modernisation de cette organisation, très marquée par la guerre froide, dans laquelle la France prend toute sa part sans abandon de sa souveraineté et fait valoir ses positions avec une plus grande capacité d'influence qu'auparavant.
Tel est l'état de nos réflexions.
M. André Dulait - Bien que partageant l'essentiel de vos analyses, je souhaiterais toutefois exprimer une différence d'appréciation avec la présentation que vous nous avez faite du fameux « arc de crise ». En effet, ayant participé avec mes collègues Josette Durrieu, Michelle Demessine et Yves Pozzo di Borgo, au groupe de travail de notre commission consacré aux printemps arabes, il me semble que les pays concernés devraient davantage être considérés comme constituant une zone de développement ou une zone d'évolution, alors qu'en revanche il conviendrait d'accorder une attention plus soutenue aux risques rencontrés dans le Sahel, qui tend à devenir une véritable zone de non-droit.
M. Didier Boulaud - Tout en constatant que votre exposé a évoqué l'ensemble des questions que nous avons nous-mêmes évoquées à l'occasion de nos auditions, je prends acte de votre optimisme quant à la défense européenne. Vous parlez de « pause ». Force est toutefois de constater l'absence d'avancée en la matière, alors qu'elle avait pourtant été présentée par le président de la République comme l'une des conditions du retour de la France dans le commandement intégré de l'OTAN.
Quant à la répartition de l'effort de défense en Europe, qui repose effectivement sur la France et sur le Royaume-Uni, rappelons que, pour notre part, le niveau de dépense de 1,5 à 1,6 % du PIB apparaît comme un minimum au-dessous duquel nous ne pourrions descendre sans risquer de perdre en crédibilité, surtout au moment où les Etats-Unis sont moins enclins à s'engager sur le vieux continent, mais plutôt à regarder vers l'Asie.
Je souhaiterais enfin apporter une nuance quant à la réalité de la menace balistique iranienne, qui fait aujourd'hui figure de tropisme franco-français, alors que, comme cela ressort notamment de la dernière réunion du Forum transatlantique parlementaire auquel j'ai participé, nos alliés américains considèrent davantage la menace nord-coréenne ou pakistanaise.
Je crains que nous ne soyons quelque peu isolés sur ce sujet et que, faute d'une meilleure concertation avec nos partenaires, nous ne prenions le risque d'être identifiés comme les principaux partisans de la prise en compte d'un risque iranien.
Mme Josette Durrieu - Que pensez-vous des menaces éventuelles représentées, d'une part, par les régimes islamistes qui succèdent à certaines dictatures du monde arabe et, d'autre part, par la prolifération des armes au Sahel ?
Ne pensez-vous pas que le traité de non-prolifération des armes nucléaires ne soit lui-même un facteur de déséquilibre, dans la mesure où il traite les différents pays en appliquant deux poids et deux mesures ? Ceci ne doit-il pas conduire à reconsidérer l'économie générale de ce traité ?
A propos des cyber-menaces, il convient aussi d'insister sur l'importance d'Internet rappelée par la coupure de toutes les connexions survenue dimanche dernier en Russie, alors que le président Medvedev se présente par ailleurs comme un promoteur des nouvelles technologies. A-t-on réfléchi à la menace que représente ce type d'actions et aux moyens d'y faire face ?
S'agissant des évolutions institutionnelles en cours, ne pensez-vous pas que l'on assiste à l'émergence de nouveaux modèles, comme par exemple l'islam soi-disant modéré dont se réclame le gouvernement turc, susceptible d'être pris comme référence par les régimes issus du printemps arabe ?
Si tel était le cas, ne devrait-on pas, en conséquence, réviser la façon dont nous considérons ce pays, y compris eu égard à sa candidature à l'Union européenne ?
Enfin, il me semble que l'on a tendance à sous-estimer la puissance ré-émergente que constitue la Russie. Pourtant, elle est bien là, dangereuse, comme on peut le voir en Géorgie, en Ossétie du Sud, et en Transnistrie, son influence se faisant sentir jusqu'au Moyen-Orient par le soutien apporté à des pays tels que l'Iran ou la Syrie. Quelle analyse faites-vous de la position de la Russie ?
M. Jean-Pierre Chevènement - Je n'ai jamais été véritablement convaincu par les analyses du Livre blanc. Le terrorisme demeure un concept aux contours particulièrement mal définis, auquel on ne peut, bien entendu, que s'opposer sans vraiment savoir ce qu'il recouvre.
Quant à l'arc de crise, quelle est sa pertinence au moment où les Etats-Unis se désengagent d'Irak et d'Afghanistan ?
En revanche, le Livre blanc sous-estime la montée de la Chine et la constitution d'une nouvelle bipolarité, qui a notamment pour conséquence un déplacement de plus en plus net du centre de gravité des préoccupations américaines vers l'Asie de l'Est et du Sud-Est.
M. Didier Boulaud - Et vers l'Australie.
M. Jean-Pierre Chevènement - En outre, des évènements majeurs sont intervenus depuis le Livre blanc, à commencer par la crise économique, qui se traduit par la réduction des moyens aux Etats-Unis et dans les pays européens, alors même que de nouvelles inconnues apparaissent. Ces dernières portent par exemple sur la montée de l'influence de la Chine en Afrique, en Amérique latine, ou même en Europe.
Par ailleurs, force est de constater qu'un an après la conférence de New York, les menaces liées à la prolifération nucléaire n'ont pas disparu, puisqu'il semble qu'il n'y ait plus de majorité au Sénat américain pour ratifier l'accord sur l'interdiction des essais nucléaires, et que la perspective de la signature d'un traité relatif aux matières fissiles à usage militaire s'éloigne, alors que se renforcent les arsenaux nucléaires en Asie.
J'entends aussi que l'on parle beaucoup de l'Iran, le président de la République française ayant même fait état, il y a cinq ans, de l'existence d'un dilemme entre la bombe iranienne et le bombardement de l'Iran. Or, rien ne dit que nos moyens de dissuasion qui nous ont protégés de l'Union soviétique ne constituent pas aussi des moyens efficaces face à un pays dont les armes seraient de toute façon moins sophistiquées.
D'une façon plus générale, j'estime que le discours actuel prend insuffisamment la mesure du véritable déplacement du centre de gravité vers l'Asie du Sud et du Sud-Est auquel nous assistons.
Les révolutions arabes ont fait naître de nouvelles inconnues, comme en témoigne l'exemple de l'Egypte, où, moins d'un an après les évènements de la place Tahrir, que nous avions trop tendance à considérer à l'aune de nos propres valeurs, les partis islamistes ont emporté plus de 70 % des suffrages, les élections tunisiennes et marocaines traduisant globalement le même mouvement.
Quant à la révolution libyenne vantée par M. Bernard-Henri Lévy, elle n'a, pour le moins, pas encore porté tous ses fruits...
Nous devons donc réévaluer nos analyses pour prendre en compte la réalité des bouleversements qui affectent l'ensemble du bassin méditerranéen.
Il faut partir de ce que sont véritablement ces sociétés au sein desquelles une fracture sépare la partie moderne, qui regarde vers l'Occident, d'une partie plus traditionnelle. Face à ces évolutions, une politique de coopération en matière de logement, d'urbanisation, de diversification économique de notre part, constituerait sans doute une réponse plus adaptée en tout cas que le développement de systèmes de lutte contre les « engins explosifs improvisés ». La dimension militaire est bien loin de résumer l'approche que nous devons avoir de sociétés qui connaissent des mutations aussi globales.
Enfin, ayant animé le groupe de travail de la commission sur les perspectives budgétaires, je tenais à souligner qu'il sera difficile de concilier la poursuite de l'effort financier prévu par la loi de programmation militaire, et les engagements qui sont contractés aujourd'hui sans doute de façon un peu rapide. Je vois mal comment il serait possible d'aller plus loin dans le sens de la diminution de l'effort que nous avons déjà connue.
M. Francis Delon . - Nous avons, au cours de nos travaux, eu le débat évoqué par M. André Dulait sur la dénomination de l'arc allant de l'Atlantique au Moyen-Orient, d'ailleurs sans l'avoir véritablement tranché. Mais quel que soit le nom qu'on lui donne, l'ensemble de cette zone appelle toute notre attention, et c'est à juste titre que le Livre blanc l'a identifiée comme telle.
Quant à la menace iranienne, Monsieur Boulaud, si elle est passée au second plan de l'attention des médias pendant le printemps arabe, force est de constater qu'elle est bien réelle, comme le confirme un très récent rapport de l'Agence internationale de l'énergie atomique sur l'accélération, au cours de cette période, du programme iranien de la fabrication d'armes nucléaires.
La lassitude qu'a pu susciter la lenteur du processus ne doit pas nous conduire à sous-estimer le risque de voir l'Iran effectivement s'équiper d'armes nucléaires, dans la mesure surtout où cela conduirait ses voisins à ne pas vouloir être en reste.
Tel pourrait être le cas de l'Arabie saoudite, comme cela ressort des récents propos du prince Turki al-Fayçal, ou de la Turquie. On peut craindre un phénomène de boule de neige aggravé par l'opposition séculaire des chiites et des sunnites. Le gouvernement et le public israéliens suivent cette affaire avec une très grande anxiété. D'où un risque fort d'intervention militaire. C'est pourquoi nous agissons depuis longtemps avec les Américains, les Britanniques, les Allemands, les Russes et les Chinois pour appliquer des sanctions économiques de façon concertée. Nous travaillons à leur durcissement, car il n'y a pas d'autre solution, sauf à se résigner à une action militaire qui pourrait déstabiliser toute la région. Monsieur Boulaud, je crois les dirigeants américains très préoccupés par ce sujet.
M. Didier Boulaud - J'ai tout de même un petit doute.
M. Francis Delon. - Mme Durrieu m'a posé beaucoup de questions. L'islam est-il un danger ? Non. Evitons tout amalgame. En revanche, il importe de distinguer les différents courants islamistes. Ainsi, le salafisme connait une dérive dangereuse. Après avoir été longtemps persécutés, les Frères musulmans prennent le pouvoir en Égypte, en Tunisie.
M. Jacques Gautier - Et au Maroc.
M. Francis Delon . - Les décisions prises par ces peuples sont souveraines.
J'en viens aux armes libyennes, dont la prolifération est inquiétante. Leur panoplie est vaste, en commençant par celles de petit calibre qui feront le bonheur des petits trafiquants, mais aussi d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). Des explosifs militaires aussi ont disparu. Nous n'avons pas de vision claire du volume d'armes disséminées. En outre, des armements plus sophistiqués, comme des missiles sol-air, se sont volatilisés. Il y en a sans doute bien moins d'une dizaine de milliers, mais certains sont tombés aux mains d'Aqmi. Sont-ils utilisables ? Les modèles anciens comme les SAM 7 soviétiques ne sont peut-être plus en état de fonctionner ; les plus récents devaient être en bon état, mais leurs conditions d'emploi et d'entretien exigeantes les rendent peu adaptés à leur emploi par des groupes terroristes, notamment au Sahel. Je note en particulier qu'en Afghanistan, aucune arme de ce type n'a jamais, sauf erreur de ma part, été utilisée par les taliban, peut-être pour les raisons que je viens de mentionner. Les nouvelles autorités libyennes oeuvrent de concert avec nous, avec les Britanniques et les Américains.
Monsieur Chevènement, le traité de non-prolifération (TNP) est imparfait, mais nous n'avons rien d'autre. De nombreux pays n'en retiennent que les dispositions relatives aux armes nucléaires. L'Iran est signataire ; la Corée du Nord, Israël, l'Inde et le Pakistan ne le sont plus ou pas. Rappelez-vous : la maîtrise de l'armement nucléaire par l'Inde a provoqué une réplique immédiate du Pakistan. Je crains un enchaînement semblable si l'Iran accédait à l'arme nucléaire.
Monsieur Chevènement, je souscris à ce que vous avez dit au sujet du traité interdisant les essais nucléaires, qu'il s'agisse du cut-off ou du traité d'interdiction complète des essais nucléaires. Les États-Unis ont dit qu'ils s'engageraient dans la ratification, mais ne l'ont pas fait en raison du blocage au Congrès. Je ne vois guère de perspectives encourageantes pour le cut-off : voyez ce qui s'est passé à Genève. Les Chinois veulent augmenter leur arsenal, tout comme les Pakistanais. L'optimisme n'est donc pas de mise sur ce front.
M. Jean-Pierre Chevènement - Ne serait-il pas souhaitable que la France, les États-Unis et d'autres grands pays prennent l'initiative de rappeler les orientations prises il y a deux ans par la conférence d'examen ? Le désarmement du Proche-Orient a été mis de côté, mais un premier bilan permettrait d'exercer une pression sur le Pakistan. Où son arsenal entraînera-t-il l'Inde et la Chine ? Comment maîtriser l'arsenal nucléaire en Asie sans initiative de grands pays affirmant que la conférence d'examen doit servir à quelque chose ?
M. Francis Delon . - Je partage votre souhait, mais où sont les espaces politiques permettant de le concrétiser ? La situation préélectorale aux Etats-Unis ne s'y prête guère. Je ne peux augurer d'initiative immédiate en perspective, malgré l'importance majeure du sujet.
M. Jean-Pierre Chevènement . - Il faut prendre des contacts préalables.
M. Francis Delon . - Je partage votre analyse.
J'en viens à la cybermenace. La France défend la libre utilisation d'Internet et des réseaux sociaux, dont on connaît le rôle dans les révoltes arabes, mais les discussions politiques sur la cyberdéfense - au sein du groupe de travail mis en place par les Nations unies ou dans celui réuni à Londres à l'initiative de M. Haig - conduisent à l'affrontement de deux conceptions : les Occidentaux veulent limiter les cyberattaques et avancent l'idée d'un code de bonne conduite, les Russes et les Chinois, notamment, mettent en avant les dangers d'internet et veulent s'intéresser à son contenu en imaginant de le réglementer. Aujourd'hui, les attaques informatiques sont utilisées à des fins d'espionnage, mais elles pourraient demain permettre des opérations de sabotage.
La Turquie est un pays important. Nous avons avec elle une divergence quant à son ambition de rejoindre l'Union européenne, mais nous avons des intérêts communs objectifs. Il faut discuter avec ce pays, qui regagne en influence dans l'espace de l'ancien Empire ottoman, et coopérer dans certains cas. La Turquie est-elle pour autant une référence ? Elle semble en tout cas aujourd'hui prise pour modèle par certains pays arabes.
Vous avez qualifié la Russie de pays « ré-émergent ». Après être tombée assez bas, elle se redresse sur le plan économique, mais ce redressement est fragile. Sa démographie n'augure pas un avenir brillant, mais elle conserve sa taille, son histoire et sa capacité nucléaire. Il reste que ce pays apparait moins au centre des préoccupations dans le contexte stratégique actuel, en tout cas moins que la Chine. La France approfondit en tout cas ses relations avec la Russie. C'est indispensable. La vente de bateaux de projection et de commandement (BPC), à cet égard, était un geste politique fort. La France est le premier pays européen à conclure une telle vente. Il est indispensable d'arrimer au maximum ce pays à l'Europe.
M. Yves Pozzo di Borgo - C'est le sens du rapport que j'ai signé !
M. Francis Delon . - J'en viens au Livre blanc. Vous pouvez ne pas approuver certaines de ses analyses, Monsieur Chevènement, mais celui de 2008 a mentionné la Chine, dont il a évoqué la montée en puissance.
S'agissant du terrorisme, il faut s'interroger avec un regard neuf sur sa centralité stratégique.
M. Daniel Reiner - Je voudrais poser une question de méthode. Vous avez dit que le Livre blanc, dont j'estime qu'il ne doit pas devenir un rituel, était d'abord un exercice administratif. Il y a là un écueil, celui de devenir un ouvrage sous influence, alors que seule une analyse libre permet un choix éclairé. Nous avons souhaité des conclusions partagées, car la nation doit connaître les motifs des efforts demandés.
Vous avez jugé nécessaire de préserver l'outil de défense, notamment sa base industrielle, qui protège notre souveraineté nationale. Nous en sommes tous d'accord. Cela commande notre position sur la défense antimissile balistique. Il nous semble qu'après avoir pris des engagements écrits envers l'OTAN, certains reculent en s'interrogeant sur la compatibilité de cette défense avec notre doctrine de dissuasion. D'éminents responsables ont répété ici ce que l'on ne disait plus depuis deux ans. Nous avons mesuré le risque pour notre industrie d'une défense antimissile balistique principalement américaine, qui ne souhaite pas vraiment associer les capacités européennes. Cette affaire n'est plus guère évoquée aujourd'hui, alors qu'il serait dommage de perdre nos compétences en la matière.
J'en viens à la prévision mathématique, ordinairement appliquée aux risques naturels, mais dont l'usage pourrait être étendu. Nous en avons les capacités intellectuelles.
M. Jeanny Lorgeoux - La desquamation de certains États fait courir un risque majeur, avec une pauvreté source d'émigration, une criminalité qui vide de leur substance des pays comme le Mexique ou la Guinée-Bissau, des formes claniques centrifuges en Afghanistan, en Afrique, les frontières artificielles héritées de la conférence de Berlin en 1883 et qui expliquent nombre de guerres, comme celle du Katanga.
M. Jean-Pierre Chevènement - Bismarck !
M. Jeanny Lorgeoux - Oui. Pourrions-nous orienter notre politique de coopération pour rétablir des cadres étatiques ?
M. Jacques Gautier - Vous avez insisté sur l'accident nucléaire au Japon, que j'analyse d'abord comme la conséquence d'un tremblement de terre et d'un tsunami. En trois jours, ce pays a réussi à mobiliser 100 000 hommes de ses forces d'autodéfense. Quelles sont les perspectives en France ? Cela me conduit au mot « résilience », qui apparaît dans le Livre blanc, mais qui n'a aucune transcription dans la France d'aujourd'hui.
M. Jean-Claude Peyronnet - De quelles armes nucléaires est-il question ? Où en sont les pays concernés en matière de miniaturisation ?
Vous avez évoqué les sanctions économiques contre l'Iran. Mais connaissez-vous un exemple récent montrant que de telles mesures peuvent être efficaces ? Il me semble que ce n'est jamais le cas.
Je pense nécessaire d'intégrer au maximum la Turquie dans l'Europe ; sinon, elle passera sous l'influence d'autres grandes puissances. Ce serait une perte majeure pour l'Europe occidentale.
Intégrez-vous la piraterie dans le terrorisme ?
M. Francis Delon - Non, la piraterie ne relève pas du terrorisme.
Monsieur Reiner, s'agissant de la méthode retenue pour conduire notre exercice, il existe un risque de « langue de bois », mais nous nous efforcerons de l'éviter. Vous jugerez sur pièces. Travailler en cercle restreint présente des inconvénients, mais nous essayons de faire pour le mieux. Le Livre blanc qui sera élaboré en 2012 sera sans doute issu d'un travail plus ouvert dans lequel le Parlement apportera sa contribution.
En matière de défense antimissile, la position de la France est inchangée. Il n'y a là aucune contradiction avec notre dissuasion nucléaire. Nous sommes entrés dans une phase de discussions sur les modalités du command control dans la perspective du sommet de Chicago. A cet égard, nous ne voulons pas d'un système aux mains des Américains et nous leurs disons s'agissant des enjeux industriels que nous voulons que les intérêts industriels de la France soient pris en compte. L'Europe et la France doivent avoir une place dans ce système.
M. Yves Pozzo di Borgo - Et la Russie ?
M. Francis Delon . - Nous souhaitons qu'elle soit un partenaire de l'OTAN dans cette affaire aussi bien pour des raisons politiques que pour des considérations géographiques. Mais vous connaissez les difficultés de cette discussion dues à la perception de l'OTAN par les Russes.
Singapour, Monsieur Reiner, conduit des travaux de prévisions mathématiques sur des sujets stratégiques dits de « horizon scanning ». Nous sommes partenaires de cette réflexion, conduite, il est vrai, en tout petit cercle.
Monsieur Lorgeoux, la faiblesse de certains États est assurément dangereuse. Comment y faire face de l'extérieur ? Vaste sujet...
Monsieur Gautier, il est exact que le drame de Fukushima est d'origine naturelle, mais la catastrophe résulte d'une connexion de facteurs. Il faudra probablement examiner notre doctrine de protection du territoire et des populations à l'aune de ce qui s'est passé en début d'année au Japon.
Je crois beaucoup à la résilience, à laquelle nous travaillons ardemment. En Californie, on apprend dès l'école aux enfants qu'ils seront confrontés à un tremblement de terre.
M. Jacques Gautier - Les écoliers japonais ont un petit sac à cette fin.
M. Jean-Pierre Chevènement - L'école doit déjà enseigner beaucoup de choses.
M. Francis Delon . - Monsieur Peyronnet, nous avons des incertitudes sur les capacités exactes de la Corée du Nord, mais aucune quant à la capacité de l'Inde et du Pakistan à placer des armes nucléaires sur des missiles. Les sanctions économiques ont un effet sur la conjoncture économique iranienne, bien qu'elles n'aient pas conduit à l'arrêt du programme nucléaire. Nous n'avons pas renoncé à atteindre nos objectifs grâce à des sanctions.
Je ne commente pas votre opinion sur la Turquie.
M. Jean-Louis Carrère, président . - Elle est majoritaire au sein de cette commission.
M. Francis Delon . - Je le note. La piraterie s'est développée...
M. Yves Pozzo di Borgo - À cause des Occidentaux !
M. Francis Delon . -...mais le phénomène reste ponctuel. Conduite par l'Union européenne, l'opération Atalante porte ses fruits.
M. Jean-Marc Pastor - La révolution démographique en cours dans certaines parties du monde risque de provoquer des désordres et des vagues migratoires. Classez-vous ce phénomène parmi les catastrophes naturelles ? Comment y répondre ?
M. Francis Delon . - Il n'y a pas là de catastrophe, mais un fait à prendre en considération. On ne peut négliger le rôle de la démographie pour l'avenir de la Russie ou de l'Afrique. La démographie joue un grand rôle dans les relations entre la Chine, dont la population vieillit avec la politique de l'enfant unique, et l'Inde, où elle s'accroît.
M. Jean-Louis Carrère, président. - Je vous remercie pour la qualité de ce dialogue. Nos ateliers vont se remettre au travail, sans doute en utilisant vos communications. Pour partager les résultats de nos travaux, nous vous auditionnons peut-être début juin.