3. Des politiques jouant sur les déterminants socio-économiques
La surreprésentation des plus pauvres parmi les obèses incite à une analyse des phénomènes macroéconomiques qui viennent influencer ces groupes. A travers certaines études a émergé le concept « d'obésité de la précarisation ».
Les travaux de Nicole Darmon sur le budget minimal à pouvoir consacrer à la nourriture pour assurer une alimentation équilibrée aboutissent ainsi à la conclusion suivante : « Nos résultats suggèrent que des connaissances en nutrition peuvent atténuer l'impact négatif des contraintes de coûts, mais seulement chez des personnes soumises à une contrainte budgétaire modérée et prêtes à s'écarter considérablement des habitudes alimentaires françaises » par la consommation de foie, d'abats, de moules, de pain complet ou encore de riz complet.
En réalité, les pratiques alimentaires des personnes à faibles ressources sont rationnelles dans la mesure où elles maximisent le rendement calorique par unité financière et adaptent ainsi leur budget à l'impératif de satiété pour le moindre coût.
Il n'est pas anodin que le taux de prévalence de l'obésité est le plus élevé dans les pays ayant le plus dérégulé.
Une étude menée sur les liens entre pauvreté et obésité infantile au Canada, en Norvège et aux Etats-Unis a également montré que c'est dans le pays ayant instauré une politique sociale très volontariste (la Norvège en l'occurrence) que lesdits liens sont les moins forts.
Par ailleurs, l'étude ABENA sur les utilisateurs de l'aide alimentaire démontre l'impossibilité d'assoir toute politique de santé publique sur des situations économiques qui ne permettent pas structurellement de répondre aux besoins élémentaires en matière d'alimentation .
Il convient donc d'une part d'éviter que les politiques publiques surestiment les explications comportementales et l'efficacité de l'éducation à la santé et, d'autre part, de s'assurer qu'elles s'attaquent aux paramètres structurels.
Par conséquent, toute politique visant à encourager l'emploi et l'employabilité, réduire les inégalités sociales et la pauvreté, mais également aménager le territoire pour rendre le développement économique compatible avec le développement humain, contribue également, de manière indirecte mais peut-être au moins aussi efficace, à lutter contre le développement de l'obésité.
Comme rappelait Angelo Tremblay lorsque votre rapporteur l'a rencontré, l'augmentation de la prévalence de l'obésité s'inscrit dans un contexte historique et économique particulier, à savoir l'essor d'une société basée sur la performance, dans laquelle les déterminants économiques sont privilégiés au détriment du développement humain.