3. Une meilleure information de la population au moment de la publication du sondage
a) La publication, sous certaines conditions, d'observations méthodologiques de la commission des sondages
(1) Présentation de l'objectif
Vos rapporteurs, animés par le souci de garantir la sérénité du débat démocratique, jugent nécessaire de mieux informer le public sur les conditions d'élaboration des sondages politiques publiés .
Afin de ne pas porter atteinte à la liberté de la presse, ils préconisent que cette transparence soit surtout garantie à l'approche d'une échéance électorale , car c'est à ce moment là que cette liberté doit impérativement être conciliée avec les principes de sincérité du scrutin et de libre détermination du corps électoral.
Il est ainsi proposé que, dans le mois précédant le premier tour d'un scrutin , la commission des sondages, lorsqu'elle relève certains manquements méthodologiques, formule des observations qui devraient figurer parmi les mentions obligatoires accompagnant la publication ou la diffusion du sondage.
Ces observations pourraient, par exemple, prendre la forme de simples réserves et, dans les cas les plus graves, de mises au point .
En conséquence, un sondage ne serait jamais interdit mais serait assorti d' observations méthodologiques, obligatoirement publiées, en cas de méconnaissance des règles d'objectivité et de sincérité.
Insistons sur le fait que ces observations porteraient sur des anomalies en termes de méthodologie et en aucun cas sur le caractère prédictif du sondage puisqu'un sondage est dépourvu de toute valeur prédictive 15 ( * ) : il constitue au mieux une photographie instantanée de l'opinion.
Ce système se justifie par le fait qu'à l'approche d'une élection, le contrôle a posteriori - toujours possible - de la commission est insuffisant : non seulement les mises au point risquent d'intervenir trop tard mais surtout ne peuvent guère contrebalancer l'influence qu'a pu avoir le sondage litigieux dans l'opinion au moment de sa publication.
Vos rapporteurs soulignent qu'une telle évolution implique l'introduction d'un contrôle a priori de la commission des sondages, contrôle qui nécessite le dépôt de la notice du sondage au moins 24 heures avant sa publication ou sa diffusion . Sur ce point, rappelons qu'avant la loi précitée de 2002, l'article 3 de la loi du 19 juillet 1977 prévoyait, « à l'occasion » de la publication de la diffusion de tout sondage de caractère électoral, le dépôt auprès de la commission des sondages, par l'institut ayant réalisé ce sondage, d'une notice d'information. Comme le souligne le rapport de notre collègue M. Patrice Gélard sur le projet de loi qui a abouti à la loi du 19 février 2002 16 ( * ) , la commission des sondages avait fait valoir, à l'époque, que la formule « à l'occasion » n'était pas suffisante pour lui permettre d'exercer son contrôle, surtout lorsque la publication intervient quelques jours seulement avant un scrutin. La commission des sondages avait estimé qu'il lui était essentiel « pour pouvoir assurer, avant le jour de l'élection, le contrôle le plus efficace de sondages qui pourront être publiés ou diffusés très peu de temps avant le scrutin, de disposer très rapidement des éléments nécessaires à ce contrôle, ce qui est loin d'être la pratique habituelle des instituts qui envoient les notices au dernier moment, parfois même après la publication du sondage, obligeant ainsi le secrétariat à des rappels téléphoniques. La Commission souhaite donc, dans cette optique que l'article 3 de la loi du 19 juillet 1977 soit modifié afin de prévoir que la notice que les instituts doivent remettre à la Commission parvienne au secrétariat de la Commission au plus tard 24 heures avant la publication ou la diffusion du sondage. »
Le législateur n'avait que partiellement répondu à cette demande en prévoyant que la notice d'information devrait être transmise à la commission des sondages avant leur publication, et non pas « à l'occasion » de celle-ci.
Notons que cette durée de 24 heures obligerait la commission des sondages à intervenir dans des délais très brefs ; toutefois, on peut supposer qu'une grille d'évaluation des sondages serait réalisée progressivement, ce qui faciliterait l'instruction des sondages par les services.
(2) Pourquoi de telles observations méthodologiques ?
Certes, le marché des sondages , qui a longtemps connu de nombreux instituts peu sérieux qualifiés d' « officines », est aujourd'hui assaini comme l'ont relevé la plupart des personnes entendues par vos rapporteurs. La commission des sondages a indiqué qu'à ses débuts, il est arrivé fréquemment que le contrôle de la commission ait relevé des négligences ou des imperfections techniques : procédure d'enquête mal définies, questionnaires ambigus, enquêteurs effectuant mal leur travail... Une accumulation de telles irrégularités peut rendre un sondage imprécis, voire biaisé ; toutefois, la qualité du travail des instituts s'est améliorée et de tels errements sont devenus plus rares.
Il est ainsi probable, selon la commission des sondages que la majorité des sondages (80 %) n'appellerait aucune observation de sa part si le mécanisme décrit précédemment devait se mettre en place.
Toutefois, les 20 % restants peuvent influencer ou perturber le débat électoral. Seraient concernés en particulier les sondages réalisés par des petits instituts qui habituellement élaborent des études de marché ou des enquêtes de satisfaction et qui, ponctuellement, notamment à l'occasion d'élections locales, réalisent des sondages politiques sans respecter les exigences méthodologiques posées par la loi.
On peut ajouter que la possibilité pour la commission des sondages d'imposer des observations méthodologiques :
- serait utile aux organes de presse : elle leur permettrait de savoir davantage ce qu'ils achètent (aujourd'hui ils sont parfois tenus de publier des mises au point qui les décrédibilisent alors qu'ils ne sont en rien responsables des erreurs méthodologiques commises par les instituts) et, par ricochet, elle les inviterait à s'intéresser davantage aux conditions d'élaboration des sondages et à relativiser leur portée. A cet égard, de nombreuses personnes ont critiqué, lors des auditions, le traitement médiatique approximatif des sondages ;
- assurerait une certaine visibilité à la commission des sondages qui souffre aujourd'hui d'un déficit certain de notoriété.
(3) Sur quels critères seraient fondées ces observations ?
Vos rapporteurs estiment que les observations de la commission des sondages devraient reposer sur un faisceau de critères, en particulier :
(a) l'objectivité et l'honnêteté de la question
La rigueur méthodologique d'un sondage est conditionnée par l'objectivité et à l'honnêteté de la question . Chacun sait que les mots ont leur importance et peuvent être fortement connotés : à titre d'exemple, une personne ne réagit pas de la même façon selon que la question porte sur la peine de mort ou ses modalités de mise en oeuvre (chaise électrique, guillotine...), selon qu'on parle d'intention de vote ou d'opinion sur le même sujet, d'intervention armée ou de guerre : à cet égard, dans tous les pays concernés par l'éventualité de la participation à une intervention militaire au Kosovo en 1999, les sondages réalisés ont partout montré les mêmes tendances : les approbations étaient plus élevées si l'intervention n'était pas présentée en termes guerriers 17 ( * ) .
Deux exemples récents ont souligné les biais inhérents à une présentation orientée d'un sujet .
En premier lieu, un sondage rendu public le 30 mai 2010, quelques jours avant l'examen au Sénat des projets de loi organique et ordinaire relatifs au Défenseur des droits, a révélé que « 58 % des Français voulaient que la Haute autorité de lutte contre les discriminations (HALDE) reste une instance spécifique » . Or, le texte de la question était le suivant :
« Des parlementaires UMP souhaitent que la HALDE soit rattachée à un futur Défenseur des droits. Ce Défenseur des droits aurait également en charge les droits des enfants, la médiation de la République et la déontologie de la sécurité. Vous personnellement, de quelle opinion vous sentez-vous le plus proche :
- Il faut fondre la lutte contre les discriminations dans une entité qui défend d'autres causes pour gagner en cohérence et faire faire des économies à l'Etat : 40 %.
- Il faut maintenir une instance spécifique pour la lutte contre les discriminations, cela garantit son indépendance et permet de défendre avec efficacité la lutte contre les discriminations : 58 %. »
On relèvera le caractère quelque peu orienté de la question : d'une part, elle faisait inutilement référence à « des parlementaires UMP » ; d'autre part, l'alternative n'était pas présentée de manière rigoureuse et objective. L'intégration de la HALDE paraissait motivée par le double souci de « cohérence » et « d'économies ». Il est fort à parier que les réponses eussent été différentes avec une phrase du type : « Il faut intégrer la HALDE au sein d'une autorité constitutionnelle dotée de pouvoirs renforcés ».
En second lieu, deux sondages contradictoires ont été publiés en août 2010 au sujet de proposition de retirer la nationalité aux personnes d'origine étrangère ayant porté atteinte à la vie d'un policier ou d'un gendarme.
Selon un sondage IFOP publié le 6 août dans le quotidien Le Figaro, 70 % des Français seraient favorables à cette mesure, contre seulement 46 % dans le cadre d'un sondage CSA publié, une semaine plus tard, le 14 août dans l'hebdomadaire Marianne, soit un écart de 24 %.
Or, on constate que le sondage publié par Marianne propose aux sondés de justifier leur position :
- « vous êtes favorable car l'acquisition de la nationalité doit être remise en cause en cas d'acte grave »
- « vous êtes défavorable car tous les Français doivent être égaux devant la loi »
Or, d'un point de vue méthodologique, il est préférable que les questions posées soient aussi neutres et ouvertes que possibles .
(b) l'ordre des questions
L'ordre des questions posées influe également sur la qualité méthodologique d'un sondage. La commission des sondages a ainsi été amenée à ordonner à un organe de presse locale la publication d'une mise au point à propos d'un sondage relatif à une élection municipale. La commission a relevé le biais qu'était susceptible d'avoir provoqué l'ordre des questions posées, puisque la popularité des candidats avait été testée avant les intentions de vote.
Les réponses apportées aux premières questions influencent les réponses apportées aux suivantes, par une sorte d' « effet de halo ».
C'est pourquoi les enquêtes à clients multiples, couramment appelées « enquêtes omnibus », doivent veiller à ce que les questions politiques soient toujours posées en premier . Dans le cas contraire, les réponses aux questions politiques peuvent être influencées par les questions précédentes.
(c) la « fraîcheur » des sondages
Les sondages doivent conserver une certaine « fraîcheur » au moment de leur publication. Autrement dit, la rigueur méthodologique impose qu'un sondage soit publié quelques jours après sa réalisation . Un délai de plusieurs semaines, de surcroît à l'approche d'une élection, est évidemment suspect.
De la même façon, la durée de l'enquête ne doit pas excéder un délai tel que ses résultats ne pourraient plus être regardés comme homogènes .
(d) la continuité des redressements
Le redressement est une opération consistant à modifier les résultats bruts du sondage afin de renforcer la qualité méthodologique de ce dernier. Si on assimile le sondage à une photographie instantanée, on peut dire qu'avant redressement la photo est floue et devient nette après.
Il existe deux types de redressement : le redressement sociodémographique et le redressement politique.
Le premier est le plus simple à comprendre : il consiste à rétablir, dans le cas de la méthode des quotas, les bonnes proportions en affectant un poids (coefficient de pondération ou clé de correction) à chaque individu en fonction de ses caractéristiques. Par exemple, si l'échantillon comporte 46,8 % d'hommes, le sondage devrait être légèrement redressé car les hommes représentent 47,8 % de la population française, soit 1 % de plus. Le redressement consiste donc à rendre, de manière artificielle, l'échantillon parfaitement conforme en proportions à la population de référence. Dans la quasi-totalité des cas, le redressement sociodémographique se fait à la marge, l'échantillon retenu étant très fidèle.
Le second type de redressement, plus complexe, est de nature politique . Il part du constat, établi de longue date, que certains votes sont traditionnellement sous-représentés dans les résultats bruts : il s'agit des votes pour les partis situés à l'extrémité de l'échiquier politique, tels que le Front national. Cette situation résulte d'une certaine réticence des sondés à avouer leur vote pour ce type de formation politique. A l'inverse, on peut observer que les partis de la gauche modérée sont généralement sur-représentés , phénomène dénommé « sinistrisme » que les spécialistes de science politique peinent à s'expliquer.
Les redressements politiques se font généralement à partir des « souvenirs de vote ». S'il apparaît un décalage entre ce que les sondés déclarent avoir voté dans certains scrutins précédents et les résultats effectivement obtenus, les instituts en déduisent que les résultats bruts doivent être corrigés. Par exemple, si seuls 5 % des sondés déclarent avoir voté pour le Front national aux dernières élections alors qu'il a obtenu 15 % des suffrages, le sondeur considèrera que ce parti est sous-estimé dans le sondage et que ce dernier doit donc être redressé.
Il convient de souligner la particulière difficulté de la réalisation de sondages relatifs à un référendum pour lesquels il n'existe pas, à proprement parler, de scrutins de référence et pour lesquels les redressements politiques sont délicats à opérer sur une base objective , les électeurs ne suivant pas nécessairement les consignes de vote des formations politiques, elles-mêmes parfois divisées sur la question.
Vos rapporteurs estiment que les observations de la commission des sondages pourront porter sur la méthode utilisée par les sondeurs pour effectuer les redressements. Devra par exemple être sanctionné le défaut de continuité méthodologique des redressements au sein d'une même campagne de sondages, absence qui peut avoir pour effet d'affecter la sincérité des sondages.
Les sondages réalisés au cours de la campagne référendaire de 2005 ont ainsi révélé la généralisation d'une nouvelle pratique des instituts consistant à effectuer le redressement selon des scrutins différents à chaque sondage : par exemple, un sondage publié en mars est redressé à partir du souvenir de vote aux dernières élections municipales, celui publié un mois plus tard est lui redressé par rapport au référendum sur le traité de Maastricht en 1992...
Une telle modification rend délicate toute comparaison d'un sondage à l'autre alors même que la plupart des commentateurs se livrent à cet exercice.
(e) la taille des échantillons
Soulignons tout d'abord que deux possibilités existent pour interroger un échantillon : la méthode aléatoire et la méthode des quotas.
La méthode aléatoire consiste à tirer au sort un grand nombre de personnes puis à les interroger . Cette technique nécessite que la personne tirée au sort réponde au questionnaire, ce qui exige de la recontacter jusqu'à ce que celle-ci soit jointe et réponde au questionnaire ; il n'y a que si elle refuse de répondre qu'elle est remplacée par une autre personne, elle aussi choisie au hasard. Cette technique est peu utilisée car elle exige que les personnes tirées au sort répondent, ce qui peut nécessiter de nombreuses relances ; c'est toutefois la seule méthode qui permette de calculer scientifiquement la marge d'erreur des résultats obtenus (voir plus loin).
La méthode par quotas consiste, quant à elle, à interroger un échantillon proportionnellement similaire à la population de référence ; les critères habituellement retenus sont le sexe, l'âge, la catégorie socio-professionnelle et la répartition géographique. Cette méthode est plus rapide que la méthode aléatoire (une personne absente n'est pas recontactée ultérieurement mais remplacée immédiatement par une autre qui constitue son « sosie » sur le plan socio-démographique) mais ne permet pas de garantir scientifiquement la précision des résultats obtenus.
La genèse de la « méthode des quotas » « L'idée de recourir à des enquêtes portant sur une partie seulement de la population remonte à la fin du XIX ème siècle. A l'époque, de nombreux pays procèdent à des recensements périodiques , c'est-à-dire à des dénombrements de la population afin d'établir une répartition par âge, par type d'habitat ou par activité économique. Ces coûteuses enquêtes mobilisent des dizaines de milliers d'enquêteurs pour dénombrer tous les logements et faire remplir à leurs occupants un questionnaire, dont le dépouillement exige beaucoup de temps. Conscient de ces contraintes, le Norvégien Anders Nicolai Kiaer présente, en 1895, au congrès de l'Institut international de statistique les résultats obtenus par une enquête, pour laquelle il avait sélectionné un certain nombre de communes qu'il jugeait typiques , puis, à l'intérieur de chacune d'elles, des personnes choisies selon leur âge et l'initiale de leur nom. Or Kiaer montrait que les chiffres obtenus dans cette enquête portant sur 120 000 personnes étaient très similaires à ceux du dernier recensement. « Encouragé par ce succès, il renouvela l'expérience quatre ans plus tard avec une sélection de 10 000 personnes seulement, et il souligna l'intérêt de sa méthode pour obtenir des résultats qui seraient inaccessibles par un recensement, ainsi que l'économie associée en temps et en moyens. « Le statisticien d'origine polonaise Jerzy Neyman publia en 1934 un article fondamental qui montrait qu'un échantillonnage « contrôlé » offrait une justification théorique rigoureuse aux enquêtes par sondage reposant sur cette méthode dite des quotas. Extrait d'un article de M. Jean-Claude Deville, statisticien, publié dans la revue « Pour la Science » n ° 344 juin 2006 |
Comme le souligne la commission des sondages dans son rapport sur le référendum de 2005, la qualité méthodologique des sondages réalisés par méthode des quotas est parfois affectée par la taille réduite des échantillons finalement utilisés par les instituts pour l'établissement des scores publiés.
Cette faible taille, qui a pour effet mécanique d'accroître la marge d'erreur 18 ( * ) , s'explique par la conjonction des trois éléments suivants :
- la réduction, pour des motifs économiques, de la taille des échantillons globaux ;
- l'importance croissante, au sein de ces échantillons, des sondés qu'on ne parvient pas à joindre (le pourcentage peut atteindre 40-50 %), ceux qu'on arrive à joindre mais qui n'expriment aucun choix et celle des sondés qui ne sont pas sûrs de leur réponse 19 ( * ) ou pas sûrs d'aller voter ;
- le fait d'isoler, grâce à la multiplication des redressements, des sous-échantillons 20 ( * ) portant, pour certains, sur quelques dizaines de personnes seulement.
La commission des sondages relève que lorsque les sous-échantillons sur la base desquels les résultats publiés sont établis sont d'une taille réduite, le sondage ne « revêt pas un caractère statistiquement significatif compte tenu de la marge d'incertitude qui résulte de la taille réduite du sous-échantillon à partir duquel cet écart a été établi » .
Il s'agit d'un cas où les observations méthodologiques proposées par vos rapporteurs seraient particulièrement utiles pour la bonne information du public puisqu'il est probable que lors de son contrôle préalable, la commission des sondages imposerait une mise au point à l'organe qui publie le sondage.
(f) les modes de recueil
Les sondages sont réalisés selon trois modes de recueil principaux : le téléphone, le face à face et Internet qui présentent chacun des avantages et des inconvénients.
Téléphone Avantages : - Les délais de réalisation sont rapides. - La représentativité de l'échantillon peut être contrôlée et garantie. - On peut cibler des fonctions précises en milieu professionnel. - L'implication des répondants est bonne. - Cette méthode présente un des meilleurs rapports Fiabilité/Prix. Désavantages : - La durée du questionnaire doit être limitée (15/20 mn). - Un tiers des personnes ne sont pas sur les annuaires (soit parce qu'ils sont sur liste rouge soit parce qu'ils n'ont pas de ligne téléphonique fixe). - Ne conviennent pas à des enquêtes où des supports visuels doivent être présentés aux répondants. Face à face Avantages : - L'enquête peut être réalisée dans le lieu concerné par l'étude. - Des supports visuels peuvent être présentés aux répondants. - La représentativité des enquêtés peut être assurée. Désavantages : - En milieu professionnel, le face à face nécessite une prise de rendez-vous préliminaire. - Nécessite une organisation logistique forte, surtout en cas de dispersion géographique de l'échantillon. - Cette méthode est la plus coûteuse. - Les délais peuvent être longs. Internet Avantages : - Les coûts de réalisation sont réduits (deux fois moins élevés en moyenne) ; - Possibilité de dispersion géographique des répondants (sur plusieurs pays par exemple). - possibilité de consulter des « populations rares » difficiles à joindre en face-à-face ou par téléphone (médecins, agriculteurs par exemple) ; - Une grande liberté pour répondre (garantie d'anonymat, choix du moment pour répondre). - Rapidité de réponse. - Possibilité de relance ciblée sur les non-répondants à enjeu. - Possibilité de contrôler le profil des répondants et de gérer les quotas en ligne. - Des supports visuels peuvent être présentés aux répondants.
- Une opération de communication en direction de tous
les répondants potentiels.
- Le questionnaire doit être extrêmement clair, aucun enquêteur ne pouvant apporter de précision. Enquête exclusivement auprès des internautes ou d'un fichier avec e-mails. - Gonflement des réponses extrêmes (les mécontents et les très satisfaits). - Le taux de participation et de retour peut être faible selon l'implication des répondants potentiels (une gratification permet toutefois d'augmenter le taux de réponse). - Biais générationnel et culturel (« l'internaute de plus de 75 ans » n'a pas de sosie téléphone ou de sosie face-à-face et les internautes sont plus technophiles que les autres populations). Extrait du site enquete-opinion.fr |
Comme l'illustre le tableau ci-dessus, tous les modes de recueil comportent des biais spécifiques et il appartient à la commission des sondages de s'assurer que le mode d'interrogation est le plus neutre possible en fonction de la nature des questions posées dans le sondage.
Signalons que ce contrôle a priori n'exclura évidemment pas le contrôle a posteriori . En effet, ce n'est pas parce qu'un sondage, du point de vue de sa rigueur méthodologique, n'appelle a priori aucune observation de la part de la commission des sondages que cette dernière ne pourra pas ultérieurement prononcer des mises au point , par exemple si une vérification sur pièce et sur place de la commission des sondages révèle que le choix des enquêteurs ou les instructions données à ceux-ci sont susceptibles d'avoir faussé les résultats de l'enquête, ou si la présentation du sondage publié a altéré la portée de ses résultats . A cet égard, ont été cités au cours des auditions :
- le cas d'un journal qui a présenté un sondage comme portant sur l'ensemble des adhérents d'un parti politique alors que seuls les sympathisants ont été consultés ;
- le cas d'un périodique qui soutient que les « communes sont favorables à un projet » alors que seuls les maires ont été interrogés ;
- le cas d'un organe de presse féminine qui présente un sondage comme portant sur l'ensemble des Français alors que l'enquête n'a porté que sur des femmes ;
- le cas d'un journal qui ne précise pas que le sondage électoral qu'il publie ne porte que sur une partie de la circonscription ;
- le cas d'un quotidien qui publie la cote de popularité d'un homme politique en Europe sans indiquer clairement que n'a pas été prise en compte dans le sondage l'opinion de la population du pays où réside cet homme politique ;
- le cas d'un périodique qui fait une présentation graphique tendancieuse du sondage, par exemple lorsqu'il réalise un histogramme ou un camembert sans respecter fidèlement les proportions du sondage, ce qui, visuellement, est de nature à induire en erreur les lecteurs.
Il apparaît d'ailleurs qu'une nette majorité de Français considèrent qu'il est fréquent que la portée des résultats d'un sondage soit altérée par la présentation qui en est faite par les organes d'information. Ainsi, selon un sondage réalisé par l'IFOP et publié en mars 2007, 78 % des Français sont « tout à fait d'accord » ou « plutôt d'accord » avec l'idée que « les médias font dire n'importe quoi aux chiffres issus des sondages » 21 ( * ).
b) La publication du nom et de la qualité de l'acheteur du sondage, s'il est différent de celui du commanditaire
Comme il vient d'être indiqué, vos rapporteurs estiment que la publication d'un sondage politique doit être accompagnée, dans certaines circonstances, d'observations de la commission des sondages à caractère méthodologique.
Elle vous propose de prévoir la publication d'une autre mention obligatoire dans l'éventualité - assez rare il est vrai - où l'acheteur du sondage est différent du commanditaire.
Il a pu en effet arriver que la personne qui achète le sondage ne soit pas celle qui l'a commandé, cette dernière souhaitant rester « discrète » et s'abriter derrière, par exemple, une association.
Dans un souci de transparence, tous les maillons de la chaîne du sondage doivent être connus .
De même, il conviendrait de tenir compte de la multiplication des enquêtes à clients multiples, encore appelées « enquêtes omnibus ». Dans ce type de sondage, qui permet d'amortir les coûts de réalisation de l'enquête sur plusieurs commanditaires, le client n'achète qu'une partie du sondage, c'est-à-dire quelques questions. La loi devrait prévoir la publication du nom et de la qualité du commanditaire du sondage ou de la partie du sondage .
Au final, compte tenu des obligations actuelles et des propositions de vos rapporteurs, la publication ou la diffusion de tout sondage politique devrait être accompagnée des indications suivantes :
- le nom de l'institut ayant réalisé le sondage ou la partie du sondage publiée ou diffusée ;
- le nom et la qualité du commanditaire du sondage ou de la partie du sondage, ainsi que ceux de l'acheteur s'il est différent ;
- le nombre des personnes interrogées ;
- la ou les dates auxquelles il a été procédé aux interrogations ;
- le texte intégral des questions posées ou un résumé qui en reflète fidèlement la teneur ;
- une mention indiquant le droit de toute personne à consulter la notice d'information précédemment définie.
- le cas échéant, les observations méthodologiques de la commission des sondages.
* 15 À cet égard, la référence, faite à l'article 5 de la loi de 1977, à la « prévision électorale » est particulièrement inopportune.
* 16 Rapport n° 193 (2001-2002) de M. Patrice Gélard, fait au nom de la commission des lois, déposé le 31 janvier 2002.
* 17 Serge Halimi, Dominique Vidal, Henri Maler, l'Opinion, ça se travaille. Le journalisme et les guerres justes, Agone, Marseille, 2006.
* 18 Voir point 4 présenté plus loin : une notice méthodologique plus complète et plus accessible.
* 19 Plusieurs mois avant un scrutin, il est fréquent que la moitié des sondés ne soient pas sûrs de leur vote. Cette indécision souligne que l'opinion révélée par le sondage est souvent « provoquée » ou « forcée » lorsque les personnes sont interrogées sur leurs intentions de vote longtemps avant un scrutin.
* 20 Ces sous-échantillons sont issus du croisement de différents critères tels que la certitude d'aller voter ou la sûreté du choix ; de même, quand on hiérarchise des préférences pour des personnalités ou des enjeux dans une sous-catégorie comme celle d'ouvrier ou de cadre supérieur, la distribution de ces préférences s'opère selon une population de quelques dizaines d'individus. Autre exemple : quand, dans un sondage, une personnalité politique recueille 1 ou 2 % de confiance, cela signifie que quelques personnes lui ont accordé un avis favorable, ce qui met en cause la fiabilité scientifique du résultat.
* 21 Sondage réalisé du 22 au 25 janvier 2007 portant sur « le regard des Français sur les sondages politiques ».