2. L'équilibre de la valeur ajoutée vue dans un ensemble économique

La déformation du partage de la valeur ajoutée dans un pays pose des problèmes de soutenabilité à ce pays qui dans un ensemble économiquement et financièrement intégré se répercutent sur les partenaires.

Dans un premier temps, l'internationalisation des débouchés du pays où se produit la baisse des salaires se fait aux dépens des partenaires par deux canaux :

- le creusement de l'écart entre les demandes domestiques ;

- les gains de compétitivité-coût du pays où les salaires unitaires réels diminuent.

Les excédents du premier pays font les déficits des partenaires (ceux-ci sont des déficits commerciaux, mais aussi des déficits publics).

Sur le plan financier, l'écart de rendement du capital entre les pays tend à augmenter le coût de la dette des partenaires, toutes choses égales par ailleurs.

Théoriquement, la rationalité financière devrait s'apposer à un tel processus à supposer que l'horizon des investisseurs soit de long terme. En effet, il n'est pas raisonnable d'escompter à long terme un découplage durable entre rentabilité économique et financière 27 ( * ) . Mais, les comportements financiers sont à la fois « court-termistes » et mimétiques. Enfin, ils semblent éprouver quelques difficultés à pondérer les risques macroéconomiques.

Les pays partenaires subissent donc un coût de la dette croissant qui peut aller jusqu'à provoquer des crises financières.

Dans un second temps, les enchaînements dépendent des réactions des partenaires : soit, ils adoptent le partage de la valeur ajoutée du premier pays et les effets décrits en 1 se généralisent ; soit ils ne s'adaptent pas et alors les déséquilibres ici décrits s'amplifient.

3. Une crise généralisée ?

A terme, les déséquilibres s'accentuent.

Les crises financières n'épargnent pas le pays où le partage de la valeur ajoutée s'est déformé le plus au détriment des salaires. Ces pays sont aussi souvent ceux où l'effet de levier d'endettement est le plus actif.

Ils subissent le contrecoup des crises tant du côté de leurs dettes que de celui de leurs actifs.

*

* *

La mise en cohérence des trajectoires de croissance économique en Europe passe par la définition d'un partage équilibré des richesses dont un partage de la valeur ajoutée moins défavorable au travail doit être l'élément central .

Une croissance économique forte et soutenable ne peut reposer sur un partage de la valeur ajoutée qui entraîne un désajustement entre la demande et l'épargne. Celle-ci ne trouvant pas à se rentabiliser s'évapore dans des territoires économiques apparemment plus prometteurs et se voit proposer des procédés de rémunération qui crée des déséquilibres financiers croissants, jusqu'à la crise.

Le niveau de baisse atteint par la rémunération du travail dans certains pays européens où la rémunération de l'épargne repose sur l'accumulation de positions créditrices sur des pays extérieurs à la zone euro reflète les déséquilibres économiques évoqués dans le chapitre précédent et nourrit les problèmes de stabilité financière et d'évolutions sociétales envisagés dans les deux chapitres qui suivent.

Un partage différent de la valeur ajoutée doit réunir les Européens autour de l'ambition d'une croissance dynamique et plus stable.

* 27 Sauf toutefois à tabler sur une tendance longue à l'internationalisation des firmes et à la baisse des rémunérations en résultant.

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