B. QUELQUES ENSEIGNEMENTS

Crise des bilans du secteur financier privé, la crise témoigne aussi d' échecs en cascade des réglementations et des systèmes de régulation , parmi lesquels il faut relever :

- les défaillances des agences de notation : face à des produits, complexes il est vrai, usant d'échelles de notation identiques pour les produits structurés et pour les produits obligataires classiques, elles ont attribué les meilleures notes à des produits abritant des créances médiocres. Ces notes n'ont pas pris en compte le risque spécifique de liquidité. Depuis juin 2007, le déclassement en chaîne des produits adossés aux subprimes a engendré un effet de panique. De façon générale, les agences de notation, qui constituent un oligopole, sont rémunérées directement par les émetteurs, ce qui crée un conflit d'intérêts 12 ( * ) ;

- les insuffisances des normes prudentielles , supposées renforcer la stabilité du système bancaire ( Bâle I et II ) : elles n'ont en rien limité l'effet de levier excessif et ont favorisé le développement de la désintermédiation. Ainsi, la réglementation de la solvabilité, d'une application déjà trop étroite, a engendré des effets de contournement , qui n'ont pas été combattus, en incitant les banques à créer des structures hors bilan sous forme de véhicules d'investissement structurés (SIV). Or la défaillance des SIV se répercute in fine sur les bilans des banques qui doivent, d'une part, conserver des prêts qu'elles prévoyaient de céder et, d'autre part, honorer les lignes de crédit dont bénéficient les SIV et décider éventuellement de les intégrer à leur bilan ;

LES NORMES PRUDENTIELLES DANS LE SECTEUR BANCAIRE

Le comité de Bâle fut créé en 1974 par les gouverneurs des banques centrales du G10 au sein de la Banque des règlements internationaux, à Bâle. Il se réunit quatre fois par an et se compose actuellement de représentants des banques centrales et des autorités prudentielles de 13 pays 13 ( * ) . En 1988, le comité a mis en place le ratio Cooke, dans l'objectif de renforcer la solidité et la stabilité du système bancaire international et de promouvoir des conditions d'égalité de concurrence entre les banques de dimension internationale. Le ratio Cooke est une norme de solvabilité : le niveau des fonds propres doit être égal à au moins 8 % des risques pondérés. Les pondérations sont fonction de la nature juridique du débiteur, de la localisation du risque et de la durée des engagements. Cette norme fut par la suite étendue non seulement aux banques des pays membres du comité de Bâle mais également à toutes les banques d'envergure internationale.

Au fil des années, la méthode retenue s'est avérée incomplète. L'évolution des marchés et notamment le développement de la titrisation ont rendu le contrôle obsolète. Pour remédier à ces défauts, la réforme de Bâle II, engagée en 1999, à abouti à un nouvel accord en juin 2004, fondé sur une approche non seulement quantitative mais aussi qualitative, s'appuyant sur les trois piliers suivants :

- une exigence minimale en fonds propres rénovée (ratio dit McDonough) : l'appréciation des risques est modifiée notamment par une meilleure prise en compte de la qualité de l'emprunteur et des techniques de réduction des risques ; le risque de marché et le risque opérationnel 14 ( * ) sont pris en compte, en plus du risque de crédit.

- un processus d'examen des procédures internes mises en place par les banques pour évaluer l'adéquation de leurs fonds propres au risque ;

- un développement du rôle de la discipline de marché et de règles en matière d'information publiée.

- les risques des normes comptables IFRS (International Financial Reporting Standards), qui, en obligeant les banques à évaluer leurs actifs à des prix de marché (« marked to market » ), après avoir contribué à favoriser l'effet de levier, ont accru la panique une fois les actifs en phase de dépréciation ;

- un management des incitations microéconomiques (système de rémunérations, parachutes dorés...) axé sur une conception étroite de la « performance » , sans contrôle de la soutenabilité à terme des orientations mises en oeuvre.

Plus fondamentalement, les caractéristiques du système financier le rendent essentiellement instable (sujet à des crises d'insoutenabilité à répétition) et procyclique (c'est-à-dire qu'il accentue les fluctuations conjoncturelles dans un sens ou l'autre).

Ce sont ces deux propriétés qui représentent les deux problèmes fondamentaux que la réforme annoncée du système financier international devra régler, tout en maintenant les conditions d'un financement efficace de l'économie.

Mais, on ne pourra pas faire l'économie d'une réflexion plus fondamentale sur les problèmes concernant l'équilibre du sentier de croissance emprunté depuis les années de déréglementation et de dérégulation, problèmes que le chapitre suivant s'efforce d'exposer .

* 12 Une diversification de l'offre - préconisée dès 2000 dans le rapport de M. Philippe Marini sur la régulation financière et monétaire internationale - et une centralisation des relations de la profession avec les agences de notation pourraient être recommandées.

* 13 Allemagne, Belgique, Canada, Espagne, Etats-Unis, France, Italie, Japon, Luxembourg, Pays-Bas, Royaume-Uni, Suède, Suisse.

* 14 Le risque opérationnel se définit comme le risque de pertes résultant de carences attribuables à des procédures, personnels et systèmes internes ou à des événements extérieurs.

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