ANNEXES - COMPTES RENDUS DES AUDITIONS ORGANISÉES EN VUE DU RAPPORT
Mercredi 22 mars 2006 - 15 h : - 16 h : |
- M. Bruno SOULIE, sous-directeur chargé du « Secteur public local » à la direction générale de la comptabilité publique, ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, membre du comité d'experts de l'Observatoire de la décentralisation. - MM. Alain PICHON, président de chambre, Jean-Philippe VACHIA, conseiller maître et Thierry MOURIER des GAYETS, conseiller référendaire à la Cour des comptes. |
Mercredi 29 mars 2006 - 14 h 30 : - 15 h : |
- M. Nicolas PORTIER, délégué général de l'Assemblée des communautés de France (ADCF). - MM. Patrick COUE, directeur général de la communauté d'agglomération d'Angoulême, et Pascal FORTOUL, directeur général adjoint de la communauté d'agglomération du Voironnais. |
Mardi 9 mai 2006 - 14 h 30 : - 16 h : |
- M. Alain GERARD, sénateur du Finistère, président de la communauté d'agglomération de Quimper. - M. Jacques OUDIN, conseiller maître à la Cour des comptes. |
- 17 h : |
- M. Jean-Luc BOEUF, directeur général des services de la région Franche-Comté, membre du comité d'experts de l'Observatoire de la décentralisation. |
Mercredi 10 mai 2006 - 9 h 45 : - 11 h : |
- M. Hervé MARITON, député de la Drôme, maire de Crest. - M. Michel PIRON, député de Maine-et-Loire, président de la communauté de communes des Coteaux-du-Layon. |
- 14 h 30 : |
- M. Pierre GIRARD, responsable des collectivités locales à la Caisse nationale des caisses d'épargne. |
- 17 h 30 : |
- M. Charles de COURSON, député de la Marne, membre de l'Observatoire des finances locales. |
Mardi 16 mai 2006 - 16 h : |
- MM. Reynald BRIEC, Olivier ORTEGA et Dominique PAGEAUD, experts chez Ernst & Young. |
Mardi 13 juin 2006 - 17 h : |
- M. Jérôme CHARTIER, député du Val-d'Oise. |
Compte rendu du 22 mars 2006
Audition de M. Bruno SOULIÉ , sous-directeur chargé du « Secteur public local » à la direction générale de la comptabilité publique ( ministère de l'économie, des finances et de l'industrie), membre du comité d'experts de l'Observatoire de la décentralisation, accompagné de M. Renaud ROUSSELLE , chef du secteur valorisation des comptes des collectivités locales.
M. Philippe Dallier, rapporteur , a présenté l'objet de son étude sur les aspects financiers de l'intercommunalité qui fait suite à un premier rapport d'information consacré à l'intercommunalité à fiscalité propre. Il a déclaré vouloir rechercher des exemples concrets grâce auxquels il pourrait se faire une idée précise de l'efficacité de l'intercommunalité et tirer un bilan coût/avantage.
M. Bruno Soulié a exposé les capacités de son service à faire remonter les informations comptables. Il a noté que la DGCL bénéficiait d'un dispositif complémentaire de celui de la DCGP mais n'avait pas la même notion de périmètre : tandis que la DGCL travaille sur les budgets et les comptes administratifs, la DGCP travaille sur les comptes de gestion. Il a ajouté que son service avait pour objectif la construction de deux types d'analyses : le traitement des comptes individuels à partir de la consolidation des budgets principaux et des budgets annexes, et la rédaction de notes de conjoncture sur la base de balances comptables provisoires. Sur le premier type de documents, il a précisé qu'il existait un décalage temporel assez conséquent que la DGCP souhaitait réduire pour faire sortir début 2007 les chiffres de 2003, 2004 et 2005 concernant les comptes consolidés individuels.
Concernant la seconde publication, M. Renaud Rousselle a ajouté qu'il travaillait sur les balances provisoires et sur le budget principal qui incluait la situation de l'endettement. Il a fait remarquer qu'il existait des fiches individuelles réalisées pour chaque communauté urbaine, communauté d'agglomération et syndicat d'agglomération nouvelle ; dans tous les cas, il s'agissait d'estimation, en septembre de l'année en cours, des dépenses et des recettes en année pleine afin de dégager les grandes tendances.
Il a également rappelé que la consolidation concernait le budget principal et l'ensemble des budgets annexes.
M. Philippe Dallier a rappelé que l'intercommunalité avait un coût et s'est demandé s'il existait des indicateurs permettant de suivre l'évolution du budget dans les EPCI et comment il serait possible de rationaliser ces coûts.
M. Bruno Soulié a considéré que la réponse à cette question atteignait la limite de leurs informations. S'ils sont en mesure de restituer des informations comptables, il ne leur est pas possible de faire des analyses dans le domaine de l'interprétation. Il a ajouté qu'il était dans leur objectif d'accélérer leur rythme de production et de valoriser leurs données.
M. Philippe Dallier a fait part de son expérience en tant que maire et a signalé que la situation financière des communes était suivie de près par les préfets à travers un réseau d'alerte et s'est posé la question de savoir s'il existait un réseau d'alerte identique pour les EPCI.
M. Bruno Soulié a signalé l'existence d'une circulaire du ministère de l'intérieur en date du 23 novembre 2005 sur la mise en place d'un réseau identique à celui prévu pour les communes.
M. Renaud Rousselle a ajouté que ce dispositif à double détente était basé sur un petit nombre d'indicateurs (endettement, autofinancement) puis sur une expertise locale.
En réponse à M. Philippe Dallier qui se demandait s'il existait un personnel spécialisé pour la gestion des EPCI au sein de la sous-direction, M. Renaud Rousselle a déclaré qu'ils formaient une équipe relativement restreinte et que le dispositif était animé au niveau local par le Trésor public.
Concernant la situation financière des EPCI, il a constaté que ceux qui étaient à TPU ne disposaient pas d'une indépendance suffisante pour faire varier leur taux et que leur marge de manoeuvre se limitait à la diminution de la dotation de solidarité communautaire et à la variation de la taxe sur l'enlèvement des ordures ménagères (TEOM). Il a considéré qu'il ne leur restait plus qu'à s'orienter vers une fiscalité mixte.
M. Philippe Dallier a souligné l'importance de ce bilan de l'intercommunalité et s'est posé la question de savoir si la source d'économie associée au passage à l'intercommunalité était bien une réalité alors que la masse salariale augmente sans cesse.
M. Renaud Rousselle a fait remarquer qu'il était difficile de se prononcer sur l'augmentation normale des budgets locaux sauf à la limiter à l'inflation et aux conséquences des mesures catégorielles.
M. Philippe Dallier a regretté l'absence d'indicateurs pour mesurer l'efficacité des EPCI et la difficulté d'interprétation des informations dont on disposait.
M. Bruno Soulié a déclaré que c'était un chantier en réflexion avec la DGCL mais qu'il relevait d'une méthodologie particulièrement complexe étant donné la diversité des EPCI ainsi que dans leur choix du mode de gestion de leurs services publics locaux.
Compte-rendu du 22 mars 2006
Audition de MM. Alain PICHON , président de chambre, Jean-Philippe VACHIA , conseiller maître et Thierry MOURIER des GAYETS , conseiller référendaire à la Cour des comptes.
M. Philippe Dallier, rapporteur, a ouvert l'audition en rappelant que l'étude sur l'intercommunalité dont il est le rapporteur avait pour but de rechercher si l'organisation territoriale actuelle était pertinente ou si, au contraire, l'on se situait dans une phase intermédiaire. Avec cette étude, il s'agit également de voir si, avec la mise en place de l'intercommunalité, la dépense publique est plus efficace ou au contraire si elle s'accroît.
M. Alain Pichon a déclaré qu'il présidait la quatrième chambre de la Cour des comptes qui a dans sa compétence le ministère de l'intérieur. Il a été président de chambre régionale des comptes, à Bordeaux et Marseille. C'est à ce double titre que M. Pichon a participé à l'enquête.
M. Jean-Philippe Vachia , qui a été président de la chambre régionale des comptes Midi-Pyrénées jusque juillet 2005 et a été désigné par le comité de liaison Cour-CRC pour assurer le comité de pilotage, a précisé que l'enquête était la première à avoir mobilisé la totalité des chambres régionales des comptes. Il n'y a en effet que la CRC Corse qui n'y ait pas participé.
M. Thierry Mourier des Gayets , vice-président de la chambre régionale des comptes d'Ile-de-France, et copilote du rapport, a précisé que l'enquête s'était appuyée sur un échantillon composé de 5 communautés urbaines, d'une cinquantaine de communautés d'agglomération et de 80 à 90 communautés de communes. L'enquête a duré un peu moins de 2 ans et demi, soit de 1 à 4 mois par EPCI. La période de réponse au rapport d'observations provisoires puis de rédaction du rapport d'observations définitives a duré presque autant de temps que l'instruction elle-même. Le travail a été réalisé à partir de documents datant de 1999 à 2003. Le rapport, daté de novembre 2005, était en fait fini dès mai 2005. Les rapports d'observations provisoires ont été notifiés au plus tard en janvier 2005.
M. Alain Pichon a rajouté que l'enquête avait porté sur les comptes 2003/2004. Le rapport est sorti en novembre mais le texte était arrêté à l'été. Tous les événements postérieurs (et notamment la réforme de la taxe professionnelle) sont donc en dehors de l'épure du rapport.
M. Alain Pichon a annoncé que le Premier président de la Cour envisageait de conduire une enquête de suivi pour voir ce que les recommandations étaient devenues et que les modalités de ce suivi seraient arrêtées dans les prochains mois. Le rapport devrait être publié soit début 2008 soit fin 2008 de manière à ce que la réforme de la TP ait produit ses effets.
M. Philippe Dallier a abordé la question de la pertinence des périmètres des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), ayant constaté qu'il existe des EPCI purement défensifs, que certains périmètres ont eu des effets pervers, et que tous les EPCI n'ont pas une taille suffisante pour fonctionner. Il a demandé à ses interlocuteurs s'ils estimaient que les choses devaient évoluer. Il a également fait part de ses interrogations sur l'importance du rôle du préfet dans la création des EPCI.
M. Alain Pichon a rappelé que la commission Mauroy avait émis le voeu qu'à l'horizon 2007, 80-90 % du territoire soit maillé par l'intercommunalité. Cette hypothèse était pessimiste, car l'intercommunalité s'est en effet développée à une vitesse considérable sous l'effet de la « carotte » et le résultat a été atteint avant 2007.
M. Alain Pichon a reconnu que la situation semblait avoir beaucoup dépendu des circonstances locales, les préfets s'étant en effet montrés plus ou moins directifs. Toutefois, le quantitatif a été privilégié au détriment du qualitatif.
Sur les périmètres, M. Alain Pichon a déclaré qu'il y avait eu un peu de précipitation et que les intercommunalités ne correspondaient pas toujours aux périmètres géographiques. Certains périmètres ont été mal dessinés, comme l'a dénoncé la Cour, et il y a eu des périmètres uniquement défensifs.
M. Alain Pichon a affirmé que, dans les prochaines années, il fallait s'attacher à mieux dessiner les périmètres et à mieux faire émerger l'intérêt communautaire.
M. Jean-Philippe Vachia a, pour sa part, évoqué la circulaire du 23 novembre 2005, qui correspondait aux propositions de la Cour et a donc été accueillie positivement par elle. Selon lui, on peut imaginer qu'à terme, le territoire sera couvert.
Sur la question des périmètres, il faut distinguer les zones urbaines (au sens de l'INSEE) des zones rurales. En zone urbaine, on constate une accumulation de communautés de statut différent. Ce qui ne signifie pas, a précisé M. Jean-Philippe Vachia , qu'il faille une communauté par aire urbaine. Face à l'écheveau extraordinaire des aires urbaines, M. Jean-Philippe Vachia a toutefois appelé de ses voeux qu'un effort soit fait pour mieux structurer le maillage des aires urbaines. Quant aux zones rurales, il existe nombre de petites communautés de communes qui n'ont pas la taille critique, ce qui signifie qu'elles n'ont ni ressources, ni indépendance. Elles dépendent de syndicats mixtes.
L'on pourrait peut-être s'inspirer de ce qui a été fait dans les nouveaux Bundeslaender, où il y a eu constitution d'un échelon d'administration territoriale comportant au minimum entre 8 000 et 10 000 habitants.
M. Philippe Dallier a alors demandé si l'on aurait dû, plutôt que d'utiliser la « carotte » financière, laisser les choses se faire d'elles-mêmes.
M. Alain Pichon a répondu que le contexte d'alors n'y était pas favorable. La loi Joxe avait connu un échec relatif et tout acte autoritaire était proscrit. Aujourd'hui, en revanche, il y a tout un mouvement pour remettre en cause les acquis -mouvement dans lequel s'inscrivent tant la circulaire de novembre 2005 que le rapport de la Cour. On semble dès lors se diriger vers un quatrième « étage » d'administration.
M. Philippe Dallier a ensuite abordé le problème des périmètres en Île-de-France. Les logiques économique, de transports, ou de bassins d'habitat n'ont selon lui pas grand sens en petite couronne et rendent les périmètres peu évidents. Ce sont davantage des logiques politiques qui sont à l'oeuvre.
M. Thierry Mourier des Gayets a répondu que le retard de l'Île-de-France en matière d'intercommunalité était aujourd'hui moins accentué qu'au moment où l'enquête a été réalisée. Un rattrapage a en effet eu lieu ces dernières années. Si bien que l'on compte désormais en Île-de-France une centaine de communautés, dont une trentaine de communautés d'agglomération. A cela, des raisons historiques -le poids de Paris qui n'est pas incitatif-, et des raisons techniques : l'existence de syndicats interdépartementaux qui répondent aux grandes fonctions, telles que le transport ou l'assainissement.
M. Jean-Philippe Vachia a ajouté qu'il fallait, pour Paris et la première couronne, une vision stratégique. Pour cela, il pourrait ne pas être inutile de s'inspirer de ce qui a été fait dans d'autres capitales, comme à Londres.
M. Thierry Mourier des Gayets a confirmé que, lorsque les préfets se sont montrés volontaristes, il y a eu des résultats. Il a estimé que l'intercommunalité devrait aussi être un outil de péréquation, et que le mouvement vers un tel résultat, déjà entamé, serait progressif. Le mécanisme de la TP devrait progressivement augmenter la péréquation.
M. Philippe Dallier a ensuite évoqué l'intercommunalité en termes d'efficacité de la dépense publique. Selon lui, les économies d'échelle sont loin d'être flagrantes, et le nombre de fonctionnaires n'a fait qu'augmenter. Regrettant qu'il n'existe pas à ce jour d'outils permettant l'évaluation, le rapporteur a demandé si, en conservant toutes les strates existantes, l'on parviendrait à réaliser des économies d'échelle.
M. Alain Pichon a déclaré qu'il faudrait que l'État se montre un peu plus exigeant dans l'attribution des dotations et que ces dernières devraient notamment être subordonnées au respect de certains objectifs.
M. Jean-Philippe Vachia a quant à lui déclaré que, si la logique de la loi de 1999 était intéressante -il devait y avoir pour tout transfert de compétence un transfert de charges-, il n'y a pas eu application de ce principe. En outre, le mécanisme était d'une complexité extrême, d'où l'effort réalisé en 2004 pour simplifier les choses.
Se posent en outre, selon M. Jean-Philippe Vachia , la question de la propriété du patrimoine et le problème des compétences. La Cour a noté une certaine tendance à définir de manière très floue l'intérêt communautaire pour que les deux échelons puissent être compétents. Afin d'éviter l'empilement des compétences, la Cour propose la solution d'une « date-butoir ».
Sur la question des moyens de fonctionnement, il faut selon la Cour regarder la croissance des dépenses de personnel de l'ensemble consolidé (villes et intercommunalité).
M. Jean-Philippe Vachia a déclaré que le partage des compétences devait être clair, que la mutualisation devait être menée à bien, et qu'il fallait aller vers la réorganisation des services publics à l'échelle des nouvelles communautés. La Cour des comptes a en effet constaté qu'à ce jour, il n'y a pas eu d'économies d'échelle, mais, au contraire, une dynamique inflationniste de l'ensemble.
Selon M. Alain Pichon , on serait dans la phase des « maladies infantiles » de l'intercommunalité. La loi de 1999, avec la taxe professionnelle unique et l'idée d'une intégration forte, a été une révolution des esprits. Tout cela s'est peut-être fait un peu trop vite et a peut-être été trop brutal. M. Alain Pichon a cité l'exemple de Marseille, qui n'a pas du tout une tradition communautaire, et dont le rapprochement avec Aix a connu l'échec.
Le départ à la retraite massif des dix prochaines années est peut-être, selon M. Alain Pichon , l'occasion de retrouver un étiage normal en termes de nombre de fonctionnaires. Pour ne pas rater cette occasion, il faut selon lui sensibiliser les élus et gestionnaires.
M. Philippe Dallier a demandé comment les choses allaient évoluer en matière de ressources des EPCI.
M. Alain Pichon a répondu qu'il avait un vrai problème de redistribution et qu'il y aurait des situations financières tendues.
M. Jean-Philippe Vachia a alors déclaré que l'un des points forts du rapport était d'avoir mis en avant la nécessité d'une prospective financière et fiscale partagée entre communes et intercommunalité à moyen terme, et donc la nécessité d'une visibilité sur l'évolution des ressources. Selon lui, le système de la loi de 1999 ne peut marcher que s'il y a un partage entre deux échelons des moyens et responsabilités. Les élus doivent s'entendre pour faire de la prospective financière et fiscale, et il faut un pacte sur le partage de la TP.
M. Alain Pichon a regretté qu'il n'y ait pas à ce jour d'obligation de présenter des comptes consolidés, mais il a reconnu que l'élaboration d'une telle présentation serait extrêmement difficile.
M. Jean-Philippe Vachia a rappelé que le rapport de la Cour avait appelé de ses voeux des comptes agrégés au niveau de l'intercommunalité elle-même, à savoir intégrant les budgets annexes. Il faut par ailleurs une vision consolidée des risques, ce qui suppose un travail de retraitement des données.
Selon M. Jean-Philippe Vachia , qui estime dommage que l'on n'utilise pas les ressources de la comptabilité fonctionnelle, il y a une « ardente obligation » d'avoir une très forte amélioration des outils d'évaluation des finances locales. Il faudrait notamment une harmonisation des méthodes de la direction générale de la comptabilité publique et de la direction générale des collectivités locales, un produit unique élaboré de concert.
Rappelant que l'intercommunalité à fiscalité propre avait pour ambition la mise en oeuvre d'un projet, M. Thierry Mourier des Gayets a déclaré que l'intercommunalité permettait de mener à bien des projets qu'il serait impossible de réaliser au niveau communal, et, qu'en conséquence, il est difficile de comparer des choses non comparables.
M. Alain Pichon a pour sa part affirmé qu'on savait que l'échec en termes d'économies d'échelle était attendu mais qu'on pouvait tout de même espérer que la qualité des services publics rendus serait supérieure, ce qui n'est pas toujours le cas. Il a donné l'exemple de certains maires des communes centrales qui n'ont pas opéré de recrutements nets, si bien que les agents de la commune travaillent également pour l'EPCI.
M. Alain Pichon a estimé que l'usager des services publics a globalement gagné à l'intercommunalité, que le délégataire est plutôt satisfait d'avoir devant lui une entité plus grande, mais que le contribuable y a, lui, perdu et que, s'agissant du citoyen, il n'y comprend plus rien. Or, l'on ne sait pas pour l'heure si le surcoût fiscal est équilibré par la qualité des services publics.
M. Alain Pichon a déclaré qu'aujourd'hui, on s'appuyait, plus que sur l'intercommunalité, sur la commune et le département, sorti selon lui vainqueur de l'acte II en matière de lisibilité et de champ de compétences.
Répondant à une interrogation de M. Philippe Dallier sur la péréquation à travers la DGF, M. Jean-Philippe Vachia a affirmé que ses missions de contrôle permettaient à la Cour des comptes d'avoir une appréciation empirique de son rôle péréquateur.
M. Jean-Philippe Vachia a enfin estimé que la dotation de solidarité communautaire consistait à rendre à chacun sa part de taxe professionnelle, et, au final, aboutissait à figer la situation. Quant au coefficient d'intégration fiscale, la Cour des comptes estime qu'il a suffisamment été modifié et qu'il faut le laisser jouer.
Compte-rendu du 29 mars 2006
Audition de M. Nicolas PORTIER , délégué général de l'Assemblée des communautés de France (ADCF).
En introduction, M. Philippe Dallier, rapporteur , a rappelé qu'il cherchait à savoir si le paysage institutionnel tel qu'il existe aujourd'hui devait être analysé comme un aboutissement de l'organisation territoriale ou une étape transitoire, dans un contexte où la Cour des comptes a, sur l'intercommunalité, émis des réserves partagées par beaucoup.
M. Nicolas Portier a déclaré que, dans sa réaction officielle au rapport de la Cour des comptes, l'ADCF avait signalé que l'analyse de la Cour recouvrait la sienne propre. En effet, l'ADCF a récemment élaboré un document (voir la « Charte d'Amiens »), dans lequel elle affirme que, si l'intercommunalité a progressé du point de vue quantitatif, tout reste à faire sur le plan qualitatif. Mais selon M. Nicolas Portier , ce document reste moins analytique que celui de la Cour des comptes.
M. Nicolas Portier a mentionné d'autres rapports sur l'intercommunalité, qui sont plus critiques ou qui font des propositions. Il a ajouté que l'ADCF venait de faire une note sur la question des périmètres.
Abordant la question de la logique territoriale, M. Philippe Dallier a demandé s'il était normal que deux à trois communautés se « partagent » des aires urbaines d'environ 150 000 habitants, dans la mesure où il existe de très grosses communautés urbaines qui parviennent à fonctionner correctement ; il a évoqué également les EPCI d'aubaine et les EPCI défensifs, phénomène qui expliquerait ce morcellement.
M. Nicolas Portier a rejoint le constat de la Cour des comptes qui a, dans son rapport, décrit les aires urbaines comme des « monstres administratifs ». Le nombre moyen de communes par aire urbaine est de 113, ce qui est, selon M. Nicolas Portier , énorme et ingouvernable ; selon lui, l'ADCF est gênée par la fragmentation de l'aire urbaine, mais son président, Marc Censi, considère l'intercommunalité comme évolutive, et donc si un périmètre a vocation à s'agrandir, il doit le faire progressivement. Ainsi, selon M. Nicolas Portier , l'on ne saurait dire qu'il y ait incohérence du seul fait que les communautés ne recouvrent pas la totalité des aires urbaines. En effet, faire fonctionner les aires urbaines dans une logique intercommunale et non supracommunale n'est pas quelque chose d'évident, car il faut constamment rechercher le consensus.
M. Philippe Dallier a réagi à ces propos en déclarant que, dans un certain nombre de cas, les aires urbaines s'imposaient et que l'on pouvait dès lors légitimement s'interroger sur la pertinence du fractionnement. Se demandant ensuite ce que la couche supplémentaire créée par l'intercommunalité a apporté en termes d'efficacité, le rapporteur a demandé à M. Nicolas Portier si l'ADCF estimait que certaines choses devaient être corrigées.
Le délégué général de l'ADCF a répondu que cette dernière était favorable au maintien des communes. La coopération intercommunale ne doit pas, selon elle, être un outil déguisé de fusion. Il faut maintenir un dispositif de fusion à part entière. Il a ajouté que de toute façon, l'ADCF considérait que les Français n'accepteraient pas la disparition des communes dès lors qu'elles avaient une taille viable.
M. Nicolas Portier a ensuite évoqué le rapport Piron sur l'équilibre territorial des pouvoirs qui a beaucoup intéressé l'ADCF. Il y a peut-être en effet, selon le délégué général, des solutions parallèlement au processus intercommunal. Il pourrait par exemple être envisagé d'alléger de certains attributs la personnalité morale de certaines communes...
M. Nicolas Portier a ensuite affirmé que l'administration locale de demain sera articulée autour du binôme commune/communauté. La question du statut de la communauté, qui tend à devenir un statut sui generis, va dès lors irrémédiablement se poser : si certaines compétences ne peuvent être exercées qu'à l'échelle communautaire et certaines exercées conjointement, d'autres ne sont pas transférables.
S'agissant des pays, il y a, selon M. Nicolas Portier , un consensus dans le débat parlementaire pour refuser les « pays-structures », bien qu'on constate, ça et là, des dérives. Le pays doit être considéré comme un programme Leader+ sur le fondement duquel est élaborée une stratégie pour plusieurs acteurs locaux. L'idée d'origine ne doit pas être dénaturée : le pays n'est pas une structure mais un territoire de projet. D'ailleurs, l'association défend la pérennité des pays là où ils fonctionnent bien.
Après avoir soutenu que le débat sur les pays avait été faussé par l'émergence de syndicats mixtes, M. Nicolas Portier a déclaré que l'ADCF était favorable à la co-contractualisation entre communautés, ce que permettait la loi de 1999, et ce qu'a généralisé la loi de 2003.
Le rapporteur a ensuite abordé la question des dotations et demandé à M. Nicolas Portier quelle était l'évolution qui paraissait judicieuse à l'ADCF.
M. Nicolas Portier a alors mentionné un sondage, réalisé par IPSOS, qui a surpris positivement l'ADCF, en ce qu'il témoigne d'une appréciation de l'intercommunalité par les Français qui est plutôt positive. Le sondage montre en effet que les Français ont une meilleure appréhension de l'intercommunalité. La population saisit mieux l'action et les responsabilités des communautés, bien que sa compréhension de ce que fait la communauté est deux fois moindre que sa compréhension de ce que ce que fait la commune. En Île-de-France, la population cerne les limites de l'intercommunalité et estime que les communes sont en mesure de satisfaire à leurs attentes, sans avoir recours à l'intercommunalité. En milieu rural ou périurbain en revanche, la population attend beaucoup de l'intercommunalité.
Sur la question financière, M. Nicolas Portier a précisé que l'ADCF recommandait la prudence, étant donné que les situations se tendent. Déclarant souscrire à l'ensemble des affirmations du rapport de la Cour des comptes, il a notamment repris à son compte le propos de la Cour selon lequel l'incitation financière avait fonctionné, mais à un coût de 2 milliards d'euros.
M. Philippe Dallier a alors regretté que le taux d'augmentation annuel des dotations de l'Etat aux communes ne s'élève qu'à 0,97 % et a déclaré que la DGF intercommunale était venue aspirer une part des ressources.
M. Nicolas Portier a affirmé qu'on était engagé dans un processus où, d'une façon générale, l'augmentation des dotations allait être très faible.
Il a informé que l'ADCF était en train de mesurer le rôle péréquateur de l'intercommunalité -à savoir l'effet « mutualisation de moyens ».
Répondant à une question de M. Philippe Dallier sur l'effet de redistribution, M. Nicolas Portier a affirmé qu'il existait des effets correcteurs extrêmement puissants. Ce qui explique que les communes situées hors intercommunalité se retrouvent en situation délicate.
Selon M. Nicolas Portier , on pourrait imaginer une DGF consolidée pour les communes en intercommunalité, et affecter les croissances des dotations, non pas tellement en fonction de critères nationaux mais selon les situations locales.
S'agissant des conséquences en termes de dotations, l'ADCF pense qu'il faut consolider les moyens, tant financiers qu'humains. En cela, avoir une approche consolidée des dotations de l'Etat est une approche « inscrite dans l'histoire », selon M. Nicolas Portier .
L'ADCF se félicite par ailleurs de la progression de la fiscalité à TPU, qui a permis de tarir l'augmentation permanente des inégalités. Mais, si la TPU est un vrai succès, le plafonnement prévu par la réforme va intervenir de manière très aléatoire. Quant à la fiscalité mixte, elle est, selon M. Nicolas Portier , à l'agenda. Si la plupart des communautés à fiscalité mixte sont celles qui avaient un faible potentiel TP, désormais, il y a une vraie dynamique, un vrai choix vers la fiscalité mixte.
M. Nicolas Portier a continué en déclarant que l'évolution était également très dynamique du côté des charges. Mais, en réalité, un peu partout, on constate un ralentissement des transferts, une stabilisation des périmètres et un vrai effort pour traquer les doublons. Le délégué a rappelé que, jusqu'en août 2004, on ne pouvait pas mutualiser les services, et il a informé que l'ADCF avait entrepris d'accompagner ses adhérents dans la chasse aux doublons.
M. Philippe Dallier a toutefois répondu que, si la création d'établissements publics de coopération intercommunale avait démontré son efficacité, il n'y aurait pas eu besoin de dotations spécifiques pour l'intercommunalité. Celle-ci en effet se serait faite à coût nul, et même aurait dû répondre à l'espoir de réaliser par son biais des économies d'échelle.
M. Nicolas Portier a qualifié ces propos comme étant « trop pessimistes ». Il existe selon lui des « effets de bord » et, normalement, avec la TPU, la neutralisation financière s'opère. La DGF, née d'une logique syndicale, a d'ailleurs permis de donner de l'oxygène à ce système. M. Nicolas Portier a estimé qu'il faudrait faire une analyse des 18 500 syndicats compétence par compétence.
Alors que, pour M. Philippe Dallier , l'intercommunalité n'a pas d'autre vocation que de gérer mieux et à moindre coût des services publics utiles pour le contribuable, et de rationaliser la dépense publique. Selon M. Nicolas Portier , au contraire, les intercommunalités naîtraient pour faire mieux mais pas seulement pour faire la même chose ; elles n'auraient pas seulement été créées pour obtenir des économies d'échelle ; elles seraient également venues répondre à des enjeux de société ; ainsi, les intercommunalités s'investiraient davantage que les communes dans les problèmes nouveaux.
Après avoir regretté l'absence d'instruments permettant de mener à bien une analyse consolidée, M. Nicolas Portier a déclaré que l'intercommunalité ne se réalisait de toute façon pas dans un environnement constant : divers paramètres ont en effet joué en faveur d'une augmentation des coûts, comme les 35 heures, le glissement-vieillesse-technicité ou le coût des services publics locaux.
Étant donné qu'il est difficile de faire une analyse comparative dans la mesure où les compétences évoluent, il apparaît plus pertinent, selon M. Nicolas Portier , de rechercher ce que cela aurait coûté si l'on était resté dans une logique communale. L'ADCF reste persuadée que l'intercommunalité permet de rationaliser la dépense, par exemple, en évitant la multiplication des petits équipements collectifs.
Compte-rendu du 29 mars 2006
Audition conjointe de M. Patrick COUÉ , directeur général de la communauté d'agglomération d'Angoulême, et M. Pascal FORTOUL , administrateur territorial, directeur général adjoint de la communauté d'agglomération du Voironnais (qui regroupe 34 communes et 90 000 habitants), vice-président de l'association et rédacteur en chef de la « Lettre de l'intercommunalité ».
Après que M. Philippe Dallier, rapporteur , a exposé l'objectif de son rapport, M. Patrick Coué a déclaré que, pour faire le bilan de l'efficacité de l'intercommunalité, il existait des outils (comptables, analytiques et de prospective budgétaire) permettant au mois le mois d'évaluer toute décision d'investissement.
Il a déclaré que le service rendu dans le cadre de l'intercommunalité n'était pas le même que celui rendu au niveau de la commune ; le service de l'eau étant, à ce titre, celui qui a le moins changé. Ainsi, la communauté d'agglomération d'Angoulême s'est alignée, par la procédure de l'appel d'offres, sur le prix le plus bas, et a gagné une marge extraordinaire avec les délégations de service public. Le fait de représenter 110 000 habitants au lieu de 5 000 ou 10 000 a permis, selon M. Patrick Coué , d'avoir plus de poids face aux interlocuteurs.
La communauté d'agglomération d'Angoulême a donc gagné à l'intercommunalité. Mais, sur les autres services rendus en régie, la situation est plus complexe. Ainsi, s'agissant des déchets ménagers, l'environnement réglementaire a tellement évolué qu'il est devenu impossible de comparer. Le service est fondamentalement différent de celui rendu au moment du vote de la loi de 1999. Les coûts de mise aux normes ont augmenté. Le comportement des élus communaux se révèle, en outre, inflationniste quand les compétences sont transférées dans le cadre de l'intercommunalité. Ils se mettent en effet en positon de demande.
M. Pascal Fortoul a pour sa part assuré que l'intercommunalité avait été à l'origine d'économies d'échelle au niveau du territoire du pays voironnais. Cela a notamment été vrai pour l'eau, l'assainissement et les déchets ménagers.
Selon M. Pascal Fortoul , il est très facile de calculer ces économies d'échelle. Ainsi, a-t-il déclaré, le coût est de 20 % inférieur à ce que coûterait la réalisation du même service sans intercommunalité.
M. Pascal Fortoul a précisé que le pays voironnais avait fait le choix de la régie. Il ne s'agit pas d'un choix idéologique mais d'un choix d'efficacité. Par exemple, pour le tri sélectif, la présence sur le terrain d'agents de la communauté permet de mieux faire passer le message.
D'ailleurs, si l'intercommunalité ne bénéficie pas de la légitimité de la population, du fait de l'absence d'élection, l'amélioration de la qualité du service rendu n'en est pas moins visible.
S'agissant de l'assainissement, le pays voironnais aurait pu diminuer le coût de 15 %. Mais le choix -politique- du prix moyen pondéré a permis de multiplier par deux la capacité d'investissement.
M. Philippe Dallier a ensuite abordé la question des nouvelles compétences, avec lesquelles, selon lui, l'on s'inscrit dans une autre logique.
M. Patrick Coué a répondu qu'à Angoulême, beaucoup de dossiers avaient été portés par des élus alors qu'ils n'étaient pas portés du tout auparavant. En cela, l'intercommunalité aura permis de mobiliser tout un territoire sur un vrai projet, sur une vraie vision.
M. Patrick Coué a regretté qu'aujourd'hui l'intercommunalité vise à repenser le redécoupage de la France, et qu'elle ne soit dans cette mesure qu'un substitut, un emplâtre sur une jambe de bois ; on voudrait à tort que l'intercommunalité ait l'efficacité d'une décision autoritaire de regroupement alors qu'elle est née par la libre volonté des communautés à s'associer.
Or l'intercommunalité, a-t-il estimé, inspire la confiance à la condition de respecter la libre adhésion des communes et l'intégrité des pouvoirs locaux ; l'intercommunalité ne peut pas réorganiser à ce stade l'administration locale.
Dans certaines intercommunalités où la ville-centre représente 80 % de la population, l'administration de la communauté est en fait celle de la ville-centre, ou, du moins, il existe des ponts très importants entre les deux. M. Patrick Coué a cité les exemples de Strasbourg, de Rennes et de Mulhouse.
Or, dans une telle situation naît chez les maires des communes alentour une suspicion d'hégémonie. C'est pourquoi il faudrait, selon M. Patrick Coué , que ce soit l'intercommunalité qui soit le lieu de rassemblement des services. Les élus des communes extérieures à la ville-centre doivent pouvoir peser sur l'intercommunalité. En effet, il n'y aura pas d'adhésion si les services décisionnels restent dans le giron de la ville-centre.
M. Pascal Fortoul a alors déclaré que le problème se posait aussi à Voiron, qui ne représente cependant que 25 % de la population de la communauté. Il a noté des réticences, chez les communes « ayant transféré leurs compétences à la ville-centre », et dans l'hypothèse où le support des services de la communauté est la ville-centre, à voir partir leurs fonctionnaires. C'est la raison pour laquelle, a estimé M. Pascal Fortoul , il faut aller vers la mutualisation des services. Mais cette mutualisation se révèle difficile, les communes se montrant frileuses sur ce point.
Pour M. Pascal Fortoul , l'intercommunalité est un outil au service d'un projet local de territoire, et les dysfonctionnements surgissent quand on a l'outil mais qu'il n'est pas sous-tendu par un projet collectif.
M. Philippe Dallier a demandé si l'efficacité et la rationalisation étaient perceptibles.
M. Pascal Fortoul a précisé que le pays voironnais, qui est en TPU, avait fait le choix, en 1999, de ne pas augmenter le prélèvement fiscal sur le territoire.
Il faut, selon le directeur général adjoint, deux éléments pour qu'une intercommunalité fonctionne : un projet de territoire et une dimension prospective -les situations pouvant à tout moment se retourner. Si ces deux conditions sont respectées, il y a alors de véritables économies d'échelle. Pour autant, ces dernières n'empêchent pas le problème du refus de la mutualisation par les communes de se poser.
M. Patrick Coué a ajouté qu'il avait aussi des réticences techniques. Ainsi, à Angoulême, l'adhésion au projet intercommunal était réelle mais la situation financière tendue d'Angoulême a empêché tout investissement depuis une vingtaine d'années. La ville n'avait plus d'autorisation de recours à l'emprunt, et, parallèlement, un déficit d'équipement extraordinaire, bien qu'au coeur d'un bassin d'emploi extrêmement riche.
Or, grâce à l'intercommunalité, et en dépit de beaucoup d'inquiétudes liées au fait qu'elle n'a pas de moyens, la ville d'Angoulême a recommencé à construire. L'intercommunalité a donc permis, sans augmenter le taux de TP, de redonner à la population un peu d'espoir et de procéder à quelques investissements. La TP a joué le rôle de solidarité entre les communes.
M. Philippe Dallier a alors interrogé ses interlocuteurs sur l'avenir des dotations et notamment de la DGF.
Après que M. Patrick Coué a déclaré qu'il fallait un couple commune/communauté très fort, se résumant à une seule entité, M. Pascal Fortoul a estimé que la TPU avait créé un lien fondamental entre l'intercommunalité et les communes. Dans cette logique, il faudrait que soit mis un terme à la pratique selon laquelle les communes utilisent leurs dotations, non pour mener à bien des projets, mais pour diminuer leurs propres impôts.
M. Pascal Fortoul a alors suggéré de faire disparaître la DGF des communes au profit d'une DGF globale qui serait répartie au niveau communautaire. Il a ajouté que les critères de répartition pourraient, pour certains, être définis par la loi et pour d'autres, définis au niveau local en fonction de la diversité des situations.
M. Patrick Coué a déclaré que les débats et décisions qui sont aujourd'hui importants se faisaient au niveau communautaire. A Angoulême, en quatre ans, a été votée la disparition de la dotation de solidarité (DSC).
M. Pascal Fortoul a alors affirmé que les communes les plus riches considèrent que s'il n'y avait pas eu d'intercommunalité, elles auraient été encore plus riches. De par leur attractivité, les équipements des communes riches sont de facto devenus intercommunaux, alors qu'ils ne sont pas d'intérêt communautaire. Aujourd'hui, ils se retrouvent en difficulté du fait d'effets de ciseaux.
M. Roger Karoutchi , sénateur des Hauts-de-Seine, a conclu que le système communautaire ne fonctionnait que s'il est animé par la notion d'intérêt général, et qu'il existe un projet communautaire fort et partagé.
Suite à ces propos, M. Pascal Fortoul a regretté que certaines communautés soient assaillies par les demandes. La pierre angulaire de l'intercommunalité devrait selon lui être un projet collectif partagé. En effet, l'intercommunalité doit être un outil au service du projet, et non l'inverse, sous peine de connaître l'échec.
M. Patrick Coué a pour sa part fait remarquer que l'intercommunalité avait permis de mettre en place un espace permanent de rencontre, de négociation et d'interconnaissance des élus. Ce faisant, l'intercommunalité permet à la politique de trouver « son plein épanouissement ».
Aujourd'hui, l'intercommunalité est une réalité dans l'esprit des gens, qui, s'ils n'ont pas une bonne connaissance des compétences de leur communauté, ont le sentiment d'appartenir à un territoire plus vaste que celui de leur commune.
M. Roger Karoutchi a abordé le problème de la lisibilité de la répartition des compétences entre les différents échelons d'administration. M. Patrick Coué a, sur ce point, estimé que les services devaient impérativement être unifiés.
Pour M. Patrick Coué , une administration unifiée est le moyen de faire des économies. Sans un mouvement d'unification, il n'y aura pas d'économies. Ainsi, à Angoulême, le personnel représente 55 % des charges des communes et seulement 20 à 25 % des charges pour la communauté d'agglomération Mais, si l'unification est possible sur le plan administratif -les exemples de Brest et Mulhouse, où c'est la ville-centre qui porte les services, l'ont montré-, elle est plus délicate sur le plan politique, et il faut que ce soit la communauté qui porte les services.
M. Patrick Coué a regretté que la réalité volontariste se heurte au cadre législatif. Il faut selon lui ne pas hésiter à entreprendre une action qui soit plus ou moins coercitive pour le rassemblement des services, notamment eu égard à la situation des finances publiques. M. Patrick Coué a rappelé qu'au cours des dix prochaines années, l'on verrait le départ de 50 % des personnels, et que ce départ fournissait l'occasion de procéder à ce rassemblement.
M. Pascal Fortoul a suggéré qu'on oblige l'intercommunalité à utiliser le critère de la LOLF. A ce jour, les intercommunalités n'ont pas sédimenté au niveau politique et sont donc capables de remettre en cause leurs méthodes. La LOLF est pour elles une source potentielle d'économies d'échelle.
Après que M. Philippe Dallier eut évoqué le problème de lisibilité pour le citoyen, M. Patrick Coué a déclaré que le lieu d'échange de projet pourrait être le département, ce qui signifierait la fin du « pays ».
Compte-rendu du 9 mai 2006
Audition de M. Alain GÉRARD , sénateur du Finistère, président de la communauté d'agglomération de Quimper.
M. Philippe Dallier, rapporteur , a ouvert l'audition en précisant les grands axes du rapport sur l'intercommunalité dont l'Observatoire de la décentralisation lui a confié la rédaction. Le rapporteur a indiqué qu'il cherchait notamment à savoir premièrement si l'organisation administrative actuelle du pays était un aboutissement ou au contraire un point d'étape, deuxièmement si l'intercommunalité avait permis la réalisation des économies d'échelle espérées, et enfin si elle avait conduit à des abus, et quels changements éventuels l'on pouvait imaginer.
Il a rappelé qu'à ses yeux, l'intercommunalité avait conduit à des abus et à une complication de l'organisation locale.
M. Alain Gérard a rappelé qu'il était, depuis 2001, maire de Quimper (65 000 habitants) et président de la communauté d'agglomération (85 000 habitants) qui, outre Quimper, regroupe essentiellement des petites communes - la plus importante comptant 4 000 habitants.
M. Alain Gérard a expliqué que la présidence de la communauté d'agglomération était commandée par le mandat de maire de Quimper, dans la mesure où c'est la ville de Quimper qui pilote les services de l'intercommunalité. Ces fonctions ont en outre entraîné, pour le sénateur, la présidence du pays, du syndicat intercommunal à vocation multiple (SIVOM), du schéma de cohérence territoriale (SCOT), de l'hôpital et de la mission locale. M. Alain Gérard a évoqué, à ce propos, la confusion que cette accumulation de structures est susceptible de provoquer dans l'esprit de la population.
M. Alain Gérard a rappelé qu'il avait démissionné de la présidence du pays de Cornouailles. Bien qu'il se soit agi d'un pays important, recouvrant 310 000 habitants (et n'ayant pas du tout le même périmètre que l'intercommunalité puisqu'il inclut, outre la communauté d'agglomération, onze communautés de communes), le sénateur n'a en effet pas du tout été convaincu de l'utilité de la structure du pays dont il avait l'impression qu'elle se résumait à un simple espace de discussion qui employait cependant un directeur et trois secrétaires.
M. Alain Gérard a estimé que le SCOT avait un périmètre bien plus pertinent que celui du pays et a mentionné le projet qu'il avait eu de réunir la communauté d'agglomération, le SCOT et le pays, en faisant se recouvrir les périmètres. Le sénateur a expliqué qu'il avait toutefois dû renoncer à ce projet, ayant rencontré des oppositions. Il a ajouté qu'à l'approche des élections municipales, le sentiment d'appartenance communautaire tendait à s'estomper au profit du sentiment d'appartenance communale.
M. Philippe Dallier , rapporteur, a alors demandé ce qu'il en était de la répartition des charges entre les différentes communes-membres de la communauté.
M. Alain Gérard a répondu qu'à l'usage et avec le développement de la communauté d'agglomération, il s'était complètement détaché des clivages politiques : il a ainsi confié des responsabilités à des maires en faisant complètement abstraction de leur appartenance partisane.
Après que M. Philippe Dallier eut qualifié la situation de la communauté d'agglomération de très particulière, en ce qu'elle ne regroupe, outre la très grosse commune qu'est Quimper, que de petites communes, M. Alain Gérard a reconnu qu'il y avait eu à l'origine un peu de méfiance de la part des élus locaux. Désormais toutefois, et même si d'aucuns tendent parfois à l'oublier, la répartition de la taxe professionnelle est bien plus satisfaisante, à l'échelle de la communauté, que ne l'était la répartition de la taxe professionnelle de zone. Grâce à la TPU et aux dotations, l'équilibre du budget de l'agglomération est assuré.
Répondant à une question du rapporteur, M. Alain Gérard a déclaré que l'état des finances de l'agglomération n'était pas de nature à susciter de l'inquiétude, et que, selon toute vraisemblance, la communauté d'agglomération ne s'acheminerait pas vers la fiscalité mixte.
M. Philippe Dallier a ensuite évoqué la question des transferts de personnels et a demandé s'ils avaient soulevé des difficultés.
M. Alain Gérard a répondu que tout se passait très bien à ce niveau. Il a indiqué que, pour l'essentiel, il s'agissait de personnels de la commune-centre qui avaient été transférés « sur le papier ». 250 personnels municipaux sont devenus communautaires et il n'y a pas eu de création nette de postes. Les autres communes membres ont apporté leur contribution en affectant quelques personnels à la communauté d'agglomération.
M. Philippe Dallier , rapporteur, ayant ensuite demandé si la communauté d'agglomération avait eu tendance à s'approprier toujours plus de compétences, ou si, au contraire, elle était restée « dans les clous », M. Alain Gérard a déclaré qu'il n'y avait pas eu de dépassements. La communauté d'agglomération a joué la carte de la transparence et cela a permis que les choses se passent « très bien » et que les statuts d'origine ne soient pas modifiés.
M. Alain Gérard a aussi évoqué la création d'un journal intercommunal, complémentaire des différents journaux communaux et propre à la communauté d'agglomération, qui a, selon lui, contribué à « arrondir les angles ». Ce journal a satisfait les demandes d'explications attendues et a permis que la communauté d'agglomération soit aujourd'hui acceptée par la population.
M. Philippe Dallier , rapporteur, a ensuite abordé la question de la simplification de l'organisation administrative territoriale.
Pour M. Alain Gérard , le pays est le seul échelon dont on puisse envisager la suppression. Budgétivore, le pays ne constitue, selon le sénateur, rien d'autre qu'une « surenchère » par rapport aux autres niveaux d'administration, et la population ne comprend ni sa fonction, ni sa raison d'être.
M. Alain Gérard a déclaré que, pour lui, la commune était un « repère », et qu'en cela, il ne pouvait que difficilement concevoir sa suppression. Quant à la communauté d'agglomération, elle est « une très bonne chose », mais elle n'a pas assez de « volume » par rapport à ses compétences, selon le sénateur qui a expliqué avoir essayé de rallier d'autres EPCI et s'être heurté à des résistances politiques ; il a également déploré qu'il y ait un si grand nombre de petites communautés de communes en Cornouailles.
S'agissant de la fusion de communes, qu'a évoquée le rapporteur, M. Alain Gérard a indiqué qu'on y avait eu recours dans les années 1960, Quimper ayant alors absorbé les communes avoisinantes sans difficulté majeure jusqu'à aujourd'hui.
M. Eric Doligé , sénateur du Loiret, a alors déclaré que le véritable problème était celui de la répartition des compétences. Selon lui, on ne parvient pas, en France, à réorganiser le réseau de collectivités car, à chaque fois que l'on cherche à supprimer une structure, on en crée une autre par réaction, alors qu'il conviendrait plutôt de s'employer à supprimer les structures dépourvues de compétences. M. Eric Doligé a ainsi estimé que l'acte II de la décentralisation, ayant ouvert de nouvelles pistes et fait naître de nouvelles attentes, a un coût de sortie supérieur à son coût d'entrée et signifiera une hausse des dépenses de l'ordre de 15 %.
M. Eric Doligé a regretté, à ce propos, que les incitations financières aient eu tendance à multiplier les structures dont les membres n'ont pas pour autant accepté d'abandonner leurs compétences antérieures.
M. Eric Doligé a ensuite abordé le problème du pays. Il a déclaré que la perception de cette structure était très différente d'un département à l'autre, et a dénoncé l'existence de détournements de finalité du pays, déplorant que le pays soit la structure choisie par la région pour transmettre ses subventions.
M. Alain Gérard a remarqué qu'il avait pu constater que le pays était une structure budgétivore, dans la mesure où, à chaque fois que, dans le cadre du pays, il avait proposé un thème de réflexion, le pays avait systématiquement eu recours à un cabinet d'études. M. Alain Gérard a estimé qu'il fallait éviter de toujours créer de nouveaux bureaux d'études ou laboratoires de recherche et qu'il était plus efficace et moins coûteux de solliciter les structures déjà existantes.
M. Philippe Dallier , rapporteur, a alors constaté qu'il était difficile de définir un périmètre efficace pour toutes les régions à la fois, car, selon l'endroit, le périmètre efficace n'est pas forcément le même.
M. Alain Gérard a approuvé les propos du sénateur et estimé qu'il n'y avait pas de modèle a priori de simplification administrative. Ainsi, à Quimper, en l'état actuel de l'organisation administrative territoriale, chacun est « à l'aise et efficace dans ses compétences ».
M. Eric Doligé a attribué cette réussite au fait que le maire et le président de la structure intercommunale soient une seule et même personne. Dans le cas contraire, en revanche, se posent des problèmes de compétences qui se traduisent par des doublons de service et compliquent les relations avec le conseil général, a expliqué M. Eric Doligé , citant l'exemple d'Orléans. Ce dernier a donc estimé souhaitable que le maire de la ville-centre, disposant d'une certaine autorité et de contacts nationaux, soit aussi le président de la communauté.
M. Philippe Dallier , rapporteur, a alors demandé si le département n'avait pas un peu perdu de sa raison d'être.
M. Alain Gérard a reconnu qu'il avait, par le passé, été très favorable à la disparition du conseil général, mais qu'aujourd'hui il n'avait plus d'a priori sur cette question. Les relations qu'entretient la communauté d'agglomération avec le conseil général du Finistère sont en effet bonnes et constructives.
M. Alain Gérard a ensuite répété, suite à une question du rapporteur, que, s'il fallait imaginer un « grand soir » de la réorganisation administrative, c'est le pays qui lui semblait être l'échelon inutile.
M. Eric Doligé a alors estimé que le vrai problème était le développement ou le maintien de certains services de l'Etat devenus totalement inutiles et qui font doublons. Il en va ainsi, selon lui, d'une grande partie des services de la direction départementale de l'Equipement (DDE), de la direction départementale de l'action sanitaire et sociale (DDASS) et de la direction régionale des affaires culturelles (DRAC). Ces services n'ont, selon M. Eric Doligé , plus aucune action de territoire et il faut les réduire à leur plus simple expression, à savoir en faire de simples conseillers du préfet.
M. Philippe Dallier , rapporteur, a conclu l'audition en déplorant ces doublonnements coûteux pour le contribuable et en appelant à une réforme pour rendre les mécanismes plus efficaces.
Compte-rendu du 9 mai 2006
Audition de M. Jacques OUDIN , conseiller maître à la Cour des comptes, ancien sénateur.
M. Philippe Dallier, rapporteur , a ouvert l'audition en rappelant qu'il cherchait à savoir, au travers du rapport sur l'intercommunalité dont l'Observatoire de la décentralisation lui a confié la rédaction, si l'empilement des « couches » s'était accompagné d'une rationalisation de la dépense publique, si l'organisation administrative actuelle du pays devait être considérée comme un point d'aboutissement ou au contraire comme une étape, et, s'il s'agissait d'une étape, comment l'on pouvait envisager d'optimiser la dépense publique.
M. Jacques Oudin a déclaré qu'il y avait tout d'abord une nécessité de clarification de l'existant, et que cette clarification était même un principe préalable.
Il a rappelé qu'il avait, cinq ans plus tôt, déposé une proposition de loi pour l'élection au suffrage universel des conseillers communautaires. Cette proposition avait été massivement rejetée par ses collègues qui estimaient qu'elle n'allait pas dans la bonne direction. Mais, selon M. Jacques Oudin , l'on ne simplifiera rien si une dose de démocratie ne s'installe pas.
M. Jacques Oudin a rappelé, sur les rapports départements/régions, qu'un groupe de travail, composé de sénateurs et dont il avait lui-même fait partie, avait remis au Président de la République, en 2001/2002, une proposition de réforme du scrutin électoral. Il s'agissait de marier les scrutins cantonal et régional. Deux personnes étaient simultanément élues ; toutes deux siégeaient au conseil général, et l'une des deux siégeait, en outre, au conseil régional.
Selon M. Jacques Oudin , ce système était très astucieux en ce qu'il permettait de ne plus opposer les départements et les régions. La proposition devait toutefois échouer, a expliqué l'ancien sénateur, du fait de la réticence des députés, qui voyaient des concurrents potentiels dans les personnes qui auraient été élues selon ce système.
Il a fait part d'une autre idée qui serait, selon lui, intéressante à creuser, et qui consisterait à transposer le système « PLM » au système exécutif local, avec un nouveau couple constitué de l'arrondissement et de la commune principale.
M. Jacques Oudin a estimé que la simplification était en tous les cas nécessaire, et qu'elle pouvait se faire soit à partir du couple commune/intercommunalité, soit à partir du couple département/région, mais, quoi qu'il en soit, sur la base du suffrage universel.
Il a expliqué que, dans les deux cas de figure, il s'agissait de lier deux élections. Une réforme sur la base du couple commune/intercommunalité consisterait à élire les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) au suffrage universel, en maintenant des arrondissements qui seraient des embryons de communes. Le même jour seraient ainsi élus les conseillers d'arrondissement et les conseillers communautaires. Éventuellement, a précisé le sénateur, l'on pourrait même envisager que le président de l'EPCI siège au conseil général. M. Jacques Oudin a toutefois fait part de son pessimisme quant aux chances de réussite d'une telle réforme. Selon lui, en effet, une solution aussi hardie ne peut que rencontrer l'opposition de l'Assemblée nationale.
M. Philippe Dallier , rapporteur, a ensuite abordé la question de la répartition des compétences.
M. Jacques Oudin a déclaré sur ce point qu'il était dans un cas de figure assez exemplaire, ayant été président d'une communauté de communes pendant 25 ans. Il a estimé que les règles de répartition des compétences n'étaient pas claires et qu'un effort était en conséquence nécessaire en vue de clarifier l'existant.
Selon M. Jacques Oudin , l'intercommunalité ne peut se pratiquer que si l'on a une vraie volonté de coopération. Toutes les communes doivent, à cet égard, être représentées au conseil de la communauté et aucune ne doit, à elle seule, avoir plus de 50 % des voix.
Ayant constaté que certaines communes ont parfois jusqu'à 48 % des voix et qu'il ne leur manque de facto qu'une voix pour avoir la majorité absolue, M. Jacques Oudin a déclaré que, sur ce point, la première réforme à mener serait de faire passer le seuil de 50 à 40 %. Aucune commune ne devrait en effet pouvoir disposer de plus de 40 %.
L'ancien sénateur a ensuite mentionné la possibilité de dérives. Certaines communes tendent en effet à s'emparer de l'intercommunalité comme d'une arme de combat. Or, il ne s'agit pas, a insisté M. Jacques Oudin , du rôle de l'intercommunalité. Si une telle attitude peut être légitime au niveau de la commune, elle ne l'est pas au niveau de l'intercommunalité.
Il a répété que, s'agissant des compétences, une clarification était nécessaire et a rappelé qu'en principe, une compétence n'existe à l'échelle communautaire que si elle est votée par la collectivité de base, à savoir la commune. Il a ajouté qu'une compétence mal exercée par l'EPCI devrait automatiquement retournée aux communes membres.
M. Yves Fréville , sénateur, a approuvé ces propos et a cité l'exemple de la compétence voirie, faisant observer que la notion de voirie d'intérêt communautaire se déclinait dans une gamme allant de 0 à 100.
M. Jacques Oudin a répondu qu'au nom de la liberté de décision, une telle variation dans le périmètre de la voirie d'intérêt communautaire ne le gênait pas a priori et ne posait pas de problème du moment que l'on avait délibéré de manière claire.
M. Yves Fréville a nuancé ce propos en évoquant les difficultés qui sont susceptibles de naître lorsque c'est la préfecture qui détermine ses propres critères alors que la DGF est calculée en partie en fonction de la voirie. M. Jacques Oudin a ajouté qu'une compétence ne devait pas être déterminée en fonction du seul effet d'aubaine.
Il a estimé que le contrôle de légalité s'exerçait dans des conditions déplorables, le préfet ne recevant selon lui aucune instruction de la direction générale des collectivités locales (DGCL) sur les points délicats.
M. Jacques Oudin a attribué le développement fulgurant de l'intercommunalité à l'existence de la « carotte » financière mais aussi au fait que les départements et régions préfèrent parfois avoir pour interlocuteurs les structures intercommunales et non les communes.
Il a dénoncé un paysage administratif local extrêmement compliqué, fait d'une multitude de contrats et d'acteurs. Si l'intercommunalité signifie souvent, pour les communes, une bouffée d'oxygène, elle génère également un coût supplémentaire qui est réel.
M. Jacques Oudin a alors déclaré qu'à son avis, la seule démarche de rationalisation possible consistait dès lors en l'élection. Suite à une question du rapporteur, il a précisé que l'élection conduirait à coup sûr à une rationalisation des dépenses. L'absence de contrôle démocratique aurait en effet conduit à ce que, jusqu'à présent, l'intercommunalité ne se soit faite qu'entre élus.
Sur l'absence supposée d'économies d'échelle, M. Jacques Oudin a suggéré de rechercher si l'intercommunalité avait permis de dynamiser les dépenses en termes d'investissement. Il s'agit en effet, selon l'ancien sénateur, d'un indice fiable, dans la mesure où, bien souvent, les communes se sont regroupées en intercommunalité pour pouvoir investir dans des domaines où, seules, elles auraient été incapables de le faire.
M. Yves Fréville a alors regretté que l'on ne dispose pas de chiffres consolidés, en particulier du fait de la non-intégration des budgets annexes dans la présentation du budget. Cette situation, a estimé le sénateur, n'est pas de nature à permettre une visibilité financière correcte sur les finances locales.
M. Philippe Dallier , rapporteur, ayant estimé qu'il était très difficile de savoir si un investissement, réalisé en situation d'intercommunalité, aurait été réalisé hors intercommunalité, M. Jacques Oudin a rétorqué qu'il était possible de savoir si l'intercommunalité s'était accompagnée d'une augmentation de l'investissement. Il a ajouté qu'il fallait toutefois pour ce faire une analyse précise de l'évolution des coûts.
Interrogé par le rapporteur sur la question des pays, M. Jacques Oudin a déclaré que le pays ne constituait pas une espèce de « superintercommunalité ». Pour l'ancien sénateur, le pays représente tout d'abord le bon périmètre pour le schéma de cohérence territoriale (SCOT). Il a rappelé à ce propos qu'il avait été, dans la loi de 1992, le grand promoteur du programme SAGE de gestion des eaux, basé sur un territoire pertinent ne souffrant pas de contestation. Selon lui, dans le SCOT, « il y a tout », notamment de l'urbanisme et la détermination des différents zonages, et, en cela, le pays doit être « un SCOT, plus une charte de développement ». Il lui faut aussi un territoire pertinent qui, a estimé M. Jacques Oudin , se dégagera de lui-même.
L'ancien sénateur a ensuite affirmé qu'on ne devait pas tant jouer sur la dotation globale de fonctionnement (DGF), l'intercommunalité étant faite pour l'investissement et non pour le fonctionnement. Dans cette mesure, il faut, selon M. Jacques Oudin , valoriser la fonction d'investissement.
Il a d'ailleurs appelé de ses voeux une contractualisation entre le pays, l'intercommunalité et la collectivité supérieure -département ou région- autour de l'investissement. Il s'est demandé si l'État n'aurait pas intérêt à diminuer le soutien au fonctionnement et à augmenter d'autant l'investissement. Un tel rééquilibrage aurait en effet le double mérite d'obliger les intercommunalités à réfléchir à la question du fonctionnement et de dynamiser les rapports contractuels entre intercommunalité, région, département et État.
M. Yves Fréville a alors considéré qu'un coefficient d'intégration fiscale (CIF) positif pour une communauté de communes devrait être contrebalancé par un CIF négatif pour les communes-membres de cette communauté.
M. Jacques Oudin a, pour terminer, affirmé que la suite du développement de l'intercommunalité devait passer par l'instauration du suffrage universel pour l'élection des conseillers communautaires, par un arrêt du soutien du fonctionnement au profit d'un basculement sur l'investissement et la contractualisation, ainsi que par une valorisation de la notion de SCOT.
Il a enfin soulevé les problèmes posés par la coexistence de deux administrations en matière financière -la DGCL et la DGCP-, d'autant qu'elles ne parviennent pas aux mêmes résultats dans leur dépouillement des comptes administratifs, et que d'autres organismes, tels que la direction générale des impôts (DGI), l'assemblée des communautés de France (ADCF) ou l'assemblée des départements de France (ADF), font le même travail.
M. Jacques Oudin a suggéré que ce soit le Sénat qui soit chargé de ce dépouillement, et qu'une loi soit votée sur ce sujet.
Compte-rendu du 9 mai 2006
Audition de M. Jean-Luc BOEUF , directeur général des services de la région Franche-Comté, membre du comité d'experts de l'Observatoire de la décentralisation.
En introduction, M. Philippe Dallier, rapporteur , a rappelé qu'il cherchait à savoir si le paysage institutionnel tel qu'il existe aujourd'hui devait être analysé comme un aboutissement de l'organisation territoriale ou une étape transitoire. Il a fait remarquer qu'à la suite d'une succession de rapports sur le sujet plutôt négatifs, il souhaitait y voir plus clair et savoir comment rationaliser pour atteindre une meilleure efficacité et éventuellement supprimer une ou deux couches du « millefeuille ».
M. Jean-Luc Boeuf a souhaité apporter un éclairage personnel et concret, ayant travaillé dans différentes collectivités : la commune de la Roche-sur-Yon, le département de l'Eure et enfin la région Franche-Comté.
Sur la question de savoir s'il y avait un échelon territorial de trop, M. Jean-Luc Boeuf a considéré qu'une spécificité accompagnait chaque niveau territorial. Il a ajouté que la commune constituait l'échelon de référence quelle que soit sa taille (« on se tourne toujours vers le maire »), l'intercommunalité, acteur majeur, qui montait en puissance connaissait un problème de représentation et de lisibilité, le département échelon naturel des solidarités territoriales mais dont la marge de manoeuvre est limitée (« il s'occupe des citoyens de la naissance à la mort »), et la région, en phase de lente émergence (« Thouret disait en 1790 qu'il préférait quatre-vingts petits roquets à quinze gros chiens loups »), représentait l'axe central de l'aménagement du territoire et du développement économique.
M. Jean-Luc Boeuf a considéré, d'un point de vue pragmatique, qu'il n'y avait donc pas d'échelon administratif en trop. Il n'a souhaité ni ériger l'intercommunalité en niveau de collectivité locale élue au suffrage universel direct, ni supprimer un niveau existant de collectivités, chacun ayant sa spécificité et il a constaté que même si l'intercommunalité avait une assise assez ambiguë, son poids financier était supérieur à celui des régions.
M. Jean-Luc Boeuf a émis une proposition de coupler l'intercommunalité et le conseil général, en faisant de ce dernier un « conseil des communautés », réglant ainsi sa représentation sans stigmatiser le département.
M. Philippe Dallier a recentré le débat sur la question de savoir si la dépense publique était efficace ou non et comment la rationaliser au mieux.
Sur la question des économies d'échelle, M. Jean-Luc Boeuf a précisé qu'il était possible de constater des économies d'échelle si, à qualité de service inchangée, le coût des prestations baisse grâce à l'utilisation plus efficace des facteurs de production que permet l'organisation du service sur un plus grand territoire. Or, il a estimé qu'il était difficile de les évaluer dès à présent, les premières structures ayant été créées depuis 2000.
Il a ajouté que pendant les premières années, un rodage devait se faire, souvent au détriment des économies d'échelle.
Il a enfin pointé la mauvaise définition des « coûts » et leur sous-évaluation lors du transfert des compétences communes-EPCI.
Prenant l'exemple des contrats de projet, il a mis en évidence les difficultés liées à l'augmentation du nombre d'interlocuteurs, les villes-centres ayant parfois du mal à se départir de certaines de leurs compétences.
Sur la question de l'évolution de la DGF intercommunale, il a constaté qu'après l'abondement exceptionnel lié à la loi Chevènement, il n'y a pas eu de véritable effort de l'Etat et la progression modeste des concours à l'intercommunalité a eu pour contrepartie une ponction sur les dotations communales.
Il a ajouté que la création de nouveaux EPCI devait bientôt se tarir et donc alléger les tensions pesant sur la DGF.
Enfin, il a estimé difficile de porter un jugement sur l'évolution de la DGF intercommunale, l'enveloppe ayant augmenté en volume parallèlement aux périmètres des intercommunalités.
Il a fait remarquer que le fait d'avoir joint à la DGF intercommunale l'ancienne compensation salaire et d'avoir neutralisé une partie de l'augmentation de la DGF au profit de la DSU des communes, c'était la fin de la relation de solidarité.
Sur la question des « pays », M. Jean-Luc Boeuf a reconnu qu'ils constituaient un cadre souple d'organisation, qui ne constituait pas un échelon administratif supplémentaire, et que les pays pouvaient prendre plusieurs formes juridiques possibles, et qu'ils pouvaient exercer des compétences à travers des contrats de plan passés avec la région.
Il a noté que les collectivités locales ne collaient plus forcément à la réalité socio-économique du territoire et que le « pays » présentait une cohésion géographique, culturelle, économique et sociale réelle. Il a ajouté que le « pays » comme territoire de projet était une réalité en Franche-Comté.
Actuellement, il a recensé 340 « pays » pour lesquels 166 contrats de plan ont été signés.
S'il a constaté que ces « pays » étaient une réussite quantitative, leur avenir étaient encore incertain. Et selon lui, c'est le seul échelon qui pouvait être amené à disparaître.
Il a déclaré que le piège commençait à se refermer dès la création de postes d'appui, de permanents comme les animateurs de pays, tous ces projets pouvant être portés par d'autres structures.
M. Philippe Dallier a fait remarquer que le PLU devait être compatible avec le SCOT et, selon l'avis de M. Jacques Oudin, ancien sénateur, le SCOT devait être calqué sur les « pays ». Par contre, il a ajouté que M. Alain Gérard, sénateur du Finistère, avait un périmètre de SCOT différent du « pays » à Quimper. S'il a noté qu'il existait des exemples vertueux où tout coïncidait, dans d'autres rien ne se chevauchait entraînant une mauvaise lisibilité.
Selon lui, le « pays » n'avait de sens que s'il correspondait avec le périmètre du SCOT, mais le « pays » n'étant pas un véritable échelon de collectivité locale, sa disparition n'apporterait rien que quelques économies et ne suffirait pas à rationaliser le paysage, contrairement à la suppression d'un véritable échelon territorial.
Cependant, il a ajouté qu'un rapport d'information sénatorial en cours allait dans un tout autre sens et s'apprêtait à donner une évaluation bienveillante du « pays » en tant qu'échelon d'administration et de concertation, ce qui lui paraissait regrettable.
Sur la question du coût de l'intercommunalité, M. Jean-Luc Boeuf a considéré que les dépenses d'investissement ont explosé depuis 1999, par rapport aux dépenses en personnel. Il a noté que le poids financier de l'intercommunalité était plus important que celui des régions.
Il a rappelé que l'intercommunalité se traduisait davantage par une amélioration du service rendu pour un coût supplémentaire moindre que si la même démarche avait été menée séparément par chacune des communes, plutôt que par une réduction nette des dépenses du territoire à niveau de service inchangé.
Par ailleurs, il a déploré un partage des compétences parfois inopérant, au point d'entraîner un foisonnement d'interventions financières et une dilution des responsabilités.
M. Philippe Dallier a regretté également le peu de clarté des règles du jeu et a souhaité les voir modifier. Considérant qu'en dessous d'une certaine taille, la collectivité était en position critique, il a insisté pour que l'Etat fixe de nouveaux seuils, avec une marge de manoeuvre selon les situations locales. Il s'est interrogé de savoir si le département était encore pertinent ou s'il fallait faire évoluer la région.
M. Jean-Luc Boeuf a répondu qu'il était facile de réaffecter les compétences du département aux autres échelons comme par exemple les compétences sociales à l'échelon de proximité et la voirie à la région.
M. Philippe Dallier a estimé que ces « autres échelons » exerçaient déjà un certains nombre de compétences relevant du département, même si c'est ce dernier qui « réglait la facture ».
M. Jean-Luc Boeuf a rappelé sa proposition de lier le département et l'intercommunalité, en faisant du conseil général le représentant des intercommunalités, ce qui correspondrait à une façon habile de rationaliser sans supprimer le département.
M. Philippe Dallier a douté que la démocratie participative au sein de l'intercommunalité puisse régler la question de la rationalisation des dépenses et soit source d'une meilleure efficacité.
En réponse à la question de M. Philippe Dallier sur la progression des dépenses de fonctionnement, M. Jean-Luc Boeuf a noté que l'exercice des compétences transférées s'est développé sur des territoires plus vastes. Il a remarqué que cela avait eu des conséquences sur le volume des charges, aussi bien de personnel que de moyens des services. Par ailleurs, il a souligné que les transferts de charges n'avaient pas fait l'objet d'un traitement homogène et cohérent. Enfin, il a estimé que les charges transférées étaient parfois sous-évaluées au profit des villes-centres et au détriment du groupement intercommunal.
Il a ajouté un élément correctif aux dépenses publiques des collectivités locales, il s'agit du taux d'endettement des collectivités locales qui est en baisse depuis 10 ans. S'il a noté qu'elles se sont désendettées de 20 milliards €, dans le même temps, l'endettement de l'Etat s'est accru de près de 400 milliards €. Il a aussi proposé de limiter le nombre de participants au cofinancement d'un projet à trois, afin d'éviter les délais et l'accumulation du travail administratif inutile.
Compte-rendu du 10 mai 2006
Audition de M. Hervé MARITON , député de la Drôme, maire de Crest, auteur du rapport « Evolution de la fiscalité locale : le contribuable se rebiffe » (n° 2436, Assemblée nationale, 12 e législature).
M. Philippe Dallier, rapporteur , a ouvert l'audition en rappelant que, par le rapport sur l'intercommunalité dont la rédaction lui a été confiée, il recherchait par quels moyens rendre la dépense publique plus efficace.
M. Hervé Mariton a tout d'abord rappelé les conclusions des travaux -auxquels il a participé- de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur la fiscalité locale. Il a fait référence à l'une des courbes, figurant dans les annexes du rapport issu des travaux de la commission et retraçant l'évolution des dépenses des communes avant et après leur entrée en intercommunalité. Une inflexion assez nette de la courbe montre qu'il y a eu, en 1993/1994, un infléchissement notable dans l'évolution des dépenses communales. Toutefois, le résultat cumulé, pour les communes entrées en intercommunalité, reste supérieur à la poursuite de la droite initiale.
Il s'est déclaré frappé de ce que le public reste globalement insusceptible d'entendre quelque critique que ce soit relativement à l'intercommunalité. Il reste, selon le député, extrêmement difficile d'entrer dans le débat. Le politiquement correct interdit d'entrer dans l'analyse.
Il a estimé que les auditions menées par la commission d'enquête avaient été très révélatrices sur le constat et l'analyse des causes. Elles ont en effet permis de montrer que l'intercommunalité avait signifié un élargissement de l'éventail des services proposés à l'usager.
Si, selon M. Hervé Mariton , l'intercommunalité a beaucoup de vertus, elle n'a pas permis de réaliser les économies d'échelle et la mutualisation des moyens qu'on avait pu espérer. Le discours tenu a été celui d'une offre de services nouveaux et non d'une prise en charge commune face à des besoins constants. D'ailleurs, le bonus de dotation globale de fonctionnement (DGF) a été absorbé pour moitié par des charges structurelles supplémentaires.
En ce qui concerne l'évolution des personnels, M. Hervé Mariton a indiqué que les employés des établissements intercommunaux étaient passés de 99 000 en 1993 à 159 000 en 2002, tandis que, dans le même intervalle, les personnels communaux passaient de 1 069 000 à 1 200 000. Il n'y a donc pas eu de baisse, ni même de stagnation, même si l'évolution reste modeste (de l'ordre de 0.5 à 3 % par an). Au-delà de l'effet nombre, un effet assez lourd s'est fait jour, lié aux conditions de rémunérations et à l'évolution statutaire.
Le député a par ailleurs évoqué les problèmes de recrutement qui sont apparus avec l'intercommunalité. Les personnels des communes tendent en effet à désirer rejoindre l'intercommunalité, plus attractive sur le plan des conditions de rémunération comme de l'organisation du travail.
Analysant les causes de l'absence d'économies d'échelle, M. Hervé Mariton a cité, outre l'élargissement de l'éventail des services, un effort notable des communes en vue d'améliorer la qualité des services rendus. Cette poursuite de la qualité est, a estimé le député, un palliatif à la réduction des marges de manoeuvre.
M. Philippe Dallier , rapporteur, a alors suggéré qu'il aurait été sage de diminuer la DGF communale au profit de la DGF intercommunale.
M. Hervé Mariton a approuvé cette piste de réforme et il a alors évoqué la « circulaire Hortefeux » dont la rédaction lui paraît assez « périlleuse », en ce qu'elle procède d'une vision quelque peu « déterministe ». La circulaire Hortefeux, en cherchant à résorber les zones blanches et à obtenir des tailles d'intercommunalité plus importantes, semble en effet négliger l'impératif de liberté et oublier que la pertinence du territoire ne signifie pas nécessairement une taille plus importante.
Il a ensuite déploré l'extrême faiblesse du contrôle de légalité à l'égard de l'intercommunalité. Il a appelé de ses voeux une réflexion sur la question de l'intérêt communautaire et une application plus rigoureuse du contrôle de légalité.
Il a qualifié l'organisation des services comme la clé essentielle du succès de l'intercommunalité et il a évoqué les exemples de Quimper, de Strasbourg et de Mulhouse qu'il a qualifiés de « très intéressants ».
Le député a par ailleurs déclaré que l'État avait, sur les finances locales, une politique de transfert, mais pas une politique de contenu de ces transferts. Selon M. Hervé Mariton , l'État n'a pas, en cela, à proprement parler de politique des finances locales. Les paramètres devraient en effet, a-t-il observé, varier en fonction des réponses que donnent les collectivités aux suggestions qu'il fait.
M. Hervé Mariton a par ailleurs estimé que les éléments indemnitaires devaient être pris en compte. Il a déploré que le nombre d'EPCI puisse se comprendre par le fait que se trouve ainsi étendue la faculté d'offrir des indemnités aux élus locaux au travers de la multiplication des présidences et de vice-présidences. Il s'est déclaré favorable à la fixation d'un quota de sièges pouvant être indemnisés, et à la substitution à l'actuel système, fondé sur un « consensualisme coûteux », d'un système « PLM ». Le député a toutefois reconnu qu'un tel système serait difficile à gérer dans les petites communes.
M. Yves Fréville , sénateur, est alors intervenu en déclarant que des mauvaises habitudes de comportement avaient été prises entre 1995 et 2000, quand les moyens financiers ont crû avec l'extension de la taxe professionnelle.
M. Philippe Dallier , rapporteur, a alors demandé à M. Hervé Mariton quelle simplification l'on pouvait imaginer face au millefeuille institutionnel, et s'il estimait qu'une telle simplification était à même de rationaliser les dépenses.
M. Hervé Mariton a alors regretté qu'il n'y ait pas eu de décision sur le pays, alors même qu'une telle décision paraissait mûre. Selon lui, il convient de supprimer les pays.
Le député a toutefois affirmé que, plutôt que de chercher à supprimer tel ou tel échelon, il fallait essayer de distinguer des coeurs de compétences. En effet, en distinguant ainsi entre ce qui relève du coeur de compétence d'une collectivité et ce qui n'en relève pas, l'on pourrait amener ladite collectivité à devoir se justifier au moment du vote budgétaire. M. Hervé Mariton a toutefois précisé qu'une région ayant massivement investi en dehors de son coeur de compétence n'en est pas pour autant illégitime, mais qu'il serait bon qu'en aient conscience les membres de son assemblée délibérative, ainsi que les citoyens. Il a souhaité toutefois que chaque échelon s'en tienne à son coeur de compétence et évite, à l'instar de régions, d'intervenir dans les relations internationales et la coopération décentralisée par exemple ; il a suggéré qu'un critère de concentration de dépenses sur les compétences essentielles soit pris en compte pour la DGF.
M. Yves Fréville a alors déclaré que nul n'était capable de savoir ce que les intercommunalités faisaient aujourd'hui, eu égard non seulement à l'existence de budgets annexes, mais aussi à la présentation même du budget principal.
S'agissant de la « fiscalité ménages », M. Hervé Mariton a observé qu'il fallait imaginer des freins pour dissuader les EPCI d'y avoir recours, voire se demander si son interdiction pure et simple pour les nouveaux EPCI ne devait pas être envisagée. M. Philippe Dallier a toutefois estimé qu'il était difficile d'être aussi radical, et qu'une telle évolution serait susceptible de déboucher sur des inégalités.
Sur l'efficacité de la dépense publique, M. Hervé Mariton a déclaré qu'il fallait obliger les collectivités à avoir une démarche de performance, sans pour autant nécessairement leur « plaquer » les critères et les indicateurs définis par la LOLF ce qui serait totalement disproportionné. Il apparaît selon lui nécessaire de disposer d'éléments de comparaison, d'un étalonnage -assortis d'une publication régulière présentant les résultats-, et de déterminer les conséquences des transferts de l'État sur les collectivités.
Quant à l'entité qui évaluera les performances, si M. Hervé Mariton a estimé qu'il serait un peu « curieux » qu'il s'agisse de l'État, il a ajouté qu'il ne serait pas non plus forcément très heureux qu'il s'agisse des juridictions.
Pour le député, si l'on a à ce jour ni la capacité ni la légitimité pour introduire de manière massive une telle démarche de performance, il n'en demeure pas moins qu'il peut être intéressant et pédagogique de le faire à la marge.
Le rapporteur étant revenu sur la question de l'empilage des couches, en regrettant notamment que, sur le terrain, les communes assument parfois la réalité de certaines compétences dévolues au département, comme en matière de revenu minimum d'insertion (RMI), M. Hervé Mariton a assuré que l'évolution des financements européens, les effets de l'acte II de la décentralisation et les transferts des personnels allaient contribuer à clarifier les choses, en ce que ces différents paramètres laisseront moins de marge aux départements pour aider les communes.
Ainsi du transfert des routes nationales aux départements : l'État ne sollicite plus les régions sur le réseau national existant, et considère que les départements pourront continuer d'entretenir seuls le réseau national transféré. Se produit une simplification de fait sur le thème de la raréfaction des moyens.
M. Philippe Dallier , rapporteur, a alors souligné le manque de lisibilité qu'une telle situation signifiait pour le citoyen et estimé qu'il pouvait en résulter une impression d'inutilité de certaines dépenses, impression, selon lui, peu saine.
M. Yves Fréville a alors fait part de son expérience en expliquant que, dans les régions de « microcommunes », le conseil général, très dépensier, jouait de facto un rôle d'intercommunalité, et rendait donc cette dernière moins nécessaire. L'intercommunalité a, dès lors, une toute autre fonction, à savoir une fonction de péréquation de la taxe professionnelle. C'est d'ailleurs, a-t-il expliqué, ce qui l'a rendue très populaire dans l'Ouest de la France.
Dans ces régions, a expliqué le sénateur, la dotation de solidarité communautaire, employée au service du développement économique, a conduit à une rationalité dans la gestion de l'espace sur le plan économique. La dimension de services supplémentaires n'est apparue que postérieurement et est restée secondaire. La montée en puissance de la taxe professionnelle unique et l'expansion économique ont permis, selon M. Yves Fréville , que l'intercommunalité endosse cette fonction très originale.
Le rapporteur a ensuite demandé à M. Hervé Mariton s'il estimait que la notion de canton avait encore un sens.
Après avoir salué la pertinence de la question, M. Hervé Mariton a répondu que, dans sa circonscription, l'intercommunalité n'était pas toujours collée au canton, ce qui tendait à « introduire une fausse monnaie » et à semer la confusion dans la détermination des responsabilités. Il a par ailleurs estimé que la carte cantonale devait être corrigée de manière à tenir compte des rattachements et autres découpages.
M. Yves Fréville s'est alors demandé si le conseil général ne devrait pas devenir le Sénat des présidents d'intercommunalités du département, dans la mesure où se posent de vrais problèmes quand le conseiller général n'est pas président de la communauté de communes ; selon lui, dans ce cas, le conseiller général est en totale apesanteur.
M. Hervé Mariton a alors précisé qu'il avait eu l'idée de caler la carte de l'intercommunalité sur la carte cantonale. L'exécutif cantonal devrait, a-t-il expliqué, être l'exécutif de l'intercommunalité. MM. Philippe Dallier et Yves Fréville ont salué l'intérêt de cette proposition, tout en considérant qu'elle était susceptible de poser des problèmes de cohabitation et de mettre, parfois, l'élu en position délicate.
Sur la question des cantons, M. Yves Fréville a ajouté qu'il existait désormais une forme d'intercommunalité supracantonale, assimilable au pays, et M. Hervé Mariton , observant que la « circulaire Hortefeux » tendrait à généraliser ces situations, a mis en garde contre les effets pervers qui risquent de se multiplier en cas de fusion d'intercommunalités.
M. Hervé Mariton , approuvé par M. Yves Fréville , a ensuite déclaré qu'il y avait eu un profond renouvellement des élus locaux ruraux et qu'il s'agissait désormais de néo-ruraux, très impliqués dans la vie de la municipalité comme dans celle de l'intercommunalité. Ces nouveaux élus sont, selon le député, favorables à la mise sur pied de nouveaux services toujours plus nombreux, quitte à devoir payer un supplément d'impôts. Ils sont plutôt dépensiers, si bien que, même si le niveau intercommunal pèse très lourd pour leur commune, dans l'absolu, les taux leur paraissent tout à fait acceptables.
Synthétisant ses propositions, M. Hervé Mariton a déclaré qu'il fallait davantage de clarté dans la répartition des compétences et une plus grande rigueur dans l'exercice du contrôle de légalité. Il a ajouté qu'il ne fallait pas laisser accroire que l'intercommunalité est une collectivité, et qu'il fallait s'efforcer d'éviter tout effet hiérarchique. Ce « principe essentiel de la décentralisation » est constamment menacé et doit être sans cesse réaffirmé, selon le député qui a par ailleurs critiqué le laxisme de l'État face à une certaine tendance des structures intercommunales à supplanter les communes et à s'approprier leurs compétences.
M. Yves Fréville , sceptique quant à la possibilité de contrôler la répartition des compétences entre communes et intercommunalités, s'est alors prononcé en faveur d'une plus grande rigueur sur le plan financier, et s'est demandé si l'ensemble de la DGF (communes et intercommunalité) ne devait pas être calculée par zones, tout en restant déterminée par l'État dans sa répartition.
M. Hervé Mariton a réagi à ces propos en déclarant qu'il était en tous les cas plutôt rétif à la territorialisation de la DGF, qui fait courir le double risque du kidnapping des moyens par l'intercommunalité et de la dépendance des communes à l'égard de la structure intercommunale.
Compte-rendu du 10 mai 2006
Audition de M. Michel PIRON , député de Maine-et-Loire, président de la communauté de communes des Coteaux-du-Layon, auteur du rapport « Gouverner en France : quel équilibre territorial des pouvoirs » (n° 2881, Assemblée nationale, 12 e législature).
M. Philippe Dallier, rapporteur , a ouvert l'audition en rappelant qu'au travers du rapport sur l'intercommunalité qu'il rédige au nom de l'Observatoire de la décentralisation, il cherchait à savoir, au nom de l'efficacité de la dépense publique, si les « couches » du millefeuille institutionnel sont, ou non, trop nombreuses et, le cas échéant, vers quel type de simplification il convient de se diriger. Il a expliqué que les différentes personnes auditionnées avaient, sur ces questions, des points de vue relativement divergents, et que la localisation géographique de l'élu paraissait à cet égard assez déterminante.
M. Michel Piron a tout d'abord déclaré qu'il convenait de distinguer la question des structures de celle des moyens de ces structures.
Sur les structures, il a précisé que, dans le cadre de la rédaction du rapport sur l'équilibre territorial des pouvoirs qu'il a présenté à l'Assemblée nationale, il avait pu se rendre compte des efforts menés par les autres pays européens pour simplifier leur organisation administrative territoriale. Deux pays latins (l'Italie et l'Espagne) et deux pays nordiques (Grande-Bretagne/Écosse et Suède) ont en effet été passés au crible. L'Allemagne a été écartée de cette étude comparative, en dépit de l'intérêt qu'il porte, à titre personnel, à l'organisation des pouvoirs dans ce pays. La mission craignait en effet un procès d'intention immédiat, lié à ce que l'Allemagne est un pays fédéral.
S'agissant de la France, M. Michel Piron a déclaré qu'elle était l'un des pays les plus immobiles. Selon lui, en effet, lorsqu'on essaie, en France, de s'attaquer aux structures, on le fait toujours par addition, jamais par soustraction et très rarement par substitution. Cela est dû, selon le député, à un certain manque de courage politique.
On aboutit à un millefeuille, à un paysage complètement illisible du point de vue institutionnel et parfois financier.
M. Yves Fréville , sénateur, a alors ajouté qu'ainsi que l'a montré le rapport qu'il a rédigé sur le rôle de l'Etat dans la fiscalité locale, cette dernière est au moins aussi compliquée qu'avant la Révolution française.
A propos de l'architecture et de l'articulation des pouvoirs, M. Michel Piron a déclaré avoir souvent entendu que la situation des pouvoirs en France, avec ses trois niveaux de collectivités, n'était pas si originale. Mais il s'agit, selon lui, d'un tour de passe-passe par lequel, en jouant sur la différence entre collectivités locales et collectivités territoriales, on fait l'impasse sur les structures intercommunales. Il y a, en fait, a fait observer M. Michel Piron , quatre étages d'administration locale qui ont des moyens et se dotent de moyens. En cela, la France est dans une situation profondément originale, si bien que l'on peut y voir, en soi, une exception française.
M. Michel Piron a toutefois ajouté que la loi Chevènement de 1999 avait, dans ce contexte, été une petite révolution locale, en ce qu'elle a changé non seulement le degré mais aussi la nature de l'intercommunalité.
Se demandant quelles compétences exclusives il convenait d'attribuer à chacun des échelons de l'organisation administrative territoriale, M. Michel Piron a évoqué une certaine tendance du pouvoir à s'étendre au-delà de la sphère dans laquelle il était autorisé à se déployer. Observant que les contenus de pouvoirs envisageables pour une structure donnée étaient très variables selon le poids démographique de ladite structure, il a proposé que, si l'on n'arrive pas à simplifier le paysage administratif local par le biais des compétences exclusives, il faut le simplifier via deux couples : d'une part, le couple commune/intercommunalité, et, d'autre part, le couple département/région.
S'agissant de la relation entre commune et intercommunalité, elle est, selon M. Michel Piron , nécessaire et doit être soigneusement gérée. En cela, les comptes consolidés annuels constituent une nécessité absolue.
Il a indiqué qu'en tant que président de communauté de communes, il avait voulu imposer des règles de vertu. Ainsi, le bulletin municipal précise, chaque fois que la communauté de communes s'approprie une compétence, de quel montant elle décharge la commune.
A une question du rapporteur, le député a répondu que les augmentations de coûts, qui se sont notamment faites jour au début de l'intercommunalité, avaient été compensées par des baisses d'un montant équivalent.
Il a indiqué que, depuis une dizaine d'années, des tableaux comparatifs étaient publiés dans sa communauté de communes, permettant en conséquence l'établissement de comparaisons entre l'exercice des compétences par les communes et celui par l'EPCI.
M. Michel Piron , approuvé par M. Yves Fréville , a déclaré regretter ne pas retrouver ces grands tableaux comparatifs dans les bulletins des grandes communautés d'agglomération. Leur publication est, a-t-il estimé, très importante.
S'agissant du couple commune/intercommunalité, M. Michel Piron a affirmé que les 36 000 communes n'étaient pas tenables à terme, sans qu'il soit pour autant possible de les supprimer.
Estimant que ces blocages nécessitaient de « requestionner » les questions, il s'est demandé si, pour garder le besoin de proximité extrême et en même temps en finir avec la « pseudodémocratie locale sans aucun moyen », l'on ne pourrait pas revisiter le statut des communes associées.
Des communautés composées de communes associées permettraient en effet de conserver une certaine visibilité locale tout en renforçant l'intercommunalité. Il n'est, selon M. Michel Piron , plus raisonnable de maintenir des communes hors du jeu de l'intercommunalité alors que cette dernière s'empare de plus en plus de choses. M. Piron a par ailleurs dénoncé une surreprésentation des élus de communes rurales qui, paradoxalement, ne favorise pas le bon exercice de la démocratie locale.
Rappelant qu'aujourd'hui, en milieu rural, le mot d'ordre est à l'agrandissement des communautés, M. Michel Piron a déclaré que le critère géographique ne devait pas être abandonné au profit du seul critère économique. En effet, certaines communautés s'agrandissent inconsidérément et ne sont pas durables.
Il a suggéré que soit envisagée l'élection au suffrage universel, non de la totalité des conseillers communautaires, mais du seul président de la communauté. Il faut en effet, a-t-il estimé, s'inspirer de ce qui se passe dans les pays voisins et dont la culture est similaire, tels l'Italie, et donc envisager l'élection du président de la communauté au suffrage universel. Eventuellement, pour faire accepter la chose, cette élection pourrait avoir lieu en même temps que celle du conseil général. On gagnerait, de la sorte, une élection, puisque c'est bien entendu le même homme qui serait élu président et qui siègerait au conseil général.
En milieu urbain, M. Michel Piron s'est demandé pourquoi l'on ne pourrait pas envisager un schéma différencié plutôt qu'un schéma identique sur tout le territoire.
Si le département a vocation à rester, il doit être l'assemblée des représentants des intercommunalités.
Quant aux régions, il s'est déclaré convaincu qu'elles étaient trop petites. Elles devraient, selon lui, être deux fois plus grandes pour pouvoir trancher sur les questions de routes ou en matière économique. De même qu'elles n'ont pas une taille leur permettant d'arbitrer sur les universités ou sur la santé.
Il faudrait, a estimé le député, deux fois moins de régions, mais de taille deux fois plus grandes, avec toutefois des spécificités pour les régions Ile-de-France et Rhône-Alpes.
S'agissant des départements, ils ont un rôle à jouer dans ce domaine de proximité qu'est le social. Celui-ci, en effet, ne saurait être traité à trop de distance, selon M. Michel Piron , pour lequel le département peut, par le biais des missions de proximité, retrouver une vraie légitimité.
Après avoir évoqué le problème des TOS et regretté qu'ils n'aient pas été transférés à une seule structure de gestion, dans la mesure où ils exercent le même métier qu'ils soient dans un collège ou dans un lycée, M. Michel Piron a suggéré que, pour éviter les redondances entre régions et départements, les élus régionaux sont d'abord des élus départementaux (les départements enverraient leurs représentants au conseil régional) d'autant que le mode de scrutin des élus régionaux n'est pas très compréhensible. Il a toutefois reconnu que beaucoup verraient dans un tel système un recul de la démocratie.
Il a ensuite déclaré croire à des conférences nationales thématiques réunissant les vice-présidents en charge des dossiers, à des conférences techniques permettant de mettre le doigt sur les redondances. Il a, en revanche, déclaré ne croire ni aux financements exclusifs ni aux compétences exclusives, et a estimé qu'il fallait limiter le nombre de financements croisés, ne serait-ce qu'au regard des coûts d'instruction.
Par exemple, les communes ou communautés devraient cofinancer les projets soit avec les départements, soit avec les régions, ou soit avec l'Etat, soit avec l'Europe. La réflexion sur l'élimination des redondances en serait facilitée ; il conviendrait de limiter à trois le nombre d'intervenants au financement.
M. Michel Piron a également posé la question du champ réglementaire. Selon lui, l'uniformisation de la réglementation génère énormément de dépenses. Rappelant qu'on légifère dans les régions italiennes, les communautés espagnoles ou en Ecosse, le député a déclaré qu'un champ réglementaire redonné aux régions permettrait une légitime variation, d'une région à l'autre, de la déclinaison des compétences.
Il a ensuite tenu à apporter une nuance sur la distinction entre commune et communauté. Il a expliqué avoir proposé que les communautés ne prennent en charge que 70 % des investissements, les 30 % restants constituant une sorte de ticket modérateur communal.
M. Yves Fréville a alors fait part de son enthousiasme pour les formules développées par le député. Il a jugé absurde que, par exemple, l'on mette sur le même plan des départements tels que le Nord et la Lozère.
M. Michel Piron a, en conclusion, affirmé qu'à confondre égalité et identité, l'on risquait de déboucher sur l'uniformité. Il a rappelé que les trois concepts n'étaient pas synonymes.
Compte-rendu du 10 mai 2006
Audition de M. Pierre GIRARD , responsable des collectivités locales à la Caisse nationale des caisses d'épargne.
M. Philippe Dallier, rapporteur , a ouvert l'audition en rappelant que l'étude sur l'intercommunalité dont il était le rapporteur avait pour but de rechercher si l'organisation territoriale actuelle était pertinente ou si, au contraire, l'on se situait dans une phase intermédiaire. Il s'interroge également sur la question de savoir si, avec la mise en place de l'intercommunalité, la dépense publique est optimisée.
Après avoir rappelé son parcours professionnel comme expert des finances locales et des collectivités locales, M. Pierre Girard a évoqué ses responsabilités au sein de la Caisse nationale des caisses d'épargne et a expliqué l'approche des banques envers les collectivités locales, leur développement économique et leur solvabilité.
En réponse à M. Philippe Dallier , qui a déclaré que les collectivités locales n'étaient jamais insolvables, M. Pierre Girard a signalé que si le risque d'insolvabilité était extrêmement faible, du point de vue des banques, le risque se situait en termes de temps dans le paiement des échéances.
Concernant le coût de l'intercommunalité, il a fait remarquer que l'Etat avait opté pour une démarche progressive mais très généreuse et que les économies d'échelle devaient être à ce jour relativisées ; le choix aurait pu être le suivant : « faire plus avec autant de moyens ou faire autant avec moins » ; force était de reconnaître que pour l'instant on faisait encore avec plus de moyens sans toujours faire plus pour le citoyen utilisateur.
M. Pierre Girard a noté qu'il n'y avait donc pas d'économies d'échelle dans un premier temps, et qu'il fallait attendre quelques années avant que l'intercommunalité acquiert son rythme de croisière. Il a insisté sur le facteur temps et a ajouté qu'il y avait même souvent des « deséconomies » dans un premier temps.
Concernant l'évolution des dépenses de fonctionnement, il a fait remarquer que selon le rapport rendu par la commission d'enquête à l'Assemblée nationale sur la fiscalité locale, il y avait une incomplète substitution entre les dépenses publiques communales et intercommunales, constatant qu'il y avait toujours une période de transition lors de la création des EPCI. De plus, il a noté que les communautés de communes faisaient souvent plus que ce qui leur avait été transféré.
M. Philippe Dallier s'est posé la question de savoir s'il y avait des abus et des dérives en la matière et sur quel critère devait se faire la redistribution fiscale.
M. Pierre Girard a noté que la redistribution fiscale était souvent mal utilisée et que le problème avait été soulevé par la Cour des comptes qui a estimé que le transfert des charges avait été sous-évalué, cette mauvaise évaluation étant à l'origine des difficultés de financement et de l'obligation de trouver de nouvelles ressources.
A ce sujet, il a signalé que l'article 86 de la loi Chevènement permettait de faire appel à des experts auprès des services techniques des communes en vue d'effectuer des analyses sur des propositions d'évaluation des charges transférées.
M. Philippe Dallier s'est interrogé sur le pourcentage de bonnes et mauvaises évaluations.
M. Pierre Girard a reconnu la difficulté de savoir par exemple combien coûtait le renouvellement d'un équipement.
Constatant les difficultés d'évaluation du coût complet des équipements transférés (en fonctionnement et en investissement), il a précisé que le législateur avait demandé à la commission locale d'évaluation des charges transférées (CLECT) de calculer un coût moyen global annualisé comprenant le coût de réalisation ou d'acquisition des équipements transférés ou, s'il est impossible de déterminer ces coûts, leur coût de renouvellement.
Il a ajouté que cette méthode du coût moyen global annualisé, qui repose sur une double approche, budgétaire et patrimoniale, consistait finalement à reconstituer un « amortissement élargi » destiné à permettre aux communautés de dégager les ressources nécessaires au financement du renouvellement du patrimoine transféré.
Or dans le cadre de la M14, il a rappelé que les communes ne pratiquaient pas l'amortissement sur les biens immobiliers et, considérant que les communautés n'amortissaient pas non plus ce type de biens, il sera difficile de faire accepter aux communes que les sommes déduites de leur attribution de compensation soient versées au fonctionnement de la communauté sans que celle-ci n'ait à intervenir sur les équipements transférés.
Il a également évoqué l'évaluation des transferts de personnel qui est aussi une source d'augmentation des dépenses et a regretté que l'aspect humain et psychologique de ces transferts ait été trop peu pris en considération.
M. Philippe Dallier a fait remarquer que de nombreux personnels avaient opté pour l'intercommunalité pour « souffler ».
M. Pierre Girard a modéré ce propos et a affirmé que les grosses structures avaient aussi attiré de nouvelles vocations, même s'il a reconnu que c'était plus difficile en milieu rural.
Il a ajouté que le fonctionnement inhérent à la structure intercommunale générait un minimum de frais de fonctionnement et qu'il fallait placer « le curseur » au bon endroit.
Il s'est opposé à toute mise en oeuvre impérative de l'unification des services ou de leur transfert et a insisté sur le fait que c'était une option offerte sur la base du volontariat.
Sur la question du périmètre pertinent, M. Pierre Girard a constaté que l'intercommunalité et les pays posaient la question du ressort territorial de la commune et du département, même si l'existence de ces collectivités inscrites dans la loi n'était pas mise en cause.
D'ailleurs, il a ajouté que suite à la circulaire du 23 octobre dernier, le sujet devait être traité par les préfets, qui devaient élaborer, d'ici au 30 juin 2006, des schémas départementaux d'orientation de l'intercommunalité. A ce propos, il a reconnu la place à part de la région parisienne.
Il a proposé de renverser le lien de causalité et de se poser la question de savoir comment les compétences allaient structurer l'intercommunalité, comment modeler le bassin de vie à travers l'aménagement de l'espace et le développement économique. Il a insisté sur cette notion de bassin de vie pour définir le périmètre pertinent.
S'il a admis que depuis 20 ans, on se reposait beaucoup sur la logique départementale, il a déclaré que c'était à l'Etat, relié par le préfet, de dire quel était l'intérêt général, le préfet pouvant imposer et s'opposer. A travers les signaux lancés par l'Etat, il a constaté un renforcement de l'intercommunalité.
Concernant les « pays », il s'est posé la question de savoir s'ils constituaient un échelon supplémentaire. Puis, il a ajouté que c'était un échelon souvent peu efficace à cause de ses trop nombreux membres.
En réponse à une question de M. Philippe Dallier sur leur avenir, il a considéré que la logique de projet devait être portée par des structures existantes, prenant l'exemple des syndicats mixtes.
Il a soutenu l'idée que la non pertinence d'un projet avec un territoire entraînait une grosse perte d'efficacité. Il a également regretté que la pérennisation de structures intercommunales soit parfois justifiée par le seul positionnement des élus au niveau local, voire l'attrait des indemnités, et a souhaité que des évolutions sensibles sur ce dernier point se profilent bientôt.
Concernant la DGF intercommunale, il a signalé que le nivellement était possible mais seulement vers le haut et la question se posait de savoir si l'Etat avait les moyens de le faire, le transfert de compétences obligatoires entraînant une DGF en conséquence.
Rappelant que la loi Chevènement avait eu le grand mérite de rendre possible, à travers la notion d'intérêt communautaire, une certaine progressivité dans le transfert des compétences, il a précisé que sur le plan financier, cette progressivité pouvait être d'une grande utilité, garantissant une certaine maîtrise de la montée en charges du budget communautaire et laissant au groupement le temps de s'adapter fonctionnellement à ses nouvelles responsabilités.
En tout état de cause, il a déclaré que si la DGF avait été, au cours de la dernière décennie, un puissant facteur de développement de l'intercommunalité, elle devrait, dans les prochaines années, peser de plus en plus dans les stratégies des communautés en matière de transfert des compétences.
Concernant l'évaluation du transfert des charges, il a reconnu que si la loi du 13 août 2004 avait apporté de nombreux facteurs de progrès, elle contenait également des effets pervers en germe en cas de mauvaise interprétation. Il s'est montré tout à fait favorable à une expérimentation sur la base du volontariat, avant d'aller vers une modification de la DGF et a surtout insisté sur le fait d'éviter des « allers-retours » sur ces recettes qui serait considéré comme plus perturbateur et décourageant pour l'intégration fiscale.
Sur l'intérêt communautaire, il a estimé que les transferts n'avaient été ni trop rapides ni trop tranchés, la plupart des compétences étant sécables. Il a considéré que la loi du 13 août précitée permettait aux élus de recentrer le débat sur l'intérêt communautaire et d'aller vers une nouvelle étape.
Enfin, à une question de M. Philippe Dallier sur la réorganisation territoriale du pays, il s'est montré favorable à une évolution progressive en la matière et à une simplification du paysage intercommunal.
Compte-rendu du 10 mai 2006
Audition de M. Charles de COURSON , député de la Marne, membre de l'Observatoire des finances locales.
M. Philippe Dallier, rapporteur , a ouvert l'audition en rappelant que le rapport qu'il rédige au nom de l'Observatoire de la décentralisation visait à rechercher si le millefeuille institutionnel comportait trop de couches, et, le cas échéant, lesquelles de ces couches il convenait de supprimer.
M. Charles de Courson a déclaré qu'il s'exprimait en son nom personnel et en tant que maire d'une commune de 360 habitants, membre d'une communauté de communes de 4 000 habitants.
Après que le rapporteur lui eut demandé comment il expliquait l'absence d'économies d'échelle depuis 1999, M. Charles de Courson a déclaré que dans la Marne, en zone rurale, existait une politique départementale extrêmement forte d'encouragement à l'intercommunalité, politique qui, par ailleurs, transcende les clivages politiques.
Le député a expliqué qu'un tiers de la population marnaise vivait dans des petites communes de moins de 250 habitants et que, dans ces conditions, il était impossible d'avoir des services compétitifs. D'ailleurs, aujourd'hui, sur 679 communes marnaises, seules 73 (soit 6 à 7 % de la population du département) ne sont toujours pas partie intégrante d'une intercommunalité et reçoivent donc des subventions de droit commun.
Selon M. Charles de Courson , la France est le dernier État à ne pas avoir réformé son organisation territoriale, et le développement de l'intercommunalité s'explique, justement, par l'échec de la réforme des communes. Cet échec, a déclaré le député, est imputable à l'existence du Sénat et au rôle que lui donne la Constitution de la V e République.
Le député a déclaré que chaque commune membre d'une communauté de communes devait être transformée en une section communale, avec un système électoral à l'allemande, et que c'était à ce prix qu'on obtiendrait la rationalisation administrative souhaitée.
M. Charles de Courson a estimé que l'organisation de l'intercommunalité à la française ne pouvait permettre d'obtenir des économies d'échelle.
M. Philippe Dallier , rapporteur, lui ayant demandé si le canton avait encore un sens, M. Charles de Courson a répondu par la négative et affirmé qu'il s'agissait d'une simple circonscription électorale.
M. Philippe Dallier s'est demandé s'il ne fallait pas réformer les collectivités en distinguant les fonctions exécutives et législatives, qui, pour le moment, sont fusionnées. Il a rappelé qu'une telle distinction existait déjà au niveau national, et M. Yves Fréville , sénateur, a ajouté que c'était également le cas, à l'échelon local, en Allemagne et en Angleterre.
M. Charles de Courson a ensuite déclaré qu'il n'y avait en tous les cas pas eu d'économies d'échelle du point de vue de la rémunération des élus.
Il a regretté que n'ait jamais été calculé le coût de la rémunération des élus en fonction de la strate de population et a dénoncé une certaine démagogie des élus nationaux qui n'ont pas eu le courage de s'attaquer au problème de l'augmentation du coût des élus. M. Charles de Courson a estimé qu'il fallait s'engager résolument dans la rationalisation des salaires des élus. Prenant l'exemple de sa commune, il a fait remarquer que pour les simples indemnités annuelles du maire et des adjoints - s'ils les prenaient - le budget s'élèverait à 26 000 euros, ce qui n'est pas défendable d'autant que des indemnités se cumulent souvent avec d'autres.
S'agissant de la rationalisation du personnel, la solution consistant à transférer purement et simplement le personnel de la commune-centre à la structure intercommunale, comme ce fut le cas à Strasbourg, est apparue un peu étrange à M. Charles de Courson , selon lequel chacune des communes devrait apporter sa contribution en termes de personnel et pas seulement la commune-centre.
M. Charles de Courson a expliqué l'augmentation des coûts par le fait que soient récemment apparus des besoins ne pouvant être satisfaits dans le cadre communal : le développement économique ou l'action culturelle peuvent ainsi difficilement s'inscrire dans le cadre communal.
Le rapporteur a ensuite demandé au député comment il analysait la progression des dépenses de fonctionnement et plus particulièrement celle des dépenses de personnel depuis 1999.
M. Charles de Courson a estimé que toutes les critiques adressées au coefficient d'intégration fiscale (CIF) étaient infondées. Il s'agit selon lui du « moins mauvais indicateur ». Le député a rappelé que l'intercommunalité avait révélé un certain nombre de besoins.
Il a indiqué que, dans la Marne, les zones urbaines étaient souvent moins bien intégrées que les zones rurales. Après que M. Yves Fréville eut précisé que le CIF s'élevait, en moyenne, à 27 % pour les communautés de communes à taxe professionnelle unique, et à environ 20 % pour les communautés de communes à fiscalité additionnelle, M. Charles de Courson a précisé que le taux de CIF pouvait varier de 15 à 75 %, et que, dans sa commune, il était de 93 %.
Pour M. Charles de Courson , le vrai problème est celui de la rationalisation des coûts de fonctionnement. A cet égard, la grande réforme à mener est celle de la transformation des communes en sections de l'intercommunalité.
Il a ensuite déclaré que la question du périmètre pertinent n'avait pas de sens : les communautés de communes les plus intégrées sont souvent les plus petites, et plus leur taille est importante, plus il est difficile de les gérer. Le périmètre est en fait, a estimé le député, fonction de chaque compétence. Un périmètre est pertinent au regard de la compétence exercée.
Par exemple, pour avoir un groupe scolaire intégré, il faut un minimum de 120-130 enfants, et donc, de 1 300 à 1 400 habitants. Mais, si la compétence considérée est celle du développement économique, le périmètre sera de facto plus étendu. Il n'y a donc pas de règle en matière de périmètre pertinent et il apparaît impossible de dessiner un schéma a priori.
Le rapporteur a alors demandé quelle simplification de l'organisation administrative territoriale il était possible d'envisager.
M. Charles de Courson a répondu que le pays était une structure dont le seul intérêt était de constituer un syndicat d'étude pour réfléchir ensemble sur un bassin de vie. Il a expliqué que c'était avec les pays que la région Champagne-Ardenne avait contractualisé. Autrement dit, c'est l'appartenance au pays qui permet d'avoir des subventions ; un pays sert à capter les subventions.
Le député a par ailleurs suggéré de supprimer la clause de compétence générale. Il lui semble en effet fâcheux que les différents échelons d'administration locale doivent intervenir dans les mêmes domaines. Par exemple, le conseil général devrait se concentrer sur ses missions essentielles que sont les subventions aux communes, les aides aux associations et la gestion des collèges.
Suite à une question de M. Philippe Dallier , rapporteur, M. Charles de Courson a déclaré qu'au vu du nombre actuel de syndicats intercommunaux et de syndicats mixtes, la loi de 1999 n'avait pas atteint son objectif de simplification de l'intercommunalité.
Ainsi, la Marne, en dépit des efforts menés, n'a pas réussi à réduire le nombre de syndicats.
Après que le rapporteur lui eut demandé si l'on pouvait maintenir la ventilation de la dotation d'intercommunalité entre communautés de communes, communautés d'agglomération et communautés de communes, M. Charles de Courson a rappelé qu'il avait toujours plaidé pour l'unité des critères et a déclaré que les catégories actuelles étaient artificielles et injustifiables.
En la matière, il faut, a-t-il estimé, quelque chose de simple. Pour le moment, sont pris en considération à la fois le CIF, la population et le potentiel fiscal. Face à cette complexité, il a appelé de ses voeux la définition de critères uniques, valables pour tous.
Il s'est en outre demandé ce qui justifiait que les plus grandes agglomérations françaises ont une dotation globale de fonctionnement (DGF) aussi importante.
Évoquant la situation de l'Île-de-France, M. Charles de Courson a regretté qu'il n'y ait pas, dans cette région, de vraie coopération intercommunale et que cette dernière tende à se réduire à de simples arrangements politiques en vue de bénéficier de la DGF. Le député a estimé dommage que l'Île-de-France n'ait pas eu le courage de faire ce qu'a, par exemple, fait Londres.
Sur l'assouplissement des transferts entre EPCI et communes membres, il s'est déclaré favorable à une certaine liberté, pourvu qu'elle soit guidée par la recherche de l'équilibre de chacun.
S'agissant de la DGF territoriale, M. Charles de Courson a estimé que le débat à son sujet était nul et non avenu, dans la mesure où l'on ne sait sur quels critères la structure intercommunale répartirait la dotation entre les différentes communes membres. Il serait plus approprié, selon le député qui a mis en garde contre la tentation d'ériger de nouvelles « usines à gaz », que la commune devienne une section de l'intercommunalité.
Il a ensuite estimé qu'il ne fallait pas diminuer la DGF des communes membres d'EPCI suffisamment intégrés, dans la mesure où une telle diminution serait vécue comme une sanction. Il a rappelé qu'il avait proposé que, dès que le CIF dépasse les 50 %, les élus communautaires soient élus au suffrage universel.
M. Charles de Courson a ensuite expliqué qu'il n'était pas gêné par le fait que la définition de l'intérêt communautaire soit laissée à la libre appréciation des EPCI. Il s'est au contraire déclaré favorable à tout ce qui va dans le sens de la liberté. Il a, sur ce sujet, regretté que les préfectures aient fait du contrôle plutôt que du conseil. Il a toutefois ajouté qu'un retoilettage des statuts pouvait être l'occasion de mettre un peu d'ordre dans les compétences des uns et des autres, et, par exemple, de redonner des compétences aux communes.
A la question de savoir si le système fiscal actuel, issu de la réforme de la taxe professionnelle, était adapté à l'intercommunalité, le député a affirmé que la réforme n'était pas tenable, qu'elle tendait à récompenser les dépensiers, et qu'elle était en conséquence déresponsabilisante et injuste.
M. Charles de Courson a alors déclaré que la prochaine grande étape consisterait à démontrer que la situation actuelle n'était en fait que provisoire, et qu'un alignement sur les systèmes allemand ou britannique était nécessaire.
Selon le député, les communes doivent devenir des sections de communes et l'Île-de-France doit s'appuyer sur le modèle des communautés urbaines. Pour les communes qui sont toujours hors intercommunalité, un schéma départemental devrait être arrêté, qui s'appliquerait autoritairement au bout de deux ans si les communes n'ont pas, dans l'intervalle, négocié leur adhésion à l'intercommunalité.
Enfin, il a insisté sur le fait qu'il ne faisait pas partie des opposants de principe à l'intercommunalité, mais qu'il déplorait simplement que, pour le moment, l'intercommunalité ait eu pour seul fondement la « carotte » financière. Il faut, selon le député, y voir le fruit de l'incapacité de la France à réformer son réseau communal. La réforme de ce dernier devra d'ailleurs, a-t-il estimé, s'accompagner de la réforme du Sénat.
M. Charles de Courson a, pour finir, dénoncé le grand scandale du taux unique national de taxe professionnelle vers lequel on se dirige et qui aurait pour effet de favoriser les plus riches. Après avoir affirmé que la réforme de la taxe professionnelle et la suppression de la part salaires allaient faire des collectivités de simples répartiteurs des dotations d'État, il a reconnu qu'il craignait, à terme, une suppression pure et simple des taxes locales, dans un contexte où le principe constitutionnel d'autonomie a déjà été vidé de son sens par le Conseil constitutionnel qui a considéré que les prélèvements sur impôts nationaux étaient une recette propre.
Compte-rendu du 16 mai 2006
Audition de MM. Reynald BRIEC, Olivier ORTÉGA et Dominique PAGEAUD , experts chez Ernst & Young.
M. Philippe Dallier, rapporteur , a ouvert l'audition en rappelant que l'étude sur l'intercommunalité dont il est rapporteur avait pour but de rechercher si l'organisation administrative territoriale actuelle était pertinente ou si, au contraire, l'on se situait dans une phase intermédiaire.
Après avoir rappelé son parcours professionnel comme avocat spécialisé dans le droit public et ses fonctions dans la fonction publique territoriale, M. Reynald Briec a évoqué sa mission tendant à la simplification de la carte intercommunale dans le département du Cher. M . Olivier Ortéga , responsable du pôle Domaine public d'Ernst & Young a précisé que son groupe avait une vision technique et non politique de l'intercommunalité.
M. Philippe Dallier , a tout d'abord fait part de sa surprise qu'aucune des auditions d'experts n'avait pu, jusqu'à présent, lui fournir une réponse claire sur la tendance inflationniste ou inflation des dépenses générées par l'intercommunalité. Même l'intercommunalité « exemplaire » de Mulhouse n'a pu lui donner en direct ces renseignements lors de son dernier déplacement. Le principal argument avancé pour justifier cette incapacité étant l'évolution du périmètre de l'intercommunalité. Le sénateur a souhaité savoir si le cabinet Ernst & Young serait capable, de lui dire si l'intercommunalité, pour un service donné, a permis de faire des économies d'échelle ?
M. Dominique Pageaud , a constaté que la question du sénateur était insoluble du fait de la redistribution réelle des rôles sur le territoire, la question des économies d'échelle devant être appréhendée en premier pour les services (Mulhouse a effectivement mutualisé ses services de manière visible et avec une grande rationalité). Mais le vrai moyen, selon l'expert, d'entrer dans un « cercle vertueux » en matière de finances et d'action publique, c'est l'évaluation qui seule peut permettre de mettre en relation les besoins, le coût de ceux-ci, les usages et les services réellement apportés.
Comment intervenir pour réaliser des économies, but premier de la création de l'intercommunalité ? La réponse est double selon M. Dominique Pageaud :
- des mesures plus coercitives pour imposer la mutualisation des services,
- la définition du niveau le plus adéquat pour mettre en place une évaluation : est-ce l'échelon départemental ?
M. Philippe Dallier , approuvant le dispositif de l'évaluation, a toutefois estimé que personne n'était capable d'évaluer a posteriori la mutualisation des services et qu'une évaluation des besoins aurait dû être mise en place a priori. Rappelant que l'intercommunalité devait à l'origine rationaliser la dépense publique, il a déploré que, sauf exception trop rare, ce n'était pas le cas.
M. Dominique Pageaud a confirmé ce processus inflationniste. Reprenant l'exemple du tramway de Mulhouse, projet répondant au besoin de l'aire urbaine, il a toutefois mis en évidence l'iniquité fiscale et financière du projet pour certaines communes de l'intercommunalité. Là encore une évaluation aurait été pertinente, a-t-il ajouté.
M. Olivier Ortéga , a ensuite dégagé deux sujets d'actualité concernant l'intercommunalité :
- la notion d'intérêt communautaire,
- l'émergence des pays -nouveau niveau territorial- alors que l'articulation avec le schéma d'orientation de l'intercommunalité est déjà confuse et ne facilite pas l'action locale, selon l'expert.
S'agissant de l'intérêt communautaire : si la date butoir du 18 août prochain a rendu plus concrète l'échéance donnée aux communautés pour définir l'intérêt communautaire, c'est la notion même qui reste floue. Au plan de vue juridique, la notion cristallise trois principes forts mais ces principes évoluent.
M. Olivier Ortéga , développant son raisonnement a précisé ces trois principes.
- Le garde-fou ou principe de spécialité . Depuis toujours, les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ne sont pas de plein exercice, à savoir qu'ils n'interviennent pas au-delà des compétences qui leur ont été octroyées à leur création. Toutefois, devant la multiplication de l'enchevêtrement des compétences, des financements et des projets, ce principe connaît quelques difficultés d'application.
- Le principe repoussoir ou principe d'exclusivité qui ne fonctionne pas tant sont grandes les interférences sur un même territoire (il existe par exemple des piscines communales, des piscines intercommunales...), et la logique des fonds de concours ne simplifierait pas non plus les choses.
- Le rassembleur ou principe de subsidiarité : c'est l'Union européenne dans les années 80 qui a inventé ce principe. Les questions à se poser sont les suivantes, selon M. Olivier Ortéga : quel est le niveau pertinent d'intervention ? Quand l'EPCI apporte-t-il une plus-value ? Là encore, l'évaluation pourrait apporter une réponse.
M. Olivier Ortéga a rappelé que ces trois principes étaient fluctuants, en devenir, alors qu'à l'origine, ils étaient censés être fixes.
Ensuite, il a précisé que la loi Chevènement avait créé un outil juridique de répartition des compétences avec une logique simple de blocs de compétences, mais que cette procédure théorique n'a pas toujours pu être mise en pratique efficacement.
M. Olivier Ortéga a conclu ses propos par une interrogation : doit-on définir l'intérêt communautaire par rapport aux intérêts des communes ou de ceux de la population ? Doit-on, pour garder cette logique, aller jusqu'à l'élection au suffrage universel des membres des EPCI ?
M. Philippe Dallier s'est ensuite interrogé pour savoir si l'on pouvait estimer que lorsque la volonté politique de mettre réellement en oeuvre l'intérêt communautaire était réelle, la définition de ce dernier était plus simple à trouver. Ajoutant que dans tous les cas le bien-fondé de la demande devait être réel.
M. Olivier Ortéga lui a répondu que si l'intérêt communautaire correspondait réellement à un projet voté par les communes membres, il ne servait plus à rien puisqu'il se dissolvait logiquement dans l'objet même de l'EPCI.
Sauf si on arrivait à développer la notion de chef de file, solution possible pour ne pas imposer de manière coercitive les objectifs d'une intercommunalité, mais également moyen de ne pas développer les syndicats mixtes, a précisé M. Dominique Pageaud.
M. Philippe Dallier a exprimé sa perplexité quant au niveau d'autorité le plus pertinent pour la codification de ce dispositif.
M. Dominique Pageaud lui a alors fait part d'un problème essentiel et récurrent de l'intercommunalité : l'iniquité financière dans les grands projets des EPCI et la trop faible compétence de l'Etat. L'Etat local (le préfet), a-t-il ajouté, pourrait intervenir plus fermement afin d'assurer dans ce type de projets, la cohérence de l'intervention.
Il a rappelé ensuite que la création d'un EPCI devait à l'origine s'accompagner d'une rationalisation des dépenses. La notion de chef de file appliquée à l'EPCI ou/et à une personne physique, pourrait avoir ce rôle de rationalisation, d'incitation. Pourtant, cette notion ne fonctionne, selon l'expert, que par la bonne volonté politique ou des fonctionnaires, ce qui est regrettable ; elle n'arrive alors pas à s'imposer.
M. Reynald Briec , reprenant la notion d'intérêt communautaire, a fait part de son expérience dans le Cher où l'on constate qu'il se limite bien souvent à une simple liste de zones, d'équipements, de délégations de services publics plutôt que de délégations réelles de compétences. Et malheureusement, il n'y a pas d'économies d'échelle, bien au contraire, a-t-il déploré.
Il a enfin exprimé le caractère positif de la circulaire Hortefeux de février dernier, notamment l'introduction de la notion de seuil (financier, physique...). Le transfert se limiterait aux besoins réels et non plus à l'ensemble d'un équipement. L'EPCI pourrait ainsi retrouver sa vocation première, selon M. Reynald Briec .
M. Dominique Pageaud , reprenant la parole, a confirmé que la notion de projet devait être fondatrice pour l'EPCI. C'est ce projet qui fera vivre la gouvernance qui ne doit pas être purement technique. Avoir un projet de base solide permettra également une meilleure cohérence du schéma de coopération et de l'évaluation. A ce stade, le Conseil de développement pourrait être un outil fort de concertation.
L'EPCI « sain », a-t-il précisé, est celui qui a réussi la mutualisation des services de fonctionnement (personnel) avec la ville mère mais aussi des services opérationnels pour les services communs, à l'image d'une holding. L'EPCI doit avoir intégré la notion de proximité intrinsèque à la relation clients/fournisseurs.
M. Dominique Pageaud a proposé que les compétences de la commission départementale de coopération intercommunale, qui a le pouvoir de porter des avis même si elle n'est que consultative, soient davantage exploitées. On constate, a-t-il précisé, que le préfet sur des territoires restreints pouvait davantage intervenir car il était plus écouté.
M. Philippe Dallier s'est alors demandé si l'on ne s'était pas trompé dès le départ, en refusant d'imposer un périmètre précis ? Un retour à un certain jacobinisme serait-il bénéfique ? On a complexifié, a-t-il expliqué, on a mis de l'argent public sur la table et maintenant l'idée de réformer la dotation générale de fonctionnement (DGF) monte en puissance, personne n'étant content de cette situation insatisfaisante.
Sans compter l'émergence de pays a rappelé M. Reynald Briec .
M. Philippe Dallier a fortement regretté que les pays deviennent des contre-pouvoirs. Comment laisser s'installer ce millefeuille dispendieux et promettre aux Français de réduire les impôts ?
M. Olivier Ortéga a dit son espoir dans la publication de l'évaluation pour faire évoluer les choses.
Il faudrait tout remettre en jeu, y compris le périmètre selon le sénateur.
M. Dominique Pageaud a ensuite émis la proposition de s'inspirer de l'Union européenne qui diligente des cabinets d'experts pour évaluer les programmes. On pourrait imaginer des plates-formes non négociables (les services de bases aux citoyens) sur les territoires, et, au-delà, de grands projets gérés par le biais des évaluations préalables ou non. C'est à ce niveau que le préfet pourrait avoir plus de pouvoirs. Il a ajouté qu'il faudrait inscrire dans les textes la notion de gouvernance locale, comme l'Europe le fait avec ses projets de programmes conduits par un responsable au niveau européen.
M. Reynald Briec , a souhaité que l'on se souvienne que jusqu'à présent, les EPCI étaient des établissements publics et non encore des collectivités territoriales. Si des changements sont envisageables, ils devraient intervenir rapidement pour éviter les conflits avec les collectivités, beaucoup plus difficiles à faire évoluer, a-t-il suggéré.
M. Olivier Ortéga a manifesté son regret de voir s'installer parfois des aberrations, en matière d'intercommunalité. Il a illustré son propos par l'exemple de l'aéroport de Montpellier qui n'est pas sur la commune de Montpellier mais sur le territoire d'une commune qui a décidé de sortir de l'EPCI.
M. Dominique Pageaud a réaffirmé vivement que c'était le manque de projet structuré qui devait être dénoncé.
M. Philippe Dallier , en réponse, a regretté qu'en matière d'intercommunalité, les Français n'y comprenaient rien et que les journalistes ne s'y intéressaient qu'épisodiquement.
M. Philippe Dallier a demandé au cabinet Ernst & Young si la fiscalité mixte avait de « beaux jours devant elle ».
M. Dominique Pageaud a confirmé l'aspect inflationniste indéniable de l'intercommunalité lorsque le périmètre de l'EPCI n'était pas cohérent.
M. Philippe Dallier a alors fait part de ses réflexions avançant que la bonne démarche aurait été de créer des intercommunalités avec pour objet des économies d'échelle, et de laisser les EPCI envisager des projets sur la base des économies réalisées. Ensuite, il a interrogé les experts sur la DGF territoriale.
Rapportant son expérience de terrain, M. Dominique Pageaud a exprimé le malaise des EPCI et des communes à cette perspective : les uns ont peur de perdre des ressources et les autres considèrent ne pas avoir tous les éléments pour redistribuer cette DGF.
M. Dominique Pageaud a alors proposé une piste de recherches qui serait la compilation des comptes (parallélisme des ressources, des dépenses....) et leur consolidation sur une aire territoriale donnée, en d'autres termes l'observation de la consolidation de l'action publique, comme ce que le cabinet Ernst & Young vient de réaliser en un mois environ, pour Lille dans le cadre d'un prochain colloque.
Il a une nouvelle fois confirmé que la taxe additionnelle avait de beaux jours devant elle. L'effet ciseaux (ressources, dépenses) est évident et le restera tant que l'on aura une vision parcellaire des budgets et actions des EPCI. Et là, seule une volonté politique peut faire évoluer les choses, selon M. Dominique Pageaud.
Il a enfin précisé que selon lui il fallait tout d'abord se pencher sur les communes -connues- à gros problèmes, pour donner une impulsion.
M. Reynald Briec , en guise de conclusion, s'est interrogé sur la date butoir du 18 août prochain faite aux intercommunalités pour définir l'intérêt communautaire. S'il estime que c'est une mesure coercitive intelligente, il a toutefois exprimé sa crainte que les communautés de communes ne bougent pas. Alors que se passera-t-il après cette date ? Pas grand-chose a-t-il conclu dubitatif.
Compte-rendu du 13 juin 2006
Audition de M. Jérôme Chartier , député UMP du Val-d'Oise, auteur du livre « Le lifting de Marianne », éditeur L'Archipel, 2005.
M. Philippe Dallier, rapporteur , a ouvert l'audition en rappelant que l'étude sur l'intercommunalité dont il était le rapporteur avait pour but de rechercher si l'organisation territoriale actuelle était pertinente ou si, au contraire, l'on se situait dans une phase intermédiaire. Il s'interroge également sur la question de savoir si, avec la mise en place de l'intercommunalité, la dépense publique est optimisée.
En 1978, a rappelé M. Jérôme Chartier pour introduire son propos, le Président de la République de l'époque déclarait que la France ne pouvait supporter quatre niveaux d'organisation. Près de trente ans plus tard, nous en avons six.
Initialement, le combat de l'intercommunalité était plutôt celui du monde rural que celui du monde urbain, même si aujourd'hui on constate que l'intercommunalité est une véritable réussite en milieu urbain, après un démarrage difficile de la généralisation des schémas directeurs créés en 1995.
Aujourd'hui, on peut même imaginer, voire souhaiter, une intercommunalité regroupant Paris et les communes périphériques de la petite couronne, a expliqué le député. Selon lui, le phénomène est inévitable et nécessaire dans un plan cohérent d'évolution des transports en région parisienne. En effet, le trafic ferroviaire est saturé et seule la voiture pourra permettra aux franciliens de venir, dans les prochaines années, travailler à Paris. Il sera alors indispensable de prévoir de vastes parkings en bordure du périphérique pour éviter la pollution et les problèmes de stationnement intra muros.
Quelle est ma vision idéale de l'intercommunalité ? s'est interrogé M. Jérôme Chartier . C'est un espace de solidarités partagées au sens large comprenant non seulement le social, le fiscal mais également le domaine culturel, environnemental... Nous allons aujourd'hui de manière certaine vers ces périmètres de solidarités et vers des intercommunalités plus cohérentes. Et ceci sans que l'Etat n'intervienne trop.
Dans l'avenir il y aura deux niveaux de pouvoirs politiques forts, a insisté le député du Val-d'Oise : la région et l'intercommunalité. Nous devons rationaliser la décentralisation sans remettre en cause la mentalité française, viscéralement attachée au principe d'identification avec la commune. D'ailleurs, la fusion de communes créée en 1971 n'a jamais fonctionné et les quelques cas de fusions se sont souvent conclus par une défusion quelques années plus tard.
Répondant à une réflexion de M. Philippe Dallier , M. Jérôme Chartier s'est dit convaincu qu'il lui paraissait impossible qu'un jour un niveau d'administration locale soit supprimé. Nous assisterions alors à une levée de boucliers des intérêts catégoriels.
Une nouvelle fois, il a affirmé que seule une rationalisation de la décentralisation était possible, comme son livre « Le lifting de Marianne » a essayé de le démontrer. Cela nécessiterait une identification réelle des responsabilités et l'organisation autour de la région et de l'intercommunalité de l'ensemble des compétences autres que purement locales.
Dans ce schéma, le département assurerait le niveau de cohérence d'un territoire évitant un accaparement du pouvoir par les intercommunalités ou par la région, dont le président pourrait, sans la contrepartie du département, instiller arbitrairement sa volonté sur l'ensemble des communes de cette région. Si la région n'a plus le contre-pouvoir du département, il faudrait limiter rigoureusement le cumul des mandats mais c'est un problème purement politique a ajouté le député du Val-d'Oise ; l'idéal étant, sur un territoire donné, six ou sept présidents d'intercommunalités prenant collégialement des décisions, intercommunalités liées à un département ou une région selon les compétences.
M. Philippe Dallier a ensuite interrogé M. Jérôme Chartier sur le coût de l'intercommunalité.
Répondant sur l'absence d'économies d'échelle depuis 1999, M. Jérôme Chartier , citant la Cour des comptes a expliqué que les transferts de personnel ont été particulièrement coûteux alors qu'ils auraient dû, à tout le moins, tendre à la neutralité. Globalement, la nouvelle intercommunalité n'a conduit à diminuer ni les effectifs, ni les frais de personnel de l'ensemble constitué par les groupements à fiscalité propre et leurs communes membres.
Le développement de l'intercommunalité s'est accompagné d'une croissance globale des charges de personnel. Certes, celle-ci a de multiples causes exogènes par rapport au sujet ici traité (réforme ARTT, GVT, augmentation des prélèvements sociaux etc.). Il en ressort clairement, toutefois, que l'effet de mutualisation des moyens que l'on pouvait attendre de la constitution de communautés fortement intégrées ne se fait pas sentir, au moins jusqu'à présent.
Les transferts réalisés n'ont souvent pas été précédés d'un diagnostic approfondi sur l'adaptation des effectifs des communes membres et n'ont pas été accompagnés d'une véritable réflexion pour la mise en place de l'organigramme des EPCI. Il s'ensuit des risques de renforcement inutile de l'encadrement intermédiaire et de doublons dans les services fonctionnels des communes et des communautés avec pour corollaire un alourdissement global des charges de fonctionnement.
La plupart des transferts sont intervenus avant la loi du 27 février 2002, époque où les agents qui exerçaient des fonctions attachées à des compétences transférées pouvaient refuser leur transfert.
Dans cette hypothèse, les groupements ont parfois été contraints de procéder à de nouveaux recrutements et les communes ont redéployé les agents concernés au sein de leurs services.
Pour favoriser des économies d'échelle et renforcer la cohérence de l'action publique locale, les EPCI devraient explorer avec les communes membres les possibilités de mutualisation des services, à leur niveau, ouvertes par l'article L. 5211-4-1 II du code général des collectivités territoriales, modifié par la loi du 13 août 2004. Les collectivités concernées devraient engager sans attendre la révision des conventions de mise à disposition de personnel encore en vigueur.
S'agissant de la progression des dépenses de fonctionnement et plus particulièrement celle des dépenses de personnel depuis 1999, M. Jérôme Chartier , se basant sur l'analyse du ministère de l'économie (MINEFI) a constaté que par les transferts de compétences pour les intercommunalités et pour les villes les charges de personnel auraient dû se réduire ou stagner. Quoi qu'il en soit, elles n'ont pas explosé et les services à la population sont de plus en plus importants et d'une qualité très élevée.
Les frais de personnel présentent la deuxième plus forte augmentation relative (+ 5,2 % des dépenses des collectivités, après l'investissement). Cette progression résulte, d'une part, d'un accroissement du nombre de personnes rémunérées par les collectivités locales (recrutement et transfert de 3 070 agents en 2005) et, d'autre part, d'un renchérissement du coût du travail. S'agissant de ce second facteur de hausse, il s'explique, outre l'effet GVT, par la revalorisation de 1,8 % du point d'indice de la fonction publique, des mesures catégorielles et l'augmentation des charges sociales (mise en place de la retraite additionnelle de la fonction publique et hausse de 0,4 point de la cotisation employeur à la CNRACL). Les catégories de collectivités connaissant la plus forte progression des frais de personnel sont les GFP (+ 13,1 %) et les régions (+ 7,7 %).
M. Philippe Dallier s'est ensuite interrogé sur le périmètre pertinent de l'intercommunalité, notamment sur le rôle des « pays ». Ne peut-on penser que l'existence de ces pays ne prouve-t-elle pas que le périmètre des EPCI n'est pas pertinent ? Enfin, il a souhaité savoir si selon M. Jérôme Chartier , et au vu du nombre actuel de syndicats intercommunaux et de syndicats mixtes, la loi de 1999 avait atteint son objectif de simplification de l'intercommunalité.
M. Jérôme Chartier a fait un bref rappel historique énonçant les différentes lois relatives à la mise en place de l'intercommunalité (source Cour des comptes) :
- la loi du 22 mars 1890 a institué les premiers syndicats de communes (prise en charge de services publics ou d'activités débordant les limites territoriales des communes comme l'eau, l'assainissement, l'électricité, les transports, etc.).
- la loi du 6 février 1992 a créé deux nouvelles catégories d'EPCI à fiscalité propre : les « communautés de communes » et les « communautés de villes ». Ces groupements disposent de compétences élargies et sont obligatoirement compétents en matière d'aménagement de l'espace et de développement économique.
- la loi du 12 juillet 1999 supprime les districts et les communautés de villes. Ces dernières n'avaient pas rencontré le succès escompté : cinq communautés de villes seulement avaient été créées depuis 1992. Elle créée une nouvelle catégorie d'EPCI à fiscalité propre, les « communautés d'agglomération », réservée aux groupements de plus de 50 000 habitants. Elle recentre les communautés urbaines sur les ensembles de population les plus importants : 500 000 habitants au lieu de 20 000 précédemment. Enfin, elle élargit les compétences des communautés de communes.
Il a ensuite procédé à une brève comparaison du même dispositif à l'étranger :
- En Angleterre : 500 collectivités (comtés, districts) élues en 1997 avec une autorité territoriale unique dans les villes ;
- Depuis la réforme de 1976, la Belgique ne compte plus que 589 communes pour 10 millions d'habitants ;
- En Allemagne de l'Ouest, le nombre de communes a été ramené dans les années 60 et 70 de plus de 24 000 à environ 8 400.
Pour autant, dans bien des cas, force est de considérer que les périmètres des communautés n'atteignent pas la dimension optimale, notamment au regard de la référence que constitue l'aire urbaine au sens de l'INSEE. S'agissant des autres formes de coopération intercommunale (syndicats de divers types), la rationalisation et la simplification du paysage restent à mener à bien. Les dispositions nouvelles de la loi du 13 août 2004 (en particulier celles relatives aux fusions d'EPCI) devraient être mises à profit pour assurer la mise en place de communautés de taille suffisante.
Au total, malgré le développement de l'intercommunalité à fiscalité propre, le paysage intercommunal reste caractérisé par un foisonnement de structures diverses, source d'opacité pour le citoyen et de coûts pour les finances publiques.
M. Philippe Dallier a ensuite procédé à une série de questions sur une réforme de la « DGF intercommunale ».
Rappelant en préliminaire que l'enveloppe nationale progresse de façon insuffisante, M. Jérôme Chartier a constaté qu'il ne serait pas illogique qu'il y ait une réforme. Puis il a passé en revue les diverses interrogations du sénateur :
1. Peut-on maintenir la ventilation de la dotation d'intercommunalité entre communautés de communes, communautés d'agglomération et communautés urbaines telle qu'elle existe aujourd'hui ?
2. Quel jugement portez-vous sur l'assouplissement des transferts entre E.P.C.I et communes membres ?
3. Peut-on envisager une DGF consolidée ou territoriale ? Selon quelles modalités ?
Actuellement, a expliqué M. Jérôme Chartier , l'enveloppe de la DGF est réservée dans un premier temps aux communes et dans un second temps à l'intercommunalité et à la péréquation. Dans la réforme, la DGF serait versée aux intercommunalités qui prendraient en charge le reversement de cette dotation à l'ensemble des communes membres de l'intercommunalité. Il y aurait ainsi une meilleure adéquation avec la réalité locale.
4. Est-il envisagé de diminuer la DGF des communes membres d'EPCI suffisamment intégrés ?
Le député ne s'est pas dit hostile à cette mesure, puisque les communes qui transfèrent les services touchent une dotation identique par rapport à l'année précédente.
Enfin, M. Philippe Dallier a porté sa réflexion sur la notion de l'intérêt communautaire, s'interrogeant sur un transfert des compétences trop rapide et insuffisamment encadré, ce qui expliquerait les difficultés liées à la définition de l'intérêt communautaire.
M. Jérôme Chartier , se basant sur l'article des Echos, a rappelé la demande de l'ADF (Association des départements de France) au Premier Ministre pour une pause dans les transferts de compétences et des normes qui s'imposent aux collectivités.
Les nouvelles compétences, et donc charges, transférées récemment (APA, RMI, prestation de compensation du handicap, personnel TOS des collèges, toutes nationales, personnels de l'équipement, etc.) sont trop nombreuses.
La réforme des minima sociaux, de la protection de l'enfance, de la tutelle et de la curatelle pourraient amener de nouvelles charges et transferts.
Les départements ne maîtrisent ni les montants, ni l'évolution du nombre de bénéficiaires des prestations et allocations sociales.
Les risques liés à l'augmentation des charges sont maintenant connus, a conclu M. Jérôme Chartier ; il est de plus en plus mis en avant la rationalisation des services et la professionnalisation des personnels. Les corrections nécessaires vont apparaître rapidement.
Les grands projets ne peuvent passer que par l'intercommunalité. Il est donc vain de critiquer sans cesse, il faut aussi chiffrer les réalisations nouvelles qui n'auraient pu naître, faute d'intercommunalité.
La première phase est coûteuse, par construction puisqu'elle se superpose, la France n'ayant pas supprimé d'échelon de décision public. La seconde phase doit apporter des économies d'échelle et permettre la rationalisation des structures de coûts.