2. L'amélioration de l'information des actionnaires
a) La publicité du rapport sur le gouvernement d'entreprise et le contrôle interne
Plusieurs autres dispositions de la LSF sont venues améliorer les droits d'information des actionnaires, notamment en matière de gouvernement d'entreprise et de contrôle interne.
Le rapport sur le gouvernement d'entreprise et le contrôle interne est complété, comme il a été dit plus haut, par un rapport des commissaires aux comptes, joint à leur rapport général, et qui comporte leurs observations concernant « celles des procédures de contrôle interne qui sont relatives à l'élaboration et au traitement de l'information financière ».
La publicité du rapport du président est identique à celle du rapport de gestion auquel il est joint, c'est-à-dire qu'il est envoyé aux actionnaires à leur demande (ou mis à leur disposition), présenté à l'assemblée générale ordinaire annuelle et déposé au greffe du tribunal de commerce dans le mois qui suit cette assemblée générale. En outre, pour les sociétés faisant appel public à l'épargne, ce rapport est rendu public. La recommandation de l'AMF du 27 janvier 2004 110 ( * ) a précisé les points suivants :
- le rapport du président doit être mis à disposition au siège social et sous format électronique sur le site internet de l'AMF ainsi que sur le site internet de l'émetteur si celui-ci en possède un ;
- la société doit publier un communiqué informant le marché de la mise à disposition du rapport ;
- si la société publie un document de référence, les informations contenues dans le rapport devront y être insérées.
En application de l'article 122 de la LSF, l'AMF établira chaque année un rapport sur la base des informations ainsi communiquées.
b) La communication des conventions
(1) Le dispositif prévu par la loi
La loi NRE avait étendu le champ d'application des conventions réglementées aux conventions conclues par la société avec tout actionnaire disposant de plus de 5 % des droits de vote de la société ou avec toute société contrôlant, directement ou indirectement, une société actionnaire disposant de plus de 5 % des droits de vote de la société. La loi NRE avait, en outre, imposé la communication au président des conventions courantes conclues à des conditions normales. Cette loi prévoyait également qu'une liste de ces conventions soit transmise par le président au conseil et aux commissaires aux comptes et qu'elle soit mise à disposition des actionnaires avant l'assemblée.
La LSF a porté le seuil de soumission à autorisation des conventions passées avec un actionnaire à 10 % de détention des droits de vote par celui-ci (article 123 de la LSF modifiant l'article L. 225-38 du code de commerce). En outre, s'agissant des conventions courantes, des difficultés constatées dans la pratique ont conduit à un assouplissement du dispositif : désormais (article 123 de la LSF modifiant l'article L. 225-39 du code de commerce), les « conventions courantes conclues à des conditions normales qui, en raison de leur objet ou de leurs implications financières, ne sont significatives pour aucune des parties » échappent à l'obligation de communication.
(2) Un dispositif imprécis critiqué encore aujourd'hui
Malgré l'assouplissement apporté par la LSF, le mécanisme de communication des conventions courantes demeure critiqué en raison de son imprécision et de sa lourdeur.
Lors de l'adoption du dispositif initial de la loi NRE, votre rapporteur général avait formulé les réserves suivantes :
« Par ailleurs, votre commission s'inquiète des lourdeurs introduites par l'obligation, pour chaque intéressé à une convention portant sur des opérations courantes conclues à des conditions normales, de communiquer ladite convention au président du conseil d'administration ou, le cas échéant, du conseil de surveillance. La convention doit ensuite être transmise aux membres du conseil d'administration et aux commissaires aux comptes.
« Le risque existe que le président comme les membres du conseil d'administration se trouvent en quelque sorte "submergés" par un flux d'informations qu'ils seront dans l'incapacité d'analyser.
« En conséquence, le souci de transparence qui anime cette mesure risque de rester très formel et de ne pas avoir le résultat escompté » 111 ( * ) .
Ces réserves ont été réitérées lors de l'examen du projet de loi de sécurité financière, votre commission des finances ayant alors jugé qu'il serait préférable d'abroger simplement le dispositif de communication des conventions courantes prévu par la loi NRE :
« De fait, votre commission s'est informée des conditions dans lesquelles l'obligation de communication des conventions courantes est aujourd'hui respectée . Il apparaît malheureusement que ses craintes se sont confirmées : soit l'obligation de communication des conventions courantes n'est pas correctement respectée, et de nombreuses conventions ne sont pas transmises, soit les conventions courantes sont transmises mais le nombre de documents est si important et ceux-ci donnent si peu d'informations que ces documents ne sont pas exploités.
« En définitive, il apparaît donc qu'une mesure, destinée à l'origine à améliorer la transparence des entreprises, conduit dans les faits à une situation dans laquelle l'information des associés et des actionnaires est diluée plutôt que renforcée.
« Votre commission estime donc, au vu de la mise en oeuvre concrète des dispositions de l'article 111 de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, qu'il est préférable, tant pour la qualité de l'information du conseil d'administration et des actionnaires que pour simplifier une procédure excessivement lourde pour les entreprises, d'abroger simplement les dispositions concernant la communication des conventions courantes conclues à des conditions normales de marché.
« Au demeurant, il faut souligner qu'il appartient aux commissaires aux comptes de veiller, dans le cadre de leurs diligences, au partage des conventions courantes et réglementées entre l'une et l'autre catégories. Il leur appartient de s'assurer, grâce à leurs contrôles, de l'exhaustivité de la liste des conventions réglementées faisant l'objet de leur rapport spécial. » 112 ( * )
Le dispositif finalement retenu par la LSF, c'est-à-dire l'obligation de communiquer les conventions courantes significatives pour l'une ou l'autre partie, demeure lourd , car les conventions concernées ne doivent être significatives pour aucune des deux parties. De plus, la formulation reste trop imprécise , bien qu'elle ait été améliorée par rapport au projet de loi initialement présenté par le gouvernement (qui évoquait les conventions « de faible importance »). Cette imprécision relativise la portée de l'assouplissement introduit par la LSF par rapport à la loi NRE. Elle conduit à créer, alors que la frontière entre les conventions réglementées et les conventions courantes n'est pas toujours évidente, une troisième catégorie de conventions aux contours encore plus incertains .
D'après les informations recueillies auprès des praticiens, ce sont des milliers de conventions intragroupes (conventions d'achat, de vente, de sous-traitance, de location de matériels, de prestations de services financiers, juridiques...) qui doivent être communiquées. Les présidents, les membres du conseil et les commissaires aux comptes se trouveraient donc submergés par un nombre considérable d'informations banales sur lesquelles ils ne peuvent pas exercer de contrôles effectifs. Par ailleurs, à ce jour, il semblerait qu'aucun actionnaire n'ait demandé la communication de ces conventions courantes.
C'est pourquoi il faudrait envisager, à l'avenir, de supprimer, ou, à défaut, de préciser, le dispositif de la loi NRE tel que modifié par la LSF.
* 110 « Gouvernement d'entreprise et contrôle interne : obligations de publication des émetteurs faisant appel public à l'épargne » (AMF, 27 janvier 2004).
* 111 Projet de loi relatif aux nouvelles régulations économiques - Rapport n° 5 (2000-2001).
* 112 Projet de loi de sécurité financière - Rapport n° 206 (2002-2003).