B. UN IMPACT CERTAIN SUR L'ÉCONOMIE FRANÇAISE
1. La géographie des départs des redevables de l'ISF
Les départs de redevables à l'ISF apportent tout d'abord un éclairage sur la fiscalité française. Il y a de la part de contribuables fortunés un sentiment fort d'illégitimité de l'impôt de solidarité sur la fortune qui les conduit à quitter le territoire français. Où partent-ils ? Partout ailleurs évidemment qu'en France !
Géographie des départs de redevables à l'ISF délocalisés en 2001 et 2002
Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie
2. Les caractéristiques des délocalisés de l'ISF
Une typologie plus précise est fournie par la direction générale des impôts. Parmi les personnes qui se délocalisent, deux populations peuvent être distinguées :
- la première, plus âgée (moyenne d'âge de 54-55 ans), plus fortunée (patrimoine moyen de 15 à 16 millions d'euros) part en Suisse ou en Belgique ;
- la seconde, plus jeune (45 ans en moyenne), relativement moins fortunée (2,8 à 3,8 millions d'euros) s'établit au Royaume-Uni ou aux Etats-Unis.
Les autres destinations, qui couvrent plus de 50 % des départs désormais, n'ont pas fait l'objet d'études de la part de la direction générale des impôts. Il s'agit d'une population dont le patrimoine moyen (2,16 millions d'euros) est légèrement supérieur au patrimoine moyen des redevables à l'ISF (1,85 million d'euros). Les destinations concernées peuvent être :
- d'autres pays européens, comme l'Italie, qui ont adopté une fiscalité du patrimoine offensive ;
- des pays comme le Maroc ou la Tunisie qui peuvent offrir un cadre de vie attrayant à de nouveaux et jeunes retraités ;
- les autres destinations concernent, elles, davantage, les cadres supérieurs : la diversification des destinations peut laisser penser à une délocalisation croissante de cadres supérieurs, dont les motifs ne sont pas uniquement fiscaux, mais où la fiscalité joue néanmoins un rôle.
Dans tous les cas, les délocalisations des redevables à l'ISF constituent une perte de dynamisme pour l'économie française : plus jeunes que la moyenne des redevables à l'ISF (qui est de 66 ans), tout en étant expérimentés (fourchette des 45-55 ans), nettement plus riches que la moyenne des redevables à l'ISF, ces contribuables, parmi lesquels les dirigeants d'entreprise sont très nombreux, ont eu depuis six ans à leur disposition 10 à 15 milliards d'euros de capitaux qu'ils ont pu investir ailleurs qu'en France . Si rien ne les empêche de posséder des liquidités sur des comptes courants de banques françaises ou de détenir des actions de sociétés françaises, les contribuables français qui ont changé de domicile fiscal ne peuvent détenir de titres représentatifs d'une participation (selon la doctrine fiscale, titres représentant plus de 10 % du capital d'une entreprise) sous peine d'être... de nouveau assujettis à l'ISF. Leurs compétences et leurs capitaux sont donc fortement incités à s'investir à l'étranger.