LA PLANIFICATION OPÉRATIONNELLE : UNE SUPERPOSITION D'HABITUDES QUE LES OUTILS NE VIENNENT PAS SIMPLIFIER

Les éléments observés sur le terrain

La gestion de la planification est délicate à mettre en oeuvre et répond, en fait, aux besoins ressentis par le chef de service, voire par le chef de brigade. Un leitmotiv a été entendu dans l'ensemble des unités visitées : « l'événement commande l'action », au risque de mettre de côté tous les outils de planification mis à disposition.

Des outils de planification hétéroclites

Face à des notions de management diversement appliquées, aux « concurrences » entre acteurs internes et externes et à la personnalisation du commandement, les modes de transmission des ordres varient considérablement d'une unité à l'autre. Par conséquent, l'utilisation des outils à disposition pour planifier les tâches est très variée selon les implantations visitées. A ce titre, lorsqu'il change d'unité, le gendarme ou le policier doit impérativement passer une certaine période d'adaptation aux méthodes de travail locales. Cette période est relativement improductive et peut être source d'erreurs.

Les usages observés montrent une grande diversité :

Exemple : dans un commissariat central, la feuille de service est systématiquement inscrite dans la Main Courante Informatique (MCI) qui est consultée par chaque chef de brigade au moment du début de service.

Exemple : les commissariats de la Préfecture de Police ne disposent pas de la Main Courante Informatique (MCI), les consignes de service sont inscrites dans un cahier que chacun doit émarger. De plus, le Centre de Commandement Central de la Préfecture rappelle régulièrement les consignes permanentes par radio à toutes les unités. Et dans les deux commissariats visités, les instructions sont répercutées aux agents oralement lors d'un « briefing » matinal.

Exemple : dans certains commissariats, une feuille de service est rédigée pour chaque unité et donnée à chaque responsable. Parfois, les instructions sont, de surcroît, inscrites sur un grand tableau blanc dans le Bureau d'Ordre et d'Emploi (BOE).

Exemple : dans un autre commissariat, le chef du secteur nord de la police de proximité préfère rencontrer ses fonctionnaires au moment de leur prise de service pour un échange informel au cours duquel il distribue les consignes.

De nombreuses tâches redondantes dans la gendarmerie

Pour la gendarmerie, l'usage de BB 2000 est bien plus répandu dans la gestion du service. Outil de gestion, mais aussi de compte rendu opérationnel, il est incontournable pour les militaires. Malgré cela, les anciennes méthodes de planification de l'activité de la brigade subsistent, tout comme la gestion des congés.

En réalité, rares sont les responsables d'unités qui utilisent BB 2000 tel qu'il devrait l'être :

Exemple : un commandant de compagnie a demandé à ses commandants de brigade de définir un plan d'action annuel qu'il a ensuite corrigé et validé. Ce plan détermine désormais la planification mensuelle du service des brigades dans BB 2000. Cette planification est d'ailleurs contrôlée par la compagnie au moment de la rencontre avec les responsables de brigade une fois par mois pour dresser le bilan de l'action réalisée et actualiser les objectifs.

Cette utilisation de BB 2000 comme outil final de planification ne doit pas masquer la réalité de l'organisation par les unités de terrain. La substitution du tableau standard issu de BB 2000 par des documents personnels est majoritairement répandue dans les unités visitées. Dans ce cas, le commandant d'unité impose immanquablement sa méthode, qu'il juge éprouvée mais qui fait doublon avec les outils diffusés par la Direction Générale de la Gendarmerie Nationale. Il arrive également que la procédure soit fixée par la cellule d'état-major (appelée Groupe de Commandement : GC).

Exemple : dans un PSIG, une carte de la circonscription placée au mur comporte l'ensemble des informations intéressant la délinquance sur la voie publique et la violence routière. Chaque mois, un gendarme relève l'activité délictueuse au niveau de la circonscription qui est traduite en pastilles de couleur sur le mur. A côté de cette carte, des fiches statistiques rédigées par les gendarmes détaillent les points particuliers dans chaque zone de la compagnie.

Exemple : dans un autre PSIG, les consignes particulières ne sont pas seulement contenues dans la situation de prise d'arme extraite de BB 2000. En effet, sur le même pan de mur se superposent l'ensemble des messages RUBIS susceptibles d'intéresser les patrouilles. Libre à chacun de consulter les messages des derniers jours avant de partir en patrouille.

Exemple : dans une brigade, le planning est d'abord rédigé à la main sur un support personnel avant d'être affiché tel quel pour l'information des gendarmes. De même, un commandant de PSIG, partant des codes couleurs utilisés par BB 2000, a reconstruit un tableau Excel avec davantage d'indications, telles que la nature des services imposés ou encore les services nocturnes qui seront directement utilisées par son Centre Opérationnel de Gendarmerie (COG).

Exemple : un commandant de brigade constate certaines lacunes de BB 2000, en reconnaissant que « bien sûr, aucun outil n'est jamais parfait » : les informations affichées à l'écran de BB 2000 ne sont pas fidèlement restituées sur le papier après impression : ce tableau n'est pas synoptique, les codes couleurs divergent et la nomenclature n'est pas respectée. Pour compenser ce manque de fiabilité, il réalise un tableau qu'il renseigne manuellement sur format A3 à partir d'une autre nomenclature, personnelle également.

Une information parfois pléthorique

Dans tous les commissariats, un service est chargé d'établir des statistiques de la délinquance. Ce service peut être soit le Bureau d'Ordre et d'Emploi (BOE), soit l'Unité de Liaison, d'Information et de Synthèse (ULIS). Les statistiques proposées par ces services varient d'un commissariat à l'autre. De même, le type d'information et les méthodes de collecte et de diffusion diffèrent.

Exemple : une des ULIS visitées propose les informations suivantes :

§ tableau journalier et hebdomadaire des plaintes de voie publique,

§ tableau journalier des gardés à vue et résultat,

§ bulletin hebdomadaire d'information,

§ activité mensuelle des bureaux de police de proximité,

§ orientations des patrouilles et des BAC en temps réel des faits constatés,

§ compte rendu à la BAC des faits répétitifs,

§ étude des plaintes avant enregistrement dans l'état 4001,

§ statistiques d'évolution de la délinquance par quartier et compte rendu aux patrouilles et BAC,

§ orientation de mise en place particulière de surveillance,

§ information à chaque secteur des sorties de prison les concernant,

§ résultats des audiences du TGI,

§ regroupement des informations recueillies auprès des polices municipales pour répercussions aux BAC et aux patrouilles.

Ces informations sont communiquées aux chefs de service et de patrouille soit sur format papier, soit par format électronique. Aucune règle n'est suivie en la matière.

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