Mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances
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ARTHUIS (Jean)
RAPPORT D'INFORMATION 388 (2002-2003) - COMMISSION DES FINANCES
Rapport au format Acrobat ( 294 Ko )Table des matières
- AVANT-PROPOS
- INTRODUCTION
-
CHAPITRE PREMIER :
UNE ENTRÉE EN VIGUEUR PROGRESSIVE PERMETTANT UNE NÉCESSAIRE APPROPRIATION DE LA RÉFORME PAR L'ENSEMBLE DES ACTEURS-
I. UNE MOBILISATION INDISPENSABLE DE L'ENSEMBLE DES
ACTEURS
- A. LA GESTION DE LA MISE EN OEUVRE DE LA LOLF PAR LE GOUVERNEMENT
- B. L'EXERCICE DE NOUVELLES MISSIONS PAR LA COUR DES COMPTES
- C. UN INDISPENSABLE ACCOMPAGNEMENT DE LA RÉFORME PAR LE PARLEMENT
-
II. UNE LOI ORGANIQUE DÉJÀ EN PARTIE
ENTRÉE EN VIGUEUR
- A. LES DISPOSITIONS RELATIVES A L'INFORMATION ET AU CONTRÔLE DU PARLEMENT14
- B. LES DIFFICULTÉS D'INTERPRÉTATION DE CERTAINES AUTRES DISPOSITIONS DE LA LOLF
- C. L'IMPORTANCE CRUCIALE DES PROCHAINES ÉCHÉANCES DU CALENDRIER DE LA RÉFORME
-
I. UNE MOBILISATION INDISPENSABLE DE L'ENSEMBLE DES
ACTEURS
-
CHAPITRE II :
LES GRANDS ENJEUX À VENIR DE LA LOLF-
I. LA DÉFINITION DES MISSIONS, DES PROGRAMMES ET
DES ACTIONS : DES EXIGENCES ESSENTIELLES
- A. LA DÉFINITION DES MISSIONS : UN ENJEU IMPORTANT POUR LE PARLEMENT
-
B. LES PROGRAMMES ET LES ACTIONS : AU CoeUR DE LA
NOUVELLE GESTION PUBLIQUE
- 1. Une exigence de lisibilité, de cohérence et d'homogénéité
- 2. La diffusion de la logique de la LOLF dans les services déconcentrés de l'Etat : une problématique complexe
- 3. Les objectifs et les indicateurs de performance : les « pièges » à éviter
- 4. L'élaboration du budget implique une réflexion approfondie sur les objectifs de l'action de l'Etat
- II. DES RÉFORMES IMPORTANTES ET NÉCESSAIRES DANS LE FONCTIONNEMENT DE L'ADMINISTRATION
-
I. LA DÉFINITION DES MISSIONS, DES PROGRAMMES ET
DES ACTIONS : DES EXIGENCES ESSENTIELLES
- EXAMEN EN COMMISSION
- ANNEXE 1 : LISTE DES MEMBRES DU GROUPE DE TRAVAIL SUR LA MISE EN oeUVRE DE LA LOI ORGANIQUE DU 1ER AOÛT 2001 RELATIVE AUX LOIS DE FINANCES
- ANNEXE 2 : LISTE DES AUDITIONS DE MINISTRES
- ANNEXE 3 : LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR LE GROUPE DE TRAVAIL SUR LA MISE EN OEUVRE DE LA LOLF
N°
388
SÉNAT
SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2002-2003
Annexe au procès-verbal de la séance du 9 juillet 2003
RAPPORT D'INFORMATION
FAIT
au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur l' état d' avancement de la mise en oeuvre de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances ,
Par M.
Jean ARTHUIS,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis, président ; MM. Jacques Oudin, Gérard Miquel, Claude Belot, Roland du Luart, Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Aymeri de Montesquiou, vice-présidents ; MM. Yann Gaillard, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; MM. Philippe Adnot, Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Jacques Baudot, Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Eric Doligé, Thierry Foucaud, Yves Fréville, Paul Girod, Adrien Gouteyron, Hubert Haenel, Claude Haut, Roger Karoutchi, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, François Marc, Michel Mercier, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, René Trégouët.
Lois de finances |
«
Un Etat qui n'a pas les moyens d'effectuer des
changements n'a pas les moyens de se maintenir
».
Edmund Burke,
Réflexions sur la Révolution française
AVANT-PROPOS
Votre
commission des finances avait, à l'initiative de son
président d'alors, notre ancien collègue Alain Lambert,
été à l'origine de la réforme de la
législation organique relative aux lois finances, conjointement avec la
commission des finances de l'Assemblée nationale, à l'initiative
de celui qui était alors rapporteur général, notre
collègue député Didier Migaud. Elle porte désormais
une double responsabilité dans sa mise en oeuvre :
- d'une part, en tant que l'un des principaux auteurs de cette loi, elle a pour
mission légitime de s'assurer que l'application des dispositions de la
loi organique du 1
er
août 2001 relative aux lois de finances
(LOLF) est conforme à l'intention du législateur organique ;
- d'autre part, la loi organique relative aux lois de finances confère
de nouveaux pouvoirs, en matière d'information et de contrôle, aux
commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées
des finances. Elles sont donc directement intéressées à ce
que la mise en oeuvre de la loi organique permette un exercice effectif et
complet de ces prérogatives.
Le bureau de votre commission des finances
1(
*
)
a
décidé de se constituer en groupe de travail sur la mise en
oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances, sous la
présidence de votre rapporteur. Composé de représentants
de tous les groupes politiques, il respecte ainsi l'esprit de consensus qui a
permis l'adoption de la LOLF. Ce groupe a procédé à
l'envoi de questionnaires à l'ensemble des ministères, portant
sur la mise en oeuvre de la loi organique, et a entendu des
hauts-fonctionnaires, dont la liste figure en annexe au présent rapport
d'information.
Il a organisé, le 10 mars dernier, un séminaire portant sur
la mise en oeuvre de la LOLF, ouvert à l'ensemble des membres de la
commission des finances, et auquel ont participé plusieurs
représentants de la direction de la réforme budgétaire
dont son directeur, M. Frank Mordacq.
Votre commission des finances a également souhaité auditionner,
à la fin du printemps de cette année, plusieurs ministres pour
faire le point sur l'exécution du budget en cours et sur l'état
d'avancement des réformes prévues par la LOLF
2(
*
)
. Compte tenu de l'intérêt qui s'attache
à la pleine réussite de cette réforme, qui
nécessite la mobilisation de l'ensemble des parlementaires, les
rapporteurs pour avis des autres commissions permanentes ont été
conviés à ces réunions.
Enfin, les questionnaires budgétaires portant sur le projet de loi de
finances initiale pour 2004, adressés aux ministères avant le 10
juillet 2003 par les rapporteurs spéciaux de votre commission des
finances, ont inclus plusieurs questions spécifiques portant de
façon très précise sur la mise en oeuvre de la LOLF.
Le présent rapport d'information s'inspire des travaux de ce groupe de
travail, ainsi que dans leurs domaines d'attribution, des travaux des
rapporteurs spéciaux portant sur la mise en oeuvre de la loi organique.
Il se nourrit également des travaux de la direction de la réforme
budgétaire et des groupes de travail constitués sur la LOLF. Il
n'a pas l'ambition de couvrir l'intégralité des chantiers ouverts
par la LOLF, mais souhaite contribuer à l'information des citoyens sur
les modalités de sa mise en oeuvre et témoigner de la vigilance
et des attentes du Parlement qui en fut à l'origine.
INTRODUCTION
La loi
organique n° 2001-692 du 1
er
août 2001 relative aux
lois de finances, désormais communément appelée
« LOLF », est, à plusieurs titres, un texte
fondamental.
En premier lieu, c'est un texte d'initiative parlementaire qui a
réformé l'ordonnance organique n° 59-2 du 2 janvier
1959, l'un des symboles du « parlementarisme
rationalisé » et en matière budgétaire, la
principale bride du Parlement. Cette loi organique a été
votée après trente-six tentatives de réforme, et, qui plus
est, à la quasi-unanimité dans les deux Assemblées. Les
travaux préparatoires de la LOLF ont par ailleurs été
marqués par une concertation permanente entre, notamment, les
commissions des deux Assemblées chargées des finances et les
services du ministère de l'économie, des finances et de
l'industrie. Le gouvernement avait souhaité que ses points de vue soient
pris en compte sans être jamais conduit à amender le texte,
conservant ainsi un caractère « purement
parlementaire » à l'initiative de la réforme.
Le contraste flagrant entre les modalités d'adoption de la LOLF et
celles de l'ordonnance organique n° 59-2 du 2 janvier 1959 souligne un
changement d'époque, puisque cette dernière n'avait fait, compte
tenu du contexte de la mise en place de nouvelles institutions, l'objet
d'aucune consultation des Assemblées ou du Conseil constitutionnel.
L'adoption de la LOLF témoigne donc d'une
volonté
partagée entre l'exécutif et le législatif à la
fois de revaloriser le rôle du Parlement, de rendre plus transparentes
les finances publiques et de doter la France des outils nécessaires
à sa réforme.
Le Parlement s'est fortement impliqué dans la conception et la
rédaction de la LOLF. Certes, sa mise en oeuvre relève pour
l'essentiel de l'exécutif, mais le Parlement ne saurait
considérer que l'essentiel de son apport appartient au
passé :
la LOLF fournit au Parlement des outils pour enrichir
son information et mieux exercer sa mission de contrôle
. Il doit
désormais s'approprier ces outils, s'assurer que la mise en oeuvre de la
LOLF ne dénature pas son intention initiale, et jouer le rôle
d'« aiguillon » de la réforme de l'Etat qui lui
revient dans le nouveau cadre budgétaire.
Nous sommes aujourd'hui à mi-chemin de la mise en oeuvre de la
réforme, dont l'entrée en vigueur complète et
définitive interviendra au 1
er
janvier 2006
. Le
chemin qui reste à parcourir est important, et essentiel :
après avoir élaboré les concepts et les outils qui
permettront de concilier le respect de la loi organique et les
problématiques complexes liées à l'organisation de l'Etat,
arrive maintenant
le temps des choix politiques
. Le choix des programmes
et des missions, qui devrait être présenté et validé
d'ici à la fin de l'année au niveau interministériel,
constituera à cet égard l'aboutissement de réflexions
engagées depuis de nombreux mois sur le périmètre,
l'organisation de les priorités de l'action des ministères. Le
Parlement, qui sera naturellement associé à la définition
de la nomenclature budgétaire, devra être présent à
ce rendez-vous essentiel, et faire part de son jugement sur la pertinence des
choix opérés ainsi que de ses attentes.
La loi organique du 1
er
août 2001 relative aux lois de
finances doit permettre de « mettre de la lumière dans toutes
les pièces de la maison Etat », mais cela n'a de sens que si
une volonté partagée existe d'y « faire le
ménage ».
Elle appelle à une véritable
« révolution culturelle », tant au sein de
l'administration que du Parlement lui-même
. Cette révolution
culturelle est rendue d'autant plus indispensable que la réforme de
l'Etat, thématique largement invoquée depuis de nombreuses
années, apparaît aujourd'hui, compte tenu de la dégradation
de la situation des finances de publique, comme une impérieuse
nécessité.
Pour les parlementaires, la réforme implique de rompre avec la tentation
de considérer de manière systématique
« Bercy » comme la source de tous les maux, en étant
portés à défendre le point de vue des ministères
qu'ils ont la charge de contrôler. Pour l'administration, cette
« révolution culturelle » implique de rompre avec
une culture du secret
3(
*
)
et parfois, de
défiance vis-à-vis du Parlement, et de responsabiliser les
acteurs qui bénéficieront d'une autonomie de gestion nouvelle.
Cette révolution culturelle rend nécessaire une sensibilisation
approfondie des futurs acteurs de la réforme.
Elle ne saurait
toutefois s'enraciner sans une ambition politique forte et exemplaire,
également partagée par l'ensemble du gouvernement
. A cet
égard, votre commission relève le constat effectué par la
Cour des comptes, qu'elle a également pu faire à l'occasion de
certaines de ses auditions : «
Dans de nombreux
ministères, la mise en oeuvre de la réforme a souffert en 2002
d'un cadrage politique insuffisant. Dans la moitié des ministères
étudiés cette année par la Cour, les équipes en
charge de la LOLF ne disposent pas d'une lettre de mission ou d'un document
d'orientation émanant du ministre. (...) Malgré
l'unanimité qui s'était exprimée au Parlement lors de
l'adoption de la LOLF, une période d'adaptation a été
observée en 2002 avant de relancer la réforme. La nouvelle
impulsion politique et le nouveau dispositif de pilotage mis en place à
partir de décembre 2002 doivent à présent permettre de
rattraper le temps perdu sur les différents chantiers
ouverts
»
4(
*
)
.
Le président de la République, M. Jacques Chirac, écrivait
dans son livre «
La France pour tous
» :
«
Le changement est d'abord un état
d'esprit
».
C'est cet état d'esprit nouveau qu'appelle
la mise en oeuvre de la LOLF et qui doit être animé par une
volonté politique ferme et durable.
A la condition d'être assumée par une volonté politique
sans faille, au delà des clivages partisans, la LOLF deviendra ainsi le
levier des réformes structurelles, l'instrument gouvernemental des
prises de décisions, la clef du renforcement du rôle du Parlement.
L'enjeu fondamental est bien de mettre un terme à l'opacité des
sphères publiques. Le temps est enfin venu de passer de l'ombre à
la lumière.
CHAPITRE PREMIER
:
UNE ENTRÉE
EN VIGUEUR PROGRESSIVE PERMETTANT UNE NÉCESSAIRE APPROPRIATION DE LA
RÉFORME PAR L'ENSEMBLE DES ACTEURS
I. UNE MOBILISATION INDISPENSABLE DE L'ENSEMBLE DES ACTEURS
A. LA GESTION DE LA MISE EN OEUVRE DE LA LOLF PAR LE GOUVERNEMENT
1. Les structures dédiées à sa mise en oeuvre
a) La direction de la réforme budgétaire5( * )
La
direction de la réforme budgétaire a été
créée au sein du ministère de l'économie, des
finances et de l'industrie par le
décret n° 2003-202 du 10 mars 2003
qui dispose, dans
son
deuxième article que, «
en liaison avec la direction du
budget et la direction générale de la comptabilité
publique, la direction de la réforme budgétaire élabore
les règles, les méthodes et les systèmes d'information,
budgétaires et comptables de l'Etat nécessaires à la mise
en oeuvre de la loi organique du 1
er
août 2001 relative
aux lois de finances
».
Le directeur de la réforme
budgétaire, M. Frank Mordacq, assure donc, avec ses équipes, la
programmation des différents chantiers permettant la mise en oeuvre de
la loi et la conduite générale du projet, en particulier le
respect du calendrier permettant l'accomplissement de la réforme dans
les délais impartis, garantissant la cohérence des
décisions prises sur les différents chantiers. On notera que la
direction de la réforme budgétaire n'est créée que
«
pour une période s'achevant le 31 décembre
2007
».
Il s'agit donc d'une direction originale et
dédiée à un projet, puisque sa durée de vie est
limitée à la conduite de la mise en oeuvre de la LOLF
.
La direction de la réforme budgétaire travaille en étroite
collaboration avec la direction du budget, la direction générale
de la comptabilité publique (DGCP) et la délégation
interministérielle à la réforme de l'Etat (DIRE). Elle est
organisée en quatre missions :
-
La mission de la modernisation budgétaire
, chargée
de coordonner les chantiers liés aux nouveaux contenus des budgets
ministériels, de participer à l'élaboration des nouveaux
standards et outils des procédures budgétaires, et
d'élaborer les nouveaux référentiels de la loi de
finances. Par ailleurs, elle assure la cohérence des décisions
prises, sur un même sujet, par les différents ministères et
leur apporte conseil et assistance dans la gestion de la transition
vers l'entrée en vigueur complète de la LOLF.
-
La mission normes comptables
est chargée
d'élaborer le référentiel comptable de l'Etat et de
préparer et suivre les travaux du comité des normes
6(
*
)
. L'article 30 de la LOLF prévoit que l'Etat se
soumet aux règles comptables applicables aux entreprises, sous
réserve de spécificités pouvant justifier l'adoption de
règles particulières. Les normes comptables doivent
définir notamment les faits générateurs conduisant
à l'enregistrement d'une opération dans les comptes de l'Etat,
les modalités d'enregistrement, les modes d'évaluation de ces
opérations ainsi que la forme et le contenu des états financiers.
Cette tâche implique de définir le traitement comptable de
certaines opérations inconnues ou traitées de manière
partielle en comptabilité d'entreprise, comme l'enregistrement des
recettes et des créances fiscales, la comptabilisation de certains
actifs ou du passif social, les engagements hors-bilan (cautions, engagements,
garanties etc...).
-
La mission de modernisation comptable
participe à
l'élaboration des normes comptables de l'Etat et à la
détermination de leurs modalités d'application, et met en oeuvre
le nouveau système d'information financier et comptable de l'Etat.
-
La mission de la communication et de la formation
définit,
en liaison avec les administrations concernées, la communication
interministérielle relative à la réforme budgétaire
et comptable et la politique de formation en la matière, et veille
à leur mise en oeuvre.
Le service à compétence nationale ACCORD
7(
*
)
enfin, assure la maîtrise d'ouvrage et la
maîtrise d'oeuvre du projet ACCORD, dont l'objectif est la
réalisation du système d'information pour l'exécution et
la comptabilisation de la dépense de l'Etat. On rappellera que la
deuxième version du progiciel ACCORD devra permettre la mise en oeuvre
de la loi organique du 1
er
août 2001 et des restitutions
comptable qu'elle prévoit en son article 27 : comptabilité
des recettes et des dépenses budgétaires, comptabilité
générale de l'ensemble de ses opérations et
comptabilité destinée à analyser le coût des
différentes actions engagées dans le cadre des programmes.
La mise en oeuvre du progiciel ACCORD
Un
arrêté du ministre délégué au budget et
à la réforme budgétaire du 25 avril 2003, publié au
Journal officiel du 20 juin 2003
8(
*
)
précise la nature et la portée du progiciel ACCORD :
«
Art 1
er
. - Le service à compétence
nationale ACCORD est autorisé à mettre en oeuvre un traitement
automatisé d'informations nominatives dénommé ACCORD
(application coordonnée de comptabilisation, d'ordonnancement et de
règlement de la dépense de l'Etat) dont les finalités
principales sont de permettre aux administrations centrales de suivre en temps
réel l'ordonnancement et l'exécution des dépenses de
l'Etat (dépenses d'investissement et de fonctionnement
exécutées sur le budget général et les comptes
spéciaux du Trésor) ainsi que la tenue de la comptabilité
de ces dépenses et des recettes étrangères à
l'impôt et au domaine.
Au moyen d'une dématérialisation aussi poussée que
possible du circuit de la dépense publique, le traitement ACCORD est
destiné à favoriser la rénovation du cadre
budgétaire de l'Etat en mettant à la disposition des
ministères des outils d'analyse des coûts et de l'exécution
des dépenses ; dans le cadre du programme de réforme de
l'Etat, il doit permettre notamment l'instauration d'une comptabilité
d'exercice (rattachement à un exercice annuel de l'ensemble des droits
constatés et des dépenses engagées dans l'année) et
d'une comptabilité patrimoniale (prise en compte des engagements
contractés par l'Etat et des charges calculées).
Le traitement ACCORD a également pour objet l'amélioration des
relations avec les créanciers fournisseurs des administrations centrales
de l'Etat par la création d'un fichier national d'identification de ces
tiers qui devra permettre aux fournisseurs de consulter par l'internet les
informations relatives à leur situation et autoriser la mise en oeuvre
des contrôles prévus par la réglementation.
Art. 2. - Le traitement ACCORD permet de suivre, au sein d'un flux continu
d'informations, toutes les phases du processus d'exécution de la
dépense de l'Etat, depuis la mise en place des crédits
budgétaires jusqu'au règlement des dépenses ainsi qu'au
suivi comptable des recettes. (...)
Au titre de l'engagement juridique, sont enregistrées les informations
relatives à la commande, dont la date de la commande, la date de
livraison, les articles commandés, le montant de la commande, les
quantités commandées, la TVA, les prix unitaires et le
numéro d'engagement comptable.
Au titre de la liquidation sont enregistrées les informations relatives
au paiement, dont la date d'origine de la créance, la date de demande de
paiement, les conditions de paiement, l'attestation de service fait, la devise
de paiement, le mode de paiement ainsi que la prise en compte du seuil des
marchés publics.
Ces informations sont conservées suivant les règles de la
prescription quadriennale. (...)
Art. 3. - L'alimentation et la mise à jour de la base des données
ACCORD incombent à l'ensemble des intervenants de l'administration
(services utilisateurs, services gestionnaires, ordonnateurs, contrôleurs
financiers et comptables).
Les informations saisies par les ordonnateurs sont, le cas
échéant, visées par le contrôleur financier et
validées par le comptable compétent. Le visa du comptable
entraîne la mise en règlement automatisée des
dépenses.
Les destinataires des opérations traitées sont :
- les services relevant des ordonnateurs principaux, les services en charge du
contrôle financier et les services comptables de l'Etat, dans les limites
de leurs profits d'habilitation respectifs ;
- la Banque de France, pour le règlement par virement ;
- les créanciers, susceptibles d'accéder en temps réel
à la situation de leurs factures, ainsi que les créanciers
opposants et opposés.
Art. 4. - Le traitement ACCORD dispose de liaisons informatisées dans le
cadre de protocoles d'échange standard.
En amont, ACCORD est interfacé avec les applications de gestion des
services ordonnateurs dans la mesure où ces derniers en ont fait la
déclaration préalable à la CNIL. (...)
».
Source : Journal Officiel du 20 juin 2003, page 10351
b) Le comité interministériel d'audit des programmes
Le
gouvernement a souhaité mettre en place une instance de validation
technique des programmes, afin de s'assurer du respect de la lettre de la LOLF
et de garantir l'homogénéité de la nomenclature
budgétaire soumise au Parlement. Le Comité
interministériel d'audit des programmes (CIAP), présidé
par M. André Barilari, inspecteur général des
finances, est chargé de cette mission. Cet organe spécialement
créé pour la mise en oeuvre de la LOLF, à l'instar de la
direction de la réforme budgétaire, est composé de membres
des différents corps d'inspection ministériels et
interministériels. Le choix de confier la mission d'auditer les
programmes à des personnalités « au fait » de
la vie administrative mais ne relevant ni des ministères soumettant
leurs projets de programmes, ni de la direction du budget, apparaît
judicieux : il devrait éviter la complaisance vis-à-vis des
projets de programme, et permet de conférer une certaine
indépendance à cette instance d'évaluation.
Votre commission des finances voit donc d'un « très bon
oeil » la création de ce comité et considère que
sa composition est garante de la qualité et de l'indépendance de
ses travaux.
Elle s'inquiète toutefois de la charge de travail
considérable de ce comité, qui devra examiner l'essentiel des
programmes ministériels dans un laps de temps particulièrement
réduit
. Or, ses moyens humains sont limités. Il est pourtant
essentiel qu'un examen approfondi puisse s'exercer de manière
égale à l'égard de l'ensemble des programmes.
Le Comité interministériel d'audit des programmes (CIAP)
Le
Comité interministériel d'audit des programmes a
été mis en place par décision du Conseil
interministériel à la réforme de l'Etat (CIRE) du 15
novembre 2001 dans le cadre de l'application de la LOLF, et ouvert le
1
er
octobre 2002.
Le CIAP a reçu mission de «
garantir que les informations
utilisées dans les discussions budgétaires reposeront sur des
bases objectives. Plus précisément, le CIAP devra vérifier
et garantir :
- la qualité initiale des programmes au regard des prescriptions de la
LOLF;
- la fiabilité des résultats affichés et
l'objectivité des commentaires.
Pour ce faire, le CIAP procédera à des audits initiaux de
programmes en amont de la discussion des projets de loi de finances, d'abord
sous forme d' « audits initiaux » pour les nouveaux
programmes, ensuite chaque année sous forme d' « audits
de réalisation ». Le calendrier de mise en oeuvre de la LOLF
prévoit que le gouvernement devra produire, sous forme d'annexe au PLF
2005, une présentation des crédits par programme conforme aux
prescriptions de la LOLF.
Des audits initiaux pourront s'effectuer dès 2003, sur la base
d'avant-projets de programmes, ce qui permettra aux ministères d'en
tirer les enseignements utiles avant la préparation du PLF
2005
»
9(
*
)
.
Ainsi que l'indiquait Alain Lambert, ministre délégué au
budget et à la réforme budgétaire, à l'occasion de
l'ouverture du Comité interministériel d'audit des programmes
(CIAP), à Bercy, le 1
er
octobre 2002, «
ces
audits ont un objectif précis que je tiens à vous rappeler. Ils
doivent donner à ceux qui ont la charge, successivement, de proposer,
d'adopter, de mettre en oeuvre et de contrôler l'exécution des
programmes, les moyens d'apprécier la qualité de ces programmes
dans la totalité de leurs composantes.
«
Au stade des audits initiaux, les critères de
qualité porteront sur la cohérence du périmètre des
programmes, sur les objectifs qui leur sont assignés, sur les
indicateurs associés, sur les systèmes d'information qui
produisent ces indicateurs, sur les actions retenues au service des objectifs,
sur le système de pilotage des réseaux, et encore, sur le
système de contrôle de gestion permettant la maîtrise des
moyens et des coûts.
«
Au stade des audits de réalisation, dans la mesure
où les appréciations sur les résultats obtenus
constitueront un élément central des discussions
budgétaires, les critères de qualité seront centrés
sur la fiabilité des résultats chiffrés ainsi que sur la
garantie d'objectivité et d'exhaustivité des commentaires
relatifs aux écarts constatés entre les objectifs et les
réalisations. »
A l'intention des membres du CIAP, le ministre ajoutait :
«
Vous allez ainsi mettre en oeuvre un contrôle
qualité, qui devra garantir que les administrations sont en phase avec
les objectifs voulus par le législateur.
«
Votre rôle sera, en quelque sorte, celui de
« chien de berger » dans la marche vers la réforme.
Vous devrez agir dans le dialogue, en recherchant l'adhésion et en
faisant preuve de pédagogie.
«
En conclusion, ce changement de modèle de budget fait
apparaître la nécessité d'une réforme du cadre de la
gestion publique et plus largement, d'une réforme de l'Etat. Il ne
présuppose pas la réforme de l'Etat mais l'induit.
«
Si elle ne lance pas le mouvement de réforme de l'Etat
engagé ici ou là dans les services, la réforme
budgétaire lui apporte un cadre.
«
Chaque loi de finances, chaque loi de règlement, au
travers des informations annexées aux programmes et de leurs instruments
de mesures, devra permettre d'en rendre visible le degré d'avancement.
(...)
».
La conception de la mise en oeuvre de la loi organique du 1
er
août 2001 relative aux lois de finances implique, outre les structures
administratives existantes ou créées spécifiquement pour
cet objet, de nombreux consultants privés. La direction de la
réforme budgétaire a en effet fait appel à plusieurs
cabinets de consultants afin de gérer la mise en oeuvre des dispositifs
informatiques ou d'accompagner les démarches en matière de
gestion du changement dans les administrations. Ainsi :
- le cabinet de consultants
Cap Gemini Ernst & Young
aide la
direction générale de la comptabilité publique à
tirer les conséquences pratiques du nouveau plan comptable de
l'Etat ;
- l'agence de publicité
Publicis
a pris en charge la
communication relative à cette réforme (rédaction de
«
La lettre de la Moderfie
», animation du site
Internet, organisation de réunions et de séminaires de
travail) ;
- le cabinet de consultants
Boston Consulting Group
s'est vu
confier une mission d'assistance à la conduite de projet ;
- enfin, une centaine de consultants du cabinet de consultants
Accenture
et des entreprises
IBM
et
PeopleSoft
collaborent
avec environ 150 agents de l'Etat au sein du service à
compétence nationale (SCN) ACCORD.
2. Les structures internes aux ministères
Si la
mise en oeuvre de la LOLF implique d'importants travaux au niveau
interministériel (harmonisation des concepts et des procédures
découlant des dispositions de la loi organique elle-même,
coordination des travaux des ministères, définition des normes
comptables, configuration et installation du progiciel ACCORD...), l'essentiel
du travail de mise en oeuvre et d'adaptation des structures et
procédures sera pris en charge par les administrations centrales des
différents ministères, compte tenu des organisations et des
enjeux spécifiques que la LOLF soulève pour chacun d'entre eux.
Il convient de rappeler que le Comité interministériel sur la
réforme de l'Etat (CIRE) du 15 novembre 2001 a créé un
comité de pilotage interministériel (COPIL), réunissant
l'ensemble des directeurs financiers des ministères.
Au sein des ministères, des « équipes
projets », dirigées par un chef de projet opérationnel
et placées sous l'autorité des directions financières des
ministères, ont été créées. La partie du
rapport de la Cour des comptes sur l'exécution des lois de finances pour
l'année 2002 consacrée au suivi de la mise en oeuvre de la loi
organique souligne toutefois
l'hétérogénéité des organisations mises
en place pour animer la mise en oeuvre de la LOLF
, et en particulier,
l'inégale implication des directives opérationnelles. Il
paraît pourtant essentiel que les structures de pilotage soient en mesure
de mobiliser les différents services de l'administration, et que
l'appropriation de la réforme ne soit pas limitée aux directions
financières, compte tenu de l'importance des conséquences de sa
mise en oeuvre pour l'ensemble des services des ministères.
A cet égard, la Cour des comptes met en avant l'exemple du
ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des
affaires rurales ou, si «
la création d'une équipe
projet complète est seulement prévue en 2003
»,
«
un « comité de correspondants »
réunit chaque mois, depuis le début de l'année 2002, des
représentants des administrations centrales et des services
déconcentrés autour de la direction financière. Cela
favorise la bonne information des services opérationnels et facilite la
préparation de la position du ministère au sein des
COPIL
»
10(
*
)
.
B. L'EXERCICE DE NOUVELLES MISSIONS PAR LA COUR DES COMPTES
1. Les premiers travaux de la Cour des comptes dans le cadre de la LOLF
Le rapport préliminaire sur l'exécution des lois de finances présenté en application de l'article 58-3 de la loi organique du 1 er août 2001, dont votre commission des finances a été destinataire au mois de mai de cette année, dans la perspective du débat d'orientation budgétaire, constitue le premier document nouvellement prévu par la LOLF produit par la Cour des comptes 11( * ) . Il constitue un outil particulièrement utile pour enrichir le débat d'orientation budgétaire, dont la loi organique renforcera considérablement le contenu et la portée lorsque le gouvernement présentera à cette occasion la nomenclature budgétaire envisagée pour l'année suivante, à compter de 2006.
Le premier rapport préliminaire sur l'exécution des lois de finances présenté en application de l'article 58-3 de la loi organique du 1 er août 2001 (mai 2003)
En
introduction, la Cour des comptes note que «
le rapport
préliminaire s'analyse comme une contribution de la Cour au débat
d'orientation budgétaire, qui se tient au Parlement au printemps. Il
comprend une mise en perspective des résultats, dans le temps et au
regard des engagements européens de la France.
«
Il replace, en effet, les résultats de l'exécution
de l'exercice antérieur dans le cadre d'une analyse rétrospective
de moyen terme, et développe des considérations portant sur la
dernière loi de finances initiale votée (les déficits, les
grandes masses de crédits et de recettes) et sur le début de
l'exécution en cours.
«
La Cour, conformément à l'article 58, dernier
alinéa, de la nouvelle loi organique, qui permet au ministre de faire
accompagner, le cas échéant, le rapport de ses réponses, a
soumis ses observations à la contradiction du ministre de
l'économie, des finances et de l'industrie
».
On notera que ce rapport présente, outre des informations sur
l'exécution de l'exercice 2002, une analyse de l'exécution des
premiers mois de l'année 2003, qui elle, n'est pas explicitement
prévue par la LOLF.
Votre commission des finances tient à souligner à nouveau la
qualité des travaux de la Cour des comptes sur la mise en oeuvre de la
LOLF, figurant dans son rapport préliminaire sur l'exécution des
lois de finances pour 2003. Ce rapport inclut de nombreux
éléments comparatifs sur l'état de préparation des
ministères à la mise en oeuvre de la LOLF et souligne
«
une préoccupation trop tardive au niveau
politique
».
Votre commission des finances insiste sur l'importance que revêt
l'attitude de la Cour des comptes, à la fois disponible et vigilante,
s'agissant de la mise en oeuvre de la LOLF.
2. Les travaux spécifiques confiés à la Cour des comptes par la LOLF
La loi
organique confie à la Cour des comptes de nouvelles missions relatives
à l'information et à l'assistance du Parlement dans ses missions
de contrôle de l'exécution du budget et d'évaluation de
toute question relative aux finances publiques, telles que définies
à l'article 57 de la loi organique, ainsi qu'à la
certification des comptes de l'Etat. Elle permet donc de donner un
véritable contenu à la disposition du dernier alinéa de
l'article 47 de la Constitution selon laquelle «
la Cour des
comptes assiste le Parlement et le Gouvernement dans le contrôle de
l'exécution des lois de finances
».
La Cour des comptes devra ainsi, lorsque l'ensemble des dispositions de la
LOLF sera entré en vigueur :
- répondre aux demandes d'assistance formulées par le
président et le rapporteur général de la commission
chargée des finances de chaque assemblée dans le cadre des
missions de contrôle et d'évaluation (1° de l'article
58) ;
- réaliser toute enquête demandée par les commissions de
l'Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances
sur la gestion des services ou organismes qu'elle contrôle (2°
de l'article 58) ;
- déposer un rapport préliminaire conjoint au
dépôt par le gouvernement du rapport sur l'évolution de
l'économie nationale et sur les orientations des finances publiques,
pouvant donner lieu à un débat d'orientation budgétaire
à l'Assemblée nationale et au Sénat (3° de
l'article 58) ;
- déposer un rapport conjoint au dépôt du projet de
loi de règlement, relatif aux résultats de l'exécution de
l'exercice antérieur et aux comptes associés, qui, en
particulier, analyse par mission et par programmes, l'exécution des
crédits (4° de l'article 58) ;
- certifier la régularité, la sincérité et la
fidélité des comptes de l'Etat, en accompagnant cette
certification du compte rendu des vérifications
opérées (5° de l'article 58) ;
- déposer un rapport conjoint au dépôt de tout projet
de loi de finances sur les mouvements de crédits opérés
par voie administrative dont la ratification est demandée par ledit
projet de loi de finances (6° de l'article 58).
Ces tâches demanderont un travail considérable à la Cour
des comptes, s'agissant notamment de la certification des comptes de l'Etat.
Votre commission souligne que la Cour des comptes s'est toutefois mise
« en ordre de marche » de manière
particulièrement rapide et efficace, de façon en particulier
à répondre favorablement aux demandes d'assistance
formulées par votre commission des finances.
C. UN INDISPENSABLE ACCOMPAGNEMENT DE LA RÉFORME PAR LE PARLEMENT
1. Une implication nécessaire de l'ensemble des commissions permanentes
Les
commissions des finances auront un rôle important dans la mise en oeuvre
de la loi organique : selon les termes de l'article 57,
«
elles suivent et contrôlent l'exécution des lois de
finances et procèdent à l'évaluation de toute question
relative aux finances publiques
». Pour autant,
les autres
commissions permanentes de l'Assemblée nationale et du Sénat
joueront un rôle important à l'occasion de l'examen des lois de
finances
. S'agissant des commissions chargées des affaires sociales,
elles sont particulièrement concernées par l'article 52 de
la loi organique qui dispose que : «
en vue de l'examen et du
vote du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la
sécurité sociale de l'année suivante par le Parlement, le
Gouvernement présente à l'ouverture de la session ordinaire un
rapport retraçant l'ensemble des prélèvements obligatoires
ainsi que leur évolution
». Cette disposition, qui a
reçu une première application en octobre 2002, invite les
commissions chargées des finances et des affaires sociales à
partager et à rapprocher encore davantage que cela n'a probablement
été le cas jusqu'ici, leurs analyses en vue de la
préparation de l'examen des projets de loi de finances et de financement
de la sécurité sociale.
Toutes les commissions permanentes sont concernées par les modifications
portant sur le calendrier et les règles de vote applicables aux lois de
finances et les informations qui leur sont annexées.
Par ailleurs,
les dispositions suivantes concernent l'ensemble des commissions
permanentes
:
- les décrets établissant la rémunération de
services rendus par l'Etat non ratifiés dans la plus prochaine loi de
finances sont caducs, le suivi de cette ratification incombant aux commissions
parlementaires (article 4) ;
- le principe de la structuration du budget de l'Etat en missions et en
programmes impliquera une modification des périmètres
attribués aux rapporteurs spéciaux et aux rapporteurs pour avis,
dont le champ de compétence sera désormais vraisemblablement
défini en fonction des missions (article 7), mais peut-être
également de programmes, s'agissant notamment de certains rapports pour
avis ;
- l'obligation d'information des commissions chargées des finances
et des «
autres commissions concernées
» sur
les virements et les transferts de crédits opérés par
décret (article 12) ;
- l'obligation de transmission pour information des décrets
d'annulation de crédits aux commissions chargées des finances et
aux «
autres commissions concernées
»
(article 14).
L'implication de l'ensemble du Parlement est essentielle pour le succès
de la loi organique relative aux lois de finances, qui constitue une occasion
nouvelle et importante de dynamiser davantage le débat
budgétaire. En particulier, l'information fournie par les rapports
annuels de performance pourrait être l'occasion pour les commissions
saisies pour avis de se pencher sur des points particuliers de la politique
menée par les ministères, en examinant, par exemple, la
pertinence des objectifs et des indicateurs retenus par le gouvernement.
Il convient de reconnaître qu'il n'est pas aisé pour le Parlement
dans son ensemble de s'impliquer dans la mise en oeuvre de la LOLF et de s'en
approprier l'ensemble des dispositions, alors même que le calendrier
législatif est particulièrement chargé.
Cet
investissement constitue toutefois l'une des clefs du succès de la
réforme engagée
par le vote de la loi organique du
1
er
août 2001 relative aux lois de finances, dont le
Parlement est à l'origine.
2. La discussion budgétaire : mettre fin au « théâtre d'ombres » ?
a) Un exercice souvent dénoncé comme largement virtuel
Edgar
Faure avait eu une formule célèbre au sujet de la discussion
budgétaire, en parlant de «
litanie, liturgie et
léthargie
»
12(
*
)
. A titre
d'exemple, le Sénat a consacré plus de 134 heures à
la discussion du projet de loi de finances pour 2003 contre moins de
3 heures à la discussion du projet de loi de règlement pour
2001, ce qui souligne l'écart considérable entre le temps
consacré à l'examen des prévisions et celui
consacré à l'examen des réalisations. Or, la discussion du
projet de loi de finances initiale constitue aujourd'hui pour d'aucuns un
exercice largement virtuel, pour plusieurs raisons.
Elle consiste trop souvent à comparer les prévisions de
l'année à venir avec celles effectuées une année
plus tôt pour l'exercice en cours
. Or, un « bon
budget » pour un ministre, et trop souvent, pour les parlementaires
et les citoyens, est un budget qui augmente par rapport à l'année
précédente, comme si cette progression était le gage d'une
plus grande contribution du ministère concerné à la
réalisation de ses objectifs. L'objectif revendiqué depuis
plusieurs années par les ministres de la culture successifs d'atteindre
le cap symbolique de 1 % des crédits du budget de l'Etat est un
exemple caractéristique de
la mauvaise coutume qui consiste à
mesurer l'importance d'une politique publique à la seule aune de la
ressource qui lui est consacrée
. Chacun peut le constater : les
crédits de la culture représentent près de 1 % du
budget de l'Etat notamment grâce à l'inscription au budget du
ministère de crédits sans rapport avec ses capacités
d'intervention
13(
*
)
. Il convient de souligner
avec force que l'énonciation de ce type d'objectifs constitue une
aberration, et n'est absolument pas porteuse de sens.
Un bon budget n'est
pas un budget qui augmente (dans une entreprise, une telle affirmation
apparaît d'emblée dénuée de tout fondement), mais un
budget qui permet de réaliser des objectifs déterminés
avec un montant de ressources minimal, et donc, qui caractérise une
action efficace, efficiente et économe des deniers de l'Etat
. Votre
rapporteur insiste sur ce point, car il s'agit véritablement d'une
« révolution culturelle » pour les citoyens, les
administrations, et bien souvent, pour les parlementaires eux-mêmes.
La discussion du projet de loi de finances initiale constitue également
un exercice pour une large part virtuel, car
les dotations votées par
le Parlement ne tiennent compte ni des reports de crédits d'une
année sur l'autre, ni des gels ou annulations de crédits
qui
sont souvent décidés dès le début de l'exercice.
Par conséquent, les crédits votés peuvent présenter
de très importants écarts avec la réalité des
sommes disponibles au début de l'exercice. D'ailleurs, les
ministères réalisent, au début de chaque année, des
documents intitulés «
programmes d'emploi des
crédits
» (PEC), qui constituent l'outil de
référence pour l'exécution budgétaire de
l'exercice. Si ces programmes respectent les enveloppes des chapitres
votés par le Parlement, ils tiennent également compte, d'une
part, des reports de crédits et de charges qui ne sont pas
définitivement arrêtés lors de l'élaboration de la
loi de finances et, d'autre part, des autres mouvements de crédits tels
que les fonds de concours et les ventes de domaines.
Ce décalage, techniquement explicable, est toutefois regrettable car il
conduit le Parlement à se prononcer sur des enveloppes dont il ne
connaît pas précisément le contenu.
Le Parlement ne
dispose ainsi des données exactes et définitives qu'en
exécution et non en prévision.
Il ne s'agit pas pour autant de considérer que ce décalage rend
la discussion des crédits devant être ouverts l'année
suivante inutile, mais de relativiser la portée de celle-ci. La loi
organique du 1
er
août 2001 relative aux lois de finances a
entendu rendre plus transparente et sincère l'exécution de la loi
de finances initiale, en encadrant davantage les possibilités de reports
et d'annulation de crédits (articles 14 et 15), et en disposant que
«
tout acte, quelle qu'en soit la nature, ayant pour objet ou pour
effet de rendre les crédits indisponibles, est communiqué aux
commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées
des finances
» (II de l'article 14). Toutefois, il
convient de noter que le législateur organique n'a pas entendu interdire
ou limiter l'usage des mécanismes de régulation
budgétaire, considérant qu'il serait dangereux, et, en tout
état de cause, illusoire, d'empêcher le gouvernement de disposer
d'un outil souple de pilotage du solde budgétaire. Il a même
explicitement validé cet usage de la régulation budgétaire
en disposant, au I de l'article 14 de la LOLF, que
«
afin de prévenir une détérioration de
l'équilibre budgétaire défini par la dernière loi
de finances afférente à l'année concernée, un
crédit peut être annulé par décret pris sur le
rapport du ministre chargé des finances (...)
».
Le
législateur organique a donc souhaité encadrer les
procédures et s'assurer de leur transparence vis-à-vis du
Parlement et des citoyens plutôt que de brider le gouvernement dans sa
gestion fine du solde budgétaire
.
b) Les expérimentations en cours pour dynamiser la discussion budgétaire
La discussion budgétaire a connu depuis quelques années, au Sénat comme à l'Assemblée nationale, des expérimentations visant à la rendre plus dynamique et plus vivante. En particulier, il s'agit, pour l'Assemblée nationale, de la procédure d'examen en commission des fascicules budgétaires. Pour sa part, le Sénat organise un débat sur les recettes des collectivités locales et a expérimenté puis développé une procédure de « questions-réponses » lors de la discussion de la seconde partie de la loi de finances portant sur les crédits demandés pour certains ministères.
Les expérimentations visant à dynamiser les débats sur les projets de loi de finances
Dès avant le vote de la loi organique du 1
er
août 2001 relative aux lois de finances, des initiatives avaient
été prises dans les deux Assemblées afin de dynamiser
l'examen des projets de loi de finances :
Le 26 mai 1999,
la commission des finances de l'Assemblée
nationale
a entendu une communication de son rapporteur
général sur la révision des conditions d'examen des
fascicules budgétaires.
Notre collègue Didier Migaud, alors rapporteur général,
soulignait que «
cette révision pourrait intervenir,
à titre expérimental, sur un nombre limité de budgets,
dès le prochain projet de loi de finances, dans le but de valoriser le
travail au sein des commissions saisies pour avis et d'éviter les
redondances résultant de l'examen des fascicules budgétaires au
sein de la Commission des finances et des commissions saisies pour avis, puis
en séance publique.
«
Il a souligné que la réforme devrait se traduire,
concrètement, par un approfondissement sensible des travaux menés
au sein des commissions saisies pour avis, lesquels reposeraient sur une
présentation du budget par le ministre concerné, les
interventions des rapporteurs spéciaux et des rapporteurs pour avis, les
observations et questions des députés présents et les
réponses du ministre aux différents intervenants. Il a
souligné que les travaux des commissions saisies pour avis seraient
ouverts à l'ensemble des parlementaires, lesquels auraient toute
liberté pour s'exprimer et présenter au ministre les questions
qu'ils souhaitent.
«
Il a précisé que les travaux menés au sein
des commissions saisies pour avis sur les fascicules faisant l'objet de cette
expérience, bénéficieraient des mêmes
modalités de publicité que la séance publique, à
savoir une retransmission télévisée, un compte-rendu
analytique et un compte-rendu intégral, publié au Journal
Officiel « débats », en annexe au compte rendu de la
séance publique au cours de laquelle s'est déroulé
l'examen du fascicule budgétaire concerné. Il a par ailleurs fait
observer que ces réunions des commissions saisies pour avis pourraient
être ouvertes à la presse, ainsi qu'au public. (...)
«
Le Rapporteur général a souligné que cette
réforme du travail en commission serait accompagnée de
l'introduction d'une procédure de questions écrites
budgétaires, conformément à une proposition
présentée en ce sens par le groupe UDF, afin de renforcer la
capacité d'expression des députés. Il a estimé que
cette procédure pourrait s'inspirer de la formule retenue pour celle des
questions écrites signalées : les questions écrites
budgétaires pourraient donc être transmises au Gouvernement quinze
jours avant l'examen en séance publique du fascicule budgétaire
faisant l'objet de la réforme, les députés devant disposer
de la réponse lors du débat en séance publique. (...)
«
Il a ensuite fait observer qu'en conséquence de ces
avancées, l'examen des fascicules budgétaires concernés
ferait l'objet, en séance publique, d'un débat plus
resserré, centré sur la présentation et
l'appréciation politique du budget. Il a indiqué que seuls
seraient appelés à intervenir, à ce stade, pour une
durée limitée, les rapporteurs des commissions, un orateur par
groupe et le ministre (...)
».
Lors des conférences des Présidents de l'Assemblée
nationale des 22 et 29 juin 1999, a été décidée
l'organisation de la discussion du projet de loi de finances pour 2000,
prévoyant que cinq budgets (affaires étrangères,
défense, jeunesse et sports, justice et logement) intéressant
chaque commission saisie pour avis seraient examinés selon une
procédure expérimentale comportant :
- un
examen approfondi en commission
(...) ;
- la mise en oeuvre d'une procédure de
questions écrites
budgétaires
(...) ;
- une
discussion solennisée en séance publique (...).
Pour la discussion du projet de loi de finances pour 2001, six budgets
(économie et finances, enseignement supérieur, intérieur,
jeunesse et sports, logement et ville) ont été examinés
selon la procédure expérimentale.
Pour la discussion du projet de loi de finances pour 2002, sept budgets
(recherche et technologie, logement, culture, affaires étrangères
et coopération, jeunesse et sports, justice, économie et
finances) ont été examinés selon la procédure
expérimentale.
L'Assemblée nationale a mis un terme à cette procédure
qui n'a pas été utilisée à l'occasion de l'examen
du projet de loi de finances pour 2003
.
Au
Sénat
, les propositions de rénovation de la discussion
budgétaire ont été élaborées puis
présentées par notre ancien collègue, M. Alain Lambert,
alors président de la commission des finances, lors de la
Conférence des Présidents du 7 novembre 2000, qui les a
pleinement avalisées.
Comme l'a souligné alors M. Christian Poncelet, Président du
Sénat, en prélude à la discussion du projet de loi de
finances initiale pour 2001, «
notre intention commune a
été de dynamiser la discussion en prenant trois directions :
raccourcir la durée globale des débats, compte tenu de l'ensemble
des travaux d'information que nous avons conduit au cours de l'année
écoulée ; réaffirmer la vocation particulière
du Sénat, représentant constitutionnel des collectivités
territoriales... ; enfin, rendre plus vivant et plus pertinent le
débat sur les dépenses
».
Un débat sur les recettes des collectivités locales
était organisé pour la première fois à l'occasion
de la discussion du projet de loi de finances pour 2001
. Il traduisait la
volonté du Président du Sénat et de la commission des
finances de souligner la vocation institutionnelle du Sénat,
représentant constitutionnel des collectivités territoriales. Son
organisation permettait, par ailleurs, de regrouper sur une seule
journée la discussion des articles relatifs aux finances locales.
Par ailleurs, une procédure expérimentale dite des
« questions-réponses » a été
inaugurée à l'occasion de la discussion du projet de loi de
finances pour 2001
. Cette procédure, fondée sur le principe
d'une réponse immédiate du gouvernement aux différents
intervenants, rapporteurs et orateurs des groupes, s'inspire des questions
orales. Chaque intervenant dispose de 5 minutes pour poser sa question.
Après la réponse du ministre d'une durée maximale de 3
minutes, il peut répondre pendant deux minutes de plus. Lors du vote
sur l'ensemble du projet de loi, M. le Président du Sénat avait
tenu à porter une première appréciation sur cette
innovation procédurale : «
Deux budgets, celui des
transports terrestres et celui de l'environnement, conformément à
la proposition de la commission des finances (...) ont fait l'objet d'une
expérimentation reposant sur la procédure des
questions-réponses. (...) Pour l'heure, je me plais à constater
que nous avons pu avoir deux débats vivants, animés, au cours
desquels tous les sujets ont pu être abordés, loin des monologues
habituels, qui finissent par lasser ceux qui prêtent attention aux
débats parlementaires
».
Pour la discussion du projet de loi de finances initiale pour 2002, la
procédure des questions-réponses a été
développée et a concerné quatre fascicules
supplémentaires : culture, urbanisme et logement, défense,
santé et solidarité.
Enfin, à l'occasion de la discussion du projet de loi de finances
initiale pour 2003, le champ d'application de la procédure des
« questions-réponses » a été
étendu à quatre budgets supplémentaires, soit 10 budgets
au total : la jeunesse et l'enseignement scolaire, le travail, la
santé et la solidarité, la culture, la sécurité, la
défense, l'écologie et le développement durable,
l'urbanisme et le logement, les transports terrestres et la justice.
La procédure expérimentale a confirmé son
efficacité et son succès
: les temps de parole
fixés ont globalement été respectés, et les
sénateurs ont utilisé cette procédure pour faire de
l'examen des crédits budgétaires un moment important du
contrôle parlementaire, donnant aux débats plus de dynamisme et
d'intensité. Ainsi, les questions ont donné lieu à des
interventions plus synthétiques, ciblant les problèmes
importants, les réponses argumentées des ministres suivant
immédiatement les questions.
Sources : compte-rendu de la réunion de la commission des
finances de l'Assemblée nationale du 26 mai 1999 ; Rapports annuels
du service de la séance du Sénat
c) Vers un « chaînage vertueux » des discussions budgétaires
A l'exercice pour une large part virtuel que constitue la discussion des projets de loi de finances initiaux s'oppose l'exercice, bien réel, mais hélas, aride, de la discussion des projets de loi de règlement. Il s'agit jusqu'à maintenant, dans la culture parlementaire et administrative, d'une loi comptable, d'un acte formel et dénué de portée politique : le Parlement approuve les comptes de l'Etat, comme il approuve des conventions internationales, c'est-à-dire sans s'impliquer réellement, conscient que les comptes de l'Etat comme les accords internationaux, sont « gravés dans le marbre » avant même de lui être soumis.
Les temps d'examen des projets de loi de finances par la commission des finances et en séance publique au Sénat
Le temps
consacré à l'examen des différents projets de loi de
finances souligne le décalage entre l'organisation des débats
portant sur les projets de loi de finances initiale et ceux portant sur les
projets de loi de règlement.
Au cours de la session 2002-2003, la commission des finances du Sénat a
consacré 52 heures et 59 minutes de réunion à
l'examen du projet de loi de finances initiale pour 2003 contre 6 heures
et 40 minutes pour celui du projet de loi de finances rectificative pour
2002 et seulement 31 minutes pour celui du projet de loi de
règlement pour 2001.
En séance publique, pas moins de 134 heures et 45 minutes ont
été consacrées à la discussion et au vote du projet
de loi de finances initiale pour 2003, contre 11 heures et 55 minutes
pour le projet de loi de finances rectificative pour 2002, et moins de
3 heures pour le projet de loi de règlement pour l'année
2001.
La loi organique relative aux lois de finances a pour ambition
d'accroître considérablement la portée de la discussion des
lois de règlement, appelée à devenir un temps fort de la
vie parlementaire
. Les modifications portent à la fois sur le
calendrier de la discussion et sur les informations soumises au Parlement
à cette occasion.
En premier lieu, la discussion des projets de loi de règlement, qui,
jusqu'à ce jour, était inscrite à l'ordre du jour du
Parlement « par défaut », et souvent, de trop
nombreux mois après la clôture de l'exercice budgétaire
concerné, est désormais encadrée par la loi organique,
dont l'article 41 dispose que «
le projet de loi de finances
de l'année ne peut être mis en discussion devant une
assemblée avant le vote par celle-ci, en première lecture, sur le
projet de loi de règlement afférent à l'année qui
précède celle de la discussion dudit projet de loi de
finances
». Cette contrainte apportée à
l'organisation de l'ordre du jour du Parlement est un élément
essentiel du « chaînage vertueux » souhaité
par le législateur organique en matière de discussion des projets
de loi de finances.
En second lieu, le projet de loi de règlement sera désormais
accompagné d'informations très complètes sur
l'utilisation, par mission et par programme, des crédits de l'exercice
budgétaire concerné. Ainsi, le 4° de l'article 58 de la
LOLF dispose que la mission d'assistance de la Cour des comptes au Parlement
comporte notamment «
le dépôt d'un rapport
conjoint au dépôt du projet de loi de règlement, relatif
aux résultats de l'exécution de l'exercice antérieur et
aux comptes associés qui, en particulier, analyse par mission et par
programme, l'exécution des crédits
». Par ailleurs,
l'article 54 de la LOLF détaille les informations jointes au
projet de règlement, qui comportent notamment «
des annexes
explicatives, développant, par programme ou par dotation, le montant
définitif des crédits ouverts et des dépenses
constatées, en indiquant les écarts avec la présentation
par titre des crédits ouverts, et les modifications de crédits
demandées ( ...) ; les rapports annuels de performances,
faisant connaître, par programme, en mettant en évidence les
écarts avec les prévisions des lois de finances de l'année
considérée, ainsi qu'avec les réalisations
constatées dans la dernière loi de règlement :
a) les objectifs, les résultats attendus et obtenus, les indicateurs et
les coûts associés ;
b) la justification pour chaque titre, des mouvements de crédits et des
dépenses constatées, en précisant, le cas
échéant, l'origine des dépassements de crédits
exceptionnellement constatés pour cause de force majeure ;
c) la gestion des autorisations d'emplois (...)
».
Cette disposition constitue une des clefs de voûte de la réforme
engagée par la LOLF, puisqu'elle conduit à
constater des
résultats avant de se prononcer sur des prévisions.
Elle vise
à
permettre aux parlementaires d'engager la discussion du projet de
loi de finances initiale « en pleine connaissance de
cause ».
Aujourd'hui, la discussion du projet de loi de règlement ne mobilise que
peu les parlementaires. Elle devra, dans le cadre défini par la loi
organique relative aux lois de finances, concerner l'ensemble des rapporteurs
spéciaux des commissions des finances, mais également impliquer
les autres commissions permanentes, et, en particulier, les rapporteurs pour
avis.
En effet, la discussion du projet de loi de finances initiale ne
prendra tout son sens que par comparaison avec les données jointes au
projet de loi de règlement
. Il paraît ainsi parfaitement
concevable que certaines commissions puissent se saisir pour avis d'une partie
du projet de loi de règlement pour faire valoir un certain nombre
d'observations en vue de préparer la discussion du projet de loi de
finances initiale à venir.
d) L'impact de l'extension du droit d'amendement des parlementaires
Votre
commission des finances considère que l'élargissement du droit
d'amendement des parlementaires - l'article 47 de la LOLF permettant en
effet aux parlementaires de créer, supprimer ou modifier le
périmètre d'un programme - rendra nécessaire une
coordination accrue en amont de l'examen du projet de loi de finances
initiale, tant entre les différentes commissions permanentes au sein
d'une Assemblée qu'entre le Parlement et le gouvernement
, compte
tenu des conséquences de la création ou de la modification d'un
programme existant sur la définition des objectifs et des indicateurs
qui lui sont associés.
S'agissant de la recevabilité des amendements d'origine parlementaire,
l'article 40 de la Constitution dispose que «
les propositions et
amendements formulés par les membres du Parlement ne sont pas recevables
lorsque leur adoption aurait pour conséquence soit une diminution des
ressources publiques, soit la création ou l'aggravation d'une charge
publique
». Cette disposition se traduit, au Sénat, par
l'article 46, alinéa 2, de son règlement, qui dispose que
«
les amendements tendant à porter un crédit
budgétaire au-delà du chiffre dont l'initiative a
été prise par le Gouvernement sont irrecevables et ne peuvent
être mis aux voix par le président
». Ainsi, en
pratique, les amendements tendant à majorer un crédit
budgétaire ne sont pas distribués, sauf s'ils ont pour objet de
rétablir un crédit réduit ou supprimé par
l'Assemblée nationale ou de coordonner un crédit avec une
disposition votée en première partie de la loi de finances.
Aux termes du premier alinéa de l'article 47 de la loi organique
relative aux lois de finances «
au sens des articles 34 et 40 de
la Constitution, la charge s'entend, s'agissant des amendements s'appliquant
aux crédits, de la mission
».
La mise en oeuvre de
cette disposition implique un élargissement assez important du pouvoir
d'amendement des parlementaires
, et, peut-être même, une
révision du règlement du Sénat sur ce point.
II. UNE LOI ORGANIQUE DÉJÀ EN PARTIE ENTRÉE EN VIGUEUR
On rappellera en premier lieu que l'entrée en vigueur des dispositions de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances est étalée dans le temps, le législateur ayant souhaité préparer progressivement les acteurs aux nouvelles procédures, et surtout, accorder aux administrations un délai suffisant pour la réflexion et la préparation de la mise en place des dispositions, s'agissant en particulier de celles liées à la nomenclature budgétaire et à la comptabilité publique, qui exigent un important travail de conception préalable.
A. LES DISPOSITIONS RELATIVES A L'INFORMATION ET AU CONTRÔLE DU PARLEMENT14( * )
1. L'information du Parlement
Les
principales mesures de la LOLF afférentes à l'information du
Parlement déjà entrées en vigueur sont :
- les délais de dépôt des « jaunes »
(2
ème
alinéa de l'article 39) et des
réponses aux questionnaires parlementaires (article 49), depuis le
1
er
janvier 2002 ;
- les rapports joints aux projets de loi de finances (articles 50 et 53),
assurant une meilleure information du Parlement notamment grâce à
la publication du programme pluriannuel des finances publiques et à
l'occasion du « débat consolidé » sur
l'évolution des prélèvements obligatoires
(article 52), depuis le 1
er
janvier 2002 ;
- les règles relatives au débat d'orientation
budgétaire, et, en particulier, le contenu du rapport sur
l'évolution de l'économie nationale et sur les orientations
des finances publiques que le gouvernement présente au Parlement avant
la fin du mois de juin (article 48, à l'exception du 4°, qui
prévoit la présentation de la liste des missions, des programmes
et des indicateurs de performances associés à chacun de ces
programmes, envisagés pour le projet de loi de finances de
l'année suivante), entrées en vigueur au
1
er
janvier 2003. Ainsi, le rapport sur l'évolution
de l'économie nationale et sur les orientations des finances
publiques comporte désormais une analyse des évolutions
économiques constatées depuis l'établissement du rapport
économique, social et financier (RESF), une description des grandes
orientations de la politique économique et budgétaire au regard
des engagements européens de la France et une
évaluation à moyen terme des ressources de l'Etat ainsi que de
ses charges ventilées par grandes fonctions.
Votre commission des finances considère que des marges de progression
existent encore sur ces différents points, en particulier s'agissant du
respect des délais de réponse aux questionnaires
budgétaires
15(
*
)
et du contenu du
rapport sur l'évolution de l'économie nationale et les
orientations des finances publiques. Toutefois, elle enregistre des
progrès encourageants par rapport aux pratiques antérieures. En
particulier, le rapport sur les prélèvements obligatoires et leur
évolution permet, avant la discussion du projet de loi de finances
initiale et du projet de loi de financement de la sécurité
sociale, de bénéficier d'un éclairage commun et
actualisé sur les prélèvements qui pèsent sur nos
concitoyens. Ce type de « mise en perspective » des
finances publiques apparaît comme un élément essentiel pour
la compréhension de la situation et des enjeux qui sous-tendent la
discussion des projets de loi de finances et de financement de la
sécurité sociale.
2. Une extension des prérogatives des commissions chargées des finances
L'ensemble des mesures relatives aux pouvoirs de
contrôle
du Parlement sur l'exécution des lois de finances est entré en
vigueur au 1
er
janvier 2002
. En effet, ces dispositions
n'impliquant pas la réalisation de travaux préparatoires
particuliers, elles pouvaient s'appliquer sans délais.
Il s'agit, pour l'essentiel, des dispositions élargissant les pouvoirs
de contrôle des commissions chargées des finances des deux
Assemblées qui figurent aux articles 57, 58 à l'exception
du 4° et du 5°, 59 et 60 de la LOLF. Votre commission
des finances reviendra plus loin sur les conséquences de l'entrée
en vigueur de ces dispositions.
Par ailleurs, sont entrées en vigueur :
- les règles relatives au principe de
sincérité des lois de finances (article 32) ;
- les règles relatives à l'affectation à des tiers de
recettes de l'Etat (article 36) ;
- les règles relatives à la procédure d'examen du
projet de loi de finances et du projet de loi de règlement
(article 41).
Les commissions chargées des finances des deux Assemblées
bénéficient désormais des dispositions de
l'article 14, qui prévoient :
- la transmission pour information de tout décret d'annulation avant sa
publication (
cette transmission concerne les commissions chargées des
finances ainsi que les autres commissions concernées
) ;
- la communication de tout acte, quelle qu'en soit la nature, ayant pour objet
ou pour effet de rendre des crédits indisponibles.
Les dispositions de l'article 36, qui prévoit que
«
l'affectation, totale ou partielle, à une autre personne
morale d'une ressource établie au profit de l'Etat ne peut
résulter que d'une disposition de loi de finances
» ont
notamment été mises en oeuvre dans le cadre du projet de loi
portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion
et créant un revenu minimum d'activité. En effet, ce projet de
loi disposait dans son article 3 que «
les charges
financières résultant, pour les départements, des
transfert et création de compétences réalisés par
la présente loi sont compensés par l'attribution de ressources
équivalentes constituées d'une partie du produit d'un impôt
perçu par l'Etat dans les conditions fixées par la loi de
finances
». Par ailleurs, l'article 41 de ce même
projet de loi disposait que «
les dispositions de la
présente loi sont applicables à compter du
1
er
janvier 2004, sous réserve de l'entrée en
vigueur à cette date des dispositions de la loi de finances
prévue à l'article 3
».
Il en va de même des règles relatives à l'examen des lois
de finances. Votre rapporteur général notait ainsi, dans
l'introduction de son rapport sur le débat d'orientation
budgétaire : «
Avec la tenue du débat
d'orientation budgétaire pour 2004, une boucle est bouclée. Le
chaînage de l'année budgétaire imaginé par les
auteurs de la loi organique n° 2001-692 du
1
er
août 2001 relative aux lois de finances est
désormais pleinement à l'oeuvre.
«
A l'automne 2002, l'année budgétaire a
démarré avec l'examen du projet de loi de règlement pour
2001. Elle s'est poursuivie avec la tenue du premier débat
consolidé sur les prélèvements obligatoires. Ensuite ont
été examinés le projet de loi de financement de la
sécurité sociale, le projet de loi de finances pour 2003 et le
deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2002.
«
Pour la première fois, le Parlement a examiné le
projet de loi de finances à la lumière des orientations
budgétaires de moyen terme du gouvernement, définies dans la
« programmation pluriannuelle des finances publiques »
désormais intégrée au rapport économique, social et
financier annexé au projet de loi de finances, et qui préfigure
le programme de stabilité transmis en fin d'année à la
Commission européenne.
«
A la fin de l'année 2002, le programme de
stabilité a été transmis à la Commission
européenne, et a été examiné au premier trimestre
par les autorités communautaires.
«
Au cours du dernier trimestre de la session ordinaire, le
gouvernement doit, en application de l'article 48 de la loi organique du
1
er
août 2001, présenter un rapport « en
vue de l'examen et du vote du projet de loi de finances de l'année
suivante par le Parlement ».
«
Pour mieux encore préparer le débat sur le projet
de loi de finances de l'année à venir, l'article 58 de la loi
organique prévoit que, au titre de sa mission d'assistance au Parlement,
la Cour des comptes dépose un « rapport préliminaire
conjoint » au rapport du gouvernement, « relatif aux
résultats de l'exécution de l'exercice
antérieur
»
.
«
Le rapport du gouvernement a été
présenté au mois de juin 2003, celui de la Cour des comptes un
mois plus tôt. Ce dernier comporte, outre des informations sur
l'exécution de l'exercice 2002, une analyse des premiers mois de
l'exécution 2003
»
16(
*
)
.
La LOLF a entendu consolider et étendre les pouvoirs des commissions des
finances, en conférant une valeur organique à une partie des
dispositions existantes et en offrant de nouveaux moyens aux rapporteurs
spéciaux, au rapporteur général et au président de
ces commissions. Il s'agit de permettre la pleine application des dispositions
de l'article 57 de la LOLF, qui prévoit que «
les
commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées
des finances suivent et contrôlent l'exécution de toute question
relative aux finances publiques. Cette mission est confiée à leur
président, à leur rapporteur général ainsi que,
dans leurs domaines d'attributions, à leurs rapporteurs
spéciaux
».
3. L'assistance de la Cour des comptes au Parlement
Les
relations entre votre commission des finances et la Cour des comptes se sont
enrichies et se développent dans le sens d'une plus grande
coopération depuis l'entrée en vigueur, le
1
er
janvier 2002, des dispositions de l'article 58 de la
LOLF (à l'exception toutefois du 4° et du 5°).
En application du 2° de cet article, votre commission des finances a
été destinataire de plusieurs communications de la Cour des
comptes au cours du premier semestre 2003, sur des sujets qui avaient
été retenus par votre commission en avril 2002
17(
*
)
. Ces communications ont fait l'objet d'auditions
auxquelles ont participé des représentants de la Cour des comptes
et les dirigeants des entités publiques concernées par ces
communications. Pour la plupart d'entre elles, ainsi que la procédure en
a été définie par votre commission des finances dans sa
réunion du 4 février 2003
,
il a été
décidé de publier la communication, ainsi que le
procès-verbal de l'audition et, le cas échéant, la
réponse écrite des entités contrôlées, sous
la forme de rapports d'information
18(
*
)
.
Cette procédure présente des avantages certains et souligne
l'intérêt partagé par la Cour des comptes et par le
Parlement d'une plus étroite collaboration. En s'appuyant sur les
travaux de la Cour des comptes, votre commission des finances leur donne
davantage de résonance et accroît le caractère
contradictoire de ses travaux de contrôle
.
Votre commission des finances devrait également expérimenter
prochainement, à l'occasion d'une mission de contrôle et
d'évaluation, la possibilité de demander l'assistance de la Cour
des comptes prévue par le 1° de l'article 58 de la loi
organique du 1
er
août 2001 relative aux lois de
finances.
4. Les autres outils de contrôle au service du Parlement
En vertu
des dispositions du deuxième alinéa de l'article 57 de la
LOLF
19(
*
)
, les commissions chargées des
finances des deux assemblées sont désormais destinataires des
rapports des corps d'inspection, à l'exception toutefois de ceux portant
sur des sujets à caractère secret, tels qu'ils
résultent de la rédaction de l'alinéa susmentionné.
Plusieurs autres dispositions importantes sont entrées en vigueur, comme
l'obligation pour le gouvernement de répondre par écrit à
une lettre d'observation d'un rapporteur spécial à l'issue d'une
mission de contrôle et d'évaluation. Cette disposition, qui n'est
pas systématiquement respectée par le gouvernement à ce
jour, doit permettre au gouvernement de faire part de ses réponses avant
la publication d'un éventuel rapport d'information. Il s'agit donc,
là encore, de
renforcer le caractère contradictoire du
contrôle parlementaire sur l'action du gouvernement
.
Il convient toutefois de souligner certaines difficultés liées
à l'application des dispositions de l'article 57 de la LOLF
relatives à la transmission des documents demandés par les
rapporteurs spéciaux, ainsi que par le président et le rapporteur
général des commissions chargées des finances des deux
Assemblées.
Votre commission des finances a rencontré à
cet égard deux types de problème, liés à la
définition du champ du secret
.
a) Des limites posées à la transmission des documents préparatoires à une décision gouvernementale
D'une
part, il est arrivé qu'elle se voie refuser la transmission de certains
rapports réalisés par des services d'inspection, en raison de
leur caractère préparatoire à une prise de décision
gouvernementale. Si un refus de transmission pour ce motif n'est pas
prévu par la LOLF, on peut toutefois comprendre que le gouvernement ne
souhaite pas voir « divulguées sur la place
publique » des informations qui seraient de nature à remettre
en cause l'indépendance de sa prise de décision
20(
*
)
. S'il est possible d'accepter que le gouvernement ne
transmette pas des documents préparatoires à une prise de
décision gouvernementale avant que cette décision ait
été actée, en revanche, il paraît incontestable que
les commissions chargées des finances des deux Assemblées ont un
droit d'accès à l'intégralité de ces documents
préparatoires, une fois la décision prise. En effet, dans ce cas,
l'argument portant sur l'indépendance de l'initiative gouvernementale
n'est à l'évidence plus recevable.
Il semble donc souhaitable de définir une formule qui permette à
la fois au gouvernement de préserver sa capacité à prendre
ses décisions librement et au Parlement, de ne pas se voir opposer un
argument dont la vérification de la pertinence est, en tout état
de cause, ardue.
b) La question de la portée du secret professionnel
Votre
commission des finances s'est également vu opposer le secret
professionnel pour justifier le refus de transmission de certaines
informations, à l'occasion d'un contrôle sur la gestion et le
financement public du secteur ferroviaire, réalisée dans le cadre
du Comité d'évaluation des politiques publiques par notre
collègue Jacques Oudin, rapporteur spécial chargé des
transports terrestres et de l'intermodalité. Notre collègue avait
souhaité entendre les commissaires aux comptes de la
Société nationale des chemins de fer français (SNCF) et
obtenir la communication de certaines informations relatives aux comptes de cet
établissement public. Or, les commissaires aux comptes lui ont
indiqué que, s'agissant de la communication d'informations relevant du
secret professionnel, ils avaient saisi la Compagnie nationale des commissaires
aux comptes afin qu'elle leur précise l'étendue et la
portée de l'article 57 de la loi organique du
1
er
août 2001 relative aux lois de finances.
Si une interprétation restrictive - mais, en l'occurrence,
abusive
21(
*
)
- pouvait être faite de la
rédaction de l'article 57 de la loi organique du
1
er
août 2001 relative aux lois de finances,
considérant que la levée du secret professionnel n'est
mentionnée qu'à l'alinéa traitant des auditions et non
à celui traitant de la transmission des documents, une telle conclusion
n'apparaît pas possible compte tenu des règles de droit existant
par ailleurs. En effet, l'article 31 de la loi de finances rectificative
pour 2000 du 13 juillet 2000 avait, avant même le vote de la loi
organique relative aux lois de finances, explicitement imposé aux
commissaires aux comptes la levée du secret professionnel à
l'égard des rapporteurs spéciaux des commissions des finances, et
prévu des sanctions en cas d'obstruction. L'article 164 de
l'ordonnance n° 58-1374 du 30 décembre 1958 portant loi
de finances pour 1959 avait été, à cette occasion,
complété par deux alinéas.
Afin d'éclaircir la portée des dispositions de l'article 57 de la
loi organique du 1
er
août 2001 relative aux lois de
finances, à l'occasion de la première lecture du projet de loi
relatif à la sécurité financière au Sénat,
notre collègue Jacques Oudin a déposé avec plusieurs de
ses collègues un amendement disposant que «
pour
l'application des dispositions de l'article 57 de la loi organique
n° 2001-692 du 1
er
août 2001 relative aux lois
de finances, les commissaires aux comptes des établissements et
entreprises publics, ainsi que de tout autre organisme
bénéficiant de fonds publics, sont déliés de leur
obligation de secret professionnel vis-à-vis du président, du
rapporteur général et des rapporteurs spéciaux des
commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées
des finances
».
M. Dominique Perben, Garde des sceaux, a alors indiqué qu'il
était «
prêt à s'engager (...) à ce que
nous étudiions très précisément les cas
visés, les difficultés rencontrées pour compléter
les conditions d'application de la loi organique si cela s'avérait
nécessaire
»
22(
*
)
.
Pour sa part, lors de la même séance, notre collègue
Philippe Marini, rapporteur général, indiquait :
«
A la vérité, il convient de se
référer à deux textes successifs dont la combinaison n'est
pas très claire, monsieur le Garde des sceaux. D'une part, la loi de
finances rectificative du 13 juillet 2000, que j'ai citée, vise
expressément les commissaires aux comptes et les délie du secret
professionnel : si cette loi est mauvaise, il faut l'abroger, si on ne
l'abroge pas, il faut l'appliquer ! D'autre part, la loi organique du
1
er
août 2001, en son article 57, vise effectivement
non pas les commissaires aux comptes, mais « tous les renseignements
et documents d'ordre financier et administratif » demandés par
les représentants de nos commissions. L'approche est donc
différente, monsieur le garde des sceaux, et il importe, tant pour les
professionnels que pour les entreprises publiques et pour le Parlement, de
clarifier ce point.
«
Pour ma part, je suggérerai au moins une voie de
réflexion. Il ne me semblerait pas concevable que l'on demande à
des commissaires aux comptes en cours de diligences de venir exposer à
des tiers, fût-ce au sein du Parlement, les risques qu'ils sont en train
d'évaluer ou leur appréciation d'une réalité sur
laquelle ils n'ont pas encore pris de position dont ils puissent assumer la
responsabilité sous la forme d'un rapport. En revanche, lorsque la
position a été prise, lorsque la certification est intervenue ou
qu'au contraire des réserves ont été exprimées,
lorsque les dossiers sont clos sur un exercice déterminé, est-il
illégitime de demander aux commissaires aux comptes pourquoi ils ont
raisonné de telle ou telle façon sur des questions de
méthode ? Je ne le pense pas !
»
23(
*
)
.
A l'occasion de la seconde lecture au Sénat du projet de loi relatif
à la sécurité financière, M. Francis Mer, ministre
de l'économie, des finances et de l'industrie, a, en réponse
à votre rapporteur général, levé les doutes qui
pouvaient persister au sujet de l'interprétation des dispositions de
l'article 57 de la loi organique du 1
er
août 2001
relative aux lois de finances : «
Monsieur le rapporteur
général, nous avons effectivement progressé dans notre
connaissance de cette question à l'occasion de la navette : le
secret professionnel imposé aux commissaires aux comptes est bien
levé à l'égard des rapporteurs spéciaux des
commissions des finances.
«
En effet, l'article 57 de la loi organique relative aux lois de
finances dispose que « les commissions de l'Assemblée
nationale et du Sénat chargées des finances suivent et
contrôlent l'exécution des lois de finances et procèdent
à l'évaluation de toute question relative aux finances
publiques.
«
Par ailleurs, cet article prévoit que, dans ce cadre,
« les personnes dont l'audition est jugée nécessaire
par le président et le rapporteur général de la commission
chargée des finances de chaque assemblée ont l'obligation de s'y
soumettre » et que ces personnes sont
« déliées du secret professionnel.
«
Contrairement à ce qui semble avoir été
soutenu, les personnes visées par l'article 57 ne peuvent pas être
exclusivement des fonctionnaires, car la mention du secret professionnel ne se
comprendrait pas dans ce cas.
«
Je pense donc que les commissaires aux comptes sont
effectivement déliés du secret professionnel à
l'égard des commissions des finances et qu'il n'y a pas lieu de
légiférer de nouveau sur ce point
»
24(
*
)
.
On rappellera par ailleurs que la LOLF a prévu des sanctions en cas
d'obstruction à ses prérogatives de contrôle. Ainsi,
l'article 59 dispose que «
lorsque dans le cadre d'une mission de
contrôle et d'évaluation, la communication des renseignements
demandés en application de l'article 57 ne peut être obtenue au
terme d'un délai raisonnable, apprécié au regard de la
difficulté de les réunir, les présidents des commissions
de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances
peuvent demander à la juridiction compétente, statuant en
référé, de faire cesser cette entrave sous
astreinte
».
5. La question des moyens d'expertise et de contrôle du Parlement
L'extension des prérogatives de contrôle du
Parlement
pose à nouveau la question des moyens des Assemblées
parlementaires françaises. Il apparaît de façon
incontestable que le Parlement français souffre en la matière de
la comparaison avec certains pays étrangers, et en particulier avec le
Royaume-Uni et les Etats-Unis d'Amérique
25(
*
)
, même si en ce cas le contexte institutionnel
est sensiblement différent. Or, en renforçant les
prérogatives du Parlement en matière de finances publiques, la
LOLF créée une demande d'expertise supplémentaire par
rapport à la situation actuelle.
La question des moyens d'expertise du Parlement relève de la
volonté du Parlement lui-même. Les premières années
de mise en oeuvre de la LOLF permettront de juger si un renforcement de ces
moyens est nécessaire pour exercer sur l'exécutif un
contrôle et une pression réformatrice suffisante. Il convient
toutefois d'insister sur le fait que
la volonté politique constitue
le fondement indispensable d'un accroissement du contrôle effectif du
Parlement sur l'exécutif
.
B. LES DIFFICULTÉS D'INTERPRÉTATION DE CERTAINES AUTRES DISPOSITIONS DE LA LOLF
Plusieurs dispositions de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances semblent faire l'objet de difficultés ou, à tout le moins, d'incertitudes, quant à leur interprétation. Il s'agit notamment du volume des crédits pouvant faire l'objet d'une annulation sans recourir à une loi de finances rectificative et de la définition du plafond de la dette et des conséquences éventuelles de son non-respect.
1. Les crédits pouvant faire l'objet d'une annulation sans recourir à une loi de finances rectificative
Les
dispositions des articles 13 et 14 de la LOLF donnent au gouvernement les
moyens de « piloter » l'évolution du solde
budgétaire de manière à respecter les plafonds de
crédits fixés par les lois de finances, en lui reconnaissant
notamment la capacité d'annuler des crédits «
afin
de prévenir une détérioration de l'équilibre
budgétaire
». Toutefois, le législateur organique a
entendu restreindre cette possibilité, afin de contraindre le
gouvernement à « retourner » devant le Parlement si
l'équilibre budgétaire défini par la dernière loi
de finances se trouvait bouleversé. Une trop grande liberté
d'annulation de crédits par voie réglementaire reviendrait en
effet à conférer à l'exécutif un pouvoir comparable
à celui du législateur.
Les facultés offertes au gouvernement par l'article 14 de la loi
organique du 1
er
août 2001 relative aux lois de finances
ont été évoquées dès le présent
exercice, lorsque M. Francis Mer, ministère de l'économie, des
finances et de l'industrie a annoncé aux commissions des finances des
deux assemblées, le 4 février 2003, la mise en
réserve de crédits pour un montant de 3,97 milliards d'euros
intitulée «
réserve de précaution et
d'innovation
», pouvant faire ultérieurement l'objet
d'annulations.
La Cour des comptes a, dans son rapport préliminaire
précité sur l'exécution des lois de finances,
commenté ce point :
Les
mises en réserve et les reports de crédits : le jugement de
la Cour des comptes
(mai 2003)
«
Lors de la présentation du PLF 2003
à
l'Assemblée nationale le 15 octobre 2002, le ministre
délégué au budget et à la réforme
budgétaire indiquait que la régulation pratiquée en 2002
sous forme de mise en réserve des crédits serait reconduite en
2003.
«
Ce dispositif appelle les remarques suivantes :
«
- il traduit le fait que, dès le mois d'octobre 2002, le
contexte économique attendu en 2003 est nettement moins favorable que
celui envisagé lors de la construction du PLF et que la croissance sera
inférieure aux hypothèses retenues ;
«
- il s'inscrit dans le nouveau cadre dans lequel doivent
s'opérer d'éventuelles annulations, conformément aux
dispositions de l'article 14 de la LOLF du 1
er
août
2001
26(
*
)
: compte tenu des ouvertures
nettes de la LFI 2003, soit 273,8 milliards d'euros, le montant maximum des
annulations qui peuvent être décidées par le gouvernement
sans vote du Parlement est de 4,1 milliards d'euros.
«
Le « gel » des crédits,
présenté le 4 février 2003 comme une
« réserve de précaution et d'innovation »,
porte sur 3,97 milliards d'euros, répartis pour moitié sur
des crédits pour dépenses ordinaires et pour dépenses en
capital. Toutefois, l'effort n'est pas réparti sur l'ensemble des
crédits ouverts par la loi de finances initiale, puisqu'il ne touche pas
aux crédits des titres I et II, ni à ceux des
rémunérations et pensions. Aussi le gel porte-t-il sur 4,1 %
des crédits ouverts aux chapitres concernés, soit 2,1 % pour
les chapitres de dépenses ordinaires et 9,1 % pour ceux de
dépenses en capital.
«
Par ailleurs, la circulaire du ministère des finances du
10 février 2003, qui fixe le cadre des reports de crédits de
2002 sur 2003, vise à limiter le montant de ces reports. (...)
«
Ce dispositif vient donc s'inscrire en complément du gel
des crédits pour limiter le déficit d'exécution en
2003.
«
Le Journal officiel du 15 mars 2003 a publié un
décret d'annulation de crédits à hauteur de
1,4 milliard d'euros, soit 0,53 % des crédits ouverts. Les
secteurs concernés sont notamment l'enseignement supérieur, les
dépenses pédagogiques de l'enseignement scolaire, la jeunesse,
les crédits dévolus à la construction et l'habitat, la
recherche. La défense, la justice et la culture sont
épargnées.
«
Enfin, il conviendra d'attendre les annulations de la loi de
règlement pour connaître la portée de cette contrainte sur
les reports
».
Source : Rapport préliminaire de la Cour des comptes sur
l'exécution des lois de finances pour 2002 présenté en
application de l'article 58-3 de la loi organique du 1
er
août
2001, pages 9 et 10
Il semble que l'interprétation du montant plafond pouvant donner lieu
à des annulations de crédits, fixé par l'article 14 de la
loi organique n° 2001-692 du 1
er
août 2001
fasse l'objet d'
interprétations divergentes entre la Cour des comptes
et le gouvernement
.
En effet, l'article 14 dispose que ce montant «
ne peut
dépasser 1,5 % des crédits ouverts par les lois de finances
afférentes à l'année en cours
». La Cour des
comptes, dans son rapport précité dans l'encadré
ci-dessus, mentionne un montant de 4,1 milliards d'euros, correspondant
à 1,5 % des ouvertures nettes de la loi de finances initiale
pour 2003, soit 273,8 milliards d'euros.
Le gouvernement, pour sa part, semblerait enclin à considérer que
les 1,5 % s'appliquent non seulement à l'ensemble des
crédits ouverts sur le budget général, mais
également à ceux ouverts sur les budgets annexes et les comptes
spéciaux du Trésor.
Les deux interprétations se conçoivent : l'article 14
mentionne «
les crédits ouverts par les lois de finances
afférentes à l'année en cours
», ce qui
autorise l'interprétation que semble faire le gouvernement de cette
disposition ; toutefois, les annulations de crédits ne portant
généralement pas sur les budgets annexes et les comptes
spéciaux du Trésor, on pourrait considérer avec
« bon sens » que le législateur organique a entendu
prendre comme base de référence, pour la détermination du
montant de crédits pouvant être annulés, la totalité
des crédits susceptibles de l'être, et seulement ceux-là,
ce qui irait dans le sens de l'interprétation stricte que la Cour des
comptes donne de cette disposition.
En tout état de cause, il conviendra de s'accorder sur une base de
référence acceptée par tous afin de donner tout son sens
aux bornes définies par l'article 14 de la loi organique du
1
er
août 2001 relative aux lois de finances.
2. Le plafond de la dette négociable
S'agissant du plafond de la dette négociable, il
convient en
premier lieu de rappeler les objectifs ayant conduit à l'inscription,
dans la loi organique n° 2001-692 du 1
er
août
2001 relative aux lois de finances, de ce plafond apprécié en fin
d'année. Cette disposition avait été rédigée
en tenant compte de deux préoccupations. Notre ancien collègue
Alain Lambert, alors rapporteur pour le Sénat de la proposition de loi
indiquait : «
Il s'agit en quelque sorte de donner un contenu
à l'autorisation d'émettre des emprunts en le liant au besoin de
financement révélé et exprimé par le tableau de
financement
». Pour sa part, Mme Florence Parly, alors
secrétaire d'Etat au budget, estimait que : «
s'il
devait y avoir un plafond d'emprunts, cela ne devrait pas placer le
Gouvernement dans une situation d'incapacité brutale à financer
ses dépenses, parce qu'il y aurait une rupture de trésorerie et
un retard dans l'encaissement d'une recette importante, par exemple
».
Pour tenir compte de ces deux positions, un amendement avait été
adopté à l'initiative de notre ancien collègue Alain
Lambert et de notre collègue Philippe Marini, rapporteur
général, ceux-ci reconnaissant : «
il est
certain que les aléas qui s'attachent tant aux décaissements
qu'aux encaissements de l'Etat justifient que les opérations
liées à la tenue de la trésorerie de l'Etat ne soient pas
contraintes par un plafond strict, sauf à imaginer des procédures
d'urgence complexes. De même, fixer un plafond brut de la dette
risquerait de soulever des difficultés pour la gestion de celle-ci. Des
techniques financières complexes, qui peuvent conduire à racheter
de la dette passée pour en émettre une nouvelle et donc à
augmenter les émissions brutes, pouvant permettre de minorer finalement
la charge de la dette. Celle-ci représentant la première
dépense de l'Etat, il serait désastreux d'en rendre impossible la
diminution par des dispositions inappropriées
».
La rédaction du 9° de l'article 34 résulte d'un
compromis : la variation nette permet d'éviter les biais
mentionnés ci-dessus d'un plafond de dette brute ; la prise en
compte de la seule dette supérieure à un an permet
d'éviter d'y inclure les émissions de très court terme
nécessitées par des besoins ponctuels de
trésorerie
27(
*
)
. Par ailleurs, la
variation est appréciée en fin d'année, autorisant des
dépassements ponctuels, au cours d'exercice, dudit plafond. Cette
disposition permet donc d'exclure du plafond les mécanismes de gestion
de la trésorerie et de gestion active de la dette.
Votre rapporteur considère, comme le rapporteur général de
votre commission des finances et notre collègue Yves Fréville,
rapporteur spécial des crédits des charges communes, que
le
plafond de variation de la dette a une valeur juridique telle qu'il contraint
le gouvernement à en demander le relèvement dans une loi de
finances rectificative
s'il lui paraît ne pas pouvoir être
respecté en raison d'une aggravation du déficit budgétaire
et d'une augmentation des besoins de financement. La décision du Conseil
constitutionnel n° 91-298 en date du 24 juillet 1991 dispose en
effet que le gouvernement est tenu de déposer sur le bureau de
l'Assemblée nationale une loi de finances rectificative dès lors
que les conditions de l'équilibre économique et financier sont
bouleversées.
Le plafond de variation de la dette a donc un statut similaire à
celui du déficit budgétaire
: s'il peut être
dépassé en cours d'année, il ne peut l'être en fin
d'année qu'à la condition expresse qu'un collectif
budgétaire soit intervenu et en ait modifié le montant. La loi de
règlement constitue la sanction politique ultime d'un éventuel
dépassement, comme c'est aujourd'hui le cas pour le déficit
budgétaire.
Or, cette interprétation ne semble pas, à ce jour, pleinement
acceptée par le gouvernement.
La demande d'une « marge de manoeuvre » associée au plafond de dette par le gouvernement
Dans le
fascicule bleu des « Charges communes » annexé au
projet de loi de finances pour 2003, le gouvernement rappelle que :
«
l'article 34 de la loi organique relative aux lois de finances
du 1
er
août 2001 dispose que la loi de finances de
l'année doit fixer « le plafond de la variation nette de la
dette négociable de l'Etat d'une durée supérieure à
un an, appréciée en fin d'année ».
L'interprétation retenue par le Gouvernement et les Commissions des
finances est que cette disposition vise la fixation d'un plafond pour la
variation nette de la dette négociable de plus d'un an
« à l'émission », soit la variation du stock
des OAT et des BTAN du 1
er
janvier au 31 décembre de
l'année considérée. (...) A titre d'information, la
variation nette de la dette négociable à plus d'un an serait de
43,5 milliards d'euros en 2003, si toutes les hypothèses qui
sous-tendent le tableau de financement étaient satisfaites. On sait que
tel peut ne pas être le cas, pour des raisons tenant tant à
l'évolution des marchés
28(
*
)
qu'à l'évolution budgétaire. Une marge de manoeuvre de 5
milliards d'euros apparaît de ce fait nécessaire pour faire face
à ces évolutions. Cette marge de manoeuvre reste par ailleurs
relativement limitée puisqu'elle correspond à 1 % ou
2 % seulement du stock de la dette négociable à plus d'un
an
».
Le gouvernement évoque ensuite les écarts entre
l'évaluation du déficit de la loi de finances et la loi de
règlement, et indique que «
la moyenne des écarts en
valeur absolue des deux évaluations s'élève, de 1990
à 2001, à 3,95 milliards d'euros. L'écart-type moyen est
de 5,77 milliards d'euros. En d'autres termes, sur la base des
données historiques depuis 1990, 17 % des années auraient
conduit à un dépassement du plafond intégrant une marge de
manoeuvre de 5 milliards d'euros par rapport à l'évolution
prévue du stock OAT-BTAN (...)
».
Source : fascicule bleu des charges communes, projet de loi de finances
pour 2003, page 61
La LOLF est un texte riche et complexe ; et certaines de ses dispositions
pourraient, à l'épreuve de leur mise en oeuvre, s'avérer
peu adaptées. Il est donc possible qu'un
« toilettage » de ce texte soit nécessaire, afin que
son application concorde pleinement avec l'intention du législateur
organique et permette la mise en oeuvre effective d'une nouvelle gestion
publique. Toutefois, un tel toilettage ne pourra être envisagé
qu'une fois que l'ensemble des dispositions du texte sera entré en
vigueur et que la pratique permettra d'identifier l'ensemble des
problèmes qu'elle soulève. Compte tenu de l'importance et du
statut de la loi organique relative aux lois de finances, véritable
«
Constitution financière de la
France
»
29(
*
)
, il conviendra en
tout état de cause de faire preuve d'une grande vigilance si une
démarche d'ajustement s'avérait nécessaire, qui
nécessitera un accord entre le gouvernement et les deux
Assemblées.
C. L'IMPORTANCE CRUCIALE DES PROCHAINES ÉCHÉANCES DU CALENDRIER DE LA RÉFORME
Les
dispositions de la LOLF qui ne sont pas encore entrées en vigueur sont
les suivantes :
•
au 1
er
janvier 2004
:
Suppression des taxes parafiscales.
•
au 1
er
janvier 2005
:
Autorisation par le Parlement des garanties octroyées par l'Etat (annexe
au projet de loi de règlement 2004 pour récapituler les garanties
déjà octroyées et non autorisées) ;
Abrogation de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique
relative aux lois de finances, sauf en ce qui concerne les lois de finances
relatives à l'exercice 2005 et entrée en vigueur de toutes
les autres dispositions de la loi organique
30(
*
)
.
Le rapport remis par le gouvernement au Parlement sur la préparation de
la mise en oeuvre de la loi organique n° 2001-692 du 1
er
août 2001 relative aux lois de finances, en application de l'article 109
de la loi de finances pour 2003, détaille le calendrier prévu par
le gouvernement pour préparer l'entrée en vigueur de la LOLF.
Le calendrier d'élaboration des nouveaux budgets
«
Par la circulaire du 18 février 2002
relative
à la mise en oeuvre de la loi organique, les ministères ont
été invités à présenter leur démarche
de mise en oeuvre de la loi organique, comprenant notamment leur organisation
projet, leur mode de pilotage et le calendrier de mise en oeuvre de la phase
préparatoire de la réforme. Un cahier des charges leur a
été transmis à cette occasion. Il contient un premier jeu
d'orientations et d'indications opérationnelles pour
l'élaboration des nouveaux contenus de leur budget et la mise en oeuvre
de la réforme. Il aura servi aux ministères à se
familiariser avec les nouveaux concepts de la loi organique, à
identifier les évolutions à envisager et à préparer
la réflexion sur l'élaboration des programmes.
«
Le ministre chargé de la réforme
budgétaire, par circulaire en date du 10 décembre 2002, a
organisé une nouvelle étape des travaux de construction des
programmes ministériels. L'objectif de cette étape est de
développer l'expertise dans la construction et la documentation des
programmes et de mettre à profit deux cycles budgétaires pour
tester et faire tester le plus largement possible les nouvelles
modalités de gestion et de budgétisation. Il a été
demandé à chaque ministère de présenter à
l'occasion du projet de loi des finances 2004, et tout en respectant le cadre
de l'ordonnance organique de 1959, des propositions d'expérimentation
d'un programme ou d'une action avec l'ensemble des éléments
requis par la loi organique.
Il leur a également été demandé de s'engager dans
l'élaboration des programmes et des actions avec leurs principaux
objectifs. Cette étape d'élaboration des programmes
ministériels et d'identification des expérimentations a fait
l'objet d'une série de réunions techniques, en décembre
2002.
«
La circulaire du ministre chargé de la réforme
budgétaire du 26 février 2003, ainsi que sa communication en
conseil des ministres du 12 mars 2003 ont fixé le calendrier de la
suite des travaux.
Les missions, les programmes et les actions seront
finalisées à l'automne 2003 et chaque ministre devra mettre en
oeuvre pour le projet de loi de finances 2004, au moins une
expérimentation
. Un nouveau cycle de réunions est
organisé au printemps à l'issue duquel un relevé de
conclusions contradictoires de la situation de chaque ministère est
établi. Les missions et les programmes feront l'objet d'une validation
interministérielle à l'automne 2003. Les objectifs et les
indicateurs de chaque action devront être définis au
1
er
trimestre 2004.
«
Ce calendrier permettra, conformément à la loi
organique, de présenter à titre indicatif les crédits du
budget général selon les principes de la loi organique pour le
projet de loi de finances 2005, tout en aménageant des phases de
discussion avec le Parlement et la possibilité d'affiner la structure du
nouveau budget
».
Source : Rapport du gouvernement sur la préparation de la mise
en oeuvre de la loi organique n° 2001-692 du
1
er
août 2001 relative aux lois de finances, en
application de l'article 109 de la loi de finances pour 2003, pages 6 et 7
Le projet de loi de finances initiale pour 2004 devrait comprendre, pour
chaque ministère, la présentation d'au moins une
expérimentation en cours de réalisation pour préfigurer
l'entrée en vigueur de la LOLF. Avant la fin de l'année 2003
devrait surtout être présentée une proposition de maquette
du budget de l'Etat, avec la liste indicative des missions, programmes et
actions, y compris les principaux objectifs associés aux programmes
.
L'ensemble des projets d'objectifs et d'indicateurs associés aux
programmes devrait être présenté à la fin du premier
trimestre de l'année 2004.
Les prochains mois seront, compte tenu de ce calendrier,
particulièrement déterminants pour la réussite de la
réforme
. En effet, la présentation par le gouvernement de la
liste indicative des programmes et des actions de chaque ministère
donnera au Parlement, et notamment aux rapporteurs spéciaux et pour avis
plus directement concernés, l'occasion de se prononcer sur un projet
concret. Ainsi que le souligne justement la Cour des comptes dans la partie de
son rapport sur l'exécution des lois de finances pour
l'année 2002 consacrée au suivi de la mise en oeuvre de la
loi organique, «
dans ces délais très courts, le
gouvernement devra donc arbitrer les présentations des nouveaux budgets
ministériels et trouver un accord sur cette nomenclature avec le
Parlement
».
CHAPITRE
II
:
LES GRANDS ENJEUX À VENIR DE LA LOLF
I. LA DÉFINITION DES MISSIONS, DES PROGRAMMES ET DES ACTIONS : DES EXIGENCES ESSENTIELLES
A. LA DÉFINITION DES MISSIONS : UN ENJEU IMPORTANT POUR LE PARLEMENT
1. La définition des missions ne semble pas être une priorité du gouvernement
L'article 7 de la LOLF dispose qu'une mission
relève
d'un ou plusieurs ministères et «
comprend un ensemble de
programmes concourant à une politique publique
définie
». Or, les missions semblent, en quelque sorte,
devenues le « parent pauvre » de la LOLF par rapport aux
programmes, dont la définition constitue la base de la nouvelle
nomenclature budgétaire et des nouvelles modalités de gestion des
crédits : la direction du budget, dans une note datée du
18 février 2002 ayant pour objet de présenter le
« cahier des charges pour l'élaboration des nouveaux contenus
des budgets ministériels », mentionnait les programmes, les
actions, les objectifs, et les indicateurs de résultat, mais
n'évoquait les missions que pour indiquer que «
la
réflexion sur ce second niveau de structuration du budget sera
engagée une fois avancée celle relative au découpage du
budget en programmes
». Il était précisé,
à la suite de cette mention, que «
une fois
validés les projets de programmes et de missions, le Gouvernement
consultera les commissions des finances sur l'ensemble de ces projets
(...)
».
Cette approche soulevait plusieurs difficultés
, relevées
par votre commission des finances à l'occasion de son séminaire
sur la loi organique du 1
er
août 2001 relative aux lois
de finances organisé le 10 mars 2003 et par nos collègues
députés, dans un rapport d'information paru en avril
2003
31(
*
)
. Ces derniers indiquaient que :
«
Ce choix présente plusieurs
inconvénients :
«
- les programmes risquent d'être construits sans
réflexion sur la justification des dépenses de l'Etat et sans
remise en cause des structures redondantes (...)
«
- la structuration des programmes pourrait ne pas prendre en
compte la dimension interministérielle de certaines politiques
«
- les programmes risquent d'être
surdimensionnés
»
32(
*
)
.
Suite à ces observations, la direction de la réforme
budgétaire a décidé de revenir sur son choix initial et de
lancer de manière concomitante la réflexion sur les missions et
les programmes. Votre commission des finances considère que ce
« revirement » était nécessaire. En effet, il
permet d'éviter en partie que les missions ne soient conçues que
comme une agrégation de programmes sans véritable logique
d'ensemble, et ne répondent donc pas à la lettre de la loi
organique selon laquelle une mission concourt à une politique publique
définie. Toutefois, il ne permet toujours pas de prendre en
considération de manière satisfaisante la dimension
interministérielle de certaines politiques.
Il convient de rappeler que le législateur organique n'a pas
souhaité, dans le cadre de la discussion budgétaire, que le
ministère fasse, en tant qu'entité administrative, l'objet d'un
vote. Le troisième alinéa de l'article 43 dispose en effet que
«
la discussion des crédits du budget général
donne lieu à un vote par mission
». Il s'agissait ainsi de
faire en sorte que la budgétisation par objectifs que le
législateur organique appelle de ses voeux ait une résonance
forte à l'occasion de la discussion budgétaire, le vote par
ministère présentant le défaut de faire porter la
discussion sur une structure permanente, et sur sa consommation de moyens.
Il semble aller de soi, dans ces conditions, que les fascicules bleus qui
seront annexés au projet de loi de finances initiale devront être
présentés par mission plutôt que par ministère.
Il paraît donc important, pour que la budgétisation par objectifs
s'inscrive pleinement dans la procédure d'examen des crédits,
qu'à chaque ministère, ne corresponde pas une mais plusieurs
missions. En effet,
si la mission ne se distinguait pas du ministère,
le changement souhaité par le législateur organique dans la
manière d'aborder le débat budgétaire ne pourrait prendre
toute son ampleur, la discussion des crédits d'un organe
identifié reprenant sa place au détriment de l'examen des
politiques publiques, et des moyens qui leur sont nécessaire pour
réaliser les objectifs fixés par le gouvernement
.
2. La délicate question des missions interministérielles
Il
convient de rappeler que, à l'initiative du Sénat, la LOLF a
prévu que les missions peuvent regrouper des crédits relevant
«
d'un ou plusieurs services d'un ou plusieurs
ministères
», et ce, afin de permettre une meilleure mise
en oeuvre des politiques interministérielles et de contribuer à
la simplification de certaines d'entre elles, dont les crédits sont
parfois éparpillés dans plusieurs fascicules budgétaires,
sans réelle justification autre qu'historique
33(
*
)
.
La constitution d'une mission interministérielle ne peut, à
l'évidence, se concevoir pour l'ensemble des politiques
interministérielles
: cela impliquerait une fragmentation
excessive des programmes la composant, rendant à la fois très
hétérogène le volume des crédits figurant sur les
programmes d'un même ministère, et peu opérant le principe
de fongibilité des crédits souhaité par le
législateur organique.
Dans une note d'orientation sur «
la loi organique relative aux
lois de finances et
l'interministérialité
»
34(
*
)
, la direction de la réforme budgétaire
indique que «
la logique de résultat et de performance et
la structuration des programmes ministériels par finalité
incitent à la prise en compte d'objectifs ou de politiques publiques
dont le périmètre peut dépasser les frontières
ministérielles.
«
Il existe ainsi des objectifs par nature transversaux, qui
concernent les activités de nombreux ministères comme les enjeux
liés à la territorialité tels que ceux de la ville, de
l'outre-mer, de l'aménagement du territoire ou de l'administration
territoriale ou des affaires étrangères et les enjeux
partagés entre plusieurs entités administratives (politique de
l'eau, de la recherche, de la sécurité routière, de lutte
contre la toxicomanie, d'intégration, de lutte contre les exclusions,
etc.).
«
Les travaux préparatoires de la loi organique ont
prévu que le budget soit structuré par un nombre limité de
programmes (de 100 à 150) afin qu'ils aient une taille suffisamment
importante pour bénéficier notamment de la fongibilité des
crédits et afin d'assurer une bonne lisibilité de l'action de
l'Etat. Cette contrainte paraît difficilement compatible avec la
constitution de programmes transversaux dans l'ensemble des
ministères
(...)
«
Le cas échéant, la mission peut fournir au
Parlement une présentation interministérielle rassemblant, parce
qu'ils concourent à une politique définie, des programmes
relevant de plusieurs ministres. Ainsi, par exemple, une mission
« sécurité intérieure » pourrait
rapprocher les programmes « police nationale » et
« sécurité civile » du ministère de
l'intérieur et le programme « gendarmerie
nationale » du ministère de la Défense. Dans une telle
hypothèse, les modalités selon lesquelles les différents
ministres responsables des programmes rassemblés par la mission
viendraient présenter la mission au Parlement restent à
définir (...)
«
En cas de mission interministérielle, le vote des
crédits par le Parlement concernerait les différents
ministères. La loi organique ne prévoit pas de vote des
crédits par ministère (sauf s'il n'y a pas de mission
interministérielle) : les crédits d'un ministère
pourront être reconstitués en additionnant ses différents
programmes, certains relevant de missions ministérielles, certains
relevant de missions partagées avec d'autres ministères (...)
«
Dans les cas où émergent des pans de politiques de
l'Etat aux finalités voisines correspondant à des programmes,
leur rapprochement dans une même mission interministérielle peut
permettre, le cas échéant, d'améliorer la
lisibilité de l'action de l'Etat. Un exemple serait la mission
interministérielle « police nationale » -
« gendarmerie nationale » -
« sécurité civile » qui sont des programmes
dotés d'un responsable identifié et qui ont une cohérence
suffisante pour lui permettre de tirer parti de la fongibilité des
crédits. Ce cas de figure ne devrait pas être très
fréquent.
«
Ce cas de figure est à distinguer du cas où on
découperait au sein d'un grand nombre de ministères comme par
exemple, l'Intérieur, l'Education nationale ou l'Equipement, des
périmètres de crédits correspondant à des enjeux
transversaux ou territoriaux que l'on érigerait en programmes
regroupés au sein de missions : ville, outre-mer,
sécurité routière, intégration, etc.
«
Cette solution reviendrait à considérer que la
cohérence des politiques qui justifient la constitution d'un
ministère est de second ordre par rapport à ces enjeux
transversaux (...)
«
Par ailleurs, cette solution des missions
interministérielles n'est pas toujours possible car les activités
concernées sont rarement dissociables, en terme de crédits et de
personnels, des autres activités des ministères
«
Enfin, la lisibilité des politiques de ces
ministères serait fortement amoindrie : ainsi, par exemple,
éclatée en une demi-douzaine de missions, la politique en
matière d'éducation serait moins lisible si l'on soustrayait aux
possibles programmes « enseignement primaire » ou
« enseignement secondaire », des crédits pour les
mettre dans un programme « ville », un programme
« sécurité routière », un
programme «intégration » et un programme
« outre-mer » qui rejoindraient chacun leur mission
respective. La gestion des crédits et des personnels figurant sur ces
petits programmes deviendrait très compliquée puisque les
redéploiements entre chacun de ces programmes devraient passer par un
décret de virement qui est limité à 2 % des
crédits initiaux. L'émiettement des ministères
concernés en une série de petits programmes ferait perdre le
bénéfice de la fongibilité des
crédits (...)
«
Pour ces raisons, la constitution de missions
interministérielles ne peut concerner qu'un nombre très
limité de politiques interministérielles dont les programmes sont
d'une taille suffisante, qui identifient une politique sectorielle lisible, qui
font l'objet d'une gestion propre et qui ne sont pas la déclinaison
territoriale d'une politique sectorielle
».
Votre commission des finances est en plein accord avec cette analyse :
les missions interministérielle doivent être l'exception, et
non la règle, compte tenu de la fragmentation des programmes qu'elle
implique. Toutefois, elle considère que la constitution de telles
missions peut être utile, afin de contribuer à améliorer la
coordination de certaines politiques dont le pilotage est partagé entre
un nombre réduit de ministères
. A cet égard, l'exemple
le plus naturel de mission interministérielle lui semble être le
regroupement des crédits de la police nationale, de la
sécurité civile et de la gendarmerie dans une mission
consacrée à la sécurité intérieure, compte
tenu notamment des rapprochements effectués entre ces acteurs par le
gouvernement de M. Jean-Pierre Raffarin.
Une autre mission interministérielle pourrait concerner l'action
extérieure de la France ou l'aide publique au
développement
35(
*
)
: cette
politique voit ses crédits dispersés entre plusieurs
ministères, ce qui nuit à sa lisibilité et à son
efficacité. La création d'une mission interministérielle
permettrait d'assurer une plus grande cohérence à l'action de la
France à l'étranger, et d'éviter une trop importante
dispersion et discordance de la voix de la France, que l'on constate parfois.
Une troisième mission interministérielle pourrait être
envisagée, concernant la recherche, même si, dans ce dernier cas,
il est peu probable qu'elle puisse englober la totalité des
crédits consacrés à la recherche, compte tenu de la
fragmentation excessive des programmes ministériels qui en
résulterait.
B. LES PROGRAMMES ET LES ACTIONS : AU CoeUR DE LA NOUVELLE GESTION PUBLIQUE
1. Une exigence de lisibilité, de cohérence et d'homogénéité
Le
rapport précité remis par le gouvernement en vertu de l'article
109 de la loi de finances pour 2004 prévoit que «
les
missions, les programmes et les actions seront finalisées à
l'automne 2003
». Les programmes seront alors soumis à
l'examen du Comité interministériel d'audit des programmes
(CIAP), dont les missions ont été précisées plus
haut.
Le guide d'audit initial des programmes, rédigé par le
Comité interministériel d'audit des programmes, pose des
questions essentielles pour s'assurer que les programmes correspondent bien
à l'intention du législateur. L'encadré suivant reproduit
quelques-unes de ces questions essentielles :
Extraits du guide d'audit initial des programmes
S'assurer de la clarté et de la lisibilité de
la
structuration des programmes et de leur décomposition en actions
Le programme correspond-t-il bien à une politique publique
définie et intègre-t-il bien les moyens et activités qui y
contribuent ?
- A quelle(s) politique(s) publique(s) bien définie(s) le programme
répond-t-il ?
- La problématique de l'articulation programmes / organisation a-t-elle
bien été identifiée ? A-t-elle conduit à des
changements d'organisation ? sinon, les découpages des programmes
permettent-ils de définir un programme clair dans sa ou ses
finalités, de désigner le responsable et d'identifier de
manière exhaustive les services chargés de sa mise en oeuvre
au sein de l'organigramme existant ? Des perspectives d'évolution de
l'organisation sont-elles envisagées et à quelle
échéance ? (...)
Le découpage en actions est-il clair, lisible et cohérent ?
- Les actions envisagées dans le cadre du programme sont-elles
cohérentes avec le programme et ses finalités ?
- Toutes les activités des services intégrés dans les
actions financées par le programme correspondent-elles bien aux
finalités de ce programme ? Certaines activités qui correspondent
à ces finalités sont-elles exclues du programme ? Pour quelles
raisons ?
Les fonctions assumées par les structures et les personnels
concernés sont-elles cohérentes avec les actions
envisagées dans le cadre du programme ?
- Les champs de compétences des acteurs du programme (administration
centrale, services déconcentrés, établissements publics et
autres organismes) sont-ils cohérents avec le périmètre du
programme et les actions envisagées ou existe-t-il un hiatus entre ces
compétences et le contenu du programme ? (...)
Commentaires :
La LOLF prévoit que les programmes couvrent des ensembles
cohérents d'actions qui s'inscrivent dans le cadre d'une politique
publique et qu'ils sont placés sous la responsabilité d'un
ministre. Les programmes doivent donc rendre lisibles les politiques de l'Etat
en termes, d'une part, de finalités et de résultats, d'autre
part, d'identification des acteurs responsables de leur mise en oeuvre.
Ces deux exigences du processus de délimitation des programmes
(identification claire des finalités de la politique concernée et
désignation des responsables et services chargés de la mise en
oeuvre) peuvent entrer en contradiction.
Les audits initiaux viseront à s'assurer que cette difficulté
d'articulation des programmes et des organigrammes a bien été
prise en compte, que les programmes répondent à cette double
préoccupation et que les domaines couverts par chacun des programmes et
les actions qu'ils comportent sont cohérents. Ils n'ont pas vocation
à porter une appréciation sur les choix politiques qui ont
conduit à la définition des programmes.
Leur rôle se borne à s'assurer que le périmètre des
programmes est clair et lisible pour l'ensemble des acteurs et que
l'articulation avec les programmes associés ou connexes, notamment en
terme de périmètres respectifs a bien été prise en
compte. (...)
S'assurer que la chaîne de responsabilité est
identifiée pour le pilotage et la mise en oeuvre du programme.
Le responsable désigné par le ministre pour le pilotage de la
mise en oeuvre du programme est-il identifié ?
- Un responsable chef de file a-t-il été identifié
lorsque plusieurs directions d'administration centrale ou plusieurs services
déconcentrés relevant de ministères différents
participent à un même programme ?
- Comment se présente la chaîne de responsabilité du
programme : responsable du programme, responsable d'un programme support
concourant au programme, responsable des différentes actions constituant
le programme, autres responsables délégués pour le
pilotage du programme, opérateurs : rôle du cabinet du
ministre, répartition des rôles au sein de l'administration
centrale, rôle des préfets de région et de
département, rôle des services déconcentrés
(régionaux et départementaux), rôle des
établissements publics, rôle éventuel des
collectivités territoriales et des organismes de droit privé
(associations) participant aux programmes ?
- La nature des liens existants au sein de la chaîne de
responsabilité est-elle claire = relations hiérarchiques,
fonctionnelles, contractuelles, de tutelle... ?
- Dans quelle mesure le programme est-il déconcentré ou
sous-traité à des opérateurs extérieurs publics ou
privés ? Dans chacun des cas, comment est identifiée la
chaîne de responsabilité ?
- Dans le cas où des opérateurs ne se situent pas dans la
chaîne hiérarchique, quelles sont les techniques utilisées
pour les mobiliser au service du programme ?
De quelle organisation et de quels moyens juridiques, humains et financiers
(notamment budgets opérationnels de programme) est doté chaque
responsable pour assurer sa mission ? Comment le responsable du programme en
assure-t-il le pilotage global ?
Au sein de la chaîne de responsabilité, les gouverneurs de
crédits et les responsables des Budgets Opérationnels de
Programmes sont-ils identifiés ?
Commentaires :
On définira le responsable du programme comme celui qui s'engage sur les
objectifs du programme, qui en rend compte au ministre et qui dispose de la
liberté d'affectation des moyens donnés par la
fongibilité, assumant ainsi la fonction de gouverneur des
crédits. Il supervise directement ou indirectement l'ensemble des
opérateurs.
Vis-à-vis du Parlement, le responsable du programme est le ministre mais
il est conduit à confier la responsabilité de sa mise en oeuvre
à un responsable du programme qui sera le plus souvent un directeur
d'administration centrale. Celui-ci pourra à son tour
déléguer ses responsabilités au sein des services
d'administration centrale, aux préfets ou aux autorités
déconcentrées, ou à des directeurs d'établissement
public ou d'agence...
Le responsable du programme est chargé de rendre compte au ministre de
sa mise en oeuvre. Il assume à ce titre une triple
responsabilité : le pilotage global de la mise en oeuvre du
programme (explicitation et déclinaison des objectifs et des actions,
mise en oeuvre à moyen terme), l'adoption de procédures
garantissant l'efficacité des actions et la gestion des crédits
qui lui sont affectés, et notamment la mise en jeu de leur
fongibilité. Il organise le contrôle interne et le dialogue de
gestion avec l'ensemble des opérateurs qui participent au programme. Il
arbitre la répartition des moyens entre actions et services.
L'audit devra s'assurer de la cohérence de la chaîne de
responsabilité du programme et de sa lisibilité pour l'ensemble
des acteurs. (...)
La définition des programmes constitue à la fois un choix
politique et un choix de gestion déterminant pour les
ministères
. En effet, le programme est l'unité de
spécialité des crédits, c'est-à-dire l'ensemble au
sein duquel le gestionnaire est en mesure - en dehors du cas spécifique
des dépenses de personnel auxquels s'applique une fongibilité
asymétrique - d'affecter librement, et donc de redéployer des
crédits en cours de gestion. Les travaux préparatoires de la LOLF
évaluaient entre 150 et 200 le nombre de programmes susceptibles
d'être créés, chiffre à mettre en regard des plus de
800 chapitres budgétaires existant à l'heure actuelle.
Plusieurs ministères ont eu la tentation de réaliser des missions
mono-programme, afin de profiter au maximum de la fongibilité des
crédits prévue par la LOLF. Or, une telle nomenclature serait
préjudiciable à l'information du Parlement, puisque les projets
annuels de performance annexés aux projets de loi de finances initiale
et les rapports annuels de performance annexés aux projets de loi de
règlement sont réalisés par programme. Enfin,
la
création d'un grand nombre de missions mono-programmes
témoignerait à l'évidence d'une interprétation
réductrice de la logique de la LOLF
, selon laquelle la
fongibilité des crédits serait le seul apport substantiel dans la
nouvelle budgétisation par objectifs souhaitée par le
législateur organique.
Il convient au passage de noter que l'extension du droit d'amendement des
parlementaires rendrait possible la « scission » d'une
telle mission à l'occasion de la discussion du projet de loi de finances
initiale, et la création de plusieurs programmes à partir du
programme figurant dans le projet du gouvernement.
Idéalement, il est souhaitable que les programmes correspondant aux
différents ministères comprennent un volume sensiblement
équivalent de crédits. Compte tenu de
l'hétérogénéité des périmètres
ministériels et de l'importance de la masse de crédits
mobilisée pour financer certaines politiques publiques telles que
l'éducation nationale ou la santé et la solidarité, il est
pratiquement inévitable que le volume des crédits inscrits sur un
programme diffère sensiblement d'une mission à une autre.
Afin
de pallier les écarts en terme de qualité d'information d'un
programme à un autre, il sera nécessaire que les programmes les
plus importants comprennent des actions bénéficiant, le cas
échéant, d'indicateurs et d'objectifs spécifiques.
Dès lors qu'une action d'un programme important pourrait correspondre
à un programme d'un autre ministère de moindre importance en
terme de volume de crédits, il est souhaitable que l'information y
étant associée tende à être équivalente
.
Enfin, il convient de souligner qu'il est fondamental que les ministères
réfléchissent d'abord à leurs activités et aux buts
de celles-ci pour concevoir les programmes plutôt que de calquer des
programmes sur leur organisation existante.
La budgétisation par
objectifs doit en effet conduire à remettre en question la structuration
des administrations, et ne pas se limiter à une démarche
« cosmétique »
.
De ce fait, la plupart des agrégats figurant dans les fascicules
« bleus » ne sont pas en mesure de préfigurer les
programmes prévus par la LOLF. Ainsi que le souligne la Cour des comptes
dans son rapport précité sur l'exécution des lois de
finances pour l'année 2002, «
dans environ la moitié
des ministères étudiés, les périmètres
budgétaires des agrégats ne retracent pas fidèlement les
moyens financiers et en personnel correspondant à leurs missions, et les
administrations en charge de la gestion des agrégats ne sont pas
identifiées ou ne disposent pas de l'ensemble des moyens retracés
par les agrégats. Aussi n'est-il pas surprenant de constater que seule
la moitié environ des projets de programmes reprend la structure
actuelle des agrégats.
Nombreux sont les agrégats qui paraissent en effet peu clairs et ne
sauraient constituer une préfiguration valable des programmes.
(...)
»
36(
*
)
.
2. La diffusion de la logique de la LOLF dans les services déconcentrés de l'Etat : une problématique complexe
La
diffusion de la culture de gestion de la LOLF dans l'ensemble de
l'administration et, en particulier, les services déconcentrés de
l'Etat, constitue l'un des enjeux majeurs de la réussite de la
réforme
.
La logique verticale des programmes prévue par la loi organique a, dans
un premier temps, fait « craindre » que l'allègement
des contraintes de gestion au niveau des administrations centrales et des
gestionnaires de programme allait conduire,
a contrario
, à des
difficultés de gestion accrues pour les services
déconcentrés de l'Etat, ceux-ci pouvant se trouver à la
congruence de plusieurs programmes nationaux. Une telle situation
entraîne en effet l'existence d'un grand nombre d'objectifs et, de
manière paradoxale, conduit à une faible fongibilité des
crédits, dès lors qu'ils participent à la
réalisation d'actions relevant de plusieurs programmes et, donc,
relèvent de financements distincts correspondant à chacun d'entre
eux. La dichotomie entre la souplesse de gestion au niveau du gestionnaire d'un
programme (appelé également « gouverneur de
crédits ») et la complexité de la gestion en
résultant au niveau déconcentré constitue, à
l'évidence, un défi pour la réussite de la réforme.
L'identification de ce problème a conduit la direction de la
réforme budgétaire à imaginer des procédés
innovants, qui ne découlent pas de manière directe de la
rédaction de la LOLF, les budgets opérationnels de programme
(BOP). L'encadré suivant reproduit des extraits d'une note d'orientation
de la direction de la réforme budgétaire, en date du
4 juillet 2003.
Les budgets opérationnels de programme (BOP)
«
(1)
Les fonctions des acteurs actuels
Plusieurs acteurs institutionnels interviennent aujourd'hui dans la
chaîne de la dépense en fonction de leur positionnement
hiérarchique ou fonctionnel : ministre, préfet, ambassadeur,
ordonnateur secondaire militaire, contrôleur financier, comptable. La
mise en oeuvre de la loi organique ne modifiera pas leur rôle
institutionnel ; en revanche, elle fera évoluer leurs fonctions
dans un nouveau cadre de gestion. (...)
(2) Les fonctions associées à la mise en place de budgets
opérationnels de programme (...)
- Le responsable de programme
Désigné par le ministre, il prépare et assure la mise en
oeuvre globale du programme. Il détermine en fonction de
compétences géographiques et fonctionnelles les responsables de
BOP qui mettront en oeuvre le programme et leur alloue les dotations
déterminées en commun pour parvenir aux résultats
attendus. Il pilote l'ensemble du dispositif de mise en oeuvre et rend compte
des résultats au ministre.
- Le responsable de BOP
Il conçoit la programmation d'actions et de moyens pour mener à
bien la part de programme qui lui a été confiée. En
fonction de compétences géographiques et fonctionnelles, les
responsables d'unités d'exécution sont les acteurs
opérationnels de proximité.
- Le responsable d'unité d'exécution
C'est le gestionnaire/ordonnateur. Il exécute la programmation
conçue par le responsable de BOP. Pour la part qui lui est
attribuée, il est le consommateur des crédits attribués au
BOP.
Les fonctions de responsable de BOP et de responsable d'unité
d'exécution du même BOP peuvent évidemment se
cumuler : le responsable d'un BOP peut être responsable
d'unité d'exécution pour tout ou partie du
périmètre du BOP.
L'articulation entre ces acteurs ne repose pas nécessairement sur une
ligne hiérarchique. En effet, un même responsable peut
gérer plusieurs BOP et donc être associé à la mise
en oeuvre de plusieurs programmes, y compris des programmes qui ne
dépendent pas de son ministère de rattachement. C'est le cas par
exemple des services des ministères de l'équipement ou de
l'agriculture qui agissent au nom du ministre de l'écologie et du
développement durable.
(...)
La diversité des compétences appelées à participer
à la mise en oeuvre d'un programme entraîne nécessairement
une hétérogénéité des contenus des BOP.
En effet, chaque BOP regroupe, la part des crédits d'un programme
à mettre à disposition d'un responsable identifié pour la
mise en oeuvre d'une ou plusieurs actions dont il a la charge. Ce responsable
correspond généralement à un service. A ce titre, le BOP
retrace sa compétence :
- soit sur un périmètre géographique :
l'ensemble du territoire (cas d'un service en administration centrale) ou une
partie du territoire (cas d'un service déconcentré) ;
- soit pour mener un type d'activités : informatique,
immobilier...
Dans les deux cas, les responsables seront guidés par les objectifs
fixés au programme et tenus par les résultats attendus.
En effet, chaque BOP hérite des caractéristiques du programme
dont il dépend - destination (actions, sous-actions) et, nature de
dépense (titre, catégorie, voire niveau inférieur),
objectifs, indicateurs - pour les segments nécessaires à son
domaine de compétence. Notamment sont reprises dans le contenu du BOP
les actions et natures de dépenses pertinentes et les objectifs et les
indicateurs sont déclinés en fonction des
caractéristiques locales.
En tout état de cause, la définition du périmètre
du BOP est arrêtée par le responsable de programme avec chaque
responsable de budget opérationnel de programme. A cette occasion, il
détermine la part du programme confiée au BOP, en autorisations
d'engagement et en crédits de paiement et il valide les cibles de
résultats. Ce dialogue se déroule en amont de la procédure
budgétaire classique et, au plus tard, dans le trimestre qui
précède le début de gestion.
Le BOP bénéficie de l'ensemble des ressources budgétaires
en crédits et en emplois nécessaires à son
exécution. Ce principe n'entraîne pas obligatoirement que
l'ensemble de ces ressources sont mises à la disposition du responsable
du BOP et gérées par lui. Il existe actuellement des situations
dans lesquelles un responsable de services bénéficie de moyens
qu'il ne gère pas directement ou pas dans leur totalité. (...)
L'ensemble de la dotation du programme est ventilé en budgets
opérationnels de programme. Leurs dotations sont réparties sur la
nomenclature de référence du programme en fonction du
périmètre budgétaire de chacun.
Pour autant cette ventilation n'est pas tenue d'épuiser la dotation
votée : le responsable de programme peut constituer à son
niveau une réserve éventuelle pour aléas ou
régulation. (...)
Le responsable de BOP répartit son enveloppe prévisionnelle entre
les unités d'exécution tout comme le responsable de programme
répartit sa dotation entre les BOP. Il peut également conserver
par devers lui une réserve non attribuée.
Sur les bases de cette ventilation prévisionnelle, la part de
crédits mis à disposition est répartie entre les
unités d'exécution.
L'ensemble de ces procédures est dématérialisé.
Elles sont équivalentes à l'usage de droits de tirage,
limités par les enveloppes définies et mis à la
disposition d'entités autorisées. (...)
La mise à disposition des autorisations d'emplois :
Dans la logique de la loi organique, les moyens dont dispose le BOP sont des
crédits, assortis lorsqu'ils relèvent du titre II des
dépenses de personnel, d'autorisations d'emplois
rémunérés, déclinées en catégories
à l'instar du plafond indicatif du programme. La dynamique de la loi
organique tend à ce que le responsable de BOP dispose de la
totalité des moyens.
Dans les cas où la gestion des emplois est actuellement
centralisée, alors même que les crédits de
rémunérations peuvent être délégués
aux services déconcentrés, se pose donc la question de la mise en
oeuvre, notamment en termes techniques (outils de suivi) et organisationnels de
ce choix de gestion déconcentrée notamment en vue d'articuler la
capacité de fongibilité offerte aux gestionnaires avec la gestion
statutaire des personnels. (...)
La modification des enveloppes initiales :
En principe ces modifications internes au BOP ne donnent pas lieu à un
mouvement si elles n'ont pas d'incidence sur la répartition entre les
dotations limitatives en application de la loi organique. Au-delà, le
principe de fongibilité assure au gestionnaire une large liberté
dans l'imputation des dépenses : la disponibilité sur la
ligne n'est plus une condition dirimante pour la consommation des
crédits.
Cependant, le responsable de programme peut imposer une limitativité
à l'un ou l'autre niveau de la nomenclature, signifiant par là
l'attention qu'il porte à la ligne. En ce cas, le gestionnaire ne peut
consommer en dépassement et doit trouver une ressource sur d'autres
lignes de sa dotation pour couvrir la dépense envisagée. Si les
lignes ressources sont porteuses de dépenses identifiées comme
obligatoires, le contrôleur financier confirme la faisabilité du
mouvement proposé. Éventuellement, le responsable de programme
peut souhaiter que le mouvement soit soumis à son autorisation.
Les modifications de la dotation initiale sont au coeur du rapport annuel de
performance à fournir au Parlement. Il est rappelé à ce
propos que tout acteur, qu'il soit dans une unité d'exécution,
responsable d'un BOP ou d'un programme, doit justifier dans son compte rendu
d'exécution, des écarts entre la budgétisation initiale et
l'exécution.
Le concept de budget opérationnel de programme est le support d'une
budgétisation articulée désormais autour de la
responsabilisation des gestionnaires et du contrôle de
l'efficacité de la dépense publique. Il repose sur un
échange : d'un côté les gestionnaires ont plus de
liberté grâce à la globalisation et la fongibilité,
de l'autre, ils ont la responsabilité des résultats obtenus et en
rendront compte.
Les propositions qui sont faites ont essayé de réaménager
le rôle de chacun des acteurs et de simplifier les procédures
d'allocation des crédits dans un cadre budgétaire
profondément rénové par la loi organique tout en laissant
chaque ministre maître de l'organisation de gestion la mieux
adaptée à la performance recherchée. »
Source : note de la direction de la réforme budgétaire, 4
juillet 2003
3. Les objectifs et les indicateurs de performance : les « pièges » à éviter
La loi
organique relative aux lois de finances contraint les administrations à
se fixer des objectifs et à mesurer les résultats de leurs
actions. Il s'agit de faire en sorte que les ministères s'interrogent
sur les finalités de leur action et la mesure de leur performance. Pour
le Parlement, les objectifs et les indicateurs permettent d'accéder
directement, sur un certain nombre de sujets déterminés, à
une information synthétique concernant l'évaluation de
paramètres stratégiques pour la mise en oeuvre d'un programme
gouvernemental.
Le document relatif au contrôle de gestion dans les administrations de
l'Etat élaboré par la Délégation
interministérielle à la réforme de l'Etat en juin 2002
rappelle que «
la logique de la LOLF incite à commencer par
fixer des objectifs. Ces objectifs doivent refléter les priorités
du gestionnaire concerné.
«
Les objectifs doivent être mesurables, c'est-à-dire
qu'à chaque objectif est associé une cible de résultat,
à laquelle la réalisation en fin d'exercice pourra être
comparée.
Ces objectifs de performance sont déclinés de manière
équilibrée en fonction des axes qui seront retenus pour la
définition de la performance, par exemple :
- le résultat final de l'action de l'Etat (ou impact) ;
- la qualité du service rendu à l'usager ;
- l'efficience, c'est-à-dire le rapport entre les moyens et les
réalisations.
A chaque objectif doit être associé un indicateur permettant de
mesurer effectivement le niveau de performance atteint
».
S'agissant des indicateurs, ceux-ci doivent respecter un certain nombre de
critères. Les critères suivants sont issus du rapport du groupe
de travail sur l'amélioration de la gestion publique
37(
*
)
; ces indicateurs doivent être :
- lisibles, compréhensibles, clairs, immédiatement
interprétables ;
- pertinents ;
- disponibles à un coût compatible avec les
bénéfices attendus de leur usage ;
- fiables, précis, contrôlables ou
« auditables » ;
- disponibles au cours du temps dans les mêmes conditions ;
- être synthétiques et sélectifs.
Il convient de souligner que
les indicateurs doivent découler
d'une
réflexion approfondie sur les objectifs de l'action
publique
. En effet, un indicateur n'a pas de sens en tant que tel, mais
doit être lié à la définition d'une stratégie
et de priorités clairement établies.
Ainsi que le souligne M. Patrick Gibert dans le document établi par la
Délégation interministérielle à la réforme
de l'Etat portant sur «
le contrôle de gestion dans les
administrations de l'Etat
» de juin 2002, au sujet du
contrôle de gestion, «
le contrôle de gestion a ses
adages. (...)
«
Le premier pose qu' «
on ne gère que ce que
l'on mesure
». Il invite à l'évidence à
l'effort d'objectivation des performances, à la quantification des
objectifs, au développement des indicateurs, à la propagation
dans l'administration de la culture et des chiffres.
«
L'autre exprime que «
l'on obtient ce que l'on
mesure
». Il suggère que le caractère mobilisateur
de l'objectif quantifié - ce qui en est d'ailleurs la raison
d'être - s'accompagne d'un éventuel effet pervers si l'indicateur
retenu n'est pas raisonnablement représentatif du
phénomène qu'il représente. Or, le polymorphisme, la
plasticité, la volatilité - parfois - des ambitions de l'action
publique rendent éminemment délicate la mise sur pied
d'indicateurs non biaisés et non réducteurs
».
S'agissant des indicateurs et des objectifs prévus par la LOLF,
plusieurs écueils doivent être évités, outre les
problèmes de définition soulignés plus haut
:
- celui de retenir un trop grand nombre d'objectifs et d'indicateurs, ce qui ne
permet pas de mettre en valeur la dimension stratégique de l'action
menée ;
- celui de ne focaliser l'action des services que sur la réalisation des
objectifs présentés au Parlement, au détriment d'autres
pans de l'action publique. En effet, si les objectifs et les indicateurs
présentés au Parlement à l'occasion de la discussion du
projet de loi de finances doivent permettre de dégager une
stratégie globale et donc, de couvrir l'ensemble des activités
des administrations relevant d'un programme, ils constituent une
synthèse des activités des différents services. Il
conviendra d'éviter ceux des travers qui pourraient être
liés à l'affichage d'un nombre limité d'objectifs et
d'indicateurs au niveau national, comme l'abandon systématique
d'activités annexes qui contribuent à la réalisation d'un
objectif sans participer directement au renseignement d'un indicateur national.
Il reviendra notamment au Parlement de s'assurer que les gestionnaires de
programmes ne cherchent pas à « faire du chiffre »,
ce qui révélerait une gestion à court terme contraire aux
intentions du législateur organique.
Dans cette perspective,
la mise en place d'un contrôle de gestion est
essentielle pour articuler l'action des différents services
dans
le cadre d'un programme, autour d'une stratégie cohérente
.
Par ailleurs, le contrôle de l'action de l'administration, y compris le
contrôle exercé par le Parlement et par ses commissions
chargées des finances, excédera largement le seul champ des
objectifs et des indicateurs présentés à l'occasion de la
discussion de la loi de finances. L'exigence de performance ne saurait donc se
limiter aux objectifs et aux indicateurs figurant dans les projets annuels de
performance et les rapports annuels de performance.
Les avancées en terme d'information contenue dans les fascicules budgétaires avant le vote de la LOLF
Les
« bleus budgétaires » ont intégré
depuis plusieurs années des éléments pouvant
apparaître comme des préfigurations des exigences de la LOLF, avec
la définition d'agrégats et d'indicateurs. Ces innovations ont
constitué des progrès par rapport à la situation
antérieure. Par ailleurs, dans la circulaire du 21 février 2000
relative à l'établissement de rapports d'activité et de
comptes rendus de gestion budgétaires ministériels, le Premier
ministre de l'époque, Lionel Jospin, indiquait :
«
1 -
La transparence de la gestion publique constitue une
exigence démocratique. Il importe en effet que chaque administration
rende compte de la manière la plus claire et la plus aisément
accessible de la façon dont elle met en oeuvre les politiques relevant
de sa compétence et dont elle utilise les moyens qui lui ont
été attribués à cet effet. Ce devoir d'information
procède des articles 14 et 15 de la
Déclaration des
droits de l'homme et du citoyen
. Il vaut à l'égard de la
représentation nationale, mais aussi de chaque citoyen.
«
Afin de mieux répondre à cette exigence, je
souhaite que, conformément aux orientations retenues par le
comité interministériel pour la réforme de l'Etat en date
du 13 juillet 1999, à partir des travaux menés par le
Comité central d'enquête sur le coût et le rendement des
services publics, chaque département ministériel s'engage dans
l'élaboration de rapports d'activité annuels. Dans le même
esprit, devront être établis des comptes rendus de gestion
budgétaire, destinés à être joints au projet de loi
de règlement.
«
Ces deux types de documents ont naturellement vocation à
être établis en utilisant les nouveaux instruments mis au point
dans le cadre de la modernisation de la gestion de l'administration, qu'il
s'agisse de la politique de pilotage par objectifs ou des indicateurs
élaborés pour mettre en oeuvre le contrôle de gestion dans
les services. Ils pourront ainsi refléter, et en même temps,
soutenir les efforts engagés par les ministères pour moderniser
leurs techniques de gestion.
«
2 - A partir d'une définition des orientations de
l'action du ministère et des fonctions qu'il exerce, les rapports
d'activité devront faire apparaître, de manière claire et
objective, un ensemble d'indicateurs permettant de mieux appréhender en
quoi a consisté l'activité du ministère durant
l'année écoulée, d'apprécier l'évolution des
résultats obtenus par rapport aux années
précédentes et de comprendre les perspectives adoptées
pour les années à venir. On s'attachera tout
particulièrement à concilier l'intérêt et la
pertinence des informations qui y seront contenues avec les impératifs
de clarté et d'accessibilité auxquels doivent répondre des
documents destinés à une large diffusion. Ils seront en effet
directement accessibles au public au moyen des technologies modernes de
l'information ; le Parlement et les organismes paritaires
compétents en seront parallèlement destinataires. ( ...)
« 3 - Par ailleurs, chaque ministère élaborera,
dès cette année, un compte rendu de gestion budgétaire.
«
Ce document permettra d'assortir le compte rendu comptable de la
consommation des crédits, tel qu'il ressort de la loi de
règlement, d'éléments d'appréciation sur
l'efficacité des politiques conduites et sur les efforts faits par les
administrations pour améliorer la qualité du service rendu
à l'usager. Accompagnant le projet de loi de règlement, dont le
dépôt sera lui-même anticipé, il permettra de mieux
préparer la discussion du budget de l'exercice à venir
grâce à un examen plus approfondi de la gestion
écoulée, conformément aux préoccupations
récemment exprimées par les députés qui ont
animé un groupe de travail sur le thème du contrôle
parlementaire et de l'efficacité de la dépense
publique
».
Ainsi que le souligne le contenu de cette circulaire, les dispositions de la
LOLF relatives au contenu des projets et des rapports annuels de performance
étaient « en germe » dès avant le vote de la
loi et avaient commencé à produire des effets. Il convient
toutefois de mettre l'accent sur le changement d'échelle que provoque la
LOLF, dès lors que les indicateurs et les objectifs sont indissociables
de la notion de programme : il ne s'agit alors plus seulement d'un
exercice de communication et d'explicitation de l'action publique, mais
véritablement, d'un affichage des priorités politiques pouvant
donner lieu à un contrôle approfondi.
En dépit de la similitude marquée entre les initiatives
développées avant le vote de la LOLF et les dispositions de
celle-ci, il serait particulièrement malvenu de chercher à
plaquer les nouvelles exigences sur l'existant, compte tenu du contexte nouveau
ouvert par la LOLF. En effet, il ne s'agit plus d'habiller en quelque sorte une
budgétisation par nature, mais de mettre en oeuvre une
budgétisation par objectifs, ce qui implique un important travail de
réflexion sur le périmètre, les priorités et la
mesure de la performance de l'action publique. La démarche
souhaitée par le législateur organique implique une mobilisation
de l'ensemble des services d'une administration, et en renouvelle
profondément les modes de gestion.
4. L'élaboration du budget implique une réflexion approfondie sur les objectifs de l'action de l'Etat
La
hiérarchisation des objectifs sera d'autant plus nécessaire dans
le nouveau cadre défini par la LOLF, que celui-ci prévoit que les
crédits ne seront plus justifiés, d'une part en services
votés, d'autre part en mesures nouvelles, mais « au premier
euro ».
Ainsi que l'indique le document de la Délégation
interministérielle à la réforme de l'Etat portant sur
« le contrôle de gestion dans les administrations de
l'Etat » de juin 2002, «
le budget dit « base
zéro » est établi sans référence à
la période précédente (d'où son appellation) et en
fonction des stricts besoins de l'exercice budgétaire. Le principe
consiste à définir le budget de base correspondant au niveau
minimal d'activité, puis à chiffrer les autres composantes du
budget en fonction d'un niveau d'activité ou de qualité attendu
afin d'aider aux choix, selon des priorités explicitées :
«
La méthode repose sur une hiérarchisation des
objectifs, condition préalable à la définition et à
l'élaboration du budget. (...)
«
La mise en oeuvre de la LOLF pourrait donc passer par une
analyse détaillée du coût des actions composant les
programmes, qui nécessiterait de se référer aux facteurs
explicatifs de la dépense, centraux dans le budget base zéro
(BBZ). (...)
«
La méthode BBZ peut être l'occasion de
procéder, lors de sa mise en place, à une réflexion sur
l'opportunité ou la valeur ajoutée de tel ou tel type de
dépense au regard des objectifs du service et déboucher sur une
reconfiguration de la structure des dépenses.
«
Par ailleurs, l'évaluation des conséquences d'une
non-réalisation d'activités ou d'un niveau d'effort, et en
particulier la mesure des économies réelles susceptibles
d'être obtenues, doit être réalisée de manière
précise.
«
Quelques questions peuvent éclairer et aider à la
décision :
«
- la non-budgétisation d'une activité
déjà réalisée par le service induira-t-elle une
économie réelle pour la collectivité ?
«
- ou bien les coûts seront-ils transférés
à un autre service ?
«
- ou encore faudra-t-il s'attendre à des surcoûts
induits à terme par la suppression d'activités ?
(...)
».
Votre commission des finances considère que
la suppression de la
distinction entre les services votés et les mesures nouvelles doit
mettre fin à un processus de
« sédimentation » de l'action de l'Etat, qui
constitue un biais favorable à la progression de la dépense
publique
, la remise en cause des services votés étant
présentée comme une exception à une règle de
reconduction tacite des dépenses passées. En effet,
le
système mis en place par l'ordonnance organique du 2 janvier 1959
est fondé sur une logique qui pousse les acteurs concernés
à se focaliser sur des mesures marginales, et non sur le coeur
de
la dépense publique
. La budgétisation « au premier
euro » et les informations demandées au gouvernement sur les
emplois rémunérés par l'Etat tendent à remettre en
cause cette logique en réorientant l'élaboration du budget et la
discussion budgétaire autour des enjeux essentiels de la dépense
publique.
La budgétisation « au premier euro » prévue
par la loi organique du 1
er
août 2001 relative aux lois
de finances doit donc conduire à un
exercice
annuel de remise
en cause des dépenses de l'administration et des activités
des
services
. La réforme de la comptabilité de l'Etat,
et la mise en oeuvre d'un contrôle de gestion, permettront aux
gestionnaires de disposer d'estimations précises et fiables des
coûts des différentes activités de l'administration, ce qui
rendra plus objectifs les calculs permettant la mise en oeuvre d'une telle
budgétisation.
La budgétisation « au premier
euro » doit, à l'aide des instruments mis en place par la
LOLF, permettre de réaliser des économies grâce au
croisement des priorités et des coûts de l'action de l'Etat
.
L'encadré ci-après reproduit des extraits du guide d'audit
initial des programmes concernant les objectifs des programmes.
Extraits du guide d'audit initial des programmes
S'assurer que les objectifs retenus pour le programme sont sélectifs
et compréhensibles, et qu'ils reflètent une approche
stratégique de la politique publique concernée.
Les
objectifs de résultats retenus dans le projet annuel de
performance :
- ont-ils été fixés à partir d'une réflexion
sur les finalités de la politique publique concernée, sur les
résultats antérieurs, sur le contexte et les contraintes dans
lesquels cette politique s'exerce et à partir d'une réflexion sur
les leviers d'action mobilisables ?
- traduisent-ils les priorités du ministère en termes de
résultats attendus et ne sont-ils pas trop nombreux ?
- sont-ils suffisamment synthétiques et/ou transversaux (toutes les
actions dont le financement est inscrit au programme contribuent-elles à
la réalisation des objectifs) ?
S'il existe des objectifs intermédiaires pour les différentes
actions du programme, leur lien logique avec les objectifs finaux de ce dernier
est-il aisément démontrable ? Les objectifs retenus
traduisent-ils, de façon adaptée à la politique
considérée :
- les finalités ultimes de l'action publique : efficacité
socio-économique ?
- les modalités de mise en oeuvre de cette action : avec quelle
qualité de service ?
- l'économie des moyens en rapport avec les résultats
attendus : avec quelle efficience ?
Les objectifs assignés au programme sont-ils compréhensibles et
ont-ils du sens pour les personnes les plus concernées par celui-ci,
soit :
- les bénéficiaires (entreprises, usagers ou leur
représentation) ?
- les opérateurs (les administrations centrales et
déconcentrées, les établissements publics...) ?
- les partenaires de l'Etat (collectivités locales, associations, ....) ?
Commentaires :
La LOLF est porteuse des exigences de performance et de transparence qui
doivent guider l'Etat pour la définition - concertée avec les
auteurs internes et externes de l'action publique - des objectifs qu'il se
fixe. Quoique formulés de façon littéraire, les objectifs
des programmes et des actions - qui seront présentés au
Parlement - doivent être suffisamment :
- précis pour traduire les priorités assignées aux
politiques publiques,
- hiérarchisés pour mettre en évidence des lignes d'action
claires,
- lisibles pour être compris et partagés par les citoyens comme
par les acteurs de leur mise en oeuvre.
La mesure de la performance suppose que les objectifs retenus rendent compte
des trois dimensions du résultat de l'action publique que sont
l'efficacité socio-économique, la qualité de service et
l'efficience. Le poids relatif de chacune de ces dimensions dépend de la
nature de la politique mise en oeuvre : une politique d'intervention
privilégiera les objectifs d'efficacité socio-économique
(c'est-à-dire la finalité ultime de l'action publique), tandis
que les objectifs d'une politique visant à assurer une prestation de
service ou les objectifs d'une fonction support seront plus centrés sur
la notion de qualité et d'efficience dans le cadre d'un arbitrage entre
les attentes des bénéficiaires (ou des clients internes) et les
ressources mobilisables par l'administration.
La définition d'objectifs d'efficacité socio-économique
présente des difficultés particulières dans la mesure
où l'impact propre de l'action de l'Etat peut être difficile
à isoler.
L'audit initial du programme a notamment pour objet de s'assurer que le
ministère, pour l'élaboration des objectifs, s'est appuyé
sur un diagnostic préalable et une vision stratégique à
moyen terme (3 à 5 ans) des missions permanentes et des politiques
publiques qu'il conduit.
S'assurer que les objectifs retenus sont cohérents avec ceux des programmes associés et connexes, ainsi qu'avec les objectifs des autres acteurs.
Mission
(ministérielle ou interministérielle) - programmes
associés et programmes connexes :
- les objectifs du programme sont-ils cohérents avec ceux des autres
programmes inclus dans la même mission (« programmes
associés ») ?
- dans le cas d'un programme inclus dans une mission interministérielle
ou participant à une politique interministérielle, comment est
organisée la coordination des objectifs et des moyens au niveau central
et au niveau déconcentré (rôle du Préfet) ?
- est-il possible d'identifier un ou des programmes non inclus dans la
même mission (« programmes connexes ») dont la mise
en oeuvre est à l'évidence susceptible d'avoir un impact sur le
programme audité ? Dans l'affirmative, les objectifs poursuivis par ce
ou ces programmes connexes sont-ils complémentaires de ceux du programme
audité ?
- une concertation et des échanges d'information sont-ils prévus
entre le responsable du programme et ceux des programmes associés et
connexes ?
Programmes de l'Etat et objectifs des autres acteurs :
- des acteurs et/ou des ressources externes (ex : collectivités
locales, Union européenne, régimes sociaux, associations faisant
appel à la générosité publique) contribuent-ils de
manière significative aux objectifs du programme ?
- dans l'affirmative
ces acteurs affichent-ils des objectifs ?
ces objectifs et ceux du programme sont-ils cohérents ?
le projet annuel de performance mentionne-t-il d'autres contributions
externes non inscrites en loi de finances de l'Etat (ex : loi de
financement de la sécurité sociale, fonds européens,
collectivités locales) ?
- une concertation, des échanges d'information et une coordination
sont-ils prévus entre le responsable du programme et ces acteurs
externes ?
Commentaires :
(...) Des programmes sont dits :
- « associés » au programme audité quand ils
relèvent formellement d'une même mission ;
- « connexes » quand, sans être formellement
intégrés à la même mission, ils sont manifestement
susceptibles d'avoir un impact sur les résultats du programme
audité en visant des objectifs complémentaires et / ou des
publics identiques.
L'analyse des objectifs des programmes associés et connexes doit
permettre de vérifier qu'une mise en synergie est en tant que
nécessaire organisée pour garantir la cohérence de
l'action de l'Etat et du pilotage des programmes.
Afin que la réalisation des objectifs d'un programme puisse être
corrélée avec l'ensemble des moyens qui y contribuent, il est
important que les « dépenses fiscales »,
c'est-à-dire les parts de recettes résultant
d'exonérations ou de régimes dérogatoires, soient prises
en compte.
Il est également important que les concours de toute nature
apportés par d'autres collectivités soient mentionnés
à titre informatif dans le projet de performance.
S'assurer de la pertinence, de la lisibilité et de la faisabilité
des indicateurs de résultats associés au programme et aux actions
Les indicateurs rendent-ils compte des objectifs retenus pour le
programme :
- de façon fidèle (lien logique objectif / indicateur) ?
- de façon exhaustive (couverture de l'ensemble des objectifs et, au
sein de chaque objectif, de l'ensemble de ses dimensions propres) ?
- de façon synthétique (nombre réduit d'indicateurs et
complémentarité des indicateurs entre eux) ?
Des valeurs cibles, assorties d'échéances précises,
ont-elles été définies pour les principaux indicateurs
?
Les indicateurs sont-ils compréhensibles pour les personnes qu'ils
concernent au premier chef, soit :
- les bénéficiaires (entreprises, usagers ou leur
représentation) ?
- les administrations centrales et déconcentrées, les
établissements publics ?
- les partenaires de l'Etat (collectivités locales, associations,...) ?
Les indicateurs choisis reposent-ils sur des données disponibles et
fiables ?
La méthode de recueil des données et de calcul des indicateurs
est-elle définie ? Assure-elle :
- leur faisabilité ?
- leur pérennité et leur homogénéité dans
l'espace, pour permettre des comparaisons ?
Commentaires :
Un programme doit présenter, outre les actions et les objectifs
poursuivis, les résultats attendus et obtenus mesurés au moyen
«
d'indicateurs précis dont le choix est
justifié
».
Un indicateur doit donc, qu'il soit quantitatif ou qualitatif, être
exprimé sous forme numérique (taux d'erreur, par exemple) et
permettre :
- de fixer des cibles argumentées traduisant des résultats
assortis d'échéances temporelles (court ou moyen terme) ;
- de mesurer les réalisations par rapport à ces cibles, puis de
les comprendre et de les analyser ;
- d'orienter les décisions des responsables des programmes dans le but
d'améliorer la performance ;
- de nourrir le dialogue de gestion entre les différents échelons
administratifs.
Le choix d'un indicateur doit :
- résulter souvent d'un arbitrage entre pertinence et fiabilité
(tenant compte notamment du coût : principe de
proportionnalité entre l'utilité de l'indicateur et les moyens
nécessaires pour en disposer) ;
- prendre en compte et anticiper les effets de comportement qu'il est
susceptible d'induire, en s'assurant qu'ils ne seront pas de nature à
mettre en péril les objectifs poursuivis par le programme.
(...)
S'assurer que les objectifs du programme sont déclinés au
travers d'objectifs spécifiques pour chaque opérateur contribuant
significativement à la réalisation du programme.
La contribution attendue de chaque opérateur aux différentes
actions du programme est-elle déclinée sous forme d'objectifs
spécifiques assortis d'indicateurs de résultats ?
- l'articulation de ces objectifs et indicateurs avec les objectifs et
indicateurs du programme apparaît-elle clairement ?
- ces objectifs et indicateurs sont-ils compréhensibles et connus des
cadres et des agents concernés ?
- ces objectifs sont-ils fondés sur une analyse des processus de chaque
opérateur et d'une appréciation des résultats obtenus dans
la période antérieure ?
Ces objectifs spécifiques sont-ils formalisés ?
- existe-t-il des plans d'action pluriannuels ou des contrats d'objectifs ?
- existe-t-il une procédure qui permet d'actualiser chaque année
durant la durée du programme, les objectifs assignés aux
opérateurs ?
- pour les opérateurs ayant une mission territoriale, existe-t-il une
procédure permettant de coordonner ces objectifs avec ceux des autres
opérateurs de l'Etat sur le même territoire (ex : projet
territorial de l'Etat) ?
Y a-t-il des objectifs du programme qui ne sont pas déclinés
en objectifs spécifiques assignés à des opérateurs ?
Commentaires :
La contribution des opérateurs s'organise dans le cadre défini
par la chaîne de responsabilité du programme (...). Pour garantir
la qualité du programme, des objectifs spécifiques, à
caractère intermédiaire, traduisant la contribution de chaque
opérateur à la réalisation des objectifs du programme
doivent être définis ; ce principe concerne les services centraux
et déconcentrés opérateurs du programme, ainsi que les
opérateurs externes bénéficiant de subventions pour
charges de service public permanentes ; en revanche, la définition
d'objectifs n'apparaît pas indispensable pour les opérateurs
occasionnels ou ceux qui perçoivent une rémunération
correspondant à l'achat par l'Etat d'une prestation de service
déterminée.
De même que les objectifs du programme, ces objectifs
intermédiaires seront formulés de façon littéraire,
mais devront être suffisamment précis, hiérarchisés,
et lisibles pour être compris et partagés par les citoyens comme
par les acteurs de leur mise en oeuvre. L'audit doit particulièrement
s'attacher à vérifier la clarté de l'articulation entre
les objectifs des opérateurs et les objectifs du programme, ainsi que
l'existence d'indicateurs permettant d'en mesure la réalisation.
Il doit également s'assurer d'une formalisation minimale de ces
objectifs, sur la base de documents de référence (les cadres de
gestion) dont la forme relève de l'initiative de chaque
ministère. (...)
Source : Guide d'audit initial des programmes, Comité
interministériel des programmes (CIAP), 17 mars 2003
II. DES RÉFORMES IMPORTANTES ET NÉCESSAIRES DANS LE FONCTIONNEMENT DE L'ADMINISTRATION
A. LA RÉFORME DE LA CHAÎNE DES CONTRÔLES
La
réforme de la chaîne des contrôles est le corollaire de la
réussite de la LOLF, permettant de s'assurer tant de la
régularité que de la souplesse des procédures.
La LOLF vise à responsabiliser davantage les gestionnaires de
crédits en leur accordant une liberté accrue dans l'affectation
des ressources.
Afin que la culture de responsabilité et de
performance puisse s'ancrer dans l'administration, il apparaît
nécessaire de réformer l'organisation des contrôles
selon deux axes : d'une part, le
développement du contrôle
de
gestion et, de manière générale, des
contrôles internes
: en effet, ils constituent des outils
indispensables pour permettre au gestionnaire de disposer
d'éléments d'information fiables et complets sur la situation de
son budget et les performances de son administration ; d'autre part,
l'allègement des contrôles externes
a priori
, qui
tendent à ralentir les procédures et à encadrer de
manière trop immédiate la responsabilité des
gestionnaires.
1. Le contrôle de gestion, corollaire indispensable de la réforme
Le
développement du contrôle de gestion dans les administrations est
un chantier dont le pilotage revient à la délégation
à la modernisation de la gestion publique et des structures de l'Etat
(DMGPSE), anciennement délégation interministérielle
à la réforme de l'Etat (DIRE).
La circulaire interministérielle du 21 juin 2001 relative au
contrôle de gestion indiquait que : «
La recherche de
la performance de la gestion publique vise à accroître le
bénéfice que l'action de l'Etat procure à la
société et à optimiser la qualité du service rendu
à l'usager tout en s'inscrivant dans une politique budgétaire
soutenable.
«
Sa réussite passe par un renforcement de l'autonomie et
de la responsabilité des gestionnaires sur la base d'objectifs et de
moyens clairement définis assortis d'engagements sur des
résultats.
«
Elle est inscrite dans les démarches de
budgétisation orientée vers les résultats, de
modernisation de la fonction immobilière et d'élaboration des
plans pluriannuels de modernisation qui ont été mises en oeuvre
depuis plusieurs années.
«
Une telle démarche, qui vise à passer d'une
logique de moyens à une logique de résultats, comporte un volet
interne à chaque administration : la structuration de ses
activités autour des résultats attendus et l'organisation du
dialogue de gestion entre l'administration centrale et les services sur ce
fondement.
«
Au-delà de cette dimension interne, l'orientation de la
gestion vers les résultats vise à mieux éclairer les
décisions de politiques publiques en fournissant des informations
pertinentes sur les coûts et les résultats de chacune d'entre
elles. Elle répond ainsi à une exigence accrue de transparence
qui découle du principe démocratique. Elle s'accompagne d'une
obligation de compte rendu à destination aussi bien du Parlement, qui
décide des politiques publiques et alloue les moyens, que des
différents niveaux d'administration chargés de les mettre en
oeuvre. Elle rend nécessaire la prise en compte des résultats de
l'action dans l'évaluation des personnels d'encadrement.
«
Le comité interministériel à la
réforme de l'Etat du 12 octobre 2000 a donné une nouvelle
impulsion à cette démarche en faisant de la
généralisation du contrôle de gestion dans les
administrations de l'Etat un des axes centraux de la modernisation de la
gestion publique.
«
Il a inscrit cette démarche dans la perspective de la
réforme de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959. L'orientation de la
budgétisation vers les résultats rend en effet indispensable
l'existence au sein des administrations d'un système de contrôle
de gestion permettant le pilotage des services et la restitution des
éléments d'appréciation des résultats des
politiques publiques. Il importe que dès à présent chaque
administration se prépare aux nouvelles règles de gestion
induites par la réforme, en développant et en
généralisant en son sein le contrôle de gestion. (...)
«
Il nous paraît en effet essentiel que les responsables des
services au sein de votre ministère considèrent le contrôle
de gestion non seulement comme une obligation formelle mais comme une
impérieuse nécessité qui requiert leur mobilisation et
s'impose à eux comme le meilleur moyen pour optimiser le pilotage et le
suivi des activités dont ils ont la charge
».
Dans un cahier des charges pour l'élaboration des nouveaux contenus des
budgets ministériels, diffusé auprès des ministères
par la direction du budget le 18 février 2002, il était
précisé que : «
le contrôle de gestion
vise d'abord à piloter les résultats intermédiaires
attendus de l'activité des services ; il est orienté vers le
pilotage des résultats directs des actions plus que vers la mesure de
l'impact final des politiques. Le document budgétaire ne pourra en
général utiliser les matériaux du contrôle de
gestion pour documenter la performance des programmes que moyennant une
sélection, une synthèse et des compléments
».
Le développement du contrôle de gestion dans les administrations
Dans la
préface du document relatif au «
contrôle de gestion
dans les administrations de l'Etat
», édité en juin
2002 par la Délégation interministérielle à la
réforme de l'Etat, M. Jacky Richard, délégué
interministériel à la réforme de l'Etat indique que
«
destiné tant aux managers qu'aux contrôleurs de
gestion, [ce document] est publié à un moment opportun pour deux
raisons. D'une part, les ministères viennent de rédiger leurs
« plans pluriannuels de développement du contrôle de
gestion », comme le CIRE
38(
*
)
2000 le
leur avait demandé, et il s'agit à présent de largement
diffuser la démarche. D'autre part, la loi organique relative aux lois
de finances du 1
er
août 2001, qui met en place une
budgétisation par objectifs, nécessite pour son application,
comme l'a rappelé le CIRE du 15 novembre 2001, un mode de management des
services qui s'articule sur les objectifs de performance définis au
niveau des lois de finances. C'est ce que permet précisément le
contrôle de gestion. La mise en place du contrôle de gestion pourra
ainsi intervenir, j'en forme le voeu, avec une méthodologie
adaptée au service public et partagée par les acteurs
publics
».
Dans ce même document, les liens entre le contrôle de gestion et le
réforme budgétaire sont précisés :
«
Si le développement du contrôle de gestion au
sein des administrations participe d'une démarche générale
d'amélioration de la gestion publique, la réforme
budgétaire décidée par le Parlement exploite cette
dynamique et lui donne une référence calendaire précise
(...)
.
«
La loi organique du 1
er
août 2001 traduit une
évolution majeure de la gestion publique d'une logique de moyens vers
une
logique de performance
. Défini à l'article 7 de la
LOLF, le nouveau cadre d'autorisation budgétaire substitue le vote des
crédits par programme ministériel (éventuellement
regroupés au sein de missions interministérielles) au vote par
nature de dépenses (titres et chapitres budgétaires actuels). Il
ne s'agit pas là d'un simple changement de nomenclature puisque les
programmes regrouperont désormais « les crédits
destinés à mettre en oeuvre une action ou un ensemble
cohérent d'actions relevant d'un même ministère et auxquels
sont associés des objectifs précis, définis en fonction de
finalités d'intérêt général, ainsi que des
résultats attendus et faisant l'objet d'une
évaluation ».
Le développement du contrôle de
gestion dans les administrations permettra cette nouvelle logique de
définition d'objectifs et de mesure
des
réalisations
.
«
Plusieurs autres dispositions de la LOLF impliquent un
renforcement des pratiques de contrôle de gestion. L'article 27 exige de
l'Etat la mise en oeuvre d'une « comptabilité destinée
à analyser les coûts des différentes actions
engagées dans le cadre des programmes », tandis que l'article
30 fait des principes de comptabilité générale la
règle et non plus l'exception (« les règles applicables
à la comptabilité générale de l'Etat ne se
distinguent de celles applicables aux entreprises qu'en raison des
spécificités de son action »). Enfin, ce même
article consacre l'abandon de la distinction « services
votés/mesures nouvelles » et l'obligation de justification des
crédits au premier euro.
«
L'esprit de la réforme budgétaire tout comme ses
principales dispositions sont donc autant d'incitations au développement
des pratiques de contrôle de gestion dans les administrations. (...)
«
La mise en place d'une « nouvelle discussion
budgétaire et d'un contrôle modernisé, fondé sur des
relations transparentes et confiantes avec
l'administration »
39(
*
)
, est aussi
l'un des objectifs majeurs poursuivis par les promoteurs de cette
réforme. Le débat budgétaire devrait rapidement s'enrichir
des documents indispensables à l'approfondissement de la fonction de
décision et de contrôle exercée par le Parlement.
Les «
projets annuels de performance
»
préciseront, lors de l'examen du projet de loi de finances, les
« actions, coûts associés, objectifs poursuivis,
résultats obtenus et attendus pour les années à venir au
moyen d'indicateurs précis dont le choix est justifié »
(article 51-5). Quant au suivi de l'exécution budgétaire, il sera
amélioré par la lecture des «
rapports annuels de
performance
» qui présenteront les « objectifs,
les résultats attendus et obtenus, les indicateurs et coûts
associés » des programmes
.
«
Dans ce cadre, le contrôle de gestion pourra faciliter le
débat budgétaire en fournissant des indications, aussi
précises que précieuses, sur l'activité des
administrations. La finalité première des indicateurs est certes
le pilotage par les responsables des ministères des activités de
leurs services, mais la matière ainsi fournie par le
développement du contrôle de gestion sera aussi utilement mise au
service de la transparence des relations entre l'administration et la
représentation nationale
».
Les liens entre le contrôle parlementaire et le contrôle de gestion
sont également rappelés :
«
Dans un premier temps, les documents budgétaires
rédigés à l'intention du Parlement ne pourront en
général utiliser les données fournies par le
contrôle de gestion pour renseigner sur la performance des programmes
qu'après avoir fait une synthèse et les avoir
complétées par des enquêtes, notamment des enquêtes
ad hoc portant sur les axes « qualité » et
« impact » de la performance. Il est néanmoins
souhaitable qu'à terme les systèmes d'information puissent
fournir des données exploitables par le Parlement, y compris dans le
domaine de la satisfaction des usagers et des résultats finaux de
l'action de l'Etat, sans avoir recours à des enquêtes
spécifiques ».
Enfin, la dimension culturelle du contrôle de gestion est mise en
exergue :
«
Traditionnellement, la gestion des activités de service
public a privilégié la dimension technique. Bien faire la
tâche à laquelle on est affecté, maîtriser l'aspect
technique du fonctionnement, mobiliser les moyens nécessaires, ont
constitué des préoccupations essentielles. Les
éléments de nature économique étaient souvent
négligés, même au moment de la construction
budgétaire. Les décisions au quotidien n'étaient pas
toujours reliés à des objectifs préétablis.
«
Ces attitudes sont aujourd'hui considérées comme
un frein à l'efficacité de fonctionnement des services publics et
de l'administration. Il faut envisager une autre culture, celle du pilotage par
la performance, la recherche régulière et continue des conditions
d'atteinte des objectifs fixés, conformément au nouveau cadre de
la gestion publique défini notamment par la loi organique relative aux
lois de finances.
«
Il est important de pouvoir mesurer régulièrement
les réalisations, de les analyser et d'en déduire les adaptations
éventuelles qui en découlent. Ainsi, le décideur pourra se
retrouver en situation de mieux gérer l'événementiel.
«
Cet état d'esprit est à développer, ou
à renforcer, voire à généraliser. Ce changement de
culture est fondamental pour assurer la qualité de service et
l'optimisation de l'utilisation des ressources économiques.
«
Il s'appuie également sur un comportement orienté
vers l'usager. La modernisation de la gestion publique impose de prendre en
compte les attentes des utilisateurs et de développer des offres de
services de plus en plus personnalisées.
«
Enfin, il suppose de savoir introduire des modes de travail plus
collectifs et coopératifs qui permettent également de mieux
placer une fonction, une activité à l'intérieur d'un
processus complet de production. Il s'agit d'une condition fondamentale pour
faciliter les échanges entre les acteurs, développer des liens et
des relations qui sont à la base de la performance (...)
».
Les extraits relatifs au contrôle de gestion cités plus haut
soulignent combien il est indispensable que soient définis au
préalable les périmètres de responsabilité de
chacun des acteurs. En ce sens,
le développement du contrôle de
gestion dans les administrations est inséparable des démarches de
contractualisation
(puisqu'il permet le pilotage des services par des
objectifs et la mesure de l'activité et des résultats obtenus)
et de responsabilisation des gestionnaires publics
(puisqu'il permet
d'identifier les sources d'inefficience et tend à développer la
dimension stratégique de la gestion), à l'oeuvre dans
l'administration.
Il doit pleinement s'articuler avec les autres chantiers
de la modernisation de la gestion publique et, en particulier, avec la mise en
oeuvre de la LOLF
.
2. La question du devenir du contrôle financier
Le
contrôle portant sur les finances publiques est essentiellement,
contrairement au contrôle de gestion, un contrôle externe. Il
existe un contrôle
a posteriori
(exercé par les inspections
générales et la Cour des comptes notamment) et un contrôle
a priori
(le contrôle financier), qui s'ajoutent aux
contrôles du comptable public.
La mission du contrôle financier est définie par la loi du 10
août 1922. Pour tout acte émanant d'une autorité
administrative ayant une incidence financière
40(
*
)
, le contrôleur financier doit
vérifier :
- l'imputation budgétaire ;
- la disponibilité des crédits ;
- l'exactitude de l'évaluation de la dépense ;
- le respect des dispositions législatives et réglementaires ;
- les conséquences immédiates ou à terme des mesures
proposées sur les finances publiques.
Extraits de la loi du 10 août 1922 relative au contrôle financier
Art. 3 -
La comptabilité des dépenses engagées est tenue suivant
les règles et dans la forme déterminées par un
décret portant règlement d'administration publique rendu sur la
proposition du ministre chargé des finances.
Les résultats de cette comptabilité sont fournis
trimestriellement au ministre des finances et aux ministres
intéressés, ainsi qu'aux commissions financières des deux
chambres.
Cette communication est accompagnée d'un relevé explicatif,
appuyé de tous renseignements utiles, des suppléments et des
annulations de crédits que l'état des engagements pourrait
motiver au cours de l'exercice. (...)
Art. 4 - Les contrôleurs des dépenses engagées donnent, au
point de vue financier, leur avis motivé sur les projets de lois, de
décrets, d'arrêtés, contrats, mesures ou décisions
soumis au contreseing ou à l'avis du ministre des finances, ainsi que
sur les propositions budgétaires et les demandes de crédits
additionnels de toute nature des départements ministériels
auxquels ils seront attachés. Ils reçoivent, à cet effet,
communication de tous documents ou renseignements utiles.
Ces avis sont transmis au ministre des finances en même temps que les
projets, propositions ou demandes auxquels ils se rapportent.
Art. 5 - Tous autres décrets, arrêtés, contrats, mesures ou
décisions émanant d'un ministre ou d'un fonctionnaire de
l'administration centrale et ayant pour effet d'engager une dépense sont
soumis au visa préalable du contrôleur des dépenses
engagées.
Le contrôleur les examine au point de vue de l'imputation de la
dépense, de la disponibilité des crédits, de l'exactitude
de l'évaluation, de l'application des dispositions d'ordre financier des
lois et règlements, de l'exécution du budget en conformité
du vote des chambres et des conséquences que les mesures
proposées peuvent entraîner pour les dépenses publiques. A
cet effet, il reçoit communication de toutes les pièces
justificatives des engagements de dépenses.
Si les mesures proposées lui paraissent entachées
d'irrégularité, le contrôleur refuse son visa. En cas de
désaccord persistant, il en réfère au ministre des
finances.
Il ne peut être passé outre au refus de visa du contrôleur
que sur avis conforme du ministre des finances. Les ministres et
administrateurs seront personnellement et civilement responsables des
décisions prises sciemment à l'encontre de cette disposition.
Le contrôleur est avisé sans délai de la suite
donnée par le ministre ou ses délégués aux
propositions qui lui ont été soumises.
Art. 6 - Aucune ordonnance de paiement ou de délégation ne peut
être présentée à la signature du ministre
ordonnateur qu'après avoir été soumise au visa du
contrôleur des dépenses engagées. Les ordonnances non
revêtues du visa du contrôleur sont nulles et sans valeur pour les
comptables du Trésor.
Le contrôleur s'assure notamment que les ordonnances soumises à
son visa se rapportent soit à des engagements de dépenses
déjà visés par lui, soit à des états de
prévisions de dépenses dont il a préalablement pris en
charge dans ses écritures, et se maintiennent à la fois dans la
limite de ces engagements ou états de prévisions et dans celles
des crédits. Il reçoit communication de toutes les pièces
justificatives des dépenses, ainsi que des états de liquidation
et des demandes d'ordonnancement. Si les ordonnances lui paraissent
entachées d'irrégularités, le contrôleur les vise
avec observations.
En aucun cas, il ne pourra être procédé au paiement des
ordonnances visées avec observations qu'après autorisation du
ministre des finances.
Les ministres ordonnateurs seront personnellement et civilement responsables
des décisions prises sciemment à l'encontre des prescriptions du
présent article.
Art. 7 - Chaque année, les contrôleurs des dépenses
engagées établissent un rapport d'ensemble relatif au budget du
dernier exercice écoulé, exposant les résultats de leurs
opérations et les propositions qu'ils ont à présenter. Ces
rapports sont dressés par chapitre budgétaire et par ligne de
recettes. Ils sont, ainsi que les suites données aux observations et
propositions qui y sont formulées, communiqués par les
contrôleurs des dépenses engagées au ministre des finances
et aux ministres intéressés et, par l'intermédiaire du
ministre des finances, à la Cour des comptes et aux commissions
financières des deux chambres. (...)
Le contrôle financier avait été créé
à la demande du Parlement : le caractère
a priori
et
systématique du contrôle ainsi exercé lui permettait en
effet de s'assurer du respect de son autorisation budgétaire et de la
conformité des actes avec les lois et les règlements
.
L'organisation et la nature du contrôle financier ont
évolué au cours des dernières années, afin
notamment d'accompagner le mouvement de déconcentration de
l'administration engagé au début des années 1990. Le
décret n° 96-629 du 16 juillet 1996 relatif au
contrôle financier déconcentré et l'arrêté du
29 juillet 1996 en définissant les modalités ont largement
modifié le périmètre et l'organisation de ce
contrôle. D'une part, celui-ci ne s'applique plus seulement à la
gestion des crédits, mais également à celle des emplois.
D'autre part, l'arrêté du 29 juillet 1996 dispose que des
dépenses peuvent bénéficier de modalités
allégées de contrôle, et faire l'objet d'un examen global
prenant la forme d'un visa préalable d'un engagement comptable global et
d'un examen des comptes rendus en fin d'exercice, ou encore se limiter à
l'analyse de comptes rendus de gestion.
Le contrôle financier central voit son positionnement remis en cause par
la LOLF et les évolutions, notamment informatiques, qui
l'accompagnent.
La question de son utilité dans le nouveau contexte
créé par la LOLF est même posée
, tant pour des
raisons symboliques (le contrôle financier est généralement
perçu comme un « censeur tatillon » par les
ministères) que pratiques (l'émergence de systèmes
informatiques intégrés tel ACCORD devrait rendre aisé le
contrôle de la disponibilité des crédits; par ailleurs, les
nouvelles missions confiées aux comptables par la LOLF semblent devoir
réduire le champ d'intervention des contrôleurs financiers).
Logique de responsabilité et évolution des contrôles
Le
document intitulé «
contrôle de gestion dans les
administrations de l'Etat
», édité en juin 2002 par
la Délégation interministérielle à la
réforme de l'Etat, rappelle l'articulation du contrôle de gestion
avec les autres formes de contrôle existantes, et notamment, le
contrôle financier :
«
Le système de contrôle est lié au mode de
gestion. Dans une gestion publique où les gestionnaires disposent de peu
d'autonomie, les contrôles sont principalement externes et portent
d'abord sur la régularité des procédures plutôt que
sur la mesure de la performance.
«
Chacun des grands contrôles externes poursuit des
objectifs spécifiques. Les contrôleurs financiers auprès
des ministres vérifient, a priori, que la dépense
envisagée n'excède pas l'autorisation parlementaire. Les autres
contrôles (Cour des comptes, inspections interministérielles,
inspections ministérielles) se font essentiellement a posteriori. Dans
les établissements publics et sociétés nationales, les
contrôleurs d'Etat exercent un contrôle
« concomitant », mais leur rôle principal est
d'assurer, par l'observation et le conseil, une représentation
permanente de l'Etat au sein de l'organisme.
«
Quoi qu'il en soit, la prédominance et la
multiplicité des contrôles externes ne favorisent pas la
responsabilisation du gestionnaire. Cela contribue à expliquer que le
contrôle interne soit aujourd'hui encore peu développé dans
les services de l'Etat. (...)
«
La loi organique relative aux lois de finances modifie le cadre
général de la gestion publique. Le mode de gestion évolue
d'une logique de moyens à une logique de performance et accroît
l'autonomie des gestionnaires, qui s'engagent en contrepartie sur des
objectifs. Les formes de contrôle de la gestion évoluent en
conséquence. A une typologie distinguant contrôle a priori et
contrôle a posteriori pourrait se substituer une classification qui
distingue contrôles internes et contrôles externes.
«
La responsabilisation des gestionnaires et la prise en compte de
la performance conduisent au développement des contrôles
internes : le contrôle interne stricto sensu et le contrôle de
gestion. (...)
«
Le développement des contrôles internes implique
de revoir le rôle des contrôles externes.
«
Le contrôle financier a déjà
évolué. Le décret du 16 juillet 1996 sur le contrôle
financier déconcentré introduit l'idée d'une modulation du
contrôle financier en fonction de la qualité de gestion de
l'ordonnateur. La tendance est à un examen global des dépenses,
plutôt qu'à un visa préalable individuel pour chaque acte
de dépenses. Des réflexions sont en cours sur l'évolution
du rôle du contrôle financier et son rapport au contrôle de
gestion dans le cadre de la mise en oeuvre de la loi organique relative aux
lois de finances.
« L'accroissement de l'autonomie des gestionnaires justifie
également le développement des audits externes. Organisés
régulièrement, l'objet de ces audits évoluerait d'une
vérification de l'utilisation des moyens vers un contrôle de la
qualité des contrôles internes, dont le contrôle de gestion.
Les inspections interministérielles et les inspections
générales des ministères pourraient exécuter tout
ou partie de ces contrôles
».
A minima
, une évolution de la fonction du contrôle
financier est donc nécessaire, incluant un recentrage de sa mission de
contrôle sur les principaux risques financiers et juridiques liés
à la dépense publique
. Ainsi, le contrôleur financier
se verrait confier un rôle d'alerte et de vigie davantage que celui d'un
censeur garantissant la régularité de chaque opération
ayant une incidence financière. Ce rôle d'alerte pourrait
d'ailleurs s'exercer tant à l'intention de la direction du budget,
qu'à destination de la Cour des comptes et du Parlement.
Dans un courrier en date du 30 décembre 2002 adressé aux
contrôleurs financiers près les ministres raccordés au
progiciel ACCORD et aux comptables assignataires des dépenses des
administrations centrales de ces ministères, M. Alain Lambert,
ministre délégué au budget et à la réforme
budgétaire rappelait que «
le comité
interministériel pour la réforme de l'Etat a décidé
lors de sa réunion du 15 novembre 2001 qu'il convenait, au regard
des progrès des systèmes de gestion de l'ordonnateur, d'organiser
une forte décroissance du contrôle externe a priori sur les actes
individuels au profit du développement de l'examen
global
». Le décret n° 2003-659 du
9 juillet 2003 qui modifie la loi précitée du 10 août
1922 constitue la mise en oeuvre de cette orientation.
Décret n° 2003-639 du 9 juillet 2003 relatif au contrôle financier au sein des administrations centrales
L'article 1 modifie l'article 6 de la loi du 10 août 1922. Il
prévoit que si les ordonnances de délégation continuent
à être soumises de manière systématique au visa du
contrôleur des dépenses engagées, seulement
« certaines ordonnances de paiement, définies pour chaque
ministère par un arrêté du ministre chargé du
budget, sont soumises, en raison de la nature des dépenses en cause ou
de leur montant particulièrement élevé, au visa
préalable du contrôle financier ».
L'article 2 dispose que «
nonobstant les dispositions du premier
alinéa de l'article 5 de la loi du 10 août 1922 susvisée,
certains engagements de dépense peuvent être dispensés du
visa préalable du contrôle financier lorsque leur montant s'impute
sur des crédits ayant fait l'objet de la part de l'ordonnateur d'une
réservation globale visée par le contrôle financier.
«
Nonobstant les dispositions du premier alinéa de
l'article 6 de la même loi, certaines ordonnances de
délégation de crédits peuvent être dispensées
du visa préalable du contrôle financier.
«
Les dispositions des deux alinéas qui
précèdent sont applicables jusqu'au 31 décembre 2005 en
vue de préparer la mise en oeuvre de la loi organique du 1er août
2001 susvisée.
«
Pour chaque ministère, un arrêté du ministre
chargé du budget détermine les engagements et les ordonnances de
délégation de crédits qui bénéficient des
dispenses prévues aux deux premiers alinéas en tenant compte de
la nature et du montant des dépenses ou crédits, ainsi que des
instruments de prévision budgétaire, de suivi des engagements et
de contrôle interne dont dispose l'ordonnateur.
Cet arrêté précise également les modalités de
vérification a posteriori, par le contrôle financier, de la
régularité des actes, telle que définie au deuxième
alinéa de l'article 5 de la loi du 10 août 1922 susvisée,
pour les engagements et les ordonnances dispensés de visa
préalable. Il prévoit les conditions dans lesquelles
l'ordonnateur rend compte au ministre chargé du budget des mesures
d'accompagnement, de suivi et de contrôle prises par lui
».
(...)
Si
l'allègement des modalités du contrôle des
dépenses engagées est indispensable, ne serait-ce que du fait de
son impact psychologique sur les gestionnaires des crédits, la question
même du maintien de ce contrôle est posée par la loi
organique
. Il convient tout de même de noter que l'existence d'un
contrôle des dépenses engagées conservera une
utilité, dès lors qu'elle permet d'éviter qu'un
responsable engage l'Etat au-delà du budget dont il dispose ou des
budgets prévisibles pour les années suivantes. Par ailleurs, les
dispositions de la LOLF relatives aux effectifs et aux crédits de
personnel sont particulièrement contraignantes pour les gestionnaires
des programmes, et il sera nécessaire qu'un contrôle assure le
respect de ces règles destinées à limiter la
création de charges pérennes pour l'Etat. Enfin, l'existence de
contrôleurs financiers placés auprès des ministères
permet au gouvernement de « tenir » l'exécution du
budget, en assurant la mise en oeuvre, en tant que de besoin, des mesures de
régulation.
L'articulation du contrôle des dépenses engagées avec celui
effectué par le comptable public pourrait toutefois être
problématique. Ainsi que le rappelle le numéro 2 de la
«
Lettre de la Moderfie
», paru en février
2003, «
demain, le comptable public travaillera dans le cadre
d'une comptabilité d'exercice. Il interviendra dès la
création d'une recette ou d'une dépense et constatera les droits
ou les obligations de l'Etat, avant même d'effectuer les
opérations de caisse. (...)
«
La mise en oeuvre d'une comptabilité d'exercice
alignée sur celle des entreprises et les nouveaux dispositifs de
contrôle envisagés militent en faveur du rapprochement
géographique des comptables avec les gestionnaires. D'où le
projet de créer dans les ministères un
« département comptable ministériel »
à l'image de l'expérimentation en cours au ministère de
l'intérieur. Toutes les missions dévolues à un comptable
public y seraient exercées : tenue des comptes, paiement de la
dépense et recouvrement de la recette. (...)
«
Une partie des contrôles encore effectuée
aujourd'hui par le comptable n'aura plus lieu d'être. Grâce
à ACCORD, de nombreuses données auront déjà
été entrées dans le système d'information par le
comptable et le gestionnaire. Ce sera le cas, notamment, de l'habilitation des
ordonnateurs ou de la disponibilité des crédits. Avec la
responsabilisation des gestionnaires, de nouvelles modalités d'exercice
des contrôlent interviennent. Les contrôles
hiérarchisés et partenariaux, actuellement en cours
d'expérimentation, préfigurent le nouveau dispositif. Les
contrôles hiérarchisés seront effectués en fonction
des risques liés à la nature de la dépense et des
pratiques des ordonnateurs. Le comptable pourra décider, par exemple, de
ne plus contrôler des dépenses de faibles montants. Les
contrôles partenariaux reposent sur une démarche d'audit
menée conjointement par l'ordonnateur et le comptable. Si la
qualité des procédures se révèle fiable, les
contrôles ne seront plus effectués qu'a posteriori
».
Compte tenu du rapprochement de la fonction comptable du gestionnaire et de
l'orientation générale vers un allégement des
contrôles
a priori
,
il paraît indispensable d'identifier
les contrôles inutiles et répétitifs, préalable
nécessaire pour mieux articuler les contrôles exercés par
les contrôleurs financiers et les comptables publics
. La question du
maintien de deux fonctions de contrôle au sein d'un même
ministère pourra alors être clairement posée.
B. VERS LA CULTURE DE RESPONSABILITÉ ET LA RÉFORME DE L'ETAT
1. Les conditions du développement d'une culture de responsabilité au sein de l'Etat
a) Une responsabilité administrative rehaussée
La LOLF
vise à améliorer la gestion publique en accordant une large
autonomie aux gestionnaires en contrepartie d'une transparence sur les
objectifs, la performance et les moyens consommés.
Le pari du législateur organique est que le desserrement des contraintes
formelles pesant sur les gestionnaires et la
« défragmentation » du budget de l'Etat permettra de
réaliser des économies substantielles, en modernisant les modes
de gestion, en améliorant leur souplesse et donc, leur adaptation aux
circonstances mouvantes de l'action publique. Un tel pari repose sur la
capacité des différents acteurs de la dépense publique
à assumer des responsabilités nouvelles.
L'appropriation d'une
culture de gestion à tous les niveaux de l'administration constitue un
véritable défi pour la réussite de la réforme.
D'importants programmes de formation doivent permettre une sensibilisation des
fonctionnaires à ce nouveau contexte.
La recherche de la performance suppose un « pilotage fin »
de la gestion publique, et donc, une relative professionnalisation des
fonctions financières au sein de l'administration, s'agissant par
exemple du développement et de la définition des systèmes
d'information financière ou du contrôle de gestion. Ces
compétences nouvelles supposeront la reconversion de certains personnels
et le recrutement de spécialistes issus du secteur privé. Par
ailleurs, de nombreuses questions restent posées s'agissant de la
gestion des ressources humaines au sein de l'administration, chantier dont le
pilotage relève pour l'essentiel du ministère de la fonction
publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du
territoire. Les dispositions de la LOLF favorisent en effet la
responsabilisation et l'autonomie des gestionnaires, ce qui n'est pas
nécessairement compatible avec l'organisation actuelle de la fonction
publique, marquée par l'importance des corps et une négociation
globale sur l'évolution des rémunérations.
La recherche de la performance constitue un changement culturel pour le
monde politique comme pour l'administration
. Elle s'accompagnera d'un
changement structurel, s'agissant des relations entre les ministres, mais
également entre les ministres et les administrations dont ils ont la
charge. La loi organique offrira aux gestionnaires plus de liberté
contre plus de responsabilité. Il faudra redéfinir le champ de
cette liberté et de cette responsabilité, puisque l'on passera
d'une responsabilité de conformité - qui consiste à
respecter les règles de droit - à une responsabilité de
performance.
Aujourd'hui, responsabilité politique et responsabilité de
gestion ne sont pas clairement séparées, compte tenu notamment de
l'importance des effectifs des cabinets ministériels, qui sont souvent
composés de hauts fonctionnaires issus de l'administration dont ils sont
chargés d'assurer le pilotage.
Parmi les pays qui ont engagé des réformes de leur gestion
publique au cours des dernières années, certains ont choisi de
créer des agences indépendantes, dirigées par des
personnes disposant d'un mandat précis et limité dans le temps,
favorisant la distinction entre la conception d'une politique, qui revient au
ministre, et sa mise en oeuvre, qui incombe au responsable de l'agence. Ce
dernier est jugé sur la qualité de sa gestion et la
réalisation des objectifs qui lui ont été fixés par
le ministre.
A cet égard, l'exemple de la Nouvelle-Zélande
constitue un cas extrême
puisque le ministre
« achète » en quelque sorte une prestation à
une agence dont il a la tutelle, et dont le gestionnaire est ensuite
responsable du respect du cahier des charges et de l'efficience dont il fera
preuve dans la production de cette prestation.
L'exemple de la gestion des ressources humaines dans la fonction publique néo-zélandaise
-
• La responsabilité contre la flexibilité
L'introduction d'une relation fournisseur/acheteur permet de focaliser l'analyse sur les 4 critères-clefs du contrat : la qualité, la quantité, les délais et le prix des biens et services rendus. Cette démarche renforce le degré d'exigence dans les relations quotidiennes des administrations entre elles et donne un contenu plus large et plus précis à la simple notion de service fait. Ces critères doivent permettre à terme de comparer la prestation publique avec une prestation du secteur privé.
Après la mise en concurrence des services, la Nouvelle-Zélande a introduit une mise en concurrence sur les emplois.
Les emplois supérieurs du secteur public ( Chief Executives ) ont été ouverts à la concurrence du secteur privé. Chaque poste de direction vacant fait l'objet d'un appel à candidature qui examine tous les candidats quelle que soit leur origine, publique ou privée.
Chaque nouveau Chief Executive , quelle que soit son origine, se voit proposé un contrat selon les termes suivants : il a la liberté totale de gestion de son service selon les règles énoncées ci-dessus, et, en contrepartie, il est jugé sur les objectifs fixés par son contrat et notamment le respect des contrats de fourniture de biens et services déjà cités.
Ainsi, le système se boucle et est équilibré : liberté accrue de gestion et de management contre responsabilité personnelle sur des objectifs, et un rendu de compte négocié et librement accepté.
L'intitulé du contrat passé entre le ministre et chacun de ses Chief Executives - Performance Agreement , accord de performance - est révélateur.
Cette relation bilatérale est encadrée par la State Commission , service qui donne son avis sur chaque contrat dont elle reçoit copie, et dont elle discute avec le ministre concerné. La commission établit un contrat cadre type et veille au maintien d'une cohérence globale des dispositifs.
- • Un cadrage global des relations contractuelles
Ainsi, une charte de l'employeur public a été édictée par la State Commission afin de garantir le respect de nombreux objectifs comme la sécurité des conditions de travail, la promotion, l'impartialité dans le recrutement et les rémunérations, la reconnaissance de la minorité Maori, la parité hommes/femmes, l'emploi des personnes handicapées, etc.
La rémunération et la carrière des Chief Executives , qui sont environ 50, restent sous l'autorité de la commission qui a vocation à leur procurer de nouvelles opportunités afin qu'ils puissent poursuivre leur carrière au sein de l'administration en fonction des résultats obtenus. Le ministre peut décider de rétribuer ses collaborateurs au-delà de la proposition de la commission, par un Political Appointment qui doit simplement être notifié à la commission.
La durée des contrats est de cinq années. Ils sont renouvelables une fois pour trois années supplémentaires. Les premiers contrats ayant été signés en 1993, 15 Chief Executives ont achevé leur premier contrat et l'ont prolongé de trois années, 9 ont changé de direction au bout de cinq années, 8 sont partis à la retraite ou ont démissionné, 8 ont quitté le secteur public.
La réforme du management a été complétée en 1991 par l' Employment Contracts Act . Cette loi n'abolit pas le statut de la fonction publique, mais permet individuellement à chaque fonctionnaire de renoncer à son statut pour choisir une contractualisation de type droit privé avec un contrat basé sur des objectifs et une évaluation de sa performance.
Ce contrat permet une rémunération en fonction des performances. Il se traduit par une majoration salariale pour l'agent qui renonce en contrepartie à la garantie de l'emploi et accepte de relever des prud'hommes pour d'éventuels litiges liés à l'exécution de son contrat de travail.
La neutralité budgétaire de cette mesure est assurée par la globalisation des crédits de personnel et de fonctionnement. La liberté de recrutement est laissée à la seule discrétion du responsable du service. En contrepartie, la mise sous enveloppe globale et contrainte de ses moyens le conduit à rechercher l'optimisation de ses moyens de production en fonction de ses objectifs contractuels.
Le taux de contractualisation varie fortement selon les services. Il est de l'ordre de 80 % à la State Services Commission , de 90 % à la direction du budget, mais tombe à 40 % pour la sécurité sociale où les syndicats sont encore très puissants et structurés, et le personnel moins qualifié en moyenne. Le contrat individuel emporte moins de succès chez les agents d'exécution, alors que la direction du budget et la commission sont majoritairement composés de cadres.
Source : rapport « Mission comptabilité patrimoniale » de M. Jean-Jacques François, cité par notre collègue Gérard Braun dans son rapport d'information : « La réforme de l'Etat à l'étranger », n° 348, 2000-2001, page 60-61
En France, la loi organique relative aux lois de finances n'est pas allée « aussi loin » que d'autres pays en matière de liberté de gestion. Ainsi, les possibilités de report de crédits restent-elles par exemple assez fortement encadrées, alors que tel n'est pas le cas dans d'autres pays de l'OCDE, qui permettent le report automatique des crédits, mais aussi, quoique plus rarement, la possibilité d'emprunter - dans une certaine mesure - sur des crédits à venir.
La nouvelle procédure budgétaire devrait toutefois produire des rapports plus contractuels entre les ministres et les directeurs d'administration . Ces derniers seront soumis à une réglementation allégée, à laquelle se substitueront des outils de pilotage et de gestion aisément partagés entre les différents acteurs grâce aux systèmes comptables qui permettront des restitutions d'informations beaucoup plus fines et régulières qu'à l'heure actuelle. La mise en oeuvre d'un contrôle de gestion ainsi que la définition d'objectifs et d'indicateurs permettront aux ministres de déléguer plus largement leurs responsabilités aux directeurs d'administration, ce que ne permet pas le système actuel, fondé sur une gestion très réglementée et fragmentée de l'emploi des deniers publics.
On peut voir ainsi se dessiner deux niveaux majeurs de responsabilité : une responsabilité politique, incarnée par le ministre vis-à-vis du Parlement, et une responsabilité de gestion incarnée par le directeur d'administration vis-à-vis de son ministre, ce dernier étant en charge de la définition des orientations stratégiques, tandis que ses directeurs disposeront des moyens pour être de véritables patrons de leur administration.
Dans cette nouvelle organisation des rapports hiérarchiques, on est en droit de s'interroger sur le rôle futur des cabinets ministériels. Il est vraisemblable que le nouveau système de gestion rendra moins nécessaire une telle structure, dès lors que les directeurs seront jugés sur leurs performances globales a posteriori davantage que sur leurs actes administratifs quotidiens. Le maintien des cabinets dans leur forme actuelle, dont le rôle dépasse largement la simple conception des politiques, serait sans doute un mauvais présage pour la réussite de la réforme, puisqu'elle rendrait moins net le partage des responsabilités entre la sphère politique et la sphère administrative. La réforme devrait en effet entraîner une revalorisation des missions des hauts fonctionnaires, les ministres étant entourés, si la réforme porte pleinement ses fruits, de cabinets plus restreints et « politiques ».
b) Une responsabilité politique plus lisible
La loi
organique relative aux lois de finances est marquée par une
volonté de rendre lisible et de fonder sur des critères objectifs
et mesurables le jugement porté par le Parlement sur l'action
gouvernementale. Or, en France, la culture politique est
imprégnée par la fiction d'une responsabilité qui ne
serait pas partagée entre plusieurs niveaux de compétence mais
incarnée par le seul politique.
La reconnaissance d'une responsabilité de gestion incarnée par
le seul politique rend, dans la pratique, inopérante la sanction de la
responsabilité, et par là, son dévoiement
. Au sens de
la loi organique relative aux lois de finances, le gestionnaire des
crédits est le ministre, rendant compte de ses résultats devant
le Parlement, qui autorise ses dépenses et contrôle l'utilisation
de ses crédits. Toutefois, le ministre ne peut être tenu pour le
gestionnaire réel, au sens de celui qui accomplit des actes de gestion
quotidiens.
Aucun ministre n'a été contraint à la démission
à cause d'une mauvaise gestion de son administration au cours de la
période récente. Dans le cadre posé par la loi organique
du 1
er
août 2001 relative aux lois de finances, les ministres
et les gestionnaires des programmes (appelés aussi
« gouverneurs de crédits ») disposeront d'une
liberté importante en matière d'emploi de leurs crédits.
Peuvent-ils continuer à disposer du même régime
d'immunité au regard de leurs performances de gestionnaire ?
En somme, peut-on concevoir que la liberté de gestion ne s'appuie pas
sur une responsabilité de gestion ? Cela ne reviendrait-il pas
à diluer l'intensité de la responsabilité portée
par le fonctionnaire ou par le ministre en charge de la gestion d'une politique
publique. Dans la plupart des cas, la responsabilité est diluée
à tel point qu'elle est « absorbée » en
quelque sorte par le système institutionnel et contribue au
développement de réactions de rejet de la part des citoyens,
portant indifféremment sur les administrations et les politiques. Une
responsabilité des fonctionnaires incarnée à tous les
niveaux est peu souhaitable, peu efficace, et sans aucun doute, impraticable.
Une responsabilité incarnée au seul sommet de l'organisation
revient en revanche à fonder cette organisation sur une
légitimité unique. La solution réside probablement dans un
compromis entre la responsabilité et la stabilité indispensable
au bon fonctionnement de l'Etat.
Il est concevable d'imaginer que les hauts fonctionnaires en charge des
programmes soient nommés pour une durée déterminée,
impliquant le cas échéant le visa de plusieurs autorités.
Le changement de titulaire des postes ne pourrait être effectué
que selon certaines règles et leur statut devrait leur permettre
d'accomplir une carrière.
Une telle conception est en germe dans la loi organique du
1
er
août 2001 relative aux lois de finances :
une responsabilité exclusivement politique conduirait dans la pratique
à rendre celle-ci soit excessive, soit inexistante. La question porte
sur
la possibilité d'appliquer une sanction à un programme mal
géré, c'est-à-dire dont les objectifs ne seraient pas
accomplis et dont la gestion serait inefficiente ?
Elle reste
posée pour l'avenir.
2. La réforme de l'Etat : un chantier complexe porté notamment par la LOLF
La réforme de l'Etat est un impératif : la dégradation des finances publiques, s'agissant aussi bien du budget de l'Etat que du financement des organismes de sécurité sociale, rend nécessaire la réalisation d'économies structurelles. Plusieurs chantiers y contribuent, ainsi que l'a rappelé récemment le Premier ministre, M. Jean-Pierre Raffarin, dans une circulaire adressé à tous les ministres et secrétaires d'Etat.
Extraits de la circulaire du 25 juin 2003 relative aux stratégies ministérielles de réforme 41( * )
«
La réforme de l'Etat, au niveau
interministériel, repose sur quatre chantiers : la
décentralisation, la réforme budgétaire, la simplification
des procédures administratives et la rénovation de la
prospective. Ces travaux sont engagés. Mais, au-delà de ces
chantiers interministériels, c'est à chacun d'entre vous
qu'il revient de piloter la réforme de son administration.
«
Par lettre du 2 décembre et lors de nos réunions
récentes, je vous ai indiqué que vous présenteriez devant
le Parlement, dès l'automne, les réformes nécessaires de
votre département ministériel. Recentré sur le coeur de
ses missions et s'appuyant sur des structures, une organisation et des
méthodes rénovées, l'Etat doit, au meilleur coût
pour la collectivité, apporter un meilleur service aux Français
et une plus grande satisfaction à ses agents.
«
Les stratégies ministérielles de réforme
que je vous demande de préparer doivent nous permettre d'atteindre ces
objectifs.
« 1. Je vous demande, en premier lieu, de procéder à un
réexamen systématique de vos missions et des structures qui les
servent. Certaines de ces missions peuvent être
déléguées ou abandonnées.
«
D'autres, au contraire, doivent être renforcées ou
exercées différemment. (...)
«
J'insiste tout particulièrement pour que vous vous
attachiez à tirer toutes les conséquences pour votre
administration de la décentralisation et de la mise en oeuvre de la loi
organique relative aux lois de finances.
«
2. Vous vous attacherez, en deuxième lieu, à
développer les démarches qualité. La réforme
renforce la légitimité de l'Etat et la qualité des
services qu'il rend au quotidien aux Français. Nos administrations
doivent aussi redevenir exemplaires en matière de qualité de
service. (...)
«
3. En troisième lieu, il est impératif que l'Etat
renouvelle le pacte qui le lie à ses agents, pour mieux
récompenser leurs efforts, pour simplifier et améliorer le cadre
de leur action et pour mieux mobiliser leur énergie et leurs
compétences.
«
Vos modes de gestion des ressources humaines devront ainsi
évoluer selon les quatre axes suivants :
- la déconcentration : il s'agit de responsabiliser vos cadres,
à qui vous devez assigner des objectifs précis, et de
gérer les hommes et les femmes qui servent l'Etat dans des structures
à taille humaine ;
- la réduction du nombre de corps : il s'agit de sortir d'une
gestion formelle des ressources humaines, pour développer une gestion
plus qualitative et faciliter la mobilité ;
- la reconnaissance du mérite : il s'agit de mieux prendre en
compte l'implication des agents et leurs contributions aux progrès de
leurs services ;
- la gestion prévisionnelle des postes, des emplois et des
carrières : il s'agit d'adapter les emplois, les qualifications et
les recrutements en fonction des besoins de demain.
«
Votre implication personnelle dans l'élaboration de ces
stratégies est nécessaire. Il vous appartient de conduire le
dialogue avec vos agents, puis de présenter au Parlement votre
stratégie de réforme. Elle fera l'objet d'un suivi et d'une
actualisation annuels.
«
En ce qui concerne l'année en cours, vous vous attacherez
d'abord à définir l'évolution de vos missions, car c'est
la clef de voûte de notre démarche. Vous me transmettrez donc pour
le 1
er
octobre 2003 une présentation de l'ensemble de vos
missions et des structures qui les servent, avec vos propositions
d'évolution. (...)
«
J'ai demandé au ministre chargé de la
réforme de l'Etat et au ministre du budget de mener les consultations
avec le Parlement pour préciser le format des documents que vous devrez
remettre.
«
Le mandat donné par nos concitoyens est clair :
mener avec pragmatisme et ténacité les réformes
structurelles qui apporteront à notre pays une croissance durable. Pour
renforcer l'Etat, nous devons conduire avec détermination les
réformes indispensables de vos ministères
».
La réforme de l'Etat comprend plusieurs chantiers, mais la LOLF est
destinée à en constituer l'un des outils les plus pérenne
et puissant, si le Parlement joue son rôle d'aiguillon
en demandant
aux ministres, autant de fois qu'il sera nécessaire, de justifier le
maintien de telle structure ou de telle action dans le périmètre
de l'Etat. Le fait de conduire plusieurs chantiers de front constitue une
tâche difficile pour les administrations, occupées par la gestion
quotidienne de l'action publique. C'est la raison pour laquelle, comme le
rappelle le Premier ministre dans la circulaire précitée,
l'implication
personnelle des ministres dans l'élaboration des
stratégies est nécessaire
, et qu'il revient à chacun
d'entre eux de piloter la réforme de leur administration.
Le vote de la LOLF constitue un événement fondateur pour la
réforme de l'Etat
. On le constate aujourd'hui : de nombreuses
thématiques, autrefois taboues, ont désormais leur place sur la
scène politique et dans le dialogue avec les fonctionnaires :
réduction des effectifs de la fonction publique,
rémunération au mérite, fusion des corps, externalisation
de services... La loi organique peut, compte tenu de la révolution
culturelle qu'elle vise à mettre en oeuvre et des nouveaux outils
d'analyse qu'elle contribue à mettre à la disposition des
différents acteurs, être véritablement
un
« catalyseur » de la réforme de l'Etat
. Ainsi
que l'indiquait M. Alain Lambert, ministre
délégué au budget et à la réforme
budgétaire, à l'occasion de l'installation du comité
interministériel d'audit des programmes, «
ce changement de
modèle de budget fait apparaître la nécessité d'une
réforme du cadre de la gestion publique et plus largement, d'une
réforme de l'Etat. Il ne présuppose pas la réforme de
l'Etat mais l'induit.
«
Si elle ne lance pas le mouvement de réforme de l'Etat
engagé ici ou là dans les services, la réforme
budgétaire lui apporte un cadre
».
Le vote de la LOLF a été marqué par une
quasi-unanimité, et sa mise en oeuvre témoigne de la
continuité de la volonté de réforme après un
changement de majorité. Le thème de la réforme de l'Etat,
sinon dans ses modalités pratiques, du moins dans ses principes, semble
désormais faire l'objet d'un quasi-consensus au sein des principaux
partis politiques. Il convient, dans un tel contexte, pour les hommes
politiques, de faire preuve d'une implication réelle et d'une
volonté sans faille pour faire avancer les chantiers
évoqués plus haut. L'Etat ne se réformera pas de
lui-même sans une véritable mobilisation politique.
La situation des finances publiques rend plus que jamais nécessaire
l'engagement de réformes structurelles, et est de nature à
consolider le consensus que la loi organique du 1
er
août 2001
relative aux lois de finances avait réussi à dégager.
Paradoxalement, cette situation favorise la réforme. Notre
collègue Gérard Braun, rapporteur spécial des
crédits de la fonction publique et de la réforme de l'Etat,
rappelait ainsi dans un rapport d'information consacré à la
réforme de l'Etat à l'étranger
42(
*
)
, «
en réalité, la
réforme de l'Etat ne doit pas être un thème porteur
limité à un affichage politique : elle a souvent
été appliquée de façon pragmatique par des
gouvernements confrontés à une situation critique de laquelle ils
étaient bien décidés à sortir.
«
Il convient en effet de constater que la plupart des pays
industrialisés a mis en oeuvre des réformes touchant à
l'organisation de leur administration ou de leur fonction publique, suite
à une crise économique ayant entraîné une forte
augmentation du chômage et un net déséquilibre de leurs
finances publiques. Plus rarement, la réforme de l'Etat faisait partie
en tant que telle du programme électoral d'une formation politique
accédant au pouvoir.
En fait, elle s'est souvent imposée comme
une solution rendue nécessaire par de graves difficultés
économiques et sociales, plus qu'elle ne résulte d'un choix
politique délibéré
».
EXAMEN EN COMMISSION
Mercredi 9 juillet
2003
-
Présidence de
M. Jean Arthuis, président
.
La commission a entendu une
communication
de
M. Jean Arthuis
,
président,
sur
l'état d'avancement de la mise en oeuvre
de la loi organique du 1
er
août 2001 relative aux
lois de finances (LOLF).
M. Jean Arthuis, président
, a rappelé qu'il y a deux ans,
à quelques jours près, le Sénat avait approuvé, en
seconde lecture, la loi organique relative aux lois de finances qui devait
être promulguée, quelques semaines plus tard, le 1
er
août 2001.
Il a souligné que la réforme était à mi-chemin,
à deux ans de la préparation du projet de loi de finances pour
2006, qui sera le premier budget à intégrer l'ensemble des
dispositions de la loi organique. Il lui a semblé important que la
commission puisse se prononcer sur la manière dont est conduite la mise
en oeuvre de la loi organique, et publier un rapport d'étape, en
utilisant notamment les travaux conduits par le groupe de travail sur sa mise
en oeuvre, composé des membres du bureau, et auxquels avaient
été associés, pour les auditions, les rapporteurs
spéciaux sectoriellement compétents.
M. Jean Arthuis, président,
a indiqué que le premier
constat qui pouvait être fait, était celui de
l'intérêt porté à la loi organique par l'ensemble
des acteurs publics : Parlement, Cour des comptes, ministères,
établissements publics, syndicats de la fonction publique... Chacun
avait désormais conscience des enjeux de la loi organique et des
changements considérables qu'elle pouvait apporter dans la vie
administrative française. La preuve en était que des
thèmes, souvent tabous jusqu'il y a peu, commençaient à
être abordés avec davantage de
sérénité : la réduction du nombre de
fonctionnaires, la clarification du mode de financement des pensions,
l'introduction d'une rémunération au mérite dans la
fonction publique ou la responsabilisation des gestionnaires étaient
autant de questions que la loi organique avait contribué à
installer durablement sur la scène politique. Il a
considéré que c'était le premier mérite de la LOLF
- et non le moindre - que de « forcer » l'administration
à se pencher sur ses objectifs, ses modalités de fonctionnement
et son organisation. Il a rappelé que la plupart des pays
développés avaient accompagné la réforme de leurs
finances publiques d'une réforme de l'organisation de l'administration
d'Etat, visant à mieux caractériser la responsabilité de
gestion des hauts fonctionnaires en charge des programmes. Si la loi organique
n'abordait pas ce type de questions, il a estimé qu'elle les posait
inévitablement pour l'avenir. En ce sens, il a affirmé qu'elle
était, et devait continuer à être, un levier essentiel de
la réforme de l'Etat, considérant qu'il s'agissait de
« mettre de la lumière dans toutes les pièces ».
S'agissant du Parlement et, en particulier, de la commission des finances du
Sénat,
M. Jean Arthuis, président,
a
indiqué
que la loi organique avait, d'ores et déjà, porté ses
premiers fruits. Il a souligné que chacun avait pu constater, au cours
des deux dernières années, les progrès accomplis en
matière d'information et de contrôle, le gouvernement devant
désormais fournir des informations plus denses et synthétiques au
Parlement, qui étaient utilisées « en temps
réel » pour auditionner les ministres dépensiers. Il a
rappelé qu'entre le 28 mai et le 10 juillet 2003, comme prévu,
six ministres avaient été entendus par la commission, en
présence des rapporteurs pour avis des commissions concernées,
sur l'exécution en 2003 de leur budget.
De même, il a indiqué que les commissions des finances
étaient davantage associées à certaines décisions
de gestion ; elles disposaient d'un droit d'accès renforcé
aux documents administratifs, y compris aux rapports des corps de
contrôle, que ce soit l'IGF, l'IGA ou l'IGAS notamment. Il s'est tout
particulièrement félicité de la qualité des
relations avec la Cour des comptes qui s'étaient enrichies, grâce
notamment aux communications que la commission lui demandait. Il a
estimé que les réunions auxquelles avaient participé les
responsables des organismes contrôlés et les magistrats de la Cour
des comptes en charge du contrôle avaient montré que cette formule
permettait de dynamiser les travaux en commission et s'est réjoui de
« l'interactivité » qui s'y était
instaurée.
Sur la mise en oeuvre de la réforme proprement dite, il a rappelé
qu'elle était organisée, au plan administratif, autour de
plusieurs institutions spécifiques, dont la direction de la
réforme budgétaire, formée de fonctionnaires de la
direction du budget pour l'essentiel, assurait le pilotage. Elle coordonnait
les nombreux travaux visant à expliciter les concepts et les
dispositions de la loi organique afin d'harmoniser sa mise en oeuvre par les
ministères. Il a indiqué qu'un comité
interministériel d'audit des programmes (CIAP) était
chargé d'évaluer les programmes des ministères, afin de
s'assurer de leur cohérence et du respect des conditions fixées
par la LOLF. Ce comité, composé de membres des corps
d'inspection, ce qui était de nature à garantir son
impartialité, avait publié, d'ores et déjà, un
utile guide initial d'audit des programmes qui recensait les principales
étapes et conditions de la construction d'un programme. Il aurait un
rôle déterminant pour assurer la qualité des programmes
présentés au Parlement.
M. Jean Arthuis,
président,
s'est interrogé toutefois quant à sa
capacité à remplir correctement cette mission essentielle,
dès lors que la plupart des programmes lui seront soumis pour audit au
cours de la même période, alors que son président
n'était en mesure d'y consacrer qu'une petite partie de son temps. Il a
indiqué qu'il avait d'ailleurs saisi le ministre
délégué au budget et à la réforme
budgétaire de cette question.
M. Jean Arthuis, président
, a rappelé que le Canada avait
engagé une ambitieuse réforme des finances publiques en 1994,
conduisant à évaluer l'ensemble des programmes du gouvernement,
à partir des six critères de base suivants : le programme
étudié servait-il encore l'intérêt
public ? Etait-il légitime et indispensable que ce soit le
gouvernement qui l'exécute ? Le rôle du gouvernement central
était-il justifié ou le programme devait-il être
repensé en fonction des provinces ? Le gouvernement devrait-il
remplir son rôle de concert avec le secteur privé ou le secteur
bénévole ? Comment pourrait-on restructurer le programme en
question pour le rendre plus efficace ? Etait-il abordable au regard de la
capacité financière du gouvernement ?
M. Jean Arthuis, président
, a rappelé que, dans les
ministères, la mise en oeuvre de la LOLF était prise en charge,
pour l'essentiel, par les directions financières. Dans son rapport sur
l'exécution des lois de finances pour l'année 2002, la Cour des
comptes avait souligné, d'ailleurs, la faible implication des directions
opérationnelles dans ce processus.
Au total, il a considéré qu'il convenait de prendre acte de la
mise en place, par l'Etat, des structures administratives visant à la
mise en oeuvre de la loi organique, et des efforts fournis par les
fonctionnaires y travaillant, car leur tâche était à la
fois complexe et urgente. Il a, à nouveau, souligné la
qualité des travaux de la Cour des comptes, tant pour répondre
aux demandes d'assistance de la commission que pour suivre la mise en oeuvre de
la LOLF dans les ministères, la partie qui y était
consacrée dans son rapport sur l'exécution des lois de finances
pour 2002 en témoignant.
M. Jean Arthuis, président
, a considéré qu'il
n'était pas certain que le choix de confier la mise en oeuvre de la
réforme aux seuls « budgétaires » soit le
meilleur gage de réussite et d'implication de tous les acteurs dans ce
projet.
En premier lieu, il a rappelé que la direction du budget, largement
impliquée dans la mise en oeuvre de la LOLF, perdrait du pouvoir avec la
réforme ; par ailleurs, la loi organique concernait avant tout les
gestionnaires des crédits, et il était donc essentiel qu'ils
soient impliqués dès l'origine dans l'élaboration des
concepts qui présideront à la nouvelle budgétisation des
dépenses ; enfin, le dispositif mis en oeuvre souffrait d'une carence
importante : l'absence de structure interministérielle
chargée d'opérer certains arbitrages. Il a indiqué qu'une
telle structure existait - même si son rôle était avant tout
technique - pour les programmes, avec le CIAP, mais qu'elle n'existait pas,
s'agissant des missions.
Il a précisé que la direction de la réforme
budgétaire considérait, à l'origine, que le choix des
missions devait intervenir à l'issue de la réflexion sur les
programmes, dès lors que la mission n'avait pas de réalité
en gestion. Il a estimé qu'une telle approche avait plusieurs
inconvénients : elle obligeait les ministères à
adopter une approche « bottom up » (par le bas), et
à concevoir les missions comme résultant de l'agrégation
de programmes ministériels. Il a indiqué qu'il avait
été décidé, suite notamment aux observations des
parlementaires, de mener de front la réflexion sur les programmes et sur
les missions, mais que l'absence de concertation entre les ministères
rendait ce travail sur les missions un peu confus lorsqu'il s'agissait
d'étudier l'opportunité de proposer des missions
interministérielles. Plusieurs ministères défendaient ou
envisageaient de telles missions parmi lesquelles la recherche, les
affaires étrangères pour l'aide publique au développement,
le ministère de l'intérieur pour la sécurité
intérieure, ou encore la ville, qui proposait, dans le projet de loi
d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine
qui sera soumis prochainement pour avis à la commission, un dispositif
semblant préfigurer une mission interministérielle, mais qui n'en
aurait sans doute pas le statut.
Il a rappelé deux éléments importants à ses yeux.
D'une part, il faudrait, de toute évidence, limiter le nombre de
missions interministérielles, afin d'éviter une fragmentation
excessive des programmes. Toutefois, il a considéré que certaines
missions interministérielles méritaient un examen approfondi.
C'était le cas, en premier lieu, de la sécurité
intérieure, mais aussi de la recherche et de l'aide publique au
développement. Or, en l'absence d'arbitrage suffisamment en amont du
processus, il a estimé qu'il serait impossible de fabriquer de telles
missions à partir de programmes qui n'auraient pas été
élaborés à cette fin. Il a donc craint que le processus en
cours n'empêche, pratiquement, la constitution de missions
interministérielles et n'entretienne une confusion certaine dans les
ministères qui défendaient une telle idée. Il a
estimé que des arbitrages interministériels s'imposaient donc
rapidement sur ce point.
D'autre part, certains ministères avaient, au contraire, la tentation de
proposer la constitution, pour leur budget, d'une mission unique comportant un
programme unique, de manière à « profiter au
maximum » de la fongibilité des crédits. Il a
considéré que sur ce point, il faudrait être ferme pour
imposer un compromis entre l'information du Parlement et le respect de son
autorisation, d'une part, et la volonté d'assouplir au maximum la
gestion des crédits, d'autre part. Il a rappelé que le Parlement
disposerait, en tout état de cause, de la possibilité de scinder
un programme s'il lui semblait qu'il s'agissait, pour un ministère, de
profiter de la fongibilité des crédits au détriment de la
cohérence d'un programme et de la lisibilité de son action.
Sur les programmes, il a indiqué que le Parlement commençait
à avoir une idée des intentions des ministères, qui
devaient « rendre leur copie » au ministère
délégué au budget et à la réforme
budgétaire à l'automne 2003. La loi de finances pour 2004 serait
donc une occasion privilégiée pour interroger les ministres, et
il a invité ses collègues à se pencher sur ce sujet, afin
que le Parlement prenne pleinement sa part dans l'élaboration de la
future nomenclature budgétaire. Il a insisté sur le fait que la
réforme, sous des apparences parfois techniques, était avant tout
politique.
Or, il a indiqué avoir constaté, pour certains ministères,
une faible implication des ministres et de leurs cabinets dans la mise en
oeuvre de la LOLF. Il a donc estimé qu'il était essentiel que le
Parlement insiste sur la nécessité pour les ministres de
s'intéresser à ce processus, et de s'impliquer davantage dans la
gestion de leur administration. Ils devaient saisir cette occasion pour mieux
connaître leurs effectifs, les priorités de leur action, et
engager les réformes structurelles qui s'imposaient. Il a
considéré que si les ministres ne s'impliquaient pas, la
réforme ne serait qu'un texte technique et « perdrait le
souffle » que le Parlement avait voulu lui donner.
Il a ajouté que la loi organique devait permettre
« d'éclairer chaque pièce de la maison des finances
publiques ». En cela, il a considéré qu'elle
était une chance pour la réforme de l'Etat et aussi un
accélérateur. Il a estimé que le Sénat, à
l'occasion de la loi de finances pour 2004, devrait mesurer cette
volonté de réforme qui devait animer l'ensemble du gouvernement
et inviter les ministères, et par roulement les structures techniques,
à présenter des projets précis préfigurant la mise
en oeuvre de la LOLF.
Il a affirmé que la loi organique devait permettre d'identifier les
coûts des politiques, et faire apparaître les inefficiences et les
services inutiles au sein des administrations. L'exercice d'élaboration
des programmes ne devait donc pas s'effectuer nécessairement à
périmètre constant, mais devait conduire les ministres à
identifier les économies potentielles et les organisations
inadaptées, afin de contribuer à la réforme de l'Etat et
à l'assainissement des finances publiques. En un mot, il devait
constituer un salutaire exercice « d'introspection » :
à quoi servent les structures existantes, quelle est leur
utilité, quel est leur coût... Il a considéré qu'il
était nécessaire, pour cela, que l'appareil administratif
« soit mis sous tension », ce que seul le politique
était en mesure de faire.
S'agissant de la mesure de la performance,
M. Jean Arthuis,
président
, a considéré qu'il était essentiel de
s'assurer de la cohérence des objectifs et des indicateurs avec les
programmes. Il a rappelé qu'il ne s'agissait pas seulement d'une
contrainte d'affichage, comme cela pouvait être le cas pour certains
agrégats, car les objectifs devraient structurer l'action des
gestionnaires. De même, il a indiqué qu'il était important
que la construction des programmes ne soit pas dissociée de la mise en
oeuvre d'un contrôle de gestion, actuellement en cours dans les
ministères : les objectifs et les indicateurs devraient être
reliés avec les objectifs opérationnels des services et les
indicateurs de gestion qu'ils développaient, ce qui impliquait une
réflexion et une concertation approfondie au sein des ministères.
Là encore, il a indiqué que l'état d'avancement des
travaux des ministères était inégal, et que la
qualité de la gestion et des informations fournies au Parlement pourrait
s'en ressentir.
Il a conclu en évoquant la réforme comptable, considérant
qu'elle était au coeur des réformes engagées, car elle
permettrait de connaître la situation financière de l'Etat, y
compris l'état de son patrimoine, le niveau des charges futures et les
risques pour l'avenir, le tout étant soumis à la certification de
la Cour des comptes. La nouvelle comptabilité fournirait aussi un
éclairage sur le coût des politiques. Ce serait donc un outil
essentiel pour le gestionnaire, mais aussi pour le Parlement, afin
d'éclairer ce qui restait aujourd'hui trop souvent opaque, et de
permettre aux parlementaires de prendre leurs décisions en pleine
connaissance de cause. La mise en oeuvre de la réforme comptable
impliquait un très lourd travail de définition des normes et de
mise en oeuvre d'un outil informatique, intitulé ACCORD. Une fois ce
travail effectué, le patrimoine de l'Etat et l'évolution de sa
valorisation seraient connus. Il a souligné que le Sénat
était souvent amené à dénoncer l'absence de
politique immobilière de l'Etat ou l'entretien insuffisant de son
patrimoine et a indiqué que la LOLF permettrait de disposer de mesures
précises pour appuyer ces observations.
Au total,
M. Jean Arthuis, président
, a insisté sur le
fait que la mise en oeuvre de la LOLF devait appeler une attention soutenue,
particulièrement au cours des prochains mois, où des
décisions importantes seraient prises. Il a estimé que
l'année 2004 serait le premier rendez-vous politique important de la
mise en oeuvre de la LOLF, et que l'implication du Parlement serait
déterminante pour son succès, que l'on devait mesurer notamment
par sa contribution à la réforme de l'Etat et à
l'assainissement des finances publiques. Cette réforme voulue par le
« politique », le politique devait la mener jusqu'au bout
et elle ne devait pas être gérée par les seuls responsables
administratifs. Elle permettrait en effet d'assumer pleinement la mission de
contrôle qui était, comme l'avait rappelé encore tout
récemment le président Christian Poncelet, la « seconde
nature du Parlement ».
M. Jean Arthuis, président
,
a considéré que les efforts ne devaient pas être
relâchés, même si les premiers résultats obtenus
étaient significatifs, et a insisté sur le fait qu'il fallait
veiller toujours à « remettre sur le métier »
les préoccupations de la commission, tout en adaptant ses
méthodes de travail à ces nouveaux enjeux.
Un très large débat s'est alors ouvert.
M. François Marc
s'est associé aux propos du
président sur la nécessaire implication des hommes politiques
dans la mise en oeuvre de la LOLF, considérant que les auditions
menées par la commission avaient montré que les ministres
s'impliquaient de manière inégale dans la gestion de ce processus.
Il a exprimé des nuances s'agissant de l'exemple des réformes
conduites au Canada, considérant que les questions destinées
à évaluer la pertinence d'un programme étaient certes
légitimes dans le secteur privé, mais que le secteur public
devait faire prévaloir le respect de la devise républicaine
« liberté, égalité,
fraternité », sur le critère de rentabilité.
Il a considéré que l'Etat ne devait pas se désengager de
la sphère publique par souci de productivité, et a rappelé
que l'augmentation des prélèvements obligatoires n'était
pas, en soi, répréhensible dès lors qu'elle permettait de
créer un champ de liberté supplémentaire.
Il a souligné que les critères du management privé
tendaient à irriguer la logique décisionnelle de la sphère
publique à l'étranger, ce qui n'était pas toujours
conforme aux principes républicains. Par conséquent, s'il a
reconnu que les paramètres comptables et financiers devaient être
pris en compte par l'administration, il a considéré qu'ils
n'étaient pas primordiaux.
M. Jean Arthuis, président
, a précisé qu'il avait
cité les questions élaborées par le gouvernement canadien
à titre d'exemple, afin de montrer de quelle manière l'action de
l'administration pouvait être remise en question.
Il a rappelé que la mise en oeuvre de la LOLF ne devait pas conduire les
ministres à « photographier » leurs services, mais
au contraire à se poser la question de leur utilité, afin
d'envisager des réorganisations en conséquence.
M. Maurice Blin
a considéré que l'échange ayant
lieu au sein de la commission soulignait la nécessité d'une
réflexion approfondie sur la LOLF. Il a considéré qu'il
n'existait pas de contradiction entre la noblesse des finalités
publiques de l'action de l'Etat et l'efficacité de leur mise en oeuvre,
citant, en exemple, les universités, dont l'organisation
différait selon les pays.
Il a constaté que la mise en oeuvre dans l'administration d'une logique
de gestion inspirée des pratiques du secteur privé constituait
une véritable révolution. A cet égard, il a indiqué
que, s'agissant du ministère de la défense, la mise en oeuvre de
la LOLF impliquait qu'une organisation nouvelle remplace la logique verticale
de séparation entre les armées, ce qui était à la
fois souhaitable et particulièrement délicat à mettre en
oeuvre.
Enfin, il a souligné l'importance de rappeler aux politiques la
nécessité de s'impliquer pleinement dans la mise en oeuvre de la
LOLF.
M. Aymeri de Montesquiou
a considéré que la bonne gestion
n'était pas un concept public ou privé, mais devait s'imposer
à tous, ajoutant qu'elle était la meilleure garantie pour que
soit respectée la devise de la République, et pour assurer la
pérennité de l'attractivité de la France.
Sur ce point,
M. Jean Arthuis, président
, a rappelé que
les Etats vivaient désormais dans une situation de concurrence
très forte, chaque faute pouvant conduire à amoindrir le
potentiel productif d'un pays.
M. Eric Doligé
a souligné que l'exigence
républicaine consistait à ne pas « vivre au-dessus de
ses moyens », ajoutant qu'avec une gestion privée, l'Etat
aurait sans aucun doute déjà « déposé son
bilan ».
Il a souhaité que la LOLF permette d'identifier les inefficiences au
sein de l'administration, considérant que les citoyens et les
entreprises ne devaient pas être la variable d'ajustement du besoin de
financement de l'Etat. Il a déploré les lacunes dans
l'évaluation des mesures annexée aux projets de loi soumis au
Parlement et a estimé que la réforme en cours était une
chance qu'il convenait de saisir rapidement.
M. Jean Arthuis, président,
a souligné que la LOLF
n'était pas une révolution en soi, la véritable
révolution étant que les ministres s'impliquent davantage dans la
gestion de leur administration. Il a souligné que l'organisation
actuelle de la comptabilité de l'Etat ne permettait pas au Parlement
d'assurer sa mission de contrôle dans de bonnes conditions, et a
estimé que la résistance des citoyens aux réformes
découlait, en partie, des lacunes de l'information relative aux finances
publiques.
M. Paul Girod
a exprimé quelques réticences quant
à la mise en oeuvre de la LOLF, souhaitant que l'on connaisse rapidement
les missions que le gouvernement envisageait de mettre en place.
Il a considéré que l'on devrait simplifier, à terme, la
discussion de la loi de finances initiale et consacrer davantage de temps, y
compris pour les rapporteurs spéciaux, à l'examen de la loi de
règlement.
M. Jean Arthuis, président
, a approuvé ces propos,
soulignant que la discussion de la loi de finances initiale était un
exercice virtuel, la réalité étant
généralement différente des informations fournies au
Parlement à cette occasion, s'agissant notamment des effectifs des
ministères. Sur les missions, il a considéré que
c'était l'un des objets de cette communication que d'inviter le
gouvernement à faire état rapidement de ses intentions à
ce sujet.
M. Adrien Gouteyron
a considéré que ce débat
montrait bien que les préoccupations des uns et des autres se
rejoignaient sur l'efficacité de la République. Il a
souhaité connaître la « feuille de route » des
rapporteurs spéciaux dans le cadre de la mise en oeuvre de la LOLF.
M. Jean Arthuis, président,
a indiqué qu'il convenait de
« mettre sous tension » les ministres et leurs cabinets et
de consacrer davantage de temps, comme cela avait été fait au
cours du premier semestre 2003, au suivi de l'exécution
budgétaire. Il a rappelé le calendrier défini par le
ministère délégué au budget et à la
réforme budgétaire pour la mise en oeuvre de la LOLF.
M. Paul Loridant
s'est félicité que ces
problématiques progressent dans un certain nombre de ministères,
citant l'exemple de la direction générale des douanes et des
droits indirects du ministère de l'économie, des finances et de
l'industrie. S'agissant de l'exercice de la mission de contrôle du
Parlement, il a déploré l'insuffisante prise de conscience du
pouvoir des rapporteurs spéciaux dans les administrations, et a
souhaité que celles-ci y soient davantage sensibilisées. Enfin,
il a demandé que des éléments relatifs à la
méthodologie des contrôles soient fournis aux membres de la
commission.
M. Jean Arthuis, président
, a considéré qu'il
convenait de faire précéder les missions de contrôle d'une
information sur la portée et la nature du contrôle
envisagé. Il a souhaité que des éléments de
méthodes soient définis à l'attention des membres de la
commission, et a indiqué qu'une réflexion était
engagée sur la constitution d'un pôle de coordination des
contrôles au sein de la commission, afin de permettre notamment
l'organisation de missions plus conséquentes. Il a indiqué
également qu'il convenait de se concerter avec les autres commissions
permanentes afin de mieux coordonner les travaux des rapporteurs
spéciaux et des rapporteurs pour avis, notamment en vue de l'examen de
la loi de finances pour 2004.
M. Adrien Gouteyron
a indiqué qu'à l'occasion du
contrôle de l'Agence française de sécurité sanitaire
des produits de santé (AFSSAPS), il avait ressenti quelques
hésitations et réticences de la part de ses interlocuteurs,
estimant notamment qu'ils avaient parfois des difficultés à
distinguer le rôle des inspections et celui des parlementaires, dans le
cadre de l'exercice de leur mission de contrôle.
M. Jean Arthuis, président,
a rappelé les
difficultés rencontrées par M. Jacques Oudin en sa
qualité de rapporteur spécial, pour obtenir certains documents
dont la LOLF prévoyait pourtant de manière explicite la
transmission aux membres des commissions des finances.
M. Paul Girod
a évoqué les circonstances
particulières dans lesquelles, il y a dix ans, il avait
été conduit à réaliser, dans des conditions
difficiles, un contrôle et a considéré que la coordination
des missions de contrôle serait d'autant plus nécessaire que la
LOLF conduirait à prendre davantage en compte la dimension
interministérielle des politiques de l'Etat.
M. Jean Arthuis, président
, a estimé que les
dysfonctionnements du secteur public étaient aussi de la
responsabilité du Parlement, qui devait, à l'instar des
administrations, s'interroger sur son rôle et son utilité.
Mme Marie-Claude Beaudeau,
au vu de sa propre expérience du
contrôle, a approuvé l'idée de développer davantage
la méthodologie et la coordination des missions de contrôle des
rapporteurs spéciaux.
M. Denis Badré
a rappelé qu'il avait été
contrôlé dans une « vie antérieure » et
a estimé que l'administration n'était souvent pas suffisamment
informée des prérogatives du Parlement, les responsables
administratifs percevant la présence d'un parlementaire plus comme le
moyen de bénéficier d'une meilleure dotation budgétaire
que comme un véritable contrôleur.
M. Jean Arthuis, président
, a estimé que cette vision des
parlementaires lui apparaissait dépassée et devait évoluer
avec le développement du contrôle parlementaire.
Suite à une intervention
de
M. Eric Doligé
qui
avait souhaité que des instructions soient données afin de
réduire le champ du secret dans les administrations,
M. Gérard
Miquel
a rappelé que les préfets devaient faire appliquer la
loi et donc, donner instruction à leurs services de fournir tous les
documents demandés par les parlementaires dans l'exercice de leurs
prérogatives de rapporteurs spéciaux.
A l'issue de ce large débat,
la commission a
décidé, à l'unanimité,
d'autoriser la
publication d'un rapport d'information sur l'état d'avancement de la
mise en oeuvre de la LOLF
.
ANNEXE 1 : LISTE DES MEMBRES DU GROUPE DE TRAVAIL SUR LA MISE EN oeUVRE DE LA LOI ORGANIQUE DU 1ER AOÛT 2001 RELATIVE AUX LOIS DE FINANCES
La
composition du groupe de travail sur la mise en oeuvre de la loi organique du
1
er
août 2001 relative aux lois de finances est celle du
bureau de votre commission des finances, qui est rappelée
ci-après :
M. Jean ARTHUIS (UC), président
M. Philippe MARINI (UMP), rapporteur général
M. Jacques OUDIN (UMP), vice-président ;
M. Gérard MIQUEL (Soc.), vice-président ;
M. Claude BELOT (UMP), vice-président ;
M. Roland du LUART (UMP), vice-président ;
Mme Marie-Claude BEAUDEAU (CRC), vice-présidente ;
M. Aymeri de MONTESQUIOU (RDSE), vice-président.
M. Yann GAILLARD (UMP), secrétaire ;
M. Marc MASSION (Soc.), secrétaire ;
M. Michel SERGENT (Soc.), secrétaire ;
M. François TRUCY (UMP), secrétaire.
ANNEXE 2 : LISTE DES AUDITIONS DE MINISTRES
Nom du Ministre |
Date de l'audition |
Commissions pour avis invitées |
Mme Roselyne BACHELOT , Ministre de l'Ecologie et du Développement durable |
28 mai 2003 |
Affaires
économiques
|
M. Jean-François MATTEI , Ministre de la Santé, de la Famille et des Personnes handicapées |
4 juin 2003 |
Affaires sociales |
M. Pierre-André WILTZER , Ministre délégué à la Coopération et à la Francophonie auprès du Ministre des Affaires étrangères |
11 juin 2003 |
Affaires
étrangères
|
M.
Gilles de ROBIEN
, Ministre de l'Equipement, des Transports, du
Logement, du Tourisme et de
|
3 juillet 2003 |
Affaires
économiques
|
M.
Jean-Jacques AILLAGON,
Ministre
|
10 juillet 2003 |
Affaires culturelles |
Mme Claudie HAIGNERE, Ministre délégué à la recherche et aux nouvelles technologies auprès du ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. |
10 juillet 2003 |
Affaires
économiques
|
ANNEXE 3 : LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR LE GROUPE DE TRAVAIL SUR LA MISE EN OEUVRE DE LA LOLF
•
Structures dédiées à la
mise en
oeuvre de la loi organique :
- Mme Marie-Hélène GRANIER-FAUQUERT, responsable de
l'équipe projet de loi organique à la direction du budget ;
- M. Frank MORDACQ, directeur de la réforme budgétaire ;
- M. Michel PRADA, président du comité des normes de
comptabilité publique ;
- M. Jean-Pierre MILOT, chef de la mission « Normes
comptables » au ministère de l'économie, des finances
et de l'industrie ;
- M. André BARILARI, inspecteur général des finances,
chargé du Comité interministériel d'audit des programmes.
•
Services des ministères
:
- M. Michel DELLACASSANDRE, directeur des affaires financières du
ministère de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la
recherche ;
- M. Gérard MAILLET, chef de projet opérationnel au
ministère de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la
recherche ;
- M. Philippe ZELLER, directeur général de l'administration au
ministère des affaires étrangères, de la
coopération et de la francophonie ;
- M. Xavier DRIENCOURT, directeur des affaires financières au
ministère des affaires étrangères, de la
coopération et de la francophonie ;
- M. Claude KUPFER, directeur de la programmation, des affaires
financières et immobilières au ministère de
l'intérieur, de la sécurité intérieure et des
libertés locales ;
- M. Jean-Luc GANGLOFF, chef de projet opérationnel au ministère
de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des
libertés locales.
•
Cour des comptes
:
- M. François DELAFOSSE, président de la première
chambre ;
- M. Jean-Raphaël ALVENTOSA, conseiller-maître ;
- M. Patrick LEFAS, conseiller-maître ;
- M. Rémy RIOUX, conseiller référendaire ;
- M. François ADAM, conseiller référendaire ;
- M. François KRUGER, conseiller référendaire.
1
Le bureau de votre commission des
finances
est composé de M. Jean Arthuis, président, M. Philippe
Marini, rapporteur général, MM. Jacques Oudin, Gérard
Miquel, Claude Belot, Roland du Luart, Mme Marie-Claude Beaudeau et M. Aymeri
de Montesquiou, vice-présidents, et MM. Yann Gaillard, Marc
Massion, Michel Sergent et François Trucy, secrétaires.
2
La liste de ces auditions figure en annexe au présent
rapport d'information.
3
Cette « culture du secret » a
été dénoncée notamment dans le rapport de votre
commission des finances constituée en commission d'enquête sur le
fonctionnement des services de l'Etat dans l'élaboration des projets de
loi de finances et l'exécution des lois de finances, intitulé
« En finir avec le mensonge budgétaire : enquête
sur la transparence très relative des comptes de l'Etat »,
Alain Lambert et Philippe Marini, n° 485, 2000-2001.
4
In Rapport de la Cour des comptes sur l'exécution des lois
de finances pour l'année 2002, juin 2003, page 121.
5
Cette partie reprend des extraits de la présentation de la
direction de la réforme budgétaire figurant sur le site Internet
www.moderfie.finances.gouv.fr.
6
La composition et les missions du comité des normes ont
été définies par l'article 136 de la loi
n° 2001-1275 du 28 décembre 2001 portant loi de finances pour
2002.
7
Application Coordonnée de Comptabilisation,
d'Ordonnancement et de Règlement de la Dépense de l'Etat.
8
Page 10351.
9
In « Guide initial d'audit des programmes »
établi par le Comité interministériel d'audit des
programmes le 17 mars 2003, page 4.
10
In rapport précité de la Cour des comptes sur
l'exécution des lois de finances pour l'année 2002, juin 2003,
pages 118-119.
11
On rappellera toutefois que l'article 58-2, qui prévoit la
réalisation par la Cour des comptes d'enquêtes à la demande
des commissions chargées des finances des deux Assemblées, est
également entré en application au 1
er
janvier 2002.
Cette procédure est détaillée à la page 33 du
présent rapport d'information.
12
In Journal Officiel Débats Assemblée nationale,
séance du 19 décembre 1975, page 10 109.
13
Ainsi que l'écrivait notre collègue Michel Mercier,
rapporteur spécial des crédits de la décentralisation dans
son rapport spécial pour le projet de loi de finances initiale pour 2003
(Rapport général n° 68, tome III, 2002-2003, annexe
23), « les crédits de la DGD inscrits au budget du
ministère de la culture s'établissent à 12,7 millions
d'euros dans le projet de loi de finances pour 2003, et ceux inscrits au
chapitre 43-06 du budget des affaires sociales s'élèvent à
1.389,4 millions d'euros. Ce sont donc environ 20 % de la DGD des communes, des
départements et des régions qui ne figurent pas dans la DGD
inscrite au budget du ministère de l'intérieur. Le maintien des
crédits au budget du ministère de la culture est destiné
à gonfler les crédits de ce ministère afin d'atteindre
plus facilement l'objectif de 1 % du budget de l'Etat (alors que, par
définition, les crédits de la DGD ne peuvent être
considérés comme un effort financier de l'Etat puisqu'il s'agit
du financement de compétences que l'Etat n'exerce plus) ».
14
Cette partie reprend de larges extraits de la partie du rapport
de votre commission des finances sur le débat d'orientation
budgétaire pour 2004 consacrée à la mise en oeuvre de la
loi organique du 1
er
août 2001 relative aux lois de
finances : « La quadrature du cercle ? Débat
d'orientation budgétaire pour 2004 », rapport n° 359
de M. Philippe Marini au nom de la commission des finances, 2002-2003.
15
On notera toutefois que cette remarque s'applique aux
réponses aux questionnaires budgétaires relatifs au projet de loi
de finances initiale pour 2003, le délai imparti pour les
réponses aux questionnaires budgétaires portant sur le projet de
loi de finances initiale pour 2004 n'étant pas échu à la
date de la publication du présent rapport d'information.
16
In « La quadrature du cercle ? Débat
d'orientation budgétaire pour 2004 », rapport n° 359
de M. Philippe Marini au nom de la commission des finances, 2002-2003, page 7.
17
La Cour des comptes a transmis à votre commission des
finances, à sa demande, des communications sur les sujets
suivants : l'organisation et la gestion des services
déconcentrés du ministère de la culture, l'activité
internationale d'EDF depuis 1993, le contrôle des comptes et de la
gestion du Centre national de la fonction publique territoriale, les actions de
développement et de reconversion industriels menées par le
secrétariat d'Etat à l'industrie et le réseau de la Banque
de France.
18
Trois rapports d'information ont été publiés
à ce jour : « Réseau de la Banque de France :
urgence et nécessité de la réforme » par
M. Jean Arthuis, président (n° 254, 2002-2003) ;
« Communication de la Cour des comptes relative aux actions de
développement et de reconversion industriels menées par le
secrétariat à l'industrie », par M. Jean Clouet,
rapporteur spécial (n° 322, 2002-2003) ; « Le
Centre national de la fonction publique territoriale : une modernisation
nécessaire » par M. Michel Mercier, rapporteur spécial
(n° 335, 2002-2003).
19
« Tous les renseignements et documents d'ordre
financier qu'ils
[le président, le rapporteur général,
ainsi que, dans leurs domaines d'attributions, les rapporteurs spéciaux
des commissions
chargées des finances]
demandent, y compris
tout rapport établi par les organismes et services chargés du
contrôle de l'administration, réserve faite des sujets à
caractère secret concernant la défense nationale et la
sécurité intérieure ou extérieure de l'Etat et du
respect du secret de l'instruction et du secret médical, doivent leur
être fournis ».
20
Cette interprétation était notamment celle de M.
Lionel Jospin, alors Premier ministre, quant à la transmission des
documents aux rapporteurs spéciaux de votre commission des finances.
21
L'article 57 de la loi organique du 1
er
août
2001 relative aux lois de finances, issu d'une initiative de votre commission
des finances, n'a pas entendu restreindre la portée des dispositions
adoptées antérieurement. Le rapport n° 343 (2000-2001)
de M. Alain Lambert, au nom de la commission des finances du Sénat,
dispose ainsi, page 288, au sujet de cet article, que « votre
rapporteur souhaite mentionner que le présent article n'a pas pour
vocation d'entraîner l'abrogation des dispositions législatives
précisant les matières dont il traite ». On rappellera
que le Conseil constitutionnel, dans sa décision, n'avait émis
aucune réserve d'interprétation sur ce point.
22
In Journal Officiel Débats Sénat, séance du
19 mars 2003, page 1945.
23
In Journal Officiel Débats Sénat, séance du
19 mars 2003, page 1947.
24
In Journal Officiel Débats Sénat, séance du
5 juin 2003, page 4030.
25
S'agissant des Etats-Unis d'Amérique, le rapport de notre
collègue Joêl Bourdin, réalisé dans le cadre de la
Délégation du Sénat pour la Planification « De
la démocratie budgétaire en Amérique - L'information
économique aux Etats-Unis : quels enseignements pour la
France ? » (n° 326, 2000-2001) détaille
l'expertise des assemblées parlementaires américaines en
matière budgétaire.
26
L'article 14 prévoit que « le montant
cumulé des crédits annulés par décret en vertu du
présent article et de l'article 13 ne peut dépasser 1,5 %
des crédits ouverts par les lois de finances afférentes à
l'année en cours ».
27
On notera que ces émissions peuvent également
constituer une échappatoire possible pour un gouvernement peu scrupuleux
qui, gêné par le plafond de la dette à plus d'un an,
souhaiterait émettre des BTF pour financer de la dette à moyen et
long terme.
28
Par exemple, une augmentation brutale des taux à court
terme, comparable à celle du début des années 90,
inciterait rationnellement à un recours relatif accru en cours
d'année au financement de long et moyen terme dans la politique
d'émission de l'Etat.
29
Cette appellation fait référence au titre du
rapport d'information de notre ancien collègue Alain Lambert, alors
président de la commission des finances du Sénat :
« Doter la France de sa nouvelle Constitution
financière : un préalable à la réforme de
l'Etat », n° 37, 2000-2001.
30
L'article 67 de la LOLF prévoit toutefois que les
dispositions de l'ordonnance organique n° 59-2 du 2 janvier 1959
« demeurent applicables aux lois de finances afférentes
à l'année 2005 et aux années
antérieures ».
31
Pierre Méhaignerie et Gilles Carrez,
« Contrôle des dépenses publiques et amélioration
des performances de l'Etat », rapport d'information n° 765,
XII
ème
législature.
32
Pages 62-63 du rapport d'information précité.
33
C'est le cas, à titre d'exemple, des crédits
consacrés à l'aide alimentaire, qui figurent à la fois sur
le fascicule du ministère des affaires étrangères et sur
celui du ministère de l'agriculture.
34
Cette note a été transmise à votre
commission des finances le 6 juin 2003.
35
Deux hypothèses sont envisagées à ce
sujet : la première porte sur la création d'une mission
interministérielle comprenant l'ensemble des crédits concourrant
à l'action extérieure de la France ; la seconde porte sur la
création d'une mission interministérielle portant sur l'aide
publique au développement, la masse des crédits concourrant
à l'action extérieure de la France faisant l'objet d'un projet
coordonné de politique interministérielle (PCPI). Les PCPI visent
notamment à définir des objectifs dont la mise en oeuvre
relève de plusieurs ministères, à mettre en commun des
indicateurs, et à rendre compte de l'exécution de crédits
correspondants à une politique interministérielle.
36
Rapport sur l'exécution des lois de finances pour
l'année 2002, page 125.
37
Délégation interministérielle à la
réforme de l'Etat (DIRE), L'amélioration de la gestion publique,
Rapport du groupe de travail dit (« rapport Weiss »),
ministère de la fonction publique et de la réforme de l'Etat,
octobre 2000.
38
Comité interministériel pour la réforme de
l'Etat.
39
Alain Lambert in « Vers une nouvelle gestion
publique », n°2, décembre 2001.
40
Le décret du 25 octobre 1935 dispose que
« la compétence des contrôleurs financiers
s'étend à toutes les opérations susceptibles d'avoir une
répercussion financière directe ou indirecte ».
41
In Journal Officiel du 17 juillet 2003, page 12 095.
42
La réforme de l'Etat à l'étranger, rapport
d'information n° 348, 2000-2001, page 9.