2. La version polyvalente du Tigre : un choix qui paraît judicieux
L'hélicoptère de combat ne remplit pas dans les crises actuelles la fonction cruciale qui lui était dévolue dans les scénarios de la guerre froide. Certes, le besoin d'hélicoptères de combat demeure dans les conflits de faible intensité que nous connaissons, pour l'appui ou la protection des troupes au sol ou d'hélicoptères de transport. Il est par ailleurs indispensable de conserver des capacités adaptées aux crises de plus forte intensité. Mais notre parc de Gazelle actuel a jusqu'à présent rempli correctement cette mission, sans tensions majeures. L'arrivée progressive du Tigre, plus rapide, plus furtif, mieux armé, doit permettre d'assurer le relais dans des conditions satisfaisantes.
La question qui se pose aujourd'hui est plutôt de savoir comment valoriser au mieux l'utilisation de cet appareil et les ressources financières qu'il mobilisera dans les prochaines années.
Lors de la discussion de la dernière loi de finances, votre rapporteur avait déjà évoqué cette version unique et polyvalente du Tigre , qui offre une alternative à l'industrialisation de deux versions, l'une pour l'appui-protection, et l'autre pour le combat antichars 5 ( * ) .
Cette version polyvalente dite « HAD », c'est à dire appui-destruction , diffère peu de la version appui-protection, mais elle peut également être très rapidement configurée pour emporter, certes en nombre plus réduit que ne le ferait le Tigre HAP, des missiles capables de détruire des véhicules blindés, des PC ou des installations radar . L'Australie s'est engagée à acheter une vingtaine de Tigre de ce type. L'Espagne, qui étudie également l'achat de l'Apache américain, pourrait être intéressée par cette version du Tigre, pour un volume analogue, à condition que l'armée française opte elle aussi pour cette version.
Au delà de l'enjeu à l'exportation, qui n'est pas négligeable, il apparaît surtout que cette version répond mieux aux besoins de l'armée de terre , le changement de contexte stratégique n'imposant plus de version exclusivement antichar, d'ailleurs plus coûteuse. Par rapport à l'achat de 70 HAP et 50 HAC, actuellement prévu dans le modèle d'armée 2015, le coût de 120 HAD serait inférieur d'environ 150 millions d'euros .
Une version unique et un parc homogène permettraient aussi de simplifier la maintenance et d'en réduire les coûts, de faciliter la formation, de rendre plus flexible la gestion des équipages, qui ne seront plus spécialisés.
Il s'agit, sur le moyen terme , d'une évidente source d'économie , mais cette solution impose une mise de fond initiale pour développer la nouvelle version polyvalente.
Le partage des coûts de développement est actuellement un sujet de discussion entre l'industriel et les ministères de la défense français et espagnol.
Il faut également prendre en compte la nécessité de livrer les premiers Tigre HAP l'an prochain, pour former les premiers pilotes à l'école franco-allemande du Luc. Si la version HAD était choisie, il faudrait en outre reprendre ultérieurement ces appareils de type HAP et les reconfigurer en version HAD, afin de ne pas perdre le bénéfice d'un parc homogène.
Il semble aujourd'hui possible de surmonter les problèmes que soulève le choix de la version polyvalente HAD, ces problèmes étant relativement mineurs au regard des avantages que représenterait une flotte homogène d'hélicoptères de combat . Votre rapporteur souhaite donc que le gouvernement puisse rapidement s'engager dans cette voie.
Au delà de ce choix, se posera celui du futur missile antichar qui équipera le Tigre. On sait qu'après avoir participé, avec l'Allemagne et le Royaume-Uni, au financement du développement du missile AC 3 G LP (Antichar de 3 ème génération Longue portée), la France a annoncé, lors de la « revue de programmes » de 1998, qu'elle se retirait de sa fabrication. Il en a été de même pour le Royaume-Uni, seule l'Allemagne restant désormais dans ce programme confié au missilier LFK.
* 5 Voir l'avis n°90, tome VI (2001-2002) présenté par M. Serge Vinçon sur le projet de loi de finances pour 2002, page 55.