EXAMEN EN COMMISSION
Au cours
d'une réunion conjointe avec le comité d'évaluation des
politiques publiques, tenue le
mardi 30 octobre 2001
, sous la
présidence de M. Alain Lambert, président, la commission a
entendu une
communication
de
M. Yves Fréville, sur la
politique de recrutement et la gestion des universitaires et des chercheurs,
puis a procédé à l'audition de M. Rémi
Barré, directeur de l'Observatoire des sciences et des techniques et de
M. Pierre-Yves Cusset, pour la société Repères.
M. Yves Fréville, rapporteur pour le comité d'évaluation
des politiques publiques
, a rappelé que la politique de recrutement
et la gestion des universitaires et des chercheurs était le premier
sujet traité par le comité d'évaluation des politiques
publiques du Sénat et qu'il avait été choisi en juin 2000.
Il a indiqué que ce choix avait été bien anticipé
et qu'il était en phase avec l'actualité, puisque la Cour des
comptes, dans le tome II de son rapport public particulier relatif à la
fonction publique de l'Etat, avait consacré un chapitre à la
gestion des enseignants-chercheurs, que M. Jean-Paul Fitoussi avait rendu un
rapport sur la réforme de l'enseignement supérieur de
l'économie, que le président de l'université de Poitiers,
M. Éric Espéret, avait remis au ministre de
l'éducation nationale son rapport sur les obligations de service des
enseignants-chercheurs et que le ministre de la recherche,
M. Roger-Gérard Schwartzenberg, avait présenté au
Conseil des ministres du 24 octobre dernier une communication sur un plan
de recrutement pluriannuel de chercheurs. Il a ensuite souligné que le
comité, pour effectuer sa première étude, avait dû
élaborer une méthodologie constituant un équilibre entre
les méthodes de travail traditionnelles du Parlement, notamment au moyen
d'auditions et de demandes de pièces, et le recours à une
expertise externe. Il s'est félicité, de ce point de vue, que le
comité ait ainsi anticipé le souhait exprimé par le
président du Sénat, Christian Poncelet, dans son discours
d'orientation.
M. Yves Fréville, rapporteur
, a ainsi précisé qu'il
avait effectué plus de trente auditions de responsables du
ministère de l'éducation nationale et de la recherche ainsi que
de présidents de section du Conseil national des universités
(CNU) et du Comité national de la recherche scientifique,
représentant un champ disciplinaire relativement large. Il a
également sollicité une contribution écrite de l'ensemble
des présidents de section et des présidents d'université,
ainsi que des syndicats de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Il a expliqué qu'il avait constamment souhaité donner la parole
aux membres de la communauté scientifique, et qu'à ce titre, il
avait mis en place un forum de discussion sur le site Internet du Sénat
afin de connaître l'avis des intéressés sur l'organisation
de leur profession, qui, avec plus de 1.400 contributions en deux mois,
avait remporté un vif succès. Puis il a expliqué avoir
passé commande de deux études à des experts
extérieurs, la première portant sur la situation et
l'évolution démographiques de l'emploi public dans l'enseignement
supérieur et la recherche, effectuée par l'Observatoire des
sciences et des techniques (OST), la seconde prenant la forme d'un sondage
réalisé par la société Repères auprès
de 4.000 universitaires. Il a du reste précisé que ce
sondage avait également été un succès, puisqu'il
avait donné lieu à un taux de retour de 25 % alors que, dans
la plupart des cas, il n'est que de 10 %. Il a toutefois vivement
regretté que les ministres de l'éducation nationale et de la
recherche n'aient pas souhaité être auditionnés par la
commission et le comité d'évaluation réunis.
M. Yves Fréville, rapporteur
, a ensuite présenté la
problématique du sujet, précisant qu'il s'était
placé dans la situation d'évaluer une politique sur le long
terme, en particulier ses résultats actuels et ses perspectives futures.
Il a rappelé que l'universitaire ou le chercheur jouissait d'un statut
dérogatoire au sein de la fonction publique qui en fait un fonctionnaire
à part, la liberté académique étant d'ailleurs
reconnue en France depuis une décision du Conseil constitutionnel de
1984 comme un principe fondamental reconnu par les lois de la
République : ce principe se traduit par une autonomie des corps
universitaires en matière de recrutement et de gestion des
carrières, l'universitaire étant choisi puis jugé par ses
pairs au sein d'instances spécifiques organisées par discipline.
Cette organisation entraîne donc un risque évident de
conservatisme, pouvant dégénérer en mandarinat, en
syndicalisation excessive ou, le plus souvent, en corporatisme disciplinaire.
Sur le plan institutionnel, le système français repose sur un
système dual comprenant, d'une part, des grandes écoles et des
facultés, et, d'autre part, des organismes de recherche, dont le Centre
national de la recherche scientifique (CNRS) est l'exemple le plus
achevé, qui emploient des chercheurs à vie. Notre système
national se distingue ainsi de la « norme » internationale
qui ne connaît que des universités pluridisciplinaires dont les
personnels ont tous une activité de recherche. Les agences de recherche
n'ont pas de personnels statutaires mais orientent la recherche au sein des
universités.
S'agissant des seules universités,
M. Yves Fréville,
rapporteur
, a estimé que le système était mal
régulé parce que le pouvoir y est partagé entre trois
niveaux d'autorité qui se neutralisent plutôt qu'ils ne
s'équilibrent :
- l'Etat : il répartit les emplois entre les
universités, mais ne dispose ni de l'information, ni des moyens
susceptibles de mettre en oeuvre une politique du personnel au niveau de
l'établissement ;
- l'université : théoriquement autonome, elle peut
définir une politique d'utilisation de ses personnels, mais ne dispose
pas, en fait, des emplois et, face aux universitaires, se retrouve très
souvent sans réels pouvoirs ;
- les corps universitaires : ils conservent une très large
autonomie par rapport à l'université, tant lors de recrutements
que de l'avancement.
Il s'agit de tenter de concilier ces trois niveaux d'autorité et les
principes que chacun d'entre eux représente.
M. Rémi Barré
,
directeur de l'OST
, a indiqué
que, dans l'étude qu'il avait effectuée, il avait tenté de
répondre à trois questions : les conséquences des
importantes évolutions démographiques affectant les
universitaires et les chercheurs, l'attractivité de la carrière
de ces derniers, et l'importance des « viviers » de futurs
universitaires et chercheurs.
S'agissant de l'aspect démographique de l'étude, il a
rappelé que la population visée comprenait environ 65.000
personnes dont trois-quarts d'universitaires. Il a expliqué que le taux
de recrutement était constitué de la somme du taux de
départ, en particulier en retraite, et de la variation annuelle des
effectifs. Il a indiqué que, au cours des années 1990, environ
1.900 départs avaient lieu chaque année ; ce nombre serait
de 2.400 en 2004 et de 2.800 en 2008, puis se stabiliserait. Dans les
années 1990 également, la population des universitaires et des
chercheurs a vu ses effectifs croître de 2,5 % par an, soit environ
1.600 personnes supplémentaires chaque année, auxquelles il
convient d'ajouter 1.900 départs, soit la réalisation d'environ
3.500 recrutements annuels. Il a souligné que la totalité de
cette augmentation des effectifs pouvait être attribuée aux
enseignants-chercheurs, les effectifs des chercheurs restant, quant à
eux, stables.
M. Rémi Barré
a indiqué qu'au cours des prochaines
années, ces recrutements passeraient de 3.500 à 4.000, voire
4.500 par an, soit une augmentation de 15 %, pour maintenir stables les
effectifs, estimant que cette évolution ne constituait pas un
bouleversement. Il a toutefois distingué les disciplines
« jeunes », par exemple les sciences pour
l'ingénieur, les sciences de l'information en particulier, et les
disciplines « vieilles » comme la physique, les
évolutions démographiques affectant ces deux catégories de
discipline étant différentes.
M. Rémi Barré
a ensuite noté que l'obtention du
doctorat, en un minimum de huit années d'études suivies d'une
période post-doctorale, donnait au parcours des enseignants-chercheurs
et des chercheurs un caractère extrêmement long, avec des
rémunérations faibles de l'ordre de 6.000 francs par mois, alors
même que, dans certaines disciplines, la concurrence peut être
extrêmement forte avec le secteur privé. Par ailleurs, la
lisibilité de ces parcours, notamment vue de l'étranger,
apparaît bien souvent excessivement réduite. Il a indiqué
que le déroulement de carrière devenait plus intéressant
à partir de 40 ans, mais que, d'une manière
générale, les carrières étaient moins rapides
aujourd'hui qu'il y a une quinzaine d'années, mais aussi plus rapides
à l'université que dans les organismes de recherche. Il a ainsi
conclu que, au regard du caractère finalement faible de
l'attractivité des carrières, ces professions étaient
avant tout le fait de vocations.
Abordant la question des « viviers », il a
considéré que les politiques conduites depuis le début des
années 1990 avaient fait disparaître tout problème d'ordre
quantitatif. En effet, la population des doctorants peut être
évaluée entre 30.000 et 40.000 personnes, dont 25 %
d'étudiants étrangers. Environ 10.000 d'entre eux
soutiennent leur thèse chaque année, puis entre 3.000 et
3.500 candidats sont effectivement recrutés.
M. Pierre-Yves Cusset, pour la société Repères,
a
ensuite présenté, à l'aide d'une vidéo-projection,
les principaux résultats du sondage effectué auprès de
4.000 enseignants-chercheurs au cours de l'été dernier.
S'agissant du recrutement, il a indiqué que le système actuel de
recrutement des maîtres de conférences était globalement
critiqué, en particulier par les intéressés, même
s'il restait préféré à d'autres systèmes, en
particulier une intervention des instances locales précédant
celle des instances nationales ou encore l'organisation d'un concours national
sur épreuves. Il a ensuite noté que les deux-tiers des
enseignants-chercheurs étaient favorables à l'interdiction ou
à la limitation des recrutements locaux.
A cet égard, il a estimé que l'un des principaux enseignements du
sondage était l'existence d'un clivage entre les universitaires
« localo-confiants » et
« localo-défiants », ces derniers étant
toutefois les plus nombreux, à hauteur des deux-tiers. Les premiers se
rencontrent plus généralement chez les maîtres de
conférences, qui ont d'ailleurs été nommés dans
l'université dans laquelle ils avaient soutenu leur thèse. Ils se
montrent plus satisfaits que la moyenne à l'égard du
système de recrutement et considèrent que l'instance locale est
la plus légitime pour prendre les décisions d'avancement. Les
seconds, au contraire, sont davantage composés de professeurs
d'université qui s'estiment peu satisfaits des modalités de
recrutement, préférant plus souvent un système de
recrutement par concours national. Ils ont, plus fréquemment que les
« localo-confiants », travaillé dans plusieurs
universités ainsi que dans des universités
étrangères. Enfin, ils estiment que l'obligation qu'ont les
agents publics de rendre compte de leur activité n'est pas satisfaite
dans l'enseignement supérieur.
Si le découpage en sections du CNU, comme la composition de celles-ci,
satisfont la majorité des répondants au sondage, un tiers des
universitaires souhaiterait qu'elles comportent davantage d'universitaires
étrangers et de membres élus plutôt que nommés.
40 % des sondés émettent des critiques à l'encontre
de la composition des commissions de spécialistes qui, au sein des
universités, recrutent les enseignants-chercheurs. Sur ce point
également, un tiers des universitaires souhaiterait qu'elles comportent
davantage de personnes extérieures à l'université.
M. Pierre-Yves Cusset
a ensuite abordé la question de
l'avancement et de l'évaluation de ces enseignants. Le sondage a
montré que les décisions d'avancement devaient prendre davantage
en compte la qualité de l'enseignement, pour 80 %, les charges
administratives, pour 70 %, la qualité de la recherche, pour
40 %, et les séjours à l'étranger, pour 30 %. De
surcroît, 80 % des enseignants-chercheurs se disent favorables
à l'évaluation de l'enseignement par les étudiants et un
tiers d'entre eux souhaiterait que le résultat de l'évaluation
soit porté à la connaissance de l'ensemble de l'université.
En matière de rémunérations et de conditions de travail,
plus de la moitié des répondants assure des heures
complémentaires, essentiellement parce qu'elles sont indispensables au
bon fonctionnement des unités de formation et de recherche (UFR). Sept
enseignants-chercheurs sur dix consacreraient entre 20 % et 60 % de
leur temps de travail à la recherche. Par ailleurs, les trois-quarts des
universitaires se disent favorables à la possibilité de moduler
leur charge d'enseignement dans le cadre d'un contrat individuel pluriannuel
passé avec le président de l'université. Deux tiers
d'entre eux souhaiteraient continuer à assumer des charges
administratives, à condition qu'elles soient davantage prises en compte
dans leur évaluation, ou qu'elles ouvrent droit à une
rémunération spécifique.
Il a indiqué que, en matière de mobilité, un tiers des
universitaires avait travaillé dans plusieurs universités, et que
70 % de ceux-ci considéraient que cette expérience avait
été profitable à leurs travaux de recherche. Les deux
tiers des enseignants chercheurs n'ont travaillé que dans une seule
université, essentiellement parce qu'ils pensent que le système
universitaire ne favorise pas la mobilité. Du reste, en
général, ils sont relativement intéressés par une
mobilité temporaire dans un organisme public de recherche, dans
l'administration ou dans le secteur privé, mais très peu, soit
10 %, seraient intéressés par une mobilité
définitive. Enfin, les enseignants-chercheurs sondés ont
considéré que les principaux problèmes qu'ils
rencontraient étaient, dans l'ordre : le manque de temps pour la
recherche, la faiblesse des rémunérations, l'insuffisance du
personnel administratif, la lourdeur des charges d'enseignement et les blocages
dans l'avancement de la carrière.
M. Yves Fréville, rapporteur,
a considéré que les
politiques à long terme mises en place il y a une décennie
s'essoufflaient aujourd'hui. Certes, un ensemble cohérent de mesures
avait été pris à la fin des années 1980 et au
début des années 1990, sous l'impulsion de Claude Allègre,
alors conseiller spécial du ministre de l'éducation nationale de
l'époque, lorsqu'il avait fallu adapter le format des universités
à l'accroissement des effectifs d'étudiants. Il a notamment
cité la reconstitution d'un vivier de futurs universitaires et
chercheurs, suite à l'alignement de la thèse sur une norme
internationale, grâce en particulier à l'instauration
d'allocations de recherche et à la création des attachés
temporaires d'enseignement et de recherche (ATER). Il a toutefois estimé
qu'il convenait de surmonter l'écueil de la reconstitution de personnels
hors statut intégrables à terme dans la fonction publique sans
garantie de qualité. Par ailleurs, le problème des
« post-doc » restait entier, alors que la recherche de
niveau international reposait essentiellement sur eux : faute de ce type
de personnels, les laboratoires de recherche français se trouvent dans
l'obligation de recourir à des chercheurs à vie dont on peut
s'interroger sur la pertinence.
M. Yves Fréville, rapporteur
, a également mis au compte de
ces politiques la revalorisation de la fonction universitaire, avec la
création d'un système de primes. Il a toutefois insisté
sur le fait que ces mesures avaient coïncidé avec la
dépression économique en 1992-1993 mais qu'elles se sont
révélées moins incitatives dans un contexte de croissance
retrouvée. Ainsi l'attractivité des carrières pour les
meilleurs éléments s'est-elle fortement réduite : le
déroulement de carrière s'est en effet
« tunnélisé », d'autant plus que les mauvais
ne sont pas sanctionnés ni les meilleurs récompensés. La
fonction publique universitaire française n'est ainsi, selon lui,
absolument pas compétitive sur le plan international, et comporte le
risque d'une « médiocratisation »
générale, notamment dans les disciplines de pointe. Le rapporteur
a dès lors considéré qu'il fallait pouvoir recourir
à des contrats de droit public permettant de recruter des universitaires
ou des chercheurs de renommée internationale. Enfin, il a
évoqué la contractualisation réalisée entre l'Etat
et les universités, tout en regrettant que ces contrats ne comportent
aucun volet relatif aux emplois.
M. Yves Fréville, rapporteur,
a plaidé pour la mise en
place progressive d'une politique cohérente de gestion des ressources
humaines. Il s'est déclaré hostile à des mesures brutales
de court terme qui seraient nécessairement rejetées par la
communauté scientifique et a indiqué qu'il ne serait pas à
l'origine d'une 25
e
modification du décret de 1984
relatif au statut des enseignants chercheurs.
Il a alors formulé des propositions allant dans trois directions :
- au niveau des personnels, il a estimé que l'obligation de service
aujourd'hui uniquement fixée en termes d'enseignement devant les
étudiants était devenue obsolète. Il a dès lors
proposé que soit instauré un contrat pluriannuel entre
l'universitaire et son établissement. Un tel contrat devrait
définir certains objectifs, notamment en matière de recherche ou
de pédagogie, et apporter de la souplesse dans la gestion du temps. Ce
contrat serait également la base du contrôle de l'activité
dans ses différentes dimensions (enseignement, recherche,
administration). Il a également considéré que les
universités elles-mêmes devaient faire l'objet d'une
véritable évaluation, l'enseignement supérieur souffrant
aujourd'hui de l'absence de coordination des enseignements et du
caractère parfois factice de certains programmes. Il s'est alors
déclaré favorable à la proposition de Jean-Paul Fitoussi
de développer une agence d'évaluation externe des
universités, qui devrait, selon lui, passer par la transformation du
comité national d'évaluation des établissements publics
à caractère scientifique, culturel et professionnel (CNE) ;
- au niveau des établissements, l'essentiel est de leur permettre de
concevoir et d'appliquer une politique efficace de gestion des personnels. Le
rapporteur a ainsi souhaité que soit améliorée la
gouvernance des universités et renforcée l'autorité du
président, ce dernier ne devant plus être tributaire de
majorités disciplinaires fluctuantes, mais devenir l'exécutif
d'un véritable conseil d'orientation sur le modèle anglo-saxon,
repris dans les universités nouvelles françaises. Il a
également considéré que les universités devaient
être capables de faire respecter leurs orientations par les commissions
de spécialistes, la composition de ces dernières devant
d'ailleurs être beaucoup plus ouverte, par exemple, à l'ensemble
des enseignants de l'établissement, voire aux représentants du
personnel administratif et des étudiants ;
- quant à l'Etat, il doit se donner les moyens d'assurer le pilotage du
système universitaire : s'il a mis en place des modèles de
répartition des moyens tels que San Remo, ceux-ci ne sont guère
performants puisqu'ils ne font que perpétuer les importantes
inégalités disciplinaires. Il a également estimé
que l'université devait proposer à l'Etat une répartition
plus rationnelle de ses emplois sur le plan de l'enseignement, ce qui suppose
des réflexes moins corporatistes. L'Etat devrait définir une
politique globale de l'emploi scientifique couvrant à la fois le champ
des universités et celui des organismes de recherche : par exemple,
le CNRS pourrait être doté d'emplois dans les secteurs ne
correspondant pas à une activité d'enseignement supérieur
suffisante, comme le latin médiéval ou l'astronomie.
Il a
considéré à cet égard que le plan de recrutement de
chercheurs annoncé par le ministre, s'il était parfaitement
acceptable dans son principe, aurait probablement pour conséquence de
freiner l'émergence en France d'un système de recherche plus
flexible et plus capable d'affronter la concurrence internationale.
M. Jean-Pierre Demerliat
a souhaité connaître l'avis du
rapporteur sur les modalités de recrutement des maîtres de
conférences. Il a en effet regretté que ces derniers soient
qualifiés uniquement sur titres, la section compétente du CNU
n'auditionnant quasiment jamais les candidats.
M. Philippe Adnot
a estimé qu'il lui paraissait
extrêmement difficile de s'exonérer du contexte international et
qu'il convenait de pouvoir attirer les meilleurs étudiants et
enseignants en France, à l'exemple de ce que fait le Massachusetts
Institute of Technology (MIT). De ce point de vue, il a souligné une
contradiction entre cette réalité internationale et les positions
défendues par de nombreux enseignants-chercheurs dans leurs
réponses au sondage. Enfin, il a insisté sur la
nécessité de réaliser des innovations en matière
d'évaluation de l'enseignement supérieur et de la recherche.
M. Yves Fréville, rapporteur
, a indiqué qu'il avait connu
et pratiqué quasiment tous les modes de recrutement des maîtres de
conférences, le critère essentiel restant toutefois la
qualification sur travaux scientifiques. Il a estimé qu'il était
nécessaire qu'à l'échelon local, les commissions de
spécialistes auditionnent les candidats dans des conditions
matérielles satisfaisantes et équitables, à l'exemple de
ce qui se pratique dans les universités américaines. Il a
estimé qu'il fallait dépasser la logique interne des
modèles de type San Remo, et profiter des périodes de croissance
économique pour remettre à plat la répartition des moyens
entre universités et entre disciplines. Enfin, il a
considéré que le système universitaire français,
s'il devait promouvoir l'excellence, devait aussi continuer de remplir ses
missions de service public à destination de tous.
Le comité et la commission ont alors donné acte au rapporteur
de sa communication et décidé que les conclusions de sa mission
feraient l'objet d'une publication sous la forme d'un rapport d'information.