3. Le droit à l'image
a) Le contenu du droit
Les programmes à base d'images de synthèse et de
réalité virtuelle sont soumis, comme tout autre produit des
technologies de l'information, aux dispositions ayant pour objet de
préserver les droits de la personnalité, le respect de la vie
privée. Le "droit à l'image qui n'est pas formellement
établi par la loi -c'est plutôt une construction
prétorienne élaborée par le juge- découle du
principe général du droit au respect de la vie privée. Le
droit à l'image est un droit de la personnalité qui
confère à toute personne le droit de s'opposer à la
diffusion et à l'utilisation de son image sans autorisation. Ainsi, le
"droit à l'image" est-il, en vérité, plutôt mal
nommé, car il correspond plutôt au "droit à la protection
de son image". Sous ces réserves, les principales dispositions
légales qui peuvent fonder le "droit à l'image" sont
rappelées ci-après.
Les principales dispositions du "droit à l'image" |
|
Code civil |
Art. 9 . Chacun a droit au respect de sa vie privée. |
Code civil |
Art. 1382 . Tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. |
Code pénal |
Art. 226-1
. Est puni
d'un an
d'emprisonnement et de
300.000 francs d'amende le fait, au moyen d'un procédé
quelconque, volontairement de porter atteinte à l'intimité de la
vie privée d'autrui : (...)
|
Code pénal |
Art. 226-8 . Est puni d'un an d'emprisonnement et de 100.000 francs d'amende le fait de publier, par quelque voie que ce soit, le montage réalisé avec les paroles ou l'image d'une personne sans son consentement, s'il n'apparaît pas à l'évidence qu'il s'agit d'un montage ou s'il n'en est pas expressément fait mention. (...) |
En sus du droit de l'image, proprement dit, le respect des
droits de la personne est également assuré par les textes
relatifs aux traitement informatique des données
81(
*
)
et les règles sur la
diffamation
82(
*
)
: un
dessin, purement imaginatif a été considéré comme
diffamatoire. Une image, fut-elle de synthèse, le serait donc
également, tout en considérant que
" si le genre
satirique n'exclut pas la recherche d'une éventuelle intention
malveillante, exclusive de la bonne foi, on ne peut, par contre, exiger de
l'humoriste la prudence dans l'expression de sa pensée
(...).
L'excès est la loi du genre... ".
Les droits de la personne évoqués ont deux composantes. Il
s'agit, d'une part du principe de protection de la vie privée, qui
impose de ne pas prendre des images de quelqu'un dans un lieu privé, et
le droit à l'image proprement dit, selon lequel toute personne dispose
d'un droit absolu au respect de son image, quelle que soit la manière
dont elle est représentée (photo, dessin...). Le principe est
celui de l'indisponibilité de l'image d'une personne, qui permet
à celle-ci de pouvoir s'opposer à la publication de son image
sans son consentement. Il n'y a toutefois atteinte à l'image que
lorsqu'une personne est reconnue, identifiée. Dans l'hypothèse
d'une utilisation d'une photographie numérisée puis
transformée à l'aide d'un logiciel de métamorphose
(
Flame
), il ne pourrait y avoir de trouble ou dommage, et aucune action
ne serait possible si la personne est méconnaissable.
Ces droits ne sont pas d'application uniforme.
D'une part, des limites sont apportées au droit à l'image dans
l'intérêt de l'information. Ainsi,
" il est de pratique
constante que les photographes prennent des clichés de tout ce qui est
soumis à la vue du public et qu'ils présentent ensuite ces
clichés à la presse sans demander aux personnes
photographiées une autorisation quelconque. "
.
D'autre part, en application de cette première limite, il a toujours
été admis que le principe de protection de la vie privée
et le droit à l'image ne s'appliquaient pas dans les mêmes
conditions aux personnalités publiques.
Encadré n°19
LES PERSONNES PUBLIQUES ET LE DROIT À L'IMAGE
Les personnes publiques sont celles qui ont acquis une
certaine notoriété, soit du fait de leur profession ou de leur
activité, soit, sous certaines réserves, parce qu'elles sont
mêlées à l'actualité. Entrent dans ce cadre, les
hommes politiques, les personnalités du sport, de l'art, du spectacle,
les chefs d'entreprises...
Selon une jurisprudence constante, le droit à l'image des personnes
publiques doit s'interpréter au regard des nécessités de
l'information. Il existe ainsi une présomption d'autorisation tacite
pour la représentation de l'image de personnes publiques dans le cadre
de leurs activités, les images peuvent être publiées sans
autorisation préalable dès lors qu'elles concernent la vie
publique ou l'activité professionnelle de la personne concernée
ou qu'elles ont été prises dans des lieux publics (rue,
plage...). Pour les personnes publiques, le droit à l'image est
contrebalancé par les nécessités de l'information.
Une "personne anonyme" peut devenir une "personne publique"
sous l'effet de
l'actualité. La reproduction de son image, liée aux
nécessités de l'information, n'est alors admissible que si elle a
été prise dans des circonstances ayant un rapport direct avec les
événements en cause
1
.
Bien que la jurisprudence n'ait pas tranché sur ce point, il semblerait
que le seul fait d'être une personne publique, dans un lieu public, dans
l'exercice de ses fonctions, n'autorise cependant pas à publier
n'importe quelle photo, notamment lorsque, par l'effet des circonstances, la
personne se trouve représentée de façon ridicule.
__________
1
Ainsi, en publiant la photographie d'un fonctionnaire de police
directement concerné par l'affaire des micros dans les locaux du
Canard enchaîné
, prise à la sortie de son domicile,
après plusieurs heures de surveillance, dans des conditions de temps et
de lieu totalement étrangères aux événements
auxquels s'intéressait l'opinion publique, les journalistes ont
excédé leur droit d'information et ont porté atteinte au
droit à l'image de l'intéressé.
Enfin, il existe le cas très particulier des artistes interprètes
pour lesquels, outre ce droit moral de portée générale
appliqué à tous, il existe un "droit à l'image", droit
voisin des droits d'auteurs , qui en a les mêmes caractéristiques.
Il s'agit d'un droit moral et d'un droit patrimonial, par conséquent
transmissible :
" Sont soumises à l'autorisation écrite
de l'artiste, la fixation de sa présentation, sa reproduction et sa
communication au public, ainsi que toute utilisation séparée du
son et de l'image de sa prestation lorsque celle-ci a été
fixée à la fois par le son et l'image "
(art. L.212-3 du
code de la propriété littéraire et artistique). La
durée de ce droit patrimonial est de cinquante ans (art. L.211-4 dudit
code).