Projet de loi autorisant la ratification de la convention relative à la coopération en matière d'adoption d'enfants entre la République française et la République socialiste du Vietnam
CALDAGUÈS (Michel)
RAPPORT 410 (1999-2000) - COMMISSION DES AFFAIRES ETRANGERES
Rapport au format Acrobat ( 48 Ko )Table des matières
-
INTRODUCTION
-
I. LA NÉCESSITÉ DE MIEUX ENCADRER LES
ADOPTIONS EN PROVENANCE DU VIETNAM
- A. LE RESPECT DES PRINCIPES FONDAMENTAUX DE L'ADOPTION INTERNATIONALE N'ÉTAIT PLUS TOTALEMENT GARANTI AU VIETNAM
- B. LES ADOPTIONS EN PROVENANCE DU VIETNAM ONT ÉTÉ PROVISOIREMENT SUSPENDUES PAR LE GOUVERNEMENT FRANÇAIS EN AVRIL 1999 JUSQU'À LA CONCLUSION D'UN ACCORD DE COOPÉRATION ENTRE LES DEUX PAYS
- C. LA MISE EN PLACE D'UNE SOLUTION SATISFAISANTE EST D'AUTANT PLUS URGENTE QUE LES ADOPTIONS EN PROVENANCE DU VIETNAM REPRÉSENTENT UNE PART MAJEURE
- II. LA CONVENTION FRANCO-VIETNAMIENNE SUR LA COOPÉRATION EN MATIÈRE D'ADOPTION : UN TEXTE LARGEMENT INSPIRÉ DE LA CONVENTION DE LA HAYE
-
I. LA NÉCESSITÉ DE MIEUX ENCADRER LES
ADOPTIONS EN PROVENANCE DU VIETNAM
- CONCLUSION
- EXAMEN EN COMMISSION
- PROJET DE LOI
N°
410
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000
Annexe au procès-verbal de la séance du 14 juin 2000
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, autorisant la ratification de la convention relative à la coopération en matière d'adoption d'enfants entre la République française et la République socialiste du Vietnam ,
Par M.
Michel CALDAGUÈS,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : MM. Xavier de Villepin, président ; Serge Vinçon, Guy Penne, André Dulait, Charles-Henri de Cossé-Brissac, André Boyer, Mme Danielle Bidard-Reydet, vice-présidents ; MM. Michel Caldaguès, Daniel Goulet, Bertrand Delanoë, Pierre Biarnès, secrétaires ; Bertrand Auban, Jean-Michel Baylet, Jean-Luc Bécart, Jean Bernard, Daniel Bernardet, Didier Borotra, Jean-Guy Branger, Mme Paulette Brisepierre, M. Robert Calmejane, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Marcel Debarge, Robert Del Picchia, Xavier Dugoin, Hubert Durand-Chastel, Mme Josette Durrieu, MM. Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, Jean-Claude Gaudin, Philippe de Gaulle, Emmanuel Hamel, Christian de La Malène, Louis Le Pensec, Simon Loueckhote, Philippe Madrelle, René Marquès, Paul Masson, Serge Mathieu, Pierre Mauroy, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. René Monory, Aymeri de Montesquiou, Paul d'Ornano, Michel Pelchat, Xavier Pintat, Bernard Plasait, Jean-Marie Poirier, Jean Puech, Yves Rispat, Gérard Roujas, André Rouvière.
Voir
les numéros :
Assemblée nationale
(
11
ème
législ.) :
2358
,
2370
et T.A.
525
Sénat
:
392
(1999-2000)
Traités et conventions. |
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Le présent projet de loi a pour objet d'autoriser la ratification de la
convention relative à la coopération en matière d'adoption
d'enfants entre la France et le Vietnam, signée à Hanoï le
1
er
février 2000.
Depuis plusieurs années, le Vietnam figure au premier rang des pays
d'origine des enfants adoptés en France, représentant à
lui seul environ le tiers des adoptions internationales. Cependant, au moment
où la communauté internationale, par l'intermédiaire de la
convention de La Haye de 1993, tentait d'instaurer un contrôle plus
rigoureux des procédures d'adoption, afin de préserver
l'intérêt supérieur des enfants, certaines dérives
ou irrégularités étaient constatées au Vietnam, par
ailleurs non signataire de cette convention.
Cette situation a conduit le gouvernement français à suspendre
provisoirement les procédures d'adoption concernant le Vietnam à
compter du mois d'avril 1999 et à engager très rapidement des
négociations avec les autorités vietnamiennes afin de
remédier aux insuffisances qui avaient permis le développement de
certaines pratiques douteuses.
Ces négociations ont abouti à la signature, le 1
er
février 2000, de la présente convention fortement inspirée
des principes de la convention de La Haye de 1993 sur la protection des enfants
et la coopération en matière d'adoption internationale.
I. LA NÉCESSITÉ DE MIEUX ENCADRER LES ADOPTIONS EN PROVENANCE DU VIETNAM
La
nécessité de mieux encadrer les adoptions en provenance du
Vietnam a été soulignée par l'Autorité centrale
pour l'adoption internationale établie en France en 1998 en application
de la convention de La Haye. Elle résulte de trois facteurs :
- ces adoptions ont donné lieu, dans certains cas, à des
dérives critiquables du point de vue de la protection de
l'intérêt des enfants,
- ces dérives ont amené le gouvernement à
suspendre
provisoirement les procédures d'adoption
en direction de ce pays,
- une solution satisfaisante doit être trouvée de manière
urgente, ces adoptions représentant une
part majeure des adoptions en
France.
A. LE RESPECT DES PRINCIPES FONDAMENTAUX DE L'ADOPTION INTERNATIONALE N'ÉTAIT PLUS TOTALEMENT GARANTI AU VIETNAM
La
convention des Nations unies du 20 novembre 1989
relative aux droits de
l'enfant et la
convention de La Haye du 29 mai 1993 sur la protection des
enfants et la coopération en matière internationale
ont
posé un certain nombre de principes en vue de
subordonner l'adoption
internationale à l'intérêt supérieur de l'enfant et
d'éviter toute pratique mercantile
à l'occasion du placement
de l'enfant.
Les Etats parties à la convention de La Haye se sont engagés,
lorsqu'ils se trouvent en situation d'Etat d'origine de l'enfant adopté,
à s'assurer :
- de l'adoptabilité de l'enfant,
- de l'obtention des consentements nécessaires d'autres personnes que
l'enfant,
- de l'expression de souhaits éventuels de l'enfant,
- du fait que le consentement de la mère, lorsqu'il est
légalement requis, a été exprimé après la
naissance de l'enfant,
- que les consentements n'ont pas été achetés,
- que les personnes dont le consentement est requis ont été
informées des conséquences de leur décision, notamment sur
l'éventualité d'une rupture des liens entre l'enfant et la
famille biologique,
- et que l'adoption internationale intervient après épuisement
des solutions de placement de l'enfant dans son Etat d'origine (principe de
subsidiarité).
Chaque Etat partie s'engage en outre à désigner une
Autorité centrale chargée d'exercer le contrôle des projets
d'adoption.
Le Vietnam,
peu concerné par les adoptions internationales
jusqu'au début de la dernière décennie,
n'a pas encore
adhéré à la convention de La Haye,
non pas, par
désaccord de fond, mais plutôt, semble-t-il, en raison, de
difficultés d'application de cette convention compte tenu de son
organisation administrative, et notamment des pouvoirs reconnus aux provinces.
L'absence d'applicabilité au Vietnam des principes et du cadre juridique
définis par la communauté internationale est d'autant plus
regrettable que ce pays a vu se produire
un certain nombre
d'irrégularités, et parfois même de dérives
choquantes
dont certaines ont été relevées par
l'Autorité centrale pour l'adoption internationale. Selon les
informations recueillies par votre rapporteur, ont notamment été
constatés :
- le recours à des intermédiaires rémunérés,
sans qualification aucune en matière d'adoption, pour la recherche
d'enfants au sein même de leurs familles biologiques,
- l'incitation à l'abandon d'enfants par ces intermédiaires
moyennant le versement aux familles de sommes d'argent,
- des insuffisances dans les exigences requises pour le recueil des
consentements à l'adoption,
- la manipulation de documents d'état civil,
- la séparation de fratries, notamment d'enfants jumeaux,
- la mise en cause, et dans certains cas la condamnation pénale, de
personnes étant intervenues, à divers échelons, dans les
procédures d'adoption.
Ces faits, qui ne sont sans doute pas généralisables, paraissent
suffisamment graves pour justifier un meilleur encadrement juridique des
procédures mises en oeuvre d'un commun accord entre la France et le
Vietnam en matière d'adoption.
RECOMMANDATION DE L'AUTORITÉ CENTRALE
POUR L'ADOPTION INTERNATIONALE
" A l'issue de la réunion du 12 mars 1999 ;
Vu le rapport établi par la Mission de l'Adoption internationale le 4
février 1999 sur la situation de l'adoption internationale au
Vietnam ;
Ayant pris connaissance des observations de la partie vietnamienne lors des
discussions bilatérales franco-vietnamiennes à Paris le 26
février 1999 ;
L'Autorité centrale pour l'adoption internationale constate que les
principes posés par l'article 21 de la Convention des Nations unies sur
les droits de l'enfant (notamment subsidiarité de l'adoption
internationale et absence de profit indu au bénéfice
d'intermédiaires) sont trop fréquemment ignorés et donc
bafoués, et que, dans beaucoup de cas, les procédures ne
présentent pas les garanties requises pour assurer le respect de
l'intérêt supérieur de l'enfant et la
sécurité juridique des adoptants.
Par ailleurs, l'Autorité centrale pour l'adoption internationale
constate que plus des deux tiers des enfants adoptés originaires du
Vietnam sont âgés de moins de six mois et qu'environ la
moitié d'entre eux sont adoptés directement dans leurs familles
biologiques.
En conséquence, l'Autorité centrale pour l'adoption
internationale recommande :
- qu'un projet d'accord franco-vietnamien en matière d'adoption soit
présenté aux autorités vietnamiennes dans les plus brefs
délais,
- que, dès la remise du projet aux autorités vietnamiennes -et
après information préalable de ces autorités-, les visas
en vue d'adoption ne soient plus délivrés que pour les enfants
remis et confiés aux familles françaises par
l'intermédiaire des organismes français habilités et des
autorités vietnamiennes compétentes dont la liste nous sera
communiquée par le gouvernement vietnamien,
- que cette dernière mesure prenne effet dès la remise du projet
d'accord, mais sans affecter les procédures en cours.
La reprise des nouvelles procédures d'adoption sera subordonnée
à l'entrée en vigueur de l'accord. "
B. LES ADOPTIONS EN PROVENANCE DU VIETNAM ONT ÉTÉ PROVISOIREMENT SUSPENDUES PAR LE GOUVERNEMENT FRANÇAIS EN AVRIL 1999 JUSQU'À LA CONCLUSION D'UN ACCORD DE COOPÉRATION ENTRE LES DEUX PAYS
La
situation de l'adoption internationale au Vietnam a conduit les
autorités gouvernementales françaises, dûment
alertées par l'Autorité centrale pour l'adoption internationale,
créée en 1998 conformément à la convention de La
Haye, et en liaison avec les autorités vietnamiennes, à
réagir au début de l'année 1999.
A l'occasion d'une visite, au mois de janvier 1999, du vice-ministre de la
justice vietnamien, la question des conditions de l'adoption internationale a
été abordée. Les discussions alors engagées ont
permis de constater de nombreux points de convergence entre les deux pays et
surtout la nécessité de conclure un accord bilatéral dans
les plus brefs délais.
Le 12 mars 1999, l'
Autorité centrale pour l'adoption internationale
recommandait la préparation d'un projet d'accord franco-vietnamien
et la suspension de la délivrance des visas en vue d'adoption dès
la remise de ce projet d'accord aux autorités vietnamiennes.
Alors qu'un premier projet d'accord était préparé par les
deux parties le gouvernement français annonçait, le 29 avril
1999, sa décision
" de suspendre provisoirement les
procédures d'adoption entre la France et le Vietnam jusqu'à la
conclusion d'un accord de coopération entre les deux pays ".
Il précisait que des négociations seraient engagées
rapidement pour
établir un cadre juridique bilatéral
permettant la reprise des adoptions
entre les deux pays dans un
délai aussi rapproché que possible.
Conformément aux recommandations de l'Autorité centrale, des
mesures étaient également prises pour éviter que la
suspension des adoptions n'affecte les
procédures en cours.
Il a
ainsi été décidé que la suspension n'affecterait
pas les procédures engagées par les adoptants arrivés sur
le sol vietnamien avant le 9 mai 1999 inclus, de même que les
procédures initiées par les candidats à l'adoption
rentrés en France dans l'attente de la remise officielle de l'enfant. Il
s'agissait d'éviter autant que possible que les familles adoptantes ne
subissent le contrecoup de cette mesure.
Ainsi,
la majorité des candidats à l'adoption concernés
par des procédures en cours ont pu les mener jusqu'à leur terme,
220 visas ayant été délivrés entre mai et juin
1999.
Une cinquantaine de personnes, en cours de procédure d'adoption à
Ho Chi Minh-Ville, ont été confrontées à des
difficultés suite à la décision du gouvernement vietnamien
de suspendre l'examen des demandes d'adoption présentées par des
ressortissants français à compter du 20 mai 1999. Toutes les
familles concernées ont pu néanmoins revenir avec leurs enfants
adoptifs en France à la fin du mois de septembre 1999.
A la fin de l'année 1999,
une vingtaine de dossiers d'adoption
restaient encore en instance
pour des raisons diverses, parfois
indépendantes de la mesure de suspension française. Le
ministère de la justice vietnamien a récemment donné son
accord au règlement de huit de ces dossiers.
C. LA MISE EN PLACE D'UNE SOLUTION SATISFAISANTE EST D'AUTANT PLUS URGENTE QUE LES ADOPTIONS EN PROVENANCE DU VIETNAM REPRÉSENTENT UNE PART MAJEURE
Apparue
dans les années 1960,
l'adoption internationale a connu
récemment une expansion rapide,
sous le double effet du
développement de
préoccupations humanitaires
à
l'égard de pays frappés par la pauvreté ou la guerre et de
la
réduction du nombre d'enfants adoptables en France,
elle-même liée aux évolutions de notre
société : baisse de la natalité, diminution du nombre
de grossesses non désirées, attitude plus ouverte à
l'égard des mères célibataires.
La
France
est ainsi devenue, après les Etats-Unis, le
deuxième pays au monde pour l'accueil d'enfants de pays
étrangers.
L'adoption internationale, qui n'y concernait encore que
moins de 1 000 enfants en 1980, représentait plus de 3 000 adoptions en
1995, plus de 3 500 en 1997 et près de 3 800 en 1998. On ne peut
d'ailleurs que souligner avec satisfaction à quel point cet essor de
l'adoption internationale contredit les insinuations ou les exploitations
abusives de sondages qui prétendent déceler dans le
tempérament de nos compatriotes des relents de xénophobie.
Comme le montre le tableau figurant page suivante, l'adoption d'enfants
nés à l'étranger représente ainsi plus des deux
tiers de l'ensemble des adoptions d'enfants en France.
Il est frappant de constater la
part majeure qu'occupe aujourd'hui le
Vietnam dans ces adoptions
-1 069 enfants en 1995, 1 393 en 1996, 1 328 en
1997 et 1 343 en 1998- soit, selon les années, entre 35 % et 38 % de
l'ensemble des adoptions internationales. Au cours de l'année 1999,
marquée par la suspension des procédures au cours du
deuxième trimestre, 731 enfants vietnamiens étaient encore
adoptés, soit 20,4 % de l'ensemble des adoptions internationales.
Sur les cinq dernières années, le nombre d'adoptions en
provenance du Vietnam a dépassé de très loin celles de
tous les autres pays. Occupant une part majeure dans l'adoption en France, les
adoptions en provenance du Vietnam ne sauraient donc être durablement
suspendues sans affecter le fonctionnement de notre système et les
nombreuses familles souhaitant engager une procédure d'adoption.
RÉPARTITION, PAR PAYS D'ORIGINE, DES ADOPTIONS
INTERNATIONALES
DE 1995 À 1999
Pays |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
Total |
VIETNAM |
1 069 |
1 393 |
1 328 |
1 343 |
731 |
5 864 |
COLOMBIE |
321 |
303 |
234 |
294 |
303 |
1 455 |
ROUMANIE |
123 |
175 |
132 |
178 |
302 |
910 |
BRESIL |
208 |
234 |
167 |
143 |
143 |
895 |
MADAGASCAR |
125 |
161 |
174 |
174 |
218 |
852 |
GUATEMALA |
80 |
108 |
161 |
151 |
186 |
686 |
BULGARIE |
97 |
110 |
121 |
140 |
188 |
656 |
RUSSIE |
42 |
145 |
173 |
156 |
116 |
632 |
ETHIOPIE |
121 |
76 |
110 |
155 |
142 |
604 |
HAÏTI |
52 |
79 |
75 |
90 |
151 |
447 |
COREE |
96 |
70 |
77 |
87 |
89 |
419 |
MALI |
70 |
102 |
92 |
73 |
70 |
407 |
POLOGNE |
64 |
67 |
61 |
78 |
54 |
324 |
INDE |
69 |
64 |
79 |
52 |
58 |
322 |
CAMBODGE |
34 |
41 |
53 |
62 |
129 |
319 |
THAÏLANDE |
52 |
48 |
51 |
77 |
86 |
314 |
LETTONIE |
32 |
60 |
56 |
83 |
72 |
303 |
DJIBOUTI |
54 |
48 |
43 |
71 |
72 |
288 |
BURKINA FASO |
37 |
39 |
22 |
30 |
34 |
162 |
MEXIQUE |
40 |
35 |
32 |
30 |
23 |
160 |
CHILI |
31 |
25 |
38 |
25 |
30 |
149 |
TUNISIE |
32 |
31 |
18 |
17 |
16 |
114 |
COTE D'IVOIRE |
15 |
24 |
17 |
9 |
27 |
92 |
CHINE |
3 |
0 |
2 |
23 |
57 |
85 |
LIBAN |
11 |
13 |
27 |
20 |
13 |
84 |
UKRAINE |
0 |
0 |
3 |
29 |
51 |
83 |
Autres pays |
150 |
215 |
182 |
187 |
231 |
965 |
TOTAL |
3 028 |
3 666 |
3 528 |
3 777 |
3 592 |
17 591 |
II. LA CONVENTION FRANCO-VIETNAMIENNE SUR LA COOPÉRATION EN MATIÈRE D'ADOPTION : UN TEXTE LARGEMENT INSPIRÉ DE LA CONVENTION DE LA HAYE
Fruit d'un processus particulièrement rapide, tant dans sa négociation que dans sa phase de ratification, la convention franco-vietnamienne sur la coopération en matière d'adoption d'enfants du 1 er février 2000 s'inspire très largement de la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale, dont les principes essentiels pourront donc s'appliquer aux procédures d'adoption entre la France et le Vietnam.
A. DES NÉGOCIATIONS RAPIDES
Comme
cela a été indiqué précédemment, la
conclusion rapide d'un accord bilatéral subordonnant la reprise des
procédures d'adoption, constituait la contrepartie indissociable de la
mesure de suspension provisoire prise par le gouvernement français le 29
avril 1999.
Sur la base d'un premier projet d'accord à la disposition des parties
dès la fin avril 1999, des négociations ont donc
été promptement engagées dans un esprit constructif, au
cours de deux séries de discussions, à Hanoï fin juin et
à Paris fin octobre 1999.
Les
principaux points de discussion
tenaient moins aux principes
mêmes de l'accord, que sur divers aspects de procédures,
notamment :
- la définition des compétences respectives du pays d'accueil et
du pays d'origine lors du prononcé des décisions d'adoption, la
France ayant souhaité et obtenu que les juridictions françaises
conservent la possibilité de prononcer des décisions d'adoption
plénières,
- la reconnaissance de plein droit des effets des décisions rendues dans
chaque pays,
- la définition de nouvelles procédures tenant compte des
compétences dévolues aux autorités locales vietnamiennes
en matière d'adoption, et notamment aux comités provinciaux.
Ce dernier point a notamment conduit à préserver, dans la
procédure d'adoption,
la compétence reconnue aux provinces en
matière d'adoption par la législation vietnamienne
, ces
dernières étant chargées de la transmission à la
famille adoptante des renseignements relatifs à l'enfant adopté,
mission qui relève de l'Autorité centrale pour les pays
signataires de la convention de La Haye.
Après approbation de part et d'autre, la Convention était
signée par les deux parties le 1
er
février 2000
à Hanoï, soit 9 mois seulement après le début des
négociations.
En déposant le projet de loi autorisant la ratification de cette
convention le 3 mai dernier et en l'inscrivant à l'ordre du jour de
l'Assemblée nationale le 6 juin, puis à celui du Sénat le
21 juin, le gouvernement français, tout comme le Parlement, s'est
imposé des délais tout à fait inhabituels en
matière de conventions internationales, soulignant ainsi l'urgence de
l'entrée en vigueur de cet accord bilatéral important.
B. UN CADRE INSPIRÉ DE LA CONVENTION DE LA HAYE POUR RÉGIR LES RELATIONS FRANCO-VIETNAMIENNES EN MATIÈRE D'ADOPTION D'ENFANTS
Destinée à garantir la régularité
et la
transparence des procédures d'adoption, la convention
franco-vietnamienne s'inspire très largement du droit international et
notamment de la Convention de La Haye de 1993.
Elle rappelle, dans son préambule, la nécessité de
conduire les adoptions d'enfants "
dans le respect de la convention des
Nations unies sur les droits de l'enfant du 20 novembre 1989, et notamment ses
dispositions concernant la garantie de l'intérêt supérieur
de l'enfant et le respect de ses droits fondamentaux, ainsi que dans le souci
de prévenir l'enlèvement, la vente et la traite d'enfants et les
profits matériels indus à l'occasion de l'adoption
".
Le champ d'application de la convention, défini par l'article premier,
se conforme aux critères retenus par la convention de La Haye et vise
les adoptions "
par une personne ou deux époux
"
résidant habituellement sur le territoire de l'une des parties d'un
enfant résidant habituellement sur le territoire de l'autre partie et
n'ayant pas atteint l'âge limite d'adoption fixé par la
législation nationale de chaque Etat contractant, cette limite
étant de 15 ans au Vietnam.
La convention prévoit la mise en place, à l'image des
stipulations de la convention de La Haye, d'une
Autorité centrale
dans chacun des Etats parties (article 2), garante de la
régularité et de la transparence des procédures et
chargée de s'assurer de l'adoptabilité des enfants. Cette
Autorité centrale sera, au Vietnam, le ministère de la justice,
et en France, la Mission de l'adoption internationale, déjà
compétente pour les adoptions couvertes par la Convention de La Haye. On
remarquera que, s'agissant du Vietnam, la convention aboutira à
renforcer le poids de l'Etat central, par rapport aux provinces, dans les
procédures d'adoption. L'article 4 charge les Autorités centrales
de prendre toutes mesures "
pour prévenir des gains
matériels indus à l'occasion d'une adoption
" et
"
en vue de faire sanctionner de telles pratiques
". Les deux
Autorités centrales sont également tenues d'échanger
"
des informations juridiques, des données statistiques et
d'autres renseignements nécessaires
" à une bonne
application de la convention (article 5).
Destinataires des dossiers de demande d'adoption (article 9), les
Autorités centrales doivent s'assurer que les
conditions
nécessaires à la régularité de l'adoption
sont
bien remplies (articles 10 et 11). Il s'agit là de reprendre, pour les
rendre applicables au Vietnam, l'essentiel des garanties prévues par la
convention de La Haye, à savoir :
- l'
adoptabilité de l'enfant
au regard de la législation
du pays d'origine,
- le
principe de subsidiarité,
selon lequel l'adoption
internationale n'est envisagée que si, après examen des
possibilités locales de prise en charge de l'enfant, elle s'avère
la plus conforme à son intérêt,
- la nécessité du
consentement à l'adoption
des
personnes habilitées à le délivrer,
- l'
information, préalablement au consentement, sur les effets
juridiques de l'adoption,
- l'
absence de paiement ou de contrepartie
pour l'obtention du
consentement.
L'intervention obligatoire de l'Autorité centrale dans la
procédure doit permettre d'éviter les recherches individuelles
d'enfants et le recours à des intermédiaires.
Le
schéma procédural
retenu par la convention
franco-vietnamienne s'écarte quelque peu de celui prévu par la
convention de La Haye, et ce afin de
prendre en compte le rôle
dévolu aux provinces
en matière d'adoption par la
législation vietnamienne.
S'agissant du Vietnam,
la convention distingue en effet l'Autorité
centrale
, c'est-à-dire le ministère vietnamien de la justice,
qui se voit confier un certain nombre de responsabilités,
et les
autorités compétentes
selon la législation nationale,
à savoir les comités populaires.
Le ministère de la justice, après avoir vérifié que
l'enfant est adoptable, procédera à l'apparentement, transmettra
au comité populaire le dossier des adoptants accompagné d'une
note attestant que toutes les conditions nécessaires sont remplies et
formulera un avis sur l'adoption envisagée (article 11-2).
Il revient au comité populaire (article 12) d'adresser aux adoptants une
note contenant les renseignements suivants sur l'enfant proposé à
l'adoption :
- nom et prénom, sexe, date de naissance, domicile,
- son adoptabilité,
- situation personnelle, familiale et sociale,
- état de santé,
- besoins particuliers, éventuellement.
Les adoptants doivent faire connaître leur réponse au
comité populaire qui a effectué la proposition.
S'agissant de la
reconnaissance des décisions d'adoption,
la
convention prévoit des dispositions particulières, la
législation vietnamienne ne connaissant pas l'adoption
plénière. L'article 7, après avoir rappelé que la
décision de confier l'enfant en vue de son adoption relève de la
compétence de l'Etat d'origine, précise que lorsque la
législation de l'Etat d'accueil prévoit
une forme
d'adoption requérant une nouvelle décision d'adoption, cette
nouvelle décision relève de la compétence des
autorités de cet Etat d'accueil.
Les décisions d'adoption vietnamiennes ne seront pas
considérées dès leur prononcé au Vietnam, comme des
adoptions plénières, directement transcriptibles sur le registre
du service central de l'état civil à Nantes, comme cela est le
cas pour toute adoption prononcée en application de la convention de La
Haye. Les candidats à l'adoption devront donc, s'ils souhaitent le
prononcé d'une adoption plénière en France, déposer
une requête en ce sens auprès du tribunal de grande instance de
leur domicile.
Signalons que la convention comporte un chapitre relatif à la
coopération entre les deux parties et qu'elle institue notamment
(article 20) un
groupe de travail mixte et paritaire
se
réunissant une fois par an pour évaluer l'application de la
convention et formuler des propositions en vue du règlement des
difficultés éventuelles.
L'article 23 précise que la convention est conclue pour une durée
de cinq ans et sera par la suite renouvelable par période de trois ans,
sauf dénonciation par l'une des parties avec un préavis de six
mois.
CONCLUSION
La
ratification de la convention franco-vietnamienne du
1
er
février 2000 doit permettre la mise en place
rapide d'un nouveau cadre pour la coopération entre nos deux pays en
matière d'adoption, cadre qui sera très proche de celui
défini par la convention de La Haye de 1993 sur l'adoption
internationale.
Compte tenu de la place majeure occupée par le Vietnam dans l'adoption
en France, et de l'impossibilité de tolérer les
irrégularités et dérives qui ont pu apparaître par
le passé dans le déroulement des procédures, il
était indispensable que soient prises les mesures appropriées
afin de pouvoir reprendre, dans de meilleures conditions, les procédures
d'adoptions suspendues au printemps 1999.
Votre commission vous propose donc d'adopter le présent projet de loi.
EXAMEN EN COMMISSION
La
commission des affaires étrangères, de la défense et des
forces armées a examiné le présent projet de loi lors de
sa séance du 14 juin 2000.
A la suite de l'exposé du rapporteur, M. Charles-Henri de
Cossé-Brissac a souligné la nécessité d'assainir
les conditions de l'adoption d'enfants étrangers, qui donnait trop
souvent lieu à des dérives scandaleuses et douloureuses pour les
familles. Il a notamment évoqué le rôle joué, dans
la plupart des pays, par des intermédiaires non officiels permettant,
moyennant de fortes rémunérations, d'accélérer les
lourdes procédures auxquelles sont confrontées les familles.
M. Christian de La Malène a souhaité que la lutte contre la
corruption internationale prenne en compte ce type de pratiques moralement
très choquantes.
M. René Marquès a rappelé les nombreuses formalités
préalables à l'adoption, qui imposent souvent de longs
délais d'attente avant que le président du conseil
général ne délivre son accord définitif.
M. Xavier de Villepin, président, s'est interrogé sur les
services administratifs susceptibles de fournir aux familles des informations
et des conseils en matière d'adoption internationale.
M. Michel Caldaguès, rapporteur, a apporté les précisions
suivantes :
- le recours à des intermédiaires rémunérés
en matière d'adoption concerne en effet un grand nombre de pays ;
- la mission pour l'adoption internationale, placée auprès du
ministre des affaires étrangères, permet d'informer les familles
et de suivre les conditions dans lesquelles sont réalisées, dans
les différents pays étrangers, les adoptions ;
- la convention franco-vietnamienne permet de renforcer les garanties en
matière d'adoptabilité de l'enfant et de validité du
consentement.
La commission a ensuite émis un avis favorable à l'adoption du
présent projet de loi.
PROJET DE LOI
(Texte
adopté par l'Assemblée nationale)
Article unique
Est autorisée la ratification de la convention relative à la coopération en matière d'adoption d'enfants entre la République française et la République socialiste du Vietnam, signée à Hanoï le 1 er février 2000, et dont le texte est annexé à la présente loi 1( * ) .
1 Voir le texte annexé au document Assemblée nationale (n° 2358 - 11 e législature).