sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la solidarité et au renouvellement urbains
ALTHAPE (Louis)
RAPPORT 304 (1999-2000) - COMMISSION DES AFFAIRES ECONOMIQUES
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Table des matières
- PRINCIPALES PROPOSITIONS DE LA COMMISSION
- INTRODUCTION
-
PREMIÈRE PARTIE -
VUE D'ENSEMBLE SUR UN TEXTE DENSE,
A LA COHÉRENCE PARFOIS INCERTAINE...
N°
304
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000
Annexe au procès-verbal de la séance du 5 avril 2000
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE APRÈS DÉCLARATION D'URGENCE, relatif à la solidarité et au renouvellement urbains ,
Par M.
Louis ALTHAPÉ,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : MM. Jean François-Poncet, président ; Philippe François, Jean Huchon, Jean-François Le Grand, Jean-Paul Emorine, Jean-Marc Pastor, Pierre Lefebvre, vice-présidents ; Georges Berchet, Léon Fatous, Louis Moinard, Jean-Pierre Raffarin, secrétaires ; Louis Althapé, Pierre André, Philippe Arnaud, Mme Janine Bardou, MM. Bernard Barraux, Michel Bécot, Jacques Bellanger, Jean Besson, Jean Bizet, Marcel Bony, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Dominique Braye, Gérard César, Marcel-Pierre Cleach, Gérard Cornu, Roland Courteau, Charles de Cuttoli, Désiré Debavelaere, Gérard Delfau, Marcel Deneux, Rodolphe Désiré, Michel Doublet, Paul Dubrule, Bernard Dussaut , Jean-Paul Emin, André Ferrand, Hilaire Flandre, Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Serge Godard, Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Mme Anne Heinis, MM. Pierre Hérisson, Rémi Herment, Bernard Joly, Alain Journet, Gérard Larcher, Patrick Lassourd, Edmond Lauret, André Lejeune, Guy Lemaire, Kléber Malécot, Louis Mercier, Paul Natali, Jean Pépin, Daniel Percheron, Bernard Piras, Jean-Pierre Plancade, Ladislas Poniatowski, Paul Raoult, Jean-Marie Rausch, Charles Revet, Henri Revol, Roger Rinchet, Josselin de Rohan, Raymond Soucaret, Michel Souplet, Mme Odette Terrade, MM. Michel Teston, Pierre-Yvon Trémel, Paul Vergès, Jean-Pierre Vial, Henri Weber.
Voir
les numéros
:
|
|
Urbanisme. |
PRINCIPALES PROPOSITIONS DE LA COMMISSION
I. DISPOSITIONS RELATIVES À L'URBANISME
Dans un
souci de cohérence et de simplification
, la commission a
souhaité :
-
conserver la dénomination " plan d'occupation des
sols " (POS)
, en tous points préférable à celle
de " plan local d'urbanisme " proposée par le
Gouvernement ;
- prévoir que les schémas de cohérence territoriale
(SCT) et les POS seraient élaborés après un
diagnostic
et mettront en oeuvre un véritable projet communal ou
intercommunal (
article 1
er
, article L.122-1 et
article 3, article L.123-1 du code de l'urbanisme
) ;
- faire en sorte que le contenu du
plan local de l'habitat
ne prime
pas sur celui du plan d'occupation des sols, sauf erreur manifeste
d'appréciation (
article 1
er
,
article L.123-1 du code de l'urbanisme
) ;
- préciser que les documents graphiques du POS contiendront des
indications relatives au
relief
, alors que tel n'est pas le cas
actuellement (
article 1
er
,
article L.123-1
) ;
- modifier l'appellation des concessions d'aménagement afin de les
qualifier désormais de
" conventions publiques
d'aménagement "
(
article 6, article L.300-4 du code de
l'urbanisme
) ;
Dans un esprit de transparence et de démocratie
, il est
proposé de :
- renforcer les mécanismes de concertation préalables
à l'élaboration des documents d'urbanisme locaux
(article
1
er
, article L.122-7)
;
- soumettre les directives territoriales d'aménagement
élaborés par l'Etat à l'enquête publique
(article
1
er
, article L.122-1)
;
- étendre la compétence de la commission de conciliation aux
permis de construire délivrés par l'Etat
(article
1
er
, article L.121-6)
;
Pour renforcer les droits des collectivités locales
, la
commission a prévu que :
- la
carte communale
serait
élaborée par la seule
commune
(article 4, article L.124-2)
;
- l'Etat fournirait aux communes les études techniques dont il
dispose en matière de prévention des risques et de protection de
l'environnement
(article 1
er
, article L.121-2)
;
- le président du conseil général siégerait au
sein de la commission de conciliation
(article 1
er
, article
L.121-6)
;
- et que les
mécanismes protégeant les communes et les
établissement publics de coopération intercommunale d'une
intégration forcée dans un SCT
seraient
renforcés
(article 1
er
, article L.122-3)
.
Afin de mieux prendre en compte la diversité
du territoire
français
, il est proposé de :
- d'accroître la mixité sociale aussi bien dans l'habitat
rural que dans l'habitat urbain
(article 1
er
, article
L.121-1)
;
- instituer un
droit à une constructibilité minimale
dans les zones où s'appliquent à la fois la loi
" littoral " et la loi " montagne "
(après
l'article premier)
;
- faciliter l'autorisation de constructions nouvelles dans les zones
rurales caractérisées par l'absence de toute pression
foncière et où l'état du droit actuel interdit tout
développement
(après l'article 19 bis)
;
Pour mieux s'adapter aux réalités du littoral
français
, il est proposé :
- d'étendre aux rivages des plans d'eau intérieurs de plus
de 1.000 hectares, la servitude longitudinale de passage des piétons
existant le long des rivages de la mer
(après l'article 20
sexies)
;
- donner aux départements les moyens de mieux protéger les
herbiers d'algues marines (telles que les posidonies et les cymodocées)
(après l'article 20 sexies)
;
- prévoir la possibilité de créer des
équipements intégrés à l'environnement, tels que
les chemins piétonniers, les parkings et les observatoires
ornithologiques
(après l'article 20 sexies).
Pour adapter la loi aux spécificités de la montagne
, la
commission a :
- prévu que les constructions appartenant au
patrimoine
montagnard
pourront être plus aisément
réhabilitées
(article 10 ter et additionnel
après l'article 19 bis) ;
- reconnu, en zone de montagne, l'existence de
zones
caractérisées par un habitat individuel
discontinu
dans lesquelles les constructions nouvelles sont possibles
(après
l'article 19 bis)
;
- permis l'implantation de constructions à usage industriel et
artisanal intégrées à l'environnement en zone de montagne
(après l'article 19 bis)
;
II. DISPOSITIONS RELATIVES À LA MIXITÉ SOCIALE
La
commission, afin de
mettre en oeuvre l'objectif de mixité sociale,
dans un cadre cohérent
, propose, à l'article 25 du
projet de loi :
- de s'appuyer, autant que faire se peut, sur les périmètres
des établissements publics de coopération intercommunale,
compétents en matière de logements ;
- d'intégrer dans la liste des logements sociaux prix en compte
pour l'appréciation du seuil des 20 %, les logements en accession
sociale à la propriété ;
- d'inscrire l'objectif de réalisation de logements sociaux dans un
contrat d'objectifs signé avec l'Etat par l'EPCI compétent en
matière de logement ou, à défaut, la commune. Ce contrat
d'objectifs, soumis à l'avis du conseil départemental de
l'habitat, s'inscrit dans les orientations arrêtées par le
schéma de cohérence territoriale, le plan d'aménagement et
d'urbanisation des sols et par le programme local de l'habitat ;
- de
substituer au mécanisme du prélèvement et du
doublement
de ce prélèvement en cas de carence, le principe
d'une
contribution versée par la commune
à l'EPCI
compétent ou au fonds d'aménagement urbain, assorti d'un
mécanisme de pénalités conventionnelles défini dans
le contrat d'objectifs.
III. DISPOSITIONS RELATIVES AUX TRANSPORTS
La
commission a tenu à assurer une compensation équitable des
charges qui seront supportées par les régions à la suite
du transfert de compétences sur les services ferroviaires
d'intérêt régional. Elle a ainsi prévu, à
l'article 52 du projet de loi :
- une dotation de compensation pour la
modernisation des gares
régionales
(article L.1614-8-1 du code général
des collectivités territoriales)
;
- la compensation du manque à gagner généré
par les
tarifs sociaux décidés et mis en oeuvre par l'Etat
(article L.1614-8-1 du code général des
collectivités territoriales)
;
- l'amélioration du régime
d'indexation
de la
compensation financière en l'alignant sur
l'évolution du
produit intérieur brut
(article L.1614-8-1 du code
général des collectivités territoriales)
;
- que toute
charge nouvelle
liée à une disposition
législative ou réglementaire ou à une modification des
tarifs sociaux donnera lieu à une
révision
de la
compensation
(article L.1614-8-1 du code général des
collectivités territoriales)
;
Elle a, en outre, dans un article additionnel après l'article 52,
prévu
l'exonération de taxe professionnelle
des
véhicules ferroviaires destinés au transport régional de
voyageurs dont l'acquisition a été
financée par une
région
(article additionnel après l'article 52).
IV. DISPOSITIONS RELATIVES AU LOGEMENT
Votre
commission vous propose :
- de reconnaître, comme participant d'un service
d'intérêt général, les compétences des
organismes d'HLM, en matière tant de
gestion locative
de
logements sociaux
que
d'accession à la
propriété
(article 61 du projet de loi)
;
- de donner à la
Caisse de garantie
, le statut d'un
établissement public à caractère industriel et
commercial
(article 67 du projet de loi)
;
- de donner compétence à cette caisse pour gérer
deux fonds distincts
, l'un relatif à la garantie des prêts
locatifs et l'autre chargé de garantir les risques financiers prix par
les organismes HLM
(article 67 du projet de loi)
.
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Adopté par l'Assemblée nationale le 21 mars dernier, le projet de
loi qui vous est soumis est relatif à la solidarité et au
renouvellement urbains.
Avant d'aborder l'économie de ce projet de loi, la présentation
de ses nombreux articles et des amendements qu'elle vous propose, votre
commission a tenu à formuler -brièvement, mais fortement- deux
remarques préliminaires.
La première porte sur les conditions d'examen de ce texte
et sur
le délai imparti à notre commission, ainsi qu'aux deux
commissions saisies pour avis, pour statuer.
Le jour même du dépôt du projet de loi devant
l'Assemblée nationale -soit le 2 février- le Gouvernement a
décidé de recourir à la déclaration d'urgence.
Encore une fois
, donc -et encore une fois sur un texte majeur !- le
Parlement est privé de la possibilité d'un véritable
dialogue sur les dispositions proposées, et les citoyens privés
des améliorations que permet toujours le fonctionnement normal de la
navette entre les deux assemblées
. Mais cette règle tend
à devenir l'exception....
Une telle situation est d'autant plus inacceptable, dans le cas précis
du projet en cause, que certaines de ses dispositions ne sont appelées
à entrer en vigueur qu'en 2002 et que d'autres -attendues parfois depuis
des années, la dernière modification substantielle du code de
l'urbanisme datant de 1994 !- concernent des pans entiers de codes,
appelés à rester durablement en vigueur.
En réalité, le Gouvernement semble recourir à l'urgence
faute du courage et de la volonté politique nécessaires à
une véritable concertation avec les élus, nationaux comme
locaux.
Quant aux délais impartis au Sénat pour étudier ce texte,
ils sont extraordinairement brefs. Le projet de loi a été
adopté par l'Assemblée nationale le 21 mars dernier. Le
début de sa discussion en séance publique a été
fixé au 26 avril, soit juste après la fin de la période de
suspension des travaux de la Haute assemblée.
C'est donc le 5 avril, soit deux semaines après l'adoption du projet de
loi par les députés, que votre commission, désireuse de
laisser aux membres de la Haute Assemblée le temps de prendre
réellement connaissance de son rapport, a été
appelée à examiner ce texte essentiel. C'est dérisoire, eu
égard à la longueur (136 pages) de ce dispositif, à la
variété et à la technicité de son contenu.
Que reste-t-il, en vérité, des engagements pris, en 1997, par
la nouvelle majorité
? Que reste-t-il des instructions
données explicitement à tous les ministres -et en particulier au
ministre chargé des relations avec le Parlement- par le chef du
Gouvernement lors de son arrivée aux affaires, dans une circulaire du 6
juin 1997 publiée au Journal Officiel ?
" La durée de vie des textes est en constant raccourcissement
parce que, préparés et débattus avec une hâte
excessive, les imperfections qu'ils contiennent imposent des rectifications.
S'agissant des lois, vous vous efforcerez donc de laisser au Parlement le temps
de débattre.
Sauf urgence avérée, vous devrez prévoir des délais
d'examen par le Parlement sensiblement plus importants que ceux qui ont
été observés au cours des années passées.
J'ai donné en ce sens des instructions particulières au ministre
des relations avec le Parlement "
1(
*
)
.
La seconde observation de votre commission portera sur la démarche
-à son sens critiquable- qui a présidé à
l'élaboration de ce texte
. Sous couvert d'un projet
emblématique, qui trouverait son unité dans la seule
volonté politique qui le sous-tend, le Gouvernement a, en quelque sorte,
présenté au Parlement
plusieurs projets de loi en un seul
.
Le dispositif soumis au Parlement regroupe, en effet, des dispositions qui
intéressent -et parfois bouleversent sur des pans entiers- des codes
très divers : ceux de l'urbanisme, de la construction et l'habitation,
de la santé publique, le code général des
collectivités territoriales et le code général des
impôts.
Il modifie également d'autres textes majeurs, notamment :
- la loi n° 91-662 du 13 juillet 1991 d'orientation pour la
ville ;
- la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise
en oeuvre du pacte de relance pour la ville ;
- la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative à la
protection et au développement de la montagne ;
- la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à la
protection et à la mise en valeur du littoral ;
- la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des
transports intérieurs ;
- l'ordonnance n° 59-151 du 7 janvier 1959 relative à
l'organisation des transports de voyageurs dans la région parisienne.
Cette accumulation de modifications dans des domaines très variés
est préjudiciable à la lecture du texte, d'autant que les
députés y ont apporté des modifications nombreuses et des
ajouts importants.
En outre, le Gouvernement n'hésite pas à saisir l'occasion
offerte par la discussion de ce texte pour modifier
d'autres dispositions
importantes qui auraient, à elles seules, justifié le
dépôt d'un projet de loi spécifique, ou à tout le
moins, leur inscription dans le projet de loi initial
. C'est ainsi que les
articles 34 bis et 34 ter amendent substantiellement le régime des zones
franches urbaines qui résulte de la loi n° 96-987 du
14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance
pour la ville.
Un tel procédé a, au demeurant, déjà
été utilisé par le Gouvernement qui a, par exemple, tout
récemment, transposé a minima une directive postale à
l'occasion de la discussion de la loi n° 99-533 du 25 juin 1999
relative à l'aménagement et au développement durable du
territoire.
On ne légifère pas à marche forcée. Votre
rapporteur craint que le temps, selon l'adage, n'épargne guère ce
que les auteurs de ce projet de loi ont voulu faire sans lui...
PREMIÈRE PARTIE -
VUE D'ENSEMBLE SUR UN TEXTE DENSE,
A LA
COHÉRENCE PARFOIS INCERTAINE...
I. L'URBANISME
La
première partie du projet de loi (articles 1 à 24) est
consacrée d'une part, à une
réforme du régime
des documents d'urbanisme
et, d'autre part, à une
modification du
financement de l'urbanisme
.
La première section du Titre I (articles 1 à 20 sexies)
réforme le régime des documents d'urbanisme.
Elle tend, en particulier à :
- introduire un nouvel article " déclaratoire " au
début du code de l'urbanisme et détaille les règles
générales d'utilisation de l'espace ;
- substituer les "
schémas de cohérence
territoriale
" (SCT) aux schémas directeurs et les
"
plans locaux d'urbanisme
" (PLU) aux " plans
d'occupation des sols " (POS) ;
- enrichir le régime juridique des cartes communales ;
- modifier le régime des opérations d'aménagement et
des taxes d'urbanisme.
Si, en apparence, ce texte bouleverse l'économie générale
du code de l'urbanisme, il ne lui apporte, en réalité, que des
modifications ponctuelles
. En effet, le Gouvernement a choisi de
réécrire ou, pour mieux dire, de " redécouper "
les articles L.122-1 et suivants (régime du SCT) et L.123-1 et suivants
(régime du PLU) en y apportant des modifications dont les principales
sont les suivantes :
Refonte des articles " de principe " du code de l'urbanisme
L'article 1
er
du projet de loi modifie le contenu de l'article
L.121-1 du code de l'urbanisme qui détaille désormais les
principes généraux applicables à tous les documents
d'urbanisme (respect de la notion d'" aménagement durable ",
" économie du territoire " notamment).
Il est si peu normatif qu'en apparence, il semble inoffensif. Il traduit
cependant la vision " duale " du territoire, caractéristique
de la loi " Voynet ", qui oppose les espaces " urbains "
aux espaces " naturels " sans reconnaître la
spécificité de l'espace " rural ". En outre, il ne
change rien au principe " d'économie du territoire " qui
fonde, bien souvent, l'interprétation souvent extensive que les services
déconcentrés de l'Etat font du principe de
" constructibilité limitée ".
Création des SCT et des PLU
Les
schémas de cohérence territoriale
(
SCT
) tendent
à
gérer les problèmes d'urbanisme au niveau d'un
territoire
en y associant les questions de logement, de transport, de
commerce. Ils devront, en effet, être compatibles avec les plans locaux
de l'habitat (PLH), les plans de déplacement urbain (PDU) et les
schémas d'équipement commercial. Le texte initial du Gouvernement
entendait que les SCT soient généralisés à tout le
territoire. Pour ce faire, il prévoyait qu'il ne serait plus possible
d'ouvrir des zones " NA " (d'urbanisation future) dans les communes
qui ne relèveraient pas d'un SCT (même si elles ont un PLU).
L'Assemblée nationale a jugé irréaliste cette proposition,
qui limite le champ d'application à cette règle aux communes qui
sont inclues dans un périmètre de quinze kilomètres autour
des agglomérations françaises.
La " structure porteuse " du SCT sera désormais durable, afin
de ne pas la difficulté suscitée par la disparition des syndicats
qui ont créé les schémas directeurs et du fait de laquelle
au moins les deux tiers des 219 schémas directeurs actuels sont
obsolètes.
Le plan local d'urbanisme (PLU)
se substitue, dans le texte initial, au
POS. Cependant, alors que le POS pouvait être " partiel ", le
PLU s'appliquera nécessairement à tout le territoire d'une
commune. La procédure d'application du POS par anticipation est, quant
à elle, supprimée.
Le régime des " cartes communales " est aussi
modifié
. Le texte prévoit en effet, qu'une commune
dotée d'une carte communale pourra délivrer les permis de
construire en son nom propre, comme celles dotées d'un POS. On notera
cependant que, comme par le passé, la carte communale sera, selon le
texte, élaborée d'un commun accord par la commune et la DDE,
cette dernière pouvant, de ce fait, " verrouiller " ce
document.
La modification du régime des opérations d'aménagement
est plus symbolique que réelle. La transformation du régime des
taxes d'urbanisme est, quant à elle, beaucoup plus technique. Il
convient cependant d'observer que la diminution du produit de certaines taxes
locales (articles 23 et 24) ne fait l'objet d'aucune compensation.
Le projet de loi contient, en outre, quelques dispositions éparses et
néanmoins intéressantes, telles que la suppression de la
déclaration de travaux (qui était un " nid à
contentieux ") sur laquelle l'Assemblée nationale est intervenue,
estimant qu'une telle modification prévient les citoyens des garanties
qu'offre ce document.
En matière d'urbanisme, votre rapporteur a travaillé en
étroite concertation avec le rapporteur pour avis de la commission des
lois afin de renforcer l'insertion du dispositif dans le cadre constitué
par la loi de juin 1999 relative à la coopération intercommunale.
Il vous présentera plusieurs amendements tendant à
rapprocher
les structures chargées de l'élaboration des schémas de
cohérence territoriale de celles des organismes de coopération
intercommunale existants
.
En matière d'urbanisme, la Commission des Affaires économiques
vous propose de
préciser des notions
floues qui résultent
de l'article L.121-1 du code de l'urbanisme, susceptibles de servir de
fondement à nombre d'annulations contentieuses. Elle a également
souligné que :
-
la mixité sociale concerne aussi bien l'habitat urbain que
l'habitat
rural
;
-
les espaces du territoire ne se résument pas à deux
catégories simplistes
, les espaces
urbains
et les espaces
naturels
,
mais comprennent un continuum
qui va des espaces
naturels, urbains, périurbains aux espaces ruraux ;
- les directives territoriales d'aménagement
élaborées par l'Etat doivent également respecter ces
principes généraux.
La Commission des Affaires économiques a affirmé un
droit
à une constructibilité minimale
, dès lors que
l'application superposée des textes tels que les lois
" littoral " et " montagne " rendent, en apparence, toute
construction impossible. Il lui est apparu utile qu'en matière de
risques, l'Etat fournisse aux communes toutes les études dont il dispose
afin que ces collectivités n'aient plus qu'à réaliser des
études ponctuelles.
D'un point de vue général, votre commission a cherché
à renforcer les modalités de concertation, qu'il s'agisse de la
concertation avec le public lors de l'élaboration d'un projet urbain, ou
lors de la mise en oeuvre des dispositions de la loi d'orientation pour la
ville.
Dans le même esprit, elle a renforcé les pouvoirs de la commission
de conciliation en lui donnant le droit d'opérer en matière de
délivrance de permis de construire au nom de l'Etat. De la sorte,
l'administration ne pourra plus opposer des refus péremptoires aux
demandes des habitants.
En ce qui concerne les schémas de cohérence territoriale, la
Commission des Affaires économiques a :
- prévu qu'un projet communal sera élaboré sur la
base d'un
diagnostic
, avant que le successeur du plan d'occupation des
sols (POS) ne soit préparé, car la dimension du projet doit
primer sur la procédure ;
- supprimé la disposition interdisant d'ouvrir des terrains
à l'urbanisation en l'absence de SCT et la délimitation du
périmètre de 15 kilomètres autour des
agglomérations couvertes par un SCT qui apparaît arbitraire et,
partant, inapplicable.
Il vous est proposé de
conserver l'appellation de
" POS "
.
Votre commission juge, en outre, nécessaire que les cartes communales
soient élaborées par la commune seule et non pas dans le cadre
d'un accord entre la commune et le préfet.
La suppression du concept de " concession d'aménagement " a
entraîné de vives critiques. C'est pourquoi, il nous est apparu
préférable de remplacer cette appellation par celle de
" convention publique d'aménagement "
, tout en
prévoyant un dispositif assurant le parfait contrôle de la
collectivité locale sur l'aménageur.
En ce qui concerne la
montagne
, votre commission a tout d'abord
conservé l'ensemble des acquis du texte de l'Assemblée nationale.
Elle vous propose, en outre, de prévoir :
- une extension du régime des chalets d'alpage aux autres
bâtiments ruraux et aux granges de montagne ;
- la possibilité de permettre le changement d'affectation des
bâtiments en zone de montagne ;
- de prévoir la création de constructions à usage
industriel et artisanal intégrées à l'environnement ;
- la création de zones NB permettant le développement d'un
habitat individuel lorsque les zones de montagne sont historiquement
mitées.
En ce qui concerne la loi "
littoral
",
plusieurs
amendements
vous seront proposés
afin de protéger
l'environnement et de permettre une
gestion dynamique des sites
. La loi
est, en effet, si restrictive qu'elle n'autorise même pas l'installation
de sanitaires sur le littoral.
II. LA POLITIQUE DE LA VILLE
Le titre
II du projet de loi s'intitule " Conforter la politique de la ville et
s'articule autour de deux sections :
- l'une relative à la solidarité entre les communes en
matière d'habitat ;
- l'autre relative à la protection de l'acquéreur et au
régime des copropriétés.
Dans cette seconde section, votre Commission des Affaires économiques a
délégué à la Commission des Lois, saisie pour avis,
l'examen de la plupart des dispositions proposées parce qu'elles
concernaient le régime des contrats de vente immobilier, ou qu'elles
proposaient de modifier des dispositions de la loi du 10 juillet 1965
sur le statut des copropriétés.
S'agissant des dispositions relatives à la solidarité entre les
communes en matière d'habitat, les articles 25 à 29 du
projet de loi modifient en profondeur le dispositif mis en place par la loi
n° 91-662 du 13 juillet 1991 dite loi d'orientation pour la
ville.
On peut brièvement rappeler que cette loi prévoyait des
dispositions spécifiques pour les agglomérations de plus de
200.000 habitants, en faisant obligation aux communes de plus de 3.500
habitants, situées dans ces agglomérations, de prendre des
mesures permettant l'acquisition de terrains ou de locaux nécessaires
à la réalisation de logements sociaux, lorsqu'elles :
- comptent moins de 20 % de logements sociaux ;
- et moins de 18 % de bénéficiaires d'aides
personnelles (rapportés au nombre de résidences principales).
La commune pouvait remplir cette obligation soit sur la base d'un programme
local de l'habitat (PLH) adopté en prenant un engagement triennal de
réalisation d'actions foncières et d'acquisitions
immobilières nécessaires à la réalisation d'un
certain nombre de logements sociaux, soit par le versement d'une contribution
financière à un -ou des- organismes désignés par le
préfet et habilités à réaliser des acquisitions
foncières et immobilières ou des logements sociaux sur le
territoire de la commune.
Cet engagement triennal devait être renouvelé si le taux de
logement social restait inférieur à 20 %.
Compte tenu des difficultés d'application qui se sont faites jour, des
assouplissements ont été apportés pour permettre la mise
en oeuvre effective du dispositif.
Le bilan d'application élaboré par le ministère de
l'équipement, du logement et des transports en avril 1998 est loin
d'être négatif et montre que cette loi a permis de mobiliser les
élus locaux et nombre d'acteurs de terrain fondamentaux sur les aspects
de la politique de la ville, tels que l'exigence de la mixité sociale ou
la lutte contre les ségrégations spatiales.
Plus précisément, le programme local de l'habitat (PLH)
conçu pour être le véritable outil des politiques locales
de l'habitat, afin de favoriser une répartition équilibrée
et diversifiée de l'offre de logements a été largement
utilisé. Selon le bilan précité, 470 PLH ont
été projetés ou mis en chantier et 288 ont
été signés.
Sur ce total, 130 PLH ont été réalisés dans le
cadre des obligations des agglomérations de plus de
200.000 habitants, dont 80 en région Ile-de-France.
S'agissant des objectifs de construction de logements sociaux, les objectifs
quantitatifs ont globalement été atteints :
- sur les 1.170 communes que comptent les
29 agglomérations de plus de 200.000 habitants, 209
étaient soumises à l'obligation de réaliser des logements
sociaux, et 201 communes ont répondu à cette obligation dans le
cadre d'un PLH tandis que 8 communes ont préféré payer la
contribution substitutive ;
- les obligations de réaliser des logements sociaux pour la
période 1995-1997 étaient de 22.400 logements dont 10.600
à Paris et 7.300 pour le reste de la région. Sur cette base,
70 % ont atteint leurs objectifs dont 80 % en Ile de France, mais
27 communes n'ont réalisé aucun logement social.
Au total, 28.340 logements sociaux ont été
réalisés qui se répartissent ainsi :
|
PLA |
Dt PLATS |
PLI |
Autres |
Total |
France entière |
24 200 |
3 120 |
3 520 |
620 |
28 340 |
Paris |
10 580 |
1 120 |
2 650 |
120 |
13 350 |
Reste IDF |
9 040 |
1 520 |
660 |
270 |
9 970 |
Selon le
rapport précité, si le résultat peut être
considéré comme modeste, car il représente seulement
1 % du parc de logements sociaux des 27 agglomérations de + de
200.000 habitants, il représente néanmoins un peu plus de
10 % de la construction de logements sociaux réalisée sur
l'ensemble du territoire, pendant la même période.
On peut donc considérer que l'objectif de mixité sociale est
désormais un objectif partagé par une très grande
majorité des élus locaux.
Le dispositif du projet de loi se veut tout à la fois plus
contraignant dans les objectifs et surtout plus restrictif sur les moyens
à employer
pour les atteindre.
D'une part, il élargit le champ d'application du dispositif à
l'ensemble des aires urbaines de plus de 50.000 habitants, sans d'ailleurs
tenir compte de l'existence de structures intercommunales existantes, notamment
celles récemment mises en place depuis l'adoption de la loi
n° 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement de
l'intercommunalité.
Il maintient, pour ces agglomérations, un objectif de réalisation
de 20 % de logements sociaux mais en étant beaucoup plus restrictif
sur la définition des logements sociaux éligibles à ce
dispositif et en ne prenant plus en compte un critère lié au
pourcentage de personnes bénéficiant d'aides au logement.
Ceci a pour conséquence, notamment, de faire disparaître tout le
parc social de fait ainsi que l'accession à la propriété.
Le projet de loi supprime le dispositif alternatif laissant le choix aux
communes de construire ou de verser une participation financière, en
rendant obligatoire le versement d'une contribution qui devra accompagner la
réalisation de logements sociaux selon des objectifs calculés sur
une période triennale. Le montant de cette contribution est
diminué des sommes engagées par la commune pour la
réalisation desdits logements sociaux.
Le projet de loi, en outre, renforce considérablement le dispositif de
substitution, qui autorise le préfet, après avoir constaté
la carence d'une commune à faire construire des logements sociaux en
lieu et place des collectivités locales.
L'Assemblée nationale a maintenu, dans ses principes le dispositif
actuel en apportant les modifications suivantes qui peuvent être ainsi
brièvement présentées :
- s'agissant des communes à prendre en compte, elle a
instauré un seuil distinct pour l'Ile-de-France et les autres
régions ;
- elle a élargi la liste des logements locatifs sociaux pouvant
être pris en compte, notamment les logements privés
réhabilités avec des subventions de l'ANAH ;
- elle a prévu que le prélèvement serait
modulé en fonction du potentiel fiscal des communes, dès lors
qu'il est supérieur à 5.000 francs par habitant ;
- elle a enfin rendu automatique le pouvoir de substitution du
préfet, après que celui-ci aura constaté la carence de la
collectivité locale.
Votre commission
entend, sur ce dispositif,
réaffirmer
qu'elle est résolument favorable à l'objectif de mixité
sociale et à la lutte contre la ségrégation spatiale et
les ghettos
.
Elle juge, sur ce dernier point, que l'Etat doit consentir un effort financier
important pour soutenir une politique plus offensive en matière de
restructuration.
S'agissant des articles 25 à 29 eux-mêmes, le dispositif qui
vous est proposé :
- entend
s'appuyer sur les structures intercommunales
compétentes
en matière de logement, lorsqu'elles
existent ;
-
fait le choix d'un développement diversifié du logement
social en prenant en compte l'accession sociale à la
propriété. Elle récuse ainsi le principe d'un parcours
résidentiel uniforme et standardisé n'autorisant aux populations
modestes ou défavorisées que l'unique solution d'un logement
locatif social
.
Ce souci est partagé par beaucoup d'élus et d'acteurs locaux
intervenant en matière d'habitat et on peut citer les propos de
Mme Marie-Thérèse Lienemann, présidente du
Comité national de l'habitat lors de la réunion
plénière du 13 janvier 2000, au cours de laquelle le
projet de loi a été examiné :
"
Autre grand sujet, la question de l'accession sociale. Cela nous
ramène aussi un peu à la question du logement social. Je crois
que c'est une erreur de considérer que le logement social est simplement
un logement locatif. Je le dis d'autant plus que la tendance de Bercy, c'est de
considérer que les pauvres et les moyens pauvres doivent vivre selon
leurs moyens, en restant locataires, alors que les autres, les gens
sérieux peuvent être accédants.
Mais il y a un petit bémol qui est l'aspiration du peuple, car la
première aspiration du peuple, c'est d'accéder à la
propriété.
Alors, avoir toute une loi qui vise à limiter ou à conjurer
l'accession sociale me paraît être une aberration. Je
considère qu'il y a une aspiration de nos sociétés
contemporaines et je ne vois pas pourquoi on ne se doterait pas d'outil qui
garantisse cette aspiration
".
- Votre commission vous propose également d'inscrire les
obligations imposées en matière de logements sociaux dans un
contrat
d'objectifs
signé avec l'Etat, et qui
s'insère dans le cadre des orientations arrêtées notamment
par le schéma de cohérence territoriale.
- Elle
récuse
enfin, avec la plus grande force,
la mise
en place d'un dispositif coercitif et contraignant
permettant au
préfet de se substituer à la commune ou à
l'établissement de coopération intercommunale. Au demeurant, elle
considère que les moyens ainsi envisagés portent atteinte au
principe de la libre autonomie des communes, et qu'ils ne peuvent être
acceptés en l'état.
III. LES TRANSPORTS
Le Titre
III du projet de loi comporte quatre sections.
Il s'agit, tout d'abord, de mettre la politique des déplacements en
cohérence avec les nouveaux mécanismes d'urbanisme.
La première section du titre III (articles 35 à 40 quater) traite
ainsi des
plans de déplacements urbains
dont les auteurs de la
réforme souhaitent qu'ils s'articulent avec les nouveaux
schémas de cohérence territoriale
.
En permettant que l'établissement chargé de l'élaboration
du schéma de cohérence territoriale se voie, aussi, confier, sous
certaines conditions, le soin de mettre au point le plan de déplacements
urbains, le projet tend à articuler des logiques de desserte qui ne
concernaient jusqu'à présent que l'agglomération urbaine
et la prise en compte des mobilités à partir ou en direction des
territoires périurbains.
En second lieu, les dispositions nouvelles insistent sur la politique de
stationnement
, de
répartition de la voirie
entre les
différents usagers et de
livraison de marchandises
dans
l'agglomération. Ces orientations constitueront les priorités des
plans de déplacements urbains.
Ces différentes mesures s'inscrivent dans une perspective de
développement des transports collectifs, de limitation des
déplacements en voiture individuelle afin d'améliorer le cadre de
vie et la qualité de l'environnement ainsi que de reconquête des
centre-villes.
La deuxième section du titre III (articles 41 à 43) tend
à promouvoir la coopération entre autorités
administratives de transport en vue de faciliter la
desserte du territoire
périurbain
. Le projet propose, ainsi, la création de
syndicats mixtes
de transport
qui associeraient la région,
les départements et, le cas échéant, des autorités
organisatrices en matière de transport urbain afin que ces
différents échelons territoriaux puissent coordonner
l'organisation de leurs services de transport, mettre en place ensemble un
dispositif d'information à l'intention des usagers et harmoniser, dans
la mesure du possible, tarifications et titres de déplacement.
La troisième section du titre III (articles 44 à 50) a pour
principal objet de faire entrer la
région Ile-de-France
dans le
syndicat des transports parisiens
(STP), nouvellement
dénommé syndicat des transports d'Ile-de-France, chargé,
aux termes de l'ordonnance n° 59-151 du 7 janvier 1959,
d'organiser les transports de voyageurs dans la région parisienne.
Cette ouverture de l'actuel STP à la région ne manquera pas de
susciter une petite " révolution culturelle " au sein d'un
organisme qui associe jusqu'à présent, sur un pied
d'égalité, représentants de l'Etat d'une part,
départements de l'Ile-de-France et ville de Paris d'autre part, à
l'exclusion de la région qui, pourtant, participe au financement des
infrastructures de transport dans le cadre du contrat de plan
Etat-région.
Il convenait donc de revenir sur une anomalie historique. La région
Ile-de-France participera désormais au conseil d'administration du
syndicat (sur un pied d'égalité avec la ville de Paris) et
contribuera, en corollaire, aux charges d'exploitation.
Une autre disposition fondamentale du projet de loi consiste à faire
désormais transiter les concours financiers de l'Etat et des autres
collectivités territoriales aux charges d'exploitation de la RATP et
autres services de transport, par le budget du nouveau syndicat des transports
d'Ile-de-France (STIF).
Ce mécanisme se substituera à l'actuel système dans lequel
une indemnité compensatrice est versée, en fin d'exercice, par
l'Etat aux entreprises de transport, sous forme d'une subvention
d'équilibre, après constatation du déficit d'exploitation.
La mesure constituera une autre " révolution culturelle " pour
la RATP qui se verra assigner des objectifs d'amélioration de gestion et
de qualité du service dans le cadre d'un contrat pluriannuel avec le
STIF.
Votre commission a constaté qu'un large consensus prévalait sur
cette réforme, tant de la part du syndicat des transports parisiens et
de la région Ile-de-France que de celle de la RATP -direction et
organisations représentatives du personnel confondues-, engagée
depuis plusieurs années dans une politique de modernisation de sa
gestion et qui appelle de ses voeux une véritable
" responsabilisation ".
Le projet de loi institue, aussi, aux côtés du STIF, un
"
comité des partenaires du transport public
".
Cette instance serait consultée sur l'offre et la qualité des
services de transport de personnes relevant du syndicat des transports
d'Ile-de-France. Son avis pourra également être requis
ponctuellement par ce même syndicat sur tout autre domaine relatif aux
transports en Ile-de-France.
Présidé par le président du conseil régional
d'Ile-de-France ou son représentant, il serait composé de
représentants :
- des organisations syndicales du secteur des transports collectifs ;
- des organisations professionnelles patronales et des organismes
consulaires ;
- des associations d'usagers des transports collectifs ;
- des collectivités participant au financement des services de
transport de voyageurs en Ile-de-France et non membres du syndicat.
Enfin, la section 4 du titre III du projet de loi (articles 51
à 59
bis
) porte sur
la régionalisation des
transports collectifs d'intérêt régional
et
principalement des services ferroviaires.
Il convient de rappeler que la décentralisation du transport ferroviaire
régional s'est effectuée en plusieurs étapes.
Envisagée, dès 1974, par M. Olivier Guichard, elle a fait
l'objet d'une expérience intéressante dans la région
Nord-Pas-de-Calais à la fin de la décennie, avant que la loi
d'orientation des transports intérieurs du
30 décembre 1982 n'ouvre, pour la SNCF et les régions,
la possibilité de signer des conventions.
C'est, notamment, à la suite du rapport des sénateurs Hubert
Haenel et Claude Belot en 1993-1994
2(
*
)
, que
la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation
pour l'aménagement et le développement du territoire a
organisé une expérimentation de régionalisation.
En application de son article 67 et de l'article 15 de la loi
n° 97-135 du 13 février 1997 portant création
de l'établissement public " Réseau ferré de
France ", une expérimentation s'est ainsi engagée, d'abord
dans six puis sept régions volontaires (Alsace, Centre,
Nord-Pas-de-Calais, Pays de la Loire, Provence -Alpes-Côte d'Azur et
Rhône-Alpes, Limousin).
L'expérimentation devait s'achever le 31 décembre 1999.
Elle a été prolongée de deux ans par
l'article 21 de la loi n° 99-533 du 25 juin 1999
d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du
territoire.
Si l'on fait abstraction de l'expérience conduite, depuis 1997, dans
sept régions, l'Etat est encore, aujourd'hui, l'autorité
organisatrice du transport ferroviaire d'intérêt
régional ; la SNCF est, quant à elle, l'opérateur
d'un service dit de référence dans lequel les régions sont
appelées à assurer un financement complémentaire pour les
prestations souhaitées dans leur ressort territorial.
La LOTI a prévu que l'organisation des liaisons ferroviaires inscrites
au plan régional des transports ferait l'objet de conventions entre la
SNCF et les régions (article 22).
Cette faculté a constitué le premier engagement des
régions dans le domaine ferroviaire.
Cette expérimentation a posé les principes d'un transfert de
compétences de l'Etat vers les régions pour les transports
collectifs d'intérêt régional.
La section 4 du projet de loi propose de
transférer
à
l'ensemble des régions, le 1
er
janvier 2002, les
compétences
que détient l'Etat en qualité
d'autorité organisatrice du
transport ferroviaire de voyageurs
d'intérêt régional
.
Ce transfert de charges sera compensé par le versement, par l'Etat,
d'une compensation annuelle indexée.
Les régions concluraient, chacune, une convention avec la SNCF, fixant
les conditions d'exploitation et de financement des services relevant de la
compétence régionale.
Telles sont les dispositions essentielles de cette section qui prévoit,
aussi, que les régions pourront signer une convention avec une
région limitrophe pour les dessertes passant par
deux régions. De même, ces collectivités auront, le
cas échéant, la faculté de conclure une convention avec
une autorité organisatrice de l'Etat voisin pour assurer une liaison
régionale transfrontalière.
Un bilan de ce transfert devrait, enfin, être établi cinq ans
après l'entrée en vigueur de la réforme.
Le transport ferroviaire régional peut être, aujourd'hui,
résumé en quelques chiffres :
- 500.000 voyageurs par jour, soit 60 % des utilisateurs de la
SNCF, hors Ile-de-France ;
- 5.000 trains TER par jour ;
- 3.000 gares ou points d'arrêt ferroviaire ;
- 4.200 points d'arrêt routier SNCF ;
- 300 entreprises routières associées ;
- 80 gares desservies par taxi TER ;
- 800 cars TER et 1.000 conducteurs.
Cette activité développe un chiffre d'affaires d'environ
9 milliards de francs et occupe 20.000 emplois.
La SNCF a mené des études statistiques sur les utilisateurs des
TER. Selon celles-ci, 56 % des déplacements sont
réalisés par des moins de 26 ans, dont 30 % par des
20-25 ans, 39 % des clients ayant entre 26 et 59 ans.
S'agissant des motifs des déplacements, on a relevé :
- 37 % de trajets " domicile-études " ;
- 29 % de trajets " domicile-travail " ;
- 7 % de trajets de professionnels non réguliers,
- 18 % de trajets de loisirs, visites à parents ou amis.
En ce qui concerne l'origine géographique des usagers, les
enquêtes ont montré que 33 % d'entre eux venaient des centres
villes, 43 % des banlieues urbaines, 17 % des communes rurales
périurbaines et 2 % du territoire rural.
En 1998, l'Etat a versé 2,813 milliards de francs aux
régions expérimentatrices.
Celles-ci ont prévu
d'investir
6 milliards de francs
dans la nouvelle
génération de trains TER et dans les rénovations de
matériels. Aujourd'hui, cela représente 55 automoteurs TER,
80 TER à 2 niveaux, 83 autorails TER et plus de
200 voitures rénovées.
On relève que
deux cents rénovations de gares
ont,
déjà, été réalisées en partenariat
avec les régions, les départements et les communes (70 gares
en région Centre, 25 en PACA, 28 en Rhône-Alpes, 35 en
Nord-Pas-de-Calais, 10 en Alsace).
On estime que l'expérimentation a permis une augmentation de 6 % du
nombre de trains en 1998, contre 2,3 % dans les régions
non-expérimentales. On citera à titre d'exemples :
- la région Alsace : 8 allers/retours supplémentaires
par jour sur la ligne Strasbourg-Mulhouse, depuis le
30 août 1998, soit 16 dessertes quotidiennes ;
- la région Nord-Pas-de-Calais : 15 trains
supplémentaires par jour sur la ligne Lille-Aulnoye-Jeumont/Hirson,
depuis le 29 novembre 1998 ; l'offre est accentuée
globalement de 43 % et comprend désormais 18 dessertes
quotidiennes ;
- la région PACA : 23 trains TER supplémentaires
depuis le 29 novembre dernier entre Marseille-Hyères, Les
Arcs-Menton, Marseille-Briançon et Marseille-Avignon (plus de
300 trains circulent désormais chaque jour sur ces lignes).
De nouveaux tarifs ont été créés pour les
déplacements quotidiens " domicile/travail " (abonnements de
travail régional au-delà de 75 km en PACA et Pays de la
Loire) et " domicile/études " (le " Campus-pass " en
Rhône-Alpes) mais aussi, de plus en plus, pour les déplacements
occasionnels " privé/loisirs " (forfaits week-end en Alsace,
billets TER avec une forte réduction pour le Printemps de Bourges en
région Centre, la Braderie de Lille en Nord-Pas-de-Calais, ...).
Des tarifications spécifiques pour les demandeurs d'emploi sont, aussi,
à signaler en Pays de la Loire ou en Limousin.
Plus globalement, la SNCF s'est montrée très satisfaite de
l'expérimentation en termes de niveau d'activité.
Le trafic et les recettes ont progressé sensiblement plus vite,
notamment durant les deux premières années, dans les
régions expérimentatrices (
avec des taux de croissance annuels
de 4 à 5 %).
Pour les six premières, on observe
qu'entre les résultats de 1996 et ceux de 1999, le trafic 1999 a
augmenté de 12,4 % pour les premières contre 6,2 % pour les
autres régions (moyenne + 9,3 %). L'évolution est la
même pour les recettes, pour lesquelles les progressions sont
respectivement de + 12 % et de + 6,4 % (moyenne + 9,3
%).
Votre commission juge, tout d'abord, raisonnable le choix de
la date du
1
er
janvier 2002
pour la généralisation
de la régionalisation du transport ferroviaire régional.
Cette échéance a été acceptée par
l'association représentative de toutes nos régions. Le
Gouvernement et l'Assemblée nationale en sont tombés d'accord. Il
n'y a plus lieu d'y revenir.
En revanche, votre commission a estimé que la ressource prévue
par le projet de loi au titre de la
compensation financière
des
régions était
très insuffisante.
En ne prenant en compte que les déficits courants d'exploitation qui
seront constatés en 2000 et la dotation nécessaire au
renouvellement du matériel roulant,
la compensation envisagée
fait l'impasse sur un certain nombre de charges,
notamment l'indispensable
modernisation des gares régionales (ce qui ne se limite pas aux frais
d'entretien des gares existantes) et le manque à gagner
généré par les tarifs sociaux décidés et mis
en oeuvre par l'Etat. Sur ce dernier point, il importe, en outre, que toute
charge nouvelle créée par l'Etat et liée à une
modification dans le régime des tarifs sociaux entraîne une
révision de la compensation.
Par ailleurs, les
modalités d'évolution
prévues
pour la compensation sont, elles aussi, apparues comme
sans rapport avec une
vision dynamique du développement du service public ferroviaire
régional
. Ce que chacun semble pourtant souhaiter...
L'argument selon lequel, incluse dans la dotation générale de
décentralisation, la compensation doit obéir au régime
d'indexation de cette dernière ne semble pas opérant, en
l'occurrence. Pour votre commission, l'indexation de la compensation
financière doit, évidemment,
s'aligner
sur
l'évolution nominale du produit intérieur brut
.
Enfin, il n'est pas logique que l'effort d'investissement des régions
dans le nouveau matériel ferroviaire génère des recettes
indues au profit des autres collectivités territoriales par le biais de
la taxe professionnelle.
Il vous sera, ainsi, demandé d'exonérer de taxe professionnelle
les véhicules ferroviaires destinés au transport régional
de voyageurs dont l'acquisition est financée par une région.
Tous les amendements de votre commission s'inscrivent dans
une
volonté de compensation équitable des charges nouvelles qui
seront supportées par les régions
, dont on sait qu'elles
seront jugées sur leur capacité à améliorer et
à développer le service public ferroviaire régional.
Ne pas donner aux régions les moyens véritables de leurs
ambitions pourrait déboucher sur l'échec pur et simple de la
régionalisation.
IV. L'HABITAT
Le
titre IV
du projet de loi s'intitule
" Assurer une offre
diversifiée de l'habitat "
et il regroupe une
très
grande variété de dispositions
, dont certaines ont
été déléguées, aux commissions des Lois et
des Affaires sociales saisies pour avis sur ce texte.
Il en est ainsi des dispositions de la section 3 relative à
l'insalubrité et à l'état de péril, ainsi que des
dispositions de la section 4 relatives aux relations bailleurs-locataires
dans le cadre de la loi du 6 juillet 1989.
Il n'est, au demeurant, pas possible de présenter une position globale
de la commission sur un ensemble de dispositions qui traitent de sujets aussi
dispersés que la pérennisation du logement locatif social, le
contrôle et le redressement des organismes d'HLM, ou encore la
concertation dans le parc locatif social.
S'agissant des articles relatifs aux compétences des organismes d'HLM,
les modifications proposées renforcent la notion de
complémentarité entre la gestion locative des logements sociaux
et les opérations d'accession à la propriété
.
Ainsi, elle privilégie, s'agissant du mécanisme de garantie des
organismes d'HLM,
le principe d'une caisse de garantie unique, gérant
deux fonds distincts
.
La commission a, enfin, étudié toutes ces mesures dans un
état d'esprit constructif en cherchant, autant que faire se peut,
à simplifier les procédures, renforcer la cohérence
interne des dispositifs, et responsabiliser les acteurs locaux
compétents en matière de logements.
1
Circulaire du 6 juin 1997 relative
à
l'organisation du travail gouvernemental - Journal officiel du 7 juin 1997.
2
Rapport de la commission d'enquête chargée d'examiner
l'évolution de la situation financière de la SNCF, les conditions
dans lesquelles cette société remplit ses missions de service
public, les relations qu'elle entretient avec les collectivités locales
et son rôle en matière d'aménagement du territoire,
crééé en vertu d'une résolution adoptée par
le Sénat le 20 décembre 1992.