Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative à la validation législative d'un examen professionnel d'accès au grade de premier surveillant des services extérieurs de l'administration pénitentiaire
OTHILY (Georges)
RAPPORT 288 (1999-2000) - commission des lois
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Table des matières
- LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION
-
INTRODUCTION
- I. L'EXAMEN PROFESSIONNEL ORGANISÉ EN 1991 POUR L'ACCÈS AU GRADE DE PREMIER SURVEILLANT DE L'ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE A ÉTÉ ANNULÉ PAR LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE EN RAISON DE LA DÉSIGNATION D'EXAMINATEURS EN DEHORS DES MEMBRES DU JURY ET DE L'ABSENCE DE PÉRÉQUATION DES NOTES ATTRIBUÉES AUX CANDIDATS.
- II. LES CONSÉQUENCES PRATIQUES DE L'ANNULATION DE L'EXAMEN PROFESSIONNEL DE 1991 SOULÈVENT DE NOMBREUSES DIFFICULTÉS.
- III. LA POSSIBILITÉ DE PROCÉDER À UNE VALIDATION LÉGISLATIVE DOIT ÊTRE EXAMINÉE AU REGARD DE LA JURISPRUDENCE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
- TABLEAU COMPARATIF
N°
288
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000
Annexe au procès-verbal de la séance du 29 mars 2000
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de loi, ADOPTÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, relative à la validation législative d'un examen professionnel d'accès au grade de premier surveillant des services extérieurs de l'administration pénitentiaire ,
Par M.
Georges OTHILY,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : MM. Jacques Larché, président ; René-Georges Laurin, Mme Dinah Derycke, MM. Pierre Fauchon, Charles Jolibois, Georges Othily, Michel Duffour, vice-présidents ; Patrice Gélard, Jean-Pierre Schosteck, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, secrétaires ; Nicolas About, Guy Allouche, Jean-Paul Amoudry, Robert Badinter, José Balarello, Jean-Pierre Bel, Christian Bonnet, Robert Bret, Guy-Pierre Cabanel, Charles Ceccaldi-Raynaud, Marcel Charmant, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye, Gérard Deriot, Gaston Flosse, Yves Fréville, René Garrec, Paul Girod, Daniel Hoeffel, Jean-François Humbert, Pierre Jarlier, Lucien Lanier, Simon Loueckhote, François Marc, Bernard Murat, Jacques Peyrat, Jean-Claude Peyronnet, Henri de Richemont, Simon Sutour, Alex Türk, Maurice Ulrich.
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les numéros
:
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Fonctionnaires et agents publics. |
LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION
Réunie le mercredi 29 mars 2000 sous la
présidence de
M. Jacques Larché, président, la commission des Lois du
Sénat a examiné, sur le rapport de M. Georges Othily, la
proposition n° 245 (1999-2000), adoptée par l'Assemblée
nationale, relative à la validation législative d'un examen
professionnel d'accès au grade de premier surveillant des services
extérieurs de l'administration pénitentiaire.
Cette proposition de loi comporte un article unique tendant à valider
les promotions au grade de premier surveillant de l'administration
pénitentiaire consécutives à un examen professionnel
organisé en 1991 et annulé depuis lors par la juridiction
administrative en raison de la désignation d'examinateurs en dehors des
membres du jury et de l'absence de péréquation des notes, le
respect du principe d'égalité entre les candidats n'ayant pu de
ce fait être assuré.
Les conséquences pratiques de cette annulation soulèvent de
nombreuses difficultés en remettant en cause la carrière des
181 fonctionnaires concernés, l'administration étant en
principe tenue d'organiser un nouvel examen professionnel se substituant
à celui qui a été annulé.
Cette situation conduit à envisager une mesure de validation
législative qui apparaît possible au regard de la jurisprudence du
Conseil constitutionnel, car on peut considérer que les décisions
de justice concernées ne sont pas définitives dans la mesure
où une procédure de tierce opposition a été
engagée par certains agents dont la promotion a été
annulée, et la validation se justifie par un motif
d'intérêt général.
Suivant la proposition de son rapporteur, la commission a adopté la
proposition de loi
sans modification.
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Le Sénat est aujourd'hui appelé à examiner une proposition
de loi de M. André Gérin, député,
adoptée sans modification par l'Assemblée nationale le
29 février 2000, relative à la validation
législative d'un examen professionnel d'accès au grade de premier
surveillant des services extérieurs de l'administration
pénitentiaire.
Cette proposition de loi comporte un article unique tendant à valider
les promotions au grade de premier surveillant de l'administration
pénitentiaire consécutives à un examen professionnel
organisé en 1991, qui ont depuis lors été annulées
par la juridiction administrative.
I. L'EXAMEN PROFESSIONNEL ORGANISÉ EN 1991 POUR L'ACCÈS AU GRADE DE PREMIER SURVEILLANT DE L'ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE A ÉTÉ ANNULÉ PAR LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE EN RAISON DE LA DÉSIGNATION D'EXAMINATEURS EN DEHORS DES MEMBRES DU JURY ET DE L'ABSENCE DE PÉRÉQUATION DES NOTES ATTRIBUÉES AUX CANDIDATS.
L'examen
professionnel d'accès au grade de premier surveillant (transformé
en concours interne en 1993) constitue une voie de
promotion interne
au
sein du corps des surveillants de l'administration pénitentiaire.
A l'issue de l'
organisation de cet examen professionnel au titre de la
session 1991-1992
, une liste d'aptitude aux fonctions de premier
surveillant a été établie par un arrêté du
ministre de la justice daté du 10 avril 1992, puis
181
fonctionnaires ont été promus
sur le fondement de cet
arrêté, les uns à compter du 1
er
juillet 1992 et les autres à compter du 1
er
mars 1993, par des décisions du directeur de l'administration
pénitentiaire datées respectivement des 4 mai et
2 décembre 1992.
Cependant, ces décisions ont été contestées devant
la juridiction administrative par certaines organisations syndicales de
personnels de l'administration pénitentiaire. Ce contentieux a
débouché sur
l'annulation des décisions litigieuses par
deux jugements du Tribunal administratif de Paris des 20 mai et
1
er
juillet 1997, confirmés par deux arrêts
de la Cour administrative d'appel de Paris du 4 juin 1998.
Ces jugements sont fondés sur la méconnaissance des dispositions
du dernier alinéa de l'article 20 de la loi n° 84-16 du
11 janvier 1984 portant statut général de la fonction
publique de l'Etat, aux termes duquel :
" Le jury peut, si
nécessaire, et pour toute épreuve, se constituer en groupes
d'examinateurs. Toutefois, afin d'assurer l'égalité de notation
des candidats, le jury opère, s'il y a lieu, la
péréquation des notes attribuées par chaque groupe
d'examinateurs et procède à la délibération
finale ".
La Cour administrative d'appel de Paris a en effet constaté :
- d'une part, que les épreuves avaient été notées
par des groupes d'examinateurs dont seul le président était un
membre du jury
1(
*
)
, alors que les membres de ces
groupes d'examinateurs auraient dû être désignés au
sein du jury ;
- et d'autre part, qu'il ne ressortait pas des mentions des
procès-verbaux des réunions du jury que le jury aurait
procédé à une
péréquation des notes
attribuées par chaque groupe d'examinateurs, alors qu'il y avait lieu de
le faire.
Dès lors, la Cour a considéré que
la constitution de
quatorze groupes d'examinateurs, eu égard aux modalités retenues,
n'avait pas permis d'assurer le respect du principe d'égalité
entre les candidats
. Elle a donc confirmé l'annulation des
promotions au grade de premier surveillant consécutives à
l'examen professionnel de 1991, qui avait été prononcée
par le Tribunal administratif de Paris.
Il est à souligner que cette jurisprudence a conduit le Gouvernement
à proposer au Parlement de régulariser
les promotions
au
grade de premier surveillant
consécutives au concours interne
organisé en 1997
, qui risquaient d'être annulées par le
juge administratif pour les mêmes raisons. Ces promotions
ont
ainsi déjà
été validées
par
l'article 5 de la loi n° 99-957 du 22 novembre 1999
portant sur diverses professions relevant du ministère de la justice, la
procédure civile et le droit comptable. En outre, les modalités
d'organisation du concours interne d'accès au grade de premier
surveillant ont désormais été réformées afin
de prendre en compte la jurisprudence relative à l'examen professionnel
de 1991.
Reste néanmoins posé le problème résultant des
conséquences pratiques de l'annulation de ce dernier examen, alors que
près de huit années se sont écoulées depuis les
promotions des agents intéressés.
II. LES CONSÉQUENCES PRATIQUES DE L'ANNULATION DE L'EXAMEN PROFESSIONNEL DE 1991 SOULÈVENT DE NOMBREUSES DIFFICULTÉS.
Les
décisions précitées de la Cour administrative d'appel de
Paris du 4 juin 1998 ont pour conséquence de
remettre en cause la
carrière des 181 fonctionnaires concernés
du fait de la
perte du bénéfice de leur nomination au grade de premier
surveillant.
Pour exécuter ces décisions,
l'administration est en principe
tenue d'organiser un nouvel examen professionnel se substituant à celui
qui a été annulé
. S'agissant de l'annulation d'un
concours organisé en vue d'une promotion de grade au sein d'un corps, la
jurisprudence administrative impose en effet l'organisation d'un nouveau
concours afin de ne pas priver les fonctionnaires concernés de leur
droit à un déroulement normal de carrière
2(
*
)
.
Trois cas de figure peuvent se présenter :
- Le plus simple concerne les agents qui avaient été reçus
à l'examen annulé et qui seraient également reçus
au nouvel examen ; ces fonctionnaires devraient être renommés
au grade de premier surveillant à la date d'effet de l'examen
professionnel de la session 1991-1992.
- Le deuxième cas concerne les agents qui n'avaient pas
été reçus à l'examen annulé et qui seraient
reçus au nouvel examen ; ces fonctionnaires devraient être
nommés au grade de premier surveillant à la date d'effet de
l'examen professionnel de 1991-1992 et leur carrière devrait être
reconstituée en conséquence.
- Le troisième cas concerne les agents qui avaient été
reçus à l'examen annulé et qui ne seraient pas
reçus au nouvel examen. Ces fonctionnaires perdraient le
bénéfice de leur promotion au grade de premier surveillant et
éventuellement d'une promotion ultérieure au grade
supérieur de surveillant-chef ; leur carrière devrait donc
être reconstituée dans les grades de surveillant et surveillant
principal.
En application de la théorie jurisprudentielle dite des
" fonctionnaires de fait "
3(
*
)
, les
actes accomplis par les fonctionnaires concernés avant l'annulation de
leur nomination seraient considérés comme valables et les
intéressés n'auraient pas à rembourser les
rémunérations qui leur ont été versées avant
cette annulation.
En revanche, pourraient être remises en cause leurs
rémunérations pour l'avenir, de même que les montants des
pensions versées à ceux qui ont depuis lors été
admis à la retraite, ainsi qu'aux ayants droit des agents
décédés.
En outre, la situation des agents qui ont remplacé les
181 fonctionnaires irrégulièrement promus pourrait
également être compromise.
Enfin, la régularité de plus de 3.000 décisions
individuelles prononcées, après avis d'une commission
administrative paritaire, en matière de mutations, d'avancement ou de
discipline, pourrait être contestée en raison de la participation
à ladite commission paritaire de certains agents dont la promotion a
été annulée.
Toutes ces difficultés ont conduit Mme Elisabeth Guigou, Garde des
Sceaux, à considérer devant l'Assemblée nationale, lors de
la discussion de la présente proposition de loi, que les
conséquences susceptibles de découler, pour les agents, de
l'annulation de l'examen professionnel de 1991, étaient "
d'une
gravité très disproportionnée au regard de l'erreur
commise
" et que la validation législative était en
l'espèce "
non seulement le meilleur mais aussi l'unique moyen
de ne pas s'engager dans un processus impossible
", tout en admettant
qu'il convenait de veiller à éviter le renouvellement d'une
situation dont elle comprenait "
que personne ne puisse la trouver
satisfaisante
".
III. LA POSSIBILITÉ DE PROCÉDER À UNE VALIDATION LÉGISLATIVE DOIT ÊTRE EXAMINÉE AU REGARD DE LA JURISPRUDENCE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
Si les
considérations qui viennent d'être évoquées
permettent de justifier en opportunité la mesure de validation
législative à laquelle tend la présente proposition de
loi, il importe néanmoins, sur le plan juridique, de s'assurer de la
possibilité de procéder à une telle validation eu
égard à la jurisprudence du Conseil constitutionnel.
Celle-ci soumet les lois de validation à deux conditions
essentielles :
- le
respect de l'autorité de la chose jugée
,
conformément au principe de la séparation des pouvoirs ;
- et la
justification
de la validation
par un motif
d'intérêt général
.
S'agissant de la première condition,
une loi de validation ne peut
revenir sur une décision de justice devenue définitive
car
"
il n'appartient ni au législateur ni au Gouvernement de
censurer les décisions des juridictions
"
4(
*
)
.
La question se pose donc de savoir si les décisions de la Cour
administrative d'appel de Paris du 4 juin 1998 prononçant
l'annulation de l'examen professionnel de 1991 doivent ou non être
considérées comme définitives.
Certes, les voies d'appel sont en l'espèce épuisées, mais
certains agents dont la promotion a été annulée ont
engagé une
procédure de tierce opposition
, sur le
fondement de l'article R. 225 du code des tribunaux administratifs et
des cours administratives d'appel, aux termes duquel : "
Toute
personne peut former tierce opposition à une ordonnance, un jugement ou
un arrêt qui préjudicie à ses droits, dès lors que
ni elle ni ceux qu'elle représente n'ont été
présents ou régulièrement appelés dans l'instance
ayant abouti à cette décision
"
5(
*
)
.
La procédure de tierce opposition permet de remettre en cause une
décision de justice sur le fond en faisant rejuger l'affaire par la
juridiction saisie.
Elle n'est soumise à une condition de délai que lorsque la
décision a été notifiée à
l'intéressé ; le délai est alors de deux mois
à compter de la notification (cf. art. R. 226 du code des tribunaux
administratifs).
Selon les précisions apportées au cours du débat à
l'Assemblée nationale, le 29 février 2000, par Mme Elisabeth
Guigou, Garde des Sceaux, les arrêts n'ayant pas été
signifiés à l'ensemble des agents, ceux qui n'ont pas
formé tierce opposition à ce jour sont encore en droit de le
faire, et la juridiction administrative ne s'est pas encore prononcée
sur le bien-fondé des tierces oppositions.
Dans la mesure où une décision de justice ne passe en force de
chose jugée vis à vis des tiers opposants qu'à compter du
rejet éventuel de la tierce opposition, on peut donc considérer
que les décisions précitées de la Cour administrative
d'appel de Paris ne sont pas définitives à l'égard des
tiers opposants et qu'une mesure de validation législative est encore
possible.
En ce qui concerne la condition tenant aux motifs justifiant la validation,
l'existence d'un
motif d'intérêt général
ne
fait guère de doute, compte tenu des conséquences de l'annulation
de l'examen professionnel de 1991 qui ont précédemment
été évoquées. En effet, le Conseil constitutionnel
admet que des mesures relatives aux agents publics puissent être
validées afin de préserver le "
déroulement normal
des carrières du personnel
" et a déjà eu
l'occasion de juger de la conformité à la Constitution d'une loi
tendant à valider les résultats d'un concours
6(
*
)
.
Par ailleurs, le Conseil constitutionnel admet la
rétroactivité
d'une loi de validation dès lors
qu'elle n'intervient pas en matière pénale et qu'elle ne concerne
pas des actes pouvant être assimilés à des sanctions.
Au terme de cet examen, la validation proposée apparaît sans doute
envisageable, même si elle n'est guère satisfaisante sur le plan
des principes. Elle présente en tout état de cause l'avantage
d'éviter les difficultés liées à l'organisation
d'un nouveau concours et d'assurer la sécurité juridique des
fonctionnaires intéressés.
*
Sous le bénéfice de l'ensemble de ces observations, votre commission vous propose donc d'adopter sans modification la présente proposition de loi.
TABLEAU COMPARATIF
1
Cette pratique était alors
fondée sur les dispositions d'un arrêté ministériel
du 20 janvier 1978 fixant les modalités de l'examen
professionnel pour l'accès au grade de premier surveillant des services
extérieurs de l'administration pénitentiaire, dont la Cour
administrative d'appel a constaté l'illégalité.
2
Cf. CE 4 février 1955 - Sieur Marcotte ; CE 25 mai
1979 - Ministre des Universités c/ Mme Toledano-Abitbol.
3
Cf. CE 2 novembre 1923 - Association des fonctionnaires de
l'administration centrale des PTT ; 8 février 1995 - Mme Robert.
4
Cf. décision n° 80-119-DC du 22 juillet 1980.
5
L'article R. 187 du même code permet en outre, par le biais
d'une requête distincte en intervention volontaire, de s'associer
aux conclusions de l'auteur d'une tierce opposition et le cas
échéant de bénéficier des mêmes
conséquences.
6
Cf. par exemple la décision n° 83-159 DC du 19
juillet 1983 relative à la validation des nominations intervenues
à la suite d'un concours d'accès à l'ENM annulé par
le Conseil d'Etat.