II. TROIS AMÉNAGEMENTS A SURVEILLER
Au terme
de l'article 44 du présent projet de loi, le Fonds forestier
national (FFN) serait supprimé, conséquence logique de
l'article 30 de première partie supprimant les deux taxes qui en
constituent l'essentiel des recettes. Cette disposition qui peut se recommander
d'une certaine logique appelle un effort du gouvernement pour informer le
Parlement et la communauté forestière de la politique conduite en
ce domaine.
Avec la modification du Fonds national de développement des adductions
d'eau (FNDAE), une réforme est apportée au fonctionnement de ce
compte d'affectation spéciale dont tous les tenants et aboutissants sont
quelque peu obscurs.
Enfin, l'instauration d'un prélèvement sur les droits de
retransmission télévisée des manifestations sportives
induit des modifications du fonds national de développement du sport
(FNDS).
A. LA SUPPRESSION DU FFN
1. Le FFN
Le I de
l'article 30 du projet de loi de finances entraîne la suppression de la
taxe forestière et de la taxe se défrichement dont les produits
affectés au compte spécial du Trésor n° 902-01
" Fonds forestier national ", constituaient la quasi-totalité
des ressources du fonds (82 % du total en 1999). Ces suppressions trouvent leur
conséquence dans le I de l'article 44 du projet de loi de finances qui
propose le clôture du compte n° 902-01. Le fonds forestier national
(FFN) serait ainsi supprimé.
Cette suppression a pour conséquence de faire du budget de l'agriculture
le seul support du soutien public à la forêt française.
Toute appréciation sur le bien fondé de la suppression du FFN est
dépendante d'un préalable déterminant portant sur
l'opportunité d'en supprimer les deux principales ressources. Mais, il
est également utile d'examiner la contribution du FFN à la
politique forestière et l'impact de son éventuelle suppression.
Doté de 417 millions de francs de crédits en 1999, ses
moyens avaient certes beaucoup diminué après la réforme de
la taxe forestière intervenue en 1991, étant divisés
à peu près par deux, mais ils représentaient une part
significative des crédits consacrés à la forêt par
le ministère de l'agriculture avec environ un quart du total.
Le tableau ci-après expose la nature des interventions du FFN
programmées pour l'année en cours.
Les
dotations du FFN en 1999
(crédits de paiement)
(en millions de francs)
Crédits d'investissement |
26,6 |
Financement d'activités forestières d'intérêt général |
186 |
Subventions dont : |
|
Boisements, reboisements, conversion et gestion des forêts de production |
119,7 |
Prêts |
44,4 |
Sous-total |
257 |
Crédits de fonctionnement : |
|
Matériels et frais de fonctionnement |
17,5 |
Subventions à divers organismes dont : |
141 |
Centre technique du bois et de l'ameublement |
50 |
Centre national de développement du bois |
25 |
Centres régionaux de la propriété forestière |
37,5 |
Prêts |
1,5 |
Sous-total |
160 |
Total |
417 |
Les
subventions du FFN en 1999 se partageaient entre des crédits
d'investissement pour 61,6 % destinés pour à peu près
la moitié d'entre eux à l'effort de boisement et des
crédits de fonctionnement pour 38,4 % du total principalement
voués à assurer la promotion de la filière-bois.
Au fil du temps, les contraintes financières rencontrées par le
FFN ont conduit à une érosion des moyens consacrés aux
investissements, en niveau absolu après la réforme de la taxe
foncière, mais aussi en pourcentage.
2. La suppression de ses ressources
Votre
commission a accepté la suppression de la taxe forestière et de
la taxe de défrichement.
La logique de la taxe forestière était celle d'un autofinancement
partiel des interventions publiques dans le domaine de la forêt.
La taxe forestière, régie par l'article 1609
sexdecies
du
code général des impôts, constituait un impôt
particulièrement complexe.
Une importante réforme était intervenue à l'occasion de la
loi de finances pour 1991, la taxe unique sur les produits forestiers alors
perçue au taux de 3,5 % ayant été
réaménagée tout à la fois pour mettre notre
législation en conformité avec la réglementation
européenne et pour alléger les prélèvements fiscaux
pesant sur les professionnels.
De fait, le produit de la taxe forestière avait considérablement
diminué depuis cette réforme.
Evolution du produit de la taxe forestière
(en millions de francs)
Années |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
Montant de la taxe |
664 |
255 |
250 |
207 |
276 |
313 |
288 |
310 |
320,3 |
310 (a) |
(a)
Montant prévu pour la loi de finances initiale 1999
Source : Ministère de l'économie, des finances et de
l'industrie.
Cette taxe a connu des difficultés d'acclimatation et la
qualité de sa gestion a pu être mise en cause sans démentis
à plusieurs occasions
. Sa complexité, la réticence de
plusieurs professionnels, la multiplicité des redevables ont,
semble-t-il, découragé les services fiscaux d'accomplir toutes
diligences pour en recouvrer le produit.
La suppression de la taxe forestière est ainsi d'abord une mesure de
simplification.
Elle n'est en outre pas dénuée d'une certaine logique
économique
en ce sens que le financement d'actions
forestières à partir d'un prélèvement sur des
activités économiques liées à la forêt,
singularité française relevée par le récent rapport
de M. Jean-Louis Bianco
5(
*
)
, constitue un paradoxe difficilement
justifiable.
Assise sur les produits d'aval, l'imputation finale de la taxe était
d'ailleurs l'objet de débats, les contribuables faisant valoir ses
effets négatifs sur des marges déjà tendues tandis que les
propriétaires forestiers regrettaient d'en supporter l'impact à
travers l'effet de la taxe sur leurs prix de vente.
En toute hypothèse,
la suppression de la taxe constitue toutes choses
égales par ailleurs, un gain net pour la filière qu'il ne faut ni
exagérer ni négliger. Il en va de même de la suppression de
la taxe de défrichement, dont le caractère d'éco-taxe
assurait la légitimité mais que sa complexité rendait
difficilement gérable.
3. Une vigilance nécessaire quant à l'effort public forestier
Il
faut néanmoins veiller à ce que l'effort public à
destination de la forêt ne se relâche pas après la
suppression envisagée du FFN.
En l'état, les concours publics à la forêt ne ressortent
pas compromis de la suppression du FFN.
Outre l'allégement des charges imposées à la
filière pour un montant de 350 millions de francs dû à
la suppression proposée des taxes forestière et de
défrichement, les crédits budgétaires s'accroissent
passant de 1.736,6 à 1.927,2 millions de francs entre les lois de
finances initiales 1999 et 2000.
Comparaison des dotations des lois de finances initiale 1999 et 2000 pour la forêt (1)
Engagements totaux en MF |
LFI 1999 |
PLF 2000 |
recherche (forêt, bois) |
20,6 MF |
29,5 MF |
Développement forestier |
116,1 MF |
138,3 MF |
inventaire forestier national |
42,4 MF |
33,1 MF |
versement compensateur (forêts communales) |
878 MF |
957 MF |
protection (incendie, terrains de montagne, dunes) |
316 MF |
332,5 MF |
travaux (reboisement, voirie forestière) |
237,9 MF |
287,7 MF |
aval de la filière |
110,1 MF |
135 MF |
fonctionnement spécifique |
10 MF |
10 MF |
acquisitions |
5,5 MF |
3,9 MF |
TOTAL |
1.736,6 MF |
1.927,2 MF |
(1)
Hors versement du budget européen
Il convient de conforter cette tendance et la suppression du FFN invite, compte
tenu de l'éparpillement des crédits forestiers qui en
résultera et d'un légitime souci de lisibilité
budgétaire, à demander au gouvernement de rendre compte
annuellement au Parlement des crédits publics consacrés à
la forêt et de leur évolution.