Section 2
-
Branche vieillesse
Art.
10
Affectations au fonds de réserve pour les retraites
Objet
: Cet article prévoit l'affectation au fonds de réserve pour les
retraites des excédents de la CNAVTS et de 49 % du produit du
prélèvement social de 2 % sur les revenus du patrimoine.
I - Le dispositif proposé
L'article 2 de la loi de financement de la sécurité sociale pour
1999 a créé, au sein du fonds de solidarité vieillesse, un
fonds de réserve pour les régimes d'assurance vieillesse des
salariés et des commerçants et artisans. Le champ d'intervention
de ce fonds est en effet limité aux régimes concernés par
la réforme de 1993, c'est-à-dire le régime
général, le régime de base des salariés agricoles,
l'ORGANIC et la CANCAVA.
Cet article prévoyait en outre l'alimentation du fonds de réserve
par une fraction fixée par arrêté des ministres
chargés de la sécurité sociale et du budget, du solde du
produit de la contribution sociale de solidarité des
sociétés (C3S) après affectation, conformément
à l'article L. 651-2 du code de la sécurité sociale, du
produit de cette contribution au régime d'assurance maladie des
travailleurs non salariés des professions non agricoles et des
régimes d'assurance vieillesse des professions indépendantes
(artisanales, industrielles et commerciales, libérales et agricoles) au
prorata et dans la limite de leurs déficits comptables. Selon les
prévisions annexées au projet de loi de financement pour 1999,
sur les 5,6 milliards de francs de C3S que percevrait le FSV au titre de
l'année 1999, 2 milliards seraient versés au fonds de
réserve.
La loi prévoyait enfin que le fonds serait abondé par tout ou
partie des excédents de la première section du FSV, dans les
conditions fixées par des arrêtés des ministres
chargés de la sécurité sociale et du budget ainsi que par
"
toute ressource qui lui serait affectée en vertu de
dispositions législatives
".
Le
paragraphe I
du présent article insère dans le code de
la sécurité sociale un article L. 251-6-1 prévoyant
l'affectation au fonds de réserve pour les retraites des
excédents de la CNAVTS.
Cette affectation se ferait sous deux formes :
1° l'affectation du résultat excédentaire de l'exercice
clos de chacun des fonds dont elle a la gestion, à l'exception de celui
du régime spécial mentionné à l'article L. 715-1 du
code de la sécurité sociale, c'est-à-dire du régime
de retraite des agents de chemins de fer secondaires, qui est aujourd'hui
géré par la CNAVTS ;
2° le cas échéant, l'affectation, en cours d'exercice,
d'un montant représentatif d'une fraction de l'excédent
prévisionnel de l'exercice tel que présenté à la
Commission des comptes de la sécurité sociale lors de sa
réunion de septembre.
Le
paragraphe II
constitue une simple coordination : il
intègre cette nouvelle ressource dans la liste des recettes du fonds de
réserve, fixée à l'article L. 135-6 du code de la
sécurité sociale.
Le
paragraphe III
prévoit que les dispositions du présent
article s'appliquent à compter de l'exercice comptable 1999.
II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale n'a pas modifié les dispositions de cet
article relatives à l'affectation des excédents de la CNAVTS au
fonds de réserve pour les retraites.
Elle a, en revanche, adopté deux amendements présentés par
le Gouvernement qui tirent les conséquences de l'abandon du
prélèvement de 5,5 milliards de francs sur les branches de
la sécurité sociale pour financer la réduction du temps de
travail.
Le premier amendement complète cet article par un
paragraphe
additionnel
IV
(nouveau) qui modifie, à l'article L. 245-16
du code de la sécurité sociale, la répartition du produit
du prélèvement social de 2 % sur les revenus du patrimoine,
initialement affecté pour moitié à la CNAVTS et pour
moitié à la CNAF.
Cette répartition avait déjà été
modifiée -il faut le souligner- en juillet dernier par la loi portant
création d'une couverture maladie universelle (CMU), qui prévoit,
à compter du 1
er
janvier 2000, l'attribution d'une partie de
ce prélèvement à une troisième branche du
régime général : la CNAMTS. La répartition
devait être de 50 % pour la CNAVTS (situation inchangée),
28 % pour la CNAMTS et 22 % pour la CNAF.
Le fonds de réserve pour les retraites bénéficierait
désormais de 49 % de ce prélèvement social, la
fraction affectée à la CNAMTS passant ainsi de 28 % à 8 %,
celle de la CNAF de 22 à 13 %, et celle la CNAVTS de 50 à
30 %.
L'affectation du prélèvement social de 2 %
|
LFSS 1998 |
Loi du 27 juillet 1999 portant création de la CMU |
PLFSS 2000 |
CNAF |
50 % |
22 % |
13 % |
CNAVTS |
50 % |
50 % |
30 % |
CNAMTS |
|
28 % |
8 % |
Fonds de réserve pour les retraites |
|
|
49 % |
Total |
100 % |
100 % |
100 % |
Le
Gouvernement n'a donc pas renoncé à ponctionner le régime
général. Les différentes branches contribueront ainsi, de
manière indirecte, au financement des " 35 heures ", non pas
par un prélèvement classé dans leurs
" dépenses ", mais par une perte de recettes.
Le second amendement adopté par l'Assemblée nationale
opère une coordination en intégrant cette nouvelle ressource dans
la liste des recettes du fonds de réserve, fixée à
l'article L. 135-6 du code de la sécurité sociale.
III - La position de votre commission
La question du fonds de réserve pour les retraites a été
étudiée de manière approfondie par M. Alain Vasselle dans
son rapport consacré au volet assurance vieillesse du présent
projet de loi
23(
*
)
.
A l'initiative de votre commission, le Sénat n'avait pas rejeté,
lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité
sociale pour 1999, le principe d'un tel fonds. Il avait cependant
souligné que la constitution d'un tel fonds n'a véritablement de
sens que si un certain nombre de conditions sont effectivement
respectées :
• la constitution d'un fonds de réserve suppose que les
pouvoirs publics mènent effectivement une politique de retraite dans une
perspective à long terme ;
• ce fonds de réserve doit avoir une mission claire et
définie de manière préalable : en l'occurrence le
lissage de la hausse des cotisations ;
• un fonds de lissage ne résout pas le problème du
financement futur des retraites : il ne peut que constituer une mesure
d'accompagnement de la réforme d'ensemble des retraites ;
• la constitution d'un fonds de lissage exige des ressources
importantes et durables : au moins 400 à 500 milliards de francs en
2020 pour le seul régime général ;
• la constitution d'un tel fonds exige de définir de
manière préalable les conditions de gestion financière de
ce fonds.
Aucune de ces conditions n'est aujourd'hui respectée.
Ainsi, aucun objectif n'a encore été assigné au fonds
créé par la loi de financement de la sécurité
sociale pour 1999. Un décret paru au Journal officiel du 24 octobre
1999
24(
*
)
a certes prévu
les modifications relatives au comité de surveillance du fonds. Mais la
finalité et les modalités de gestion du fonds de réserve
restent dans le flou le plus complet.
La constitution d'un fonds de réserve suppose des ressources importantes
et durables.
Près d'une année après sa
création, le fonds de réserve reste de ce point de vue
parfaitement virtuel ; la seule trace de son existence est une ligne sur les
comptes du Fonds de solidarité vieillesse (FSV), ligne qui n'est pas
encore affectée
25(
*
)
.
Le fonds de réserve est encore vide aujourd'hui.
Depuis cette date, le Gouvernement multiplie pourtant les effets d'annonce pour
tenter de donner un semblant d'existence à son fonds.
La piste de l'affectation des " excédents budgétaires "
a été mentionnée lors du débat surréaliste
de l'été 1999. C'était oublier un peu vite que le budget
de l'Etat connaît un déficit toujours très important, et
que des rentrées fiscales plus importantes que prévu n'ont jamais
constitué un " excédent budgétaire ".
Alors que la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999
avait prévu que les excédents du FSV iraient alimenter le fonds
de réserve, le Gouvernement a finalement décidé d'amputer
sur les excédents du FSV en baissant ses recettes (partie des droits sur
les alcools) et de faire bénéficier le fonds de réserve
d'une fiscalité affectée, par l'intermédiaire de 49 % du
prélèvement social de 2 % sur les revenus du patrimoine et les
produits de placement, correspondant aux 5,5 milliards de francs que n'a pas
versé le régime général au financement des 35
heures.
Ce tour de passe-passe est véritablement inacceptable :
- il fait financer de manière directe le fonds de réserve
par toutes les branches de la sécurité sociale, y compris les
branches famille et maladie, au mépris du principe de séparation
des branches ;
- il prive ce faisant la CNAMTS d'une recette qui lui avait
été attribuée pour financer la CMU ;
- il contribue à faire financer de manière indirecte les
" 35 heures " par la sécurité sociale.
Parallèlement, le Gouvernement racle " les fonds de tiroirs "
en mettant à contribution de manière ponctuelle les caisses
d'épargne ou la Caisse des dépôts et Consignations.
Cette agitation un peu désordonnée, cette politique au coup
par coup, révèlent l'absence totale de plan de financement
à moyen ou long terme pour le fonds de réserve.
Le
Gouvernement s'efforce à l'évidence de masquer une terrible
réalité : il ne sait pas comment alimenter durablement ce
fonds.
Le fonds de réserve n'est dès lors, pour le Gouvernement,
qu'un alibi destiné à masquer son incapacité à
entreprendre les vraies réformes nécessaires à assurer la
pérennité à long terme de notre système de retraite.
Pas plus que l'an dernier, votre commission ne souhaite supprimer le fonds de
réserve pour les retraites qui peut servir de réceptacle à
des recettes non fiscales (fonds des Caisses d'épargne) ou à des
libéralités spontanées (Caisse des dépôts et
consignations). En revanche, votre commission est défavorable à
une ponction dans les réserves de la sécurité sociale, par
des contributions directes ou indirectes, avant que les lignes directrices de
la réforme des retraites n'aient été clairement
définies et ladite réforme effectivement engagée.
Votre commission vous propose par conséquent d'adopter un amendement de
suppression de cet article.
Art.
11
Revalorisation des pensions de retraite
Objet
: Cet article revalorise de 0,5 % au 1
er
janvier 2000 les
pensions de retraite, d'invalidité, les rentes d'accidents du travail et
les salaires portés au compte.
I - Le dispositif proposé
La loi n° 93-936 du 22 juillet 1993 relative aux pensions de retraite et
à la sauvegarde de la protection sociale avait mis en place, pour une
durée de cinq ans, du 1
er
janvier 1994 au 31
décembre 1998, un mécanisme d'indexation permettant de garantir
une évolution des pensions versées par le régime
général identique à celle des prix. Cette indexation
était, en pratique, déjà appliquée depuis 1987.
Le dispositif de revalorisation prévu par la loi de 1993 se composait de
trois éléments :
- une revalorisation annuelle fixée en fonction de l'indice
d'évolution prévisionnelle des prix (hors tabac) ;
- un ajustement -positif ou négatif- permettant de corriger un
éventuel écart entre le taux prévisionnel et le taux
réel d'évolution annuelle des prix (hors tabac) (ajustement
" en niveau ") ;
- une compensation positive ou négative pour les assurés
titulaires, à la date de la revalorisation, d'un avantage de vieillesse
ou d'invalidité, correspondant à l'écart ainsi
constaté au titre de l'année précédente (ajustement
" en masse ").
Il était également prévu de procéder à un
ajustement au 1
er
janvier 1996 afin de faire
bénéficier les titulaires de pensions de vieillesse ou
d'invalidité des progrès de productivité, ce qui a en fait
été anticipé au 1
er
juillet 1995.
Les dispositions de la loi de 1993 venant à échéance au 31
décembre 1998, il a été nécessaire de
définir, à la fin de l'année 1998, les modalités de
revalorisation pour 1999 et les années suivantes.
Deux options fondamentales s'offraient dès lors au Gouvernement :
- le maintien d'une indexation fondée sur l'évolution des
prix ;
- le choix d'une indexation sur l'évolution des salaires à
laquelle l'actuelle majorité s'était déclarée
favorable lors de la campagne électorale précédant les
élections législatives de mai 1997.
Le Gouvernement n'a pas véritablement tranché entre ces deux
options fondamentales. L'article 37 de la loi de financement de la
sécurité sociale pour 1999 a ainsi institué un dispositif
d'indexation provisoire, valable pour la seule année 1999
,
" dans l'attente du diagnostic que doit établir le Commissaire
général du Plan en concertation avec les partenaires sociaux et
portant sur la situation de l'ensemble des régimes de
retraite ",
selon l'exposé des motifs de cet article.
Le Gouvernement a donc une première fois repoussé à une
décision ultérieure la définition d'un système
d'indexation des pensions applicable pour les prochaines années.
En 1999, la revalorisation des pensions et la majoration des salaires et
cotisations servant de base au calcul de celles-ci a été
fixée conformément au taux prévisionnel d'évolution
en moyenne annuelle des prix à la consommation hors tabac, prévu
dans le rapport économique, social et financier annexé au projet
de loi de finances, soit + 1,2 %.
Cette revalorisation était donc bien supérieure à ce
qu'aurait exigé la simple reconduction du mécanisme d'indexation
des pensions instaurée par la loi du 22 juillet 1993. En effet,
l'application de ce mécanisme aurait conduit à procéder
à un rattrapage négatif pour compenser l'écart entre le
taux de l'inflation prévisionnelle qui avait servi de base à la
revalorisation au 1
er
janvier 1998 (1,3 %) et l'inflation qui a
été effectivement constatée pour 1998 (0,8 %).
Le Gouvernement s'était ainsi refusé à appliquer ce
rattrapage négatif, ce qui assurait dès lors automatiquement un
gain du pouvoir d'achat de 0,5 % à l'ensemble des retraités
au titre de l'année 1998.
Pour l'année 2000, le présent article propose une nouvelle
rédaction de l'article L. 351-11 du code de la
sécurité sociale qui supprime toute référence au
mécanisme institué en 1999, qui reposait sur le seul taux
prévisionnel d'évolution en moyenne annuelle hors tabac.
Cette nouvelle rédaction se borne à prévoir, au
1
er
janvier 2000, une revalorisation de 0,5 %.des pensions de
vieillesse déjà liquidées ainsi que des cotisations et
salaires servant de base à leur calcul. Cette revalorisation sera
également applicable aux pensions d'invalidité et aux rentes
d'accidents du travail.
Pour justifier le choix de ce taux, l'exposé des motifs du
présent article explique :
" L'évolution en moyenne
annuelle des prix à la consommation de tous les ménages (hors
tabac) pour l'année 2000, telle que prévue dans le rapport
économique, social et financier annexé au projet de loi de
finances pour 2000, est de 0,9 %.
" Toutefois, la base sur laquelle la revalorisation des pensions avait
été effectuée en 1999, à savoir l'indice
prévisionnel des prix pour 1999, s'est révélée
supérieure de 0,7 point à l'indice tel qu'il est estimé
actuellement (1,2 % au lieu de 0,5 %). Cela s'est traduit par un gain
significatif de pouvoir d'achat des retraités en 1999 (0,7 point) qui
s'ajoute au " coup de pouce " de 0,7 point qui avait
été accordé au 1
er
janvier 1999.
" Le maintien strict du pouvoir d'achat des retraités en 2000
conduirait à une revalorisation des pensions limitée à
0,2 % (évolution prévisionnelle de 0,9 % en 2000
corrigée de la surévaluation de 0,7 point de l'indice des prix
pour 1999). Ce mode de calcul, instauré en 1994 pour cinq ans et
reconduit pour 1999 avec un " coup de pouce " de 0,7 point, arrive
à échéance le 31 décembre 1999.
" le Gouvernement souhaitant en 2000 faire participer les retraités
à la croissance, propose de majorer de 0,3 point la revalorisation telle
qu'elle découlerait des règles antérieures. "
Changeant de stratégie par rapport à l'année
précédente, le Gouvernement a donc choisi cette année
d'appliquer à la revalorisation des pensions le rattrapage
négatif découlant de l'année 1999, soit 0,7 point. Il
majore exceptionnellement de 0,3 % le taux ainsi obtenu (0,2 %) pour
atteindre finalement le chiffre de 0,5 %.
Le coût de ce " coup de pouce " de 0,3 % accordé en
2000 est évalué par l'annexe C du projet de loi à 950
millions de francs pour la branche vieillesse du régime
général
26(
*
)
.
Ce " coup de pouce " affecte également les régimes dont
les pensions sont, en droit ou en fait, revalorisées dans les
mêmes conditions que celles du régime général. Le
coût de cette mesure est ainsi de 50 millions de francs pour l'ORGANIC et
de 40 millions de francs pour la CANCAVA, ce qui réduit à due
concurrence le solde prévisionnel du compte de la C3S.
Le coût pour le régime général -toutes branches
confondues- est en outre plus élevé dans la mesure où la
revalorisation des pensions entraîne -mécaniquement- la
revalorisation d'un certain nombre d'autres prestations dont l'évolution
est alignée sur celle des pensions (rentes d'accidents du travail,
pensions d'invalidité). Le surcoût de cette revalorisation est par
conséquent estimé à 50 millions de francs pour la
branche maladie et 60 millions de francs pour la branche accidents du
travail. Le coût total du " coup de pouce " de 0,3 % est
donc évalué à 1,06 milliard de francs pour le
régime général -toutes branches confondues.
Au total, sur l'ensemble de la période 1990-1999, les pensions ont
été revalorisées plus vite que l'évolution des prix.
L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.
II - La position de votre commission
Votre commission constate que le Gouvernement s'avère une nouvelle fois
incapable de proposer un mécanisme pérenne de revalorisation des
pensions de retraites et des salaires portés au compte. L'institution
d'un dispositif durable est repoussé d'année en année.
L'exposé des motifs de cet article précise ainsi que
" l'élaboration d'une règle pérenne de
revalorisation des pensions pour les années suivantes sera
examinée dans le cadre de la concertation pour les retraites ".
Votre commission juge que cette situation n'est pas satisfaisante : elle
n'assure aucune garantie aux retraités qui se voient chaque année
soumis, pour la revalorisation de leur pension, à l'arbitraire des
décisions gouvernementales : selon les années, le
Gouvernement choisit ainsi d'appliquer ou non un rattrapage négatif, de
donner un " coup de pouce " plus ou moins généreux...
Votre rapporteur s'était inquiété du coût
particulièrement élevé du " coup de pouce " de
0,5 % accordé aux pensions de retraite en 1999, coût qui
pouvait être évalué à 2,080 milliards de francs
pour le régime général -toutes branches confondues.
Il avait en outre rappelé que si les pensions de retraite allaient
être revalorisées de 1,2 % en 1999, les prestations
familiales ne le seraient quant à elles que de 0,71 %. Le
Gouvernement avait en effet choisi, pour la deuxième année
consécutive, d'opérer sur l'évolution de la base mensuelle
des allocations familiales (BMAF), qui conditionne la progression de la plupart
des prestations familiales, le rattrapage négatif de 0,5 % qu'il
s'était refusé à appliquer aux pensions de retraite.
Votre commission constate que le Gouvernement a choisi cette année un
taux de revalorisation des pensions plus raisonnable. Elle a la satisfaction de
constater qu'en 2000 les retraités et les familles
bénéficieront des mêmes conditions, soit une revalorisation
de 0,5 % intégrant une " coup de pouce " de 0,3 %.
Sous réserve de ces observations, votre commission vous propose
d'adopter cet article sans modification.
Article additionnel après l'article
11
Situation
du Fonds national de l'assurance veuvage
Objet
: Le présent article additionnel, que votre commission vous propose
d'insérer après l'article 11, prévoit que le Gouvernement
présentera au Parlement, avant le dépôt du projet de loi de
financement de la sécurité sociale pour 2001, un rapport
retraçant la situation du Fonds national de l'assurance veuvage depuis
sa création.
Financée par une cotisation spécifique à la charge du
salarié dont le taux est fixé à 0,1 % du salaire
déplafonné, l'assurance veuvage ne semble pas aujourd'hui en
mesure de remplir la mission qui lui avait été assignée :
donner au conjoint survivant n'exerçant pas d'activité
professionnelle des moyens de subsistance en attendant qu'il puisse se
réinsérer dans la vie professionnelle.
Jusqu'au 28 février 1999, l'assurance veuvage garantissait au conjoint
d'un assuré relevant du régime général ou du
régime des salariés agricoles, âgé de moins de 55
ans, et ayant élevé ou ayant à sa charge au moins un
enfant, une allocation veuvage dégressive dans le temps, dès lors
que ses ressources étaient inférieures ou égales à
un plafond, fixé au niveau très bas de 3.930 francs par
mois, allocation comprise.
L'allocation était de :
- 3.144 francs par mois la première année ;
- 2.065 francs par mois la deuxième année ;
- 1.573 francs par mois la troisième année.
L'article 38 de la loi de financement de la sécurité sociale pour
1999, qui résulte d'un amendement présenté par le
Gouvernement, a apporté trois modifications au régime de
l'assurance veuvage :
- le bénéfice de l'allocation est désormais
réservé aux conjoints des assurés qui ont
été affiliés à l'assurance vieillesse, à
titre obligatoire ou volontaire,
" au cours d'une période de
référence et pendant une durée fixées par
décret en Conseil d'Etat ".
- l'allocation perd son caractère dégressif ;
- la détermination des modalités et de la durée de
son versement est renvoyée à un décret en Conseil d'Etat,
le Gouvernement ayant précisé que décret réduirait
de trois ans à deux ans la durée normale de service de
l'allocation en contrepartie de l'unification de son taux.
Ces mesures ont été mise en oeuvre par les décrets
n° 99-371 et n° 99-372 du 14 mai 1999, applicables à
compter du 1
er
mars 1999.
Le montant de l'allocation veuvage n'est plus dégressif dans le temps
mais stable sur deux ans (3.144 francs par mois), alors que
précédemment sa durée de versement était de trois
ans. En outre, le bénéfice de l'allocation de veuvage est
désormais réservé aux veuves et veufs des assurés
qui ont été affiliés à l'assurance vieillesse
pendant au moins trois mois durant l'année précédant leur
décès. Les conditions de ressources restent quant à elles
identiques.
Votre commission suit avec beaucoup d'attention les problèmes du
veuvage. Elle a déjà souligné, à de nombreuses
reprises, l'impérieuse nécessité d'améliorer la
condition des veuves et des veufs. Le groupe d'études sénatorial
des problèmes du veuvage, que préside M. Jacques Machet et qui
est rattaché à votre commission, a ainsi souvent attiré
l'attention du Gouvernement sur la situation de l'assurance veuvage.
Pour améliorer le sort des veuves et des veufs, des moyens financiers
sont disponibles. Le Fonds national de l'assurance veuvage, qui retrace en
recettes les cotisations d'assurance veuvage et en dépenses les
prestations d'assurance veuvage, est structurellement excédentaire
depuis sa création, en 1980.
Fonds national de l'assurance veuvage
(en millions de francs)
|
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
Recettes (cotisations) |
1.738 |
2.028 |
1.941 |
1.924 |
1.992 |
2.020 |
2.321 |
2.153 |
2.185 |
Dépenses (prestations) |
435 |
435 |
439 |
449 |
465 |
462 |
506 |
550 |
544 |
Solde |
+ 1.303 |
+ 1.593 |
+ 1.502 |
+ 1.475 |
+ 1.527 |
+ 1.558 |
+ 1.815 |
+ 1.603 |
+1.641 |
Sur la
période 1990-1998, les dépenses au titre des prestations veuvage
n'ont représenté en moyenne que
24 % des recettes
et
le total des excédents cumulés s'élève à
14 milliards de francs. Ces excédents répétés
viennent minorer les déficits du régime général
d'assurance vieillesse. La loi n° 94-637 du 25 juillet 1994 a
d'ailleurs entériné la pratique du transfert des excédents
de l'assurance veuvage vers l'assurance vieillesse en créant une branche
unique vieillesse-veuvage.
Pourtant, le deuxième alinéa de l'article L. 251-6 du code de la
sécurité sociale prévoit que
" les
excédents du fonds national d'assurance veuvage constatés
à l'issue de chaque exercice sont affectés en priorité
à la couverture sociale du risque de veuvage ".
Cette
disposition n'a jamais été appliquée.
Votre commission a par conséquent souligné depuis longtemps la
nécessité de revaloriser de manière significative le
montant de l'allocation veuvage. Elle juge qu'il conviendrait
parallèlement de relever dans des proportions au moins
équivalentes le plafond de ressources applicable.
La réforme mise en place au 1
er
mars 1999 constitue un
progrès très relatif. Elle améliore certes la situation de
la deuxième année. Pour les personnes âgées de moins
de 50 ans, elle supprime en revanche toute prestation pour la troisième
année : les personnes concernées basculeront désormais sur
le RMI dès la fin de la deuxième année.
Au total, l'effort financier accompli par le Gouvernement est modeste : le
coût de cette réforme est évalué à 18
millions de francs par an par l'annexe b du présent projet de loi. La
réforme constitue donc davantage un redéploiement de
crédits qu'un réel effort financier en faveur des veuves et des
veufs. La mesure proposée n'a pas affecté sensiblement
l'excédent du fonds national de l'assurance veuvage, qui continue
à être très excédentaire.
Votre commission regrette que le Gouvernement n'ait pas jugé bon de
mener à cette occasion une réforme plus ambitieuse de l'assurance
veuvage. L'effort accompli paraît bien dérisoire par rapport aux
besoins et aux excédents structurels du Fonds national de l'assurance
veuvage.
Elle vous propose par conséquent d'adopter un article additionnel
après l'article 11 afin de prévoir que le Gouvernement
présentera au Parlement, avant le dépôt du projet de loi de
financement de la sécurité sociale pour 2001, un rapport
retraçant la situation du Fonds national de l'assurance veuvage depuis
sa création. Ce rapport étudiera également la
possibilité et les modalités d'une revalorisation significative
du montant des prestations d'assurance veuvage.
Votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel ainsi
rédigé.
Art.
12
Prorogation des dispositions limitant le cumul emploi-retraite
Objet : Cet article proroge jusqu'au
31 décembre
2000 le dispositif limitant les possibilités de cumul d'un emploi et
d'une retraite.
I - Le dispositif proposé
Jusqu'en 1983, les mesures de limitation du cumul entre un emploi et une
pension de retraite étaient d'une portée très restreinte
et ne concernaient que le secteur public.
Le développement du chômage massif dans les années 70-80,
notamment chez les jeunes, conduisit les pouvoirs publics à rechercher
les voies d'un meilleur partage de travail entre les générations.
Aussi en 1982, l'abaissement à 60 ans de la possibilité de
bénéficier d'une pension à taux plein s'est
accompagné d'une stricte réglementation du cumul emploi-retraite
après 60 ans, l'objectif étant de libérer un maximum
d'emplois.
Cette liaison étroite avec les préoccupations immédiates
relatives à l'emploi s'est traduite par :
- le caractère provisoire annoncé des règles de cumul
fixées par l'ordonnance du 30 mars 1982 dont l'application était
limitée jusqu'au 31 décembre 1990. Ce délai a depuis
été prolongé jusqu'au 31 décembre 1999 ;
- l'institution par cette même ordonnance d'une contribution de
solidarité pénalisant l'emploi des retraités de plus de
60 ans. Cette disposition a été abrogée en 1987 ;
- plus fondamentalement, l'obligation, lorsque la liquidation de la
pension est demandée, de cesser l'activité professionnelle
antérieure.
Cependant, cette règle stricte de non-cumul entre emploi et retraite
a progressivement perdu de sa substance au fil des dérogations qui ont
pu l'amender, laissant en vigueur un dispositif complexe, assez peu
contraignant et d'une efficacité incertaine.
L'interdiction du cumul emploi-retraite repose sur un principe :
l'obligation de cesser l'activité exercée au moment de la
liquidation de la pension.
Le service d'une pension de vieillesse est ainsi
" subordonné
à la rupture définitive de tout lien professionnel avec
l'employeur ou, pour les assurés exerçant une activité non
salariée, à la cessation définitive de cette
activité "
(
art. L. 161-22 du code de la
sécurité sociale
).
La règle de non-cumul est applicable pour les pensions de retraite dont
la date d'entrée en jouissance intervient à compter du
soixantième anniversaire.
Cette obligation, d'abord instituée pour les salariés à
compter du 1
er
avril 1983 par l'ordonnance du 30 mars 1982 a
été étendue, à compter du 1
er
juillet
1984, aux non-salariés des professions artisanales, industrielles et
commerciales par la loi du 9 juillet 1984 puis aux exploitants agricoles
à partir du 1
er
janvier 1986 (loi du 6 janvier 1986).
Les retraites servies par les régimes d'assurance vieillesse des
professions libérales sont exclues du champ d'application de la
législation sur le non-cumul. Mais les règles propres à
certaines sections professionnelles (agents généraux d'assurance,
géomètres, médecins, notaires, officiers
ministériels, pharmaciens, sages-femmes et vétérinaires)
font également de la cessation de l'activité professionnelle une
condition du versement de la retraite.
Dans tous les cas, l'activité ou les activités à prendre
en considération pour la mise en oeuvre de l'obligation de cessation
d'activité ou de rupture de tout lien professionnel avec l'employeur
sont celles effectivement exercées en dernier lieu au cours de
l'année précédant la date d'effet de la pension
(circulaire du 4 juillet 1984).
Lorsque la dernière activité est salariée, le service de
la pension est subordonné à la cessation définitive de
tout lien professionnel avec l'employeur.
A contrario
, rien n'interdit
de reprendre éventuellement la même activité
salariée auprès d'un autre employeur ou une activité non
salariée si aucun lien professionnel n'est conservé avec l'ancien
employeur.
Lorsque la dernière activité est non salariée, le service
de la pension est subordonnée à la cessation définitive de
l'activité professionnelle non salariée exercée à
la date d'effet de la pension. Il est interdit aux artisans, industriels et
commerçants de travailler :
- dans son ancienne entreprise, aussi bien en tant que salarié,
non-salarié, conjoint collaborateur que d'aide familial, et ceci
même si l'entreprise a changé de statut juridique ;
- dans la même classe d'activité que celle exercée en
tant que non-salarié et dans les mêmes lieux ou locaux (circulaire
du 9 avril 1985) ;
En cas d'exercice simultané d'une activité salariée et
d'une activité non salariée, il est possible de cesser ses
activités salariées et de bénéficier de sa ou ses
pensions au titre de ces activités tout en continuant à exercer
des activités non salariées.
Dans son principe même, le dispositif régissant le cumul
emploi-retraite autorise la reprise d'une nouvelle activité. A titre
dérogatoire, il n'interdit pas également de poursuivre
l'activité exercée antérieurement à la liquidation
de la retraite.
Le droit à la retraite n'exclut pas le droit au travail. Il est ainsi
possible :
- pour un ancien salarié, de percevoir sa retraite de base tout en
exerçant une activité salariée pour le compte d'un nouvel
employeur ou une activité non salariée n'entraînant aucun
lien avec le dernier employeur (circulaires du 4 juillet 1984 et du 9 avril
1985) ;
- pour un ancien non salarié, de percevoir sa retraite de base et
d'exercer :
• une activité salariée dans une entreprise ou une
exploitation distincte de celle précédente ;
• une activité non salariée dans une entreprise ou
une exploitation distincte de celle précédente.
Ce cumul peut être soumis à des restrictions plus importantes en
matière de retraite complémentaire.
Pour les salariés, chaque institution de retraite complémentaire
décide souverainement des règles à appliquer en la
matière. D'une manière générale, le critère
du salaire est déterminant : l'addition du salaire de la nouvelle
activité et des retraites (base + complémentaire) ne doit pas
dépasser le niveau de la rémunération
précédant le départ en retraite. En revanche, la plupart
des règlements des caisses autorisent la reprise d'une activité
non salariée.
Pour les non-salariés, la position des caisses est
généralement moins contraignante.
A titre dérogatoire, certaines activités peuvent par ailleurs
être poursuivies après la liquidation de la retraite.
Le cumul emploi-retraite est ainsi autorisé pour la plupart des
professions artistiques, pour les concierges et employés de maison,
à la condition qu'ils soient logés par l'employeur et que leur
rémunération n'excède pas la valeur mensuelle du SMIC,
pour les nourrices, gardiennes d'enfants et assistantes maternelles, pour les
personnes exerçant des fonctions de tierce-personne auprès d'une
personne âgée, invalide ou handicapée.
De même, l'assuré qui transmet son entreprise entre 60 et 65 ans
est autorisé à y poursuivre une activité
rémunérée, tout en percevant sa pension, pendant une
durée de six mois (loi du 31 décembre 1991).
En outre, l'exercice de certaines activités accessoires ne fait pas
obstacle au versement de la pension : activités littéraires
ou scientifiques exercées accessoirement avant la liquidation de la
pension, participation aux activités juridictionnelles ou
assimilées, participation à des jurys et instances consultatives
ou délibératives réunies en vertu d'un texte
législatif ou réglementaire (parlementaires, conseillers
municipaux...), consultations données occasionnellement,
activités bénévoles ou de faible importance...
Les activités, salariées ou non, exercées à
l'étranger en qualité d'expatrié ne sont pas
concernées par la règle de cessation d'activité.
Le dispositif de non-cumul ne s'applique pas aux assurés qui ne sont pas
assujettis, à titre obligatoire ou facultatif, au versement de
cotisations (les jetons de présence ou des avantages en nature peuvent
être considérés comme des éléments de
rémunération) : les gérants minoritaires ou
égalitaires de SARL non rémunérés, les
associés commanditaires dans les sociétés en commandite
simple ou par actions, les administrateurs de sociétés anonymes,
les présidents-directeurs généraux, les directeurs
généraux et membres des directoires des sociétés
anonymes ne percevant aucune rémunération.
Enfin, la retraite progressive ouverte aux salariés, aux artisans,
industriels et commerçants permet de cumuler une fraction de sa retraite
et la rémunération d'une activité poursuivie à
temps partiel. Le bénéfice de ce dispositif est soumis à
plusieurs conditions : avoir au moins 60 ans, justifier du nombre de
trimestres exigé pour bénéficier d'une retraite à
taux plein et exercer une activité à temps partiel.
L'ensemble des dispositions imposant la cessation de l'activité
exercée au moment de la liquidation de la pension présente,
depuis l'origine, un caractère explicitement provisoire. Fixée
à l'origine au 31 décembre 1990, la date limite
d'application a été repoussée d'un an par
l'article 34 de la loi n° 91-73 du 11 janvier 1991,
l'article 23 de la loi n° 91-1406 du 31 décembre
1991 et l'article 19 de la loi n° 93-121 du 27 janvier
1993. La loi quinquennale n° 93-1313 du 20 décembre 1993
relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle
a repoussé cette date limite du 31 décembre 1993 au
31 décembre 1998. L'échéance a, une nouvelle fois,
été reportée au 31 décembre 1999 par l'article 39
de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999
(n° 98-1194 du 23 décembre 1998).
Ces dispositions ont donc pris, avec le temps, un caractère
particulièrement durable que le présent article se propose de
confirmer puisqu'il les proroge une nouvelle fois pour un an, jusqu'au
31 décembre 2000.
Le présent article procède par conséquent au remplacement
de la référence au 31 décembre 1999 par la
référence au 31 décembre 2000, aux articles
L. 161-22 (régime général, régime des
salariés agricoles et régimes spéciaux), L. 634-6 du
code de la sécurité sociale (assurance vieillesse des professions
artisanales, industrielles et commerciales), à l'article L. 353-1
du code rural et à l'article 14 de la loi n° 87-563 du
17 juillet 1987 portant réforme du régime d'assurance
vieillesse applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon.
L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.
II - La position de votre commission
Pour la deuxième année consécutive, le projet de loi de
financement de la sécurité sociale comporte une mesure prorogeant
d'une année les dispositions limitant le cumul emploi-retraite.
Dans l'exposé des motifs de cet article, le Gouvernement justifie cette
prorogation d'un an par les situations respectives du marché de l'emploi
et de la branche vieillesse. La non-reconduction du dispositif institué
en 1982 reviendrait en effet à autoriser le cumul sans limitation d'un
emploi et d'une retraite, ce qui serait, selon l'exposé des motifs du
projet de loi, préjudiciable à l'emploi et source de
dépenses nouvelles pour la branche vieillesse.
En outre le Gouvernement précise dans l'exposé des motifs
qu'
" un aménagement éventuel des règles
nécessite une réflexion approfondie. Une mission en ce sens a
été confiée à M. Dominique Balmary, conseiller
d'Etat, le 30 juillet 1999, par la ministre de l'emploi et de la
solidarité, le ministre de l'économie, des finances et de
l'industrie, le ministre de la fonction publique, de la réforme de
l'Etat et de la décentralisation et le secrétaire d'Etat au
budget. "
Votre rapporteur souhaite rappeler à cette occasion que le Gouvernement
précisait déjà dans l'exposé des motifs de
l'article 30 du projet de loi de financement de la sécurité
sociale pour 1999, qui allait devenir l'article 39 de la loi et qui prorogeait
les dispositions limitant le cumul emploi-retraite jusqu'au 31 décembre
1999, que
" ce délai d'un an permettra de procéder
à une étude spécifique sur les dispositions
régissant le cumul d'un emploi et d'une retraite dans le cadre de
l'analyse confiée au Commissaire général du Plan sur la
situation de l'ensemble des régimes de retraite, dont les conclusions
doivent être déposées avant le 31 mars 1999 ".
Votre rapporteur observe que ce délai d'un an supplémentaire
accordé par la loi de financement de la sécurité sociale
pour 1999 n'a manifestement pas suffi au Gouvernement pour se forger une
opinion sur l'utilité réelle de ce dispositif. La reconduction de
ce dernier jusqu'au 31 décembre 2000, proposé par le
présent article, témoigne à l'évidence de
l'embarras du Gouvernement sur cette question.
Votre rapporteur n'est pas insensible aux arguments avancés par le
Gouvernement. Il relève cependant que les exceptions aux limites du
cumul emploi-retraite sont aujourd'hui nombreuses et que l'impact réel
qu'aurait la suppression de ces dispositions n'est pas clairement établi.
Le dispositif régissant le cumul emploi-retraite apparaît en effet
limité et peu contraignant. Il laisse la place, sans aucune limite :
- au cumul de n'importe quelle activité avec une pension
liquidée avant 60 ans : c'est notamment le cas dans les
régimes spéciaux, principaux " exclus " du disposition
de cumul emploi-retraite ;
- au cumul de n'importe quelle retraite avec une activité
professionnelle nouvelle ou un employeur différent ;
- le niveau de ressources ou de revenus disponibles demeure, dans les
régimes de base, un critère d'autorisation ou d'interdiction de
cumul d'un emploi et d'une retraite à peu près inexistant.
En outre, le système est complexe en raison du foisonnement des
situations dérogatoires, de la multiplication des situations de
polyactivité mettant en cause plusieurs régimes de retraite aux
âges d'accession à la retraite différents.
Enfin, comme l'a montré l'annexe II du rapport
L'avenir de nos
retraites
, ses incidences sur l'emploi apparaissent limitées.
Le
cumul emploi-retraite
(Annexe II du rapport
L'avenir de nos retraites
,
par
M. Jean-Michel Charpin, Commissaire au Plan),
L'abaissement de l'âge légal de la retraite
à
60 ans en 1982 s'est accompagné de la mise en place d'une
réglementation stricte du cumul d'une pension de retraite et d'un emploi
à partir de 60 ans. Ce dispositif, amendé à plusieurs
reprises, fait aujourd'hui l'objet d'une réglementation complexe,
supportant de nombreuses dérogations.
L'incidence du cumul sur l'emploi serait modérée.
Les estimations actuelles du nombre de cumulants laissent à penser que
l'impact sur l'emploi du cumul entre pension et activité serait assez
limité. Avec le dispositif actuel, le SESI estime le nombre de
retraités cumulant un emploi et une retraite à environ 280.000
(180.000 salariés et 100.000 non-salariés). 4 cumulants sur 10
ont moins de 60 ans.
Le cumul d'un emploi avec une retraite est plus fréquent avant
60 ans : il concerne environ 19 % des retraités de moins
de 60 ans. A ces âges-là, le cumul est essentiellement le
fait de personnes ayant entamé une seconde carrière après
avoir exercé l'une des rares professions dans la fonction publique ou
dans les régimes spéciaux, qui imposent une retraite
précoce et autorisent statutairement la perception de la pension. La
moitié d'entre eux sont en effet d'anciens militaires et une forte
minorité sont d'anciens mineurs. Ces jeunes cumulants effectuent leur
seconde carrière dans le secteur privé, le plus souvent en tant
que salarié.
A partir de 60 ans, le cumul est nettement moins fréquent (2 % des
retraités de 60 ans et plus). Le cumul d'une retraite avec un
emploi salarié reste une situation exceptionnelle. La grande
majorité des cumulants salariés de 60 ans et plus gagne
d'ailleurs moins de 1.000 francs par mois, ce qui suggère davantage une
activité occasionnelle qu'une véritable activité
professionnelle. Seul un quart des cumulants salariés -environ 19.000
personnes- cumulent leur retraite avec une activité salariée qui
leur rapporte au moins 3.900 francs par mois. Ce sont les retraités les
plus aisés (plus de 15.000 francs de retraite mensuelle) qui gagnent les
salaires les plus élevés. C'est d'ailleurs dans cette tranche de
retraite que le taux de cumul est le plus élevé : 4 %
des retraités qui ont une pension supérieure à 15.000
francs sont des cumulants. En revanche, le taux de cumul est très faible
chez ceux qui perçoivent une petite retraite (moins de 5.000 francs).
Ceci suggère que le cumul est moins le fait de retraités
percevant une pension modeste et cherchant à la compléter que de
retraités aisés, le plus souvent d'anciens cadres, qui
bénéficient d'opportunités d'emplois intéressantes
qui les poussent au cumul.
En revanche, les retraités de 60 ans ou plus qui poursuivent une
activité indépendante parallèle -environ 90.000 personnes-
franchissent le plus souvent la barre des 1.000 francs mensuels.
Faut-il faire évoluer la législation sur le cumul
emploi-retraite ?
La législation régissant le cumul emploi-retraite est
arrivée à échéance le 31 décembre 1998.
Elle a été prolongée d'un an. Sa refonte doit, en tout
état de cause, être envisagée au regard des
évolutions socio-économiques tant collectives (situation du
marché du travail et contraintes financières pesant sur les
régimes de retraite) qu'individuelles (évolution des fins de
carrière, aspiration au temps libre).
Une autorisation de cumul sans restriction paraît peu satisfaisante,
à l'heure même où des dispositifs publics (l'ARPE)
s'efforcent d'organiser la substitution de jeunes travailleurs à des
travailleurs âgés, plutôt que leur mise en concurrence. Or,
l'autorisation du cumul intégral serait susceptible de modifier
sensiblement le coût relatif du travail des jeunes et des vieux, ces
derniers pouvant, dans un tel cas de figure, accepter un maintien en
activité des niveaux de salaires plus faibles et donc
intéressants pour l'employeur. En outre, une telle autorisation serait
contradictoire avec la réforme de 1993 dans la mesure où elle
encouragerait la liquidation à 60 ans, au risque d'aggraver la
situation financière des régimes de retraite.
A l'inverse, dans la mesure où le cumul après 60 ans est
essentiellement le fait de cadres et de professions indépendantes, une
interdiction renforcée du cumul pénaliserait la transmission du
savoir-faire et des entreprises familiales.
Votre rapporteur espère que la nouvelle étude qui a
été demandée par le Gouvernement permettra d'apporter des
éléments décisifs sur cette question complexe. Il observe
que le rapport Charpin aura permis au Gouvernement de repousser une nouvelle
fois :
- la nécessaire réforme de notre régime de retraite,
- la mise en place d'un dispositif pérenne de revalorisation des
pensions,
- la décision sur le maintien ou non de l'interdiction du cumul
emploi-retraite.
Sous réserve de ces observations, votre commission vous propose
d'adopter cet article sans modification.
Art.
13
Intégration de la section professionnelle des
géomètres et des experts agricoles et fonciers (CARGE) au sein de
la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse
(CIPAV)
Objet : Cet article autorise un
prélèvement
sur le fonds de réserve et de compensation de la Caisse nationale
d'assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL) pour financer
l'intégration de la section professionnelle des géomètres
et des experts agricoles et fonciers (CARGE) au sein de la Caisse
interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse (CIPAV)
I - Le dispositif proposé
Le régime de retraite des professions libérales, institué
par la loi n° 48-101 du 17 janvier 1948, couvre les personnes
exerçant une profession libérale, à l'exception des
artistes-auteurs, rattachés au régime général, et
des avocats, qui dépendent de la Caisse nationale des barreaux
français (CNBF), distincte de la CNAVPL depuis 1954.
Le régime est géré par treize caisses dites
" sections professionnelles ", juridiquement et financièrement
autonomes, réunies au sein de la caisse nationale, organisme de
coordination, de compensation financière et de garantie de
solvabilité.
Les sections regroupent les professions suivantes : notaires (CRN),
officiers ministériels (CAVOM), médecins (CARMF),
chirurgiens-dentistes (CARCD), pharmaciens (CAVP), sages-femmes (CARSAF),
vétérinaires (CARPV), agents généraux d'assurances
(CAVAMAC), experts-comptables (CAVEC), géomètres (CARGE). Trois
sections ont un caractère interprofessionnel : la CARPIMKO
(auxiliaires médicaux), la CREA (professeurs de musique, arts
appliqués, sports, tourisme) et la CIPAV (architectes,
ingénieurs, interprètes...).
Les treize sections professionnelles, dont les statuts sont différents,
ont pour vocation initiale de servir, sous certaines conditions, une allocation
du régime de base. La Caisse nationale assure une compensation
financière des charges de l'allocation de base supportées par les
sections professionnelles au titre des droits propres, en fonction de la
situation démographique de chaque profession et de la situation
économique de ses ressortissants.
Chaque section professionnelle gère un ou plusieurs régimes
complémentaires obligatoires ou facultatifs ayant pour objet le service
des pensions de vieillesse complémentaires ou la couverture des risques
invalidité et décès.
La section professionnelle des géomètres et des experts agricoles
et fonciers, gérée par la Caisse autonome de retraite des
géomètres experts (CARGE), est un petit régime qui ne
compte que 1.700 cotisants. Elle se trouve confrontée, depuis le
début des années 1990, à une dégradation de son
rapport démographique, qui menace sa pérennité. Cette
dégradation vient pour partie de ce qu'un nombre croissant de
géomètres experts optent pour le statut de gérants
minoritaires et cessent par conséquent d'être affiliés
à la CARGE.
Il a donc été décidé d'intégrer la CARGE
dans une autre caisse de la CNAVPL, la Caisse interprofessionnelle de
prévoyance et d'assurance vieillesse (CIPAV). Cette caisse, beaucoup
plus importante puisqu'elle regroupe 63.000 cotisants, accueille les
architectes, ingénieurs, experts et conseils ; elle connaît
une forte progression du nombre de ses cotisants et se trouve dans une
situation démographique et financière favorable.
Cette opération d'intégration a été
réalisée par deux décrets qui viennent d'être
publiés au
Journal officiel
du 28 octobre 1999 : le
décret n° 99-912 du 21 octobre 1999 portant suppression d'une
section professionnelle de l'Organisation autonome d'assurance vieillesse des
professions libérales et modifiant le code de la sécurité
sociale (deuxième partie : Décrets en Conseil d'Etat) et le
décret n° 99-913 du 21 octobre 1999 fixant les
modalités d'intégration des géomètres experts et
des experts agricoles et fonciers aux régimes relevant de la Caisse
interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse.
Cette intégration a naturellement un coût pour la caisse
d'accueil. Comme le souligne l'exposé des motifs de cet article
" malgré les efforts consentis par les ressortissants des deux
régimes, cette opération n'aurait cependant pas pu être
entièrement financée sans le recours à la
solidarité des autres professions libérales. "
Ces
dernières ont donc consenti à une participation financière
du fonds de réserve et de compensation de la CNAVPL, prévu
à l'article R. 642-4 du code de la sécurité sociale.
L'intégration de la CARGE au sein de la CIPAV sera par conséquent
financée par un versement du fonds de réserve et de compensation
de la CNAVPL au régime de retraite complémentaire de la CIPAV.
Le montant de ce versement unique ne pourra excéder le tiers des
ressources disponibles du fonds au 31 décembre 1999, estimées
à environ 400 millions de francs. Selon les informations obtenues
par votre rapporteur, ce versement sera d'un montant de 92 millions de francs.
Seule une disposition législative pouvait autoriser un tel versement.
Cet article a été adopté sans modification par
l'Assemblée nationale.
II - La position de votre commission
L'opération d'intégration de la CARGE au sein de la CIPAV a fait
l'objet d'une large concertation qui a permis de recueillir l'accord de toutes
les parties concernées. Cet article répond donc au souhait
exprimé par les responsables de la CNAVPL.
Sur le fond, votre commission est naturellement favorable à cet article.
Elle observe à cette occasion que la capacité des régimes
de retraite à se réformer paraît inversement
proportionnelle au rôle que joue l'Etat dans leur gestion.
S'agissant de la méthode, votre commission constate que
l'opération d'intégration résulte de deux décrets
en date du 21 octobre dernier, parus le 28 octobre, soit à un moment
où l'Assemblée nationale ne s'était pas encore
prononcée sur le présent article, dont l'adoption constitue
pourtant une condition nécessaire de l'opération. Le Gouvernement
tenait sans doute pour acquis le vote de cet article par le Parlement... On est
tout de même en droit de se demander ce qu'il adviendrait si le
législateur s'avisait de le rejeter.
Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
Art.
13 bis (nouveau)
Possibilité de rachat de cotisations
d'assurance vieillesse
pour les artisans et les commerçants
Objet : Cet article vise à permettre, pendant
un an,
aux artisans et aux commerçants de racheter les cotisations d'assurance
vieillesse pour les périodes antérieures à 1973.
I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale
Les artisans et les commerçants disposent d'un régime d'assurance
vieillesse obligatoire, géré par la CANCAVA et l'ORGANIC, dont
les modalités de cotisation sont différentes selon qu'il s'agit
des périodes avant ou après le 1
er
janvier 1973, date
à laquelle ces régimes ont été alignés sur
le régime général. Avant le 1
er
janvier 1973,
la cotisation était établie par tranches de revenus ouvrant droit
à un certain nombre de points.
Or certains assurés n'ont pu, pour des raisons diverses, acquitter leurs
cotisations, avec pour conséquence une diminution de leurs droits
à pension à retraite.
Cet article additionnel, qui résulte d'un amendement
présenté par le Gouvernement et adopté à
l'unanimité par l'Assemblée nationale en première lecture,
ouvre la possibilité aux assurés de ces régimes de
régulariser leur situation et de verser des cotisations pour la
période avant 1973.
S'agissant d'un dispositif dérogatoire, cette possibilité de
rachat est ouverte pour une durée d'une année suivant
l'entrée en vigueur du décret en Conseil d'Etat qui fixe les
conditions d'application du présent article. Par ailleurs, le coût
du rachat est calculé pour être neutre sur l'équilibre
à terme des caisses de retraite. La possibilité de rachat n'est
ouverte qu'aux personnes à jour du paiement des cotisations
échues depuis le 1
er
janvier 1973. En outre, la demande de
rachat doit porter sur l'intégralité des cotisations dues.
C'est la quatrième -et probablement dernière- fois qu'une telle
possibilité est offerte aux commerçants et artisans.
II - La position de votre commission
Votre commission est favorable à cet article, qui concerne toutefois un
nombre très limité de personnes. Parmi les 3.000 artisans et
commerçants potentiellement concernés par cette disposition,
rares seront ceux qui demanderont effectivement à
bénéficier de cette possibilité de rachat, qui
s'avère très coûteuse pour les intéressés.
Le délai d'un an prévu par cet article pour présenter la
demande de rachat des cotisations a paru un peu court à votre commission
qui vous proposera de le porter, par amendement, à deux années.
Cette modification permettra de laisser le temps nécessaire pour que
l'ensemble des personnes intéressées se manifestent. On peut
espérer qu'il ne sera dès lors plus nécessaire d'offrir
une nouvelle fois, dans quelques années, cette possibilité de
rachat.
Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.