Projet de loi concernant l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne relatif à la coopération entre les autorités de police et les autorités douanières
MASSON (Paul)
RAPPORT 377 (98-99) - COMMISSION DES AFFAIRES ETRANGERES
Table des matières
- INTRODUCTION
- CONCLUSION
- EXAMEN EN COMMISSION
-
ANNEXE -
L'ORGANISATION DE LA POLICE EN RFA - PROJET DE LOI
- ETUDE D'IMPACT33 Texte transmis par le Gouvernement pour l'information des parlementaires.
N°
377
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Annexe au procès-verbal de la séance du 26 mai 1999
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1), sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne relatif à la coopération dans leurs zones frontalières entre les autorités de police et les autorités douanières (ensemble une déclaration),
Par M.
Paul MASSON,
Sénateur.
(1)
Cette commission est composée de :
MM. Xavier de Villepin,
président
; Serge Vinçon, Guy Penne, André Dulait,
Charles-Henri de Cossé-Brissac, André Boyer, Mme Danielle
Bidard-Reydet,
vice-présidents
; MM. Michel Caldaguès,
Daniel Goulet, Bertrand Delanoë, Pierre Biarnès,
secrétaires
; Bertrand Auban, Michel Barnier, Jean-Michel Baylet,
Jean-Luc Bécart, Daniel Bernardet, Didier Borotra, Jean-Guy
Branger, Mme Paulette Brisepierre, M. Robert Calmejane, Mme Monique
Cerisier-ben Guiga, MM. Marcel Debarge, Robert Del Picchia, Hubert
Durand-Chastel, Mme Josette Durrieu, MM. Claude Estier, Hubert Falco, Jean
Faure, Jean-Claude Gaudin, Philippe de Gaulle, Emmanuel Hamel,
Roger Husson, Christian de La Malène, Philippe Madrelle,
René Marquès, Paul Masson, Serge Mathieu, Pierre Mauroy, Jean-Luc
Mélenchon, René Monory, Aymeri de Montesquiou, Paul d'Ornano,
Charles Pasqua, Michel Pelchat, Alain Peyrefitte, Xavier Pintat, Bernard
Plasait, Jean-Marie Poirier, Jean Puech, Yves Rispat, Gérard Roujas,
André Rouvière.
Voir le numéro
:
Sénat
:
161
(1998-1999).
Traités et conventions. |
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
L'accord de coopération transfrontalière relatif à la
coopération dans leurs zones frontalières entre les
autorités de police et les autorités douanières a
été signé par la France et l'Allemagne à
Mondorf-les-Bains, le 9 octobre 1997.
Le présent accord trouve son
fondement
dans l'
article 39
de la
convention d'application de l'accord de Schengen
.
Aussi pour comprendre la portée de ce texte faut-il revenir sur les
profondes modifications introduites par les accords de Schengen dans
l'organisation des contrôles aux frontières. Votre rapporteur
renverra sur ce point aux développements qui figurent dans le rapport
consacré à l'accord de coopération transfrontalière
et l'accord de réadmission signés entre la France et l'Italie en
octobre 1997.
Il évoquera ici la situation de l'Allemagne vis-à-vis des
mouvements migratoires avant d'analyser l'accord de
coopération.
I. L'ALLEMAGNE : UN PÔLE D'ATTRACTION MAJEUR POUR L'EUROPE ORIENTALE ET BALKANIQUE
1. Une forte pression migratoire aux frontières terrestres
D'une
manière générale, l'Allemagne apparaît comme une
destination privilégiée de nombreuses nationalités en
provenances des pays d'Europe centrale et orientale. Les étrangers
atteignent généralement ce pays, grâce à des
filières bien organisées, et n'hésitent pas à
déposer une demande d'asile politique.
En 1998
1(
*
)
, les autorités allemandes ont
procédé à 55 778 non-admissions. Les principales
nationalités non-admises sont les Polonais (14 314), les
Tchèques (8 865), les Yougoslaves (6 961), les Turcs
(2 750) et les Macédoniens (2 149).
Elles ont également procédé à 36 970
interpellations à la suite d'entrées irrégulières.
Les frontières tchèques (18 220 irréguliers
interpellés), autrichiennes (6 734 irréguliers
interpellés) et polonaises (4 635 irréguliers interpellés)
sont confrontées aux flux migratoires irréguliers les plus
importants. Les principales nationalités interpellées
réunissent les Yougoslaves (11 961 irréguliers), les Roumains ( 3
934 irréguliers), les Afghans (2 571 irréguliers) et les Irakiens
(1 862 irréguliers).
2. Une organisation des forces de sécurité marquée par les prérogatives des länder
Le
gouvernement régional d'un land comprend un ministère de
l'intérieur régional chargé de gérer la police de
sa région dans tous les domaines sans aucune restriction
fédérale, même si le droit pénal et la
procédure pénale nationale s'appliquent à tous les
Allemands. Cependant, chaque gouvernement régional peut apporter des
aménagements à ces codes, par le vote de lois
complémentaires, la promulgation de décrets ou encore par
diffusion de circulaires administérielles. Cette pratique locale, au
sein d'un land, entraîne des disparités de fonctionnement et de
pratiques policières dans certaines circonstances telles les
manifestations ou les prises d'otages. Ces particularismes des polices des
länder ne facilitent pas l'action de la police fédérale.
En matière d'immigration, certains länder ont accepté une
complémentarité avec la police des frontières
fédérale - Bundensgrentzschutz (BGS)- et développent de
plus en plus des actions communes. A titre d'exemple, en retrait des
frontières germano-polonaises et germano-tchèque, des policiers
dépendant du lander assistent régulièrement les policiers
du BGS dans leurs missions de surveillance de la frontière verte. Ces
accords résultent de l'
augmentation des délits de droit commun
frontalier
, et facilitent le maintien de la sécurité
publique. A l'inverse, en
Bavière,
la police locale assure une
part importante de la sécurité de ses frontières
terrestres et peut, sans intervention fédérale, moduler les
effectifs des policiers affectés à la frontière.
•
L'organisation des contrôles aux frontières
Après la signature de la convention de Schengen, l'Allemagne avait
progressivement réduit les effectifs chargés de la surveillance
des frontières intérieures, et lors de l'entrée en vigueur
de cette convention, le pays comptait environ 200 fonctionnaires
répartis à ces frontières. Mais en raison de
l'évolution de
l'immigration massive en provenance d'Italie
(Kurdes, Albanais, Kosovars), le gouvernement allemande a décidé
de renforcer les contrôles aux frontières intra-Schengen par un
rédéploiement des fonctionnaires du BGS dans le cadre de la
réorganisation de ce service qui a début le 1
er
janvier 1998. A terme, près de mille de ces fonctionnaires devraient
être affectés à la surveillance de ces frontières.
Le BGS effectue en Allemagne des contrôles sur les grands axes
autoroutiers, les gares ferroviaires en permanence, ainsi que dans les trains,
dans une bande de 30 km en deçà de la frontière. La
surveillance du trafic routier transfrontalier par les Allemands est
réalisée en deux phases, une d'observation à
proximité immédiate de la frontière, et une phase
d'interception des véhicules suspects à l'intérieur du
territoire.
•
La situation à la frontière franco-allemande
Actuellement, près de 200 fonctionnaires du BGS assurent la surveillance
des frontières allemandes en Sarre, ainsi que les missions de police des
chemins de fer. Ils peuvent être ponctuellement secondés par des
unités mobiles du BGS en cas de mise en oeuvre de contrôles
renforcés.
La progression importante des moyens et des effectifs du BGS a permis un
nombre accru d'interpellations d'irréguliers en RFA
, induisant une
augmentation du nombre des réadmissions
à effectuer par la
Police aux frontières (PAF) -ancienne direction centrale de la lutte
contre l'immigration irrégulière et l'emploi des clandestins
(DICCILEC)- du Bas-Rhin, dont les effectifs sont en lente diminution. Ce
déséquilibre a eu pour effet une saturation des services
français concernés.
II. L'ACCORD DE COOPÉRATION TRANSFRONTALIÈRE : UN CADRE JURIDIQUE RENFORCÉ POUR DES LIENS NOUÉS SUR LE TERRAIN
La
coopération entre nos deux pays s'est développée de
manière spécifique, et au niveau local, entre services ayant des
affinités de missions : la gendarmerie française avec ses
correspondants en Allemagne, la PAF avec le BGS. En l'absence d'une
coopération franco-allemande globale interrégionale et
interservices, la coopération a ainsi reposé davantage sur des
rapports personnels que sur des échanges institutionnalisés.
Au fil des années, la PAF et le BGS ont resserré leurs liens,
notamment face au développement des filières d'immigration et de
la pression migratoire.
Les moyens n'ont toutefois pas toujours été à la mesure
des ambitions affichées par les deux pays en matière de
coopération policière. La France et l'Allemagne avaient ainsi
projeté la création de quatre commissariats communs
(Strasbourg-Pont de l'Europe, Sarrebruck-Autoroute, Ottmarsheim et Lauterbourg,
sur les trois départements alsaciens et lorrains face aux trois
länder). Seul le poste de Strasbourg-Pont de l'Europe a, en fait, vu le
jour.
L'accord de Mondorf du 9 octobre 1997 se substitue à un accord du 3
février 1977 dont la portée apparaissait limitée. Il
étend la coopération :
- d'une part, en incluant le BGS et la PAF expressément
mentionnés désormais ainsi que la douane parmi les forces
appelées à coopérer ;
- d'autre part, en visant d'autres domaines que la seule prévention des
crimes et délits (immigration irrégulière et
criminalité transfrontalière, garantie de la
sécurité et de l'ordre public, lutte contre les trafics...).
- enfin, en fixant une base juridique pour la création de centres de
coopération policière et douanière aux compétences
élargies.
L'accord de Mondorf prévoit cependant la pérennité de la
coopération directe, permettant que les liens spécifiques
tissés entre les services de part et d'autre de la frontière
soient maintenus.
L'accord de coopération assigne pour objectif aux forces des deux pays
la prévention des menaces à la sécurité et à
l'ordre public. Il prévoit explicitement que la coopération est
maintenue à la suite de l'application de la
clause de sauvegarde
prévue à l'article 2, paragraphe 2 de la convention
d'application de l'accord de Schengen qui permet à un Etat de
décider, de manière unilatérale, le rétablissement
temporaire du contrôle des personnes (art. 2).
A. L'INSTITUTION DE CENTRES DE COOPÉRATION POLICIÈRE ET DOUANIÈRE
Du
dispositif de la convention consacré aux centres de coopération
policière et douanière, sans doute faut-il retenir trois
points :
- les
trois länder frontaliers
(Bade-Wurtemberg,
Rhénanie-Palatinat, Sarre) peuvent décider
séparément de leur participation aux centres communs. Qu'ils
prennent part ou non à l'activité de ces centres, ils exercent un
pouvoir d'approbation sur toutes les activités des centres communs qui
relèvent de leurs compétences (art. 10 § 3) ;
- les centres communs ne peuvent exercer de
manière autonome des
activités opérationnelles
(art.4 § 2).
- cependant, la mission de coordination confiée aux centres communs est
entendue de manière assez large ; elle recouvre notamment
l'harmonisation d'interventions et de mesures de recherche
transfrontalières ainsi que les
activités de soutien
pour l'exécution de telles mesures (art. 6).
- les agents affectés au centre accomplissent leurs tâches en
équipe. Condition de la qualité de la coopération et de la
confiance nécessaire, chaque partie peut exercer un
droit de veto
sur le désignation d'un agent par l'autre partie contractante.
En application des dispositions de l'accord franco-allemand de Mondorf, le
Centre commun d'Offenbourg
(RFA), situé à 20 km de
Strasbourg, est aujourd'hui en cours d'installation. Il se substituera au
commissariat franco-allemand de Strasbourg-Pont-de-l'Europe, en
bénéficiant de compétences et d'effectifs plus
développés.
Il regroupera des représentants des services de Police, de Douane et de
Gendarmerie français des départements de la Moselle, du Bas-Rhin,
du Haut-Rhin avec leurs homologues allemands de Bade-Wurtemberg, de
Rhénanie-Palatinat et de Sarre.
Les services français devraient compter 15 fonctionnaires
répartis entre la PAF (un Commandant et 5 fonctionnaires du Corps de
Maîtrise et d'Application), la Sécurité publique de
Strasbourg, le SRPJ de Strasbourg, la Douane et la Gendarmerie.
Les services allemands fourniraient également 15 fonctionnaires
répartis entre le BGS, la Douane, la police du land de Bade-Wurtemberg,
celle du land de Rhénanie-Palatinat et celle du land de Sarre.
Il n'est pas exclu qu'une initiative lancée par le Luxembourg
débouche sur la création d'un nouveau CCPD entre la France, le
Grand-Duché et la Sarre qui, bien que faisant officiellement partie du
Centre d'Offenbourg, n'y sera que rarement présente pour des raisons
d'effectifs et d'intérêt opérationnel (la
criminalité qui concerne la Sarre s'oriente surtout vers la
Lorraine).
B. LA COOPÉRATION DIRECTE
La
coopération directe revêt trois formes principales.
- Le
détachement réciproque de fonctionnaires pour une
durée limitée
. Ils n'exercent alors que des fonctions de
liaison. Toutefois, l'accord prévoit également que des agents des
services de police français peuvent se voir confier en Allemagne, avec
l'accord de notre pays, des
missions de police
conformément aux
législations applicables des parties (art. 10).
L'accord reconnaît ici une faculté déjà
employée par les Etats signataires de l'accord de Schengen.
Ainsi, en Allemagne, un officier de liaison de la PAF est en poste à
Coblence depuis le 15 septembre 1992. Il travaille au sein du
Budensgrentzschutz. Parallèlement, un officier de liaison allemand a
pris ses fonctions le 10 juin 1992 au sein du Bureau des Affaires
internationales de la PAF.
De plus, avec la disparition des frontières internes, la PAF a entrepris
de détacher aux frontières extérieures du nouvel espace
européen, dans les postes sensibles des pays partenaires, des
"
officiers de liaison aux frontières
extérieures
" (OLIFE). Le premier échange
réalisé s'appuie sur l'accord conclu le 1
er
juin 1994
entre ministres de l'intérieur allemand et français. Un premier
OLIFE allemand est désormais en place sur l'aéroport de
Roissy-Charles de Gaulle. A titre de réciprocité, un officier de
la PAF est en poste à l'aéroport de Francfort sur le Main.
- L'
échange d'informations.
Les forces de sécurité frontalières peuvent se transmettre
directement les informations touchant à la lutte contre la
criminalité qui présentent un intérêt pour la zone
frontalière ;
-
La coordination de l'intervention des forces
.
Les forces des deux pays peuvent agir de concert sous la forme notamment de
centres opérationnels et de commandements communs
, des
groupes
mixtes de contrôle, d'observation et de recherche
(les agents
intervenant sur le territoire de l'autre partie limitent alors leurs
activités au conseil et à l'information), d'élaboration de
plans en commun
.
Dans les cas d'une particulière gra vité ou qui dépassent
le cadre d'une région, les forces de l'ordre doivent alors associer
immédiatement les autorités centrales nationales.
L'accord est enfin accompagné d'une
déclaration commune
rappelant la détermination des deux Etats signataires pour surmonter les
différends qui ont pu apparaître entre les services de police en
matière d'entraide judiciaire.
C. LE PROBLÈME PARTICULIER DE LA COOPÉRATION JUDICIAIRE
•
L'entraide répressive
Les dossiers prioritaires de ce domaine ont trait, pour l'essentiel, au suivi
des commissions rogatoires internationales et des extraditions
signalées. Cette activité permet de mettre en contact les
services de la Direction des Affaires criminelles et des grâces, ainsi
que des magistrats de juridiction (juges d'instruction et procureurs) avec
leurs homologues allemands.
- Commission rogatoires internationales. Le magistrat de liaison
français (poste créé en septembre 1998) qui, tout en
exerçant ses fonctions sous l'autorité de l'Ambassadeur de France
à Bonn, a son siège au Ministère fédéral de
la Justice allemand, a été contacté pour
l'exécution de 10 commissions rogatoires internationales émanant
de juges d'instruction français et à destination des parquets
allemands compétents. En sens inverse, notre magistrat de liaison a
contribué au transit et au traitement, en France, de quatre commissions
rogatoires internationales adressées par des procureurs allemands
à des juges français. Il s'agit d'affaires très diverses,
allant de la délinquance traditionnelle (crimes de sang, trafics de
stupéfiants, atteintes aux personnes et aux biens) à des affaires
plus " sensibles " (financement de partis politiques, levée de
l'immunité de président du Front national). Parmi les dossiers
ainsi suivis, une place particulière doit être
réservée à l'enquête en cours au tribunal de
Béthune relative à l'agression du gendarme Nivelle par les
hooligans allemands lors du Mondial 98, qui a donné lieu à
plusieurs commissions rogatoires réciproques.
- Extraditions. Le magistrat de liaison français a été
appelé à connaître de 8 extraditions, principalement
requises par la France. A ce jour, elles n'ont guère soulevé de
difficultés juridiques ou pratiques.
•
L'entraide civile
L'essentiel de l'activité du magistrat de liaison français porte
sur le suivi des dossiers de couples franco-allemands divorcés ou
séparés. Ce contentieux, très médiatisé en
raison des drames humains qu'il recouvre, concerne plus d'une soixantaine de
dossiers pour lesquels la France est demanderesse, alors qu'elle n'est requise
par l'Allemagne que dans moins de vingt dossiers. Ces affaires, qui portent
tant sur des questions relatives au déplacement illicite d'enfants que
sur l'organisation des droits de visite ou d'hébergement, mettent en
oeuvre les dispositions des conventions de Luxembourg du 25 mai 1980 et de La
Haye du 25 octobre 1980. Elles sont génératrices, dans leur
traitement judiciaire, de difficultés et de tensions entre les deux
pays, largement relayées par la presse, surtout française. Les
demandes de retour ou d'exequatur formulées par la France connaissent
rarement une issue favorable, et il est assez fréquent de voir les
juridictions allemandes réaménager de manière restrictive
les droits du parent non gardien, sans considération pour une
décision de justice française rendue antérieurement et
ayant le même objet, au motif que la reconnaissance du droit de visite et
d'hébergement du parent non gardien doit se faire avec l'accord du
parent gardien.
Ces difficultés ont conduit, lors du Sommet franco-allemand d'Avignon en
1998, les ministres allemand et français de la Justice, à adopter
le principe de rencontres semestrielles ou trimestrielles des deux
autorités centrales instituées par la convention de la Haye
précitée (Bureau d'entraide judiciaire en matière civile
pour la France, Procureur général près la Cour
fédérale de justice pour l'Allemagne) et dont la mission consiste
à coordonner les actions judiciaires entreprises de part et d'autre de
la frontière dans les dossiers d'enlèvement d'enfants. Par
ailleurs, les deux ministres de la Justice sont convenus, lors du Sommet de
Postdam d'ouvrir à ces affaires la voie d'une médiation
internationale, confiée, par exemple, à des parlementaires
européens. Du côté allemand, une avancée notable
pourrait résulter de la spécialisation régionale de
certaines juridictions dans ce contentieux (compétence
centralisée d'un tribunal par ressort de cour d'appel, au lieu des 680
juridictions compétentes actuellement). Un projet de loi en ce sens a
été présenté en novembre 1998 au Parlement
fédéral et devrait être voté au printemps de cette
année.
CONCLUSION
Dans la mesure où cet accord confère des bases plus solides à une coopération qui a montré sur le terrain tout son intérêt, votre commission vous propose d'adopter le présent projet de loi.
EXAMEN EN COMMISSION
La
commission des affaires étrangères, de la défense et des
forces armées a examiné le présent rapport au cours de sa
réunion du mercredi 26 mai 1999.
A la suite de l'exposé du rapporteur, M. Xavier de Villepin,
président, est revenu sur les situations difficiles que pouvait soulever
l'insuffisance de la coopération judiciaire entre nos deux pays. La
commission a alors approuvé le présent projet de loi.
ANNEXE -
L'ORGANISATION DE LA POLICE EN
RFA
•
La police fédérale
Les services de police nationaux placés sous l'autorité du
ministère de l'Intérieur, dépendent, chacun, d'un
département distinct :
- le
Bundeskriminalamt
(BKA) dont le siège se trouve à
Wiesbaden : il s'agit de la Direction centrale de la police judiciaire,
qui n'est pas une direction opérationnelle, sauf pour certains
délits particuliers (traite internationale des êtres humains,
blanchiment d'argent, certaines expertises, fausse monnaie et terrorisme) Ses
missions essentielles portent sur l'analyse et la synthèse de la
criminalité, les diffusions, les relations internationales, la
coordination avec les autres services de la police, la gestion de certains
fichiers et la centralisation des empreintes digitales...
- le
Bundesverfassungschutzamt
(BVA) -dont le siège est à
Cologne- correspond à notre Direction des renseignements
généraux et notre Direction de la surveillance du territoire. Ses
fonctionnaires n'ont aucune prérogative policière ;
- le
Bundesgrenzschutz
(BGS) : cette direction de police assure la
protection des frontières et la lutte contre l'immigration
irrégulière, mais assume également d'autres missions,
comme la sécurité des trains, la sûreté
aéroportuaire, le maintien de l'ordre avec ses compagnies de
sécurité et autres fonctions d'assistance, de sauvetage et de
garde côtes. La République fédérale allemande est
découpée en cinq " präsidien ", commandés
par un Directeur (präsident). Une direction administrative à
Coblence assure la coordination des éloignements, les règles
administratives, l'expertise des faux documents, l'analyse et la
synthèse des enquêtes, l'élaboration des statistiques et
diverses autres fonctions strictement administratives. Un groupe
d'enquête national se trouve au siège du BGS mais
représente un effectif très restreint.
- Le
Bundesamt für die Amerkennung ausländischer
Flüchtlinge
(BAFL) -dont le siège est à Nuremberg-
gère les demandes d'asile déposées en Allemagne et dispose
de plusieurs antennes décentralisées. Les étrangers
peuvent également effectuer le dépôt de leur dossier
d'asile politique auprès des divers services des étrangers
localement compétents.
•
La police des " länder
"
La République fédérale d'Allemagne est divisée en
16 länder. Chacun dispose d'un ministère de l'Intérieur
régional, qui organise indépendamment de l'administration
fédérale sa police (recrutement, formation, salaire et retraite,
règlement intérieur, lois spécifiques à la police,
équipements divers, locaux et matériels...). D'une façon
générale, les divers " länder " s'inspirent d'une
même organisation.
- Le
Landkiminalamt
, qui peut être assimilé aux Services
régionaux de police judiciaire français, assume globalement les
missions de police judiciaire, mais dispose de plus en plus de laboratoires
d'expertises diverses. Dans certaines régions, il existe un groupe
spécialisé dans les délits relatifs aux étrangers.
- Les "
Präsiden
" comparables à nos Direction
départementales de sécurité publique regroupent des
policiers en civil et en tenue. Leurs compétences ne sont pas
strictement urbaines, mais couvrent également les zones rurales,
l'Allemagne ne disposant pas de gendarmerie. Ces " präsiden "
peuvent également avoir des commissariats décentralisés si
le ressort de compétence est trop étendu.
- Les
groupements de sécurité
proches de nos compagnie
républicaines de sécurité ou encore à nos escadrons
de gardes mobiles assurent essentiellement le maintien de l'ordre dans leur
land mais peuvent également assister les services judiciaires pour
leurs interventions, et également être appelées dans
d'autres länder à leur demande, sans intervention
fédérale.
- Les
Unités de sécurité autoroutière
assurent la police des autoroutes allemandes, tant au niveau préventif
qu'au niveau répressif, et les constats d'accident. En Allemagne, la
police intervient également en matière d'accident
matériel. Dans les länder frontaliers, la police des autoroutes
effectue de plus en plus de contrôles routiers préventifs, pour
lutter contre l'immigration irrégulière.
- La
police fluviale
assume toutes les missions sur les voies d'eau, le
trafic fluvial en Allemagne étant encore très
important.
PROJET DE LOI
(Texte proposé par le Gouvernement)
Article unique
Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne relatif à la coopération dans leurs zones frontalières entre les autorités de police et les autorités douanières (ensemble une déclaration) signé à Mondorf-les-Bains le 9 octobre 1997 et dont le texte est annexé à la présente loi 2( * ) .
ETUDE D'IMPACT3( * )
I.
ETUDE DE DROIT ET SITUATION DE FAIT EXISTANTS ET LEURS INSUFFISANCES
L'article 39 de la convention d'application de l'accord de Schengen impose aux
Etats parties un devoir d'assistance entre leurs services de police aux fins de
la prévention et de la recherche de faits punissables. Le paragraphe 4
de cet article 39 précise que dans les régions
frontalières, la coopération peut être mise en place par
des arrangements entre les ministres compétents des parties
contractantes. Le paragraphe 5 souligne que les dispositions de cet article ne
font pas obstacle aux accords bilatéraux plus complets présents
et futurs entre parties contractantes ayant une frontière commune.
Afin de développer la coopération policière avec les Etats
membres voisins et parties aux accords de Schengen, la France a engagé
des négociations sur la base d'un modèle de convention
transfrontalière policière et douanière établi en
1996 dans le cadre du Comité de coordination de la politique
européenne de sécurité intérieure. Ce modèle
d'accord a été adapté de façon à tenir
compte de la structure fédérale de l'organisation des services
répressifs allemands.
II. BÉNÉFICES ESCOMPTÉS
En matière d'emploi
La coopération entre les services répressifs des parties
contractantes sera conduite notamment dans des centres communs de
coopération policière et douanière, sans que pour autant
des créations d'emplois soient prévues. Des agents de ces
services pourront être détachés en tant que fonctionnaires
de liaison auprès de l'autre partie dans le cadre de l'accord.
En matière d'intérêt général
Cet accord constitue une des mesures compensatoires rendues nécessaires
par la libre circulation des personnes et la levée des contrôles
aux frontières entre les parties. Son objectif est de renforcer la
coopération entre les autorités et services de police et de
douane afin de prévenir les menaces à la sécurité
et à l'ordre public, et de favoriser la prévention et la
recherche de faits punissables.
Il permettra aux services de police et de douane, au sein des centres communs,
de procéder très largement à des échanges
d'informations, qui peuvent porter sur les données à
caractère personnel nécessaires à la recherche de faits
punissables, ainsi qu'à la réadmission de ressortissants d'Etats
tiers, et d'organiser la coordination des interventions mettant en cause les
autorités de différents secteurs.
La coordination est définie de façon large, comprenant
l'harmonisation de mesures de recherche et de surveillance dans la zone
frontalière, l'harmonisation d'interventions et de mesures de recherche
transfrontalière, les activités de soutien pour
l'exécution technique des mesures d'observation et de poursuite
transfrontalières, et des mesures de préparation et d'assistance
dans la remise d'étrangers sur la base des conventions applicables entre
les Parties.
Police et douane pourront aussi coopérer directement, en
échangeant directement des informations, en se communiquant
l'identité des personnes impliquées dans des faits punissables,
par l'intermédiaire de points de contacts désignés. La
coordination de l'intervention des forces, l'institution de groupes mixtes de
contrôle, d'observation et de recherche, pourront conduire à
l'établissement de plans en commun, et à la préparation de
programmes communs de prévention de la criminalité.
En matière financière
L'accord n'a pas d'impact financier direct. La répartition
équitable des coûts relatifs aux centres communs de
coopération fera l'objet d'un accord séparé.
En matière de simplification des formalités administratives
Sans objet.
III. COMPLEXITÉ DE L'ORDONNANCEMENT JURIDIQUE
L'accord complète utilement les dispositions de la convention
d'application de l'accord de Schengen, sans accroître la
complexité de l'ordonnancement juridique.
1
Les statistiques communiquées
à
votre rapporteur ne comprennent pas le mois de décembre.
2
Voir le texte annexé au document Sénat n°161
(1998-1999)
3
Texte transmis par le Gouvernement pour l'information des
parlementaires.