Projet de loi sur les privilèges et immunités d'Europol

MASSON (Paul)

RAPPORT 282 (98-99) - COMMISSION DES AFFAIRES ETRANGERES

Table des matières




N° 282

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999

Annexe au procès-verbal de la séance du 24 mars 1999

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant la ratification du Protocole établissant , sur la base de l'article K. 3 du traité sur l'Union européenne et de l'article 41, paragraphe 3, de la convention Europol, les privilèges et immunités d' Europol , des membres de ses organes, de ses directeurs adjoints et de ses agents,

Par M. Paul MASSON,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Xavier de Villepin, président ; Serge Vinçon, Guy Penne, André Dulait, Charles-Henri de Cossé-Brissac, André Boyer, Mme Danielle Bidard-Reydet, vice-présidents ; MM. Michel Caldaguès, Daniel Goulet, Bertrand Delanoë, Pierre Biarnès, secrétaires ; Bertrand Auban, Michel Barnier, Jean-Michel Baylet, Jean-Luc Bécart, Daniel Bernardet, Didier Borotra, Jean-Guy Branger, Mme Paulette Brisepierre, M. Robert Calmejane, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Marcel Debarge, Robert Del Picchia, Hubert Durand-Chastel, Mme Josette Durrieu, MM. Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, Jean-Claude Gaudin, Philippe de Gaulle, Emmanuel Hamel, Roger Husson, Christian de La Malène, Philippe Madrelle, René Marquès, Paul Masson, Serge Mathieu, Pierre Mauroy, Jean-Luc Mélenchon, René Monory, Aymeri de Montesquiou, Paul d'Ornano, Charles Pasqua, Michel Pelchat, Alain Peyrefitte, Xavier Pintat, Bernard Plasait, Jean-Marie Poirier, Jean Puech, Yves Rispat, Gérard Roujas, André Rouvière.

Voir le numéro :

Sénat : 229
(1998-1999).


Traités et conventions.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Notre Haute Assemblée avait autorisé la ratification de la convention portant création d'un Office européen de police (Europol) le 14 octobre 1997. Ce texte est entré en vigueur le 1 er octobre 1998 après la ratification par les quinze Etats membres de l'Union européenne.

Toutefois le fonctionnement effectif d'Europol demeure subordonné à la mise en place, au bénéfice de cette organisation et de son personnel, d'un régime de privilèges et immunités. Aux termes de l'article 41 de la convention Europol, la définition de ces privilèges et immunités relevait d'un protocole séparé dont la ratification est aujourd'hui soumise à l'autorisation du Sénat.

On peut s'étonner des délais qui séparent l'entrée en vigueur de la convention Europol de la mise en oeuvre des procédures de ratification pour un accord qui en constitue le complément indispensable. Il faut certes tenir compte de l'inévitable lourdeur du système de négociation internationale dans le cadre même de l'Union européenne et reconnaître également que l'activité déployée par l'Unité " drogue " Europol (UDE) mise en place en 1993 et investie par anticipation d'une partie des missions d'Europol rendait moins pressante la mise en place de l'Office européen de police.

L'examen du présent protocole fournit ainsi l'occasion de dresser un bilan de cette unité tout en revenant sur les incertitudes soulevées par le futur fonctionnement d'Europol. Votre rapporteur évoquera ensuite le régime des privilèges et immunités traité par le protocole dans des stipulations de caractère très classique.

I. EUROPOL : UN ORGANISME UTILE DONT LA MISE EN PLACE SOULÈVE CEPENDANT DES INCERTITUDES

A. UN INSTRUMENT AU SERVICE DE LA COOPÉRATION POLICIÈRE EUROPÉENNE

1. Un organisme principalement dévolu à l'échange d'informations

. Une lente maturation

Pour mieux comprendre le rôle confié à Europol, il n'est pas inutile de revenir sur les origines de cet organisme et les débats qui ont marqué sa naissance.

Le Chancelier Kohl, le premier, évoqua en 1988 la création d'une " sorte de police fédérale européenne " sur le modèle du FBI américain. Dès lors deux conceptions s'opposèrent. La première, défendue par l'Allemagne et par les Pays-Bas notamment, visait à conférer à Europol des compétences opérationnelles tout en l'intégrant dans le cadre institutionnel communautaire. La seconde, soutenue par la France et le Royaume-Uni, limitait au contraire le rôle d'Europol à un système d'information mutuel régi par les principes de la coopération intergouvernementale.

Ces oppositions expliquent pour une large part la lenteur de la maturation du projet Europol. Les négociations sur la convention Europol engagées depuis 1991 n'ont ainsi abouti que le 26 juillet 1995.

Dans l'intervalle toutefois, différentes initiatives avaient permis de poser plusieurs jalons.

En juin 1991 le Conseil européen donne son accord à la proposition allemande de créer une structure européenne compétente dans la lutte contre le trafic international de drogue et le crime organisé. En 1993, un accord ministériel signé à Copenhague permet la mise en place à La Haye de l'Unité " drogue " Europol, organisme précurseur de l'Office européen de police sous la forme d'un système d'échange d'informations spécialisées dans le trafic de stupéfiants et le blanchiment d'argent.

. Rôle et composition d'Europol

La convention Europol s'inscrit dans le cadre fixé par le traité de Maastricht en 1992 : " ... les Etats membres considèrent les domaines suivants comme des questions d'intérêt commun : (...)

- la coopération policière en vue de la prévention et de la lutte contre le terrorisme, le trafic illicite de drogue et d'autres formes graves de criminalité internationale, y compris, si nécessaire, certains aspects de coopération douanière, en liaison avec l'organisation à l'échelle de l'Union d'un système d'échange d'informations au sein d'un office européen de police (Europol) ".


La double préoccupation française s'est ainsi trouvée satisfaite :

- Europol a pour mission principale de favoriser l'échange d'informations entre Etats membres et de procéder à l'analyse de ces informations ;

- l'organisation est soumise aux règles de la coopération intergouvernementale.

La compétence d'Europol s'exerce sur des infractions qui répondent à trois critères : elles doivent être le fait d'une organisation criminelle, concerner deux pays au moins et enfin, relever de l'une des grandes formes de criminalité définie, de manière il est vrai, assez large par la convention.

L'Office européen de police assume cinq fonctions principales : favoriser l'échange d'informations entre pays membres, procéder à l'analyse de ces informations, communiquer sans délai aux services compétents les informations qui les concernent, faciliter les enquêtes dans les différents Etats membres en transmettant les informations utiles, gérer, enfin, des recueils d'informations automatisés.

Agence d'information, Europol ne dispose pas de compétences opérationnelles. Les pouvoirs d'enquête demeurent de la stricte compétence des services des Etats membres et s'exercent sous leur responsabilité conformément aux règles procédurales en vigueur dans ces Etats.

L'Office européen de police est placé sous la double autorité d'un conseil d'administration (au sein duquel chaque Etat dispose d'un représentant et d'une voix) et du Conseil de l'Union européenne, organe suprême de décision. Ces deux instances se prononcent en principe à l'unanimité.

Europol dispose de ses propres agents (une centaine en 1999) placés sous l'autorité d'un directeur et tenus de s'acquitter de leurs fonctions " sans solliciter ni accepter d'instructions d'aucun gouvernement, autorité, organisation ou personne extérieure à Europol " (art. 30 de la convention Europol). L'Office européen de police regroupe également des officiers de liaison, chargés de représenter leurs Etats respectifs. Le nombre d'officiers de liaison que chaque Etat peut envoyer auprès de l'organisation est fixé par une décision adoptée à l'unanimité par le conseil d'administration d'Europol.

2. Le bilan positif de l'Unité " drogue " Europol

Même si l'Unité " drogue " Europol ne dispose ni de l'assise juridique, ni de tous les moyens dont bénéficie Europol, elle donne à travers son activité, une image assez fidèle du rôle futur de l'Office européen de police.

En effet, la compétence de l'Unité " drogue " Europol d'abord limitée à la lutte contre le trafic des stupéfiants a été progressivement étendue au trafic illicite de matières radioactives et nucléaires, à la criminalité liée aux filières d'immigration clandestine, au trafic des véhicules volés et au blanchiment de capitaux liés à ces activités et, enfin, à la traite des êtres humains. L'ensemble de ces missions sera repris par Europol, également chargé, deux ans au plus tard après l'entrée en vigueur de la convention, des infractions commises dans le cadre d'activités terroristes .

L'UDE n'a pas de compétence opérationnelle mais a pour seul objectif de favoriser l'échange d'informations. Le cadre fixé à l'activité d'Europol obéira aux mêmes limitations mais, à la différence de l'unité " drogue " Europol, l'Office européen de police disposera d'un système informatisé fondé d'une part sur une base de données relatives aux personnes soupçonnées d'avoir commis une infraction et, d'autre part, sur des fichiers créés aux fins d'analyse dans le but, principalement, d'appuyer l'enquête criminelle.

Le développement de l'activité de l'UDE depuis sa création, souligne l'intérêt et l'utilité de cette structure. Les Etats s'adressent de plus en plus souvent à Europol pour obtenir les informations nécessaires au déroulement des enquêtes ; ainsi les demandes d'échange d'informations sont passées de 2 139 en 1997 à 2 298 en 1998.

L'an passé, la lutte contre le trafic des stupéfiants a représenté 60 % des demandes, le blanchiment de l'argent, 7,7 %, les réseaux d'immigration illégale, 14,7 %, le trafic de voitures, 13,2 %, le trafic des êtres humains 4 %.

Ces échanges ont permis en certaines occasions l'organisation d'opérations communes ; au cours de l'opération Pristina ont été ainsi saisis 170 kg d'héroïne et arrêtées une quarantaine de personnes.

En outre, l'UDE a conduit dans différents domaines qui lui sont confiés, un utile travail de documentation , base d'une coopération plus poussée entre les quinze Etats membres de l'Union européenne.

A cet égard, il convient de citer le quatrième rapport de l'UDE sur la production et le trafic de drogues, destiné à procurer aux Etats une vision d'ensemble sur les problèmes soulevés sur ce sujet à l'échelle européenne. Sur ce chapitre, il faut également mentionner d'autres initiatives : le développement de la base de données Europol Logo (qui recueille des informations sur les pilules d'ecstazy saisies dans l'Union), l'analyse conduite sur les dangers liés à l'usage de nouvelles drogues, la préparation d'un manuel sur les actions contre les laboratoires de stupéfiants.

D'autres initiatives ont été prises récemment :

- en matière d'immigration illégale , des projets contre les réseaux d'immigration en provenance de l'Irak et des Balkans, la mise en place d'un bulletin de liaison et un rapport sur la situation générale en Europe ;

- pour le trafic des êtres humains , un rapport sur cette question dans les pays d'Europe centrale et orientale et l'échange d'informations opérationnelles dans le cadre des réunions d'experts ;

- pour le trafic des véhicules volés , une participation dans les différentes enquêtes engagées sur ce trafic ;

- dans le domaine du blanchiment d'argent , une évaluation de l'efficacité des mesures prises par les Etats membres et une étude préparatoire sur la création d'une base de données sur les transactions douteuses.

Le bilan n'est donc pas négligeable. Toutefois toutes les incertitudes soulevées par Europol et déjà évoquées par votre rapporteur à plusieurs reprises n'ont pas été levées.

B. DES INTERROGATIONS QUI DEMEURENT ENCORE SANS RÉPONSE

1. Une influence française longtemps limitée

La France est représentée par cinq officiers de liaison auprès de l'UDE. Toutefois elle ne compte au sein des agents de cette structure que quatre ressortissants (contre 13 pour l'Allemagne et 23 pour les Pays-Bas) alors même qu'elle prend en charge 18 % du budget d'Europol et figure ainsi au deuxième rang des contributeurs, derrière l'Allemagne. En 1999, le budget d'Europol s'élève à 18,904 millions d'euros y compris les frais de mise en place de l'ordinateur central d'Europol.

Peut-être la France a-t-elle manqué de pugnacité pour obtenir un nombre de postes à la mesure de sa contribution à Europol et de l'intérêt qu'elle peut retirer de cette organisation. Votre rapporteur a souligné ailleurs 1( * ) les difficultés de la France -liées en partie à l'organisation administrative et institutionnelle de notre pays- à s'engager dans la coopération policière internationale

L'enjeu se cristallise aujourd'hui sur le renouvellement de l'équipe de direction d'Europol attendue pour les semaines qui viennent. Les autorités françaises ont confirmé à votre rapporteur que l'un des postes de directeur adjoint reviendrait à un Français. L'attention doit également porter sur une meilleure représentation française au sein du personnel attaché à Europol.

2. Le risque d'inefficacité en pratique des mécanismes de contrôle d'Europol

Votre rapporteur s'était déjà inquiété des conditions de contrôle de l'Office européen de police.

Sans doute le directeur d'Europol est-il responsable devant le conseil d'administration et peut être révoqué par le Conseil des ministres de l'Union européenne statuant à la majorité des deux tiers des voix des Etats membres après avis du conseil d'administration.

Cependant, le conseil d'administration d'Europol se réunit en principe deux fois par an. Or dans un domaine aussi technique et complexe que l'activité policière internationale, on peut douter que le conseil d'administration puisse exercer un réel contrôle sur le directeur général et ses adjoints dont les propositions risquent fort d'être entérinées par l'autorité politique sans un examen suffisant.

L'inquiétude se cristallise également sur le statut de l'autorité de contrôle d'Europol chargée de veiller sur le bon déroulement des activités de l'institution et, en particulier, au respect des droits individuels sur la collecte, le stockage, l'utilisation et la transmission des données. La France plaide pour le régime d'une autorité administrative indépendante retenu par exemple pour la Commission Informatique et Libertés. L'Allemagne et l'Autriche privilégient une autorité juridictionnelle qui toutefois permettra une publicité des débats qui, dans les domaines couverts par Europol, n'apparaît pas opportune. Les divergences sur ce thème n'ont pas encore été tranchées mais un compromis pourrait aboutir en mai prochain.

3. Une extension des compétences pour l'avenir

La question du contrôle de l'activité d'Europol prend une importance d'autant plus grande que les compétences de cet organisme seront accrues après l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam . En effet ce texte invite le Conseil, dans un délai de cinq ans, à prendre une triple série de mesures :

- la possibilité pour Europol d'appuyer la mise en oeuvre d'activités spécifiques d'enquêtes conduites par les autorités compétentes des Etats membres, y compris des actions opérationnelles d'équipes conjointes comprenant des représentants d'Europol ;

- la capacité pour Europol de développer des compétences spécialisées au service des Etats membres pour les enquêtes conduites sur la criminalité organisée ;

- la possibilité pour Europol de demander aux autorités compétentes de mener et de coordonner leurs enquêtes dans des affaires précises.

Cette dernière stipulation en particulier, pourrait conduire Europol à exercer une forme d' injonction sur les Etats et à lui conférer des compétences opérationnelles qui lui ont précisément été refusées par la convention Europol. Une telle évolution ne serait donc conforme ni au caractère intergouvernemental d'Europol, ni à la vocation de l'organisation.

Par ailleurs le Conseil doit favoriser le rapprochement entre magistrats et enquêteurs et permettre la mise en place d'un réseau de recherche, de documentation et de statistiques sur la criminalité transfrontalière.

Seule l'expérience permettrait de justifier un élargissement des missions d'une organisation dont il faut rappeler qu'elle n'est pas encore mise en place. Une telle évolution restera toutefois subordonnée à une décision du Conseil des ministres de l'Union européenne, appelé en la matière, à se prononcer à l'unanimité. La France devra donc faire montre de vigilance sur des initiatives qui pourraient se révéler prématurées.

4. La coordination avec les autres instances de coopération policière

La multiplication des enceintes dévolues à la coopération policière constitue une source possible de confusion et de redondance.

Le partage des rôles entre Europol et les structures Schengen -en particulier le système d'information Schengen- désormais intégré à l'Union européenne, mais aussi entre Europol et Interpol appelle une clarification. Europol pourra toutefois, comme le lui permet la convention de 1995, signer des accords avec des organismes tiers afin de formaliser les responsabilités respectives en matière de coopération policière internationale.

II. LE PROTOCOLE SUR LES PRIVILÈGES ET IMMUNITÉS : LA NÉCESSITÉ D'UNE ENTRÉE EN VIGUEUR RAPIDE

A. UN PROTOCOLE DONT L'ENTRÉE EN VIGUEUR CONDITIONNE LE FONCTIONNEMENT EFFECTIF D'EUROPOL

Aux termes de l'article 45 de la convention Europol, l'activité de cet organisme débutera lorsque différents actes prévus par la convention elle-même seront entrés en vigueur :


• les droits et obligations des officiers de liaison déterminés à l'unanimité par le conseil d'administration -art. 5 § 7;


• les règles d'application sur les fichiers préparés par le conseil d'administration et arrêtées à l'unanimité par le Conseil -art. 10 § 1 ;


• le règlement intérieur de l'autorité de contrôle commune soumis à l'approbation unanime du Conseil -art. 24 § 7 ;


• le statut du personnel d'Europol arrêté par le Conseil à l'unanimité -art. 30 § 3 ;


• la réglementation en matière de protection du secret adoptée à l'unanimité par le Conseil -art. 31 § 1 ;


• le règlement financier d'Europol arrêté à l'unanimité par le Conseil -art. 35 § 9 ;


• l'accord de siège conclu, après approbation à l'unanimité par le conseil d'administration -art. 37 ;


• enfin, le régime des privilèges et immunités des officiers de liaison au sein d'Europol (art. 41 § 2) et le régime des privilèges et immunités d'Europol et de ses personnels (art. 41 § 1).

Le dernier de ces actes a été adopté, sous la forme d'un protocole, à l'unanimité par le Conseil le 19 juin 1997. Ce protocole, comme le prévoyait la convention Europol, devait ensuite être " adopté par les Etats membres selon leurs règles constitutionnelles respectives " (art. 41 § 3). Or, dans la mesure où ce protocole comporte différentes stipulations d'ordre fiscal et engage ainsi les finances de l'Etat, seul parmi les différents actes prévus par la convention, il requiert une ratification autorisée par le parlement français en vertu de l'article 53 de notre Constitution. Tel est l'objet du présent projet de loi.

S'agissant des officiers de liaison, le régime des privilèges et immunités nécessaires à l'accomplissement de leurs tâches est fixé par convention, en termes identiques, entre les Pays-Bas, siège d'Europol, d'une part et les autres Etats membres d'autre part.

Le statut provisoire des officiers de liaison français affectés à l'UDE avait été établi par deux échanges de notes en date du ler décembre 1994 et du 15 janvier 1995 entre le ministère des affaires étrangères français et l'Ambassade des Pays-Bas à Paris. Il a été complété par deux autres échanges de notes permettant aux personnels affectés à l'UDE de jouir des privilèges et immunités : " ...qui reviennent, en vertu de la convention de Vienne du 18 avril 1961 sur les relations diplomatiques, aux membres du personnel administratif et technique des missions diplomatiques établies aux Pays-Bas, étant entendu que le régime des immunités ne s'appliquera pas dans les cas de dommages causés par des véhicules ou d'autres moyens de transports qui leur appartiennent ou qu'ils conduisent ni aux infractions au code de la route et que l'immunité de la juridiction pénale ne s'appliquera pas aux actes accomplis en dehors de l'exercice de leurs fonctions ". Ce statut a été renouvelé, sur une base définitive, cette fois, par un dernier échange de lettres, en décembre et février derniers.

B. UN TEXTE AUX STIPULATIONS CLASSIQUES

Le protocole établissant les privilèges et immunités d'Europol et de ses personnels ne comporte pas de stipulations spécifiques qui le distinguerait des textes de même nature adoptés pour d'autres organisations internationales. En particulier, toutes les matières couvertes par le protocole se retrouvent dans l'accord signé entre la France et Interpol relatif aux immunités et privilèges de cette organisation sur le territoire français.

• les privilèges et immunités d'Europol

Le dispositif relatif aux privilèges et immunités d'Europol s'articule autour de quatre stipulations principales :

- l'immunité de juridiction et une exemption de perquisition, saisie, réquisition, confiscation et toute autre forme de contrainte (art. 2) ;

- l'inviolabilité des archives d'Europol (art. 3) ;

- l'exonération d'impôts et de droits dans le cadre des fonctions officielles de l'organisme (art. 4) ;

- les facilités et immunités relatives aux communications (art. 6) ;

• les privilèges et immunités des personnels d'Europol :

- immunités de juridiction pour toutes les paroles prononcées ou écrites et pour les actes accomplis dans l'exercice des fonctions officielles (art. 8 § 1) ;

- inviolabilité de tous les documents officiels (Ibidem) ;

- exonération de l'impôt sur le revenu pour les traitements sous réserve, notamment, du versement par les personnels d'Europol d'un impôt à cet organisme sur les traitements qu'ils perçoivent dans le cadre de leurs fonctions ; cette exonération ne s'applique pas aux retraites versées aux anciens membres du personnel d'Europol (art. 8 § 2).

La protection liée au régime des immunités n'est ni systématique, ni définitive.

Elle n'est pas systématique car elle ne s'étend pas aux actions civiles engagées par un tiers en cas de dommages corporels ou d'homicide, survenus lors d'un accident de la circulation causé par les personnels d'Europol (art. 9).

La protection n'est pas davantage définitive. En effet, les privilèges et immunités sont conférés dans l'intérêt d'Europol et non dans l'intérêt du personnel de cet organisme (art. 12 § 1).

Dès lors, le directeur de cette institution est tenu de lever l'immunité dont bénéficient Europol et les membres du personnel d'Europol au cas où cette immunité entraverait l'action de la justice et où il peut la lever sans nuire aux intérêts d'Europol. Une telle décision s'agissant du directeur d'Europol, du contrôleur financier et des membres du comité budgétaire incombe au conseil d'administration.

CONCLUSION

Le renforcement de la coopération policière européenne au moment où les différents réseaux de criminalité -stupéfiants, immigration clandestine...- se jouent des frontières constitue une priorité.

La mise en place effective d'Europol que permettra la ratification du protocole relatif aux privilèges et immunités de cette organisation peut constituer un jalon utile dans l'effort de coordination nécessaire.

C'est pourquoi, malgré les incertitudes soulevées par l'organisation d'Europol -incertitudes qu'il conviendra de dissiper dans les mois à venir-, votre commission vous invite à adopter le présent projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a examiné le présent projet de loi lors de sa séance du 24 mars 1999.

A la suite de l'exposé du rapporteur, M. Emmanuel Hamel a souhaité obtenir des précisions sur les relations entre Interpol et Europol.

M. Paul Masson, rapporteur, a souligné que la compétence d'Interpol s'étendait au monde entier ainsi qu'à l'ensemble des crimes et délits, qu'ils soient ou non le fait d'une organisation structurée. Il a souligné qu'il existait davantage de liens entre Europol et le système d'information Schengen qui comprenait aujourd'hui près d'un million de données et qui pouvait être interrogé par Europol par l'intermédiaire des officiers de liaison représentant, au sein de cette institution, chacun des Etats-membres.

M. André Dulait s'est interrogé sur les relations entre Europol et les Etats candidats à l'adhésion de l'Union européenne.

M. Paul Masson a observé à cet égard que l'Union européenne avait envisagé que des officiers de liaison des pays de l'Europe centrale et orientale, candidats à l'adhésion de l'Union européenne, puissent être rapidement affectés à Europol afin d'intensifier la coopération en matière de lutte contre le crime organisé.

M. Xavier de Villepin, président, a demandé au rapporteur de préciser les domaines d'attribution d'Europol.

M. Paul Masson a relevé que la compétence d'Europol portait sur cinq grandes formes de criminalité (le trafic illicite de stupéfiants, le trafic illicite de matières nucléaires et radioactives, les filières d'immigration clandestine, la traite des êtres humains, et le trafic des véhicules volés) et qu'elle s'étendrait en outre, deux ans au plus tard après l'entrée en vigueur de la convention, aux infractions commises dans le cadre d'activités de terrorisme. Il a rappelé que l'activité déployée par Europol dans ces différents domaines s'inscrivait dans le cadre strict de l'échange d'informations. Il a noté à cet égard que si la tradition policière française ne reposait pas sur la systématisation de procédures informatisées, comme cela pouvait être le cas avec Europol, il était toutefois important que la France soit mieux représentée au sein de cet organisme afin de pouvoir en tirer le meilleur parti.

La commission a alors approuvé le projet de loi qui lui était soumis.

PROJET DE LOI

(Texte proposé par le Gouvernement)

Article unique

Est autorisée la ratification du Protocole établissant, sur la base de l'article K.3 du traité sur l'Union européenne et de l'article 41, paragraphe 3, de la convention Europol, les privilèges et immunités d'Europol, des membres de ses organes, de ses directeurs adjoints et de ses agents, fait à Bruxelles le 19 juin 1997, et dont le texte est annexé à la présente loi. 2( * )


1 Paul Masson, Alex Turk - Quand les policiers succèdent aux diplomates... Assurer la présence de la France dans la coopération policière européenne, rapport d'information n° 523, 1997-1998.

2 Voir le texte annexé au document Sénat n° 229.



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