Projet de loi sur l' innovation et la recherche
LAFFITTE (Jacques)
RAPPORT 217 (98-99) - commission des affaires culturelles
Table des matières
-
INTRODUCTION
- I. DÉVELOPPER LA MOBILITÉ DES CHERCHEURS VERS LES ENTREPRISES
- II. FAVORISER LES COOPÉRATIONS ENTRE LA RECHERCHE PUBLIQUE ET LES ENTREPRISES
- III. FAVORISER FISCALEMENT L'INNOVATION
- EXAMEN DES ARTICLES
- EXAMEN EN COMMISSION
N°
217
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Annexe au procès-verbal de la séance du 11 février 1999
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur le projet de loi sur l' innovation et la recherche ,
Par M.
Pierre LAFFITTE,
Sénateur.
(1)
Cette commission est composée de :
MM. Adrien Gouteyron,
président
; Jean Bernadaux, James Bordas, Jean-Louis
Carrère, Jean-Paul Hugot, Pierre Laffitte, Ivan Renar,
vice-présidents
; Alain Dufaut, Ambroise Dupont, André
Maman, Mme Danièle Pourtaud,
secrétaires
;
MM. François Abadie, Jean Arthuis, Jean-Paul Bataille, Jean
Bernard, André Bohl, Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Michel
Charzat, Xavier Darcos, Fernand Demilly, André Diligent, Michel
Dreyfus-Schmidt, Jean-Léonce Dupont, Daniel Eckenspieller, Jean-Pierre
Fourcade, Bernard Fournier, Jean-Noël Guérini, Marcel Henry, Roger
Hesling, Pierre Jeambrun, Serge Lagauche, Robert Laufoaulu, Jacques Legendre,
Serge Lepeltier, Louis Le Pensec, Mme Hélène Luc,
MM. Pierre Martin
,
Jean-Luc Miraux, Philippe Nachbar,
Jean-François Picheral, Guy Poirieux, Jack Ralite, Victor Reux,
Philippe Richert, Michel Rufin, Claude Saunier, Franck Sérusclat,
René-Pierre Signé, Jacques Valade, Albert Vecten, Marcel Vidal.
Voir les numéros :
Sénat
:
152
et
210
(1998-1999).
Recherche. |
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
L'innovation est désormais enfin reconnue dans les milieux industriels,
technologiques et politiques comme un élément essentiel de la
croissance et un facteur déterminant de la création d'emplois. Le
contexte de mondialisation croissante se traduit par un processus
d'accélération de la mise sur le marché des produits
nouveaux. Les entreprises sont donc condamnées à une forte
réactivité. L'appropriation rapide de l'innovation par les
entreprises est la seule solution pour assurer durablement
compétitivité et rentabilité.
Ce lien entre croissance et innovation est aujourd'hui unanimement reconnu
comme l'illustrent les nombreux rapports parus sur le sujet.
1(
*
)
Mais innovation n'est pas synonyme de recherche bien qu'elle soit de plus en
plus liée à la recherche. Elle est liée aux idées
qui peuvent entrer en application, conduire à des produits et à
des services qui eux-mêmes doivent trouver un marché grâce
à des transferts ou créations d'entreprises.
Or, en ce domaine, la France accuse un retard inquiétant. Parmi les
causes de cette situation, figure l'insuffisance des mécanismes de
passage de l'idée au produit ou service et d'étude pour passer
à l'industrialisation de ce produit ou service. L'importance de l'effort
public de recherche si on le compare à la faiblesse de notre position
technologique mérite une réflexion et des actions
énergiques.
L'article 14 de la loi n° 82-610 du 15 juillet 1982 d'orientation et
de programmation pour la recherche et le développement technologique de
la France précise que la valorisation de ses résultats constitue
un des objectifs de la recherche publique.
Néanmoins, force est de constater que cette activité est souvent
encore considérée comme secondaire par le monde de la recherche.
En outre la population en général ne se rend pas assez compte que
ce sont désormais les innovations scientifiques et technologiques qui
permettent de créer des richesses et des emplois. La diffusion
très large et de façon systématique de la culture
scientifique et technique est nécessaire. Votre commission à cet
égard a largement évoqué ces problèmes et, par
exemple, a fortement contribué à la création de la
chaîne du savoir, considérant que le média
télévisuel était un véhicule utile.
De même, à l'initiative de votre rapporteur, le Sénat a
adopté le 22 octobre 1998 une proposition de loi permettant aux
fonctionnaires du service public de la recherche de participer à la
création d'entreprises innovantes (AN, n° 1146, 1998-1999) que
votre rapporteur avait déposé et qui avait été
rapportée par le président de votre commission.
Toute avancée en la matière ne peut être que
bénéfique.
Le projet de loi sur l'innovation et la recherche qui est soumis au
Sénat ne résout évidemment pas les multiples
problèmes qui se posent à la société
française. Sans doute avons-nous trop oublié le dynamisme
innovateur qui, il y a un siècle, nous avait placé à
l'avant-garde du progrès technique. Mais il constitue de l'avis de tous
les milieux que votre rapporteur a pu consulter une avancée
intéressante. Toutefois, tous regrettent que les mesures fiscales
proposées soient insuffisantes
*
* *
Le
projet de loi reprend l'essentiel des dispositions de la proposition de loi
susmentionnée. Il propose, en outre, des mesures d'importance et de
nature diverses pour lever certains des obstacles qui s'opposent à la
diffusion des résultats de la recherche publique et à la
création d'entreprises innovantes.
Les mesures proposées répondent à trois
préoccupations :
- faciliter la mobilité des chercheurs vers l'entreprise ;
- favoriser les coopérations entre la recherche publique et les
entreprises et encourager les actions de valorisation des organismes de
recherche et des universités, notamment en créant des incubateurs
;
- enfin, créer des conditions fiscales favorables aux entreprises
innovantes, objectif légitime mais qui se réduit à une
mesure unique très utile mais, à notre avis, de trop faible
portée.
I. DÉVELOPPER LA MOBILITÉ DES CHERCHEURS VERS LES ENTREPRISES
Le projet de loi reprend les deux mesures déjà adoptées par le Sénat en les complétant par une troisième d'une nature un peu différente.
A. INCITER LES FONCTIONNAIRES À APPORTER LEUR CONCOURS À UNE ENTREPRISE DE VALORISATION
Le dispositif proposé par le paragraphe IV de l'article premier du projet de loi pour les articles 25-1 et 25-2 nouveaux de la loi n° 82-610 du 15 juillet 1982 précitée en précisant les conditions dans lesquelles les fonctionnaires du service public de la recherche peuvent participer à la création d'une entreprise de valorisation ou lui apporter leur concours scientifique s'inspire très largement de celui adopté par le Sénat.
1. Le dispositif proposé répond à la nécessité d'adapter les règles statutaires de la fonction publique
Les
entreprises créées à l'initiative des chercheurs ont un
taux de réussite supérieure à la moyenne et sont
très créatrices d'emplois. Pourtant, leur nombre reste
insuffisant. On estime à un pour mille le nombre de chercheurs
créant chaque année une telle entreprise et à 50 le nombre
d'entreprises de ce type créées depuis 10 ans. Votre rapporteur
estime que ces chiffres sont sous-évalués. L'opacité est
de règle puisque l'on a pu dire que bien des entreprises innovantes
s'étaient créées " au noir ", ce qui justifie
l'urgence de légiférer en la matière.
L'inadaptation des règles statutaires de la fonction publique constitue
à l'évidence un des obstacles principaux à la diffusion de
l'innovation par la création d'entreprises de haute technologie adaptant
au marché les résultats de la recherche publique et les
complétant par les développements nécessaires.
Le statut général de la fonction publique ainsi que le code
pénal comportent des dispositions très restrictives concernant
les liens pouvant s'établir entre un fonctionnaire et une entreprise.
Celles-ci sont incompatibles avec la création d'entreprises par des
chercheurs à partir des résultats de leurs travaux,
démarche qui implique dans la pratique une interaction entre
l'entreprise et le service public de la recherche.
L'article 25 du statut de la fonction publique dispose, en effet, que
"
les fonctionnaires (...) ne peuvent exercer à titre
professionnel une activité privée de quelque nature que ce
soit
", précisant que les conditions de dérogation
à cette règle sont fixées par décret en Conseil
d'Etat. Ce dernier n'étant jamais intervenu, s'applique encore le
décret-loi du 29 octobre 1936 qui détermine les exceptions
à la règle d'interdiction de cumul d'emplois et de
rémunérations, prévoyant notamment que le cumul peut
être autorisé quand il s'agit d'enseignement, d'expertises ou de
consultations.
Par ailleurs, le même article dispose également que "
les
fonctionnaires ne peuvent prendre, par eux-mêmes ou par personnes
interposées, dans une entreprise soumise au contrôle de
l'administration à laquelle ils appartiennent
ou en relation avec
cette dernière
, des intérêts de nature à
compromettre leur indépendance
".
A cette règle, s'ajoutent deux articles du code pénal qui
sanctionnent la prise illégale d'intérêts, l'article 432-12
réprimant "
le fait, par une personne
(...)
chargée d'une mission de service public
(...),
de prendre,
recevoir ou conserver
(...)
un intérêt quelconque dans une
entreprise
(...)
dont elle a, au moment de l'acte, en tout ou partie, la
charge d'assurer la surveillance, l'administration
(...) " et
l'article 432-13 punissant tout fonctionnaire ayant été
chargé en raison de sa fonction "
soit d'assurer la surveillance
ou le contrôle d'une entreprise privée, soit de conclure des
contrats de toute nature avec une entreprise privée
" lorsqu'il
s'est rendu coupable "
de prendre ou de recevoir une participation par
travail, conseil ou capitaux dans l'une de ces entreprises avant l'expiration
d'un délai de cinq ans suivant la cessation de cette fonction
".
Ces règles visent à prévenir tout conflit
d'intérêt entre le service public et les fonctionnaires en
garantissant l'indépendance de ces derniers. Elles sont
complétées par des règles spécifiques aux
personnels du service public de la recherche.
La loi n° 82-610 du 15 juillet 1982 d'orientation et de programmation pour
la recherche et le développement technologique de la France comme la loi
n° 84-52 du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur
qui ont souligné l'importance de la valorisation de la recherche en font
une des missions de la recherche et de l'enseignement supérieur.
A ce titre, l'article 26 de la loi du 15 juillet 1982 précitée
précise que les statuts particuliers des personnels des
établissements publics à caractère scientifique et
technologique (EPST) peuvent permettre "
des adaptations au
régime des positions prévues par le statut général
des fonctionnaires et des dérogations aux règles relatives aux
mutations afin de faciliter la libre circulation des hommes et des
équipes entre les métiers de la recherche et les institutions qui
y concourent
".
Le décret n° 83-1260 du 30 décembre 1983 fixant
les dispositions statutaires communes aux corps de fonctionnaires des EPST a
ainsi prévu dans ses articles 243 à 245 trois catégories
de position dérogeant aux règles applicables à l'ensemble
des fonctionnaires.
• En vertu de l'article 243, les fonctionnaires des EPST peuvent, pour
une durée de cinq ans renouvelable, être détachés
dans des entreprises, des organismes privés ou des groupements
d'intérêt public lorsque ce détachement est effectué
pour exercer notamment des fonctions de recherche ou de mise en valeur des
résultats de la recherche, sous réserve que
l'intéressé n'ait pas eu, au cours des cinq dernières
années, soit à exercer un contrôle sur l'entreprise ou
l'organisme privé, soit à participer à
l'élaboration ou à la passation de marchés avec lui.
• L'article 244 prévoit que ces fonctionnaires peuvent
également être mis à disposition d'entreprises, notamment
afin d'assurer le transfert des connaissances et leur application dans les
entreprises et ce pour une durée maximale de trois ans renouvelable.
• Enfin, aux termes de l'article 245, les fonctionnaires peuvent
être mis en disponibilité, pour une durée maximum de trois
ans renouvelable, pour créer une entreprise à des fins de
valorisation de la recherche. Cette possibilité est néanmoins
limitée par les dispositions de l'article premier du décret
n°95-168 du 17 février 1995 relatif à l'exercice
d'activités privées par des fonctionnaires placés en
disponibilité qui leur interdit notamment l'exercice d'activités
"
professionnelles dans une entreprise privée lorsque
l'intéressé a été, au cours des cinq
dernières années (...) précédant sa mise en
disponibilité, chargé en raison même de sa fonction (...)
de passer des marchés ou contrats avec cette entreprise ou d'exprimer un
avis sur de tels marchés ou contrats
" et
d'"
activités lucratives, salariées ou non (...) si par
leur nature ou leurs conditions d'exercice et eu égard aux fonctions
précédemment exercées (elles) portent atteinte à
(leur) dignité ou risquent de compromettre ou mettre en cause le
fonctionnement normal, l'indépendance ou la neutralité du
service.
".
Les statuts des enseignants-chercheurs comportent des dispositions similaires.
Outre les possibilités de détachement, ils prévoient que
les enseignants-chercheurs peuvent être placés, pour une
durée de quatre ans au plus, en délégation soit dans une
entreprise soit pour créer une entreprise. Cette position, propre au
statut des enseignants-chercheurs, suppose au-delà des six premiers mois
le versement par l'entreprise d'une contribution au moins équivalente
à l'ensemble de la rémunération de
l'intéressé au profit de l'établissement d'origine du
chercheur. Dans le cas d'une création d'entreprise, une convention est
passée avec l'Agence nationale de valorisation de la recherche.
Ces règles qui sont certes favorables dans la mesure où elles
ouvrent au chercheur qui participe à la création ou au
développement d'une entreprise de valorisation un droit à
réintégration, n'apparaissent pas adaptées aux
modalités dans lesquelles de telles entreprises se constituent dans la
pratique.
En effet, elles reposent sur l'interdiction faite aux chercheurs d'appartenir
au service public et en même temps de participer à la
création d'une entreprise. Or, le succès des entreprises
innovantes créées à partir des résultats de la
recherche publique tient précisément dans l'imbrication de ces
deux mondes.
Un rapport public particulier de la Cour des comptes publié en juin 1997
consacré à la valorisation de la recherche dans les EPST
relevait, à ce propos, que "
l'état actuel de la
réglementation place souvent (les personnels de recherche) devant la
difficile alternative, soit de ne pas répondre aux invitations de la
loi
2(
*
)
, soit de risquer de se mettre en
infraction avec le droit existant
".
En effet, le fonctionnaire qui souhaite créer une entreprise est
contraint de " faire le grand saut " puisque, tant qu'il n'est pas en
position de disponibilité, la négociation de contrats de
collaboration ou de licence, qui sont à l'origine de la création
d'une entreprise de valorisation ne peut avoir lieu. Les règles
statutaires comme celles du code pénal imposent donc au fonctionnaire de
rompre tout lien avec le service public avant d'entreprendre toute
démarche, ce qui est en contradiction avec l'idée de l'essaimage.
Il faut bien comprendre que le passage d'une idée de valorisation d'un
résultat scientifique vers un projet de création d'entreprise
nécessite un temps de maturation, et donc une disponibilité du
chercheur, et suppose également pour ce dernier de se former aux aspects
juridiques, administratifs, financiers liés à la création
et à la gestion d'une entreprise. Ensuite sont également
nécessaires des dépenses de développement et
d'études de marché qui sont souvent d'un ordre de grandeur tel
que les budgets des établissements ne peuvent les supporter. Il s'agit
là d'une des causes de la faiblesse de la France en matière
d'innovation.
De même, un fonctionnaire ne peut prendre de participation au capital
d'une entreprise innovante qui a pour origine ses propres travaux de recherche
dès lors qu'elle est liée par un contrat à la personne
publique dont il relève. Or, sa participation au capital s'avère,
dans bon nombre de cas, essentielle. Compte tenu de la faiblesse des
mécanismes de soutien financier à l'innovation , les
investisseurs éventuels considèrent que même si
l'intéressé ne souhaite pas quitter son laboratoire, il doit
à tout le moins montrer qu'il croit à la viabilité de son
projet en risquant une part de ses avoirs.
2. Les deux mesures proposées par le projet de loi
L'article premier du projet de loi complète la loi du
15 juillet 1982 sur la recherche par deux articles nouveaux. On analysera
successivement ces deux articles.
•
L'article 25-1 nouveau : la participation du fonctionnaire en
qualité d'associé à la création d'une entreprise de
valorisation
Cet article précise le cadre statutaire dans lequel le chercheur peut
" essaimer ", c'est-à-dire quitter son laboratoire pour
créer une entreprise. Il prévoit que le fonctionnaire peut
être autorisé à participer, en qualité
d'associé ou de dirigeant, à la création d'une entreprise
dont l'objet est de valoriser ses travaux de recherche en vertu d'un contrat
conclu avec la personne publique dont il relève et l'entreprise.
Afin d'éviter tout conflit d'intérêt entre chercheur et
l'établissement dont il relève, il prévoit que le
fonctionnaire ne peut participer à la négociation du contrat en
qualité de représentant du service public et que l'autorisation
doit être demandée préalablement à celle-ci.
Le projet de loi dispose que l'autorisation est accordée par
l'autorité dont relève le fonctionnaire après avis du
conseil d'administration de son établissement et de la commission de
déontologie prévue à l'article 87 de la loi
n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention
de la corruption et à la transparence de la vie économique et des
procédures publiques. Cette commission, rappelons-le, est
compétente pour "
apprécier la compatibilité avec
leurs fonctions précédentes des activités que souhaitent
exercer en dehors de leur administration des fonctionnaires devant cesser ou
ayant cessé définitivement leurs fonctions par suite de leur
radiation des cadres ou devant être placés en position de
disponibilité
".
A compter de la date d'effet de l'autorisation, l'intéressé est
soit détaché dans l'entreprise, soit mis à disposition de
celle-ci ou d'un organisme qui concourt à la valorisation de la
recherche.
Au terme de l'autorisation, le fonctionnaire a le choix entre, d'une part,
réintégrer son corps d'origine et, éventuellement,
continuer à collaborer avec l'entreprise en lui apportant son concours
scientifique dans le cadre des dispositions de l'article 25-2, et, d'autre
part, rester dans l'entreprise en demandant sa mise en disponibilité ou
sa radiation des cadres.
L'économie générale de ce dispositif, qui s'inspire
très étroitement de celui adopté par le Sénat, ne
peut que recueillir le soutien de votre commission dans la mesure où il
offre un cadre juridique clair aux chercheurs désireux de créer
une entreprise. Votre commission a souhaité alléger la
procédure de délivrance de l'autorisation en supprimant
l'obligation de consulter le conseil d'administration de l'établissement
dont relève le fonctionnaire Votre rapporteur pense toutefois qu'il
conviendra que l'autorité dont relève le fonctionnaire rende
compte au conseil d'administration des autorisations qu'elle a
délivrées mais qu'il n'y ait pas de débat préalable
au sein du conseil, qui se réunit en fait trop rarement pour être
en la matière opérationnel.
•
L'article 25-2 nouveau : le concours scientifique apporté
par un fonctionnaire à une entreprise de valorisation
L'article 25-2 nouveau qu'il est proposé d'introduire dans la loi du 15
juillet 1982 permet à un chercheur d'apporter, pour une période
de 5 ans renouvelable, son concours scientifique à une entreprise
assurant, en vertu d'un contrat conclu avec la personne publique dont il
relève, la valorisation des travaux qu'il a réalisés dans
l'exercice de ses fonctions.
Votre commission a constaté avec satisfaction que le gouvernement
reprenait à son compte l'essentiel du dispositif proposé par le
Sénat. Cette mesure apparaît opportune dans la mesure où
elle permet de prévoir une position intermédiaire entre la simple
consultance, encadrée par le décret-loi de 1936, et le
départ dans l'entreprise, que ce soit par le biais de la mise à
disposition, du détachement ou de la mise en disponibilité.
Dans cette hypothèse, le fonctionnaire demeure au sein du service public
de la recherche, le concours scientifique devant être pleinement
compatible avec le plein exercice de son emploi public. Cette condition
n'exclut pas que ses obligations à ce titre puissent être
aménagées, notamment par un temps partiel, afin de lui permettre
de se consacrer plus largement à la collaboration avec l'entreprise.
Les modalités de cette collaboration sont prévues dans le cadre
d'une convention ; elles peuvent inclure le versement d'une
rémunération au profit du chercheur. Une telle solution permet
donc d'aménager de manière très souple le concours
scientifique. Cette souplesse est selon les responsables des organismes de
recherche une condition nécessaire pour permettre à ce dispositif
d'être efficace. D'après les informations communiquées
à votre rapporteur, ce dispositif sera complété par des
textes réglementaires aménageant les positions statutaires des
chercheurs afin de préciser notamment les caractéristiques de la
mise à disposition à temps partiel.
Dérogeant sur ce point aux dispositions du droit commun, le projet de
loi prévoit que cette collaboration peut s'accompagner d'une prise de
participation au capital de l'entreprise, dans la limite de 15 %.
Afin d'éviter les conflits d'intérêts entre le
fonctionnaire et la personne publique dont il relève, l'article 25-2
nouveau précise que l'intéressé ne peut participer
à l'élaboration ni à la passation des contrats et
conventions conclus entre l'entreprise et le service public de la recherche. En
outre, afin de garantir l'indépendance du concours scientifique, le
projet de loi précise que le fonctionnaire ne peut occuper au sein de
l'entreprise des fonctions de dirigeant ni être placé dans une
situation hiérarchique.
B. LA PARTICIPATION DES FONCTIONNAIRES À DES CONSEILS D'ADMINISTRATION OU DE SURVEILLANCE DE SOCIÉTÉS ANONYMES
Afin de
favoriser la diffusion des résultats de la recherche publique par la
mobilité des personnels, le projet de loi prévoit, au delà
des deux mesures déjà proposées par le Sénat, une
troisième mesure d'une nature sensiblement différente.
L'article 25-3 nouveau que l'article premier propose d'insérer dans la
loi du 15 juillet 1982 prévoit que les chercheurs et les
enseignants-chercheurs pourront, à titre personnel, être
autorisés à être membre du conseil d'administration ou du
conseil de surveillance d'une société anonyme "
afin de
favoriser la diffusion des résultats de la recherche publique et
d'encourager le développement de la recherche dans les entreprises
privées
".
Une telle disposition apparaît très largement dérogatoire
au droit commun découlant des obligations de
désintéressement et d'exclusivité professionnelle qui
résultent de l'article 25 du code de la fonction publique.
On rappellera que jusqu'ici les possibilités pour un fonctionnaire de
participer aux conseils d'administration ou de surveillance d'une
société anonyme ont été définies de
manière très restrictive.
Votre rapporteur s'est longuement interrogé sur l'intérêt
d'une telle disposition.
Selon les informations qui lui ont été fournies, elle pourrait
par exemple, permettre à des professeurs d'économie ou de gestion
ou encore de droit de participer aux conseils de surveillance ou
d'administration de grandes entreprises. On serait alors assez loin de
l'encouragement à la création de PME innovantes.
Le champ d'application de l'article 25-3 nouveau est très large. Il est
en effet ouvert à l'ensemble des chercheurs et des
enseignants-chercheurs et concerne les sociétés anonymes sans
restriction d'aucune sorte. Par ailleurs, la participation du fonctionnaire aux
organes dirigeants est rémunérée au même titre que
celle des autres membres du conseil d'administration ou de surveillance.
Les modalités d'octroi de l'autorisation sont les mêmes que celles
prévues à l'article 25-1.
Les conditions encadrant ce dispositif sont les suivantes :
- la participation du fonctionnaire au capital de l'entreprise est
limitée à la détention du nombre d'actions exigé
par les statuts pour être membre du conseil d'administration ou du
conseil de surveillance, sans néanmoins pouvoir excéder 5 %
du capital ;
- le montant des jetons de présence que peut percevoir le fonctionnaire
est soumis à un plafonds fixé par décret ;
- le fonctionnaire, comme dans le cas du concours scientifique, ne peut
participer à la négociation des contrats et conventions conclus
entre l'entreprise et le service public de la recherche ;
- la commission de déontologie prévu par l'article 87 de la loi
n° 93-122 du 29 janvier 1993 précitée est tenue
informée des relations contractuelles de l'entreprise avec le service
public de la recherche.
L'intérêt de ce dispositif est à l'évidence de
faciliter les contacts entre le monde de la recherche publique et celui de
l'entreprise. Votre rapporteur souhaite qu'il soit surtout mis en oeuvre dans
les petites et moyennes entreprises plutôt que dans la plupart des
grandes entreprises dont les conseils d'administration ou de surveillance ne
sont pas en général les organes dans lesquels est en
priorité débattue la politique de recherche et de
développement de l'entreprise et il serait bon que tant les
décrets que les circulaires d'application soient pris dans cet
esprit.
II. FAVORISER LES COOPÉRATIONS ENTRE LA RECHERCHE PUBLIQUE ET LES ENTREPRISES
Au delà du développement de la mobilité des personnels, le projet de loi tend à remédier à l'absence, au sein des organismes de recherche et des universités, de structures spécifiques destinées à valoriser les résultats de la recherche publique. A cette fin, il propose de nouveaux dispositifs mais prévoit surtout d'étendre ou d'améliorer les dispositifs existants.
A. DES DISPOSITIFS NOUVEAUX
Le
projet de loi clarifie les modalités de gestion des activités
commerciales et industrielles des établissements d'enseignement
supérieur, en prévoyant la création en leur sein de
services qualifiés "
d'activités industrielles et
commerciales
".
Il ouvre également la possibilité à ces
établissements de fournir à des entreprises des prestations de
services destinées à encourager leur développement.
Enfin, il facilite la gestion des personnels non titulaires que les
établissements d'enseignement supérieur et les EPST peuvent
recruter.
•
la création des services d'activités industrielles et
commerciales au sein des établissements d'enseignement
supérieur
L'article 20 de la loi de 1984 sur l'enseignement supérieur
prévoit que les EPSCT "
dans le cadre des missions qui leur sont
dévolues (...)et afin de faire connaître leurs réalisations
(...) peuvent assurer, par voie de convention, des prestations à titre
onéreux, exploiter des brevets et licences, commercialiser les produits
de leurs activités et, dans la limite des ressources
disponibles
dégagées par ces activités, prendre des participations et
créer des filiales
".
Jusqu'à présent, les modalités de gestion de ces
activités se sont avérées peu adaptées, faisant
l'objet de vives critiques de la part de la Cour des Comptes comme des services
fiscaux.
Le recours à des services internes ne constitue pas à
l'évidence une solution satisfaisante dans la mesure où les
règles budgétaires et comptables qui s'appliquent à ces
services ne sont ni claires ni adaptées à la gestion
d'activités commerciales. Par ailleurs, les missions que doivent assumer
ces services requièrent des compétences techniques très
spécifiques qui exigerait le recrutement de personnels
spécialisés. Or, les établissements n'ont que des
possibilités limitées de recruter du personnel sur les ressources
propres tirées de ces activités.
L'exercice des activités de valorisation au travers de filiales ne
constitue pas non plus une solution qui convient à tous les cas. En
effet, certaines activités en raison de leur caractère temporaire
ou encore de leur insuffisante rentabilité ne peuvent être
confiées à des filiales.
Enfin, le recours à des formules plus souples de coopération
telles que le groupement d'intérêt public n'a rencontré
qu'un succès très modeste.
En l'absence de structures appropriées, ont été mises en
place des formules présentant, dans bon nombre de cas, des risques
à la fois juridiques et financiers.
Afin de répondre au besoin de structures spécialisées dans
la gestion d'activités industrielles et commerciales, l'article 2 du
projet de loi prévoit la possibilité de créer au sein des
établissements publics d'enseignement supérieur de
" services d'activités industrielles et commerciales " dont le
régime financier sera adapté aux impératifs de souplesse
propres à de telles activités. Ces services
bénéficieront de budgets annexes dont le régime permettra
notamment d'affecter les recettes aux dépenses, et, dans certaines
limites, de reporter les crédits d'une année sur l'autre et
d'adapter les dépenses à l'évolution des ressources. Par
ailleurs, pour assurer le fonctionnement de ces services, les
établissements pourront recruter du personnel à durée
indéterminée, faculté interdite par la rédaction
actuelle de l'article 42 de la loi de 1984 prévoyant que les personnels
des EPSCP sont soit des agents titulaires soit des agents recrutés par
contrat à durée déterminée.
Ce dispositif devrait être de nature à clarifier le régime
fiscal des activités commerciales des établissements publics
d'enseignement supérieur. La séparation des activités
administratives et des activités commerciales permettra de
définir plus précisément l'assiette de la TVA, de
l'impôt sur les sociétés et de la taxe professionnelle que
doivent acquitter ces établissements.
Ce dispositif proposé par le gouvernement doit être étendu
aux établissements publics à caractère scientifique et
technologique, dont les activités sont comparables. Un rapport public
particulier de la Cour des Comptes consacré à la valorisation
dans les EPST, publié en juin 1997 avait souligné, en effet, la
nécessité d'élaborer des structures et des règles
harmonisées pour la mise en oeuvre de leur politique de valorisation. Ce
projet de loi est sans doute l'occasion de répondre à ses
observations sur ce point.
•
permettre aux établissements publics d'enseignement
supérieur et aux EPST d'aider la création et le
développement d'entreprises
Les articles premier et 2 du projet de loi proposent de compléter les
lois de 1982 sur la recherche et de 1984 sur l'enseignement supérieur
afin de préciser que les établissements publics d'enseignement
supérieur comme les organismes publics de recherche peuvent en vue de
favoriser la valorisation des résultats de la recherche, dans leurs
domaines de compétences, fournir temporairement contre
rémunération des moyens de fonctionnement à des
entreprises dans le cadre de conventions.
Cette catégorie de prestations de services constitue un dispositif
modeste qui ouvre la voie à la création au sein des organismes de
recherche ou des établissements d'enseignement supérieur,
à ce qui est aujourd'hui désigné sous le terme
d'" incubateurs " et de " pépinières
d'entreprises ".
Il est désormais admis que la création d'une entreprise innovante
nécessite une phase de maturation qui a d'autant plus de chance
d'aboutir qu'elle se déroule dans un environnement spécifique et
protecteur. Dans des pays comme les Etats-Unis, le Canada ou les Pays-Bas, ont
été mis en place, notamment au sein des universités, des
structures capables de mettre à la disposition de jeunes entreprises des
locaux, des moyens matériels ou humains moyennant
rémunération. En outre les services et notamment la formation et
les conseils qui constituent la valeur ajoutée essentielle de ces
incubateurs et pépinières servent aussi à la phase
antérieure à la création d'entreprise c'est à dire
la période où l'on passe de l'idée au projet et du projet
à la création d'entreprise. Les incubateurs ont donc une double
fonction à remplir : d'une part, avant la création de
l'entreprise et, d'autre part, de la création jusqu'à " la
sortie du nid ".
Selon un rapport de la mission scientifique et technique de l'Ambassade de
France aux Etats-Unis le nombre moyen d'entreprises créées par
incubateur est de plus de 50 au bout de 10 ans, ce qui correspond à
environ 1 000 emplois par incubateur. Les mêmes chiffres ont
été relevés dans les universités européennes
qui se sont lancées dans des expériences similaires.
Votre rapporteur, lors d'une mission aux Etats-Unis, en mai 1985
3(
*
)
, avait pu constater que les structures
évoquées dans le projet de loi étaient déjà
largement appliqués. Ses conclusions n'ont eu qu'un impact limité.
Force est de constater qu'en France, de tels lieux d'accueil sont encore trop
peu nombreux et surtout qu'il est rare qu'ils correspondent à une
coopération entre public et privé, ce qui est pourtant
nécessaire.
La disposition introduite par le projet de loi ne sera efficace qu'à la
condition qu'elle s'accompagne de la création de fonds d'amorçage
et que d'autres partenaires puissent être associés aux structures
mises en place par les organismes de recherche et les universités,
notamment des partenaires industriels, financiers ou encore des fondations.
Même si le dispositif prévu reste modeste, la mesure va dans le
bon sens. Votre rapporteur a considéré que même si le
projet de loi apparaît en retrait par rapport aux ambitions qui avaient
été annoncées, il existe un appel à propositions
lancé par le ministère de l'éducation nationale, de la
recherche et de la technologie. Le but de cet appel d'offre doté de 200
millions de francs est de participer au financement d'incubateurs et de fonds
d'amorçage. L'objectif est de d'encourager la
généralisation à proximité des
établissements de recherche et d'enseignement supérieur d'une
offre d'infrastructures matérielles, d'aide à la décision
et à la gestion, de service de formation entrepreneuriale et enfin de
relais vers l'éventail des aides aux entreprises. Ce projet ambitieux
vient à son heure.
•
une mesure de simplification administrative
L'article L. 351-12 du code du travail prévoit que les
établissements publics de l'Etat employant des agents non fonctionnaires
et donc entrant dans le champ d'application de la législation sur
l'indemnisation des travailleurs involontairement privés d'emplois
relèvent pour la mise en oeuvre de cette indemnisation non pas du
régime général prévu à l'article L. 351-4
mais de régimes particuliers.
Le régime prévu pour les EPST et les établissements
d'enseignement supérieur les contraint donc à assurer
eux-mêmes la gestion et le paiement des indemnités pour perte
d'emploi. Ces règles qui compliquent les recrutements des personnels
contractuels nécessaires à la mise en oeuvre de collaborations
entre entreprises et établissements public dans le cadre de contrats de
recherche constituent un frein substantiel à la coopération avec
le secteur industriel.
L'article 4 du projet de loi modifie l'article L. 351-12 du code du
travail afin de prévoir pour les établissements publics
d'enseignement supérieur et les EPST la possibilité d'opter pour
le régime prévu à l'article L. 351-4 et en
conséquence de cotiser aux ASSEDIC pour leur personnel contractuel.
Votre commission a approuvé cette disposition qui participe de la
légitime simplification des règles de gestion des
activités de valorisation.
B. L'AMÉLIORATION ET L'EXTENSION DES DISPOSITIFS EXISTANTS
Le
projet de loi propose à ce titre d'étendre aux EPST les
procédures applicables aux établissements d'enseignement
supérieur en matière, d'une part, de contractualisation
pluriannuelle avec l'Etat et, d'autre part, de constitution de filiales et de
prises de participation.
En outre, l'article 6 du projet de loi précise les conditions de
participation des lycées d'enseignement général et
technologique et des lycées professionnels aux actions de transfert de
technologie.
•
la possibilité ouverte aux EPST de contracter avec l'Etat
La loi d'orientation de 1982 n'ouvre pas aux organismes publics de recherche la
possibilité de conclure avec l'Etat des contrats pluriannuels,
possibilité prévue par l'article 20 de la loi de 1984 pour les
EPSCT en ce qui concerne "
leurs activités de formation, de
recherche et de documentation
".
Dans la pratique, bon nombre d'EPST ont déjà conclu avec l'Etat
des contrats de ce type. Le projet de loi se borne donc à
légaliser cette pratique et à la généraliser.
Votre commission souhaite que ces contrats constituent un instrument efficace
permettant de préciser les obligations des établissements, plus
particulièrement en matière de mobilité des personnels et
de valorisation des travaux de recherche.
Il convient cependant de souligner que les engagements financiers de l'Etat
resteront tributaires de la règle de l'annualité
budgétaire, comme le rappelle d'ailleurs le texte du projet de loi.
•
la simplification des procédures imposées aux EPST
pour la création de structures de collaboration
La rédaction actuelle de l'article 19 de la loi de 1982 sur la recherche
conditionne les créations de structures de collaboration, qu'il s'agisse
de prises de participation, de constitution de filiales ou de création
de groupement, à une autorisation accordée par
arrêté des ministres chargés de la tutelle des
établissements, le nombre de ces derniers pouvant aller jusqu'à
cinq dans certains cas.
En pratique, cette procédure s'est révélée source
de lourdeurs administratives.
La Cour des Comptes, dans son rapport précité, a ainsi pu
observer des délais parfois fort longs entre les
délibérations des conseils d'administration des
établissements approuvant certaines prises ou cessions de participation
et l'approbation des ministères de tutelle matérialisée
par la publication des arrêtés nécessaires. Le rapport
relève que : "
tel fut notamment le cas, par exemple,
lorsque l'INSERM a sollicité l'autorisation de souscrire au capital de
la société Immunotech : la délibération du
conseil d'administration de l'INSERM date du 17 octobre 1985,
l'arrêté autorisant cette souscription, en date du 24 avril 1990,
a été publié au Journal officiel du 5 mai 1990. Un calcul
simple montre que, pendant ce délai de plus de quatre ans, la variation
de la valeur des actions de la société a fait perdre à
l'INSERM plus de 1 million de francs, pour un investissement lui-même
à peine supérieur à un million
".
Un tel exemple ne peut que souligner la pertinence de la modification
proposée par le gouvernement, substituant à la procédure
en vigueur une procédure d'autorisation tacite semblable à celle
prévue pour les EPSCT par la loi de 1984 sur l'enseignement
supérieur.
•
les modalités de participation des lycées
technologiques et professionnels aux actions de transfert de technologie
Le projet de loi réaffirme la vocation des lycées technologiques
et les lycées professionnels à participer à la diffusion
de l'innovation.
Son article 6 complète la loi n° 89-486 du 10 juillet 1989
d'orientation sur l'éducation par deux nouveaux dispositifs.
L'article 14 bis nouveau prévoit la possibilité pour les
enseignants, dans le cadre des projets d'établissement, de participer
à des actions en faveur de l'innovation technologique.
L'article 18 ter prévoit la possibilité pour les lycées
professionnels et les lycées d'enseignement général et
technologique de passer des conventions de prestations de services à
titre onéreux visant des transferts de technologie.
Le rôle déterminant que peuvent jouer ces établissements,
notamment dans les transferts de technologie de proximité en faveur des
PME-PMI est certain et il est bon de le souligner. Toutefois, une simple
application des dispositions du 3° de l'article 17 de la loi de programme
n° 85-1371 sur l'enseignement technologique et professionnel permettrait
d'atteindre l'objectif poursuivi.
Aux termes de ces dernières, " l
es personnels enseignants
titulaires dans les disciplines technologiques ou professionnelles peuvent, sur
leur demande ou avec leur accord, exercer leurs compétences
auprès d'entreprises publiques ou privées, dans des conditions
fixées par décret en Conseil d'Etat. A cet effet, une convention
doit être conclue entre l'Etat et l'entreprise
intéressée. "
Or, ce décret n'est pas paru après dix sept ans. Il serait
opportun de remédier à cette regrettable abstention plutôt
que de dupliquer des dispositions existantes.
Votre commission a obtenu des engagements du gouvernement en ce sens. Elle
souhaite que les textes d'application puissent prévoir des dispositifs
inspirés de ceux prévus aux articles 25-1, 25-2 et 25-3 nouveaux
de la loi de 1982 pour les fonctionnaires du service public de la
recherche.
III. FAVORISER FISCALEMENT L'INNOVATION
Il ne
peut y avoir innovation sans financement de l'innovation. En sa qualité
de rapporteur pour avis des crédits consacrés à la
recherche scientifique et technologique, votre rapporteur a plaidé sans
relâche pour la mise en place d'un cadre juridique, social et fiscal
favorable aux créateurs d'entreprises.
L'adaptation de la législation fiscale aux contraintes
spécifiques des entreprises à forte croissance ou
" start-up " est désormais entamée. Beaucoup reste
à faire.
Aussi, votre commission a regretté que le volet fiscal d'un projet de
loi ayant vocation à couvrir "
l'ensemble des volets liés
à la diffusion dans l'économie des résultats de la
recherche "
, selon les termes mêmes de son exposé
des motifs, ne comporte qu'une mesure fiscale, certes utile, mais de
portée limitée.
L'article 3 du projet de loi aménage le régime des bons de
souscription de parts de créateur d'entreprise créé par
l'article 76 de la loi de finances pour 1998 afin d'élargir son champ
d'application.
Il propose d'en étendre le bénéfice aux entreprises
détenues à 25 % au moins -au lieu de 75 % dans la
rédaction actuelle- par des personnes physiques ou par des personnes
morales détenues par des personnes physiques.
On rappellera que les bons de souscription de parts de créateur
d'entreprise offrent à des entreprises non cotées, qui ne peuvent
généralement pas offrir des salaires élevés
à leurs cadres, un moyen d'intéresser ces derniers à leurs
résultats.
Ce dispositif est légitime. L'incitation à la prise de risque
réside largement dans la rémunération du risque, et la
modification proposée par le projet de loi constitue un assouplissement
donc une avancée.
Il s'agit là d'une nécessité. En effet, le dispositif est
à la fois complexe et restrictif et seul son assouplissement peut le
rendre attractif. En particulier le passage à quinze ans de la
durée d'application des dispositions sur les bons de souscription
s'inscrivait dans cette logique. Votre commission proposera de simplifier
encore son économie en élargissant son champ d'application
à l'ensemble des jeunes sociétés de moins de quinze ans
même si elles sont cotées sur le Nouveau Marché ou l'un des
marchés réunis au sein du groupement Euro NM ou l'un des
marchés analogues en Europe et en permettant l'attribution de tels bons
aux dirigeants non salariés. En outre elle a souhaité ramener de
25% à 20% la part du capital de l'entreprise devant être
détenue par des personnes physiques. Il est en effet des cas, notamment
dans le domaine des biotechnologies, où le financement nécessaire
est de l'ordre de dizaines de millions de francs et où le seuil de 25%
dépasse largement les capacités de financières des
chercheurs et de leurs amis.
Par ailleurs, votre commission a également souhaité
réformer le régime de report d'imposition des plus-values en cas
de réinvestissement dans une PME innovante prévu à
l'article 92 B
decies
du code général des impôts.
Les modifications proposées sont destinées à encourager
les vocations de
" business angels "
et à
démocratiser une pratique aujourd'hui encore insuffisamment
développée en France.
La proposition conduirait à ce que les épargnants dont
l'entourage crée une entreprise innovante puissent aider ces entreprises
en vendant certaines actions et en ne payant les éventuelles plus-values
qu'avec un certain retard.
Par ailleurs, dans le même souci de favoriser l'innovation, votre
commission a adopté un amendement tendant à encourager les
assureurs à généraliser des contrats de protection
juridique des droits attachés aux brevets. Un tel système pour
lequel il existe, selon votre rapporteur, un marché, permettra aux
entreprises innovantes de se protéger contre les contrefaçons. A
défaut d'une telle mesure, l'efficacité des politiques d'aide
à la création et au développement de ces entreprises
risque fort d'être menacée. Les PME, en effet, prennent d'autant
moins de brevets que leur protection effective coûte très cher en
frais de justice s'ils sont contrefaits, notamment à l'étranger.
Le contrat de protection juridique créé il y a quelques
années afin de parer à ce risque, dit " Brevet'assur ",
incluait dès l'origine une participation de l'Etat, dans la mesure
où l'ANVAR avait passé une convention générale
destinée à financer une part des primes des contrats d'assurance
souscrits par les entreprises. Mais, à l'époque, le nombre de
sociétés innovantes était faible, la mondialisation, moins
étendue et les systèmes informatiques de détection des
innovations, moins performants.
Le coût des assurances était donc -et est donc- encore trop
élevé puisqu'il s'agit d'un risque peu connu. La
nécessité d'un système de réassurance innovation
est évidente. Le fait pour la France d'innover en la matière
donnera à nos compagnies d'assurance une avance technique et permettra
à court terme d'étendre le système à l'ensemble des
entreprises et organismes européens, ce qui permettra d'assurer la
dynamique d'innovation par rapport à nos concurrents asiatiques ou
américains.
EXAMEN DES ARTICLES
Article premier
Actualisation de la loi
n° 82-610 du 15 juillet 1982
d'orientation et de
programmation pour la recherche
et le développement technologique de
la France
I.
Commentaire du texte du projet de loi
Cet article modifie diverses dispositions de la loi n° 82-610 du
15 juillet 1982 d'orientation et de programmation pour la recherche et le
développement technologique de la France :
- il complète son article 14 afin d'ouvrir la possibilité aux
établissements publics à caractère scientifique et
technologique (EPST) de conclure des contrats pluriannuels avec l'Etat
(paragraphe I) ;
- il modifie l'article 19 afin de faciliter la valorisation des travaux de
recherche des EPST, d'une part, en assouplissant les conditions dans lesquelles
ils peuvent constituer des filiales (paragraphe II) et, d'autre part, en
précisant les conditions dans lesquelles ils peuvent mettre à la
disposition des entreprises des moyens de fonctionnement (paragraphe III) ;
- enfin, il propose d'introduire au sein de la loi de 1982 un dispositif
destiné à préciser le cadre dans lequel les chercheurs
peuvent participer à la création d'entreprises ou apporter leur
collaboration à des entreprises déjà créées
(paragraphe IV).
1) Contrats pluriannuels entre l'Etat et les EPST
Le paragraphe I
de l'article prévoit que les EPST peuvent conclure
avec l'Etat des contrats pluriannuels. Cette procédure s'inspire de la
procédure prévue à l'article 20 de la loi n°84-52 du
26 janvier 1984 pour les universités en ce qui concerne "
leurs
activités de formation, de recherche et de documentation
". A
leur différence, les contrats visés par le paragraphe I
recouvrent l'ensemble des activités des EPST.
Ces dispositions sont de nature à permettre une meilleure programmation
à long terme des moyens des établissements. Votre rapporteur
souhaite que ces contrats puissent être également le moyen
d'assurer un contrôle plus rigoureux de leurs obligations en
matière de transfert de technologie et de mobilité des personnels.
L'exécution de ces contrats doit faire l'objet d'une évaluation.
2) Adaptation des dispositions législatives régissant les EPST
afin de faciliter la gestion de leurs activités de valorisation
•
Le paragraphe II
de cet article a pour seul objectif
d'assouplir le régime d'autorisation préalable applicable aux
EPST pour les prises de participations, la constitution de filiales, la
participation à des groupements et le recours à l'arbitrage en
cas de litiges nés de l'exécution de contrats de recherche
passés avec des organismes étrangers.
Dans sa rédaction actuelle, l'article 19 de la loi du 15 juillet 1982
prévoit pour la participation des EPST à ces structures
privées de coopération un régime d'autorisation
préalable et expresse par les ministres de tutelle.
L'exposé des motifs du projet de loi précise que lui sera
substitué un régime d'autorisation tacite, à l'image de ce
qui prévaut pour les établissements publics à
caractère scientifique, culturel et professionnel (EPSCP) et pour les
établissements à caractère industriel et commercial
(EPIC). Il s'agit là d'une excellente intention. Mais la
rédaction retenue par le gouvernement ne la traduit pas clairement.
• Le
paragraphe III
précise les conditions dans lesquelles
les EPST peuvent mettre à la disposition des entreprises des moyens de
fonctionnement pour une durée déterminée moyennant
rémunération. Cette catégorie de prestations de services,
qui constituent l'ébauche de structures d'incubation, fera l'objet d'une
convention entre l'établissement et l'entreprise concernée.
3)
Conditions dans lesquelles les fonctionnaires peuvent participer
à la création d'entreprise de valorisation ou apporter leur
collaboration à des entreprises existantes
Le
paragraphe IV
complète la loi du 15 juillet 1982
précitée par quatre articles nouveaux.
Il convient de remarquer que les deux premiers articles, les articles 25-1 et
25-2 (nouveaux), s'inspirent très largement de la proposition de loi,
adoptée par le Sénat, permettant à des fonctionnaires de
participer à la création d'entreprises innovantes.
L'article 25-3 (nouveau), quant à lui, propose un dispositif original,
largement dérogatoire au droit commun, permettant aux fonctionnaires du
service public de la recherche d'être membres du conseil d'administration
ou du conseil de surveillance d'une société anonyme afin de
favoriser la diffusion des résultats de la recherche et d'encourager le
développement de la recherche dans les entreprises privées.
Enfin, l'article 25-4 (nouveau) précise les conditions d'application des
trois articles précédents.
•
L'article 25-1 (nouveau) de la loi du 15 juillet 1982 : la
participation d'un fonctionnaire en qualité d'associé à la
création d'une entreprise de valorisation.
Cet article prévoit le cas de l'" essaimage ",
c'est-à-dire le cas où un chercheur décide de quitter son
laboratoire pour une entreprise de valorisation en création et cesse
toute activité au titre du service public dont il relève.
A cette fin, il précise les conditions de participation, en
qualité d'associé ou de dirigeant, d'un fonctionnaire appartenant
au service public de la recherche à la création d'une entreprise
dont l'objet est, en exécution d'un contrat conclu entre cette
entreprise et la personne publique employant le chercheur, la valorisation des
travaux qu'il a effectués dans le cadre de ses fonctions.
Le champ d'application de cet article est très large. Il vise l'ensemble
des fonctionnaires des services publics mentionnés à l'article 14
de la loi de 1982. Aux termes de cette disposition, sont donc concernés
notamment les universités, les établissements publics de
recherche qu'il s'agisse d'établissements publics administratifs, d'EPIC
ou d'EPST, ainsi que les entreprises publiques.
Afin d'éviter tout conflit d'intérêt entre
l'intéressé et le service public dont il relève, le projet
de loi prévoit que, d'une part, l'autorisation doit être
demandée préalablement à la négociation du contrat,
et, d'autre part, qu'au cours de cette négociation le fonctionnaire ne
peut représenter le service public de la recherche. Ces dispositions ont
pour objet d'écarter les risques que courent les chercheurs au regard
des dispositions des articles 432-12 et 432-13 du code pénal.
La participation du fonctionnaire, en qualité d'associé ou de
dirigeant, est autorisée par l'autorité dont il relève
après avis du conseil d'administration de l'établissement et de
la commission de déontologie prévue à l'article 87 de la
loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la
prévention de la corruption et à la transparence de la vie
économique et des procédures publiques.
Les modalités de fonctionnement de cette commission ont
été fixées par le décret n°95-168 du 17
février 1995 précitée, qui précise notamment les
activités privées que ne peuvent prétendre exercer les
fonctionnaires ayant cessé temporairement ou définitivement leurs
fonctions.
Reprenant sur ce point les termes du décret n° 95-168 du 17
février 1995 précité, le projet de loi précise que
l'autorisation ne peut être accordée si la participation à
la création de l'entreprise est susceptible de porter atteinte à
la dignité des fonctions exercées par le chercheur ou risquerait
de compromettre le fonctionnement normal, l'indépendance ou la
neutralité du service. Le projet de loi dispose également que
l'autorisation peut être refusée si la prise
d'intérêt dans l'entreprise est de nature à porter atteinte
aux intérêts matériels ou moraux du service public de la
recherche.
Afin d'assurer un contrôle des conditions dans lesquelles se
déroule la participation du chercheur à la création de
l'entreprise, le projet de loi prévoit que la commission de
déontologie est informée de toutes les relations contractuelles
qui seront nouées entre l'entreprise et l'organisme de recherche.
Si l'autorisation est accordée, le fonctionnaire peut être
détaché auprès de l'entreprise ou mis à disposition
de celle-ci, ou d'un organisme concourant à la valorisation de la
recherche, pour une durée de deux ans renouvelable deux fois, soit six
ans au total.
A l'issue de cette période destinée à assurer le lancement
de l'entreprise de valorisation, le chercheur devra opter entre son entreprise
et sa carrière au sein du service public. Dans le premier cas, le
fonctionnaire sera placé en disponibilité ou décidera de
cesser ses fonctions, sans que les dispositions prévues par l'article 72
de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions
statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ne s'appliquent.
Dans le second cas, il sera réintégré dans son corps
d'origine et disposera d'un délai d'un an pour mettre un terme à
sa collaboration avec l'entreprise et céder les participations qu'il
détient. Il pourra cependant être autorisé à
conserver une participation dans le capital de l'entreprise ou à lui
apporter sa collaboration dans les conditions prévues par l'article
25-2.
S'il est mis fin à l'autorisation ou si son renouvellement est
refusé, le fonctionnaire ne peut poursuivre son activité dans
l'entreprise que dans les conditions prévues par l'article 72 de la loi
n° 84-16 précitée, après avoir été
mis en disponibilité ou radié des cadres selon son choix.
•
L'article 25-2(nouveau) : le concours scientifique apporté
par un fonctionnaire à une entreprise de valorisation.
Cet article prévoit une situation différente, dans laquelle un
chercheur apporte son concours scientifique à une entreprise assurant,
en vertu d'un contrat conclu avec la personne publique dont il relève,
la valorisation des travaux de recherche qu'il a réalisés dans
l'exercice de ses fonctions.
Dans cette hypothèse, il demeure au sein du service public de la
recherche, le concours scientifique devant être pleinement compatible
avec le plein exercice par le fonctionnaire de son emploi public.
Les modalités de collaboration entre le fonctionnaire et l'entreprise
sont définies par une convention conclue entre la personne publique dont
relève le chercheur et l'entreprise, convention qui peut prévoir
le versement d'un complément de rémunération au profit du
chercheur. Cette rémunération ne peut excéder un plafond
fixé par décret.
Le fonctionnaire peut également être autorisé à
prendre une participation dans le capital de l'entreprise, dont le montant ne
peut excéder 15 %.
Afin d'éviter les conflits d'intérêts entre le
fonctionnaire et la personne publique dont il relève, l'article
25-2 (nouveau) précise que l'intéressé ne peut
participer à l'élaboration ni à la passation des contrats
et conventions conclus entre l'entreprise et le service public de la recherche.
En outre, afin de garantir l'indépendance du concours scientifique, le
projet de loi précise que le fonctionnaire ne peut occuper des fonctions
de dirigeant au sein de l'entreprise ni être placé dans une
situation hiérarchique.
L'autorisation est accordée pour une durée de cinq ans selon la
même procédure que pour la participation à la
création d'entreprise. Elle est renouvelable.
En cas de retrait de l'autorisation, le chercheur dispose d'un délai
d'un an pour céder ses droits sociaux. Il ne peut alors poursuivre son
activité au sein de l'entreprise que dans les conditions prévues
à l'avant-dernier alinéa de l'article 25-1(nouveau).
Afin de contrôler les conditions dans lesquelles se déroule la
collaboration entre le fonctionnaire et l'entreprise, il est
précisé en premier lieu que la personne publique dont
relève le chercheur est tenue informée des revenus qu'il
perçoit à raison de sa participation au capital et des cessions
de titres auxquelles il procède. En deuxième lieu, à
l'instar de ce que prévoit l'article 25-1(nouveau), la commission de
déontologie précitée est tenue informée des
relations contractuelles nouées entre l'entreprise et le service public
de la recherche.
•
L'article 25-3 (nouveau) : participation d'un fonctionnaire au
conseil d'administration ou au conseil de surveillance d'une
société anonyme.
L'article 25-3 (nouveau) ouvre la possibilité aux corps de
fonctionnaires visés par la loi de 1982 et aux enseignants-chercheurs
d'être autorisés , à titre personnel, à être
membres du conseil d'administration ou du conseil de surveillance d'une
société anonyme.
Cette possibilité est sans doute celle qui apparaît comme la plus
largement dérogatoire au droit commun. Rappelons, en effet, que le
régime des incompatibilités entre la fonction publique et les
fonctions exercées dans les organes directeurs des
sociétés commerciales est strictement entendu. Le Conseil d'Etat
a précisé qu'un fonctionnaire ne peut être membre du
conseil d'administration d'une société anonyme, sauf si la
société a un but désintéressé ou s'il s'agit
d'une société de famille (avis du 9 février 1949). De
même, est interdit l'exercice de la fonction de membre du conseil de
surveillance d'une société à responsabilité
limitée, sauf si la société n'y attache aucune
rémunération ou avantage matériel (avis du 24 septembre
1952). Enfin, un agent public ne peut exercer les fonctions de président
d'une société anonyme, sauf si celle-ci est à but non
lucratif et si ces fonctions ne sont pas rémunérées (avis
du Conseil d'Etat du 20 juillet 1955).
La finalité de l'article 25-3 (nouveau) est de favoriser la diffusion
des résultats de la recherche publique, objectif fixé par
l'article 14 de la loi n° 82-610 du 15 juillet 1982
précitée, à la recherche publique, et d'encourager le
développement de la recherche dans les entreprises privées.
Néanmoins, on soulignera que c'est "
à titre
personnel
" que les chercheurs sont désignés dans les
conseils d'administration ou de surveillance.
Le champ d'application de l'article 25-3, comme nous l'avons souligné
plus haut, est très large. Il convient néanmoins de souligner que
ce régime n'exclut pas l'application des dispositions des articles
432-12 et 432-13 du code pénal, ce qui signifie qu'un fonctionnaire ne
pourra siéger au conseil d'administration ou de surveillance d'une
entreprise, s'il a eu au cours des cinq dernières années soit
à exercer un contrôle sur l'entreprise soit à participer
à l'élaboration et à la passation de marchés avec
celle-ci.
Par ailleurs, le projet de loi encadre les conditions d'exercice du mandat
confié au fonctionnaire.
La participation au capital de l'entreprise est limitée à la
détention du nombre d'actions requis par les statuts de l'entreprise
pour être membre du conseil d'administration ou de surveillance mais ne
pourra excéder 5 % du capital social de l'entreprise. Une telle
disposition n'est pas de nature à interdire à un chercheur de
siéger au conseil d'administration ou de surveillance d'une grande
entreprise dans la mesure où, dans ces dernières, les exigences
posées par les statuts sont modestes et se réduisent souvent
à la possession d'une seule action.
La rémunération du fonctionnaire est limitée à la
perception des jetons de présence dans la limite d'un plafond
fixé par décret en Conseil d'Etat, seule
rémunération au demeurant que la loi n° 66-537 du 24
juillet 1966 sur les sociétés commerciales autorise avec les
rémunérations exceptionnelles allouées par le conseil
d'administration pour des missions ou mandats confiés à des
administrateurs qui dépassent le cadre normal de leurs fonctions. En
effet, les administrateurs ne peuvent percevoir de la société
aucune autre rémunération, qu'elle soit permanente ou non, le
deuxième alinéa de l'article 107 de la loi de 1966
prévoyant que "
toute clause statutaire contraire
(serait)
réputée non écrite et toute décision
contraire
(...)
nulle
".
On soulignera que les fonctions d'administrateur ou de membre du conseil de
surveillance sont rarement exercées à titre gratuit, sauf dans
les petites sociétés familiales. Dans les autres entreprises, une
rémunération convenable est en général
nécessaire pour permettre le recrutement de personnalités de
valeur. Par ailleurs, il convient également de rappeler que le versement
d'une rémunération est la contrepartie du risque non
négligeable qu'ils encourent sur leur patrimoine en cas
d'évolution défavorable de la société.
L'autorisation est accordée pour la durée du mandat de membre du
conseil d'administration ou du conseil de surveillance dans des conditions
analogues à celles prévues par l'article 25-1.
Afin d'éviter les risques de conflit d'intérêts entre le
chercheur et la personne publique dont il relève, le fonctionnaire ne
peut prendre part aux relations contractuelles qui se nouent entre l'entreprise
et cette dernière.
Les modalités de contrôle de cette collaboration entre le
fonctionnaire et l'entreprise sont similaires au dispositif prévu
à l'article 25-2. L'entreprise informe la personne publique dont
relève le fonctionnaire des revenus que perçoit ce dernier au
titre en sa participation au capital et en sa qualité de membre du
conseil d'administration ou du conseil de surveillance. De même que les
articles 25-1 et 25-2, l'article 25-3 précise que la commission
prévue à l'article 87 de la loi du 29 janvier 1993
précitée est tenue informée des contrats et conventions
conclus entre l'entreprise et le service public de la recherche.
•
L'article 25-4 (nouveau) : modalités d'application.
Cet article précise que les modalités d'application des articles
25-1, 25-2 et 25-3 (nouveaux) sont définies par décret en Conseil
d'Etat. Il prévoit que les dispositions prévues aux articles 25-1
et 25-2 peuvent bénéficier aux agents non titulaires selon des
modalités fixées par décret en Conseil d'Etat. Cette
dernière disposition vise notamment les doctorants ou jeunes docteurs
ayant un statut d'agent non titulaire de l'Etat tels que les allocataires de
recherche ou les attachés temporaires d'enseignement.
II. Position de la commission
Votre commission a adopté à cet article cinq amendements :
• le
premier amendement
, qui porte sur le paragraphe II de
l'article, prévoit explicitement la possibilité d'autorisation
tacite. En effet, la jurisprudence du Conseil constitutionnel donne une valeur
législative au principe selon lequel " le silence de
l'administration vaut rejet " ; une dérogation à ce
principe ne peut donc, selon cette jurisprudence, être renvoyée
à un décret. En outre, la rédaction proposée fait
plus clairement apparaître l'intention du gouvernement, et la
portée de la modification proposée. Cette rédaction permet
toutefois le maintien d'une procédure d'autorisation expresse pour le
recours à l'arbitrage.
• le
deuxième amendement
répond à la fois
à des préoccupations de forme et de fonds :
a) Quant à la forme, il propose d'insérer dans la loi de 1982 un
article 19-1 nouveau regroupant les dispositions relatives aux activités
industrielles et commerciales des EPST, plutôt que les insérer au
milieu de l'article 19, qui traite des prises de participations, constitutions
de filiales ou de groupements.
b) Quant au fond, il propose :
- de préciser, en parallélisme avec la loi de 1984 sur les
universités, l'ensemble des activités industrielles et
commerciales que peuvent exercer, dans le cadre de contrats, les EPST ;
- d'étendre à ces EPST la possibilité de créer des
services d'activités industrielles et commerciales ;
- de rédiger cet article de telle manière qu'il soit clair que
ces services auront vocation à gérer l'ensemble des
activités industrielles et commerciales des établissements, y
compris les conventions " incubateurs " ;
- d'ouvrir l'accès aux incubateurs non seulement à des
entreprises déjà constituées mais aussi à des
chercheurs projetant de créer une entreprise ;
- de mettre l'accent sur la portée et le contenu du décret qui
devra " encadrer " les conventions " incubateurs " :
ce décret devra en particulier définir les prestations de
services que pourront prévoir les conventions, les conditions
d'évaluation de ces prestations et celles de la
rémunération des établissements.
•
Les trois autres amendements
proposent une nouvelle
rédaction des articles 25-1, 25-2, 25-3 et 25-4 (nouveaux).
Cette nouvelle rédaction introduit des modifications
rédactionnelles destinées à alléger et clarifier la
rédaction du dispositif proposé.
Dans le souci de mieux encadrer le dispositif, votre commission a
néanmoins précisé que les autorisations prévues aux
articles 25-1, 25-2 et 25-3 ( nouveaux) ne peuvent remettre en cause les
conditions d'exercice de la mission d'expertise indépendante qu'exerce
auprès des pouvoirs publics le service public de la recherche.
Par ailleurs, cet amendement allège les procédures d'autorisation
prévues aux articles nouveaux en supprimant l'obligation de consulter le
conseil d'administration de l'établissement dont relève le
fonctionnaire.
Enfin, il améliore l'articulation entre l'article 25-1 et 25-3 afin de
permettre à un chercheur ayant participé à la
création d'une entreprise et réintégré le service
public d'être membre du conseil d'administration de celle-ci.
Article 2
Actualisation de la loi
n° 84-52 du 26 janvier 1984
sur l'enseignement supérieur
I.
Commentaire du texte du projet de loi
Cet article, qui modifie plusieurs articles de la loi n° 84-52 du
26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur, poursuit
différents objectifs.
Les
paragraphes I à V
proposent la création de structures
de valorisation spécifiques au sein des établissements publics
d'enseignement supérieur, le
paragraphe VI
prévoyant quant
à lui l'élargissement de la composition des organes de
recrutement des enseignants-chercheurs.
1) La création de structures de valorisation au sein des
établissements publics d'enseignement supérieur
Le paragraphe I de l'article ouvre à ces établissements la
possibilité de créer en leur sein des " services
d'activités industrielles et commerciales " dotées de
règles de fonctionnement plus souples que celles prévalant pour
leurs autres activités. Les établissements pourront, pour assurer
leur fonctionnement, recruter des agents non titulaires par contrat de droit
public à durée déterminée ou
indéterminée. Le paragraphe I permet également aux
établissements de conclure avec des entreprises, dans les mêmes
conditions que les EPST, des conventions destinées à fournir
temporairement des moyens de fonctionnement à des entreprises, et donc
à créer des " incubateurs ".
Ces services, comme le précise le paragraphe III, pourront constituer au
sein des EPSCT des services communs au même titre que ceux
destinés à organiser les bibliothèques ou à assurer
l'accueil, l'information et l'orientation des étudiants. Le paragraphe
IV prévoit que ces services, dont le régime financier sera
fixé par décret en Conseil d'Etat, seront dotés de budgets
annexes.
2) L'élargissement de la composition des organes de recrutement des
enseignants-chercheurs
Le paragraphe VI de l'article 2 complète le deuxième
alinéa de l'article 56 de la loi n° 84-52 du 26 janvier 1984
précitée afin de préciser que les statuts particuliers des
corps d'enseignants-chercheurs peuvent prévoir la possibilité de
faire participer des universitaires, des chercheurs étrangers et des
enseignants associés à temps plein aux organes compétents
en matière de recrutement.
Cette disposition, qui étend aux enseignants-chercheurs une
possibilité déjà ouverte aux corps des fonctionnaires des
EPST, devrait permettre de bénéficier des connaissances et des
qualités d'expertise d'enseignants-associés dans des disciplines
peu représentées parmi les enseignants-chercheurs aptes à
se prononcer sur des recrutements.
II. Position de la commission
Votre commission a adopté à cet article deux amendements :
•
un amendement
proposant une nouvelle rédaction du
paragraphe I afin :
- d'insérer les dispositions nouvelles prévues par ce paragraphe
à l'article 6 de la loi de 1984, relatif au rôle de l'enseignement
supérieur en matière de valorisation de la recherche,
plutôt qu'à son article 7, qui est relatif à la diffusion
des connaissances et de la culture ;
- d'harmoniser la rédaction de ces dispositions, qui concernent la
création d'" incubateurs " et celle de services
d'activités industrielles et commerciales, avec celles proposées
à l'article premier pour les EPST.
•
un amendement
portant sur le paragraphe II, qui a pour objet,
dans le même souci d'harmonisation des dispositions applicables aux
établissements de recherche et aux établissements d'enseignement
supérieur, de donner aux EPSCT, comme aux EPST, la possibilité de
participer à des GIE ou à des GIEE et de recourir à
l'arbitrage en cas de conflit avec un co-contractant étranger.
Article 3
Extension du champ d'application des
bons
de souscription
de parts de créateur d'entreprise
I.
Commentaire du texte du projet de loi
L'article 3 étend le champ d'application du régime des bons de
souscription de parts de créateurs d'entreprise (BSCPE) prévu
à l'article 163 bis G du code général des
impôts.
La modification proposée consiste à réduire de 75 %
à 25 % la part du capital de l'entreprise devant être
détenue par des personnes physiques ou des personnes morales
elles-mêmes contrôlées par des personnes physiques afin que
cette entreprise puisse émettre de tels bons.
Il s'agit là du deuxième élargissement de ce dispositif
institué à titre provisoire pour une période de deux ans,
jusqu'au 31 décembre 1999, par l'article 76 de la loi de finances pour
1998.
- Ce
mécanisme
est destiné à fidéliser les
cadres des petites et moyennes entreprises et à les faire participer
à leur développement en leur offrant la possibilité
d'être intéressés aux résultats de l'entreprise.
Fiscalement favorisé mais peu incitatif au regard des
prélèvements sociaux, ce mécanisme participe de la
même logique que les plans d'options de souscription ou d'achat
d'actions, plus connus sous la dénomination de
" stock-options ". Son champ d'application diffère dans la
mesure où il est limité aux entreprises qui se créent ou
commencent à se développer, pour lesquelles le régime
fiscal et social des plans d'options de souscription ou d'achat d'actions est
insuffisamment incitatif et qui présentent un fort potentiel de
développement.
Ces bons confèrent à leurs bénéficiaires le droit
de souscrire des titres, actions ou certificats d'investissement
représentatifs d'une quote-part du capital de l'entreprise dont ils sont
salariés à un prix fixé de manière intangible, lors
de l'attribution du bon.
Le salarié qui en bénéficie peut ainsi réaliser une
plus-value dès lors que la valeur du titre de l'entreprise
dépasse sa valeur d'acquisition telle qu'elle a été
fixée lors de l'attribution du bon.
Ce mécanisme d'intéressement est réservé à
des salariés ayant un niveau de revenu leur permettant de mobiliser les
fonds nécessaires à l'acquisition des titres, préalable
nécessaire à la réalisation de la plus-value. Il
apparaît néanmoins plus risqué, et donc plus
légitime, que les stock-options dans la mesure où les titres des
sociétés concernées sont moins liquides et que les risques
de moins-value sont plus grands.
- Les sociétés concernées
sont des
sociétés par actions
4(
*
)
dont les
titres ne sont pas cotés ou sont négociés sur le
marché libre qui s'est substitué au marché hors cote le
1er juillet 1998 et qui sont immatriculées au registre du commerce et
des sociétés depuis moins de quinze ans -au lieu de sept ans
à l'origine, cette dernière extension résultant de
l'article 5 de la loi de finances pour 1999.
Si cette dernière condition est d'interprétation stricte, puisque
le décompte intervient de quantième à quantième, il
importe de souligner que le législateur avait introduit une souplesse
dans la condition liée à la composition du capital de
l'entreprise. En effet, le 2 du II de l'article 163 bis G du CGI
précise que pour la détermination du pourcentage du capital
détenu ou indirectement par des personnes physiques, ne sont prises en
compte ni les participations des sociétés de capital-risque, des
sociétés de développement régional et des
sociétés financières d'innovation, dès lors qu'il
n'existe pas de lien de dépendance, ni les participations des
FCPR
5(
*
)
et des FCPI
6(
*
)
, ce qui semble opportun si l'on considère la
composition du capital de la plupart des " start-up ".
En outre, ces entreprises doivent satisfaire plusieurs conditions :
- être soumises à l'impôt sur les sociétés en
France ;
- ne pas exercer une activité bancaire, financière, d'assurance,
de gestion ou de location d'immeuble ;
- n'avoir pas été créées dans le cadre d'une
concentration, d'une restructuration, d'une extension ou d'une reprise
d'activités préexistantes, une exception étant faite pour
les sociétés créées par essaimage au sens de
l'article 39 quinquies H du code général des impôts, qui
prévoit le cas où une équipe de cadres et de chercheurs se
met à son compte pour reprendre une activité non
stratégique de l'entreprise avec le soutien de celle-ci.
- Le régime d'imposition
des BSPCE est avantageux. Les gains
réalisés sont imposés au taux proportionnel de 16 %
applicable aux plus-values de cession de valeurs mobilières. Ce taux est
a priori
plus favorable que le barème de l'impôt sur le
revenu applicable aux rémunérations mais également que le
taux spécifique de 30 % applicable aux gains sur options de
souscription ou d'achat d'actions. Toutefois, on relèvera que ce dernier
taux est applicable lorsque le bénéficiaire exerce son
activité dans la société depuis moins de trois ans.
Par ailleurs si, à la différence des options sur actions, aucun
rabais ne peut être accordé sur la valeur des titres lors de
l'attribution des bons, le bénéfice de ce régime fiscal
n'est assorti d'aucune durée d'indisponibilité des titres entre
la date d'attribution des options et la date de cession des actions, les droits
de souscriptions pouvant être exercés dès leur attribution.
Rappelons que pour les stock-options, le délai d'indisponibilité
est de cinq ans.
Toutefois, le mécanisme proposé demeure peu incitatif au regard
des prélèvements sociaux. En effet, il ne prévoit pas
d'exonération de cotisations sociales pour la plus-value
réalisée par les bénéficiaires de ces bons. On
rappellera que cette exonération existe toujours pour les options de
souscription ou d'achat d'actions dès lors que le délai
d'indisponibilité de cinq ans entre l'attribution de l'option et la
cession des titres est respecté, ce qui est le cas le plus
fréquent.
II. Position de la commission
Votre commission a adopté un amendement destiné à
compléter le dispositif proposé par le projet de loi.
L'amendement répond à deux préoccupations.
• Il élargit le champ d'application de l'article 163 bis G du
code général des impôts sur trois points :
Il étend le bénéfice de ce régime aux jeunes
sociétés de moins de quinze ans cotées au Nouveau
Marché.
Il précise que les dirigeants non soumis au régime fiscal des
salariés, c'est-à-dire les membres du conseil d'administration ou
du conseil de surveillance pourront également bénéficier
de l'attribution de BSPCE ;
Enfin, il abaisse le seuil d'éligibilité en réduisant de
25% à 20% la part du capital de l'entreprise devant être
détenue par des personnes physiques ou des personnes morales
détenues par des personnes physiques.
• Il reconduit le dispositif jusqu'au 31 décembre 2001.
Article additionnel après l'article
3
Elargissement des possibilités de report
d'imposition
des plus-values de cession de titres dont le produit est
investi
dans les fonds propres des PME
L'article 92 B decies du code général des
impôts
précise les conditions dans lesquelles l'imposition des plus-values de
cession de droits sociaux peut faire l'objet, à la demande du
contribuable, d'un report d'imposition en cas de réinvestissement du
produit de la cession dans la souscription en numéraire au capital de
sociétés non cotées soumises à l'impôt sur
les sociétés.
Ce dispositif correspond à la situation où un créateur
d'entreprise cède sa participation dans sa société
après en avoir assuré le succès et réinvestit sa
plus-value dans une jeune entreprise.
Ce mécanisme est destiné à susciter en France des
vocations
de " business angels "
, encore trop rares en France,
l'angélisme et les affaires n'allant pas facilement de pair dans notre
culture.
Or, l'article 92 B
decies
dans sa rédaction actuelle
s'avère exagérément complexe et restrictif. Il
prévoit en effet treize conditions pour permettre un simple report
d'imposition. A l'évidence, il ne permet pas de drainer fortement
l'épargne vers les PME en création.
Votre commission a souhaité concevoir un système plus incitiatif
-susceptible d'exercer un véritable effet de levier- qui ne s'adresse
pas aux seuls entrepreneurs ayant réalisé des
bénéfices à l'occasion de la cession de leur entreprise
mais à l'ensemble des épargnants et notamment les petits
épargnants désireux d'aider les créateurs d'entreprises de
proximité. Cette disposition apparaît d'autant plus
légitime qu'il s'agit non pas d'une dépense supplémentaire
pour l'Etat mais d'un simple report d'imposition.
Cet amendement modifie sur plusieurs points le régime de reports
d'imposition des plus-values en cas de remploi dans des PME nouvelles afin d'en
élargir le champ d'application. Sont assouplies :
• les conditions tenant à la nature des titres
cédés. L'amendement précise que sont susceptibles de
bénéficier de ce régime l'ensemble des plus-values
réalisées à l'occasion de cession de titres détenus
depuis plus de cinq ans de façon à éviter que le report ne
s'adresse à ces cessions effectuées à titre
spéculatif.
L'amendement supprime donc la condition subordonnant l'application de ce
régime à ce qu'à la date de la cession, les titres
cédés représentent plus de 10% des bénéfices
sociaux de la société dont les titres sont cédés.
• les conditions tenant à la qualité du cédant. Il
ne sera plus exigé que le cédant ait été, au cours
des cinq dernières années précédant la cession,
soit salarié soit mandataire social de l'entreprise dont les titres sont
cédés.
• les conditions tenant à la société
bénéficiaire de l'apport. Au moment de l'apport, l'entreprise
devra être détenue non plus à 75 % mais seulement à
20 % par des personnes physiques.
Enfin, l'amendement reconduit le dispositif jusqu'au 31 décembre 2001.
Tel est l'objet de l'article additionnel que votre commission vous propose
d'insérer après l'article 3 du projet de loi.
Article additionnel après l'article
3
Incitation au développement des contrats
d'assurance
de protection juridique des droits attachés aux
brevets
La
contrefaçon du brevet qu'elle exploite peut menacer la survie d'une
entreprise innovante.
Or, le dépôt d'un brevet ou l'acquisition d'une licence -qui sont,
on le sait, coûteux- ne suffisent évidemment pas à garantir
les entreprises contre la contrefaçon : il faut qu'elles aient les
moyens de défendre les droits attachés à ce brevet ou
à cette licence
7(
*
)
.
Or, souvent, elles ne disposent pas des moyens financiers ni des services
juridiques nécessaires.
Une formule d'assurance protection juridique adaptée serait donc
indispensable. Cette idée a déjà été
étudiée, notamment à l'initiative de l'INPI, mais elle n'a
pas abouti : les compagnies d'assurances ne semblent pas, en particulier,
avoir mené de réflexions approfondies sur une telle formule, ni
avoir réellement étudié son marché potentiel.
Pour votre rapporteur, un tel marché existe et il est indispensable de
prendre, à l'échelle nationale, mais aussi à celle de la
communauté européenne, des mesures incitatives permettant aux
entreprises innovantes de se protéger contre la contrefaçon, qui
sans cela serait susceptible de réduire très fortement
l'efficacité des politiques d'aide à la création et au
développement de ces entreprises.
Il faut donc créer une incitation forte au développement du
marché de l'assurance-protection juridique contre les
contrefaçons, qui permettra d'abaisser le niveau des primes et de rendre
cette protection accessible aux PME innovantes.
Cette incitation bénéficiera aussi au secteur de l'assurance,
dont l'essor au XIXe siècle a été lié à
celui de la production de masse et de l'industrialisation et qui doit
aujourd'hui savoir s'adapter au développement des nouvelles
technologies, qui fait des risques pesant sur leurs actifs incorporels un
aléa majeur pour un nombre croissant d'entreprises.
Le dispositif proposé comporte deux éléments :
- il habilite la caisse centrale de réassurance à pratiquer, avec
la garantie de l'Etat, la réassurance des risques de contrefaçon
de brevets ou de licences ;
- il crée un fonds de compensation, qui permettra de dégager les
moyens de cette réassurance, et donc de réduire le risque de
faire jouer la garantie de l'Etat.
Les ressources de ce fonds pourraient également être
utilisées pour favoriser le recours à l'assurance. Une mission
analogue a par exemple été assignée au fonds national des
garanties des calamités agricoles : elle peut prendre la forme d'une
prise en charge partielle des primes d'assurances pendant une période
donnée. Il serait à souhaiter que l'INPI comme l'ANVAR soient
associées à de telles mesures, et c'est notamment la raison pour
laquelle votre rapporteur estime indispensable que les décrets
d'application du texte qu'il propose prévoient une association de ces
organismes à la gestion du Fonds.
L'amendement renvoie à des décrets d'application la fixation du
taux des contributions au Fonds : cette disposition permet notamment de
retarder la création du Fonds -et le recouvrement des contributions-
pendant le délai nécessaire à la mise au point et au
lancement de produits d'assurance-protection juridique adaptés.
L'objectif essentiel du mécanisme proposé est en effet, il faut
le rappeler,
l'incitation au développement d'un marché
potentiel et non la mise en place d'un dispositif permanent de soutien
.
C'est d'ailleurs pour insister sur son
caractère temporaire
que
votre commission ne vous propose pas d'introduire ce dispositif dans le code
des assurances.
Le Fonds serait alimenté par deux catégories de ressources :
- une contribution assise sur les primes d'assurances de dommages et de
responsabilité souscrites par les entreprises. Ce choix traduit celui
d'une solidarité entre toutes les entreprises. Il permettra aussi,
compte tenu de l'importance de l'assiette (de l'ordre de 75 milliards) de
retenir un taux très faible (1 pour mille ou moins) qui ne correspondra
qu'à une charge minime pour chaque entreprise ;
- une contribution assise sur les indemnités restant à la charge
des personnes convaincues de contrefaçon, selon une disposition
calquée sur celles prévoyant une contribution des responsables
non assurés d'accidents d'automobiles ou de chasse au financement du
Fonds de garantie contre les accidents de circulation et de chasse.
Tel est l'objet de
l'article additionnel
que votre commission vous
propose d'insérer après l'article 3 du projet de loi.
Article 4
Possibilité pour les
organismes de
recherche et les établissements d'enseignement supérieur
d'adhérer au régime de droit commun d'indemnisation du
chômage
I.
Commentaire du texte du projet de loi
Cet article propose de modifier le début du quatrième
alinéa de l'article L. 351-12 du code du travail afin de permettre aux
établissements publics d'enseignement supérieur et aux
établissements publics à caractère scientifique et
technologique de cotiser au régime de droit commun d'assurance
chômage pour leur personnel contractuel.
Jusqu'à présent, ces établissements, lorsqu'ils
employaient des agents non titulaires par contrat de droit privé,
notamment dans le cadre de programmes de recherche conduits en collaboration
avec des entreprises, ne relevaient pas, pour la mise en oeuvre de la
législation sur l'indemnisation des travailleurs involontairement
privés d'emploi, du régime général de l'article
L. 351-4 du code du travail mais de régimes particuliers
prévus à l'article L. 351-12 du code du travail. Ces
dispositions conduisaient les établissements à assurer
eux-mêmes la gestion et le paiement des indemnités pour perte
d'emploi, situation source de nombreuses difficultés administratives.
La modification proposée par cet article va dans le sens d'une
simplification dispensant du recours à des associations relais
destinées à gérer les personnels contractuels de droit
privé.
II. Position de la commission
Votre commission a adopté cet article sans modification.
Article 5
Extension de la qualité de
professeur émérite
I.
Commentaire du texte du projet de loi
Cet article propose d'étendre le bénéfice de
l'éméritat aux personnels titulaires de l'enseignement
supérieur assimilés aux professeurs des universités pour
les élections au Conseil national des universités
8(
*
)
. Les professeurs d'université
bénéficient de ce régime en vertu l'article 4 de la loi
n° 84-434 du 13 septembre 1984 relative à la limite
d'âge dans la fonction publique.
L'article 58 du décret n° 84-431 du 6 juin 1984 modifié qui
en précise les modalités dispose que
" les professeurs
admis à la retraite peuvent pour une durée
déterminée par l'établissement recevoir le titre de
professeur émérite par décision du conseil
d'administration prise à la majorité des membres présents
sur proposition du conseil scientifique siégeant en formation restreinte
aux personnes qui sont habilitées à diriger des travaux de
recherche dans un établissement, prise à la majorité
absolue des membres composant cette formation. Les professeurs
émérites peuvent diriger des séminaires, des thèses
et participer à des jurys de thèse ou d'habilitation. "
Cette faculté est très largement utilisée dans les
universités. Votre rapporteur, sans remettre en cause le
bien-fondé de cette disposition, s'est néanmoins interrogé
sur les raisons de son introduction dans un projet de loi consacré
à l'innovation.
II. Position de la commission
Votre commission a adopté cet article sans modification.
Article 6
Contribution des lycées
d'enseignement général et technologique
à la diffusion
de l'innovation technologique et des lycées professionnels
I.
Commentaire du texte du projet de loi
Cet article insère deux nouveaux articles dans la loi
n° 89-486 du 10 juillet 1989 d'orientation sur
l'éducation afin de préciser les modalités de
participation des lycées d'enseignement général et
technologique et des lycées professionnels et de leurs personnels
à la diffusion de l'innovation technologique et au transfert de
technologie.
Le
paragraphe I
insère dans la loi de 1989 un article 14 bis
précisant que, dans le cadre des activités prévues par le
projet d'établissement, les enseignants peuvent prendre part à
des actions en faveur de l'innovation technologique et du transfert de
technologie.
On rappellera que l'article 17 de la loi de programme n° 82-1371 du
23 décembre 1982 sur l'enseignement technologique et professionnel
prévoit déjà dans le cadre d'un dispositif certes moins
ambitieux mais sans doute plus opérant, la possibilité pour les
personnels enseignants titulaires dans les disciplines technologiques ou
professionnelles d'exercer leurs compétences auprès d'entreprises
publiques ou privées. Pour l'heure, ces dispositions ne peuvent
être appliquées, le décret en Conseil d'Etat prévu
par la loi n'ayant jamais été publié. Appliquer les lois
en vigueur semblerait pourtant de meilleure politique législative que
d'élaborer de nouveaux textes.
Le
paragraphe II
insère dans la loi de 1989 un article nouveau
afin d'ouvrir la possibilité aux lycées d'enseignement
général et technologique et aux lycées professionnels
d'assurer des prestations de service à titre onéreux dont
l'objectif est de réaliser des transferts de technologie.
Le projet de loi précise que ces actions peuvent être conduites
dans le cadre d'une convention ou au sein des groupements
d'intérêt public créés en application de
l'article 22 de la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le
développement du mécénat.
II. Position de la commission
Votre commission a adopté cet article sans
modification
.
EXAMEN EN COMMISSION
La
commission a examiné, au cours d'une réunion tenue le 11
février 1999 sous la présidence de
M. Adrien Gouteyron
, le
projet de loi n° 152 (1998-1999) sur
l'innovation
et la
recherche
.
Après l'exposé du rapporteur, la commission a
procédé à l'examen des articles au cours duquel sont
intervenus, outre le rapporteur et le président,
MM. James
Bordas
,
Jean-Paul Hugot
,
Serge Lagauche
et
Albert
Vecten
.
Après avoir adopté les amendements proposés par son
rapporteur, la commission a ensuite adopté le projet de loi ainsi
modifié.
*
* *
(1)
On citera notamment :
- les avis successifs de la commission des affaires culturelles pour les
budgets de 1986 à 1999 ;
- le rapport de mission sur la technologie et l'innovation de M. Henri
Guillaume (mars 1998) ;
- le compte rendu des assises de l'innovation de mai 1998.
2
par référence à la loi du 15 juillet 1982
qui fait de la valorisation de la recherche une mission du service public de la
recherche.
3
Un rapport de mission établi en 1985 précisait
l'état de la question il y a quatorze ans aux Etats-Unis (Pierre
Laffitte, Les incubateurs aux USA)
4
Sociétés anonymes, sociétés en
commandite par actions et sociétés par actions simplifiées
à l'exclusion des SARL, des sociétés en commandite simple
et des sociétés en nom collectif.
5
Fonds communs de placement à risque
6
Fonds commun de placement dans l'innovation
7
le bénéficiaire d'un droit exclusif d'exploitation
et le titulaire d'une licence peuvent exercer l'action en contrefaçon si
le propriétaire du brevet ne l'exerce pas.
8
La liste des personnels de l'enseignement supérieur
assimilés aux professeurs d'universités pour les élections
au Conseil national des universités est définie à
l'article 6 du décret n° 92-70 du 16 janvier 1992
selon la rédaction résultant du décret n 95-489 du
27 avril 1995.