Proposition de loi relative à la prise en charge des personnes atteintes de démence sénile et, en particulier, de la maladie d'Alzheimer
VASSELLE (Alain)
RAPPORT 155 (98-99) - Commission des Affaires sociales
Table des matières
- TRAVAUX DE LA COMMISSION
-
INTRODUCTION
- I. LA MALADIE D'ALZHEIMER : UN ENJEU MAJEUR DE SANTÉ PUBLIQUE ET UN FLÉAU SOCIAL
-
II. LES PROPOSITIONS DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES : UNE
APPROCHE GLOBALE VISANT À AMÉLIORER LA PRISE EN CHARGE DES
PERSONNES ATTEINTES DE LA MALADIE D'ALZHEIMER ET DE TROUBLES
APPARENTÉS
-
A. UN ENSEMBLE DE PROPOSITIONS COHÉRENT
- 1. Reconnaître l'enjeu épidémiologique et social de ces maladies
- 2. Améliorer la formation des intervenants et l'information de l'opinion publique
- 3. Favoriser le dépistage précoce de la maladie
- 4. Apporter un soutien psychologique aux familles
- 5. Favoriser le maintien à domicile des personnes malades par le développement des centres d'accueil de jour ou temporaire
- 6. Adapter les structures d'hébergement aux spécificités de la maladie d'Alzheimer et des troubles apparentés
- 7. Améliorer la prise en charge financière
-
B. UN DISPOSITIF LÉGISLATIF ADAPTÉ
- 1. Evaluer l'enjeu de santé publique et de politique sociale que représentent la maladie d'Alzheimer et les troubles apparentés (titre premier)
- 2. Améliorer la formation des personnes intervenant auprès des malades (titre II) ;
- 3. Adapter certaines dispositions financières et fiscales à la situation particulière des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer (titre III).
-
A. UN ENSEMBLE DE PROPOSITIONS COHÉRENT
- EXAMEN DES ARTICLES
-
TITRE PREMIER
-
DE L'AMÉLIORATION DE LA CONNAISSANCE
DU NOMBRE, DES BESOINS ET DES MODALITÉS DE PRISE EN CHARGE DES PERSONNES ATTEINTES DE LA MALADIE D'ALZHEIMER ET DE TROUBLES APPARENTÉS -
TITRE II
DE LA FORMATION DES INTERVENANTS-
Art. 2
Inscription de la maladie d'Alzheimer et des troubles apparentés parmi les thèmes nationaux prioritaires arrêtés par le Conseil national de la formation médicale continue -
Art. 3
Introduction dans la formation des intervenants à domicile
d'une partie consacrée à la prise en charge des personnes atteintes
de la maladie d'Alzheimer et de troubles apparentés
-
Art. 2
-
TITRE III
DES DISPOSITIONS FINANCIÈRES-
Art. 4
Doublement du plafond des dépenses autres que celles de personnel pour lesquelles la prestation spécifique dépendance peut être utilisée par les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et de troubles apparentés -
Art. 5
Extension aux personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer
et de troubles apparentés du bénéfice de la réduction d'impôt
au titre de l'hébergement dans un établissement de long séjour
ou une section de cure médicale -
Art. 6
Maintien, pour les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer
et de troubles apparentés, du plafond de 90.000 francs
pour les dépenses ouvrant droit à une réduction d'impôt
effectuées pour l'emploi d'un salarié à domicile -
Art. 7
Financement des dispositions fiscales de la proposition de loi - Intitulé de la proposition de loi
-
Art. 4
- CONCLUSIONS DE LA COMMISSION
N°
155
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Annexe au procès-verbal de la séance du 19 janvier 1999
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur la proposition de loi présentée par M. Alain VASSELLE et plusieurs de ses collègues, relative à l'amélioration de la prise en charge des personnes atteintes de démence sénile et, en particulier, de la maladie d'Alzheimer ,
Par M.
Alain VASSELLE,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : MM. Jean Delaneau, président ; Jacques Bimbenet, Louis Boyer, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Guy Fischer, Jean-Louis Lorrain, Louis Souvet, vice-présidents ; Mme Annick Bocandé, MM. Charles Descours, Alain Gournac, Roland Huguet, secrétaires ; Henri d'Attilio, François Autain, Paul Blanc, Mme Nicole Borvo, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Gilbert Chabroux, Jean Chérioux, Philippe Darniche, Christian Demuynck, Claude Domeizel, Jacques Dominati, Michel Esneu, Alfred Foy, Serge Franchis, Francis Giraud, Claude Huriet, André Jourdain, Philippe Labeyrie, Roger Lagorsse, Dominique Larifla, Henri Le Breton, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Simon Loueckhote, Jacques Machet, Georges Mouly, Lucien Neuwirth, Philippe Nogrix, Mme Nelly Olin, MM. Lylian Payet, André Pourny, Mme Gisèle Printz, MM. Henri de Raincourt, Bernard Seillier, Martial Taugourdeau, Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vezinhet, Guy Vissac.
Voir le
numéro :
|
|
Santé publique. |
TRAVAUX DE LA COMMISSION
Le
mardi 19 janvier 1999
, sous la
présidence de M. Jean Delaneau,
président,
la commission a procédé à l'examen
de la proposition de loi n° 210 (1997-1998) de
M. Alain Vasselle,
rapporteur
, relative à l'amélioration de la
prise en
charge des personnes atteintes de démence sénile
et, en
particulier, de la
maladie d'Alzheimer
.
M. Alain Vasselle, rapporteur,
a présenté les grandes
lignes de son rapport (cf. exposé général).
M. Jean Delaneau, président,
a considéré que la
prise en charge des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer allait
bientôt constituer un véritable problème de
société dont le Sénat ne pouvait se
désintéresser.
Après avoir indiqué qu'elle partageait les analyses
formulées par le rapporteur,
Mme Marie-Madeleine Dieulangard
a
souligné que les efforts de prévention et les avancées de
la recherche médicale permettraient sans doute d'éviter une trop
forte croissance du nombre des personnes atteintes de ces pathologies à
l'horizon 2050. Elle a fait valoir qu'une prise en charge adaptée
pouvait parfois faciliter la stabilisation, voire la régression, de la
maladie.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard
a considéré que la
prestation spécifique dépendance (PSD) apparaissait manifestement
inadaptée à la prise en charge de ces personnes. Elle s'est
demandé si cette proposition de loi ne risquait pas de
générer une multiplication des revendications émanant de
personnes atteintes d'autres pathologies. Evoquant les travaux actuellement
menés par le Gouvernement sur la professionnalisation de l'aide à
domicile, elle s'est interrogée sur la possibilité de
différer de quelque temps l'adoption de cette proposition de loi.
M. Jean Chérioux
s'est félicité de cette
proposition de loi qui témoignait de la volonté du
législateur d'agir sur un sujet très douloureux. Il a
demandé au rapporteur quelles dispositions du texte proposé
permettaient de répondre au problème spécifique
soulevé par les malades jeunes.
M. Francis Giraud
a souligné que cette proposition de loi
constituait la première pierre d'une nécessaire politique de
santé publique en faveur des personnes atteintes de la maladie
d'Alzheimer. Il a rappelé que le diagnostic de cette pathologie
était difficile et constituait avant tout une affaire
d'appréciation de la part du médecin. Il a souhaité savoir
qui serait chargé d'établir ce diagnostic dans le cadre des
dispositions prévues par le présent texte.
M. Guy Fischer
a déclaré qu'il accueillait favorablement
cette proposition de loi destinée à apporter une première
réponse à un problème majeur de santé publique.
Après avoir souligné que la PSD était insuffisante
à faire face au problème de la prise en charge de ces personnes
malades, il a considéré qu'il fallait aller plus loin encore en
augmentant les moyens financiers disponibles et en facilitant la
création de structures adaptées du type " Cantou ".
M. Bernard Cazeau
a souligné qu'il convenait de ne pas confondre
démence sénile et maladie d'Alzheimer, contrairement à ce
que semblait faire le texte de la proposition de loi initiale. Il s'est
inquiété de l'impact éventuel sur les budgets des
départements des dispositions financières que comportait le texte.
En réponse aux orateurs,
M. Alain Vasselle, rapporteur,
s'est
félicité de l'intérêt que portaient ses
collègues à cette proposition de loi. Il a expliqué que la
rencontre avec des familles touchées par la maladie l'avait convaincu de
la nécessité de prendre une initiative parlementaire.
En réponse à Mme Marie-Madeleine Dieulangard,
M. Alain
Vasselle, rapporteur,
a précisé que les prévisions du
nombre des personnes malades n'intégraient naturellement pas les
progrès futurs de la recherche médicale. Evoquant la
réflexion sur les métiers de l'aide à domicile, il a
souligné que l'article 16 de la loi du 24 janvier 1997 instituant la PSD
prévoyait une formation pour ces personnes selon des modalités
définies par décret : il a déploré que ce
décret ne soit toujours pas paru, deux ans après la promulgation
de la loi.
S'agissant des risques de " précédent " que pouvait
susciter cette proposition de loi,
M. Alain Vasselle, rapporteur,
a
rappelé que le Parlement avait adopté deux ans auparavant une
proposition de loi sur l'autisme, ce qui n'avait pas pour autant
déclenché les revendications de personnes atteintes d'autres
formes de handicap. Il a considéré que la situation actuelle ne
permettait pas de différer plus longtemps l'adoption de la proposition
de loi.
En réponse à M. Jean Chérioux,
M. Alain Vasselle,
rapporteur,
a souligné que les malades jeunes avaient vocation
à bénéficier de l'ensemble des dispositions fiscales et
financières figurant dans la proposition de loi. Il a
précisé que l'article 5, qui supprimait la condition d'âge
pour bénéficier de la réduction d'impôt au titre des
dépenses d'hébergement, leur était particulièrement
destiné.
En réponse à M. Bernard Cazeau,
M. Alain Vasselle, rapporteur,
a précisé que la proposition de loi qu'il soumettait à
la commission ne faisait plus référence à la
démence sénile et privilégiait la dénomination de
maladie d'Alzheimer et troubles apparentés. Il a expliqué que le
doublement du plafond des dépenses autres que de personnel prises en
charge par la PSD permettrait une meilleure utilisation de cette prestation
pour les personnes malades sans toutefois augmenter le montant de la prestation
versée et donc les charges des départements.
En réponse à M. Guy Fischer,
M. Alain Vasselle,
rapporteur,
a considéré que les structures
d'hébergement de type " Cantou " constituaient
vraisemblablement la formule la plus adaptée à la prise en charge
des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et de troubles
apparentés.
Puis la commission a procédé à l'examen des articles. Elle
a adopté, sur proposition du rapporteur, l'ensemble des articles dans le
texte figurant dans le présent rapport.
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
La maladie d'Alzheimer est aujourd'hui considérée comme la
première cause de démence et de perte d'autonomie
sévère de la personne âgée.
Elle touche environ 350.000 personnes dans notre pays tandis que 60 à
70.000 nouveaux cas se manifestent chaque année. Elle concernerait deux
millions de personnes aux Etats-Unis, un million au Japon et trois millions en
Europe. Compte tenu du vieillissement prévisible de la population des
pays industrialisés, ces chiffres sont en outre amenés à
croître fortement dans les prochaines années.
Affection frappant essentiellement les personnes âgées, la maladie
d'Alzheimer voit sa fréquence augmenter avec l'âge : elle
atteint ainsi 3 % des personnes âgées de 70 ans, 7 % des
75 ans, 17 % des 80 ans et 29 % des 85 ans et plus
1(
*
)
. Elle frappe en outre parfois des personnes plus
jeunes.
Problème majeur de santé publique, la maladie d'Alzheimer
constitue également un véritable fléau social.
Cette affection place en effet les personnes qu'elle frappe en situation de
grande dépendance, impose une prise en charge lourde et rend difficile,
sinon impossible, le maintien à domicile à moyen terme. 70 %
des personnes âgées entrent ainsi en institution pour des troubles
démentiels mettant en cause gravement leur sécurité dans
leur propre logement.
Dramatique pour le malade, cette maladie affecte également tout
l'environnement familial, le plongeant dans la détresse morale,
l'épuisement et une solitude extrême, surtout dans les phases
tardives où le malade nécessite une surveillance constante.
Le maintien à domicile trouve vite ses limites : la charge
-croissante et permanente- qui pèse sur les familles conduit souvent
à l'épuisement. En établissement, la prise en charge
n'apparaît pas toujours adaptée : la cohabitation avec les
autres personnes âgées se révèle impossible,
l'architecture des structures intègre rarement les contraintes propres
à l'hébergement de ces malades.
La prise en charge des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et de
troubles apparentés se traduit de surcroît par un coût
financier très important, largement supérieur à celui
qu'engendrent les autres formes de dépendance.
Au moment où commence l'année 1999, année internationale
des personnes âgées, votre rapporteur a considéré
que les pouvoirs publics ne pouvaient se désintéresser des
problèmes posés par la prise en charge des personnes atteintes de
maladies dégénératives de type Alzheimer.
Partageant la conviction exprimée par M. Bernard Kouchner,
Secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale,
que
" notre pays ne fait pas face à cette affection, qui
engendre bien des malheurs dans les familles et suscite un désarroi
très profond "
2(
*
)
,
votre
rapporteur a été amené à déposer la
proposition de loi n° 210 relative à l'amélioration de
la prise en charge des personnes atteintes de démence sénile et,
en particulier, de la maladie d'Alzheimer.
La présente proposition de loi a donc pour objet d'élaborer un
dispositif d'ensemble cohérent, bien que modeste, afin d'apporter une
première réponse aux besoins croissants qu'engendre le nombre,
toujours plus important, des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et
de troubles apparentés.
Soucieux de couvrir l'ensemble des maladies
neurodégénératives, votre rapporteur a choisi
d'élargir le champ d'application de cette proposition de loi aux
troubles apparentés à la maladie d'Alzheimer.
Cette proposition de loi ne vise nullement à morceler la politique en
faveur des personnes âgées ou à introduire un traitement
privilégié de certaines pathologies et de certains malades ;
elle s'efforce simplement de mieux répondre aux difficultés
particulières que soulèvent la maladie d'Alzheimer et les
troubles apparentés.
Elle se caractérise par une triple approche : une meilleure
connaissance de l'enjeu de santé publique et de politique sociale que
représentent ces maladies, l'amélioration de la formation des
médecins et des intervenants à domicile, et des dispositions
financières visant à assurer une meilleure prise en charge des
malades et de leurs familles.
Les travaux que votre rapporteur a consacré à cette proposition
de loi l'ont amené à formuler de surcroît un certain nombre
de propositions qui dépassent le cadre de ce texte et qui pourraient
constituer les axes d'une véritable politique publique de prise en
charge des personnes atteintes de ces affections.
I. LA MALADIE D'ALZHEIMER : UN ENJEU MAJEUR DE SANTÉ PUBLIQUE ET UN FLÉAU SOCIAL
A. UN ENJEU MAJEUR DE SANTÉ PUBLIQUE
La
maladie d'Alzheimer a été désignée jusqu'à
des années récentes sous différentes appellations :
démence sénile, présénile ou précoce,
maladie d'Alzheimer ou démence de type Alzheimer.
Cette profusion terminologique découlait d'une conception erronée
du vieillissement cérébral. Les cliniciens considéraient
que la dégradation progressive des fonctions cognitives et la
sénilité étaient un mode de vieillissement
" naturel " lié à l'âge. Les recherches
entreprises ont montré que cette approche était
erronée : la maladie d'Alzheimer n'est pas le résultat du
vieillissement, elle constitue une véritable maladie dont la
fréquence d'apparition augmente avec l'âge.
Plusieurs conférences internationales de consensus ont aujourd'hui
entériné le terme unique de maladie d'Alzheimer.
Désormais, le terme de maladie d'Alzheimer réunifie les
différentes appellations et celui de démence sénile est
progressivement abandonné
3(
*
)
.
Si le terme de " maladie d'Alzheimer " est aujourd'hui largement
utilisé par l'opinion publique et les médias, il existe cependant
d'autres maladies dégénératives moins connues, telles que
les dégénérescences frontotemporales (DFT) et la
démence à corps de Lewy, qui ont longtemps été
confondues avec la maladie d'Alzheimer et dont les manifestations sont aussi
dramatiques.
Soucieux de couvrir l'ensemble de ces affections, votre rapporteur a
souhaité inclure ces troubles apparentés dans le champ
d'application de la proposition de loi, laquelle porte par conséquent
sur la prise en charge des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et de
troubles apparentés.
Par coordination, la commission a adopté l'utilisation de cette
terminologie dans l'ensemble des articles et dans le titre de la
présente proposition de loi.
1. Une démence dégénérative et irréversible
La
maladie d'Alzheimer porte le nom du Dr Alois Alzheimer qui décrivit pour
la première fois, le 4 novembre 1906, lors de la
37
ème
Conférence des psychiatres allemands
à Tübingen, ce type de démence
4(
*
)
.
Au cours de cette conférence, le Dr Alzheimer évoque une patiente
nommée Auguste D., âgée de 51 ans et habitant Francfort,
qui souffrait d'une dégradation progressive de ses facultés
cognitives, d'hallucinations, de confusion mentale et d'une inaptitude
psychosociale. L'autopsie du cerveau avait révélé des
plaques, des enchevêtrements neurofibrillaires et des lésions
d'athérosclérose. L'éponyme Alzheimer, utilisé
à l'origine pour qualifier la démence présénile,
fut employé ensuite pour décrire plus généralement
les démences primaires : la démence sénile de type
Alzheimer
5(
*
)
.
La maladie d'Alzheimer associe un syndrome démentiel et des
lésions cérébrales caractéristiques. La maladie
débute par des troubles de la mémoire épisodique
6(
*
)
, qui résultent d'une incapacité à
enregistrer, à fixer des informations nouvelles de nature
autobiographique. Ces troubles peuvent être méconnus ou
sous-estimés en raison de la tolérance de l'entourage et d'une
compensation des déficits par le patient qui, encore conscient de ses
difficultés, s'aide en notant ses rendez-vous ou les courses à
faire. Apparaît ensuite un manque du mot, ainsi que des
difficultés d'attention et de mémoire de travail
7(
*
)
, attestant de l'extension des lésions vers le
cortex associatif, ces dernières entraînant une diminution des
capacités conceptuelles et de jugement. Le patient devient alors plus
indifférent à ses troubles et incapable de les compenser. C'est
à ce stade qu'il commence à être plus dépendant d'un
entourage qui prend alors conscience de ses difficultés
8(
*
)
.
Enfin, le tableau clinique s'aggrave, car apparaissent progressivement les
perturbations de fonctions spécifiques, dites instrumentales (langage,
activités gestuelles, identification des objets). Le discours
spontané est de moins en moins informatif et souvent incohérent,
la compréhension s'altère, l'expression écrite devient
inintelligible, le patient a de plus en plus de difficultés à
réaliser les gestes de la vie courante et se renferme socialement. Une
agitation et des préoccupations délirantes peuvent
apparaître, compliquant les relations avec l'entourage.
Avec l'accentuation de la dépendance, le maintien à domicile peut
alors poser de grandes difficultés. Le décès survient
généralement après sept ans d'évolution de la
maladie.
2. Un diagnostic difficile
Paradoxalement, alors que la maladie d'Alzheimer a
été
bien décrite dès 1907, il a fallu attendre la fin des
années 1980 pour disposer de chiffres permettant de cerner, encore
imparfaitement, l'ampleur du phénomène. Pour comprendre les
difficultés de ce qui pourrait sembler une simple opération de
comptabilité, il faut savoir qu'il est difficile de bien repérer
les cas de démences dans une population et de différencier ceux
liés à une maladie d'Alzheimer
9(
*
)
.
Le diagnostic de la maladie d'Alzheimer est en effet difficile à
établir. A son début, la maladie peut être confondue avec
la plainte mnésique, très fréquente au-delà de 50
ans, et qui résulte de la prise de conscience par le sujet d'une
diminution de ses capacités de mémorisation dans la vie
quotidienne.
Etre dément c'est, selon une des classifications les plus
utilisées, le DSMIII-R
10(
*
)
,
présenter une altération importante des fonctions cognitives,
entraînant une perte d'autonomie dans les activités de la vie
quotidienne.
Il est cependant parfois difficile de situer la limite entre un trouble de la
mémoire isolé et un véritable début de
démence. Les outils permettant le diagnostic sont complexes et, sans
mettre en place une enquête spécifique, on ne peut facilement
savoir si un sujet est victime d'une démence. Une fois le diagnostic
posé, il faudra procéder à des examens plus poussés
pour déterminer si la démence est due à une maladie
d'Alzheimer ou à une autre étiologie
11(
*
)
, notamment à une démence d'origine
vasculaire.
Dans un centre de neurologie spécialisé, des tests
psychométriques et des analyses complémentaires permettront de
dire s'il s'agit d'une maladie d'Alzheimer possible ou d'une autre maladie.
Mais il n'y a aucun test, ni aucun examen simple et sûr pour
diagnostiquer la maladie d'Alzheimer. Le diagnostic de maladie d'Alzheimer
probable sera prononcé lorsque l'on aura éliminé toutes
les autres pathologies possibles (vasculaire ou dépressive par exemple)
et que le patient aura au moins une perte du langage (aphasie), de la
stratégie des mouvements (apraxie) ou de la reconnaissance visuelle
(agnosie) en plus des pertes de mémoire.
Il n'existe pas encore de marqueur biologique spécifique qui permette un
diagnostic positif de la maladie d'Alzheimer. Seule une autopsie mettant en
évidence les lésions cérébrales spécifiques
permet de diagnostiquer avec certitude la maladie. En effet, le
neuropathologiste donnera ce diagnostic s'il observe les deux types de
lésions caractéristiques de la maladie : les plaques
séniles et la dégénérescence neurofibrillaire. Ces
lésions sont observées dans la plupart des régions
cérébrales.
Cette difficulté de diagnostic rend indispensable une formation
adaptée du corps médical.
3. L'absence de traitement curatif
L'origine de la maladie d'Alzheimer est encore inconnue et il
n'existe actuellement aucun médicament permettant de guérir cette
maladie.
La tacrine, médicament à visée symptomatique, demeure le
seul traitement disponible. Ce médicament agit en s'opposant à la
dégradation d'un neurotransmetteur, l'acétylcholine, dans le
cerveau et vise à accroître les performances cognitives des
malades. Il ne guérit pas mais améliore les performances de
certains patients. Il n'est pas efficace chez tous les malades et sa
prescription exige, en raison de certains effets toxiques sur le foie, une
surveillance étroite du patient.
La recherche actuelle s'oriente vers le diagnostic précoce et les moyens
d'affiner celui-ci. L'idée est, dans son principe, simple :
chercher des moyens de diagnostic précoce de la maladie à ses
débuts afin de ralentir voire d'empêcher par des
médicaments la formation des plaques séniles.
Afin de lutter le plus efficacement contre la maladie d'Alzheimer et les
troubles apparentés, il importe en effet de repérer et de
reconnaître suffisamment tôt ces affections et de les prendre en
charge quand leur stabilisation est encore susceptible d'intervenir. Certaines
pistes sont aujourd'hui explorées afin de prévenir l'apparition
de ces pathologies, telles que le traitement hormonal substitutif de la
ménopause et la lutte contre l'hypertension artérielle. Il
apparaît en outre qu'il sera sans doute possible à terme de
repérer très précocement les sujets à risques et de
mettre en oeuvre à leur bénéfice une prévention
appropriée.
Dans un contexte de vieillissement des populations des pays
développés, on conçoit l'importance de la recherche qui,
seule, peut faire progresser le diagnostic et découvrir des traitements
préventifs et curatifs. Un neurologue américain a calculé
que le simple fait de reculer de cinq années l'apparition des signes
cliniques permettrait de réduire de près de 50 % le nombre
de cas.
Le développement récent des consultations de la mémoire a
grandement facilité la mise en place de stratégies de
dépistage. En effet, un nombre croissant de personnes en bonne
santé s'inquiètent de troubles de la mémoire et viennent
en consultation dans ces structures spécialisées alors qu'elles
ne se seraient pas rendues dans des services de gériatrie ou de
neurologie.
Ces consultations permettent de détecter à un stade très
en amont des personnes présentant des troubles encore mineurs mais qui
risquent de développer une démence quelques années plus
tard.
4. Une croissance prévisible du nombre des malades
Les
difficultés de diagnostic expliquent en partie qu'on ne puisse pas
donner directement le nombre de sujets touchés par la maladie
d'Alzheimer en France. Il faut estimer ce chiffre à partir
d'enquêtes où l'on a recherché pour un groupe de sujets
s'il existait ou non une démence et quelle en était la
cause.
12(
*
)
Pour être exhaustive, cette recherche doit s'effectuer auprès des
personnes vivant à domicile et dans les institutions médicales
pour personnes âgées ou dans les services de long séjour.
En France, depuis 1988, une vaste étude longitudinale
13(
*
)
sur le vieillissement, baptisée PAQUID, a
été mise en place en Aquitaine par le
Pr. Jean-François Dartigues (Inserm, U330, Bordeaux). Ce travail
porte sur un échantillon représentatif des sujets vivant dans
cette région, suivis maintenant depuis plus de huit ans. Il permet de
disposer de données de prévalence
14(
*
)
(nombre de cas présents) et
d'incidence
15(
*
)
(nombre de nouveaux cas par an)
pour les démences et la maladie d'Alzheimer.
Au niveau européen un groupe de recherche, intitulé EURODEM, a
rassemblé les données obtenues entre 1980 et 1990 dans douze
lieux d'enquêtes, incluant les résultats recueillis auprès
de la population française. Les chiffres de prévalence des
démences issus de l'étude européenne montrent que leur
fréquence augmente avec l'âge : elles atteignent moins de 2 %
d'Européens entre 65 et 69 ans, plus de 30 % après
90 ans. Selon les études, 50 à 70 % de ces
démences sont à mettre au compte de la maladie d'Alzheimer.
Globalement, dans la population européenne âgée de 65 ans
et plus, la prévalence de la maladie d'Alzheimer est voisine de
3 %. Plus précisément, si moins de 1 % des
Européens sont touchés entre 65 et 70 ans, au-delà de
85 ans ils sont environ 15 %. Un des éléments les plus
marquants révélés par ces chiffres est l'allure quasi
exponentielle de l'augmentation des pourcentages avec l'âge. Les
différences entre les deux sexes sont peu marquées, même si
on note une fréquence un peu plus élevée chez les femmes,
probablement à cause de leur plus grande longévité (huit
ans de plus que les hommes). Les analyses les plus récentes
suggèrent que l'augmentation de la prévalence en fonction de
l'âge est moins rapide après 90 ans, la courbe semblant
même amorcer un plateau
16(
*
)
.
Si l'on applique les chiffres de l'analyse européenne aux données
démographiques françaises actuelles, on peut évaluer le
nombre total de démences en France, toutes causes confondues, à
580.000. Avec les estimations de l'étude PAQUID, ce nombre tombe
à environ 300.000. Une fourchette large qui montre à quel point
il est délicat d'estimer l'ampleur du drame humain que
représentent ces pathologies.
Deux facteurs pèsent sur ce chiffre de prévalence : la
durée de la maladie et le nombre de cas qui apparaissent tous les ans,
dits cas incidents. D'après les données de l'étude PAQUID
et en se basant sur notre situation démographique actuelle, on peut
évaluer ces cas incidents à environ 100.000 par an. Mais pour
2020, les projections deviennent encore plus alarmantes. Si l'on admet
-hypothèse a priori plutôt optimiste- que la baisse de la
mortalité va se poursuivre au même rythme que ces dernières
années, plus de 200.000 nouveaux cas de démence pourraient
apparaître tous les ans en 2020, dont 50.000 parmi les plus de
90 ans. Ces chiffres ne sont toutefois que des estimations.
A l'évidence, comme le souligne Mme Janine Cayet dans son rapport au
Conseil économique et social
17(
*
)
,
" l'estimation de l'ampleur de la population concernée demeure
entachée d'incertitude ".
Un élément est toutefois certain : le nombre des personnes
malades ne peut qu'augmenter dans les prochaines années, en raison du
vieillissement de la population.
L'allongement très significatif de l'espérance de vie dans nos
sociétés industrialisés est l'un des faits marquants du
siècle qui s'achève. En un siècle, l'espérance de
vie en France s'est ainsi globalement accrue de 25 ans : elle
s'élève aujourd'hui à 73 ans pour les hommes et 82 ans
pour les femmes.
Selon l'INSEE, les plus de 70 ans représenteront en 2050 plus de
11 millions d'individus. La population âgée de plus de 90 ans
, à peine supérieure à 240.000 en 1990,
s'établirait en 2050 à 2 millions de personnes, dont 700.000 de
plus de 95 ans. Il y avait 3.000 personnes de plus de 90 ans en 1930, 70.000 en
1995 et vraisemblablement 700.000 en 2015.
Ce vieillissement de la population s'accompagne naturellement d'une
augmentation des pathologies liées à l'âge, au premier rang
desquelles figurent les démences et en particulier la maladie
d'Alzheimer. Le nombre de personnes susceptibles de développer des
pathologies mentales liées à l'âge serait multiplié
par 6 d'ici 2050.
Le vieillissement de la population ne s'accompagnera pas pour autant d'une
augmentation parallèle des pathologies liées à
l'âge. Si le nombre de personnes exposées au risque de
dépendance va croître de manière importante dans les
prochaines années, il est difficile d'évaluer aujourd'hui
l'état de santé futur de ces personnes. Il est en effet
très probable que les Français vivront de plus en plus longtemps
et en meilleure santé que les générations actuelles.
De très nombreux travaux ont montré que l'élévation
de l'espérance de vie ne s'accompagnait pas d'un accroissement
parallèle du handicap. Une étude récente
18(
*
)
montre que si l'espérance de vie a
progressé de 2,5 années entre 1980 et 1990, l'espérance de
vie sans incapacité s'est accrue parallèlement de 3 ans pour les
hommes et de 2,7 ans pour les femmes : chaque année
d'espérance de vie gagnée le serait sans incapacité.
Toutefois, si le taux de prévalence de pathologies mentales lourdes
liées à l'âge est susceptible de régresser à
l'avenir, le nombre de personnes concernées ne peut, dans une population
de personnes âgées qui augmente de façon importante, que
s'accroître sensiblement.
B. UN FLÉAU SOCIAL
1. La nécessité d'une surveillance constante de la personne malade
La prise
en charge -en institution ou à domicile- d'une personne
âgée démente soulève des problèmes tout
à fait particuliers. Ce constat a été souligné avec
force par l'ensemble des personnes que votre rapporteur a été
amené à auditionner.
La personne âgée souffrant de la maladie d'Alzheimer ou de
troubles apparentés ne constitue généralement plus un
interlocuteur fiable ; elle n'est pas en état de jouer un
rôle dans sa prise en charge et d'émettre un jugement ou une
appréciation sur celle-ci. Il revient par conséquent à la
famille de décider pour la personne âgée, ce qui constitue
souvent une épreuve difficile.
La personne âgée démente peut en revanche jouer un
rôle de " perturbateur ". La détérioration
mentale s'accompagne souvent de troubles du comportement (fugue, violence
à l'égard des proches, dangerosité...) qui peuvent prendre
des proportions importantes surtout lorsque les capacités physiques sont
conservées. Ainsi, non seulement la personne démente ne va pas
collaborer mais elle va parfois résister et s'opposer aux mesures
permettant d'assurer sa prise en charge.
Au sein des démences, la maladie d'Alzheimer présente en outre
des caractéristiques particulières de désorientation,
d'errance et d'agressivité. Elle nécessite, à un stade
avancé, une surveillance constante du malade. Elle est en cela
différente des formes de dépendance physique très lourdes
où la présence d'un tiers n'est pas indispensable de
manière permanente.
Il convient de rappeler à cet égard que la lourdeur de la prise
en charge n'est pas liée à la lourdeur du handicap.
Si un traitement précoce permet de stabiliser voire de retarder
l'évolution des détériorations du malade, un soutien suivi
des proches est indispensable tant est importante la charge, aussi bien
physique que psychique, qui pèse sur la famille et l'entourage
proche.
2. Une prise en charge très coûteuse
La
maladie d'Alzheimer et les troubles apparentés sont des affections
particulièrement lourdes et coûteuses tant pour la famille et
l'entourage proche que pour l'ensemble des structures intervenant à
chaque étape de la prise en charge. Il convient, en effet, de prendre en
compte l'ensemble des dépenses de santé relatives aux soins
à prodiguer aux patients (thérapeutique, ergothérapie,
kinésithérapie, coût engendré par l'aggravation des
pathologies associées, soins à domicile ou en institution...)
mais aussi le coût social du patient lié à la
dépendance (aide ménagère, auxiliaire de vie, prestations
spécifiques...).
A ces dépenses, il conviendrait d'ajouter les coûts connexes et
difficilement quantifiables liés, par exemple, aux arrêts de
travail de l'entourage, au soutien psychologique, voire médical, dont il
peut avoir besoin.
Un certain nombre de dispositifs permettent d'alléger le coût
financier, pour les malades et leurs familles, de cette prise en charge.
Ces affections sont reconnues comme " affections de longue
durée " (ALD) entraînant l'exonération du ticket
modérateur. Les soins en rapport avec la pathologie concernée
sont pris en charge en totalité, que ce soit pour le court ou le moyen
séjour hospitalier (hors forfait hôtelier), ou à domicile
par les intervenants libéraux.
En institution, les " forfaits soins " de section de cure
médicale ou de service de soins de longue durée ne comportent pas
de ticket modérateur, de même que les prestations des services de
soins infirmiers à domicile.
Afin de faire face aux frais entraînés, soit par le maintien
à domicile, soit par l'hébergement en institution, des
prestations peuvent être versées : l'allocation compensatrice pour
aide d'une tierce personne (ACTP) peut être attribuée par les
COTOREP et versée par les départements pour les personnes de
moins de soixante ans, quelle que soit l'origine de leur dépendance.
La prestation spécifique dépendance (PSD), instituée par
la loi 97-60 du 24 janvier 1997, est attribuée par les
départements aux personnes de plus de soixante ans, en fonction de leur
niveau de dépendance. Les personnes atteintes de
détérioration intellectuelle qui sont parmi les plus
dépendantes, ont vocation à bénéficier, dans le
cadre de cette prestation, des plus importants volumes d'aide.
Des exonérations d'impôt ou de charges sociales et des
déductions fiscales sont également possibles.
Au titre des frais d'hébergement, une réduction d'impôt
égale à 25 % des sommes versées dans la limite de
15.000 francs, est accordée pour les personnes de plus de
soixante-dix ans résidant dans une maison de retraite avec section de
cure médicale ou en service de soins de longue durée.
En outre, est totalement exonérée de cotisations sociales
patronales la rémunération d'une aide à domicile par des
personnes titulaires de l'ACTP ou de la majoration pour tierce personne, ou
remplissant les conditions de degré de dépendance pour
l'obtention de la PSD, ou obligées de recourir à l'aide d'une
tierce personne pour les actes ordinaires de la vie et titulaires d'une pension
d'invalidité ou d'un avantage vieillesse. La même
exonération est applicable aux rémunération des aides
à domicile employées par des associations
19(
*
)
.
Il existe de plus une déductibilité fiscale de 50 % des
sommes versées pour emploi à domicile, dans la limite de 45.000
francs par an, plafond porté à 90.000 francs pour les personnes
titulaires d'une pension d'invalidité de
3
ème
catégorie.
Enfin, si la personne ne peut s'acquitter des frais d'hébergement en
institution, elle peut demander à bénéficier de l'aide
sociale telle que prévue par le code de la famille et de l'aide sociale.
Ce dernier dispositif s'applique indépendamment de l'âge, mais
fait appel à l'obligation alimentaire et au recours sur succession.
Si ces dispositifs légaux permettent certes d'alléger la charge
financière pesant sur les malades et leurs famille, ils n'apparaissent
cependant pas suffisants pour faire face aux dépenses qu'entraîne
la prise en charge des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et de
troubles apparentés.
La prise en charge des personnes victimes de ces affections se traduit en effet
par un coût financier très important, largement supérieur
à celui qu'engendrent les autres formes de dépendance. La maladie
d'Alzheimer et les troubles apparentés génèrent ainsi des
coûts faibles en matière de soins et des coûts très
élevés en matière de garde du malade.
L'hébergement en maison de retraite médicalisée a un
coût généralement compris entre 10.000 et 20.000 francs
mensuels. A domicile, la nécessité d'assurer une surveillance
constante des personnes malades oblige les personnes en charge de la garde
à se relayer et engendre également des coûts très
importants.
Cette charge financière considérable repose bien souvent sur les
seules familles.
3. Les limites du maintien à domicile et l'inadaptation de l'offre d'accueil en institution
Pour l'essentiel, c'est actuellement sur la famille et
l'entourage que repose la prise en charge du malade dont l'état se
dégrade progressivement et inexorablement. Cette prise en charge
permanente constitue un fardeau particulièrement lourd pour les
familles, qui ne peuvent que trop rarement recourir à des formules
d'accueil ou d'hébergement temporaires.
A partir d'un certain stade de la maladie, le maintien à domicile
devient impossible. La seule solution qui s'offre aux familles est alors
l'hébergement en établissement.
L'accueil en institution des personnes souffrant de la maladie d'Alzheimer ou
de troubles apparentés présente des spécificités
qui sont rarement prises en compte dans les projets de vie des
établissements.
La configuration architecturale de la plupart des établissements
constitue généralement la première
difficulté : la déambulation du malade,
caractéristique de la maladie d'Alzheimer, n'est en effet guère
compatible avec le fonctionnement quotidien d'une structure
d'hébergement.
En outre, les particularités du comportement de ces malades rendent
impossible toute cohabitation directe avec d'autres personnes
âgées et imposent un hébergement dans des structures
spécialisées.
II. LES PROPOSITIONS DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES : UNE APPROCHE GLOBALE VISANT À AMÉLIORER LA PRISE EN CHARGE DES PERSONNES ATTEINTES DE LA MALADIE D'ALZHEIMER ET DE TROUBLES APPARENTÉS
A. UN ENSEMBLE DE PROPOSITIONS COHÉRENT
Pour ces
recommandations, votre rapporteur s'est inspiré des suggestions
formulées lors des auditions auxquelles il s'est livré et du
remarquable travail accompli sur le sujet par Mme Janine Cayet dans son
récent rapport au Conseil économique et social relatif à
" La prise en charge des personnes vieillissantes handicapées
mentales ou souffrant de troubles mentaux "
20(
*
)
.
Il a jugé utile de formuler un certain nombre de propositions
susceptibles d'orienter l'action des pouvoirs publics en matière de
prise en charge des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et de
troubles apparentés.
Une politique publique de prise en charge efficace et ambitieuse de la maladie
d'Alzheimer passe par des actions multiples et diversifiées.
Naturellement, seules certaines des propositions formulées par votre
rapporteur revêtent un caractère explicitement législatif
et sont reprises dans les conclusions de la commission sur la proposition de
loi.
1. Reconnaître l'enjeu épidémiologique et social de ces maladies
Il apparaît tout d'abord nécessaire de
reconnaître la maladie d'Alzheimer et des troubles apparentés
au titre des trente maladies
" comportant un traitement
prolongé et une thérapeutique particulièrement
coûteuse "
répertoriées par l'article D. 322-1 du
code de la sécurité sociale.
A ce jour, la maladie d'Alzheimer ne figure pas, en tant que telle, parmi les
trente maladies " comportant un traitement prolongé et une
thérapeutique particulièrement coûteuse "
répertoriées par l'article D. 322-1 du code de la
sécurité sociale, alors qu'une affection comme la maladie de
Parkinson en fait partie.
Elle est cependant implicitement comprise dans les cas de "
psychose,
trouble grave de la personnalité, arriération mentale "
.
En effet, la recommandation du haut comité médical de la
sécurité sociale cite parmi les arriérations mentales la
maladie d'Alzheimer.
Le patient atteint de cette affection bénéficie par
conséquent de l'exonération du ticket modérateur et de la
prise en charge à 100 % des dépenses d'hospitalisation
liées à sa maladie, sous réserve du paiement du forfait
journalier hospitalier.
Toutefois, dans un souci de reconnaissance officielle de cette affection et
afin de permettre un meilleur suivi du nombre des personnes affectées,
votre rapporteur formule le souhait que cette maladie soit inscrite par voie
réglementaire dans l'article D. 322-1 du code de la
sécurité sociale.
Outre que la reconnaissance de la maladie d'Alzheimer comme
31
ème
maladie présenterait un
intérêt épidémiologique évident, elle
constituerait un signal fort pour la prise de conscience des
conséquences douloureuses de cette maladie sans coût pour la
collectivité.
Cette mesure permettrait de prendre en compte cet enjeu de santé
publique et de politique sociale que sont la maladie d'Alzheimer et les
démences séniles en général et d'améliorer
la qualité de prise en charge des personnes qui en sont atteintes.
Afin de favoriser la reconnaissance par les pouvoirs publics de l'enjeu de
santé publique et de politique sociale que constituent la maladie
d'Alzheimer et les troubles apparentés, votre commission juge en outre
indispensable que le Gouvernement remette prochainement au Parlement
un
rapport relatif aux modalités de prise en charge de ces affections.
Cette proposition fait l'objet de l'article premier de la proposition de loi
résultant des conclusions de la commission.
2. Améliorer la formation des intervenants et l'information de l'opinion publique
Afin de favoriser un dépistage précoce de la
maladie d'Alzheimer et des troubles apparentés et une prise en charge
adaptée des personnes qui en sont atteintes, votre commission juge
nécessaire de mieux sensibiliser les différents intervenants
auprès des malades.
Il convient en premier lieu
d'
intégrer la maladie d'Alzheimer
et les troubles apparentés dans la formation des médecins, des
infirmières et des intervenants à domicile
Le médecin généraliste -en l'occurrence le médecin
de famille- apparaît le mieux placé pour déceler les
premiers signes de la maladie. Il joue un rôle essentiel dans le
dépistage précoce de la maladie d'Alzheimer et des troubles
apparentés.
Dans plus de la moitié des cas
21(
*
)
,
c'est le médecin de famille qui propose un diagnostic initial, lequel
est ensuite validé, à la demande du praticien, par un neurologue,
en consultation ou en hôpital de jour.
Or, la formation initiale et continue des médecins sur ces affections
est sans doute insuffisante.
Dans sa réponse à une question orale de votre rapporteur, M.
Bernard Kouchner, Secrétaire d'Etat à la santé et à
l'action sociale, reconnaissait ainsi que
" notre pays manque
cruellement de structures de formation adaptée en la matière.
Cela signifie qu'il faudrait revoir très précisément la
formation médicale, tant initiale que continue, afin de l'adapter
à cette catégorie particulière
d'affections. "
22(
*
)
La formation initiale des médecins étant du ressort exclusif des
universités, rares sont celles qui ont mis en place un programme
cohérent sur la maladie d'Alzheimer et les troubles apparentés.
Ces pathologies souffrent sans doute de se situer aux frontières de la
psychiatrie, de la neurologie et de la gérontologie. Il serait par
conséquent nécessaire de définir une
spécialité responsable de cet enseignement.
Si une action en faveur de la formation initiale des médecins s'impose
à l'évidence, votre commission est convaincue que la maladie
d'Alzheimer et les troubles apparentés doivent également
constituer un thème de la formation continue des médecins.
C'est pourquoi l'article 2 de la proposition de loi résultant des
conclusions de la commission prévoit que la maladie d'Alzheimer et les
troubles apparentés constitueront un des thèmes nationaux
prioritaires de la formation médicale continue.
Un effort similaire de formation et de sensibilisation apparaît
nécessaire pour les infirmières et les intervenants qui assurent
le maintien à domicile du patient (aides à domicile, auxiliaires
de vie...)
S'agissant des intervenants à domicile, l'article 3 de la proposition de
loi vise ainsi à compléter, par une partie consacrée
à la prise en charge des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer
et de troubles apparentés, la formation des salariés
rémunérés pour assurer un service d'aide à domicile
auprès d'une personne allocataire de la prestation spécifique
dépendance.
Enfin, il paraît également nécessaire de mieux sensibiliser
l'opinion publique aux spécificités de ces maladies et à
l'enjeu qu'elles représentent pour la collectivité.
3. Favoriser le dépistage précoce de la maladie
Afin de
lutter le plus efficacement possible contre la maladie d'Alzheimer et les
troubles apparentés, il importe de repérer et de
reconnaître suffisamment tôt ces affections.
Soucieuse de favoriser le diagnostic précoce de ces maladies, votre
commission souhaite mettre l'accent sur la nécessité de
développer des unités de consultation à visée
diagnostique et des centres d'expertise au sein des hôpitaux.
Ces unités permettent aux médecins généralistes,
dès les premiers signes laissant suspecter l'apparition de la maladie,
d'envoyer leurs malades pour une consultation de la mémoire ou une
consultation spécialisée
Les centres comprennent généralement des équipes
multidisciplinaires (gériatres, psychologues, ergothérapeutes) et
permettent souvent un diagnostic complet en une journée. Ils jouent un
rôle précieux de dépistage de la maladie et de conseil aux
médecins généralistes et aux familles. Ils sont un
élément indispensable d'une meilleure prise en charge.
Les unités de consultation à visée diagnostique en milieu
hospitalier sont encore en nombre très insuffisant, le délai
d'attente pour une consultation pouvant atteindre six mois dans certaines
régions.
4. Apporter un soutien psychologique aux familles
La plupart des familles souhaitent garder le malade à
son domicile. Or ceci suppose un encadrement permanent du malade par les
membres de la famille, qui conduit souvent à un épuisement
physique et psychique. La garde d'un malade atteint de ces affections est un
expérience très douloureuse qui nécessite à
l'évidence un accompagnement psychologique.
Ces familles doivent être soutenues et aidées. Si l'association
France Alzheimer joue à cet égard un rôle tout à
fait exemplaire
23(
*
)
, il convient cependant
d'aller plus loin.
Votre commission juge par conséquent indispensable le
développement de programmes d'aide aux aidants, au premier rang desquels
figurent naturellement les familles
24(
*
)
.
5. Favoriser le maintien à domicile des personnes malades par le développement des centres d'accueil de jour ou temporaire
Le
maintien à domicile des malades doit être recherché tant
qu'il ne représente pas une charge intolérable pour la famille et
les proches. Un changement d'univers de la personne malade entraîne en
effet inévitablement une perte des repères et un repli sur soi.
Il est important de proposer à la famille et à l'entourage de la
personne malade une gamme diversifiée de services permettant
d'alléger la charge qui est la leur et favorisant, en fin de compte, le
maintien à domicile : gardes à domicile, centres de jour,
possibilités d'hébergement temporaire...
Le développement des centres d'accueil de jour et d'accueil temporaire
apparaît à cet égard un moyen efficace de prolonger le
maintien à domicile.
Les centres d'accueil de jour assurent la garde d'une personne malade pendant
la journée : ils constituent une formule intermédiaire entre
l'établissement et le domicile. Les centres d'accueil temporaire
permettent aux familles de faire une pause bienvenue pendant un week-end ou de
courtes vacances.
Ces centres, qui participent de manière évidente au maintien
à domicile, sont encore insuffisamment
développés.
6. Adapter les structures d'hébergement aux spécificités de la maladie d'Alzheimer et des troubles apparentés
Lorsque
le maintien à domicile devient impossible, le patient doit trouver en
institution une prise en charge adéquate.
Ceci nécessite
la création de structures
spécialisées
dans la prise en charge des personnes atteintes
de ces maladies.
Compte tenu du caractère souvent très perturbateur des personnes
atteintes de la maladie d'Alzheimer et de troubles apparentés, il
apparaît en effet difficile de faire cohabiter ces malades avec d'autres
personnes âgées au sein d'une même structure.
Une maison de retraite ou un foyer-logement peut héberger un malade
d'Alzheimer, rarement plusieurs. L'expérience montre que la cohabitation
entre malades et autres résidents au sein d'un même
établissement d'hébergement de personnes âgées
engendre des perturbations importantes pour l'ensemble des personnes
concernées et présente des risques évidents pour les
autres personnes âgées.
La spécialisation de la structure d'accueil est donc indispensable.
L'hébergement en institution de ces personnes peut être
effectué dans des établissements spécialisés qui
n'accueillent que des malades d'Alzheimer ou dans des sections
spécialisées d'établissements généralistes.
Les spécificités du comportement des personnes malades, notamment
leur tendance à déambuler, imposent une
adaptation
architecturale
des établissements les accueillant.
Cette adaptation passe soit par l'aménagement des établissements
existants, soit par la création de lieux de prise en charge
spécifique.
Le ministère de l'emploi et de la solidarité recommande ainsi aux
maîtres d'ouvrage de faire en sorte que tout nouveau projet de
construction d'établissement pour personnes âgées soit
adapté, dès sa conception, à l'accueil de personnes
présentant une détérioration intellectuelle. Il a
élaboré en ce sens un document intitulé
"
Détérioration intellectuelle et établissements
pour personnes âgées : quelques éléments de
réflexion "
, regroupant un ensemble de recommandations
destinées aux responsables locaux et aux promoteurs, qui a
été envoyé à l'ensemble des directions
départementales des affaires sanitaires et sociales.
Des recommandations ont été diffusées afin de promouvoir
prioritairement l'adaptation des établissements d'hébergement
existants à la prise en charge des personnes présentant une
détérioration intellectuelle.
Ces efforts doivent être amplifiés afin de permettre aux personnes
malades de trouver plus facilement un établissement leur proposant,
ainsi qu'à leur famille, des services adaptés et de
qualité.
Votre rapporteur n'entend naturellement pas définir quelle forme doit
revêtir la structure d'accueil idéale de ces personnes.
Les témoignages recueillis par votre rapporteur semblent indiquer que
les petites structures adaptées, de proximité, du type
" cantous "
25(
*
)
semblent cependant
constituer la formule d'établissement la plus adaptée à la
prise en charge des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et de
troubles apparentés. Ces structures permettent que la personne malade
continue à vivre dans un environnement proche du domicile. Elle sont
à l'évidence plus adaptées que les unités de long
séjour ou les hôpitaux psychiatriques. Pour votre rapporteur, le
développement de ces petites structures doit être
encouragé.
7. Améliorer la prise en charge financière
La prise
en charge des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et de troubles
apparentés se traduit par un coût financier très important,
qui repose bien souvent sur les seules familles.
La prestation spécifique dépendance (PSD), instituée par
la loi du 24 janvier 1997, a naturellement vocation à
bénéficier aux personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et
de troubles apparentés. Il arrive cependant que certains malades
atteints de ces pathologies mais physiquement en forme soient classés en
GIR 4 et se voient par conséquent refuser le bénéfice de
la PSD.
Il apparaît donc nécessaire, d'une part, de déterminer si
la grille AGGIR est effectivement adaptée à l'évaluation
de ces situations, d'autre part, de mieux sensibiliser les équipes
médico-sociales aux particularités de la maladie d'Alzheimer et
des troubles apparentés.
Si le besoin s'en fait sentir, il conviendra de modifier la grille AGGIR pour
mieux intégrer les malades atteints de la maladie d'Alzheimer et de
troubles apparentés.
On peut également envisager que les équipes
médico-sociales chargées de l'évaluation de l'état
de dépendance de la personne âgée se rapprochent des
centres experts des hôpitaux dans les cas où elles suspectent une
pathologie de ce type.
Votre commission considère qu'il est indispensable de surcroît
d'améliorer la prise en charge financière des malades atteints de
ces pathologies. Elle proposera par conséquent un certain nombre de
mesures financières qui font l'objet des articles 4, 5 et 6 de la
proposition de loi résultant des conclusions de la commission.
B. UN DISPOSITIF LÉGISLATIF ADAPTÉ
Parmi
les nombreuses analyses et propositions formulées par la commission des
Affaires sociales, seules certaines dispositions sont susceptibles de
revêtir un caractère législatif et figurent par
conséquent dans ses conclusions sur la proposition de loi.
Ces propositions s'articulent autour de trois axes qui constituent les trois
titres du texte adopté par la commission le 19 janvier 1999 :
• évaluer l'enjeu de santé publique et de politique
sociale que représentent la maladie d'Alzheimer et les troubles
apparentés (titre premier) ;
• améliorer la formation des personnes intervenant
auprès des malades (titre II) ;
• adapter certaines dispositions financières et fiscales
à la situation particulière des personnes atteintes de la maladie
d'Alzheimer (titre III).
1. Evaluer l'enjeu de santé publique et de politique sociale que représentent la maladie d'Alzheimer et les troubles apparentés (titre premier)
L'évaluation de l'enjeu épidémiologique et
social que représentent la maladie d'Alzheimer et les troubles
apparentés est, pour votre commission, un préalable indispensable
à toute action efficace en ce domaine. Il est en effet impératif
de connaître le nombre des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer
et de troubles apparentés, les modalités de prise en charge et
les besoins de ces personnes. Ces éléments font aujourd'hui
cruellement défaut.
De même, des données prospectives quant à
l'évolution de ce que certains qualifient
" d'épidémie silencieuse " dans la prochaine
décennie apparaissent nécessaires pour prendre la mesure de ce
fléau afin de mettre en oeuvre des dispositifs de prise en charge
adaptés et d'offrir à la recherche les moyens de progresser.
L'article premier
de la proposition de loi résultant des
conclusions de la commission prévoit que le Gouvernement
présentera au Parlement, dans un délai de deux ans à
compter de la promulgation de la loi, un rapport relatif aux modalités
de prise en charge des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et de
troubles apparentés.
Ce rapport formule également des propositions en vue d'améliorer
la prise en charge de ces personnes.
2. Améliorer la formation des personnes intervenant auprès des malades (titre II) ;
Votre
commission a considéré que l'amélioration de la formation
des médecins était un élément essentiel pour
favoriser une détection précoce de ces affections. Elle a
insisté à cette occasion sur le rôle du médecin de
famille, ou du médecin du travail pour les malades les plus jeunes, qui,
dès la moindre suspicion, doit orienter son patient vers des
consultations spécialisées.
L'article 2
de la proposition de loi résultant des
conclusions de la commission prévoit par conséquent que la
maladie d'Alzheimer et les troubles apparentés constitueront un des
thèmes nationaux prioritaires de la formation médicale continue.
Votre commission a considéré qu'il convenait également
d'assurer une formation adaptée des intervenants à domicile
(aides à domicile et auxiliaires de vie) qui permettent à
l'entourage, et, principalement, au conjoint, de
" récupérer " un peu de cette tension permanente qu'est
la prise en charge de personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer ou de
troubles apparentés. Ces intervenants jouent un rôle essentiel
dans le maintien à domicile des personnes malades.
L'article 3
de la proposition de loi complète l'article 16
de la loi n° 97-60 du 24 janvier 1997 afin de préciser que la
formation des salariés rémunérés pour assurer un
service d'aide à domicile auprès d'une personne allocataire de la
prestation spécifique dépendance comprend, si la nature des
tâches effectuées par le salarié le requiert, une partie
consacrée à la prise en charge des personnes atteintes de la
maladie d'Alzheimer et de troubles apparentés.
3. Adapter certaines dispositions financières et fiscales à la situation particulière des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer (titre III).
Lorsqu'elle reste à domicile, la personne atteinte de la
maladie d'Alzheimer ou de troubles apparentés entraîne plus de
frais qu'une autre personne dépendante : nécessité
d'une adaptation du logement, suppression du gaz, incontinence...
L'article 4
de la proposition de loi résultant des
conclusions de la commission double le plafond de prise en charge des
dépenses autres que de personnel par la prestation spécifique
dépendance (PSD). Lorsque la personne bénéficiaire de la
PSD est atteinte de la maladie d'Alzheimer ou de troubles apparentés, ce
plafond s'établirait par conséquent à 20 % du montant
maximum de la PSD prévu par le règlement départemental
d'aide sociale.
Cet article permettra de mieux répondre aux besoins spécifiques
des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et de troubles
apparentés, s'agissant notamment de la nécessaire adaptation de
leur habitat.
S'agissant des personnes malades dont le maintien à domicile
s'avère impossible et qui sont en établissement, le
critère d'âge -70 ans- exigé en application de l'article
199
quindecies
du code général des impôts, pour
bénéficier d'une réduction d'impôt en raison des
dépenses nécessitées par cet hébergement, ne
s'avère pas pertinent pour les personnes atteintes de la maladie
d'Alzheimer et de troubles apparentés.
Même si leur fréquence d'apparition augmente avec l'âge, la
maladie d'Alzheimer et les troubles apparentés frappent parfois des
personnes jeunes. Beaucoup de ces personnes n'ont pas atteint l'âge de
70 ans et ne peuvent donc se prévaloir du bénéfice de
cette réduction d'impôt, alors même que leur état
impose un hébergement en établissement de long séjour ou
dans une section de cure médicale.
L'article 5
de la proposition de loi prévoit de faire
bénéficier les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et
de troubles apparentés, quel que soit leur âge, de la
réduction d'impôt égale à 25 % des
dépenses d'hébergement, limitées à 15.000 francs,
dans un établissement de long séjour ou une section de cure
médicale.
Le bénéfice de cette disposition est soumis à une double
exigence : un diagnostic de maladie d'Alzheimer ou de troubles
apparentés et une condition de degré de dépendance
identique à celle prévue pour l'octroi de la PSD, soit le
classement dans les groupes 1,2 et 3 de la grille AGGIR.
Afin de favoriser le maintien à domicile des personnes malades,
l'article 6
de la proposition de loi élève, pour
les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et de troubles
apparentés, à 90.000 francs le plafond des dépenses,
effectuées pour l'emploi d'un salarié à domicile, ouvrant
droit à une réduction d'impôt de 50 %.
La loi de finances pour 1998 a en effet diminué de moitié le
plafond de ces dépenses qui s'élève aujourd'hui à
45.000 francs. Le plafond de 90.000 francs est toutefois maintenu pour les
contribuables mentionnés au 3° de l'article L. 341-4 du code de la
sécurité sociale - c'est-à-dire les invalides - ainsi que
pour les contribuables ayant à leur charge une personne
mentionnée au 3° dudit article, ou un enfant donnant droit au
complément d'allocation d'éducation spéciale prévu
par le deuxième alinéa de l'article L. 541-1 du code de la
sécurité sociale.
L'article 6 de la proposition de loi étend par conséquent ce
plafond de 90.000 francs aux personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et
de troubles apparentés.
La condition d'octroi de cet avantage fiscal est identique à celle
prévue à l'article 5 : un diagnostic de maladie d'Alzheimer
ou de troubles apparentés et un classement dans les groupes 1,2 et 3 de
la grille AGGIR.
L'article 7
de la proposition de loi constitue le gage fiscal
permettant de compenser les pertes de recettes résultant de
l'application de la présente proposition de loi. Il prévoit que
les pertes de recettes résultant de la proposition de loi seront
compensées par une majoration des droits sur les tabacs.
*
* *
Votre commission vous propose d'adopter la proposition de loi dans le texte résultant de ses conclusions, tel qu'il est inclus dans le présent rapport.
EXAMEN DES ARTICLES
TITRE PREMIER
-
DE L'AMÉLIORATION DE LA
CONNAISSANCE
DU NOMBRE, DES BESOINS ET DES MODALITÉS DE PRISE EN
CHARGE DES PERSONNES ATTEINTES DE LA MALADIE D'ALZHEIMER ET DE TROUBLES
APPARENTÉS
Intitulé du Titre premier
Votre commission a modifié l'intitulé du Titre premier par coordination avec les modifications qu'elle a apportées à l'article premier.
Article premier
Présentation d'un rapport au
Parlement
relatif aux modalités de prise en charge des personnes
atteintes
de la maladie d'Alzheimer et de troubles
apparentés
I
- Le texte de la proposition de loi
L'article premier de la proposition de loi prévoit que le Gouvernement
présentera au Parlement, avant le 31 décembre 2001, un rapport
relatif aux modalités de prise en charge des personnes atteintes de
démence sénile et, en particulier, de la maladie d'Alzheimer.
Il comportera notamment une évaluation du nombre de personnes atteintes
par ces affections, de la capacité des unités de consultation et
d'accueil en secteur hospitalier pour celles-ci, ainsi que des besoins
prévisibles en structures adaptées et personnels qualifiés
pour les dix années suivantes.
II - Le texte adopté par la commission des Affaires
sociales
L'évaluation de l'enjeu épidémiologique et social que
représentent la maladie d'Alzheimer et les troubles apparentés
est, pour votre commission, un préalable indispensable à toute
action efficace en ce domaine. Il est en effet impératif de
connaître le nombre des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et
de troubles apparentés, les modalités de prise en charge et les
besoins de ces personnes. Ces éléments font aujourd'hui
cruellement défaut.
Lors des nombreuses auditions auxquelles il s'est livré dans le cadre de
la préparation de ce rapport, votre rapporteur a pu constater, par
exemple, que personne n'était véritablement en mesure
d'évaluer précisément le nombre de personnes malades. Les
chiffres résultent d'évaluations grossières et varient
fortement selon les sources.
De même, des données prospectives quant à
l'évolution de ce que certains qualifient
" d'épidémie silencieuse " dans la prochaine
décennie apparaissent nécessaires pour prendre la mesure de ce
fléau afin de mettre en oeuvre des dispositifs de prise en charge
adaptés et d'offrir à la recherche les moyens de progresser.
Le rapport prévu au présent article devrait permettre de mieux
appréhender l'enjeu de santé publique que constituent ces
affections et favoriser l'émergence d'une prise de conscience des
défis qu'elles représentent pour l'avenir.
Convaincue de l'intérêt et du caractère indispensable que
présentait un rapport sur ce sujet, votre commission a souhaité
que ce rapport soit présenté au Parlement dans les deux ans
à compter de la promulgation de la présente loi.
Elle a souhaité apporter une modification terminologique quant à
l'appellation des pathologies visées par la proposition de loi.
La maladie d'Alzheimer a été désignée
jusqu'à des années récentes sous différentes
appellations : démence sénile, présénile ou
précoce, maladie d'Alzheimer ou démence de type Alzheimer. Cette
profusion terminologique découlait d'une conception erronée du
vieillissement cérébral. Les cliniciens considéraient que
la dégradation progressive des fonctions cognitives et la
sénilité étaient un mode de vieillissement
" naturel " lié à l'âge. Les recherches
entreprises ont montré que cette approche était
erronée : la maladie d'Alzheimer n'est pas le résultat du
vieillissement, elle constitue une véritable maladie dont la
fréquence d'apparition augmente avec l'âge.
Plusieurs conférences internationales de consensus ont aujourd'hui
entériné le terme unique de maladie d'Alzheimer.
Désormais, le terme de maladie d'Alzheimer réunifie les
différentes appellations et celui de démence sénile est
progressivement abandonné
26(
*
)
.
Si le terme de " maladie d'Alzheimer " est aujourd'hui largement
utilisé par l'opinion publique et les médias, il existe cependant
d'autres maladies dégénératives moins connues, telles que
les dégénérescences frontotemporales (DFT) et la
démence à corps de Lewy, qui ont été longtemps
confondues avec la maladie d'Alzheimer et dont les manifestations sont aussi
dramatiques.
Soucieuse de couvrir l'ensemble de ces affections, votre commission a
souhaité inclure ces troubles apparentés dans le champ
d'application de la proposition de loi, laquelle porte par conséquent
sur la prise en charge des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et de
troubles apparentés.
Par coordination, votre commission a adopté l'utilisation de cette
terminologie dans l'ensemble des articles et dans le titre de la
présente proposition de loi.
Elle a en outre apporté une modification rédactionnelle au
deuxième alinéa de cet article.
Votre commission a enfin estimé qu'il était nécessaire que
le Gouvernement aille, dans le rapport prévu au présent article,
au-delà d'un simple état des lieux et s'engage sur des actions
permettant d'assurer une meilleure prise en charge des personnes atteintes de
ces pathologies. Elle a par conséquent ajouté un troisième
alinéa précisant que le rapport du Gouvernement formulait
également des propositions en vue d'améliorer la prise en charge
des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et de troubles
apparentés.
Elle vous propose d'adopter cet article ainsi
rédigé.
TITRE II
DE LA FORMATION DES
INTERVENANTS
Art. 2
Inscription de la maladie d'Alzheimer et
des troubles apparentés parmi les thèmes nationaux prioritaires
arrêtés par le Conseil national de la formation médicale
continue
I
- Le texte de la proposition de loi
Cet article prévoit que les démences séniles et, en
particulier, la maladie d'Alzheimer constitueront un des thèmes
nationaux prioritaires de la formation médicale continue
arrêtés par le Conseil national de la formation médicale
continue.
II - Le texte adopté par la commission des Affaires
sociales
Votre commission a considéré que l'amélioration de la
formation des médecins était un élément essentiel
pour favoriser une détection précoce de ces affections. Elle a
souhaité insister particulièrement sur le rôle du
médecin de famille ou du médecin du travail pour les malades les
plus jeunes, qui, dès la moindre suspicion, doit orienter son patient
vers des consultations spécialisées.
Par conséquent, elle a repris cet article en apportant la rectification
terminologique précédemment évoquée.
Elle vous propose d'adopter cet article ainsi
rédigé.
Art. 3
Introduction dans la formation des
intervenants à domicile
d'une partie consacrée à la
prise en charge des personnes atteintes
de la maladie d'Alzheimer et de
troubles apparentés
I
- Le texte de la proposition de loi
Le deuxième alinéa de l'article 16 de la loi n° 97-60 du 24
janvier 1997 instituant la prestation spécifique dépendance
prévoit que
" les salariés rémunérés
pour assurer un service d'aide à domicile auprès d'une personne
allocataire de la prestation spécifique dépendance
bénéficient d'une formation selon des modalités
définies par décret ".
L'article 3 de la proposition de loi complète cette disposition en
précisant que, si l'emploi du salarié le requiert, cette
formation comporte une partie consacrée à la prise en charge des
personnes atteintes de démence sénile.
II - Le texte adopté par la commission des Affaires
sociales
A l'occasion du débat sur la loi du 24 janvier 1997 instituant la
prestation spécifique dépendance, le législateur avait
souligné la nécessité de professionnaliser les services
d'aide à domicile et avait souhaité que toutes les personnes
assurant un service d'aide à domicile puissent bénéficier
d'une véritable formation. Il avait précisé que les
modalités de cette formation seraient fixées par décret.
Or, deux ans après la publication de la loi, ce décret n'est
toujours pas paru et les différents intervenants du secteur de l'aide
à domicile ne sont pas en mesure d'assurer à leurs
salariés la formation prévue par la loi.
En outre, aucun élément ne permet de penser que ce décret
serait publié prochainement.
La commission des Affaires sociales demande par conséquent une nouvelle
fois au Gouvernement de faire paraître dans les meilleurs délais
ce décret nécessaire à la mise en place d'une
véritable formation des personnes assurant l'aide à domicile des
personnes âgées dépendantes.
S'agissant du présent article, elle a considéré qu'il
convenait en effet de mettre l'accent sur la nécessité d'une
formation adaptée des intervenants à domicile (aides à
domicile et auxiliaires de vie) qui permette à l'entourage, et,
principalement, au conjoint, de " récupérer " un peu de
cette tension permanente qu'est la prise en charge de personnes atteintes de la
maladie d'Alzheimer ou de troubles apparentés.
Elle a repris cet article en apportant la rectification terminologique
précédemment évoquée ainsi qu'une modification
rédactionnelle.
Elle vous propose d'adopter cet article ainsi
rédigé.
TITRE III
DES DISPOSITIONS
FINANCIÈRES
Art. 4
Doublement du plafond des dépenses
autres que celles de personnel pour lesquelles la prestation spécifique
dépendance peut être utilisée par les personnes atteintes
de la maladie d'Alzheimer et de troubles
apparentés
I
- Le texte de la proposition de loi
Le deuxième alinéa de l'article 16 de la loi n° 97-60 du 24
janvier 1997 instituant la prestation spécifique dépendance
précise que cette dernière peut être utilisée
à des dépenses autres que de personnel dès lors que
l'état de dépendance l'impose, conformément à ce
qui a été constaté lors de la visite d'instruction de
l'équipe médico-sociale.
Ces dépenses sont plafonnées à 10 % du montant
maximum de la PSD prévu par le règlement départemental
d'aide sociale. Le montant de la PSD pouvant être utilisé par le
bénéficiaire à des dépenses autres que de personnel
est fixé dans la décision d'attribution de la prestation.
Les dépenses autres que de personnel sont celles qui servent à
solvabiliser des besoins connus, principalement les protections à usage
unique, mais aussi, le cas échéant, des prestations d'aide
technique, petits travaux d'aménagement, télé-alarme...
Le présent article prévoit que ce plafond de dépenses
serait doublé lorsque la personne bénéficiaire de la PSD
est atteinte de démence sénile. Dans ce cas, le plafond
s'établirait par conséquent à 20 % du montant maximum
de la PSD prévu par le règlement départemental d'aide
sociale.
II - Le texte adopté par la commission des Affaires
sociales
Restant à domicile, la personne atteinte de la maladie d'Alzheimer ou de
troubles apparentés entraîne plus de frais qu'une autre personne
dépendante : nécessité d'une adaptation du logement,
suppression du gaz, incontinence...
Votre commission a considéré que le présent article
permettrait de mieux répondre aux besoins spécifiques des
personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et de troubles apparentés,
s'agissant notamment de la nécessaire adaptation de leur habitat.
Votre commission a repris cet article en apportant la rectification
terminologique précédemment évoquée.
Elle vous propose d'adopter cet article ainsi
rédigé.
Art. 5
Extension aux personnes atteintes de la
maladie d'Alzheimer
et de troubles apparentés du
bénéfice de la réduction d'impôt
au titre de
l'hébergement dans un établissement de long séjour
ou
une section de cure médicale
I
- Le texte de la proposition de loi
En application de l'article 199
quindecies
du code général
des impôts, les personnes âgées de plus de 70 ans
hébergées dans un établissement de long séjour ou
une section de cure médicale peuvent bénéficier d'une
réduction d'impôt en raison des dépenses
nécessitées par cet hébergement.
Le taux de cette réduction d'impôt est fixé à
25 % et s'applique aux dépenses d'hébergement
limitées à 13.000 francs. Ce plafond a été
porté, par l'article 90 de la loi de finances pour 1998
27(
*
)
, à 15.000 francs à compter de
l'imposition des revenus de 1998.
Le présent article prévoit de faire bénéficier de
cette réduction d'impôt les personnes atteintes de démence
sénile, quel que soit leur âge.
II - Le texte adopté par la commission des Affaires
sociales
Même si leur fréquence d'apparition augmente avec l'âge, la
maladie d'Alzheimer et les troubles apparentés frappent parfois des
personnes jeunes.
Votre commission a considéré que l'article 199
quindecies
du code général des impôts, dans sa version actuelle,
n'était pas adapté aux personnes atteintes de ces affections. En
effet, beaucoup de ces personnes n'ont pas atteint l'âge de 70 ans
et ne peuvent donc se prévaloir du bénéfice de cette
réduction d'impôt, alors même que leur état impose un
hébergement en établissement de long séjour ou dans une
section de cure médicale.
La réduction d'impôt au titre de l'article 199
quindecies
reste au demeurant modeste et son plafond mériterait sans doute
d'être sensiblement augmenté
28(
*
)
.
Votre commission estime qu'il serait en outre nécessaire de diminuer
à 60 ans -contre 70 ans aujourd'hui- l'âge d'ouverture de cette
réduction d'impôt pour l'ensemble des personnes
hébergées dans un établissement de long séjour ou
une section de cure médicale.
Votre commission a repris cet article en lui apportant toutefois une
modification importante : elle a souhaité en effet ne faire
dépendre le déclenchement de cet avantage fiscal du seul
diagnostic de la maladie d'Alzheimer.
Il est apparu gênant à votre commission d'opérer une
discrimination positive à partir d'un seul diagnostic. Elle a
jugé par exemple que le diagnostic d'une maladie d'Alzheimer au
début de son développement ne suffisait pas à justifier
l'avantage fiscal accordé.
Votre commission a donc souhaité compléter l'exigence de
diagnostic par une condition d'état de dépendance de la personne
concernée. Elle a par conséquent repris la condition de
dépendance exigée pour l'obtention de la prestation
spécifique dépendance (PSD), figurant à l'article 2 de la
loi n° 97-60 du 24 janvier 1997, soit le classement dans les groupes
1, 2 et 3 de la grille AGGIR. Cette condition devrait pouvoir être
remplie par la très grande majorité des personnes atteintes de la
maladie d'Alzheimer et de troubles apparentés.
Votre commission a enfin apporté à cet article la rectification
terminologique précédemment évoquée.
Elle vous propose d'adopter cet article ainsi
rédigé.
Art. 6
Maintien, pour les personnes atteintes de
la maladie d'Alzheimer
et de troubles apparentés, du plafond de
90.000 francs
pour les dépenses ouvrant droit à une
réduction d'impôt
effectuées pour l'emploi d'un
salarié à domicile
I
- Le texte de la proposition de loi
En application de l'article 199
sexdecies
du code général
des impôts, les dépenses effectuées pour l'emploi d'un
salarié à domicile ouvrent droit à une réduction
d'impôt.
Cette réduction d'impôt est égale à 50 % du
montant des dépenses effectivement supportées par le contribuable
après déduction, le cas échéant, des diverses aides
versées par les organismes publics ou privés, retenues, à
compter de l'imposition des revenus de 1997, dans la limite de 45.000 francs.
La loi de finances pour 1998 a diminué de moitié le plafond de
ces dépenses qui s'élevait auparavant à 90.000 francs.
Le plafond de 90.000 francs est toutefois maintenu pour les contribuables
mentionnés au 3° de l'article L. 341-4 du code de la
sécurité sociale
29(
*
)
, ainsi que
pour les contribuables ayant à leur charge une personne, vivant sous
leur toit, mentionnée au 3° dudit article, ou un enfant donnant
droit au complément d'allocation d'éducation spéciale
prévu par le deuxième alinéa de l'article L. 541-1 du
code de la sécurité sociale.
Le présent article prévoit que les personnes atteintes de
démence sénile telle que la maladie d'Alzheimer, ou les personnes
qui les hébergent, pourront bénéficier du maintien
à 90.000 francs du plafond des dépenses ouvrant droit à la
réduction d'impôt.
II - Le texte adopté par la commission des Affaires
sociales
Votre commission a estimé que cet article permettrait de favoriser la
maintien à domicile des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et
de troubles apparentés.
Elle a repris cet article en apportant la rectification terminologique
précédemment évoquée et en ajoutant la même
exigence de degré de dépendance qu'à l'article 5.
Elle ne peut, à cette occasion, que regretter que le Gouvernement ait
choisi en 1997 de diminuer de moitié -de 90.000 francs à 45.000
francs- le plafond de la déduction fiscale pour l'emploi à
domicile. Cette décision aura des conséquences très
dommageables sur l'emploi.
Elle vous propose d'adopter cet article ainsi
rédigé.
Art. 7
Financement des dispositions fiscales de
la proposition de loi
I
- Le texte de la proposition de loi
Cet article constitue le gage fiscal permettant de compenser les pertes de
recettes résultant de l'application de la présente proposition de
loi.
Il prévoit que les majorations de charges résultant de la
présente proposition de loi seront compensées par une taxe
additionnelle aux droits sur les tabacs.
II - Le texte adopté par la commission des Affaires
sociales
Votre commission a estimé que la présente proposition de loi ne
générerait pas d'augmentation des charges publiques mais
entraînerait plutôt des pertes de recettes fiscales.
Elle a donc préféré compenser cette perte de recettes par
une majoration des recettes.
Elle a par conséquent choisi de faire référence aux pertes
de recettes plutôt qu'aux majorations de charges et de remplacer la
création d'une taxe additionnelle aux droits sur les tabacs par une
simple majoration de ces droits.
Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi
rédigé.
Intitulé de la proposition de loi
Votre commission a modifié l'intitulé de la proposition de loi par coordination avec les modifications qu'elle a apportées au texte de celle-ci. La proposition de loi a donc désormais pour intitulé : " proposition de loi tendant à améliorer la prise en charge des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et de troubles apparentés ".
CONCLUSIONS DE LA COMMISSION
Proposition de loi tendant à améliorer la
prise en
charge des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et de troubles
apparentés
TITRE PREMIER
DE L'AMÉLIORATION DE LA CONNAISSANCE
DU NOMBRE,
DES BESOINS ET DES MODALITÉS DE PRISE EN CHARGE DES PERSONNES ATTEINTES
DE LA MALADIE D'ALZHEIMER ET DE TROUBLES APPARENTÉS
Article premier
Dans un
délai de deux ans à compter de la promulgation de la
présente loi, le Gouvernement présente au Parlement un rapport
relatif aux modalités de prise en charge des personnes atteintes de la
maladie d'Alzheimer et de troubles apparentés.
Ce rapport comporte notamment une estimation du nombre des personnes atteintes
par la maladie d'Alzheimer et les troubles apparentés, un bilan de la
capacité des unités de consultation et d'accueil en secteur
hospitalier ainsi qu'une évaluation des besoins prévisibles en
structures adaptées et personnels qualifiés pour les dix
années suivantes.
Ce rapport formule également des propositions en vue d'améliorer
la prise en charge des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et de
troubles apparentés.
TITRE
II
DE LA FORMATION DES INTERVENANTS
Art. 2
La maladie d'Alzheimer et les troubles apparentés constituent, en matière de formation médicale continue, un des thèmes nationaux prioritaires mentionnés au 1° de l'article L. 367-3 du code de la santé publique.
Art. 3
Le
deuxième alinéa de l'article 16 de la loi n° 97-60 du 24
janvier 1997 tendant, dans l'attente du vote de la loi instituant une
prestation d'autonomie pour les personnes âgées
dépendantes, à mieux répondre aux besoins des personnes
âgées par l'institution d'une prestation spécifique
dépendance est complété par une phrase ainsi
rédigée :
" Cette formation comprend, si la nature des tâches
effectuées par le salarié le requiert, une partie
consacrée à la prise en charge des personnes atteintes de la
maladie d'Alzheimer et de troubles apparentés. "
TITRE
III
DES DISPOSITIONS FINANCIÈRES
Art. 4
L'article 16 de la loi n° 97-60 du 24 janvier 1997
précitée est complété
in fine
par un
alinéa ainsi rédigé :
" Le plafond mentionné à l'alinéa
précédent est doublé lorsque la personne allocataire de la
prestation spécifique dépendance est atteinte de la maladie
d'Alzheimer ou de troubles apparentés. "
Art. 5
Dans le premier alinéa de l'article 199 quindecies du code général des impôts, après les mots : " âgé de plus de soixante-dix ans ", sont insérés les mots : " ou atteint de la maladie d'Alzheimer ou de troubles apparentés et remplissant la condition de degré de dépendance prévue à l'article 2 de la loi n° 97-60 du 24 janvier 1997 ".
Art. 6
Dans la dernière phrase du troisième alinéa du 1° de l'article 199 sexdecies du code général des impôts, après les mots : " mentionnés au 3° de l'article L. 341-4 du code de la sécurité sociale ", sont insérés les mots : " ou atteints de la maladie d'Alzheimer ou de troubles apparentés et remplissant la condition de degré de dépendance prévue à l'article 2 de la loi n° 97-60 du 24 janvier 1997 " et, après les mots : " mentionnée au 3° dudit article ", sont insérés les mots : " ou atteinte de telles affections et remplissant ladite condition de degré de dépendance ".
Art. 7
Les pertes de recettes résultant des dispositions de la présente loi sont compensées par une majoration à due concurrence des droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
1 Source : France Alzheimer, 1994
2
Réponse à une question orale de
votre
rapporteur, J.O. Débats Sénat, séance du 28 avril 1998, p.
1908.
3
" Démence sénile et maladie d'Alzheimer,
une même entité clinique "
,
dans
Panorama du
Médecin
, 5 octobre 1998, n° 4590, pp. 14-15.
4
L'Organisation mondiale de la santé (OMS) donne
la définition suivante de la démence dans sa classification
internationale des maladies (10ème édition) :
" Altération progressive de la mémoire et de
l'idéation, suffisamment marquée pour handicaper les
activités de la vie quotidienne, apparue depuis au moins six mois et
avec la présence d'au moins un trouble suivant : langage, calcul,
jugement, altération de la pensée abstraite, praxies, gnosies ou
modification de la personnalité. ".
5
K. Maurer, S.Volk et H. Gerbaldo, " Auguste D.
première patiente du Docteur Alzheimer ", dans
La Recherche
,
n° 303, novembre 1997, p. 58.
6
Mémoire épisodique : ensemble des
souvenirs correspondant à des épisodes personnellement
vécus ou à des informations apprises dans un contexte
temporo-spatial précis.
7
Mémoire de travail ou mémoire à court
terme : système à capacité limitée,
destiné au maintien temporaire et à la manipulation de
l'information pendant la réalisation de tâches diverses de
compréhension, de raisonnement ou de résolution de
problèmes.
8
B. Dubois et B. Deweer, " Les égarements
progressifs de la pensée " dans
La Recherche
,
n° 303, novembre 1997, p. 62.
9
C. Berr, " 100.000 nouveaux cas de
démence par an ", dans
La Recherche
, n° 303,
novembre 1997, p. 68.
10
Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux
(3ème édition révisée) de l'Association
américaine de psychiatrie. Traduction française Masson, Paris,
1989.
11
L'étiologie est l'étude des causes des maladies.
12 C. Berr, op. cit.
13
Elle consiste à comparer la
morbidité
(survenue d'une maladie) observée dans un ou plusieurs groupes
d'individus initialement indemnes de la maladie et définis en fonction
de leur exposition à un facteur de risque soupçonné de
cette maladie.
14
Nombre de personnes touchées par une maladie par rapport
à l'effectif de la population susceptible de présenter cette
maladie, à un instant donné.
15
Nombre de nouveaux cas de maladie observés pendant une
période donnée, par rapport à l'effectif de la population
susceptible de présenter cette maladie.
16 C. Berr, op. cit.
17
" La prise en charge des personnes
vieillissantes
handicapées mentales ou souffrant de troubles mentaux ", rapport au
Conseil économique et social, novembre 1998.
18
CREDES-INSERM, Evolution de l'état de santé des
personnes âgées en France,
juin 1998.
19 Article 5 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999.
20
Rapport au Conseil économique et social,
présenté au nom de la Section des Affaires sociales,
séances des 24 et 25 novembre 1998.
21
" Maladie d'Alzheimer : adapter la prise en
charge ", dans
Décision Santé
, n° 89,
janvier 1996, pp. 16-18.
22 J.O. Débats Sénat, séance du 28 avril 1998, p. 1907.
23
Cette association a un double objectif :
" sensibiliser l'opinion et promouvoir la recherche " et " aider
les malades et leurs familles ".
24 Voir notamment, sur ce sujet, les travaux du séminaire
européen organisé le 11 décembre 1998 par le LEGOS
(Université Paris IX Dauphine) et l'INSERM (Unité 500) :
" Situation économique et qualité de vie des aidants aux
malades atteints de démence sénile de type Alzheimer ".
25 Cantou : petites unités de vie communautaires pour les personnes âgées dépendantes.
26
" Démence sénile et
maladie
d'Alzheimer, une même entité clinique "
,
dans
Panorama du Médecin
, 5 octobre 1998, n° 4590, pp. 14-15.
27
Modifié par l'article 102 de la loi
n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre
économique et financier.
28
Le coût d'un relèvement de ce plafond
n'apparaît pas très élevé : la dépense
fiscale supplémentaire induite par l'augmentation du plafond de 13.000
francs à 15.000 francs a, par exemple, été
évaluée à 34 millions de francs par la commission des
finances du Sénat.
29
" Invalides qui, étant absolument incapables
d'exercer une profession, sont, en outre, dans l'obligation d'avoir recours
à l'assistance d'une tierce personne pour effectuer les actes ordinaires
de la vie ".