IV. UNE DÉGRADATION PARADOXALE DU DÉFICIT PRIMAIRE
Bien que la croissance et les recettes fiscales soient bien meilleures qu'escompté, l'amélioration du déficit budgétaire est décevante. Elle est en rupture avec les améliorations observées ces derniers mois, et ne capitalise pas la réduction enregistrée de la charge nette de la dette.
A. UNE ÉTONNANTE RUPTURE DE TENDANCE PAR RAPPORT AUX DERNIERS RÉSULTATS CONNUS EN EXÉCUTION
Au moment de l'établissement du présent rapport, l'exécution du budget à fin septembre 1998 est connue. Elle marque une amélioration spectaculaire des comptes de l'Etat, dont on ne peut que féliciter le gouvernement.
La situation budgétaire au 30 septembre 1998
Le solde
budgétaire
Le solde budgétaire s'établit à
- 244,8 milliards de francs à la fin septembre 1998, soit une
amélioration de 47,9 milliards de francs par rapport à celui
enregistré l'année dernière à la même date
(- 292,7 milliards de francs).
Les recettes du budget général
Sur les neuf premiers mois de l'année, les recettes nettes du budget
général s'élèvent à 1.058 milliards de
francs. Par rapport à la même période de 1997, la
croissance des recettes fiscales nettes s'établit à 3,9 %.
Les dépenses du budget général
A la fin septembre 1998, les dépenses du budget général
s'établissent à 1.193,1 milliards de francs contre
1.181,5 milliards de francs à la fin septembre 1997, soit une
augmentation de 1 %.
Situation au 30 septembre (en milliards de francs)
|
Septembre 1997 |
Septembre 1998 |
Evolution (%) |
Dépenses ordinaires |
1.063,50 |
1.090,5 |
+ 2,5 |
Dépenses en capital |
118,0 |
102,6 |
- 13,0 |
Dépenses du budget général |
1.181,5 |
1.193,1 |
+ 1,0 |
Recettes fiscales nettes |
1.051,7 |
1.092,4 |
+ 3,9 |
Prélèvements sur recettes |
- 193,5 |
- 191,4 |
- 1,1 |
Recettes non fiscales |
90,0 |
114,9 |
+ 27,7 |
Recettes du budget général (hors fonds de concours) |
948,2 |
1.015,9 |
+ 7,1 |
Solde
des CST*
|
- 106,6
|
- 109,7
|
ns
|
Solde général d'exécution |
- 292,7 |
- 244,8 |
|
* Ces
deux montants tendent à s'annuler en fin d'exercice : les fonds de
concours sont comptabilisés pour le même montant en
dépenses, le solde négatif des CSIT, essentiellement lié
au compte d'avance aux collectivités locales, rejoint l'équilibre.
Au 31 août 1998, l'amélioration du déficit
budgétaire était de 24,8 milliards de francs.
Au
30 septembre, cette amélioration atteint 47,9 milliards de
francs.
Et pourtant, aux termes du présent projet, le déficit
budgétaire ne s'améliorerait que de 3,3 milliards de francs
à la fin de 1998.
Or, le profil d'exécution du budget est à peu près le
même d'une année sur l'autre
. Le ministère de
l'économie, des finances et de l'industrie ne signale pas
d'élément exceptionnel expliquant la forte amélioration de
l'exécution à fin septembre. Il n'y a donc pas de raisons
particulières, hors mesures nouvelles, pour que cette
amélioration ne soit pas acquise jusqu'à la fin de l'exercice,
toutes choses relatives étant égales par ailleurs.
A la fin de septembre 1998, les recettes nettes (fonds de concours compris)
étaient en progression de 6,3 %, les dépenses ne
dérivaient que de 1 %. Si cette tendance s'était poursuivie
jusqu'à la fin de l'exercice, compte tenu d'une charge nette des comptes
spéciaux du Trésor maintenue à 4,6 milliards de
francs, en ligne avec la loi de finances initiale, on aurait obtenu le
résultat suivant par rapport à l'exécution 1997 :
Extrapolation des résultats du 30 septembre 1997
(En milliards de francs)
|
Exécution 1997 |
Fin 1998 selon la tendance observée en septembre |
Dépenses nettes |
1.654,4 |
1.670,95 |
Recettes nettes |
1.385,2 |
1.472,5 |
Solde du budget général |
- 269,2 |
- 198,4 |
Charge nette des CST |
+ 1,5 |
- 4,6 |
Solde général d'exécution |
- 267,7 |
- 203,0 |
Bien
entendu, cette comparaison n'a qu'une valeur indicative. Toutefois, en
l'absence d'une modification du profil d'exécution, cette extrapolation
donne une idée de l'écart entre le résultat auquel on
aurait pu s'attendre entre la loi de finances initiale et le présent
projet de collectif.
Il reste donc très probable que l'exécution définitive
de l'exercice 1998 soit meilleure que ce que prévoit le présent
projet.
L'évolution finale des dépenses sera probablement en
ligne avec l'observation réalisée à fin septembre. Pour ne
prendre qu'un seul exemple, le présent projet de loi continue de tabler
sur 73,6 milliards de francs de dépenses d'équipement
militaire (contre 81 votés), alors que le ministre de la
défense a dit lui-même devant la commission de la défense
de l'Assemblée nationale que les 70 milliards de francs de
dépenses seraient à peine atteints...
Certes, il convient de corriger l'exécution probable de l'effet de la
loi portant mesures urgentes à caractère économique et
financier
, évalué par la Cour des Comptes à un
surcroît de recettes de 23,1 milliards de francs. Mais, même
dans cette hypothèse, le déficit proposé par le projet de
loi de finances rectificative reste supérieur au niveau qu'on aurait pu
attendre.
Evolution du déficit entre septembre et décembre
|
1997 |
1998 |
Solde septembre |
292,7 |
244,8 |
Solde décembre |
267,7 |
254,6 |
Effet MUFF |
- 23,1 |
- |
Amélioration -/détérioration + |
- 1,9 |
+ 9,8 |
Selon cette observation, le déficit aurait pu s'améliorer non de 3,3 milliards de francs, mais d'une quinzaine de milliards de francs pour s'établir aux environs de 242/243 milliards de francs.