Projet de loi de finances pour 1999
MARINI (Philippe), Rapporteur général ; BRAUN (Gérard), Rapporteur spécial
RAPPORT GENERAL 66 (98-99), Tome III, Annexe 29 - COMMISSION DES FINANCES
Table des matières
- INTRODUCTION
-
CHAPITRE PREMIER
LES CRÉDITS DU MINISTÈRE CHARGÉ
DE LA FONCTION PUBLIQUE -
CHAPITRE II
LES CHARGES DE PERSONNEL DE L'ETAT- I. LES DÉPENSES DE FONCTION PUBLIQUE " STRICTO SENSU "
- II. LA DÉPENSE " INDUITE " DE FONCTION PUBLIQUE
-
III. L'AUGMENTATION DES DÉPENSES DE FONCTION PUBLIQUE
- A. LA PROGRESSION SIGNIFICATIVE DES EMPLOIS BUDGÉTAIRES CIVILS DEPUIS 1990
- B. LES INSTRUMENTS DE MESURE DE LA PROGRESSION DES RÉMUNÉRATIONS PUBLIQUES
-
C. L'ABSENCE DE MAÎTRISE DE LA NÉGOCIATION SALARIALE
- 1. Un gain de pouvoir d'achat de 3,2 % par an depuis 1990
- 2. Un écart qui s'accroît avec le secteur privé
- 3. L'accord salarial du 10 février 1998 : 14,8 milliards de francs en 1999
- 4. Une rigidité croissante des dépenses publiques
- 5. La nécessaire clarification budgétaire
- 6. Un exemple étranger : la réduction des effectifs sous l'administration Clinton
- IV. LES CONTOURS DE L'EMPLOI PUBLIC DEVIENNENT PLUS FLOUS
-
V. LE FINANCEMENT DES RETRAITES PUBLIQUES : " UNE EXPLOSION
PROGRAMMÉE "
- A. LE RÉGIME PARTICULIER DES PENSIONS DE RETRAITE DE LA FONCTION PUBLIQUE
-
B. UNE DÉRIVE FORTE ET RAPIDE DU COÛT BUDGÉTAIRE
- 1. La situation démographique
-
2. Les perspectives d'évolution financière
- a) D'après les chiffres du Commissariat général au Plan (rapport Briet de 1995), la croissance serait " rapide et cumulative ".
- b) Pour la Direction du Budget (chiffrage de 1997) :
- c) Pour la Cour des Comptes qui le souligne régulièrement dans ses rapports notamment sur l'exécution des budgets, " l'évolution des charges de pension constitue une hypothèque sérieuse pour les budgets futurs .
- C. QUELQUES PISTES DE RÉFLEXION
-
CHAPITRE III
QUELLE RÉFORME DE L'ÉTAT ?- I. DEUX EXEMPLES EUROPÉENS
- II. IL FAUT POURSUIVRE LES RÉFORMES DÉJÀ MISES EN OEUVRE
-
III. LE GOUVERNEMENT TARDE À AFFICHER SES PRIORITÉS
- A. L'AMÉNAGEMENT DU TEMPS DE TRAVAIL
- B. LA SITUATION DES HAUTS FONCTIONNAIRES
- C. LA CIRCULAIRE DU 3 JUIN 1998
- D. QUELLES PRIORITÉS LÉGISLATIVES ?
- E. QUEL RÔLE POUR LA DÉLÉGATION INTERMINISTÉRIELLE À LA RÉFORME DE L'ETAT ?
- F. LES TRAVAUX DU COMITÉ CENTRAL D'ENQUÊTE SUR LE COÛT ET LE RENDEMENT DES SERVICES PUBLICS
- EXAMEN EN COMMISSION
- ANNEXES
N° 66
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Annexe au procès verbal de la séance du 19 novembre 1998.
RAPPORT GÉNÉRAL
FAIT
au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi de finances pour 1999 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,
Par M.
Philippe MARINI,
Sénateur,
Rapporteur général.
TOME III
LES MOYENS DES SERVICES ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES
(Deuxième partie de la loi de finances)
ANNEXE N° 29
FONCTION PUBLIQUE ET RÉFORME DE L' ÉTAT
Rapporteur spécial
: M. Gérard BRAUN
(1)
Cette commission est composée de :
MM. Alain Lambert,
président
; Jacques Oudin, Claude Belot, Mme Marie-Claude
Beaudeau, MM. Roland du Luart, Bernard Angels, André Vallet,
vice-présidents
; Jacques-Richard Delong, Marc Massion,
Michel Sergent, François Trucy,
secrétaires
; Philippe
Marini,
rapporteur général
; Philippe Adnot, Denis
Badré, René Ballayer, Jacques Baudot, Mme Maryse
Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin,
Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean
Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Thierry Foucaud, Yann Gaillard,
Hubert Haenel, Claude Haut, Alain Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Claude
Lise, Paul Loridant, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne,
Joseph Ostermann, Jacques Pelletier,
Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Henri
Torre, René Trégouët.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
1078
,
1111
à
1116
et T.A.
193
.
Sénat
:
65
(1998-1999).
Lois de finances. |
INTRODUCTION
L'examen
des crédits de la fonction publique appelle deux analyses
distinctes :
-
la première est juridique
: il s'agit de la
présentation des crédits du ministère chargé de la
gestion de la fonction publique qui sont individualisés dans le budget
des services généraux du Premier ministre au sein d'un
agrégat: " Fonction publique ". Les crédits
s'élèvent à 1,4 milliard de francs en 1999 en
diminution de 0,18% par rapport à 1998 ;
- la seconde est économique
: il convient d'analyser
les charges de personnel de l'Etat, qu'il s'agisse des crédits de
rémunération, des charges sociales ou des pensions. Ce sont des
dépenses transversales qui apparaissent au sein de l'ensemble des
départements ministériels et sur lesquelles il est
indispensable d'avoir une vision globale. Elles représentent en effet
plus de 650 milliards de francs en 1999 soit prés de 39% des
dépenses du budget général nettes de remboursements et
dégrèvements.
L'examen de ces crédits conduit à se poser deux
questions :
- Comment l'Etat gère-t-il ses charges de personnel ? :
celles-ci sont-elles maîtrisées ?
- Comment l'Etat fait-il évoluer ses structures,
conformément
au principe de mutabilité du service public
, et cela afin de fournir
aux usagers des services publics les meilleures prestations ?
En effet, la notion de service public doit retrouver toute sa signification,
qui est d'être au service du public, et pour cela de s'adapter aux
nouveaux enjeux et aux nouvelles contraintes de la
société.
CHAPITRE PREMIER
LES CRÉDITS DU
MINISTÈRE CHARGÉ
DE LA FONCTION PUBLIQUE
Ces
crédits correspondent à l'agrégat n°2 " Fonction
publique " au sein des services généraux du Premier
ministre. Ils sont consacrés à :
- la mise en oeuvre d'une politique d'ensemble de la fonction publique ;
- la modernisation de l'administration et la réforme de l'Etat ;
- la tutelle des écoles d'administration.
De 1998 à 1999 les crédits évoluent de la façon
suivante :
(En millions de francs)
Dépenses ordinaires |
1998 |
1999 |
1999/1998 (en %) |
Titre III
|
1.386,9
|
1.150,1
|
- 17,07
|
Titre IV |
1,8 |
2 |
+11,11 |
Total dépenses ordinaires |
1.388,7 |
1.152,1 |
- 17,04 |
Dépenses en capital |
|
|
|
Titre V |
26 |
260 |
n.s. |
Total général |
1.414,7 |
1.412,1 |
-0,18 |
I. LES DÉPENSES DE PERSONNEL
Elles
sont exclusivement constituées de prestations d'action sociale
interministérielle (aides au logement, aide ménagère
à domicile pour les retraités, chèques-vacances,
prestations " crèche ") ou d'opérations d'action
sociale telles que la rénovation de restaurants inter-administratifs.
La diminution de 250 millions de francs de ces crédits en 1999 est
due principalement - à hauteur de 230 millions de francs - à
la suppression de la provision qui était destinée dans le projet
de loi de finances pour 1998 à accompagner la négociation
salariale dans la fonction publique.
Elle a été transférée au titre V pour un montant
fixé dans le projet de loi de finances pour 1999 à 255 millions
de francs.
L'évolution du solde est liée à la diminution des
opérations d'action sociale à hauteur de 34,6 millions de
francs qui ont été transférées au sein du titre V,
à 8 millions de francs d'économies, et à
l'accroissement de 21,5 millions de francs des
" chèques-vacances ".
Lors de l'examen à l'Assemblée nationale, ce montant a
été réduit de 50 millions de francs :
35 millions de francs ont été affectés à
l'action sociale interministérielle (titre III) et 15 millions
de francs au profit des investissements destinés à l'accueil des
handicapés au sein des administrations publiques.
II. LES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT
A. LES SUBVENTIONS AUX ÉCOLES
Elles
sont destinées à l'ENA, à l'IIAP
1(
*
)
, aux IRA
2(
*
)
, et au
Centre d'études européennes de Strasbourg.
Elles représentent 343,95 millions de francs en progression de
4,46 %.
Cette progression est principalement imputable à
l'augmentation de 8,42 % de la subvention allouée aux cinq IRA
résultant de l'accroissement du nombre des élèves en
scolarité. La subvention versée à l'ENA augmente de
1,19 % et s'établit à 163,1 millions de francs.
A ce titre, votre rapporteur tient à souligner que
les surcoûts
résultant de la double localisation de l'ENA
, à Paris et
à Strasbourg que le rapporteur pour avis de la commission des lois de
l'assemblée nationale a chiffré à 16 millions de
francs, pour les regretter, avaient été relevés dès
1994 par M. Maurice Couve de Murville alors rapporteur spécial.
Il s'interroge également sur la cohérence d'une politique de
délocalisation mise en place à partir de 1991 telle que
conçue actuellement par le gouvernement qui le conduit à ne
prévoir aucun crédit en 1999 au titre de ces
opérations
3(
*
)
.
L'activité du
fonds de délocalisation pour le prochain exercice budgétaire est
donc totalement dépendante d'un éventuel abondement en loi de
finances rectificative.
La politique de délocalisation
En 1991
ont été décidées les premières mesures de
transfert de services publics, dans le cadre des Comités
interministériels de l'aménagement du territoire (CIAT).
Au 1er juillet 1998, 26.650 emplois étaient concernés
et 49 % ont été effectivement transférés, soit
13.050 emplois. Par ailleurs, 4.500 emplois sont concernés par des
opérations en cours. Si le transfert de l'ENA à Strasbourg a
été emblématique, à bien des titres, de ce
mouvement de délocalisation, d'autres ministères et institutions
ont été délocalisés, tels que le Centre national
d'enseignement à distance à Poitiers (200 emplois), la
Direction générale de l'aviation civile dans la région de
Toulouse (320 emplois) ou l'Ecole nationale des techniciens de
l'équipement à Valenciennes (300 fonctionnaires stagiaires).
Le coût de revient brut moyen est estimé à
440.000 francs par emploi, avec une forte dispersion : les écarts
vont de 23.000 francs à 1 million de francs (pour les emplois
de recherche).
B. LES CRÉDITS DU FONDS POUR LA RÉFORME DE L'ETAT
Que ce
soit pour les actions à caractère local ou national, ils
s'élèvent en 1999 à 110,3 millions de francs, en
baisse de 2,2 millions de francs. Par ailleurs 5 millions de francs
de crédits d'investissement figurent au titre V.
S'agissant du fonctionnement de ce fonds, votre rapporteur spécial
s'était interrogé l'an dernier sur les critères de
répartition des crédits entre les départements, et sur le
risque de " saupoudrage " que cela risquait d'entraîner. Mais
plus généralement, on peut estimer que les améliorations
financées par ce fonds sont en réalité inhérentes
au fonctionnement normal de toute administration soucieuse de s'adapter au
développement des techniques et aux besoins du public.
Il convient par ailleurs de relever que la tendance est au renforcement des
actions locales qui font l'objet d'une délégation globale au
profit des préfets de département.
C. LA FORMATION ET LA COMMUNICATION
Les crédits de formation interministérielle sont destinés principalement à financer les actions de formation des membres des syndicats représentés au CSFPE 4( * ) , ou le programme de formation continue des agents de la DGAFP 5( * ) . Ils progressent de 32 à 34 millions de francs. Les crédits d'études et de communication sur la gestion publique passent de 14,8 à 13,8 millions de francs en raison de redéploiements vers d'autres chapitres.
III. LES DÉPENSES EN CAPITAL
Outre
les dépenses d'investissement du Fonds pour la réforme de l'Etat
(5 millions de francs), ces crédits correspondent à
255 millions de francs de crédits destinés à des
" équipements en faveur de l'action sociale
interministérielle ".
Il s'agit en réalité des crédits qui figuraient dans le
projet de loi de finances pour 1998 au sein du titre III (chapitre 33-94) et
étaient destinés en tant que " provision exceptionnelle non
reconductible " à accompagner les négociations salariales
dans la fonction publique (accord du 10 février 1998).
A l'issue de l'examen par l'Assemblée nationale, 35 millions de
francs de crédits du titre V ont été
transférés au titre III pour les prestations sociales
interministérielles.
CHAPITRE II
LES CHARGES DE PERSONNEL DE
L'ETAT
I. LES DÉPENSES DE FONCTION PUBLIQUE " STRICTO SENSU "
A. L'ÉVOLUTION GÉNÉRALE EN 1999
En 1999, les dépenses de fonction publique progressent de 6,8 % -soit trois fois plus vite que l'ensemble des dépenses de l'Etat : 2,3%. Elles dépassent le seuil de 650 milliards de francs, atteignant 652,1 milliards soit 38,7 % du budget général 6( * ) , contre 38,1% en 1998.
Evolution des charges de personnel du budget général
(En milliards de francs)
|
LFI 1998 |
PLF 1999 |
Variation en % |
Rémunérations
d'activité
|
303,1
|
316,3
|
4,35
|
Pensions
|
103,9
|
126,3
7(
*
)
|
21,54
|
Cotisations et prestations
sociales
|
69,6
|
73,1
|
4,93
|
Total
des charges de personnel
|
476,7
|
515,7
|
8,18
|
Total général |
610,7 |
652,1 |
6,78 |
Cette progression intègre la rebudgétisation de 22,1 milliards de francs de crédits correspondant, pour 14,8 milliards de francs aux pensions de la fonction publique civile, 7,1 milliards de francs à l'inscription en loi de finances initiale des " crédits d'article " et à la budgétisation des fonds extrabudgétaires du cadastre pour 137 millions de francs.
Récapitulation des crédits
budgétisés
|
Montant (en mil-lions de francs) |
En % des crédits de la partie |
Titre III - Dépenses civiles |
|
|
1ère partie - Rémunérations d'activité |
7.077 |
2,24 |
2ème partie - Pensions de retraite |
14.822 |
11,7 |
3ème partie - Cotisations sociales |
169 |
0,23 |
TOTAL |
22.068 |
4,28 |
Hors prise en compte des effets de la budgétisation, ces dépenses progressent encore de 3,19 % soit un montant supérieur à la progression moyenne de dépenses de l'Etat pour 1999: 2,3 %.
B. LES FACTEURS D'ÉVOLUTION
Cette
progression des dépenses de la fonction publique est principalement due,
outre les effets des budgétisations décrites ci-dessus et les
conséquences de la professionnalisation des armées :
aux effets de l'accord salarial du 10 février 1998 dont le
coût en 1999 pour le budget de l'Etat a été chiffré
à 14,8 milliards de francs. A titre de comparaison les crédits
consacrés par le budget de l'emploi au financement en 1999 des
emplois-jeunes s'élèvent à 14,3 milliards de francs ;
aux mesures catégorielles et aux transformations
d'emplois : 1,9 milliard de francs ;
à l'impact du GVT-solde : 3,7 milliards de
francs ;
à la dérive spontanée des dépenses de
pensions : 5,85 milliards de francs.
Le glissement vieillissement technicité : " GVT "
Le
" GVT " est issu de deux effets :
- un effet de carrière ou " GVT positif " qui retrace
l'incidence positive sur la masse salariale des avancements à
l'ancienneté, ou au choix, et de l'acquisition d'une
technicité ; il est estimé à + 2,2 % en
1998 soit un montant identique à celui de 1997 ; il est en
progression constante depuis 1988 (1,7 %) ;
- un effet de " noria " ou " GVT négatif " qui
traduit l'incidence généralement négative sur la masse
salariale des entrées (moins " chères ") et sorties
(plus coûteuses) des effectifs ; il est estimé en 1998
à -1,3 % contre - 1,2 % en 1997.
La somme algébrique des deux effets constitue l'effet de structure ou
" GVT solde ", qui permet de mesurer l'évolution de la masse
salariale due aux variations de structure de la population des fonctionnaires.
Il est estimé en 1998 à 0,9 % contre 1 % en 1997. Il
progresse régulièrement depuis 1991.
Le " GVTpositif " est très largement automatique, car il
n'est pas lié à une politique de recrutement mais aux garanties
statutaires. Sa progression très nette depuis 1988 s'explique
essentiellement par les mesures catégorielles du plan Jospin et du
protocole Durafour.
(source : rapport sur les rémunérations publiques-PLF1999)
Evolution du GVT positif (en %)
1988 |
1989 |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1,7 |
1,8 |
1,8 |
1,8 |
1,9 |
1,9 |
2,0 |
2,1 |
2,1 |
2,2 |
2,2 |
II. LA DÉPENSE " INDUITE " DE FONCTION PUBLIQUE
La
fonction publique de l'Etat induit des dépenses qui vont au-delà
des seules charges liées aux fonctionnaires.
Si l'on intègre les dépenses induites (subventions à
l'enseignement privé, pensions des anciens combattants et charges de
personnel du budget de l'Aviation civile) les dépenses sont en 1999 de
717,4 milliards de francs en augmentation de 6,2 % et correspondent
à 42,6 % des dépenses du budget général.
Ainsi que le relève le rapport sur les rémunérations de la
fonction publique annexé au projet de loi de finances pour 1999, ces
dépenses induites représentaient en 1998, 8,1 % du PIB.
La dépense induite de fonction publique
Certaines dépenses évoluent de manière
directement liée aux charges de personnel de l'Etat.
Il s'agit notamment :
des subventions à l'enseignement privé sous contrat :
rémunération des personnels enseignants pour lesquels les
créations et suppressions de postes évoluent parallèlement
à l'enseignement public, contribution au fonctionnement, bourses...
des pensions et allocations aux anciens combattants, les pensions étant
liées à l'évolution des traitements de la fonction
publique par un " rapport constant ".
L'ensemble de ces dépenses s'élève en 1998 à
79 milliards de francs et s'ajoute aux charges de personnel de l'Etat pour
constituer la dépense induite.
Source : Rapport sur les rémunérations publiques - PLF 1999
En
outre, la dépense induite est indexée à plus de 91 %
sur le point " fonction publique " :
ce sont donc plus de
38 % des dépenses du budget général de l'Etat qui
sont indexées sur le point " fonction publique ".
Ainsi, une revalorisation de 1 % du point " fonction publique "
représente un coût de 6,3 milliards de francs pour l'Etat, et
s'élève à 11,2 milliards si l'on y intègre les
collectivités locales et les hôpitaux.
III. L'AUGMENTATION DES DÉPENSES DE FONCTION PUBLIQUE
A. LA PROGRESSION SIGNIFICATIVE DES EMPLOIS BUDGÉTAIRES CIVILS DEPUIS 1990
La
progression des crédits relevée ci-dessus traduit la très
forte inertie des dépenses de rémunération de la fonction
publique en l'absence de négociation salariale maîtrisée et
souligne de ce fait la nécessité de parvenir à diminuer le
nombre des fonctionnaires.
Il convient de rappeler que ces données émanent du rapport sur
les rémunérations de la fonction publique annexé au projet
de loi de finances pour 1999.
1. La situation en France
L'ensemble des emplois budgétaires de l'Etat a augmenté de 1,20 % depuis 1990, soit 24.786 emplois.
Evolution des emplois budgétaires (civils et militaires) des agents de l'Etat (1)
Années |
Emplois budgétaires |
1990 |
2.072.656 |
1990 |
2.087.329 |
1992 |
2.075.805 |
1993 |
2.080.678 |
1994 |
2.078.872 |
1995 |
2.079.917 |
1996 |
2.086.128 |
1997 |
2.085.445 |
1998 |
2.092.287 |
1999 (prévisions) |
2.097.442 |
(1) Non compris les établissements publics, et hors météorologie, Postes et télécom-munications, imprimerie nationale.
Evolution des emplois budgétaires dans la fonction publique de l'Etat
Par ailleurs, comme le souligne le rapport sur les rémunérations
de la fonction publique "
les budgets des ministères civils de
l'Etat comptent, à structure constante,
39.400 emplois
budgétaires de plus en 1998 qu'en 1990
, soit une progression de
2,4 % ".
Cependant,
en 1997, les effectifs des budgets civils ont diminué de
0,4 %, soit 6.456 emplois
, permettant une économie de
0,8 milliard de francs en 1997 et 1,1 milliard de francs en 1998.
En 1998, les créations d'emplois civils ont repris avec un solde
positif de 621 emplois et pour 1999, le gouvernement affiche un solde
nul : 2.358 créations de postes civils compensées
par autant de suppressions. Compte tenu de la professionnalisation des emplois
militaires, les effectifs budgétaires progresseront de 0,25 %.
Il est cependant possible, de diminuer les effectifs nets de la fonction
publique sans pour autant perturber le bon fonctionnement des services publics,
comme le ministère de l'économie en donne lui-même
l'exemple :
" les efforts de rationalisation, certaines mesures de
simplification fiscale et administrative, et la réorganisation des
services permettent une baisse de 0,4 % des effectifs budgétaires,
soit 695 emplois, qui traduisent les progrès de productivité
du ministère (budget des services communs et finances) "
8(
*
)
.
2. Une mise en perspective internationale
Dans son
rapport sur les crédits de la fonction publique au titre du projet de
loi de finances pour 1998, votre rapporteur spécial, M. Philippe
Marini, soulignait que le poids de la dépense de fonction publique dans
le budget ne devait pas être le seul élément
d'appréciation du poids de la fonction publique.
Il rappelait également qu'une comparaison de cette dépense avec
les pratiques observées dans les principaux pays partenaires de la
France devait être opérée si l'on voulait se faire de la
fonction publique "
une autre idée que celle d'une gestion aux
acquets
".
Il relevait, à ce titre le poids élevé des effectifs
publics en France.
A cet égard, l'étude réalisée en octobre 1997 par
l'Institut Rexecode sur la mise en perspective internationale des
dépenses françaises est éclairante : il
apparaît que "
l'écart le plus marqué entre les
dépenses par nature de la France et celle des autres pays, hors le cas
spécifique de la Suède, apparaît au sein du coût
direct de fonctionnement des administrations publiques, et de façon plus
précise, au sein du poste coût des
rémunérations
".
Réserves faites des différences de bases de calcul de ces
rémunérations, l'étude conclut au poids très
supérieur des effectifs publics : "
En France, la part de
l'emploi des administrations publiques dans l'emploi total représente
25 %. Au sein de l'OCDE entière, pour laquelle la part moyenne est
de moins de 15 %, seuls les pays scandinaves affichent un secteur public
plus élevé en effectifs. Pour l'Union européenne, les
emplois dans les administrations publiques représentent en moyenne
18 % de l'emploi total
".
Il soulignait par ailleurs que ce poids ne s'était pas réduit au
cours des cinq dernières années.
Les dernières statistiques disponibles sur ce sujet émanant de
l'OCDE confirment cet état de fait.
Source OCDE
B. LES INSTRUMENTS DE MESURE DE LA PROGRESSION DES RÉMUNÉRATIONS PUBLIQUES
Ainsi
que votre rapporteur spécial l'avait relevé, "
les bases
de la négociation salariale dans la fonction publique sont
introuvables "
. Ces négociations concernent plusieurs
millions d'agents et il convient à ce titre de trouver des
éléments de calcul incontestables.
Deux indicateurs existent, la rémunération des personnes en place
(RMPP) ou le salaire moyen par tête (SMPT)
9(
*
)
.
Par ailleurs, l'évolution des rémunérations peut
être appréciée de deux façons, en niveau et en
moyenne :
-
l'évolution en niveau ou en glissement
correspond à la
variation des salaires de date à date ;
-
l'évolution en masse ou en moyenne
sur une année
correspond à l'écart entre la rémunération totale
(ou moyenne) perçue au cours de l'année et la
rémunération totale (ou moyenne) perçue au cours de
l'année précédente. L'effet en moyenne des revalorisations
du point fonction publique correspond ainsi à la variation entre deux
années de la valeur annuelle moyenne du point.
C. L'ABSENCE DE MAÎTRISE DE LA NÉGOCIATION SALARIALE
1. Un gain de pouvoir d'achat de 3,2 % par an depuis 1990
La
rémunération des fonctionnaires de l'Etat a, entre 1990 et 1998,
progressé de 5 % par an, soit un gain de pouvoir d'achat de
3,2 % par an.
Ainsi, sur la période 1990-1996, pour les agents de l'Etat le gain brut
de pouvoir d'achat mesuré au travers de la Rémunération
Moyenne des Personnels en Place (RMPP) est de plus de deux fois celui dont
bénéficient les salariés du secteur privé.
Entre 1990 et 1998
, la RMPP des fonctionnaires de l'Etat a
progressé en moyenne de 5,0 % par an, soit, compte tenu de
l'inflation hors tabac,
3,2 % de gains de pouvoir d'achat en moyenne
par an,
soit plus de 28 % de gain cumulé sur huit ans.
Pour 1998, la progression prévue est de 4,2 %, soit une
augmentation de 3,4 % en francs constants.
2. Un écart qui s'accroît avec le secteur privé
La
comparaison des niveaux moyens de rémunération avec le
privé est également riche d'enseignements.
Sur la période 1990 à 1996, la progression du SMPT brut dans
la fonction publique dépasserait au total de 5,5 points celle du
secteur privé
et assurerait aux agents de l'Etat un
gain brut de
pouvoir d'achat de plus de deux fois celui dont bénéficient les
salariés du secteur privé.
L'écart se creuse davantage en termes de rémunération
nette : la progression dans la
fonction publique du SMPT
net sur la
période dépasse de
7,5 points celle du secteur
privé en francs constants.
Ainsi
le salaire moyen net dans la fonction publique de l'Etat
a
enregistré des
gains de pouvoir d'achat de 5,9 %
sur ces six
années, soit en moyenne 1,2 % par an.
Dans le secteur
privé, le salaire moyen net
a progressé moins vite que les
prix sur cette période,
soit une perte de pouvoir d'achat de
1,3 %
et de 0,3 % en moyenne par an.
En 1996, l'évolution du SMPT brut est plus favorable dans la
fonction publique que dans le secteur privé (2,6 % contre
2 %). L'écart s'accentue en net : le salaire moyen net des
agents des services civils de l'Etat
a progressé de
1,9 % en
francs courants
, comme les prix hors tabac,
soit 1,2 point de plus
que dans le secteur privé.
Par ailleurs, en 1996, la rémunération nette moyenne
mensuelle d'un agent de l'Etat atteint 11.830 francs et est ainsi
supérieure de plus de 10 % à celle d'un salarié du
secteur privé (10.690 francs).
Le salaire net médian des fonctionnaires de l'Etat est quant à
lui supérieur de près de 32 % à celui des
salariés du secteur privé (11.330 francs et
8.600 francs respectivement).
Même s'il faut tenir compte des différences de structure ou de
qualification professionnelle, il est intéressant de relever que cet
écart s'est accru
: en 1994, le salaire net moyen mensuel d'un
agent de l'Etat était supérieur de 6 % à celui d'un
salaire du secteur privé (11.230 francs et 10.190 francs).
S'agissant du salaire net médian, la différence était de
29 % (10.800 francs et 8.400 francs).
De même pour le salaire brut médian des fonctionnaires de
l'Etat : il était en 1994 supérieur de 29 % à
celui des salaires du privé ; l'écart est de 32 % en
1996.
Source : Rapport sur les rémunérations publiques - PLF 1999
Les éléments de comparaison avec le secteur privé
Remarque
méthodologique
Le concept pertinent pour une comparaison des évolutions salariales
est la RMPP. Mais pour le secteur privé, des estimations fiables de
l'évolution de la RMPP ne sont pas disponibles pour les années
postérieures à 1986. La comparaison entre les deux secteurs doit
donc se fonder sur les évolutions de SMPT, en faisant l'hypothèse
qu'elles rendent compte de façon satisfaisante des écarts
d'évolution de la RMPP.
La prise en compte des différences de structure
S'agissant des niveaux de salaires, les écarts entre la fonction
publique et le secteur privé ne peuvent s'interpréter qu'en
tenant compte des différences de structures professionnelles, en
particulier :
- dans le secteur privé, les emplois tertiaires coexistent avec les
emplois primaires et secondaires ;
- le poids des cadres moyens et supérieurs est sensiblement plus
élevé dans la fonction publique de l'Etat que dans le
privé, notamment du fait du nombre d'enseignants. Ceci est d'autant plus
marquant depuis 1990, que la création du corps des professeurs des
écoles a entraîné la transformation des emplois des
instituteurs en emplois de catégorie A.
Source : Rapport sur les rémunérations publiques - PLF
1999
3. L'accord salarial du 10 février 1998 : 14,8 milliards de francs en 1999
Le contenu de l'accord salarial du 10 février 1998
Cinq
organisations syndicales (CFDT, FO, UNSA, CFTC, CGC) ont signé avec le
gouvernement le 10 février 1998 un accord salarial portant sur les
années 1998 et 1999.
L'accord de 1998 devrait permettre un accroissement du pouvoir d'achat des
fonctionnaires en 1998 et 1999, renforcé, compte tenu de la nature des
mesures adoptées, pour les salaires les moins élevés.
I - Des mesures de revalorisation portant plus spécifiquement sur les
bas salaires
Les mesures suivantes marquent un effort particulier en faveur des plus basses
rémunérations :
- d'une part, une attribution de points d'indice majoré intervient en
deux temps (le 1er juillet 1998 et le 1er juillet 1999) ;
- d'autre part, les cinq échelles de traitement de la
catégorie C ont été améliorées,
notamment afin qu'aucun traitement indiciaire brut dans la fonction publique ne
soit inférieur au salaire minimum interprofessionnel de croissance
(SMIC) ;
- par ailleurs, les perspectives de carrière des fonctionnaires
appartenant aux corps ou cadres d'emploi de la catégorie C doivent
être améliorées par un repyramidage du nouvel espace
indiciaire (NEI).
II - L'accroissement du pouvoir d'achat
Le pouvoir d'achat de tous les fonctionnaires, indépendamment de leur
progression professionnelle, devrait s'accroître en 1998 et 1999
grâce à des mesures générales prévoyant une
augmentation de la valeur du point de 1,3 % en 1998 (0,8 % le
1er avril et 0,5 % le 1er novembre) et en 1999 (0,5 % le
1er avril et 0,8 % le 1er décembre).
Par ailleurs, deux points d'indice majoré seront attribués
à tous les traitements en 1999 (un point au 1er avril et un point
au 1er décembre).
III - Autres mesures
D'autres stipulations concernent les perspectives relatives au temps de
travail, le congé de fin d'activité (CFA) et l'action sociale.
L'accord salarial du 10 février 1998 va accentuer encore ce
phénomène et contribuer à accroître ces
disparités.
Il se traduira par un accroissement du pouvoir d'achat
des fonctionnaires comme le souligne le rapport sur les
rémunérations publiques.
Il est par ailleurs intéressant de relever, s'agissant de la
présentation de ce même accord, que le ministère de la
Fonction Publique préfère le terme de " préservation
du pouvoir d'achat " à celui " d'accroissement " figurant
dans le projet de loi de finances. Par delà la différence
sémantique on peut ainsi noter une différence
d'appréciation entre ce ministère et celui de l'économie
quant à la portée et au contenu dudit accord.
Le coût de cet accord salarial en 1999 (14,8 milliards de francs)
est à rapprocher de deux chiffres :
- le coût du programme emplois-jeunes en 1999 qui doit en principe
concerner, d'ici le 31 décembre 1999, 250.000 jeunes. Ce
coût est de 14,3 milliards de francs au titre des crédits
inscrits sur le budget de l'emploi dans le projet de loi de finances pour
1999 ;
- le montant que le gouvernement a décidé de consacrer au total
en 1999 au financement de ses priorités : 16 milliards de
francs. Cette somme est donc déjà
" préemptée " à plus de 90 % par ce seul
accord salarial et, les mesures visant l'accroissement du pouvoir d'achat des
fonctionnaires qu'il contient.
Le coût de l'accord salarial du 10 juin 1998
(En milliards de francs)
|
Coûts annuels supplémentaires par rapport à l'année précédente |
Coûts annuels totaux |
||||
|
en 1998 |
en 1999 |
en 2000 |
en 1998 |
en 1999 |
en 2000 |
I - Fonction publique de l'Etat |
|
|
|
|
|
|
Revalorisation du point |
4,3 |
6,7 |
5,8 |
4,3 |
11 |
16,8 |
Mesures d'accompagnement (dont points uniformes et points différenciés) |
1,0
|
2,8
|
2,7
|
1,0
|
3,8
|
6,5
|
Total |
5,3 |
9,5 |
8,5 |
5,3 |
14,8 |
23,3 |
II -
Fonction publique territoriale
|
2,2 |
4,3 |
3,5 |
2,2 |
6,5 |
10,0 |
III -
Fonction publique hospitalière
|
1,8 |
3,4 |
2,8 |
1,8 |
5,2 |
8,0 |
Total trois fonctions publiques |
9,3 |
17,2 |
14,8 |
9,3 |
26,5 |
41,3 |
Source : rapport sur les rémunérations publiques PLF 1999
Votre
rapporteur tient à souligner que cet accord aura également des
effets induits sur les fonctions publiques territoriale et hospitalière.
Selon les informations fournies par le rapport sur les
rémunérations publiques annexé au projet de loi de
finances pour 1999, l'impact sur ces deux fonctions publiques sera en 1999
significatif avec des montants estimés respectivement à 6,5 et
5,2 milliards de francs.
Les collectivités locales et les hôpitaux publics devront donc
faire face à des augmentations de dépenses de fonctionnement qui
leur sont imposées.
Cet accord contribuera par ailleurs à restreindre encore
l'éventail des salaires dans la fonction publique tel que le calcule
l'INSEE : il était de 2,41 en 1991 et de 2,38 en 1996, contre 3,01
dans le privé.
4. Une rigidité croissante des dépenses publiques
Une
revalorisation de 1 % du point " fonction publique "
représente un coût de 6,3 milliards de francs pour l'Etat et
a également des effets sur les autres fonctions publiques et les
dépenses induites. Le coût total net en ce cas est de
11,3 milliards de francs.
Cela ne fera que renforcer une situation relevée par la Cour des Comptes
notamment lors de son rapport sur l'exécution du budget de 1997 :
"
La part relative des dépenses de personnel et des
dépenses obligatoires n'a cessé d'augmenter au cours des derniers
exercices. La rigidité du budget s'en trouve accentuée et les
efforts de réduction des dépenses seront à l'avenir plus
difficiles
".
5. La nécessaire clarification budgétaire
S'agissant des rémunérations, une étape
supplémentaire pourrait permettre de sortir d'une gestion salariale
à la fois rigide et à courte vue. Comme le préconisait
votre rapporteur spécial sur le projet de loi de finances pour 1998, le
Parlement pourrait fixer une enveloppe salariale maximale pour la fonction
publique sur plusieurs années. La direction du budget répartirait
cette enveloppe entre les différents ministères selon les
modalités actuellement retenues pour le contrat pluriannuel avec le
ministère de l'équipement, et enfin des contrats de service
pourraient être conclus par les ministères avec leurs services
déconcentrés.
Mais cette évolution devrait s'inscrire dans le contexte plus
général de la révision, à l'évidence
indispensable, de l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique
relative aux lois de finances.
En attendant, la publication du rapport sur les rémunérations
publiques, joint en annexe au présent projet de loi de finances,
constitue déjà un outil d'information extrêmement utile et
instructif. Sa portée, et probablement son ambition vont au delà
du simple constat budgétaire de l'évolution des
rémunérations publiques.
Dans ce contexte, et afin de contribuer à réduire la masse des
rémunérations publiques et de mettre en place, pour cela, une
politique plus volontaire de stabilisation et de réduction des effectifs
de la fonction publique, votre rapporteur tient à rappeler l'attention
que va porter le Sénat à l'éducation nationale.
En effet, la commission d'enquête sur la situation et la gestion des
personnels enseignants et non enseignants de l'Education nationale dont le
Sénat vient de prendre l'initiative, permettra d'étudier la
faisabilité des efforts de limitation de la progression de la masse
salariale, en analysant l'évolution des besoins selon la courbe des
effectifs scolarisés aux différents niveaux, et selon le taux
d'encadrement effectif des élèves ou
étudiants.
6. Un exemple étranger : la réduction des effectifs sous l'administration Clinton
L'administration fédérale américaine a
mis en
oeuvre une politique drastique de réduction des effectifs de
l'administration.
" Le Vice-président Al Gore a mené un effort sans
précédent de réduction de la taille du gouvernement
fédéral afin de le rendre plus efficace et productif s'inspirant
pour cela de l'expérience du secteur privé. Grâce aux
efforts ainsi entrepris, l'administration a économisé 137
milliards de dollars au cours des cinq dernières années.
Ainsi le gouvernement a réduit le nombre des employés civils de
316.000 le portant à un effectif le plus faible jamais atteint depuis
35 ans. Presque tous les 14 départements ministériels ont
réduit leurs effectifs : seul le ministère de la Justice a
accru ses effectifs, en raison de la politique de lutte renforcée contre
la criminalité et le trafic de drogue ; de même en raison du
recensement décennal le ministère du Commerce intérieur a
été épargné par ledit mouvement. "
(source : site Internet de l'administration fédérale
américaine)
Bien entendu, chaque pays est confronté à ses contraintes
propres, mais il faut rappeler que l'expérience de l'administration
démocrate a été réalisée de manière
empirique et ne manifeste aucun a priori idéologique...
IV. LES CONTOURS DE L'EMPLOI PUBLIC DEVIENNENT PLUS FLOUS
A. PLUS D'UN ACTIF SUR CINQ DANS LE CHAMP DE LA NÉGOCIATION SALARIALE
Au-delà des 2,1 millions d'agents civils de l'Etat
et de
ses établissements publics, il faut en effet comptabiliser dans l'emploi
public :
- les 460.000 agents des exploitants publics de la Poste et de France
Telecom ;
- les 295.000 militaires (hors appelés du contingent) ;
- les 1,323 million d'agents de la fonction publique territoriale ;
- les 681.000 agents de la fonction publique hospitalière (hors
médecins) ;
- ainsi que 146.000 enseignants des établissements privés
sous contrat et 125.000 salariés des établissements de
santé privés à but non lucratif tarifiés en
dotation globale.
Les dépenses de personnel des administrations publiques
Les
dépenses de personnel des administrations publiques telles que
retracées par la comptabilité nationale représentent
14,4 % du PIB en 1997. Elles se sont accrues de 2,4 % par an en
moyenne en francs constants depuis le début des années 1990.
Elles s'élèvent en 1997, selon le rapport sur les comptes de
la nation de l'année 1997, à
1.172 milliards de
francs
pour rémunérer environ
5,1 millions d'agents
en activité,
soit près d'un quart de l'ensemble des
salariés, et près de 4 millions de retraités.
Au total, les dépenses de personnel de l'ensemble des administrations
représentent en 1997, avec 14,4 % du PIB,
1,2 point de PIB
de plus qu'en 1990.
(Source : Rapport sur les rémunérations publiques - PLF 1999)
Au
total, on recense donc 5,1 millions d'agents publics pour une population
active de 22,4 millions,
soit plus d'un actif sur cinq
.
Enfin, environ 4,2 millions de personnes voient leur pension directement
indexée sur la rémunération des fonctionnaires :
1,7 million de personnes bénéficiant d'une pension civile ou
militaire de retraite et 550.000 bénéficiaires d'une pension
versée par la CNRACL, 1,3 million de bénéficiaires du
régime de retraite complémentaire IRCANTEC ainsi que
600.000 personnes ayant droit à une pension d'invalidité.
C'est la totalité de cette population qui est concernée par la
négociation salariale dans la fonction publique, même si seule une
partie de ses effets apparaît dans le budget de l'Etat.
B. VERS LA PÉRENNISATION DES EMPLOIS-JEUNES ?
Les
agents employés par l'Etat, les collectivités territoriales et
les établissements hospitaliers ne le sont pas sous le même
statut :
- le " noyau dur " est constitué des
titulaires
, soit
à peu près les quatre-cinquièmes des agents publics ;
- le solde, soit environ un million de personnes, est constitué de
non titulaires
: contractuels, auxiliaires, vacataires... Leur
proportion est beaucoup plus grande dans les établissements publics
(plus de 60 %) et dans la fonction publique territoriale (plus de
30 %) que dans la fonction publique d'Etat où ils
représentent toutefois plus de 13 % des effectifs ;
-
enfin, un troisième cercle d'agents
est constitué, outre
des personnes bénéficiaires de contrats emploi
solidarité
10(
*
)
, dont le nombre est
supérieur à 200.000,
par les
" emplois-jeunes
"
. Ils peuvent être
considérés comme des emplois publics, puisque l'Etat prend en
charge 80 % de leur rémunération
11(
*
)
, et même 100 % pour ceux recrutés
par l'Intérieur ou l'Education nationale.
Cela représenterait 250.000 emplois à la fin de 1999 et
350.000 en 2000 qui relèveront d'un statut quasi-public. C'est
d'ailleurs le souhait explicitement exprimé par le rapporteur
spécial des crédits de la fonction publique à
l'Assemblée nationale qui a "
souhaité que les
emplois-jeunes soient pérennisés au terme du contrat de cinq ans,
sans se substituer à des emplois existants
".
Répartition entre titulaires et non titulaires
|
1990 |
1995 |
||||
|
Total titulaires et non titulaires |
Non titulaires |
|
Total titulaires et non titulaires |
Non titulaires |
|
Ministères (1) |
2.168.900 |
328.100 |
15,1 % |
2.214.400 |
294.000 |
13,3 % |
Etablissements publics (2) |
188.500 |
117.100 |
62,1 % |
208.000 |
126.500 |
60,8 % |
Total Fonction Publique de l'Etat (1) |
2.357.400 |
445.200 |
18,9 % |
2.422.400 |
420.500 |
17,4 % |
FPT (1) (2) (3) |
1.326.400 |
448.900 |
33,8 % |
1.442.700 |
504.900 |
34,7 % |
FPH (personnel non médical) (1) |
667.100 |
35.700 |
5,4 % |
689.900 |
37.500 |
5,4 % |
Total des 3 fonctions publiques (1) |
4.386.900 |
929.900 |
21,2 % |
4.575.000 |
962.900 |
21,0 % |
(*) %
de non titulaires par rapport à l'effectif total
(1) Effectifs non compris les bénéficiaires de contrat emploi
solidarité (CES)
(2) Y compris assistantes maternelles
(3) Les effectifs de 1995 sont une estimation
Source : Direction générale de la Fonction publique
L'Etat
emploie donc une proportion non négligeable d'agents dans des conditions
non statutaires, même si des progrès ont été
réalisés grâce à la loi du 16 décembre
1996 relative à l'emploi dans la fonction publique qui comporte un plan
de résorption de l'emploi précaire s'adressant à environ
20.000 agents du niveau de la catégorie C et près de 18.000
agents assurant des fonctions d'enseignement ou d'éducation
(contractuels vacataires, auxiliaires...).
Les premiers concours ont été organisés au printemps 1997
par les ministères de l'éducation nationale (2.700 postes) et de
l'agriculture (370 postes) : toutefois cette résorption de
l'emploi précaire ne concernera que 38.000 agents sur
1 million.
V. LE FINANCEMENT DES RETRAITES PUBLIQUES : " UNE EXPLOSION PROGRAMMÉE "
Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 1998 votre rapporteur général, alors M. Alain Lambert avait évoqué cette " explosion programmée ", après s'être inquiété de la progression " au cours des années à venir dans des proportions considérables, de ces charges ".
A. LE RÉGIME PARTICULIER DES PENSIONS DE RETRAITE DE LA FONCTION PUBLIQUE
1. L'origine du statut spécial
L'ordonnance du 4 octobre 1945 portant organisation de la
sécurité sociale a posé le principe de la couverture
interprofessionnelle du risque de vieillesse, tout en maintenant, à
titre provisoire, un certain nombre de régimes de retraite
préexistants dont les régime des fonctionnaires civils de l'Etat
et des militaires (code des pensions civiles et militaires de retraite).
Cette exception au principe de l'unification des régimes a
été confirmée par le statut général des
fonctionnaires qui dispose que les fonctionnaires sont affiliés à
des régimes spéciaux de retraite et de sécurité
sociale (ordonnance du 4 février 1959 et loi du 13 juillet
1983).
Bénéficient ainsi du régime des pensions civiles et
militaires de l'Etat, tous les fonctionnaires titulaires relevant du statut
général, ainsi que les magistrats et les militaires de
carrière ou sous contrat, de même que les ayants cause de ces
personnels (conjoints, divorcés, orphelins).
2. Les particularités de ce régime
Il
s'agit d'un régime :
-
unique
, à la différence de celui dont relèvent
les salariés du secteur privé qui bénéficient
à la fois d'un régime de base et d'un ou plusieurs régimes
complémentaires obligatoires ;
-
législatif et réglementaire
, commun aux fonctionnaires
et aux militaires, qui fonctionne selon le système de la
répartition et non par capitalisation des cotisations versées par
les assujettis ; le montant des prestations accordées aux
retraités n'est pas déterminé par celui des retenues,
actuellement au taux de 7,85 % acquittées par l'agent pendant son
activité ;
-
budgétaire
, dont l'Etat couvre la plus grande partie du
financement, le total des cotisations versées par les personnels
affiliés, de la contribution employé versée par les
offices et établissements autonomes et des contributions de La Poste et
au titre de France Télécom représentant moins du tiers du
coût global (29,5 % en 1997) ;
Les pensions figurent au grand Livre de la Dette Publique. Il n'existe pas de
cotisation de l'employeur et le montant des retenues pour pensions
payées par les fonctionnaires n'est pas affecté directement au
service des dépenses de pension ;
-
global
: il couvre à la fois les risques vieillesse et
invalidité.
Le mode de calcul de la pension de retraite
Le droit à pension et le montant de celle-ci sont liés à
la notion de carrière, notion qui englobe la durée des services
et le niveau hiérarchique auquel l'agent est parvenu au terme de son
activité.
Est réputé avoir accompli une carrière, l'agent titulaire
qui a effectué au moins quinze ans de services effectifs, condition de
durée minimale exigée par la législation pour avoir droit
à une pension.
Lorsque cette durée est inférieure à quinze ans, les
droits afférents sont transférés auprès du
régime général d'assurance vieillesse et de l'IRCANTEC.
La pension est calculée en fonction de la durée des services et
du niveau hiérarchique de l'agent.
Ce calcul est réalisé sur la base du traitement
d'activité des six derniers mois, qui tient compte de l'ensemble du
développement de la carrière mais ne prend pas en compte les
primes et avantages accessoires.
Elle s'exprime en pourcentage à raison de 2 % du traitement indiciaire
par année de service ou de bonification, avec un maximum de 75 %
pouvant être porté à 80 % par le jeu des bonifications
liées à la situation de l'agent ou à la nature des
services.
La pension évolue en fonction de la revalorisation
générale des traitements et des modifications apportées au
grade à la suite, soit d'un changement du classement indiciaire, soit
d'une réforme statutaire.
La pension est proportionnelle aux années de services effectuées
dès lors que l'intéressé a réalisé un
minimum de quinze années de services.
Toutefois, la pension ne peut être perçue avant l'âge de
60 ans par les personnels sédentaires et de 55 ans par ceux
qui ont accompli au moins quinze ans de services dans les activités
présentant des risques particuliers ou des fatigues exceptionnelles.
Est immédiate la jouissance de la pension allouée à la
femme fonctionnaire qui remplit certaines conditions de situation de famille et
des dispositions particulières existent pour certaines catégories
de personnels militaires non officiers ayant quinze ans de services.
B. UNE DÉRIVE FORTE ET RAPIDE DU COÛT BUDGÉTAIRE
La
question du financement des retraites des fonctionnaires de l'Etat va se
poser rapidement.
En effet, le coût brut des pensions est de 179,9 milliards de francs
en 1999, en progression de 4,8% par rapport à 1998. Or, compte tenu des
évolutions démographiques, le surcoût est estimé
à 79 milliards de francs dès 2010 par les services du
ministère de l'économie.
Compte tenu du mode de financement de ces retraites qui fait déjà
supporter à l'Etat 70,5% de la charge totale, ce surcoût sera,
à réglementation constante, financé à 90 % par
la dépense publique.
1. La situation démographique
Dès 2000, et surtout à compter de 2005 la situation démographique du régime de retraite de la fonction publique d'Etat se dégrade fortement.
Evolution du rapport démographique
Années |
1995 |
2000 |
2005 |
2010 |
2015 |
Taux de croissance |
Retraités de droit direct |
828.308 |
956.711 |
1.126.718 |
1.318.503 |
1.491.840 |
+ 80,1 % |
Cotisants 1 |
2.081.689 |
2.081.689 |
2.081.689 |
2.081.689 |
2.081.689 |
|
Rapport démographique |
2,51 |
2,18 |
1,85 |
1,58 |
1,40 |
- 44,6 % |
Régime général |
1,75 |
1,69 |
1,72 |
1,57 |
1,37 |
- 21,7 % |
1. Par convention la population active est considérée comme stable sur la période considérée,
Source : Direction du budget
2. Les perspectives d'évolution financière
Les différents constats existant en la matière insistent tous sur la question de la soutenabilité budgétaire de ces évolutions et, partant, sur leurs implications en terme d'équité et de solidarité intra-générationnelle.
a) D'après les chiffres du Commissariat général au Plan (rapport Briet de 1995), la croissance serait " rapide et cumulative ".
|
1995 |
2005 |
2015 |
Montant des prestations retraite (en milliards, à francs constants) |
108 |
153 |
226 |
Hausse des taux de cotisation nécessaire pour maintenir l'équilibre du régime des fonctionnaires |
+ 1,3 |
+ 10,7 |
+ 20,6 |
Hausse nécessaire pour équilibrer le régime général |
+ 0,6 |
+ 0,9 |
+ 4 |
b) Pour la Direction du Budget (chiffrage de 1997) :
Le surcoût est estimé en 2010 à 79 milliards de francs, en francs constants, et serait financé à moins de 10 % par la croissance des cotisations. Le reliquat soit près de 90 % serait à la charge de l'Etat .
c) Pour la Cour des Comptes qui le souligne régulièrement dans ses rapports notamment sur l'exécution des budgets, " l'évolution des charges de pension constitue une hypothèque sérieuse pour les budgets futurs .
LE COÛT BUDGÉTAIRE DES RETRAITES DE LA FONCTION PUBLIQUE DE L'ETAT
Les charges de pension : montant et progression
Le montant des pensions civiles et militaires versées au titre de
l'exercice 1997 s'élève à 164,5 milliards de
francs se répartissant en 44,9 milliards de francs pour les
pensions militaires et 119,6 milliards de francs pour les pensions civiles.
La charge relative aux pensions progresse de façon significative :
depuis 1990, ce poste de dépenses a enregistré une augmentation
de + 4,8 % en francs courants en moyenne par an, et de 2,7 % par
an en moyenne en francs constants ; pour les fonctionnaires civils de
l'Etat, le montant a augmenté de + 3,5 % par an, et les
pensions des militaires ont progressé de + 0,8 % par an.
Sur la période 1990-1997, les effectifs de pensionnés ont
augmenté de + 12,3 %, avec une croissance de
+ 20,9 % du nombre des pensionnés civils et une diminution de
la population des retraités militaires (- 2,5 %) : la
progression des dépenses de pensions, en francs courants, provient donc,
pour plus des deux tiers, de l'amélioration de la pension moyenne servie
aux retraités, tant pour les nouveaux retraités
(" flux " annuels de départs à la retraite) que pour
les anciens retraités (" stock " des pensionnés).
-
Concernant les " flux "
, cette amélioration se
réalise par l'effet des mesures catégorielles et
l'élévation des qualifications, qui induisent une hausse de
l'indice retenu pour la liquidation des pensions (l'indice moyen des pensions
des fonctionnaires civils partant à la retraite est passé de 471
en 1991 à 548 en 1997).
Elle est également la conséquence de l'augmentation du taux de
liquidation des nouveaux pensionnés due à l'allongement de la
durée de carrière qui est passé de 65,2 % en 1990
à 67,9 % en 1997 pour les fonctionnaires civils (et de 65,2 %
à 67,2 % pour les militaires).
-
Concernant le " stock "
, la progression du montant des
pensions servies provient, d'une part, de l'effet direct des revalorisations de
l'indice fonction publique et, d'autre part, de l'application aux
retraités des mesures statutaires concernant les actifs, laquelle aura
permis près de + 0,5 point supplémentaire de croissance
des pensions par an en moyenne sur la période 1990-1997.
Le financement des retraites de la fonction publique
Le caractère budgétaire du régime des fonctionnaires ne
permet pas d'appréhender directement les équilibres de son
financement :
- la contribution de l'Etat employeur se confond avec le financement
budgétaire des pensions ;
- le principe d'universalité budgétaire ne permet pas
d'affecter le produit de la retenue pour pension supportée par les
fonctionnaires : 7,85 % de leur traitement indiciaire, au financement
des charges de pensions ;
- les charges afférentes aux compensations
généralisée et spécifique figurent sur un chapitre
de crédits distinct des chapitres de pensions.
Source : Rapport sur les rémunérations publiques - PLF 1999
C. QUELQUES PISTES DE RÉFLEXION
Au
travers des réflexions menées notamment par le Commissariat
général au Plan, on peut esquisser quelques pistes en ce
domaine :
allongement de la durée de cotisation, prise en
considération des rémunérations accessoires,
création d'une caisse autonome de financement de ces pensions etc.
En tout état de cause, il est indispensable d'agir rapidement en ce
domaine, puisque les premières difficultés apparaîtront
dès 2005.
Une première étape consisterait à clarifier la
situation en disposant à l'image du rapport sur les
rémunérations publiques joint au présent projet de loi,
d'un document budgétaire " ad hoc "
. Il pourrait ainsi
être publié un " jaune budgétaire "
spécifique sur cette question.
A ce titre, l'initiative prise par le gouvernement dans le rapport sur les
rémunérations publiques joint au présent projet de loi de
finances doit être relevée.
Elle présente ainsi un
compte simplifié des pensions pour 1997, offrant un panorama aussi
complet qu'incontestable de la situation en ce domaine.
Par ailleurs, l'étude actuellement menée par la Cour des comptes
sur la fonction publique apportera, fort opportunément, un très
utile complément d'informations.
Compte simplifié 1997
|
En millions de francs |
Evolution par rapport à 1996 |
I. Emplois |
|
|
Pensions |
164.494 |
+ 3,48 % |
-dont civils hors PTT |
97.621 |
+ 4,37 % |
- dont La Poste |
13.626 |
+ 3,58 % |
- dont France Télécom |
8.356 |
+ 3,85 % |
- dont militaires |
44.891 |
+ 1,46 % |
Transferts |
22.030 |
+ 0,43 % |
- dont compensation généralisée |
12.848 |
+ 5,34 % |
- dont compensation spécifique |
8.752 |
- 6,30 % |
- dont titulaires sans droits |
430 |
- 9,31 % |
Total emplois |
186.524 |
+ 3,12 % |
II. Ressources |
|
|
Cotisations salariales (retenues pour pension) |
29.416 |
+ 1,83 % |
Contributions employeurs (hors Etat) |
25.549 |
+ 2,20 % |
- dont contribution établissements publics |
4.520 |
- 3,98 % |
- dont remboursement La Poste |
12.883 |
+ 1,30 % |
- dont contributions au titre des pensionnés de France Télécom |
8.146 |
+ 6,89 % |
Sous-total (hors contribution Etat) |
54.965 |
+ 2,02 % |
Solde : charge nette pour l'Etat |
131.559 |
+ 3,60 % |
Total ressources |
186.524 |
+ 3,12 % |
La
reconstitution des ressources et des emplois du régime des
fonctionnaires civils de l'Etat et des militaires permet de mettre en
évidence
l'effort budgétaire net de l'Etat
. On peut
calculer un
taux de cotisation patronale implicite
en rapportant cet
effort budgétaire net à la masse salariale indiciaire. En 1997,
ce taux s'établit à 39,01 % pour les fonctionnaires civils
et à 101,71 % pour les militaires, soit 47,15 % pour
l'ensemble des ressortissants du code des pensions civiles et militaires de
retraite de l'Etat.
Il devrait atteindre, dès 1998, 47,62 % (39,78 % pour les
fonctionnaires civils et 98,90 % pour les militaires) et
s'établirait à 51,2 % à l'horizon 2002, soit
44,5 % pour les seuls fonctionnaires civils et 92,1 % pour les
militaires.
CHAPITRE III
QUELLE RÉFORME DE
L'ÉTAT ?
Des
avancées avaient été réalisées par le
gouvernement précédent, qu'il s'agisse de la mise en place du
Commissariat à la réforme de l'Etat, du Fonds pour la
réforme de l'Etat, de la politique de déconcentration, ou de la
réflexion sur le nécessaire développement de la gestion
patrimoniale de l'Etat.
Elles nécessitent incontestablement d'être poursuivies, mais le
nouveau gouvernement n'a pas encore donné d'assurances véritables
à ce sujet, alors que la comité d'enquête sur les services
publics a tracé des orientations intéressantes à examiner.
De même, votre rapporteur attend avec intérêt la publication
des travaux de la Cour des Comptes sur la fonction publique, qui apporteront un
très utile éclairage.
Après 18 mois de fonctionnement, les orientations du gouvernement
actuel n'apparaissent pas clairement.
On semble en rester au stade des " déclarations d'intention ",
alors que deux autres grands pays européens, la Grande-Bretagne et
l'Allemagne, ont mis en place des politiques innovatrices s'agissant de la
nécessaire évolution de l'Etat, de son rôle et de ses
structures.
I. DEUX EXEMPLES EUROPÉENS
A. LA MODERNISATION DE L'ETAT EN GRANDE-BRETAGNE
Les
priorités actuelles du gouvernement britannique se traduisent par la
volonté réaffirmée de maintenir en vigueur une fonction
publique permanente, fondée sur des valeurs d'intégrité,
d'impartialité politique et d'objectivité, sur la
sélection et la promotion en fonction du mérite, tout en
améliorant les performances, dans le respect de deux principes
clés :
- en vertu de la Charte du citoyen, spécifier clairement le niveau de
qualité des services rendus aux usagers ;
- continuer de contrôler rigoureusement les coûts de fonctionnement
de la fonction publique.
1. La stratégie mise en oeuvre
L'administration du Royaume-Uni a passé toutes ses
activités au crible en posant une série de questions
préalables dans le cadre de l'initiative " Prior
options " :
1.
La tâche considérée est-elle réellement
nécessaire ? Dans la négative, elle doit être
supprimée.
2.
Dans l'affirmative, faut-il nécessairement que
l'administration publique en assume la responsabilité ? Dans la
négative, il convient d'envisager une privatisation.
3.
S'il est nécessaire que l'administration en assume la
responsabilité, le travail doit-il être effectué par des
fonctionnaires, ou peut-il être réalisé de façon
plus efficace et plus efficiente par le secteur privé ? Il convient
d'organiser une mise en concurrence pour déterminer qui offre la
prestation dans les meilleures conditions d'efficience et d'efficacité.
Le premier critère de sélection est le rapport
qualité-prix.
4.
Dans le cas où la tâche doit être effectuée
dans le cadre de l'administration, l'organisation est-elle correctement
structurée et est-elle concentrée sur cette
tâche ?
2. Le contrôle du coût
La politique du gouvernement britannique consiste à plafonner les dépenses publiques globales, à consacrer en priorité les ressources aux activités essentielles, à recourir au choix, à la concurrence et aux forces du marché dans le cadre des prestations de services, et à optimiser le rapport qualité-prix.
B. LA MODERNISATION DE L'ÉTAT EN ALLEMAGNE
Après la réunification, l'administration a du
prendre
en charge les missions d'un Etat providence dans des proportions jusqu'alors
inconnues dues aux conséquences et au coût de la
réunification. La rentabilité des activités
administratives est donc actuellement un des principaux objectifs de
l'Allemagne.
Mais les critères d'efficience et de rationalisation qui font leur
apparition au sein de l'administration ne suffisent pas à apurer les
dettes de l'Etat et se pose parallèlement la question de limiter son
action aux domaines régaliens.
Au titre, on peut citer les modalités de gestion des ressources
humaines. Actuellement, l'administration allemande pratique une pause dans le
recrutement. L'objectif est de diminuer de 1,5 % par an la masse salariale
de l'administration fédérale. A terme, seules les fonctions
régaliennes devraient être occupées par des fonctionnaires.
Une nouvelle grille est en voie d'élaboration, qui tiendrait compte des
profils de poste et qui permettrait des déroulements de carrière
identiques tout en reconnaissant des spécificités. Le but est de
favoriser l'établissement de plans de carrière et de formation.
La flexibilité est aussi recherchée par la promotion du temps
partiel, l'élargissement des plages de travail et le
développement du télétravail.
L'évaluation et la notation jouent un rôle de plus en plus
important dans la progression de carrière et dans le traitement des
cadres : deux possibilités de rémunération au
mérite ont ainsi été introduites par une loi du
24 février 1997.
Il convient enfin de relever que les organisations syndicales de
fonctionnaires ont accueilli favorablement l'introduction d'un salaire au
mérite.
II. IL FAUT POURSUIVRE LES RÉFORMES DÉJÀ MISES EN OEUVRE
A. LA DÉCONCENTRATION
L'enjeu
est décisif car les services déconcentrés de l'Etat
regroupent 96 % des agents de l'Etat. Or, les administrations centrales
qui ne regroupent que 4 % des effectifs gèrent encore le tiers des
crédits et prennent toujours le quart des décisions
administratives individuelles.
Par ailleurs ce retour vers l'administré est souvent le gage d'une
meilleure qualité de l'action publique.
B. LA COMPTABILITÉ PATRIMONIALE DE L'ETAT
Faisant
suite notamment aux rapports Giraud et Delorme, les conclusions des travaux de
la mission " comptabilité patrimoniale " mise en place en 1997
ont été rendus fin juin 1998. Votre rapporteur souhaiterait en
connaître les conséquences pratiques et juridiques.
Il apparaît que ces conclusions seraient à l'étude au sein
des directions du ministère et cela dans la perspective du projet de loi
de finances.
Il faut rappeler que le précédent ministre de l'économie
et des finances avait réussi à amorcer un objectif de gestion
patrimoniale de l'Etat. Il s'agissait de passer d'une logique de budget
à une logique de bilan. Par ailleurs, il semble indispensable de
moderniser également la politique de gestion immobilière car
300.000 bâtiments ou parties de bâtiment relèvent du
domaine de l'Etat.
C. LA MODERNISATION DE LA GESTION DE LA FONCTION PUBLIQUE
En ce
qui concerne la gestion de la fonction publique, trois chantiers au moins
doivent absolument être poursuivis : les fusions de corps
administratifs (il en existe 1.700 dont 900 " vivants "),
l'enrichissement de la procédure de notation et l'élargissement
de la mobilité des fonctionnaires qui pourrait conduire à
l'avènement de " métiers " au sein de la fonction
publique.
Si votre rapporteur se félicite qu'aucun nouveau corps de fonctionnaire
n'ait été créé en 1998, selon les informations
communiquées par le gouvernement, il regrette que ne soit pas
accéléré le mouvement de fusion des corps encore
existant.
D. DÉVELOPPER LA FORMATION ET L'OUVERTURE VERS L'EXTÉRIEUR
1999
sera le premier budget de l'euro
.
La prise en compte des réalités extérieures, et
notamment communautaires, doit plus que jamais constituer à ce titre un
impératif pour les fonctionnaires
.
L'ouverture d'une partie de la fonction publique à des ressortissants
communautaires, la mise en place d'une mobilité en cours de
carrière à laquelle réfléchissent actuellement deux
groupes d'experts au sein de la Commission européenne, constituent
désormais autant de données incontournables.
Il importe par ailleurs de développer, que ce soit à
l'entrée dans la fonction publique, notamment au sein des écoles
administratives françaises, ou tout au long de la carrière, la
formation aux réalités communautaires. Il y a là un gage
d'efficacité pour le fonctionnement de l'administration mais
également le moyen pour celle-ci de mieux intégrer et assimiler
le processus de décision communautaire, et partant, de permettre
à notre pays de mieux " faire entendre sa voix " au sein de
ces institutions.
Votre rapporteur se félicite que la formation aux questions
communautaires constitue depuis 1991 l'une des priorités des actions de
formation interministérielle.
En parallèle, il apparaît également nécessaire que
se renforce la présence des fonctionnaires français dans les
institutions communautaires et internationales afin que se confirme le
mouvement décrit par le gouvernement : "
La situation
française dans les organisations internationales est
caractérisée par un taux de présence globalement
satisfaisant au regard du poids démographique de la France et d'un
contexte tendant à la diminution des effectifs dans ces organisations.
Sur le plan qualitatif, une amélioration notable de la présence
française a été constatée par un accès
à des postes de responsabilité plus importants ".
Les actions de formation aux réalités communautaires à destination des administrations françaises
Celles-ci se déroulent principalement dans le cadre et
sous
l'égide du Centre d'Etudes Européennes de Strasbourg (CEES).
Elles sont de deux types :
Les actions de formation initiale et continue
La formation initiale s'adresse essentiellement aux élèves des
écoles administratives françaises, à savoir : les
élèves de l'ENA, les auditeurs de justice de l'ENM, les
inspecteurs-élèves de l'Ecole nationale des douanes, les
élèves administrateurs de l'INSEE, les
inspecteurs-élèves de l'Institut national du travail, de l'emploi
et de la formation professionnelle, les élèves des IRA, les
élèves des écoles d'ingénieurs du groupe de Paris,
les élèves de l'ENSP, les élèves de l'Ecole
nationale du génie rural, des eaux et des forêts, les
élèves officiers de la gendarmerie nationale.
La formation continue
La vocation principale du centre étant la formation continue, notamment
dans le secteur public, la majorité des sessions organisées par
le centre s'adresse à des fonctionnaires de l'Etat ainsi qu'à des
fonctionnaires territoriaux : les administrateurs civils nommés au
tour extérieur dans le cadre de leur formation à l'ENA, les
directeurs régionaux du travail, de l'emploi et de la formation
professionnelle, les cadres du secteur santé, en liaison avec l'Ecole
nationale de la santé publique de Rennes, les cadres de l'administration
centrale, les fonctionnaires des diverses administrations de l'Etat participant
aux cycles de formation organisés par la DGAFP, les cadres de la
fonction publique territoriale, etc...
Le contenu de la formation est articulé en modules. Elle comporte
notamment une présentation générale de l'organisation et
du fonctionnement des institutions européennes, des exercices de
simulation en application de l'enseignement reçu et la visite de
certaines institutions (Parlement européen, audience à la Cour de
justice des Communautés européennes...).
Votre rapporteur tient également à rappeler que la fonction
publique française est ouverte aux ressortissants communautaires.
L'application de la loi du 26 juillet 1991 sur les modalités d'accès aux emplois publics des ressortissants de l'Union européenne
Les
dispositions du Traité de Rome érigeant en principe la libre
circulation des travailleurs ne sont pas applicables en tant que telles aux
emplois dans l'administration publique.
Cette exception a été nuancée par l'évolution de la
jurisprudence de la Cour de justice des Communautés qui a restreint la
notion " d'emploi " dans l'administration publique aux " emplois
participant à l'exercice de la puissance publique et responsables de la
sauvegarde des intérêts généraux de l'Etat et des
autres collectivités publiques ".
Afin de se conformer au droit communautaire, les corps, cadres d'emplois et
emplois de la fonction publique dont les attributions, soit sont
séparables de l'exercice de la souveraineté, soit ne comportent
aucune participation directe ou indirecte à l'exercice de
prérogatives de puissance publique de l'Etat ou des autres
collectivités publiques sont ouverts aux ressortissants de l'Union
européenne.
Cette ouverture s'est effectuée par décrets statutaires en
Conseil d'Etat préparés par chaque ministère pour la
fonction publique de l'Etat, par le ministre chargé des
collectivités locales pour la fonction publique territoriale et par le
ministre chargé de la santé pour la fonction publique
hospitalière.
Ainsi, les décrets déjà publiés ont permis d'ouvrir
70 % de la fonction publique française aux ressortissants de
l'Union européenne (plus de 80 % de la fonction publique de l'Etat)
et mis la législation française en conformité avec la
jurisprudence communautaire concernant la libre circulation des fonctionnaires
en Europe.
Ainsi, pour le seul domaine de l'enseignement, sont ouverts aux ressortissants
de l'Union européenne les corps, cadres d'emplois et emplois
suivants :
A. Education nationale
1. Enseignement des premier et second degrés :
Professeurs
des écoles, professeurs certifiés, professeurs
agrégés, professeurs d'éducation physique et sportive,
conseillers principaux d'éducation, conseiller d'orientation -
psychologues et directeurs de CIO, professeurs de lycées professionnels.
2. Enseignement supérieur :
professeurs de l'ENSAM,
professeurs techniques adjoints de l'ENSAM, chefs de travaux pratiques de
l'ENSAM.
3. Enseignants chercheurs :
maîtres de conférences,
professeurs d'université.
4. Personnels de santé :
médecins de
l'éducation nationale.
5. Personnel de laboratoire :
techniciens de laboratoire des
établissements d'enseignement, aide technique de laboratoire des
établissements d'enseignement, aide de laboratoire des
établissements d'enseignement, agent technique de laboratoire des
établissements d'enseignement.
6. Personnels techniques et ouvriers :
technicien,
maître-ouvrier des établissements d'enseignement, ouvrier
professionnel des établissements d'enseignement ouvrier et d'accueil des
établissements d'enseignement.
B. Jeunesse et sports
Professeurs de sport, conseillers d'éducation populaire et de jeunesse.
C. Agriculture
Professeurs certifiés de l'enseignement agricole, professeurs de
lycées professionnels agricoles, conseillers principaux
d'éducation.
D. Culture
Professeurs des écoles nationales d'art, ingénieurs de recherche,
ingénieurs d'étude, assistants ingénieurs et techniciens
recherche, corps de chargés d'études documentaires.
E. LES CONTRATS DE SERVICE
Les
contrats de service ont été mis en place par la circulaire
conjointe des ministres chargés de la réforme de l'Etat et du
budget du 12 juillet 1996.
Conclus pour une durée de trois ans entre les administrations centrales
et leurs services déconcentrés, ces contrats permettent, à
partir d'une meilleure définition des prestations à offrir aux
usagers se traduisant par une formulation précise des objectifs à
atteindre, d'accentuer la responsabilisation des services dans la gestion de
leurs moyens. Et cela grâce à la négociation d'un budget
global, en personnel et en crédits de fonctionnement, et à un
mécanisme de retour sur les économies éventuellement
réalisées.
Les agents sont associés, au sein de chaque service, à
l'élaboration du projet de contrat ainsi qu'à la
répartition interne des moyens au sein du service concerné.
Ces contrats offrent à l'administration une réelle
possibilité de modernisation
. Il importe de les relancer et de ne
pas se cantonner aux deux expériences actuellement en cours au sein de
l'éducation nationale ou de l'industrie.
III. LE GOUVERNEMENT TARDE À AFFICHER SES PRIORITÉS
La seule
priorité claire est l'absence de maîtrise de la négociation
salariale, dont les effets seront très lourds pour les finances
publiques à l'avenir.
Le gouvernement semble en rester sur les autres dossiers aux
déclarations d'intention sans véritable avancée
concrète.
A. L'AMÉNAGEMENT DU TEMPS DE TRAVAIL
La loi
sur les 35 heures n'est pas applicable en tant que telle à la fonction
publique. Elle prévoit cependant qu'un rapport sera remis au Parlement
sur
" le bilan et les perspectives de la réduction du temps de
travail pour les agents de la fonction publique "
.
Par ailleurs, conformément à l'accord salarial du 10
février 1998, il était prévu que, compte tenu
de
" la diversité extrême de la réglementation et des
pratiques ainsi que des contraintes liées à la nature des
missions de service public "
un état des lieux serait
confié à une personne mandatée à cet effet. M.
Jacques Roche, conseiller maître honoraire à la Cour des Comptes a
été chargé de déterminer les implications de la
perspective des 35 heures dans chacune des trois fonctions publiques. Ses
conclusions doivent être rendues avant la fin de l'année 1998.
Il importe selon votre rapporteur, que la réflexion s'engage à
effectif constant : l'aménagement du temps de travail doit se
traduire non par un accroissement des effectifs de la fonction publique mais
par une plus grande souplesse dans la gestion des horaires et, partant, une
plus grande efficacité au service des usagers des services
publics.
B. LA SITUATION DES HAUTS FONCTIONNAIRES
Il
importe de leur assurer une progression de carrière motivante et une
mobilité accrue entre départements ministériels. A
défaut se développera la " fuite des cerveaux " de la
fonction publique, phénomène qui sera particulièrement
préjudiciable au bon fonctionnement des services publics.
A ce titre votre rapporteur relève que l'accord salarial du
10 février 1998 en revalorisant les plus bas salaires de la
fonction publique, a contribué au resserrement de l'éventail des
rémunérations au sein de la fonction publique. Il est donc
indispensable que puisse aboutir rapidement la réflexion en cours au
sein des services du Premier ministre.
La dispersion des rémunération de la fonction publique de l'Etat
En 1996, comme les années antérieures, l'éventail
des salaires apparaît plus resserré dans la fonction publique
(2,38 en 1996 après 2,41 en 1991) que dans le secteur privé
(3,01).
Cet éventail est calculé par l'INSEE en comparant le salaire net
moyen du neuvième décile par rapport au premier décile,
c'est-à-dire des 10 % de personnes les mieux payées par
rapport au 10 % des personnes les moins payées, soit respectivement
pour la fonction publique, 18.100 francs et 7.600 francs, et pour le
secteur privé, 17.260 francs et 5.740 francs.
Il traduit un éventail hiérarchique des traitements de la
fonction publique relativement peu ouvert et en resserrement constant depuis
1957. Le rapport entre le traitement minimum (6.811,83 francs bruts) et le
sommet de l'échelle-lettre (40.980,25 francs bruts) est ainsi
passé d'un écart de 1 à 17,6 en 1957 à un
écart de 1 à 6,1 au 1er avril 1998 (qui devrait être
de 1 à 5,9 au 1er décembre 1999).
Source : Rapport sur les rémunérations publiques - PLF 1999
C. LA CIRCULAIRE DU 3 JUIN 1998
La
circulaire du Premier ministre en date du 3 juin 1998 met en place un
programme pluriannuel de modernisation de l'administration. Quelles en seront
les traductions concrètes ?
Ainsi que le relève cette circulaire :
"
La modernisation de l'administration est permanente : de
nombreuses actions ont déjà été conduites à
ce titre ou sont en cours pour accroître l'efficacité de l'Etat.
La nécessité de les accélérer et de les
compléter implique que les services se dotent des outils
appropriés pour conduire le changement de manière
cohérente et lisible pour eux-mêmes et pour la collectivité
nationale.
C'est la raison pour laquelle le Premier ministre vous demande de
préparer, en liaison avec le ministre chargé de la réforme
de l'Etat et le ministre chargé du budget, un programme pluriannuel de
modernisation de votre administration dont la mise en oeuvre pourra
s'étendre sur une période de trois à cinq ans
. "
Dans ce cadre, cinq points doivent faire l'objet d'une attention
particulière :
Réflexion sur les missions de l'Etat
Examen des procédures de travail, des circuits de
décision et de l'organisation des services
Amélioration de la gestion des ressources humaines passant
par :
-
la rénovation des méthodes et des outils de gestion des
ressources humaines ;
- la déconcentration de la gestion ;
- le développement des actions de formation des personnels ;
Modernisation des outils et méthodes de la gestion publique se
traduisant par :
- l'amélioration des relations avec les usagers et le
développement de la qualité des services ;
- la mise en place d'outils de contrôle de gestion et de connaissance du
coût de l'activité des services ;
- le développement de la contractualisation interne ;
- développement des nouvelles technologies de l'information et de la
communication.
A ce titre, le rapport concernant l'impact des nouvelles technologies de
l'information et de la communication sur la modernisation de l'administration
(rapport Basquiat) a relevé
qu'Internet allait entraîner un
décloisonnement tant vertical et horizontal des structures de l'Etat
remettant en cause la hiérarchie administrative classique.
L'administration se doit de se préparer à un tel changement qui
va par ailleurs, en permettant le traitement de certains dossiers en temps
réel imposer aux administrations de " répondre dans des
délais raccourcis avec plus d'efficacité et de rigueur "
comme le relevait récemment le ministre de la fonction
publique.
D. QUELLES PRIORITÉS LÉGISLATIVES ?
Où en sont les priorités législatives du
Gouvernement ?
Votre rapporteur s'interroge sur les suites prévues pour le projet de
loi relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les
administrations. Le texte a été déposé le
13 mai 1998 à l'Assemblée nationale, mais sa discussion
n'est pas prévue avant la seconde quinzaine de mars 1999.
Ce texte prévoit notamment l'actualisation des droits d'accès
aux documents administratifs, l'amélioration de la transparence des
décisions, le renforcement des pouvoirs du Médiateur de la
République ou la constitution de maisons de services publics en
groupement d'intérêt public.
De façon plus générale, il vise à favoriser
"
une meilleure connaissance des services publics pour permettre une
meilleure utilisation de ceux-ci
".
E. QUEL RÔLE POUR LA DÉLÉGATION INTERMINISTÉRIELLE À LA RÉFORME DE L'ETAT ?
Celle-ci
vient en effet de remplacer le Commissariat à la réforme de
l'Etat.
Le Commissariat à la réforme de l'Etat, équipe
inter-ministérielle légère, composée d'une
quinzaine de fonctionnaires de haut niveau, placée auprès du
Premier Ministre, avait été créé par décret
du 13 septembre 1995, pour une durée de trois ans.
Cette équipe a été chargée du travail de conception
et de mise en oeuvre des réformes préconisées alors par le
gouvernement. Il a ainsi veillé à l'application des
réformes engagées par le gouvernement et a coordonné leur
mise en oeuvre. Par ailleurs, il a souvent apporté son expertise
" d'ingénierie administrative " tout en proposant le cas
échéant de nouvelles réformes à entreprendre en
fonction des objectifs fixés par le gouvernement.
A ce titre, la nomination en 1997 d'un ministre expressément
chargé de la réforme de l'Etat a pu illustrer la volonté
de continuer cette réforme.
La mise en place de la délégation interministérielle à la réforme de l'Etat
Le
décret n° 98-573 du 8 juillet 1998 a modifié le
décret du 13 septembre 1995 relatif au comité
interministériel pour la réforme de l'Etat et au commissariat
à la réforme de l'Etat.
Selon le gouvernement, "
il a paru nécessaire de mettre en
place un dispositif réglementaire apte à prendre le relais et
à poursuivre l'action engagée
. "
Le commissariat a été remplacé par une structure
pérenne, la " délégation interministérielle
à la réforme de l'Etat " (DIRE), dont les missions sont
identiques.
Le directeur général de l'administration et de la fonction
publique se voit confier les fonctions de délégué
interministériel à la réforme de l'Etat afin d'assurer une
meilleure cohérence et une plus grande coordination entre les politiques
menées respectivement en matière de fonction publique et de
réforme de l'Etat.
La délégation interministérielle se compose de cinq
missions, dont trois sont chargées de fonctions transversales
(" service à l'usager et management public ",
" fonctionnement, organisation et déconcentration de l'Etat ",
" utilisation des nouvelles technologies de l'information et de la
communication par l'administration ") et deux du suivi spécifiques
des réformes propres à un ensemble de ministères (les
administrations régaliennes, économiques et financières
d'une part, les autres administrations d'autre part).
Cette nouvelle structure correspond à la volonté affichée
par le gouvernement de " relancer " la modernisation de
l'administration. Conformément aux orientations définies par le
Premier Ministre dans sa circulaire du 3 juin 1998, il lui appartiendra de
faire ses preuves.
Votre rapporteur attend également que soient précisées
les orientations du gouvernement s'agissant de la modernisation du
fonctionnement et de l'organisation de l'administration territoriale. La
décentralisation et l'évolution des conditions d'intervention de
l'Etat imposent d'adapter l'administration territoriale, pour mieux prendre en
compte la réalité et l'importance des régions et
départements.
Des groupes de travail ont été mis en place au printemps 1998, et
ont rendu leurs travaux en juillet. Des propositions de modernisation de
l'action des services déconcentrés doivent être
adressées au Premier ministre afin de permettre la mise en place de
véritables schémas de modernisation au plan local. Cette
réforme doit par ailleurs prolonger et accompagner la
déconcentration.
F. LES TRAVAUX DU COMITÉ CENTRAL D'ENQUÊTE SUR LE COÛT ET LE RENDEMENT DES SERVICES PUBLICS
Votre
rapporteur partage le diagnostic formulé par le comité
d'enquête sur le coût des services publics ainsi que les pistes de
réforme évoquées par celui-ci.
Il en retient surtout une idée essentielle : le service public doit
retrouver toute sa signification, c'est-à-dire être au service du
public, et pour cela, évoluer et s'adapter aux nouveaux enjeux et aux
nouvelles contraintes.
Présenté par M. Pierre Joxe, Premier président de la Cour
des Comptes, le rapport (1995-1998) de ce comité s'interroge sur
l'état de la modernisation du service public. Structure originale
à laquelle sont associés des parlementaires, ses conclusions sont
très instructives
Il souligne la nécessaire adaptation des administrations afin de les
rendre plus efficaces. Est ainsi relevé que "
la clé de
réussite des politiques conduites par le gouvernement est l'exigence
d'adaptation et d'efficacité renforcée de
l'administration.
"
A ce titre, le comité au vu des efforts accomplis a tenu à
suggérer quelques pistes de réflexion.
S'agissant des efforts accomplis, le rapport du Comité relève
les actions de grande ampleur destinées à informatiser les
services de l'Etat, le caractère de "
pièce
maîtresse
" de la modernisation de l'administration que
représente la déconcentration. Il relève par ailleurs que
"
progresse l'idée selon laquelle, le cadrage
réglementaire et statutaire ne constitue pas l'instrument unique pour
gouverner la main des fonctionnaires
".
Sans préconiser une transposition directe des méthodes du
secteur privé, il préconise une modernisation de la gestion des
personnels notamment au travers d'un renforcement de la formation continue des
agents ou de la réforme de la procédure de notation. Il rappelle
également l'importance de l'attention accordée aux usagers :
"
il n'y a plus aujourd'hui de réforme du service public qui
puisse se concevoir sans la volonté de répondre aux attentes des
usagers dans le respect de l'intérêt
général
".
Dans ce contexte, deux défis sont à relever : la rapidité
et l'accueil, afin que la notion de service public conserve toute sa
signification.
Au vu de ces éléments, le rapport insiste sur la
nécessité "
d'aller vers plus de cohérence et
d'efficacité
".
Il se déclare également soucieux de ne pas confondre les
objectifs et les moyens : si les objectifs doivent être
"
exigeants et surtout cohérents
", il convient de ne
pas oublier que l'Etat ne se réformerait pas en quelques mois. Il
définit à ce titre, trois domaines dans lesquels peut se
développer cet effort : "
la gestion de l'allocation des
ressources budgétaires, la relation interministérielle ou le
dispositif d'appui à la modernisation de
l'administration
".
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mardi 10 novembre 1998,
sous la présidence de
M. Alain Lambert, président
, la commission a
procédé, sur le
rapport de M. Gérard Braun, rapporteur
spécial,
à l'
examen des crédits
de la
fonction publique et la réforme de l'Etat pour 1999.
A titre liminaire,
M. Gérard Braun
a indiqué que l'examen
des crédits de la fonction publique appelait deux analyses distinctes :
la première était juridique. Il s'agissait de présenter
les crédits du ministère chargé de la gestion de la
fonction publique qui sont individualisés dans le budget des services
généraux du Premier ministre au sein d'un agrégat
:" fonction publique ". Ils s'élèvent à
1,4 milliard de francs en 1999 et sont en diminution de 0,18 %.
La seconde était économique : il convenait d'analyser les
charges de personnel de l'Etat, qu'il s'agisse des crédits de
rémunération, des charges sociales ou des pensions. Elles
apparaissaient au sein de l'ensemble des départements
ministériels et représentaient plus de 650 milliards de
francs en 1999, soit près de 39 % des dépenses du budget
général, nettes de remboursement et dégrèvements.
Il a précisé que l'examen de ces crédits conduisait
à se poser deux questions : comment l'Etat gère-t-il ses charges
de personnel et celles-ci sont-elles maîtrisées ? Comment l'Etat
fait-il évoluer ses structures, conformément au principe de
" mutabilité " du service public, et cela afin de fournir aux
usagers des services publics les meilleures prestations ?
Il a rappelé que les crédits du ministère chargé
de la fonction publique représentaient 1,4 milliard de francs et
comportaient des dépenses de personnel exclusivement constituées
de prestations d'action sociale interministérielle ou
d'opérations d'action sociale.
Il a indiqué que la diminution de ces crédits de personnel
était due principalement -à hauteur de 230 millions de
francs- à la suppression de la provision destinée, dans le projet
de loi de finances pour 1998, à accompagner la négociation
salariale dans la fonction publique. Elle a été
transférée, sans justification, au sein du titre V
" dépenses en capital " pour un montant fixé dans le
projet de loi de finances pour 1999 à 255 millions de francs.
Les dépenses de fonctionnement représentent 343,95 millions
de francs, en progression de 4,46 % et correspondent aux subventions
destinées aux écoles (ENA, IIAP -Institut international
d'administration publique-, et IRA -instituts régionaux
d'administration).
Il a par ailleurs précisé que, outre les dépenses
d'investissement du fonds pour la réforme de l'Etat (5 millions de
francs), les dépenses en capital correspondaient à
255 millions de francs destinés à des
" équipements en faveur de l'action sociale
interministérielle ". Il s'agit en réalité des
crédits qui figuraient dans le projet de loi de finances pour 1998 au
sein du titre III et étaient destinés en tant que
" provision exceptionnelle non reconductible " à accompagner
les négociations salariales dans la fonction publique (accord du
10 février 1998). Il a rappelé que la commission
s'était opposée, l'année dernière, à
l'adoption de ces mesures et que le rapporteur spécial des
crédits des services généraux du Premier ministre avait
également déposé un amendement de suppression, auquel il
s'associait.
Puis, il a présenté, de façon plus
générale, l'évolution des charges de personnel de l'Etat.
Il a relevé que, en 1999, les dépenses de fonction publique
progressaient de 6,8 % et dépassaient le seuil de 650 milliards de
francs, pour atteindre 652,1 milliards, soit 38,7 % du budget
général, contre 38,1 % en 1998.
Cette progression était principalement due, outre les effets de la
budgétisation de 14.822 millions de francs de pensions des
fonctionnaires de La Poste et les conséquences de la
professionnalisation des armées, aux conséquences de l'accord
salarial du 10 février 1998 dont le coût en 1999 pour le
budget de l'Etat a été chiffré à
14,8 milliards ; aux mesures catégorielles et aux transformations
d'emplois (1,9 milliard) ; à l'impact du
" GVT-solde " (3,7 milliards), ainsi qu'à la
dérive spontanée des dépenses de pensions
(5,85 milliards).
Il a également rappelé que la fonction publique de l'Etat
induisait des dépenses qui allaient au-delà de celles
liées aux fonctionnaires. Les dépenses totales, y compris les
subventions à l'enseignement privé, les pensions des anciens
combattants et les charges de personnel du budget de l'aviation civile
étaient, en 1999, de 717,4 milliards, en augmentation de 6,2 %.
En outre, il a souligné que la dépense " induite "
était liée à plus de 91 % à l'évolution du
point " fonction publique ". De ce fait, plus de 38 % des
dépenses du budget général de l'Etat étaient
indexées sur le point " fonction publique ".
Puis
M. Gérard Braun
a présenté ses principales
observations sur les crédits de la fonction publique et de la
réforme de l'Etat. Il a tout d'abord tenu à souligner que les
dépenses de la fonction publique échappaient au contrôle du
Gouvernement et présentaient une très forte inertie.
Il a indiqué qu'en 1998, les créations d'emplois civils avaient
repris, avec un solde positif de 621 emplois et que, pour 1999, le
Gouvernement affichait un solde nul : 2.358 créations de
postes civils compensées par autant de suppressions.
Il a souligné qu'il était cependant possible de diminuer les
effectifs nets de la fonction publique, sans pour autant perturber le bon
fonctionnement des services publics, comme le ministère de
l'économie en donnait lui-même l'exemple en baissant de 0,4 % les
effectifs budgétaires, soit 695 emplois, grâce à des
progrès de productivité.
Il a également relevé la très grande difficulté
d'arriver à chiffrer précisément les effectifs
réels de la fonction publique, la notion d'effectif budgétaire ne
rendant qu'imparfaitement compte de la réalité.
A propos des rémunérations des fonctionnaires de l'Etat, il a
souligné qu'entre 1990 et 1998, elles avaient progressé de
5 % par an, soit un gain annuel de pouvoir d'achat de 3,2 %, qui
était de plus de deux fois celui dont avaient
bénéficié les salariés du secteur privé.
M. Gérard Braun
a rappelé que l'accord salarial du
10 février 1998 coûterait à l'Etat, en 1999, 14,8
milliards de francs et se traduirait par un accroissement du pouvoir d'achat
des fonctionnaires, comme le souligne le rapport sur les
rémunérations publiques annexé au présent projet de
loi de finances, et non par une simple " préservation ", selon
les termes du ministère de la fonction publique.
Il a souligné que cet accord induisait une rigidité croissante
dans les dépenses publiques : ainsi une revalorisation de 1 %
du point fonction publique représentait un coût de
6,3 milliards de francs pour l'Etat et avait également des effets
sur les autres fonctions publiques et les dépenses induites. Le
coût total net, en ce cas, était de 11,2 milliards de francs.
Cet accroissement du poids des dépenses de rémunération ne
ferait que renforcer une situation relevée à de nombreuses
reprises par la Cour des Comptes.
Par ailleurs, il a souligné que les contours de l'emploi public
devenaient plus flous. En effet, plus d'un actif sur cinq est concerné
par le champ de la négociation salariale puisque, au-delà des
2,1 millions d'agents civils de l'Etat et de ses établissements
publics, il faut comptabiliser dans l'emploi public : les
460.000 agents des exploitants publics de la Poste et de France Telecom,
les 295.000 militaires (hors appelés du contingent), les
1,323 million d'agents de la fonction publique territoriale, les
681.000 agents de la fonction publique hospitalière, ainsi que
146.000 enseignants des établissements privés sous contrat
et 125.000 salariés des établissements de santé
privés à but non lucratif, tarifés en dotation globale.
Il a relevé que c'était la totalité de cette population
qui était concernée par la négociation salariale dans la
fonction publique, même si seule une partie de ses effets apparaissait
dans le budget de l'Etat. Il s'est par ailleurs inquiété de la
probable pérennisation des emplois-jeunes. En effet, les agents
employés par l'Etat, les collectivités territoriales et les
établissements hospitaliers ne l'étaient pas sous le même
statut : outre le " noyau dur " constitué des
titulaires, le solde était constitué de non titulaires tandis
qu'existe un troisième cercle d'agents. Ce dernier comprend, outre des
personnes bénéficiaires de contrats emploi solidarité,
dont le nombre est supérieur à 200.000, les
" emplois-jeunes " qui peuvent être considérés
comme des emplois publics, puisque l'Etat prenait en charge 80 % de leur
rémunération, et même 100 % pour ceux qui sont
recrutés par le ministère de l'intérieur ou de
l'éducation nationale.
M. Gérard Braun
a rappelé que cela représenterait
250.000 emplois à la fin de 1999 et 350.000 en l'an 2000
qui relèveront d'un statut quasi-public, conformément d'ailleurs
au souhait exprimé par le rapporteur spécial des crédits
de la fonction publique à l'Assemblée nationale, mais
également par le ministre de l'éducation nationale lors de son
audition par la commission.
Enfin, évoquant les retraites publiques, il a souligné que
celles-ci connaîtraient une " explosion programmée " en
raison d'une dérive forte et rapide du coût budgétaire. En
effet, si le coût brut des pensions était de 179,9 milliards
de francs en 1999, en progression de 4,8 % par rapport à 1998,
compte tenu des évolutions démographiques, le surcoût
était estimé à 79 milliards de francs dès 2010
par les services du ministère de l'économie.
Au travers des réflexions menées notamment par le Commissariat
général du Plan, il a indiqué que l'on pouvait esquisser
quelques pistes en ce domaine afin de faire face à cette
dérive : allongement de la durée de cotisation, prise en
considération des rémunérations accessoires ou
création d'une caisse autonome de financement de ces pensions.
Il a rappelé qu'en tout état de cause, il est indispensable
d'agir rapidement en ce domaine, puisque les premières
difficultés apparaîtront dès 2005 et qu'une première
étape consisterait à clarifier la situation en disposant à
l'image du rapport sur les rémunérations publiques joint au
présent projet de loi d'un document budgétaire " ad
hoc ". Il a ainsi souhaité que soit publié un " jaune
budgétaire " spécifique sur cette question.
Enfin, s'agissant de la réforme de l'Etat, de ses contours et de sa
portée, il a évoqué les
" valses-hésitations " du Gouvernement, en ce domaine. En
effet, après 18 mois de fonctionnement, ses orientations
n'apparaissent pas clairement, et on semble en rester au stade des
" déclarations d'intention ".
Il a tout d'abord souhaité que se poursuivent les réformes mises
en place, telles que la déconcentration. Il apparaissait
nécessaire de mettre fin à la situation qui faisait que 4 %
des agents des administrations centrales de l'Etat géraient encore un
tiers des crédits et prenaient toujours un quart des décisions
administratives individuelles. Il a par ailleurs évoqué la
question de la gestion patrimoniale de l'Etat ainsi que la nécessaire
modernisation de la gestion de la fonction publique, indiquant que trois
chantiers, au moins, devaient absolument être poursuivis : les
fusions de corps administratifs, l'enrichissement de la procédure de
notation et l'élargissement de la mobilité des fonctionnaires qui
pourrait conduire à l'avènement de " métiers "
au sein de la fonction publique. S'agissant de la formation et de l'ouverture
vers l'étranger des fonctionnaires, il a souhaité le
développement de la mobilité à l'étranger des
fonctionnaires français et que l'accentuation de la nécessaire
dimension européenne de la formation professionnelle. Il s'est par
ailleurs étonné qu'aucun crédit ne soit prévu en
1999 pour les opérations de délocalisation :
l'activité pour cet exercice budgétaire du fonds de
délocalisation était donc totalement dépendante d'un
éventuel abondement en loi de finances rectificative ou de reports de
crédits.
En conclusion, il a souligné que le Gouvernement tardait à
afficher ses priorités. La seule certitude claire était l'absence
de maîtrise de la négociation salariale, dont les effets pour les
finances publiques seraient très lourds. Néanmoins,
évoquant l'aménagement du temps de travail au sein de la fonction
publique, il a rappelé que la réflexion devait s'engager à
effectif constant. L'aménagement du temps de travail devait se traduire
non par un accroissement des effectifs de la fonction publique, mais par une
plus grande souplesse dans la gestion des horaires et, partant, une plus grande
efficacité au service des usagers des services publics. Par ailleurs,
s'agissant de la situation des hauts fonctionnaires, il importait de leur
assurer une progression de carrière motivante et une mobilité
accrue entre départements ministériels. A défaut se
développerait la " fuite des cerveaux " de la fonction
publique, phénomène qui serait particulièrement
préjudiciable au bon fonctionnement des services publics.
Il s'est enfin interrogé sur les traductions concrètes de la
circulaire du Premier ministre en date du 3 juin 1998 qui mettait en place
un programme pluriannuel de modernisation de l'administration, sur
l'état d'avancement de l'examen du projet de loi sur les droits des
citoyens dans leurs relations avec les administrations et souhaité que
le ministre puisse définir quel serait le rôle de la
délégation interministérielle à la réforme
de l'Etat qui venait de remplacer le Commissariat à la réforme de
l'Etat.
En conclusion, et sous réserve de ces observations,
M. Gérard
Braun, rapporteur spécial,
s'est déclaré favorable
à l'adoption des crédits concernés.
M. François Trucy
a tenu à remercier
M. Gérard Braun pour la qualité de sa présentation,
s'agissant d'un problème aussi complexe. A propos du financement des
retraites, il a par ailleurs évoqué les conséquences
budgétaires, pour l'Etat, du changement de statut de France
Télécom ainsi que, pour l'avenir, de celui d'EDF, de la SNCF ou
de la Poste.
M. Denis Badré
a souhaité obtenir des précisions
sur les modalités de calcul de la progression des dépenses de
retraite ainsi que des compléments d'information quant au nombre de
corps existant au sein de la fonction publique ou les perspectives de fusion de
certains d'entre eux.
Il
a par ailleurs déclaré partager le sentiment du
rapporteur spécial quant à l'inertie du Gouvernement en
matière de réforme de l'Etat et souhaité que se
développent tant la formation aux questions communautaires que la
participation de fonctionnaires français aux instances
décisionnelles de l'Union européenne.
En réponse à M. Roger Besse qui s'inquiétait de la
mise en place des 35 heures au sein de la fonction publique,
M.
Gérard Braun
a indiqué qu'elle ne devait pas entraîner
de création de postes et qu'en tout état de cause, il
était nécessaire de procéder au préalable à
un état des lieux précis de la situation, eu égard
à la spécificité de la fonction publique.
M. Gérard Braun
a par ailleurs précisé à M.
Denis Badré que le surcoût en termes de dépenses de
fonctionnement de la double localisation de l'ENA pouvait être
estimé à 16 millions de francs par an, mais qu'il ne
souhaitait cependant pas, à titre personnel, que celle-ci soit
" relocalisée ".
Puis, la commission
a adopté le rapport de
M. Gérard
Braun.
ANNEXES
Annexe
1
LES COMPOSANTES DE LA RÉMUNÉRATION DES FONCTIONNAIRES
I - LE
TRAITEMENT
Le traitement annuel brut est obtenu en multipliant l'indice majoré
correspondant à l'échelon du grade détenu par le
centième de la valeur annuelle du traitement afférent à
l'indice 100 majoré (328,28 francs au 1er avril 1998).
Les retenues sur traitement :
- la retenue pour pension : 7,85 % du traitement brut à
l'exception d'indemnités de toute nature ;
- la CSG : 7,5 % sur 95 % de la rémunération brute
totale (traitement brut et indemnités) ; son accroissement depuis
1997 a été compensé par une indemnité
exceptionnelle destinée à éviter toute baisse de
rémunération nette ;
- la CRDS : 0,5 % sur 95 % de la rémunération
brute totale ;
- la contribution exceptionnelle de solidarité : 1 % de la
rémunération (primes comprises) du fonctionnaire, nette de
retenue pour pension. Elle est affectée au Fonds de solidarité
qui finance notamment l'ASS et l'AI.
II - LES COMPLÉMENTS DU TRAITEMENT
L'indemnité de résidence : elle est calculée
sur la base des traitements soumis aux retenues pour pension en fonction d'un
taux fixé suivant des zones territoriales (de 0 à 3 %), et a
été progressivement intégrée au traitement.
Dans la première zone (taux de 3 %), le montant mensuel
afférent au traitement moyen est de 375,87 francs par mois.
Le supplément familial de traitement (SFT) : il est
alloué en sus des prestations familiales de droit commun et est inclus
dans l'assiette de l'IRPP.
Il se compose d'un élément fixe annuel et d'un
élément proportionnel calculé en pourcentage du traitement
et en fonction du nombre d'enfants à charge. Il est de 15 francs
mensuels pour un enfant à charge et pour deux enfants de
436,03 francs à 657,61 francs par mois. 880.617 agents de
l'Etat, soit 35,2 % des effectifs en bénéficient en 1997.
Les bonifications indiciaires : il s'agit, soit d'attribution de
points d'indice majoré s'ajoutant au traitement principal
destinés à des fonctionnaires d'un corps ou d'un grade
donné, soit de la nouvelle bonification indiciaire (NBI) qui a
été mise en place par l'accord du 9 février 1990, et
correspond à certains emplois nécessitant une technicité
particulière ou l'exercice de responsabilités.
Elles ne sont plus versées dès que le fonctionnaire n'exerce
plus les fonctions y ouvrant droit.
III - LES RÉGIMES INDEMNITAIRES DES FONCTIONNAIRES DE L'ETAT
Prévus par un texte législatif ou réglementaire, ceux-ci
sont très divers, rendant leur approche exhaustive difficile. Des
dispositions similaires existent également pour les fonctionnaires
territoriaux et les personnels de la fonction publique hospitalière.
L'indemnité pour travaux supplémentaires : elle est
soit horaire, notamment pour les agents rémunérés sur un
indice brut inférieur ou égal à 380, ou forfaitaire. Son
montant varie selon le grade et est généralement plafonné.
Les indemnités pour sujétions spéciales : ces
régimes sont très divers et très complexes, qu'il s'agisse
de l'indemnité pour responsabilités pécuniaires, pour
risques, pour conditions de travail, etc...
Les primes de rendement et de productivité : elles sont
attribuées en principe en fonction de la valeur et de l'action de chaque
agent, mais coexistent avec de très nombreux régimes particuliers.
Les primes de qualification et de technicité : ces primes
spécifiques bénéficient aux agents exerçant des
fonctions exigeant un niveau de qualification ou de technicité
particulier.
Les indemnités d'enseignement et de jury : très
diverses, elles dépendent du nombre d'heures consacrées, de la
nature de l'enseignement dispensé, du niveau moyen des
élèves.
Les indemnités diverses : il s'agit notamment des
indemnités de décentralisation, de mutation, de
délocalisation, qui sont versées en sus des indemnités de
changement de résidence et sont généralement de
caractère forfaitaire.
IV - LES INDEMNITÉS REPRÉSENTATIVES DE FRAIS ET VACATIONS
Les indemnités représentatives de frais sont liées
aux frais engagés par le fonctionnaire dans l'exercice de ses fonctions,
notamment à l'occasion de ses déplacements (indemnités de
repas, de nuitées) ou en cas de changement de résidence.
Les vacations sont destinées aux collaborateurs occasionnels de
commissions, conseils, ou en cas d'expertise, de consultations
médicales, de travaux d'entretien.
Source : Rapport sur les rémunérations publiques - PLF 1999
Annexe
2
LA MESURE DE LA PROGRESSION DES RÉMUNÉRATIONS PUBLIQUES
Deux instruments existent afin de mesurer l'évolution des
rémunérations publiques : la rémunération
moyenne des personnels en place (RMPP) et le salaire moyen par tête (SMPT)
I - LA RMPP EST UNE NOTION SALARIALE QUI PERMET DE MESURER UN POUVOIR
D'ACHAT MOYEN
La progression de la RMPP mesure l'évolution de la fiche de paye
moyenne des fonctionnaires en place. Elle est calculée sur les effectifs
présents sur deux exercices consécutifs.
Elle intègre en effet les facteurs suivants qui contribuent à la
hausse des rémunérations des agents :
- l'effet en moyenne des mesures générales (revalorisation du
point fonction publique, attribution uniforme de points d'indice ou de prime
exceptionnelle) ;
- les mesures catégorielles qui sont ciblées sur certains
groupes d'agents (réformes statutaires, revalorisations
indemnitaires) ;
- le GVT (Glissement Vieillissement Technicité) positif ou " effet
de carrière ", autrement dit l'effet positif des avancements
d'échelons et des promotions de grades ou de corps, hors incidence
directe des mesures catégorielles.
II - LE SMPT EST UNE NOTION FINANCIÈRE ET BUDGÉTAIRE, QUI
PERMET D'ANALYSER L'ÉVOLUTION DE LA DÉPENSE
La progression du SMPT mesure
l'évolution de la masse salariale
à effectifs constants.
Autrement dit, elle rend compte de
l'évolution du coût moyen d'un agent.
Celle-ci est la résultante de la progression des salaires des agents en
place, mesurée par la RMPP, et de l'effet de la modification de la
structure des rémunérations induit par les mouvements
d'entrées et de sorties (effet entrées-sorties), principalement
lié à la différence de niveau de
rémunération entre les agents qui quittent la fonction publique
en fin de carrière et les agents qui débutent. Cet effet est
généralement négatif, bien qu'il comptabilise
également en sens inverse le remplacement d'agents peu qualifiés
par de jeunes agents plus diplômés. Le niveau de l'effet
entrées-sorties est actuellement à - 1,3 %.
La somme du GVT positif pris en compte dans le calcul de la RMPP et de l'effet
entrées-sorties est dit GVT solde.
Source : Rapport sur les rémunérations publiques - PLF 1999
Annexe
3
LES RÉMUNÉRATIONS ANNEXES DES FONCTIONNAIRES CIVILS
Au
total, en 1996, les rémunérations annexes ont
représenté en moyenne 17 % du traitement brut des
fonctionnaires civils.
Les cadres et professions intellectuelles supérieurs dans leur ensemble
perçoivent en moyenne des rémunérations annexes à
hauteur de 17 % de leur traitement. Les employés et ouvriers
bénéficient d'un taux moyen de 21 % essentiellement
lié aux sujétions et contraintes particulières auxquelles
ils sont soumis. La moyenne des rémunérations annexes
perçues par les agents des professions intermédiaires est, en
proportion, un peu plus faible (14 %).
|
Traitement brut |
Primes |
|
Catégories socioprofessionnelles |
de base |
Montant |
Taux (en %) |
Cadres et professions intellectuelles supérieures |
187.903 |
32.621 |
17 |
Cadres |
194.059 |
71.269 |
37 |
Personnels de direction |
322.785 |
123.162 |
38 |
Magistrats |
228.787 |
87.447 |
38 |
Administrateurs et assimilés |
237.673 |
107.483 |
45 |
Attachés et inspecteurs |
166.257 |
50.425 |
30 |
Ingénieurs des grands corps techniques |
225.404 |
87.849 |
39 |
Professeurs, professions scientifiques et culturelles |
186.674 |
24.910 |
13 |
Professeurs d'université et assimilés |
317.900 |
30.829 |
10 |
Professeurs agrégés |
217.015 |
51.789 |
24 |
Professeurs certifiés et assimilés |
170.471 |
20.844 |
12 |
Professions intermédiaires |
139.223 |
19.551 |
14 |
Professeurs de collège titulaires |
154.707 |
23.701 |
15 |
Secrétaires administratifs et contrôleurs |
123.184 |
28.785 |
23 |
Maîtrise ouvrière |
110.892 |
13.721 |
12 |
Employés et ouvriers |
102.930 |
21.308 |
21 |
Personnel de la police et des prisons |
117.899 |
39.084 |
33 |
Personnels de service de catégorie C |
89.337 |
5.693 |
6 |
Personnels de service de catégorie D |
78.808 |
14.848 |
19 |
Ensemble |
149.236 |
25.496 |
17 |
Source : Rapport sur les rémunérations publiques - PLF 1999
1
Institut International d'Administration
Publique
2
Instituts Régionaux d'Administration
3
Les crédits relatifs aux délocalisations
figurent aux chapitres 37-07 (dépenses diverses) et 57-01
(dépenses immobilières)
4
Conseil Supérieur de la Fonction Publique de l'Etat
5
Direction Générale de l'Administration et de la
Fonction Publique
6
C'est-à-dire hors budgets annexes et comptes
spéciaux du Trésor.
7
Compte tenu de la budgétisation de 14,8 milliards de francs
au titre des pensions des fonctionnaires de La Poste
8
In dossier de presse de présentation du PLF 1999,
rubrique "dépenses" page 19.
9
Ces deux modes de présentation sont présentés
et détaillés dans l'annexe n° 2.
10
Ce ne sont pas des contrats de droit public : ils ne peuvent
pas être directement conclus par les services de l'Etat : toutefois
de nombreux CES le sont par les collectivités territoriales et par les
établissements publics, ce qui aboutit à les considérer
comme des CES "Fonction publique"
11
Soit 93.840 francs par an et par emploi, depuis le 1er
juillet 1998