Rapport général n° 85 (1997-1998) de M. Emmanuel HAMEL , fait au nom de la commission des finances, déposé le 20 novembre 1997

Disponible au format Acrobat (1,2 Moctet)

N° 85

--

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998

Annexe au procès verbal de la séance du 20 novembre 1997.

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi de finances pour 1998, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Alain LAMBERT,

Sénateur,

Rapporteur général.

TOME III

LES MOYENS DES SERVICES ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES

(Deuxième partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 17

EMPLOI ET SOLIDARITÉ :

I. - EMPLOI

Rapporteur spécial : M. Emmanuel HAMEL

(1) Cette commission est composée de : MM. Christian Poncelet, président ; Jean Cluzel, Henri Collard, Roland du Luart, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Philippe Marini, René Régnault, vice-présidents : Emmanuel Hamel, Gérard Miquel, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires : Alain Lambert, rapporteur général ; Philippe Adnot, Bernard Angels, Denis Badré, René Ballayer, Bernard Barbier, Jacques Baudot, Claude Belot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Guy Cabanel, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Yvon Collin, Jacques Delong, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Marc Massion, Michel Mercier, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Oudin, Maurice Schumann, Henri Torre, René Trégouët.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (11ème législ.) : 230, 305 à 310 et TA. 24.

Sénat : 84 (1997-1998).

Lois de finances

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

La dépense pour l'emploi, comprenant les charges d'indemnisation du chômage et le financement des mesures d'intervention volontaristes sur le marché du travail a dépassé, depuis 1993, le niveau de 4 % du produit intérieur brut, ce qui représentait un peu moins de 300 milliards de francs il y a 3 ans.

L'effort budgétaire soutenu de l'État ne parvient pas, hélas, à enrayer la montée du chômage, qui touche aujourd'hui 12,5 % de la population active.

Dans ce contexte, le projet de budget de 1998 doit être examiné au regard de la situation actuelle du marché du travail (chapitre 1er), avant d'être analysé par grandes catégories de dépenses (chapitres II à VI).

Votre rapporteur souligne que les documents budgétaires relatifs à l'emploi devront absolument, pour l'information du Parlement, être rendus plus lisibles à l'avenir afin de pouvoir identifier des actions au sein des chapitres, et de redéfinir des "agrégats" correspondant à des politiques.

CHAPITRE PREMIER - UN BUDGET DE PARI

Le budget de l'emploi progresse près de trois fois plus vite que le budget de l'État dans son ensemble en 1998. C'est un budget de pari politique, face à une situation de chômage très inquiétante.

I. UN DIXIÈME DU BUDGET DE L'ÉTAT

En 1998, les crédits du ministère de l'emploi et de la solidarité -section Emploi- s'élèvent à 112,6 milliards de francs, en augmentation de 9,3 %.

Compte tenu des dotations inscrites pour l'emploi au budget des charges communes, les crédits consacrés à l'emploi s'élèvent en fait à 155,6 milliards de francs, en progression de 3,8 % par rapport à 1997, et représentent un peu moins de 10 % des dépenses du budget général.

Évolution des crédits pour l'emploi de 1997 à 1998

Budgets de l'emploi et des charges communes

(en millions de francs)


• Le titre III
comporte les moyens de fonctionnement du service public de l'emploi : pour l'essentiel le ministère du travail et l'Agence nationale pour l'emploi. Ces crédits sont en diminution en 1998, du fait de la non-reconduction des dépenses liées aux élections prud'homales.


• Le titre IV
regroupe les crédits du ministère consacrés aux mesures pour l'emploi (stages, contrats aidés...) qui progressent très vivement en 1998 du fait de l'inscription de 8 milliards de francs de crédits destinés aux "emplois-jeunes".

Il faut y ajouter les crédits du chapitre 44-75 des charges communes, intitulé : "mesures exceptionnelles en faveur de l'emploi et de la formation professionnelle", ces mesures prenant la forme exclusive de la compensation d'exonérations de charges sociales. La diminution de ces crédits en 1998 reflète la décision prise de freiner l'allégement des charges sur les bas salaires. En effet, le projet de loi de finances pour 1998 prévoit de "reproratiser" cet allégement en fonction du temps travaillé, de ramener de 1,33 à 1,3 SMIC le plafond des salaires concernés, enfin de geler le SMIC au niveau de 1997 pour le calcul de la ristourne de cotisations sociales.


• Le titre V
retrace les investissements pris directement en charge par l'État. La dépense concerne principalement les services déconcentrés, et l'augmentation de 1998 s'explique par une nouvelle clé de répartition des autorisations de programme en crédits.


• Le titre VI
retrace les subventions d'investissements accordés dans le cadre des contrats de plan État région, ou bien à l'AFPA et à l'ANPE.

II. UNE SITUATION DU CHÔMAGE CRITIQUE

A. UNE PROGRESSION CONTINUE DU CHÔMAGE

La "barre" des 3 millions de chômeurs a été franchie au mois de mars 1993.

En septembre 1997, 3.561.600 personnes étaient recensées comme demandeurs d'emploi, ce qui représente un taux de chômage de 12,5 % , en progression de 3,6 % sur l'année écoulée.

Ce taux maintient la France à un très mauvais rang au sein des pays de l'OCDE.

B. LE RÉSULTAT DE L'INSUFFISANCE DE CRÉATIONS D'EMPLOIS

L'aggravation du chômage depuis 20 ans est due au retard considérable des créations d'emplois par rapport à la croissance de la population active. Les "fiches de diagnostic" destinées aux partenaires sociaux participants à la préparation de la Conférence nationale sur l'emploi, les salaires et le temps de travail du 10 octobre 1997, ont parfaitement décrit ce phénomène :

"Entre 1973 et 1996, la population active est passée de 22.210.000 à 26.250.000, est s'est donc accrue de plus de 4 millions (+ 180.000 par an). La plus grande partie de ce supplément potentiel d'actifs (2.550.000, soit 62 %) est allée gonfler le chômage en raison du dynamisme insuffisant de l'emploi. Un peu plus de 700.000 -soit 17 % de l'ensemble se retrouvent en dehors de l'activité, par exemple dans le cadre de dispositifs de formation ou de cessation anticipée d'activité. Le reste -près de 900.000, 21 %- correspond à la progression de l'emploi. Cette progression recouvre deux mouvements en sens opposé : la hausse du nombre de salariés (environ +2,2 millions), et le recul des emplois non salariés (-1,3 million)".

Pour 1997, l'INSEE estimait en juillet dernier la croissance de l'emploi à + 0.5 %.

C. UNE DIFFUSION GÉNÉRALE DU CHÔMAGE

Le chômage ne reste plus concentré sur les travailleurs non qualifiés, fragilisés par les restructurations industrielles.

Entre 1990 et 1997, comme le souligne le rapport économique, social et financier associé au projet de loi de finances pour 1998, "la hausse du nombre des demandeurs d'emploi en fin de mois s'explique ainsi, pour 88 %, par des nouveaux chômeurs qualifiés (employés qualifiés, ouvriers qualifiés, techniciens et agents de maîtrise et cadres dans une moindre mesure), les non qualifiés ne contribuant à cette augmentation que pour 12 %. En parallèle, le poids des diplômés (titulaires de CAP, BEP, BEPC, niveau baccalauréat et baccalauréat + 2, voire grande école ou 2ème cycle) dans le chômage total est passé de 14 % en 1990 à plus de 27 % aujourd'hui."

Cette évolution est confirmée par les derniers chiffres du chômage : de septembre 1996 à septembre 1997, seul a progressé de façon identifiée le chômage des employés qualifiés, agents de maîtrise, techniciens et cadres.

D. DES CATEGORIES PARTICULIÈREMENT FRAGILES

1. Le poids du chômage des jeunes

En septembre 1997, 650.300 jeunes de moins de 25 ans étaient recensés comme demandeurs d'emplois. Ce chiffre est en recul, de 7,3 % depuis un an, notamment sous l'effet du succès des contrats de formation en alternance.

Toutefois, la part des jeunes ayant un emploi reste faible : 21,5 % pour les 15-24 ans, contre 38,3 % en moyenne dans l'Union européenne.

Ce phénomène est dû à un taux de chômage plus important des jeunes français, mais aussi à une scolarité plus longue que dans les autres pays européens.

2. La situation précaire des plus de 50 ans

En septembre 1997, ce sont 393.600 personnes de 50 ans et plus qui étaient recensées comme demandeurs d'emploi, ce chiffre ayant progressé de près de 9 % en un an.

Cette situation est évidemment préoccupante, les difficultés de retrouver un emploi augmentant manifestement après 50 ans, alors que les dispositifs de préretraites ne s'adressent qu'aux personnes de plus de 55 ans.

3. L'aggravation de la situation des chômeurs de longue durée

En septembre 1997, on recensait 1.145.600 demandeurs d'emploi inscrits depuis plus d'un an, ce chiffre ayant progressé de 8,2 % en un an.

Le nombre de chômeurs de très longue durée est resté important. En septembre 1997, on recensait ainsi :

651.400 demandeurs d'emploi d'ancienneté comprise entre 1 et 2 ans

242.100 demandeurs d'emploi d'ancienneté comprise entre 2 et 3 ans

252.100 demandeurs d'emploi d'ancienneté supérieure à 3 ans.

III. DES OBJECTIFS BUDGÉTAIRES CIBLES POUR 1998

A. PAS DE PRÉVISIONS RELATIVES AU CHÔMAGE

Selon les informations fournies à votre rapporteur. " Il n'y a pas de prévisions d'évolution du chômage ou de la population active dans le rapport économique et financier, et donc pas d'hypothèses de ce type jointes au budget. Des prévisions de population active peuvent toutefois être réalisées grâce à des travaux (INSEE et ministère du travail, et des Affaires sociales). Par contre, le projet de budget intègre des prévisions sur le nombre de bénéficiaires de mesures de politique de l'emploi.

De fait, seules sont affichées des prévisions de croissance de population active et des objectifs de mesures pour l'emploi.

1. Une progression stable de la population active

La population active augmente à un rythme assez stable autour de 165.000 personnes par an, qui devrait se maintenir jusqu'en 2000.

L'activité repose de plus en plus sur les classes d'âge centrales de 25 à 55 ans qui constituent un peu plus de 80 % des actifs, proportion qui s'accroît d'année en année. Les jeunes et les plus âgés représentent chacun un peu moins de 10 %.

2. Des perspectives incertaines pour l'emploi

Ni les documents associés à la loi de finances -rapport économique, social et financier- ni les "fiches de diagnostic" fournies en préparation de la conférence nationale sur l'emploi n'avancent de prévisions chiffrées sur les créations d'emplois en 1998.

Seul y figure le constat que la croissance est plus "riche en emplois" : le seuil de croissance à partir duquel l'économie créerait des emplois serait ainsi passé d'environ 2 % dans les années 1980 à 1,5 % aujourd'hui.

Toutefois, le gouvernement fait état d'un scénario illustratif de croissance sur la période 1997-2002, qui table sur une croissance moyenne autour de 3 % par an, et qui ne permettrait qu'une baisse du taux de chômage de 12,5 % à 11 % de la population en cinq ans. Un autre scénario, basé sur le maintien "toujours possible de l'attentisme actuel des ménages et des entreprises", montre quant à lui que la croissance serait sensiblement plus faible et que le chômage ne baisserait pas.

B. UNE AUGMENTATION CIBLÉE DES ENTRÉES DANS LES DISPOSITIFS DE LA POLITIQUE DE L'EMPLOI

Le budget de 1998 prévoit une augmentation globale de 16.000 entrées supplémentaires dans les dispositifs de la politique de l'emploi, compte tenu de la création des emplois-jeunes par la loi du 16 octobre 1997

Flux d'entrées dans les dispositifs

Source : Ministère de l'Emploi

L'accent est mis délibérément en 1998 sur les mesures pour les jeunes : + 90.000 entrées par rapport au budget initial de 1997, par rapport aux mesures pour les chômeurs de longue durée (- 50.000) ou pour les publics en difficulté : (- 14.000). Enfin, l'État est moins disposé à participer aux restructurations : - 10.000 entrées dans les mesures de conversion en 1998.

Au total, le budget de l'emploi pour 1998 repose sur un triple pari :

- celui de la croissance à 3 %, plus "riche en emplois", sans que son impact sur le chômage puisse être mesuré ;

- celui des emplois-jeunes, mesure massive financée par l'État destinée à fournir une solution de court terme à une catégorie de chômeurs particulièrement fragile ;

- celui du freinage de l'allégement sur les bas salaires, alors que celui-ci commençait à consolider la situation de l'emploi peu qualifié, et constituait un facteur essentiel de l'"enrichissement" de la croissance en emplois.

CHAPITRE II - LE SERVICE PUBLIC DE L'EMPLOI

Les crédits du service public de l'emploi regroupent les moyens en personnel et fonctionnement du ministère de l'emploi -section emploi- ainsi que les subventions de fonctionnement aux établissements publics -pour l'essentiel à l'ANPE.

Ces crédits représentent moins de 10 % du total des dépenses pour l'emploi : leur progression en 1998 est limitée à 1,13 %.

(en millions de francs)

I. LES MOYENS DE L'ADMINISTRATION DE L'EMPLOI

A. LES DÉPENSES DE PERSONNEL DU MINISTÈRE

Les dépenses de personnel du ministère de l'emploi s'établissent en 1998 à 2,17 milliards de francs, en progression de 4,1 %.

L'augmentation de 74,5 millions de francs des dépenses de rémunérations recouvre notamment :

1) Des créations nettes d'emplois

- la création (+18,7 millions de francs) de 185 emplois de contractuels destinés à régulariser la situation des coordonnateurs emploi formation chargés de s'occuper de l'encadrement des jeunes dans le cadre du "crédit-formation individualisé" (CFI) depuis 1989. Cette régularisation est amorcée comme une première étape, portant sur la moitié des personnes concernées (actuellement, un coordonnateur est en place par bassin d'emploi),

- la création de 25 emplois de catégorie C (+3,1 millions de francs) dans le cadre du plan de résorption de l'emploi précaire dans la fonction publique,

- la création de 15 emplois supplémentaires d'inspecteurs de travail (+ 2,5 millions de francs) destinés à accompagner les nouveaux emplois jeunes et les mesures sur la réduction du temps de travail.

En contrepartie, 50 emplois budgétaires de catégorie sont supprimés (- 5,20 millions de francs).

2) Une revalorisation salariale

L'ajustement des crédits de rémunérations principales, tenant compte notamment de la revalorisation de deux fois 0,5 % du point d'indice en 1997, représente 42,6 millions de francs.

B. LE FONCTIONNEMENT ET L'ÉQUIPEMENT

1. Les dépenses de matériel et fonctionnement

Les dépenses de matériel et fonctionnement progressent de 5 % et atteignent 481,3 millions de francs.

- Les dépenses de statistiques diminuent de 5,6 % et s'établissent à 55,42 millions de francs. On note toutefois une mesure nouvelle de 2 millions de francs nécessaire à la création de l'indicateur mensuel de créations/suppressions d'emplois demandée par le ministre afin de faire coïncider le rythme de suivi conjoncturel de l'emploi et les chiffres du chômage.

- Les dépenses de communication et information diminuent de 2,8 % et s'établissent à 3,3 millions de francs.

- Les moyens de fonctionnement de l'administration centrale progressent de 6 % et atteignent 332,6 millions de francs (mesure nouvelle de 15,5 millions de francs pour le relogement de la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle).

- La dotation globale de fonctionnement des services déconcentrés progresse de 0,7 % et atteint 387,87 millions de francs.

- La dotation du CNASEA qui gère la rémunération des stagiaires de la formation professionnelle, passe de 219,7 à 230,1 millions de francs.

En sens inverse :

- La compensation à l'UNEDIC des frais d'inscription des demandeurs d'emploi passe de 250 millions de francs (budget des charges communes en 1997) à 235 millions de francs.

- Les crédits consacrés aux coordonnateurs emploi formation passent de 115,8 à 79,2 millions de francs du fait de la création des 186 emplois contractuels correspondants.

- Les crédits consacrés aux élections prud'homales passent de 173,6 à 1,1 million de francs, les élections ayant lieu en 1997.

2. Les crédits d'équipement

Les crédits passent de 50,9 à 62,37 millions de francs, en raison de l'adoption d'une nouvelle clé de répartition entre autorisations de programme et crédits de paiement sur deux ans, qui remplace l'ancienne clé sur trois ans.

C. LES SUBVENTIONS DE FONCTIONNEMENT

1. L'Agence nationale pour l'emploi

a) Le contrat de progrès

L'année 1998 sera la dernière année d'application du second contrat de progrès entre l'État et l'Agence. Un rapport effectué à mi-parcours permet de dégager quelques éléments significatifs de bilan.

Le second contrat de progrès entre l'État et l'Agence nationale pour l'emploi

1) Premier axe : "trouver, susciter et satisfaire beaucoup plus d'offres d'emplois"


• La part de marché de l'Agence
doit passer à 40 % des offres avant la fin de l'année 1998 : cet objectif a été quasiment atteint en 1996, mais la part est beaucoup plus importante pour les très petites entreprises (64,4 % en 1995) que pour les grandes : 18,5 % pour celles de plus de 50 salariés.


• Le recueil et le traitement des offres :
l'objectif de 2.400.000 offres d'emploi a été atteint à 97 % dès 1996. Les contrats aidés représentent une proportion stable de 30 % des offres.

2) Deuxième axe : "aider les personnes à mieux chercher et trouver un emploi"

Les objectifs n'ont pas pu être tenus vis à vis des demandeurs d'emploi et des jeunes.


• L'Agence s'était engagée à faire baisser le nombre de chômeurs de longue durée de 50.000 en deux ans (leur nombre s'élevait à 1.048.900 en août 1996). Or, cette baisse n'a été que de 18.642 et s'est interrompue : le nombre total est remonté à 1.143.070 en août 1997.


• L'objectif d'entretien systématique avec les jeunes n'a pas pu non plus être tenu.


• Au total, le nombre de prestations (aide à la recherche d'emploi, évaluation...) a été en augmentation de 13 % en 1996.

3) Troisième axe : développer le partenariat

- Le transfert de l'inscription des demandeurs d'emploi vers les ASSEDIC devrait être achevé à la fin de l'année 1997.

- Au 30 juin 1997, 240 conventions de coopération locale ont été conclues entre l'État, la région, l'ANPE, le réseau des missions locales et PAIO, afin de mettre en place des espaces jeunes.

- Avec l'AFPA une convention nationale a été signée le 4 juillet 1996 pour trois ans afin de favoriser l'articulation entre l'accès à la formation et l'accès à l'emploi.

4) Quatrième axe : la modernisation de l'Agence

L'ANPE a poursuivi sa déconcentration, la modification de son organisation territoriale, la modernisation de la gestion des ressources humaines.

b) Les crédits pour 1998

En 1998, les moyens de fonctionnement consentis à l'Agence sont strictement identiques à ceux de 1997 en francs courants, soit une subvention de 5.204 millions de francs.

En revanche, 18,7 millions de francs sont inscrits en crédits de paiement (soit deux fois moins que les crédits de 1997).

Les effectifs budgétaires ont atteint un plafond en 1997 de 15.463 emplois.

En 1998, les mesures nouvelles arrêtées en matière de personnel, à savoir la création de 70 emplois supplémentaires et la transformation de 300 emplois d'assistants de gestion en conseillers adjoints, seront financés par redéploiements.

Votre rapporteur se félicite de ce que le Gouvernement ait su maîtriser, en 1998, les coûts de fonctionnement de l'Agence, dont les progrès au cours des deux dernières années sont incontestables. Comme l'a souligné Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité lors de son audition le 20 novembre 1998 devant votre commission des finances, il reste maintenant à l'Agence à améliorer grandement la qualité de ses prestations de conseil et d'orientation des demandeurs d'emplois.

2. Les autres organismes

Les subventions aux autres organismes évoluent de la manière suivante :

Évolution des crédits aux autres organismes

Selon les informations fournies à votre rapporteur, la progression des crédits de l'ANACT de 8 millions de francs est liée au développement de l'appui technique aux entreprises "en particulier sur la réorganisation du temps de travail, avec une priorité donnée aux PME".

CHAPITRE III - LA FORMATION ET L'ADAPTATION DES SALARIÉS

Les crédits destinés à la formation et à l'adaptation des salariés se divisent en :

- soutien à la formation professionnelle continue ;

- conversion : soit prévention et accompagnement des licenciements.

Au total, ces crédits progressent de 4,4 % et atteignent 9,4 milliards de francs en 1998.

L'essentiel de cette progression est due aux crédits consacrés à la loi "de Robien" d'accompagnement de la réduction du temps de travail.

A. LA FORMATION DES SALARIÉS

La formation étant décentralisée aux régions, les crédits de formation figurant au budget de l'État sont constitués pour l'essentiel par une dotation de décentralisation, et pour le solde par les actions que l'État a considéré devoir maintenir comme étant d'intérêt national.

L'ensemble de ces crédits progresse de 2 % en 1998.

Évolution des crédits

1. Les actions menées par l'État

a) Le programme national de formation professionnelle

La définition donnée du programme national de formation professionnelle est "un regroupement des actions financées par l'État en application des orientations prioritaires mentionnées à l'article L. 910-2 du code du travail" : celles-ci sont déterminées par un comité interministériel placé auprès du Premier ministre, qui dispose de relais régionaux et départementaux.

Dans les faits, le programme national recouvre essentiellement :

- l'aide à la modernisation des entreprises ;

- le soutien à la formation de catégories prioritaires : ingénieurs, réfugiés, détenus...

La politique contractuelle : 399 millions de francs, soit - 0,2 % en 1998. Cette politique s'appuie sur des contrats d'études prospectives permettent de connaître les perspectives d'emploi à moyen terme, ainsi que sur les engagements de développement de la formation, favorisant les plans de qualification des entreprises, axés prioritairement sur les bas niveaux -le nombre de personnes formées en 1996 a été de près de 200.000, pour une aide de l'État représentant 28 % des coûts de fonctionnement.

Les publics prioritaires

Les crédits progressent de près de 40 millions de francs en 1998 et s'établissent à 1.142,2 millions de francs.

Cette augmentation porte principalement sur :

- le programme "catégoriel" (illettrisme, jeunes détenus, handicapés) : + 12 millions de francs ;

- le programme ingénieurs : + 5 millions de francs.

b) Les contrats de plan État-régions

Les crédits progressent de 13,5 % et s'établissent à 498 millions de francs en 1998 : cette augmentation s'explique par l'étalement sur trois ans des deux dernières années, la dotation de 1998 correspondant à 50 % des crédits restant à déléguer dans le cadre de ces contrats signés pour la période 1994-1999.

2. La dotation de décentralisation aux régions

La dotation de décentralisation aux régions issue de la loi du 7 janvier 1983 évolue selon la norme d'indexation retenue dans le projet de loi de finances pour la dotation globale de fonctionnement : soit + 1,38 % : elle atteint 3.132,8 millions de francs en 1998 (avec la dotation spécifique à Mayotte).

Cette dotation est répartie aux régions selon une clé définie par un décret de 1985.

B. LES MESURES DE CONVERSION

En 1998, les crédits consacrés aux mesures de conversion progressent de 6,6 % et atteignent 5 milliards de francs.

(en millions de francs)

Les principales évolutions concernent

:

- la progression de 11,2 % des crédits de conventions de conversion, dispositif de reconversion de 6 mois ouvert aux salariés licenciés pour motif économique. Le nombre d'entrées prévu est le même que celui de 1997, soit 120.000, mais le prélèvement effectué sur les réserves de l'association de gestion des conventions, de 100 millions de francs en 1997, n'est pas reconduit ;

- la diminution des crédits consacrés aux conventions sociales de la sidérurgie :

- 25 %, ce dispositif évoluant vers une extinction naturelle ;

- la diminution des crédits de chômage partiel (- 8,4 %) justifiée par la diminution des entrées constatée en 1997 ;

- la progression de +10,4% de la dotation déconcentrée de prévention et accompagnement des restructurations, qui permet aux directions départementales d'utiliser plusieurs instruments : chômage partiel, conversion... ;

- l'augmentation de 162 % des crédits consacrés au dispositif "de Robien" qui atteignent 2,13 milliards de francs.

Le dispositif de la loi "de Robien" du 11 juin 1996

La loi du 11 juin 1996 sur l'aide à la réduction du temps de travail comprend deux volets :

- un volet "défensif" de réduction du temps de travail d'au moins 10 % permettant de maintenir des emplois dans des entreprises touchées par des licenciements économiques ;

- un volet "offensif, permettant d'embaucher un salarié dans le cadre de nouveaux horaires réduits de 10 à 15 % ;

- l'allégement des cotisations patronales de sécurité sociale dépend du taux de réduction du temps de travail: si le taux de réduction du temps de travail est de 10 %, l'allégement est de 40 % la première année et de 30 % les 6 années suivantes ; si le taux de réduction est de 15 %, l'allégement est de 50 % la première année et de 40 % les 6 années suivantes.

Ce dispositif rencontre, en 1997, un succès indéniable : 1.062 conventions ont été signées entre janvier et septembre 1997, pour un nombre d'entrées de 109.000.

D'après les informations fournies à votre rapporteur, 400 conventions supplémentaires devraient être signées sur le dernier trimestre, pour un nombre total d'entrées sur l'année 1997 de 145 à 150.000.

Bilan d'application de la loi de Robien.

Incidences sur l'emploi des deux volets du dispositif

Source : Ministère de l'emploi et de la solidarité

Votre rapporteur souligne l'intérêt de la loi de Robien, dispositif souple pourtant destiné à disparaître au profit de la future loi qui imposera les 35 heures dans les entreprises. Il croît utile de comparer l'avantage procuré par les deux dispositifs :

Montant de l'aide pour un salarié au SMIC en 1998

(en francs)

Source : Liaisons sociales, 24 octobre 1997

CHAPITRE IV - L'AIDE AU DÉPART ET L'INDEMNISATION

L'État intervient également vis-à-vis des personnes exclues du marché du travail, sous forme d'indemnisation, à travers trois dispositifs principaux :

- l'encouragement au départ des salariés dans le cadre de plans sociaux ;

- l'indemnisation des chômeurs en fin de droits ;

- le financement aux régimes complémentaires de retraite de l'abaissement de l'âge de la retraite à 60 ans.

En 1998, les crédits destinés à ces mesures diminuent de 4,1 % et s'établissent à 20.2 milliards de francs.

A. LES DÉPENSES D'AIDE AU DÉPART

Évolution des crédits

(en milliards de francs)


• Les "allocations spéciales du Fonds national de l'emploi"
sont les préretraites cofinancées par l'État et les entreprises. La diminution des crédits est due à une prévision de reflux des entrées dans le dispositif (20.000) : ce reflux est lié aux effets de la réforme de 1994 qui a remonté l'âge d'accès au dispositif, et a augmenté les taux de contribution des entreprises. Elle est due également à la volonté de maîtriser les mesures d'âge au sein des plans sociaux, volonté déjà manifestée depuis plusieurs années.


• Les préretraites progressives :
cofinancées par l'État et l'employeur, elles visent à favoriser le passage à mi-temps des salariés âgés d'au moins 55 ans afin d'éviter des licenciements ou permettre des embauches.

En 1998, le nombre de bénéficiaires devrait se stabiliser à la baisse compte tenu de la réforme intervenue au printemps 1997 qui a introduit une participation financière de l'entreprise pour les préretraites progressives accompagnées d'embauchés : 25.000 entrées sont prévues dans le dispositif.

Votre rapporteur souligne le caractère massif des annulations de crédits portant sur ces mesures (plus d'un milliard de francs), associées au collectif de la fin d'année 1997. Il s'interroge sur le calibrage des crédits pour 1998 et souligne la nécessité de dispenser les allocations spéciales du FNE avec beaucoup plus de rigueur dans les plans sociaux.

B. LES DÉPENSES D'INDEMNISATION

Ces dépenses évoluent en 1998 de la manière suivante :


• La subvention à l'Association pour la gestion de la structure financière (ASF), qui correspond à la participation de l'État aux coûts pour les régimes complémentaires de l'abaissement de l'âge de la retraite à 60 ans, s'élève à 708,4 millions de francs, dans le cadre d'une nouvelle convention conclue entre l'État et l'ASF pour trois ans à partir de 1997.

L'ASF

L'Association pour la gestion de la structure financière (ASF) a été fondée par les partenaires sociaux, et déclarée le 31 mai 1983, en application de l'accord du 4 février 1983.

Elle a notamment pour objet de prendre en charge les conséquences de l'abaissement à 60 ans de l'âge d'ouverture du droit à la retraite pour les régimes complémentaires (ARRCO et AG1RC).

Par convention financière du 18 mars 1983, l'État s'est engagé à contribuer, pendant cette durée, à l'équilibre des comptes de la structure financière.

Depuis 1990, date d'échéance de cette convention, l'État a continué à apporter son aide financière à l'association.

L'accord du 23 décembre 1996 a prorogé jusqu'au 31 décembre 2000 le dispositif qui permet de financer l'abaissement à 60 ans de l'âge d'ouverture du droit à la retraite complémentaire dans les régimes ARRCO et AGIRC.

Par convention financière, signée le 28 avril 1997, entre l'État et les partenaires sociaux, la participation financière de l'État est fixée à 700 millions de francs par an (valeur 1997) pour la période du 1er janvier 1997 au 31 décembre 2000.

Les dépenses au titre de l'ASF ont atteint 36,277 millions de francs en 1996.

Pour l'année 1997, les chiffres prévisionnels sont de 38,615 millions de francs.

S'agissant de la participation de l'État, elle s'est élevée à 1.653,71 millions de francs pour 1996. Pour 1997, il est prévu de verser 700 millions de francs. Il a été inscrit au projet de loi de finances pour 1998, 708,40 millions de francs.


• La subvention au Fonds de solidarité qui assure l'indemnisation des chômeurs en fin de droits, cofinancée par la contribution de solidarité des fonctionnaires, progresse de 7,1 %, et s'établit à 8,1 milliards de francs.

L'indemnisation prend essentiellement la forme d'allocation de solidarité spécifique, versée à certains chômeurs en fin de droits quand leurs ressources sont inférieures à 5.180 francs par mois pour une personne seule et 8.141 francs pour un couple. Son montant est de 2.251 francs au taux normal.

L'allocation d'insertion est d'un montant de 1.311 francs et est subordonnée à un plafond de 3.933 francs pour un célibataire. Elle est réservée à certaines catégories de personnes n'ayant pas travaillé.

L'augmentation des crédits en 1998 est justifiée par les informations ainsi fournies à votre rapporteur :

"Les dépenses effectives du Fonds de solidarité se sont élevées à 7.187 millions de francs durant le premier semestre 1997.

Le besoin budgétaire pour 1998 du Fonds de solidarité s'élève à 8.115 millions de francs dans le cadre d'une dépense prévisionnelle égale à 14.135 millions de francs (457.720 bénéficiaires) pour ce qui concerne les allocations de solidarité et à 249 millions de francs pour les allocations d'insertion (15.000 bénéficiaires).

Ces crédits ajoutés aux ressources propres du Fonds de solidarité permettront notamment une revalorisation significative du montant de l'allocation de solidarité spécifique, la précédente revalorisation datant du 1er juillet 1994".

CHAPITRE V - LES PUBLICS "PRIORITAIRES"

Le "bleu" budgétaire des crédits de l'emploi rassemble sous un seul "agrégat" l'ensemble des mesures consacrées aux jeunes, aux demandeurs d'emploi, aux handicapés.

Ces crédits progressent de 17 % en 1998 et atteignent 67,8 milliards de francs. Ils méritent bien sûr d'être analysés en sous-ensembles plus cohérents.

I. LES ACTIONS EN FAVEUR DES JEUNES

Ces crédits progressent de 38,2 % et atteignent 25,6 milliards de francs.

Évolution des crédits

(en millions de francs)

(1) Budget des charges communes pour 1997, transfert au budget du travail en 1998.

1. La formation décentralisée aux régions

La loi quinquennale sur l'emploi du 20 décembre 1993 a organisé une décentralisation progressive de la formation des jeunes :

Le mécanisme de la décentralisation de la formation des jeunes

- le 1er juillet 1994, l'ensemble des formations dites "qualifiantes" ont été décentralisées ;

- les régions ont conclu progressivement des conventions avec l'État pour la décentralisation des formations non qualifiantes, ainsi que les actions d'accompagnement" : bilans, correspondants des jeunes... Au 1 er janvier 1997, seules trois régions (Lorraine, Provence Côte d'Azur et Guyane) demeurent en gestion étatique directe.


• s'agissant des actions qualifiantes, une dotation globale a été calculée en juin 1994 à partir des dépenses exposées par l'État en 1993 (hors Fonds social européen) : elle a été établie à 830,32 millions de francs pour le deuxième semestre 1994.


• la dotation évolue comme la dotation globale de fonctionnement, soit + 1,38 % en 1998, et s'établit donc à 1.797,15 millions de francs,


• en ce qui concerne les actions non qualifiantes, les crédits ont été calculés sur la même base : au 2 e semestre, la dotation a été établie à 561,05 millions de francs.

En 1995, les crédits ont été de 2.467,45 millions de francs, abondé d'une dotation exceptionnelle de 378,7 millions de francs pour un programme destiné à 10.000 jeunes les plus en difficulté.

En 1998, les crédits s'établissent à 1.350,26 millions de francs en fonctionnement, et à 1.255,03 millions de francs, en rémunérations, soit un total de 2.613,3 millions de francs, en diminution de 0,5 %.

Par ailleurs, une enveloppe de rééquilibrage au titre de l'aménagement du territoire s'ajoute à ces dotations : 54,11 millions de francs en 1998, soit une progression à celle de la DGF

2. La formation en alternance

a) Les contrats de qualification

L'aide de l'État à la formation en alternance dans le cadre des contrats de qualification -qui s'effectue à l'école et dans l'entreprise et doit mener à une qualification reconnue- prend la forme d'exonération de charges sociales aux entreprises : la dotation prévue pour 1998 diminue d'un peu moins d'un quart et s'établit à 2.155,5 millions de francs : le nombre d'entrées prévu est de 100.000, pour 130.000 en 1997.

Cette diminution est tout à fait dommageable, pour une mesure dont les entreprises reconnaissent l'intérêt à l'égard de l'insertion professionnelle.

b) Les contrats d'apprentissage

L'aide de l'État aux contrats d'apprentissage prend la forme d'exonérations de l'ensemble des charges sociales sur les contrats et d'aides directes à l'entreprise dans le cadre de la loi du 6 mai 1996 : prime de 6.000 francs par apprenti, et versement d'une indemnité de soutien à la formation (de 10.000 à 12.000 francs).

En 1998, l'ensemble de ces crédits atteint 9.819,66 millions de francs, en progression de 3,3 %, ce qui correspond à 240.000 entrées dans les entreprises, au lieu de 220.000 en 1997.

Cette progression est très appréciable, car elle prolonge l'effort amorcé depuis deux ans.

Toutefois, la dotation afférente aux primes transférées du budget des charges communes au budget de l'emploi fait l'objet d'une réfaction de 400 millions de francs qui devrait être compensée par une contribution versée au budget de l'État par les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA).

Par ailleurs, lors de l'examen du budget par l'Assemblée nationale, le Gouvernement a diminué de 500 millions de francs les crédits d'exonérations sur les contrats d'apprentissage, justifiant cette baisse -qui "gageait" le prolongement du plan textile- par :

- le basculement des cotisations d'assurance maladie sur la CSG pour 400 millions de francs,

- un nouveau prélèvement sur les fonds de l'alternance de 100 millions de francs.

Ces prélèvements inopinés sur les fonds de l'alternance posent un véritable problème du point de vue de l'unité budgétaire. Par ailleurs, ils justifient que soit présentée en même temps que le budget de l'emploi, la situation des fonds de l'alternance, avant et après les prélèvements.

3. Le réseau d'accueil

Les subventions versées par l'État aux missions locales et permanences accueil-information-orientation (PAIO), progressent en 1998 de 1,1 % et atteignent 359,9 millions de francs. La loi quinquennale du 20 décembre 1993 prévoit la transformation de ces structures en "espaces jeunes" où les jeunes peuvent disposer, en un lieu unique, de tous les services proposés par l'État, les régions et l'ANPE.

4. Les emplois jeunes

a) Les caractéristiques générales du dispositif

Le budget de 1998 prévoit l'inscription de 8,050 milliards de francs à un chapitre nouveau 44.01 "Programme en faveur de l'emploi des jeunes" correspondant au financement de la loi du 16 octobre 1997 1 ( * ) : l'État fournit une aide par emploi égale à 80 % du SMIC charges sociales comprises -soit 92.000 francs en 1997- pour des contrats de droit privé conclus avec des associations ou des collectivités locales en vue de répondre à des besoins non satisfaits ou émergents.

Cette aide devrait atteindre 100 % pour les emplois jeunes recrutés directement par l'État à l'Education nationale, ou à l'Intérieur 2 ( * ) .

Financés en 1997 à hauteur de 2 milliards de francs par décret d'avances, les emplois jeunes sont censés compter 50.000 bénéficiaires en 1997 et 100.000 bénéficiaires en 1998. L'objectif est de 350.000 emplois sur cinq ans. En contrepartie, le dispositif des emplois-ville est supprimé (- 0,6 milliard de francs), étant considéré comme devant être absorbé par le dispositif plus général -car non "zone"- des emplois jeunes.

b) Une source de multiples inquiétudes

Lors de l'examen du projet de loi relatif au développement d'activités pour l'emploi des jeunes par le Sénat, les inconvénients du dispositif ont été mis en lumière :

- il s'agit d'une mesure particulièrement coûteuse, puisque l'État prend en charge les emplois jeunes sur la base de 80 % du SMIC avec charges sociales, ce qui représente une aide de 92.000 francs par emploi ;

- il s'agit d'un dispositif qui risque d'apporter une concurrence déloyale à des emplois existants, malgré les assurances données par le Gouvernement : ainsi, il semble acquis que les emplois ville, pourtant ciblés sur les jeunes en difficulté, seront absorbés par les emplois jeunes. Mais cette concurrence risque fort de s'étendre à d'autres emplois aidés, et même aux emplois du secteur privé, étant donné l'avantage financier considérable consenti par l'État pour les emplois jeunes ;

- la transformation de ces emplois à l'issue des cinq ans assurés par l'État donnera lieu à une fonctionnarisation ou à de graves désillusions pour les jeunes concernés ;

- enfin, et surtout, le véritable problème du chômage des jeunes, qui est celui de l'inadaptation de la formation et d'un coût du travail excessif, est en quelque sorte "camouflé" par ce dispositif. Pas totalement toutefois, car il apparaît actuellement que les 350.000 emplois qui devaient être créés pour les jeunes dans le secteur privé restent à l'état de pure annonce.

Au total, cette mesure "phare" du budget de l'emploi suscite de réelles inquiétudes. Au demeurant, il est vraisemblable que le chiffre de 150.000 emplois jeunes en 1998 ne pourra pas être atteint, sauf à exercer une concurrence frontale avec des emplois existants.

II. LES ACTIONS EN FAVEUR DES DEMANDEURS D'EMPLOI

En 1998, ces actions diminuent de 8,1 % pour s'établir un peu en dessous de 36 milliards de francs.

Evolution des crédits

(en millions de francs)

A. LA SUBVENTION À L'ASSOCIATION POUR LA FORMATION PROFESSIONNELLE DES ADULTES

La subvention de fonctionnement de l'AFPA s'établit à 4 milliards de francs, en progression de 0,3 %, pour un établissement comprenant plus de 10.500 salariés.

Votre rapporteur salue ce souci louable d'économie, qui doit inciter l'AFPA à une indispensable rationalisation de sa gestion.

L'année 1998 est la première année d'exécution du contrat de progrès entre l'État et l'AFPA. La signature de ce contrat permis d'établir la subvention de l'Etat sur des bases renouvelées :

(en milliards de francs)

1. La commande publique de l'État

Le contrat de progrès avait pour objet d'inciter l'AFPA à une modernisation, tout en la recentrant sur sa mission de service public. En particulier, l'État s'est engagé à apporter les ressources nécessaires à l'accomplissement de cette mission ; c'est ce que l'on appelle la "commande publique", qui a donné lieu à 63.295 stages en 1994, 71.302 stages en 1995, 71.816 stages en 1996.

2. Le bilan des progrès de l'AFPA

Les indicateurs d'amélioration qualitative de l'AFPA ont donné lieu à une mesure, synthétisée dans les chiffres reproduits ci-après :

Principaux indicateurs de progrès 1994/1996

* Estimation sur capacité théorique 1995

** Les taux du rapport d'activité 1995 (9,8 % pour 1994 et 8,9 % pour 1995) portaient sur l'ensemble des clients de l'AFPA.

*** Formations de 160 heures et plus, homologuées ou référencées, à contenu professionnel, hors départs encours de stage et hors congés individuels déformation.

3. L'adaptation régionale de l'AFPA

Le contrat de progrès prévoit un développement des relations avec les conseils régionaux notamment par la conclusion de conventions tripartites : État, régions, AFPA.

L'AFPA fait état d'un fort développement du volume de ses activités régionales entre 1994 et 1996. Ce fonds aurait été multiplié par 6. Cette croissance s'explique par la décentralisation des programmes jeunes mis en oeuvre précédemment par l'État, mais aussi par les nouvelles conventions signées avec les régions.

À la mi-1997, 3 conventions tripartites ont été conclues (Aquitaine, Languedoc-Roussillon, Provence-Côte d'Azur), et cinq autres devraient être signées avant la fin de l'année 1997.

4. Les crédits pour 1998

Dans la justification des crédits pour 1998, le ministère de l'emploi et de la solidarité fait valoir la poursuite de "la volonté de maintenir l'effort de l'État en faveur de la qualification et de l'emploi de personnes en difficulté, notamment des chômeurs de longue durée."

Par ailleurs, il est précisé que l'AFPA "apportera son appui aux services déconcentrés de l'État pour la mise en oeuvre du programme "nouvelles activités pour le développement de l'emploi des jeunes" en mettant à leur disposition ses moyens et ses compétences".

B. L'ALLOCATION FORMATION RECLASSEMENT

1. Les caractéristiques du régime de l'AFR

L'allocation formation-reclassement (AFR) est un dispositif de prise en charge par l'État et l'UNEDIC du coût de la rémunération des chômeurs bénéficiaires de l'allocation unique dégressive entrant en formation.

Si la durée de la formation excède la durée des droits à l'assurance, une allocation de formation de fin de stage, de même nature et de même montant, est servie jusqu'à la fin de la formation.

Cette mesure doit bénéficier en priorité :

- aux personnes dépourvues de qualification ou peu qualifiées et notamment celles dont l'âge entraîne des difficultés particulières de reclassement :

- aux personnes qui ont besoin d'une nouvelle qualification et parmi ces personnes celles dont les demandes sont présentées dans les meilleurs délais.

La convention d'assurance chômage du 1er janvier 1997 et son règlement annexé ont modifié les conditions d'obtention de l'AFR sur deux points :

- seules les personnes ayant opté pour l'AFR dans les six premiers mois de leur indemnisation peuvent prétendre à cette allocation ;

- pour les personnes ayant travaillé à temps partiel, l'allocation minimale AFR, égale depuis le 1er juillet 1997 à 148,28 francs, est proratisée en fonction du temps de travail.

Ces mesures sont applicables au 1er janvier 1997 à tout salarié dont le contrat de travail a pris fin à cette date ou postérieurement.

Pour ceux dont la fin de contrat est antérieure, les nouvelles dispositions ne sont pas opposables.

Sur les sept premiers mois de l'année 1997, 128.110 personnes indemnisées par le régime d'assurance chômage sont entrées en AFR

2. Les crédits pour 1998

L'État finance 41 % des dépenses exposées pour l'AFR. En 1998, la subvention prévue est de 2.697,98 millions de francs, en progression de 10 %

Votre rapporteur s'interroge sur la justification d'une telle progression de ces crédits, alors que la réforme opérée en 1997 aura pour effet de diminuer le nombre de bénéficiaires. Il s'interroge également sur l'opportunité de maintenir les conditions de la prise en charge par l'État, alors que le régime d'assurance chômage géré par l'UNEDIC devrait dégager un excédent de 1 milliard de francs en 1998.

C. LES ACTIONS NON DÉCENTRALISÉES POUR LES DEMANDEURS D'EMPLOIS

L'État a conservé à sa charge la coordination de diverses actions au plan local, à travers des structures telles que les centres inter-institutionnels de bilans de compétence, et les ateliers pédagogiques personnalisés (APP). Les crédits passent en 1998 de 200 à 220 millions de francs, afin de soutenir davantage ces ateliers, tournés vers les publics en grande difficulté, notamment en milieu rural.

D. LES STAGES POUR CHÔMEURS DE LONGUE DURÉE

Le nombre d'entrées dans ces stages est augmenté de 30.000 emplois en ce qui concerne les stages collectifs, et passe à 200.000. La dépense correspondante en 1998 est de 2.061,3 millions de francs (en fonctionnement), et de 1.772,79 millions de francs (en rémunérations), soit une enveloppe de 3.834,1 millions de francs, en progression de 17 %.

Ces stages collectifs ont été, dans le passé, reconnus comme non qualifiants, et leur progression n'amène pas un progrès dans le traitement des demandeurs d'emplois.

E. LES STAGES POUR LES CADRES

6.000 places sont prévues pour ces stages, comme en 1997, pour 227,28 millions de francs.

F. LE CONTRAT INITIATIVE EMPLOI

Contrat du secteur marchand, recentré en 1997 sur les publics les plus en difficulté, le CIE voit ses moyens diminuer de plus d'un quart et s'établir à 13,1 milliards de francs : le nombre d'entrées prévu en 1998 est de 200.000 (au lieu de 215.000 prévus) en 1997. Par ailleurs, le montant des compensations d'exonérations de charges sur les contrats diminue de 44 % pour s'adapter aux dépenses constatées.

Votre rapporteur remarque que l'arrêté d'annulation du 17 novembre 1997, "gageant" les dépenses du collectif de fin d'année, porte à hauteur de 2,1 milliards de francs sur le contrat initiative emploi. Il s'interroge dès lors sur le calibrage des dépenses prévues pour 1998 pour cette mesure qui est devenue, depuis 1997, ciblée à l'extrême sur les publics les plus en difficulté.

G. LES CONTRATS EMPLOI-SOLIDARITÉ ET EMPLOIS-CONSOLIDÉS

Les crédits des CES diminuent de 3,2 %, le nombre de bénéficiaires restant affiché à 500.000 : le ralentissement du nombre d'entrées de 1997 (- 46.000) se répercute sur le coût de la mesure en 1998.

En revanche, les crédits consacrés aux contrats emploi consolidés, destinés à faire accéder à un emploi les bénéficiaires des CES, augmentent de 1,4 milliard de francs et atteignent 3,14 milliards de francs. Une telle augmentation des crédits, si elle répond à une inspiration généreuse, ne peut qu'amener à s'interroger sur le dispositif des CES dans son ensemble, et son incapacité à susciter une insertion professionnelle pour ses quelque 500.000 bénéficiaires.

III. LES ACTIONS EN FAVEUR DES HANDICAPÉS

En 1998, les crédits consacrés aux travailleurs handicapés progressent de 5,7 %, principalement sous l'effet de la garantie de ressources qui s'établit en 1998 à 4.981,6 millions de francs. Cette augmentation correspond à la création de 2.000 places dans les centres d'aide par le travail, et de 500 places en atelier protégé.

IV. L'INSERTION PAR L'ÉCONOMIQUE

Ces crédits évoluent de la façon suivante :

(en millions de francs)

Cette progression de 9,2 % recouvre trois mouvements :

- une progression de 8,7 % de l'aide aux entreprises d'insertion et associations intermédiaires ;

- l'extinction du dispositif d'exonération des cotisations d'assurance maladie maternité des travailleurs indépendants créant ou reprenant une entreprise, pour les deux premières années d'activité (loi Madelin) : - 143 millions de francs ; cette extinction, prévue par l'article 66 du projet de loi de finances pour 1998, ne paraît aucunement cohérente avec le souci affiché par ce budget de promouvoir l'insertion par l'économique.

- l'institution d'une dotation de 200 millions de francs pour l'aide à la création d'entreprise par des jeunes, dans le cadre de la loi sur l'emploi des jeunes.

CHAPITRE VI - L'ALLÉGEMENT DU COÛT DU TRAVAIL


• Les crédits consacrés à l'allégement des coûts du travail au ministère de l'emploi diminuent de 630 millions de francs et s'établissent à 860 millions de francs.


• Toutefois, l'essentiel des crédits d'allégement des coûts du travail figure au budget des charges communes : en 1998, ces crédits diminuent de 8,3 % et s'établissent à 43 milliards de francs.

I. UNE DIMINUTION GLOBALE DES CRÉDITS

Au total, les crédits consacrés à l'allégement du coût du travail évoluent de la manière suivante :

(en millions de francs)


La diminution des crédits figurant au budget du travail (mesures d'aménagement du territoire) s'explique par l'ajustement aux besoins constatés.


• La diminution des crédits figurant au budget des charges communes résulte en revanche d'une série de décisions.

II. LA TRADUCTION DE DÉCISIONS IMPORTANTES

Le budget des charges communes comporte un chapitre de "mesures exceptionnelles en faveur de l'emploi et de la formation professionnelle" doté de 43 milliards de francs, soit - 3,5 milliards par rapport à 1997. Ces mesures n'ont en fait rien d'"exceptionnel" puisqu'il s'agit, pour l'essentiel, de la compensation des exonérations de charges sociales sur les bas salaires, dont l'origine remonte à 1996.

Quatre types de dépenses sont retracés sur ce chapitre :

Le mécanisme dit de "ristourne dégressive" sur les bas salaires, qui est issu de la fusion opérée à compter du 1 er octobre 1996, entre l'exonération totale ou partielle des cotisations d'allocations familiales instituée par la loi du 27 juillet 1993 relative au développement de l'emploi et de l'apprentissage et amplifiée par la loi quinquennale sur l'emploi du 20 décembre 1993, et d'autre part la réduction de cotisations sociales sur les bas salaires instaurée par la loi du 4 août 1995 relative à des mesures d'urgence pour l'emploi et la sécurité sociale ;

La ristourne dégressive représente un allégement de charges sociales sur les salaires d'un niveau de 1.210 francs au niveau du SMIC, et dégressif de façon linéaire jusqu'à 1,33 SMIC. Pour le secteur du textile, de l'habillement, du cuir et de la chaussure, le seuil a été fixé à 1,5 SMIC entre le 1 er août 1996 et le 31 décembre 1997.

La compensation des exonérations de cotisations sociales dans les DOM instituées par la loi du 25 juillet 1994, dite loi "Perben".

La compensation de l'exonération de cotisations d'allocations familiales pour les catégories d'employeurs auxquelles la ristourne dégressive ne s'applique pas : les employeurs installés dans une zone de revitalisation rurale, les employeurs relevant de régimes spéciaux de sécurité sociale, et les entreprises "nouvelles" au sens du code général des impôts.

Les primes à l'apprentissage instituées par la loi du 16 octobre 1996.

Évolution des crédits de 1997 à 1998

(en milliards de francs)

L'évolution de la progression de la ristourne dégressive sur les bas salaires, + 1,4 milliard de francs s'explique par :

- une progression tendancielle du coût de la ristourne dégressive : + 4,9 milliards de francs,

- l'inscription d'une provision de + 3 milliards de francs au sein de ces crédits, destinée à financer la future loi sur les 35 heures,

- en sens inverse, une économie de 6,5 milliards de francs due à :


• 4 milliards de francs procurés par la proratisation de la ristourne dégressive au temps partiel ;


• 2,1 milliards de francs liés à l'abaissement du seuil de 1,33 à 1,3 SMIC pour l'application de la ristourne ;


• 0,4 milliard de francs liés au gel du SMIC au niveau de 1997 pour le calcul de la ristourne en 1998.

III. DES CHOIX TRÈS CONTESTABLES

Votre rapporteur souligne l'importance des choix opérés à travers la diminution de ce chapitre "réservoir" inscrit aux charges communes, dont le caractère indifférencié rend le décryptage particulièrement difficile : ainsi, il est impossible de repérer, à la lecture des documents budgétaires, la mesure de gel du SMIC au niveau 1997 pour le calcul de la ristourne de 1998, ou bien pis encore, l'inscription de 3 milliards de francs pour les 35 heures.

Ces choix appellent deux observations :

Le ralentissement de l'allégement des charges sociales sur les bas salaires a été présenté notamment comme la conséquence du caractère coûteux de la mesure : 40 milliards de francs auraient été consacrés à la création de 40.000 emplois. Or, les chiffres donnés par le Conseil supérieur de l'emploi des revenus et des coûts faisaient état l'an dernier de créations de 40 à 50.000 emplois par tranche de dix milliards dépensés.

Par ailleurs, cette politique, unanimement saluée par les partenaires sociaux, devait absolument s'inscrire dans la durée pour préserver l'emploi peu qualifié dans le contexte actuel des restructurations industrielles.

Son coût est justifié par le fait qu'elle concerne près de 5 millions de salariés. Son effet est indéniable : les fiches de préparation de la conférence nationale sur l'emploi, les salaires et la durée du travail, soulignent que "après avoir augmenté sur la période 1970-1984, le coût relatif du travail peu qualifié a retrouvé, au cours des années récentes, son niveau de 1970, sous l'effet notamment de la réduction des charges sociales pesant sur les bas salaires".

Ces documents relèvent par ailleurs que "la relative bonne résistance de l'emploi, dans une conjoncture peu favorable résulte pour partie des premiers effets de la baisse du coût du travail au voisinage du salaire minimum (- 12,6 % depuis 1993)".

Il est grave que le Gouvernement freine cette politique en abaissant le seuil des salaires concernés, et en gelant la base de calcul des exonérations au niveau de 1997.

La provision pour les "35 heures" s'élève à 3 milliards de francs.

En l'absence de justification plus précise, on peut penser que ces crédits correspondent à peu près à l'encouragement à la réduction du temps de travail de 9.000 francs par salarié, dispensé à quelque 700.000 emplois, sur la moitié d'une année.

Cette politique, présentée comme une incitation, se révélera, on le sait, coercitive à compter du 1er janvier 2000, pour les entreprises de plus de 20 salariés. L'ensemble des entreprises devraient appliquer l'horaire de 35 heures à partir du 1er janvier 2002.

Votre rapporteur ne peut que souligner le risque d'effets néfastes sur l'emploi d'un dispositif ainsi imposé aux entreprises, ainsi que de la baisse d'attractivité qui en résultera, pour notre pays, du point de vue des investisseurs industriels étrangers.

EXAMEN EN COMMISSION

I. EXAMEN DES CRÉDITS

Réunie le jeudi 30 octobre 1997, sous la présidence de M. Christian Poncelet, président, la commission a procédé, sur le rapport de M. Emmanuel Hamel, rapporteur spécial, à l' examen des crédits de l' emploi pour 1998.

M. Emmanuel Hamel, rapporteur spécial, a précisé qu'en 1998, les crédits du ministère de l'emploi s'élèveraient à 112,6 milliards de francs, en augmentation de 9,3 %, mais que compte tenu des dotations inscrites pour l'emploi au budget des charges communes, les crédits consacrés à l'emploi atteindraient, en fait, 155,6 milliards de francs, en progression de 3,8 % par rapport à 1997.

M. Emmanuel Hamel, rapporteur spécial, a tout d'abord présenté les crédits consacrés au service public de l'emploi en rappelant que la progression de 74,5 millions de francs des dépenses de rémunération prendrait en compte la création nette de 370 emplois parmi lesquels on relevait la création de 15 emplois d'inspecteurs du travail et la création de 185 emplois de contractuels destinés à régulariser la situation des coordonnateurs emploi formation, chargés de s'occuper de l'encadrement des jeunes, dans le cadre du "crédit formation individualisé" depuis 1989.

M. Emmanuel Hamel, rapporteur spécial, a également précisé que les dépenses de matériel et fonctionnement progressaient de 5 % et atteignaient 481,3 millions de francs, les moyens de fonctionnement de l'administration centrale progressant de 6 % et atteignant 332,6 millions de francs du fait du relogement de la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle. Il a également indiqué que les crédits d'équipement passaient de 50,9 à 62,37 millions de francs, en raison de l'adoption d'une nouvelle clé de répartition entre autorisations de programme et crédits de paiement sur deux ans, qui remplacera l'ancienne clé sur trois ans.

M. Emmanuel Hamel, rapporteur spécial, a ensuite présenté les subventions de fonctionnement, l'essentiel de ces crédits étant consacrés à l'Agence nationale pour l'emploi.

L'année 1998 sera la dernière année d'application du second contrat de progrès entre l'État et l'Agence. Un rapport effectué à mi-parcours permet de dégager quelques éléments significatifs de bilan, dont une amélioration significative de la part de marché de l'Agence dans les offres d'emploi recueillies, et la modernisation des services ; en sens inverse, il semble que les objectifs de prestations vis-à-vis des chômeurs de longue durée et des jeunes n'aient pas pu être tenus.

En 1998, les moyens de fonctionnement consentis à l'Agence sont strictement identiques à ceux de 1997 en francs courants, soit une subvention de 5.204 millions de francs, les mesures nouvelles arrêtées en matière de personnel, à savoir la création de 70 emplois supplémentaires et la transformation de 300 emplois d'assistants de gestion en conseillers adjoints, étant financées par redéploiements.

M. Emmanuel Hamel, rapporteur spécial, a rappelé que les autres subventions de fonctionnement progressaient de 5,5 % et atteignaient 129,29 millions de francs, la progression des crédits de 14 % de l'Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail étant liée au développement de l'appui technique aux entreprises sur la réorganisation du temps de travail.

M. Emmanuel Hamel, rapporteur spécial, a ensuite présenté les crédits destinés à la formation et à l'adaptation des salariés, se divisant en soutien à la formation professionnelle continue, et prévention ou accompagnement des licenciements.

Au total, ces crédits progressent de 4,4 % et atteignent 9,4 milliards de francs en 1998.S'agissant de la formation des salariés, M. Emmanuel Hamel, rapporteur spécial, a rappelé que les crédits de la politique contractuelle étaient quasiment maintenus, et que les crédits du programme national de formation professionnelle progressaient de 6,6 % et atteignaient 322 millions de francs ; par ailleurs, les crédits des contrats de plan État-régions, qui permettent des actions conjointes, dans le cadre du XIe Plan (1994-1998), dans les domaines de la formation continue, en alternance, et de l'apprentissage, progressent de 17,2 % et atteignent 397,4 millions de francs, du fait du gel des actions opérées en 1997 ; enfin, la dotation de décentralisation résultant de la loi du 7 janvier 1983 conférant aux régions une compétence de droit commun en matière d'apprentissage, évolue, comme chaque année, en fonction des prix, soit + 1,38 % en 1998.

S'agissant des crédits de conversion, M. Emmanuel Hamel, rapporteur spécial, a notamment relevé les évolutions et l'augmentation de 162 % des crédits consacrés au dispositif "de Robien".

M. Emmanuel Hamel, rapporteur spécial, a ensuite présenté les crédits accompagnant l'aide au départ des salariés et l'indemnisation des demandeurs d'emplois, qui diminuent de 4,1 % pour s'établir à 20,2 milliards de francs.

La diminution des crédits consacrés aux allocations spéciales du fonds national de l'emploi est due à une prévision de reflux des entrées dans le dispositif, liée aux effets de la réforme de 1994 qui a remonté l'âge d'accès au dispositif et augmenté les taux de contribution des entreprises, mais aussi à la volonté de maîtriser les "mesures d'âge" au sein des plans sociaux.

Par ailleurs, le nombre de bénéficiaires des préretraites progressives devrait se stabiliser à la baisse compte tenu de la réforme intervenue au printemps 1997 qui a introduit une participation financière de l'entreprise pour les préretraites progressives accompagnées d'embauchés : 25.000 entrées sont prévues dans le dispositif.

M. Emmanuel Hamel, rapporteur spécial, a ensuite présenté les dépenses d'indemnisation, en progression de 16,4%, qui s'établissent à 8,8 milliards de francs. La subvention à l'Association pour la gestion de la structure financière, qui correspond à la participation de l'État aux coûts pour les régimes complémentaires de l'abaissement de l'âge de la retraite à 60 ans, s'élève à 708,4 millions de francs, et la subvention au fonds de solidarité qui assure l'indemnisation des chômeurs en fin de droits (cofinancée avec la contribution de 1 % de solidarité des fonctionnaires) progresse de 7,1 %, en raison de la revalorisation annoncée de l'allocation de solidarité spécifique.

M. Emmanuel Hamel, rapporteur spécial, a ensuite traité des actions en faveur des publics prioritaires qui rassemblent l'ensemble des crédits consacrés aux jeunes, aux chômeurs de longue durée et aux handicapés.

Ces crédits progressent de 17 % en 1998 et atteignent 67,8 milliards de francs.

Concernant les actions menées en faveur des jeunes, ces crédits progressent de 36,7 % et atteignent 26,4 milliards de francs.

En 1998, la dotation globale de formation qualifiante des jeunes évolue comme la dotation générale de décentralisation, soit une progression de 1,38 % et s'établit à 1.797,14 millions de francs ; en ce qui concerne les actions non qualifiantes, les crédits progressent de 0,4 % et s'établissent à 2.613,25 millions de francs

M. Emmanuel Hamel, rapporteur spécial, a ensuite souligné que l'aide de l'État à la formation en alternance dans le cadre des contrats de qualification diminuait d'un peu moins d'un quart et s'établissait à 2.155,5 millions de francs, le nombre d'entrées prévu étant de 100.000, pour 130.000 en 1997.

Par ailleurs, M. Emmanuel Hamel, rapporteur spécial, a précisé que les aides de l'État aux contrats d'apprentissage atteignaient 9.819,66 millions de francs, en progression de 3,3 %, ce qui correspondait à 240.000 entrées dans les entreprises, au lieu de 220.000 en 1997.

En outre, les subventions versées par l'État aux missions locales et permanences accueil-information-orientation, progressent en 1998 de 1,1 % et atteignent 359,9 millions de francs.

Enfin, M. Emmanuel Hamel, rapporteur spécial, a souligné que le budget de 1998 prévoyait l'inscription de 8,050 milliards de francs correspondant au financement de la loi du 16 octobre 1997 sur l'emploi des jeunes : l'État fournira une aide par "emploi-jeune" égale à 80 % du SMIC, charges sociales comprises -soit 92.000 francs en 1997- pour des contrats de droit privé conclus avec des associations ou des collectivités locales en vue de répondre à des besoins non satisfaits ou émergents.

Cette aide devrait atteindre 100 % pour les emplois jeunes recrutés directement par l'État à l'éducation nationale ou à l'intérieur.

Financés en 1997 à hauteur de 2 milliards de francs par décret d'avances, les emplois jeunes devraient compter 50.000 bénéficiaires en 1997 et 150.000 bénéficiaires en 1998. L'objectif est de 350.000 emplois sur cinq ans. En contrepartie, le dispositif des emplois-ville est supprimé (- 0,6 milliard de francs), car il est considéré comme devant être absorbé par le dispositif plus général -car non "zone"- des emplois jeunes.

M. Emmanuel Hamel, rapporteur spécial, a ensuite présenté les crédits consacrés aux actions en faveur des chômeurs de longue durée, en diminution de 8,1 %, qui s'établissent à 36 milliards de francs. La subvention de fonctionnement à l'Association pour la formation professionnelle des adultes est quasiment stabilisée, mais sans que des éléments de bilan quantitatifs du contrat soient encore actuellement disponibles.

S'agissant des stages du Fonds national pour l'emploi, individuels ou collectifs, organisés spécifiquement pour les chômeurs de longue durée, leur nombre est augmenté en 1998 de 30.000 pour les stages collectifs : au total, 206.000 personnes entreront dans ces dispositifs en 1998, pour une dépense en progression de 15,4 %.

Par ailleurs, le contrat initiative emploi voit ses moyens diminuer de plus d'un quart et s'établir à 13,1 milliards de francs, le nombre d'entrées prévu en 1998 étant de 200.000.

Enfin, M. Emmanuel Hamel, rapporteur spécial, a rappelé que les crédits des contrats emploi solidarité diminuaient de 3,2 %, le nombre de bénéficiaires restant affiché à 500.000 car le ralentissement du nombre d'entrées de 1997 (- 46.000) se répercute sur le coût de la mesure en 1998 ; il a également précisé que les crédits des emplois-consolidés pour les publics sortant des contrats emploi solidarité progressaient de 80 %, pour 10.000 entrées supplémentaires en 1998.

S'agissant des actions en faveur des handicapés en 1998, les crédits progressent de 5,7 %, principalement sous l'effet de la garantie de ressources qui s'établit à 4.981,6 millions de francs : cette augmentation correspond à la création de 2.000 places dans les centres d'aide par le travail, et de 500 places en atelier protégé.

M. Emmanuel Hamel, rapporteur spécial, a ensuite présenté les crédits consacrés à l'insertion par l'économique, en progression de 9,2 %, qui atteignent 958,21 millions de francs.

Cette progression de 9,2 % recouvre trois mouvements : une progression de 8,7 % de l'aide aux entreprises d'insertion et associations intermédiaires ; l'extinction du dispositif d'exonération des cotisations d'assurance maladie maternité des travailleurs indépendants créant ou reprenant une entreprise, pour les deux premières années d'activité, et l'institution d'une dotation de 200 millions de francs pour l'aide à la création d'entreprise par des jeunes, dans le cadre de la loi sur l'emploi des jeunes.

Enfin, M. Emmanuel Hamel, rapporteur spécial, a présenté les dépenses consacrées à l'allégement des coûts du travail. Les crédits consacrés à l'allégement des coûts du travail au ministère de l'emploi, qui diminuent de 630 millions de francs, s'établissent à 860 millions de francs ; toutefois, l'essentiel des crédits d'allégement des coûts du travail figure au budget des charges communes : en 1998, ces crédits diminuent de 8,3 % et s'établissent à 43 milliards de francs.

La diminution des crédits figurant au budget du travail s'explique par l'ajustement aux besoins constatés, alors que la diminution de 4,5 milliards de francs des crédits figurant au budget des charges communes résulte de plusieurs mouvements : une progression tendancielle du dispositif de ristourne dégressive (+ 4,922 milliards de francs), une progression tendancielle des exonérations d'allocations familiales en zone de revitalisation rurale (+ 0,3 milliard de francs), l'inscription d'une provision destinée à financer la réduction hebdomadaire du temps de travail à 35 heures (+ 3 milliards de francs). En sens inverse, la "re-proratisation" de la ristourne dégressive sur le temps partiel procure une économie de 4 milliards de francs, la réduction de 1,33 à 1,30 SMIC du plafond des salaires éligibles à la ristourne dégressive procure une économie de 2,1 milliards de francs, l'arrêt du plan d'allégement des charges spécifiques au textile permet une économie de 2 milliards de francs, le gel du SMIC au niveau de 1997 pour le calcul de la ristourne 1998 permet enfin une économie de 0,4 milliard de francs ; par ailleurs, le transfert au budget de l'emploi des primes à l'apprentissage se traduit par une économie de 5,3 milliards de francs.

À l'issue de cette présentation des crédits, M. Emmanuel Hamel, rapporteur spécial, a formulé plusieurs observations. Il a tout d'abord estimé que le budget de l'emploi pour 1998 intégrait un souci louable d'économie concernant le fonctionnement du service public de l'emploi : en effet, les subventions de fonctionnement à l'Agence nationale pour l'emploi et à l'Association pour la formation professionnelle des adultes sont reconduites en francs courants, ce qui suppose un effort de redéploiement des établissements pour entamer des actions nouvelles. Il reste, toutefois, qu'aucun bilan quantitatif du contrat de progrès conclu en 1994 par l'État avec l'Association pour la formation professionnelle des adultes n'a pu être produit.

En deuxième lieu, il a fait valoir que le maintien ou la progression de mesures d'accompagnement des licenciements, telles que les conventions de conversion ou l'aide à la réduction du temps de travail ("loi de Robien"), lui paraissaient être justifiées par des prévisions économiques moins favorables que la croissance de 3 % affichée pour 1998 par le Gouvernement. La diminution des crédits de préretraites ne contredit pas cette estimation mais correspond à la poursuite de la maîtrise des "mesures d'âge" au sein des plans sociaux, orientation amorcée depuis plusieurs années après des dérives constatées.

En troisième lieu, il apparaît que la formation des jeunes est sérieusement prise en compte par le budget, comme le montre la poursuite de l'effort consenti en faveur de l'apprentissage, l'orientation étant moins nette en ce qui concerne les contrats de qualification.

Enfin, les mesures s'adressant aux chômeurs de longue durée seraient conservées, sous réserve d'une réduction des entrées en contrat initiative emploi présentée comme une adaptation aux entrées constatées. Le maintien des contrats emploi solidarité et la progression des emplois consolidés sont des mesures allant dans le bon sens, si l'on prend en compte la progression continue du nombre de chômeurs de longue durée au sein des statistiques du chômage. En revanche, la progression des "stages d'initiation et de formation à l'emploi" collectifs (+ 30.000) ne peut être considérée comme un progrès, ces stages ne débouchant pas sur l'emploi comme il l'a été constaté au cours des dernières années.

M. Emmanuel Hamel, rapporteur spécial, a estimé qu'en revanche, plusieurs orientations du budget de l'emploi posaient de véritables questions de principe : ainsi, l'extinction de l'aide aux travailleurs indépendants créant ou reprenant une entreprise "loi Madelin" ne paraît aucunement justifiée ; de même, la mise en place des emplois-jeunes, si elle répond dans le court terme à une véritable situation de détresse sociale, laisse augurer de la création, à moyen terme, d'autant d'emplois publics par l'État ou les collectivités territoriales, orientation néfaste à l'heure où la puissance publique peine à honorer ses charges d'endettement : par ailleurs, l'inscription d'une provision de 3 milliards de francs au budget des charges communes destinée à financer les "35 heures" pose le problème de savoir si l'on doit accepter qu'une loi statue sur un sujet qui devrait rester du ressort de la négociation dans l'entreprise. Enfin, le budget de l'emploi comporte une économie de 2,5 milliards de francs qui résulte principalement de l'abaissement de 1,33 à 1,30 SMIC du plafond des salaires éligibles à la ristourne dégressive de charges sociales. Cette restriction apparaît comme contestable à l'heure où les entreprises attendaient une accentuation de l'effort d'allégement des charges sur les bas salaires, politique amorcée dès 1993, et qui a donné de réels résultats.

M. Alain Lambert, rapporteur général, a estimé que les crédits consacrés à l'emploi devaient donner lieu à un véritable examen de conscience : en effet, même si l'objet de ces dépenses est particulièrement sensible, la multiplication des dispositifs et des crédits ne constitue pas forcément la meilleure solution.

M. Alain Lambert, rapporteur général, a ensuite fait part de ses réserves quant à trois orientations du budget de l'emploi pour 1998 : la suppression de l'aide à la création d'entreprises par des travailleurs indépendants, l'inscription d'une provision de 3 milliards de francs pour le financement de la future loi sur les "35 heures", enfin, l'abaissement à 1,30 SMIC du plafond des salaires concernés par la ristourne dégressive de charges sociales.

Enfin, M. Alain Lambert, rapporteur général, a exprimé son inquiétude sur le financement des emplois-jeunes qui pourrait déboucher sur la création d'emplois publics, ou bien au contraire plonger les bénéficiaires des contrats dans une situation de précarité insupportable à l'issue de la période de cinq ans garantie par la loi.

M. Christian Poncelet, président, a approuvé ces observations en soulignant que le budget de l'emploi était un exemple d'incitation à dépenser mieux les crédits publics.

M. Emmanuel Hamel, rapporteur spécial, est convenu de l'incertitude sur les résultats de la dépense pour l'emploi, dans un contexte de progression des dépenses publiques et des prélèvements obligatoires.

Répondant à M. Denis Badré, après que celui-ci eut appuyé les prises de position du rapporteur général, M. Emmanuel Hamel, rapporteur spécial, a précisé que 25 emplois de catégorie C seraient créés au ministère en 1998, au titre de la résorption de l'emploi précaire, et que 70 emplois supplémentaires seraient créés à l'Agence Nationale pour l'Emploi par redéploiement des crédits.

En réponse à M. Philippe Adnot, le rapporteur spécial a précisé que des mesures en faveur du secteur du textile étaient actuellement en cours de négociation avec les professions et la commission de Bruxelles, et que le nombre de contrats emploi solidarité serait maintenu à 500.000 en 1998.

Enfin, en réponse à Mme Maryse Bergé-Lavigne, le rapporteur spécial a précisé que les effets de la politique d'allégement de charges sur les bas salaires avaient été estimés à 50.000 créations d'emplois par dizaine de milliards de francs dépensés.

La commission a ensuite décidé de réserver son vote sur les crédits de l'emploi jusqu'après l'audition de Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, prévue pour le 20 novembre prochain.

Au cours d'une séance tenue le vendredi 21 novembre 1997 sous la présidence de M. Christian Poncelet, président, la commission a adopté sur proposition de M. Alain Lambert, rapporteur général, un amendement visant à réduire les crédits des mesures nouvelles du titre III du budget de l'Emploi de 105.000.000 F et les crédits des mesures nouvelles du titre IV de 6.224.000.000 F.

Elle a ensuite décidé de recommander au Sénat l'adoption des crédits du budget de l'Emploi ainsi modifié.

II. AUDITION DE MME MARTINE AUBRY, MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITÉ

La commission a procédé à l'audition de Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, le jeudi 20 novembre 1997.

Le ministre a rappelé tout d'abord que la progression de ces crédits était de 3,6 % pour l'emploi, de 4,4 % hors budget des charges communes.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, a ensuite insisté sur le fait que le budget de l'emploi pour 1998 constituait, à ses yeux, un budget de rupture par rapport à la démarche traditionnelle du ministère du travail, centrée sur le traitement et l'accompagnement social du chômage. Elle a insisté sur deux mesures pour illustrer ce tournant vers une politique offensive de l'emploi : la création d'activités et d'emplois nouveaux pour les jeunes et la réduction de la durée du travail.

S'agissant des emplois jeunes, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, a estimé que le dispositif permettait de passer de la logique des contrats aidés à une logique économique, ces emplois ne devant pas concurrencer des emplois préexistants du secteur privé ni du secteur public.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, a rappelé que 8,35 milliards de francs étaient ouverts pour les emplois-jeunes en 1998, dont 300 millions de francs affectés aux départements d'outre-mer, et que cette enveloppe avait été précédée par l'ouverture de 2 milliards de francs par décret d'avance en juillet dernier. Elle a rappelé également que la loi du 16 octobre 1997 créait aussi un dispositif d'encouragement des jeunes à la création d'entreprises, sous forme d'une avance remboursable assortie d'un suivi pendant les trois premières années.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, a ensuite présenté l'orientation du budget de 1998 vers la réduction du temps de travail, le Gouvernement s'étant engagé sur le passage aux 35 heures au 1er janvier 2000, pour les entreprises de plus de 10 salariés ; l'État accompagnera le mouvement et aidera les entreprises à l'anticiper par une incitation sous forme d'abattement forfaitaire de cotisations sociales, que la loi d'orientation et d'incitation mettra en place. Dans cette perspective, une provision de 3 milliards de francs est constituée, sans être individualisée, à l'intérieur des 43,2 milliards de francs inscrits aux crédits des charges communes sur la ligne de l'allégement de cotisations sur les bas salaires, cette provision permettant de financer le passage aux 35 heures pour environ 1 million de salariés, au fil des accords de branches ou d'entreprises.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, a précisé que cette provision s'ajouterait à l'enveloppe de 2,14 milliards de francs destinée à financer la loi "de Robien", soit 1,3 milliard de francs de plus que la dotation 1997.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, a ensuite souligné que les dispositifs traditionnels de traitement social du chômage étaient replacés dans une perspective de prévention et de lutte contre les exclusions. Ainsi, les contrats emploi-solidarité (CES) seront maintenus au niveau de 500.000 entrées et seront réservés aux personnes les plus défavorisées ; les contrats consolidés à l'issue d'un CES seront renforcés de 50 % afin d'aider notamment les chômeurs âgés qui ont peu de chances de se réintégrer dans un emploi classique. Les emplois de ville devraient être englobés par les emplois-jeunes, et lorsque cette conversion ne sera pas possible, ils pourront se poursuivre jusqu'à terme : 414 millions de francs de crédits sont prévus à cette fin dans le budget de 1998.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, a insisté sur les moyens affectés aux personnes les plus touchées par le chômage : au total, 484 millions de francs, en hausse de 6 % sont consacrés à l'insertion par l'économique à raison de 349 millions de francs sur le budget de l'emploi et 135 millions de francs sur le budget de la solidarité pour l'accompagnement social nécessaire à ces publics.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, s'est félicitée de ce que les contrats initiative-emploi aient été recentrés par le Gouvernement précédent sur les publics prioritaires : 200.000 entrées sont prévues en 1998, ce qui correspond au niveau atteint cette année, même si les crédits nécessaires diminuent fortement (13,2 milliards de francs contre 17,9 milliards de francs budgétés en 1997), car le freinage des entrées 1997 se répercute sur le coût 1998.

Enfin, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, a rappelé que la capacité d'accueil dans les stages collectifs pour les chômeurs de longue durée serait portée à 160.000 places, soit 30.000 places de plus qu'en 1997.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, a souligné que les préretraites ne devaient plus être l'instrument prioritaire des restructurations des entreprises alors que les préretraites progressives, moins coûteuses pour la collectivité, étaient maintenues au même niveau qu'en 1997. En revanche, la contribution des grandes entreprises aux préretraites serait augmentée, de façon à cibler les mesures sur les entreprises en difficulté, les petites entreprises, les régions en crise, et à porter la part des préretraites de 80 % à 30 % dans les instruments des plans sociaux.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, a aussi insisté sur l'extension de l'allocation de remplacement pour l'emploi, auquel le Gouvernement contribuera à hauteur de 40 % dès lors que les partenaires sociaux auront conclu des négociations au niveau interprofessionnel ou par branche, et aussi sur les 8,115 milliards de francs prévus dans le budget de 1998, qui permettront à la fois de couvrir une revalorisation générale de l'allocation de solidarité spécifique et une majoration spéciale pour les allocataires ayant validé 40 annuités de cotisations.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, a ensuite abordé la problématique de l'allégement du coût du travail en reconnaissant que la lourdeur des charges sociales sur les bas salaires constituait un véritable problème. Dans un contexte où l'importance du coût par poste de travail s'avère difficile à chiffrer, l'enveloppe consacrée à la ristourne dégressive est maintenue à 40 milliards de francs en 1998. La principale mesure qui permet de tenir dans cette enveloppe est la proratisation de l'exonération pour les emplois à temps partiel. La deuxième mesure ramène le plafond d'exonération de 1,33 à 1,30 SMIC, l'effet de cette mesure sur le montant en francs de l'exonération étant atténué par la revalorisation du SMIC de 4 % intervenue en juillet 1997.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, a souligné que par ailleurs le basculement des cotisations d'assurance maladie sur la contribution sociale généralisée (CSG) contribuerait à l'allégement des charges sociales et que le Gouvernement étudiait la voie de l'élargissement de l'assiette des cotisations patronales. Par ailleurs, Mme Martine Aubry a rappelé que la France était contrainte de mettre fin au plan spécifique d'allégement de charges pour le secteur textile-habillement, condamné par la commission de Bruxelles, et que le Gouvernement s'efforçait d'aménager l'obligation de remboursement des aides perçues à ce titre ; toutefois, l'application du plan pourrait être poursuivie en 1998 dans les limites autorisées dans le cadre de la règle de minimis, c'est-à-dire à hauteur de 650.000 francs par entreprise sur trois ans.

S'agissant des exonérations applicables dans les zones de redynamisation urbaine et de revitalisation rurale et dans les zones franches, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, a rappelé qu'elles avaient été maintenues, dans leur principe, pour les zones franches jusqu'à l'établissement d'un bilan du pacte de relance pour la ville.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, a ensuite présenté les crédits de la formation professionnelle : à champ constant, c'est-à-dire en rétablissant dans le budget de l'emploi les primes des contrats d'apprentissage qui figuraient aux charges communes, les crédits de la formation professionnelle augmentent de 2 %, avec un montant de 24,5 milliards de francs, dont la moitié pour les contrats en alternance ; si l'on y ajoute le financement des formations de l'association pour la formation professionnelle des adultes, composé de la subvention de l'État et des rémunérations des stagiaires, le budget de la formation professionnelle est porté à 30 milliards de francs, soit 27% des 112,6 milliards de francs du budget de l'emploi, hors budget des charges communes. Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, a insisté sur la nécessité de développer la formation en alternance, le nombre des jeunes actifs de moins de 26 ans diminuant régulièrement dans les entreprises.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, a rappelé que le nombre de contrats d'apprentissage prévus dans le budget 1998 était porté de 220.000 à 240.000, les contrats de qualification étant ramenés au niveau de la tendance réelle de 1997, soit 100.000 contre 130.000 prévus en 1997, la faiblesse de ces contrats étant au demeurant préoccupante.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, a indiqué qu'elle souhaitait entreprendre une remise à plat des circuits de financement de la formation, ainsi que de son contenu et de ses objectifs.

* 1 Par ailleurs, 300 millions de francs sont inscrits au budget de l'outre-mer pour les emplois jeunes

* 2 200 millions de francs sont inscrits au budget de l'intérieur pour les "adjoints de sécurité".

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page