Rapport sur une proposition de résolution sur Euro 1999
Alain LAMBERT, Sénateur
COMMISSION DES FINANCES, DU CONTROLE BUDGETAIRE ET DES COMPTES ECONOMIQUES DE LA NATION - RAPPORT N° 382 - 1997/1998
Table des matières
- AVANT-PROPOS
-
CHAPITRE PREMIER
L'EURO POUR ONZE ÉTATS MEMBRES- I. LE SUCCÈS DE LA CONVERGENCE FONDE L'ADOPTION PAR UNE LARGE COMMUNAUTÉ D'ETATS D'UNE MÊME MONNAIE, INSTRUMENT D'UNE EUROPE PUISSANTE
- II. UN SUCCÈS QUI NE LÈVE PAS TOUTES LES INCERTITUDES ET QUI SUPPOSE UNE CONSOLIDATION DE LA SITUATION ÉCONOMIQUE EUROPÉENNE
-
CHAPITRE II
LES QUESTIONS POSÉES PAR LA COORDINATION
DES POLITIQUES ÉCONOMIQUES EN EUROPE-
I. LE CADRE DE LA COORDINATION DES POLITIQUES ÉCONOMIQUES EN EUROPE : DES
ARTICLES 103 ET 104 C AU PACTE DE STABILITÉ ET DE CROISSANCE
- A. LA COORDINATION ET LA SURVEILLANCE DES POLITIQUES ÉCONOMIQUES : L'ARTICLE 103 DU TRAITÉ ET LE RÈGLEMENT 1466/97 DU 7 JUILLET 1997
- B. UN RENFORCEMENT DES CONTRAINTES ENCADRANT LA POLITIQUE BUDGÉTAIRE : DE L'ARTICLE 104 C DU TRAITÉ AU RÈGLEMENT 1467/97 DU 7 JUILLET 1997
- II. UN DISPOSITIF EN DEBAT
-
I. LE CADRE DE LA COORDINATION DES POLITIQUES ÉCONOMIQUES EN EUROPE : DES
ARTICLES 103 ET 104 C AU PACTE DE STABILITÉ ET DE CROISSANCE
- CONCLUSION
-
ANNEXE N° 1
Texte des trois propositions de résolution renvoyées
à la commission des finances, en application de
l'article 73 bis du règlement- I. PROPOSITION DE RÉSOLUTION N° 362 PRÉSENTÉE PAR M. CLAUDE ESTIER ET LES MEMBRES DU GROUPE SOCIALISTE ET APPARENTÉS LE 31 MARS 1998
- II. PROPOSITION DE RÉSOLUTION N° 370 PRÉSENTÉE PAR M. XAVIER DE VILLEPIN, LE 1ER AVRIL 1998
- III. PROPOSITION DE RÉSOLUTION N° 378 PRÉSENTÉE PAR MMES HÉLÈNE LUC, MARIE-CLAUDE BEAUDEAU, M. JEAN-LUC BECARD, MMES DANIELLE BIDARD-REYDET, NICOLE BORVO, MM. JEAN DERIAN, MICHEL DUFFOUR, GUY FISCHER, PIERRE LEFEBVRE, PAUL LORIDANT, LOUIS MINETTI, ROBERT PAGES, JACK RALITE, IVAN RENAR ET MME ODETTE TERRADE1212
-
ANNEXE N° 2
LA PROCÉDURE PRÉVUE À L'ARTICLE 109 J DU TRAITÉ -
ANNEXE N° 3
PROTOCOLE N° 6 SUR LES CRITÈRES DE CONVERGENCE VISÉS À L'ARTICLE 109 J DU TRAITÉ INSTITUANT LA COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE -
ANNEXE N° 4
LE PROTOCOLE N° 5 SUR LA PROCÉDURE
CONCERNANT LES DÉFICITS EXCESSIFS -
EXAMEN EN COMMISSION
- I. EXAMEN DU RAPPORT
- II. AUDITION DE M. PATRICK ARTUS, DIRECTEUR DU SERVICE DES ÉTUDES ÉCONOMIQUES ET FINANCIÈRES DE LA CAISSE DES DÉPÔTS ET CONSIGNATIONS
- III. AUDITION DE M. YVES-THIBAULT DE SILGUY, COMMISSAIRE EUROPÉEN, CHARGÉ DES AFFAIRES MONÉTAIRES ET FINANCIÈRES
- IV. AUDITION DE M. JEAN-CLAUDE TRICHET, GOUVERNEUR DE LA BANQUE DE FRANCE
- V. AUDITION DE M. PHILIPPE SIGOGNE, DIRECTEUR DE L'OBSERVATOIRE FRANÇAIS DE CONJONCTURE ÉCONOMIQUE (OFCE)
-
TEXTE DE LA PROPOSITION DE RESOLUTION
ADOPTEE PAR LA COMMISSION
N° 382
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès-verbal de la séance du 8 avril 1998
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Finances, du contrôle
budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1)
sur
les propositions de résolution, présentées en application
de l'article 73
bis
du Règlement :
- par M. Claude ESTIER et les membres du groupe socialiste et apparentés,
- par M. Xavier de VILLEPIN,
- par Mmes Hélène LUC, Marie-Claude BEAUDEAU, M. Jean-Luc
BÉCART, Mmes Danielle BIDARD-REYDET, Nicole BORVO, MM. Jean DERIAN,
Michel DUFFOUR, Guy FISCHER, Pierre LEFEBVRE, Paul LORIDANT, Louis MINETTI,
Robert PAGÈS, Jack RALITE, Ivan RENAR et Mme Odette TERRADE,
sur
EURO 1999
- 25 mars 1998 -
Rapport sur l'état de la
convergence et recommandation associée en vue du passage à la
troisième phase de l'Union économique et monétaire (Partie
1 : Recommandation - Partie 2 : Rapport) (E 1045)
,
Par M. Alain LAMBERT,
Sénateur,
Rapporteur général.
(1) Cette commission est composée de :
MM.
Christian Poncelet,
président
; Jean Cluzel, Henri Collard,
Roland du Luart, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Philippe Marini,
René Régnault,
vice-présidents
; Emmanuel
Hamel, Gérard Miquel, Michel Sergent, François Trucy,
secrétaires
; Alain Lambert,
rapporteur
général
; Philippe Adnot, Bernard Angels, Denis Badré,
René Ballayer, Jacques Baudot, Claude Belot, Mme Maryse
Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Guy
Cabanel, Jean-Pierre Camoin, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques
Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jacques Delong, Yann Gaillard, Hubert
Haenel, Claude Haut, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Marc
Massion, Michel Mercier, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Oudin,
Henri Torre, René Trégouët.
Voir les numéros
:
Sénat
:
362
,
370
et
378
(1997-1998).
|
Union européenne. |
AVANT-PROPOS
La commission des finances du Sénat a été
saisie de trois propositions de résolution relatives à la
recommandation de la Commission européenne préconisant l'adoption
par onze Etats de l'euro. Ce rapport est consacré à l'ensemble de
ces textes.
La recommandation de la Commission au Conseil s'inscrit dans le cadre de la
procédure organisée par l'article 109 J du
traité sur l'Union européenne -article 121 du traité
d'Amsterdam- pour passer à la troisième phase de l'Union
économique et monétaire.
Cette troisième phase qui, faut-il le rappeler, est celle de l'adoption
de la monnaie unique, de l'euro, contribue à atteindre l'un des
objectifs majeurs de la Communauté européenne,
l'établissement d'une Union économique et monétaire.
Le chemin vers une union monétaire en Europe a été long et
semé d'embûches. L'aboutissement du projet est le résultat
d'un engagement politique très fort de plusieurs
générations de chefs d'Etat et de gouvernement que, moyennant
débat, les opinions publiques ont soutenu majoritairement. L'adoption de
l'euro est avant tout un acte politique. Chaque Etat participant abandonne une
part de sa souveraineté au profit de la construction européenne.
L'adoption de l'euro est une étape historique de cette construction.
Elle resserre les liens entre les Etats et les peuples d'Europe. Elle s'inscrit
dans le mouvement vers une Europe unie et puissante.
Ce dernier ne peut lui-même se comprendre sans référence au
processus de mondialisation. Face à des puissances économiques
extérieures considérables, les Etats européens doivent
relever le défi et, par conséquent, s'unir. Cette union est
d'autant plus nécessaire qu'existe entre eux une forte
interdépendance économique et d'autant plus justifiée que
de profondes racines culturelles communes unissent les peuples d'Europe.
L'adoption d'une monnaie unique les renforcera sans doute mais elle doit
surtout permettre de retrouver une vraie souveraineté monétaire
fondée sur la disposition d'une monnaie appelée à devenir
à tout le moins l'égale des autres devises internationales. Cette
souveraineté monétaire retrouvée s'inscrit en outre dans
un contexte de solidarité monétaire renforcée entre les
Etats européens. L'euro, c'est bien aussi le partage d'une même
monnaie et l'abandon de "l'arme monétaire" entre les pays
européens.
Le désarmement monétaire n'est cependant pas le
désarmement général. La fin de l'illusion monétaire
signe sans doute une intensification supplémentaire des concurrences.
Les performances économiques compteront plus encore demain qu'hier.
L'adoption de l'euro, qui ne constitue pas de ce point de vue une
révolution, mais plutôt un stade supplémentaire et ultime
dans une évolution vers un système monétaire
européen de changes fixes, appelle donc un approfondissement de la
construction européenne.
Il reste en effet à poser les règles d'une concurrence loyale. Il
reste sans doute aussi à progresser vers la conciliation des points de
vue, des objectifs et des moyens.
Mais, s'agissant de l'Union monétaire, le passage à la
troisième phase de sa réalisation en constitue, pour les pays qui
y participeront, l'aboutissement
au terme duquel se trouvent
instaurées une monnaie unique ainsi que la définition et la
conduite d'une politique monétaire et d'une politique de change uniques.
L'article 4 du traité détermine l'objectif principal de
cette union qui est de maintenir la stabilité des prix "
et, sans
préjudice de cet objectif, de soutenir les politiques économiques
générales dans la Communauté
".
Cet aboutissement doit réussir car l'adoption de l'euro est bien une
étape majeure, historique, de la construction européenne. Mais
elle ne deviendra un succès que pour autant que sa contribution à
la réalisation des objectifs éminents qu'elle est censée
servir soit effective.
C'est à cette condition qu'elle recueillera le plein soutien des peuples.
L'union monétaire n'est en effet pas une fin suprême. Elle n'est
d'ailleurs pas considérée par les traités autrement que
comme un moyen parmi d'autres, l'établissement d'un marché
commun, la mise en oeuvre de politiques économiques communes, au service
d'un projet plus ambitieux.
Celle-ci, telle que précisée à Amsterdam, est
définie à l'article 2 du traité et consiste à
"promouvoir
dans l'ensemble de la Communauté
un
développement harmonieux
équilibré et durable
des
activités économiques, un niveau d'emploi et de protection
sociale élevé,
l'égalité entre les hommes et les
femmes
, une croissance durable et non inflationniste, un haut degré
de
compétitivité et de
convergence des performances
économiques, un niveau
élevé de protection et
d'amélioration de la qualité de l'environnement
, le
relèvement du niveau et de la qualité de vie, la cohésion
économique et sociale et la solidarité entre les Etats
membres
1(
*
)
".
Quant à l'Union économique et monétaire, elle suppose
à côté de l'Union monétaire, la mise en oeuvre
d'actions diverses dont l'énoncé se trouve aux articles 3 et 4 du
traité. Parmi celles-ci, il faut citer, car il s'agit d'une sorte de
pendant de l'unification monétaire "l'instauration d'une politique
économique fondée sur l'étroite coordination des
politiques économiques des Etats membres...".
CHAPITRE PREMIER
L'EURO POUR ONZE ÉTATS
MEMBRES
La recommandation de la Commission consacre les succès
économiques remportés par l'Europe.
Elle ouvre la perspective du développement d'une monnaie unique, facteur
de solidarité entre les Etats qui l'adopteront et de puissance pour
l'Europe.
Mais, tout n'est pas pour autant acquis. L'Europe doit affermir sa situation
économique et apprendre à gérer une monnaie unique.
I. LE SUCCÈS DE LA CONVERGENCE FONDE L'ADOPTION PAR UNE LARGE COMMUNAUTÉ D'ETATS D'UNE MÊME MONNAIE, INSTRUMENT D'UNE EUROPE PUISSANTE
A. LES SUCCÈS DE LA CONVERGENCE ÉCONOMIQUE
Les progrès réalisés en matière de convergence conduisent la Commission à recommander la constitution d'une zone euro à onze pays. Quelques indications liminaires s'imposent pour rappeler la procédure prévue par le Traité et souligner la justification de l'intervention du Parlement national dans le processus en cours.
La procédure prévue par le
Traité
La recommandation de la Commission s'inscrit dans le cadre de
la procédure prévue à l'article 109 J du
traité de Maastricht.
Les stipulations du traité -article 109 J- organisant le passage
à la troisième phase de réalisation de l'union
économique et monétaire précisent que, sauf mise en oeuvre
antérieure, la troisième phase
commence
le
1er janvier 1999.
La procédure se déroule en plusieurs étapes.
·
La commission et l'Institut monétaire
européen -IME- ont rendu le 25 mars dernier leurs
rapports
-visés au paragraphe I
de l'article
-
consacrés aux
progrès faits par les Etats membres dans
l'accomplissement de leurs obligations pour la réalisation de l'Union
économique et monétaire.
·
La commission a alors adressé la
recommandation visée par les propositions de résolution
renvoyées à la commission des finances du Sénat au Conseil
de l'Union européenne qui statuant à la majorité
qualifiée devra
évaluer
"
pour chaque Etat membre s'il
remplit les conditions nécessaires pour l'adoption d'une monnaie
unique".
Le Conseil de l'Union européenne transmettra alors sous
forme de recommandations ses conclusions au Conseil réuni au niveau des
chefs d'Etat et de gouvernement.
Le Parlement européen est consulté sur les recommandations du
Conseil et transmet son avis au Conseil réuni au niveau des chefs d'Etat
et de gouvernement.
·
Finalement, ce dernier
confirmera
à la
majorité qualifiée quels sont les Etats qui remplissent les
conditions nécessaires pour l'adoption d'une monnaie unique.
Cette procédure appelle
quelques observations
afin de
préciser certains éléments, parfois un peu flous.
Le rôle central y est joué par le Conseil de l'Union
européenne.
C'est lui qui conclut qu'un Etat membre remplit les
conditions pour adopter la monnaie unique. La Commission, l'IME, le Parlement
européen n'ont pas de compétence décisionnaire en la
matière.
Un problème se pose, en revanche, au sujet de la compétence du
Conseil réuni au niveau des chefs d'Etat et de gouvernement. Le
Traité indique que celui-ci
confirme
les décisions du
Conseil de l'Union européenne. La marge d'appréciation
laissée au Conseil apparaît ainsi des plus réduites.
Pourtant, une règle de majorité étant posée, il y a
lieu de considérer que le Conseil dispose d'un pouvoir de
décision. Ainsi,
si le Conseil de l'Union européenne joue un
rôle central, celui-ci ne dispose pas d'une compétence exclusive.
Le Conseil réuni au niveau des chefs d'Etat et de gouvernement a le
dernier mot
, mais son pouvoir est "bordé" par les recommandations
du
Conseil de l'Union européenne.
Un débat s'est ouvert sur
l'automaticité du passage à
la monnaie unique
pour les Etats réunissant les conditions
nécessaires à l'adoption de l'euro. Ce débat exclut les
situations particulières du Danemark et du Royaume-Uni qui, par
protocoles annexés au traité, sont exemptés de
l'obligation d'adopter l'euro. Mais, pour les autres Etats,
c'est bien une
telle obligation qui est posée par le traité
sans
préjudice de la marge d'interprétation laissée aux
différentes institutions communautaires à l'occasion de l'examen
des performances économiques des Etats membres auquel, aux termes du
traité, elles se livrent.
Dans ces conditions, l'intervention éventuelle des Parlements
nationaux avant l'adoption de la recommandation du Conseil de l'Union
européenne, est-elle vraiment utile ?
Une réponse affirmative doit, sans aucune ambiguïté,
être donnée à cette interrogation. Il est non seulement
utile mais nécessaire à la démocratie que le Parlement
exprime à cette occasion ses volontés et les adresse au
gouvernement
. C'est là tout le sens de la procédure de
l'article 88-4 de notre Constitution. Sans doute celle-ci n'a-t-elle pas,
en l'occurrence, la portée juridique de la réserve
d'interprétation admise par la Cour constitutionnelle allemande au terme
de laquelle le Bundestag aura à se prononcer sur le passage à la
troisième phase de réalisation de l'Union monétaire. Mais,
elle constitue un outil politique de grande importance que seule une conception
négligeante du Parlement pourrait conduire à minimiser. Le
renforcement de l'intégration européenne appelle sans doute une
rénovation des moyens d'information et de contrôle des Parlements
nationaux à laquelle la Délégation du Sénat pour
l'Union européenne apporte une réflexion toute
particulière. Qu'il soit ici permis
d'insister pour que les
résolutions du Sénat soient prises en compte par
l'exécutif et que celui-ci mette le plus grand soin à rendre
compte de leur respect !
Une dernière observation doit souligner un paradoxe juridique introduit
par le droit européen. Le Parlement national ne sera, semble-t-il, pas
saisi des recommandations adressées par le Conseil de l'Union
européenne au Conseil réuni au niveau des chefs d'Etat et de
gouvernement alors que le Parlement européen aura lui l'occasion de
donner son avis au dit Conseil.
1. Retour sur les conditions d'adoption de la monnaie unique
La recommandation de la Commission est la suite logique de
l'examen présenté dans son rapport sur l'état de la
convergence du 25 mars 1998 des
"progrès faits par les Etats
membres dans l'accomplissement de leurs obligations pour la réalisation
de l'Union économique et monétaire"
.
Un autre rapport coexiste avec celui de la Commission, le rapport
élaboré par l'Institut monétaire européen -IME-.
Institutionnellement, il servira, tout comme le rapport de la Commission, de
base au Conseil pour évaluer si chaque Etat membre remplit les
conditions nécessaires pour l'adoption de la monnaie unique.
Ces dernières sont bien connues, mais il n'est pas inutile de les
rappeler.
Auparavant, il convient de souligner l'insistance mise par la Commission et
l'IME à placer sur un pied d'égalité toutes les conditions
posées par le Traité et à affirmer que chacune d'entre
elles doit être atteinte pour qu'un Etat puisse adopter l'euro.
Il est également à souligner que le Traité se
réfère à des conditions soit à une notion qui n'est
pas simplement assimilable aux fameux
critères
souvent
évoqués.
Les trois catégories de conditions
La première catégorie
de conditions est
institutionnelle
: les législations nationales doivent
être compatibles avec les articles 107 et 108 du Traité
et avec les statuts du système européen de banques centrales
-SEBC.
La deuxième catégorie
de conditions est la mieux connue,
popularisée qu'elle a été sous les vocables divers de
"critères de convergence", de "critères du traité de
Maastricht."
Il s'agit :
- de la réalisation d'un degré élevé de
stabilité des prix ;
- du caractère soutenable de la situation des
finances
publiques ;
- du respect des marges normales de fluctuation prévues par le
mécanisme de
change
du système monétaire
européen ;
- du caractère durable de la convergence atteinte par l'Etat membre et
de sa participation au mécanisme de change qui se reflète dans
les niveaux de
taux d'intérêt à long
terme
.
La troisième
et dernière catégorie de conditions,
appelées "facteurs supplémentaires" par la Commission, a
trait :
- au développement de l'écu ;
- aux résultats de l'intégration des marchés ;
- à la situation et à l'évolution des balances des
paiements courants ;
- à l'évolution des coûts salariaux unitaires et d'autres
indices de prix.
Ces conditions édictées au paragraphe 1 de
l'article 109 J ont été précisées, les
unes par la pratique d'examen de la Commission, les autres par protocole
annexé au Traité.
S'agissant des conditions institutionnelles
relatives à la
compatibilité des législations nationales avec les stipulations
du Traité, c'est à la pratique d'examen de la Commission qu'il
faut se reporter pour l'essentiel. Celle-ci a pris l'habitude de faire porter
son examen sur trois aspects :
- les objectifs assignés aux banques centrales nationales (BCN) ;
- leur indépendance ;
- leur capacité à être intégrées dans le
système européen de banques centrales (SEBC).
C'est ainsi qu'en ce qui concerne
les objectifs
des BCN, la Commission
estime qu'ils doivent être compatibles avec ceux du SEBC tels que
définis à l'article 105 paragraphe 1 du
Traité :
L'objectif principal du SEBC est de maintenir la
stabilité de prix. Sans préjudice de l'objectif de
stabilité des prix, le SEBC apporte son soutien aux politiques
économiques générales dans la Communauté, en vue de
contribuer à la réalisation des objectifs de la
Communauté, tels que définis à l'article 2"
.
Dans ces conditions, la Commission soumet la compatibilité des
dispositions de droit national renvoyant à la politique du gouvernement
ou à des objectifs macro-économiques spécifiques avec le
Traité, à la condition que
"soit respectée la
primauté des premier et deuxième objectifs de l'article 105
du Traité".
En ce qui concerne l'
indépendance
des BCN, la Commission
opère le classement des critères d'indépendance qui
suit :
" Critères institutionnels
Cette catégorie renvoie par exemple au fait qu'aucun organisme
extérieur à la BCN n'a le droit, en ce qui concerne les missions
relevant du SEBC :
- de donner des instructions à la BCN .
- d'approuver, de suspendre, d'annuler ou de différer une
décision de la BCN .
- de censurer les décisions de la BCN pour des raisons de
légalité ;
- de faire partie des organes de décision de la BCN en y ayant un droit
de vote ;
- d'être consulté avant que la BCN prenne une décision.
Critères liés au personnel
- Certaines règles doivent figurer dans la législation nationale
en application de l'article 14.2 des statuts du SEBC :
- la durée du mandat du Gouverneur doit être d'au moins cinq
ans ;
- un Gouverneur ne peut être relevé de ses fonctions que s'il ne
remplit plus les conditions nécessaires à l'accomplissement de
ses devoirs ou s'est rendu coupable de faute grave.
Critères financiers
Il est évident qu'une BCN doit répondre de ses actes en
matière financière. Cependant, instaurer un droit de
contrôle ex ante sur son budget peut, selon le contexte, la placer dans
l'impossibilité d'accomplir de manière indépendante les
missions qui lui incombent dans le cadre du SEBC.
Enfin, s'agissant de l'intégration des banques centrales nationales dans
le SEBC et des dispositions diverses, la Commission rappelle que la BCE veille
à ce que les missions conférées au SEBC soient
exécutées par ses propres activités
2(
*
)
ou par
les banques centrales nationales, et que les
BCN font partie intégrante du SEBC et agissent conformément aux
orientations et aux instructions de la BCE. Elle en déduit que les
dispositions des statuts des BCN qui les empêchent d'assumer leur
rôle doivent être adaptées conformément à
l'article 108, et donne une liste d'exemples de dispositions incompatibles
:
- dispositions en vertu desquelles la BCN est compétente pour fixer les
taux d'intérêt applicables aux opérations de crédit
ou pour imposer des réserves minimums ;
- règles liant le Gouverneur lors des votes au Conseil des gouverneurs
de la BCE ;
- dispositions empêchant l'organe de décision de la BCN de suivre
les orientations ou instructions de la BCE .
- règles ne respectant pas les dispositions financières des
statuts du SEBC .
- règles empêchant une BCN de détenir et de gérer
les réserves officielles de change."
S'agissant des "critères de convergence"
, leur définition
a été précisée par voie de protocoles
annexés au traité.
Le
protocole, n° 6
fixe les modalités des
critères. Il précise que le critère
de stabilité
de prix
signifie qu'un Etat membre a un degré de stabilité
des prix
durable
et un taux d'inflation
moyen observé au cours
d'une période d'un an
qui ne dépasse pas de plus de
1,5 % celui des trois Etats membres
au plus
présentant les
meilleurs résultats en matière de stabilité des prix.
S'agissant du critère relatif à
la situation des finances
publiques
, le protocole reprend fidèlement les termes de
l'article 109J en prévoyant que le caractère soutenable de
la situation des finances publiques sera atteint si l'Etat membre ne fait pas
l'objet au moment de l'examen d'une décision du Conseil
visée
à l'article 104C paragraphe 6 du traité
concernant
l'existence d'un
déficit excessif
dans l'Etat membre
concerné.
En ce qui concerne le
critère de participation au mécanisme de
change
, il signifie que la monnaie de l'Etat concerné a
respecté les marges normales de fluctuation prévues sans
connaître de tensions graves pendant
au moins
les deux
dernières années précédant l'examen.
Enfin, s'agissant du
critère des taux d'intérêt
, il
signifie que l'Etat membre n'a pas eu, pendant l'année
précédant l'examen, un taux d'intérêt nominal moyen
à long terme excédant de 2 % celui des trois Etats membres
au plus
présentant les meilleurs résultats en
matière de stabilité des prix.
Compte tenu du renvoi opéré à l'article 104C du
traité, le second protocole pertinent est
le protocole
n° 5
sur la procédure concernant les déficits
excessifs. Celle-ci fait l'objet de développements approfondis dans le
chapitre II de ce rapport qui rappelle, en particulier, les valeurs
retenues pour apprécier la discipline budgétaire dans les Etats
membres. Mais, une curiosité doit être remarquée.
Il est en effet souligné dans la suite de ce rapport qu'une lecture
à la lettre du texte de l'article 104 C semble exclure qu'une
décision du Conseil prise dans le cadre du paragraphe 6 du traité
"place" en situation de déficit excessif un Etat membre qui ferait
preuve de laxisme dans la maîtrise de sa dette publique.
Ce n'est donc que par le truchement d'une interprétation très
extensive mais conforme à la logique économique que le
critère de la dette publique a pu être pris en
considération pour apprécier l'aptitude d'un Etat membre à
adopter l'euro.
Il reste que l'on attend mieux de l'ordre juridique européen que le
recours à la syllepse dont on rappelle que, "figure de grammaire
réglant l'accord des mots, non d'après les règles
grammaticales, mais d'après les vues particulières de l'esprit",
elle a sans doute plus de charme et de justification dans la littérature
que dans les textes de droit.
S'agissant des "
facteurs supplémentaires
", c'est également
de la pratique de la Commission qu'on peut tirer quelques enseignements sur
leur sens.
C'est en effet une appréciation large dont dispose la Commission pour
apprécier les différents "facteurs supplémentaires"
énoncés par le traité.
2. Les performances économiques des Etats membres
Le rapport de la Commission et le rapport de l'IME
s'accordent
pour constater que onze Etats membres candidats à l'adoption de l'euro
présentent les conditions posées pour procéder à
l'adoption de l'euro.
Le tableau ci-dessous synthétise l'état de chacun au regard des
"critères de convergence" tel que le décrit le rapport de la
Commission.
Situation actuelle des Etats membres en matière de convergence
|
Inflation |
Situation des finances publiques |
Taux de change |
Taux d'intérêt à long terme |
|||||
|
IPCH
|
Existence d'un déficit
excessif
|
Déficit (% du
PIB)
|
Dette
|
Participation au mécanisme de change |
|
|||
|
Janvier 1998 |
|
1997 |
1997 |
Variation par
rapport
à
|
Mars 1998 |
Janvier 1998 |
||
|
|
|
|
|
1997 |
1996 |
1995 |
|
|
Valeur de référence |
2,7 (e) |
|
3 |
60 |
|
|
|
|
7,8 (f) |
B |
1,4 |
oui (g) |
2,1 |
122,2 |
- 4,7 |
- 4,3 |
- 2,2 |
oui |
5,7 |
DK |
1,9 |
non |
- 0,7 |
65,1 |
- 5,5 |
- 2,7 |
- 4,9 |
oui |
6,2 |
D |
1,4 |
oui (g) |
2,7 |
61,3 |
0,8 |
2,4 |
7,8 |
oui |
5,6 |
EL |
5,2 |
oui |
4,0 |
108,7 |
- 2,9 |
1,5 |
0,7 |
oui (h) |
9,8 (i) |
E |
1,8 |
oui (g) |
2,6 |
68,8 |
- 1,3 |
4,6 |
2,9 |
oui |
6,3 |
F |
1,2 |
oui (g) |
3,0 |
58,0 |
2,4 |
2,9 |
4,2 |
oui |
5,5 |
IRL |
1,2 |
non |
- 0,9 |
66,3 |
- 6,4 |
- 9,6 |
- 6,8 |
oui |
6,2 |
I |
1,8 |
oui (g) |
2,7 |
121,6 |
- 2,4 |
- 0,2 |
- 0,7 |
oui (j) |
6,7 |
L |
1,4 |
non |
- 1,7 |
6,7 |
0,1 |
0,7 |
0,2 |
oui |
5,6 |
NL |
1,8 |
non |
1,4 |
72,1 |
- 5,0 |
- 1,9 |
1,2 |
oui |
5,5 |
A |
1,1 |
oui (g) |
2,5 |
66,1 |
- 3,4 |
0,3 |
3,8 |
oui |
5,6 |
P |
1,8 |
oui (g) |
2,5 |
62,0 |
- 3,0 |
- 0,9 |
2,1 |
oui |
6,2 |
FIN |
1,3 |
non |
0,9 |
55,8 |
- 1,8 |
- 0,4 |
- 1,5 |
oui (k) |
5,9 |
S |
1,9 |
oui (g) |
0,8 |
76,6 |
- 0,1 |
- 0,9 |
- 1,4 |
non |
6,5 |
UK |
1,8 |
oui (g) |
1,9 |
53,4 |
- 1,3 |
0,8 |
3,5 |
non |
7,0 |
EUR |
1,6 |
|
2,4 |
72,1 |
- 0,9 |
2,0 |
3,0 |
|
6,1 |
(a)
Variation en pourcentage de la moyenne
arithmétique des 12 derniers indices mensuels des prix à la
consommation harmonisés (IPCH) par rapport à la moyenne
arithmétique des 12 IPCH de la période précédente.
(b)
Décisions du Conseil des 26 septembre 1994, 10 juillet
1995, 27 juin 1996 et 30 juin 1997.
(c)
Un signe
négatif indique un excédent.
(d)
Durée moyenne : 10 ans ; moyenne des
12 derniers mois.
(e)
Définition adoptée dans le
présent rapport : moyenne arithmétique simple des taux
d'inflation des trois Etats membres présentant les meilleurs
résultats en matière de stabilité des prix, majorée
de 1,5 point de pourcentage.
(f)
Définition
adoptée dans le présent rapport : moyenne
arithmétique simple de la moyenne sur 12 mis des taux
d'intérêt des trois Etats membres présentant les meilleurs
résultats en matière de stabilité des prix, majorée
de 2 points de pourcentage.
(g)
Abrogation recommandée
par la Commission. (H) Depuis mars 1998.
(i)
Moyenne des
données disponibles au cours des 12 derniers mois.
(j)
Depuis novembre 1996.
(k)
Depuis octobre 1996.
Source : Services de la Commission.
S'agissant du
taux d'inflation
, quatorze des quinze
Etats membres inscrivent un taux d'inflation inférieur à la
valeur de référence. Celle-ci s'élève à
2,7 % soit "la moyenne des trois Etats membres présentant les
meilleurs résultats en matière de stabilité des prix"
à laquelle est ajoutée la valeur fixée par le
traité de 1,5 %.
Il est à noter que la France compte parmi les trois Etats membres,
-l'Autriche et l'Irlande sont les deux autres- dont le taux d'inflation sert de
référence.
Mais il faut aussi noter que la convergence des taux d'inflation en Europe vers
de très bas niveaux a été très forte, certains
Etats, l'Italie, l'Espagne et le Portugal en particulier n'ayant
réalisé que fort récemment, pour l'essentiel au cours du
second semestre 1997, les progrès considérables qui leur
permettent aujourd'hui de satisfaire les exigences du traité.
S'agissant de la
situation des finances publiques,
quatorze des quinze
Etats membres ont réalisé un processus d'ajustement
budgétaire leur permettant d'atteindre les conditions fixées par
le Traité.
Le tableau ci-dessous illustre l'ampleur de l'assainissement des soldes publics
réalisés en moyenne en Europe.
Excédent/déficit des administrations
publiques
(Capacité (+)/besoin (-) de financement des administrations
(en pourcentage du PIB
|
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998* |
B
|
- 7,1
|
- 4,9
|
- 3,9
|
- 3,2
|
- 2,1
|
- 1,7
|
F |
- 5,8 |
- 5,8 |
- 4,9 |
- 4,1 |
- 3,0 |
- 2,9 |
IRL
|
- 2,7
|
- 1,7
|
- 2,2
|
- 0,4
|
0,9
|
1,1
|
EUR |
- 6,1 |
- 5,4 |
- 5,0 |
- 4,2 |
- 2,4 |
- 1,9 |
* Budgets économiques du printemps 1998. Source : Services de la commission
.
Le besoin de financement des administrations publiques qui
était de 6,1 % du PIB en 1993 a été réduit de
3,7 points et s'élève en 1997 à 2,4 % du PIB.
Les prévisions de la Commission établissent le caractère
durable de cette baisse du besoin de financement des administrations publiques
qui devrait passer à 1,9 % du PIB européen au cours de
l'année. Il est remarquable que ce mouvement se soit
accéléré à mesure que s'approchait la date d'examen
des conditions de participation à l'euro. Mais il faut également
souligner la diversité des efforts consentis par les Etats pour
réduire leurs déficits. A cet égard, la Belgique, la
Grèce -qui aurait peut-être pu à ce titre mériter
une abrogation de la décision la plaçant dans une situation de
déficit excessif-, l'Espagne, l'Italie, le Portugal, la Suède et
le Royaume-Uni, tout deux pays non participants, ont réalisé un
cheminement spectaculaire vers l'équilibre de leurs finances publiques.
S'agissant de la
participation au mécanisme de change,
la
Commission estime que seuls trois pays, le Royaume-Uni, la Suède et la
Grèce ne peuvent être considérés comme remplissant
cette condition. Elle concède que ni l'Italie, ni la Finlande n'auront
acquis, à la date d'examen du Conseil, l'ancienneté requise pour
satisfaire au critère. Mais elle remarque que la stabilité de ces
deux monnaies leur aurait permis, sans tensions graves, de participer au
mécanisme de change au cours de la période retenue pour l'examen
de cette condition. En conséquence, elle recommande que douze pays
soient considérés comme satisfaisant le critère de
stabilité des changes.
S'agissant de la condition relative aux
taux d'intérêt
réels,
la convergence des performances des Etats membres est grande.
Evolution des taux d'intérêt à long
terme
(moyennes sur 12 mois)
|
1993 a) |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
Janvier
|
B |
7,2 |
7,8 |
7,5 |
6,5 |
5,8 |
5,7 |
DK |
7,3 |
7,8 |
8,3 |
7,2 |
6,3 |
6,2 |
D |
6,5 |
6,9 |
6,9 |
6,2 |
5,6 |
5,6 |
EL c) |
23,3 |
20,8 |
17,4 |
14,4 |
9,9 |
9,8 |
E |
10,2 |
10,0 |
11,3 |
8,7 |
6,4 |
6,3 |
F |
6,8 |
7,2 |
7,5 |
6,3 |
5,6 |
5,5 |
IRL |
7,7 |
7,9 |
8,3 |
7,3 |
6,3 |
6,2 |
I |
11,2 |
10,5 |
12,2 |
9,4 |
6,9 |
6,7 |
L |
6,8 |
7,2 |
7,2 |
6,3 |
5,6 |
5,6 |
NL |
6,4 |
6,9 |
6,9 |
6,2 |
5,6 |
5,5 |
A |
6,7 |
7,0 |
7,1 |
6,3 |
5,7 |
5,6 |
P |
11,2 |
10,5 |
11,5 |
8,6 |
6,4 |
6,2 |
FIN |
8,8 |
9,0 |
8,8 |
7,1 |
6,0 |
5,9 |
S |
8,5 |
9,7 |
10,2 |
8,0 |
6,6 |
6,5 |
UK |
7,6 |
8,2 |
8,3 |
7,9 |
7,1 |
7,0 |
EUR d) |
8,0 |
8,2 |
8,5 |
7,3 |
6,2 |
6,1 |
Valeur de référence e) |
|
|
|
9,1 |
8,0 |
7,8 |
Moyenne des trois pays les plus performants |
|
|
|
7,1 |
6,0 |
5,8 |
Taux de dispersion f) |
1,6 |
1,3 |
1,8 |
1,0 |
0,5 |
0,5 |
a) Pour 1993, les données afférentes au
Luxembourg, au Portugal et à la Grèce ne sont pas comparables.
b) Moyenne pour la période février 1997 - janvier 1998.
c) Les données afférents à la Grèce ne sont pas
comparables.
d) Moyenne pondérée sur la base du PIB.
e) Moyenne des taux d'intérêt des trois Etats membres
(soulignés) présentant les meilleurs résultats en
matière de stabilité des prix, majorée de 2 points de
pourcentage.
f) mesuré par l'écart type (la Grèce est exclue pour
chacune des années considérées).
Source : IME; Eurostat.
L'Europe, dans son ensemble, a connu une décrue des
taux d'intérêt passés depuis 1993 de 8 à 6,1 %.
Quatorze des quinze Etats membres satisfont le critère posé par
le Traité. Leurs taux d'intérêt sont inférieurs
à la valeur de référence de 7,8 %.
L'appréciation des "facteurs supplémentaires" confirme
l'aptitude des Etats membres à adopter l'euro.
En ce qui concerne le
développement de l'écu
, la
Commission relève que celui-ci ne s'est pas réalisé de
façon satisfaisante. Elle n'en tire cependant aucune conséquence
estimant que la subsistance de monnaies nationales et la perspective de l'euro
ont expliqué ces mauvaises performances quand bien même les
perspectives plutôt rassurantes d'un taux de conversion de l'écu
en euro de 1 pour 1 auraient pu doper les transactions.
En ce qui concerne
les résultats de l'intégration des
marchés
, la Commission relève le développement des
échanges intracommmunautaires dont la part dans le commerce total des
Etats membres s'est accrue de 2,6 points entre 1985 et 1997 et
s'élève en moyenne à 61,2 % en 1997.
Part des échanges intracommunautaires
dans le commerce total
a)
|
1997 b) |
Variation de la
part
|
Variation de la
part
|
B/L |
72,6 |
4,0 |
0,3 |
DK |
68,5 |
4,8 |
4,3 |
D |
56,8 |
3,8 |
- 2,3 |
EL |
58,6 |
14,0 |
4,9 |
E |
67,0 |
16,8 |
19,3 |
F |
63,9 |
7,5 |
4,7 |
IRL |
64,4 |
2,5 |
- 8,7 |
I |
57,3 |
10,9 |
6,1 |
NL |
67,9 |
3,6 |
- 0,4 |
A |
68,6 |
7,8 |
7,0 |
P |
76,6 |
17,6 |
18,0 |
FIN |
57,0 |
9,2 |
6,0 |
S |
57,9 |
3,0 |
- 1,7 |
UK |
52,1 |
3,3 |
- 1,1 |
EUR |
61,2 |
6,1 |
2,6 |
a) Moyenne des importations et des exportations de
marchandises
b) Neuf premiers mois
Source : Eurostat
Le tableau qui précède démontre cependant que
l'intensité de l'intégration varie selon les Etats puisque 6
d'entre eux présentent un ratio inférieur à la moyenne, le
Royaume-Uni apparaissant toutefois comme la seule économie
significativement partagée entre l'Europe et le reste du monde pour ses
échanges.
Il est à souligner que la Commission conteste vigoureusement la
qualité des statistiques du commerce intracommunautaire.
Selon elle, le passage d'un enregistrement douanier à une méthode
d'enquête nécessité par l'élimination des
formalités aux frontières en 1993 dans le cadre du marché
unique donne lieu à une "sous-estimation
considérable
des
flux effectifs".
Ce constat est évidemment très
préoccupant compte tenu de ses implications fiscales et
douanières.
Pour apprécier l'intégration des marchés, la Commission
s'attache également à analyser les flux d'investissements directs
étrangers. Elle met en évidence l'accroissement de la part des
flux intracommunautaires passée de 57 % du total entre 1986 et 1991
à 65 % entre 1992 et 1996.
Un mouvement significatif s'est produit entre ces deux périodes avec un
rééquilibrage des flux au terme duquel l'attractivité du
Royaume-Uni qui reste forte (20 % des entrées de capitaux) s'est
considérablement réduite, avec une perte de 12 points. En
contrepartie, les Pays-Bas mais aussi la France ont, semble-t-il,
renforcé leur attrait. Il n'en reste pas moins que six pays attirent
à eux seuls 70 % des investissements directs étrangers et
que la dispersion des flux apparaît encore assez grande.
On peut en conclure que
l'attractivité des espaces économiques
reste très différenciée en Europe
.
Cette caractéristique importante s'inscrit dans
un contexte de
concentration économique
permettant aux entreprises
manufacturières les plus importantes de gagner des parts de
marché. On relève souvent l'impact de l'unification
monétaire en Europe sur l'accentuation des phénomènes de
concentration géographique et économique des sites de production.
Le constat présenté par la Commission ne valide pas cette analyse
ou, plus précisément, s'il démontre que certains pays sont
plus attractifs que d'autres, il indique que les pays attractifs sont nombreux.
Il apporte également, semble-t-il, la preuve qu'existe un coût
pour les pays non candidats à l'euro, en tout cas, pour l'un d'entre
eux, le Royaume-Uni, dont la part des investissements internationaux qui lui
revient fond à vive allure.
Deux enseignements supplémentaires ressortent de l'analyse de la
Commission.
La concentration économique a jusqu'à présent
concerné surtout l'industrie, le secteur des services y échappant
largement.
Une évolution contraire pourrait cependant naître
du fait des déréglementations en cours.
La concentration économique a intensifié les
phénomènes de concurrence, dans l'industrie au moins.
La
taille des entreprises européennes n'est pas telle que le "monopole de
secteur" soit la règle en Europe. Cette concurrence a constitué
un facteur structurel de désinflation en Europe si bien que les marges
moyennes des entreprises auraient été, selon les estimations de
la Commission, inférieures de 0,5 point à ce qu'elles
auraient été sans le marché unique entre 1987 et 1991.
En ce qui concerne la
situation et l'évolution des balances des
paiements courants
, plusieurs éléments doivent d'abord
être soulignés. Le premier d'entre eux est que, si les balances
extérieures de chacun des pays exerceront un rôle sensiblement
moins important sur la valeur des taux de change une fois l'union
monétaire réalisée en Europe, elles constituent un
indicateur très précieux de la situation d'endettement global de
chaque pays.
Autrement dit, un solde positif indique l'existence d'une capacité de
financement de la Nation, c'est-à-dire d'une épargne globale,
addition des épargnes des agents économiques (Etats,
ménages, entreprises) supérieur aux besoins nationaux.
On doit à ce stade rappeler une controverse d'économistes qui
n'est pas sans intérêt compte tenu du constat d'une assez forte
dispersion des performances obtenues par les différents Etats en la
matière.
Certains économistes rappellent en effet que si le niveau des taux
d'intérêt dépend de l'équilibre entre offre et
demande d'épargne, il convient d'apprécier la performance d'une
économie de ce point de vue à partir d'un jugement d'ensemble sur
les conditions de cet équilibre. Autrement dit, qu'un agent
économique national s'endette n'est pas un problème dès
lors que les autres offrent une épargne suffisante pour que
l'équilibre national reste inchangé. Or, le seul indicateur
pertinent est alors la capacité de financement de la Nation. Il serait
donc inutile de s'intéresser à la situation d'un agent en
particulier, ce que fait la construction européenne lorsqu'elle encadre
le déficit et la dette de l'Etat et néglige la capacité de
financement de la Nation. Une validation empirique de cette analyse
proviendrait des Etats-Unis où l'absence de déficit public
n'empêche pas l'existence d'un fort besoin de financement de la Nation,
résultat du déséquilibre entre l'épargne et
l'investissement du secteur privé.
Cette analyse n'emporte pas entièrement la conviction dans la mesure
où elle ignore certains autres éléments
d'appréciation comme l'effet dynamique d'une baisse de la demande
d'épargne d'un agent sur la situation des autres, les
caractéristiques particulières de l'Etat en tant qu'agent
économique ou organe de régulation, la soutenabilité pour
un agent particulier de son endettement.
Mais elle doit être présente à l'esprit lorsqu'on
évalue la responsabilité particulière de chaque
économie dans le processus de fixation des taux d'intérêt
ou encore sur le niveau prévisible des taux d'intérêt ou du
taux de change après l'adoption de l'euro.
Solde de la balance des opérations courantes
(définition des comptes nationaux, en % du PIB)
|
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998* |
B |
3,3 |
3,9 |
4,5 |
4,5 |
4,9 |
5,2 |
DK |
3,0 |
1,5 |
0,8 |
0,8 |
0,1 |
0,0 |
D |
- 1,1 |
- 1,5 |
- 1,4 |
- 1,2 |
- 0,6 |
0,1 |
EL |
- 2,6 |
- 0,8 |
- 2,1 |
- 2,6 |
- 2,3 |
- 2,8 |
E |
- 1,0 |
- 1,3 |
0,4 |
0,3 |
0,6 |
0,7 |
F |
1,0 |
1,0 |
1,5 |
1,6 |
2,9 |
2,9 |
IRL |
5,3 |
3,6 |
4,5 |
3,8 |
3,9 |
3,1 |
I |
1,0 |
1,4 |
2,4 |
3,4 |
3,1 |
3,1 |
L |
20,1 |
18,2 |
15,4 |
16,3 |
14,4 |
17,0 |
NL |
4,9 |
5,4 |
5,5 |
5,8 |
5,8 |
5,6 |
A |
- 0,4 |
- 0,9 |
- 1,8 |
- 2,1 |
- 1,9 |
- 1,6 |
P |
- 2,3 |
- 2,7 |
- 2,0 |
- 1,4 |
- 2,8 |
- 2,7 |
FIN |
- 1,3 |
1,3 |
4,1 |
3,8 |
5,3 |
6,0 |
S |
- 1,4 |
- 0,5 |
1,2 |
1,5 |
2,1 |
2,2 |
UK |
- 2,4 |
- 1,9 |
- 1,9 |
- 1,5 |
- 0,9 |
- 2,2 |
EUR |
- 0,1 |
0,0 |
0,4 |
0,8 |
1,2 |
1,1 |
*Budgets économiques du printemps 1998
Source : Services de la commission.
Sur le premier point, il faut relever que la Commission
distingue trois groupes de pays. Le premier réunit le Danemark,
l'Allemagne, l'Espagne, l'Autriche et le Royaume-Uni, dont les balances des
paiements courants sont plus ou moins à l'équilibre, mais ont
connu, pour certains pays -Allemagne, Royaume-Uni- des déficits
considérables et qui présentent des résultats
inégalement favorables.
Le deuxième groupe réunit la Belgique, la France, l'Irlande,
l'Italie, les Pays-Bas, la Suède et la Finlande qui affichent des
excédents supérieurs à 2 % du PIB.
L'Italie présente probablement une situation particulière due
à la dépréciation de la lire dans le courant des
années 90, mais on ne note pas, depuis, de dégradation de sa
situation.
Le dernier groupe, la Grèce et le Portugal, connaît des
déficits supérieurs à 2 % du PIB.
L'équilibre entre épargne et investissement n'est certes pas
intangible et dépend de variables aussi bien réelles que
monétaires appelées à évoluer. Toutefois,
les
données disponibles
doivent être appréciées dans
un contexte de convergence monétaire si bien qu'elles
apparaissent
assez significatives de l'équilibre épargne-investissement dans
chaque Etat et, partant, de l'influence de chacun sur le niveau des taux
d'intérêt
.
La contribution du deuxième groupe de pays à l'excédent
extérieur de la zone européenne doit être
soulignée
. C'est d'ailleurs cet excédent qui pourrait
justifier une appréciation de l'euro par rapport aux autres monnaies
s'il se traduisait par un excès de demande sur l'offre d'euro. Cela
constituerait un facteur de détente des taux d'intérêt en
Europe qui profiterait à tous et dont chacun serait redevable aux pays
en excédent. La dépréciation corrélative du dollar
pourrait alors induire un écart de taux entre l'Europe et les Etats-Unis
supposés rémunérer davantage des emprunteurs formant des
anticipations de change défavorables au dollar. Dans ces conditions, le
taux de change euro-dollar reviendrait à l'équilibre
antérieur, mais avec un écart de taux d'intérêt
favorable au dynamisme de l'économie européenne à travers
les gains de compétitivité que suppose un niveau de taux
d'intérêt relativement bas.
Dernier "facteur supplémentaire", l'évolution
des coûts
salariaux unitaires et d'autres indices de prix
est
considérée par la Commission comme autant d'indicateurs
avancés de l'inflation.
La Commission souligne la convergence des performances acquises par les Etats
membres en matière de coûts salariaux unitaires. Elle souligne que
la hausse modérée de ces coûts constitue "
l'une des
principales explications de l'évolution favorable de l'inflation au
cours de la deuxième phase
". Elle considère que ce
phénomène résulte de changements structurels qui devraient
perdurer et garantir à l'avenir une évolution des salaires
compatible avec la stabilité des prix.
Coûts salariaux
(variation en pourcentage, ensemble
de l'économie)
|
Rémunération
nominale
|
Accroissement de la productivité du travail |
Coûts salariaux
|
|||||||||||||
|
1990-1993 (a) |
1994-1997 (a) |
1997 |
1998* |
1990-1993 (a) |
1994-1997 (a) |
1997 |
1998* |
1990-1993 (a) |
1994-1997 (a) |
1997 |
1998* |
||||
B |
6,1 |
2,9 |
3,2 |
2,1 |
1,1 |
2,1 |
2,5 |
1,6 |
4,9 |
0,8 |
0,7 |
0,5 |
||||
DK |
3,6 |
3,6 |
4,0 |
4,3 |
2,2 |
1,9 |
0,7 |
1,5 |
1,4 |
1,7 |
3,2 |
2,7 |
||||
D |
6,4 |
2,9 |
1,8 |
2,0 |
2,4 |
2,9 |
3,7 |
2,7 |
3,8 |
0,0 |
- 1,8 |
- 0,6 |
||||
EL |
14,8 |
11,8 |
10,7 |
6,9 |
0,1 |
1,3 |
3,0 |
2,7 |
14,6 |
10,4 |
7,4 |
4,4 |
||||
E |
9,0 |
2,7 |
2,7 |
2,6 |
1,4 |
1,3 |
0,8 |
1,2 |
7,5 |
1,4 |
1,9 |
1,5 |
||||
F |
4,1 |
2,5 |
2,5 |
2,7 |
1,0 |
2,0 |
2,5 |
1,8 |
3,1 |
0,5 |
0,0 |
0,9 |
||||
IRL |
5,6 |
2,9 |
5,5 |
5,3 |
3,3 |
5,4 |
6,6 |
5,0 |
2,2 |
- 2,4 |
- 1,1 |
0,3 |
||||
I |
7,2 |
4,4 |
4,6 |
2,9 |
1,2 |
2,2 |
1,4 |
2,0 |
5,9 |
2,2 |
3,1 |
0,9 |
||||
L |
5,6 |
2,8 |
3,3 |
3,6 |
2,2 |
1,3 |
1,8 |
1,9 |
3,3 |
1,5 |
1,5 |
1,7 |
||||
NL |
3,9 |
2,4 |
2,7 |
3,3 |
1,1 |
1,7 |
1,1 |
1,6 |
2,8 |
0,6 |
1,6 |
1,7 |
||||
A |
5,6 |
2,4 |
1,6 |
2,2 |
1,6 |
2,3 |
2,7 |
2,3 |
3,9 |
0,0 |
- 1,1 |
- 0,1 |
||||
P |
14,8 |
6,5 |
4,3 |
3,9 |
2,1 |
2,3 |
1,8 |
2,7 |
12,4 |
4,1 |
2,5 |
1,2 |
||||
FIN |
4,4 |
3,0 |
1,3 |
3,4 |
2,0 |
3,8 |
3,8 |
2,4 |
2,4 |
- 0,8 |
- 2,4 |
1,0 |
||||
S |
6,6 |
4,5 |
3,8 |
2,7 |
1,8 |
2,9 |
2,9 |
2,0 |
4,7 |
1,6 |
0,8 |
0,7 |
||||
UK |
6,7 |
3,8 |
4,3 |
4,6 |
1,4 |
2,2 |
1,9 |
1,2 |
5,2 |
1,6 |
2,4 |
3,4 |
||||
EUR |
6,4 |
3,3 |
3,1 |
3,0 |
1,6 |
2,3 |
2,3 |
1,9 |
4,8 |
1,0 |
0,8 |
1,0 |
(a) Variation annuelle moyenne en pourcentage
* Budgets économiques du printemps 1998.
Source : Services de la Commission
B. L'ADOPTION D'UNE MONNAIE UNIQUE
L'adoption d'une même monnaie par onze Etats signe l'aboutissement de la solidarité monétaire entre des Etats fortement interdépendants sur le plan économique. Elle devrait aussi favoriser l'émergence d'une devise majeure du système monétaire international, instrument de puissance et de prospérité pour l'Europe.
1. Une solidarité monétaire renforcée
L'instauration de l'euro est le complément
indispensable du marché unique. Elle constitue une voie de "sortie vers
le haut" des difficultés rencontrées par un système
monétaire européen imparfait.
Même si sa réalisation n'est encore que ponctuelle, le
marché unique s'est considérablement développé et
la libre circulation des capitaux et des biens y est désormais la
règle. Cette construction repose sur l'idée que les entraves
à la liberté économique sont contre-productives car
nuisant à une allocation optimale des facteurs.
Avec l'adoption de l'euro, c'est l'une de ces entraves qui disparaît. La
solidarité monétaire instituée entre les économies
de la zone aura en effet pour conséquence de faire disparaître les
" frottements " associés à la diversité des
signes monétaires.
Parmi les effets favorables attendus d'une telle disparition sont d'abord
citées les
économies réalisées sur les frais de
transaction
que le Commissaire européen chargé des affaires
monétaires et financières a pu évaluer à
200 milliards de francs par an
3(
*
)
.
Mais, les économies sur les coûts de transaction dont le chiffrage
mérite sans doute d'être affiné, n'est pas l'essentiel des
effets bénéfiques attendus de la monnaie unique.
Le premier d'entre eux est évidemment le fait que
l'instauration d'un
signe monétaire
commun à des économies fort ouvertes
les unes aux autres
supprime des occasions de manipulations des monnaies
à des fins compétitives
. C'est la fin de l'illusion
monétaire et, plus précisément, de l'artifice du change
utilisé à la seule fin de masquer des écarts réels
de compétitivité.
On doit en attendre, outre une compétition économique plus
loyale, l'instauration d'un cadre durablement non inflationniste.
Indicateurs du commerce extérieur en 1997 des pays de l'Union européenne
Exportations totales de biens et services (en % du PIB)
B |
DK |
D |
EL |
E |
F |
IRL |
I |
L |
NL |
A |
P |
FIN |
S |
UK |
75,5 |
35,0 |
24,8 |
16,3 |
26,2 |
24,3 |
75,6 |
27,1 |
93,5 |
55,7 |
40,6 |
34,1 |
38,1 |
40,9 |
29,8 |
Echanges intracommunautaires (en % de la moyenne des
importations et exportations de marchandises)
B/L |
DK |
D |
EL |
E |
F |
IRL |
I |
NL |
A |
P |
FIN |
S |
UK |
72,6 |
68,5 |
56,8 |
58,6 |
67,0 |
63,9 |
64,4 |
57,3 |
67,9 |
68,6 |
76,6 |
57,0 |
57,9 |
52,1 |
Ce phénomène revêt une importance toute
particulière compte tenu du degré d'ouverture des
économies européennes entre elles décrit par le tableau
ci-dessus.
Mais, au-delà, la création d'une monnaie commune est
appelée à supprimer les asymétries de fonctionnement du
système monétaire européen (SME). Ce dernier,
système de changes stables mais ajustables, a donné naissance
à au moins deux types d'asymétrie.
La première asymétrie
a résulté de ce qu'au
sein du SME coexistaient des monnaies dont la crédibilité est
vite apparue inégale aux marchés. Les monnaies du noyau dur
n'étaient guère contestées tandis que des épisodes
réguliers de spéculation sont venus fragiliser les autres
monnaies. Celles-ci n'ont pu échapper à des dévaluations,
le cas type des crises monétaires étant atteint avec la crise de
1992-1993. Un schéma classique présentait successivement une
variation du dollar à la baisse suivie d'une appréciation du mark
et d'une dépréciation des monnaies du SME jugées les plus
faibles.
La seconde asymétrie
est venue de ce que les théoriciens
appellent le "triangle d'incompatibilité de la politique
monétaire". Sous cette dénomination se cache l'affirmation selon
laquelle en situation de liberté des mouvements de capitaux, on ne peut
à la fois maîtriser son taux d'intérêt et son taux de
change. Dans le SME, le maintien des parités a, de fait, supposé
de la part des partenaires de l'Allemagne qu'ils calquent leur politique
monétaire et, en particulier, la fixation du niveau de leurs taux
d'intérêt sur celle de la Bundesbank.
Les partenaires de
l'Allemagne avaient ainsi perdu toute indépendance monétaire et
le recours à la dévaluation ne pouvait que la leur redonner un
court laps de temps, celui que les tensions inflationnistes en découlant
apparaissent à nouveau
. Pis encore, les marchés anticipant
d'éventuels épisodes de dépréciation de leurs
monnaies, les partenaires de l'Allemagne devaient supporter une prime de risque
qui haussait d'autant leurs taux d'intérêt par rapport aux taux
allemands. Il en résultait un écart de
compétitivité favorable à l'Allemagne.
C'est l'unification allemande qui présente, bien entendu, le cas le plus
typique de ces enchaînements.
Il est tout à fait remarquable que, la perspective de l'adoption de
l'euro se rapprochant, ces asymétries aient peu à peu disparu.
L'avènement de l'euro les supprimera à jamais.
La
solidarité économique de l'Europe sortira renforcée de
cette entière solidarité monétaire
.
2. Vers un euro, instrument de puissance et de prospérité de l'Europe
Le système monétaire international devrait quant
à lui sortir modifié de l'adoption de l'euro.
Il est jusqu'à présent très fortement dominé par le
dollar, que ce soit comme monnaie utilisée dans les échanges
commerciaux ou comme monnaie de réserve.
Malgré un certain rééquilibrage observable depuis quinze
ans, les tableaux ci-dessous démontrent la suprématie du dollar
sur les marchés de capitaux.
Marchés internationaux de capitaux
Total des fonds empruntés
a)
|
1975 |
1980 |
1985 |
1990 |
1995 |
1996 |
Total des émissions
|
40,6 |
116,5 |
259,8 |
361,4 |
841,3 |
1.058,5 |
Part de quelques
monnaies
|
74,3 |
76,2 |
68,8 |
44,6 |
56,0 |
54,7 |
Yen japonais |
0,2 |
1,6 |
7,1 |
9,0 |
10,0 |
7,4 |
Deutschemark |
9,2 |
8,5 |
4,7 |
7,2 |
10,6 |
10,8 |
Livre sterling |
0,4 |
1,9 |
3,5 |
11,9 |
6,9 |
8,3 |
Franc français |
0,9 |
1,6 |
0,6 |
3,0 |
2,3 |
5,9 |
ECU |
- |
0,0 |
3,7 |
7,8 |
2,5 |
0,5 |
a) Le total des fonds comprend les émissions d'obligations internationales, les prêts consortiaux à moyen et long terme et d'autres formes d'emprunt.
Obligations internationales a)
|
1975 |
1980 |
1985 |
1990 |
1995 |
1996 |
Total des émissions
|
19,9 |
38,3 |
167,8 |
229,9 |
467,3 |
708,8 |
Part de quelques
monnaies
|
51,2 |
42,7 |
60,9 |
34,8 |
37,8 |
43,6 |
Yen japonais |
0,4 |
4,8 |
7,2 |
13,4 |
17,7 |
10,9 |
Deutschemark |
16,3 |
21,9 |
6,8 |
8,0 |
15,6 |
14,1 |
Livre sterling |
0,2 |
3,0 |
4,2 |
9,2 |
4,6 |
7,3 |
Franc français |
1,8 |
3,0 |
0,9 |
4,2 |
2,7 |
6,5 |
ECU |
- |
0,0 |
4,3 |
7,8 |
1,5 |
0,7 |
a) Les obligations internationales comprennent le montant brut des offres publiques et privées d'euro-obligations et d'obligations en devises.
Source : Secrétariat de l'OCDE
Cette prééminence est confirmée par la part occupée par le dollar dans les avoirs officiels en devises.
Part dans le total des avoirs officiels en devises (en %)
|
Fin 1973 |
Fin 1983 |
Fin 1995 |
Dollar |
76,1 |
71,1 |
61,5 |
Monnaies européennes (1) |
14,3 |
15,8 |
20,1 |
dont Deutsche mark |
7,1 |
11,7 |
14,2 |
Yen |
0,1 |
4,9 |
7,4 |
(1) Livre sterling, Deutsche mark, franc français,
florin néerlandais
Source : FMI, rapports annuels
Mais,
le dollar n'est pas seulement la monnaie de réserve par
excellence. Il est aussi l'instrument monétaire le plus utilisé
pour libeller les échanges commerciaux internationaux.
Libellé des échanges internationaux
Part des principales monnaies dans le libellé des échanges
internationaux
|
1980 |
|
1992 |
|
|
Part des exportations mondiales libellées en (en %) |
|
Part des exportations mondiales libellées en (en %) |
|
Dollar |
56,4 |
4,5 |
47,6 |
3,6 |
Deutsche mark |
13,6 |
1,4 |
15,5 |
1,4 |
Yen |
2,1 |
0,3 |
0,3 |
0,6 |
(1) Ratio du montant des échanges internationaux
libellés dans une monnaie sur le montant des échanges
internationaux du pays d'origine de la monnaie
Source : Commission européenne
La création de l'euro pourrait modifier ces rapports de force.
L'accroissement de la part des échanges commerciaux libellés en
euros n'est pas l'effet le plus couramment attendu.
Les habitudes des pays
sont réformables mais progressivement. Cependant, en la matière,
rien n'est sûr et les exportateurs et importateurs peuvent vouloir
modifier leurs usages, ne serait-ce que pour diversifier les monnaies dans
lesquelles sont libellés leurs échanges et s'affranchir ainsi
d'un lien monétaire univoque. La dépendance à
l'égard du dollar des exportateurs de pétrole pourrait, par
exemple, inciter ceux-ci à recourir à la référence
euro pour libeller leurs exportations.
Les perspectives d'affirmation de la monnaie européenne comme monnaie de
réserve utilisée dans les transactions financières
internationales pourraient d'ailleurs hâter ce processus. Ces
perspectives sont, rappelons-le, d'une extrême importance puisqu'aussi
bien les transactions financières quotidiennes sont peut-être
quelque quarante fois supérieures aux transactions commerciales. La
constitution d'un vaste marché financier de titres libellés en
euro est un résultat mécanique de l'adoption par onze Etats de
cette monnaie. La substitualité des titres, des coûts de
transaction réduits et les opportunités de diversification qui en
résulteront devraient favoriser une décrue des taux
d'intérêt en Europe.
Mais, au-delà de ces modifications du système monétaire
international, la création de l'euro devrait avoir pour effet de rendre
relativement indolores les variations du dollar pour les pays
européens.
Les monnaies autrefois très sensibles aux évolutions du dollar
disparaissent et il y a tout lieu de considérer que l'euro se comportera
comme les monnaies du noyau dur du SME.
De plus, l'ouverture de l'Europe sur l'extérieur est beaucoup moins
grande que l'ouverture de chaque pays européen du fait de la
prééminence -voir supra- des échanges
intraeuropéens dans le commerce extérieur des Etats membres. Le
degré d'exposition à l'extérieur de l'Europe se compare
avec le degré d'exposition des Etats-Unis. A supposer que la part des
échanges intérieurs libellés en euro tende vers
100 %, la vulnérabilité des économies
européennes au dollar sera significativement réduite.
Il pourrait en résulter, mais ce n'est pas sûr, ce que les
économistes nomment une sorte de "benign neglect" à
l'égard de la parité de l'euro et du dollar qui affranchirait la
politique monétaire de l'Europe de considérations
extérieures à la zone euro.
La souveraineté monétaire de l'Europe, après celle de
certains de ses Etats, serait reconquise.
II. UN SUCCÈS QUI NE LÈVE PAS TOUTES LES INCERTITUDES ET QUI SUPPOSE UNE CONSOLIDATION DE LA SITUATION ÉCONOMIQUE EUROPÉENNE
La réussite de l'euro suppose une consolidation économique de l'Europe. L'adoption de l'euro ne lève pas toutes les incertitudes.
A. UNE CONSOLIDATION ÉCONOMIQUE EST NÉCESSAIRE
1. Des performances économiques encore inégales
Si le rapport de la Commission européenne se
félicite à juste titre des progrès réalisés
en matière de convergence, ce satisfecit ne doit pas occulter quelques
"difficultés" qui subsistent.
S'agissant des performances monétaires des Etats membres
,
plusieurs considérations conduisent non pas à mettre en cause
leur réalité, mais à en nuancer la portée.
S'agissant de l'inflation
, s'il faut reconnaître que les facteurs
structurels désormais à l'oeuvre en Europe, avec en particulier
un contexte concurrentiel renforcé et une politique monétaire
crédible, jouent un rôle désinflationniste puissant, on
doit aussi souligner la contribution de l'environnement conjoncturel aux
performances constatées. A cet égard, des
événements récents ont agi pour contenir
l'inflation ; ils ont, soit profité à l'ensemble de la zone
comme la baisse des prix des matières premières
consécutive à la crise asiatique, soit
bénéficié tout particulièrement à certains
pays, comme l'appréciation de la lire et de la peseta espagnole. Mais,
surtout, la croissance économique languissante observée dans les
pays de la zone euro, avec un rythme d'activité inférieur au
potentiel de croissance dans la plupart des pays a contenu les risques de
dérive inflationniste, en pesant sur les coûts de production. Le
tableau qui suit, récapitulant l'évolution des prix de production
depuis 1993, illustre ce phénomène.
Prix à la production
Production intérieur de l'ensemble de l'industrie, à l'exclusion
de la construction
(monnaie nationale variation en pourcentage)
|
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 a) |
B |
- 1,0 |
1,4 |
2,3 |
0,6 |
1,7 |
DK |
- 1,1 |
0,7 |
3,8 |
1,6 |
2,2 |
D |
0,2 |
0,6 |
1,7 |
- 0,4 |
1,1 |
EL |
11,4 |
7,2 |
9,5 |
7,4 |
3,5 |
E |
2,4 |
4,3 |
6,4 |
1,7 |
1,0 |
F |
- 1,0 |
0,3 |
2,2 |
0,5 |
0,2 |
IRL |
2,3 |
2,0 |
3,7 |
1,8 |
0,1 |
I |
3,8 |
3,7 |
7,9 |
1,9 |
1,3 |
L |
0,9 |
2,0 |
3,4 |
- 0,4 |
1,7 |
NL |
- 1,6 |
0,7 |
3,0 |
1,8 |
2,7 |
A b) |
- 0,4 |
1,3 |
0,4 |
0,0 |
0,4 |
P |
3,6 |
2,8 |
3,8 |
3,1 |
1,6 |
FIN |
2,8 |
1,9 |
1,8 |
- 0,1 |
1,3 |
S |
2,0 |
4,3 |
8,0 |
0,6 |
1,0 |
UK |
3,9 |
2,5 |
3,7 |
0,8 |
0,4 |
EUR d) |
1,7 |
1,9 |
3,9 |
0,8 |
1,0 |
a) Moyenne des onze premiers mois de 1997, rapportée
à la période correspondante de 1996.
b) Indice général des prix de gros.
Source : Services de la commission, OCDE.
Il illustre également que les pays les plus dynamiques
de la zone où, corrélativement, le taux de chômage est
relativement faible et l'utilisation des capacités de production
relativement tendue, ont tendance à connaître une
résurgence inflationniste. C'est tout particulièrement vrai pour
les Pays-Bas ; les situations de l'Irlande et du Royaume-Uni viennent le
confirmer. En effet, la modération des prix de production dans ces deux
pays provient exclusivement de l'appréciation de leur monnaie, alors que
les coûts salariaux unitaires nominaux y enregistrent un accroissement
sensible comme en rend compte le tableau de la page 26.
S'agissant de l'évolution et de la convergence des taux
d'intérêt à long terme
, deux observations doivent
être faites.
La première consiste à relever que la convergence n'est pas
l'uniformité et que les marchés exigent des conditions de
rémunération variables selon l'appartenance des émetteurs
à tel ou tel espace économique. Ces conditions, et c'est bien
l'essentiel, se sont toutefois rapprochées, de telle sorte que le
processus d'unification monétaire n'est pas affecté par la
dispersion des taux à long terme, unification qu'elle devrait d'ailleurs
conduire à réduire.
Une seconde observation consiste dans le constat que la dispersion des taux
à court terme est plus grande que celle des taux à long terme. Il
en résulte que la convergence des taux à long terme a, pour
certains pays, un prix : la fixation des taux courts plus
élevés. Il reste -voir infra- à apprécier l'impact
de ce phénomène sur la politique monétaire que conduira la
BCE.
Mais, c'est
la situation des finances publiques
qui suscite le plus
d'interrogations.
Si les déficits publics ont, dans l'ensemble, été
réduits, les performances acquises ont pu susciter quelques doutes quant
à leur perennité.
La réduction des déficits publics a été obtenue
dans un certain nombre de cas par des mesures exceptionnelles ou par des
reports de charges sur des exercices futurs.
En outre, certains pays, dont, malheureusement, la France n'ont aucune marge de
manoeuvre de sorte qu'ils se trouvent exposés à des chocs pouvant
les conduire à ne pas respecter les règles du traité. Ils
doivent poursuivre et intensifier l'assainissement de leurs comptes publics.
Mais c'est sans doute la situation de
l'endettement public
en Europe qui
reste le point le plus délicat.
Dette publique
(Dette brute consolidée des administrations publiques en % du PIB)
|
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998* |
B
|
135,2
|
133,5
|
131,3
|
126,9
|
122,2
|
118,1
|
F |
45,3 |
48,5 |
52,7 |
55,7 |
58,0 |
58,1 |
IRL
|
96,3
|
89,1
|
82,3
|
72,7
|
66,3
|
59,5
|
EUR |
65,9 |
68,0 |
71,0 |
73,0 |
72,1 |
70,5 |
a) Les dépôts du gouvernement auprès de
la banque centrale, les obligations émises par d'autres secteurs et
détenues par les administrations publiques et la dette relative aux
entreprises publiques s'élevaient à 13 % du PIB en 1997.
* Budgets économiques du printemps 1998.
Source Services de la commission.
Depuis 1993, la part de la dette publique dans le PIB européen a
progressé de 6,2 points. Elle s'élève à
72,1 % du PIB en 1997.
Sans même évoquer à ce stade le lien d'ailleurs
discuté entre le niveau de la dette publique et le niveau des taux
d'intérêt,
il faut souligner combien la situation d'endettement
pèse sur les marges de manoeuvre des budgets nationaux
.
Les charges de la dette publique qui représentaient en moyenne
4,8 % du PIB européen en 1989 s'élèvent à
5,3 % en 1997. Elles représentent plus de 11,4 % des recettes
courantes de l'ensemble des administrations publiques et presque le double de
leurs dépenses d'investissement.
Le tableau qui suit démontre que ces chiffres moyens s'accompagnent
d'une grande diversité de situation selon les pays concernés.
Charges d'intérêt supportées
par les
administrations publiques en 1997
(en % du PIB)
Pays |
1997 |
B |
8,1 |
DK |
5,9 |
D |
3,9 |
EL |
11,2 |
E |
5,3 |
F |
3,8 |
IRL |
4,2 |
I |
9,6 |
L |
0,4 |
NL |
5,4 |
A |
4,6 |
P |
4,5 |
FIN |
5,8 |
S |
7,0 |
UK |
3,9 |
EUR 15 |
5,3 |
Il met en évidence la fragilité de certains
Etats qui, en cas de tensions sur les taux d'intérêt, auraient
à faire face à un surcroît de dépenses au titre de
la dette qui les priverait de toutes marges de manoeuvre au moment où
ils en auraient le plus besoin.
C'est pourquoi la réduction de la dette publique est en Europe une
absolue nécessité. L'obligation de provisionner des engagements
financiers futurs lourds, les pensions de retraite en particulier, vient
confirmer cette conclusion.
Absolue nécessité financière et économique mais
aussi absolue nécessité morale car l'endettement public a
très largement excédé dans le passé les
dépenses d'investissement public ; tout s'est passé comme si
l'on demandait aux générations futures de financer le train de
vie des générations présentes.
La confrontation des chiffres du tableau ci-dessous avec les niveaux de
déficits publics constatés au cours des années
récentes démontre amplement cette observation.
Dépenses d'investissement des administrations
publiques
(Formation brute de capital fixe des administrations publiques, en % du PIB)
|
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
B
|
1,5
|
1,6
|
1,4
|
1,2
|
1,4
|
F |
3,3 |
3,2 |
3,1 |
2,7 |
2,8 |
IRL
|
2,2
|
2,3*
|
2,2*
|
2,2*
|
2,2*
|
EUR |
2,7 |
2,6 |
2,5 |
2,2 |
2,1 |
* Indique que les dépenses d'investissement des administrations publiques sont supérieures ou égales au déficit public.
Source : Services de la commission
Cette nécessaire réduction des dettes publiques
ne doit pas être différée. Elle impose des politiques
budgétaires probablement plus strictes que celles entreprises par
certains gouvernements.
C'est ce que démontre le tableau ci-dessous.
Caractère soutenable de l'évolution de la dette
|
Ratio de la dette publique en 1997 (en % du PIB) |
Variation du ratio de la dette 1996-1997 (en % du PIB) |
Solde primaire effectif en
1997
(en % du PIB)
|
Solde primaire nécessaire
à la stabilisation
de la dette en 1997 (en % du PIB)
|
Ecart à combler pour
stabiliser la dette a) en 1997
(en % du PIB)
|
Nombre d'années nécessaires pour ramener le ratio de la dette au-dessous de 60 % du PIB b) |
Année où le ratio de la dette tombera au-dessous de 60 % du PIB b) |
B
|
122,2
|
- 4,7
|
5,8
|
2,7
|
- 3,1
|
14
|
2011
|
F |
58,0 |
2,4 |
0,6 |
1,8 |
1,2 |
Dette60% |
Dette60% |
IRL
|
66,3
|
- 6,4
|
5,2
|
- 2,4
|
- 7,6
|
1
|
1998
|
EUR |
72,1 |
- 0,9 |
2,6 |
1,3 |
- 1,3 |
7 |
2004 |
a) Un signe négatif indique que le solde primaire
effectif est suffisant pour faire baisser le ratio de la dette en 1997.
L'ajustement stocks-flux n'est pas pris en compte pour ces calculs.
b) Les calculs ont été effectués comme suit : budgets
économiques du printemps 1998 pour le ratio de la dette jusqu'en 1999,
et projections pour les années ultérieures, les taux
d'intérêt sur la dette publique étant fixés à
un niveau commun de 6 %, les taux d'inflation à 2 %, les
ajustements stocks-flux à zéro, et les taux de croissance
réelle du PIB tendanciel et les soldes primaires étant
supposés constants aux niveaux prévus pour chaque Etat membre en
1999.
Source : Services de la commission
Ce tableau n'est pas une prévision. Il est bâti
à partir d'une maquette permettant de calculer le nombre d'années
nécessaires à chaque Etat pour ramener le ratio de sa dette
publique par rapport à son PIB sous la barre des 60 %. Le calcul
est effectué à partir d'orientations de politique
budgétaire portant sur le solde primaire (recettes publiques -
dépenses publiques hors charges d'intérêt) et
d'hypothèses faites sur la croissance et le coût de la dette
publique. Il est à signaler que ces deux dernières variables
échappent largement au contrôle.
Le tableau est donc bâti sur des conventions. Mais celles-ci sont
plutôt favorables grâce à un coût modéré
de la dette et à des taux de croissance plutôt dynamiques.
Malgré cette caractéristique, l'ajustement de certains pays
prendrait des années. Ce résultat confirme donc une
vulnérabilité des finances publiques de certains pays de la zone
euro appelant à souhaiter, de leur part, un ajustement plus rapide.
A cet égard, la responsabilité des grands pays est grande car
la stabilité de la zone euro dépendra, au premier chef, de leurs
propres performances.
Notre pays, qui compte pour environ 18 % du PIB européen, doit
donner l'exemple et donc modifier en conséquence sa politique
budgétaire.
Une autre politique budgétaire s'impose en France
Notre pays respecte désormais les deux conditions
posées par le Traité en matière de finances publiques.
C'est le résultat d'un comblement du déficit public nous
permettant d'atteindre en la matière le niveau nominal requis par le
Traité et d'éviter de dépasser le critère
fixé pour la dette.
Mais, nos performances sont très insuffisantes.
Exprimée en part de PIB, notre dette publique s'accroît. Notre
résultat en matière de déficit nous place dans une
situation de vulnérabilité face à tout accident
conjoncturel.
Le tableau ci-après permet de comparer la réduction de notre
besoin de financement avec les performances de nos partenaires.
Composition de l'assainissement budgétaire entre 1993
et 1997
(Chiffres ajustés cycliquement, en % du PIB tendanciel)
|
|
dont |
dont |
dont |
|||
|
Variation du solde global
|
Variation des paiements
d'intérêts
|
Variation du solde primaire
|
Variation des recettes
|
Variation des dépenses
primaires
|
Variation des dépenses primaires courantes (6) |
Variation des dépenses en
capital
|
B |
4,6 |
- 2,6 |
2,0 |
1,2 |
- 0,8 |
- 0,6 |
- 0,2 |
DK |
1,5 |
- 1,8 |
- 0,3 |
- 0,5 |
- 0,2 |
0,2 |
- 0,4 |
D |
1,1 |
0,4 |
1,5 |
- 1,3 |
- 3,0 |
- 1,6 |
- 1,4 |
EL |
9,2 |
- 2,9 |
6,3 |
3,2 |
- 3,0 |
0,6 |
- 3,6 |
E |
4,3 |
- 0,7 |
3,6 |
- 1,6 |
- 5,2 |
- 3,5 |
- 1,7 |
F |
2,4 |
0,3 |
2,7 |
1,4 |
- 1,3 |
- 0,5 |
- 0,8 |
IRL |
- 0,1 |
- 1,8 |
- 1,9 |
- 2,1 |
- 0,2 |
- 0,7 |
0,5 |
I |
6,4 |
- 2,6 |
3,8 |
0,5 |
- 3,3 |
- 1,7 |
- 1,6 |
L |
|
|
|
|
|
|
|
NL |
1,6 |
- 1,0 |
0,6 |
- 4,2 |
- 4,7 |
- 4,2 |
- 0,5 |
A |
2,3 |
- 0,3 |
2,0 |
0,0 |
- 2,1 |
- 1,3 |
- 0,8 |
P |
4,3 |
- 1,9 |
2,4 |
4,6 |
2,2 |
2,8 |
- 0,6 |
FIN |
0,6 |
1,3 |
1,9 |
0,1 |
- 1,8 |
- 1,6 |
- 0,2 |
S |
7,7 |
0,3 |
8,0 |
2,4 |
- 5,5 |
- 2,9 |
- 2,6 |
UK |
3,4 |
0,8 |
4,2 |
2,3 |
- 1,8 |
- 0,4 |
- 1,4 |
EUR |
3,2 |
- 0,4 |
2,8 |
0,0 |
- 2,8 |
- 1,5 |
- 1,3 |
Note : Le solde primaire ne comprend pas les paiements
d'intérêts. On le calcule en déduisant les dépenses
primaires des recettes. Les dépenses primaires peuvent encore être
ventilées en dépenses primaires courantes et dépenses en
capital. En raison des arrondis, la somme des composantes ne correspond pas
nécessairement aux totaux.
Source : Services de la Commission
Nous avons moins réduit notre déficit que la moyenne des pays
européens et la variation positive de notre solde budgétaire est
l'une des moins satisfaisantes. Notre performance nominale est meilleure qu'en
Allemagne, mais celle-ci a dû supporter les charges de l'unification et
était moins éloignée de l'équilibre.
Surtout, notre ajustement s'est réalisé plutôt grâce
à une hausse des recettes et donc des prélèvements que par
une réduction des dépenses. La part des dépenses
budgétaires dans le PIB a été réduite d'un point
(- 1,3 point pour les dépenses primaires, mais
+ 0,3 point pour les paiements d'intérêt) quand celle
des recettes a été accrue de 1,4 point.
Les économies ont principalement porté sur les dépenses
d'investissement de l'Etat, si bien que la dynamique de la dépense
publique n'a pas été suffisamment enrayée.
Nos partenaires ont en moyenne réduit leurs dépenses
primaires
4(
*
)
de 2,8 points et laissé
inchangé le poids des prélèvements dans le PIB.
Or, un ajustement budgétaire durable suppose que le poids des
dépenses publiques dans le PIB soit réduit et donc une
évolution des dépenses moins rapide que celle du PIB.
Ce n'est pas le chemin emprunté par le gouvernement, ce qu'a largement
démontré la dernière discussion budgétaire.
A cet égard, le tableau ci-après est instructif.
Influence du cycle économique sur
l'excédent/le déficit des administrations
publiques
(capacité (+)/besoin (-) de financement des
administrations publiques, en % du PIB)
|
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998* |
||||||||||||||
|
Solde effectif |
Compo-sante cyclique |
Solde ajusté
|
Solde effectif |
Compo-sante cyclique |
Solde ajusté
|
Solde effectif |
Compo-sante cyclique |
Solde ajusté
|
Solde effectif |
Compo-sante cyclique |
Solde ajusté
|
Solde effectif |
Compo-sante cyclique |
Solde ajusté
|
Solde effectif |
Compo-sante cyclique |
Solde
ajusté
|
||
B |
- 7,1 |
- 1,0 |
- 6,1 |
- 4,9 |
- 0,6 |
- 4,3 |
- 3,9 |
- 0,6 |
- 3,3 |
- 3,2 |
- 1,0 |
- 2,2 |
- 2,1 |
- 0,6 |
- 1,5 |
- 1,7 |
- 0,4 |
- 1,3 |
||
DK |
- 2,8 |
- 1,9 |
- 0,9 |
- 2,8 |
- 0,6 |
- 2,2 |
- 2,4 |
- 0,3 |
- 2,1 |
- 0,7 |
- 0,2 |
- 0,5 |
0,7 |
0,0 |
0,7 |
1,1 |
0,1 |
1,0 |
||
D |
- 3,2 |
0,0 |
- 3,2 |
- 2,4 |
0,2 |
- 2,6 |
- 3,3 |
0,0 |
- 3,3 |
- 3,4 |
- 0,5 |
- 2,9 |
- 2,7 |
- 0,6 |
- 2,1 |
- 2,5 |
- 0,5 |
- 2,0 |
||
EL |
- 13,8 |
- 0,8 |
- 13,0 |
- 10,0 |
- 0,9 |
- 9,1 |
- 10,3 |
- 1,1 |
- 9,2 |
- 7,5 |
- 0,9 |
- 6,6 |
- 4,0 |
- 0,5 |
- 3,5 |
- 2,2 |
- 0,1 |
- 2,1 |
||
E |
- 6,9 |
- 0,9 |
- 6,0 |
- 6,3 |
- 1,2 |
- 5,1 |
- 7,3 |
- 1,1 |
- 6,2 |
- 4,6 |
- 1,3 |
- 3,3 |
- 2,6 |
- 0,9 |
- 1,7 |
- 2,2 |
- 0,5 |
- 1,7 |
||
F |
- 5,8 |
- 1,0 |
- 4,8 |
- 5,8 |
- 0,6 |
- 5,2 |
- 4,9 |
- 0,6 |
- 4,3 |
- 4,1 |
- 0,8 |
- 3,3 |
- 3,0 |
- 0,7 |
- 2,3 |
- 2,9 |
- 0,3 |
- 2,6 |
||
IRL |
- 2,7 |
- 2,7 |
0,0 |
- 1,7 |
- 2,3 |
- 0,6 |
- 2,2 |
- 0,4 |
- 1,8 |
- 0,4 |
0,0 |
- 0,4 |
0,9 |
1,0 |
- 0,1 |
1,1 |
1,2 |
- 0,1 |
||
I |
- 9,5 |
- 1,0 |
- 8,5 |
- 9,2 |
- 0,7 |
- 8,5 |
- 7,7 |
- 0,1 |
- 7,6 |
- 6,7 |
- 0,6 |
- 6,1 |
- 2,7 |
- 0,7 |
- 2,0 |
- 2,5 |
- 0,4 |
- 2,1 |
||
L |
1,7 |
- |
- |
2,8 |
- |
- |
1,9 |
- |
- |
2,5 |
0,0 |
2,5 |
1,7 |
- 0,1 |
1,8 |
1,0 |
- 0,1 |
1,1 |
||
NL |
- 3,2 |
- 0,6 |
- 2,6 |
- 3,8 |
- 0,4 |
- 3,4 |
- 4,0 |
- 0,8 |
- 3,2 |
- 2,3 |
- 0,6 |
- 1,7 |
- 1,4 |
- 0,3 |
- 1,1 |
- 1,6 |
0,1 |
- 1,7 |
||
A |
- 4,2 |
0,0 |
- 4,2 |
- 5,0 |
0,0 |
- 5,0 |
- 5,2 |
- 0,1 |
- 5,1 |
- 4,0 |
- 0,6 |
- 3,4 |
- 2,5 |
- 0,5 |
- 2,0 |
- 2,3 |
- 0,3 |
- 2,0 |
||
P |
- 6,1 |
0,0 |
- 6,1 |
- 6,0 |
- 0,9 |
- 5,1 |
- 5,7 |
- 1,3 |
- 4,4 |
- 3,2 |
- 1,0 |
- 2,2 |
- 2,5 |
- 0,6 |
- 1,9 |
- 2,2 |
- 0,2 |
- 2,0 |
||
FIN |
- 0,8 |
- 5,9 |
- 2,1 |
- 6,4 |
- 4,2 |
- 2,2 |
- 4,7 |
- 2,3 |
- 2,4 |
- 3,3 |
- 1,7 |
- 1,6 |
- 0,9 |
0,3 |
- 1,2 |
0,3 |
1,1 |
- 0,8 |
||
S |
- 12,2 |
- 4,1 |
- 8,1 |
- 10,3 |
- 2,5 |
- 7,8 |
- 6,9 |
- 0,5 |
- 6,4 |
- 3,5 |
- 0,8 |
- 2,7 |
- 0,8 |
- 0,8 |
0,0 |
0,5 |
- 0,1 |
0,6 |
||
UK |
- 7,9 |
- 2,0 |
- 5,9 |
- 6,8 |
- 0,9 |
- 5,9 |
- 5,5 |
- 0,4 |
- 5,1 |
- 4,8 |
- 0,3 |
- 4,5 |
- 1,9 |
0,3 |
- 2,2 |
- 0,6 |
0,1 |
- 0,7 |
||
EUR |
- 6,1 |
- 1,0 |
- 5,1 |
- 5,4 |
- 0,6 |
- 4,8 |
- 5,0 |
- 0,4 |
- 4,6 |
- 4,2 |
- 0,6 |
- 3,6 |
- 2,4 |
- 0,5 |
- 1,9 |
- 1,9 |
- 0,2 |
- 1,7 |
(a) Solde ajusté des variations cycliques.
* Budgets économiques du printemps 1998.
Source : Services de la Commission.
Il en résulte que
la France relâche sa
politique des finances publiques. Le déficit effectif ne serait que fort
peu réduit entre 1997 et 1998, de 0,1 point de PIB, mais de
surcroît, le déficit discrétionnaire, c'est-à-dire
celui résultant de choix politiques sera creusé, passant de 2,3
à 2,6 % du PIB.
Il est donc essentiel de réorienter la politique budgétaire.
2. Des éléments de "divergence"
La convergence nominale n'a pas fait disparaître
l'hétérogénéité des économies
européennes.
Trois pays, l'Allemagne, la France et l'Italie, représentent près
de 60 % de la richesse de l'Europe. Les niveaux de production par habitant
diffèrent beaucoup.
Données relatives aux écarts de
développement
entre pays européens
|
PIB aux prix courants 1) |
PIB par habitant 2) |
||
|
1991 |
1997 |
1991 |
1997 |
B |
160,6 |
215,4 |
104,1 |
111,4 |
DK |
104,7 |
144,1 |
131,7 |
144,6 |
D |
1.391,5 |
1.916,6 |
112,8 |
123,4 |
EL |
72,1 |
103,6 |
45,8 |
51,8 |
E |
427,6 |
483,0 |
71,3 |
64,9 |
F |
971,7 |
1.256,1 |
110,5 |
113,2 |
IRL |
37,5 |
61,3 |
69,0 |
89,5 |
I |
931,1 |
1.004,7 |
106,4 |
92,5 |
L |
8,8 |
13,9 |
147,8 |
175,3 |
NL |
234,8 |
320,9 |
101,1 |
108,6 |
A |
133,5 |
184,1 |
110,7 |
120,0 |
P |
61,8 |
89,1 |
40,6 |
47,7 |
FIN |
98,1 |
104,1 |
126,6 |
107,2 |
S |
193,5 |
212,4 |
145,7 |
125,8 |
UK |
818,2 |
969,9 |
91,8 |
86,9 |
EUR 15 |
5.645,4 |
7.078,9 |
100,0 |
100,0 |
2) Europe à 15 = 100
Ces écarts sont pour certains pays en voie de
réduction alors que pour d'autres, ils se creusent.
L'instauration d'une monnaie unique accentuera leur lisibilité. Il est
alors à redouter que les gouvernements des pays en retard de
développement ne subissent des pressions auxquelles une réponse
appropriée devra être apportée. La convergence des
variations des coûts salariaux unitaires observée récemment
invite à un certain optimisme, mais les disciplines dont elle
témoigne ne devront pas être relâchées.
C'est d'autant plus indispensable que la part des salaires dans les pays en
cause est relativement élevée comme le montre le tableau
ci-dessous.
Part des salaires dans le PIB
(% du PIB aux coûts des facteurs)
Pays |
1991 |
1997 |
B |
72,0 |
69,7 |
DK |
71,2 |
69,4 |
D |
69,3 |
66,5 |
EL |
71,5 |
72,6 |
E |
68,5 |
63,3 |
F |
68,3 |
66,2 |
IRL |
70,2 |
62,2 |
I |
72,8 |
68,3 |
L |
73,5 |
72,1 |
NL |
65,3 |
65,1 |
A |
69,3 |
66,1 |
P |
76,7 |
71,3 |
FIN |
76,7 |
68,2 |
S |
76,2 |
72,6 |
UK |
76,7 |
71,0 |
EUR 15 |
71,6 |
68,4 |
La question des effets de la monnaie unique sur la
convergence
réelle en Europe est, quant à elle, un objet de conjectures.
La disparition de l'aléa monétaire pourrait favoriser une
allocation des facteurs et un développement des échanges plus en
accord avec les niveaux relatifs de la compétitivité des pays
européens. Il s'ensuivrait un certain rattrapage structurel.
Compétitivité de quelques pays européens
Prix relatif du PIB en monnaie commune Allemagne = 100 |
|
|
|
|
|
France |
100 |
96,3 |
90,8 |
88,1 |
91,9 |
Belgique |
100 |
102,2 |
99,0 |
100,0 |
102,1 |
Pays-Bas |
100 |
94,1 |
89,7 |
89,3 |
91,9 |
Espagne |
100 |
124,2 |
102,5 |
94,6 |
100,9 |
Italie |
100 |
111,0 |
88,3 |
76,8 |
94,6 |
Une réorientation des flux d'investissement pourrait
favoriser les pays en retard de développement.
Mais, la fragilité des indices de compétitivité, la
complexité de ses déterminants, imposent une certaine
circonspection.
Un scénario inverse est d'ailleurs avancé par certains qui,
remarquant la spécialisation économique et géographique
à l'oeuvre aux Etats-Unis, tablent sur un phénomène
semblable en Europe, qui bénéficierait aux pays les plus
développés.
Le niveau de développement n'est pas le seul élément de
différenciation en Europe. Les niveaux de chômage y sont
très disparates.
Taux de chômage en Europe en 1997
(% de la population active civile)
Pays |
1997 |
B |
9,9 |
DK |
6,0 |
D |
9,1 |
EL |
9,0 |
E |
21,5 |
F |
12,4 |
IRL |
12,0 |
I |
12,3 |
L |
3,0 |
NL |
6,3 |
A |
4,3 |
P |
7,1 |
FIN |
14,9 |
S |
9,4 |
UK |
7,8 |
EUR 15 |
10,8 |
Source : Commission européenne
Cette situation est de nature à influer sur la
capacité des différents Etats à maîtriser leurs
finances publiques. Elle pourrait aussi receler des facteurs de divergence dans
l'évolution des coûts et donc des prix.
Mais
c'est également le rythme de croissance qui différencie
les Etats européens.
Croissance en volume des pays européens de 1992 à 1997
(variations en %)
|
Années |
|||||
|
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
B |
1,7 |
- 1,4 |
2,3 |
1,9 |
1,4 |
2,2 |
DK |
0,2 |
1,5 |
4,4 |
2,8 |
2,1 |
3,1 |
D |
2,2 |
- 1,1 |
2,9 |
1,9 |
1,4 |
2,2 |
EL |
0,4 |
- 1,0 |
1,5 |
2,0 |
2,4 |
2,5 |
E |
0,7 |
- 1,2 |
2,1 |
2,8 |
2,1 |
2,7 |
F |
1,2 |
- 1,3 |
2,8 |
2,2 |
1,1 |
2,1 |
IRL |
4,6 |
3,7 |
7,3 |
10,7 |
7,8 |
5,8 |
I |
0,6 |
- 1,2 |
2,1 |
3,0 |
0,8 |
1,4 |
L |
1,9 |
0,0 |
3,3 |
3,4 |
2,3 |
2,8 |
NL |
2,0 |
0,8 |
3,4 |
2,1 |
2,5 |
2,8 |
A |
2,0 |
0,4 |
3,0 |
1,8 |
1,0 |
1,6 |
P |
1,1 |
- 1,2 |
0,8 |
2,3 |
2,5 |
2,8 |
FIN |
- 3,6 |
- 1,2 |
4,4 |
4,2 |
2,3 |
3,7 |
S |
- 1,4 |
- 2,2 |
2,6 |
3,0 |
1,7 |
2,1 |
UK |
- 0,5 |
2,2 |
3,8 |
2,4 |
2,3 |
3,0 |
EUR 15 |
0,9 |
- 0,5 |
2,8 |
2,4 |
1,6 |
2,3 |
Si, du fait de leur interdépendance économique,
l'Allemagne et la France connaissent une conjoncture le plus souvent
parallèle, les rythmes de croissance des autres Etats peuvent
s'éloigner de la trajectoire du couple franco-allemand.
La nécessité de redresser les finances publiques à
laquelle sont plus particulièrement confrontés certains pays
pourrait accroître ces écarts.
Comme il s'agit d'une variable importante pour la définition de la
politique monétaire, il y a là une source d'incertitudes.
B. L'ADOPTION DE L'EURO NE LÈVE PAS TOUTES LES INCERTITUDES MONÉTAIRES
L'adoption de l'euro suppose celle d'une politique
monétaire commune et la définition d'une politique de change.
Les orientations de ces deux politiques ont donné naissance à des
débats parfois passionnés. Une lecture attentive du
Traité, la logique de la construction entreprise, ainsi que son esprit,
permettent de les aborder avec sérénité.
1. Quelle politique monétaire pour l'Europe ?
a) L'impact d'une politique monétaire unique sur les conditions monétaires de chaque Etat
Le constat d'une relative
hétérogénéité des conditions
économiques en Europe et les développements théoriques
relatifs aux fonctions de réaction des politiques monétaires ont
fait naître des incertitudes sur l'orientation de la future politique
monétaire de la BCE.
Au terme de considérations assises sur la "règle de Taylor", on
peut en effet observer que la future politique monétaire commune se
traduira, pour certains, par une hausse des taux d'intérêt
à court terme, et pour d'autres par une détente de ces taux.
La "règle de Taylor"
La règle dite de Taylor est utilisée pour
estimer les déterminants des taux d'intérêt et par
conséquent le niveau souhaitable et probable des taux
d'intérêt en tant que cible que devrait se fixer une Banque
centrale.
Selon cette règle, les déterminants des taux
d'intérêt sont le taux d'inflation, l'écart du PIB à
sa tendance de moyen terme et l'écart d'inflation par rapport à
une cible.
Dans sa contribution à un prochain rapport de la
délégation pour la planification du Sénat, l'OFCE examine
ce que pourrait être la politique monétaire de la BCE si elle
était fixée sur le fondement de ces déterminants.
L'étude de l'OFCE indique ce que serait les taux à court terme
dans chaque pays européen si la règle de Taylor était
observée de la même manière.
Les résultats pour chacun des principaux pays sont indiqués dans
le tableau ci-après :
Règle de Taylor en Europe en 1998
Allemagne |
3,45 |
Autriche |
3,45 |
Belgique |
3,3 |
France |
2,4 |
Italie |
3,8 |
Espagne |
4,95 |
Pays-Bas |
5,65 |
Portugal |
5,45 |
Irlande |
9,7 |
On peut observer des écarts importants par rapport
à la situation réelle, la dispersion naturelle des taux
d'intérêt étant plus forte que la dispersion
observée.
A supposer que la BCE conduise une politique monétaire
pour
l'ensemble de la zone
fondée sur une fonction de réaction
inspirée de la règle de Taylor, les taux d'intérêt
à court terme serait en Europe de 3,7 %.
Cependant, cette perspective ne doit pas être exagérée
en même temps que ses effets ne doivent pas être excessivement
redoutés.
Cette perspective ne doit pas être exagérée dans la mesure
où la BCE est appelée à mettre en oeuvre une politique
monétaire réellement européenne, c'est-à-dire
adaptée aux réalités économiques de l'ensemble de
la zone euro.
Il faudra donc veiller à ce que chaque gouverneur ne
"cherche pas à pondérer" à l'excès la situation de
son propre pays.
La définition d'agrégats européens
s'impose dans cette perpective. Elle justifie aussi pleinement qu'un dialogue
s'instaure entre le Conseil de l'euro et la BCE.
Les effets d'une communautarisation de la politique monétaire ne doivent
pas donner naissance à de trop vives inquiétudes.
Le relèvement des taux d'intérêt à court terme
qu'elle laisse présager pour certains pays est minime. Il pourrait
s'accompagner d'une baisse du niveau des taux d'intérêt à
long terme et favoriser les ajustements des pays pour lesquels les conditions
monétaires en sortiront détendues.
b) Les objectifs de la politique monétaire
Un débat doit être récusé,
même si certains s'en offusquent, celui de la mission imposée
à la BCE de rechercher la stabilité des prix.
Il n'est pas sérieux de considérer qu'une politique
monétaire axée sur un autre objectif -l'inflation ?- puisse
apporter un quelconque bienfait à l'Europe. On voit mal en quoi la
politique monétaire pourrait régler les problèmes
structurels sur lesquels vient buter la croissance. On voit également
mal comment une politique monétaire visant la stabilité des prix
pourrait faire comme si ces problèmes structurels n'existaient pas, et
n'étaient pas de nature à provoquer des enchaînements
inflationnistes.
Il est de la responsabilité des autres agents économiques
-partenaires sociaux, Etat-, d'apporter les réponses adaptées aux
problèmes structurels qu'ils rencontrent.
Le vrai problème posé par la politique monétaire ne
résulte pas de la mission qui lui est attribuée, mais, à
l'évidence, des conditions dans lesquelles cette mission est
réalisée.
On peut craindre que les interventions d'une banque
centrale soient inappropriées, soit par excès de laxisme, soit
par excès de rigorisme. Mais rien ne permet de craindre que ce risque
pèsera davantage avec la BCE qu'avec n'importe quelle autre banque
centrale.
Mais, comme rien n'indique qu'il pèsera moins.
La
nécessité d'un dialogue entre la BCE et les institutions
politiques de la zone euro
(le Conseil, mais aussi le Conseil de l'euro et
les parlements nationaux) s'affirme de manière absolue. Le rôle
des parlements nationaux doit être d'autant plus affirmé qu'ils
sont seuls en mesure de traduire des réalités nationales
spécifiques.
2. La controverse relative à la politique de change
L'adoption prochaine de l'euro a donné naissance
à un débat sur la valeur externe de la monnaie européenne.
Une querelle institutionnelle est née de la perspective d'un
dessaisissement des Etats en matière de change.
Elle s'est doublée d'un débat entre les partisans de l'euro fort
et ceux de l'euro faible.
S'agissant des questions institutionnelles,
les clauses du traité
relatives à la détermination de la politique de change de l'euro
figurent pour l'essentiel à l'article 109.
Cet article distingue deux situations selon que la parité de l'euro est
fixée par un accord international formel ou non.
Dans la première hypothèse,
le Conseil
statuant
à l'unanimité
,
peut
conclure des accords de change.
Une fois ceux-ci conclus, le Conseil est également l'institution
communautaire qui,
à la majorité qualifiée
adopte,
modifie ou abandonne les cours centraux de l'euro.
Dans la seconde hypothèse, soit en l'absence d'un accord formel
instituant un système de taux de change, le Conseil
peut formuler les
orientations générales
de la politique de change de l'euro
vis à vis des monnaies tierces. Ces orientations sont
décidées
à la majorité qualifiée
du
Conseil.
La compétence pour définir le taux de change de l'euro
appartient donc au Conseil.
Au terme de l'article 109 K, le Conseil devrait, dans cette
hypothèse, être composé des seuls représentants des
Etats ayant adopté la monnaie unique européenne. Ainsi, les Etats
ne participant pas à l'euro n'auraient aucune part dans les
décisions ou les orientations générales relatives à
la valeur extérieure de l'euro.
La compétence du Conseil
est, on l'a dit, affirmée par le
traité, mais
il s'agit d'une compétence limitée et
conditionnelle.
L'action du Conseil est d'abord encadrée par des conditions
procédurales. Son initiative
est conditionnée à une
recommandation de la Banque Centrale Européenne -BCE- ou de la
Commission. Le Conseil n'en est pas pour autant à la merci du bon
vouloir de la Commission ou de la BCE. L'article 109 D du
traité permet en effet au Conseil ou à un Etat membre de demander
à la Commission de formuler la recommandation qui conditionne son
initiative. En ce cas, la Commission doit rendre ses conclusions sans
délai. Le dispositif laisse la Commission entièrement libre de
choisir le sens de sa recommandation ou de ses conclusions. Mais le Conseil est
lui-même libre de décider ce qu'il souhaite.
De plus, une consultation du Parlement européen est prévue.
Une difficulté doit cependant être signalée.
Les parlements nationaux sont ignorés par le dispositif. Il est,
dès lors, souhaitable que le gouvernement transmette toutes
recommandations au Conseil susceptibles de donner lieu à l'application
de la procédure afin que le Parlement français soit en mesure de
se prononcer sur des accords dont l'importance pourrait être
considérable.
Doit être encore soulignée la place éminente
réservée à la BCE qui, au terme du dispositif de
l'article 109, devra être consultée lorsqu'elle n'aura pas
elle-même pris l'initiative d'une recommandation adressée au
Conseil.
Enfin, la Commission doit être étroitement associée aux
négociations susceptibles de déboucher sur un accord de change.
Mais l'action du Conseil est également soumise au respect de
règles de fond
. Les accords conclus sur les orientations
générales formulées par le Conseil ne doivent pas affecter
l'objectif principal du système européen de banque centrale
-SEBC- à savoir le maintien de la stabilité des prix.
Cette règle formellement posée par le paragraphe 2, dans
l'hypothèse où le Conseil décide de formuler des
orientations générales, devrait s'appliquer également
lorsqu'il entend conclure des accords de change formels puisqu'en ce cas un
consensus devra être recherché avec la BCE afin que ces accords
n'altèrent pas l'objectif de stabilité des prix.
Cette condition de fond est cohérente compte tenu de l'impact du
système de change sur l'inflation et le niveau des taux
d'intérêt.
On conclura en soulignant qu'une lecture attentive du Traité permet
d'établir que la responsabilité en matière de change
reviendra au Conseil, c'est-à-dire à une instance politique. Il
est de plus loisible d'observer que les gouvernements continueront d'avoir,
dans la pratique, l'influence qu'ils tiennent de leur participation dans les
institutions monétaires internationales et lors des sommets qui
dessinent régulièrement le paysage monétaire international.
Quant au débat sur la valeur de la parité extérieure
de l'euro,
son existence démontre combien, grâce à
l'euro, l'Europe est appelée à regagner de sa souveraineté
monétaire.
L'euro sera, et c'est souhaitable, un concurrent du dollar. Pour qu'il le soit,
il lui faut être crédible, inspirer confiance. Cette perspective
permet de maximiser les avantages propres à l'adoption de l'euro en
termes d'attraction de capitaux et de modération des coûts de
financement ; on imagine mal dès lors comment l'euro pourrait
être une monnaie faible.
D'ailleurs, une politique monétaire et économique crédible
devrait permettre de gagner des marges de manoeuvre ; un euro fort
pourrait s'accompagner de taux d'intérêt réduits. La
situation extérieure de la zone européenne justifierait sans
doute cette prime de risque négative qui permettrait de dégager
un avantage de compétitivité pour les entreprises
européennes.
Si l'euro doit être attractif, il lui faut aussi être
maîtrisable
. Les perturbations que pourraient traverser le
système monétaire international seront d'ailleurs plus
susceptibles d'être réglées au profit d'une Europe unie
monétairement que dans un contexte de polycentrisme monétaire. Il
faudra veiller à exploiter cet avantage propre de l'euro. C'est
d'ailleurs ce que reconnaît sans ambiguïté la
résolution du Conseil européen de Luxembourg -voir infra- qui
confirme à ce titre les pouvoirs du Conseil.
Une dernière considération : l'Europe monétaire
étant constituée, l'exposition de l'économie
européenne à l'extérieur sera du même ordre
quantitatif que celle de l'économie américaine ; dès
lors, les problèmes posés par les rapports extérieurs de
change de l'euro devraient être, sinon minimes, du moins beaucoup moins
sensibles que ceux rencontrés par une Europe monétairement
éclatée.
CHAPITRE II
LES QUESTIONS POSÉES PAR LA
COORDINATION
DES POLITIQUES ÉCONOMIQUES EN EUROPE
L'article 103 du traité est le fondement juridique
de la coordination des politiques économiques entre les pays membres.
Les règles posées par l'article 103 ont récemment
été complétées par le règlement 1466/97 du
7 juillet 1997 qui constitue l'un des trois piliers du pacte de
stabilité et de croissance et, ce, dans la perspective du passage
à la troisième phase de la réalisation de l'Union
monétaire.
Quant à l'article 104 C complété par le
règlement 1467/97 du 7 juillet 1997, deuxième pilier du
pacte de stabilité et de croissance, il pose des règles de
discipline budgétaire assorties de sanctions pour les Etats adoptant la
future monnaie unique.
Cet ensemble, qui forme avec la résolution du Conseil européen
d'Amsterdam du 17 juin 1997 le pacte de stabilité et de croissance,
fonde un processus de renforcement de la coordination des politiques
économiques d'Etats partageant la même monnaie. Mais, si les
fondations sont posées, il n'est pas sûr que ce soit toujours dans
les règles de l'art, tandis qu'il reste à construire
l'édifice.
Avant-propos
Résumé des conclusions des résolutions du Conseil
européen d'Amsterdam relatives au pacte de stabilité et de
croissance (17 juin 1997) et du Conseil européen de Luxembourg sur
la coordination des politiques économiques au cours de la
troisième phase de l'UEM (15 décembre 1997)
La résolution du Conseil européen
d'Amsterdam
a pour objet de fournir des orientations politiques
qualifiées de fermes aux Etats auxquels s'appliquera le pacte de
stabilité et de croissance.
Elle repose sur l'idée que des finances publiques "saines" sont un
moyen
de renforcer les conditions propices à la stabilité des prix et
à une croissance forte et durable génératrice d'emplois.
Par cette résolution, les Etats s'engagent à respecter un
objectif budgétaire
à moyen
terme proche de
l'équilibre ou excédentaire
. Ils sont invités à
rendre publiques les recommandations que pourrait leur adresser le Conseil aux
fins d'atteindre cet objectif ou de corriger un déficit excessif.
La résolution invite le Conseil à décider
systématiquement
d'infliger des sanctions si un Etat membre
participant ne prend pas les mesures nécessaires pour mettre fin
à une situation de déficit excessif.
La résolution du Conseil européen de Luxembourg
rappelle
que les politiques économiques, ainsi que la détermination des
salaires, demeureront des prérogatives nationales, mais que l'UEM
établira des liens plus étroits entre les économies des
Etats membres. Elle rappelle que cette interdépendance concernera aussi
bien les Etats membres non participants. Elle en conclut que la coordination
renforcée entre les évolutions et les politiques
économiques nationales s'impose lorsque lesdites évolutions ou
politiques économiques sont susceptibles d'influer sur la situation
monétaire et financière dans l'ensemble de la zone ou d'affecter
le bon fonctionnement du marché intérieur.
Suit une liste de tels sujets qui inclut :
"- la surveillance étroite de l'évolution
macroéconomique dans les Etats membres afin d'assurer une convergence
soutenue, ainsi que de l'évolution du taux de change de l'euro ;
- la surveillance des situations et des politiques budgétaires,
conformément au traité et au pacte de stabilité et de
croissance ;
- la surveillance des politiques structurelles menées par les Etats
membres sur les marchés du travail, des produits et des services, ainsi
que des tendances en matière de coûts et de prix, notamment dans
la mesure où elles pèsent sur les possibilités d'obtenir
une croissance non inflationniste durable et de créer des emplois, et
- l'encouragement de réformes fiscales de nature à
améliorer l'efficacité et des mesures dissuasives à
l'encontre d'une concurrence fiscale préjudiciable
."
Il est rappelé que la
coordination économique renforcée
doit être conforme au principe de subsidiarité
prévu
par le traité et respecter le rôle du Conseil "Questions
économiques et financières" (Ecofin) en tant qu'instance centrale
habilitée à prendre des décisions en matière de
coordination économique. Cependant, le Conseil, la Commission et les
Etats membres sont invités à appliquer intégralement et
efficacement les instruments que prévoit le traité en
matière de coordination des politiques économiques.
A cette fin, il est souhaité que les "
grandes orientations des
politiques économiques
" adoptées conformément à
l'article 103, paragraphe 2, du traité, soient un instrument
efficace au service d'une convergence soutenue entre les Etats membres
,
qu'elles fournissent des lignes directrices plus concrètes,
adaptées à chaque pays
, et soient davantage axées sur
des mesures destinées à améliorer le potentiel de
croissance des Etats membres, augmentant ainsi l'emploi.
La résolution poursuit en souhaitant que la surveillance
multilatérale prévue à l'article 103 du traité
veille particulièrement à déclencher rapidement l'alerte,
non seulement en cas de menace de détérioration de la situation
budgétaire, mais aussi lorsque surviennent d'autres évolutions
qui risquent de menacer la stabilité, la compétitivité et,
à terme, la création d'emplois. Est exprimé le souhait que
les Etats membres s'engagent à procéder à un
échange d'informations complet et rapide sur l'évolution
économique et les intentions politiques susceptibles d'avoir des
incidences au-delà des frontières nationales.
En outre,
la résolution conforte l'existence d'un Conseil de
l'euro
. Elle indique que les ministres des Etats participant à la
zone "euro" peuvent se réunir entre eux de façon informelle pour
discuter de questions liées aux responsabilités
spécifiques qu'ils partagent en matière de monnaie unique et que
la Commission ainsi que, le cas échéant, la Banque centrale
européenne (BCE), peuvent être invitées à participer
aux réunions.
La résolution aborde également la mise en oeuvre des dispositions
du traité relatives à la politique de change, à la
position extérieure et à la représentation de la
Communauté (article 109 du traité).
Elle indique que
le Conseil devrait surveiller l'évolution du taux
de change de l'euro à la lumière d'une large gamme de
données économiques et qu'il convient d'assurer entre le Conseil
et la BCE un échange de vues et d'informations sur le taux de change de
l'euro. Elle précise que le Conseil peut, dans des circonstances
exceptionnelles, par exemple en cas de désalignement manifeste, formuler
des orientations générales de politique de change
vis-à-vis des monnaies non communautaires, conformément à
l'article 109, paragraphe 2, du traité mais que
ces
orientations générales devraient toujours respecter
l'indépendance du SEBC et être conformes à l'objectif
principal du SEBC
, qui est d'assurer la stabilité des prix.
Elle ajoute que le Conseil devra arrêter la position de la
Communauté au niveau international en ce qui concerne des questions qui
revêtent un intérêt particulier pour l'UEM,
conformément à l'article 109, paragraphe 4, du
traité pour les relations bilatérales entre l'Union
européenne et des pays tiers et pour les travaux se déroulant
dans des enceintes internationales ou des groupements informels d'Etats.
Elle précise enfin les conditions du dialogue entre le Conseil et la
BCE.
Elle indique qu'il faudra que s'instaure entre le Conseil et la BCE un
dialogue.
Elle suggère que le Conseil devrait jouer pleinement son rôle en
tirant parti des voies de dialogue prévues par le traité,
rappelant que le président du Conseil, faisant usage de la
faculté que lui ménage l'article 109 B du traité,
devrait faire rapport au conseil des gouverneurs de la BCE sur
l'évaluation que fait le Conseil de la situation économique de
l'Union et sur les politiques économiques des Etats membres et qu'il
pourrait discuter avec la BCE du point de vue du Conseil sur l'évolution
et les perspectives en matière de taux de change.
Elle remarque également que les rapports annuels que la BCE adressera
au Parlement européen, au Conseil et à la Commission, ainsi qu'au
Conseil européen, sont un autre élément important.
I. LE CADRE DE LA COORDINATION DES POLITIQUES ÉCONOMIQUES EN EUROPE : DES ARTICLES 103 ET 104 C AU PACTE DE STABILITÉ ET DE CROISSANCE
A. LA COORDINATION ET LA SURVEILLANCE DES POLITIQUES ÉCONOMIQUES : L'ARTICLE 103 DU TRAITÉ ET LE RÈGLEMENT 1466/97 DU 7 JUILLET 1997
L'article 103 du traité et le règlement 1466/97 visent à assurer la pérennité des performances acquises par les Etats adoptant l'euro. Ils ont un autre objet, qui est de tirer les conséquences de l'absence d'un budget fédéral européen. Celle-ci impose en effet que les Etats puissent mobiliser leurs budgets propres en cas de choc économique. Il leur faut, pour cela, regagner des marges de manoeuvre. Compte tenu des règles de discipline budgétaire posées par le deuxième pilier du pacte de stabilité et de croissance, il est nécessaire de rejoindre une situation d'équilibre des finances publiques.
1. L'article 103 du traité
Dans un premier paragraphe, l'article pose le principe de la
coordination des politiques économiques des Etats membres au sein du
Conseil. Chaque Etat membre est tenu de considérer sa politique
économique comme une question d'intérêt commun.
Cette coordination doit s'inscrire dans le cadre des grandes orientations des
politiques économiques qui, au terme d'un processus complexe, font
l'objet d'une recommandation adoptée par le Conseil à la
majorité qualifiée.
C'est également le Conseil -paragraphe 3 de l'article- qui, sur la
base de rapports présentés par la Commission, surveille la
conformité des politiques économiques des Etats à ces
"grandes orientations".
Lorsque cette conformité n'est pas établie -paragraphe 4 de
l'article-, le Conseil agissant sur recommandation de la Commission peut,
statuant à la majorité qualifiée, adresser des
recommandations à l'Etat membre concerné et, dans les mêmes
conditions, décider de rendre publiques ses recommandations.
Un devoir d'information du Parlement européen est posé : les
résultats de la surveillance multilatérale font l'objet d'un
rapport adressé au Parlement par le Président du Conseil et par
la Commission.
Enfin, le cinquième paragraphe de l'article ouvre au Conseil la latitude
d'arrêter les modalités de la procédure de surveillance
multilatérale organisée aux paragraphes 3 et 4 du texte.
C'est de cette latitude dont le conseil a usé en adoptant le
règlement 1466/97 du 7 juillet 1997.
2. Le règlement 1466/97 du 7 juillet 1997 : premier pilier du pacte de stabilité et de croissance
L'objet du règlement est, explicitement, de
renforcer la surveillance des positions budgétaires ainsi la
surveillance et la coordination des politiques économiques.
Les règles adoptées par le Conseil diffèrent selon la
situation des Etats membres au regard de l'euro.
Pour ceux qui auront adopté l'euro
, dénommés Etats
membres participants, ils devront présenter au Conseil et à la
Commission avant le 1
er
mars 1999 puis, ensuite, chaque
année, un
programme de stabilité.
Le contenu du programme de stabilité
est précisé avec
un certain souci de détail. Il doit fournir les informations
suivantes :
l'objectif à moyen terme d'une position budgétaire proche de
l'équilibre ou excédentaire ainsi que la trajectoire d'ajustement
-les programmes doivent couvrir, outre l'année encours, au moins les
trois années suivantes- qui doit conduire à la réalisation
de cet objectif ;
les principales hypothèses et les principaux résultats de
prévisions économiques sous-jacentes ;
la description des mesures budgétaires et économiques
envisagées pour réaliser les objectifs du programme et un
chiffrage de l'impact des mesures sur le budget ;
une analyse, sous forme de variante sans doute, des effets sur le budget et la
dette publique d'un changement d'hypothèses économiques.
Il est prévu que
les Etats membres rendent publics leurs programmes
de stabilité.
C'est au Conseil de procéder à l'examen des programmes de
stabilité.
Deux cas sont à distinguer. S'agissant des programmes initiaux, le
Conseil les examine ; s'agissant de programmes actualisés, il
peut
les examiner.
En tout état de cause, il procède à son examen sur la base
d'évaluations effectuées par la Commission et par le
comité économique et financier qui succède, au
début de la troisième phase, au comité monétaire
institué à l'article 109C du traité.
Les objectifs poursuivis, lors de l'examen par le Conseil des programmes de
stabilité, sont précisés
. Il s'agit d'abord
d'apprécier si l'objectif budgétaire à moyen terme offre
une marge de sécurité pour prévenir l'apparition d'un
déficit excessif et, si, compte tenu des hypothèses
économiques sous-jacentes et des mesures budgétaires mises en
oeuvre ou envisagées, l'objectif budgétaire est réaliste.
Il s'agit, en outre, d'apprécier si le contenu du programme favorise une
coordination plus étroite des politiques économiques et s'il est
conforme aux grandes orientations de politique économique
recommandées par le Conseil.
Dans les deux mois de la présentation du programme de stabilité,
le Conseil rend un avis dans lequel, le cas échéant, il invite
l'Etat concerné à adapter son programme.
Le Conseil surveille l'exécution du programme de stabilité et
s'il constate un dérapage de la position budgétaire par rapport
à l'objectif du programme, il adresse une recommandation à l'Etat
membre concerné
l'invitant à prendre les mesures d'ajustement
nécessaires.
Si le dérapage persiste, le Conseil adresse une recommandation
l'invitant à prendre rapidement des mesures correctrices.
Le Conseil
peut
rendre publique sa recommandation.
On sera plus bref pour décrire les
obligations imposées aux
Etats membres non participants
, ceux qui n'auront pas adopté l'euro.
Ils doivent présenter des
programmes de convergence
. Ces
programmes sont identiques aux programmes de stabilité sauf sur un
point. Ils doivent, en effet, présenter les objectifs à moyen
terme de la politique monétaire et les relations entre ces objectifs et
la stabilité des prix et des taux de change.
De la même manière, la procédure, les finalités et
les sanctions de l'examen des programmes de convergence sont identiques
à ce qu'elles sont pour les programmes de stabilité
excepté sur un point, lui aussi relatif aux questions monétaires.
Le Conseil doit suivre les politiques économiques des Etats membres afin
de s'assurer qu'elles évitent les distorsions des taux de change
réels et les fluctuations excessives des taux de change nominaux.
Engagement européen et affichage national, un hiatus
récent :
le partage de la valeur ajoutée
On ne compte pas les déclarations du gouvernement issu
de la nouvelle majorité sur les méfaits d'un partage de la valeur
ajoutée supposé défavorable aux salariés. Par
exemple, le rapport économique, social et financier associé au
projet de loi de finances pour 1998 dénonçait "un partage de la
valeur ajoutée préjudiciable à la consommation et à
l'emploi". Il y était dénoncé la relative faiblesse de la
part revenant aux salaires.
C'est dans ces conditions une profonde perplexité qui saisit le lecteur
attentif de la recommandation du Conseil du 7 juillet 1997 concernant les
grandes orientations des politiques économiques des Etats membres de la
Communauté à laquelle s'est associé le nouveau
gouvernement français. Elle précise en effet que le dosage
souhaitable des politiques économiques en Europe doit comprendre
"une
évolution (...) des salaires réels (...) inférieure
à la hausse de la productivité afin de renforcer la
rentabilité des investissements créateurs d'emplois"
.
En clair, notre engagement européen est radicalement à
l'opposé des déclarations nationales.
Les programmes économiques
de moyen terme de chaque Etat membre
sont issus des gouvernements. Les premiers programmes devront être
notifiés avant le 1er mars 1999, les programmes devant ensuite
être révisés chaque année. Compte tenu de leur
objet, ces programmes s'apparenteront beaucoup à des "budgets
économiques" prolongés et enrichis ne serait-ce qu'en raison de
l'existence dans leurs corps de variantes et d'évaluations
spécifiques.
Il serait donc souhaitable que le calendrier d'élaboration de ces
programmes puisse être compatible avec leur transmission au Parlement
dans le cadre du rapport économique et financier produit chaque
année à l'appui de la loi de finances.
L'article 163 de
l'ordonnance n° 58-1374 du 30 décembre 1958 devrait
être modifié sur ce point.
Enfin,
les recommandations adressées aux Etats membres
sont
issues des organes communautaires sans qu'a priori soit ménagée
une association en amont des gouvernements. Ces éventuelles
recommandations doivent être transmises aux commissions
compétentes du Parlement.
B. UN RENFORCEMENT DES CONTRAINTES ENCADRANT LA POLITIQUE BUDGÉTAIRE : DE L'ARTICLE 104 C DU TRAITÉ AU RÈGLEMENT 1467/97 DU 7 JUILLET 1997
L'article 104 C et l'une des dispositions importantes
introduites par le traité sur l'Union européenne puisqu'il a
posé
une règle communautaire d'encadrement des politiques
budgétaires conduites
par les Etats membres. Cet article vise
fondamentalement à
combattre les déficits publics excessifs et
à fonder la discipline budgétaire imposée aux Etats
membres
au nom de l'Union économique et monétaire.
Destiné à entrer en vigueur de façon progressive à
mesure que se déroulerait le cheminement de l'union monétaire,
l'article 104 C a été complété par le
règlement 1467/97 du 7 juillet 1997 qui constitue l'un des trois
piliers du pacte de stabilité et de croissance.
L'analyse des difficultés résultant de ces dispositifs conduit
à mettre en évidence un choix de politique budgétaire
sous-jacent à l'unification monétaire qui peut être
discuté, ainsi que quelques difficultés résultant des
modalités d'application des règles européennes de
discipline budgétaire.
1. L'article 104 C du traité sur l'Union européenne
L'article 104 C est le cadre juridique de la discipline budgétaire imposée aux Etats membres dans le contexte de la réalisation d'une union monétaire.
a) Une application par étapes
L'article 104 C organise la surveillance et la lutte
contre ce que l'usage a désigné du nom de "déficits
excessifs".
Divisé en 14 chapitres, son application a été
conçue comme évolutive dans le temps à mesure des
progrès réalisés sur la voie de l'unification
monétaire en Europe. L'article 109 E du traité
prévoit ainsi que l'article 104 C, à l'exception des
paragraphes 1, 9, 11 et 14 s'applique
dès le début de la
deuxième phase
... de l'Union économique et monétaire
qui a commencé le 1er janvier 1994 et que l'article 104 C,
paragraphes 1, 9, et 11 s'applique
dès le début de la
troisième phase
, c'est-à-dire le 1er janvier 1999 lors
de l'instauration de l'euro.
S'agissant des paragraphes 1, 9 et 11, qui ne s'appliqueront donc qu'à
partir du 1er janvier 1999, il faut souligner que les paragraphes 9 et 11
ne s'appliqueront qu'aux Etats ayant adopté l'euro, les Etats "hors
euro" étant cependant soumis au paragraphe 1 dès cette date.
Objet des paragraphes destinés à entrer en application le 1er janvier 1999
Le paragraphe 1
de l'article 104 C comporte une
injonction aux Etats membres d'éviter les déficits publics
excessifs.
Les paragraphes 9 et 11
complètent la procédure de
l'article 104 C en introduisant deux nouvelles étapes.
Le paragraphe 9
introduit la faculté laissée au
Conseil de
mettre en demeure
un Etat en déficit excessif de
prendre des mesures correctrices.
Le paragraphe 11 donne au Conseil la faculté de prononcer une
série de sanctions contre un Etat qui ne se serait pas conformé
à cette mise en demeure.
Il faut aussi souligner que c'est le traité sur l'Union
européenne lui-même qui a organisé le renforcement des
pouvoirs du Conseil sur la politique budgétaire des Etats membres
après l'adoption de la monnaie unique et non pas le "pacte de
stabilité et de croissance".
b) L'édiction de règles de "discipline budgétaire"
L'expression 'discipline budgétaire" doit être
considérée comme une commodité. Les règles
posées par l'article 104 C et précisées par le
protocole n° 5 annexé au traité concernent en effet la
situation globale des finances publiques appréhendée à
travers les dettes publiques et les besoins de financement des administrations
publiques, soit deux "critères" sensiblement différents par leurs
champs du concept de déficit budgétaire.
En tout état de cause, au terme du dispositif de
l'article 104 C, paragraphe 2, la discipline budgétaire
est censée avoir été respectée
en tant qu'elle
intéresse les déficits publics
si le rapport entre ceux-ci,
qu'ils soient prévus ou effectifs, ne dépasse pas 3 % du
PIB. Si tel n'est pas le cas, un manquement à la discipline
budgétaire n'est pour autant pas nécessairement établi.
Autrement dit,
le dépassement de la valeur de 3 % du PIB ne
constitue pas automatiquement un fait "d'indiscipline budgétaire"
.
Deux cas de figure alternatifs sont envisagés. Ils permettent tous deux
de décerner un label de bonne conduite budgétaire, même si
le critère quantitatif évoqué ci-dessus n'est pas
atteint :
si le rapport entre le déficit public et le PIB a diminué
de manière
substantielle
et
constante
et
atteint un
niveau proche de 3 % du PIB
;
si le dépassement de la valeur de référence n'est
qu'
exceptionnel
et
temporaire
et que
le rapport entre le
déficit public et le PIB reste proche de 3 %.
On peut donc énoncer qu'un déficit public excessif est, au sens
du traité, un déficit public excédant 3 % du PIB ou
un déficit public d'une valeur éloignée de 3 % du
PIB, ou encore un déficit public un peu supérieur à
3 % du PIB si le dépassement de cette valeur ne peut être
considéré comme exceptionnel et temporaire ou comme s'inscrivant
dans un processus de diminution substantielle et constante du rapport du
déficit public dans le PIB.
Lorsque le déficit public d'un Etat ne dépasse pas 3 % du
PIB, il est réputé respecter la norme de discipline
budgétaire relative au niveau de son déficit public.
Toutefois, même si un Etat membre respecte ce critère, la
Commission est habilitée à élaborer un rapport et à
transmettre son avis au Conseil si elle estime qu'il y a un
risque
de
déficit excessif dans cet Etat membre (article 104 C,
paragraphe 3, second alinéa).
En ce cas, le Conseil ne pouvant que décider s'il y a ou non
déficit public excessif, le paragraphe 6 de
l'article 104 C ne lui ouvrant pas la faculté de
décider qu'il y a un
risque
de déficit public excessif,
l'avis de la Commission ne peut que servir de support à une
décision du Conseil constatant l'inexistence d'un déficit public
excessif.
Une incertitude subsiste sur le
fait de savoir si un Etat membre qui
respecte strictement la règle des 3 % obtient de ce fait la
garantie d'être considéré comme budgétairement
discipliné.
L'article 104 C organise la surveillance communautaire des
déficits publics
des Etats membres mais aussi du montant de leur
dette publique
(paragraphe 2 de l'article 104 C). Il
indique en effet que
la discipline budgétaire suppose le respect des
critères précisés ci-dessus relatif au rapport du
déficit public dans le PIB, mais aussi des critères suivants qui
concernent la dette publique
. La discipline budgétaire est
respectée si le rapport entre la dette publique dans le PIB ne
dépasse pas une valeur de référence fixée à
60 % par le protocole n° 5 annexé au traité. Dans
le cas contraire, la discipline budgétaire n'est pas respectée
à moins que ledit rapport "ne diminue
suffisamment
et
'
approche de 60 % à un rythme satisfaisant
".
Cependant, la question se pose de savoir quelles sont les
conséquences du non-respect de critère relatif à la dette
publique.
Précisons qu'elle se pose dans le cadre d'une lecture
littérale du traité mais que la coutume ne semble ni infirmer ni
confirmer cette lecture.
L'article 104 C du traité énonce en effet que si un Etat
membre ne satisfait pas les critères relatifs au déficit public
et (ou) à la dette publique, la Commission élabore un rapport
(paragraphe 3). En revanche, lorsque le même article donne mission
à la Commission d'adresser un avis au Conseil (paragraphe 5) sur la
base duquel celui-ci décide s'il y a ou non déficit excessif
(paragraphe 6), il ne vise pas autre chose que l'existence d'un
déficit excessif (ou d'un risque de déficit excessif).
Or, un déficit excessif n'est pas une dette excessive
. Dans ces
conditions,
il apparaît loisible de considérer que sans que cet
Etat soit réputé budgétairement discipliné
-la
Commission peut (paragraphe 3) élaborer un rapport à ce
sujet-
un Etat qui connaîtrait une dette excessive ne pourrait
être l'objet de la part du Conseil d'aucune autre décision prise
dans le cadre de l'article 104 C
. Seule, dans ce cadre là, la
Commission pourrait agir en élaborant un simple rapport.
Cette interprétation à la lettre n'est évidemment pas la
seule possible. Mais il faut admettre qu'elle s'inscrit dans un contexte d'une
pratique communautaire où le "critère" de dette publique
n'apparaît pas comme le plus fondamental des deux "critères" de
finances publiques.
Un débat s'est ouvert opposant les tenants d'une appréciation
stricte des règles de discipline budgétaire à ceux
favorables à une interprétation souple de ces règles. Si
la lettre même du traité donne plutôt raison à ces
derniers en ce qu'elle admet -voir supra- quelques écarts par rapport
aux valeurs arithmétiques fixées dans le protocole n° 5
annexé au traité, force est de reconnaître que celui-ci ne
laisse pourtant que de faibles marges aux Etats membres.
Si le déficit public d'un Etat membre peut dépasser la valeur de
référence de 3 % du PIB sans pour autant être
considéré comme excessif, il n'en doit pas moins, pour
échapper à cette qualification, satisfaire des critères
exigeants.
D'abord, le traité impose qu'il prenne
une valeur proche
de
3 % du PIB. Aucune définition précise de ce qu'est une
valeur proche de 3 % du PIB n'est donnée par le texte. Mais, on
peut inférer de la pratique récente de la Commission suivie par
le Conseil que cette valeur ne saurait être éloignée de
plus de quelques dixièmes de points de PIB de la valeur de 3 %.
Ensuite, il faut, on le rappelle, que ce dépassement soit, soit
exceptionnel et temporaire, soit inscrit dans un processus d'ajustement
budgétaire caractérisé par une réduction
substantielle et constante du rapport du déficit public dans le PIB.
Une source d'assouplissement aurait pu provenir de la rédaction du
paragraphe 6 de l'article qui prévoit que pour décider s'il
y a ou non déficit excessif le Conseil entreprend une "évaluation
globale".
Il est toutefois difficile de concilier cette marge d'appréciation
laissé au Conseil avec la rigueur des règles posées par le
paragraphe 2 de l'article. On doit en outre indiquer que manquent des
indications sur la méthode d'évaluation globale que devrait
suivre le Conseil.
Sans doute s'agit-il de prendre en considération
tous les éléments pertinents pour juger de la situation des
finances publiques d'un Etat et, en particulier, leur évolution sur
moyenne période. Mais, on conviendra que cela est un peu vague.
Peut-être alors pourrait-on considérer que le paragraphe 3 de
l'article est susceptible d'apporter un peu de précision quant à
la méthode d'évaluation globale que devrait suivre le Conseil. Il
y est en effet indiqué que lorsqu'elle élabore un rapport en cas
de déficit ou de dette excessifs, la Commission examine "
si le
déficit public excède les dépenses publiques
d'investissement
" et "
tient compte de tous les autres facteurs
pertinents, y compris la position économique et budgétaire
à moyen terme de l'Etat membre
".
Si tel était le cas, le Conseil bénéficierait d'une
marge d'appréciation tout à fait considérable.
Car, si
l'élaboration d'un rapport par la Commission suppose que celle-ci ait au
préalable pris acte que l'Etat membre se trouve en situation de
déficit ou de dette publics excessifs, le Conseil pourrait lui, à
la lumière d'une évaluation globale conduite sur les bases
indiquées ci-dessus, requalifier le déficit public de cet Etat
et, en un mot, l'absoudre.
Dans les faits, le Conseil n'a jusqu'à présent pas usé
de cette marge d'appréciation.
c) Une procédure d'une très grande complexité
L'article 104 C organise en outre la procédure dite des déficits excessifs.
Les différentes étapes de la procédure
1. Le rapport de la Commission (paragraphe 3)
Si un Etat membre ne satisfait pas aux exigences du critère relatif
à la dette publique et à celui du déficit public, ou si
elle estime qu'il existe un risque de déficit excessif, la Commission
élabore un rapport
5(
*
)
.
Aucun autre
paragraphe de l'article 104 C ne visant littéralement
l'existence dans un Etat membre d'une dette publique excessive, il y a lieu de
s'interroger sur le point de savoir si la seule "sanction"
ménagée par ce texte dans ce cas consiste dans
l'élaboration par la Commission d'un rapport tel qu'il est
indiqué au paragraphe 3 de l'article.
Cette étape de procédure, lorsqu'elle concerne l'hypothèse
où un déficit public excessif serait constaté par la
Commission est, sans doute possible quant à elle, suivie d'autres
étapes.
2. L'avis de la Commission (paragraphe 5)
C'est ainsi que la Commission ayant élaboré le rapport sus-dit,
elle adresse alors un avis au Conseil -paragraphe 5 de l'article
104 C- qu'il y ait
déficit excessif
ou, d'ailleurs, qu'un
tel déficit
risque de se produire.
Il est assez piquant d'observer que, dans cette dernière
hypothèse, la Commission n'a pas la même latitude que lors de
l'élaboration du rapport visé au paragraphe 3 :
elle
doit
adresser un avis au Conseil. Plus étonnant encore est le sort
que réserve le paragraphe 6 à l'avis de la Commission si
celui-ci n'est fondé que sur le
risque
de survenance d'un
déficit excessif -voir infra-.
3. La décision du Conseil (paragraphe 6)
En effet, cette clause énonce que le Conseil qui statue à la
majorité qualifiée sur la recommandation de la Commission n'a
qu'une alternative : décider soit qu'il y a
déficit
excessif
, soit qu'il n'y a pas
déficit excessif. On souligne que
le Conseil n'a alors littéralement pas vocation à décider
qu'il y a dette excessive
. Mais au-delà, il faut aussi souligner que
saisi d'un avis de la Commission qui ne ferait que constater l'existence d'un
risque
de déficit excessif,
on voit mal le Conseil sauf
à ce qu'il s'éloigne de l'avis de la Commission décider
autre chose que l'inexistence d'un déficit excessif.
4. Les recommandations du Conseil (paragraphes 7, 8 et 10)
Une fois prise par le Conseil la décision qu'existe
un déficit
excessif
, celui-ci adresse des recommandations à l'Etat
concerné afin que celui-ci mette un terme à cette situation dans
un délai donné. En l'état, le délai n'est pas
précisé par le texte et est donc fixé à la
discrétion du Conseil. Les recommandations du Conseil ne sont pas
rendues publiques sauf si, paragraphe 8, le Conseil constate qu'aucune
action suivie d'effets n'a été prise en réponse à
ses recommandations.
Le paragraphe 10 précise que les voies de recours organisées
par les articles 169 et 170 du traité -la saisine de la Cour de justice
par la Commission ou un Etat membre qui s'estimerait lésé par le
non-respect par un autre membre de ses obligations- ne peuvent être
exercées dans le cadre des paragraphes 1 à 9.
5. L'abrogation des décisions du Conseil (paragraphe 12)
Lorsqu'il estime que le
déficit excessif
dans l'Etat membre a
été corrigé, le Conseil abroge toutes ou certaines des
décisions visées aux paragraphes 6 à 9 et 11. En
l'état, seuls les paragraphes 6, 7 et 8 étant en vigueur, les
seules décisions susceptibles d'être abrogées par le
Conseil sont celles prises sur la base de ces paragraphes.
Une formalité particulière est imposée au Conseil si
celui-ci a décidé de rendre publiques ses recommandations, celle
de déclarer publiquement qu'il n'y a plus de
déficit
excessif
dans cet Etat membre.
2. La troisième phase de réalisation de l'Union monétaire : la mise en oeuvre complète de l'article 104 C et le règlement 1467-97 du 7 juillet 1997
a) La mise en oeuvre complète de l'article 104 C
La troisième phase de réalisation de l'Union
monétaire qui commencera le 1
er
janvier 1999 sera
caractérisée par l'entrée en vigueur des paragraphes 1, 9
et 11 de l'article 104 C et du règlement 1467-97 du
7 juillet 1997.
Le
paragraphe 1
de l'article 104 C édicte une
obligation faite à tous les Etats membres,
celle d'éviter
à compter du 1
er
janvier 1999 les déficits
excessifs.
Le
paragraphe 9
permet au Conseil de mettre en demeure un Etat qui
ne donnerait pas suite à ses recommandations de prendre, dans un
délai déterminé, les mesures visant à la
réduction du déficit.
Le
paragraphe
11
pose le principe de sanctions en
précisant que le Conseil peut décider d'appliquer à un
Etat qui ne respecterait pas ses mises en demeure -celles du paragraphe 9-
les mesures suivantes :
la publication d'informations supplémentaires avant l'émission
de titres publics ;
inviter la Banque européenne d'investissement -BEI- à revoir sa
politique de prêts à l'égard de cet Etat ;
effectuer des dépôts sans intérêt auprès de
la Communauté ;
imposer des amendes d'un montant approprié.
Ces clauses entrent en vigueur dès le 1
er
janvier 1999
mais, rappelons-le, cette entrée en vigueur n'est appelée
à concerner, pour les paragraphes 9 et 11, que les Etats ayant
adopté l'euro.
b) Le règlement 1467/97 du 7 juillet 1997 : deuxième pilier du pacte de stabilité et de croissance
Il en va de même pour les dispositions du
règlement 1467/-97
qui viennent préciser ces derniers
paragraphes tandis que les autres dispositions de ce règlement
s'appliquent à l'ensemble des Etats membres.
Le règlement évoqué ci-dessus qui forme
l'un des trois
piliers du pacte de stabilité et de croissance
décidé
lors du Conseil européen d'Amsterdam de juin dernier vise à
"accélérer et à clarifier la mise en oeuvre de la
procédure concernant les déficits excessifs"
. Ses
dispositions doivent être appréciées au regard du
troisième pilier du pacte que constitue la résolution du Conseil
européen relative au pacte de stabilité et de croissance
adoptée le 17 juin 1997 lors du sommet d'Amsterdam.
Un curiosité doit au préalable être exposée. On sait
que le règlement 1467-97 a été pris sur la base du
paragraphe 14 de l'article 104 C. Or, d'une lecture
littérale du traité, il ne ressort pas clairement quel est le
moment d'entrée en vigueur de ce paragraphe.
Une curiosité
L'article 104 C du traité comporte
14 paragraphes
. L'article 109 E du même traité
précise que neuf de ces paragraphes s'appliquent dès le
début de la deuxième phase qui a commencé le
1
er
janvier 1994. Sont exclus de cette application
immédiate les paragraphes 1, 9, 11 et 14. L'article 109 E
indique que les paragraphes 1, 9 et 11 s'appliquent dès le début
de la troisième phase. Il n'évoque en rien le paragraphe 14.
Cette omission, qui ne trouve pas d'explication, pose un problème
juridique signification de la qualité de rédaction de certaines
clauses du traité.
A quel moment le paragraphe 14 de
l'article 104 C du traité trouve-t-il à
s'appliquer ? Nulle réponse ne peut être donnée
à cette question.
Comme la clause dont il s'agit est le fondement juridique de la proposition de
la Commission ayant donné naissance au règlement 1467/97, on
admettra qu'il y aurait pu y avoir là un problème substantiel.
Le règlement qui entrera en vigueur le 1
er
janvier 1999
a d'abord pour objet d'accélérer la procédure dite des
déficits excessifs. A cette fin, sont institués une série
de délais.
Les délais encadrant les différents stades de la procédure
On se reportera au tableau ci-dessus pour identifier les
différentes étapes de la procédure.
Le rapport prévu au paragraphe 3 donne lieu à un avis du
comité économique et financier
dans les deux semaines
de
son adoption.
Le Conseil prend la décision visée au paragraphe 6 dans
un délai de 3 mois
à compter des dates de
notification prévues à l'article 4 paragraphes 2 et 3 du
règlement 3605/93. On rappelle que, selon celui-ci, les Etats membres
doivent notifier à la commission les informations requises par ce
règlement deux fois dans l'année avant le
1
er
mars et avant le 1
er
septembre.
S'il décide qu'il y a déficit excessif, le Conseil doit
concomitamment
adresser à l'Etat concerné les
recommandations visées au paragraphe 7 du traité. Ces
recommandations prescrivent à l'Etat concerné un délai
de quatre mois au maximum
pour engager une action suivie d'effets et
fixent un délai pour corriger le déficit excessif qui, sauf
circonstances exceptionnelles, doit disparaître
dans l'année
suivant
celle de sa constatation.
La décision mentionnée au paragraphe 8 est prise
immédiatement
après l'expiration du délai
mentionné ci-dessus.
La décision mentionnée au paragraphe 9 est prise
un
mois
après la décision ci-dessus.
La décision d'imposer des sanctions (paragraphe 11) est prise,
au plus tard deux mois
, après la décision ci-dessus.
Finalement,
entre les dates de ratification prévues par le
règlement 3605/93 et la décision du Conseil d'appliquer des
sanctions, ne doit pas s'écouler un délai supérieur
à 10 mois.
Est en outre prévue la mise en oeuvre d'une
procédure accélérée en cas de déficit
excessif prévu et délibéré. Enfin,
l'intensification des sanctions doit, le cas échéant, intervenir
dans les deux mois des dates de notification évoquées ci-dessus,
tandis que l'abrogation des décisions du Conseil prévue au
paragraphe 12 de l'article 104 C doit intervenir le plus rapidement
possible et, au plus tard, dans les deux mois suivant les dates de notification.
Mais l'accélération de la procédure n'est pas le seul
objet d'un règlement qui ambitionne aussi de la clarifier
.
Deux éléments sont concernés : la définition
de ce qu'est un déficit excessif et le mécanisme des sanctions.
L'article 2
précise en effet d'abord à
quelles
conditions un déficit peut n'être pas excessif s'il est
considéré comme exceptionnel et temporaire
. Il faut pour cela
qu'il résulte "d'une circonstance inhabituelle indépendante de la
volonté de l'Etat membre concerné et ayant des effets sensibles
sur la situation financière de ses administrations publiques" ou qu'il
soit "consécutif à une grave récession économique".
Le paragraphe 2
de l'article précise qu'une récession
se produit lorsque le PIB réel de l'Etat membre "enregistre une baisse
annuelle d'au moins 2 %".
Le paragraphe 3
du même article apporte une certaine
atténuation à la rigueur de la règle
précédente. Il invite en effet le Conseil à tenir compte
"
dans son évaluation globale, des observations éventuelles de
l'Etat membre concerné, lui indiquant qu'une baisse annuelle du produit
intérieur brut de moins de 2 % en termes réels est
néanmoins exceptionnelle, eu égard à d'autres
éléments d'information allant dans le même sens
...".
Ceux-ci sont, en particulier, "
le caractère soudain de la
récession ou la baisse cumulative de la production par rapport à
l'évolution constatée dans le passé
".
Cependant, dans la résolution d'Amsterdam citée plus haut, les
Etats se sont engagés à ne pas invoquer le bénéfice
de cette dernière disposition lorsque la baisse annuelle du PIB
réel serait inférieure à 0,75 %.
En ce qui concerne les sanctions
, dont on rappelle qu'elles ne
s'appliquent qu'aux Etats ayant adopté la monnaie unique
européenne, l
'article 11
indique que lorsque des sanctions sont
décidées contre un Etat membre, le Conseil doit, "en principe",
exiger avant tout que cet Etat "effectue un dépôt non porteur
d'intérêts".
L'article 12
encadre le pouvoir du Conseil en précisant les
règles de calcul des dépôts.
Le montant du premier dépôt comprend un
élément
fixe
égal à 0,2 % du PIB et un
élément
variable
égal à un dixième de la différence
entre le déficit exprimé en points de PIB et la valeur de
référence (3 % du PIB).
Les dépôts supplémentaires sont, quant à eux,
égaux à cette différence ; c'est dire qu'il ne
comporte pas d'élément fixe.
En tout état de cause, les dépôts annuels ne peuvent
excéder 0,5 % du PIB de l'Etat concerné.
L'article 13
précise que ces dépôts sont, "en
principe" convertis en amende" dans les deux années suivant la
décision d'imposer la constitution du dépôt "si le
déficit excessif n'a pas été corrigé.
L'article 14 et l'article 15
prévoient des mesures
d'abrogation par le Conseil de ses décisions de sanction.
Pour ce qui est des sanctions des premier et deuxième tirets du
paragraphe 11
6(
*
)
, le Conseil peut les
abroger si l'Etat a accompli des progrès sensibles même s'ils sont
insuffisants pour corriger son déficit excessif.
Ce n'est que s'il est décidé que le déficit excessif a
été corrigé que le Conseil peut, et doit, lever toutes les
sanctions prononcées par lui. Il est cependant prévu qu'en ce cas
les amendes ne sont pas remboursées à l'Etat fautif.
L'article 16
précise enfin le sort des dépôts
et des amendes infligés aux Etats. Les dépôts sont
constitués auprès de la Commission. En outre, il précise
que les intérêts sur ces dépôts et les amendes font
partie des ressources du budget général des Communautés
européennes.
Ils sont répartis entre les Etats membres n'étant pas en
situation de déficit excessif, au prorata de leur part dans le PNB des
Etats membres éligibles.
II. UN DISPOSITIF EN DEBAT
Le pacte de stabilité et de croissance a fait l'objet
d'après discussions. Deux objections ont été
émises, l'une portant sur son principe même, l'autre sur ses
modalités.
Les termes de ce débat sont exposés ci-dessous pour ce qui
concerne, successivement, la surveillance et la coordination des
évolutions et des politiques économiques et la prévention
et la correction des déficits excessifs.
A. LE NECESSAIRE RENFORCEMENT DE LA SURVEILLANCE ET DE LA COORDINATION DES EVOLUTIONS ET POLITIQUES ECONOMIQUES
Le thème de la coordination des politiques
économiques a une longue histoire en Europe. Mais, c'est une histoire
complexe qui superpose deux conceptions au moins.
La première, minimale, consiste à promouvoir un modèle
où le partenaire ne gêne pas l'autre. Minimale certes mais
exigeante au moins pour les pays disposant d'une situation favorable dans un
rapport de forces économiques que tend à atténuer la
coordination mise en oeuvre. On peut estimer que l'union monétaire est
l'exemple même de ce type de coordination.
Une deuxième conception est axée sur l'idée de
coopération. Elle suppose la définition et la mise en oeuvre de
règles au terme desquelles l'inégalité des partenaires
étant constatée, le partenaire le plus fort aide celui qui est en
difficulté. Elle est également invoquée pour
reconnaître que la contribution à la résolution d'un
problème commun aux partenaires peut supposer des efforts inégaux
de la part de chacun d'eux.
Ces deux conceptions peuvent avoir des frontières communes -le
renoncement à un avantage comparatif structurellement nuisible pour les
partenaires peut être rangé dans la catégorie des
comportements coopératifs-, cependant la distinction entre ces deux
formes de coordination conserve une valeur analytique robuste.
Force est de constater que la coordination des politiques économiques en
Europe relève plutôt du premier modèle que du second. Force
est aussi de souhaiter que des progrès soient réalisés
pour promouvoir mieux la coordination en Europe.
1. Une évolution des règles du traité
Le règlement 1466/97 pris sur la base du
paragraphe 5 de l'article 103 a modifié les règles
posées par cet article.
Des règles de fond nouvelles ont en effet été
ajoutées sans que ces modifications trouvent de base légale
évidente dans le traité.
C'est évidemment l'énoncé d'un objectif
budgétaire proche de l'équilibre ou excédentaire,
à rechercher dans le cadre des programmes de stabilité ou de
convergence, qui constitue la novation essentielle du texte.
Cet objectif intangible et non circonstancié -tout au moins si
l'on
se réfère au seul dispositif du règlement-
est plus
rigoureux que celui inscrit à l'article 104 C du traité
qui "admet" l'existence de déficits s'élevant à 3 %
du PIB. Et même s'il est vrai que le défaut de respect de la
règle ainsi posée n'est sanctionné que par
l'édiction d'une recommandation du Conseil -alors que l'apparition d'un
déficit excessif entraînera, en théorie, des sanctions
pécuniaires- il s'agit là d'une contrainte qui ajoute
incontestablement au texte du traité.
Dans ces conditions, une
application nuancée des nouvelles règles s'impose, qui devrait
s'appuyer sur le considérant (4) du règlement nouveau qui se
réfère explicitement aux fluctuations conjoncturelles et
paraît associer l'objectif budgétaire ainsi énoncé
à un environnement économique particulier.
Un second ajout
, de précision cette fois, mérite d'être
cité même s'il ne concerne que les
Etats membres non
participants
. Il s'agit de la
surveillance de la politique
monétaire conduite dans ces Etats
et des éventuelles
distorsions des taux de change réels et des fluctuations excessives des
taux de change nominaux auxquelles elle pourrait donner lieu. Il est peu
douteux que l'objectif recherché consiste principalement à
prévenir l'apparition de "dévaluations compétitives".
Mais, il est également significatif que la surveillance s'exerce sur les
fluctuations des taux de change nominaux. Il y a là probablement la
volonté d'arrimer les Etats non participants -dont le nombre au moment
de la rédaction du texte ne pouvait qu'être supputé-
à la nouvelle monnaie unique. En tout état de cause, outre que ce
texte manifeste une grande confiance dans la capacité de la politique
monétaire à contribuer à la maîtrise des prix et des
parités, il faut souligner son aspect paradoxal.
Il est en effet significatif que soit organisée la surveillance de la
politique monétaire conduite par des Banques centrales
indépendantes.
Cela constitue une reconnaissance claire de la part du
Conseil que le contrôle par lui de la politique monétaire ne pose
pas de difficultés juridiques.
Mais il n'est pas moins significatif que le règlement ne ménage
en revanche aucun contrôle de la politique monétaire de la BCE
alors même qu'il s'inscrit dans le cadre d'une surveillance
multilatérale
des politiques économiques
exercée
par référence à des grandes orientations de politiques
économiques qui, elles, comportent bien diverses mentions à la
politique monétaire.
Il faut cependant concéder que la résolution du Conseil
européen de Luxembourg a été l'occasion de
réaffirmer les compétences du Conseil et la
nécessité d'instaurer le dialogue visé par l'article 109 B
du Traité entre le Conseil et la BCE.
2. Un dispositif auquel n'est pas associé le Parlement national
L'article 103 complété par le
règlement du 7 juillet 1997 est le cadre formel de l'élaboration
et du suivi des politiques économiques en Europe. Il est à ce
titre censé déboucher sur trois types de documents
importants :
- les grandes orientations des politiques économiques en Europe ;
- les programmes économiques à moyen terme de chaque Etat
membre ;
- les recommandations adressées à eux.
Chacun de ces importants documents desquels le Parlement national est
jusqu'alors, en pratique, tenu à l'écart, a sa
spécificité, si bien que les modalités de la
nécessaire association du Parlement à leur examen ne peuvent
qu'être diversifiées.
Les grandes orientations des politiques économiques
sont
adoptées par le Conseil au terme d'une négociation où
chaque pays fait entendre sa voix. Il serait heureux que la position
défendue par la France à cette occasion puisse faire l'objet d'un
débat en amont à partir d'une communication de l'exécutif
transmise au Parlement.
Dans cette perspective,
il conviendrait que le gouvernement fasse
application de l'article 88-4 de la Constitution en transmettant la
recommandation de la Commission qui initie la procédure
.
Jusqu'à présent, une telle transmission n'a jamais
été réalisée. Sans entrer dans un débat
juridique un peu vain, il suffit d'indiquer combien, la dimension
européenne s'imposant de plus en plus à la définition et
à la conduite de la politique économique, une telle
possibilité de débat au Parlement national apporterait à
la satisfaction d'une simple exigence démocratique, ne serait-ce que
parce qu'elle permettrait d'évaluer et discuter les engagements pris par
les gouvernements à l'égard de nos partenaires européens.
3. Une procédure à faire vivre
Jusqu'à présent la procédure de
l'article 103 n'a donné lieu qu'à une pratique
décevante.
Les possibilités ouvertes par le mécanisme
n'ont guère été utilisées et lorsqu'elles l'ont
été, elles n'ont débouché que sur des documents peu
opératoires.
La concrétisation essentielle, sinon exclusive, de la procédure a
jusqu'alors été l'adoption annuelle des "grandes orientations de
politique économique".
Le Conseil européen dans sa résolution de Luxembourg en a reconnu
la faible portée -v supra- et l'on ne peut que s'associer à ses
conclusions souhaitant un approfondissement du texte afin que ces grandes
orientations deviennent
l'expression d'objectifs communs des partenaires
formulés sur la base d'une appréciation économique
concrète de la situation de chacun.
C'est à cette condition
qu'une politique économique réellement européenne pourra
exister fondée sur une base sérieuse d'appréciation de la
situation des partenaires et des problèmes rencontrés par chacun.
C'est aussi une condition nécessaire à l'exercice d'une
surveillance efficace des évolutions et des politiques
économiques dans la zone euro.
Or,
celle-ci s'impose tout particulièrement compte tenu des
caractéristiques de cette zone.
Sans aborder le débat théorique suscité par la notion de
zone monétaire optimale
7(
*
)
, il est
remarquable d'observer la dispersion des niveaux de développement et des
taux de croissance en Europe ainsi que les écarts constatés face
à des problèmes structurels, par exemple le chômage -v.
supra-. L'on peut en outre supputer une faible mobilité de la population
active européenne et, le cas échéant, le renforcement
d'une spécialisation économique déjà à
l'oeuvre dans certains pays.
La convergence nominale n'est donc pas acquise
une fois pour toutes.
Dans ces conditions, les occasions
d'hétérogénéité des évolutions
économiques seront probablement non nulles dans la zone euro
si bien
qu'une surveillance rigoureuse des phénomènes économiques
à l'oeuvre dans chaque Etat partenaire s'impose. Il est souhaitable
qu'elle débouche sur une prévention et, le cas
échéant, une correction des divergences ce qui peut supposer
davantage que le modèle de coordination minimal évoqué
plus haut.
Plusieurs observations doivent alors être formulées.
Il ne faut pas surestimer le risque d'une divergence grave entre
économies européennes.
L'expérience historique
démontre que l'intégration européenne s'est
accompagnée d'une mise en phase des conjonctures et de performances
nominales qui ont convergé. En outre, les économies
européennes sont, dans l'ensemble, peu spécialisées, les
grands pays de la zone disposant d'une gamme productive vaste ce dont
témoignent les caractéristiques des échanges
intraeuropéens qui concernent des produits relevant des mêmes
branches de production. Néanmoins, ces données sont
inégalement vérifiées dans les pays appelés
à adopter l'euro.
L'absence d'un budget fédéral
capable, comme aux
Etats-Unis, de compenser une part substantielle des chocs économiques
supportées par certaines régions
doit inciter les Etats
membres de la zone euro à pratiquer une politique budgétaire qui
leur permette de disposer de marges de manoeuvre en phase conjoncturelle
défavorable
.
De ce point de vue, l'objectif posé par le pacte de stabilité
et de croissance d'un retour à l'équilibre des finances publiques
en période ascendante du cycle économique doit être
entièrement approuvé.
Toutefois, il est à supposer que la question du
fédéralisme budgétaire continuera à se poser.
Le rôle des finances publiques comme instrument d'ajustement
conjoncturel est appelé à s'intensifier. Deux questions
émergeront inévitablement.
La première sera celle de savoir si les disciplines budgétaires
du pacte de stabilité et de croissance sont pertinentes et
réalistes -v.infra-.
La seconde sera celle de la coordination entre la politique budgétaire
et la politique monétaire.
Cette question est "a priori" résolue par les règles du pacte de
stabilité et de croissance. Celles-ci peuvent s'analyser comme un
engagement réciproque des autorités budgétaires et de la
BCE. Les premières s'engagent à conduire une politique
budgétaire saine
8(
*
)
et contracyclique. La
seconde s'engage à reconnaître que la phase descendante du cycle
ou un choc récessif peuvent justifier un déficit
budgétaire dans certaines limites. Il reste que la
réciprocité de ces engagements devra être
vérifiée dans la pratique.
C'est pourquoi il est si
fondamental qu'un dialogue s'instaure entre le Conseil et la BCE.
La surveillance et la coordination des évolutions et des politiques
économiques n'est pas seulement justifiée par le souci de mettre
en place un cadre favorable aux ajustements conjoncturels. Il faut aussi
éliminer les aspects déloyaux d'une concurrence que l'adoption de
l'euro pourrait accentuer.
L'adoption de l'euro doit s'accompagner d'un approfondissement rapide de
tous les volets de l'Union économique et monétaire.
Le
Président de la République a pris la très heureuse
initiative de promouvoir l'approfondissement social de l'Union. D'autres
dossiers importants doivent être traités, qu'il s'agisse des
gestions fiscales que votre commission des finances s'est attachée
à clarifier depuis deux ans
9(
*
)
ou des
règles financières. La concurrence entre Etats européens
doit être loyale. Des rapprochements avec nos partenaires doivent
être recherchés à cet effet dans le respect d'un principe
de subsidiarité évalué sur des bases réalistes.
Ces rapprochements seront, ne le cachons pas, difficiles à obtenir. Nous
devons éviter l'écueil que nous rencontrerions certainement en
imaginant pouvoir toujours amener nos partenaires à se calquer sur
"l'exception française". C'est vrai dans le domaine social et la loi
imposant la mise en oeuvre universelle des 35 heures, quelle que soit
l'issue des négociations sociales, nous place dans une situation de
singularité incohérente avec le souci d'une recherche de
solutions communes en Europe.
Mais, c'est également vrai dans bien d'autres domaines dont, tout
particulièrement, le domaine fiscal. En nous situant dans un contexte de
hausse des prélèvements mise en évidence à
l'occasion du dernier débat budgétaire
10(
*
)
, le
gouvernement nous éloigne de l'objectif
à promouvoir d'une certaine harmonisation fiscale en Europe. Là
aussi, la maîtrise et l'optimisation des dépenses publiques
s'imposent, sauf à se résigner à des pertes cumulatives de
compétitivité structurelle.
B. LA PROCÉDURE DE PRÉVENTION ET DE CORRECTION DES DÉFICITS PUBLICS EXCESSIFS
La procédure ménagée par l'article 104 C
du traité institue des règles strictes de discipline
financière.
Le dispositif en vigueur depuis 1994 a été durci dans le cadre du
deuxième pilier du pacte de stabilité et de croissance si bien
que les imperfections constatées à l'occasion de sa mise en
oeuvre effective devront être corrigées à l'avenir.
Mais l'essentiel est ailleurs. La pertinence des règles posées
peut être débattue ; leur crédibilité peut
être discutée.
1. Une procédure appelée à évoluer
L'article 104 C sur les déficits excessifs a
été mis en oeuvre sous une forme partielle depuis le 1er janvier
1994, date du début de la deuxième phase de réalisation de
l'Union économique et monétaire. Désormais, il sera mis en
oeuvre dans la totalité de ses stipulations et selon les
modalités prévues par le règlement 1467/97
analysées plus haut.
Le renforcement de la discipline budgétaire devra s'accompagner d'une
application de la procédure plus stricte qu'auparavant.
La mise en oeuvre de la procédure des déficits excessifs n'a en
effet pas été entièrement satisfaisante jusqu'à
présent. L'application éventuelle de sanctions aux Etats membres
devrait susciter une rationalisation des méthodes. Un point doit et sera
probablement corrigé.
La procédure de l'article 104 C suppose un enchaînement
de décisions. Le Conseil doit chaque année décider si un
Etat membre se trouve en situation de déficit excessif.
Les textes communautaires ne précisent pas suffisamment de quel
déficit il s'agit ou, plus exactement, le rattachement temporel du
déficit public en question. S'agit-il du déficit public en cours
ou du déficit public de l'année à venir ou bien encore
d'un autre déficit public ?
La seule mention utile donnée par le texte de l'article 104 C est celle
du a) du paragraphe 2 qui vise le déficit public prévu ou
effectif.
Il faut, pour obtenir des informations supplémentaires, se reporter au
règlement n° 3605/93 du Conseil du 22 novembre 1993 qui, dans son
article 3, dispose que
"
1.
les chiffres de
déficit public
prévu
sont les chiffres établis pour l'année courante par les Etats
membres en conformité avec les décisions les plus récentes
de leurs autorités budgétaires.
", tandis que
"
2.
les chiffres de
déficit public effectif
et
de niveau de dette publique effective sont les résultats estimés,
semi-définitifs et définitifs pour une année
écoulée.
"
Si donc la surveillance du déficit public prévu concerne le
déficit de l'année courante, celle du déficit public
effectif concerne les déficits d'années écoulées.
Ces dernières sont définies à l'article 4 du
règlement sus-mentionné. Il s'agit des années n-1 à
n-4.
Ces règles posent à l'évidence un problème par leur
caractère extensif. Car, littéralement, les instances
communautaires sont en mesure de constater l'existence d'un déficit
excessif dans un Etat membre pour n'importe quel déficit des
années n à n-4. Cependant, l'utilité de la
procédure commande que ce constat soit réservé au
déficit de l'année courante car, par hypothèse, le
déficit des années précédentes ne peut être
corrigé.
Cette interprétation de bon sens, conforme à la règle de
l'interprétation utile des textes de droit a-t-elle prévalu dans
la pratique ?
L'examen des propositions de la Commission démontre que tel n'a pas
été le cas.
La Commission et le Conseil ont en effet pris l'habitude de se
référer au déficit de l'année écoulée
pour fonder le constat de l'existence d'un déficit public excessif dans
un état membre.
La recommandation de la Commission au Conseil visant le déficit public
français notifié par notre pays en 1997 illustre cette
méthode.
En effet, alors que le Conseil notait
, "que conformément à sa
recommandation, le gouvernement français se propose de ramener le
déficit des administrations publiques à 3 % du PIB en
1997
" soit à un niveau conforme à la valeur de
référence, il n'en recommandait pas moins au gouvernement
français "
de mettre un terme à la
situation actuelle de
déficit excessif
".
Il y a là une contradiction patente à laquelle les organes
communautaires tentent de donner une solution au moyen d'une astuce de
procédure. Elles se fondent en effet sur le paragraphe 12 de l'article
104 C qui concerne l'abrogation des décisions du Conseil pour
éviter de décider formellement l'existence d'un déficit
excessif.
Ce paragraphe stipule en effet que :
"
le Conseil abroge toutes ou certaines de ses décisions visées
aux paragraphes 6 à 9 et 11 dans la mesure où, de l'avis du
Conseil,
le déficit excessif dans l'Etat membre concerné a
été corrigé
...
"
Ce paragraphe permet de maintenir en vie des décisions prises dans le
passé et donc de considérer qu'un Etat membre connaît un
déficit excessif dès lors que le constat que ce déficit
a été corrigé
n'est pas posé par le Conseil.
Or, ce constat dépend de
la réalisation effective
d'un
objectif de réduction du déficit et ne saurait être
fondé sur
les seules intentions d'un gouvernement
.
En optant pour cette méthode les organes communautaires ont probablement
mésusé de la procédure de l'article 104 C.
On peut en effet considérer que le paragraphe 12 organise un simple
dispositif de conséquence en prévoyant l'abrogation de
décisions antérieures et donc la suppression de leurs effets pour
l'avenir.
On comprend que le Conseil ait, par prudence, agi de la sorte. mais, cette
méthode qui conduit à négliger les efforts consentis par
un Etat pour assainir ses finances publiques tant que la réalisation
d'un objectif, serait-il posé par la loi
11(
*
)
,
n'aurait pas été constatée,
devrait n'être plus de mise dès lors que les décisions du
Conseil pourraient déboucher sur le prononcé de sanctions.
On peut par ailleurs signaler une dérive de la Commission et du
Conseil qui devrait être endiguée à l'avenir.
On sait que, lorsque le Conseil décide de constater l'existence d'un
déficit excessif dans un Etat membre, il adresse des recommandations
à cet Etat "
afin que celui-ci mette un terme à cette situation
dans un délai donné
" conformément au paragraphe 7 de
l'article 104 C.
Le reste de la procédure est conditionnée par les
réactions de l'Etat concerné face aux recommandations du Conseil
et non plus par le maintien ou l'extinction du déficit excessif.
On pourrait considérer que ces deux conditions sont équivalentes.
Il n'en est rien. Les organes communautaires ont en effet élargi leur
compétence et sont allés dans leurs recommandations
au-delà de ce qu'implique le retour à un déficit ne
dépassant pas 3 % du PIB.
C'est ainsi que dans le projet de recommandation adressé à la
France en 1997, "
le Conseil invite en outre le gouvernement français
à poursuivre la réduction du déficit public en 1998 afin
de le ramener à 2,8 % du PIB...
".
Ces initiatives, qui pourraient être justifiées dans le cadre
de l'article 103 du traité sont condamnables lorsqu'elles prennent
place dans le cadre de l'article 104 C.
Elles le sont d'autant plus
que les organes communautaires, allant au-delà des textes,
considèrent que "
le Conseil tient compte du respect des
recommandations... quand il adopte des décisions conformément
à l'article 104 C paragraphe 12
". En clair, l'abrogation des
décisions consécutives au constat de l'existence d'un
déficit excessif, tient compte du respect de recommandations dont le
contenu peut être plus exigeant que ce qu'impliquerait le retour à
un déficit public limité à 3 % du PIB.
Il convient donc d'inviter le gouvernement à faire en sorte que la
procédure de l'article 104 C joue normalement.
2. La discipline budgétaire en débat
Une question fondamentale est de savoir si les règles de discipline budgétaire posées par le Traité sont cohérentes avec les objectifs d'une zone monétaire unifiée. Une autre question est de savoir si elles sont réalistes.
a) Le réalisme des règles
Cette question conduit à présenter des analyses
nuancées.
Une première approche consiste à explorer l'histoire
récente des finances publiques en Europe et à se demander si des
déficits supérieurs à la norme posée auraient pu
échapper à la procédure des déficits excessifs
compte tenu des cas d'exemption prévus par elle.
Quelques considérations factuelles doivent d'abord être
présentées.
Le tableau ci-après démontre que des déficits publics
supérieurs à 3 % ont fréquemment été
observés en Europe dans un passé proche.
Excédent/déficit des administrations publiques
(Capacité (+)/besoin (-) de financement des administrations
(en pourcentage du PIB)
|
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998* |
B
|
- 7,1
|
- 4,9
|
- 3,9
|
- 3,2
|
- 2,1
|
- 1,7
|
F |
- 5,8 |
- 5,8 |
- 4,9 | - 4,1 | - 3,0 | - 2,9 |
IRL
|
- 2,7
|
- 1,7
|
- 2,2
|
- 0,4
|
0,9
|
1,1
|
EUR |
- 6,1 |
- 5,4 |
- 5,0 | - 4,2 | - 2,4 | - 1,9 |
* Budgets économiques du printemps 1998. Source
: Services de la commission
On peut en outre estimer que les conditions à remplir pour qu'un
déficit soit considéré comme exceptionnel et temporaire au
sens du pacte de stabilité et de croissance sont particulièrement
rigoureuses.
Il faut d'abord imaginer ce que pourrait être une circonstance
inhabituelle indépendante de la volonté de l'Etat membre et ayant
des effets sensibles sur la situation financière de ses administrations
publiques
. Une catastrophe naturelle est souvent citée comme pouvant
constituer un tel événement. Peut-être un conflit guerrier,
mais à condition qu'il n'ait pas été
déclenché par l'Etat concerné pourrait-il en constituer un
aussi. Un événement aussi important et lourd de
conséquences financières que l'unification allemande ne
répondrait pas aux critères ainsi posés. Il n'y
répondrait tout du moins pas pour l'Allemagne elle-même, puisqu'il
a dépendu à l'évidence de sa volonté. En revanche,
pour les autres Etats européens ou, pour certains d'entre eux, il
pourrait être considéré comme tel.
La question se pose avec une particulière acuité pour les crises
pouvant affecter tel ou tel secteur économique et, notamment, les
établissements financiers. La crise du Crédit Lyonnais pourrait
entrer dans le cadre ainsi défini..., mais rien n'est moins sûr.
Sans doute le Conseil disposera-t-il d'une marge d'appréciation, mais il
reste à savoir comment il en usera.
Pour ce qui est de l'autre circonstance dans laquelle un déficit
public excessif pourrait être absent, celle d'une "grave
récession", l'exigence d'une baisse annuelle du PIB d'au moins 2 %
en termes réels relève d'une démarche
particulièrement rigoureuse là aussi
. Seuls le Royaume-Uni en
1980 et 1991, la Suède en 1993 et la Finlande en 1991 et 1992 ont, parmi
les pays européens, connu de telles récessions. Ce cas
d'exemption pourrait donc -on peut d'ailleurs le souhaiter- ne se rencontrer
que rarement.
Il est vrai que le Conseil pourra apprécier si une récession
comprise entre 0,75 % et 2 % justifie une exemption. Mais, là
également, on ne peut qu'observer que cette circonstance se rencontre
rarement et que les finances publiques européennes ont connu des
déficits supérieurs à la norme retenue dans des contextes
économiques nettement moins dégradés.
Il est par conséquent probable que les règles d'exemption des
disciplines instituées ne trouveront que rarement à s'appliquer
mais qu'elles permettront d'absorber des chocs économiques de grande
ampleur.
Une deuxième approche du "réalisme" des règles de
discipline budgétaire conduit à examiner si les situations de
finances publiques observées dans les Etats de la zone euro au moment
où elle se constitue les garantissent contre l'éventualité
de se trouver en situation de déficit excessif.
A cette question, l'analyse des programmes de convergence fournis par les
différents Etats membres apporte une réponse plutôt
rassurante.
Projections des programmes de convergence
concernant
l'évolution de l'excédent/du déficit
des
administrations publiques
(Capacité (+)/besoin (-) de financement des administrations publiques en
% du PIB)
|
Date de présentation |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
B |
1/97 |
- 2,9 |
- 2,3 |
- 1,7 |
- 1,4 |
|
DK a) |
06/97 |
0,7 |
0,7 |
0,9 |
1,1 |
|
D b) |
1/97 |
- 2,9 |
- 2 ½ |
- 2 |
- 1 ½ |
|
EL |
7/97 |
- 4,2 |
- 2,4 |
- 2,1 |
|
|
E |
4/97 |
- 3,0 |
- 2,5 |
- 2,0 |
- 1,6 |
|
F |
1/97 |
- 3,0 |
- 2,8 |
- 2,3 |
- 1,8 |
- 1,4 |
IRL |
12/97 |
0,4 |
0,3 |
0,7 |
|
|
I |
6/97 |
- 3,0 |
- 2,8 |
- 2,4 |
- 1,8 |
|
NL |
12/96 |
- 2,2 |
- 2 ¼ |
|
|
|
A |
10/97 |
- 2,7 |
- 2,5 |
- 2,2 |
- 1,9 |
|
P |
3/97 |
- 2,9 |
- 2,5 |
- 2,0 |
- 1,5 |
|
FIN |
9/97 |
- 1,3 |
- 0,1 |
0,3 |
1,0 |
1,9 |
S |
9/97 |
- 1,9 |
0,6 |
0,5 |
1,5 |
|
UK c) |
9/97 |
- 1,6 |
- 0,3 |
- 0,1/0,4 |
0,5/1,5 |
0,9/2,4 |
a) Un excédent des administrations publiques de
2,8 % du PIB est projeté pour 2005.
b) Les autorités allemandes ont présenté des estimations
révisées en février 1997.
c) Années budgétaires.
Sources : Programmes de convergence nationaux
Mais ces programmes sont dépendants d'hypothèses
dont certaines échappent à la volonté des gouvernements.
Un accident conjoncturel qui ne revêtirait pas l'ampleur requise pour
exempter des règles de discipline budgétaire l'Etat qui en serait
victime mettrait en situation difficile les Etats dont le besoin de financement
se situe aux alentours de 3 %.
Il est à cet égard
heureux que l'instauration de l'euro s'inscrive dans un contexte
économique favorable, propice à un redressement des comptes
publics.
De la même manière, un choc de taux d'intérêt
mettrait en grande difficulté les finances publiques des Etats fortement
endettés.
Ces programmes dépendent aussi d'une volonté politique qui
conditionne leur mise en oeuvre.
A cet égard, on doit
déplorer que les récentes orientations du gouvernement ne
s'inscrivent pas dans les objectifs du programme présenté au mois
de janvier de l'année dernière. Un objectif de déficit du
budget de l'Etat de 2,5 % pour 1999 apparaît insuffisant pour
garantir que la progression du poids de la dette publique sera stoppée.
Compte tenu du degré inégal de maîtrise des comptes sociaux
et du budget de l'Etat, il convient que celui-ci traduise mieux l'objectif
nécessaire d'un retour à l'équilibre.
b) La pertinence des règles
La pertinence des règles de discipline
budgétaire doit être examinée au regard d'abord de
l'indicateur choisi et ensuite des valeurs retenues.
S'agissant du choix de l'indicateur
, plusieurs observations doivent
être faites.
L'objectif des règles du pacte de stabilité et de
croissance étant essentiellement d'éviter qu'un accroissement de
la demande d'épargne n'exerce des tensions sur le niveau des taux
d'intérêt en Europe, certains ont pu considéré qu'il
aurait été plus justifié de choisir d'encadrer le besoin
de financement de l'ensemble des agents économiques plutôt que
celui des seules administrations publiques -voir supra-. Mais, compte tenu de
l'influence particulière exercée par celles-ci sur les conditions
de formation de l'équilibre entre épargne et investissement et de
leur propension à s'affranchir des règles de discipline
financière au détriment des autres agents, une surveillance de
leur politique financière apparaît nécessaire.
Le choix d'une norme imposée à chaque Etat plutôt que
d'une norme tenant compte du besoin de financement de l'ensemble de la zone
euro peut déboucher, en théorie, sur des "illogismes" financiers.
Tel serait le cas si le besoin de financement des administrations publiques
européennes se réduisant dans l'ensemble, un pays se trouvait
pour des raisons propres en situation de devoir resserrer sa politique
budgétaire pour satisfaire les conditions posées par le pacte
plus que ne l'exigerait sa situation économique. Une autre
difficulté vient de l'inégale influence sur la demande
d'épargne dans la zone euro d'une norme uniforme exprimée en
pourcentage du PIB de chaque Etat, compte tenu des écarts entre leurs
niveaux de PIB.
Ce choix qui résulte beaucoup d'une absence de fédéralisme
budgétaire en Europe est, en outre, justifié par le souci
d'éviter la propagation dans la zone de comportements de "passagers
clandestins". Autrement dit, il s'impose pour éviter que chacun, pariant
sur la discipline de l'autre, tous pratiquent des politiques budgétaires
laxistes, phénomène qui rendrait insoutenable la situation
financière de l'Europe.
Cette solution, réaliste, pourrait
sortir améliorée d'un approfondissement de l'Union
économique et monétaire. En l'état, elle a le
mérite de proposer un compromis acceptable.
La procédure de prévention et de correction des situations
où des finances publiques se trouveraient compromises traite, on l'a vu,
avec plus de sévérité les déficits publics que les
dettes publiques. Ce choix, fondé sur l'idée selon laquelle les
contraintes imposées aux déficits publics garantissent contre une
dérive des dettes publiques n'est pourtant pas entièrement
satisfaisant. Il ignore qu'une même valeur de déficit national
exprimée en pourcentage de PIB peut faire varier l'endettement public de
la zone dans des conditions très variables. Il ignore aussi les effets
que pourraient avoir des reprises de dette pratiquées par certains Etats
sur le niveau de l'endettement de la zone.
Une grande vigilance s'imposera
donc afin de vérifier l'efficacité des limites imposées
aux déficits publics sur la demande d'épargne dans la zone euro.
S'agissant des valeurs retenues pour apprécier les disciplines
budgétaires
, on rappelle qu'elles sont inchangées par rapport
aux valeurs choisies pour apprécier les performances des Etats candidats
à l'euro, à savoir 3 % du PIB pour le déficit public
et 60 % du PIB pour la dette publique.
Un bref rappel historique doit indiquer que ces chiffres correspondaient, pour
l'un, à la moyenne de l'endettement public au moment de la signature du
traité sur l'Union européenne et, pour l'autre, au niveau de
déficit public compatible, dans le cadre d'une croissance de 5 %,
avec une convergence des performances de chacun vers une stabilisation de la
dette autour de 60 % du PIB.
Plusieurs conclusions intermédiaires doivent donc être
formulées.
La référence posée en matière de dette
publique est arithmétique plutôt que financière et
économique.
Elle ne doit pas servir de guide pour apprécier
la soutenabilité de la dette publique. Compte tenu des effets potentiels
d'une dette publique atteignant 60 % du PIB sur les marges de manoeuvre
budgétaires, il faut se fixer un objectif plus ambitieux.
La référence posée en matière de
déficit ne correspond plus à la situation des finances publiques
de la zone non plus que, semble-t-il, aux conditions économiques
prévisibles.
Un déficit public atteignant 3 % n'assure
pas la stabilité ou la réduction du poids de la dette publique
dans le PIB autour des objectifs, d'ailleurs insuffisants, visés en la
matière. C'est donc à juste titre qu'il doit être
considéré comme exceptionnel.
Une seconde question est alors de savoir si, une situation exceptionnelle
advenant, un Etat pourra user de sa politique budgétaire efficacement
dans le respect des disciplines imposées par le pacte de
stabilité et de croissance.
Une réponse affirmative doit être apportée à cette
interrogation sous réserve que l'assainissement budgétaire ait
été entrepris de telle sorte que le besoin de financement des
administrations publiques tende vers l'équilibre lorsque la conjoncture
est favorable.
Un exemple chiffré
Soit un équilibre des finances publiques
réalisé moyennant des recettes et des dépenses publiques
s'élevant, chacune, à 50 % du PIB. On suppose une baisse du
PIB de deux points.
Les recettes de l'Etat sont alors réduites d'un point de PIB. Pour
soutenir l'activité, on imagine que l'Etat ne réduit pas ses
dépenses. Leur part dans le PIB s'accroît mécaniquement
d'un point. La dégradation de l'équilibre budgétaire
s'élève donc à deux points et compense comptablement la
récession économique.
Il faut en conclure que, même en cas de difficultés
exceptionnelles, la capacité pour un gouvernement de décider
d'orienter sa politique budgétaire pour compenser des évolutions
économiques défavorables sera entière dès lors
qu'une politique budgétaire saine aura été entreprise
auparavant.
3. La crédibilité de l'arsenal des sanctions
S'agissant de la crédibilité de l'arsenal de
sanctions
prévu dans le cadre du pacte de stabilité et de
croissance, une première observation peut être formulée.
L'exclusion du système de sanctions des Etats membres n'ayant pas
adopté d'euro peut être contestée
. Elle obéit
à une certaine logique si l'on considère que la "discipline
budgétaire" ne doit être renforcée qu'entre les
participants à la monnaie unique pour des motifs propres à la
cohérence de la nouvelle zone monétaire. Elle entre dans la
logique propre au traité qui n'a prévu d'entrée en vigueur
de ces nouvelles disciplines qu'au stade de la troisième phase,
c'est-à-dire après l'adoption de l'euro.
Une autre solution aurait pu être décidée. Appliquer ces
disciplines à tous dès l'adoption de la monnaie unique aurait pu
être délicat pour les pays dont la situation de déficit
excessif aurait justifié qu'ils soient exclus de la monnaie unique. Le
risque aurait été alors grand que ces pays soient quasi
automatiquement sanctionnés. On doit toutefois remarquer que les
délais prévus par la procédure sur les déficits
excessifs leur aurait ménagé du temps pour corriger leur
déficit. Le traité aurait d'ailleurs pu n'exempter que pour un
temps les Etats membres "hors euro" du renforcement des disciplines de
l'article 104 C.
Cette difficulté renvoie fondamentalement au statut de la future monnaie
unique. On sait qu'elle n'est pas un objectif de politique économique de
l'Union mais qu'elle en est un instrument qu'on peut qualifier d'essentiel.
Dans cette perspective, il aurait été logique d'intensifier au
fil du temps les pressions pour que tous les Etats du grand marché
adoptent la monnaie unique et donc que tous soient astreints au renforcement
des règles de discipline budgétaire.
Cette solution aurait d'autant moins manqué de logique qu'elle aurait
entouré le fonctionnement du "SME bis" qui devrait constituer une zone
monétaire par défaut des garanties supplémentaires
qu'exige un tel mécanisme.
Il est cependant à souligner que la constitution d'une zone euro
à onze Etats fait un peu perdre de son intérêt à une
critique dont la pertinence aurait été plus grande si le nombre
des Etats qualifiés avait été moindre.
Une seconde difficulté avait pu être justement mise en
évidence. Elle concernait l'
affectation du produit (capital et
intérêts) des amendes et des dépôts
qui
posait un problème de principe.
La proposition de
résolution n° 71 présentée par M. Xavier de
Villepin le 7 novembre 1996 sur une version initiale de la proposition de
la Commission avait très justement demandé au gouvernement :
"
de veiller à ce que le produit des amendes prévues par la
procédure concernant les déficits excessifs ne puisse
bénéficier aux pays qui ne sont pas astreints aux règles
du pacte de stabilité budgétaire
".
On rappelle en effet que l'article 109 K paragraphe 3 du Traité
prévoit que les Etats faisant l'objet d'une dérogation, en clair
les Etats n'ayant pas adopté la monnaie unique, sont exemptés des
règles posées par les paragraphes 9 et 11 du traité si
bien qu'en particulier ils échappent aux sanctions ci-dessus
décrites.
Echappant au dispositif destiné à renforcer la discipline
budgétaire, il aurait été choquant qu'ils
bénéficient de la mise en oeuvre des règles
répressives imposées aux Etats qui y auraient été
astreints.
Le dispositif de l'article 16 a été corrigé sur ce point.
Il prévoit certes que les intérêts sur les
dépôts et les amendes infligées par le Conseil font partie
des ressources du budget des Communautés européennes. Mais les
Etats faisant l'objet d'une dérogation sont exclus du
bénéfice de ces ressources. Il reste à veiller à ce
que soient précisées les modalités de leur
répartition entre les seuls Etats participants respectant la discipline
budgétaire.
Mais, l'essentiel est sans doute ailleurs.
Le Conseil européen d'Amsterdam a demandé au Conseil de
sanctionner systématiquement les Etats dont le déficit
apparaîtrait excessif.
Une telle fermeté s'impose compte tenu de la logique de la construction
européenne. Mais, il est naturel de s'interroger sur l'usage d'un
dispositif qui est essentiellement dissuasif. Il pourrait être
malaisé d'appliquer des sanctions financières à un Etat
qui, par définition, connaîtrait des difficultés.
La vertu dissuasive de l'appareil de sanctions en sort-elle vraiment
affaiblie ? Probablement pas car un Etat qui serait en infraction
risquerait au fond bien plus que les sanctions prévues. Ne risquerait-il
pas en effet d'être conduit à renoncer à l'euro ?
En tout état de cause, cette perspective n'interviendrait qu'au terme
d'un processus de riposte graduée permettant aux instances
européennes de vérifier l'indiscipline caractérisée
d'un Etat membre.
CONCLUSION
La recommandation de la Commission européenne a fait
l'objet de trois propositions de résolution dont les textes figurent en
annexe de ce rapport. Ces propositions, renvoyées à la commission
des finances, ont fait l'objet d'un examen attentif. A son terme, et compte
tenu des conclusions suscitées par la recommandation de la Commission
européenne, votre rapporteur a jugé souhaitable de proposer
à l'adoption de la commission des finances un nouveau texte. Celui-ci
s'inspire très étroitement de la proposition de résolution
n° 370 de M. Xavier de Villepin, telle qu'elle est sortie des
délibérations de la délégation du Sénat pour
l'Union européenne.
Les apports du texte de la commission des finances résultent
principalement d'une volonté de préciser certaines conditions du
contrôle du Parlement français sur les implications
financières et économiques de la participation de la France
à la zone euro.
En outre, sur la base des conclusions du rapport relatives aux implications de
l'euro, il est proposé d'inviter le Gouvernement à adopter une
politique économique et des finances publiques cohérente avec nos
engagements européens et à contribuer ainsi à approfondir
l'ensemble des volets de l'Union économique et monétaire. Cet
approfondissement, qui suppose d'être attentif aux conditions
économiques et sociales, implique aussi d'être vigilant dans
d'autres domaines parmi lesquels la fiscalité ou les règles
financières.
Au total, la proposition de résolution de la commission soumise à
l'adoption du Sénat par la commission des finances manifeste les
mêmes préoccupations que celle déposée par
M. Xavier de Villepin. Se félicitant de l'adoption de l'euro dans
un grand nombre de pays européens, elle invite le Gouvernement à
agir dans le sens d'un succès de l'euro, à s'inscrire dans le
cadre de l'équilibre institutionnel dessiné par le traité,
ses textes d'application et les résolutions des conseils
européens et à permettre au Parlement français de
surveiller les implications de l'adoption de l'euro.
ANNEXE N° 1
Texte des trois propositions de
résolution renvoyées
à la commission des finances, en
application de
l'article 73 bis du règlement
I. PROPOSITION DE RÉSOLUTION N° 362 PRÉSENTÉE PAR M. CLAUDE ESTIER ET LES MEMBRES DU GROUPE SOCIALISTE ET APPARENTÉS LE 31 MARS 1998
Le Sénat,
Vu l'article 88-4 de la Constitution,
Vu les dispositions de l'article 109 J du Traité de Maastricht
concernant le passage à la troisième phase de l'Union
économique et monétaire (UEM),
Vu l'examen par la Commission européenne des déficits excessifs
dans les Etats membres, conformément à l'article 104 C du
Traité de Maastricht,
Vu le rapport de convergence de la Commission européenne publié
le 25 mars 1998,
Vu la recommandation de la Commission européenne publiée le
25 mars 1998 relative à la liste des pays candidats à
l'entrée dans l'Union économique et monétaire
(article 109 J), (E-1045),
- Considérant :
la détermination du Gouvernement à respecter les
critères de convergence, tout en maintenant les objectifs primordiaux de
croissance et de création d'emplois,
les initiatives du Gouvernement en faveur du rééquilibrage
des dispositions monétaires inscrites dans le traité de
Maastricht, dans le sens de l'emploi, de la croissance et d'une meilleure
coordination des politiques économiques des futurs Etats participant
à l'Union économique et monétaire,
les atouts de la création d'une monnaie unique européenne
en termes de croissance, d'emploi et de compétitivité sur le plan
international, qui vont dans le sens du renforcement d'une Europe puissante,
- Considérant que le passage à la troisième phase de
l'Union économique et monétaire nécessite
un
degré élevé et durable de convergence
vers les
critères définis par le Traité de Maastricht.
- Se félicite :
que
11 Etats membres
de l'Union européenne sont
susceptibles de participer à la monnaie unique,
du respect de tous les critères de convergence par la France,
que l'
Italie
, compte tenu des sacrifices qu'elle s'est
imposé et des efforts qu'elle a entrepris dans le sens du respect des
critères de convergence définis dans le Traité de
Maastricht, fasse partie des premiers pays participants à la monnaie
unique, tout comme l'
Espagne
.
- Souhaite que :
dans le cadre de la mise en place de l'Union économique et
monétaire, les principes de
solidarité et de
cohésion
qui fondent l'Union européenne soient
préservés, aussi bien entre les pays membres de la zone euro
qu'entre les Etats participant à l'euro et ceux qui n'y participent pas
encore,
le processus d'intégration économique et monétaire
continue à s'accompagner de politiques permettant d'éviter
l'approfondissement des disparités économiques entre les
différentes régions de l'espace européen,
soit instauré un contrôle démocratique qui puisse
assurer une plus grande transparence des décisions monétaires et
par conséquent une plus grande confiance des citoyens européens
dans le fonctionnement de l'Union économique et monétaire.
- Souligne, cependant, la nécessité d'une harmonisation
progressive de la fiscalité, de la protection sociale et des salaires,
afin de réduire toute tentation de concurrence dommageable
entraînant une pratique de "dumping" fiscal et social
préjudiciable à l'emploi.
- Souligne la nécessité d'une meilleure organisation des
relations entre les pays membres de la zone euro et ceux qui n'y appartiennent
pas encore.
- Rappelle, enfin, que l'appréciation globale que porteront les
gouvernements sur les progrès de convergence est une décision
éminemment politique.
- Invite le Gouvernement :
à maintenir ses efforts pour que soient renforcés dans les
années à venir les volets économique et social de l'Union
économique et monétaire,
à soutenir les initiatives de ses partenaires européens qui
aillent dans le sens d'une coordination des politiques budgétaires et
des politiques fiscales,
à veiller à ce que, en cas de "choc asymétrique",
c'est-à-dire de variation de compétitivité dommageable
entre les Etats participant à la monnaie unique, le droit du travail et
le niveau de protection sociale ne servent pas de variable d'ajustement.
II. PROPOSITION DE RÉSOLUTION N° 370 PRÉSENTÉE PAR M. XAVIER DE VILLEPIN, LE 1ER AVRIL 1998
Le Sénat,
Vu l'article 88-4 de la Constitution,
Vu la recommandation de la Commission en vue d'une recommandation du Conseil
conformément à l'article 109 J, paragraphe 2, du
Traité,
Invite le gouvernement :
à approuver, au sein du Conseil, la liste des Etats membres
remplissant les conditions nécessaires pour l'adoption d'une monnaie
unique telle qu'elle est proposée par la Commission
européenne ;
a réaffirmer que le bon fonctionnement de la zone euro ainsi
définie suppose que tous les Etats membres s'attachent, par une stricte
gestion de leurs finances publiques, à retrouver la marge de manoeuvre
indispensable pour que chaque politique budgétaire nationale puisse
pleinement jouer son rôle d'ajustement conjoncturel dans le cadre d'une
politique monétaire unique ;
à veiller à ce que le Conseil, dans le cadre d'un dialogue
permanent et équilibré avec la Banque centrale européenne
(BCE), exerce effectivement les responsabilités qui lui sont reconnues
par les articles 109 et 109 B du traité sur l'Union
européenne, dans l'esprit de la résolution adoptée par le
Conseil européen à Luxembourg le 13 décembre
1997 ;
à poursuivre ses efforts pour que soient renforcés dans les
années à venir les volets économique et social de l'Union
économique et monétaire ;
à assurer l'information régulière de
l'Assemblée nationale et du Sénat sur l'action que le
Gouvernement mènera à ce titre au sein du Conseil et lors des
réunions informelles des ministres des Etats participant à la
zone euro, et à organiser un débat annuel à ce sujet dans
chacune des deux assemblées ;
à favoriser un dialogue entre la BCE et les Parlements des Etats
participant à la zone euro afin que ceux-ci soient informés de la
politique monétaire menée au sein de celle-ci ;
à agir en sorte que soient pleinement respectées les
dispositions de l'article 109 A du traité sur l'Union
européenne, en vertu desquelles la nomination des membres du directoire
de la BCE relève de la pleine responsabilité des chefs d'Etat ou
de Gouvernement des Etats membres participant à la monnaie unique.
III. PROPOSITION DE RÉSOLUTION N° 378 PRÉSENTÉE PAR MMES HÉLÈNE LUC, MARIE-CLAUDE BEAUDEAU, M. JEAN-LUC BECARD, MMES DANIELLE BIDARD-REYDET, NICOLE BORVO, MM. JEAN DERIAN, MICHEL DUFFOUR, GUY FISCHER, PIERRE LEFEBVRE, PAUL LORIDANT, LOUIS MINETTI, ROBERT PAGES, JACK RALITE, IVAN RENAR ET MME ODETTE TERRADE12( * )
Le Sénat,
Vu l'article 88-4 de la Constitution,
Vu la recommandation de la Commission de Bruxelles (E-1045) pour le passage de
11 pays -dont la France- à la monnaie unique dès le
1er janvier 1999,
Vu que la dite recommandation doit être examinée par les Chefs
d'Etat et de Gouvernement le 2 mai,
Demande au gouvernement :
de surseoir à l'examen de la recommandation de la Commission
européenne tant qu'un grand débat national n'aura pas eu lieu sur
les implications de l'euro, notamment sur le plan social, de la
démocratie et de la souveraineté, et sur les alternatives
possibles en matière de coopération monétaire ;
de faire respecter ses objectifs sociaux, de relance de l'emploi et de la
réduction du temps de travail pour lesquels notre peuple vient encore
d'affirmer sa volonté de voir l'action gouvernementale poursuivie et
amplifiée ;
de proposer à nos partenaires de travailler en commun à une
véritable réorientation de la construction européenne
tournée vers le développement social et l'emploi, et donc
à une coopération monétaire conçue pour ces
priorités ;
qu'en tout état de cause, la décision finale de passage ou
non de la France à la monnaie unique, revienne aux citoyens,
consultés par voie de référendum.
ANNEXE N° 2
LA PROCÉDURE
PRÉVUE À L'ARTICLE 109 J DU TRAITÉ
1.
La Commission et l'IME font rapport au Conseil sur
les progrès faits par les Etats membres dans l'accomplissement de leurs
obligations pour la réalisation de l'Union économique et
monétaire. Ces rapports examinent notamment si la législation
nationale de chaque Etat membre, y compris les statuts de sa Banque centrale
nationale, est compatible avec les articles 107 et 108 du
présent Traité et avec les statuts du SEBC. Les rapports
examinent également si un degré élevé de
convergence durable a été atteint, en analysant dans quelle
mesure chaque Etat membre a satisfait aux critères suivants :
- réalisation d'un degré élevé de stabilité
des prix : ceci ressortira d'un taux d'inflation proche de celui des trois
Etats membres, au plus, présentant les meilleurs résultats en
matière de stabilité des prix ;
- caractère soutenable de la situation des finances publiques ;
ceci ressortira d'une situation budgétaire qui n'accuse pas de
déficit excessif au sens de l'article 104 C,
paragraphe 6 ;
- respect des marges normales de fluctuation prévues par le
mécanisme de change du système monétaire européen
pendant deux ans au moins, sans dévaluation de la monnaie par rapport
à celle d'un autre Etat membre ;
- caractère durable de la convergence atteinte par l'Etat membre et de
sa participation au mécanisme de change du système
monétaire européen, qui se reflète dans le niveau des taux
d'intérêt à long terme.
Les quatre critères visés au présent paragraphe et les
périodes pertinentes durant lesquelles chacun doit être
respecté sont précisés dans un protocole annexé au
présent Traité. Les rapports de la Commission et de l'IME
tiennent également compte du développement de l'écu, des
résultats de l'intégration des marchés, de la situation et
de l'évolution des balances des paiements courants, et d'un examen de
l'évolution des coûts salariaux et d'autres indices de prix.
2.
Sur la base de ces rapports, le Conseil, statuant à la
majorité qualifiée, sur recommandation de la Commission,
apprécie :
- pour chaque Etat membre, s'il remplit les conditions nécessaires pour
l'adoption d'une monnaie unique ;
- si une majorité des Etats membres remplit les conditions
nécessaires pour l'adoption d'une monnaie unique ;
et transmet, sous forme de recommandations, ses conclusions au Conseil
réuni au niveau des chefs d'Etat ou de gouvernement. Le Parlement
européen est consulté et transmet son avis au Conseil
réuni au niveau des chefs d'Etat ou de gouvernement.
3.
Prenant dûment en considération les rapports
visés au paragraphe 1 et l'avis du Parlement européen
visé au paragraphe 2, le Conseil réuni au niveau des chefs
d'Etat ou de gouvernement, statuant à la majorité
qualifiée, au plus tard le 31 décembre 1996 :
- décide, sur la base des recommandations du Conseil visées au
paragraphe 2, si une majorité des Etats membres remplit les
conditions nécessaires pour l'adoption d'une monnaie unique ;
- décide s'il convient que la Communauté entre dans la
troisième phase ;
et, dans l'affirmative,
- fixe la date d'entrée en vigueur de la troisième phase.
4.
Si, à la fin de 1997, la date du début de la
troisième phase n'a pas été fixée, elle commence le
1er janvier 1999. Avant le 1er juillet 1998, le Conseil, réuni
au niveau des chefs d'Etat ou de gouvernement, après
répétition de la procédure visée aux
paragraphes 1 et 2, compte tenu des rapports visés aux
paragraphes 1 et 2, compte tenu des rapports visés au
paragraphe 1 et de l'avis du Parlement européen, confirme, à
la majorité qualifiée et sur la base des recommandations du
Conseil visées au paragraphe 2, quels sont les Etats membres qui
remplissent les conditions nécessaires pour l'adoption d'une monnaie
unique.
ANNEXE N° 3
PROTOCOLE N° 6 SUR LES
CRITÈRES DE CONVERGENCE VISÉS À L'ARTICLE 109 J DU
TRAITÉ INSTITUANT LA COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE
Les hautes parties contractantes
Désireuses de fixer les modalités des critères de
convergence qui doivent guider la Communauté dans les décisions
qu'elle prendra lors du passage à la troisième phase de l'Union
économique et monétaire visée à
l'article 109 J, paragraphe 1, du traité instituant la
Communauté européenne.
Sont convenues des dispositions ci-après, qui sont annexées au
traité instituant la Communauté européenne.
Article premier
Le critère de stabilité des prix, visé à l'article 109 J, paragraphe 1, premier tiret, du traité, signifie qu'un Etat membre a un degré de stabilité des prix durable et un taux d'inflation moyen, observé au cours d'une période d'un an avant l'examen, qui ne dépasse pas de plus de 1,5 % celui des trois Etats membres, au plus, présentant les meilleurs résultats en matière de stabilité des prix. L'inflation est calculée au moyen de l'indice des prix à la consommation sur une base comparable, compte tenu des différences dans les définitions nationales.
Article 2
Le critère de situation des finances publiques, visé à l'article 109 J, paragraphe 1, deuxième tiret, du traité, signifie qu'un Etat membre ne fait pas l'objet, au moment de l'examen, d'une décision du Conseil visée à l'article 104 C, paragraphe 6, du traité concernant l'existence d'un déficit excessif 13( * ) dans l'Etat membre concerné.
Article 3
Le critère de participation au mécanisme de change du système monétaire européen, visé à l'article 109 J, paragraphe 1, troisième tiret, du traité, signifie qu'un Etat membre a respecté les marges normales de fluctuation prévues par le mécanisme de change du système monétaire européen sans connaître de tensions graves pendant au moins les deux dernières années précédant l'examen. Notamment, l'Etat membre n'a, de sa propre initiative, pas dévalué le taux central bilatéral de sa monnaie par rapport à la monnaie d'un autre Etat membre pendant la même période.
Article 4
Le critère de convergence des taux d'intérêt, visé à l'article 109 J, paragraphe 1, quatrième tiret, du traité, au cours d'une période d'un an précédant l'examen, signifie qu'un Etat membre a eu un taux d'intérêt nominal moyen à long terme qui n'excède pas de plus de 2 % celui des trois Etats membres, au plus, présentant les meilleurs résultats en matière de stabilité des prix. Les taux d'intérêt sont calculés sur la base d'obligations d'Etat à long terme ou de titres comparables, compte tenu des différences dans les définitions nationales.
Article 5
Les données statistiques utilisées pour l'application du présent protocole sont fournies par la Commission.
Article 6
Le Conseil, statuant à l'unanimité, sur proposition de la Commission, et après consultation du Parlement européen, de l'IME ou de la BCE selon le cas, ainsi que du comité visé à l'article 109 C du traité, adopte les dispositions appropriées pour préciser de manière détaillée les critères de convergence visés à l'article 109 J du traité, qui remplacent alors le présent protocole.
ANNEXE N° 4
LE PROTOCOLE N° 5
SUR LA PROCÉDURE
CONCERNANT LES DÉFICITS EXCESSIFS
Les hautes parties contractantes
Désireuses de fixer les modalités de la procédure
concernant les déficits excessifs visés à l'article
104 C du traité instituant la Communauté européenne,
sont convenues des dispositions ci-après, qui sont annexées au
traité instituant la Communauté européenne.
Article premier
Les valeurs de référence visées à
l'article 104 C, paragraphe 2 du traité sont les
suivante :
- 3 % pour le rapport entre le déficit public prévu ou
effectif et le produit intérieur brut aux prix du marché ;
- 60 % pour le rapport entre la dette publique et le produit
intérieur brut aux prix du marché.
Article 2
A l'article 104 C du traité et dans le
présent protocole, on entend par :
- public : ce qui est relatif au gouvernement général,
c'est-à-dire les administrations centrales, les autorités
régionales ou locales et les fonds de sécurité sociale,
à l'exclusion des opérations commerciales, telles que
définies dans le système européen de comptes
économiques intégrés ;
-
déficit
14(
*
)
: le besoin
net de financement, tel que défini dans le système
européen de comptes économiques intégrés
;
- investissement : la formation brute de capital fixe, telle que
définie dans le système européen de comptes
économiques intégrés ;
-
dette : le total des dettes brutes, à leur valeur
nominale, en cours à la fin de l'année et consolidées
à l'intérieur des secteurs du gouvernement général
tel qu'il est défini au premier tiret
.
Article 3
En vue d'assurer l'efficacité de la procédure concernant les déficits excessifs, les gouvernements des Etats membres sont responsables, aux termes de la présente procédure, des déficits du gouvernement général tel qu'il est défini à l'article 2, premier tiret. Les Etats membres veillent à ce que les procédures nationales en matière budgétaire leur permettent de remplir les obligations qui leur incombent dans ce domaine en vertu du traité. Les Etats membres notifient rapidement et régulièrement à la Commission leurs déficits prévus et effectifs ainsi que le niveau de leur dette.
Article 4
Les données statistiques utilisées pour l'application du présent protocole sont fournies par la Commission.
EXAMEN EN COMMISSION
I. EXAMEN DU RAPPORT
Réunie le mercredi 8 avril 1998, sous la
présidence de M. Christian Poncelet, président, en
présence de M. Jacques Genton, président de la
délégation du Sénat pour l'Union européenne, la
commission ayant désigné M. Alain Lambert, rapporteur
général, rapporteur, a examiné son rapport sur trois
propositions de résolution, n° 362, présentée
par M. Claude Estier, n° 370, présentée par
M. Xavier de Villepin et n° 378 présentée par Mme
Hélène Luc, en application de l'article 73 bis du
règlement, sur la recommandation de la Commission en vue d'une
recommandation du Conseil relative au rapport sur l'état de convergence
et à la recommandation associée en vue du passage à la
troisième phase de l'Union économique et monétaire
(n° E-1045).
M. Jacques Genton, président de la délégation du
Sénat pour l'Union européenne, ayant, en préambule,
rappelé que la délégation avait souhaité
créer les conditions d'un débat en séance publique sur le
passage à l'euro, a estimé que le texte de la commission des
finances s'inscrivait pleinement dans l'esprit de la proposition de
résolution de M. Xavier de Villepin.
M. Alain Lambert, rapporteur, a alors exposé les conclusions de son
rapport présenté au soutien de la proposition de
résolution soumise à l'adoption de la commission des finances.
Un large débat s'est alors ouvert.
M. Bernard Angels ayant observé que l'adoption de l'euro
représentait pour la France le fruit d'un engagement politique continu
des chefs d'Etat et de Gouvernement, s'est félicité que notre
pays présente des conditions économiques telles que sa
participation à la monnaie unique européenne soit possible,
soulignant que cela n'était pas acquis au seuil de l'année
précédente.
Ayant manifesté qu'il aurait pu donner son accord avec la
tonalité d'ensemble de la proposition de résolution
examinée par la commission, il a regretté qu'elle
s'éloigne du texte de la proposition de résolution de
M. Xavier de Villepin, en particulier en supprimant une disposition
résultant d'un amendement issu d'une initiative du groupe socialiste et
citant la nécessité de poursuivre les efforts vers une Europe
plus sociale.
M. Jean-Philippe Lachenaud a indiqué son adhésion à
la proposition de résolution, se demandant toutefois si une adjonction
ne devait pas être faite afin de préciser que les programmes de
stabilité prévus par le pacte de stabilité et de
croissance représentaient la garantie d'une croissance durable.
M. Paul Loridant, s'étant félicité de la
cohérence du calendrier des travaux de la commission et relevé le
contraste avec la confusion d'un agenda proposé par le Gouvernement au
terme duquel le texte sur la Banque de France aura été
examiné par l'Assemblée nationale avant le débat sur
l'euro, a manifesté son désaccord avec la proposition de
résolution. Il a insisté sur la nécessité de rendre
la parole au peuple et de satisfaire, par un référendum, à
l'exigence démocratique. Il a dénoncé une version
monétariste de la construction européenne, observant qu'il
était sans précédent dans l'histoire qu'une monnaie
précède une construction politique.
M. Philippe Marini, ayant précisé qu'il s'exprimait
à titre personnel, à indiqué que l'état de sa
réflexion ne lui permettait pas d'apporter, à l'instant de
l'examen de la proposition de résolution soumise à la commission
des finances, un vote favorable.
Ayant jugé que l'euro n'avait ni vice ni vertu propre, il a tout
particulièrement souligné que deux questions étaient
posées par les ambiguïtés institutionnelles résultant
de l'instauration de l'euro et le hiatus créé par des initiatives
gouvernementales en totale contradiction avec les engagements européens
souscrits par le pays.
M. René Ballayer a alors manifesté son soutien à la
proposition de résolution examinée par la commission.
M. Denis Badré, s'étant félicité de la
convergence du texte proposé par le rapporteur avec celui
présenté par M. Xavier de Villepin, a exprimé
quelques réserves sur l'idée selon laquelle les programmes de
stabilité pourraient apporter une garantie en matière de
croissance. Il a souligné que l'euro était en effet le
succès d'un engagement politique qui avait permis d'en réussir la
préparation. Il a jouté que ce succès devait être
confirmé après l'adoption de l'euro, ce qui supposait en
particulier une réduction durable des déficits publics, que seule
rendrait possible la baisse des dépenses publiques. Ayant estimé
que chacun des dossiers européens devait avancer en fonction d'un projet
cohérent, il a jugé qu'introduire la mention du volet social dans
une résolution portant sur l'euro était de nature à
créer quelque confusion. Il a, à ce propos, rappelé les
déboires qui s'en étaient suivis lorsqu'une telle tentative avait
été faite lors du sommet de Poitiers. Il a jugé qu'il
était préférable de mentionner l'approfondissement de
l'Union économique et monétaire dans tous ses volets, à
l'instar du texte de la proposition de résolution
présentée par le rapporteur.
Il a insisté sur l'utilité de prévoir un dialogue entre
la BCE et le Parlement français remarquant que la construction
européenne n'étant pas fédérale, un tel dialogue
devait permettre de promouvoir un système original et acceptable.
Mme Maryse Bergé-Lavigne a souligné les liens entre
l'instauration d'une monnaie unique et les données sociales dans la zone
euro. Elle a insisté sur le fait que l'acceptation de l'euro serait
conditionnée par des améliorations du sort des peuples.
M. Jacques Ostermann a considéré que les questions
posées sur l'harmonisation des règles du jeu devaient être
abordées dans le texte de la commission.
M. Jacques Genton, président de la délégation du
Sénat pour l'Union européenne, a suggéré que la
proposition de résolution mentionne que les documents à destiner
aux présidents des commissions permanentes le soient également
aux présidents des délégations compétentes des
parlements.
M. Christian Poncelet, président, s'est interrogé sur le
devenir du Royaume-Uni et les problèmes posés par sa non
participation à la monnaie unique. Il s'est, par ailleurs,
inquiété de la crédibilité du système de
sanctions des déficits excessifs.
En réponse aux différents intervenants, M. Alain Lambert,
rapporteur, a d'abord rappelé qu'un assainissement budgétaire
durable supposait que l'on évite de lever de nouveaux impôts
faisant observer que le présent gouvernement avait malheureusement
recouru à cette dangereuse facilité. Il a alors souligné
que le texte qu'il proposait était très proche de celui de
M. Xavier de Villepin, n'en différant que lorsque la
sensibilité propre de la commission des finances l'avait conduit
à proposer des adjonctions. Il a insisté sur le fait que le terme
d'approfondissement lui semblait englober le volet social de l'Union
économique et monétaire, mais visait aussi d'autres volets, comme
la fiscalité. Il a estimé que les programmes de stabilité
ayant pour objectif d'assurer une croissance durable, il serait peut-être
redondant d'adjoindre cette mention dans le texte de la proposition de
résolution. Ayant relevé la profondeur des désaccords de
la majorité gouvernementale, il a souligné que la lecture
attentive du traité permettait de faire litière d'un certain
nombre d'ambiguïtés, mais qu'il fallait favoriser le rapprochement
entre les instances communautaires et les pouvoirs nationaux.
Il a jugé que la proposition de résolution souhaitait que des
progrès soient réalisés dans la voix de l'harmonisation
des règles européennes.
Ayant indiqué que, demandant au Gouvernement la communication de
documents qui, pour certains, ne seraient pas publics, il lui faudrait
vérifier que cette demande puisse être juridiquement
étendue au-delà des destinataires mentionnés dans la
proposition de résolution.
Il a enfin estimé que la crédibilité des sanctions
dépendrait probablement beaucoup de leur efficacité dissuasive et
de la pratique qui s'instaurerait en la matière.
La commission a alors
décidé d'adopter la proposition de
résolution présentée par le rapporteur.
II. AUDITION DE M. PATRICK ARTUS, DIRECTEUR DU SERVICE DES ÉTUDES ÉCONOMIQUES ET FINANCIÈRES DE LA CAISSE DES DÉPÔTS ET CONSIGNATIONS
Au cours d'une séance tenue le
mardi 24 mars, sous la présidence de M. Christian Poncelet,
président, la commission a procédé à l'audition de
M. Patrick Artus, directeur du service des études
économiques et financières de la Caisse des Dépôts
et Consignations, sur les perspectives de la mise en oeuvre de l'euro.
M. Patrick Artus a rappelé que les Allemands n'étaient
guère persuadés du degré élevé et durable de
la convergence économique dans tous les Etats membres appelés
à participer à l'Union économique et monétaire
(UEM). Il a rappelé que le cas de l'Italie était, aux yeux des
responsables monétaires allemands, très significatif d'un effort
de convergence considérable, mais qui suscitait de vives interrogations
sur la pérennité de cet effort, la convergence italienne ayant
été rendue possible par une hausse des recettes et non par une
réduction des dépenses publiques. En outre, l'Italie n'a pas
totalement tiré profit de son effort de convergence, dont elle a par
ailleurs beaucoup souffert, eu égard au montant des
intérêts qu'elle devra payer sur sa dette à court terme,
même si elle devrait encore bénéficier de la baisse des
taux, de sorte que son déficit budgétaire ne devrait pas
être supérieur à 2 % de son produit intérieur
brut (PIB) en 1999.
M. Patrick Artus a estimé, au regard des profondes réformes
structurelles accomplies par de nombreux Etats, que les craintes allemandes de
voir ces Etats brutalement changer de politique économique après
leur entrée en UEM étaient peu fondées.
Il a jugé "peu intelligent" le pacte de stabilité et de
croissance tel qu'il a été conçu, notamment en raison de
la trop grande uniformité des dispositions qu'il prévoit.
Il a considéré que l'Union économique et monétaire
devait avoir pour ambition de stabiliser le niveau de la dette publique des
Etats membres, et a rappelé que cette dernière, en moyenne,
atteignait aujourd'hui 80 % du PIB communautaire, contre 30 % au
début des années 1980.
M. Patrick Artus a estimé qu'un objectif, qu'il a qualifié
de "raisonnable mais nécessaire", devait consister à utiliser les
gains générés par la forte croissance économique
attendue pour les prochaines années, à réduire le
déficit budgétaire à moins de 2 % du PIB, si les
Etats voulaient retrouver une marge d'intervention budgétaire en cas de
récession.
Il a expliqué que, si la coordination en matière
monétaire était très approfondie en Europe, les autres
domaines de la politique économique souffraient au contraire d'un manque
considérable de coordination suscitant de vives inquiétudes de sa
part. Il a en effet estimé que les Etats européens étaient
encore beaucoup trop concurrents sur leur propre marché, et a notamment
ajouté que la compétition sans coopération par les
instruments fiscaux était plus dommageable que la compétition
sans coopération par les taux de change.
M. Patrick Artus a estimé que, contrairement aux craintes initiales des
marchés, l'euro risquait d'être trop fort, ajoutant qu'existaient
des risques d'entrée massive de capitaux internationaux, notamment des
dollars, en Europe, ce qui pourrait entraîner une sous-évaluation
de la monnaie américaine, avec les risques que cela comporte.
Il a expliqué que ce danger était accru par l'importance du
déficit extérieur des Etats-Unis, évalué à
220 milliards de dollars cette année, la conjonction d'une dette
tendanciellement croissante et d'un taux d'épargne des ménages
toujours en régression faisant des Etats-Unis un pays financé par
l'endettement extérieur et, par conséquent, exposé
à une chute brutale du cours de sa monnaie.
M. Patrick Artus a noté que l'unification monétaire en Europe
allait lever le risque de change et améliorer la circulation des
capitaux, mais aurait également des conséquences sur la
localisation des activités sur notre continent.
D'une part, les pays périphériques (Espagne, Portugal,
Irlande...), qui ont jusqu'à présent beaucoup
bénéficié du marché unique, risquent de perdre
leurs avantages comparatifs, l'euro entraînant chez eux, par exemple, une
forte augmentation salariale.
D'autre part, la monnaie unique devant se traduire par un mouvement de
spécialisation industrielle en Europe, chaque pays devrait promouvoir
dès maintenant son attractivité afin d'aborder ce mouvement de
concentration dans des conditions optimales.
M. Patrick Artus a conclu son intervention en estimant que, si la concurrence
était bénéfique aux économies européennes,
elle devait néanmoins s'effectuer dans un cadre harmonisé.
M. Alain Lambert, rapporteur général, s'est interrogé sur
l'efficacité de la politique budgétaire, l'expérience
ayant montré que les politiques expansionnistes étaient
rapidement contrecarrées par la hausse des taux d'intérêt.
Il a rappelé le doute, souvent exprimé, sur la capacité
des Etats européens à vivre dans le contexte actuel de
concurrence fiscale et sociale, et a voulu savoir ce qu'il en serait en
situation d'Union économique et monétaire.
M. Alain Lambert, rapporteur général, a également voulu
connaître l'évaluation des pertes de recettes, notamment pour les
commissions de change, occasionnées par le passage à la monnaie
unique.
Il s'est, enfin, demandé si la politique monétaire que
conduirait la Banque centrale européenne (BCE) serait très
différente de celle actuellement appliquée par la Bundesbank.
M. Patrick Artus a rappelé qu'en UEM les chocs asymétriques
seraient plus fréquents et que, face à de tels chocs, la
politique monétaire ne pouvait plus les corriger, la seule solution
consistant à recourir à la politique budgétaire.
Il a néanmoins affirmé la nécessité de stabiliser
le déficit budgétaire, non pas pays par pays, mais au niveau de
l'ensemble de l'UEM.
Il a également fait part de ses craintes, d'une part, devant
l'utilisation peu coopérative des réformes fiscales actuellement
mises en oeuvre, en Grande-Bretagne par exemple, et, d'autre part, eu
égard aux effets sous optimaux des mesures de rétorsion
éventuellement adoptées.
M. Patrick Artus a estimé que la présentation souvent faite de
la Banque centrale allemande était largement caricaturale, la Bundesbank
accordant bien plus souvent qu'on ne le dit une importance considérable
aux objectifs réels en général, et à l'emploi en
particulier. Il a ainsi qualifié cette politique de "souple et
pragmatique".
M. Patrick Artus a, en revanche, exprimé ses craintes de voir la BCE
davantage polarisée sur des objectifs d'inflation, ses textes fondateurs
réduisant trop son rôle à la surveillance de la masse
monétaire.
Il a expliqué que, au moment de la réunification de l'Allemagne,
la politique monétaire de la Bundesbank ne poursuivait, comme il
était normal, que des objectifs nationaux, la forte augmentation du
chômage, en France, au cours de la première moitié des
années 1990 résultant essentiellement de l'erreur des
autorités monétaires françaises qui ont choisi d'importer
les taux d'intérêt allemands.
M. Patrick Artus a reconnu qu'il fallait distinguer le discours et la pratique
de la Bundesbank, le premier étant, afin de préserver sa
réputation, marqué du sceau de l'orthodoxie, la seconde
s'étant révélée très souple.
M. Denis Badré s'est interrogé sur l'opportunité de
mettre rapidement en oeuvre une harmonisation fiscale au niveau
européen, et sur les capacités de reporter la concurrence entre
les entreprises européennes de leur marché intérieur vers
les marchés extérieurs.
M. Paul Loridant a souhaité savoir où en était le
projet, évoqué par le ministre allemand Théo Waigel, d'un
"pacte de stabilité bis".
M. François Trucy s'est interrogé sur la confiance
prétendument moindre qu'inspirerait le dollar, eu égard à
l'excellente santé de l'économie américaine, et a voulu
connaître l'avenir de "l'euro-CFA".
M. Philippe Marini a souhaité connaître les possibles
améliorations du pacte de stabilité, et s'est demandé si
un tel pacte renové ne devait pas s'accompagner d'un prolongement
institutionnel.
M. Christian Poncelet, président, a souhaité savoir si la
Grande-Bretagne pouvait se tenir à l'écart longtemps encore de la
monnaie unique et si le Parlement allemand, qui doit normalement se prononcer
sur l'entrée de la République fédérale dans l'UEM
avant le 1
er
juillet, pouvait être appelé à ne
se prononcer qu'après les élections législatives d'octobre.
En réponse aux différents intervenants, M. Patrick Artus a
apporté les éléments d'information suivants :
- l'entrée en UEM ne nécessite pas une structure fiscale
similaire, mais exige une synchronisation des évolutions fiscales,
l'harmonisation en tant que telle ne devant pas nécessairement
être recherchée ;
- le "pacte de stabilité bis" repose sur l'idée de ramener
durablement les déficits budgétaires des pays participant
à l'UEM en-dessous de 3 % du PIB, et, plus fondamentalement,
soulève la question du fédéralisme budgétaire en
Europe qui gagnerait à être développé, au moins au
profit des petits pays ;
- le financement par le crédit de l'investissement américain et
la baisse continue du taux d'épargne des ménages constituent
d'importants motifs d'inquiétude, la dette extérieure des
Etats-Unis suivant actuellement une trajectoire explosive, ce qui devrait
entraîner soit une forte récession dans ce pays, soit une chute du
cours du dollar ;
- la Grande-Bretagne ne devrait pas entrer en UEM avant 2001 ou 2002, du fait
du fort ralentissement de l'économie britannique et de ses
spécificités telles que forte cyclicité, inflation plus
élevée que sur le continent et niveau assez haut des taux
d'intérêt ;
- les économistes allemands sont généralement hostiles
à l'euro, mais résignés, ce qui n'empêche pas les
banques et les entreprises allemandes d'être plus en avance que les
banques et les entreprises françaises dans leur préparation au
passage à l'euro.
III. AUDITION DE M. YVES-THIBAULT DE SILGUY, COMMISSAIRE EUROPÉEN, CHARGÉ DES AFFAIRES MONÉTAIRES ET FINANCIÈRES
Au cours d'une séance tenue le jeudi 26 mars,
sous la présidence de M. Christian Poncelet, président, la
commission a procédé à l'audition de M. Yves-Thibault
de Silguy, commissaire européen, chargé des affaires
monétaires et financières, sur les perspectives de la mise en
oeuvre de l'euro.
M. Christian Poncelet, président, ayant remercié le
commissaire européen de la primeur accordée par lui à la
commission des finances du Sénat pour présenter la recommandation
de la Commission européenne sur les pays susceptibles d'adopter l'euro,
a indiqué à la commission qu'il solliciterait, à la fin de
l'audition, une décision sur le principe d'une demande adressée
à la Banque de France en vue qu'elle élabore et publie un rapport
sur l'état de la convergence des pays candidats à l'euro comme
entendent y procéder six banques centrales en Europe.
M. Yves-Thibault de Silguy, commissaire européen, ayant
exprimé son honneur et son plaisir de se trouver en priorité
devant le Sénat français pour présenter les travaux de la
Commission européenne, qui serviront de base à la décision
des chefs d'Etat et de Gouvernement le 2 mai prochain, dressant la liste
des Etats adoptant la future monnaie unique européenne, a
souligné que les résultats obtenus provenaient d'un engagement
politique fort des Etats concernés. Ajoutant qu'ils étaient aussi
le fruit d'années d'efforts de redressement économique, il a
précisé que la commission avait, pour apprécier les
performances des Etats, fait une application stricte des critères du
Traité.
Le commissaire européen a alors exposé le cheminement du travail
de la commission qui, saisie à la fin février 1998 des
résultats définitifs de l'année 1997, en avait
examiné la sincérité, puis avait élaboré de
nouvelles prévisions économiques à l'horizon 1999 pour
servir de cadre à son évaluation présentée dans son
rapport de convergence. Il a insisté sur l'importance
particulière accordée à cette occasion au caractère
durable des performances économiques des Etats membres.
Evoquant les rapports élaborés par les différentes
banques centrales, il a rappelé que seule la Commission
européenne avait un pouvoir de recommandation, aux termes du
traité, tout en soulignant les avantages pour le débat
démocratique de l'existence d'une pluralité d'opinions.
Puis, M. Yves-Thibault de Silguy, commissaire européen, a
indiqué que, lors de l'examen de la compatibilité des
législations nationales relatives aux banques centrales avec les textes
communautaires, une réserve avait été émise
s'agissant de la France, qui impliquait que les projets actuels du Gouvernement
soient adoptés avant début mai prochain pour mettre la France en
situation de participer à l'euro.
Après avoir observé que, malgré une légère
révision à la baisse, les perspectives économiques en
Europe restaient favorables, il a analysé l'évolution des
différents critères posés par le Traité. A ce
propos, il a tout particulièrement mis en valeur :
la convergence des Etats vers un très bas niveau
d'inflation ;
la réduction structurelle des déficits publics, revenus de
5,5 à 2,6 % du PIB entre 1993 et 1997 ;
la stabilité du mécanisme de change européen ;
et le niveau historiquement bas des taux d'intérêt à
long terme, reflet d'anticipations favorables des marchés.
Concluant son exposé, le commissaire européen a insisté
sur le découplage entre la réduction des déficits publics
et la croissance du chômage et il a expliqué que l'assainissement
des finances publiques était, contrairement à une idée
répandue, source de baisse du chômage.
Un large débat s'est alors ouvert.
M. Denis Badré s'est félicité que le commissaire
européen ait souligné la contribution décisive à la
réussite de l'euro d'un engagement politique fort. S'étant
interrogé sur le degré effectif de la coordination des politiques
économiques, il a souhaité obtenir une série de
précisions sur :
la nature du déficit, passé ou prévu, pris en
compte dans le cadre du pacte de stabilité ;
la destination du produit des sanctions éventuellement
prononcées dans ce même cadre ;
les raisons de l'inexistence d'une procédure sur les dettes
publiques excessives ;
les problèmes rencontrés dans le processus d'harmonisation
fiscale ;
l'adaptation nécessaire de la législation sur la Banque de
France ;
l'impact de l'unification monétaire sur le budget
européen ;
et les coûts, pour les agents économiques, du passage
à l'euro.
En réponse, M. Yves-Thibault de Silguy, commissaire
européen, a d'abord précisé que le déficit
pertinent était le déficit constaté et que les recettes
issues d'éventuelles sanctions ne sauraient bénéficier aux
Etats ne participant pas à l'euro, estimant en outre que le
mécanisme des sanctions était d'essence dissuasive et qu'il
n'était appelé à jouer qu'en cas de mauvaise
volonté manifeste d'un Etat. Il a ensuite indiqué que les Etats
membres s'étaient opposés au projet de la Commission visant
à sanctionner les dettes publiques excessives au motif que
l'appréciation des dettes publiques devait être faite en tendance.
Ayant estimé que se produirait certainement un rapprochement des
fiscalités, il a complété sa réponse en jugeant que
les réformes budgétaires majeures proviendraient plutôt de
l'initiative "Agenda 2000" que de l'Union monétaire et en
indiquant
que, si les coûts du passage à l'euro, estimés dans une
fourchette de 2 à 5 points de PIB, étaient importants, il
s'agissait d'une dépense assimilable à un investissement.
M. Maurice Blin, ayant souligné l'optimisme des propos du
commissaire européen, a rappelé qu'il était sans
précédent qu'une monnaie commune devance la construction d'une
union politique forte. Il a jugé que les efforts de pédagogie sur
les avantages de l'euro devaient être renforcés. Enfin, il s'est
inquiété de la possibilité de concilier
l'élargissement de l'Europe et la préservation de l'euro.
En réponse, M. Yves-Thibault de Silguy a souligné que l'euro
était une évolution, certes importante, mais pas une
révolution compte tenu de l'expérience européenne de taux
de change fixe. Il a estimé qu'il n'existait plus depuis longtemps de
souveraineté nationale en matière monétaire et que l'euro
était un moyen de recréer une souveraineté
monétaire partagée. Il a considéré que
l'information sur l'euro devait être développée et qu'elle
supposait une implication des décideurs locaux. Il a enfin
rappelé les difficultés résultant de la négociation
relative à "Agenda 2000", expliquant que le point majeur de friction
avait trait au devenir des fonds structurels.
Mme Marie-Claude Beaudeau s'est alors inquiétée des conditions
dans lesquelles s'était effectuée la convergence nominale en
Europe et s'est demandée si les risques de concentration
géographique des activités économiques et d'accroissement
de la concurrence en Europe n'étaient pas susceptibles d'être
extrêmement préjudiciables à la France. Elle s'est enfin
interrogée sur la perspective d'une modification des rapports politiques
entre Etats européens.
M. Yves-Thibault de Silguy ayant notamment souligné que la convergence
n'était pas synonyme d'uniformisation, M. Christian Poncelet,
président, a mis en évidence les phénomènes de
concurrence fiscale et leur impact éventuel en matière
d'uniformisation.
M. Yves-Thibault de Silguy a alors jugé que l'euro devant attirer les
capitaux extérieurs, la localisation des activités
économiques dans les pays dont ce serait la monnaie, serait accrue sans
qu'on puisse, en effet, prédire les pays qui en
bénéficieraient le plus.
M. Jacques-Richard Delong, ayant souligné que la monnaie unique
était la pierre de touche de la construction européenne, s'est
inquiété des effets négatifs du choix de sa
dénomination et a estimé qu'il aurait été
préférable de la baptiser marc ou livre, conformément
à l'histoire monétaire de la France et de l'Europe.
M. Yves-Thibault de Silguy, ayant rappelé que le choix en la
matière avait appartenu aux chefs d'Etat et Gouvernement, M. René
Ballayer s'est inquiété des effets d'une éventuelle crise
boursière survenant lors du lancement de l'euro.
M. Yves-Thibault de Silguy a estimé que le lancement de l'euro
s'accompagnerait probablement d'importants transferts vers les marchés
d'actions en Europe du fait de l'attractivité de la monnaie unique et du
bas niveau des taux d'intérêt.
M. Yvon Collin a souhaité recueillir les explications du
commissaire européen sur les causes de la langueur de l'économie
européenne depuis 1990. Puis, évoquant les grandes orientations
de politique économique du Conseil et le rapport de la Commission, il
s'est demandé s'il n'existait pas un hiatus entre la recommandation du
Conseil d'un partage de la valeur ajoutée favorable aux entreprises et
le constat fait par la Commission d'une forte rentabilité des
investissements des entreprises.
En réponse, M. Yves-Thibault de Silguy a jugé que la croissance
avait été cassée en Europe par la remontée des taux
d'intérêt résultant de la hausse des taux américains
en 1994. Il a considéré que, depuis, le dosage des politiques
économiques était devenu beaucoup plus satisfaisant, le
redressement des finances publiques ayant été accompagné
d'une baisse des taux d'intérêt.
Il a alors estimé que la croissance pourrait désormais
connaître un rythme annuel, durable, de 3 %. Ayant reconnu que ces
résultats devaient beaucoup à la modération salariale, il
a jugé que les positions du Conseil et de la Commission étaient
en cohérence sur ce point.
M. Emmanuel Hamel s'est vivement alarmé des conséquences
sociales d'une conception exclusivement monétariste de la construction
européenne.
M. Yves-Thibault de Silguy a alors rappelé que la souveraineté
monétaire avait disparu de fait et que le pacte de stabilité et
de croissance était destiné à permettre aux Etats de
regagner des marges de manoeuvre budgétaire. Il a enfin appelé
à la mise en oeuvre d'une vraie politique pour l'emploi,
éliminant les obstacles structurels qui s'opposent à la baisse du
chômage.
M. Christian Poncelet, président, s'est interrogé sur les voies
et moyens d'une meilleure association des parlements nationaux au
fonctionnement de l'union monétaire, en soulignant qu'il s'agissait
d'assurer la légitimité démocratique de l'édifice.
Il s'est ensuite demandé si la banque centrale européenne serait
en mesure de définir une politique monétaire pour l'ensemble de
l'Europe et d'échapper à certains tropismes nationaux.
En réponse, M. Yves-Thibault de Silguy a considéré que le
mécanisme de coordination des politiques économiques donnerait
l'occasion aux Gouvernements nationaux d'associer les Parlements au
fonctionnement de l'union monétaire, estimant souhaitable que l'euro
soit soumis à un contrôle démocratique dans le respect de
l'indépendance de la banque centrale européenne.
La commission a donc alors décidé à l'unanimité
d'adresser une demande à la Banque de France pour qu'elle élabore
et publie un rapport sur l'état de la convergence des performances
économiques des pays candidats à l'adoption de la future monnaie
unique européenne.
IV. AUDITION DE M. JEAN-CLAUDE TRICHET, GOUVERNEUR DE LA BANQUE DE FRANCE
Au cours d'une séance tenue le mercredi
1er avril, sous la présidence de M. Christian Poncelet,
président, la commission a tout d'abord procédé à
l'audition de M. Jean-Claude Trichet, gouverneur de la Banque de France.
M. Christian Poncelet, président, a fait trois remarques
préliminaires. D'une part? il s'est inquiété de l'absence
d'obligation pour la Banque centrale européenne d'informer
régulièrement les Parlements nationaux et a souhaité la
mise en place de procédures spécifiques d'information directe.
D'autre part, il a fait part de certaines craintes quant à
l'éventualité d'une politique trop rigoureuse de la future banque
centrale européenne, qui conduirait à l'aggravation du
chômage. Enfin, il s'est interrogé sur les capacités de la
France et de l'Italie à poursuivre l'ajustement de leurs politiques
budgétaires.
M. Jean-Claude Trichet, gouverneur de la Banque de France, a rappelé
les caractéristiques principales de la conjoncture des pays
européens, en précisant que la croissance dans l'ensemble des
pays de l'Europe continentale était probablement passée d'un taux
de l'ordre de 2 % à un taux de 3 % environ, tirée
essentiellement par la demande interne.
Il a souligné les bons résultats de la France : une inflation
parmi les trois plus basses de l'Union européenne et des taux
d'intérêt à long terme les plus bas avec ceux des Pays-Bas.
Il a estimé que cette très bonne compétitivité
monétaire constituait une condition nécessaire mais non
suffisante pour assurer l'avenir économique de la France, qui
dépend également d'une politique budgétaire
adaptée, d'indispensables réformes structurelles et d'un bon
environnement économique international.
Concernant le projet de loi modifiant le statut de la Banque de France,
M. Jean-Claude Trichet a souligné qu'il s'agissait essentiellement
d'adapter ce statut de la Banque de France aux exigences juridiques
provoquées par le passage à la 3ème phase de l'Union
Economique et Monétaire. Puis, il s'est félicité de ce que
la convergence de l'ensemble des pays appartenant à l'Union
européenne ait été beaucoup plus rapide que le
pronostiquait l'ensemble des acteurs économiques. En particulier,
14 pays sur 15 respectent les critères de l'inflation, des taux
d'intérêt à long terme et du déficit
budgétaire.
Il a récusé les critiques concernant les sacrifices trop
importants que les pays auraient dû consentir pour satisfaire les
critères définis lors du sommet de Maastricht, en faisant
remarquer que même les pays refusant pour l'instant de participer
à l'Union monétaire avaient suivi des politiques identiques. Les
pays européens ont poursuivi des politiques conformes à leurs
intérêts nationaux, qui se trouvaient au surplus correspondre aux
objectifs de convergence économique, monétaire ou
financière.
M. Jean-Claude Trichet a ensuite souligné que la situation de certains
pays pouvait être jugée délicate à cause de
l'importance de leur encours de dette en proportion du produit intérieur
brut.
Il a également souligné que le respect du critère de
déficit public sera décisif pour le bon fonctionnement de l'Union
monétaire. Il a rappelé un récent sondage qui
révèle que 95 % des Français intéressés
souhaitent que la nouvelle monnaie soit au moins aussi solide et stable que le
franc. En outre, il a refusé l'idée selon laquelle une monnaie
solide, en inspirant confiance, pouvait conduire à un chômage
élevé. Il a donc estimé que la nouvelle banque centrale
européenne maintiendra durablement la stabilité d'un euro au
moins aussi solide que le franc ou le Mark aujourd'hui.
Ensuite, M. Jean-Claude Trichet a fait part de trois réflexions sur la
future Union monétaire. Il a jugé que le Conseil des ministres
aurait à fonctionner de manière efficace pour assurer la
surveillance mutuelle des budgets des différents pays européens.
Il a en effet souligné qu'il existait un risque si un pays aggravait
fortement son déficit dans la nouvelle Union européenne sans que
les autres gouvernements ne réagissent. Il a toutefois contesté
les critiques selon lesquelles l'Union monétaire ne pouvait fonctionner
sans fédéralisme budgétaire. Concernant les
déficits budgétaires, il a insisté sur le fait que tous
les Etats membres s'étaient donné pour objectif
l'équilibre, voire l'excédent des finances publiques. C'est ce
qui figure dans le pacte de stabilité et de croissance signé par
les quinze pays de l'Union. En effet, seule cette stratégie permet la
consolidation des bas taux d'intérêt sur les marchés
financiers, le financement dans de bonnes conditions de l'investissement
productif, le renforcement de la confiance des ménages et des
entreprises et l'utilisation des stabilisateurs automatiques en période
de basse conjoncture. A propos du chômage, il a déclaré que
toutes les analyses sur ce sujet convergent pour en dénoncer les causes
structurelles et que l'accent devait donc être mis sur la mise en oeuvre
de réformes structurelles. En conséquence, il s'est
déclaré favorable au renforcement de la coordination des
politiques économiques des Etats membres de l'Union
décidée au conseil de Luxembourg.
Un large débat s'est alors ouvert. M. Alain Lambert, rapporteur
général, a demandé des renseignements
supplémentaires sur la parité externe du futur euro, sur le
décalage entre les prévisions de la Banque de France et
l'évolution réelle de la masse monétaire, sur la
constitution du Conseil politique comme contrepoids à la future Banque
centrale européenne, sur la composition du directoire de celle-ci et sur
la réforme du statut de la Banque de France.
En réponse, M. Jean-Claude Trichet, gouverneur de la Banque de France,
a tenu à préciser les conditions dans lesquelles les Parlements
seront informés des actions menées par la Banque centrale
européenne. Il a insisté sur le fait que le Traité de
Maastricht avait organisé le même type de relations entre la
Banque centrale européenne et le Parlement européen que celles
qui existent entre la Banque de France et le Parlement français. Ainsi,
le président de la Banque centrale européenne pourra être
entendu par le Parlement européen. Par ailleurs, les gouvernements
nationaux continueront d'expliquer aux parlements la politique de la Banque
centrale européenne.
A propos du rôle futur du Conseil politique et monétaire de la
Banque de France, il a estimé que celui-ci serait au moins aussi
important qu'aujourd'hui, même si les décisions finales seront
prises en dernier ressort par le Conseil de la Banque centrale
européenne, composé du Collège des gouverneurs et des
membres du directoire. Il sera chargé, demain comme aujourd'hui, de
synthétiser l'état économique, monétaire et
financier de notre pays à partir des informations recueillies dans les
régions, de préserver des contacts étroits avec les
leaders d'opinion de toutes sensibilités dans l'ensemble de la France,
d'expliquer la politique du Système européen de banques centrales.
Concernant la parité externe de l'euro, M. Jean-Claude Trichet a
insisté sur le rôle des marchés et sur la concertation au
niveau du G7 qui régule, dans le régime des changes flottants
actuel, les rapports entre l'euro, le dollar et le yen. Il a estimé que
la parité externe du futur euro serait probablement dans la
continuité des relations observées au cours des dernières
années entre le dollar et les monnaies du coeur de l'Europe.
Concernant l'évolution des agrégats monétaires, M.
Jean-Claude Trichet a rappelé que l'évolution de
référence de la Banque de France, soit une augmentation à
moyen terme des agrégats monétaires de 5 % par an,
était établie compte tenu d'une croissance potentielle non
inflationniste de 2,5 % et d'un objectif d'inflation de moins de 2 %.
Il a noté que l'évolution effectivement observée de ces
agrégats avait été inférieure, certaines
années, à la valeur de référence et qu'elle
était aujourd'hui supérieure à cette valeur de
référence.
Concernant les pouvoirs de l'exécutif européen, il a
estimé que l'on sous-estimait souvent le degré d'union politique
déjà atteint dans le volet "Union économique" de l'Union
économique et monétaire. En effet, le Conseil des gouvernements
dispose de pouvoirs considérables en matière budgétaire,
notamment pour influencer, voire sanctionner, les Etats membres. Par ailleurs,
il a noté que, dans le Traité de Maastricht comme dans la loi
française ou dans la loi allemande, le dernier mot appartenait aux
gouvernements ou au Conseil après concertation étroite avec la
Banque centrale en vue de trouver un consensus, sur la question d'un
réalignement au sein d'un mécanisme de change.
Concernant la réforme de la Banque de France, M. Jean-Claude Trichet a
rappelé que, pour le Conseil de la politique monétaire,
l'objectif de la stabilité des prix était réalisé
lorsque l'inflation s'élevait à moins de 2 %. Au niveau
européen, il appartiendra au Conseil de la Banque centrale
européenne de décider l'objectif fixé.
Concernant la possibilité d'émettre des obligations
indexées sur l'inflation, M. Jean-Claude Trichet a indiqué qu'il
ne s'agissait pas d'une responsabilité de la Banque de France, mais de
l'Etat. Il s'est borné à mentionner la réserve des banques
centrales en général à l'égard du concept
d'indexation.
M. Denis Badré s'est inquiété de l'importance du
déficit budgétaire et de l'encours de la dette en France. Il
s'est étonné que la France connaisse les taux
d'intérêt les plus bas de la Communauté européenne
alors que son déficit est parmi les plus élevés. Il a
également plaidé pour un budget européen limité.
M. Roland du Luart a souhaité des renseignements complémentaires
sur les réformes structurelles à entreprendre.
Mme Marie-Claude Beaudeau a demandé des informations sur les
modifications qu'entraînera le passage à l'euro pour la gestion
des réserves par la Banque de France et s'est inquiété du
plan de restructuration lancé par celle-ci et visant la suppression de
plus de huit cents emplois et de quatre-vingt-dix succursales.
M. Maurice Blin s'est inquiété de la diminution des marges de
manoeuvre des pays de l'Union monétaire pour conduire leurs politiques
économiques internes.
M. François Trucy s'est interrogé sur l'avenir de "l'euro/CFA",
en remplacement du franc CFA.
M. Yann Gaillard a souligné la continuité de la politique
monétaire de la France malgré les alternatives politiques.
M. Henri Collard a demandé des renseignements supplémentaires
sur les pouvoirs du Conseil européen et sur l'état de l'opinion
publique face à la perspective de l'euro.
M. Jean Clouet s'est interrogé sur la procédure de rachat des
monnaies nationales. Il s'est également demandé si un état
fédéral européen n'était pas de facto en train de
se constituer.
M. Christian Poncelet, président, a rappelé que M. Patrick
Artus, directeur du service des études économiques et
financières de la Caisse des dépôts et consignations, avait
estimé, au cours de son audition, que le franc, à cause de son
"arrimage" au Deutsche Mark, était surévalué aux
débuts de la réunification allemande, ce qui aurait causé
1,5 million de chômeurs. Il a donc demandé si l'euro serait
également surévalué. En outre, il a demandé un
rapport détaillé de la Banque de France sur analyse de la
convergence économique, telle qu'elle a été
appréciée par la Commission européenne et par l'Institut
monétaire européen.
En réponse, M. Jean-Claude Trichet, gouverneur de la Banque de France,
a souligné les risques que courrait la France si elle négligeait
la croissance de l'encours de sa dette. Il a estimé que la France
disposait de très nombreux atouts, mais qu'elle devait également
combattre ses défauts. Concernant le paradoxe de taux
d'intérêt très bas malgré un déficit
élevé, il a déclaré que cette situation
résultait de la remarquable position de la France face aux quatre autres
critères du Traité de Maastricht, de l'état
exceptionnellement bon de ses comptes extérieurs et de la confiance
qu'avait su acquérir la Banque de France.
Concernant le fonctionnement du système de banques centrales
européennes, il a insisté sur le caractère
collégial des décisions prises par la Banque centrale
européenne.
Par ailleurs, M. Jean-Claude Trichet a indiqué qu'il était
erroné d'imputer notre chômage à la politique du franc fort
et stable. Cette politique a permis de préserver non seulement le
pouvoir d'achat des Français mais aussi de bas taux
d'intérêt de marché et une bonne
compétitivité, ce qui est bon pour la croissance et la
création d'emplois. Cependant, une bonne politique monétaire est
une condition nécessaire mais pas suffisante pour vaincre le
chômage. Encore faut-il des réformes structurelles.
Puis, il a indiqué que la quote-part de la France dans le montant des
réserves de la future Banque centrale européenne constituerait
une part ténue des réserves de la Banque de France. Il a
souligné que la restructuration de cette dernière avait pour
objectif d'abaisser le coût des services rendus dans le domaine de la
circulation fiduciaire et qu'il n'était pas question de fermer la
moindre succursale. En outre, il a insisté sur les rencontres
organisées entre la Banque de France et les maires concernés par
les suppressions d'emplois afin de trouver des solutions concrètes et
adaptées aux conditions locales. La Banque de France entend aider le
mieux possible les villes concernées.
S'agissant de l'avenir du franc/CFA, il a fait remarquer que la Banque de
France n'intervenait pas puisque le franc/CFA est relié au franc par
l'intermédiaire du budget de l'Etat. Il a estimé qu'à sa
connaissance, la France et les pays africains n'entendaient rien changer dans
leurs relations.
Ensuite, M. Jean-Claude Trichet a déclaré que la construction
européenne conduisait probablement moins à la création
d'un Etat fédéral "de facto" qu'à une organisation
originale confiant au collège des gouvernements de l'Union des pouvoirs
importants et qu'il ne fallait pas sous-estimer l'efficacité de la
construction institutionnelle sans précédent que les
Européens s'étaient donnée. Il a également
annoncé que le "rachat" des monnaies nationales se ferait partout en
Europe, à partir du 1er janvier 2002, avec l'aide des banques
commerciales.
Enfin, il a répondu favorablement à la demande de rapport
présentée par M. Christian Poncelet, président.
V. AUDITION DE M. PHILIPPE SIGOGNE, DIRECTEUR DE L'OBSERVATOIRE FRANÇAIS DE CONJONCTURE ÉCONOMIQUE (OFCE)
Au cours d'une séance tenue le mercredi
1er avril, la commission a procédé à l'audition de M.
Philippe Sigogne, directeur de l'Observatoire français de conjoncture
économique (OFCE).
S'interrogeant sur la destruction éventuelle de un à un million
et demi d'emplois par la politique monétaire menée depuis la fin
des années 80, le directeur de l'OFCE a expliqué que la politique
monétaire de la France avait été dictée par un
objectif politique, consistant à préparer l'euro et à
ancrer l'Allemagne à l'Ouest. Dans ce contexte, il a indiqué que
le rôle de la politique économique était de limiter les
contraintes occasionnées par ce choix. Détachée de la
réalisation de cet objectif, la politique économique aurait
probablement été caractérisée par des taux
d'intérêt plus bas et une gestion différente de la phase
spéculative. A titre de comparaison, il a signalé que les
Etats-Unis avaient opté pour des taux d'intérêts
réels presque nuls et des recapitalisations sur fonds publics des
organismes financiers en difficulté, tandis que la France avait subi une
dégradation de ses finances publiques et un désendettement trop
rapide du secteur privé.
Les conséquences de cette politique sur les entreprises varient selon
leur taille. M. Philippe Sigogne a considéré que les grandes
entreprises sortaient indéniablement raffermies de la phase de
désendettement, acquérant ainsi un avantage sur leurs
concurrentes allemandes sur les marchés internationaux. En revanche, il
a constaté que les contraintes imposées aux petites et moyennes
entreprises avaient conduit à une destruction importante de tissu
productif. En conséquence, il a jugé que des mesures en faveur
des PME constituaient aujourd'hui une priorité.
S'agissant des finances publiques, le directeur de l'OFCE a estimé que
leur évolution, au cours de la période, était liée
aux orientations de la politique monétaire. En effet, la
dégradation de la situation des finances publiques doit être
considérée comme l'inévitable contrepartie de la
nécessité de défendre la parité de change entre le
franc et le mark, conjuguée à une demande intérieure
française inférieure à la demande intérieure
allemande. Ce mécanisme a provoqué la nécessité
d'une phase de désendettement de l'Etat et des entreprises. Il a
signalé que l'action de la Banque de France avait été
conforme aux orientations fixées par le Gouvernement.
M. Philippe Sigogne a déclaré percevoir aujourd'hui les
prémisses d'une modification des comportements. S'agissant des
ménages, il a constaté un retour, peu à peu, vers le
crédit. S'agissant des entreprises, il a pronostiqué qu'elles
reprendraient également le chemin de l'endettement bancaire mais aussi
hypothécaire et sur le marché des actions.
Il a indiqué que ce réendettement des agents devrait faciliter
l'amélioration des finances publiques une fois effectués les
mouvements actuels de restructuration, de fusion-acquisition notamment. Il
s'est déclaré optimiste quant à la possibilité de
réduire le déficit public dans un contexte d'augmentation des
dépenses publiques limitée à 1% par an. Il a
considéré que les aides à l'emploi constituaient un
gisement d'économies budgétaires important.
M. Philippe Sigogne a ensuite évoqué les orientations
susceptibles d'être retenues par la future banque centrale
européenne dans la conduite de la politique monétaire commune.
Envisageant qu'elles soient inspirées par celles de la Bundesbank, il a
signalé que cette dernière était de moins en moins
influencée par les fluctuations du dollar, et déterminait le
niveau des taux d'intérêt à court terme en fonction de deux
facteurs : l'écart avec le taux de croissance potentiel de
l'économie et l'écart avec un taux d'inflation jugé
raisonnable.
Si la banque centrale européenne décidait de retenir ces deux
facteurs, le directeur de l'OFCE a mis en évidence le fait que la
politique monétaire européenne ne serait, pour autant, pas
forcément identique à celle de la Bundesbank. En effet, la France
et l'Allemagne ont des acceptions différentes tant du taux de croissance
potentiel de l'économie que du niveau d'inflation raisonnable.
S'agissant du taux de croissance potentiel de l'économie, il correspond
en France au taux de croissance à long terme, soit 2,5 %, tandis
que les Allemands le déterminent en faisant une moyenne de taux de
croissance passés, soit environ 3 %. S'agissant de l'inflation, la
Banque de France considère qu'une augmentation des prix de 2 % par
an est raisonnable tandis que la Bundesbank vise une évolution des prix
comprise entre 0 et 2 % par an. En conséquence, en appliquant les
critères de la Bundesbank dans leur interprétation
française, la banque centrale européenne fixerait les taux
d'intérêt à court terme à 4%, et les porterait
à 5 % si elle retenait l'interprétation allemande.
En outre, M. Philippe Sigogne a relevé que la politique
monétaire européenne serait en théorie
déterminée par onze banquiers centraux raisonnant à partir
d'agrégats correspondant à l'ensemble de l'Europe, mais que
ceux-ci ne manqueraient pas d'être influencés par la conjoncture
interne de leur pays d'origine. Il a décelé dans ce cas de figure
un risque de politique restrictive à court terme, les économies
de la plupart des petits pays d'Europe étant aujourd'hui proches de la
surchauffe.
M. Alain Lambert, rapporteur général, a alors sollicité
le point de vue du directeur de l'OFCE s'agissant de deux risques
identifiés par le Gouverneur de la Banque de France au cours de son
audition : l'absence de réformes structurelles destinées à
réduire durablement le chômage et l'incidence de la situation des
finances publiques sur le niveau des taux d'intérêt.
S'agissant du chômage, M. Philippe Sigogne a évoqué la
tentation d'imiter les pays dans lesquels le nombre de demandeurs d'emploi a le
plus fortement baissé dans les années récentes, tels que
les Etats-Unis, la Grande Bretagne ou les Pays-Bas. Il a cependant
indiqué, s'appuyant sur une étude de l'INSEE, que la baisse du
chômage s'était accompagnée dans ces pays d'une
élévation du nombre de personnes vivant sous le seuil de
pauvreté, et que l'Europe devait se départir d'un modèle
portant en germe des facteurs de destabilisation aussi graves que l'opposition
entre travailleurs et chômeurs.
Evoquant les pistes à étudier afin de réduire le
chômage, il a cité les travaux de la Commission européenne
incitant à une réduction du coût du travail pour les
emplois les moins qualifiés. Il a jugé que la loi portant
réduction de la durée légale du travail s'écartait
de cette direction. M. Philippe Sigogne a ajouté qu'il fallait
développer les incitations à travailler, afin que personne ne se
contente de revenus de substitution. Enfin, il a prôné le
développement de remises dans les conditions mentales de retour à
l'emploi, en s'inspirant des expériences américaines. Il a
déploré l'absence totale d'actions dans ce sens en France.
Au plan macroéconomique, le directeur de l'OFCE a
considéré qu'il existait de solides raisons de croire à un
accroissement de la quantité de travail offerte par les entreprises. Il
a avancé l'idée selon laquelle une légère
augmentation des salaires, liée à la reprise de la croissance, ne
conduirait pas à l'apparition d'un risque inflationniste, et que la part
des profits dans la valeur ajoutée diminuerait compte tenu de l'effort
de productivité important réalisé au cours des
dernières années. Il a ajouté que ce
phénomène s'était produit aux Etats-Unis, sans mettre en
péril la rentabilité des entreprises. Il a également
estimé que l'enjeu des années à venir consisterait
à répartir la diffusion du progrès technique, due aux
investissements passés, entre salaire et emploi.
Dans cette perspective, M. Philippe Sigogne a appelé à une
réflexion sur le type de politique des revenus et de négociation
salariale à mettre en oeuvre, s'interrogeant sur la faisabilité
d'une transposition de l'expérience néerlandaise à
l'ensemble de l'Europe.
M. Jean-Philippe Lachenaud, constatant que la durabilité de la
croissance actuelle n'était pas acquise, a souhaité la mise en
place d'une politique d'incitation à l'investissement productif. Il a
par ailleurs souhaité savoir si, au vu du texte sur la réduction
de la durée du travail adopté par l'Assemblée nationale,
l'OFCE avait modifié ses prévisions de créations d'emplois
occasionnées par ce dispositif.
M. Philippe Sigogne s'est déclaré sceptique quant à
l'efficacité des dispositifs d'aide à l'investissement. Il a
considéré qu'ils étaient souvent mal ciblés, donc
peu efficaces, et très chers lorsqu'ils étaient incitatifs. Il a
par ailleurs constaté qu'ils étaient souvent mis en place au
moment où la croissance était forte et que l'investissement
repartait de lui-même, provoquant par là des effets d'aubaine. Il
s'est prononcé en faveur de mesures facilitant la création
d'entreprise.
S'agissant de la loi relative à la réduction du temps de
travail, le directeur de l'OFCE a précisé que son institut ne
s'était pas livré à des prévisions de
créations d'emploi, mais à des estimations reposant sur
différents scénarios. Il s'est déclaré incapable de
se livrer à des prévisions compte tenu du trop grand nombre
d'éléments restant flous s'agissant de la manière dont le
texte allait être appliqué. Il a maintenu la fourchette
élaborée par son institut, envisageant des résultats
allant d'une destruction de 100.000 emplois à la création de
450.000 emplois.
M. Jacques Oudin a déclaré que la politique actuelle
négligeait l'investissement productif et collectif. Il a
considéré que certains mécanismes d'amortissement ou
d'orientation de l'épargne avaient fait leur preuve. S'agissant de la
réduction de la durée du travail, il a considéré
que la France ne pouvait pas avoir raison contre l'ensemble de ses partenaires.
Il a, enfin, rejeté l'idée d'une politique des revenus, lui
préférant une politique de charges ou de fiscalité.
Le directeur de l'OFCE a indiqué que, s'agissant d'incitation à
l'investissement dans des secteurs tels que la flotte maritime ou les
autoroutes, pour lesquels la rentabilité n'est pas immédiate, une
réflexion spécifique devait être menée. Il a
constaté que ces investissements étaient souvent
délaissés par l'Etat en période de basse conjoncture et
repris au moment où le marché serait à même de les
prendre en charge.
Il a précisé que la loi sur la réduction de la
durée du travail n'avait pas pour objectif de créer des richesses
ou des heures de travail, mais de les répartir différemment,
moyennant un coût budgétaire minime. Il a fait valoir que ce
coût ne serait, pour les finances publiques, probablement pas
supérieur à celui d'une mesure de réduction des charges.
Répondant aux questions de M. Christian Poncelet, président,
M. Philippe Sigogne a observé que l'endettement de la France se
réduisait année après année, même si
l'endettement public continuait à croître.
Il a appelé à ne pas séparer la question du
déficit de celle de la dette, soulignant que l'institut monétaire
européen, dans son récent rapport, s'était surtout
intéressé au niveau de dette des Etats de l'Union. Il a
affirmé qu'un niveau de dette équivalent 40 % du produit
intérieur brut lui paraissait raisonnable. Afin d'atteindre cet
objectif, il a estimé qu'un déficit public ramené entre 1
et 2 % du produit intérieur brut était suffisant. Le
directeur de l'OFCE a rappelé que le Royaume-Uni, l'Espagne ou
l'Allemagne s'étaient fixés des objectifs ambitieux
d'équilibre budgétaire, et a mis l'accent sur les risques
d'assèchement du marché des actifs liquides induits par de telles
orientations.
Il a pronostiqué que la banque centrale européenne serait
très crédible, sa crédibilité résultant
d'une comparaison avec les autres banques centrales. La Banque du Japon
traversant une période difficile, la concurrente de la banque centrale
européenne sera la réserve fédérale
américaine, réputée pour agir selon des règles
moins strictes que celles de la Bundesbank.
En conclusion, M. Philippe Sigogne a considéré que, l'Europe
ayant, contrairement aux Etats-Unis, procédé au
désendettement de ses entreprises, elle serait une zone très
attractive pour les capitaux internationaux dans les années à
venir.
TEXTE DE LA PROPOSITION DE RESOLUTION
ADOPTEE PAR
LA COMMISSION
Le Sénat,
Vu l'article 88-4 de la Constitution,
Vu la recommandation de la Commission européenne en vue d'une
recommandation du Conseil conformément à l'article 109 J,
paragraphe 2, du Traité,
Invite le Gouvernement
- à approuver, au sein du Conseil, la liste des Etats membres
remplissant les conditions nécessaires pour l'adoption d'une monnaie
unique, telle qu'elle est proposée par la Commission européenne ;
- à réaffirmer que le bon fonctionnement de la zone euro
ainsi définie suppose que tous les Etats membres s'attachent à
retrouver la marge de manoeuvre indispensable pour que chaque politique
budgétaire nationale puisse jouer son rôle d'ajustement
conjoncturel dans le cadre d'une politique monétaire unique ;
- à élaborer et mettre en oeuvre un programme de
stabilité, pleinement conforme à nos engagements européens
et au rôle de notre pays en Europe ;
- à veiller à ce que le Conseil, dans le cadre d'un
dialogue permanent avec la Banque centrale européenne (BCE) exerce
effectivement les responsabilités qui lui sont reconnues par les
articles 109 et 109 B du Traité sur l'Union européenne, en tirant
parti des possibilités de modulation institutionnelle
décidées dans le cadre de la résolution adoptée par
le Conseil européen de Luxembourg le 13 décembre 1997 ;
- à poursuivre rapidement l'approfondissement de tous les volets
de l'Union économique et monétaire ;
- à assurer l'information régulière du Parlement sur
l'action que le Gouvernement conduira à ces différents titres,
à organiser un débat annuel à ce sujet dans chacune des
deux assemblées, à produire à l'appui du projet de loi de
finances de l'année le programme de stabilité notifié par
lui et, au moins une fois par an, une présentation des programmes des
autres Etats membres ;
- à communiquer aux présidents des commissions permanentes
compétentes du Parlement tous rapports, avis et recommandations auxquels
pourrait donner lieu la mise en oeuvre des articles 103 et 104 C du
traité sur l'Union européenne du 7 février 1992 ;
- à favoriser un dialogue régulier entre la BCE et le
Parlement français afin que celui-ci soit informé de la politique
monétaire menée par celle-ci ;
- à agir en sorte que soient pleinement respectées les
dispositions de l'article 109 A du Traité sur l'Union européenne,
en vertu desquelles la nomination des membres du directoire de la BCE
relève de la pleine responsabilité des Chefs d'Etat ou de
gouvernement des Etats membres participant à la monnaie unique.
1
Les mots en italique
résultent des adjonctions introduites par le traité d'Amsterdam.
2
Sic...
3
Ces économies se traduisent par symétrie par une
perte de recettes pour le système financier, les recettes tirées
des échanges de devises entre pays membres étant appelées
à disparaître tandis que les marges de taux d'intérêt
devraient se réduire encore.
L'OCDE cite ainsi diverses estimations selon lesquelles les profits sur les
opérations de banque en gros pourraient diminuer de 10 à
15 %. Il reste ainsi à déterminer comment seront
compensées ces pertes des recettes.
4
Dépenses hors charges d'intérêt.
5
Si elle estime que seul un risque de déficit excessif
se présente, elle conserve la latitude d'élaborer ou de ne pas
élaborer son rapport.
6
C'est-à-dire l'exigence de publications
supplémentaires avant l'émission de titres publics par l'Etat
concerné et l'invitation adressée à la BEI de revoir sa
politique de prêts à l'Etat en cause.
7
La théorie des zones monétaires optimales
initiée par un article de Mundell (1961) établit que le
coût de la renonciation à l'instrument monétaire (taux
d'intérêt et taux de change) peut être élevé
lorsque les économies liées entre elles par une même
politique monétaire et une même monnaie sont inégalement
vulnérables à des chocs économiques. Elle considère
qu'en ce cas, la flexibilité des marchés du travail est une
condition essentielle à la viabilité de la zone monétaire.
La flexibilité du marché du travail peut elle-même
être vérifiée soit si les salaires réels sont
flexibles, soit si les salariés sont mobiles.
8
C'est-à-dire profitant de la phase ascendante du cycle pour
tendre vers l'équilibre et évitant les déficits excessifs.
9
Rapports n° 86 du 21 novembre 1996 et n° 85
du 20 novembre 1997 - Sénat - Commission des finances.
10
Rapport n° 85 du 20 novembre 1997 - Sénat
- Commission des finances.
11
En particulier par une loi de finances.
12
Telle qu'elle a été transmise à votre rapporteur.
13
Souligné par le rapporteur.
14
Souligné par le rapporteur.