LES CONCLUSIONS DE VOTRE RAPPORTEUR
Le projet de budget de la Marine pour 1998 offre une image
contrastée.
Les dotations inscrites au titre des dépenses ordinaires doivent
permettre de poursuivre dans de bonnes conditions l'adaptation des effectifs au
nouveau modèle issu de la professionnalisation et à la
réduction du format. L'inquiétude, sur ce point, tient moins aux
crédits budgétaires qu'à la capacité de
réaliser effectivement les recrutements prévus par la loi de
finances, en trouvant pour les postes que la Marine doit pourvoir, suffisamment
de volontaires au sein de la Direction des constructions navales. Devant le
risque d'accentuation du déficit déjà constaté en
personnels civils, il sera sans doute nécessaire d'adapter les
règles qui président actuellement aux recrutements, afin de ne
pas affecter le bon fonctionnement des unités.
Mais le budget de la Marine étant avant tout un budget d'investissement,
il sera bien entendu surtout marqué par la diminution des crédits
d'équipement, inférieurs de près de 10 % au niveau
prévu en programmation.
Certes, à ce stade, la ponction importante opérée sur le
titre V ne remet pas fondamentalement en cause le modèle défini
par la loi de programmation.
Les capacités opérationnelles essentielles ne seront pas
amoindries et les grandes échéances concernant les SNLE/NG, le
porte-avions et le Rafale marine sont globalement confirmées, même
si certains retards interviennent. Le maintien de la livraison des avions de
guet embarqués Hawkeye traduit la priorité accordée au
renforcement de la cohérence des systèmes d'information et
permettra d'améliorer considérablement les capacités de
détection au profit du groupe aéronaval.
Les grands programmes conduits en coopération ne sont pas
affectés par les diminutions de crédits, qu'il s'agisse de la
frégate anti-aérienne HORIZON, de l'hélicoptère NH
90, des systèmes de missiles antiaériens (FSAF et PAAMS) et de la
torpille légère MU 90 qui bénéficiera de la
procédure de commande globale pluriannuelle.
En revanche, il est clair que les moratoires ou les retards ne seront pas
dépourvus de conséquences opérationnelles.
L'indisponibilité du Duquesne et vraisemblablement du Suffren amoindrira
très sévèrement nos capacités de défense
antiaérienne, en réduisant de moitié le nombre de
frégates pouvant protéger le groupe aéronaval ou le groupe
amphibie.
La défense antiaérienne du groupe aéronaval sera d'autre
part affectée par les décisions concernant le programme Rafale.
Dès la loi de programmation apparaissait déjà un "trou"
entre le retrait des Crusader en 1999 et la constitution de la première
flottille de Rafale en 2002, ce qui conduisait à limiter les
possibilités d'emploi du Charles de Gaulle en cas de menace
aérienne importante. Cet inconvénient sera accentué par le
retard dans la livraison du standard le plus évolué pour le
Rafale. A plus long terme, l'avenir du groupe aéronaval reste bien
entendu conditionné par la décision de construire ou non un
second porte-avions.
Plus généralement, il faut bien constater que les
économies réalisées en 1998 ne feront la plupart du temps
que reporter des charges inéluctables, avec souvent pour
conséquences des intérêts moratoires et des surcoûts.
Enfin, il est évident que la portée des mesures prises pour 1998
ne sera pas la même selon que ces mesures ne constitueront qu'une
"encoche" dans la loi de programmation ou qu'elles seront
pérennisées pour plusieurs années.
Lors de sa présentation du projet de budget, le ministre de la
Défense avait indiqué que "
les choix proposés
permettent de maintenir les objectifs du modèle d'armée
arrêté en 1996, même si la progression vers ce modèle
est retardée".
Il ajoutait que les mesures prises
"ne
pourraient
être amplifiées ni même prolongées sans dommages".
Au-delà de ce budget incontestablement porteur d'incertitudes, la "revue
des programmes" engagée dès cet automne par le ministère
de la Défense devra très clairement faire apparaître les
implications financières des grands choix effectués pour le
modèle de Marine futur.