AVIS n° 88 - Tome IV - PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 1998 ADOPTE PAR L'ASSEMBLEE NATIONALE - DEFENSE - NUCLEAIRE ESPACE ET SERVICES COMMUNS
M. Jean FAURE, Sénateur
Commission des Affaires étrangères de la défense et des forces armées - Avis n° 88 - Tome IV - 1997/1998
Table des matières
-
PRINCIPALES OBSERVATIONS ET CONCLUSIONS
DE LA COMMISSION SUR LE BUDGET DE LA DÉFENSE POUR 1998 1 -
CHAPITRE PREMIER -
LE NUCLÉAIRE, L'ESPACE ET LES SERVICES COMMUNS
DANS LE BUDGET DE LA DÉFENSE POUR 1998 -
CHAPITRE II -
LES QUESTIONS NUCLÉAIRES- I. LE PROGRAMME DE SIMULATION ET LA MODERNISATION DE NOS DEUX COMPOSANTES : UN DOUBLE IMPÉRATIF POUR LA CRÉDIBILITÉ A LONG TERME DE LA DISSUASION NUCLÉAIRE
- II. DES ORIENTATIONS BUDGÉTAIRES DONT LA POURSUITE SERAIT PORTEUSE DE GRAVES INCERTITUDES POUR L'AVENIR DE LA DISSUASION NUCLÉAIRE
-
CHAPITRE III -
L'ESPACE ET LE RENSEIGNEMENT MILITAIRES- I. L'ESPACE MILITAIRE : UN DOMAINE STRATÉGIQUE QUI POURRAIT SOUFFRIR D'UNE INSUFFISANTE COOPÉRATION EUROPÉENNE
- II. LE RENSEIGNEMENT : DES MOYENS HUMAINS ACCRUS
-
CHAPITRE IV -
LES AUTRES ACTIONS COMMUNES- I. LA DÉLÉGATION GÉNÉRALE POUR L'ARMEMENT
- II. LE SERVICE DE SANTÉ DES ARMÉES
- III. LES AUTRES SERVICES COMMUNS
- CONCLUSION
- EXAMEN EN COMMISSION
N° 88
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès-verbal de la séance du 20 novembre 1997.
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi de finances pour 1998 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,
TOME IV
DÉFENSE - NUCLÉAIRE, ESPACE ET
SERVICES COMMUNS
Par M. Jean FAURE,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de :
MM. Xavier
de Villepin,
président
; Yvon Bourges, Guy Penne, Jean Clouet,
François Abadie, Mme Danielle Bidard-Reydet, MM. Jacques Genton,
vice-présidents
; Michel Alloncle, Jean-Luc
Mélenchon, Serge Vinçon, Bertrand Delanoë,
secrétaires
; Nicolas About, Jean Arthuis, Jean-Michel Baylet,
Jean-Luc Bécart, Daniel Bernardet, Pierre Biarnès,
Didier Borotra, André Boyer, Mme Paulette Brisepierre, MM. Michel
Caldaguès, Robert Calmejane, Mme Monique Cerisier-ben Guiga,
MM. Charles-Henri de Cossé-Brissac, Pierre Croze, Marcel
Debarge, Jean-Pierre Demerliat, Xavier Dugoin, André Dulait, Hubert
Durand-Chastel, Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, Philippe
de Gaulle, Daniel Goulet
,
Jacques Habert, Marcel Henry, Roger
Husson, Christian de La Malène, Edouard Le Jeune, Maurice
Lombard, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Paul
d'Ornano, Charles Pasqua, Alain Peyrefitte, Bernard Plasait, Régis
Ploton, André Rouvière, André Vallet.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
230
,
305
à
310
et T.A.
24
.
Sénat
:
84
et
85
(annexes n°
s
43
et
44
) (1997-1998).
Lois de finances.
PRINCIPALES OBSERVATIONS ET CONCLUSIONS
DE LA COMMISSION
SUR LE BUDGET DE LA DÉFENSE POUR 1998 1(
*
)
1/-
L'enveloppe globale des
crédits du titre
III
du ministère de la défense inscrits dans le projet de loi
de finances pour 1998, qui s'élève à 103,7 milliards de
francs, traduit la priorité affichée en faveur de la
professionnalisation des armées.
Toutefois,
la compression des dépenses de fonctionnement
(hors
rémunérations et charges sociales) est
préoccupante
et menace, avec l'insuffisance des crédits d'entretien programmé
des matériels,
l'entraînement et l'activité des
forces
.
La période de
transition
est par ailleurs fragilisée par
les conséquences potentielles, particulièrement pour
l'armée de terre, des dispositions adoptées en matière de
reports d'incorporation pour les jeunes gens titulaires d'un contrat de
travail
qui rendront nécessaire l'adoption de mesures de
compensation.
2/-
La
brutale diminution des crédits du titre V
(- 8,7%
en francs courants, -9,9% en francs constants), qui sont réduits
à 81 milliards de francs dans le projet de loi de finances pour 1998,
donne à penser que les crédits d'équipement militaire ont
joué le rôle de
" variable d'ajustement " du budget
de l'Etat
. Il s'agit là d'un
signal négatif adressé
à la nation dans son ensemble
.
Au sein même des crédits d'équipement militaire,
les
crédits consacrés au nucléaire
subissent une
amputation encore supérieure de 13 %
(alors que la programmation
ne prévoyait qu'une diminution de 1,4%), évolution qui
représente un motif d'inquiétude pour l'avenir.
3/-
Cette réduction des crédits d'équipement
constitue
un mauvais signal adressé aux industries de la
défense
en raison :
- du
coût
de ces réductions budgétaires
en
matière
d'
emplois
,
- du
surcoût
des équipements faisant l'objet de mesures
d'étalement ou de moratoires,
- de la
perte de " lisibilité "
que la loi de
programmation avait précisément pour objet d'apporter aux
industriels,
- et de
l'affaiblissement
qui en résultera pour les industriels
français dans la perspective des restructurations indispensables de
l'industrie européenne de l'armement.
4/-
Le projet de budget de la défense pour 1998 constitue
surtout
un signal très négatif adressé à nos
armées
au moment même où un effort d'adaptation
exceptionnel leur est demandé.
Les orientations de ce budget, si elles n'étaient pas corrigées
après 1998, poseraient deux interrogations majeures pour l'avenir :
- ne risquent-elles pas de compromettre
la cohérence de la
réforme entreprise
dans son ensemble ?
- ne risquent-elles pas de remettre en cause
le futur modèle
d'armée professionnelle
lui-même ?
5/-
Si les économies imposées à la Défense
pour 1998 avaient - comme il est annoncé - un
caractère
exceptionnel
, leurs conséquences, pour regrettables et dommageables
qu'elles soient, seraient peut-être surmontables.
Si, en revanche, la Défense ne retrouvait pas
à partir de
1999
le niveau de ressources prévu par la loi de programmation
militaire 1997-2002,
l'ensemble de l'édifice et la loi de
programmation elle-même se trouveraient remis en cause
.
Or, la
loi de programmation
- contrairement à ses
devancières - comportait déjà une forte réduction
des crédits d'équipement militaire et constituait la traduction
d'une réforme d'ensemble devant aboutir à la mise en place d'un
nouveau modèle d'armée.
Son non respect ou - a fortiori - son
abandon ne pourrait donc conduire qu'à l'affaiblissement progressif de
notre défense ou à la révision à la baisse de ce
modèle d'armée
.
La commission réaffirme en conséquence son
ferme attachement
à l'exécution
intégrale de la loi de programmation
pour les années 1997-2002.
Sous le bénéfice de ces observations, la commission des Affaires
étrangères, de la Défense et des forces armées a
émis un
avis défavorable
à l'adoption de l'ensemble
des crédits du ministère de la Défense pour 1998.
Mesdames, Messieurs,
Le présent rapport pour avis porte sur les crédits de la
défense de l'ancienne " section commune ", c'est-à-dire
ceux ne relevant ni des trois armées ni de la Gendarmerie.
Il s'agit d'un ensemble extrêmement composite qui regroupe aussi bien les
crédits alloués à la Délégation
générale pour l'armement, la rémunération des
personnels civils affectés dans les armées, les dépenses
de l'administration centrale et de diverses directions ou services comme le
service de santé des armées, le service des essences, le SIRPA,
les directions du renseignement (DGSE et DPSD), ou encore la direction des
centres d'expérimentations nucléaires.
Les crédits prévus au titre de ces différentes actions
pour 1998 s'élèvent à 47,2 milliards de francs et
diminuent de 1,9 % par rapport au budget voté en 1997. Les
crédits du titre III s'établiront à 24,3 milliards de
francs et régresseront de 2,4 %. Les dépenses en capital des
titres V et VI représenteront 22,8 milliards de francs, soit une
diminution de 1,4 % par rapport à 1997.
Ainsi, l'évolution des crédits de l'ancienne section commune se
distingue-t-elle de celle de l'ensemble du budget de la Défense qui
diminue plus fortement (- 3,2 %), le titre III progressant de 1,5 % alors que
la baisse du titre V atteint 8,7 %.
Cette divergence apparente n'est due qu'à d'importants transferts de
crédits au profit de la Délégation générale
pour l'armement qui, cumulés, atteignent 2,2 milliards de francs.
Abstraction faite de ces mouvements, les crédits de l'ancienne section
commune connaissent une évolution analogue à celle de l'ensemble
du budget de la défense, à savoir :
. une évolution des dépenses ordinaires qui permet de poursuivre
la professionnalisation des armées,
. des dépenses en capital très inférieures au niveau
prévu par la loi de programmation.
Votre rapporteur se propose, après avoir donné quelques
indications générales sur l'évolution du budget de la
défense pour 1998, de centrer son analyse sur les points les plus
importants de l'ancienne section commune :
. le domaine du nucléaire, qui subit une très forte diminution de
crédits inquiétante pour l'avenir de la dissuasion,
. les programmes spatiaux militaires, dont le développement est
affecté par les difficultés de la coopération
franco-allemande,
. le renseignement, qui voit ses moyens humains renforcés,
. la délégation générale pour l'armement, en
profonde réorganisation, qui cherche à renforcer
l'efficacité de la gestion des programmes d'armement en réduisant
leur coût, mais qui doit également adapter ses structures
industrielles,
. le service de santé et les autres services communs.
CHAPITRE PREMIER -
LE NUCLÉAIRE, L'ESPACE ET LES
SERVICES COMMUNS
DANS LE BUDGET DE LA DÉFENSE POUR 1998
Les crédits consacrés au nucléaire,
à l'espace et aux différentes actions communes pour 1998
s'inscrivent dans le cadre d'un budget de la Défense marqué par
une forte régression des crédits d'équipement, à la
fois par rapport au budget voté de 1997 et au regard des dotations
résultant d'une stricte application de la loi de programmation militaire
1997-2002.
Votre rapporteur se propose d'évoquer brièvement les grandes
lignes du budget de la défense pour 1998 avant de présenter
l'évolution globale des masses financières consacrées au
nucléaire, à l'espace et aux services communs.
I. UN BUDGET DE LA DÉFENSE EN FORT RETRAIT PAR RAPPORT À LA LOI DE PROGRAMMATION
En planifiant pour six ans l'ensemble des crédits de
fonctionnement et d'équipement des armées et l'évolution
des effectifs de la défense, la loi de programmation constituait un
schéma global et cohérent permettant de réaliser la
professionnalisation, de réduire les effectifs et de moderniser les
équipements afin d'atteindre en 2002 un modèle d'armée
répondant aux quatre grandes missions de notre système de
défense, la dissuasion, la prévention, la projection et la
protection.
Votre rapporteur avait insisté sur la cohérence d'ensemble de cet
exercice en soulignant combien la réussite de la réforme reposait
sur le strict respect de la programmation, tant du point de vue des lois de
finances initiales que de leur exécution budgétaire.
Sensible dès la gestion de l'exercice 1997, l'écart entre les
crédits programmés et les crédits effectivement
disponibles va aller croissant puisque le projet de loi de finances pour 1998
est inférieur de près de 9 milliards de F à
l'annuité prévue.
A. UNE "ENTRÉE" DIFFICILE DANS LA PROGRAMMATION
Dans son rapport sur la gestion budgétaire et la
programmation au ministère de la Défense remis en juin dernier,
la Cour des comptes estime que "
les mesures de régulation
budgétaire, qu'il s'agisse de gels, d'annulations, ou de reports de
crédits de paiement, même justifiées par le contexte
budgétaire général, sont excessives par leur ampleur, qui
de surcroît est allé en augmentant d'année en année
jusqu'en 1995 inclusivement".
La
Cour des comptes constate
également que
"tout concourt à ce que l'équilibre du
budget général soit obtenu, in fine, par un ajustement des
dépenses en capital du ministère de la Défense, alors que
celles-ci sont impropres à subir des à-coups importants et
répétés, en raison des conséquences qu'ils
entraînent sur le plan de charge des industriels et sur les coûts
des matériels d'armement".
De telles pratiques étaient incompatibles avec le bon déroulement
de la programmation et il aurait été nécessaire qu'aucun
report de charges excessif ne vienne fausser dès le départ
l'application de la loi.
Tel n'a pas été le cas puisque la gestion de l'exercice 1996 n'a
pas permis, loin de là, d'apurer la situation financière du
ministère de la Défense qui se caractérise depuis
plusieurs années par un "déficit" en crédits disponibles
qui génère un stock de factures reporté d'un exercice
à l'autre.
Ainsi, le montant des reports de charges de 1995 sur 1996 s'est
élevé à 11 milliards de F et il a entraîné,
pour 1996, plus de 800 millions de F d'intérêts moratoires. Par
ailleurs, les annulations de crédits intervenues en 1996 se sont
montées à 8,5 milliards de F et 4,8 milliards de F qui n'ont pu
être consommés, car disponibles trop tardivement, ont
été reportés sur 1997. Au total, le
report de charges
de 1996 sur 1997 s'est élevé à près de
10 milliards de F.
Entamée avec ce report de charges considérable, qui devrait
générer des intérêts moratoires de l'ordre de 300
millions de F, la première annuité de la loi de programmation a
subi
trois
annulations de crédits d'équipement
représentant 5 milliards de F,
alors que parallèlement, 2
milliards de francs étaient ouverts au titre III, notamment pour
financer des dépenses liées aux opérations
extérieures.
Il apparaît ainsi clairement que dès la première
année d'exécution de la loi, le ministère de la
Défense n'a pu disposer de la totalité des ressources
correspondant au contenu physique de l'annuité 1997 de la programmation.
Au regard des exercices précédents, notamment 1995 et 1996,
trois améliorations
peuvent cependant être relevées :
· malgré une dotation budgétaire en réduction par
rapport à la loi de programmation, le montant des charges de
l'année 1997 reportées sur l'exercice 1998 devrait être
très significativement diminué, le
stock de factures à
payer
ayant été
largement résorbé
puisqu'il s'élève actuellement à 3 milliards de
F, selon l'information fournie le 5 novembre dernier à votre commission
par le Délégué général pour l'armement. Il
importe bien entendu que de nouvelles mesures de régulation ne viennent
pas alourdir ce passif.
· le ministère de la Défense et le ministère du
budget ont élaboré le 24 avril 1997 une
instruction
interministérielle relative à la gestion des crédits
d'équipement
du ministère de la défense ayant pour
objectif d'améliorer l'efficacité des procédures
financières du ministère.
· enfin, les modalités de
prise en charge du coût des
opérations extérieures
ont été revues,
grâce à la notion d'opérations extérieures
exceptionnelles dont le financement restera extérieur à la
défense. Le conseil de défense de mars 1997 a retenu
l'ex-Yougoslavie au titre des opérations exceptionnelles pour 1997. Le
financement des opérations normales par le ministère de la
Défense devrait être facilité par la révision
à la baisse du régime de solde des militaires en opération
à l'étranger et par la couverture, au moins partielle, des
besoins de financement par le produit de fonds de concours rattachés au
titre V du budget de la défense, dès lors qu'ils constituent des
recettes nettes (entre 450 et 500 millions de F par an en moyenne). Le projet
de budget pour 1998 prévoit, pour compléter ces mesures, une
dotation de 260 millions de F inscrite en loi de finances initiale au titre de
la rémunération des forces en opérations
extérieures normales.
B. DES CRÉDITS D'ÉQUIPEMENTS AMPUTÉS DE 9 MILLIARDS DE F EN 1998
Le projet de budget de la Défense pour 1998
s'élève, pensions comprises, à 238,3 milliards de F, soit
un recul de 2,1 % par rapport au budget voté de 1997.
Hors pensions (53,4 milliards de F), le budget s'établit à
184,7 milliards de F
, soit un
recul de 3,3 %
par rapport au
budget voté de 1997.
Ce recul résulte d'une légère augmentation des
dépenses ordinaires du titre III (103,7 milliards de F soit + 1,5 %)
alors que les dépenses en capital des titres V et VI régressent
de 8,7 % et passeront de 88,7 à 81 milliards de F.
Les effectifs du ministère diminuent de 4,4 % en 1998, passant de
548 508 à 524 026 (- 24 482), la réduction du nombre
d'appelés (- 31 853) et de sous-officiers (- 1 837) étant en
partie compensée par l'augmentation du nombre de personnels civils (+ 1
366) et de militaires du rang engagés (+ 7 838), alors que le
nombre d'officiers reste stable (+ 4).
L'évolution des crédits du titre III traduit une hausse sensible
des dépenses de rémunération et de charges sociales qui
s'élèvent à 80,5 milliards de F (+ 3,5 %) due pour partie
à des modifications de la structure budgétaire (prise en compte
au titre III du coût de fonctionnement du service des programmes navals
de la DGA, jusqu'alors inclus dans les crédits du titre V, inscription
au budget de la gendarmerie des redevances du fonds de concours
acquittées par les sociétés concessionnaires d'autoroute),
mais aussi à la réévaluation des
rémunérations et à l'accentuation des mesures
d'accompagnement de la professionnalisation (notamment pour les pécules
d'incitation au départ qui bénéficient de 250 millions de
F supplémentaires). Parallèlement, les crédits de
fonctionnement courant diminuent de 5,1 % et passent de 24,5 à 23,2
milliards de F, à la fois en raison des effets de la réduction de
format des armées et de mesures d'économies
supplémentaires portant sur l'administration centrale, la DGA et le
service de santé des armées.
Les dépenses en capital des titres V et VI régressent quant
à elles de 8,7 % et passent de 88,7 à 81 milliards de F.
Les
crédits consacrés aux fabrications (30,7 milliards de F),
diminuent de 8,6 %. Les crédits d'entretien programmé des
matériels (15,6 milliards de F) ne diminuent que de 4,6 % mais cette
diminution affecte très différemment les différentes
armées. Les crédits d'infrastructure (9,4 milliards de F, soit -
3,8 %) sont relativement épargnés par les réductions
budgétaires qui touchent beaucoup plus sévèrement les
crédits d'études et de développements (19,6 milliards de
F, soit - 12,3 %), l'entretien programmé des personnels (habillement,
couchage) qui, avec 1,9 milliard de F diminuera de 17,2 %, et les munitions
(3,1 milliards de F, soit - 18 %).
S'agissant des différents domaines couverts par des crédits
d'équipement, les diminutions seront respectivement de 7,8 % pour les
forces classiques, de 5,6 % pour l'espace et de 13,3 % pour le nucléaire.
Par rapport à l'annuité actualisée de la programmation,
les crédits d'équipement subissent un "abattement" de l'ordre de
9 milliards de F qui se traduira :
· par des économies sur les programmes, mais surtout sur
l'entretien programmé de matériels et sur les études,
· par des reports dans l'engagement de certains programmes et de
certaines commandes,
· par des étalements de programmes.
II. LES CRÉDITS DU NUCLÉAIRE, DE L'ESPACE ET DES SERVICES COMMUNS
Les crédits de l'ancienne section commune diminuent sensiblement moins vite que l'ensemble du budget de la Défense, principalement en raison de modifications de la nomenclature budgétaire. Abstraction faite de ces modifications, on observe que l'évolution du titre III est conforme à la mise en oeuvre de la professionnalisation alors que les crédits inscrits au titre V sont très inférieurs au niveau prévu par la loi de programmation.
A. L'ÉVOLUTION GÉNÉRALE
Pour 1998, les crédits de l'ancienne section commune se monteront à 47,189 milliards de F, soit une diminution de 1,9 % par rapport à 1997. Leur part dans l'ensemble du budget de la Défense s'accroît et atteint 25,5 %.
Évolution des crédits de l'ancienne section
commune
(en millions de F.)
1997 |
1998 |
% |
|
TITRE III
|
24 957
|
24 360
|
- 2,4
|
TITRES V ET VI
|
23 148
|
22 829
|
- 1,4
|
TOTAL
|
48 105
|
47 189
|
- 1,9
|
L'évolution générale des crédits
de l'ancienne section commune pour 1998 est donc sensiblement divergente de
celle de l'ensemble du budget de la Défense puisque les crédits
du titre III, qui progressent pour l'ensemble de la Défense, diminuent
de 2,4 % pour la section commune alors que les crédits
d'équipement de cette dernière ne régressent que de 1,4 %,
soit beaucoup moins que l'ensemble des dépenses en capital de la
défense.
Cette évolution est en effet affectée par
d'importantes
opérations de transferts de crédits
ou de modifications de la
structure budgétaire
qui conduisent notamment à majorer les
crédits de la DGA de plus de 2 milliards de F
. En effet, la DGA
bénéficiera en 1998 :
· de l'inscription à son titre III de 690 millions de F provenant
pour la quasi totalité des crédits d'équipement de la
Marine, qui correspondent au coût de fonctionnement du service des
programmes navals et qui résultent de la séparation des
activités "étatiques" et industriels de la Direction des
constructions navales,
· d'un transfert au titre V de crédits d'études-amont en
provenance des autres armées pour un montant de 844 millions de F,
· de l'inscription à son titre V également d'une dotation
de 500 millions de F destinés à être
transférés au budget civil de recherche et de
développement au titre de la recherche duale en matière spatiale.
A périmètre constant, les crédits de l'ancienne section
commune accusent une baisse plus sensible, au titre III mais surtout au titre V.
S'agissant des crédits du titre III, ils se répartissent entre
les rémunérations et charges sociales (18,507 milliards de F),
qui progressent de 0,5 %, et les crédits de fonctionnement (5,852
milliards de F) qui régressent de 10,6 % (Cf tableau ci-après).
Évolution des dépenses ordinaires de la section commune (en
millions de F.)
1997 |
1998 |
% |
|
Rémunérations et
charges sociales
|
18 413,6
|
18 507,4
|
+ 0,5
|
Fonctionnement
|
6 543,5
|
5 852,3
|
- 10,6
|
Total dépenses
ordinaires
|
24 957,1
|
24 359,7
|
- 2,4
|
L'évolution modérée des
rémunérations et charges sociales au sein de la section commune,
malgré les transferts au profit de la DGA et l'accroissement des
effectifs de civils, tient à ce que le montant des provisions à
répartir en cours d'année ne sera que de 654 millions de F
en 1998, contre 1,766 milliard de F en 1997. En effet, à la
différence de l'an passé, chaque armée disposera
dès la loi de finances initiale des crédits permettant de couvrir
la revalorisation de la solde des militaires du rang intervenue en juin 1997 et
d'une partie des crédits finançant le pécule d'incitation
au départ.
La
réduction des crédits de fonctionnement courant
sera en
revanche
particulièrement forte pour les services communs puisqu'elle
dépassera 10 %.
Pour plus de 430 millions de F, ce recul correspond
à la mise en oeuvre de la loi de programmation, et plus
particulièrement de la disparition en 1998 de la Direction des centres
d'expérimentations nucléaires suite à l'arrêt des
essais (- 222 millions de F) et de la réduction des versements à
la SNCF (- 146 millions de F) à la suite de la diminution du nombre
d'appelés. A cette baisse normale des crédits s'ajoutent des
économies
supplémentaires
pour un montant de 385
millions de F qui affectent les crédits de fonctionnement du service de
santé des armées (- 175 millions de F), de la DGA (- 168 millions
de F) et de l'administration centrale (- 42 millions de F).
Les
crédits d'équipement du titre V
se monteront pour 1998
à 21,076 milliards de F et diminueront de 4,5 %. Les diminutions sont
particulièrement fortes sur les crédits de fabrication (1,731
milliard de F soit - 8,4 %) et d'infrastructure (1,186 milliard de F soit - 10
%) alors que les crédits d'investissements restent stables (1,329
milliard de F soit - 0,4 %). Les crédits
consacrés aux
études
, qui représentent l'essentiel du titre V de la section
commune et qui recouvrent notamment une bonne part du financement des
programmes relatifs à l'espace et au nucléaire,
représenteront en 1998 une masse de
16,828 milliards de F
,
en
recul de 4 %.
Si l'on tient compte du transfert à la DGA des
études amont jusqu'à présent inscrites au budget des trois
armées, le recul est beaucoup plus fort et approche les 10 %.
Enfin, le montant des
subventions d'investissement
figurant au titre VI
atteint, pour la section commune, 1,753 milliard de F, soit une progression de
62 % due essentiellement à la dotation de 500 millions de F
destinés à être transférés au budget civil de
recherche et de développement pour la recherche duale en matière
spatiale, mais aussi à une augmentation des dotations du Fonds pour les
restructurations de la défense, qui passent de 136 à 176,3
millions de F.
Évolution des dépenses en capital de la section commune (en
millions de F.)
1997 |
1998 |
% |
|
Équipement (titre V)
|
22 070,8
|
21 076,1
|
- 4,5
|
Subvention d'investissement
(titre VI)
|
1 081
|
1 753,4
|
+ 62,2
|
Total dépenses
en capital
|
23 151,8
|
22 829,5
|
- 1,4
|
B. L'INCIDENCE DE L'ÉVOLUTION DES CRÉDITS DANS LE DOMAINE DU NUCLÉAIRE, DE L'ESPACE ET DES AUTRES ACTIONS COMMUNES
L'évolution des crédits relevant de l'ancienne section commune et consacrés au nucléaire, à l'espace et aux services communs peut être retracée dans le tableau ci-dessous.
Évolution par action des crédits de l'ancienne
section commune
(en millions de F.)
1997 |
1998 |
% |
|
NUCLÉAIRE
|
12 491
|
11 264,9
|
- 9,8
|
ESPACE
|
3 098
|
2 923
|
- 5,6
|
CLASSIQUE
|
32 519,9
|
33 001,5
|
+ 1,5
|
TOTAL |
48 108,9 |
47 189,4 |
- 1,9 |
S'agissant du
nucléaire
, les crédits
inscrits à la section commune, tout comme ceux relevant de
l'armée de l'air et de la Marine, connaissent une
baisse très
importante
, indépendamment de la suppression de la DIRCEN
prévue en 1998, beaucoup plus forte en tout cas que celle prévue
par la loi de programmation. Globalement,
les ressources affectées
à la dissuasion nucléaire sont inférieures de plus de
2 milliards de F à l'annuité qui aurait
résulté d'une stricte application de la loi de programmation
.
Ce "décrochage" implique une série de
mesures palliatives
telles qu'un retard dans le développement du futur missile balistique
M51, une forte compression du budget de la Direction des applications
militaires du CEA qui devra ralentir le démantèlement de l'usine
de Pierrelatte, repousser des essais, réduire les programmes de
recherche amont ainsi que les simulations effectuée à partir des
matériels actuels. Les réductions opérées sur la
Marine entraîneront un retard de l'admission au service actif du 3e
sous-marin nucléaire lanceur d'engins, et le décalage de
l'adaptation de ces bâtiments au futur missile M51.
Votre rapporteur considère que
cette réduction de
crédits est très inquiétante
alors que l'enveloppe
définie par la loi de programmation correspondait à la stricte
mise en oeuvre des grands choix effectués pour l'avenir de notre
dissuasion nucléaire : arrêt des essais et développement
d'un programme de simulation destiné à garantir la
fiabilité et la sûreté des armes futures, abandon de la
composante terrestre, modernisation de la composante sous-marine (SNLE/NG et
M51) et aéroportée (ASMP amélioré).
Dans ces conditions, l'affirmation selon laquelle la dissuasion
nucléaire, maintenue à son niveau de suffisance, voit sa
modernisation se poursuivre sans remise en cause, repose uniquement sur
l'hypothèse d'une réduction exceptionnelle de crédits en
1998 et d'un retour en 1999 au niveau prévu en programmation, seul
compatible avec la réalisation des choix effectués l'an
passé. Si tel n'était pas le cas en 1999, on ne voit pas comment
l'on pourrait à la fois poursuivre le programme de simulation, maintenir
nos deux composantes et entreprendre leur modernisation comme prévu.
Les crédits relatifs à
l'espace
diminuent de 5,6 % et avec
3,1 milliards de F, sont très inférieurs au niveau fixé en
programmation, soit 3,5 milliards de F. Si les réductions de
crédits entraînent le report de programmes tels que la
surveillance de l'espace, moins importants que nos programmes majeurs, elles
traduisent également les
difficultés de la coopération
franco-allemande
sur les programmes spatiaux d'observation. Compte tenu du
caractère de plus en plus hypothétique de la participation
allemande, le
programme d'observation radar Horus semble désormais,
du moins sous sa forme actuelle, compromis
. Plus
généralement, cette absence d'entente franco-allemande fragilise
considérablement l'avenir d'une composante spatiale militaire proprement
européenne de nature à doter l'Europe dans ce domaine
stratégique, d'une autonomie vis-à-vis des Etats-Unis.
Les crédits consacrés au
renseignement
diminuent sans pour
autant compromettre
la poursuite de l'accroissement des effectifs
,
nécessaire au développement de ce domaine jugé prioritaire
sur le plan stratégique. Votre rapporteur rappellera à ce sujet
que la question des modalités d'information du Parlement sur le secteur
du renseignement reste toujours posée.
L'évolution des
crédits concernant la DGA
est difficile
à suivre d'une année sur l'autre en raison de l'importance des
mouvements de transferts prévus en 1998. Par ailleurs, ces
crédits n'ont qu'une signification limitée puisqu'au travers des
programmes d'armement, la DGA gère en réalité 80 % des
crédits d'équipement de la Défense. Votre rapporteur
retiendra l'effort effectué par la DGA pour diminuer ce que l'on appelle
son "coût d'intervention", c'est-à-dire son coût de
fonctionnement propre. Quant à l'objectif de réduction de 30 % du
coût des programmes, il est encore trop tôt pour juger de sa
réalisation. Des premiers résultats ont été
enregistrés mais on peut se demander si les mesures de réduction
de crédits imposées en 1998, avec les retards et avec les
surcoûts qu'elles génèrent sur les programmes, ne viendront
pas notablement compliquer la tâche de la DGA. Enfin, la DGA doit mener
à bien une difficile restructuration de ses services industriels,
essentiellement la Direction des constructions navales.
Enfin, au titre des autres services communs, votre rapporteur retiendra la
très forte diminution des crédits du service de santé
des armées
(- 14,6 %) qui va bien au-delà des
conséquences de la réduction de ses effectifs et de son format.
Une
mesure d'économie de 325 millions de F
, portant
à la fois sur les rémunérations et charges sociales et les
crédits de fonctionnement courant, a été
décidée au motif que l'activité propre des hôpitaux
militaires pourrait procurer une recette supplémentaire du même
ordre l'an prochain, ce qui permettrait de maintenir l'équilibre global
du budget des services. Votre rapporteur s'étonne vivement de cette
mesure qui consiste à transférer une part importante du
fonctionnement du service de santé sur des ressources
extrabudgétaires aléatoires. Il doute que l'activité
militaire hospitalière, alors que l'on ferme des établissements,
augmente l'an prochain de manière suffisante pour compenser la
diminution des ressources budgétaires du service, et il craint qu'une
telle opération perturbe gravement le fonctionnement d'un service
essentiel aux armées actuellement en pleine restructuration,
touché de plein fouet par la professionnalisation et de plus en plus
appelé à contribuer aux opérations extérieures.
CHAPITRE II -
LES QUESTIONS NUCLÉAIRES
Avec 16,5 milliards de francs dans le projet de budget pour
1998, les
crédits consacrés à la dissuasion
nucléaire sont inférieurs de 2,3 milliards de francs, soit
près de 13 %, au niveau prévu par la loi de programmation
militaire 1997-2002.
La loi de programmation tirait les conséquences de la révision
à la baisse de notre posture nucléaire, fondée sur le
principe de suffisance, dans le cadre d'un nouveau contexte
géostratégique, qui se traduit par l'abandon de la composante
terrestre, l'arrêt de la production de matières nucléaires
militaires dans les usines de Pierrelatte et de Marcoule et l'arrêt des
essais nucléaires. Elle maintenait toutefois le
rôle central de
la dissuasion dans notre stratégie
et mettait en place les moyens
financiers permettant au pays de disposer d'un arsenal nucléaire
sûr et crédible, grâce à la modernisation des
composantes océanique et aéroportée et au
développement d'un programme de simulation, corollaire indispensable de
l'arrêt des essais.
Dans un domaine aussi essentiel, qui nécessite plus que tout autre le
meilleur niveau de crédibilité, les réductions de
crédits qui seront opérées en 1998 ne peuvent que susciter
l'inquiétude.
Votre rapporteur rappellera tout d'abord les deux impératifs qui
conditionnent la crédibilité de notre dissuasion future : le
programme de simulation et le maintien de deux composantes modernisées.
Il présentera ensuite les incidences du budget 1998 sur ces deux volets
de notre politique, qui risquent d'être fragilisés par
l'incertitude qui pèse sur le financement des programmes
nucléaires
au cours des années prochaines.
I. LE PROGRAMME DE SIMULATION ET LA MODERNISATION DE NOS DEUX COMPOSANTES : UN DOUBLE IMPÉRATIF POUR LA CRÉDIBILITÉ A LONG TERME DE LA DISSUASION NUCLÉAIRE
Le rapport annexé à la loi de programmation
militaire 1997-2002, tel qu'il a été approuvé par le
Parlement rappelle que
" la dissuasion reste l'élément
fondamental de la stratégie de défense. Elle demeure la garantie
contre toute menace sur nos intérêts vitaux, quelles qu'en soient
l'origine et la forme. Elle reste nécessaire dans un monde où la
vigilance continue de s'imposer ".
Il ajoute que
" sur le plan des moyens, notre politique de
dissuasion
doit tenir compte à la fois de la permanence de certains risques et des
évolutions favorables de l'environnement international ".
Aussi a-t-il été décidé de revoir la situation et
le niveau de la force de dissuasion
" dans le strict respect des
principes de suffisance et de crédibilité ".
Cette doctrine débouchait sur
deux impératifs :
. après l'abandon de la composante sol-sol, la
modernisation
programmée des composantes océanique et aéroportée
qui doivent offrir
" la souplesse et la diversité qui
permettront à la dissuasion française de rester pertinente et
crédible en toutes circonstances ",
. après l'arrêt des essais, la
poursuite du programme de
simulation
qui permettra
" de garantir, dans l'avenir,
la
sûreté et la fiabilité de nos armes
nucléaires ".
Lors du vote de la loi de programmation, votre commission des affaires
étrangères, de la défense et des forces armées
avait souligné qu'elle considérait que ces deux axes majeurs
constituaient le
seuil incompressible
en-deçà duquel la
dissuasion nucléaire perdrait sa crédibilité. Ainsi
reste-t-elle particulièrement vigilante sur la poursuite de ce double
objectif et sur le respect des engagements financiers indispensables à
leur réalisation.
A. LE PROGRAMME DE SIMULATION
Le programme de simulation est le corollaire indispensable de l'arrêt des essais et du démantèlement des installations d'expérimentation car lui seul permet de garantir la fiabilité et la sûreté des armes futures.
1. L'arrêt des essais et le démantèlement des installations du centre d'expérimentations du Pacifique
En signant le
traité d'interdiction complète
des essais nucléaires (CTBT) et en supprimant de manière
irréversible ses capacités d'expérimentation,
la
France a pris deux décisions majeures qui pèsent lourdement sur
les nouvelles orientations des programmes nucléaires.
Votre rapporteur ne reviendra pas longuement sur ces deux décisions
qu'il a largement commentées dans son avis budgétaire de l'an
passé.
S'agissant du traité d'interdiction complète des essais
nucléaires, rappelons simplement qu'il interdit
" toute
explosion expérimentale d'arme nucléaire, ou toute autre
explosion nucléaire ",
formule qualifiée d'option
zéro car elle prohibe tous les essais, y compris ceux de faible
puissance. Elle n'exclut pas cependant les programmes de simulation tels que
ceux mis en oeuvre par la France et les Etats-Unis.
Il met également en place un régime de vérification qui
s'appuie sur plusieurs éléments : un système international
de surveillance constitué de 321 stations de mesures réparties
d'une manière globalement uniforme sur les continents et les
océans, de laboratoires et d'un centre international de recueil, de
stockage et de gestion de données, un régime d'inspection sur
place, des procédures d'échange d'informations entre les
Etats-parties et l'organisation internationale du traité. Cette
dernière comprend une conférence des Etats-parties, un conseil
exécutif et un secrétariat technique qui, sous la supervision du
conseil exécutif, assume la responsabilité d'ensemble du
système de vérification. L'organisation doit progressivement se
mettre en place à Vienne, sous l'égide d'une commission
préparatoire installée depuis mars dernier et qui poursuivra sa
mission jusqu'à l'entrée en vigueur du traité.
Il reste désormais à rendre effective l'application de ce
traité, dont l'entrée en vigueur nécessite la ratification
par 44 Etats-membres de la Conférence du désarmement
possédant des capacités nucléaires de recherche ou
industrielle, ce qui permet d'inclure sans les viser expressément les
cinq puissances nucléaires déclarées et les trois Etats du
seuil : l'Inde, le Pakistan et Israël. Si cette condition n'est pas
atteinte au bout de deux ans, une conférence des Etats ayant
déjà ratifié devra se réunir pour statuer sur
l'entrée en vigueur sans attendre que la condition inscrite dans le
traité soit totalement remplie.
Cette hypothèse est aujourd'hui la plus probable dans la mesure
où l'Inde s'oppose toujours à la signature du traité.
L'application effective du traité d'interdiction des essais et la mise
en oeuvre de vérifications efficaces sont d'autant plus importantes pour
notre pays que
la France a non seulement renoncé aux essais, mais
également aux capacités matérielles
d'expérimentation
dont elle disposait dans le Pacifique, alors que
des puissances nucléaires comme les Etats-Unis, la Russie et la Chine
ont conservé leurs sites d'essais.
En effet, le démantèlement des installations des centres d'essais
du Pacifique à Mururoa et Fangataufa a commencé dès 1996.
Au 1er juillet dernier, près de 60 % de la surface construite avait
été traitée.
Cette opération représente un coût global de 130 millions
de francs.
Une partie des équipements scientifiques a été
ramenée au CEA en métropole alors que l'essentiel des
matériels sont récupérés par les armées,
notamment au profit du 5e Régiment étranger stationné sur
l'atoll de Hao. Les matériels restants ont été
cédés aux communes et au territoire de Polynésie
française ou vendus.
Par ailleurs, l'Agence internationale de l'énergie atomique doit rendre
en fin d'année ses conclusions sur les conséquences des essais
effectués et la surveillance des atolls de Mururoa et Fangataufa
reposera désormais sur un système de mesures et de
détection automatiques, dont le gardiennage sera assuré par une
section du 5e Régiment étranger.
La totalité des opérations de démontage devrait être
achevée en 1998, année au cours de laquelle disparaîtra la
Direction des centres d'expérimentations nucléaires (DIRCEN).
En résumé, la France qui a pris l'engagement juridique de
renoncer aux essais en signant le traité, ne dispose plus aujourd'hui
des moyens techniques nécessaires à la réalisation des
expérimentations nucléaires.
Au-delà de l'ultime campagne d'essais qui a permis de certifier les
têtes nucléaires TN75 qui équipent désormais les
missiles M45 des SNLE de nouvelle génération, d'étudier le
comportement d'amorces robustes, plus tolérantes aux variations
technologiques, et d'acquérir de nouveaux éléments
indispensables de mesure des phénomènes physiques,
la
simulation constitue désormais un moyen nécessaire pour
pérenniser la capacité de dissuasion nucléaire de la
France.
2. La garantie de la fiabilité et de la sûreté de la dissuasion repose désormais sur le programme de simulation
Votre rapporteur croit utile de revenir cette année
encore sur les enjeux et le contenu du programme de simulation.
Il faut en effet rappeler que le programme de simulation répond à
la nécessité de
garantir à la fois la
sûreté et la fiabilité des armes actuelles et de celles qui
les remplaceront,
mais aussi d'assurer à plus long terme la
fiabilité de la dissuasion :
- les armes subissent des phénomènes de vieillissement des
charges qu'il importe de surveiller et dont il faut mesurer les incidences pour
y remédier. En l'absence d'essais, la simulation permettra
d'évaluer les conséquences du vieillissement des charges et
contribuera au maintien de la durée de vie des armes actuelles, telle
qu'elle est prévue jusqu'à leur remplacement.
- les têtes nucléaires appelées à remplacer les
charges actuelles bénéficieront des concepts
" robustes " testés lors de la dernière campagne
d'essais, qui devraient limiter les modifications par rapport aux engins
testés. Mais seule la simulation permettra de garantir la
fiabilité et la sûreté de ces charges nouvelles, garantie
sans laquelle la dissuasion perdrait une part de sa crédibilité.
- enfin, à plus long terme, les concepteurs des armes qui assureront le
renouvellement appartiendront à une génération n'ayant pas
été confrontée aux essais en grandeur réelle.
Au-delà des données recueillies lors de ces essais, la simulation
leur fournira des calculateurs et des moyens expérimentaux
adaptés (la machine radiographique AIRIX et le laser Mégajoule)
leur permettant d'apporter la garantie de la fiabilité et de la
sûreté des armes.
En résumé, le maintien de la dissuasion nucléaire suppose
non seulement un arsenal d'armes nucléaires mais aussi une
garantie
permanente de la fiabilité et de la sûreté de ces armes
qu'en l'absence d'essais, seule la simulation peut apporter.
La mise en oeuvre du programme de simulation repose sur de
puissants moyens
de simulation numérique
fournis par des ordinateurs beaucoup plus
performants que ceux actuellement en service, et sur des
installations
expérimentales
permettant de valider les modèles physiques
décrivant les phénomènes essentiels du fonctionnement des
armes nucléaires : la
machine radiographique AIRIX
pour la
visualisation détaillée du comportement dynamique de l'arme, et
le
laser Mégajoule
pour l'étude des
phénomènes physiques, notamment thermonucléaires.
La
machine radiographique AIRIX
, en phase de construction à
Moronvilliers, en Champagne, sera vouée à l'analyse de la
dynamique des matériaux et elle permettra d'étudier le
fonctionnement non nucléaire des armes, à l'aide
d'expériences au cours desquelles les matériaux nucléaires
sont remplacés par des matériaux inertes. Elle devrait être
opérationnelle dès 1999 et succéder à l'actuelle
machine GREC.
Projet de plus grande ampleur, le
laser Mégajoule
qui sera
installé au Barp, en Gironde, est pour sa part destiné à
l'étude du domaine thermonucléaire. Il permettra de
déclencher une combustion thermonucléaire sur une très
petite quantité de matière et de mesurer ainsi les processus
physiques élémentaires. Le développement du projet doit
s'effectuer en plusieurs étapes, avec tout d'abord la construction d'une
ligne d'intégration laser (LIL) qui devra valider et qualifier la
définition de la chaîne laser de base du laser Mégajoule.
Le
calendrier du programme de simulation
a été
arrêté en fonction de
plusieurs critères
: d'une
part,
la relève des équipes de concepteurs actuels
par des
équipes n'ayant pas connu les essais nucléaires, qui implique la
mise à disposition de ces dernières de moyens de simulation, et
d'autre part les
échéances de remplacement des charges
nucléaires actuelles
.
Les principales phases de ce calendrier sont :
. 1999 : premier tir de démonstration sur AIRIX et début de la
construction du bâtiment du laser Mégajoule,
. 2000 : recette finale de l'installation d'AIRIX,
. 2001 : qualification de la ligne d'intégration laser,
. 2006 : premières expériences sur le laser Mégajoule avec
un tiers des faisceaux,
. 2010 : premières expériences sur le laser Mégajoule avec
la totalité des faisceaux.
Le respect de ce calendrier implique celui des enveloppes financières
affectées au programme, dont les investissements ont été
évalués à 6,5 milliards de francs pour le laser
Mégajoule, 500 millions de francs pour la construction d'AIRIX et 170
millions de francs pour la première génération
d'ordinateurs.
Au-delà des exigences liées à la garantie de nos armes
nucléaires, votre rapporteur souhaiterait également souligner
l'importance du programme de simulation pour le maintien en France d'une
très forte capacité scientifique dans le domaine du
nucléaire militaire, qui place nos chercheurs, avec les
Américains, au plus haut niveau de compétence. Il importe de
préserver ce potentiel scientifique exceptionnel
qui, par
ailleurs, ne manquera pas de favoriser des
retombées positives dans
la recherche civile
, que ce soit dans le domaine des lasers ou par l'apport
de la méthodologie de la simulation pour des domaines tels que la
sûreté nucléaire ou la biologie.
B. LA MODERNISATION DES COMPOSANTES OCÉANIQUE ET AÉROPORTÉE
L'abandon de la composante sol-sol implantée au plateau d'Albion, effectif depuis l'an passé, rend d'autant plus nécessaires la modernisation et le renouvellement des deux composantes complémentaires sur lesquelles repose désormais notre dissuasion.
1. La composante océanique
La
modernisation
de la force océanique
stratégique passe :
- par la construction des
4 sous-marins nucléaires lanceurs d'engin
de nouvelle génération
, nombre minimal pour assurer si
nécessaire la présence à la mer de 2 bâtiments,
- par le programme de
missiles M45,
dotés de la
tête
nucléaire TN75,
qui doivent équiper les SNLE/NG.
Son
renouvellement
implique :
- de mener à bien le
programme M51,
qui sera doté dans un
premier temps (2010) de la TN75, puis à partir de 2015 de la
nouvelle
tête nucléaire océanique,
dont la portée sera de
6 000 km avec chargement complet contre 4 000 km pour le M45.
- l'adaptation des SNLE/NG à ce futur missile.
S'agissant des
SNLE/NG
, le Triomphant a été admis au
service actif au début de 1997. Un nouvel
étalement du
calendrier de réalisation
a été effectué si
bien que les dates d'admission au service actif des futurs bâtiments sont
les suivantes :
- SNLE/NG le Téméraire : printemps 1999
- SNLE/NG le Vigilant : hiver 2003
- SNLE/NG n° 4 : été 2007.
Rappelons que si les SNLE/NG emportent autant de missiles que les actuels
sous-marins à propulsion nucléaire de type Redoutable, ils se
caractérisent par une discrétion très supérieure,
ce qui accroît considérablement leur invulnérabilité.
Le coût total du programme de SNLE/NG a été
évalué à environ 88 milliards de francs.
Le missile M45, actuellement en service sur le Triomphant et qui
équipera les autres SNLE/NG, a une portée supérieure
à 4 000 km avec un chargement complet de ses têtes
nucléaires TN75. Il dispose d'une meilleure capacité de
pénétration que la version antérieure et a
été durci vis-à-vis des effets d'une agression
nucléaire en vol.
Il doit être remplacé à partir de 2010 par des missiles M51
équipés dans un premier temps de la TN75, puis, après
2015, de la nouvelle tête nucléaire océanique. Beaucoup
plus lourd que le M45 et conçu pour résister aux systèmes
de défense antimissiles futurs, le M51 aura également une
portée beaucoup plus longue puisqu'elle sera de 6 000 km. Cette
portée supérieure permettra d'élargir les zones de
patrouille et donc d'accroître l'invulnérabilité des
sous-marins.
Enfin, bien qu'ayant été conçu dès l'origine pour
accueillir des missiles plus importants que les M45, les SNLE/NG devront subir
certaines adaptations pour accueillir le M51. Le coût de
développement du M51 (hors tête nucléaire et adaptation des
SNLE/NG) est estimé à plus de 30 milliards de francs.
En résumé, pour faire face à sa mission consistant
à assurer la permanence de la dissuasion face aux menaces massives, la
FOST doit disposer :
. d'un nombre minimal de 4 sous-marins, dotés de hautes qualités
de discrétion et d'indétectabilité,
. de missiles durcis contre les agressions et de portée accrue, afin
d'accroître l'invulnérabilité des sous-marins en favorisant
l'élargissement des zones de patrouille.
2. La composante aéroportée
La composante aéroportée repose sur les Mirage
2000-N de l'armée de l'air et sur les Super Etendard de
l'aéronavale, qui emportent le missile air-sol moyenne portée
(ASMP). Ces appareils doivent être à terme remplacés par le
Rafale, tant dans l'armée de l'air que dans la Marine.
La modernisation de la composante aéroportée implique à
partir de 2007 le
remplacement de l'ASMP par un missile aux performances
sensiblement accrues, l'ASMP amélioré,
dont la portée
et la capacité de pénétration de la défense
antimissiles seront supérieures. Il sera dès son entrée en
service doté d'une tête nouvelle. Il bénéficiera
d'un vecteur à statoréacteur dit VESTA, dont le
développement servira également au missile antinavires futur.
Le coût prévisionnel du programme ASMP amélioré
s'établit à 4,3 milliards de francs.
Votre rapporteur souhaite insister sur l'importance de ce programme tant la
composante aéroportée
apparaît comme le
complément indispensable de la composante océanique
,
surtout depuis l'abandon de la composante terrestre. Par sa souplesse d'emploi
et sa mobilité, elle permet de diversifier les modes de
pénétration. Mise en oeuvre depuis le sol ou depuis le
porte-avions, elle peut offrir, selon les circonstances, au pouvoir politique,
un moyen plus visible de dissuasion. Enfin, elle renforce la
crédibilité de la dissuasion face au risque
représenté par les progrès toujours envisageables,
fût-ce à long terme, dans la détection des sous-marins.
Son
maintien à un niveau crédible
s'impose dans un
contexte mondial marqué par la persistance des menaces et des risques
liés à la prolifération.
II. DES ORIENTATIONS BUDGÉTAIRES DONT LA POURSUITE SERAIT PORTEUSE DE GRAVES INCERTITUDES POUR L'AVENIR DE LA DISSUASION NUCLÉAIRE
Avec une enveloppe de l'ordre de 16,5 milliards de francs
consacrée à la dissuasion nucléaire, le projet de budget
pour 1998 se situe
en recul de près de 13 % et de 2,3 milliards de
francs
par rapport au budget voté de 1997 mais également par
rapport à l'annuité prévue par la loi de programmation.
Cette forte diminution intervient alors que la loi de programmation avait
déjà largement revu à la baisse les moyens financiers
destinés au nucléaire, confirmant une tendance amorcée
dès le début des années 1990.
Les crédits pour 1998 resteront donc très en-deçà
du niveau défini par la loi de programmation, pourtant
considéré comme calculé au plus juste, pour garantir la
modernisation de composantes, réduites de trois à deux, et mener
à bien le programme de simulation.
Compte tenu de l'ampleur de cette réduction de crédits, la
question du respect des objectifs définis en 1996 est incontestablement
posée. A l'évidence, la réponse à cette question ne
peut être identique selon que la baisse des crédits du
nucléaire présentera un caractère exceptionnel,
limité à la seule année 1998, ou qu'elle sera
confirmée au cours des exercices futurs. Il est clair que, bien que
n'étant pas à ce stade formellement remises en cause, les grandes
orientations qui fondaient la modernisation de notre dissuasion
nucléaire risquent d'être fragilisées par la poursuite des
orientations retenues pour 1998.
Votre rapporteur analysera l'évolution des crédits avant d'en
évaluer l'incidence, à court et à moyen terme, sur la
poursuite des programmes.
A. LA DIMINUTION DES CRÉDITS DU NUCLÉAIRE S'ACCÉLÈRE
S'inscrivant dans une tendance amorcée au début
de la décennie, la loi de programmation avait prévu une
diminution régulière des crédits de la dissuasion
nucléaire.
Le projet de budget pour 1998 représente une
nette rupture
au
regard de cet échéancier et il accélère la
décrue des crédits du nucléaire qui atteindront l'an
prochain un niveau exceptionnellement bas.
1. L'évolution générale des crédits consacrés au nucléaire : un niveau exceptionnellement bas en 1998
Les crédits consacrés à la dissuasion
nucléaire inscrits dans les budgets de l'armée de l'air, de la
Marine, de la DGA et de la DIRCEN représentent un
montant global de
16,56 milliards de francs pour 1998.
Les mêmes crédits se montaient à 18,95 milliards de francs
dans le budget voté de 1997 (hors BCRD). Selon la loi de programmation,
et après application des coefficients représentant la hausse des
prix, ils auraient dû atteindre 18,89 milliards de francs en 1998.
On constate donc un
recul de près de 13 % et de plus de 2,3 milliards
de francs, par rapport au budget voté de 1997 et au niveau prévu
pour 1998 par la programmation.
Dans l'ensemble des dépenses en capital du ministère de la
défense, le nucléaire ne représente plus que 20,4 % contre
21,4 % en 1997, ces dépenses en capital étant par ailleurs
inférieures de près de 10 % en francs constants à celles
de 1997.
L'impact des réductions de crédits est donc plus fort
sur le nucléaire que sur le reste du budget de la défense
. La
part du nucléaire sur un budget d'équipement lui-même en
forte baisse, diminue nettement.
Toujours en francs constants, les crédits de la dissuasion
nucléaire ne représenteront plus en 1998 que la moitié de
ce qu'ils étaient en 1992, ce qui signifie qu'en volume,
l'enveloppe
destinée au nucléaire aura été divisée par
deux en six ans.
Cette décrue s'inscrit dans une tendance amorcée au début
de la décennie, avec la révision progressive à la baisse
du format des forces nucléaires et de plusieurs programmes.
Evolution de la part des crédits du nucléaire
dans les dépenses en capital du budget de la défense
(1990-1996)
Année |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
Nucléaire/TV-VI |
31,4 % |
30,1 % |
29,0 % |
25,7 % |
22,8 % |
21,8 % |
21,9 % |
Quoique de manière moins nette, cette évolution devait se poursuivre dans le cadre de la loi de programmation. Sur la base d'une enveloppe constante pour les dépenses en capital sur toute la durée de la programmation (86 milliards de francs en 1995), la part du nucléaire devait passer de 21,4 % en 1997 à 19,7 % en 2002.
Evolution des crédits du nucléaire prévue par la loi de programmation 1997-2002
MF 95 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
Crédits nucléaires |
18 361 |
18 103 |
17 789 |
17 447 |
17 142 |
16 943 |
Nucléaire TV-VI |
21,4 % |
21,1 % |
20,7 % |
20,3 % |
19,9 % |
19,7 % |
En francs constants, les crédits consacrés au
nucléaire en 1998 sont inférieurs de 12,3 % au niveau
prévu pour cette même année 1998. Ils sont d'ores et
déjà très inférieurs au montant qui aurait dû
être atteint en 2002, après 6 années de diminution
régulière.
Enfin, la réduction de crédits opérée en 1998
représente à elle seule une diminution de 2,1 % de l'ensemble de
l'enveloppe prévue sur toute la durée de la programmation pour
les programmes nucléaires.
2. Les crédits de la direction des applications militaires du CEA
Le CEA, par l'intermédiaire de sa direction des
applications militaires (DAM), remplit trois types de missions dans le domaine
du nucléaire militaire :
-
la conception, la fabrication et la maintenance des armes
, qui
constituent l'essentiel de son activité et qui couvrent la livraison des
TN 75 équipant les SNLE/NG, la conception des futures têtes
nucléaires pour la composante océanique et la composante
aéroportée et la mise en oeuvre du programme de simulation.
-
la fourniture de matières
pour les armes nucléaires et
surtout désormais le démantèlement et l'assainissement des
usines de production,
- enfin, la mise au point des systèmes de
propulsion
nucléaire,
c'est-à-dire des chaufferies nucléaires
équipant les sous-marins et le porte-avions Charles de Gaulle.
Globalement, les crédits inscrits au budget de la Défense qui
seront transférés à la DAM en 1998
s'élèveront à 6,651 millions de francs. Ils seront
inférieurs de 4,5 % à ceux transférés en 1997,
et de près de 600 millions de francs au niveau attendu
en
application de la loi de programmation.
Si l'on se limite aux crédits inscrits au chapitre 51-70 (articles 16 et
30) et relatifs aux missions concernant les armes et les matières, les
crédits prévus pour la DAM en 1998 s'élèvent
à 5,979 milliards de francs, soit 4,7 % de moins qu'en 1997. Les
crédits prévus pour la mission " armes ", qui
concernent notamment les études et la réalisation du programme de
simulation s'établissent à 4,538 milliards de francs et reculent
de près de 13 %, alors que ceux concernant la mission
" matières " s'élèvent à 1,441 milliard
et augmentent de plus de 30 % en raison du coût des
démantèlements et du traitement des déchets
nucléaires.
La forte diminution des crédits de la DAM intervient après
plusieurs exercices difficiles en raison d'annulations de crédits
importantes survenues en cours d'année. Pour 1997, ces annulations ont
représenté 250 millions de francs et elles ont
entraîné un ralentissement des opérations d'assainissement
des usines de Marcoule et de Pierrelatte, ainsi que des reports dans le
lancement ou le déroulement de certaines études.
Pour 1998, s'agissant des crédits relevant de la mission
" armes ", ils devraient pour l'essentiel être affectés
au programme de simulation, auquel sera consacré 1,7 milliard de francs
(dont 1 milliard de francs d'études et près de 700 millions de
francs pour les investissements liés aux calculateurs, à la
section radiographique AIRIX, et à la ligne d'intégration laser)
ainsi qu'à la production de la TN 75.
Les crédits relatifs à la mission "matières" sont
ajustés à la suite de l'arrêt de la production
matières fissiles et sont consacrés à la
récupération de matières sur les armes retirées du
service et aux crédits d'assainissement et de
démantèlement des usines en production de la vallée du
Rhône.
Par ailleurs, le CEA poursuivra en 1998 l'importante
restructuration de la
DAM
, dont les effectifs doivent être ramenés de 5 700 à
4 500 agents sur la période 1996-2000.
Cette restructuration se justifiait à la fois par l'arrêt des
essais nucléaires et la diminution de l'ampleur des programmes d'armes
mais aussi par la nécessité de privilégier l'effort
d'investissement très important lié au programme de simulation.
Elle se traduit :
- par une diminution des effectifs de 1 200 postes environ entre 1996 et 2000,
effectuée sans licenciements grâce aux nombreux départs en
retraite sur la période,
- par la fermeture de plusieurs sites d'implantation dont la charge d'entretien
et de maintenance risquait de devenir trop lourde au regard du budget de la
DAM, et par le regroupement des activités autour de quatre grands
pôles.
La restructuration de la DAM bénéficie de crédits au titre
du Fonds d'adaptation industrielle (219 millions de francs en 1997 et 241
millions de francs en 1998).
Après la fermeture du Centre d'Expérimentations du Pacifique en
1996, le centre de Vaujours sera fermé à la fin de
l'année, celui de Limeil-Valenton cessant son activité fin 1999.
Le CESTA en Aquitaine, où sera réalisé le laser
mégajoule, ainsi que les sites du Ripault en Touraine (matières
non nucléaires) seront renforcés par des mutations de personnels
des sites fermés en région parisienne. L'implantation en Ile de
France sera concentrée à Bruyères le Chatel, qui
accueillera l'autre partie des personnels des sites arrêtant leur
activité. Le site de Moronvilliers en Champagne sera consacré aux
expérimentations sur la machine radiographique AIRIX.
Une fois réalisée, la restructuration devrait permettre un
allégement de 350 millions de francs des charges annuelles de
fonctionnement de la DAM. D'ores et déjà, compte tenu des
opérations engagées, l'économie pourrait être de
l'ordre de 250 millions de francs en 1998.
A ce propos, votre rapporteur tient à souligner que
les
dépenses de rémunérations et de charges sociales
ainsi
que les dépenses de fonctionnement courant représentent environ
la moitié du budget de la DAM. Or, ces dépenses, comme l'ensemble
du budget de la DAM, sont
intégralement financées sur le titre
V du budget de la Défense.
Cette situation n'est guère justifiée. En effet, la DAM ne peut
être considérée comme un industriel fournisseur de l'Etat
alors qu'elle assure pour ce dernier des missions fondamentales, exigeant une
continuité dans le temps.
Alimentée exclusivement par le titre
V,
la DAM subit de plein fouet le contrecoup des annulations de
crédits qui frappent régulièrement les crédits
d'équipement de la défense.
On remarque que pour ses activités civiles, le CEA perçoit une
subvention de fonctionnement inscrite au titre III du budget de l'Etat. De
même, et de manière tout à fait justifiée, des
crédits seront inscrits en 1998 au titre III du budget de la
Défense pour le fonctionnement des activités étatiques de
la Direction des constructions navales, nettement séparées des
activités industrielles pour lesquelles la DCN reçoit des
crédits du titre V.
Il serait tout à fait utile -et logique- qu'une telle séparation
des dotations budgétaires distinguant les charges de fonctionnement et
celles d'investissement puisse à l'avenir s'opérer pour la DAM.
3. Les autres crédits
Les autres crédits sont tout d'abord ceux de la
Force océanique stratégique (FOST)
qui passent de 5,692
à 4,235 milliards de francs de 1997 à 1998, soit un
recul de
25,6 %.
Les dotations de la FOST devaient certes légèrement
décroître au cours de la programmation, mais la diminution est
beaucoup plus forte que prévu, les crédits
étant
inférieurs de plus de 700 millions de francs au montant prévu
pour l'annuité 1998 de la programmation.
Le programme de construction du SNLE/NG type le Triomphant (y compris les
crédits de recherche et de développement et ceux liés
à l'environnement des bâtiments) représente à lui
seul près de 2,6 milliards de francs. L'entretien programmé des
matériels de la FOST bénéficie de crédits d'un
montant de près de 1,2 milliard de francs. Enfin, le programme
d'adaptation des SNLE/NG au futur missile M 51 fait l'objet d'un
décalage et ne mobilise que 54 millions de francs en 1998.
Les
crédits relatifs aux systèmes d'armes
(hors
têtes nucléaires), s'élèvent à
1,9
milliard de francs
, dont 305 millions de francs pour le missile M45, 1,052
milliard de francs pour le missile M 51 et 215 millions de francs pour l'ASMP
amélioré.
B. DES RETARDS DANS LE DÉROULEMENT DES PROGRAMMES DONT LA POURSUITE SERAIT PORTEUSE DE GRAVES INCERTITUDES A LONG TERME
La forte régression des dotations consacrées au nucléaire impose dès 1998 des retards et des étalements dans les programmes. Ces mesures palliatives permettent d'absorber les restrictions budgétaires sans remise en cause fondamentale des objectifs, du moins si l'on considère qu'aucune autre diminution de crédits ne viendra frapper ces programmes après 1998. S'il n'en était pas ainsi, la poursuite de la modernisation de nos deux composantes et la mise en oeuvre de la simulation se trouveraient alors incontestablement fragilisées.
1. L'impact des réductions de crédits en 1998 : des retards dans le développement des programmes
Même si elle ne conduit pas, à ce stade, à
remettre en cause les différents programmes en cours dans le domaine de
la dissuasion nucléaire, la diminution de 2,3 milliards de francs
opérée en 1998 par rapport au niveau de dotations attendues en
application de la loi de programmation entraînera des conséquences
importantes sur leur déroulement.
La Direction des applications militaires du CEA, dont les crédits
sont inférieurs de près de 600 millions de francs au montant
attendu,
fera essentiellement porter l'effort d'économies sur ses
activités " matières " et " armes ". Le
démantèlement de l'usine de production d'uranium enrichi de
Pierrelatte, qui devait démarrer en 1998 et durer six ans, sera
considérablement ralenti. L'activité de
récupération des matières nucléaires sera elle
aussi ralentie. Les programmes de recherche-amont seront réduits, ainsi
que les programmes de simulation effectués avec les matériels
actuels. Un certain nombre d'expérimentations (non nucléaires),
importantes pour la mise au point des charges de renouvellement, seront
repoussées.
En ce qui concerne la
FOST, l'économie demandée
représente environ 740 millions de francs,
dont près de 400
millions de francs sur le programme SNLE/NG, plus de 200 millions de francs sur
l'adaptation des SNLE/NG au futur missile M51, 100 millions de francs sur
l'entretien programmé des bâtiments et 40 millions de francs sur
l'adaptation opérationnelle du SNLE/NG. L'admission au service actif du
3ème SNLE/NG, le Vigilant, équipé de missiles M45, sera
décalée d'un an, de 2002 à 2003, et imposera le maintien
en service durant une année supplémentaire du Tonnant,
équipé de missiles M4. Le programme d'adaptation des SNLE-NG au
M51 fait l'objet d'un moratoire d'un an, qui ne remet pas en cause
l'échéance de remplacement du M 45 par le M 51 (2010). S'agissant
des SNLE de type Redoutable, un étalement sera opéré sur
leur adaptation opérationnelle, notamment dans le domaine de la
navigation et de la discrétion acoustique, et sur la mise en condition
opérationnelle, par une réduction des travaux et des rechanges.
Une
réduction de crédits de près de 450 millions de
francs sera également opérée sur le développement
du missile M 51
, par application d'un moratoire d'une année. Cette
mesure intervient alors que dans le cadre de la loi de programmation, une
économie de 20 % sur l'ensemble du programme avait déjà
été réalisée par le passage du programme M5 au M51.
Le moratoire appliqué en 1998 devrait, selon le ministère de la
Défense, rester
sans incidence sur le calendrier de mise en
service
, le développement étant réalisé dans un
temps plus court. On notera que le respect de cet objectif impliquera donc de
concentrer l'enveloppe de crédits sur une période plus
brève et, par conséquent, d'allouer à ce programme
à partir de 1999 des dotations supérieures à celles
prévues en programmation.
D'une manière générale, les économies
imposées ne 1998 ne font en réalité que reporter des
charges inéluctables, correspondant à des opérations qui
ne peuvent être purement et simplement annulées.
2. L'apparition d'incertitudes sur l'avenir des programmes nucléaires à long terme
Comme votre rapporteur l'a rappelé en début de
ce chapitre, les grands choix opérés en 1996 tendaient à
maintenir la crédibilité de la dissuasion nucléaire en
définissant deux objectifs à moyen terme : la modernisation puis
le renouvellement de nos deux composantes, la mise en oeuvre de la simulation,
moyen essentiel pour garantir la fiabilité et la sûreté des
armes futures.
Pour atteindre cet objectif, la
loi de programmation
avait défini
une
enveloppe financière
sur six ans, que votre commission des
Affaires étrangères, de la Défense et des Forces
armées avait alors considéré comme
" calculée au plus juste ",
en soulignant qu'elle
correspondait, pour la force de dissuasion, à un
seuil strictement
incompressible
.
De ce point de vue, même s'il ne faut observer pour le moment que
quelques " glissements " dans le déroulement de programmes
par
ailleurs maintenus,
l'importante ponction
, supérieure à
2,3 milliards de francs,
opérée en 1998 sur les crédits
de la dissuasion nucléaire constitue un signe très
négatif.
Pour votre commission, une réduction durable des crédits du
nucléaire, c'est-à-dire au delà de 1998, impliquerait une
remise en cause profonde de l'édifice bâti en 1996. En effet,
comment maintenir deux composantes, les moderniser et assurer le renouvellement
des armes tout en menant à bien le défi considérable
constitué par la simulation avec des ressources très
inférieures à celles prévues par la programmation ?
Certes, ces objectifs sont officiellement réaffirmés, mais pour
les atteindre, il faudrait qu'après les restrictions budgétaires
de 1998, le nucléaire retrouve en 1999 et au delà
l'intégralité des dotations inscrites dans la programmation.
Aussi les orientations de ce budget paraissent-elles inquiétantes, car
si elles n'étaient pas corrigées après 1998, le
financement de la dissuasion nucléaire atteindrait un nouveau palier peu
compatible avec la réalisation des programmes prévus dans notre
modèle d'armée.
Votre commission tient à rappeler avec force que le maintien de la
crédibilité de la dissuasion nucléaire exige la
modernisation et le renouvellement des deux composantes océanique et
aéroportée qui apparaissent plus que jamais
complémentaires. Il ne saurait davantage être question de
fragiliser le programme de simulation, enjeu essentiel pour l'avenir de la
dissuasion après l'arrêt des essais.
Aussi estime-t-elle que l'entorse très importante au respect de la loi
de programmation, dans un domaine aussi fondamental que la dissuasion
nucléaire, n'est pas acceptable si aucune garantie n'est apportée
sur l'évolution des crédits indispensables à la poursuite
des programmes après 1998.
CHAPITRE III -
L'ESPACE ET LE RENSEIGNEMENT
MILITAIRES
Cités par le livre blanc sur la Défense au premier rang des nouvelles capacités prioritaires de nos forces armées, le renseignement et le commandement sont désormais reconnus comme des fonctions déterminantes pour la prévention et la gestion des conflits. Le renforcement de ces fonctions se traduit par une priorité affichée en faveur du développement des programmes spatiaux militaires et des moyens humains du renseignement.
I. L'ESPACE MILITAIRE : UN DOMAINE STRATÉGIQUE QUI POURRAIT SOUFFRIR D'UNE INSUFFISANTE COOPÉRATION EUROPÉENNE
La loi de programmation a reconnu le rôle essentiel des
programmes spatiaux militaires de communication et d'observation, à la
fois pour garantir l'autonomie et la fiabilité des décisions et
pour assurer l'efficacité des actions de projection.
De fait, tout en ne représentant qu'un peu moins de 4 % des
dépenses d'équipement des armées, l'effort de la France
dans le domaine spatial militaire est très significatif, notamment par
rapport à celui des autres pays européens, même s'il reste
sans commune mesure avec le budget spatial militaire des Etats-Unis, environ
vingt-cinq fois supérieur.
La suprématie américaine dans ce domaine crucial souligne avec
plus d'acuité encore la
nécessité pour la France de
maintenir son effort
si elle souhaite préserver, pour
elle-même et pour l'Europe, l'autonomie que procurent les
équipements spatiaux.
Rappelons que la loi de programmation préservait l'enveloppe
consacrée à l'espace, représentant 20,7 milliards de
francs sur six ans soit près de 3,5 milliards de francs par an, et
retenait un double objectif : la poursuite et le perfectionnement du programme
de communication SYRACUSE d'une part, et d'autre part, le développement
en coopération d'un système d'observation global et
cohérent, efficace de jour comme de nuit et par tous temps, grâce
à l'association d'un satellite d'observation optique plus performant
(HÉLIOS II) et d'un satellite d'observation radar (HORUS).
Au regard de ces objectifs et du caractère stratégique de
l'équipement spatial, le
projet de budget pour 1998
apparaît comme un
signe inquiétant
. En effet,
les
crédits relatifs à l'espace se montent à 3,1 milliards de
francs et régressent de près de 200 millions de francs par
rapport au budget voté de 1997.
Ils se situent également
nettement en retrait du niveau envisagé par la loi de
programmation.
En dépit du caractère stratégique des programmes spatiaux
et du rôle moteur de la France pour leur développement en Europe,
l'espace n'est pas épargné par la réduction
générale des crédits d'équipement des armées.
Cette contraction de l'enveloppe se traduit inévitablement par des
mesures de moratoire ou d'étalement des programmes, mesures qui
reflètent aussi très largement les
difficultés de la
coopération
avec nos partenaires européens. A ce titre,
l'absence d'engagement allemand sur HÉLIOS II et surtout sur HORUS
s'avère gravement préoccupante pour l'avenir des programmes
spatiaux militaires d'observation.
Avant d'analyser les conséquences de la réduction des
crédits affectés à l'espace pour 1998, votre rapporteur
souhaite en effet rappeler l'absolue nécessité de parvenir
à poursuivre et à développer la coopération
européenne dans le domaine spatial militaire.
A. UN ENJEU MAJEUR DE SOUVERAINETÉ QUI PASSE PAR UNE COOPÉRATION EUROPÉENNE ACCRUE
L'acquisition de moyens spatiaux militaires constitue pour la France, et au-delà pour l'Europe, un enjeu majeur de souveraineté qui implique une coopération européenne beaucoup plus active. Cette dernière paraît aujourd'hui très affaiblie en raison du caractère de plus en plus hypothétique de la participation allemande aux programmes spatiaux d'observation .
1. Un enjeu majeur de souveraineté
Le rôle croissant des équipements spatiaux dans
la prévention ou la gestion des crises les rend indispensables à
tout pays ou tout ensemble de pays soucieux de préserver une
capacité d'action autonome.
Ceux-ci sont en effet nécessaires aux communications à longue
distance lors d'opérations de projection, les besoins
spécifiquement militaires concernant la couverture géographique,
la protection contre les agressions, le brouillage ou les interceptions
exigeant des moyens adaptés, même s'ils peuvent en partie
reprendre les caractéristiques des satellites civils.
Ils permettent surtout un développement considérable des
capacités d'observation, grâce à la liberté de
survol, à la faible vulnérabilité, à l'ampleur du
champ observé et à la fréquence élevée
d'observation. Ils améliorent la qualité de la documentation
militaire (cartographie et surtout sites sensibles et objectifs militaires) et
favorisent la surveillance d'un territoire que ce soit en temps de paix ou en
temps de crise. Ces observations sont rapidement remises à jour. Elles
permettent de connaître le positionnement des forces, de repérer
les objectifs et de guider les armes à longue portée.
Les équipements spatiaux militaires connaissent en outre d'autres
applications telles que l'écoute électromagnétique, qui
permet de détecter une activité militaire avant
l'éclatement d'une crise ou d'un conflit, la détection des tirs
de missiles (alerte avancée), les systèmes de localisation et de
navigation.
En raison de la capacité de décision et de l'autonomie d'action
qu'ils confèrent, les moyens spatiaux militaires constituent un
enjeu
majeur de souveraineté.
La France a pu en faire l'expérience
depuis le lancement de ses satellites d'observation HÉLIOS I en 1995,
car elle a pu se livrer à sa propre appréciation de certaines
situations, sans dépendre exclusivement de sources d'information
extérieures.
Toutefois, bien que sans équivalent en Europe, les moyens spatiaux
militaires français restent très modestes au regard de ceux des
Etats-Unis. On rappellera que le budget spatial militaire américain
représente annuellement environ 15 milliards de dollars, soit un
niveau 25 fois supérieur au budget français. La politique
américaine vise aujourd'hui à multiplier la puissance et
l'efficacité des moyens satellitaires en envisageant, au début du
siècle prochain, la mise en orbite de "constellations" de satellites
de
communication, d'observation ou d'écoute électromagnétique
qui amélioreront considérablement les performances dans le
domaine du renseignement et des transmissions.
Face à la puissance américaine dans le domaine spatial, il
importe de développer des capacités françaises et
européennes propres qui, sans rivaliser avec le niveau atteint par les
Etats-Unis, doivent permettre de préserver une certaine autonomie
stratégique. Malheureusement, l'association de l'Allemagne aux efforts
entrepris par la France et certains de ses partenaires européens,
paraît aujourd'hui compromise à court terme.
2. Une coopération européenne en panne faute d'engagement allemand
Votre rapporteur a souligné à plusieurs reprises
par le passé la nécessité d'une coopération
européenne accrue dans le domaine spatial, à la fois pour des
raisons financières (le coût des équipements, difficilement
supportés par un seul Etat), pour des raisons industrielles (le
renforcement de la synergie entre programmes civils et militaires dans le cadre
d'une industrie spatiale européenne consolidée) et pour des
raisons politiques (le rôle que peut jouer l'espace dans la
concrétisation d'une Europe de la défense).
En dehors du centre expérimental satellitaire de Torrejon (Espagne),
créé dans le cadre de l'UEO, il n'existe pas pour l'instant
d'initiative européenne d'envergure dans le domaine spatial militaire.
En revanche, plusieurs initiatives nationales ont débouché vers
des solutions de coopération bilatérale ou multilatérale
de nature à faciliter le financement et la mise en oeuvre des programmes.
Ainsi, le système d'observation optique HÉLIOS I, lancé
par la France en 1986, a-t-il été rejoint par l'Italie en 1987 et
l'Espagne en 1988.
Dans le domaine des satellites de télécommunication, le programme
SYRACUSE III, qui succédera à SYRACUSE II en 2005, devrait
être conduit en coopération franco-britannique, avec
éventuellement une participation allemande.
Enfin, l'accord intervenu le
7 décembre 1995
lors du
sommet
franco-allemand de Baden-Baden
devait jeter les bases d'une importante
coopération entre la France et l'Allemagne dans le domaine des
satellites d'observation. Outre une participation dans le programme
HÉLIOS II, l'Allemagne devait assurer la maîtrise d'oeuvre et
prendre en charge la plus grande part du financement du satellite d'observation
radar HORUS, complément indispensable des satellites d'observation
optique pour obtenir une capacité d'observation par tous les temps.
L'accord de Baden-Baden revêtait une portée politique importante,
car il rattachait l'Allemagne à l'Europe dans le domaine du
renseignement satellitaire, domaine dans lequel elle entretenait une relation
privilégiée avec les Etats-Unis. Il ouvrait par ailleurs de
vastes perspectives pour le développement futur de moyens spatiaux
européens, l'apport industriel et financier de l'Allemagne apparaissant
décisif, aux côtés de celui de la France, pour enclencher
une dynamique dans ce domaine.
Depuis lors, et malgré l'engagement personnel du chancelier allemand,
aucune décision concrète de confirmation de la participation
allemande à nos grands programmes spatiaux n'est intervenue.
Les implications financières de ces programmes et la possibilité
de recours aux moyens américains ont incité certains responsables
publics allemands à remettre en cause l'opportunité de construire
un système d'observation radar européen.
Officiellement, l'Allemagne n'a pas renoncé à s'associer aux
programmes HÉLIOS II et HORUS mais force est de constater qu'aujourd'hui
sa participation s'avère de plus en plus hypothétique.
Cette probable défection allemande rend désormais plus lointaines
les perspectives d'une Europe spatiale militaire et fragilise la
possibilité pour les européens d'acquérir des
capacités propres leur conférant une certaine autonomie
stratégique. Elle renforce au contraire l'hypothèse d'une
domination américaine plus affirmée encore.
B. UN BUDGET EN FORT RECUL
Avec 3,1 milliards de francs, les crédits relatifs
à l'espace inscrits dans le projet de budget pour 1998 régressent
de 5,6 % par rapport à 1997 et sont inférieurs de plus de 10 % au
niveau prévu par la programmation.
S'il ne remet pas en cause les programmes SYRACUSE et HÉLIOS, ce recul
traduit en revanche l'incertitude qui pèse désormais sur le
programme HORUS.
1. L'évolution générale des crédits
L'enveloppe consacrée aux programmes spatiaux par la
loi de programmation s'élevait à 20,7 milliards de francs sur 6
ans, soit 4 % des crédits d'équipement de la défense. Elle
incluait pour plus de 6,2 milliards de francs le financement des programmes de
télécommunications (2,2 milliards de francs pour SYRACUSE II, 4
milliards de francs pour SYRACUSE III) et pour plus de 11,6 milliards de francs
les programmes d'observation (2,8 milliards de francs pour HÉLIOS I, 6,4
milliards de francs pour HÉLIOS II et 2,4 milliards de francs pour
HORUS).
Le montant du budget spatial militaire devait représenter en moyenne 3,5
milliards de francs par an, et croître légèrement
d'année en année tout au long de la période. Il faut
observer que ce niveau consacrait un maintien des crédits par rapport
aux années antérieures, l'espace se trouvant de ce fait
préservé de la réduction générale des
crédits d'équipement.
Le projet de budget pour 1998 tranche nettement avec les orientations retenues
par la loi de programmation.
Crédits consacrés à l'espace (en millions de francs)
1997 |
1998 |
% |
|
Autorisations de programme |
3 407 |
2 790 |
- 18,1 % |
Crédits de paiement |
3 298 |
3 112 |
- 5,6 % |
Comme le montre le tableau ci-dessus, la diminution des
autorisations de programme est particulièrement forte et si celle des
crédits de paiement est plus modérée, le niveau est de
loin inférieur à celui prévu par la loi de programmation
(près de 3,5 milliards de francs, compte tenu des coefficients
d'actualisation).
On doit cependant se féliciter que conformément à la loi
de programmation, le budget spatial militaire ne supporte plus de contribution
au budget civil de recherche et de développement. Une dotation de 500
millions de francs a été inscrite à cet effet au titre VI,
pour la participation de la défense au financement de la recherche duale.
Pour l'essentiel, la diminution de crédits résulte du
moratoire d'un an décidé sur le programme HORUS
, en
l'absence de décision allemande. Le programme de satellite de
télécommunication SYRACUSE III sera ralenti et le programme de
surveillance de l'espace verra son lancement suspendu.
2. Les programmes de télécommunications SYRACUSE
Le programme SYRACUSE I, entré en service à
partir de 1984, a permis de doter les armées de capacités de
télécommunications par satellites.
Le
programme SYRACUSE II
visait à assurer la continuité du
service au delà de 1995, à étendre le réseau
à de nouveaux types de stations et à accroître la
protection d'un certain nombre de liaisons.
Mis en service en 1991, le système SYRACUSE II a définitivement
pris le relais de SYRACUSE I en 1995. Le lancement des deux derniers satellites
en décembre 1995 et en août 1996 permet de garantir la
continuité de service jusqu'en 2005
. A la fin de l'année
1997, l'ensemble des stations, au nombre d'une centaine contre 23 seulement
pour SYRACUSE I, aura été livré. Le programme fait l'objet
d'améliorations successives qui visent notamment à permettre une
meilleure interopérabilité avec les systèmes
alliés, notamment le système britannique SKYNET.
Le coût total du programme, y compris les compléments, est
évalué à 13,6 milliards de francs, 10,8 milliards de
francs ayant déjà été consommés.
Le projet de budget pour 1998 consacre 509 millions de francs de crédits
de paiement à SYRACUSE II.
Le
système successeur SYRACUSE III
doit remplacer en 2005 le
système SYRACUSE II. Il devra en outre accroître la
capacité de résistance d'un nombre important de liaisons aux
moyens de guerre électronique et étendre la zone de couverture,
tout en améliorant la cohérence interarmées et
l'interopérabilité avec nos alliés. La composante spatiale
devrait comprendre 4 ou 5 satellites. Le nombre de stations devrait passer
à près de 400 et leurs types seront diversifiés (notamment
petites stations tactiques).
En phase de faisabilité depuis 1993, le programme devrait prochainement
passer en phase de définition, de manière à respecter
l'échéance fixée pour le lancement du premier satellite
(2005).
Toutefois, les
différentes options de coopération
internationale
pour la réalisation de ce programme n'ont toujours
pas été tranchées.
Si une réalisation purement nationale demeure à l'étude,
le coût prévisible du programme et la recherche d'une meilleure
interopérabilité avec les alliés font privilégier
la recherche de partenaires.
L'option la plus probable
semble aujourd'hui consister en une
coopération trilatérale
(projet TRIMILSATCOM) entre la
France et le Royaume-Uni (dont les besoins sont complémentaires compte
tenu de la nécessité de remplacer SYRACUSE II et SKYNET) auxquels
se joindrait l'Allemagne.
Le retard pris dans les discussions relatives à la coopération
sur ce programme justifie la mise en place en 1998 de crédits d'un
montant inférieur à celui prévu en programmation
(255 millions de francs).
Dans l'hypothèse d'une coopération entre la France, le
Royaume-Uni et l'Allemagne, le coût budgétaire de SYRACUSE III se
monterait à
15,7 milliards de francs.
3. Les programmes d'observation optique HÉLIOS
Le
système d'observation optique HÉLIOS I
est opérationnel depuis octobre 1995. Il permet déjà
d'assurer les fonctions de base du renseignement spatial mais
ses
capacités sont limitées à l'observation de jour et par
temps clair.
Le programme d'observation optique HÉLIOS I a été
lancé par la France en 1986 mais l'Ialie en 1987, puis l'Espagne en 1988
se sont joints au programme à hauteur respectivement de 14,1 % et 7 % et
disposent d'un droit d'utilisation potentielle des images à due
concurrence. Le système inclut un module expérimental
d'écoute électromagnétique (EURACOM) qui est exclusivement
réalisé par la France.
Ce programme a été mené en liaison avec le programme civil
SPOT 4, les deux satellites utilisant une plate-forme commune.
Le premier satellite, HÉLIOS I A, est entrée en phase
opérationnelle en octobre 1995. Le second, HÉLIOS I B, est
disponible et stocké depuis fin 1996 en vue de la relève
d'HÉLIOS I A, qui doit normalement intervenir en 1999.
Le coût total du programme HÉLIOS I s'élève à
9,6 milliards de francs. Plus de 8 milliards de francs avaient
déjà été consommés au début de
l'année.
Le projet de budget pour 1998 inscrit un crédit de 557 millions de
francs au titre d'HÉLIOS I.
Le
système HÉLIOS II
doit normalement
permettre
d'assurer la continuité du service dès 2001
, en remplacement
du système HÉLIOS I.
Sa phase de définition a débuté en 1994 avec les objectifs
suivants :
· permettre l'observation de nuit grâce à une
capacité infrarouge
,
· améliorer les capacités de prise de vue et de
transmission des images afin d'en augmenter le nombre et de réduire les
délais d'acquisition de l'information,
· améliorer la résolution des images pour mieux
détecter les objectifs d'intérêt militaire.
Le système comporterait
trois satellites
dont le premier devait
normalement pouvoir être lancé dès 2001.
Comme HÉLIOS I, HÉLIOS II doit être réalisé
en coopération européenne. L'Italie et l'Espagne,
déjà partie prenantes dans le cadre d'HÉLIOS I ont bien
entendu été sollicitées. Le principe d'un
élargissement à l'Allemagne
de cette coopération a
été décidé au sommet franco-allemand de Baden-Baden
en décembre 1995 puis confirmé au sommet de Dijon en mai dernier.
Pour le moment, la participation de chacun de nos partenaires à ce
programme n'est pas clarifiée.
L'hypothèse d'un taux de coopération de 20 % dont 10 % pour
l'Allemagne et 10 % répartis entre l'Espagne et l'Italie, a
été retenue. Le coût global du programme étant
estimé à plus de 14 milliards de francs, la part incombant
à la France, dans cette hypothèse, dépasserait 11,2
milliards de francs.
Pour l'heure, la participation allemande paraît compromise. La France a
annoncé qu'elle poursuivrait le développement d'HÉLIOS II
tout en ménageant à l'Allemagne la possibilité de
rejoindre le programme ultérieurement.
La France a déjà consacré (fin 1996) près de 2
milliards de francs à HÉLIOS II. Les crédits inscrits au
budget 1997 pour ce programme se montaient à 1,049 milliard de francs et
ils passeront à 1,42 milliard de francs en 1998.
La
date de lancement du premier satellite a été
décalée de 6 mois
et si la non-participation allemande se
confirme, il faudra soit accroître significativement les dotations
consacrées à ce programme dans les toutes prochaines
années, soit revoir à nouveau la date du passage du relais entre
HÉLIOS I et HÉLIOS II.
4. Le programme d'observation radar HORUS menacé par l'absence de participation allemande
Le
programme d'observation radar HORUS
a
été conçu
en complément
du programme optique
HÉLIOS pour obtenir des images par tous les temps, même en cas de
couverture nuageuse, de jour comme de nuit, y compris sous des couverts
(fumée, camouflage), avec des possibilités de surveillance de
larges zones.
L'ensemble des avantages de l'observation radar est toutefois
contrebalancé par une plus grande difficulté
d'interprétation des images, si bien que
la référence
aux observations optiques demeure indispensable
.
Il existe donc une
très forte complémentarité entre
observation optique visible ou infrarouge et observation radar
, la fusion
de ces trois types d'images enrichissant considérablement l'information
et permettant le recueil des renseignements quelles que soient les conditions
sur le terrain.
Seule la mise en oeuvre du programme d'observation radar HORUS peut donc
permettre, associée au système HÉLIOS, de construire un
système d'observation spatiale militaire complet et cohérent.
Le programme HORUS, qui comporterait le lancement de trois satellites à
partir de 2005, devait faire l'objet d'une coopération européenne
avec l'Allemagne et l'Italie. Le principe d'une répartition de la charge
industrielle à hauteur de 60 % pour l'Allemagne et de 40 % pour la
France avait été retenu au Sommet de Baden-Baden. La
participation d'autres partenaires éventuels devait s'imputer sur la
part des deux pays, de manière à respecter la proportion 60 %/40
% entre la France et l'Allemagne. Dans la perspective d'une participation
italienne, l'Allemagne assurant la maîtrise d'oeuvre et prenant à
sa charge la plus grosse part du financement, la France n'aurait financé
le programme qu'à hauteur du tiers et l'Italie du cinquième.
L'absence de confirmation de l'engagement allemand a d'ores et
déjà conduit à appliquer un
moratoire sur ce
programme
, si bien que le lancement du premier satellite interviendrait au
mieux en 2006.
Le projet de budget tire les conséquences de cette situation et
n'inscrit que 30 millions de francs au titre du programme HORUS.
Si l'Allemagne renonçait définitivement à sa
participation, on ne voit pas comment ce programme pourrait être
maintenu, sinon dans une version profondément remaniée et revue
à la baisse.
II. LE RENSEIGNEMENT : DES MOYENS HUMAINS ACCRUS
La priorité accordée au renseignement, sous
toutes ses formes, suppose que le développement de nouveaux moyens
techniques tels que les satellites d'observation, s'accompagne d'un
renforcement du potentiel humain et matériel des services chargés
de recueillir, de traiter et d'exploiter l'information.
Le projet de budget prévoit une diminution globale des moyens
affectés au service de renseignements mais celle-ci résulte plus
d'une baisse des crédits d'équipement, notamment des
dépenses d'infrastructure, que d'une baisse des moyens de
fonctionnement, ceux-ci progressant légèrement.
Votre rapporteur analysera l'évolution des moyens des différents
services concourant au renseignement avant d'évoquer une nouvelle fois
la question de l'implication du Parlement dans le domaine du renseignement.
A. L'ÉVOLUTION GÉNÉRALE DES CRÉDITS
Le "bleu" budgétaire regroupe dans un agrégat
"Renseignement" les crédits alloués à la Direction
générale de la sécurité extérieure et
à la Direction de la protection et de la sécurité de
défense.
Pour 1998, ces crédits s'élèvent à
1,367
milliard de francs,
soit une
diminution de 5,1 %
par rapport au
budget voté de 1997.
Evolution des crédits relatifs au renseignement
(en millions de francs)
1997 |
1998 |
% |
|
Personnel
|
574,802
|
602,377
|
+ 4,8
|
Total titre III |
788,869 |
806,044 |
+ 2,2 |
Titre V |
651,000 |
561,000 |
- 13,8 |
Total |
1 439,869 |
1 367,044 |
- 5,1 |
Il faut toutefois observer que ces chiffres ne concernent,
s'agissant de la DPSD, que les dépenses hors rémunération
et charges sociales.
Par ailleurs, la Direction du Renseignement Militaire (DRM), rattachée
à l'Etat-major des armées, n'est pas incluse dans cet ensemble.
B. LES MOYENS DES DIFFÉRENTS SERVICES DE RENSEIGNEMENT
Votre rapporteur évoquera successivement la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), la direction de la protection et de la sécurité de défense (DPSD), la Direction du renseignement militaire (DRM) et la délégation aux affaires stratégiques (DAS).
1. La direction générale de la sécurité extérieure (DGSE)
Les crédits de la
DGSE
se monteront à
1 296 millions de francs
en 1998 contre 1 362 millions de francs en
1997, soit une
diminution de 4,9 %.
Les
dépenses ordinaires
, qui se monteront à 762 millions
de francs,
progressent de 2,6 %,
la réduction de 4,8 % des
crédits de fonctionnement courant (159 millions de francs) étant
contrebalancée par l'augmentation de 4,8 % des crédits de
rémunération et charges sociales (602 millions de francs), en
raison de l'augmentation des effectifs.
Les
dépenses en capital
s'élèveront à 534
millions de francs, soit
13,9 % de moins qu'en 1997
. Les
crédits destinés aux fabrications (399 millions de francs)
baissent de 6,1 % mais ce sont surtout les crédits d'infrastructure (135
millions de francs) qui diminuent le plus fortement, puisqu'ils seront
inférieurs de 30,8 % et de 60 millions de francs à ceux de 1997.
En ce qui concerne
les effectifs
, ceux-ci
progressent de 2,2 %
et
atteindront 4 045 personnes en 1998. La loi de programmation a retenu le
principe d'une augmentation régulière des effectifs, qui
devraient se situer autour de 4 300 personnes en 2002. Cette augmentation
devrait essentiellement s'effectuer par un accroissement des postes
occupés par des personnels civils. Ceux-ci représentent
déjà les deux tiers des effectifs de la DGSE et leur proportion
devrait dépasser 70 % d'ici 2002.
L'année 1998 verra la création de 65 emplois civils et de 22
emplois de militaires. Les effectifs seront donc répartis entre
2 714 civils et 1 331 militaires, dont 166 appelés du
contingent.
Votre rapporteur précise que les corps de fonctionnaires de la DGSE ne
sont pas régis par le statut général de la fonction
publique mais par un dispositif spécifique.
En ce qui concerne les crédits d'équipement, on ne peut que
constater que leur baisse brutale risque de peser sur le déroulement du
programme de réalisation de nouveaux centres d'interception et sur les
travaux d'extension du siège de la direction, sur le site de la caserne
Mortier, travaux qui avaient été évalués à
380 millions de francs sur la durée de la programmation.
2. La direction de la protection et de la sécurité de défense (DPSD)
Les crédits dévolus à la
DPSD
,
hors rémunérations et charges sociales, accuseront une baisse
sensible en 1998, passent de 77,26 à 70,96 million de F, soit une
diminution de 8,2 %.
Les crédits de fonctionnement courant passent de 46,26 à
43,96 millions de francs (- 5 %). Les crédits d'équipement
du titre V passent de 31 à 27 millions de francs (- 12,9 %) et sont
essentiellement consacrés au plan d'équipement informatique de la
direction, qui a été revu à la baisse.
En ce qui concerne les
effectifs
, ceux-ci se situaient depuis plusieurs
années autour de
1 620 personnes
(1 360 militaires et 258
civils en 1997). La professionnalisation devrait se traduire par une
déflation globale du nombre des personnels, par un réexamen de
l'organisation territoriale pour prendre en compte la nouvelle
répartition des états-majors et des grands commandements, par le
remplacement partiel des appelés du contingent (247 en 1997) par des
engagés volontaires et des personnels civils et par un recours accru
à la sous-traitance, notamment dans les domaines touchant au secteur
(gardiennage, nettoyage). En revanche, la professionnalisation ne modifiera pas
les missions dévolues à la DPSD en matière de protection
des informations, des personnes, des matériels et des installations de
la défense.
3. La direction du renseignement militaire (DRM)
Les crédits alloués à la DRM, hors
rémunérations et charges sociales, s'établiront à
81,975 millions de francs en 1998 contre 83,475 millions de francs en 1997,
soit une
diminution de 1,8 %
de budget à budget.
Les
crédits de fonctionnement
inscrits au titre III
destinés à la DRM et aux organismes interarmées qui en
dépendent (centre de formation interarmées
d'interprétation de l'imagerie, centre d'information sur les
rayonnements électromagnétiques, unité interarmées
Helios, école interarmées du renseignement et des études
linguistiques) diminuent de 1,5 million de francs (- 4 %) et
s'établissent à 35,975 millions de francs pour 1998. Le quart
environ de ces crédits concerne des dépenses de
déplacements et transport.
Les
crédits d'équipement
du titre V
s'élèvent à 46 millions de francs et sont identiques
à ceux du budget voté en 1997. Ces crédits destinés
aux investissements de la DRM ne comprennent pas le financement de certains
programmes d'armement (SARIGUE et MINREM notamment) destinés à la
recherche électromagnétique du renseignement à vocation
opérationnelle et technique.
Conformément aux objectifs retenus par la loi de programmation, les
effectifs
de la DRM devraient augmenter régulièrement pour
atteindre environ 2 000 personnes en 2002.
En 1997, la DRM employait
1 689 personnes
réparties comme suit :
- 716 personnes à "l'administration centrale", dont 339 à Paris
et 377 à la base aérienne 110 de Creil,
- 347 personnes dans les trois organismes rattachés à la DRM,
également situés à Creil : 228 au CFIII (centre de
formation et d'interprétation interarmées de l'imagerie), 99 au
CIREM (centre d'information sur les rayonnements
électromagnétiques) et 20 à l'unité
interarmées Helios,
- 626 personnes réparties entre l'école interarmées du
renseignement et des études linguistiques à Strasbourg et les
détachements autonomes de transmissions.
Organisme récent, créé en 1992, la DRM cherche à
accroître progressivement les moyens techniques nécessaires
à la conduite de sa mission de renseignement, en particulier à
l'exploitation des différentes sources de renseignement. Dans le domaine
du renseignement d'origine image, le regroupement à Creil des
unités spécialisées des trois armées permet la
fusion des systèmes de photo-interprétation de chaque
armée, l'entrée en service du satellite Helios I A permettant en
outre d'accroître considérablement les capacités de
renseignement. Dans le domaine du renseignement d'origine
électromagnétique, le CIREM, lui aussi basé à
Creil, poursuit sa modernisation en vue de rattraper le retard français
dans ce domaine. L'installation d'une station d'interception est en cours de
réalisation en zone Antilles-Guyane.
Par ailleurs, l'effort se poursuit en vue d'améliorer les transmissions
et l'interconnexion de réseaux entre la DRM et ses organismes
interarmées associés. La transmission d'informations vers les
théâtres extérieurs fait également l'objet d'une
attention prioritaire.
4. La délégation aux affaires stratégiques (DAS)
Créée en 1992, la délégation aux
affaires stratégiques (DAS) ne constitue pas un service de renseignement
mais elle doit renforcer la capacité d'analyse et de réflexion
stratégique du ministère de la Défense.
La DAS assure la coordination et la préparation des données
liées à la réforme des armées et à la
politique de défense, elle participe à la mise au point des
positions internationales intéressant la défense, notamment en ce
qui concerne l'OTAN et l'UEO et elle suit, dans le domaine de la maîtrise
des armements et de la prolifération, les négociations relatives
au traité d'interdiction complète des essais nucléaires.
En matière de réflexion prospective, elle est chargée du
secrétariat du comité de coordination des études
prospectives de défense à caractère politico-militaire,
économique et social.
Les effectifs de la DAS comptent environ 110 personnes, dont 57 officiers,
sous-officiers et militaires du rang, 30 personnels civils de
catégorie A, 14 appelés du contingent et 10 personnels
civils de catégorie C.
Du point de vue financier, elle bénéficie de crédits de
fonctionnement gérés par la direction de l'administration
générale du ministère de la défense. Elle pilote un
programme d'études stratégiques représentant entre 15 et
17 millions par année qui est financé pour partie par des
crédits de la délégation générale pour
l'armement, et pour le restant par des subventions inscrites au titre VI et
allouées aux principaux instituts de réflexion stratégique
ayant passé convention avec le ministère.
C. UNE QUESTION TOUJOURS EN SUSPENS : L'IMPLICATION DU PARLEMENT DANS LE DOMAINE DU RENSEIGNEMENT
Votre commission a évoqué à plusieurs
reprises lors des précédents débats budgétaires la
question, qui lui semble importante, de l'implication du Parlement dans le
domaine du renseignement.
Sans revenir longuement sur ce sujet (cf. avis n° 80, tome IV, 1995-1996,
pages 81-82 et page 98, avis n° 89, tome IV, 1996-1997, pages 61 à
66), votre rapporteur souhaite simplement rappeler que sans mésestimer
la spécificité du renseignement, dont l'efficacité suppose
la confidentialité, la discrétion et le secret, cette
démarche s'inscrit dans le
souci de conforter une activité
reconnue à juste titre comme prioritaire dans le nouveau contexte
stratégique.
Il apparaît en effet nécessaire de ne pas
laisser le Parlement à l'écart d'une activité essentielle
pour la sécurité du pays, mais plus encore de
contribuer
à une meilleure prise de conscience du rôle éminent du
renseignement
dans notre politique de défense.
Votre rapporteur avait évoqué l'an passé les
différentes législations en vigueur chez nos principaux
partenaires, notamment les Etats-Unis, le Royaume-Uni et l'Allemagne, qui ont
instauré au sein de leur Parlement des structures habilitées
à connaître du fonctionnement des services de renseignement. Il
lui semble à nouveau qu'une démarche prudente mériterait
d'être également engagée dans ce sens en France, par
exemple sous la forme d'une structure parlementaire habilitée à
entendre les responsables des services et à recevoir des informations
périodiques sur leurs activités.
Le précédent premier ministre avait demandé
"au
secrétaire général de la défense nationale, qui
assure le secrétariat du comité interministériel du
renseignement (CIR), de lui proposer les procédures à même
d'améliorer l'information du Parlement"
(JO Questions Sénat,
31.10.96 p. 2837).
Votre rapporteur souhaite, sur ce point important, que l'actuel gouvernement
donne suite à cette démarche et effectue des propositions.
CHAPITRE IV -
LES AUTRES ACTIONS COMMUNES
I. LA DÉLÉGATION GÉNÉRALE POUR L'ARMEMENT
Avec plus de 29,6 milliards de francs prévus pour 1998,
le budget de la Délégation générale pour l'armement
représente à lui seul plus de la moitié des crédits
de l'ancienne section commune. Ce chiffre ne saurait cependant résumer
à lui seul la place de la DGA au sein du ministère de la
Défense. En effet, au travers des programmes d'armement dont elle suit
le déroulement, elle est appelée à gérer environ 80
% des crédits d'équipement de la Défense. C'est dire son
rôle pivot tant sur le plan budgétaire qu'au regard de la
satisfaction des besoins exprimés par les états-majors et du
devenir des industries de défense.
Il était par conséquent logique que la DGA se trouve au coeur de
la réforme des armées et de la politique de défense, tout
particulièrement dans un contexte de restrictions budgétaires
incitant à rechercher une réduction du coût des programmes
d'armement.
Votre rapporteur évoquera la mise en oeuvre de la réforme de la
DGA puis l'avenir de ses structures industrielles ainsi que de ses centres
d'expertise et d'essais, avant de commenter l'évolution des
crédits qui lui sont affectés en 1998.
A. UNE RÉFORME AXÉE SUR LA RATIONALISATION DE LA CONDUITE DES PROGRAMMES D'ARMEMENT
L'année 1997 a été marquée par la mise en oeuvre de la refonte institutionnelle de la DGA, autour d'un objectif ambitieux : renforcer la cohérence et réduire les coûts des programmes d'armement. Elle a vu également se poursuivre les efforts de la DGA pour renforcer la coopération européenne en matière d'armement.
1. La refonte institutionnelle de la DGA
Le décret du 17 janvier 1997 a mis en place la nouvelle
organisation institutionnelle de la DGA :
.
les
directions chargées des programmes
, jusqu'alors
réparties par " milieux " (terre, air, mer, espace) ont
été remplacées par
trois directions agissant ensemble
pour assurer la cohérence de la préparation et de la conduite des
programmes
: la direction des systèmes de forces et de la
prospective, qui pilote les actions de recherche, conduit les
développements technologiques communs, prépare les programmes et
conduit ceux relatifs aux missiles stratégiques et aux moyens
d'observation, de télécommunications et de renseignement ; la
direction des systèmes d'armes, qui conduit les programmes terrestres,
navals, aéronautiques et de missiles tactiques ; la direction des
programmes, des méthodes d'acquisition et de la qualité, qui
regroupe les compétences nécessaires pour mener à bien
les programmes (achat, qualité, maintien en condition
opérationnelle, etc ...).
.
les
activités industrielles, d'expertise et d'essais,
ont été nettement séparées et relèvent
de trois structures : la direction des centres d'expertises et d'essais, le
service de la maintenance aéronautique et la direction des constructions
navales, désormais entièrement vouée à ses
tâches industrielles, les tâches étatiques et les personnels
les exécutant relevant du service des programmes navals de la direction
des systèmes d'armes.
.
la politique industrielle et la coopération relèvent de
la direction de la coopération et des affaires industrielles alors que
le contrôle et la promotion des exportations sont assurés par une
direction des relations internationales.
.
les tâches d'organisation sont dévolues à la
direction de la gestion et de l'organisation et à la direction des
ressources humaines
Au terme de l'année 1997, la nouvelle organisation devra être
définitivement mise en place et les modes de fonctionnement ainsi que
les objectifs à moyen terme devraient être définis.
2. Un objectif ambitieux : accroître la cohérence et réduire les coûts des programmes d'armement
La DGA a engagé au cours de l'année les
premières mesures visant à renforcer la cohérence et
à réduire les coûts des programmes d'armement.
Le
renforcement de la cohérence des programmes d'armement
trouve
sa traduction dans plusieurs innovations.
Tout d'abord, l'
approche
par grandes fonctions militaires
(par
exemple : commandement, conduite, communications, renseignement)
ou par
grandes missions
(par exemple : frappe dans la profondeur, maîtrise
du milieu aéroterrestre, du milieu aéronautique, du milieu
aérospatial, mobilité stratégique et technique) est
désormais privilégiée. Elle présente un fort
caractère interarmées et permet de mieux mesurer la
complémentarité des différents systèmes, en vue
d'une cohérence d'ensemble. La DGA utilise désormais la notion de
" système de forces " et a créé dans cette
perspective la fonction nouvelle d'" architecte " de système
de forces " disposant d'un homologue opérationnel dans les
états-majors. Leur rôle consiste à analyser la
cohérence et l'opportunité du lancement des nouveaux programmes,
et à veiller, pour les programmes existants, à la
cohérence d'ensemble de leur déroulement, sur le plan des
échéances, du financement et des caractéristiques
techniques.
La DGA élabore ensuite un
plan prospectif à 30 ans,
en
s'appuyant notamment sur ces architectes de système de forces. Le plan
prospectif doit éclairer les choix sur les armes futures, définir
les nouveaux types d'armement à développer à cet horizon
ainsi que les technologies nécessaires.
Enfin, une importante refonte du traitement des
études amont
a
été opérée. Les crédits correspondants ont
été pour l'essentiel regroupés sous le contrôle de
la DGA. Les études-amont seront orientées en fonction du plan
prospectif à 30 ans et un plan d'études amont sera établi
en vue de mieux les adapter aux besoins futurs et de permettre une utilisation
plus optimale de leurs résultats par les utilisateurs.
En ce qui concerne le
coût des programmes
, l'objectif d'une
réduction de 30 % a été affiché, ce chiffre devant
être entendu comme représentant l'économie à
réaliser sur un programme défini mais dont la réalisation
n'a pas commencé. Les méthodes retenues consistent à
limiter le besoin de matériel et de système " au juste
nécessaire " pour l'exécution des missions des forces
armées, à utiliser dans la mesure du possible les normes, les
technologies et les standards civils, à renforcer la compétence
d'acheteur des cadres de la DGA, à réduire les délais de
développement, à recourir plus fréquemment à la
concurrence et à fixer aux industriels des objectifs de
productivité volontaristes, mais aussi à accroître la
politique des commandes pluriannuelles.
Lors de son audition par la commission, le délégué
général pour l'armement a précisé que sur la
centaine de programmes d'armement en cours, 78 avaient été
placés sous contrôle de gestion en vue d'obtenir un coût
inférieur à celui prévu lors de l'adoption de la loi de
programmation. L'objectif fixé est de réaliser 85 milliards de
francs d'économies sur les programmes se déroulant sur la
période de la planification, c'est-à-dire d'ici 2015. Selon le
délégué, les négociations avec les industriels et
les révisions de spécifications admises par les
états-majors auraient d'ores et déjà permis d'assurer
27,6 milliards de francs d'économies
sur ces programmes,
dont
7,4 milliards de francs identifiés sur la période de la
programmation
(1997-2002) et le restant sur la période 2002-2015.
3. Le renforcement de la coopération européenne
Le renforcement de la coopération européenne
constitue également l'un des objectifs majeurs de la DGA, à la
fois pour satisfaire les besoins croissants d'interopérabilité
des équipements et pour réduire le coût des programmes pour
les budgets nationaux tout en offrant un marché plus vaste aux
industriels européens.
Dans ce domaine, les évolutions ne peuvent être que lentes et
progressives.
La création, le 12 novembre 1996, de l'organisation conjointe de
coopération en matière d'armement (OCCAR) par l'Allemagne, la
France, l'Italie et le Royaume-Uni constitue à ce titre un
élément très positif. Cette organisation, ébauche
d'un agence européenne d'armement, entend favoriser une meilleure
complémentarité technologique et industrielle entre les pays
concernés et dépasser la notion de " juste retour "
industriel, apprécié programme par programme, au profit d'un
" juste retour " globalisé sur plusieurs années et sur
plusieurs programmes.
Dans un premier temps, les programmes de missiles Milan, Hot, Roland et
d'hélicoptère Tigre, issus de deux bureaux de programme
franco-allemands, seront rattachés administrativement à l'OCCAR.
Pourraient également être concernés ultérieurement
les programmes de radar de contrebatterie Cobra, le véhicule
blindé VBCI, le satellite de télécommunications Syracuse
III et éventuellement, si la coopération se confirme, les
programmes Hélios II et Horus.
L'OCCAR dispose déjà d'une structure réduite (30
personnes) installée à Bonn et dirigée par un
Français. Son fonctionnement implique qu'elle soit dotée de la
personnalité juridique, ce qui n'est pas encore le cas, afin qu'elle
puisse passer directement des contrats et recevoir des engagements pluriannuels
de la part des Etats.
B. L'AVENIR DES ACTIVITÉS D'EXPERTISE ET D'ESSAI ET DES ACTIVITÉS INDUSTRIELLES DE LA DGA
La réforme de la DGA touche également les différentes structures au travers desquelles elle intervient comme opérateur, dans le domaine des expertises et des essais et dans le domaine industriel, principalement de construction navale.
1. Les centres d'expertise et d'essais
Les
23 centres
de recherche et d'études,
d'évaluation, d'expertise et d'essais qui dépendaient jusqu'alors
de diverses direction ont été
regroupés
depuis
cette année au sein de la Direction des centres d'expertise et d'essais,
de manière à séparer nettement ces organismes,
considérés désormais avant tout comme des prestataires de
service, des directions chargées de la conduite des programmes.
Dans le cadre de l'objectif de diminution de 30 % du coût d'intervention
de la DGA, les centres d'expertise et d'essais se voient assigner une
amélioration de leurs performances et de leur productivité et un
effort de réduction des coûts.
Les effectifs, actuellement au nombre de 12 000 personnes pour l'ensemble des
centres, devraient diminuer, notamment par utilisation des procédures de
reclassement dans les armées.
Un effort important est également demandé aux centres d'expertise
et d'essais pour réduire leurs dépenses de fonctionnement courant
et pour mettre en commun leurs moyens et regrouper les approvisionnements.
D'une manière générale, le regroupement des centres sous
l'autorité d'une direction unique doit permettre une meilleure
coordination de leurs moyens, de leurs investissements et de leurs
activités.
Sur ce plan du rôle des centres d'expertise et d'essais, deux
orientations sont retenues :
- la contractualisation des relations entre les directions de programme de la
DGA et les centres, afin de mieux maîtriser le coût des prestations,
- la diversification des activités par la recherche de commanditaires
extérieurs à la défense, soit dans le secteur civil, soit
à l'étranger.
Enfin, le passage des centres d'expertise et d'essai sous compte de commerce
est évoqué sans que son principe soit actuellement
approuvé. Une telle décision entraînerait des
conséquences importantes pour des centres dont les missions
d'études au profit de l'Etat ne peuvent entièrement être
assimilées à de simples prestations de service.
2. Le service de la maintenance aéronautique
Depuis cette année, le service de la maintenance
aéronautique regroupe les trois ateliers industriels de
l'aéronautique de Bordeaux, Clermont-Ferrand et Cuers-Pierrefeu. Ces
ateliers assurent environ 40 % de la maintenance industrielle des
aéronefs militaires, et interviennent dès lors que celle-ci
requiert des moyens importants.
L'atelier de Bordeaux est spécialisé dans la maintenance de la
réparation des moteurs d'aéronefs, celui de Clermont-Ferrand dans
la maintenance et la réparation des aéronefs de l'armée de
l'air et des hélicoptères de l'armée de terre, et celui de
Cuers-Pierrefeu se consacre aux appareils de l'aéronautique navale.
Au 31 décembre 1996, les effectifs du service de la maintenance
aéronautique s'élevaient à 3 600 personnes, dont 1 190
à Bordeaux, 1 323 à Clermont-Ferrand et 1 087 à
Cuers-Pierrefeu. Au 30 juin 1997, ils avaient été ramenés
à 3 554 personnes, la diminution des effectifs du service étant
liée à la réduction de format des armées mais aussi
à l'amélioration de la conception et de la fiabilité des
appareils.
Aussi les ateliers industriels de l'aéronautique sont-ils
confrontés à une diminution de leur plan de charge.
3. La Direction des constructions navales
La mise en oeuvre de la réforme de la Direction des
constructions navales (DCN) s'est poursuivie en 1997.
La séparation des activités dites " étatiques "
et des activités industrielles a été menée à
bien. La DCN assure désormais l'ensemble des fonctions industrielles de
construction navale alors que les fonctions de maîtrise d'ouvrage qu'elle
exerçait relèvent désormais de la direction des
systèmes d'armes, et plus précisément du service des
programmes navals. Par ailleurs, les centres d'expertise de la DCN sont
désormais rattachés à la Direction des centres d'expertise
et d'essais.
Cette séparation des activités industrielles et étatiques
se traduit par un transfert de personnels jusqu'alors inclus dans le compte de
commerce en zone budgétaire. Ce transfert touche 2 026 personnes dont
856 ouvriers, 445 officiers, 50 sous-officiers, et 675 civils titulaires ou
contractuels.
L'
adaptation des effectifs au plan de charge
s'est poursuivie, par le
biais de départs anticipés, de dégagement des cadres pour
les ouvriers, de cessations anticipés d'activité pour les
fonctionnaires, de départs volontaires indemnisés, de
détachements et mises à disposition ou de mutations dans les
armées.
S'ajoutant aux départs naturels, ces mesures devraient permettre de
ramener l'effectif de la DCN à 19 800 personnes pour 1997
, soit
environ 2 000 de moins qu'au début de l'année.
Les mesures incitatives devraient concerner au cours de l'année 1 465
personnes et se répartir de la façon suivante : 459
dégagements de cadres, 21 cessations anticipées
d'activité, 157 indemnités de départ volontaire, 785
mutations dans les armées et 43 détachements et mises à
disposition.
S'agissant des mutations dans les armées et les services communs, au 30
septembre 1997, 1 125 dossiers de mutation avaient été
élaborés et 853 avaient été acceptés par les
organismes d'accueil, principalement la Marine.
Le fonds d'adaptation industrielle, imputé sur le budget de la Marine,
et doté de 327 millions de francs, a permis de financer le
dégagement de cadres (230 millions de francs), les départs
volontaires (50 millions de francs) et les mutations dans les armées (50
millions de francs).
A la date de rédaction du présent rapport, l'objectif de
diminution des effectifs de la DCN pour 1998 n'avait pas encore
été fixé et il dépendait à la fois des
perspectives d'évolution du plan de charge, des contrats à
l'exportation et d'éventuelles adaptations du dispositif de
formation-mobilité.
A cet égard, votre rapporteur souhaite souligner que les
mutations de
personnels des arsenaux vers les armées
, principalement la Marine,
ont été réalisées en nombre satisfaisant en 1997
mais risquent de s'avérer insuffisantes en 1998. En effet, on constate
une certaine distorsion entre les postes proposés dans les
armées, souvent pour remplacer les appelés du contingent, et les
qualifications des personnels de la DCN. Par ailleurs, ces postes peuvent
être géographiquement éloignés des
établissements de la DCN et l'on constate déjà que la
Marine n'a pu pourvoir des emplois proposés aux ouvriers des arsenaux
à Toulon ou à Paris. Fondées exclusivement sur le
volontariat, les mutations vers les armées pourraient donc être
plus difficiles en 1998, l'essentiel des potentialités ayant
été réalisé en 1997. Aussi faudrait-il sans doute
envisager une adaptation du dispositif à partir de l'an prochain.
Parallèlement à l'adaptation de ses effectifs, la DCN
redéfinit son mode de fonctionnement afin de le rapprocher de celui
d'une entreprise. L'aspect essentiel de cette évolution consiste
à contractualiser l'ensemble des projets avec le service des programmes
navals.
Enfin, l'un des objectifs majeurs de la DCN pour les années à
venir consiste à diversifier des activités et à
conquérir des marchés à l'exportation.
En ce qui concerne la diversification, une première expérience
est actuellement en cours avec la construction de plates-formes
pétrolières offshore.
La DCN a par ailleurs enregistré des
résultats significatifs
à l'exportation
, des contrats ayant été conclus ou
étant en cours de conclusion avec Taïwan pour la fourniture de
frégates proches du type La Fayette, avec l'Arabie saoudite pour une
frégate et des matériels de défense antiaérienne et
anti-sous-marine, avec la Norvège pour le nouveau système de
combat des patrouilleurs de la Marine norvégienne et avec le Chili pour
la fourniture de deux sous-marins à propulsion classique de type
Scorpène, réalisés avec le chantier espagnol Bazan.
La poursuite de cet effort à l'exportation est absolument indispensable
pour redresser la situation de la DCN et favoriser un plan de charge compatible
avec l'évolution des effectifs.
Votre rapporteur ne peut que vivement déplorer la décision
inscrite dans le projet de loi de finances rectificative pour 1997 de
reverser au budget général l'excédent financier de 1,4
milliard de francs
réalisé par la DCN sur le contrat de vente
de frégates à Taïwan. Cette mesure est critiquable à
plusieurs titres :
- elle pénalise la DCN alors que celle-ci est aux prises avec des
difficultés considérables liées à
l'évolution de son plan de charge,
- elle va à l'encontre du nécessaire encouragement de
l'exportation, en privant la DCN des fruits de ses succès sur les
marchés à l'étranger,
- elle provoque un déséquilibre financier, lié notamment
au fait que les bénéfices réalisés sur le contrat
concerné compensaient les pertes subies sur d'autres activités,
déséquilibre qu'il faudra bien redresser.
D'une manière plus générale, on peut s'étonner de
voir appliquer à un secteur en crise une pratique
généralement réservée aux entreprises publiques
dégageant d'importants bénéfices.
C. LE BUDGET DE LA DGA
Avec 25,6 milliards de francs en crédits de paiement, le budget de la DGA pour 1998 s'inscrit en hausse de 2,5 % par rapport à celui de 1997. Ce mouvement contraire à celui de l'ensemble du budget de la défense résulte d'importants transferts de crédits liés à la réforme de la DGA. Votre rapporteur évoquera l'évolution de ces crédits avant de détailler celle des effectifs et de mentionner les mesures prises par la DGA pour réduire son coût d'intervention.
1. Un budget marqué par d'importants transferts de crédits
Le montant des crédits alloués à la DGA
pour 1998 s'élève à 25,652 milliards de francs contre
25,030 milliards de francs en 1997, soit une augmentation de 2,5 %.
Les dépenses en capital des titre V et VI s'élèveront
à 18,949 milliards de francs, soit 0,6 % de plus qu'en 1997.
Les dépenses ordinaires s'élèvent à 6,702 milliards
de francs, soit 8,1 % de plus qu'en 1997.
Evolution des dépenses ordinaires de la DGA (en
millions de francs)
1997 |
1998 |
% |
|
Rémunérations et charges sociales |
4 043 |
4 637 |
+ 14,7 % |
Fonctionnement courant |
1 353 |
1 267 |
- 6,3 % |
Subvention de fonctionnement |
771 |
770 |
- 0,1 % |
Dépenses diverses |
32 |
28 |
- 11,5 % |
Total dépenses ordinaires |
6 199 |
6 702 |
+ 8,1 % |
La forte augmentation des dépenses ordinaires
résulte exclusivement de la réforme de la DCN, dont les
activités étatiques, désormais clairement
séparées des activités industrielles, sont prises en
compte par le budget alors qu'elles relevaient auparavant du compte de
commerce. Un
transfert de 2 026 emplois
a ainsi été
opéré du compte de commerce vers la zone budgétaire.
Cette " budgétisation de la DCN étatique ", augmente de
690 millions de francs
les dépenses ordinaires, dont 535 millions
de francs au titre des rémunérations et charges sociales et 135
millions de francs au titre du fonctionnement courant.
Abstraction faite de cette opération, c'est-à-dire à
paramètres constants, les dépenses ordinaires de la DGA auraient
diminué de 3 %, avec une augmentation de 1 % seulement des
rémunérations et charges sociales et une diminution de 16 % sur
le fonctionnement courant.
Evolution des dépenses en capital de la DGA
en millions de francs
1997 |
1998 |
||
Etudes
|
16 778 |
16 343 |
- 2,6 % |
espace |
2 977 |
2 786 |
- 6,4 % |
nucléaire |
11 526 |
10 819 |
- 6,1 % |
classique : |
2 275 |
2 737 |
+ 20,3 % |
Investissement |
1 314 |
1 323 |
+ 0,7 % |
Infrastructure |
96 |
99 |
+ 4,1 % |
Subvention d'investissement |
642 |
1 183 |
+ 84,3 % |
Total |
18 830 |
18 949 |
+ 0,6 % |
L'évolution des dépenses en capital est
également marquée par d'importants transferts de crédits :
- 190 millions de francs provenant du budget de la Marine et finançant
des investissements du service des programmes navals, l'ex DCN
" étatique ",
- 844 millions de francs représentant les crédits
d'études-amont désormais placés sous gouvernorat de la DGA
et provenant des trois armées,
- 500 millions de francs inscrits au titre VI et destinés à
être transférés au budget civil de recherche et
développement au titre de la recherche duale en matière spatiale.
A périmètre constant, les crédits d'équipement de
la DGA diminueront de 7,5 %.
Ce recul est particulièrement net pour les crédits
d'études, qui constituent l'essentiel des dépenses en capital de
la DGA. Votre rapporteur a déjà analysé l'impact de ces
réductions de crédits, très supérieures à ce
que prévoyait la loi de programmation, dans le domaine de l'espace
(moratoire sur le programme Horus notamment) et du nucléaire
(réduction des crédits de la Direction des applications
militaires du CEA, décalage sur le développement du M51).
2. L'évolution des effectifs de la DGA
Le tableau suivant retrace l'évolution des effectifs
budgétaires de la DGA de 1997 à 1998, en englobant les personnels
relevant du budget de l'Etat proprement dit, et ceux relevant du compte de
commerce.
1997 |
1998 |
||
Officiers |
3 500 |
3 434 |
- 1,9 |
Sous-officiers |
903 |
899 |
- 0,4 |
MDR |
40 |
20 |
- 50,0 |
Contingent |
825 |
625 |
- 24,2 |
Total militaires |
5 268 |
4 978 |
- 5,5 |
Titulaires |
9 696 |
9 574 |
- 1,3 |
Contractuels |
4 928 |
4 879 |
- 1,0 |
Ouvriers |
23 996 |
22 646 |
- 5,6 |
Total civils |
38 620 |
37 099 |
- 3,9 |
Total général |
43 888 |
42 077 |
- 4,1 |
L'effectif global, qui avait diminué de 5,3 % en 1997,
sera réduit de 4,1 % en 1998, soit une suppression de 1 811 postes, dont
1 370 postes d'ouvriers.
L'application de la loi de programmation entraîne la suppression de 395
postes, la volonté de réduire le coût d'intervention de la
DGA se traduisant par une déflation supplémentaire de 59 postes
d'officiers et de 1 350 emplois en zone compte de commerce.
La professionnalisation va entraîner la disparition de la ressource en
appelés, constituée de scientifiques du contingent, mais la DGA
compte y faire face sans difficulté grâce au maintien à un
niveau proche du niveau actuel des effectifs de cadres civils et militaires.
La budgétisation des activités étatiques de la DCN a
entraîné le passage en zone budgétaire de 2 026 postes
relevant jusqu'alors du compte de commerce de la DCN.
Le tableau suivant fournit la répartition des effectifs entre la zone
budgétaire et les comptes de commerce.
Répartition des effectifs de la DGA
Zone budgétaire |
/97 |
Comptes de commerce |
/97 |
|
Militaires |
4 165 |
+ 5,5 % |
813 |
- 38 % |
Civils titulaires et contractuels |
10 117 |
+ 5,2 % |
4 336 |
- 13,5 % |
Ouvriers |
5 755 |
+ 17,5 % |
16 891 |
- 11,6 % |
total |
20 037 |
+ 8,5 % |
22 040 |
- 13,3 % |
A périmètre constant, indépendamment du transfert en zone budgétaire des personnels du service des programmes navals, les effectifs en zone budgétaire auront diminué de 2,4 % et ceux relevant des comptes de commerce de 5,4 %.
3. La réduction du " coût d'intervention " de la DGA
La DGA s'est fixé comme objectif de réduire son
" coût d'intervention ", notion économique qui retrace
le coût de ses structures permanentes et des moyens mis en oeuvre pour
assurer leur fonctionnement.
Défini dans le cadre du contrôle de gestion mis en place par la
DGA, le coût d'intervention ne concerne pas les activités
industrielles de la DGA mais seulement ses activités étatiques,
c'est-à-dire celles des services de programmes, des directions centrales
et des centres d'expertise et d'essais.
Certains de ces coûts ne sont pas supportés par le budget de la
DGA (personnel mis à disposition, prestations reçues en
fonctionnement et en investissement).
Ainsi défini, le coût d'intervention de la DGA
s'établissait à 7,4 milliards de francs en 1996 (dont environ 3
milliards de francs pour la réalisation d'essais au profit des
programmes d'armement), ce qui représentait une diminution de 5 % en
francs constants par rapport à 1995. Il devait être ramené
à 7 milliards de francs (- 5,4 %) en 1997, l'objectif étant de
parvenir à 6,6 milliards de francs en 1998.
Les mesures envisagées touchent :
- les dépenses de rémunérations et charges sociales (53 %
du coût d'intervention), par une poursuite de la réduction des
effectifs grâce aux départs anticipés et à des
mutations vers les armées,
- les dépenses de fonctionnement (31 %) par le regroupement des moyens
de soutien sous la responsabilité unique de l'établissement
central de soutien et par la redéfinition de la politique d'achats de
fonctionnement,
- les dépenses d'investissement (16 %), par un programme
d'économies sur l'informatique et par un contrôle
centralisé des investissements.
II. LE SERVICE DE SANTÉ DES ARMÉES
Service de soutien indispensable à l'activité
des forces, le service de santé des armées se situe, à
plusieurs titres, au coeur de la réforme des armées. Il est
touché de plein fouet par la professionnalisation, qui implique la
disparition de l'apport important en personnel médical jusqu'alors
fourni par le contingent. Il doit mener une profonde restructuration, qui se
traduit notamment par la fermeture de plusieurs établissements
hospitaliers. Enfin, sa participation croissante aux opérations
extérieures souligne la réorientation de ses missions vers le
soutien de la projection des forces.
La période de transition allant jusqu'en 2002 exige donc de profondes
mutations et s'avérera particulièrement délicate pour le
service de santé.
Dans ce contexte, les crédits afférents au service de
santé pour 1998 connaissent une
diminution brutale de près de
15 %,
tant en moyens de fonctionnement que d'équipement. Rendue
possible, aux yeux du gouvernement, par l'évolution des ressources
provenant de l'activité hospitalière et dont le service de
santé dispose par ailleurs grâce à un fonds de concours,
cette contraction importante des crédits budgétaires risque
cependant de pénaliser le service au moment où il traverse une
phase d'adaptation complexe.
A. UN SERVICE CONFRONTÉ À UNE PROFONDE MUTATION
L'évolution du service de santé au cours des prochaines années sera marquée par une mutation profonde perceptible au niveau des effectifs, de l'organisation et des missions.
1. Les effectifs : la nécessité d'une politique active de recrutement
La loi de programmation militaire prévoit une
diminution de 27 % des effectifs du service de santé des armées,
qui doivent passer de 18 451 personnes en 1996 à 13 509 personnes en
2002, cette diminution résultant de la suppression du service national.
Le niveau d'effectifs prévu en 2002 doit permettre le soutien
simultané d'une force terrestre de 30 00 hommes, d'une base
aérienne projetée et d'un groupe aéronaval sur un
théâtre, alors que, sur un second théâtre, un
groupement de forces plus limité pourra être engagé.
Le tableau ci-dessous retrace les prévisions d'évolution des
effectifs d'ici 2002.
Prévision d'évolution des effectifs du service
de santé d'ici 2002
1996 |
1997 |
1998 |
2002 |
|
Officiers |
3 447 |
3 453 |
3 455 |
3 406 |
Sous-officiers |
3 798 |
3 935 |
4 049 |
3 914 |
MDR engagés |
10 |
50 |
100 |
240 |
Civils |
6 253 |
6 128 |
6 077 |
5 710 |
Appelés et volontaires |
4 943 |
4 050 |
3 000 |
239 |
TOTAL |
18 451 |
17 616 |
16 681 |
13 509 |
En ce qui concerne les effectifs d'officiers l'évolution est retracée par le tableau suivant.
Evolution des effectifs d'officiers du service de santé
1996 |
1997 |
1998 |
2002 |
|
Médecins |
2 303 |
2 330 |
2 356 |
2 412 |
Pharmaciens |
255 |
255 |
255 |
208 |
Vétérinaires |
48 |
53 |
59 |
83 |
Dentistes |
0 |
0 |
0 |
58 |
OCTA * |
398 |
390 |
384 |
339 |
MITHA officiers ** |
253 |
245 |
231 |
179 |
Aumôniers militaires |
183 |
173 |
163 |
120 |
Officiers de l'armée de terre |
7 |
7 |
7 |
7 |
Total officiers |
3 447 |
3 453 |
3 455 |
3 406 |
* officiers des corps technique et administratif de la
santé
** militaires infirmiers et techniciens des hôpitaux des armées
On rappellera qu'en 1996, les appelés du contingent fournissaient
38 % des emplois de niveau officier, soit 27 % des médecins, 63 %
des pharmaciens, 75 % des vétérinaires et 92 % des dentistes (24
chirurgiens dentistes officiers d'active étaient employés sur des
postes de pharmacien).
La suppression du service national implique donc la mise en oeuvre d'une
nouvelle politique de recrutement.
La
création d'un corps de chirurgiens dentistes
est rendue
indispensable par la disparition des 256 postes budgétaires des
dentistes du contingent. Aux 24 postes d'officiers de réserve en
situation d'activité (ORSA) actuellement réalisés dans le
cadre du statut des pharmaciens, qui seront transformés, s'ajouteront 34
postes supplémentaires pour porter à 58 l'effectif du nouveau
corps en 2002. Un plan de recrutement prévoit l'étalement des
recrutements jusqu'en 2002, à raison de 5 à 6 postes par an, ces
postes étant partagés entre les établissements
hospitaliers et les forces. La santé dentaire dans les armées
sera prise en charge à la fois par les chirurgiens dentistes des forces
et des hôpitaux sur une base territoriale. Le recrutement s'effectuera
prioritairement par le biais des officiers de réserve servant en
situation d'activité (ORSA), avec possibilité
d'intégration ultérieure, ainsi que parmi les
élèves des écoles du service de santé.
Les fonctions de vétérinaire-biologiste sont elles aussi
largement assurées par les appelés, si bien qu'un recrutement
sera opéré soit auprès de volontaires
diplômés, soit en école de formation initiale pour
compléter les effectifs du corps d'officiers d'active déjà
existant.
Quant au remplacement des
médecins
appelés du contingent,
il impliquera un recrutement diversifié. Le recrutement sur concours
interviendra tant après le baccalauréat, qu'au début de
chaque cycle et, enfin, auprès de médecins déjà
diplômés d'Etat. Le recrutement sur titre, soit sous contrat, soit
sous statut d'ORSA, sera également maintenu car il permet de pourvoir
rapidement aux besoins spécifiques du service.
Votre rapporteur tient à souligner que ces recrutements doivent
être suffisamment ciblés pour atteindre deux objectifs :
- assurer le soutien des forces en maintenant l'encadrement médical des
forces et en renforçant les spécialités
hospitalières nécessaires au soutien de la projection, en premier
lieu la chirurgie et l'anesthésie-réanimation,
- garantir le maintien du niveau des hôpitaux des armées, tant
pour des exigences de qualité des soins et de sécurité que
pour conserver la clientèle libre qui apporte au service de santé
des ressources financières à peu près équivalentes
aux ressources budgétaires.
Enfin, la disparition du service national impose une augmentation des
personnels paramédicaux, ceux-ci étant désormais
formés dans une école unique, l'école des personnels
paramédicaux des armées.
2. L'organisation : un format profondément remanié
La restructuration du service de santé concerne tant sa
présence au sein des forces, que l'organisation hospitalière et
le ravitaillement sanitaire.
En ce qui concerne le
soutien sanitaire intégré aux
armées
, les nouvelles orientations sont les suivantes :
.
dans l'armée de terre, les services médicaux des
régiments projetables comporteront un médecin par unité
élémentaire de combat, et le soutien médical en
opérations se traduira par la professionnalisation du 1er
régiment médical, renforcé de deux hôpitaux mobiles
de campagne, et par la création d'une unité composée de
quatre bataillons médicaux.
.
dans l'armée de l'air, de trois à cinq médecins
sont planifiés par base, selon l'importance de celles-ci et leurs
charges spécifiques (aptitude du personnel navigant,
sécurité des vols, médicalisation des évacuations
sanitaires par voie aérienne),
.
dans la Marine, les conditions d'isolement du soutien médical
détermineront les plans d'armement des bâtiments en personnels
médicaux.
S'agissant des
hôpitaux des armées
, le modèle retenu
pour 2002 prévoit une réduction de 4 500 à 3 400 du nombre
de lits en métropole, ces lits se répartissant entre 9 centres
hospitaliers et un centre de rééducation.
Après la fermeture du centre hospitalier des armées de Bourges en
1993, le service de santé compte actuellement 17 établissements,
dont 9 hôpitaux d'instruction. Le nombre d'établissements sera
ramené à 14 d'ici la fin 1999, avec la fermeture des centres
hospitaliers des armées de Lille en 1998 et de Dijon et Strasbourg en
1999.
Enfin, la
réorganisation du ravitaillement sanitaire
a
été engagée, avec la fermeture en 1997 de la pharmacie
magasin du port de Toulon et de l'établissement de matériels de
mobilisation de Lyon. L'établissement central des matériels de
mobilisation de Bordeaux sera fermé en 1998.
3. Les missions : une priorité au soutien des forces de projection
Le service de santé des armées doit
prioritairement répondre aux besoins générés par le
soutien des forces en opérations.
La participation aux opérations extérieures au cours des
années récentes témoigne de l'importance de cette nouvelle
orientation mais aussi des difficultés auxquelles elle se heurte.
Au cours de l'année 1997, le soutien médical des forces
françaises engagées en opérations extérieures a
nécessité, en moyenne, près de 300 personnels
médicaux et paramédicaux.
Ce chiffre est certes sensiblement inférieur à l'engagement
requis en 1996 et l'optimisation des ressources constitue l'un des objectifs
recherchés par le service en liaison avec l'état-major des
armées. De même, le caractère multinational des
opérations doit permettre de jouer sur la complémentarité
des moyens des différents pays, ainsi que l'illustre
l'intégration d'une équipe chirurgicale française au sein
de l'hôpital allemand de Sarajevo et le déploiement d'un poste de
secours allemand à Mostar, avec la compagnie chirurgicale mobile
française.
Toutefois, le soutien des unités engagées dans des
opérations extérieures n'est possible que par
prélèvement de personnels sur les forces et sur les organismes
relevant du service de santé, notamment les hôpitaux.
On
considère en effet que le départ en mission d'une antenne
chirurgicale correspond à la mise en sommeil de l'équivalent d'un
centre hospitalier des armées. L'engagement simultané et durable
de plusieurs antennes chirurgicales réduit d'autant la capacité
des hôpitaux des armées à assurer leur mission de temps de
paix en métropole. Ainsi, au coût direct des opérations
extérieures en termes de rémunérations des personnels, de
dépenses de matériel, de médicaments, de transport et de
mise en condition des personnels, s'ajoute pour le service de santé un
coût indirect, lié à la réduction de son
activité hospitalière lorsque ses établissements se
trouvent privés d'une partie de leurs équipes chirurgicales.
B. UN BUDGET EN RECUL DE PRÈS DE 15 % EN 1998
Le budget du service de santé subira un recul de 14,6 % en 1998, qui va très au delà des simples conséquences de la réduction de son format. Ce recul traduit une nouvelle répartition entre les ressources budgétaires et les ressources provenant du fonds de concours, qui comporte un risque de fragilisation du service dans la délicate période d'adaptation qu'il traverse.
1. L'évolution générale des crédits
Le tableau ci-dessous retrace l'évolution des crédits du service de santé de 1997 à 1998.
Evolution des crédits du SSA (en millions de
francs)
1997 |
1998 |
% |
|
Rémunérations et charges sociales |
1 286,559 |
1 185,942 |
- 7,8 |
Fonctionnement |
753,239 |
556 ,309 |
- 26,1 |
Total titre III |
2 039,798 |
1 742,251 |
- 14,6 |
Equipements |
128,9 |
102,0 |
- 20,9 |
Infrastructures |
154 |
139 |
- 9,7 |
Total titre V |
282,89 |
241 |
- 14,8 |
Total général |
2 322,688 |
1 983,251 |
- 14,6 |
La diminution des crédits est de même ampleur en
ce qui concerne les dépenses en capital et les dépenses
ordinaires.
Pour les
dépenses en capital
, qui représentent
traditionnellement une faible part du budget du service de santé, le
recul est particulièrement net pour les dépenses
d'équipements (- 20,9 %), mais il atteint près de 10 % pour les
dépenses d'infrastructure.
La modernisation des installations du service et des formations sanitaires de
campagne sera affectée par cette réduction des ressources.
Les opérations prévues en 1998 concernent la poursuite des
équipements techniques modulaires, l'équipement du nouveau centre
de transfusion sanguine des armées de Clamart, la construction du bloc
technique de l'hôpital d'instruction des armées Robert
Picqué à Bordeaux et la reconstruction de la pharmacie centrale
des armées d'Orléans.
S'agissant des
dépenses ordinaires
, on assiste en 1998 à
une
diminution de 7,8 % des dépenses de rémunérations
et de charges sociales et de 26,1 % des crédits de fonctionnement
courant.
La stricte application de la " tranche 1998 " de la loi de
programmation a peu d'impact sur l'évolution des dépenses
ordinaires.
En effet, si la suppression de 1 050 emplois d'appelés entraîne
une économie de 17,5 millions de francs sur les crédits de
rémunérations et charges sociales, ceux-ci sont majorés de
18,9 millions de francs pour assurer les créations d'emplois
prévus en 1998 (3 officiers, 47 élèves, 50 MITHA
sous-officiers, 50 militaires du rang). En outre, la mensualisation de la solde
des élèves officiers entraîne une dépense
supplémentaire de 20 millions de francs par rapport à 1997 et un
crédit de 2,7 millions de francs est prévu pour la
rémunération de personnels vacataires.
Quant aux dépenses de fonctionnement courant, qui couvrent notamment
l'entretien et l'achat de matériels, le fonctionnement et l'entretien
immobilier ainsi que les dépenses d'alimentation, leur réduction
va très au delà de ce qu'impliquait la stricte application de la
loi de programmation.
La diminution considérable des crédits de dépenses
ordinaires du service de santé est essentiellement imputable à
une
mesure d'économies de 325 millions de francs
, qui s'applique
à hauteur de 150 millions de francs aux rémunérations et
charges sociales et de 175 millions de francs aux dépenses de
fonctionnement.
Présentée par le ministère de la Défense comme une
contribution à l'effort général de maîtrise des
dépenses publiques, cette mesure appliquée au service de
santé prendrait en compte
" l'évolution de la structure
de financement dont une part est assurée par des recettes externes de
cessions de prestations médicales
".
Ainsi, les recettes tirées de l'activité hospitalière du
service de santé, qui lui sont reversées par un fonds de
concours, compenseraient cette réduction des ressources
budgétaires.
2. Un risque de déséquilibre dans les ressources du service de santé
Le service de santé présente
l'originalité de fonctionner à partir d'une double
catégorie de ressources :
- les ressources budgétaires provenant des titres III et V du
ministère de la Défense,
- les produits d'un fonds de concours qui regroupe les recettes des services
hospitaliers, qu'ils tirent des prestations médicales
délivrées à leur clientèle.
La part des produits de l'activité hospitalière des
établissements militaires s'est accrue puis s'est stabilisée
à partir de 1993 pour représenter près de la moitié
des ressources du service de santé. Selon les indications fournies par
le bulletin du SIRPA Santé de juin 1997, le rapport entre les produits
des fonds de concours et l'ensemble des ressources du service était de
48,6 % en 1993, 47,93 % en 1994, 47,75 % en 1995, 48,27 % en 1996 et 48,98 %
selon les estimations effectuées pour 1997.
On observe donc une relative stabilité de la répartition entre
les ressources budgétaires et celles des fonds de concours.
La réduction de 325 millions de francs des crédits du service de
santé envisagée pour 1998 aura deux conséquences :
- la diminution de la part des crédits budgétaires,
désormais inférieure à 50 %, dans les ressources du
service de santé,
- une diminution globale, de l'ordre de 7 %, des ressources totales du service
de santé, qui ne pourrait être compensée que par une hausse
de l'activité hospitalière, assez peu probable dans un contexte
de limitation des dépenses de santé et de diminution du nombre
d'établissements.
Votre rapporteur considère
qu'il est particulièrement
inopportun de rompre l'équilibre entre les deux sources de financement
du service de santé, au détriment des ressources
budgétaires
, alors que ce service se trouve en pleine phase de
réorganisation et que les produits des fonds de concours,
désormais voués à assurer plus de la moitié des
dépenses, présentent un caractère éminemment
aléatoire.
Cette démarche, qui n'était absolument pas inscrite dans la loi
de programmation, présente deux risques :
- créer des difficultés dans le fonctionnement du service de
santé en 1998 en ajoutant aux contraintes budgétaires
déjà importantes qui lui ont été imposées
- amoindrir l'effet positif que joue la procédure des fonds de concours
dans la gestion des hôpitaux militaires, ceux-ci se trouvant de fait
privés d'une partie des fruits de leurs efforts.
III. LES AUTRES SERVICES COMMUNS
A. LE SERVICE DES ESSENCES DES ARMÉES
Chargé du ravitaillement des forces en produits
pétroliers, le service des essences est un
service interarmées
qui exerce son activité dans deux grands domaines :
. la cession des produits pétroliers aux armées et le soutien
logistique " carburants " des forces engagées en
opérations extérieures ou lors des manoeuvres et exercices,
. l'expertise dans son domaine de compétence technique
(définition des spécifications et homologation des produits
pétroliers nécessaires aux armées ; définition,
réalisation, gestion et soutien des matériels pétroliers ;
contrôle technique, notamment des véhicules de transport de
produits pétroliers).
La priorité du service des essences est actuellement de
dégager une forte capacité de projection sur les
théâtres d'opérations extérieures.
Initiées dès 1991, les restructurations engagées par le
service des essences se sont amplifiées avec la professionnalisation des
armées.
En ce qui concerne les
effectifs du service des essences
, la
professionnalisation du service s'accompagne d'une
" militarisation " accrue,
afin de répondre aux
nécessités opérationnelles qui résultent en
particulier de l'engagement du service dans les opérations
extérieures (70 à 100 personnes par an engagées
régulièrement dans les opérations extérieures
depuis 1990, avec des pointes temporaires sur plusieurs mois pouvant atteindre
170 personnes). Ainsi la totalité des postes d'appelés et le
tiers des postes de civils seront transformés en postes de militaires du
rang engagés d'ici 2002 (suppression des 639 postes d'appelés,
diminution de 906 à 610 des personnels civils ouvriers et augmentation
de 310 à 850 des postes d'engagés d'ici 2002). En 1998, le
service des essences supprimera 120 postes d'appelés et 65 postes
d'ouvriers, qui seront remplacés par 113 militaires du rang
engagés supplémentaires.
Les enseignements tirés des opérations extérieures
conduiront également à
redéfinir les matériels
dont dispose le service. Dans certaines conditions d'emploi, les ensembles
" tracteur/semi-remorque citerne " se sont
révélés peu adaptés. Le service des essences
souhaite disposer de matériels plus " rustiques "
utilisables
en métropole comme sur les théâtres extérieurs, et
interopérables avec les armées alliées. Il est ainsi
équipé depuis 1996 de véhicules nouveaux : un avitailleur
rustique, aérotransportable avec remorque et un camion citerne à
forte motricité et tous chemins pouvant tracter une remorque, dont les
derniers exemplaires seront livrés en 1998. L'armée de terre
devrait en outre obtenir livraison en 1998 d'un véhicule citerne sur
chassis TRM apte au ravitaillement des chars Leclerc.
L'adaptation du service des essences entraîne également une
profonde réorganisation de ses infrastructures.
La totalité des dépôts situés en Allemagne a
été fermée, ainsi que certains sites de métropole,
notamment ceux de faible capacité ou ceux dont la mise en
conformité avec les règles de protection de l'environnement
s'avère trop coûteuse. Le service des essences privilégie
la rénovation de certains sites, dotés de plus grandes
capacités et mis à niveau, et si possible raccordés
à des moyens de transport massif (oléoduc, voie ferrée).
Les moyens sont regroupés autour de pôles fonctionnels :
- la base pétrolière interarmées de Chalon sur
Saône, pour la formation et l'entraînement des personnels,
- un pôle de soutien technique par regroupement autour du magasin central
de Montereau des fonctions de réparation des matériels
exercées par les trois ateliers lourds du service.
En ce qui concerne le
budget du service des essences,
il
s'élèvera en 1998 à
526,1 millions de francs
contre
506,8 millions de francs en 1997, soit une
augmentation de 3,8 %.
Les crédits de rémunérations et charges sociales (216,9
millions de francs) progressent de 15,5 % en raison notamment des recrutements
de militaires du rang engagés, alors que les crédits de
fonctionnement courant restent stables (143,2 millions de francs).
Les crédits d'équipement représentent 166 millions de
francs et diminuent de 5,7 %, les crédits de fabrication (77 millions de
francs) diminuant de 20,6 % alors que les crédits d'infrastructure (89
millions de francs) progressent de 12,7 %.
B. LE SERVICE D'INFORMATION ET DE RELATIONS PUBLIQUES DES ARMÉES (SIRPA)
Service particulièrement actif et efficace pour
l'information au sein des armées comme en direction de
l'extérieur, le SIRPA doit actuellement s'adapter au nouveau contexte
créé par la professionnalisation et par la réforme des
armées.
La professionnalisation implique en effet la mise en oeuvre d'une
nouvelle
politique de communication
obéissant à plusieurs objectifs ;
- informer sur la réforme des armées, tant au sein du
ministère de la défense qu'auprès de l'extérieur,
- participer au succès des recrutements nécessités par la
professionnalisation, en présentant les différents métiers
de la défense,
- maintenir et renforcer les liens entre la nation et son armée, travail
plus que jamais nécessaire dans l'optique d'une armée
entièrement professionnelle qui ne saurait être coupée du
reste de la nation,
- optimiser l'organisation de la journée d'appel de préparation
à la défense instaurée par la loi sur le service national.
Par ailleurs, le SIRPA fonctionnant avec 40 % d'appelés du contingent,
un redéploiement de ses effectifs est indispensable. Il s'effectuera par
le recrutement de personnels civils et de militaires du rang engagés, le
recours à des volontaires et des réservistes, et l'appel à
la sous-traitance pour certains travaux non spécifiquement militaires.
En 1997, les effectifs réalisés du SIRPA et de
l'établissement cinématographique et photographique des
armées (ECPA) totalisaient 716 personnes (265 pour le SIRPA et 451 pour
l'ECPA), se répartissant en 40 % de militaires d'active ou sous contrat,
40 % de militaires appelés et 20 % de civils.
Pour 1998, le
budget du SIRPA
s'élèvera à 60,6
millions de francs contre 65,2 millions de francs en 1997, soit une diminution
de 7,1 %. Ces dotations ne comprennent par les rémunérations et
les charges sociales des personnels. Les crédits de fonctionnement
courant (47,6 millions de francs) diminueront de 5,2 %, les crédits
d'équipement et d'infrastructure (13 millions de francs) étant
réduits de 13,3 %.
Les principales actions engagées par le SIRPA sont les suivantes :
- construction du centre de consultation multimédia de l'ECPA, qui
devrait être achevée en 1998,
- mise en oeuvre d'un serveur défense INTERNET, opérationnel dans
les premiers mois de 1998,
- améliorations techniques de la radio Azur FM diffusant à
l'intention de troupes françaises en Bosnie,
- création d'un SIRPA anciens combattants.
C. LE CONTRÔLE GÉNÉRAL DES ARMÉES
Les moyens consacrés au contrôle
général des armées s'élèvent pour 1998
à 61,2 millions de francs, soit une diminution de 12,1 % par rapport
à 1997 essentiellement imputable à un recul de 12,5 % des
crédits de rémunération et charges sociales, alors que les
crédits de fonctionnement courant diminuent de 3,6 %.
Les effectifs de contrôle général restent fixés
à 160 personnes dont 16 civils et 144 militaires, une proportion
variable mais importante des membres du corps servant à
l'extérieur, au sein du ministère de la défense ou hors de
ce dernier, par voie de détachement ou de mise à disposition.
Les missions et études menées en 1997 ont principalement
porté sur la professionnalisation des armées et la
réorganisation de la défense ainsi que sur l'équipement
des armées.
CONCLUSION
Par leur hétérogénéité, les
crédits de l'ancienne section commune se prêtent mal à une
analyse d'ensemble. On peut toutefois remarquer que globalement, et une fois
neutralisés les effets des changements importants opérés
dans la nomenclature budgétaire, ces crédits suivent une
évolution comparable à celle de l'ensemble du budget de la
Défense pour 1998, à savoir, une légère progression
des dépenses ordinaires, en dépit de mesures d'économies
rigoureuses sur les crédits de fonctionnement courant, et un fort recul
des dépenses d'équipement, très inférieures au
niveau résultant de l'application de la loi de programmation.
De manière générale,
les motifs de satisfaction dans le
domaine des services communs sont rares.
On peut se féliciter de
l'accroissement des effectifs des services de renseignement,
même
si les moyens matériels affectés à ces mêmes
services ne suivent pas la même tendance. De même, il faut
reconnaître
l'ampleur des réformes entreprises par la
délégation générale pour l'armement,
dont il
faut souhaiter la réussite tant cet organisme pèse de
manière décisive sur la politique d'équipement des
armées. Tout au plus peut-on constater que la remise en cause de la loi
de programmation, du moins de son échéancier de financement,
brouille la vision claire et cohérente des programmes d'armement que la
DGA entend par ailleurs promouvoir.
Au titre des
motifs d'inquiétude,
votre rapporteur retiendra tout
d'abord
l'évolution défavorable des crédits du service
de santé,
dont le fonctionnement sera désormais
majoritairement tributaire des recettes, par définition
aléatoires, tirées de l'activité hospitalière de
ses établissements. Cette orientation paraît peu opportune au
moment où le service de santé opère une profonde
transformation de son organisation et doit faire face au départ des
nombreux appelés du contingent exerçant des fonctions
médicales.
La
réduction des crédits affectés à l'espace
est elle aussi inquiétante, car elle traduit
l'incertitude qui
pèse sur la poursuite des programmes spatiaux
d'observation, et
surtout du satellite radar Horus, du fait des réticences de plus en plus
perceptibles de nos partenaires allemands. La possibilité pour la
France, et pour l'Europe, d'acquérir un ensemble complet et
cohérent de moyens d'observation spatiale capable de garantir une
véritable autonomie stratégique reste encore incertaine.
C'est certainement dans le domaine de la
dissuasion nucléaire
que
réside
l'essentiel des aspects négatifs
de ce projet de
budget, en ce qui concerne l'ancienne section commune. Le recul des
crédits du nucléaire -près de 13 %- est beaucoup plus fort
que celui de l'ensemble du budget de la défense, si bien que l'on va
très au-delà de la réduction programmée des
dotations, telle que l'avait prévue la loi de programmation. Par rapport
aux grands objectifs définis en 1996 pour l'avenir de la dissuasion
nucléaire, qui demeure l'élément fondamental de la
stratégie de défense, les réductions de crédits
entraîneront des
décalages et des retards dans la
réalisation des programmes.
Cette orientation, si elle se confirmait
dans les budgets à venir, ne serait pas compatible avec la
poursuite
des deux grands objectifs assignés à notre dissuasion :
moderniser et renouveler nos deux composantes, mener à bien le
programme de simulation, garant de la fiabilité, de la
sûreté et donc de la crédibilité à long terme
de nos forces nucléaires. Il est clair que si à partir de 1999,
la dissuasion nucléaire ne retrouvait pas le niveau de crédits
prévu par la loi de programmation, ces objectifs ne pourraient
qu'être revus à la baisse, avec les conséquences que cela
impliquerait sur le niveau de notre appareil de défense. Dans le domaine
du nucléaire plus que dans tout autre, le non-respect de la loi de
programmation constitue un signe très inquiétant, qui, aux yeux
de votre rapporteur, rend ce projet de budget de la défense pour 1998
inacceptable.
EXAMEN EN COMMISSION
La commission des affaires étrangères, de la
Défense et des Forces armées a examiné le présent
avis lors de sa réunion du mercredi 5 novembre 1997.
A l'issue de l'exposé du rapporteur pour avis, Un débat s'est
ensuite engagé entre les commissaires.
M. Daniel Goulet a estimé qu'au travers de la forte réduction des
crédits du nucléaire risquait de se préparer une remise en
cause stratégique profonde de notre doctrine, qui devrait
nécessairement impliquer les plus hautes autorités de l'Etat.
M. Jacques Genton a rejoint les conclusions du rapporteur pour avis sur ses
craintes de mise en cause, pour l'avenir, des capacités
nucléaires de la France.
M. Jean Clouet a souhaité obtenir des précisions sur la
présence des militaires français à l'étranger,
notamment auprès de nos ambassades. Il a souhaité connaître
la part des ressources hospitalières dans les crédits du service
de santé et s'est inquiété de constater que celles-ci
allaient devoir contribuer de manière plus importante encore au
fonctionnement courant du service.
M. Charles-Henri de Cossé-Brissac a souhaité connaître le
montant des crédits d'équipement du service de santé.
M. Serge Vinçon a indiqué que des événements
récents l'avaient conduit à revoir sa position sur le rôle
du Parlement en matière de renseignement, qu'il lui apparaissait
effectivement utile de renforcer.
M. Xavier de Villepin, président, a souligné qu'à ses
yeux, le Parlement français, à l'image de tous ses homologues des
grandes démocraties, devait bénéficier d'une meilleure
information dans le domaine du renseignement. Il a estimé que la
probable défection allemande sur le programme Horus constituait un
indice inquiétant de la dégradation des relations entre la France
et l'Allemagne dans le domaine de la défense et il a jugé qu'elle
touchait un domaine fondamental pour l'autonomie stratégique de
l'Europe. Il a partagé les inquiétudes du rapporteur pour avis
sur l'évolution des crédits de la dissuasion nucléaire en
rappelant que l'on ne pourrait toucher à la modernisation des armes,
à la simulation ou à l'une des deux composantes sans affaiblir
gravement notre dissuasion.
En réponse à ces différentes interventions, M. Jean Faure,
rapporteur pour avis, a apporté les précisions suivantes :
- dans le domaine du nucléaire, il importait de ne pas compromettre la
transmission des compétences entre les équipes actuelles, qui ont
vécu les essais, et les équipes futures ;
- le budget pour 1998 ne prévoyait pas de mesures particulières
de redéploiement ou de restriction de postes pour les militaires
affectés dans les ambassades ;
- les ressources du service de santé provenaient à 49 % en 1997
de l'activité propre des hôpitaux militaires ;
- les crédits d'équipement du service de santé passeront
de 128 à 102 millions de francs de 1997 à 1998.
M. Xavier de Villepin, président, a alors rappelé que la
commission ne voterait sur l'ensemble des crédits de la défense
pour 1998 qu'après avoir entendu tous ses rapporteurs pour avis.
La commission a ensuite examiné l'ensemble des crédits du
ministère de la défense pour 1998, au cours de sa réunion
du mercredi 26 novembre 1997.
M. Xavier de Villepin, président, a exprimé les raisons de sa
forte inquiétude devant le projet de budget proposé.
S'agissant des crédits du titre III, dont l'enveloppe globale traduisait
la priorité affichée en faveur de la professionnalisation, il a
néanmoins exprimé une double préoccupation : d'une part,
la compression des crédits de fonctionnement (hors
rémunérations et charges sociales) qui, avec l'insuffisance des
crédits d'entretien programmé des matériels,
menaçait l'activité des forces ; d'autre part, les
conséquences potentielles, particulièrement pour l'armée
de terre, des dispositions adoptées en matière de reports
d'incorporation pour les jeunes gens titulaires d'un contrat de travail, qui
fragilisaient la période de transition et rendaient nécessaire
l'adoption de mesures de compensation.
En ce qui concerne les crédits du titre V -qui connaissaient une brutale
diminution (de 8,7 % en francs courants et de 9,9 % en francs constants)- M.
Xavier de Villepin, président, a formulé les observations
suivantes :
- il a d'abord déploré que les crédits d'équipement
militaire jouent le rôle de " variable d'ajustement " du
budget
de l'Etat, ce qui constituait un signal négatif adressé à
la nation dans son ensemble ; il a particulièrement souligné les
conséquences de ces coupes budgétaires sur les crédits
consacrés au nucléaire (- 13 %), évolution qui constituait
un important sujet d'inquiétude pour l'avenir ; il a également
regretté les incidences de ces diminutions de crédits sur les
programmes spatiaux militaires et sur le programme Rafale ;
- M. Xavier de Villepin, président, a ensuite estimé que le
projet de budget de la défense pour 1998 constituait un mauvais signal
adressé aux industries de la défense pour quatre raisons : le
coût élevé, et quasi mécanique, de ces
réductions budgétaires en termes d'emplois, le surcoût
inévitable des équipements faisant l'objet de mesures
d'étalement ou de moratoires, la perte de
" lisibilité " que la loi de programmation avait
précisément pour objet d'apporter aux industriels, et enfin
l'affaiblissement qui en résultera pour les industriels français
dans la perspective des restructurations indispensables de l'industrie
européenne de l'armement ;
- puis M. Xavier de Villepin, président, a souligné que ce projet
de budget constituait surtout un signal très négatif
adressé à nos armées au moment même où un
effort exceptionnel leur était demandé ; il a estimé que
les orientations de ce budget, si elles n'étaient pas corrigées
après 1998, poseraient des interrogations majeures pour l'avenir : ne
risqueraient-elles pas de compromettre la cohérence de la réforme
entreprise dans son ensemble ? ne risqueraient-elles pas de remettre en cause
le futur modèle d'armée lui-même ?
- M. Xavier de Villepin, président, a estimé que toutes ces
interrogations revenaient finalement à poser la question de la
validité de la théorie dite de l' " encoche " ; il a
estimé que, si les économies imposées à la
défense en 1998 avaient un caractère exceptionnel, leurs
conséquences, pour regrettables et dommageables qu'elles soient,
seraient peut-être surmontables ; si, en revanche, la défense
ne retrouvait pas, à partir de 1999, le niveau de ressources
prévu par la loi de programmation 1997-2002, l'ensemble de la
réforme engagée se trouverait gravement fragilisée et la
dernière loi de programmation devrait être
considérée comme caduque.
Or, a souligné M. Xavier de Villepin, président, la
dernière loi de programmation -contrairement à ses
devancières- comportait déjà une forte réduction
des crédits d'équipement militaire et constituait la traduction
d'une réforme d'ensemble devant aboutir à la mise en place d'un
nouveau modèle d'armée. Son non-respect ou -a fortiori- son
abandon ne pourrait donc conduire qu'à l'affaiblissement progressif de
notre défense ou à la révision de ce modèle
d'armée. Il a en outre estimé que, si l'élaboration
éventuelle d'une nouvelle programmation venait à être
envisagée, il vaudrait mieux alors renoncer à sa traduction
législative, devenue sans valeur.
Concluant son propos, M. Xavier de Villepin, président, a estimé
que la commission n'avait d'autre choix que de rejeter les crédits du
ministère de la défense pour 1998 et l'a invitée à
réaffirmer son ferme attachement au respect de la loi de programmation
votée en 1996. Il a enfin suggéré à la commission,
pour expliquer son avis négatif, d'adopter les principales observations
qu'il venait de présenter et de les faire figurer dans chacun de ses
rapports pour avis au titre des conclusions de la commission.
M. Bertrand Delanoë a alors indiqué que, s'il partageait certaines
des inquiétudes exprimées par M. Xavier de Villepin,
président -pour des raisons qui étaient d'ailleurs
antérieures au projet de budget pour 1998-, il était globalement
en désaccord avec les conclusions proposées et approuvait la
démarche générale suivie par le Gouvernement. Il a
relevé que les programmes conduits en coopération avec nos
partenaires européens étaient poursuivis de manière
satisfaisante. Il a estimé que les difficultés rencontrées
venaient essentiellement de la méthode employée pour
professionnaliser nos forces armées qui ne pouvait aboutir qu'à
des pressions de plus en plus fortes sur les crédits
d'équipement. M. Bertrand Delanoë a conclu en
considérant qu'une " épreuve de vérité "
était souhaitable et ne devrait écarter aucun des choix
nécessaires, qu'il s'agisse des missions assignées à nos
forces ou des équipements retenus.
M. Michel Caldaguès a indiqué qu'il partageait pleinement chacune
des observations formulées par M. Xavier de Villepin, président.
Il a estimé que le budget très inquiétant qui était
présenté trouvait son origine, non pas dans la méthode
suivie pour professionnaliser nos armées, mais, beaucoup plus largement,
dans la mise en cause progressive des différentes
spécificités des forces françaises et dans le processus de
" mutualisation " des forces qui ne pouvait conduire, de
manière insidieuse, qu'à la réduction de notre effort
national de défense. Il a enfin souligné que la politique
conduite par le Gouvernement en matière de dépenses publiques
civiles conduisait inévitablement à la compression de nos
dépenses militaires.
M. Jean Faure a exprimé son entier soutien à chacune des
conclusions présentées par M. Xavier de Villepin,
président. S'agissant des crédits consacrés au
nucléaire, il a estimé indispensable de respecter les calendriers
prévus et souligné, dans ce domaine plus que dans tout autre,
l'enjeu majeur que représentait la question de la transmission du savoir
et du maintien des compétences scientifiques.
M. Philippe de Gaulle a relevé qu'une quinzaine d'années auront
été nécessaires entre le lancement du programme Rafale et
la constitution de la première flottille de ces appareils.
M. Claude Estier a enfin indiqué que les commissaires socialistes ne
s'associaient pas aux conclusions proposées par M. Xavier de Villepin,
président.
La commission a alors adopté, le groupe socialiste votant contre, les
principales observations présentées par M. Xavier de Villepin,
président, et décidé de les faire figurer en tête de
chacun de ses rapports pour avis sur le budget de la défense pour 1998,
au titre des conclusions de la commission.
Elle a enfin émis un avis défavorable à l'adoption de
l'ensemble des crédits du ministère de la défense pour
1998.
1
Texte adopté par la commission au
cours de sa réunion du mercredi 26 novembre 1997, le groupe socialiste
votant contre.