RAPPORT GENERAL N° 85 TOME III N° 28 - PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 1998 ADOPE PAR L'ASSEMBLEE NATIONALE - FONCTION PUBLIQUE ET REFORME DE L'ETAT
M. Philippe MARINI
COMMISSION DES FINANCES, DU CONTROLE BUDGETAIRE ET DES COMPTES ECONOMIQUES DE LA NATION - RAPPORT GENERAL N° 85 TOME III ANNEXE 28 - 1997/1998
Table des matières
- LES CRÉDITS DE LA FONCTION PUBLIQUE
-
CHAPITRE II
LA REFORME DE L'ETAT- I. LES CONTOURS DE LA REFORME DE L'ETAT
- II. UN PREMIER BILAN DE LA REFORME
- III. DES INTERROGATIONS NOMBREUSES EN DÉBUT DE LÉGISLATURE
- EXAMEN EN COMMISSION
N° 85
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès verbal de la séance du 20 novembre 1997.
RAPPORT GÉNÉRAL
FAIT
au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi de finances pour 1998 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,
Par M. Alain LAMBERT,
Sénateur,
Rapporteur général.
TOME III
LES MOYENS DES SERVICES ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES
(Deuxième partie de la loi de finances)
ANNEXE N° 28
FONCTION PUBLIQUE ET RÉFORME DE L'ÉTAT
Rapporteur spécial
: M. Philippe MARINI
(1) Cette commission est composée de :
MM.
Christian Poncelet,
président
; Jean Cluzel, Henri Collard,
Roland du Luart, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Philippe Marini,
René Régnault,
vice-présidents
; Emmanuel
Hamel, Gérard Miquel, Michel Sergent, François Trucy,
secrétaires
; Alain Lambert,
rapporteur
général
; Philippe Adnot, Bernard Angels, Denis Badré,
René Ballayer, Bernard Barbier, Jacques Baudot, Claude Belot,
Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël
Bourdin, Guy Cabanel, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Yvon
Collin, Jacques Delong, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut,
Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Marc Massion, Michel
Mercier, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Oudin, Maurice Schumann,
Henri Torre, René Trégouët.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
230
,
305
à
310
et T.A.
24
.
Sénat
:
84
(1997-1998).
Lois de finances. |
LES CRÉDITS DE LA FONCTION PUBLIQUE
L'examen des crédits
de la fonction publique
recouvre deux exercices distincts :
- l'analyse des charges de personnel de l'Etat, dépenses
transversales à l'ensemble des départements ministériels
qui représentent plus de 600 milliards de francs en 1998 ;
-
la présentation des crédits du ministère
chargé de la gestion de la fonction publique, dont les crédits
sont individualisés dans le budget des services généraux
du Premier ministre et qui s'élèvent à 1,4 milliard
de francs en 1998.
I. LES CHARGES DE PERSONNEL DE L'ETAT
A. LES DÉPENSES EN 1998
1. L'évolution générale
En 1998, les dépenses de fonction publique progressent de 2,9 % -soit deux fois plus vite que l'ensemble des dépenses de l'Etat- et dépassent le seuil de 600 milliards de francs, atteignant la part de 38,4 % du budget général 1( * ) .
Evolution des charges de personnel du budget
général
(En milliards de francs)
LFI 1997 |
PLF 1998 |
Evolution 1998/1997 en % |
|
Rémunérations
d'activité
|
294,377
|
301,112
|
2,3 %
|
Pensions
|
98,564
|
103,945
|
5,4 %
|
Cotisations et prestations
sociales
|
68,277
|
69,655
|
2 %
|
Total des charges de
personnel
|
461,218
|
474,212
|
2,9 %
|
Total général |
591,351 |
608,726 |
2,9 % |
2. Les facteurs d'évolution
Cette progression de 17,4 milliards de francs des
charges
de personnel s'explique notamment par :
- les revalorisations salariales opérées en 1997
:
+ 0,5 % au 1er mars et + 0,5 % au 1er octobre,
qui occasionnent une dépense de 3,2 milliards de francs en 1997,
de 4 milliards de francs en 1998
;
- une provision de
3 milliards de francs
qui est inscrite au budget
des charges communes, et
de 575 millions
de francs au budget de la
défense au titre des mesures diverses d'
ajustement salarial de 1998
(une négociation salariale ayant été ouverte au mois
d'octobre dernier) ;
- les mesures catégorielles (dont le plan Jospin et le protocole
Durafour) ont créé une dépense de 2,2 milliards de
francs en 1997, et devraient entraîner une dépense de
2,3 milliards de francs en 1998
(poursuite du "Jospin" et
mesures
ministérielles) ;
- le glissement vieillissement technicité contribue à une
dépense estimée à près de
4 milliards de
francs pour l'année 1998
.
Le glissement vieillissement technicité
Le "GVT" est issu de deux effets :
- un effet de carrière ou "GVT positif" qui retrace l'incidence
positive
sur la masse salariale des avancements à l'ancienneté, ou aux
choix, et de l'acquisition d'une technicité, estimé à
+ 2,2 % en 1997 ;
- un effet de "noria" qui traduit l'incidence négative sur la masse
salariale des entrées (moins "chères") et sorties (plus
coûteuses) des effectifs, estimé en 1997 à - 1,2 %.
La somme des deux effets constitue l'effet de structure ou "GVT
solde", qui
permet de mesurer l'évolution de la masse salariale due aux variations
de structure de la population des fonctionnaires. Il est estimé en 1997
à 1 %.
Le GVT "positif" est très largement automatique, car il n'est pas
lié à une politique de recrutement mais aux garanties
statutaires. Sa progression très nette entre 1987 et 1997 s'explique
essentiellement par les mesures catégorielles du plan Jospin et du
protocole Durafour.
Evolution du GVT positif (en %)
1988 |
1989 |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1,7 |
1,8 |
1,8 |
1,8 |
1,9 |
1,9 |
2,0 |
2,1 |
2,1 |
2,2 |
Au total, les facteurs d'évolution des dépenses
de fonction publique en 1998 sont synthétisés dans le tableau
ci-dessous :
Effets en Milliards de francs |
PLF 98 |
LFI 97 |
Effectifs |
Point |
Catégoriel |
GVT |
Autres(1) |
Rémunérations |
7,0 |
- |
1,4 |
||||
- civils |
5,8 |
||||||
- Défense |
1,2 |
2,3 |
4 |
1 |
|||
Cotisations et prestations |
2,3 |
- |
0,6 |
||||
- civils |
1,4 |
0,5 |
|||||
- défense |
1,0 |
0,1 |
|||||
Pensions |
6,5 |
3,2 |
1,4 |
1,1 |
0,8 |
||
- civils |
5,8 |
3,3 |
1 |
0,7 |
0,8 |
||
- Défense |
0,7 |
- 0,1 |
0,4 |
0,4 |
|||
Enseignement privé |
1,1 |
0,4 |
0,7 |
||||
Anciens combattants |
- 0,5 |
- 0,7 |
0,2 |
||||
Frais de déplacements |
|||||||
Autres (2) |
3,6 |
3,6 |
|||||
Total |
20,0 |
2,5 |
4,0 |
8,1 |
5,4 |
Source : Direction du Budget
(1) y compris plan de professionnalisation des armées
(2) Provisions pour mesures générales
B. UNE MISE EN PERSPECTIVE INTERNATIONALE
Le poids de la dépense de fonction publique dans le
budget ne doit pas être le seul élément
d'appréciation du poids de la fonction publique.
Une comparaison de cette dépense avec les pratiques observées
dans les principaux pays partenaires de la France doit être
opérée si l'on veut se faire de la fonction publique une autre
idée que celle d'une gestion "aux acquets".
1. Le poids élevé des effectifs publics en France
A cet égard, l'étude réalisée en
octobre dernier par l'institut Rexecode sur la mise en perspective
internationale des dépenses françaises est
éclairante
2(
*
)
: en effet, il
apparaît que "
l'écart le plus marqué entre les
dépenses par nature de la France et celle des autres pays, hors le cas
spécifique de la Suède, apparaît au sein du coût
direct de fonctionnement des administrations publiques, et de façon plus
précise, au sein du poste coût des
rémunérations
".
Réserves faites des différences de bases de calcul de ces
rémunérations, l'étude conclut au poids très
supérieur des effectifs publics en France :
"le facteur clef des
divergences entre les dépenses de rémunérations en masse
est le niveau de l'emploi public. Les données permettent un diagnostic
sans ambiguïté. En France, la part de l'emploi dans l'emploi total
des administrations publiques représente 25 %. Au sein de l'OCDE
entière, pour laquelle la part moyenne est de moins de 15 %, seuls
les pays scandinaves affichent un secteur public plus élevé en
effectifs. Pour l'Union européenne, les emplois dans les administrations
publiques représentent en moyenne 18 % de l'emploi total"
.
2. Un poids non réduit au cours des cinq dernières années
Selon la même étude, l'exception française résulte aussi de l'absence de réduction des effectifs publics au cours des cinq dernières années : alors que l'emploi public a baissé en Allemagne de 450.000 unités entre 1991 et 1996, et que l'Italie et l'Espagne limitaient sérieusement leurs créations d'emplois dans le secteur public, l'emploi public en France s'est accru sur la même période de 380.000 unités.
3. Une progression des effectifs dans toutes les fonctions publiques
Alors même que la décentralisation s'effectuait, les administrations centrales de l'Etat ont continué à augmenter leurs effectifs, tandis que les emplois sociaux continuaient leur progression.
Emploi public par catégorie d'administration
(en milliers)
1989 |
1993 |
1995 |
1996 |
|
Etat central (administrations centrales et établissements publics) |
|
|
|
|
Collectivités locales |
1.225,3 |
1.272,5 |
1.346,3 |
1.347,1 |
Sécurité sociale |
1.064,7 |
1.085,8 |
1.117,6 |
1.122,4 |
Source : INSEE 1997
C. OBSERVATIONS
1. L'Etat ne parvient pas à maîtriser la dépense de fonction publique
Entre 1980 et 1996
, les effectifs budgétaires de
l'Etat ont progressé, à champ constant, de 11,3 % hors
Défense -et de 6,6 % y compris Défense-, soit de
+ 115.700 emplois
.
Ce n'est qu'
en
1997
qu'a été marqué
l'arrêt souhaitable de cette évolution, avec une diminution de
0,4 % hors Défense -soit
- 5.499 emplois
- et une
quasi stabilité si l'on prend en compte les emplois militaires :
cette diminution a permis une économie de 0,8 milliard de francs en
1997.
En 1998
, cette orientation, pourtant la seule possible pour amorcer une
modernisation de l'Etat et une diminution de la dépense publique, est
abandonnée : le mouvement de créations reprend avec un solde
positif de
490 emplois civils
, et de 6.533 emplois en prenant
en compte la Défense.
L'abandon de la politique de réduction d'effectifs, qui avait permis
d'économiser 0,8 milliard de francs en 1997, et 1,1 milliard
de francs en 1998, renforce la difficulté évidente pour l'Etat de
maîtriser ses coûts de personnel : au poids des effectifs
s'ajoute en effet celui du "GVT" positif, reflétant les mesures
catégorielles des années passées.
Par ailleurs, cette absence de maîtrise naît également de
l'impossibilité actuelle de scinder la négociation salariale, qui
se déroule cette année encore sous sa forme traditionnelle avec
l'ensemble des syndicats de fonctionnaires. Ses répercussions touchent
non seulement l'ensemble des agents de l'Etat
3(
*
)
mais au total l'ensemble de la dépense induite de fonction publique,
soit plus de 39 % des dépenses du budget : ainsi, une
revalorisation d'1 % du point d'indice coûte 6,2 milliards de
francs au budget de l'Etat.
Les bases introuvables de la négociation salariale dans la fonction publique
Le caractère massif de cette négociation, qui
concerne plusieurs millions d'agents, pose à l'évidence un
problème de calcul de base.
Ainsi, à l'heure actuelle, les fédérations de
fonctionnaires réclament un rattrapage salarial pour l'année
1996, où toute augmentation générale avait
été gelée. Ce rattrapage serait basé sur la hausse
des prix hors tabac constatée sur l'année
considérée, soit + 1,6 %.
Mais, sur quelle base apprécier l'augmentation du pouvoir d'achat des
fonctionnaires en 1996 ? L'INSEE vient de fournir des
éléments de calcul avec son étude annuelle sur les
salaires des agents de l'Etat :
- Le salaire moyen, calculé en incluant
les mesures
générales et catégorielles, ainsi que toutes les formes de
primes
, a augmenté de 2,6 % en francs courants entre 1995 et
1996, soit 0,6 % en francs constants
Cette progression doit toutefois être corrigée de l'effet de
structure qui retrace les changements de répartition des effectifs entre
catégories, la catégorie A ayant progressé en 1995 de
42,8 % de l'ensemble des titulaires à 44,7 % en 1996.
Par ailleurs, le salaire doit être corrigé des
prélèvements effectués : au total, le salaire net a
reculé de 1 % en pouvoir d'achat en 1996.
-
La rémunération moyenne des personnes en place
est
un autre indicateur, plus proche des calculs effectués dans le secteur
privé : sa progression mesure l'évolution de la fiche de
paye moyenne des fonctionnaires en place. L'INSEE évalue cette
augmentation à 1,2 % en francs constants en 1996.
- Enfin, le salaire moyen net par catégorie
a
évolué de manière différenciée selon les
effets de structure : ainsi, le salaire moyen est abaissé dans les
corps où les entrants -moins rémunérés- sont plus
nombreux que les sortants ; c'est le cas pour les cadres enseignants
où le salaire moyen a baissé de 2,4 %.
Ces problèmes d'évaluation illustrent la difficulté pour
l'Etat à vouloir mener une seule négociation salariale pour
plusieurs millions d'agents.
2. Les contours de l'emploi public sont flous
a) Le champ d'application de la négociation salariale
Au-delà des 2,2 millions d'agents de l'Etat, il
faut comptabiliser dans l'emploi public :
- les 200.000 emplois des établissements publics nationaux (hors
entreprises nationales) ;
- les 165.000 agents de France Télécom et les
280.000 agents de La Poste
4(
*
)
;
- les 1,4 million d'agents de la fonction publique territoriale ;
- les 845.000 agents de la fonction publique hospitalière.
Au total, on recense donc plus de 5 millions d'agents publics pour une
population active de 22,4 millions,
soit plus d'un actif sur cinq
.
C'est la totalité de cette population qui est concernée par la
négociation salariale dans la fonction publique, ce n'est donc qu'une
seule partie de ses effets qui apparaît dans le budget de l'Etat.
b) La vraie nature de l'emploi public
Les agents employés par l'Etat, les
collectivités territoriales et les établissements hospitaliers ne
le sont pas sous le même statut :
- le "noyau dur" de la fonction publique est constitué des
titulaires
, soit à peu près les quatre-cinquièmes
des agents publics ;
- le solde, soit environ un million de personnes, est constitué de
non titulaires
: contractuels, auxiliaires, vacataires... Leur
proportion est beaucoup plus grande dans les établissements publics
(plus de 60 %) et dans la fonction publique territoriale (plus de
30 %) que dans la fonction publique d'Etat où ils
représentent toutefois plus de 13 % des effectifs.
Répartition entre titulaires et non titulaires
1990 |
1995 |
|||||
Total titulaires et non titulaires |
Non titulaires |
|
Total titulaires et non titulaires |
Non titulaires |
|
|
Ministères (1) |
2.168.900 |
328.100 |
15,1 % |
2.214.400 |
294.000 |
13,3 % |
Etablissements publics (2) |
188.500 |
117.100 |
62,1 % |
208.000 |
126.500 |
60,8 % |
Total Fonction Publique de l'Etat (1) |
2.357.400 |
445.200 |
18,9 % |
2.422.400 |
420.500 |
17,4 % |
FPT (1) (2) (3) |
1.326.400 |
448.900 |
33,8 % |
1.442.700 |
504.900 |
34,7 % |
FPH (personnel non médical) (1) |
667.100 |
35.700 |
5,4 % |
689.900 |
37.500 |
5,4 % |
Total des 3 fonctions publiques (1) |
4.386.900 |
929.900 |
21,2 % |
4.575.000 |
962.900 |
21,0 % |
(*) % de non titulaires par rapport à l'effectif
total
(1) Effectifs non compris les bénéficiaires de contrat emploi
solidarité (CES)
(2) Y compris assistantes maternelles
(3) Les effectifs de 1995 sont une estimation
Source : Direction générale de la Fonction publique
- un troisième cercle d'agents est constitué de personnes bénéficiaires de contrats emploi solidarité, qui ne sont pas des contrats de droit public, et qui ne peuvent pas être directement conclus par les services de l'Etat : toutefois de nombreux CES sont conclus par les collectivités territoriales et par les établissements publics, ce qui aboutit à les considérer comme des CES "Fonction publique", dont le nombre est supérieur à 200.000 :
Répartition des CES "fonction publique"
|
Total CES fonction publique (1) |
Collectivités territoriales |
EPA et EPIC hors enseignement |
Etablissements publics d'enseignement |
Etablissements de santé |
1993 |
219.073 |
94.175 |
64.611 |
37.426 |
22.861 |
1994 |
254.094 |
107.451 |
70.086 |
47.117 |
29.440 |
1995 |
250.416 |
105.645 |
64.127 |
49.983 |
30.661 |
(1) Le total des bénéficiaires de CES fin
1995 est de plus de 400.000 ; les autres bénéficiaires de
CES, hors fonction publique, sont classés en "associations" et
"mutuelles".
Enfin, les "emplois-jeunes" prévus ans le projet de loi de finances
pour 1998 peuvent être considérés comme des emplois
publics, puisque l'Etat prendre en charge 80 % de leur
rémunération, et même 100 % pour les jeunes
recrutés par l'Intérieur ou par l'Education nationale : il y
aura là encore quelque 100.000 emplois publics (350.000 en 1999)
relevant du droit privé.
L'Etat emploie donc une proposition non négligeable d'agents dans des
conditions non statutaires.
Certes des progrès ont été réalisés
grâce à la loi du 16 décembre 1996 relative à
l'emploi dans la fonction publique qui comporte un plan de résorption de
l'emploi précaire s'adressant à environ 20.000 agents du niveau
de la catégorie C et près de 18.000 agents assurant des
fonctions d'enseignement ou d'éducation (contractuels vacataires,
auxiliaires...).
Les premiers concours ont été organisés au printemps 1997
par les ministères de l'éducation nationale (2.700 postes) et de
l'agriculture (370 postes) : toutefois cette résorption de
l'emploi précaire ne concernera que 38.000 agents sur
1 million ; par ailleurs, le problème demeure -et
s'accroît en 1998- pour les CES "fonction publique" et les emplois
jeunes, dont le total pourrait atteindre 500.000 en période de
croisière.
II. LES CRÉDITS DU MINISTÈRE CHARGÉ DE LA FONCTION PUBLIQUE
Ces crédits sont regroupés en un seul
"agrégat" au sein des services généraux du Premier
ministre, intitulé "Fonction publique".
Il s'agit des moyens consacrés à :
- la mise en œuvre d'une politique d'ensemble de la fonction publique,
- la modernisation de l'administration et la réforme de l'Etat,
- la tutelle des écoles d'administration.
De 1997 à 1998 les crédits évoluent de la façon
suivante :
(En millions de francs)
1997 |
1998 |
1997/1996 |
|
Dépenses ordinaires |
|||
Titre III
|
1.133,203
|
1.386,775
|
+ 22,3
|
Titre IV |
2,3 |
2 |
- 13,1 |
Total dépenses ordinaires |
1.135,503 |
1.388,575 |
+ 22 |
Dépenses en capital |
|||
Titre V |
40 |
26 |
- 35 |
Total général |
1.175,503 |
1.414,575 |
+ 20,3 |
A. LES DÉPENSES DE PERSONNEL
Ces dépenses sont exclusivement constituées de prestations d'action sociale interministérielle. La progression de 263,67 millions de francs est due principalement -à hauteur de 230 millions de francs- à l'inscription d'une provision destinée à accompagner la négociation salariale dans la fonction publique. Pour le solde, la progression est liée à des prestations telles que les chèques vacances des fonctionnaires.
B. LES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT
1. Le fonds pour la réforme de l'Etat
Le fonds pour la réforme de l'Etat s'élève à 112,5 millions de francs ; cette année aucun crédit d'investissement ne figure pour ce fonds, contrairement à 1997 où les crédits étaient de 110 millions de francs en fonctionnement et les crédits en capital à 40 millions de francs. La dotation pour 1998 est alignée sur la régulation budgétaire pratiquée au mois de juillet dernier sur ces crédits.
2. La formation et la modernisation
Les crédits de formation interministérielle diminuent de 40 à 32 millions de francs, les crédits de modernisation de 20 à 14,3 millions de francs, là encore par alignement sur les dotations budgétaires issues de la régulation de juillet 1997.
3. Les subventions aux écoles
a) Une modération des crédits en 1998
Les subventions aux écoles représentent 329,27 millions de francs en quasi-stagnation. C'est notamment le cas de la subvention à l'ENA qui s'élève à 161,2 millions de francs.
L'évolution des crédits des subventions aux écoles (1995-1998)
(en millions de francs)
Ecoles |
Crédits 1995 |
Crédits 1996 |
Crédits 1997 |
PLF |
Variation en % |
|||
LFI |
LFI moins crédits annulés |
LFI |
LFI moins crédits annulés |
LFI |
LFI moins crédits annulés |
1998 |
PLF 98/
|
|
36-11 Ecole nationale d'administration |
|
|
|
|
|
|
|
|
36-31 Institut international d'aminis-tration publique |
|
|
|
|
|
|
|
|
36-51 Instituts régionaux d'administration |
|
|
|
|
|
|
|
|
43-01 Centre des études européennes de Strasbourg |
|
|
|
|
|
|
|
|
TOTAL |
335,839 |
331,859 |
314,690 |
310,444 |
329,172 |
322,058 |
329,274 |
+ 0,03 |
Source : Direction générale de l'administration et de la fonction publique.
b) Les surcoûts de la délocalisation de l'ENA
Cette modération, appréciable, des subventions,
ne doit pas faire oublier les surcoûts nés de la "fausse
délocalisation" de l'Ecole nationale d'administration à
Strasbourg.
Les dépassements considérables du budget initial prévu
pour cette opération avaient été dénoncés,
à juste titre, en 1994, par M. Maurice Couve de Murville, alors
rapporteur de la commission des finances sur les crédits des services
généraux du Premier ministre.
L'état détaillé de ce dossier figure dans le rapport de la
Cour des Comptes rendu public le 24 novembre dernier.
La Cour synthétise de la façon suivante les surcoûts
nés de la délocalisation décidée en 1992 :
"Annoncé comme une opération exemplaire de
"délocalisation", le transfert de l'Ecole nationale d'administration
à Strasbourg s'est traduit, en fait, par une double implantation dont
les conditions de mise en œuvre ont été
particulièrement coûteuses.
Le transfert envisagé à l'origine a conduit à
aménager pour un coût sensiblement supérieur aux
prévisions initiales les bâtiments de la Commanderie Saint-Jean,
à Strasbourg, progressivement, mais épisodiquement occupés
au fur et à mesure de leur livraison. Par la suite, la décision
de maintenir l'implantation parisienne a consacré la sous-utilisation
des locaux strasbourgeois.
Cette opération, décidée par le Gouvernement sans
préparation ni concertation, en application d'un calendrier
précipité et de décisions successives qui en ont
modifié le déroulement d'une manière parfois
imprévisible, s'est traduite par une dépense directe de
170 millions, sensiblement supérieure à celle qui avait
été annoncée au Parlement en juin 1992. Contrairement au
principe initialement retenu, aucun produit de cession immobilière n'est
venu en atténuer la charge. Ses effets continuent de peser lourdement
sur le budget et sur le fonctionnement de l'établissement. La gestion
quotidienne et le fonctionnement pédagogique de l'école restent
en outre gravement perturbés par les effets de la double installation,
qui entraîne inévitablement la sous-occupation des locaux, le
sous-emploi des équipements et des déplacements
répétitifs".
L'analyse de la Cour porte en effet sur le dépassement des
crédits constaté sur l'opération initiale, mais aussi sur
les coûts additionnels de fonctionnement annuels occasionnés par
cette opération.
Les surcoûts de la délocalisation de l'ENA
Un dépassement considérable des coûts
initiaux
*
Une opération précipitée
La décision de transférer l'ENA à Strasbourg n'a
été précédée d'aucune des procédures
préconisées par le CIAT du 7 novembre 1991 en ce qui
concerne les délocalisations : examen immobilier, exigence
d'économie budgétaire, évaluation précise des
dépenses et recettes immobilières entraînées par
l'opération.
En réalité, comme le souligne la Cour,
"les prévisions
financières successives ont fait une large place à
l'improvisation, chaque décision étant déterminée
prioritairement par la nécessité de respecter les délais
assignés par le gouvernement"
.
L'estimation annoncée devant le Parlement le 9 juin 1992
était d'environ 100 millions de francs, soit 30 millions de
francs pour l'achat du bâtiment, et 70 à 80 millions de
francs pour les travaux.
*
Un changement de conception "
en cours de route
"
Alors que l'Etat avait engagé les travaux à Strasbourg, la
réflexion a fait reconnaître, en 1993, la nécessité
de maintenir certains enseignements dans la capitale : il a donc
été décidé de partager les activités de
l'école entre Strasbourg et Paris
*
Des surcoûts considérables
L'Etat a finalement acheté les bâtiments d'une ancienne prison, la
"
Commanderie Saint-Jean
" intégrée dans une ZAC, le
8 octobre 1992. Par ailleurs, la cession des bâtiments de la rue de
l'Université, à Paris, qui devait concourir au financement de
l'opération, a été abandonnée.
Afin de livrer le bâtiment en temps voulu, les travaux ont
été confiés à une société locale, sur
la base d'un avant-projet sommaire.
Enfin, le transfert des agents, qui devait porter sur 120 emplois, s'est
finalement réduit à 14.
Des recrutements ont du être effectués pour assurer le
fonctionnement de Strasbourg (41 agents), alors que quatre-vingt agents
sont restés en poste à Paris, et que près de vingt
travaillent sur les deux sites.
Dans sa réponse au rapport de la Cour des Comptes, le ministre de la
fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation, chiffre le coût des opérations initiales
de la manière suivante :
- la répartition des activités entre les deux sites, la
superficie des locaux et le montant total des travaux : 97 millions
de francs ;
- le montant des équipements : 28,2 millions de
francs ;
- le coût d'achat du bâtiment : 15 millions de
francs ;
soit 155,2 millions de francs auxquels se sont ajoutées des mesures
d'accompagnement du déménagement : indemnités de
mission, frais de gardiennage et de déménagement de
matériel, plan social de délocalisation, soit au total
15 millions de francs, ce qui porte le coût de l'opération
initiale à
170,2 millions de francs
.
Une hausse des charges de fonctionnement annuelles
La hausse des charges de fonctionnement est induite par la dualité des
sites.
- Un personnel vacataire a été recruté pour assurer
le gardiennage et le fonctionnement des deux sites : douze emplois ont
été créés.
- Compte tenu des frais supplémentaires de déplacement et
des autres charges de fonctionnement,
la subvention de l'Etat est
passée de 116 millions de francs à 161 millions de
francs en 1995.
La Cour relève enfin la sous-utilisation aberrante des locaux à
Strasbourg, la perturbation profonde de la gestion de l'école, le rythme
des déplacements imposés aux élèves.
Elle conclut que "
Dans les conditions présentes, il est contraire au
bon sens de perpétuer la décision de l'établissement entre
deux sites. Si le regroupement, par retour à Paris ou transfert complet
à Strasbourg, est considéré comme trop difficile, il faut
moins spécialiser chacun des deux ; l'installation, ainsi que la
création d'un pôle de formation annoncée par le
gouvernement, en novembre 1996, fusionnant l'ENA et l'Institut international
d'administration publique, offrent des perspectives dans ce sens
".
Dans sa réponse au rapport de la Cour des comptes, le ministre de la
fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation, se contente de mettre en avant la mise à
disposition active des locaux de l'ENA à des tiers, et l'utilisation
croissante de Strasbourg par le Centre d'études européennes.
c) Les crédits de délocalisation
Ces crédits constituent le fonds de
délocalisation piloté par un comité
interministériel présidé par le secrétaire
général du gouvernement, et composé des ministères
de l'aménagement du territoire, de la fonction publique, du logement, de
l'intérieur et du budget.
Les crédits d'investissement des délocalisations se sont
élevés à 990,5 millions de francs en autorisations de
programme, et 848 millions de francs en crédits de paiement, de
1992 à 1997.
L'évolution des crédits depuis la création du fonds est
retracée par le tableau ci-dessous :
(en millions de francs)
Chapitre 57-01 A.P. |
Chapitre 57-01 C.P. |
Chapitres 37-07 D.O. |
|
LFI 1992 |
800,00 |
400,00 |
100,00 |
LFI 1993 |
0,00 |
400,00 |
85,86 |
LFI 1994 |
130,00 |
30,00 |
20,00 |
LFI 1995 |
0,00 |
0,00 |
0,00 |
LFI 1996 |
25,00 |
12,50 |
0,00 |
LFR 1996 |
5,50 |
5,50 |
0,00 |
LFI 1997 |
30,00 |
0,00 |
0,00 |
Total |
990,50 |
848,00 |
205,86 |
Consommation de 1992 au 30.06.97 |
737,51 |
708,56 |
131,33 |
Arrêtés de transfert en instance |
0,50 |
8,50 |
5,20 |
Total affecté |
738,01 |
717,06 |
136,53 |
Disponible effectif |
252,49 |
130,94 |
69,33 |
Prévisions pour 2ème semestre 1997 |
|||
Crédits préaffectés |
128,50 |
40,00 |
6,26 |
Solde disponible en fin d'exercice |
123,99 |
90,94 |
63,07 |
Prévisions pour 1998 |
|||
Crédits préaffectés |
50,00 |
112,00 |
8,12 |
PLF 1998 |
0,00 |
26,00 |
0,00 |
Crédits disponibles (prévision) |
73,99 |
4,94 |
54,95 |
Pour 1998, les autorisations de programme passent de
30 millions de francs à 0 million de francs, alors que les
crédits de paiement passent de 0 à 26 millions de francs.
Aucune dotation n'est inscrite en fonctionnement.
La demande de crédits de paiement est justifiée, selon le
ministère de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de
la décentralisation, par "
la nécessité de couvrir les
autorisations de programme accordées pour des opérations d'ores
et déjà engagées et d'autoriser le lancement, en 1998, des
opérations prévues par les CIAT qui seront en état de
l'être au cours de cet exercice
".
CHAPITRE II
LA REFORME DE L'ETAT
La réforme de l'Etat avait été
placée par une circulaire du Premier Ministre du 26 juillet 1995 au
centre des priorités du précédent gouvernement. Celui-ci
considérait en effet que l'administration devait s'adapter aux exigences
de son environnement, mais aussi que les citoyens étant
sollicités pour le redressement du pays, ainsi que pour la lutte contre
le chômage, l'Etat ne devait pas s'exonérer de l'effort de
discipline imposé à tous.
Durant le premier semestre de l'année 1997, votre rapporteur a
souhaité faire le point de l'avancement de cette réforme
ambitieuse.
Aujourd'hui, de multiples questions se posent sur les intentions du nouveau
gouvernement vis-à-vis de sa poursuite.
I. LES CONTOURS DE LA REFORME DE L'ETAT
Les objectifs et les moyens de la réforme de l'Etat étaient dès le départ clairement définis.
A. CINQ OBJECTIFS DE BASE
La circulaire du 26 juillet 1995 énonçait cinq objectifs prioritaires :
1. Clarifier les missions de l'Etat et le champ des services publics
Cette clarification impliquait :
- un travail de redéfinition des frontières entre le secteur
public et le secteur privé.
- une clarification des compétences entre l'Etat et les
différentes collectivités territoriales.
- Enfin, un recensement des domaines d'application du principe de la
subsidiarité européenne par rapport au rôle de l'Etat
national.
2. Mieux prendre en compte les besoins et les attentes des citoyens
Cette recherche impliquait :
- l'élaboration d'une charte des citoyens et des services publics ;
- l'élaboration par les services en relation avec le public de
programmes d'amélioration des méthodes ;
- l'adaptation de l'administration aux quartiers urbains en
difficulté et à la désertification rurale.
3. Changer l'Etat central
Ce changement passait par :
- la déconcentration des tâches de gestion, les effectifs des
administrations centrales étant appelés à diminuer de
10 % d'ici à la fin de 1996 ;
- l'amélioration des capacités de conception et de
décision des administrations centrales ;
- une lutte contre la prolifération des textes
réglementaires et législatifs.
4. Déléguer les responsabilités
Cette délégation devait s'effectuer :
- en rebâtissant un schéma de réorganisation des
services centraux et déconcentrés,
- en opérant un regroupement fonctionnel des services territoriaux,
- en modifiant les relations de l'Etat avec ses services, par
l'établissement de contrats de services.
5. Rénover la gestion publique
Il s'agissait :
- de moderniser la gestion de la fonction publique
- de moderniser les procédures financières et les
règles de la comptabilité publique.
*
* *
Au total, la réforme de l'Etat ainsi proposée était très ambitieuse, car elle portait sur les méthodes mais aussi sur les missions : ce deuxième volet s'est d'ailleurs avéré beaucoup plus difficile à mener à bien.
B. LES MOYENS DONNES A LA REFORME
Deux instruments spécifiques étaient mis en place :
1. Le commissariat à la réforme de l'Etat
Le commissariat à la réforme de l'Etat,
équipe inter-ministérielle légère, composée
d'une quinzaine de fonctionnaires de haut niveau, placée auprès
du Premier Ministre, a été créé par décret
du 13 septembre 1995, pour une durée de trois ans.
Cette équipe a été chargée du travail de conception
et de mise en oeuvre des réformes préconisées.
2. Le fonds pour la réforme de l'Etat
Un fonds pour la réforme de l'Etat a été mis en place au sein des services généraux du Premier Ministre, destiné à accompagner des opérations telles que la mise en place des maisons de services publics.
II. UN PREMIER BILAN DE LA REFORME
Votre rapporteur a souhaité, au début du premier
semestre 1997, faire le point sur le degré d'avancement de la
réforme de l'Etat, en évaluant :
- la mise en oeuvre du fonds pour la réforme de l'Etat,
destinée à financer des opérations bien spécifiques,
- l'engagement des réformes annoncées sur les structures
mêmes de l'Etat.
A. LE FONDS POUR LA REFORME DE L'ETAT
1. Le principe du fonds
Ce fonds est une enveloppe financière
créée en 1996 afin d'accompagner les chantiers de modernisation
et de réorganisation des administrations centrales et
déconcentrées.
Il comporte deux sections : la première consacrée au financement
des réformes "particulièrement importantes ou exemplaires" et la
seconde consacrée à l'action territoriale de l'Etat.
Les moyens du fonds
Les moyens inscrits ont été successivement de :
en 1996
46 millions de francs dont
18,5 millions de francs pour la section centrale
27,5 millions de francs pour la section locale
en 1997
150 millions de francs dont
50 millions de francs pour la section centrale
100 millions de francs pour la section territoriale.
Toutefois, l'arrêté d'annulation gageant le décret
d'avances du 9 juillet 1997 a diminué ces crédits à
hauteur respective de :
37,5 millions de francs (section centrale)
75 millions de francs (section territoriale).
Pour 1998
, la dotation prévue est de 112,5 millions de
francs dont :
37,5 millions de francs pour la section centrale
75 millions de francs pour la section terrioriale.
Les moyens seraient donc ramenés à ceux de 1997 après
régulation budgétaire.
L'emploi des crédits
Pour 1996, un peu moins de 60 % des crédits ont été
consacrés à des opérations d'amélioration du
service rendu à l'usager, principalement au plan local :
Récapitulation des opérations
financées en 1996
par type d'opération
Thèmes |
Opérations |
Financement |
|
Nombre |
% |
Montant |
|
I - Amélioration du
service rendu à
l'usager
|
16
|
10,7
|
9.196.800
|
Sous-total I |
91 |
61 % |
26.318.875 |
II - Restructuration de
services
|
3
|
2
|
1.550.000
|
Sous-total II |
3 |
2 % |
1.550.000 |
III - Formation
|
9
|
6
|
3.900.000
|
Sous-total III |
9 |
6 % |
3.900.000 |
IV - Outils de gestion
|
8
|
5,4
|
3.100.000
|
Sous-total IV |
32 |
21,5 % |
9.940.000 |
V - Divers
|
4
|
2,7
|
700.000
|
Sous-total V |
14 |
9,5 % |
2.903.450 |
TOTAL |
149 |
100 % |
44.612.325 |
2. L'appréciation sur les réalisations
Le fonctionnement du fonds pour la réforme de l'Etat
appelle trois réflexions :
- Ne peut-on pas considérer les améliorations techniques
financées par le fonds comme des mesures inhérentes au
fonctionnement normal de toute administration soucieuse de s'adapter au
développement des techniques et aux besoins de son public ?
Le commissariat à la réforme de l'Etat objecte que ce fonds a
une vocation d'incitation, et que la réussite de la réforme de
l'Etat dépend de l'impact de telles mesures, fussent-elles modestes, sur
l'opinion publique.
- La répartition des crédits entre les projets
n'aboutit-elle pas à un saupoudrage ?
Selon le commissariat à la réforme de l'Etat, ces moyens,
même modestes, permettent aux préfets de disposer d'une marge de
manoeuvre pour concrétiser les réformes dans leurs
départements. Le commissariat estimait aussi dans un premier temps que
ces crédits auraient l'avantage d'échapper à la
régulation budgétaire, espoir démenti par
l'arrêté d'annulation du 9 juillet 1997.
- A quels critères obéit la répartition des
crédits entre les départements ?
Le commissariat à la réforme de l'Etat précise que les
départements ont été classés en cinq groupes en
fonction de leur population, et que le montant des dotations accordées
varie de 200.000 F pour les départements les moins peuplés
à 600.000 F pour les plus importants.
B. LES RÉFORMES DE STRUCTURE
1. La déconcentration
a) Une première réforme importante : la déconcentration des décisions individuelles
La loi du 6 février 1992 relative à
l'administration territoriale de la République a fait de la
déconcentration le mode d'organisation de droit commun de
l'administration de l'Etat, en disposant que (article 2) "
sont
confiées aux administrations centrales les seules missions qui
présentent un caractère national ou dont l'exécution, en
vertu de la loi, ne peut être déléguée à un
échelon territorial
".
Dans les faits, cette loi n'a pu faire évoluer la tradition
administrative qui fait "remonter à Paris" d'innombrables
décisions individuelles, ôtant ainsi toute souplesse de gestion
aux services déconcentrés.
Il faut donc saluer comme une réussite tout à fait inédite
la déconcentration des décisions individuelles
opérée par le décret n° 97-34 du 15 janvier
1997 : la méthode adoptée par ce décret est radicale
puisqu'est posé le principe général du transfert des
décisions administratives individuelles aux autorités locales
déconcentrées de l'Etat à partir du
1
er
janvier 1998, sauf texte contraire express pris sous forme
de décret en Conseil d'Etat ou en Conseil des ministres, pour deux types
d'exceptions :
- les décisions ayant une portée nationale (ex. : le
taux de remboursement des médicaments),
- les décisions nécessitant une expertise préalable de
caractère national.
Par exemple : au ministère de l'agriculture, 700 procédures
ont été recensées, dont 200 sont déjà
déconcentrées et 300 sont considérées comme
hors champ ou seront supprimées. Sur les 200 décisions
administratives individuelles actuellement traitées au plan national, 90
procédures seulement devraient y être maintenues.
Les décrets de dérogation (environ 40 au total) n'interviendront
que de manière très sélective.
Chaque ministère va préparer un guide à l'intention des
services déconcentrés, fournissant des conseils et des
éléments de jurisprudence pour chacune des procédures
déconcentrées.
Cette déconcentration implique-t-elle l'affectation de nouveaux moyens
dans les services locaux de l'Etat ? Dans certains départements,
notamment au sud de la France, les effectifs paraissent suffisants. Dans les
autres, on peut envisager de redéployer des emplois supprimés
à l'administration centrale.
b) La création de services à compétence nationale
Deux décrets du 9 mai 1997 ont créé
les services à compétence nationale, qui sont des services dont
le champ territorial est national mais qui exercent des activités
à caractère opérationnel : études,
statistiques, prestations de services. Exemples : la direction nationale
des enquêtes douanières, le service des essences des
armées, le service national des travaux du ministère de la
culture.
Ces services comptent environ 20.000 emplois, sur les 75.000 existant
actuellement dans les administrations centrales. Leur organisation devrait
désormais obéir notamment au principe de l'externalisation des
tâches.
50 % des services à compétence nationale existent
déjà en fait, 50 % seront créés par
"externalisation" de tâches actuellement exercées au sein des
administrations centrales. Au total, on devrait compter une centaine de
services à compétence nationale.
Les services à compétence nationale sont des services auxquels
seront fixés des objectifs, et dont seront évalués les
résultats ; des contrats de service pourront être
passés entre eux et l'administration centrale.
c) Les contrats de service
La notion de contrat de service va plus loin que celle de
service à compétence nationale. Elle représente un nouveau
mode de gestion qui peut s'appliquer à tous les échelons
administratifs.
Telle qu'elle a été définie par le précédent
gouvernement, à partir d'un conseil interministériel du
29 mai 1996, la notion de contrat de service offre à
l'administration de réelles possibilités de modernisation.
Le contrat de service : un réel espoir de modernisation
1. La définition des objectifs, la mesure des
résultats
Les objectifs des contrats de service seront très
précisément spécifiés, leurs résultats
mesurés et comparés si possible avec ceux de services du secteur
commercial.
2. La consultation des usagers
Des enquêtes de satisfaction seront réalisées pour
consulter les usagers.
3. Un nouveau mode de gestion
Le contrat de service doit permettre une autonomie plus grande des
gestionnaires, en contrepartie d'un contrôle des résultats.
Les chefs de service négocieront chaque année, au printemps, avec
leur administration centrale le budget global qui leur sera alloué
l'année suivante, en personnels et en fonctionnement, pour exercer les
missions qui leur seront confiées.
Chaque service se verra ainsi indiquer une enveloppe globale de
référence -addition d'une dotation globale de fonctionnement et
de crédits de personnel calculés à partir des emplois
prévus pour le service- au sein de laquelle il aura la
possibilité de réallouer les moyens, soit en rendant des emplois
d'une catégorie en échange d'emplois d'un profil plus
adapté aux missions qui lui ont été assignées, soit
en proposant des économies nettes de personnel et en demandant, le cas
échéant, un renforcement d'autres dotations, soit,
également en panachant l'ensemble de ces dispositions, sans toutefois
proposer des créations nettes d'emplois au-delà de la dotation
d'emplois communiquée par l'administration centrale.
Une fois arrêtées les décisions gouvernementales sur le
projet de loi de finances, le service recevra notification définitive de
son budget, en crédits et en emplois.
4. L'association des personnels à l'amélioration de la
gestion et les retours financiers en leur faveur
Un intéressement financier des agents pourra être mis en oeuvre
sur la base des économies réalisées.
A l'heure actuelle, trois ministères se sont lancés dans une
démarche d'expérimentation des contrats de service avec leurs
services déconcentrés : le ministère de
l'équipement, le ministère de l'éducation nationale, le
ministère de l'industrie.
A l'équipement
Le ministère de l'équipement a inclus cette démarche dans
le cadre de l'accord pluriannuel qu'il a conclu avec la direction du budget sur
l'évolution des emplois et des crédits de fonctionnement.
Il s'agit d'une contractualisation sur la base, d'une part d'engagements
concrets des directions départementales de l'équipement portant
sur l'amélioration de la qualité, en termes de services rendus
aux usagers dans divers domaines et de performance interne, et d'autre part
d'engagements de l'administration centrale sur un budget global de
fonctionnement (emplois, crédits).
Au sein de cette enveloppe, des moyens de fonctionnement peuvent être
échangés contre des emplois, des économies peuvent donner
lieu à des retours sous forme collective ou individuelle.
La mesure de performance s'appuie sur les indicateurs de gestion existants
(plans "objectifs-moyens" mis en place il y a quatre-cinq ans) ainsi
que sur
d'autres indicateurs permettant d'évaluer l'amélioration de la
qualité du service rendu aux usagers.
La programmation pluriannuelle Budget-Equipement a pu être mise en place
pour trois ans grâce à la quantification des missions du
ministère de l'équipement, et dans le cadre de la
rénovation de la procédure d'élaboration de la loi de
finances où un budget de "reconduction" est arrêté
désormais en début d'année avec chaque ministère.
Les contrats de services sont prévus sur la base du volontariat de
directions départementales de l3'équipement, parce que des outils
de contrôle de gestion existent dans les services
déconcentrés de l'équipement depuis plusieurs
années.
A l'éducation nationale
A l'éducation nationale, l'expérimentation devrait concerner le
fonctionnement des services administratifs académiques et des
lycées et collèges. Quatre groupes de travail successifs ont
été programmés pour accompagner la démarche
(expérimentation de nouvelles règles de fonctionnement
budgétaire ; mise au point d'un référentiel national
des missions ; démarche qualité-réflexion autour
d'éventuels engagements scolaires ; implication des personnels et
de leurs représentants).
A l'industrie
Au ministère de l'industrie, les directions régionales
concernées ont lancé l'élaboration de leurs engagements
spécifiques et l'identification des indicateurs de mesure pertinents et
préparé des actions internes, notamment dans le domaine du
management du personnel.
Dans les trois ministères, la démarche se développe en
étroite association avec le personnel.
2. La rénovation de la gestion de la fonction publique
a) Ce qui a été fait
Trois décrets sont intervenus le 31 mai 1997 pour
faciliter la déconcentration de la gestion des personnels et du dialogue
social :
- le premier institue l'obligation de créer des comités
techniques paritaires locaux dans les services déconcentrés de
plus de 50 personnes ;
- le deuxième décret ouvre la possibilité de
déconnecter le niveau (local ou central) où siège la
commission administrative paritaire (consultative) du niveau (local ou central)
où est prise la décision individuelle.
- le troisième décret donne au préfet la
compétence d'organiser les mises à disposition de personnel entre
les services extérieurs de l'Etat d'un même échelon
territorial.
Ces décrets vont beaucoup plus loin que de simples mesures
techniques : ils devraient permettre, pour la première fois, une
gestion avisée du personnel au plan territorial.
b) Les chantiers futurs
1) Les fusions de corps
Il existe actuellement à peu près 1.000 corps
administratifs ; seuls 50 ont pu faire l'objet de fusion.
Par exemple, il existe 20 corps de secrétaires administratifs des
services déconcentrés. Or, cette division est un obstacle
essentiel à la mobilité des agents. Le problème des
rémunérations accessoires est évidemment un
élément important de la réforme, les indemnités
pouvant aller de 1 à 10 pour des corps comparables.
2) La réforme de la notation
Il faut enrichir la procédure de notation annuelle, actuellement assez
stérile.
En effet, cette notation devrait être l'occasion d'établir un
bilan professionnel de l'agent. Par ailleurs, la notation devrait pouvoir
être utilisée pour favoriser une mobilité, pour fonder une
individualisation des primes allouées.
3) La création d'une bourse des emplois
Une bourse des emplois devait être mise en place en 1997, par
centralisation des offres et demandes à la direction
générale de la fonction publique (support : Minitel,
Internet, presse...).
Une expérimentation devait être menée sur
2-3 administrations et concerner tous les emplois : elle devait
permettre d'utiliser le congé "formation-mobilité", qui ouvrira
aux fonctionnaires la possibilité de changer de métier au sein
même de la fonction publique.
c) Aller plus loin ?
Votre rapporteur considère qu'il n'est pas interdit
d'envisager une gestion salariale dans le secteur public qui obéirait
à des critères rationnels, selon la démarche
suivante :
1. Le Parlement pourrait fixer une enveloppe salariale maximale pour la
fonction publique (sur plusieurs années).
2. La direction du budget répartirait cette enveloppe entre les
différents ministères selon les modalités actuellement
retenues pour le contrat pluriannuel avec le ministère de
l'équipement.
3. Enfin, des contrats de service seraient conclus par les ministères
avec leurs services déconcentrés.
3. La gestion patrimoniale de l'Etat
Il s'agit là d'un pan essentiel de la réforme
de l'Etat, puisque l'on se propose de passer d'une logique de budget à
une logique de bilan.
Il faut rendre hommage au précédent ministre de
l'économie et des finances d'avoir su amorcer ce changement des
mentalités, qui seul permettra une rationalisation des décisions
de l'Etat.
Une mission a été confiée à
M. François (trésorier payeur général) qui
doit publier un livre blanc au début de l'année 1998, contenant
une expertise technique des problèmes très approfondie.
Cette réforme amènera à introduire la notion de provision
et d'amortissement dans la comptabilité de l'Etat.
En ce qui concerne la politique immobilière, une commission
présidée par Jean-Pierre Weiss, ingénieur en chef des
ponts et chaussées, a présenté des propositions qui seront
prochainement discutées en commission interministérielle de la
politique immobilière de l'Etat.
A partir du livre blanc, il conviendra de saisir le Parlement des bases d'un
nouveau plan comptable pour l'Etat.
III. DES INTERROGATIONS NOMBREUSES EN DÉBUT DE LÉGISLATURE
Votre rapporteur considère que les avancées opérées par le gouvernement précédent sur la réforme de l'Etat ont été remarquables, même si elles ont suscité peu de publicité. Elles nécessitent incontestablement d'être poursuivies, mais le nouveau gouvernement n'a pas encore donné d'assurances véritables à ce sujet.
A. IL FAUT ALLER PLUS LOIN
1. La gestion de la fonction publique doit absolument être modernisée
En ce qui concerne la gestion de la fonction publique, trois chantiers au moins doivent absolument être poursuivis : les fusions de corps administratifs (il en existe à peu près 1.000), l'enrichissement de la procédure de notation, l'élargissement de la mobilité des fonctionnaires qui pourrait conduire à l'avènement de "métiers" dans la fonction publique.
2. La négociation salariale doit changer de cadre
Une étape supplémentaire vers la modernisation de la fonction publique pourrait permettre de sortir d'une gestion salariale à la fois rigide et à courte vue : le Parlement pourrait fixer une enveloppe salariale maximale pour la fonction publique (sur plusieurs années), la direction du budget répartirait cette enveloppe entre les différents ministères selon les modalités actuellement retenues pour le contrat pluriannuel avec le ministère de l'équipement, et enfin des contrats de service pourraient être conclus par les ministères avec leurs services déconcentrés. Mais cette évolution devrait s'inscrire dans le contexte plus général de la révision, à l'évidence indispensable, de l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique sur les finances publiques.
3. L'Etat doit prendre conscience qu'il gère un patrimoine
A cet égard, le livre blanc annoncé sur la
gestion patrimoniale de l'Etat devrait pouvoir permettre de soumettre au
Parlement les bases d'un nouveau plan comptable.
Face à l'ensemble de ces questions, les orientations du nouveau
gouvernement ne paraissent pas claires.
B. LES INTENTIONS DU NOUVEAU GOUVERNEMENT N'APPARAISSENT PAS CLAIREMENT
1. L'abandon de la réduction des effectifs
Une seule option apparaît hélas de manière incontestée, qui est celle de l'abandon de la réduction des effectifs : votre rapporteur ne peut que déplorer ce revirement, car la modernisation de l'Etat va bien évidemment de pair non seulement avec une redéfinition de ses missions -sur laquelle aucun débat public n'a pu encore avoir lieu- mais aussi, à tout le moins, avec une plus grande efficacité de ses méthodes qui implique un allégement des structures.
2. Une absence de volonté politique
La communication présentée sur la réforme de l'Etat au Conseil des Ministres par le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation, le 5 novembre dernier, laisse des problèmes essentiels en suspens.
a) Des références dépassées
Le gouvernement, plutôt que de reconnaître les aspects novateurs de la circulaire du 26 juillet 1995, se réfère à des concepts beaucoup plus anciens, et qui précisément n'ont pas fait leurs preuves : la décentralisation de 1982, le renouveau du service public en 1989, l'effort de déconcentration de 1992.
b) Des objectifs réduits
Plutôt que d'engager la réflexion sur le
rôle de l'Etat, vis-à-vis du secteur privé, des
collectivités locales, et de l'Union Européenne, ou même
d'approfondir les résultats obtenus en matière de modernisation
des structures (services à compétence nationale,, contrats de
service), le gouvernement s'attache à poursuivre des objectifs aussi
vagues et inconsistants que "
la simplification des procédures"
ou
"
de nouvelles modalités de fonctionnement des services
déconcentrés
".
Par ailleurs, il renvoie la suite de la réforme à un futur
débat d'orientation au printemps prochain, puis à des assises
programmées pour l'automne 1998, enfin à l'élaboration
-d'ici à l'année prochaine- de programmes pluriannuels par les
ministères...
Au total, le contenu de la réforme de l'Etat semble réduit,
dans l'immédiat, à une approbation du bout des lèvres des
acquis du précédent gouvernement, en abandonnant en fait les
chantiers essentiels tels que la rénovation en profondeur de la gestion
de la fonction publique.
Au nom de la concertation, les sujets "qui fâchent" sont ainsi remis
sine die.
Votre rapporteur estime que le coup d'arrêt donné à
l'impulsion de réformes aussi fondamentales est préjudiciable aux
citoyens autant qu'aux fonctionnaires, qui ne peuvent plus se satisfaire d'une
gestion totalement périmée. Plus grave encore, la
réflexion sur le rôle de l'Etat s'arrête, alors que son
environnement évolue tous les jours : l'obstacle de cette remise en
question ne pourra pas indéfiniment être esquivé au nom du
retour au "renouveau du service public".
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mercredi 15 octobre 1997, sous la
présidence de M. Christian Poncelet, président, la
commission a examiné, sur le rapport de
M. Philippe Marini,
rapporteur spécial,
les crédits de la
fonction publique
et de la
réforme
de l'
Etat.
M. Philippe Marini, rapporteur spécial,
a
précisé que l'examen de ces crédits recouvrait à la
fois l'analyse des charges de personnel de l'Etat, qui sont des dépenses
transversales à l'ensemble des départements ministériels,
représentant plus de 600 milliards de francs en 1998, et l'examen
des crédits du ministère chargé de la gestion de la
fonction publique, dont les crédits sont individualisés dans le
budget des services généraux du Premier ministre, pour un montant
de 1,4 milliard de francs en 1998.
M. Philippe Marini
a tout d'abord rappelé que les
dépenses de la fonction publique progressaient de 2,9 % en 1998,
-soit deux fois plus vite que l'ensemble des dépenses de l'Etat- et
dépassaient le seuil de 600 milliards de francs, pour
représenter 38,4 % du budget général. Cette
progression de 17,4 milliards de francs des charges de personnel
s'explique notamment par les revalorisations salariales opérées
en 1997, qui occasionnent une dépense de 4 milliards de francs,
mais aussi par l'inscription de deux provisions de 3 milliards de francs
au budget des charges communes, et de 575 millions de francs au budget de
la défense, au titre des mesures diverses d'ajustement salarial de 1998,
et par les mesures catégorielles (dont le plan Jospin et le protocole
Durafour) qui devraient entraîner une dépense de
2,3 milliards de francs. Par ailleurs, la dérive spontanée
des dépenses de pensions est de 5 milliards de francs en 1998, et
le glissement vieillissement technicité contribue à une
dépense estimée à près de 4 milliards de
francs.
M. Philippe Marini
a également rappelé que la
fonction publique de l'Etat induisait des dépenses allant au-delà
des charges liées aux fonctionnaires, telles que les subventions
à l'enseignement privé sous contrat ou les pensions et
allocations aux anciens combattants : en 1998, le total des dépenses
induites de fonction publique devrait progresser de 3,1 % et atteindre
692,3 milliards de francs, soit 43,7 % du budget
général de l'Etat.
M. Philippe Marini
a ensuite présenté les crédits
du ministère chargé de la fonction publique, regroupés en
un seul "agrégat" au sein des services généraux du Premier
ministre : il s'agit des moyens consacrés à la mise en oeuvre
d'une politique d'ensemble de la fonction publique, à la modernisation
de l'administration et à la réforme de l'Etat et, enfin, à
la tutelle des écoles d'administration.
De 1997 à 1998 ces crédits progressent de 20,3 % pour
atteindre 1.414,5 millions de francs, essentiellement du fait de
l'inscription d'une provision de 230 millions de francs destinée
à accompagner la négociation salariale dans la fonction publique.
Par ailleurs, les subventions aux écoles représentent
329,27 millions de francs, en quasi-stagnation. Le fonds pour la
réforme de l'Etat s'élève à 112,5 millions de
francs, aucun crédit d'investissement ne figurant en 1998 pour ce fonds,
la dotation étant alignée sur la régulation
budgétaire pratiquée au mois de juillet dernier sur les
crédits du fonds. Enfin, les crédits de formation
interministérielle diminuent de 40 à 32 millions de francs,
les crédits de modernisation de 20 à 14,3 millions de
francs, là encore par alignement sur les dotations budgétaires
issues de la régulation de juillet 1997.
M. Philippe Marini
a enfin souligné l'inscription d'un
crédit de 7,4 millions de francs, consacré à une
réserve d'emplois destinée à la mobilité des
administrateurs civils, entre ministères, vers les services
déconcentrés et les organisations internationales.
M. Philippe Marini
a ensuite fait part de ses observations sur les
crédits de la fonction publique et de la réforme de l'Etat pour
1998.
En premier lieu, il apparaît que le poids des dépenses de
personnel reflète celui des créations d'emplois
opérées depuis le début des années 1980 : entre
1980 et 1996, les effectifs budgétaires de l'Etat ont progressé,
à champ constant de + 115.700 emplois.
Il a fallu attendre 1997 pour que soit marqué un coup d'arrêt
à cette évolution inquiétante, avec une diminution de
0,4 % des effectifs hors Défense -soit - 5.499 emplois.
En 1998, cette orientation est abandonnée : le mouvement de
créations reprend avec un solde positif de 490 emplois civils, et
de 6.533 emplois en prenant en compte la Défense.
M. Philippe Marini
a ensuite fait remarquer que l'Etat ne
parvenait pas à maîtriser la dépense de fonction
publique : en effet, l'abandon de la politique de réduction
d'effectifs renforce encore la difficulté évidente pour l'Etat de
maîtriser ses coûts de personnel, car au poids des effets s'ajoute
celui du "glissement vieillissement technicité" positif,
reflétant les mesures catégorielles des années
passées.
M. Philippe Marini
a souligné, par ailleurs, que cette
absence de maîtrise naissait également de l'impossibilité
actuelle de scinder la négociation salariale, dont l'ouverture est
aujourd'hui annoncée sous sa forme traditionnelle avec l'ensemble des
syndicats de fonctionnaires. Ses répercussions touchent non seulement
l'ensemble des agents de l'Etat mais au total l'ensemble de la dépense
induite de fonction publique, soit plus de 39 % des dépenses du
budget.
M. Philippe Marini
a également fait remarquer que les
contours de l'emploi public étaient devenus flous. En effet,
au-delà des 2,2 millions d'agents de l'Etat, il faut comptabiliser
dans l'emploi public, les 200.000 emplois des établissements
publics nationaux (hors entreprises nationales), les 165.000 agents de
France Télécom et les 280.000 agents de La Poste, les
1,4 million d'agents de la fonction publique territoriale, les
845.000 agents de la fonction publique hospitalière. Au total, on
recense donc plus de 5 millions d'agents publics pour une population
active de 22,4 millions, soit plus d'un actif sur cinq.
Par ailleurs, les agents employés par l'Etat, les collectivités
territoriales et les établissements hospitaliers ne le sont pas tous
sous le même statut : le "noyau dur" de la fonction publique est
constitué des titulaires, soit à peu près les
quatre-cinquièmes des agents publics, le solde, soit environ un million
de personnes, étant constitué de non titulaires : contractuels,
auxiliaires, vacataires... Leur proportion est beaucoup plus grande dans les
établissements publics (plus de 60 %) et dans la fonction publique
territoriale (plus de 30 %) que dans la fonction publique d'Etat où
ils représentent toutefois plus de 13 % des effectifs.
De même, un troisième cercle d'agents est constitué de
personnes bénéficiaires de contrats emploi solidarité, qui
ne sont pas des contrats de droit public, et qui ne peuvent pas être
directement conclus par les services de l'Etat : toutefois de nombreux contrats
emploi solidarité sont conclus par les collectivités
territoriales et par les établissements publics, ce qui aboutit à
les considérer comme des contrats "fonction publique", dont le nombre
est supérieur à 200.000.
Enfin, les "emplois-jeunes" prévus dans le projet de loi de finances
pour 1998 peuvent être considérés comme des emplois
publics, puisque l'Etat prendra en charge 80 % de leur
rémunération, et même 100 % pour les jeunes
recrutés par l'éducation nationale : il y aura là encore
quelque 100.000 emplois publics relevant du droit privé.
Au total, l'Etat emploie donc une proportion non négligeable d'agents
dans des conditions non statutaires, même si quelques progrès ont
pu être réalisés grâce à la loi du
16 décembre 1996 relative à l'emploi dans la fonction
publique, qui comporte un plan de résorption de l'emploi précaire
s'adressant à environ 20.000 agents du niveau de la
catégorie C et près de 18.000 agents assurant des fonctions
d'enseignement ou d'éducation.
M. Philippe Marini, rapporteur spécial,
a ensuite fait part
de ses réflexions sur les lenteurs de la réforme de l'Etat. Alors
que l'utilité du fonds pour la réforme de l'Etat ne paraît
pas totalement démontrée, les mesures prises jusqu'au 31 mai 1997
en matière de déconcentration ont été
décisives, qu'il s'agisse du transfert des décisions
administratives individuelles aux autorités déconcentrées
de l'Etat à partir du 1er janvier 1998, de la définition de la
notion de contrat de service, de la création des services à
compétence nationale ou enfin des mesures prises pour faciliter la
déconcentration de la gestion des personnels et du dialogue social qui
devraient permettre, pour la première fois, de pouvoir pratiquer une
gestion avisée du personnel au plan territorial.
Par ailleurs,
M. Philippe Marini
a rappelé que le
précédent ministre de l'économie et des finances avait
réussi à amorcer un objectif de gestion patrimoniale de l'Etat et
qu'une mission avait été confiée à un
trésorier payeur général, qui devait publier un livre
blanc au cours de cet automne, contenant une expertise technique des
problèmes.
M. Philippe Marini
a donc considéré que les
avancées opérées par le Gouvernement
précédent sur la réforme de l'Etat avaient
été remarquables, même si elles avaient suscité peu
de publicité, mais qu'elles nécessitaient incontestablement
d'être poursuivies.
M. Philippe Marini
a notamment rappelé qu'en ce qui
concernait la gestion de la fonction publique, trois chantiers au moins
devaient aboutir : les fusions de corps administratifs, l'enrichissement de la
procédure de notation et l'élargissement de la mobilité
des fonctionnaires qui pourrait conduire à l'avènement de
"métiers" dans la fonction publique.
S'agissant de la négociation salariale, une étape
supplémentaire vers la modernisation de la fonction publique pourrait
permettre de sortir d'une gestion salariale à la fois rigide et à
courte vue : le Parlement pourrait fixer une enveloppe salariale maximale pour
la fonction publique (sur plusieurs années), la direction du budget
répartirait cette enveloppe entre les différents
ministères selon les modalités actuellement retenues pour le
contrat pluriannuel avec le ministère de l'équipement, et enfin
des contrats de service pourraient être conclus par les ministères
avec leurs services déconcentrés. Cette évolution devrait
s'inscrire dans le contexte plus général de la révision,
à l'évidence indispensable, de l'ordonnance du 2 janvier
1959 portant loi organique sur les finances publiques.
M. Philippe Marini
a enfin insisté sur le livre blanc
annoncé sur la gestion patrimoniale de l'Etat qui devrait pouvoir
permettre de soumettre au Parlement les bases d'un nouveau plan comptable.
Au regard de l'ensemble de ces objectifs,
M. Philippe Marini,
rapporteur spécial,
a estimé que les intentions du nouveau
Gouvernement n'apparaissaient pas clairement, hors la volonté
affichée de ne pas réduire les effectifs.
En effet, l'intervention toute récente de M. le ministre de la
réforme de l'Etat et de la décentralisation devant la commission
de modernisation du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat,
le 24 septembre dernier, ne traduisait pas de véritable
volonté politique de réforme.
Au vu de ces incertitudes,
M. Philippe Marini, rapporteur
spécial
, a proposé de rejeter les crédits de la
fonction publique figurant aux Services généraux du Premier
Ministre.
A l'issue de cet exposé, un débat s'est ouvert au sein de la
commission.
Répondant à
M. Jacques Oudin
,
M. Philippe
Marini, rapporteur spécial,
s'est déclaré
disposé à effectuer des investigations, en sa qualité de
rapporteur spécial, sur le problème des fonctionnaires mis
à disposition d'organismes extérieurs à l'administration.
Par ailleurs, il est convenu de la nécessité absolue de
réformer la procédure de notation des fonctionnaires. Enfin, le
rapporteur spécial a rappelé qu'il avait abordé, au cours
de ses précédents entretiens avec le commissaire à la
réforme de l'Etat, les questions de la gestion prévisionnelle des
ressources humaines et de l'avènement d'une véritable
mobilité des fonctionnaires.
En réponse à
M. Roland du Luart
, le rapporteur
spécial a rappelé que la progression des charges de pensions
passait de 3 milliards de francs en 1997 à 5 milliards de
francs en 1998 et que les dépenses de pensions étaient
appelées à progresser de 65 milliards de francs après
l'année 2015, du fait de l'évolution démographique des
régimes.
Par ailleurs,
M. Philippe Marini, rapporteur spécial,
a
précisé que l'inscription d'une provision de 230 millions de
francs au budget des Services généraux du Premier ministre
était destinée à l'accompagnement de la négociation
salariale entamée avec les syndicats de la fonction publique.
Enfin, il a rappelé que l'abaissement de la durée du travail
à 35 heures dans la fonction publique devait, d'après les
annonces faites par le Gouvernement, être précédé
d'un bilan de la durée effective de travail par corps de fonctionnaires.
M. Philippe Marini, rapporteur spécial,
a ensuite
souligné la convergence de ses analyses avec celles de
M. Denis
Badré
, qu'il s'agisse du flou de la gestion des emplois publics, des
incertitudes actuelles sur la poursuite de la réforme de l'Etat, du
risque de voir surgir la nécessité de titulariser dans la
fonction publique les bénéficiaires des emplois-jeunes, ou des
difficultés soulevées par la formation de ces jeunes. Il a par
ailleurs estimé que la constitution d'une réserve d'emplois
destinée à favoriser le retour des administrateurs civils
détachés auprès des services extérieurs de l'Etat
ou d'organisations internationales était une mesure qui paraissait
raisonnable dans son principe.
En réponse à
M. Jean-Philippe Lachenaud
, le
rapporteur spécial est convenu de la nécessité d'adapter
la réduction du temps de travail à des situations
particulières telles que celles des agents hospitaliers. Il a par
ailleurs reconnu les inconvénients liés à la nature des
emplois-jeunes, reposant sur des contrats de droit privé alors qu'ils ne
correspondent pas à une demande solvable. Il s'est enfin
déclaré prêt à effectuer, conjointement avec le
rapporteur des crédits de l'enseignement supérieur, un
contrôle de l'exécution des dépenses de
rémunérations et d'heures supplémentaires pour les
professeurs des universités.
M. Philippe Marini, rapporteur spécial,
a ensuite
donné acte de son désaccord avec les déclarations de
M. Gérard Miquel
, qui avait souligné
l'intérêt du maintien d'emplois au niveau départemental,
réaffirmé l'utilité de services de l'Etat suffisamment
solides tels que ceux chargés de la santé publique, et mis en
garde contre les surcoûts de services publics dévolus à la
gestion privée tels qu'il les constatait aux Etats-Unis.
M. Philippe Marini, rapporteur spécial,
a en effet
estimé qu'il fallait se donner les moyens d'une politique
cohérente de maîtrise des charges de personnel. Il a en outre
rappelé le risque de fonctionnarisation des emplois-jeunes, notamment de
ceux qui seront utilisés pour le service national.
Répondant ensuite à
M. Maurice Blin
, le rapporteur
spécial a estimé que la mobilité territoriale des
fonctionnaires devait pouvoir s'effectuer dans de meilleures conditions. Il a
par ailleurs rappelé l'intérêt de l'introduction de la
notion juridique de services à compétence nationale.
Enfin, en réponse à
M. Christian Poncelet,
président
, le rapporteur
spécial
a
rappelé que la loi de programme sur la justice adoptée en 1995
prévoyait la création pluriannuelle de postes de magistrats, mais
s'est interrogé sur la répartition inégale de magistrats
tels que les juges pour enfants dans des départements pourtant
comparables. Par ailleurs,
M. Philippe Marini, rapporteur
spécial,
a estimé qu'il n'était pas opportun de
prévoir l'affiliation des bénéficiaires des emplois-jeunes
à la caisse nationale de retraite des collectivités locales, ce
qui préjugerait injustement de l'intégration des
intéressés dans la fonction publique territoriale.
Enfin,
M. Philippe Marini, rapporteur spécial,
s'est
déclaré disposé à poursuivre des investigations sur
le passage des fonctionnaires au secteur privé, tout en soulignant la
nécessité d'en préserver le principe au nom de la
liberté de choix individuelle.
La commission a alors
adopté
le
rapport
présenté par
M. Philippe Marini, rapporteur
spécial,
et
décidé
de
réserver le
vote
sur
les crédits
de la fonction publique inclus dans le
fascicule budgétaire des services généraux du Premier
ministre
jusqu'à l'examen de ce budget.
Au cours d'une séance tenue le 20 novembre 1997, la commission a
adopté deux amendements, tendant à réduire les
crédits des mesures nouvelles du titre III du budget des services
généraux du Premier ministre de 276,6 millions de francs, et
du titre IV du même budget de 9,3 millions de francs. Elle a
ensuite décidé de recommander au Sénat l'adoption du
budget ainsi modifié.
1
C'est-à-dire hors budgets
annexes et comptes spéciaux du Trésor.
2
Les dépenses publiques françaises : une mise en
perspective internationale - Rexecode Octobre 1997.
3
et aussi des autres fonctions publiques, hors budget de l'Etat
4
dont plus de 10 % d'agents contractuels inclus dans des
conventions collectives spécifiques.