ARTICLE 58 - Institution d'une amende en cas de délivrance abusive d'attestations ouvrant droit à un avantage fiscal

Commentaire : cet article tend à insérer un nouvel article 1768 quater dans le code général des impôts, qui institue une amende fiscale à l'encontre de toute personne, organisme ou groupement qui délivre irrégulièrement des attestations de versement ouvrant droit à déduction ou réduction fiscale .

I. UN DISPOSITIF ACTUEL INÉQUITABLE

A. UNE RECRUDESCENCE DES DÉLIVRANCES ABUSIVES D'ATTESTATIONS OUVRANT À UN AVANTAGE FISCAL

Une enquête réalisée l'été dernier par les services du contrôle fiscal a révélé qu'un certain nombre d'assureurs avaient délivré des attestations de versements de primes qui, pourtant, n'ouvrent plus droit à la réduction d'impôt depuis la loi de finances pour 1996 dont l'article 4 module l'avantage fiscal.

Par ailleurs, d'autres enquêtes ont mis en lumière des irrégularités concernant les reçus délivrés aux contribuables ayant effectué des dons au profit d'oeuvres ou d'organismes d'intérêt général et bénéficiant, à ce titre, d'une réduction d'impôt.

B. UN DISPOSITIF QUI PERMET UNIQUEMENT DE SANCTIONNER LES CONTRIBUABLES, MÊME DE BONNE FOI

Or, le dispositif actuel ne permet pas de sanctionner les personnes ou organismes qui ont délivré irrégulièrement les attestations ouvrant droit à une déduction ou une réduction d'impôt.

En effet, l'administration est simplement autorisée à opérer un redressement à l'égard du contribuable ayant bénéficié de cet avantage. En outre, ce dernier se verra appliquer un intérêt de retard même s'il est de bonne foi.

Le présent article propose de remédier à cette situation.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. LA POSSIBILITÉ DE SANCTIONNER LES ORGANISMES DÉLIVRANT IRRÉGULIÈREMENT LES ATTESTATIONS

Pour éviter d'avoir à sanctionner le contribuable qui peut s'être fié de bonne foi aux indications portées sur le certificat délivré par l'assureur ou l'organisme d'intérêt général, cet article propose d'instaurer une amende à l'encontre de toute personne, organisme ou groupement qui délivrerait irrégulièrement des attestations de versements ouvrant droit à déduction ou à réduction d'impôt.

Le champ d'application de cet article est très étendu. Ainsi, les redevables éventuels de l'amende peuvent être des personnes physiques comme des personnes morales, des organismes ou des groupements, ce qui inclut donc aussi bien les associations que les organismes d'assurance.

De même, les termes utilisés pour qualifier le document délivré (certificat, reçu, état, attestation) englobent tous les documents qui peuvent être joints à la déclaration de revenu pour justifier le bénéfice d'un avantage fiscal.

Par ailleurs, l'irrégularité envisagée couvre un champ très large puisque l'exposé des motifs vise aussi bien les délivrances abusives (qui peuvent résulter d'une erreur de droit) que frauduleuses, c'est-à-dire intentionnelles. La bonne foi de la personne ou de l'organisme ayant délivré l'attestation n'est donc pas prise en compte.

Cette disposition paraît bien rigoureuse. Elle trouve en partie sa contrepartie dans le fait que les contribuables ne pourront plus faire l'objet de redressement concernant l'avantage fiscal indu dont ils ont bénéficié. Toutefois, votre rapporteur espère que l'administration se montrera compréhensive et fera bon usage du droit de remises et de transactions à titre gracieux que lui accorde l'article L. 247 du livre des procédures pénales.

Ce dispositif n'est acceptable que s'il n'entraîne pas systématiquement une double sanction, et du contribuable et de la personne ou de l'organisme délivrant irrégulièrement un certificat. Or, l'article proposé par le Gouvernement et adopté par l'Assemblée nationale ne mentionne nulle part le fait que l'introduction de cette amende conduit à ne plus opérer de redressement sur le contribuable de bonne foi.

C'est pourquoi votre rapporteur propose un amendement visant à rappeler l'objectif de ce nouveau dispositif.

Le montant de l'amende est fixé à 25 % des sommes indûment mentionnées sur l'attestation fournie au contribuable. Ce taux a été choisi par référence au taux de la réduction d'impôt afférente aux primes d'assurance-vie.

Conformément à l'article L. 80 D, le recouvrement de cette amende ne sera régulier que si la motivation de l'amende fiscale est portée à la connaissance de la personne ou de l'organisme sanctionné trente jours au moins avant la mise en recouvrement. Durant ce délai, ces derniers peuvent présenter leurs observations.

En outre, cet article prévoit la responsabilité solidaire des dirigeants de droit ou de fait des personnes émettrices des attestations. Cette dernière disposition vise essentiellement les dirigeants d'association.

À l'origine, le texte proposé par le Gouvernement ne prenait pas en compte le comportement du dirigeant, et notamment, sa bonne foi. Or, une telle sévérité aurait conduit à des abus d'autant plus regrettables qu'ils auraient gravement affecté le monde associatif. Toutefois, l'Assemblée nationale a adopté un amendement visant à limiter au cas où la mauvaise foi est établie, la possibilité de mettre enjeu la responsabilité solidaire.

B. LES PROBLÈMES POSÉS PAR LES ASSOCIATIONS

L'application du dispositif prévue par le présent article aux associations a provoqué des inquiétudes dans le milieu associatif à cause du différend qui les oppose à l'administration fiscale à propos de la déductibilité des cotisations d'adhésion. Alors que la documentation de base de la direction générale des impôts dispose que « la cotisation versée par les membres d'une association ne peut jamais avoir la nature d'un don ouvrant droit à un avantage fiscal » , beaucoup d'associations estiment que les cotisations qu'elles recueillent ne représentent pas la contrepartie d'un service rendu et, en conséquence, sont déductible au titre de l'impôt sur le revenu. En outre, elles soulignent l'inégalité de situation entre, d'une part, les syndicats et partis politiques, dont les cotisations ouvrent droit à réduction conformément au 2 bis de l'article 200 du code général des impôts et, d'autre part, les associations.

Votre rapporteur est conscient de ce problème et estime qu'il mériterait d'être examiné attentivement dans le cadre d'une loi sur le financement des associations.

En attendant, il tient à rappeler la création, dans le cadre de la politique d'amélioration des relations entre l'usager et l'administration, de « correspondants-associations » dans chaque direction départementale des services fiscaux. Ces derniers ont pour mission de recueillir toutes les interrogations des associations sur leur financement ou leur mode de fonctionnement, et de leur apporter les réponses appropriées.

En outre, le service de communication de l'administration fiscale a élaboré une plaquette d'information destinée spécialement aux associations.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter l'article ainsi amendé.

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