5. Le mouvement syndical
Une évaluation de l'OCDE de 1991, seule donnée générale récente disponible, estime le taux de syndicalisation en France à 9,8 % de la population active. Ce taux est de 25 % pour les agents de la fonction publique, mais il n'est que de 7 % pour les salariés du secteur privé.
Les autres données statistiques disponibles permettant de mesurer le mouvement syndical en France sont celles relatives à l'implantation syndicale dans les comités d'entreprise, établies à partir de l'exploitation au niveau national des résultats des élections aux comités d'entreprise en 1993, et celles relatives aux élections prud'homales qui se sont tenues en décembre 1992.
Les résultats des élections aux comités d'entreprise pour 1993 (hors SNCF) marquent une remontée significative du taux de participation : alors qu'il diminuait de façon pratiquement continue depuis 1968, le taux est remonté de 1,3 point entre 1991 et 1993. Pour l'ensemble des collèges, seuls les non-syndiqués, la CFTC et divers syndicats non affiliés aux grandes confédérations améliorent significativement leur score.
Avec un taux de 20,8 %, la CFDT prend la première place, avec une progression de 0,3 points par rapport à 1991. La CGT recueille un taux de 19,6 %. Avec un taux de 4,9 %, la CFTC connaît une progression de l'ordre de 0,4 points. La CGC enregistre un résultat stable avec un taux de 6,5 %. La CFTC progresse dans les grands établissements ; les non-syndiqués progressent surtout dans les tranches de taille inférieures à 50 salariés.
Les résultats des dernières élections prud'homales, celles de décembre 1992, marquent le maintien de la CGT (33,4 %) à la tête des confédérations représentatives (malgré un léger tassement), une légère progression de la CFDT (23,7 %) et une stabilité de la CGT-FO (20,4 %). En revanche, le taux d'abstention gagne plus de 5 points par rapport aux élections de 1987 et atteint le niveau record de 59,72 %, ce qui signifie que seulement 4 électeurs sur 10 se sont déplacés pour élire leurs conseillers prud'homaux.
Le mouvement syndical a enfin été marqué pour l'année 1996 par la reconduction des instances dirigeantes de la CGC et de la CGT-FO, ainsi que par le remplacement de la CGT-FO par la CFDT à la tête de la CNAM.
6. Les conflits du travail13 ( * )
Avec près de 6 millions (5.883.200) de journées de grève (journées individuelles non travaillées (JINT) -dont près de 4 millions (3.762.700) dans la Fonction publique d'État (y compris France Télécom, à l'exclusion de la Fonction publique territoriale et de la Fonction publique hospitalière) et un peu plus de 2 millions (2.120.500) dans le secteur privé et semi-public (entreprises privées, publiques, nationalisées y compris SNCF, RATP, Air France et Air Inter)- l'année 1995 contraste avec les années précédentes. 1995 a, en effet, été marquée par les grandes grèves de la fin de l'année, motivées notamment par la réforme de la protection sociale.
En 1995, on a dénombré 2.120.500 JINT dans le secteur privé et semi-public. Durant la période 1982-1994, le nombre moyen de jours de grève était plus faible, environ 1,1 million par an. Cependant, bien qu'élevé, le chiffre atteint en 1995 reste en dessous du niveau de la décennie 1971-1981, qui comptabilisait en moyenne, chaque année, 3,3 millions de jours de grève.
Pour les conflits localisés, le nombre de jours de grève dans ces entreprises est passé de 500.500 en 1994 à 784.500 en 1995 (dont les 2/3 au premier semestre), soit un accroissement de 57 %. Dans le même temps, le nombre de grévistes a plus que doublé, passant de 215.200 à 521.720.
Le nombre de jours de grève dus aux conflits généralisés, dans les entreprises du secteur privé et semi-public, s'élève à 1.336.740 pour 1995. En 1994, 20.500 journées individuelles non travaillées seulement avaient été comptabilisées au titre des conflits généralisés. En 1995, ces conflits sont répartis, pour l'essentiel, entre septembre et décembre. Ils ont été déclenchés par l'évocation d'une réforme des régimes spéciaux de retraite, et par le projet de contrat de plan SNCF.
Si l'on additionne les conflits généralisés et localisés, deux entreprises, la SNCF et la RATP totalisent 1.281.000 jours de grève. Ceci représente 65 % du total des jours de grève de l'ensemble des entreprises du secteur privé et semi-public.
Les thèmes des régimes de retraite et du service public ont également conduit à une fort mobilisation des agents de l'État. Dans la Fonction publique de l'État, le nombre de jours de grève est passé de 226.600 en 1994 à 3.762.700 en 1995. En valeur absolue, le nombre de JINT dans les Postes et les Télécommunications passe de 169.000 JINT en 1994 à 1.432.080 en 1995.
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Comme l'année dernière, le budget du travail et de l'emploi constitue une exception dans le cadre restrictif du projet de loi de finances. Toutefois, il n'échappe pas aux impératifs de rigueur et d'économies.
Mais cette gestion nouvelle des actions de la politique de l'emploi voit son champs se réduire puisque la plus grosse part des crédits, une quarantaine de milliards à titre structurel (ristourne, apprentissage, ...) et une vingtaine à titre conjoncturel (CIE...) porte sur la réduction du coût du travail. A terme, une fois le transfert des cotisations sociales sur la CSG effectué, cette mesure d'exonération n'aura plus de raison d'être, ce qui devrait ramener la politique de l'emploi à un rôle subsidiaire dans la vie économique.
Votre commission approuve les grandes orientations du budget du travail et de l'emploi et se félicite des efforts de rigueur que le Gouvernement s'est imposés, même si certains choix lui paraissent un peu moins justifiés. Elle souhaite aussi que la réforme de la formation professionnelle soit poursuivie avec plus de célérité, afin d'éviter les retards de financement et d'écarter les soupçons qui pèsent en permanence sur le système de collecte, inspirant des décisions (amendement AGEFAL) qu'elle considère comme regrettables.
Elle rappelle le souhait exprimé par le Président René Monory, que soit entreprise une réflexion approfondie pour rapprocher plus complètement la politique de l'emploi des acteurs locaux, meilleurs connaisseurs du tissu économique local, et la transformer en une véritable politique de proximité.
Votre commission n'oublie pas cependant que certaines incertitudes entourent la mise en oeuvre de ce budget : les effets sur l'emploi, alors que les prévisions sont de plus en plus pessimistes, de la réduction des actions de traitement social (même si les emplois villes doivent y suppléer partiellement), l'avenir de l'association pour la gestion de la structure financière (ASF) alors que l'État n'y participe plus, l'application de la loi de Robien (dont le coût pour l'État peut paraître sous-estimé) ou encore les négociations avec l'UNEDIC pour, notamment, transférer à sa charge une partie de l'AFR...
Mais elle considère que la politique de l'emploi conduite ces dernières années et poursuivie par le présent budget a préparé les conditions d'une reprise durable de l'emploi dès que la croissance repartira.
Au terme de cet examen, et sous réserve des amendements proposés et des observations formulées ci-dessus, votre commission des Affaires sociales a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle contenus dans le projet de loi de finances pour 1997. |
* 13 Sources DARES.