II. LES RECETTES DU PROJET DE BUDGET POUR 1997
Les recettes de la Communauté pour 1997 1 ( * )
Le montant total des ressources propres s'élève à 1,16 % du PNB communautaire prévu pour 1997.
Ce pourcentage est inférieur à celui prévu l'an dernier -1,1889 %- et aussi au plafond fixé par la décision relative aux ressources propres du 31 octobre 1994 désormais applicable : 1,24 %.
A. L'ARCHITECTURE DES RECETTES
Par rapport au budget pour 1996, une évolution importante doit être relevée : la mise en oeuvre de la décision "ressources propres" autorisée désormais par sa ratification dans l'ensemble des Etats membres à la suite de la décision prise en cours d'année par les Pays-Bas produit une modification de la structure des recettes communautaires. Elle devrait se déformer au bénéfice d'un renforcement de la part de la contribution sur les Etats assise sur leur PNB, celle de leur contribution assise sur la TVA devant s'infléchir. Il faut observer d'emblée que ce n'est que par commodité de langage qu'on nomme ces deux recettes "ressources propres".
Evolution de la structure des recettes
communautaires
(en % du total)
En ce qui concerne la ressource TVA, elle représenterait 42,4 % du total des ressources communautaires. S'il est encore loisible de la considérer comme une ressource propre des Communautés en ce sens qu'elle est perçue sur la base d'une assiette unifiée et selon un système de taux fixé par la décision du 31 octobre 1994, on doit toutefois observer que les pouvoirs de décision de la Communauté sont aujourd'hui réduits à la constatation d'une assiette et à l'application d'un taux prédéterminé.
Mais, qualifier de "ressource propre" la ressource assise sur le PNB c'est pousser trop loin "l'impropriété". La quatrième ressource n'est en fait rien de plus qu'une recette permettant de solder le budget communautaire compte tenu des plafonds de recettes applicables et du niveau des dépenses. Le calcul de son taux apparaît purement arithmétique.
La question de la responsabilisation de l'Europe en matière de prélèvements reste donc posée et l'on peut même affirmer qu'elle se pose de plus en plus. Le système actuel des ressources des Communautés peut être considéré de ce fait comme transitoire.
Compte tenu, d'une part, de la pression qui devrait continuer de s'exercer en matière de gestion des finances publiques en Europe et, d'autre part, des perspectives d'élargissement de l'Union européenne, ce dossier doit être ouvert et faire d'urgence l'objet d'un vrai débat pour préparer les échéances de 1999.
Le système actuel a le mérite d'une certaine cohérence. Faute d'une vraie légitimité politique et étant donnée l'architecture politique de l'Europe, il est justifié que le pouvoir de prélever l'impôt soit refusé aux institutions européennes.
Mais, en l'état, le contrôle des Parlements nationaux n'est pas pour autant réellement assuré. Enfermé dans un système, il n'est qu'épisodique et contraint. Les Parlements nationaux ont un pouvoir d'adresse et de contrôle très indirect. Ils n'ont en aucun cas un pouvoir de décision et encore moins censure.
L'approfondissement de la réflexion sur les recettes des Communautés européennes doit également concerner les problèmes posés par les recettes actuelles.
L'amélioration de la connaissance des bases taxables doit être poursuivie afin que tous les Etats soient traités sur un pied d'égalité.
S'agissant de la TVA, le problème essentiel concerne le taux moyen pondéré (TMP) de celle-ci. Toute variation du TMP d'un Etat membre se traduit par une modification de sa base TVA et, le cas échéant, par une modification de sa situation au regard du seuil d'écrêtement de 55 % du PNB. Or, le TMP n'est pas calculé de manière uniforme dans les Etats, ainsi que relevé la Cour des Comptes des Communautés européennes.
C'est ainsi qu'aux termes de l'article 89 du Règlement CEE-Euratom N° 1533/89, les taux pris en considération doivent être ceux qui influent sur les recettes de la TVA encaissées durant l'année considérée. Cette disposition vise à permettre un calcul précis du TMP en assurant la cohérence en taux et recettes.
Or, la Cour constate que les Etats membres ne ventilent pas les recettes selon l'exercice au cours duquel la taxe est devenue exigible. Les recettes d'une année contiennent donc des éléments concernant des exercices antérieurs.
Dans ces conditions, les bases TVA qui résultent du calcul de TMP ne sont pas conformes aux assiettes fiscales réelles des Etats membres.
Par ailleurs, le calcul de la pondération des taux pour l'établissement du TMP suppose pour chaque taux la mesure complète des opérations taxables à ce taux. Or tel n'est pas le cas. Certains Etats ne disposent pas d'un appareil statistique leur permettant de satisfaire cette condition.
La Cour des Comptes des Communautés estime que les Etats membres ont certes progressé dans la comparabilité des données et des méthodes, mais considère que "le degré de fiabilité de la base de" -ce qui aura été- "la plus importante ressource communautaire reste insuffisant" 2 ( * ) .
De plus la recette fait l'objet de sérieuses présomptions de fraude fiscale. Ainsi, depuis la mise en place du marché unique, la TVA appliquée à des produits faisant l'objet d'échanges entre Etats membres n'est plus acquittée dans les bureaux de douane par les transporteurs, mais par les entreprises acheteuses, une fois les marchandises livrées. Le contrôle de l'acquittement de la TVA s'effectue par coopération des administrations fiscales. Or on constate la difficulté d'opérer de tels contrôles dans certains Etats membres, ce qui laisse à penser que leur vigilance en matière de TVA n'est pas ce qu'elle devrait être.
S'agissant de la ressource assise sur le PNB, elle est conditionnée par l'évaluation des PNB nationaux. Or, celle-ci laisse, dans certains cas, apparaître des insuffisances, qu'il s'agisse des disparités quant aux périodes de référence des données ou des incertitudes quant aux procédures et aux bases statistiques utilisées pour le calcul du PNB.
La France a pris l'initiative exemplaire de créer une instance de coordination de lutte antifraude aux fonds communautaires (l'ICLAF). Cette instance doit devenir le correspondant privilégié et actif de l'UCLAF qui est le service central de lutte contre la fraude de la commission.
Il serait très souhaitable que chaque Etat-membre suive notre exemple. En tout état de cause, il paraît pertinent de faire figurer au premier rang des priorités de l'ICLAF la question de la sincérité des contributions des Etats membres et, en particulier, de la comparabilité des PNB nationaux déclarés par les membres de l'Union européenne.
La Cour des Comptes des Communautés estime par exemple qu'une grande incertitude demeure du fait de références à des comptes nationaux établis à partir de données trop anciennes (Grèce, Portugal, Länder de l'ex-RDA). Des phénomènes d'économie souterraine sont en outre susceptibles d'altérer la vérité des comptes.
L'harmonisation des conditions de contribution des Etats membres doit être recherchée si l'on veut que les contributeurs nets ne se révoltent pas.
En outre, la question de l'opportunité de maintenir le système de compensation accordé au Royaume-Uni se pose.
* 1 Les pourcentages sont calculés hors recettes diverses
* 2 Rapport de la Cour des Comptes des Communautés pour l'exercice 1992, page 30.