4. Les laboratoires privés d'analyse pourraient, cette année encore, respecter un objectif en forte baisse
Pour 1996, l'accord conclu le 11 mars entre l'État, les caisses d'assurance maladie et les organisations représentatives des laboratoires d'analyse de biologie médicale a fixé à 1,3 % l'objectif quantifié national, applicable au montant total des frais d'analyses et examens de laboratoires pris en charge par les régimes d'assurance maladie.
A ce taux, il faut ajouter des dotations affectées au Fonds d'adaptation du secteur de la biologie (50 millions de francs) et au financement de l'Observatoire de la Biologie (5 millions de francs).
Les partenaires conventionnels sont convenus de la répartition des reversements qui restaient dus à la profession :
- maintien, en 1996, des mesures de nomenclature et de revalorisation de la lettre clé B intervenues en application de l'accord du 12 janvier 1995 ;
- mise en oeuvre de nouvelles mesures de nomenclature (42 millions de francs).
Pour les six premiers mois et les trois principaux régimes (CNAM, CANAM, MSA), la progression constatée a été de 0,7 %. Dès lors, en 1996, les laboratoires, une fois encore, ont de bonnes chances de respecter l'objectif fixé, même si la Commission des comptes estime à 1,9 % la progression qui sera réalisée pour le seul régime général, pour les actes en B, BM, BP et KB.
5. Les infirmières libérales : le respect de l'objectif est incertain
L'objectif de 2,8 % sera difficile à respecter. Pour les six premiers mois de 1996, les dépenses liées aux actes infirmiers dans les principaux régimes (CNAM, CANAM, MSA) ont progressé de 5,9 %.
La prévision de la Commission des comptes pour le régime général et la totalité de l'année 1996 est elle aussi très supérieure à l'objectif fixé à 2,8 %.
6. Les médicaments remboursables : cette année encore, les chiffres risquent d'être décevants
a) Des résultats peu satisfaisants en 1995, 1996 et 1997 selon la Commission des comptes
La part de la consommation pharmaceutique dans le produit intérieur brut augmente de manière quasi continue :
1985 1,37 % du PIB
1990 1,48 % du PIB
1995 1,64 % du PIB
Le médicament représentait, en 1995, 13,2 % des remboursements effectués par le seul régime général, ce pourcentage devant être porté à 15 % selon le Syndicat national de l'industrie pharmaceutique si l'on inclut le médicament hospitalier.
En moyenne, ce poste a crû, entre 1985 et 1995, de 6,5 % chaque année.
Avec l'application de l'accord cadre, du plan Veil de sauvegarde de l'assurance maladie et des nouvelles références médicales pour les médecins, cette tendance avait été stoppée en 1994 les remboursements de médicaments ont, non plus progressé, mais diminué de 0,2 % il y a deux ans.
Cette accalmie a été de courte durée, les remboursements ayant progressé en 1995 de 6,9 % pour l'ensemble des régimes et de 7,9 % pour le seul régime général, malgré la généralisation des conventions conclues entre le comité économique du médicament et les laboratoires pharmaceutiques.
Les résultats pour 1995 ont incité le gouvernement à solliciter l'industrie pharmaceutique à hauteur de 2,5 milliards de francs dans le cadre des mesures d'urgence destinées au redressement des comptes de l'assurance maladie. Compte tenu de l'existence de conventions entre l'État et les laboratoires, votre Commission estime qu'il aurait du être possible de sanctionner les laboratoires à hauteur des dépassements ou dérives constatées, et non par une mesure d'application générale et trop indépendante des résultats de la politique menée depuis 1994.
Le résultat pour 1996 s'annonce, lui aussi, assez décevant : la Commission des comptes de la sécurité sociale estime en effet à 5,2 % l'augmentation des remboursements du régime général pour l'ensemble de l'année (effet volume : 5,2 % et effet prix nul).
L'année 1997, enfin, serait également mauvaise pour le régime général avec un taux de progression de 5,6 % dont 6,3 % en volume et - 0,6 % en prix.
Au passage, on comprend mal, pour les années récentes, les effets prix négatifs annoncés par la Commission des comptes (1993 : - 0,8 % ; 1994 : - 0,8 % ; 1995 : - 0,4 %), le prix moyen pondéré des spécialités remboursables ayant progressé pendant toute la période selon la société IMS (1992 : 23,11 francs ; 1993 : 24 francs ; 1994 : 24,73 francs ; 1995 : 25,90 francs).
Au vu de ces évolutions, votre commission souhaite attirer l'attention sur deux éléments.
b) D'importants transferts entre l'hôpital et la médecine de ville doivent être soulignés
Selon un rapport de l'IGAS cité par le journal Le Monde, le chiffre d'affaires de l'industrie pharmaceutique réalisé à l'hôpital a triplé entre 1984 et 1994, soit une progression annuelle de 11,5 % et un volume global de près de 11 milliards de francs en 1994. Ce chiffre d'affaires serait réalisé, pour 36 % dans les CHU, 33 % dans les centres hospitaliers et 26 % dans les cliniques, les 5 % restants représentant les hôpitaux psychiatriques et les centres de lutte contre le cancer.
Cette importante progression est due à celle de la réserve hospitalière dans les années 80-90, notamment pour des médicaments innovants et coûteux destinés à traiter le Sida ou les hépatites B et C. En outre, dans les dix premières spécialités vendues à l'hôpital, trois étaient des médicaments destinés à traiter les effets iatrogènes d'autres médicaments.
Cette croissance de la consommation hospitalière plus rapide que celle de la consommation en ville s'est réalisée sans dommage majeur pour l'assurance maladie, les dépenses de médicament à l'hôpital étant prises en charge dans le budget global hospitalier dont le taux d'évolution annuel a fait l'objet d'un encadrement administratif.
Ces données risquent d'être moins vérifiées à l'avenir, un nombre croissant de médicaments forts coûteux sortant de la réserve hospitalière ou étant directement commercialisés en ville.
Ainsi, pour le traitement de l'hépatite C, l'interféron peut désormais être prescrit en ville.
Un arrêté du 30 janvier 1996 a ainsi inscrit sur la liste des médicaments remboursables les interférons alpha 2a et 2b (Laroféron et Viraféron) qui seront commercialisés en officine.
La rétrocession par l'hôpital de ces médicaments (qui représentent, selon l'IGAS, 20 % des budgets des CHU pour l'ensemble des médicaments de la réserve hospitalière) n'est donc plus possible.
Source : Droit et pharmacie actualités
Selon le journal « Panorama du Médecin », environ 15.000 patients bénéficient actuellement de l'interféron, alors que 150.000 à 200.000 en auraient besoin.
L'évolution ci-dessus mentionnée pour l'hépatite C concerne ou concernera prochainement d'autres médicaments, notamment en cancérologie et dans le cadre du traitement du Sida.
Selon la Commission des comptes, la part de médicaments prescrite par les médecins hospitaliers a ainsi progressé de 18,5 % en 1996. Les pouvoirs publics doivent en tenir compte dans l'articulation des dispositifs de maîtrise des dépenses de santé à l'hôpital et en ville.
c) L'accord-cadre conclu entre l'État et le Syndicat national de l'industrie pharmaceutique : la commission des Affaires sociales souhaiterait obtenir un bilan détaillé.
Alors que les chiffres concernant l'évolution des dépenses de médicaments en 1995, 1996 et 1997 ne s'annoncent pas très bons, la commission des Affaires sociales aimerait disposer d'un bilan de l'application de l'accord-cadre conclu entre l'État et le Syndicat National de l'Industrie Pharmaceutique.
Cet accord arrive à expiration à la fin de l'année. Pourtant, si l'on excepte les données chiffrées relatives au nombre d'accords conclus entre le comité économique du médicament et les laboratoires, le Parlement n'a jamais été destinataire d'aucune information précise sur le fonctionnement et les résultats de ces conventions.
Bien sûr, l'industrie pharmaceutique est une industrie, au sein de laquelle l'emploi continue d'augmenter et qui réalise le cinquième de son chiffre d'affaires à l'export.
La politique du médicament remboursable ne peut ni ne doit donc être conduite selon les mêmes modes que les politiques de maîtrise des dépenses menées en direction des autres secteurs du système de santé.
La commission des Affaires sociales estime cependant que le comité économique du médicament, qui agit au nom de l'État, n'aurait rien à perdre en renforçant la transparence de sa politique.