N° 138

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025

Enregistré à la Présidence du Sénat le 13 novembre 2024

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires sociales (1) sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, dont le Sénat est saisi en application de l'article 47-1, alinéa 2, de la Constitution, pour 2025,

Par Mme Élisabeth DOINEAU,

Rapporteure générale,

Mmes Corinne IMBERT, Pascale GRUNY, M. Olivier HENNO,
Mmes Marie-Pierre RICHER et Chantal DESEYNE,

Rapporteures et Rapporteurs

Sénatrices et Sénateurs

Tome II

Examen des articles

(1) Cette commission est composée de : M. Philippe Mouiller, président ; Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale ; Mme Pascale Gruny, M. Jean Sol, Mme Annie Le Houerou, MM. Bernard Jomier, Olivier Henno, Xavier Iacovelli, Mmes Cathy Apourceau-Poly, Véronique Guillotin, M. Daniel Chasseing, Mme Raymonde Poncet Monge, vice-présidents ; Mmes Viviane Malet, Annick Petrus, Corinne Imbert, Corinne Féret, Jocelyne Guidez, secrétaires ; Mmes Marie-Do Aeschlimann, Christine Bonfanti-Dossat, Corinne Bourcier, Céline Brulin, M. Laurent Burgoa, Mmes Marion Canalès, Maryse Carrère, Catherine Conconne, Patricia Demas, Chantal Deseyne, Brigitte Devésa, M. Jean-Luc Fichet, Mme Frédérique Gerbaud, M. Khalifé Khalifé, Mmes Florence Lassarade, Marie-Claude Lermytte, Monique Lubin, Brigitte Micouleau, M. Alain Milon, Mmes Laurence Muller-Bronn, Solanges Nadille, Anne-Marie Nédélec, Guylène Pantel, M. François Patriat, Mmes Émilienne Poumirol, Frédérique Puissat, Marie-Pierre Richer, Anne-Sophie Romagny, Laurence Rossignol, Silvana Silvani, Nadia Sollogoub, Anne Souyris, MM. Dominique Théophile, Jean-Marie Vanlerenberghe.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (17ème législ.) :

325, 480 et 487

Sénat :

129 et 130 (2024-2025)

EXAMEN DES ARTICLES

Article liminaire

Cet article présente, pour l'exercice en cours et pour l'année à venir, l'état des prévisions de dépenses, de recettes et de solde des administrations de sécurité sociale.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

Cet article fait partie des dispositions devant obligatoirement figurer dans la loi de financement de la sécurité sociale, conformément aux dispositions de la loi organique du 14 mars 2022.

Article L.O. 111-3-2 du code de la sécurité sociale

« Dans son article liminaire, la loi de financement de l'année présente, pour l'exercice en cours et pour l'année à venir, l'état des prévisions de dépenses, de recettes et de solde des administrations de sécurité sociale. »

L'intégration de cet article liminaire dans la LFSS a été souhaitée par le législateur organique.

En effet, si le Parlement, au moment de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, ne peut se prononcer, pour l'essentiel, que sur les mesures ayant un effet sur les régimes obligatoires de base (Robss), les organismes ou des organismes concourant à leur financement (FSV), à l'amortissement de leur dette (Cades) ou à la mise en réserve de recettes à leur profit (FRR), c'est bien le champ plus large des administrations de sécurité sociale (Asso) qui est considéré par l'Insee dans le calcul des comptes des administrations publiques (selon les concepts de la comptabilité nationale), et utilisé pour l'application du pacte de stabilité et de croissance.

Au demeurant, l'État accorde sa garantie de droit ou de fait à plusieurs organismes et régimes situés en dehors du périmètre des Robss.

C'est pourquoi, à défaut d'élargir formellement le périmètre des LFSS, comme l'avait proposé le Sénat1(*), le législateur organique a au moins souhaité que le Parlement dispose d'une vision financière globale des administrations de sécurité sociale au moment de l'examen des lois de financement, tant par la création de nouvelles annexes relatives à l'assurance chômage, aux régimes complémentaires de retraite et aux établissements de santé que par la création de cet article liminaire.

Sur le fond, les prévisions de cet article sont retracées dans le tableau ci-après.

Prévisions de dépenses, de recettes et de solde des administrations de sécurité sociale pour les années 2024 et 2025 au sens de la comptabilité nationale

(en points de produit intérieur brut)

 

2024

2025

Recettes

26,6

26,7

Dépenses

26,6

26,4

Solde

0,0

+ 0,2

Source : Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025

Prises dans leur ensemble, les Asso, dont les dépenses et les recettes représentent plus d'un quart du PIB, présenteraient donc, selon le Gouvernement, un excédent nul en 2024 et de + 0,2 point de PIB en 2025.

Les administrations de sécurité sociale (Asso)

Les administrations de sécurité sociale regroupent les régimes d'assurance sociale et les organismes dépendant des assurances sociales (principalement les hôpitaux à financement public) (Odass).

Les régimes d'assurance sociale comprennent principalement :

- le régime général ;

- divers fonds : Fonds de solidarité vieillesse (FSV), mais aussi Fonds commun pour les accidents du travail (FCAT), Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva), Service social d'allocation aux personnes âgées (Saspa), Fonds de compensation des organismes de sécurité sociale (FCOSS), etc. ;

- les autres régimes de base des salariés (régimes spéciaux d'entreprises et d'établissements publics, salariés agricoles, etc.) ;

- les régimes des non-salariés (dont la mutualité sociale agricole) ;

- l'Unédic ;

- les régimes complémentaires d'assurance vieillesse des salariés (Agirc-Arrco...) ;

- depuis un reclassement effectué en 2011 par l'Insee, la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) et le Fonds de réserve des retraites (FRR), jusqu'alors considérés comme des organismes divers d'administration centrale (Odac).

Les organismes dépendant des assurances de sécurité sociale (Odass), qui dépendent des administrations de sécurité sociale, comprennent :

- les hôpitaux de l'assistance publique, ainsi que les hôpitaux privés financés par la dotation globale hospitalière (attribuée par les caisses de sécurité sociale) ;

- les oeuvres sociales intégrées aux organismes de sécurité sociale (oeuvres sociales de la Cnaf, écoles d'infirmiers) ;

- France Travail.

Comme le montre le tableau ci-après, en 2024 comme en 2025, l'écart entre le déficit de la sécurité sociale et l'excédent global des administrations de sécurité sociale proviendrait essentiellement de la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) et de l'Unédic.

Capacité de financement des administrations de sécurité sociale

(en milliards d'euros)

 

 2024

2025

Asso

- 0,6

5,6

Recettes 

775,7

800,6

Dépenses 

776,4

795

Régime général + Fonds de solidarité vieillesse

- 15,2

- 13,4

Recettes 

530

552,5

Dépenses 

545,2

565,9

Unédic

0,9

3,9

Recettes 

44,8

45,5

Dépenses 

43,9

41,6

Régimes complémentaires

1,6

1,2

Recettes 

108,5

111,6

Dépenses 

106,9

110,4

Cades

16

16

Recettes 

19,3

19,1

Dépenses 

3,3

3,1

FRR - Fonds de réserve des retraites

- 1,5

- 0,8

Recettes 

0,8

0,8

Dépenses 

2,3

1,7

Organismes divers de sécurité sociale

- 1

- 0,9

Recettes 

131

135,3

Dépenses 

132

136,3

Asso : administrations de sécurité sociale. Cades : Caisse d'amortissement de la dette sociale. PSMT : plan budgétaire et structurel à moyen terme. Resf : rapport économique, social et financier.

Source : Commission des affaires sociales, d'après le PSMT d'octobre 2024

L'hypothèse d'un fort excédent des régimes complémentaires de retraites, dont la commission avait souligné l'irréalisme à l'occasion de l'examen du PLFSS 2024, est donc abandonnée.

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

Le Gouvernement a transmis cet article au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

Comme indiqué dans le tome I du présent rapport, les prévisions du Gouvernement pour 2025 paraissent optimistes.

On rappelle toutefois que le présent article est purement prévisionnel.

Par ailleurs, l'article liminaire est une disposition obligatoire des LFSS (article L.O. 111-3-2 du code de la sécurité sociale). Son absence susciterait un risque d'inconstitutionnalité de l'ensemble du PLFSS.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

PREMIÈRE PARTIE

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES
ET À L'ÉQUILIBRE GÉNÉRAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
POUR L'EXERCICE 2024

Article 1er
Rectification des tableaux d'équilibre

Cet article a pour objet de rectifier pour 2024, exercice en cours, les tableaux d'équilibre, par branche, des régimes obligatoires de base, ainsi que le tableau d'équilibre du Fonds de solidarité vieillesse.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

Cet article fait partie des dispositions devant obligatoirement figurer dans la loi de financement de la sécurité sociale, conformément à la loi organique du 14 mars 2022.

Article L.O. 111-3-3 du code de la sécurité sociale (extrait)

« Dans sa partie comprenant les dispositions relatives à l'année en cours, la loi de financement de l'année :

1° Rectifie les prévisions de recettes et les tableaux d'équilibre des régimes obligatoires de base, par branche, ainsi que ceux des organismes concourant au financement de ces régimes ;

2° Rectifie les objectifs de dépenses, par branche, de ces régimes (...) ;

3° Rectifie l'objectif assigné aux organismes chargés de l'amortissement de la dette des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement et les prévisions de recettes affectées aux fins de mise en réserve à leur profit. »

A. La rectification des tableaux d'équilibre

Le présent article propose deux tableaux, le premier pour l'ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale (Robss), le deuxième pour le Fonds de solidarité vieillesse (FSV).

Depuis la LFSS 2023, cette partie rectificative ne comporte plus de tableau spécifique au régime général de sécurité sociale, conformément au nouveau cadre organique qui focalise les votes du Parlement sur l'ensemble des régimes obligatoires de base.

Le déficit, de 10,8 milliards d'euros en 2023, augmenterait fortement en 2024, pour atteindre 18,0 milliards d'euros.

Comme indiqué dans le tome I du présent rapport, cette forte augmentation du déficit par rapport à 2023 proviendrait essentiellement d'une augmentation des dépenses supérieures de près de 12 milliards d'euros à ce qui découlerait d'une croissance au même taux que le PIB potentiel2(*), qui ne serait que partiellement compensée par l'augmentation des recettes.

Décomposition indicative de l'évolution du solde de la sécurité sociale
entre 2023 et 2024 (Robss+FSV)

(en milliards d'euros)

Un montant positif (bâtons verts) correspond à une amélioration du solde, un montant négatif (bâtons rouges) à une dégradation du solde.

Lecture : En 2024, l'écart de l'évolution spontanée des dépenses par rapport à celle du PIB potentiel a dégradé le solde de 12,7 milliards d'euros.

Solde effectif : PLFSS 2025. Soldes conjoncturel et structurel calculés par la commission des affaires sociales d'après les estimations du PIB potentiel de la Commission européenne (15 mai 2024). Dépenses covid et Ségur : annexe 3 au PLFSS 2025. Impact de la réforme des retraites : rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale d'octobre 2024. Mesures nouvelles sur les recettes : rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale d'octobre 2024 (mesures hors PLFSS) et annexe 3 au PLFSS 2024 (mesures PLFSS).

Robss : régimes obligatoires de base de sécurité sociale. FSV : Fonds de solidarité vieillesse.

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après les sources indiquées

Par rapport à la prévision de la LFSS 2024, le supplément de déficit, de 7,5 milliards d'euros, viendrait très majoritairement du fait que les recettes seraient inférieures de 6,2 milliards d'euros aux prévisions.

Recettes et dépenses de la sécurité sociale en 2024 (Robss + FSV)

(en milliards d'euros)

Source : Commission des affaires sociales du Sénat

Dans le cas des dépenses, le dérapage de 1,4 milliard d'euros correspond en quasi-totalité à celui, de 1,2 milliard d'euros, des dépenses entrant dans le champ de l'Ondam (de 254,9 milliards d'euros selon la LFSS 2024 et 256,1 milliards d'euros selon le PLFSS 2025).

1. Un déficit 2024 provenant de la branche maladie et dans une moindre mesure de la branche vieillesse

Le déficit correspondrait très majoritairement à celui de la branche maladie, celui de la branche vieillesse, bien qu'en augmentation, demeurant nettement moins élevé.

La branche autonomie serait excédentaire (avant quatre années de déficit croissant).

Prévisions de solde des différentes branches par le présent PLFSS (2024)

(en milliards d'euros)

 

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

239,0

253,6

- 14,6

Accidents du travail et maladies professionnelles

16,7

16,0

0,7

Vieillesse

287,4

293,7

- 6,3

Famille

58,3

57,9

0,4

Autonomie

40,9

40,0

0,9

Toutes branches (hors transferts entre branches)

624,2

643,0

- 18,9

Toutes branches (hors transferts entre branches),
y compris Fonds de solidarité vieillesse

625,3

643,4

- 18,0

Source : PLFSS 2025

2. Par rapport à la LFSS 2024, une révision à la hausse du déficit concernant essentiellement la branche maladie

Le tableau suivant détaille, par branche, l'évolution des prévisions de soldes pour 2024.

On observe que la révision à la hausse du déficit, de 7,5 milliards d'euros, concerne essentiellement la branche maladie, dont le déficit a été revu à la hausse de 6,1 milliards d'euros. Cette révision à la hausse s'explique, comme d'habitude, par un Ondam irréaliste (dépassé de 1,2 milliard d'euros), qui a suscité un dérapage des dépenses de santé (1,7 milliard d'euros de plus que la prévision). Toutefois, contrairement aux années précédentes, les recettes ont été inférieures de 4,4 milliards d'euros aux prévisions. Cela s'explique essentiellement par des recettes de TVA nettement inférieures aux prévisions, la branche maladie étant la seule à percevoir de la TVA.

Prévisions de recettes, de dépenses et de solde des Robss et du FSV pour 2024

(en milliards d'euros)

 

Recettes

Dépenses

Solde

LFSS 2024

Maladie

243,4

251,9

- 8,5

Accidents du travail et maladies professionnelles

17,1

16

1,1

Vieillesse

287,9

293,7

- 5,8

Famille

58,8

58

0,8

Autonomie

41,2

40

1,2

Toutes branches (hors transferts entre branches)

630,3

641,6

- 11,3

Toutes branches (hors transferts entre branches), y compris Fonds de solidarité vieillesse

631,5

642

- 10,5

PLFSS 2025

Maladie

239

253,6

- 14,6

Accidents du travail et maladies professionnelles

16,7

16

0,7

Vieillesse

287,4

293,7

- 6,3

Famille

58,3

57,9

0,4

Autonomie

40,9

40

0,9

Toutes branches (hors transferts entre branches)

624,2

643

- 18,9

Toutes branches (hors transferts entre branches), y compris Fonds de solidarité vieillesse

625,3

643,4

- 18,0

Écart

Maladie

- 4,4

1,7

- 6,1

Accidents du travail et maladies professionnelles

- 0,4

0

- 0,4

Vieillesse

- 0,5

0

- 0,5

Famille

- 0,5

- 0,1

- 0,4

Autonomie

- 0,3

0

- 0,3

Toutes branches (hors transferts entre branches)

- 6,1

1,4

- 7,6

Toutes branches (hors transferts entre branches), y compris Fonds de solidarité vieillesse

- 6,2

1,4

- 7,5

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après les textes indiqués

B. La rectification de l'objectif d'amortissement de la Cades

Le présent article révise légèrement l'objectif d'amortissement de la dette sociale par la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) fixé par la LFSS 2023. Cet objectif s'établirait à 15,99 milliards d'euros, au lieu de 16 milliards d'euros en LFSS 2024.

Cette révision à la baisse symbolique s'explique par le fait que, comme la Cades l'a indiqué à la rapporteure générale, l'amortissement devrait être un peu en dessous de l'objectif de 16 milliards d'euros, du fait de recettes légèrement inférieures aux prévisions.

C. La confirmation de l'absence de recettes affectées au FRR ou mises à disposition du FSV

Comme prévu par la LFSS 2024, les prévisions des recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites sont nulles, de même que les prévisions de recettes mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse.

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

Le Gouvernement a transmis cet article au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

La prévision de déficit du présent article (18,0 milliards d'euros) est cohérente avec celle figurant dans le rapport d'octobre 2024 à la commission des comptes de la sécurité sociale (18,5 milliards d'euros).

L'écart provient en quasi-totalité de l'article 6 du PLFSS, qui intègre dès 2024 la prime de partage de la valeur (PPV) dans les revenus pris en compte pour la détermination des seuils des allégements généraux, suscitant une recette supplémentaire de 0,4 milliard d'euros.

Le présent article est une disposition obligatoire des LFSS (article L.O. 111-3-3 du code de la sécurité sociale). Son absence susciterait un risque d'inconstitutionnalité de l'ensemble du PLFSS.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article 2
Rectification de l'Ondam et des sous-objectifs de l'Ondam

Cet article fixe le montant rectifié de l'Objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) pour 2024 ainsi que ceux de ses sous-objectifs.

La commission propose d'adopter cet article modifié par un amendement visant à adapter la ventilation des crédits entre sous-objectifs de l'Ondam.

I - Le dispositif proposé

A. 2024 entérine un nouveau dépassement de l'Ondam, d'une ampleur plus limitée que les années précédentes

• La loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2024 a fixé le montant de l'Ondam à 254,9 milliards d'euros pour 2024.

Ce montant est rehaussé à 256,1 milliards d'euros par la LFSS pour 2025, soit de 1,2 milliard d'euros. Cette montant majoré représente une progression de l'Ondam de 3,3 % à périmètre constant par rapport à 2023.

Comparaison des prévisions votées et révisées pour l'Ondam 2024

(LFSS pour 2024 / LFSS pour 2025)

(en milliards d'euros)

Source : Commission des affaires sociales, données du PLFSS 2025

• Le dépassement du montant de l'Ondam est constaté à hauteur3(*) :

- de plus d'un milliard d'euros sur le sous-objectif relatif aux soins de ville ;

- de 0,2 milliard d'euros sur le sous-objectif relatif aux établissements de santé ;

- de 0,3 milliard d'euros par des dépenses liées à la gestion de la covid-19, principalement au titre des achats de vaccins et des dépenses de dépistage.

Le cumul de ces dépassements est compensé par une moindre dépense constatée de 0,2 milliard d'euros, en raison d'une révision à la baisse de la trajectoire des dépenses du Ségur de la santé.

Répartition du dépassement prévisionnel de l'Ondam 2024 par sous-objectif

(en milliards d'euros)

 

Montant prévisionnel en LFSS pour 2024

(en Mds €)

Montant rectifié en LFSS pour 2025

(en Mds €)

Taux de dépassement

Taux de progression de l'Ondam 2023 / 2024

Total (hors dépenses de crise)

254,9

256,1

0,47 %

3,4 %

Dépenses de soins de ville

108,4

109,5

1 %

4,3 %

Dépenses relatives aux établissements de santé

105,3

105,5

0,2 %

2,9 %

Dépenses relatives aux établissements et services pour personnes âgées

16,3

16,1

- 1,2 %

3,9 %

Dépenses relatives aux établissements et services pour personnes handicapées

15,2

15,2

0 %

3,4 %

Dépenses relatives au FIR et au soutien national à l'investissement

6,5

6,7

3,1 %

3,1 %

Autres prises en charge

3,3

3,2

- 3 %

- 5,9 %

NB : en 2024, les dépenses engendrées par les mesures de revalorisation des indemnités de permanence des soins et du travail de nuit et de week-end ont été transférées du sous-objectif relatif aux établissements de santé (2e sous-objectif) vers le Fonds d'intervention régional (FIR) (5e sous-objectif). Cette opération, qui porte sur un montant de 0,4 milliard d'euros, modifie donc les montants de référence initialement fixés par la LFSS pour 2024 pour ces deux sous-objectifs.

Source : Commission des affaires sociales, d'après les données de l'annexe 5 au PLFSS

• 2024 entérine un nouveau dépassement de l'Ondam pour la quatrième année consécutive depuis 2020, hors contexte de crise désormais.

La période de 2020 à 2024 a été marquée par divers évènements exceptionnels, au premier rang desquels figure la crise sanitaire de la covid-19. Dans ce contexte, l'Ondam a connu une progression inédite, passant de 200,2 milliards d'euros en 2019 à 256,1 milliards d'euros en 2024.

L'envolée des dépenses s'explique donc par la crise sanitaire, notamment les campagnes de vaccination et de dépistage, ainsi que par les mesures de soutien à l'attractivité des établissements de santé dans le cadre du Ségur de la santé. Le contexte inflationniste très marqué à partir de 2022 a fortement renchéri le coût de ces mesures. En 2023, le niveau exceptionnel de l'inflation a encore pesé dans le dépassement de l'objectif de dépenses, conjugué aux mesures de revalorisation salariales ciblées dans la fonction publique et de soutien à l'attractivité des établissements. Le dépassement du sous-objectif relatif aux soins de ville a également contribué au dépassement enregistré.

Taux de croissance et dépassements de l'Ondam par année, 2014-2024

Source : Annexe 5 au PLFSS 2025

B. Des dynamiques de dépenses inégales selon les sous-objectifs

• Le dynamisme des dépenses de soins de ville est principalement porté par un effet volume, à hauteur de 930 millions d'euros, décomposé entre :

- les indemnités journalières, qui présentent un dépassement en volume de 0,5 milliard d'euros par rapport à l'objectif de la LFSS pour 2024, du fait d'une accélération des indemnités de longue durée et de la forte progression des indemnités pour cause d'accident du travail ou de maladie professionnelle ;

- les honoraires des médecins spécialistes (+ 0,2 milliard d'euros) ;

- les produits de santé et notamment, les dispositifs médicaux (+ 0,2 milliard d'euros).

Au global, les dépenses de soins de ville progresseraient de 4 % en 2024 par rapport à la base actualisée de 2023.

Progression de l'Ondam entre 2023 et 2024

(en milliards d'euros)

Source : Commission des affaires sociales, données du PLFSS 20254(*)

• Le sous-objectif relatif aux établissements de santé présente un dépassement de 0,2 milliard d'euros, en raison :

- d'une consolidation de la reprise d'activité plus dynamique que les prévisions (+ 0,3 milliard d'euros sur la part tarif MCO) ;

- de dépenses liées à l'activité non régulée (+ 0,1 milliard d'euros) et à la prise en charge du vaccin beyfortus (+ 0,1 milliard d'euros) ;

- d'une moindre dépense estimée à 0,3 milliard d'euros sur la liste en sus brute.

Au global, les dépenses des établissements de santé progresseraient de 2,5 % en 2024 par rapport à la base actualisée de 2023.

Évolution de l'activité des établissements de santé en 2023 et 20245(*)

Après une chute brutale en 2020 (- 10,9 % en nombre de séjours), les établissements de santé ont retrouvé un niveau d'activité supérieur à celui d'avant la crise à partir de 2023 (+ 4,3 % par rapport à 2019).

Cette reprise d'activité apparaît toutefois contrastée selon les secteurs. En effet, l'activité des établissements privés a en réalité dépassé le niveau de 2019 dès 2022 et ce dynamisme retrouvé s'est fortement confirmé en 2023. En moyenne, entre 2019 et 2023, le nombre de séjours dans les établissements de santé privés a augmenté de 1,9 % par an. Les établissements publics de santé n'ont en revanche bénéficié d'une reprise d'activité qu'à compter de 2023, avec une croissance de 3,7 % du nombre de leurs séjours.

L'activité des établissements de santé, tous secteurs confondus, est également marquée par la forte progression de l'ambulatoire par rapport à l'hospitalisation complète, qui se traduit par une moindre progression du volume économique des établissements, comparativement à la croissance de leur activité. En 2023, le volume économique de l'activité restait ainsi inférieur de 2,3 % par rapport à 2019.

Les tendances observées sur le premier semestre de l'année 2024 confirment une reprise d'activité à un niveau supérieur aux prévisions, en particulier dans le secteur public. À fin août, l'activité du secteur public serait en hausse de 4 % par rapport à la même période en 20196(*). Ce dynamisme pourrait relever d'un effet de rattrapage par rapport à la reprise plus précoce du secteur privé.

• Les dépenses relatives au Fonds d'intervention régional (FIR) et au soutien national à l'investissement enregistrent un dépassement de 0,2 milliard d'euros, à champ constant, en raison du décalage de la date d'extinction du plan d'aide à l'investissement (PAI) dans le cadre du Ségur immobilier.

• Les dépenses correspondant aux sous-objectifs du secteur médicosocial (3e et 4e sous-objectifs) et aux autres prises en charge (6e sous-objectif) sont globalement conformes aux prévisions établies. Sur le champ « personnes âgées », les crédits mis en réserve en début d'année et non mobilisés participent à l'effort de rectification de l'Ondam pour 2024.

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

Le Gouvernement a transmis cet article au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

• La commission constate que le dépassement de l'Ondam, systématique depuis 2020, se poursuit au-delà de la crise sanitaire et ce, malgré le ralentissement de l'inflation.

Si l'Ondam a enregistré une progression inédite de l'ordre de 5,2 % par an en moyenne entre 2019 et 2023, les dépenses liées à la gestion de crise et à la covid-19 se sont largement tassées en 2023 (1,1 milliard d'euros). Elles sont devenues résiduelles en 2024, se stabilisant à 0,5 milliard d'euros.

Dépassements de l'Ondam par rapport à l'objectif initial de la LFSS

(en milliards d'euros)

 

2020

2021

2022

2023

Dépassement

13,9

14,4

10,3

3,9

Source : Rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale, octobre 2024

Le retraitement des facteurs exceptionnels ayant conduit à cette progression inédite de l'Ondam - crise sanitaire, Ségur de la santé, inflation - permet de neutraliser leurs effets pour analyser les dépassements constatés. Il en résulte :

- que le sous-objectif relatif aux soins de ville connaît des dépassements systématiques entre 2020 et 2023, y compris hors effet de crise ;

- que le sous-objectif relatif aux établissements de santé enregistre des dépassements en 2022 et 2023, principalement liés aux mesures de soutien à l'activité en compensation des pertes de séjours et des déprogrammations massives.

Pourtant, la situation des établissements de santé, notamment des établissements publics se dégrade très nettement depuis la fin de la crise sanitaire. Cette situation est la conséquence d'un effet ciseaux qui se matérialise d'une part dans le renchérissement exceptionnel du niveau des charges supportées - inflation, revalorisations salariales du Ségur et de la fonction publique -, et d'autre part dans les pertes de recettes subies du fait du retard à la reprise d'activité jusqu'en 2023.

Analyse des dépassements de l'Ondam par sous-objectif,
hors évènements exceptionnels, entre 2019 et 2023

Source : Rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale, octobre 2024

• Alors que la Cour des comptes appelait à une « impérative reprise en main » du pilotage de l'Ondam dès 20247(*), à nouveau, l'objectif de dépense n'a pas été maîtrisé. La commission s'interroge donc sur la capacité des autorités de régulation à piloter effectivement la dépense et à anticiper les facteurs soutenant sa progression.

En 2024, le dépassement est très largement constaté sur le sous-objectif relatif aux soins de ville, puisqu'il contribue à hauteur de plus d'un milliard d'euros sur 1,2 milliard.

Le rebasage du sous-objectif relatif aux établissements de santé à hauteur de 200 millions d'euros, soutenu par une reprise d'activité supérieure aux prévisions initiales, constitue in fine un signal positif qui peut laisser espérer une stabilisation des déficits hospitaliers.

• Ce constat plaide en faveur d'un pilotage plus fin des sous-objectifs de l'Ondam, en particulier des sous-objectifs relatifs aux soins de ville et aux établissements de santé, qui représentent près de 85 % du total.

La commission soutient une mobilisation rigoureuse des mécanismes conventionnels et de régulation des dépenses pour freiner la croissance dynamique des soins de ville. Ce travail de régulation conventionnelle doit se construire en partenariat étroit avec les professionnels de santé.

Malgré la reprise d'activité observée dans les établissements de santé, elle s'inquiète en outre de la profonde dégradation de la situation des établissements de santé depuis 2019.

Les déséquilibres financiers auxquels font face les établissements de santé ont conduit à une aggravation sans précédent de leur situation, malgré la mise en oeuvre de la garantie de financement puis de la sécurisation modulée à l'activité qui ont joué un rôle d'amortisseur en sortie de crise.

En 2023, le déficit cumulé des établissements publics de santé s'élevait à 1,8 milliards d'euros pour les seuls budgets principaux, et à 2,2  milliards d'euros en incluant les budgets annexes. En 2024, ce déficit cumulé se creusera encore. De ce fait, « le déficit des établissements publics de santé constitue un point de fuite majeur de l'Ondam » selon le comité d'alerte sur le respect de l'Ondam8(*).

La commission considère que la situation des établissements de santé appelle des mesures de soutien fortes. Pour mémoire, la FHF estime qu'au titre de 2023 et 2024, l'impact de l'inflation fait l'objet d'un sous-financement de l'ordre d'1,8 milliard d'euros pour l'ensemble des établissements de santé.

Les données pour 2024 confirment une dynamique d'activité soutenue dans le secteur public, qui avait tardé à se manifester par rapport à la reprise observée dès 2022 dans le secteur privé. Cette tendance positive doit être soutenue et encouragée. En outre, alors que la dynamique d'activité s'appuie sur un fort développement de l'ambulatoire, la valorisation des tarifs du secteur MCO doit constituer un point de vigilance majeur, pour que les prises en charge les plus complexes ne soient pas chroniquement sous financées. En 2024, la revalorisation des tarifs du secteur MCO de 4,4 % en moyenne pour les établissements ex-DG et de 0,4 % pour ceux relevant du champ ex-OQN a ainsi permis de soutenir la reprise d'activité et certaines filières spécialisées (pédiatrie, obstétrique, soins palliatifs...). Ce travail de juste valorisation des activités doit demeurer au coeur des préoccupations de 2025.

Enfin, l'éventuel dégel des crédits mis en réserve sur le champ MCO, qui s'élèvent à 410 millions d'euros pour 2024, n'a encore fait l'objet d'aucune décision officielle de la part du ministère. La direction générale de l'offre de soins (DGOS) a toutefois indiqué lors des auditions que ce dégel paraissait peu probable, dans un contexte de sur-exécution du deuxième sous-objectif de l'Ondam.

• Dans un contexte d'aggravation brutale du déficit de la sécurité sociale en 2024, la commission souligne l'absolue nécessité d'oeuvrer au rétablissement des comptes sociaux, auquel la maîtrise de l'Ondam doit impérativement contribuer. Des efforts significatifs devront être consentis dès 2025, pour éviter un nouveau dérapage incontrôlé des dépenses, sans sacrifier néanmoins les besoins de santé de la population.

En conséquence, la commission propose, en responsabilité d'adopter cet article modifié par l'amendement de crédits n° 118.

La commission souhaite en effet marquer sa préoccupation quant à un juste niveau de financement des établissements de santé en modifiant la ventilation de l'Ondam par la majoration de 200 millions d'euros du deuxième sous-objectif de l'Ondam, sans modifier toutefois le montant global de l'Ondam pour 2024. Cette majoration est donc compensée par une minoration de 100 millions d'euros du cinquième sous-objectif et de 100 millions d'euros du sixième sous-objectif.

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

DEUXIÈME PARTIE

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES
ET À L'ÉQUILIBRE GÉNÉRAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L'EXERCICE 2025

TITRE IER

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES,
AU RECOUVREMENT ET À LA TRÉSORERIE

Article 3
Alignement de l'effort contributif des non-salariés agricoles
sur celui des travailleurs indépendants

Cet article complète la réforme de la pension de retraite de base des non-salariés agricoles afin d'en aligner le mode de calcul sur le régime général, qui figure à l'article 22 du présent projet de loi. Il aligne les taux de cotisations d'assurance vieillesse et les plafonds applicables aux non-salariés agricoles sur ceux applicables aux travailleurs indépendants, tout en conservant les spécificités du régime que sont l'assiette triennale et l'annualisation des cotisations.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé : l'alignement de l'effort contributif des non-salariés agricoles sur celui des travailleurs indépendants, dans une recherche de convergence entre les régimes

A. Le droit existant : l'effort contributif des non-salariés agricoles varie selon leur statut et repose principalement sur le chef d'exploitation

L'affiliation au régime des non-salariés des professions agricoles est ouverte aux personnes non salariées réalisant des activités dites « agricoles » réalisées dans des entreprises et des exploitations ad hoc, dont la liste figure à l'article L. 722-1 du code rural et de la pêche maritime. Il s'agit notamment d'activités d'élevage et de travaux agricoles ou forestiers.

1. Le régime des non-salariés agricoles comprend différents statuts

Les travailleurs non salariés agricoles se répartissent entre différents statuts qui reflètent la nature de leur activité agricole, et permettent ainsi d'offrir une protection sociale aux membres de la famille travaillant sur l'exploitation.

Les différents statuts des non-salariés agricoles

• Le chef d'exploitation ou d'entreprise agricole9(*), qui dirige et met en valeur une exploitation ou une entreprise dont l'importance atteint l'un des critères de l'activité minimale d'assujettissement, à savoir :

1° la superficie mise en valeur est au moins égale à la surface minimale d'assujettissement, fixée par arrêté préfectoral pour chaque département et chaque type de culture ;

2° dans le cas où la condition fixée au 1° ne peut être appréciée, le temps de travail nécessaire à la conduite de l'activité doit être au moins égal à 1 200 heures par an ;

3° pour les cotisants exploitant ¼ de la surface minimale d'assujettissement ou travaillant entre 150 et 1 200 heures par an sans avoir fait valoir leurs droits à la retraite, le revenu professionnel doit être au moins égal à l'assiette forfaitaire applicable aux cotisations d'assurance maladie, invalidité et maternité, soit 800 Smic horaire ;

• l'aide familial est une personne âgée d'au moins 16 ans, ascendant, descendant, frère, soeur ou allié du même degré du chef d'exploitation agricole, ou de son conjoint, qui vit sur l'exploitation et participe à sa mise en valeur sans être salarié ;

• le conjoint collaborateur : ce statut a été créé en 1999 afin de permettre aux personnes mariées, pacsées ou vivant en concubinage avec un chef d'exploitation ou d'entreprise agricole exerçant une activité non rémunérée sur l'exploitation et l'entreprise, de bénéficier d'une protection sociale au même titre que les aides familiaux, en contrepartie de cotisations sociales relativement faibles. Depuis le 1er janvier 2022, ce statut est limité à 5 ans, durée au terme de laquelle le conjoint devrait opter entre le statut de co-exploitant ou de salarié ;

• l'associé d'exploitation s'entend d'une personne non salariée, âgée de 18 ans révolus et de moins de 35 ans, descendant, frère, soeur ou allié du même degré du chef d'exploitation agricole ou de son conjoint, qui a pour activité principale la participation à la mise en valeur de l'exploitation10(*). Les personnes bénéficiant de ce statut depuis le 18 mai 2005 sont également soumises à une durée maximale de 5 ans, au terme de laquelle ils doivent opter pour le statut de co-exploitant ou de salarié.

2. L'effort contributif varie selon le statut des non-salariés agricoles, ce qui justifie qu'ils n'aient pas tous accès à toutes les composantes de la pension de retraite ni aux minima de pension

Le régime des non-salariés agricoles comprend 4 types de cotisations d'assurance vieillesse, qui reflètent l'architecture complexe de la pension de retraite, composée d'une partie de retraite forfaitaire et d'une partie de retraite proportionnelle, auxquelles s'ajoute une pension de retraite complémentaire obligatoire.

Actuellement, les différents statuts des non-salariés agricoles se répartissent l'effort contributif de manière inégale, ce qui justifie qu'ils n'aient pas tous accès aux différentes composantes de la pension de retraite listées ci-avant.

En effet, la retraite forfaitaire est réservée aux non-salariés agricoles exerçant cette activité à titre principal ou exclusif. Elle est ouverte au chef d'exploitation ou d'entreprise, au conjoint collaborateur, ainsi qu'à l'aide familial. Elle est financée par une cotisation d'assurance vieillesse individuelle (AVI) qui applique un taux forfaitaire de 3,32 % à une assiette comprise entre 800 Smic horaire (y compris en cas de revenus inférieurs à ce seuil minimum) et le plafond de la sécurité sociale (Pass).

Tous les cotisants à la retraite forfaitaire sont ainsi assurés de bénéficier d'un montant minimal de pension de 288,48 euros par mois au 1er janvier 2024 pour une carrière complète, et ce même lorsqu'ils ont des revenus inférieurs à 800 Smic horaire.

La retraite proportionnelle, calculée selon un barème de points, est quant à elle financée par deux cotisations d'assurance vieillesse agricole (Ava) que sont :

- une cotisation plafonnée à un taux de 11,5 %, assise sur une assiette comprise entre 600 Smic horaire et le plafond de la sécurité sociale. Les chefs d'exploitation ou d'entreprise, le conjoint collaborateur et l'aide familial, y compris ceux exerçant à titre secondaire, y sont soumis.

- une cotisation déplafonnée à un taux de 2,24 %11(*), assise sur une assiette comprenant la totalité du revenu agricole, avec un minimum de 600 Smic, qui s'applique aux seuls chefs d'exploitation ou d'entreprise.

Enfin, la retraite complémentaire repose également sur un barème de points, acquis par cotisation assise sur un taux de 4 % appliquée aux revenus professionnels selon une assiette minimale fixée à 1820 Smic horaire pour les chefs d'exploitation et 1200 Smic horaire pour les membres de la famille (conjoints, aides familiaux).

Modalités de calcul des cotisations d'assurance vieillesse
dues au titre de l'activité des travailleurs non-salariés agricoles

Taux applicables au 1er janvier 2026

Cotisation

Assiette

Taux

Chef d'exploitation à titre principal ou exclusif

Chef d'exploitation à titre secondaire

Conjoint collaborateur
et aide familial à titre principal ou exclusif

Conjoint collaborateur et aide familial à titre secondaire

Assurance vieillesse individuelle (retraite forfaitaire)

Revenus professionnels du chef d'exploitation, avec une assiette minimale égale à 800 Smic, jusqu'au montant du Pass

Néant

Revenus professionnels du chef d'exploitation, avec une assiette minimale égale à 800 Smic, jusqu'au montant du Pass

Néant

3,32 %

Assurance vieillesse agricole (retraite proportionnelle) plafonnée

Revenus professionnels, avec une assiette minimale égale à 600 Smic, jusqu'au montant du Pass

Revenus professionnels,
avec une assiette minimale égale à 600 Smic, jusqu'au montant du Pass

Assiette forfaitaire égale à 400 Smic

Assiette forfaitaire égale à 400 Smic

11,55 %

Assurance vieillesse agricole (retraite proportionnelle) déplafonnée

Revenus professionnels, avec une assiette minimale égale à 600 Smic

Revenus professionnels, avec une assiette minimale égale à 600 Smic

Néant

Néant

2,36 %

Taux de cotisations de retraite de base cumulé

17,23 %

13,91 %

14,87 %

11,5 %

 

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après l'annexe 9 du PLFSS pour 2025

B. Le droit proposé : un alignement progressif de l'effort contributif sur celui des travailleurs indépendants en contrepartie de nouveaux droits

Dans le cadre de la réforme du mode de calcul de la pension de retraite de base des non-salariés agricoles programmée par le Parlement au 1er janvier 2026 au terme de la loi dite « Dive », le Gouvernement a fait le choix de retenir un scénario de convergence vers les régimes alignés. Il prévoit à l'article 22 du présent projet de loi de fusionner les parts forfaitaire et proportionnelle de la pension de retraite des non-salariés agricoles, en une pension de retraite de base calculée selon les vingt-cinq meilleures années de revenu (cf. commentaire de l'article 22).

1. L'alignement du taux de cotisation et de l'assiette minimale participe de la réforme du mode de calcul de la retraite de base figurant à l'article 22

Cette convergence entre les régimes, qui a vocation à faciliter le calcul de la retraite des polypensionnés, qui représentent 85 % des non-salariés agricoles, s'étend également au taux des cotisations et plafonds applicables, comme le préconisait le rapport remis au Parlement par l'Igas et le conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) le 30 janvier 2024.

La réforme du mode de calcul de la retraite de base des non-salariés agricoles prévue à l'article 22 a pour effet, pour les années cotisées à compter du 1er janvier 2026, de supprimer les pensions de retraite forfaitaire et proportionnelle pour les remplacer par une pension unique. Cela se traduira par la suppression des cotisations d'assurance vieillesse de base AVA et AVI et la création d'une cotisation d'assurance vieillesse unifiée, assise sur une assiette minimale harmonisée.

L'unification de l'effort contributif donnera lieu à une harmonisation des droits : le bénéfice des minima de pension que sont la pension majorée de référence (PMR) et le complément différentiel de points de retraite complémentaire (CD de RCO) sera étendu aux non-salariés exerçant leur activité à titre secondaire. En effet, ces derniers n'y ont pas accès à droit constant eu égard au fait qu'ils ne cotisent qu'à la retraite proportionnelle et à la retraite complémentaire obligatoire.

Selon les estimations transmises par la direction de la sécurité sociale, cet alignement progressif de l'effort contributif génèrera des recettes de 19,4 millions d'euros en 2026, 25,7 millions d'euros en 2027 et 31,9 millions d'euros en 2028.

Conformément aux recommandations du rapport de l'Igas et du CGAAER, deux spécificités agricoles auxquelles la profession reste très attachée sont toutefois conservées :

l'assiette triennale, qui permet de lisser les revenus sur une assiette glissante de trois ans ;

l'annualisation des cotisations, au titre de laquelle un exploitant en activité au 1er janvier d'une année est tenu de cotiser pour l'année entière. Elle garantit aux non-salariés agricoles de valider automatiquement quatre trimestres par an.

2. Les différents statuts des non-salariés agricoles seront désormais soumis à un taux de cotisation unique et à une assiette minimale harmonisée

Le taux de cotisation de la retraite de base des travailleurs indépendants est de 17,15 % sur la part de l'assiette inférieure ou égale au plafond annuel de la sécurité sociale et de 0,72 % sur la totalité du revenu12(*). L'assiette minimale applicable est de 450 Smic horaire.

La convergence vers ces paramètres se traduira par la fusion des cotisations d'assurance vieillesse de base AVI et AVA, conséquence de la suppression des parts forfaitaire et proportionnelle de la retraite de base qu'elles financent, en une seule cotisation de retraite de base.

Le 5° du I de l'article 3 précise que cette cotisation sera due par les chefs d'exploitation ou d'entreprise exerçant à titre principal ou secondaire, au titre de leur activité propre, et sera calculée pour partie sur la part de l'assiette inférieure ou égale au plafond annuel de la sécurité sociale, et pour partie sur la totalité de l'assiette.

Elle sera également due par les chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole au titre de l'activité principale ou secondaire de chaque membre de de la famille (conjoint collaborateur et aide familial) participant à la mise en valeur de son exploitation ou de son entreprise.

Selon les éléments transmis par le Gouvernement, le taux de cotisation d'assurance vieillesse de base, définit de façon réglementaire, va augmenter pour l'ensemble des non-salariés agricoles, pour atteindre un taux unique de 17,87 %, aligné sur celui des travailleurs indépendants.

La répartition inégale de l'effort contributif actuelle explique que les différents statuts de non-salariés agricoles verront leurs taux de cotisations évoluer différemment :

• Le deuxième alinéa du 5° du I de l'article 3 prévoit que les taux de cotisation applicables aux cotisations dues par les chefs d'exploitation seront identiques à ceux applicables aux travailleurs indépendants.

Les chefs d'exploitation seront ainsi soumis à un taux de cotisation de 17,87 % sur la part de l'assiette inférieure ou égale au plafond de la sécurité sociale et à un taux de 0,72 % sur la totalité du revenu. Cela équivaut à une hausse de l'effort contributif de 0,64 point pour ceux exerçant à titre principal et de 3,96 points pour ceux exerçant à titre secondaire.

• Le quatrième alinéa du 5° du I de l'article 3 porte le taux de cotisation des aides familiaux et conjoints collaborateurs au niveau égal à la somme des cotisations plafonnées et déplafonnées des chefs d'exploitation.

Les membres de la famille exerçant une activité agricole à titre exclusif ou principal, qui n'étaient jusqu'alors pas soumis à l'AVA déplafonnée, vont voir leur taux de cotisation augmenter de 3 points.

• Les membres de la famille exerçant une activité agricole à titre secondaire, qui n'étaient pas redevables de l'AVI ni de l'AVA déplafonnée, vont voir leur taux de cotisation augmenter de 6,32 points.

Scénario d'évolution du taux de cotisation des non-salariés agricoles au 1er janvier 2029

Source : D'après l'annexe 9 du PLFSS pour 2025

Selon l'étude d'impact, cette hausse de cotisation concernera 69 % des chefs d'exploitation et se traduira par une augmentation annuelle moyenne de 190 euros, qui soit environ 15 euros par mois.

Le III de l'article 3 prévoit que cet alignement se fera toutefois de manière progressive jusqu'au 1er janvier 2029 pour les chefs d'exploitation et d'entreprise exerçant à titre secondaire, ainsi que pour les collaborateurs d'exploitation et les membres de la famille qui subiront les majorations les plus importantes.

Ce même III prévoit en revanche que cet alignement entrera en vigueur au 1er janvier 2026 pour les chefs d'exploitation et d'entreprise exerçant à titre principal pour lesquels la marche à gravir est moins haute.

Alignement progressif du taux de cotisation de retraite de base

 

Chef d'exploitation à titre principal ou exclusif

Chef d'exploitation à titre secondaire

Conjoint collaborateur
et aide familial à titre principal ou exclusif

Conjoint collaborateur
et aide familial à titre secondaire

Taux au 1er janvier 2026 sans la réforme

17,23 %

13,91 %

14,87 %

11,55 %

2026

17,87 %

14,87 %

13,05 %

2027

15,87 %

14,55 %

2028

16,87 %

2029

17,87 %

Source : D'après l'annexe 9 du PLFSS pour 2025

Enfin, les 6° et 8° du I de l'article 3 prévoient le maintien à titre transitoire du droit existant en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin.

L'assiette de calcul des non-salariés agricoles ultramarins fait actuellement l'objet d'une réforme à laquelle le Gouvernement a été habilité à procéder par ordonnance aux termes de l'article 26 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024. Le II de l'article 3 étend cette habilitation à la présente réforme.

Les 1°, 2°, 3° et 4° du I procèdent à des modifications légistiques de « toilettage » et de précision.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

Le Gouvernement a transmis au Sénat cet article modifié d'un amendement rédactionnel adopté par l'Assemblée nationale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

La commission se félicite de la mise en oeuvre de la réforme de la pension de retraite de base des non-salariés agricoles selon les vingt-cinq meilleures années de la durée d'assurance, portée à l'article 22 et dont participe le présent article.

Elle partage la volonté de simplification du système de pension de retraite de base des non-salariés agricoles, qui se traduit notamment par la fusion des pensions de retraite forfaitaire et proportionnelle en une pension de retraite de base unique. Cette fusion s'accompagne logiquement d'une simplification des cotisations d'assurance vieillesse.

Si la commission approuve l'objectif de convergence entre les régimes porté par le présent article, elle n'en reste pas moins sensible à la hausse significative de l'effort contributif des non-salariés agricoles exerçant à titre secondaire qui sera induite par l'alignement des taux de cotisation sur ceux des travailleurs indépendants.

En effet, selon l'étude d'impact, les recettes supplémentaires générées par cet alignement seraient supportées par moitié par les personnes exerçant une activité agricole à titre secondaire, qui représentent 12 % des effectifs.

La contrepartie de cette hausse importante de cotisations consiste en l'extension du bénéfice des minima de pension que sont la PMR et le CD de RCO aux non-salariés agricoles exerçant à titre secondaire.

Il en résulte un renforcement significatif de leurs droits à pension, et ce d'autant plus que l'article 22 prévoit également le relèvement du plafond d'écrêtement tous régimes de la PMR (1 073 euros brut en 2023) à celui du minimum contributif (MiCo) du régime général (1 387 euros brut).

Sous le bénéfice de ces observations, la commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article 3 bis (nouveau)
Affiliation au régime général de la sécurité sociale des agents employés par l'administration des Terres australes et antarctiques françaises

Cet article vise à affilier au régime général de la sécurité sociale les agents employés par l'administration des terres australes et antarctiques françaises pendant la durée de leur mission.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

A. Le droit actuel : l'absence de régime obligatoire pour les agents en districts et à bord des navires employés par l'administration de la collectivité des Terres australes et antarctiques françaises

Les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF) bénéficient d'un régime juridique législatif, pris en application de l'article 72-3 de la Constitution. La loi du 6 août 195513(*) prévoit le statut de ce territoire et encadre les règles qui y sont applicables.

La nature des TAAF reste incertaine. L'article 1er de la loi du 6 août 1955 qualifie les TAAF de « territoire d'outre-mer », un statut constitutionnel ayant disparu depuis 2003, tandis que l'article 5-1, issu de la loi du 21 février 202214(*) , prévoit que ce territoire est une collectivité.

L'article 1-1 du statut des TAAF dispose : « Dans les matières qui relèvent de la compétence de l'État, sont applicables dans les Terres australes et antarctiques françaises les dispositions législatives et réglementaires qui comportent une mention expresse à cette fin ». Des exceptions sont prévues à ce principe de spécialité législative. Cependant, par l'absence de population locale, peu de mentions des TAAF sont prévues par le législateur, faisant de cette collectivité un « territoire de l'oubli »15(*) juridique.

Ainsi, en l'absence de mention expresse, le code de la sécurité sociale ne s'applique pas aux individus recrutés par la collectivité des TAAF. Leurs agents contractuels à bord d'un bateau ou dans les districts sont donc dans une situation de vide juridique et ne peuvent se prévaloir d'une affiliation au régime général de la sécurité sociale prévue aux articles L. 311-1 et suivants du code de la sécurité sociale.

À l'inverse, les fonctionnaires et assimilés, ainsi que les militaires, continuent, même en étant placés dans les districts et à bord des navires, à être affiliés à leur régime de sécurité sociale. Les agents contractuels des TAAF déployés à Saint-Pierre de La Réunion, bénéficient, quant à eux, de la Caisse générale de sécurité sociale de La Réunion. Sont donc uniquement concernés par ce vide juridique les agents contractuels dans les districts ou à bord d'un navire.

La collectivité des TAAF affilie donc tous les agents contractuels en mission, hors de La Réunion, à la Caisse des Français de l'étranger. Cet organisme de sécurité sociale sert d'assurance volontaire aux Français expatriés et souhaitant une protection sociale supplémentaire16(*). Il n'est pas cohérent d'affilier des agents contractuels d'une collectivité française à une caisse réservée aux Français de l'étranger. Cette solution, bien qu'ayant répondu de manière pragmatique à un vide juridique, demeure insatisfaisante.

Le territoire des TAAF est subdivisé en cinq districts administratifs : Kerguelen, Crozet, Amsterdam et Saint-Paul, les îles Éparses et Terre Adélie. Les effectifs dans ces bases sont variables selon les périodes et peuvent atteindre jusqu'à une quarantaine d'agents pour la principale base qu'est Kerguelen. En 2020, selon la Cour des comptes17(*), la répartition au sein des TAAF était la suivante.

Comme le montre ce tableau, 51,33 équivalents temps plein travaillés étaient des contractuels de la collectivité des TAAF en districts, ne bénéficiant donc pas du régime général de la sécurité sociale.

Répartition des équivalents temps plein travaillés (ETPT) au sein des Terres australes et antarctiques françaises en 2020

Statut

ETPT

Programme budgétaire

Fonctionnaires de l'État

16,81

Programme 354

Contractuels de l'État

9,04

Programme 354

Apprentis

1,96

Programmes 354 et territoire

Stagiaires

1,53

Programme territoire

Contractuels territoire « siège »

38,10

Programme territoire

Contractuels territoire « districts »

51,33

Programme territoire

Volontaires de Service Civique

24,86

Programme territoire

PARTEX

55,00

Programme territoire

Source : Cour des comptes, 2022

B. Le dispositif proposé : une affiliation au régime général de la sécurité sociale

Le présent article, issu d'un amendement du Gouvernement et retenu par ce dernier dans le texte transmis au Sénat, propose d'affilier l'ensemble des agents de la collectivité des Terres australes et antarctiques françaises en mission dans ses territoires ou embarquées à bord de navires au régime général de la sécurité sociale.

Le I prévoit deux modifications du code de la sécurité sociale pour intégrer les agents des TAAF en districts et à bord de navires au régime général de la sécurité sociale. Le dispositif comble donc un vide juridique et ne prévoit pas d'intégrer au régime général de la sécurité sociale les agents situés au siège de Saint-Pierre de La Réunion qui bénéficient déjà d'un régime de protection sociale.

Le II prévoit une mise en oeuvre du dispositif à une date fixée par décret, au plus tard le 1er janvier 2026.

II - La position de la commission

La commission des affaires sociales approuve l'affiliation au régime général de la sécurité sociale des agents de la collectivité des Terres australes et antarctiques françaises en districts et embarqués à bord de navires.

En effet, affilier des agents contractuels d'une collectivité française à une caisse dédiée aux Français de l'étranger pour combler un vide juridique n'est pas cohérent et a constitué jusqu'à présent une réponse plus pragmatique que satisfaisante.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article 3 ter (nouveau)
Extension du régime simplifié des professions médicales
aux médecins libéraux en situation de cumul emploi-retraite
et aux médecins participant aux campagnes de vaccination

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale sur proposition du Gouvernement, permet d'étendre le dispositif du régime simplifié des professionnels médicaux conventionnés (RSPM) aux médecins libéraux exerçant en situation de cumul emploi-retraire et à ceux participant aux campagnes de vaccination.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé : l'extension du régime simplifié aux médecins participant aux campagnes de vaccinations et à ceux en situation de cumul emploi-retraite

A. Le droit existant : les dispositifs de régime simplifié et de cumul emploi-retraite ont vocation à faciliter l'installation et la poursuite d'activité des médecins, notamment dans les zones de déserts médicaux

1. Le régime simplifié pour les professionnels médicaux conventionnés répond à un besoin de simplification administrative

Le régime simplifié pour les professionnels médicaux conventionnés (RSPM) a été créé par la loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019.

Alors que ce régime était initialement ouvert aux seuls médecins exerçant en libéral à titre accessoire une activité de remplacement, que sont les étudiants de 3ème cycle, les jeunes médecins remplaçants, ainsi que les médecins salariés exerçant à titre secondaire une activité libérale, la loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023 l'a étendu aux médecins exerçant une activité libérale de régulation dans le cadre du service d'accès aux soins et de la permanence des soins.

L'affiliation au RSPM s'inscrit comme une alternative à l'affiliation au régime des praticiens et auxiliaires médicaux (PAMC), source de démarches administratives conséquentes. Les médecins relevant du PAMC sont ainsi tenus à une obligation d'affiliation en tant que profession libérale auprès des Urssaf et de la caisse de retraite des médecins (CARMF), et doivent entreprendre des démarches de conventionnement avec l'assurance maladie.

Le règlement différé des cotisations, qui consiste en appel de cotisations provisionnelles sur la base du dernier revenu déclaré suivi d'une régularisation à l'année N+1 ou N+2, crée un décalage entre la perception des revenus et le règlement des cotisations, et impose la tenue d'une comptabilité précise des charges.

Partant du constat que cette complexité administrative pouvait constituer un frein à l'établissement d'une activité libérale à titre secondaire, le Gouvernement a ouvert aux médecins ne relevant pas déjà du régime du PAMC la possibilité d'opter pour un régime simplifié de déclaration et de paiement des cotisations sociales dues au titre d'une activité de remplacement.

Le RSPM permet ainsi aux médecins de déclarer leurs revenus mensuellement ou trimestriellement, et de s'acquitter en un versement unique d'une cotisation de 13,5 % sur le revenu généré par leur activité, lequel ne peut excéder un seuil de 19 000 euros par an, après application des abattements de 34 % prévus par l'article 102 ter du code général des impôts. Selon l'étude d'impact de la LFSS pour 2019, cela correspond à sept à huit semaines de consultations au tarif opposable. Enfin, les déclarations administratives telles que l'affiliation à l'Urssaf et la CARMF sont assurées par les caisses primaires d'assurance maladie.

2. Le cumul emploi-retraite, qui permet la poursuite d'une activité professionnelle tout en percevant une pension de retraite, est désormais créateur de droits à pension

Les médecins retraités peuvent continuer leur activité dans le cadre du cumul-emploi retraite qui peut prendre deux formes :

- le cumul emploi-retraite libéralisé, qui permet à l'assuré ayant liquidé l'intégralité de pensions de retraite auxquelles il a droit, de cumuler entièrement sa pension de retraite avec ses revenus d'activité, sous réserve qu'il ait atteint l'âge d'ouverture des droits à la retraite et justifie de la durée d'assurance requise pour l'obtention du taux plein, ou qu'il ait atteint l'âge d'annulation de la décote ;

- le cumul emploi-retraite plafonné, qui permet aux retraités ne satisfaisant pas à ces conditions de cumuler leurs pensions avec les revenus issus de leur activité, dans la limite d'un plafond au-delà duquel leurs pensions sont écrêtées.

La loi du 14 avril 2023 réformant les retraites a permis aux assurés remplissant les conditions du cumul emploi-retraite libéralisé de bénéficier de nouveaux droits à pension en contrepartie des cotisations versées en cumul emploi-retraite.

Cette possibilité n'est toutefois pas ouverte aux médecins en situation de cumul emploi-retraite bénéficiaires de l'exonération de l'ensemble des cotisations de retraite au titre de l'année 2023, accordée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 aux médecins dont le revenu annuel est plafonné à 80 000 euros.

B. Le dispositif proposé : étendre le bénéfice RSPM aux médecins en situation de cumul emploi-retraite libéralisé et aux médecins participant aux campagnes de vaccination

L'article 3 ter réécrit l'article L. 642-4-2 du code de la sécurité sociale qui codifie le dispositif du régime simplifié pour les professionnels médicaux conventionnés, afin de l'étendre aux médecins en situation de cumul emploi-retraite libéralisé, par le jeu d'un renvoi aux troisième à sixième alinéas de l'article L. 643-6 du code de la sécurité sociale, ainsi qu'aux médecins participant à une campagne de vaccination.

Le taux global des cotisations dues par les médecins affiliés au RSPM peut désormais être minoré, lorsque l'activité concernée fait l'objet d'une prise en charge de tout ou partie des cotisations et contributions par l'assurance maladie, et croître lorsque les rémunérations supérieures à un certain montant, tout en restant inférieures au seuil au-delà duquel l'affiliation au RPSM n'est plus possible. Ces montant et seuil sont définis par décret.

II - La position de la commission

La commission des affaires sociales est favorable à l'extension du régime simplifié aux professionnels médicaux conventionnés afin de lutter contre les situations de déserts médicaux dans lesquels se trouvent de nombreux territoires. Elle se félicite également du fait que le Gouvernement ait annoncé publiquement lors des débats à l'Assemblée nationale son souhait d'augmenter le plafond de revenus permettant de bénéficier du RPSM, qui est actuellement de 19 000 euros, à hauteur de 80 000 euros. Ce plafond, ainsi que le montant de la rémunération au-delà duquel le taux global de cotisation peut être minoré, sont définis par décret.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article 3 quater (nouveau)
Sécurisation de la hausse progressive du taux global de cotisations et contributions des travailleurs indépendants libéraux exerçant dans le cadre de la microentreprise

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, propose de sécuriser la trajectoire de hausse des cotisations des travailleurs indépendants libéraux exerçant dans le cadre de la microentreprise prévue par un décret du 30 mai 2024 en conséquence d'une décision du Conseil d'État du 9 février 2024.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

A. Le droit en vigueur

1. Le régime micro-social des professions libérales non réglementées

L'article L. 613-7 du code de la sécurité sociale prévoit un dispositif simplifié de calcul des cotisations et contributions sociales, dit « régime micro-social ». Ce régime bénéficie notamment aux professions libérales non réglementées régies par l'article L. 631-1 du code de la sécurité sociale.

L'article L. 613-7 précité prévoit que le taux global, appliqué au montant du chiffre d'affaires ou de recettes, doit être fixé « de manière à garantir [...] un niveau équivalent entre le taux effectif global des cotisations et des contributions sociales versées, d'une part, par ces travailleurs indépendants et, d'autre part, par ceux ne relevant pas [du régime micro-social] ».

2. L'annulation du montant du taux global par une décision du Conseil d'État du 9 février 2024

a) La fixation du taux global par le décret du 7 décembre 2022

L'article 1er du décret n° 2022-1529 du 7 décembre 2022 a fixé, notamment, ce taux de cotisation global.

Ainsi, l'article D. 613-4 du code de la sécurité sociale fixait le taux de cotisation global à 21,1 %.

b) La décision du Conseil d'État du 9 février 2024

Dans une décision du 9 février 202418(*), le Conseil d'État a annulé ce taux global figurant dans l'article D. 613-4 précité, de même que des dispositions de l'article D. 613-6 du même code.

Il a considéré que le taux de 21,1 % était trop bas. En effet, il avait été calculé sur la base d'un taux de contribution nul au titre du régime complémentaire obligatoire de retraite, ce qui ne correspondait qu'à la situation d'une part infime des travailleurs indépendants relevant de l'article L. 631-1 du code de la sécurité sociale, hors régime micro-social19(*).

Eu égard aux conséquences excessives qu'aurait emportées l'annulation prononcée par la présente décision pour un nombre important de travailleurs indépendants, l'annulation des dispositions attaquées n'a été prononcée qu'à compter du 1er juin 2024.

c) L'augmentation progressive du taux global prévue par un décret du 30 mai 2024

En conséquence de cette décision du Conseil d'Etat, un décret du 30 mai 202420(*) a modifié l'article D. 613-4 précité pour prévoir que le taux global, jusqu'alors de 21,1 %, augmente progressivement de 5 points, pour atteindre : 

- 23,1 % du 1er juillet au 31 décembre 2024 ;

- 24,6 % du 1er janvier 2025 au 31 décembre 2025 ;

- 26,1 % à partir du 1er janvier 2026.

B. Le dispositif proposé

Cet article, issu d'un amendement du Gouvernement et retenu dans le texte qu'il a transmis au Sénat, sécurise juridiquement cette trajectoire.

Pour cela, il prévoit que jusqu'au 1er janvier 2026, le taux global peut être fixé par décret à un niveau inférieur à celui qui résulterait de l'application du droit actuel, sans que l'écart à ce dernier excède 20 % en 2024 et 10 % en 2025.

Le tableau ci-après permet de comparer les différents taux et écarts.

Taux de cotisation global des travailleurs indépendants des professions libérales exerçant dans le cadre de la microentreprise

 

avant le 1er juillet 2024

du 1er juillet 2024 au 31 décembre 2024

2025

A partir de 2026

Taux effectif (art. D. 613-4 du code de la sécurité sociale) (en %)

21,1

23,1

24,6

26,1

Taux à atteindre selon le Gouvernement (en %)

26,1

26,1

26,1

26,1

Ecart (en % du taux à atteindre)

23,7

13,0

6,1

0,0

Ecart autorisé par le présent article (en % du taux à atteindre)

 

-20*

-10

0,0

*En 2024.

Source : Commission des affaires sociales, d'après l'article D. 613-4 du code de la sécurité sociale et le présent article

II - La position de la commission

Lors de la présentation de l'amendement tendant à insérer cet article, la ministre du travail et de l'emploi a déclaré que la stricte application de la décision du Conseil d'État aurait conduit à une hausse d'environ 5 points des cotisations des microentrepreneurs concernés. Après concertation avec leurs représentants, il avait été jugé préférable d'organiser une hausse progressive des cotisations, s'étalant sur trois ans. Une telle augmentation devait être inscrite dans la loi.

La ministre a souligné qu'à terme, les microentrepreneurs concernés auraient donc un niveau de prélèvements et de droits équivalent à celui des autres travailleurs indépendants. C'était le souhait de ces deux catégories. Ils pourraient également racheter les périodes manquantes.

Elle a enfin relevé que cette proposition avait été accueillie très favorablement par les instances des caisses de sécurité sociale concernées. 

La commission est favorable à cet article, qui sécurise les dispositions déjà adoptées au niveau réglementaire.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article 4
Pérennisation de l'exonération en faveur des employeurs agricoles de travailleurs occasionnels et de demandeurs d'emploi (TO-DE)

Cet article propose de pérenniser l'exonération de cotisations employeur pour l'emploi d'un travailleur saisonnier agricole, cette exonération dérogatoire au droit commun devant prendre fin au 31 décembre 2025. Il vise en outre à relever de 1,20 à 1,25 Smic le plafond de rémunération octroyant une exonération totale.

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

I - Le dispositif proposé : pérenniser une exonération paradoxalement historique

A. L'état du droit : une exonération en faveur des employeurs de TO-DE devenue temporaire

1. Le mécanisme de l'exonération

Déjà ancien, le principe d'une exonération spécifique de cotisations sociales pour l'emploi de travailleurs saisonniers agricoles permet de soutenir la compétitivité des employeurs agricoles ; le travail saisonnier représente en effet plus de 30 % des heures travaillées du salariat agricole21(*).

La loi du 1er février 1995 de modernisation de l'agriculture22(*) a ainsi introduit pour la première fois un dispositif de réduction de taux de cotisations d'assurances sociales dues au titre des travailleurs saisonniers agricoles, calculée sur le salaire réel. Auparavant, les cotisations de ces salariés agricoles étaient calculées sur une base forfaitaire prévue par arrêté qui permettait peu ou prou une exonération de moitié23(*).

Codifié à l'article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime, ce dispositif d'exonération concerne toutes les cotisations et contributions à la charge de l'employeur : cotisation à la sécurité sociale, à l'assurance-chômage, au régime complémentaire agricole, contribution solidarité autonomie (CSA) et contribution au fonds national d'aide au logement (Fnal).

Champs d'application de l'exonération TO-DE

En vertu des articles L. 741-16 et L. 722-1 du code rural et de la pêche maritime, l'exonération de cotisations et de contributions sociales s'applique pour l'emploi d'un travailleur réalisant des tâches temporaires liées au cycle de la production animale et végétale. Sont ainsi comprises les tâches :

- réalisées au sein des exploitations de culture et d'élevage de quelque nature qu'elles soient, ainsi qu'au sein des exploitations de dressage, d'entraînement et haras ;

- correspondant à des travaux forestiers, à l'exclusion de l'activité elle-même des entreprises de travaux forestiers ;

- réalisées dans des établissements de conchyliculture et de pisciculture ;

- s'apparentant à des activités de pêche maritime à pied professionnelle ;

- participant des activités de transformation, de conditionnement et de commercialisation de produits agricoles lorsque ces activités, accomplies sous l'autorité d'un exploitant agricole, constituent le prolongement direct de l'acte de production.

Les employeurs ne peuvent bénéficier de cette exonération que pour une durée inférieure ou égale à cent dix-neuf jours ouvrés par année civile pour un même salarié24(*)

.

Le mécanisme de l'exonération a évolué à plusieurs reprises et, notamment, lors de la refonte des allègements généraux opérée par l'article 8 de la LFSS pour 201925(*) en contrepartie de la suppression du crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE). Le texte initial de cet article 8 prévoyait une suppression pure et simple du régime d'exonération liée à l'emploi des TO-DE au profit du renforcement des allègements généraux. La discussion parlementaire a toutefois permis de maintenir ce régime spécifique pour un temps avant le basculement vers les allègements généraux.

Il convient également de noter que les employeurs de TO-DE bénéficient des réductions de 1,8 point de la cotisation famille et de 6 points de la cotisation maladie (dénommées « bandeau famille » et « bandeau maladie ») jusqu'à 3,5 Smic et 2,5 Smic respectivement prévues aux articles L. 241-2-1 et L. 241-6-1 du code de la sécurité sociale.

Le dispositif tel qu'il est actuellement en vigueur prévoit ainsi une réduction globale de 38,96 points de cotisations patronales pour les rémunérations allant jusqu'à 1,2 Smic - ce seuil était de 1,25 Smic avant la LFSS pour 2019. Au-delà de 1,2 Smic, l'exonération suit une pente, dont le coefficient de dégressivité est prévu par décret26(*), pour s'annuler, comme les allègements de droit commun, à 1,6 Smic. Au-delà de ce seuil, seules les deux réductions proportionnelles famille et maladie s'appliquent à l'emploi d'un TO-DE.

En conséquence, et ainsi que le montre le graphique ci-après, l'exonération spécifique TO-DE est, jusqu'à 1,6 Smic, un régime plus favorable aux employeurs agricoles que le régime de droit commun des allégements généraux.

Enfin, les exploitants agricoles salariant des TO-DE peuvent, sur le fondement du second alinéa du VI de l'article L. 741-16 précité, choisir de bénéficier des allègements dégressifs de droit commun dans le cas où la période d'emploi du saisonnier agricole dépasse la durée maximale de 119 jours par année civile27(*).

Taux de l'exonération TO-DE selon la rémunération

Source : Annexe 5 au PLFSS pour 2021

Selon les informations transmises à la rapporteure générale par la caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA), ce dispositif bénéficiait en 2023 à plus de 69 541 exploitations agricoles pour 913 943 contrats concernés. Le salaire moyen versé aux saisonniers agricoles (1,14 Smic) et la durée moyenne plutôt courte (21 jours) rendent l'exonération totale dans la plupart des cas. En comparaison, l'étude d'impact indique qu'à 1,14 Smic l'exonération par les allègements généraux, dans leur version en vigueur, ne serait que de 67 %.

2. Un dispositif en sursis depuis 2019

La LFSS pour 2019 a maintenu l'exonération spécifique liée aux TO-DE jusqu'au 1er janvier 2021, date à laquelle l'article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime devait être abrogé. La LFSS pour 202028(*) a repoussé cette abrogation au 1er janvier 2023. Enfin, la LFSS pour 2023 a accordé un nouveau délai avant l'abrogation en repoussant la fin de l'exonération au 1er janvier 2026.

Selon la CCMSA, ce dispositif d'exonération a minoré les recettes de cotisations et contributions sociales de 567,6 millions d'euros en 2023, répartis à 68 % sur le champ des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale. Conformément au VII de l'article L. 741-16 précité, ces moindres recettes sont compensées par le budget de l'État, en l'occurrence par les programmes budgétaires 149 et 381.

Répartition des exonérations TO-DE en 2023 selon le risque couvert

(en euros)

Source : Commission des affaires sociales, d'après les données CCMSA

B. Le dispositif proposé : une pérennisation et un relèvement du seuil pour le bénéfice d'une exonération totale

• Le présent article propose - au II - de pérenniser le dispositif d'exonération TO-DE en supprimant la disposition de l'article 8 de la LFSS pour 2019 qui porte l'abrogation de l'article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime. L'étude d'impact anticipe une moindre recette de 606 millions d'euros pour 2026, pesant sur les dépenses de l'État.

• D'autre part, le I de l'article vise à relever de 1,20 à 1,25 Smic le plafond de rémunération octroyant une exonération totale à l'employeur. Ce relèvement est rendu applicable à compter du 1er mai 2024. Il est à noter que l'augmentation de ce seuil conduit à revenir au niveau en vigueur avant la LFSS pour 2019.

Selon l'étude d'impact, l'incidence financière de cette mesure serait de 14 millions d'euros en 2024 et 18 millions d'euros en année pleine pour 2025. 88 000 contrats supplémentaires par an pourraient ainsi donner droit à une exonération totale de cotisations patronales.

II - Le dispositif transmis au Sénat

Le Gouvernement a transmis au Sénat cet article modifié par deux amendements adoptés par l'Assemblée nationale, en application de l'article LO. 111-7 du code de la sécurité sociale.

• L'Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement, identique à deux amendements des députés Didier Le Gac et Marc Fesneau, visant à éviter que la réforme des allègements généraux, prévue à l'article 6 de la présente LFSS, ait une incidence sur le régime d'exonération TO-DE.

La liste des cotisations et contributions concernées par l'exonération spécifique TO-DE est en effet identique à celle prévue pour les allègements dégressifs à l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale. Alors que l'assiette des allègements dégressifs serait réduite à deux reprises en 2025 et 2026 par une minoration de la cotisation d'assurance vieillesse (de 2 points au 1er janvier 2025 et 2 points supplémentaires au 1er janvier 2026), le a) du  du I du présent article permet que cette assiette, pour le dispositif TO-DE, soit figée dans sa version en vigueur au 1er janvier 2024.

En l'absence de ces dispositions de neutralisation, la direction de la sécurité sociale indique ainsi que le surplus de cotisations à acquitter, à partir de 2026, pour un employeur versant le salaire moyen de 1,14 Smic à un saisonnier agricole serait de 80 euros par mois. L'incidence globale positive pour les finances publiques de cette moindre exonération serait de 80 millions d'euros par année29(*).

• Enfin, le III du présent article, issu d'un amendement du député Yannick Monet, vise à demander un rapport au Gouvernement, avant le 1er juillet 2025, sur les évolutions du travail saisonnier agricole et l'amélioration des droits des travailleurs concernés.

Le Gouvernement a transmis au Sénat cet article ainsi modifié.

III - La position de la commission : des mesures opportunes

Ces dispositions traduisent les engagements pris par le Gouvernement30(*) début 2024 à la suite de la mobilisation des agriculteurs. Le rehaussement du seuil de 1,20 à 1,25 Smic est d'ailleurs déjà appliqué par les caisses de la MSA depuis le 1er mai 2024.

La commission accueille très favorablement ces mesures alors qu'elle a soutenu à plusieurs reprises la pérennisation de l'exonération « TO-DE ». Le présent article permettra de mettre fin à un couperet pour les employeurs agricoles, certes sans cesse repoussé, mais inutilement maintenu en droit alors que l'allégement du coût du travail des saisonniers agricoles est un besoin durable pour les exploitants.

La commission se réjouit par ailleurs que l'Assemblée nationale et le Gouvernement aient en partie clarifié l'articulation entre la réforme des allègements généraux de l'article 6 et le présent article 4. Le risque de diminuer au global les points d'exonération pour l'emploi d'un TO-DE ne paraissait pas conforme aux annonces formulées début 2024 par l'exécutif.

Toutefois, la neutralisation des effets de l'article 6 est circonscrite à l'année 2025 - en omettant la réduction des points d'extinction des bandeaux famille et maladie à 3,2 et 2,2 Smic qui ne concernerait pratiquement pas d'employeurs de saisonniers agricoles. La suppression prévue pour 2026 des bandeaux famille et maladie réduirait en revanche mécaniquement le niveau d'exonération pour les employeurs de TO-DE, y compris pour des revenus versés compris entre 1 et 1,25 Smic. Un amendement de la rapporteure générale à l'article 6 vise précisément à maintenir les bases légales prévoyant ces bandeaux afin qu'ils demeurent applicables à plusieurs dispositifs dérogatoires d'exonération, dont le dispositif TO-DE31(*).

En outre, conformément à sa doctrine, la commission a adopté un amendement n° 119 de la rapporteure générale, visant à supprimer une demande de rapport adressée au Gouvernement. Celle-ci, au demeurant, porte sur les évolutions des conditions de travail des saisonniers agricoles et sur le profil de ces travailleurs, sujet certes connexe au présent article mais distant du périmètre des lois de financement de la sécurité sociale.

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

Article 4 bis (nouveau)
Éligibilité des coopératives d'utilisation de matériel agricole à l'exonération TO-DE

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale, propose d'étendre le périmètre du dispositif d'exonération TO-DE aux coopératives d'utilisation de matériel agricole (Cuma).

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif transmis au Sénat

A. L'état du droit

L'article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime prévoit le dispositif d'exonération pour l'emploi des saisonniers agricoles (TO-DE) décrit ci-avant dans le commentaire de l'article 4. Aux termes de cet article, le bénéfice de cette exonération est ouvert aux « employeurs relevant du régime de protection sociale des professions agricoles ». Sont ainsi concernés tant les exploitants agricoles que les groupements d'employeurs agricoles, y compris si ces derniers comportent des membres - coopératives ou entreprises - qui ne sont pas éligibles en propre au dispositif d'exonération TO-DE32(*).

Au chapitre des exceptions à cette souplesse d'éligibilité, le V du même article L. 741-16 exclut expressément du bénéfice de l'exonération les coopératives d'utilisation du matériel agricole (Cuma) mettant des salariés à la disposition de leurs adhérents.

Les coopératives d'utilisation du matériel agricole

Appartenant à la catégorie des sociétés de coopératives agricoles, régies par les articles L. 521-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime, les Cuma ont pour finalité la mise à disposition de leurs adhérents des moyens nécessaires à leurs exploitations agricoles (machines agricoles, hangars, salariés, etc.). En application de l'article R. 522-1 du même code, elles doivent réunir comme membres au moins quatre chefs d'exploitation - qu'ils soient des personnes morales ou des personnes physiques. Environ un agriculteur sur deux est adhérent d'une des 12 500 Cuma recensées en France.

Les Cuma ont comme vocation première de permettre une mutualisation de matériel. Toutefois, un besoin croissant des agriculteurs a conduit le législateur en 200633(*) à autoriser les Cuma à mettre à disposition de leurs adhérents des salariés, comme le font les groupements d'employeurs. D'abord limitée à une masse salariale définie par décret34(*), cette mise à disposition n'est plus plafonnée depuis la loi dite « Travail » de 201635(*) et son décret d'application36(*).

En contrepartie de l'octroi de cette activité de mise à disposition par les Cuma, le législateur en 2006 a introduit les dispositions précitées du V de l'article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime afin de favoriser le salariat d'emploi permanent et non pas de saisonniers agricoles.

B. Le droit proposé

Le présent article, issu de douze amendements parlementaires identiques37(*), vise à abroger le V de l'article L. 741-16 précité afin d'élargir aux Cuma le périmètre de l'exonération pour l'emploi des TO-DE.

Selon les informations transmises par le Gouvernement, cette mesure représente, comme incidence financière, des moindres recettes de six millions d'euros par an.

II - La position de la commission 

Soutien du dispositif TO-DE, la commission s'est toujours montrée réservée sur l'opportunité d'étendre le bénéfice de l'exonération à des catégories d'employeur qui, aujourd'hui, en sont exclues. En 2022, elle ne s'était toutefois pas opposée à des dispositions identiques au présent article, et finalement adoptées par le Sénat, considérant que les Cuma pouvaient également avoir recours à des saisonniers agricoles et les mettre à disposition.

En outre, la rapporteure générale note que l'incidence financière de cette extension serait faible et que cette dernière permettrait de répondre à un besoin effectif des exploitants agricoles.

Sous le bénéfice de ces observations, la commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article 5
Cumul de l'exonération applicable aux jeunes agriculteurs
et des taux réduits de cotisations

Cet article vise à permettre aux jeunes agriculteurs, âgés de 18 à 40 ans au moment de leur affiliation, de cumuler les bénéfices de l'exonération partielle de cotisation octroyée aux jeunes agriculteurs et de la réduction de taux de cotisation octroyée à tous les travailleurs indépendants et chefs d'exploitation agricole.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé : bénéficier d'un cumul plutôt que d'un droit d'option

A. L'état du droit

1. Une exonération partielle de cotisations en faveur des jeunes agriculteurs

Jusqu'en 2000, une exonération partielle de cotisations existait sur le fondement d'un décret de 1985 au bénéfice des jeunes agriculteurs âgé de 21 à 35 ans. La LFSS pour 200038(*) a inscrit au niveau législatif le principe de cette exonération partielle et a élargi l'intervalle d'âges éligible en fixant les bornes à 18 ans et 40 ans39(*). L'inscription de ce dispositif au niveau législatif s'accompagnait d'un relèvement40(*) des taux d'exonération41(*).

Codifiée à l'article L. 731-13 du code rural et de la pêche maritime, cette exonération partielle de cotisation d'assurance maladie, invalidité et maternité, d'allocations familiales et d'assurance vieillesse de base s'applique pour une durée de cinq années civiles, au bénéfice des agriculteurs âgés de 18 à 40 ans au moment de leur affiliation au régime agricole42(*).

Le taux de réduction est déterminé par décret43(*) et décroît au cours des cinq années :

 

Taux de réduction

1ère année
de réduction

65 %

2e année

55 %

3e année

35 %

4e année

25 %

5e année

15 %

Selon la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA), 45 703 jeunes agriculteurs bénéficiaient de cette exonération partielle en 2023.

Répartition des jeunes agriculteurs bénéficiant
de l'exonération partielle selon l'année

Source : Commission des affaires sociales, d'après l'annexe 9

Il convient par ailleurs de noter que cette exonération peut être cumulée avec l'exonération de cotisations sociales accordée durant douze mois en cas de début d'activité de création ou de reprise d'exploitation agricole44(*).

2. Une réduction progressive des taux de droit commun pour les exploitants agricoles

La LFSS pour 201845(*) a accru la réduction des taux de cotisation famille pour les travailleurs indépendants46(*) et les non-salariés agricoles47(*). Ce taux est désormais nul pour les chefs d'exploitation dont les revenus d'activité sont inférieurs à 110 % du plafond annuel de la sécurité sociale (Pass), dont le montant est fixé à 46 368 euros en 2024. Leur taux est ensuite progressif jusqu'au seuil de 3,10 % pour un revenu d'activité supérieur à 140 % du Pass48(*) (voir graphique infra).

La loi du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat49(*) a renforcé la progressivité du taux de la cotisation maladie (voir graphique infra). Ainsi, depuis le 1er janvier 2022, le taux de cotisation maladie est nul pour les non-salariés agricoles dont le revenu est inférieur à 40 % du Pass (18 547 euros). La cotisation maladie est encore réduite entre ce seuil et 60 % du Pass (27 821 euros) où elle atteint un taux de 4,0 %. Puis, elle augmente progressivement pour atteindre le taux de 6,5 % à partir d'un revenu équivalent à 110 % du Pass (51 005 euros).

Évolution du taux des cotisations maladie et famille en fonction du revenu
des chefs d'exploitation agricole bénéficiant des réductions de droit commun

Source : Direction de la sécurité sociale

En application du dernier alinéa de l'article L. 613-1 du code de la sécurité sociale et du II de l'article L. 621-3 du même code, ces deux réductions peuvent être conjointement appliquées mais ne sont pas cumulables avec un autre dispositif de réduction ou d'abattement à l'exception de l'exonération déjà mentionnée de début d'activité de création ou de reprise d'entreprise.

Depuis la loi précitée du 16 août 2022, les jeunes agriculteurs éligibles au dispositif d'exonération, décrit plus en amont, disposent d'un droit d'option50(*) entre leur dispositif ad hoc et ces réductions de taux de droit commun. Leur choix de revenir à un taux réduit de droit commun s'exprime auprès des caisses de mutualité sociale agricole de manière définitive51(*). Selon les informations transmises par la CCMSA à la rapporteure générale, seuls 5 % des jeunes agriculteurs éligibles auraient renoncé à l'exonération spécifique au profit de la réduction de droit commun en 2023.

B. Le dispositif proposé

Le présent article vise à permettre aux jeunes agriculteurs de bénéficier des réductions de droit commun et de leur exonération spécifique. Pour cela :

- le I ajoute au sein des articles L. 613-1 et L. 621-3 du code de la sécurité sociale la mention de l'exonération en faveur des jeunes agriculteurs à la liste des dispositifs pouvant être cumulés avec la réduction de cotisations famille et maladie ;

- le II supprime la mention au droit d'option entre les deux dispositifs, rendu inutile.

En effet, ainsi que l'indique l'annexe 9 au PLFSS, l'absence de cumul entre ces réductions de taux et cette exonération partielle, dégressive au cours du temps, conduit à ce que des jeunes agriculteurs versent, notamment les 4e et 5e années d'application de leur exonération, un montant de cotisations famille et maladie supérieur aux autres non-salariés agricoles.

Selon l'annexe 9 au PLFSS, l'incidence financière de cette mesure est une perte de 25 millions d'euros pour la sécurité sociale compensée par l'État.

Taux de la cotisation maladie
des bénéficiaires de l'exonération JA sous le régime actuel

Évolution du taux de la cotisation maladie des bénéficiaires
de l'exonération JA avec cumul exonération JA et réduction
de droit commun du taux

 
 

Source : Direction de la sécurité sociale

Taux de la cotisation famille des bénéficiaires de l'exonération JA sous le régime actuel

Évolution du taux de la cotisation famille des bénéficiaires de l'exonération JA avec un cumul de l'exonération JA et de la réduction de droit commun du taux

 
 

Source : Direction de la sécurité sociale

Ainsi que le montrent les graphiques ci-dessus, le cumul des deux dispositifs permettrait aux jeunes agriculteurs disposant d'un revenu inférieur à 140 % du Pass de verser un montant moindre de cotisations et contributions sociales, quel que soit le régime actuel le plus avantageux pour eux - exonération JA ou taux réduits.

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

Le Gouvernement a transmis cet article au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission : un dispositif bienvenu de soutien au monde agricole

La commission soutient le dispositif proposé de cumul de l'exonération propre aux jeunes agriculteurs et des taux réduits de cotisations qui traduit un des engagements pris par le Gouvernement le 21 février 202452(*). Cette mesure s'inscrit dans la politique publique d'encouragement au renouvellement des générations agricoles alors que les exploitants agricoles représentent la catégorie socio-professionnelle la plus âgée au sein de la population active53(*).

Selon les informations transmises par la DSS, le présent article permettra ainsi un gain par rapport au régime le plus favorable compris entre 620 euros et 1 177 euros pour un chef d'exploitant au revenu correspondant à 40 % du Pass54(*). Ce même gain varierait entre 598 euros et 1 282 euros pour un revenu équivalent à 60 % du Pass. Il s'agit ainsi d'une aide non négligeable en faveur des jeunes agriculteurs récemment installés.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article 5 bis (nouveau)
Modification de l'assiette des cotisations
et contributions des salariés indépendants

Cet article propose, dans la continuité de la réforme portée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, de modifier l'assiette des cotisations et contributions de différentes catégories de travailleurs indépendants.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif transmis au Sénat

A. L'état du droit

1. Les travailleurs indépendants : une population hétérogène dont la protection sociale suppose des règles spécifiques

· Les travailleurs indépendants constituent une catégorie très hétérogène, qui regroupe différentes populations exerçant dans de nombreux secteurs d'activité et sous des formes et statuts juridiques variables. Cette spécificité se traduit par un grand nombre de régimes de sécurité sociale auxquels ils peuvent être affiliés : régime général depuis 202055(*), mutualité sociale agricole (MSA), Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL), Caisse Nationale des barreaux français (CNBF), etc.

Il est cependant possible de distinguer parmi les travailleurs indépendants les exploitants agricoles, les dirigeants non-salariés qui regroupent à la fois les micro entrepreneurs et les entrepreneurs individuels de droit commun et les dirigeants assimilés salariés56(*). De même, cette diversité s'est longtemps retrouvée dans la construction de l'assiette de cotisations sociales (bénéfice total de l'entreprise pour les indépendants non micro entrepreneurs en EURL, revenu versé au gérant en SARL, chiffre d'affaires déclaré pour les micro entrepreneurs, rémunération brute versée pour les dirigeants assimilés salariés) ainsi que dans les modalités de calcul des prélèvements sociaux.

Ces différentes catégories de travailleurs indépendants partagent une communauté de situation vis-à-vis de la sécurité sociale, dans la mesure où, assumant à la fois la charge du financement du régime côté employeur et salarié, ils bénéficient de taux de cotisations moindres en contrepartie d'une protection sociale plus limitée.

2. Une réforme de l'assiette sociale des travailleurs indépendants déjà prévue dans la LFSS pour 2024

· L'article 18 de la LFSS pour 202457(*) est venu réformer l'assiette sociale des travailleurs indépendants, notamment en unifiant les assiettes des cotisations et des contributions sociales. Pour les indépendants « classiques », c'est-à-dire hors micro entrepreneurs58(*), il existait en effet deux assiettes distinctes pour les cotisations sociales et pour la CSG et la CRDS. L'articulation de ces deux assiettes, parfois qualifiée de « doublement circulaire », était particulièrement complexe et limitait la prévisibilité des futurs revenus pour les travailleurs indépendants. De fait, la définition de l'assiette des cotisations sociales, ou revenu net fiscal, revenait à retrancher ces mêmes cotisations sociales au revenu super-brut ainsi que la part fiscalement déductible de la CSG - contribution elle-même dépendante du niveau des cotisations sociales.

Dorénavant, pour les travailleurs indépendants non agricoles, les cotisations et contributions sociales doivent être calculées sur la base du revenu professionnel diminué des frais et charges professionnels autres que les cotisations et contributions sociales, auquel doit être déduit un abattement de 26 % - dans une fourchette de 1,76 % à 130 % du plafond annuel de la sécurité sociale (Pass)59(*). Un rapprochement équivalent a été opéré pour les travailleurs indépendants agricoles.

B. Le droit proposé

Le présent article, issu d'un amendement du Gouvernement, entend « précise[r] et apporte[r] plusieurs corrections aux dispositions adoptées à l'article 18 de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 »60(*). Pour rappel, les modifications apportées par la LFSS pour 2024 n'entreront en vigueur qu'au 1er janvier 2025 pour les travailleurs indépendants non-agricoles et au 1er janvier 2026 pour les travailleurs indépendants agricole.

Le I du présent article étend aux chefs d'exploitation exerçant à titre secondaire le bénéfice de la réduction du taux de cotisation maladie dont bénéficient les autres travailleurs indépendants au titre de l'article L.621-3 du code de la sécurité sociale.

Le 1° du II du présent article revient rétablit le droit en vigueur préexistant à la réforme, en étendant à l'ensemble des travailleurs indépendants le bénéfice de l'étalement sur plusieurs années dans le compte de résultat des subventions d'équipements qui peuvent leur être accordées par une personne de droit public au titre de l'article 42 septies du code général des impôts. Le 2° du même II fait évoluer l'assiette de la CSG définie à l'article L.136-4 du code de la sécurité sociale, en exonérant les revenus issus de plus-values de cession à court terme qui font l'objet d'une exonération d'impôt sur le revenu61(*). Le b du 2° dudit II précise également que, dans le cas d'un exercice de travailleur indépendant en société, ou de coexploitation, les montants soumis à la CSG le sont en proportion des rémunérations et avantages personnels non déductibles des résultats de la société ou de la coexploitation qu'ils ont perçu.

Le III du présent article modifie les modalités d'entrée en vigueur de la réforme de l'assiette pour les travailleurs indépendants :

- le 1° repousse l'entrée en vigueur du nouveau calcul des cotisations et des contributions dues par les travailleurs indépendants non agricoles prévues au titre de l'article 18 de la LFSS pour 2024, initialement prévue au 1er janvier 2025, à la date de régularisation des cotisations dues au titre de 2025 prévue par l'article L. 131-6-52 du code de la sécurité sociale ;

- le 2° précise que le même nouveau calcul des cotisations s'appliquera pour les cotisations et contributions des travailleurs indépendants au régime micro au titre des périodes courant à partir du 1er janvier 2026 ;

- le 3° dispose des modalités dans lesquelles, pour le calcul des cotisations et contributions dues au tire des années 2026 et 2027 par les travailleurs indépendants agricoles, leurs revenus super-bruts au titre des années 2023 et 2024 sont reconstitués par les caisses de la MSA.

II - La position de la commission : des mesures souhaitables, dont on peine à comprendre l'introduction par voie d'amendement

La commission soutient, sur le fond, les mesures proposées par le Gouvernement dans la mesure où elles permettent de mettre en oeuvre la réforme de l'assiette de cotisation des travailleurs indépendants qui est attendue de longue date. Elle est particulièrement sensible à la précision des modalités d'entrée en vigueur de l'article 18 de la LFSS pour 2024, donc la rédaction elliptique avait nourri une certaine incompréhension auprès des micro entrepreneurs et des travailleurs indépendants agricoles notamment.

Cependant, il semble que cet article est symptomatique des facilités dont fait parfois l'objet le PLFSS : introduit par le Gouvernement par voie d'amendement il modifie, avant entrée en vigueur, une disposition adoptée l'année dernière et elle-même introduite par amendement du Gouvernement. L'absence d'évaluation préalable, ainsi que le temps limité dont dispose le législateur pour se prononcer, réduit de fait la qualité et la clarté de la norme, au risque de retarder ou de contrarier le déploiement d'une réforme pourtant nécessaire.

Sous le bénéfice de ces observations, la commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article 5 ter (nouveau)
Application à Mayotte de la réforme de l'assiette sociale
pour les travailleurs indépendants non-agricoles
et extension d'une habilitation à légiférer par ordonnance

Cet article propose de rendre applicable à Mayotte la réforme de l'assiette des cotisations et contributions sociales des travailleurs indépendants prévue par l'article 18 de la loi de financement pour la sécurité sociale pour 2024. Il prolonge également l'habilitation accordée au Gouvernement pour légiférer par ordonnance sur l'application de la réforme de l'assiette sociale pour les non-salariés agricoles en outre-mer.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif transmis au Sénat

A. L'état du droit

1. Les réformes déjà prévues dans la LFSS pour 2024

a) La réforme de l'assiette sociale des travailleurs indépendants

Alors que les cotisations sociales, d'une part, la contribution sociale généralisée (CSG) et la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) d'autre part, étaient assises sur des assiettes distinctes aux modalités de calcul complexes, l'article 18 de la LFSS pour 202462(*) a unifié ces deux assiettes en proposant une nouvelle modalité de détermination de l'assise.

Ainsi, pour les travailleurs indépendants non agricoles les cotisations et contributions sociales dues au titre des périodes courant à compter du 1er janvier 2025 seront peu ou prou calculées sur la base du revenu professionnel diminué des frais et charges professionnels, auquel serait déduit un abattement de 26 % - dont les montants plancher et plafond sont déterminés par décret63(*). En outre, l'assiette des cotisations sociales, légèrement différente, prend en compte les revenus de remplacement64(*) et exclut les sommes perçues au titre de l'intéressement, de la participation et de l'abondement d'un plan d'épargne d'entreprise65(*).

L'article 5 bis du présent PLFSS propose d'apporter des ajustements à cette assiette66(*).

b) Une habilitation à légiférer par ordonnance pour les outre-mer

Les cotisations sociales des non-salariés agricoles en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin sont assises sur la superficie de l'exploitation agricole et non pas calculées en fonction du revenu professionnel.

Le I de l'article 26 de la LFSS pour 2024 a habilité le Gouvernement à légiférer par ordonnance dans un délai de 18 mois à compter de la promulgation de la loi afin de :

- rendre applicable aux non-salariés agricoles exerçant leur activité à la Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin, sous réserve d'ajustements nécessaires, les dispositions relatives aux taux, au calcul et au recouvrement des cotisations et des contributions sociales des travailleurs indépendants résultant des dispositions de l'article 18 de la LFSS pour 2024. Le II de l'article 3 du présent PLFSS étend également cette habilitation à la réforme prévue afin d'aligner l'effort contributif des non-salariés agricoles sur celui des travailleurs indépendants s'agissant du calcul de leur retraite de base ;

- adapter le dispositif d'exonération de cotisations sociales dont bénéficient les exploitants agricoles de ces territoires ;

- procéder à toutes les modifications rédactionnelles rendues nécessaires.

2. L'assiette sociale des travailleurs indépendants non agricoles à Mayotte

L'article 28-1 de l'ordonnance n° 96-1122 du 20 décembre 199667(*) prévoit que les revenus d'activité des travailleurs indépendants non agricoles exerçant leur activité à Mayotte sont « ceux pris en compte pour la détermination du revenu imposable selon les règles applicables à Mayotte ». Cette assiette demeure toutefois diminuée notamment des « plus-values et moins-values professionnelles à long terme, des reports déficitaires, des exonérations (...) ». Ces règles ont largement convergé vers le droit fiscal de l'Hexagone depuis 2011 (voir encadré ci-après) mais des adaptations demeurent.

Départementalisation de Mayotte

La départementalisation de Mayotte68(*) a eu pour conséquence de changer le régime constitutionnel applicable à la collectivité d'outre-mer. Désormais régi par l'article 73 de la Constitution, le droit applicable à Mayotte est soumis au principe d'identité législative. Toutefois, les législations applicables à l'Hexagone et aux autres départements et régions d'outre-mer de l'article 73 de la Constitution ne sont étendues à Mayotte que progressivement. L'étude d'impact accompagnant les projets de loi simple du 7 décembre 2010 relative au Département de Mayotte69(*) prévoyait une convergence des dispositions en matière de prestations sociales et de cotisations de sécurité sociale, dans une période de vingt à vingt-cinq ans.

S'agissant des dispositions de nature fiscale, l'article 11 de la loi du 7 décembre 2010 précitée dispose que « le code général des impôts et les autres dispositions de nature fiscale en vigueur dans les départements et régions d'outre-mer sont applicables [à Mayotte] à compter du 1er janvier 2014 ». Les adaptations au droit fiscal rendues nécessaires à Mayotte ont toutefois été précisées par une ordonnance du 19 septembre 201370(*).

B. Le droit proposé

Le présent article, issu d'un amendement du Gouvernement, vise :

- au  à modifier l'article 28-1 de l'ordonnance précité du 20 décembre 1996 afin rendre applicable aux travailleurs indépendants non agricoles exerçant à Mayotte la nouvelle assiette de la contribution sociale généralisée définie à l'article L. 136-3 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de la LFSS pour 2024 ;

- au  de prolonger de 18 mois l'habilitation à légiférer par ordonnance prévue à l'article 26 de la LFSS pour 2024 concernant la réforme de l'assiette sociale des non-salariés agricoles en outre-mer.

Selon le Gouvernement, cette prolongation de l'habilitation, qui la porte à durée totale de trois ans, vise à mieux articuler la réforme du calcul des pensions des non-salariés agricoles, dont l'application en outre-mer fait l'objet d'une habilitation à légiférer par ordonnance à l'article 22 de la présente loi, avec la réforme de l'assiette des cotisations sociales. Cette révision de l'assiette est « un préalable indispensable à l'extension en outre-mer de la réforme du calcul de la retraite de base sur la règle des 25 meilleures années »71(*).

Les deux habilitations auraient une durée similaire de deux ans à compter de la présente LFSS.

II - La position de la commission : des mesures utiles

Comme en 202272(*), la commission soutient les mesures visant à faire converger le régime de protection sociale de Mayotte vers celui des départements ultramarins et de l'Hexagone. Alors que le présent article vise à rapprocher l'assiette des cotisations et contributions sociales des travailleurs indépendants mahorais et celle applicable dans l'Hexagone, elle se réjouit que le recouvrement des cotisations sociales des travailleurs indépendants, interrompu depuis 2012 à Mayotte73(*), puisse reprendre par l'Urssaf à compter du 1er janvier 202574(*). La réforme pourra donc être effective.

La commission prend par ailleurs acte de la nécessité de repousser de 18 mois la période pendant laquelle le Gouvernement peut légiférer afin de faire appliquer la réforme de l'assiette des cotisations et contributions sociales des non-salariés agricoles dans les outre-mer.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article 5 quater (nouveau)
Rapport sur la réforme de l'assiette sociales
des travailleurs indépendants

Cet article vise à demander un rapport au Gouvernement sur la mise en oeuvre de la révision de l'assiette des cotisations et contributions sociales des travailleurs indépendants opérée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024.

La commission propose de supprimer cet article.

I - Le dispositif transmis au Sénat

A. L'état du droit

Ainsi qu'il a été dit dans le cadre du commentaire de l'article 5 bis, l'article 18 de la LFSS pour 202475(*) a revu les modalités de détermination de l'assise des cotisations et contributions sociales pour les travailleurs indépendants. Cette réforme doit s'appliquer pour les cotisations et contributions dues à compter du 1er janvier 2025 pour les travailleurs indépendants non agricoles et à compter de 2026 pour les non-salariés agricoles.

B. Le droit proposé

Le présent article, issu d'un amendement du Gouvernement complété par un sous-amendement du député Jérôme Guedj, prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement sur l'application de la réforme issue de l'article 18 de la LFSS pour 2024, ainsi que « plus largement » sur la pertinence de définir l'assiette des cotisations sociales sur celle de la CSG.

II - La position de la commission 

La commission ne nie pas la complexité de la réforme de l'assiette sociale des travailleurs indépendant et le besoin de disposer d'informations complètes à ce sujet. Toutefois, elle n'a pas dérogé à sa position constante sur les demandes de rapport au Gouvernement, lesquelles contribuent à une inflation législative peu normative. De surcroît, l'article 5 bis procède déjà à des ajustements de cette réforme, ce qui amenuise la pertinence de ce rapport.

Elle a donc adopté un amendement n° 120 de la rapporteure générale visant à supprimer le présent article.

La commission propose de supprimer cet article.

Article 6
Réforme des allègements généraux de cotisations patronales

Cet article propose de réformer les allégements généraux de cotisations patronales, afin d'augmenter les recettes publiques d'environ 5 milliards d'euros par an tout en réduisant le risque de « trappe à bas salaires ». En 2025, les allégements seraient réduits de 2 points de cotisation au niveau du Smic et les seuils maximaux des bandeaux famille et maladie seraient ramenés à 3,2 et 2,2 Smic (contre 3,5 et 2,5 Smic actuellement). En 2026, les allégements seraient réduits de 2 points supplémentaires au niveau du Smic, les deux bandeaux seraient supprimés et le dispositif prendrait la forme d'une courbe « lissée » s'annulant à 3 Smic.

La commission considère que le dispositif doit être rendu plus favorable à l'emploi. Les dispositifs spécifiques, comme Lodéom et TO-DE, doivent en outre à ce stade être préservés en l'état.

La commission propose d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.

I - Le dispositif proposé : une réduction des allégements généraux de 5 milliards d'euros

A. Le dispositif actuel : des allégements de 80 milliards d'euros, correspondant à environ un million d'emplois créés ou sauvegardés

1. En 2024, un coût d'environ 80 milliards d'euros, dont 65 milliards d'euros pour la sécurité sociale

Les allégements généraux de cotisations patronales ont coûté en 2023 près de 80 milliards d'euros, dont plus de 65 milliards d'euros à la sécurité sociale (régimes obligatoires de base de sécurité sociale, ou Robss). Ces 65 milliards d'euros se sont répartis de la façon suivante :

- 27 milliards d'euros pour les allégements dégressifs (de 32,4 points au niveau du Smic) ;

- 28 milliards d'euros pour le bandeau maladie (ex-CICE, allégement non dégressif de cotisations maladie, de 6 points, jusqu'à 2,5 Smic) ;

- 10 milliards d'euros pour le bandeau famille (allégement non dégressif de cotisations famille, de 1,8 point, jusqu'à 3,5 Smic).

Le schéma ci-après permet de visualiser ces différents éléments.

Les allégements généraux de cotisations sociales patronales

NB : Le graphique concerne les entreprises de 50 salariés ou plus. Dans le cas des entreprises de moins de 50 salariés, qui paient 0,4 point de moins pour le financement de l'allocation de logement social (taux de 0,1 % au lieu de 0,5 %), l'allégement du barème est réduit de 0,4 point au niveau du Smic.

Source : Commission des affaires sociales

Le coût des allégements généraux a fortement augmenté en 2023, du fait de la crise sanitaire, comme le montre le graphique ci-après. Cette forte augmentation provient de la forte inflation de 2022, qui a suscité une forte revalorisation du Smic en 2023. De nombreux salaires se sont alors retrouvés « rattrapés » par le Smic, et ont donc donné lieu à des allégements à un taux plus élevé.

Coût des allégements généraux de cotisations patronales

(en milliards d'euros)

Source : Rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale, octobre 2024

2. Une suppression totale des allégements généraux ferait disparaître environ un million d'emplois

L'impact sur l'emploi de ces trois composantes est très différent :

- l'allégement dégressif entre 1 et 1,6 Smic correspondrait à environ 800 000 emplois créés ou sauvegardés76(*) ;

- l'ex-CICE, au coût analogue, correspondrait à seulement environ 100 000 emplois créés ou sauvegardés77(*) ;

- l'impact sur l'emploi du bandeau famille pour sa part supérieure à 1,6 Smic, et a fortiori à 2,5 Smic, est considéré comme très faible. Ainsi, une note78(*) de 2019 du Conseil d'analyse économique préconisait d'« abandonner (...) les baisses de charges au-dessus de 2,5 Smic voire 1,6 Smic, si les évaluations à venir de France Stratégie venaient à confirmer leurs résultats décevants ».

En cohérence avec ces estimations, le « rapport Bozio-Wasmer » d'octobre 2024 (cf. infra) estime qu' « un scénario radical de suppression complète des exonérations générales conduirait, suivant les élasticités emploi retenues dans la suite de ce rapport [...], à la destruction de 980 000 ETP ».

Cela ne signifie pas que sans les allégements, il y aurait en France environ un million d'emplois de moins. En effet, ces allégements existant depuis longtemps, leur effet sur l'emploi s'est atténué (par exemple parce qu'ils ont permis d'augmenter davantage les salaires).

Toutefois il ressort de ces études que leur suppression susciterait la disparition rapide d'environ un million d'emplois. Leur réduction doit donc être envisagée avec prudence.

3. Le gel en euros courants des seuils maximaux des bandeaux famille et maladie par la LFSS 2024

Lors de l'examen du PLFSS 2024, la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a adopté un amendement de Marc Ferracci tendant à supprimer le bandeau famille au-delà de 2,5 Smic, conformément à une proposition d'un récent rapport d'information79(*) co-écrit avec Jérôme Guedj (Mecss80(*) de l'Assemblée nationale). L'économie devait être « recyclée » pour renforcer les allégements dégressifs, étendus aux salaires compris entre 1 et 1,64 Smic.

Le Medef a exprimé dans un communiqué la crainte que cela suscite un « choc négatif de compétitivité ». M. Ferracci a déposé pour la séance un autre amendement, dont résulte l'actuel article 20 de la LFSS 2024.

Cet article a modifié le code de la sécurité sociale, pour exprimer les seuils jusqu'auxquels s'appliquent les bandeau maladie (2,5 Smic) et bandeau famille (3,5 Smic) en multiples du Smic de fin 2023 (et non plus du Smic de l'année en cours). Il s'agissait à la fois d'éviter une augmentation excessive du coût en cas de forte inflation et de réduire progressivement ces seuils en multiples du Smic, afin de les rendre plus efficients en termes de créations d'emplois. Toutefois la diminution des seuils est lente. Ainsi, selon l'évaluation préalable de l'article 6 du PLFSS, à droit inchangé ces seuils seraient encore en 2027 de 2,33 et 3,26 Smic.

Impact du gel des points de sortie des bandeaux famille et maladie
par la LFSS 2024

Source : Évaluation préalable de l'article 6 du PLFSS 2025

À l'initiative de la commission des affaires sociales du Sénat, le dispositif a été précisé afin de prévoir que ces seuils ne peuvent devenir inférieurs à 2 Smic de l'année en cours.

B. Le « rapport Bozio-Wasmer »

À l'issue de la conférence sociale du 12 octobre 2023, Élisabeth Borne, alors Première ministre, a chargé deux économistes, Antoine Bozio et Étienne Wasmer, d'une mission sur l'articulation entre les salaires, le coût du travail et la prime d'activité. Un rapport d'étape81(*) a été publié en avril 2024. La publication du rapport définitif, prévue en juin, a été retardée du fait de la dissolution de l'Assemblée nationale, et n'a eu lieu que début octobre82(*).

La lettre de mission indiquant que les propositions devaient se faire à prélèvements obligatoires constants, ce rapport ne propose pas d'économie dans son « scénario central »83(*).

1. Un « scénario central » à coût et à emploi constant, réduisant le risque de « trappe à bas salaire »

Actuellement, si pour augmenter d'un euro le salaire net d'un salarié, l'employeur doit habituellement payer environ 1,8 euro, du fait des allégements dégressifs ce montant est de 2,44 euros en dessous de 1,6 Smic, comme le montre le graphique ci-après.

Coût pour l'employeur d'une hausse de 1 € du salaire net en fonction
du niveau de salaire en part de Smic (janvier  2024)

(en euros)

Lecture : En janvier 2024, le coût pour l'employeur d'une hausse de 1 euro du salaire net au niveau du Smic est de 2,44 euros. Note : Taux en vigueur pour une entreprise de 50 salariés ou plus située à Paris.

Source : D'après Antoine Bozio, Étienne Wasmer, Les politiques d'exonérations de cotisations sociales : une inflexion nécessaire, 3 octobre 2024

On observe par ailleurs une part croissante des salaires proches du Smic.

Distribution du salaire brut horaire exprimé en parts de Smic entre 1994 et 2022

Lecture : En 2022, 1,5 % des salariés du secteur privé âgés de 18 à 64 ans perçoivent un salaire brut horaire entre 1,22 et 1,23 fois le Smic. Champ : Poste principal (i.e. le plus rémunérateur au sens du salaire brut) des salariés (comptés en personnes physiques) âgés de 18 à 64 ans employés dans le secteur privé hors particuliers-employeurs, France métropolitaine ; salaire brut horaire inférieur à 4 Smic.

Source : Antoine Bozio, Étienne Wasmer, Les politiques d'exonérations de cotisations sociales : une inflexion nécessaire, 3 octobre 2024

Le« rapport Bozio-Wasmer » souligne que cette concentration « s'est principalement manifestée au moment du passage aux 35 heures » et lors de la récente augmentation du Smic, venant de la forte inflation.

Le « scénario central » du « rapport Bozio-Wasmer » est décrit par le graphique ci-après.

Le scénario central du « rapport Bozio-Wasmer »

NB : Le graphique concerne les entreprises de 50 salariés ou plus. Pour obtenir les exonérations applicables pour les entreprises de moins de 50 salariés, il faut retrancher 0,4 point à l'origine du barème de la réduction générale.

Lecture : Le taux d'exonération applicable pour un salarié au Smic en emploi dans une entreprise de 50 salariés ou plus passerait d'actuellement 40,15 % (toutes réductions et exonérations confondues) à 36,1 % dans le scénario central.

Source : Antoine Bozio, Étienne Wasmer, Les politiques d'exonérations de cotisations sociales : une inflexion nécessaire, 3 octobre 2024

Contrairement au barème actuel, le barème proposé par le rapport ne présente pas d'effets de seuil, afin de réduire le phénomène de « trappe à bas salaires ».

Pour la même raison, la pente de la courbe serait réduite.

Les allégements seraient inférieurs aux allègements actuels pour tous les niveaux de salaire, sauf entre 1,2 et 1,9 Smic, où ils leur seraient supérieurs, afin d'inciter à la « dé-smicardisation ».

2. Des gagnants et des perdants en termes d'emplois

Le barème proposé par le « rapport Bozio-Wasmer » augmente le coût du travail entre 1 et 1,2 Smic, le réduit entre 1,2 et 1,9 Smic et l'augmente au-delà.

Il en résulte, comme c'est logique, que ce barème détruit des emplois proches du Smic et en crée d'autres autour de 1,4 Smic, conformément au graphique ci-après.

Impact du scénario central du rapport Bozio-Wasmer
sur l'emploi en fonction du salaire

Lecture : En supposant l'emploi élastique à la fois à son coût au niveau du contrat et à la masse salariale globale de l'entreprise (avec des élasticités de - 0,4 et - 0,2 au niveau du Smic, et de 0 et - 0,2 à partir de 2 Smic), le scénario central réduirait de 23 110 les ETP rémunérés entre 1 et 1,1 Smic (dont 19 670 sous l'effet de l'application des élasticités au niveau individuel et 3 440 au niveau entreprise).

Source : Antoine Bozio, Étienne Wasmer, Les politiques d'exonérations de cotisations sociales : une inflexion nécessaire, 3 octobre 2024

Ainsi, si la réforme proposée par le « rapport Bozio-Wasmer » créerait 9 460 emplois (ce qui, compte tenu de l'imprécision inévitable de la simulation, doit être considéré comme équivalent à un emploi à peu près stable, avec une marge d'erreur importante dans un sens ou dans l'autre), il y aurait des gagnants et des perdants :

- les gagnants seraient les secteurs appliquant des rémunérations relativement élevées, comme l'industrie (avec un effet sur l'emploi industriel estimé à + 3 960) ;

- les perdants seraient les secteurs appliquant des rémunérations proches du Smic (entretien, médico-social...).

Le différentiel d'impact sur l'emploi en fonction du niveau de rémunération qui résulterait du « scénario central » du « rapport Bozio-Wasmer » est la conséquence de la réduction de la pente des allégements sans augmenter le coût global du dispositif. En effet, comme Antoine Bozio l'a souligné lors de son audition par la commission le 22 octobre 2024, dès lors qu'on fixe le point de sortie à 2,5 Smic, la contrainte de budget constant rend nécessaire la réduction des allégements de 4,05 points au niveau du Smic.

3. Un rapport dont la qualité est unanimement reconnue mais qui ne fait pas consensus

Le « rapport Bozio-Wasmer » est un travail dont la très grande qualité est unanimement reconnue, synthétisant l'ensemble des connaissances disponibles sur le sujet et faisant utilement avancer la réflexion.

En particulier, il suggère que l'emploi au niveau du Smic pourrait être devenu moins réactif à son coût qu'on ne le pensait dans les années 2000. Il propose en outre un « scénario central » qui, à coût constant, permettrait, selon ses estimations, de réduire le risque de « trappe à bas salaire » sans destruction nette d'emplois.

Ce rapport préconise en outre de supprimer les bandeaux maladie et famille, dont l'utilité pour les salaires élevés était contestée par la quasi-totalité des économistes, que ce soit en termes d'impact sur l'emploi ou en termes de compétitivité84(*), comme la commission l'avait souligné lors de l'examen du futur article 20 de la LFSS 2024.

Toutefois, ce rapport ne « clôt pas le débat ».

En particulier, les spécialistes de l'emploi auditionnés par la rapporteure générale85(*) ont exprimé un certain scepticisme sur l'affirmation du rapport selon laquelle son « scénario central » aurait un impact nul sur l'emploi, les destructions d'emplois au voisinage du Smic étant compensées par des créations au-delà. Selon l'un d'eux, « nous sommes démunis de preuves empiriques satisfaisantes permettant d'apprécier l'élasticité86(*) aux différents niveaux de salaire ». Un autre a estimé qu'il s'agissait d'un « pari dangereux ».

Par ailleurs, certains ont exprimé des doutes sur l'existence en France de « trappes à bas salaire ». De fait, le « rapport Bozio-Wasmer » souligne que « la littérature disponible sur la France offre des évidences limitées », que la concentration au niveau du Smic « s'est principalement manifestée au moment du passage aux 35 heures » et lors de la récente augmentation du Smic, venant de la forte inflation. Surtout, il indique que « l'évolution individuelle du salaire est plus dynamique à des bas niveaux de salaire », y compris quand on limite l'analyse aux personnes de plus de trente ans.

Au total, un spécialiste de l'emploi auditionné craint que la mise en oeuvre du « scénario central » du « rapport Bozio-Wasmer » se traduise surtout par des destructions nettes d'emplois, sans effet visible sur les salaires.

C. Le dispositif proposé : une réduction de 5 milliards d'euros, concentrée sur les plus bas salaires

1. Une mise en oeuvre en deux temps

Le III du présent article propose de modifier le barème conformément au graphique ci-après.

La mesure proposée par le PLFSS 2025

(Allégements en % du salaire brut)

Lecture : Au niveau du Smic, selon le barème proposé par le PLFSS pour 2025, l'allégement de cotisations patronales, actuellement de 40,14 points de cotisations, passerait à 38,14 points de cotisations au 1er janvier 2025.

NB : Le graphique concerne les entreprises de 50 salariés ou plus. Dans le cas des entreprises de moins de 50 salariés, qui paient 0,4 point de moins pour le financement de l'allocation de logement social (taux de 0,1 % au lieu de 0,5 %), l'allégement du barème est réduit de 0,4 point au niveau du Smic.

Source : Commission des affaires sociales (d'après le code de la sécurité sociale, l'article 6 du PLFSS 2025 et les formules des barèmes dégressifs envisagés (de niveau réglementaire) figurant dans l'évaluation préalable)

La réforme aurait lieu en deux temps.

En 2025, le barème conserverait un profil analogue à celui d'aujourd'hui. Les différences seraient une diminution de l'allégement pour les plus bas salaires (diminution de 2 points au niveau du Smic, au bénéfice du seul régime d'assurance vieillesse), et la réduction du niveau de rémunération maximal permettant de bénéficier des bandeaux « famille » et « maladie », qui passeraient à respectivement 3,2 Smic (pour 3,5 Smic actuellement) et 2,2 Smic (pour 2,5 Smic actuellement).

En 2026, le dispositif serait lissé. Les bandeaux seraient donc supprimés. Au niveau du Smic, le taux maximal d'exonération serait à nouveau réduit de 2 points afin d'atteindre un taux de 4 points plus bas que le taux actuel. L'allégement disparaîtrait à 3 Smic.

Le reprofilage des allégements généraux par le III du présent article

Le reprofilage des allégements généraux est réalisé par le III du présent article.

Son 1° fixe le régime applicable à compter du 1er janvier 2025 :

- ses a) et b) ramènent les seuils maximaux des bandeaux maladie et famille, actuellement de 2,5 et 3,5 Smic, à respectivement 2,2 et 3,2 Smic ;

- son c) prévoit qu'au niveau du Smic, les allégements dégressifs ne s'appliquent pas à 2 points de cotisations vieillesse. Cela permet de réduire de 2 points les allégements généraux en 2025, et de faire en sorte que le produit correspondant revienne à la branche vieillesse.

Le 2° du III fixe le régime applicable à compter du 1er janvier 2026 :

- son a) abroge les bandeaux maladie et famille ;

- son b) porte la baisse des allégements dégressifs au niveau du Smic à 4 points, et leur point de sortie à 3 Smic.

2. Une dégressivité précisée au niveau réglementaire

Si l'article 34 de la Constitution prévoit que la loi fixe les règles concernant « l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures », il résulte de la jurisprudence du Conseil constitutionnel que celles-ci ne comprennent pas les cotisations sociales.

Aussi l'article 6 du PLFSS fixe-t-il seulement l'architecture globale du nouveau dispositif, la dégressivité (c'est-à-dire la « forme de la courbe ») étant comme actuellement fixée au niveau réglementaire.

Les formules envisagées, figurant dans l'évaluation préalable, sont indiquées par l'encadré suivant87(*).

Formules envisagées pour le profil des allégements dégressifs (de niveau réglementaire)

Pour 2025 :

À partir de 2026 :

(avec T = allégement au niveau du Smic)

Dans ce second cas, la puissance a pour fonction d'augmenter la convexité de la courbe, afin de réaliser les économies souhaitées malgré notamment le point de sortie à 3 Smic.

Source : D'après l'évaluation préalable du présent article

3. Une recette supplémentaire estimée à 5,1 milliards d'euros en 2025, dont 4,1 milliards d'euros pour la sécurité sociale

a) Un supplément de cotisations de 5,1 milliards d'euros en 2025

Selon les estimations du Gouvernement, le présent article permettrait d'augmenter les recettes publiques de 5,1 milliards d'euros en 2025, ce montant étant à peu près stable les années suivantes, malgré le changement de barème de 2026.

Ces 5,1 milliards d'euros se répartiraient initialement entre 2,7 milliards d'euros pour la branche vieillesse (baisse de 2 points de l'allégement au niveau du Smic), 2,2 milliards d'euros pour la branche maladie (réduction du point de sortie du bandeau maladie), et 0,3 milliard d'euros pour la branche famille (réduction du point de sortie du bandeau famille).

b) Un gain transféré à l'État pour un milliard d'euros, en compensation des moindres recettes d'impôt sur les sociétés (article 38 du PLF)

Toutefois, les recettes pour la sécurité sociale seraient chaque année réduites d'un milliard d'euros par rapport à ce montant d'environ 5 milliard d'euros par an.

En effet, l'article 38 du PLF prévoit de réduire d'un milliard d'euros la TVA affectée à la sécurité sociale (en compensation de l'estimation de la perte d'impôt sur les sociétés résultant pour l'État de la mesure).

c) L'intention du Gouvernement d'empêcher la branche famille de bénéficier de l'augmentation de recettes (article 8 du PLFSS)

La branche maladie étant la seule à percevoir la TVA, ces moindres recettes doivent être re-réparties entre les différentes branches au moyen de transferts de taxe sur les salaires. C'est ce que fait l'article 8 du PLFSS (« article tuyau »).

Le Gouvernement considérant que la branche famille ne doit pas bénéficier du supplément de recettes résultant du présent article, l'article 8 du PLFSS prévoit de transférer 0,266 milliard d'euros de la branche famille (dont le supplément de recettes résultant du seul présent article est estimé à 0,3 milliard d'euros) vers la branche maladie.

Impact du des articles 6 et 8 du PLFSS et de l'article 38 du PLF
sur le solde des branches de la sécurité sociale, selon les évaluations préalables

(en milliards d'euros)

 

2024

2025

2026

2027

Article 6 du PLFSS (seul)

Robss

0,4

5,1

5

4,7

Maladie

0,1

2,2

2,1

2

AT-MP

       

Famille

0,1

0,3

0,3

0,2

Vieillesse

0,2

2,7

2,6

2,5

Autonomie

0,2

     

Agirc-Arrco

0,1

     

Unédic

0,1

     

Transferts liés à l'article 6 prévus par l'article 8 du PLFSS et l'article 38 du PLF

Robss

       

Maladie

 

- 0,200*

- 0,200

- 0,200

AT-MP

       

Famille

 

- 0,266

- 0,266

- 0,266

Vieillesse

 

- 0,534

- 0,534

- 0,534

Autonomie

       

Agirc-Arrco

       

Unédic

       

Effet conjoint des articles 6 et 8 du PLFSS et 38 du PLF

Robss

0,4

4,2

4,0

3,7

Maladie

0,1

2,0

1,9

1,8

AT-MP

       

Famille

0,1

0,0

0,0

-0,1

Vieillesse

0,2

2,2

2,1

2,0

Autonomie

0,2

     

Agirc-Arrco

0,1

     

Unédic

0,1

     

Champ : pour les articles 8 du PLFSS et 38 du PLF, seuls sont pris en compte les transferts liés au présent article.

* Transfert de 0,266 Md€ depuis la branche famille + transfert de 0,534 Md€ depuis la branche vieillesse - réduction de 1 Md€ de la TVA affectée.

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après les évaluations préalables des articles 6 et 8 du PLFSS et 38 du PLF

Par ailleurs, les I et II du présent article prévoient que dès 2024, seraient mises en oeuvre diverses mesures d'économie (comme l'intégration de la prime de partage de la valeur dans les rémunérations prises en compte), pour un montant de 0,4 milliard d'euros (cf. infra). Par prudence, ces mesures sont réputées ne pas avoir d'impact après 202488(*). Les montants indiqués pour les années 2025, 2026 et 2027 correspondent donc au seul reprofilage des allégements généraux.

Les estimations du Gouvernement ne prennent pas en compte l'impact de l'augmentation du chômage consécutive à la réforme des allégements généraux89(*), qui, sous l'hypothèse de 50 000 destructions nettes d'emplois, pourraient réduire l'amélioration du solde public d'un milliard d'euros (cf. ci-après).

D. Les autres dispositions du présent article

1. L'intégration de la prime de partage de la valeur à la rémunération prise en compte pour l'application des seuils

a) Dispositif juridique

Les I et II du présent article prévoient diverses mesures d'économie s'appliquant dès 2024.

Le 1° du I re-rédige le I de l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale pour modifier les conditions d'application du seuil de 1,6 Smic :

- les rémunérations prises en compte comprennent désormais la prime de partage de la valeur (PPV), dite « prime Macron », qui en 2022 a coûté 5,3 milliards d'euros et a été distribuée à 5,5 millions de salariés90(*). Le régime de cette prime, bénéficiant de diverses exonérations91(*), n'est pas modifié, mais désormais elle est prise en compte pour déterminer le taux d'allégement ;

- le seuil de 1,6 Smic n'est plus fixé par référence au Smic de l'année en cours, mais, comme depuis la LFSS 2024 dans le cas des seuils maximaux des bandeaux famille et maladie, par référence au Smic à une certaine date, ici le 1er janvier 2024 (le Gouvernement pouvant toutefois décider par décret de se rapprocher autant qu'il le souhaite de 1,6 fois le Smic de l'année en cours). Il s'agit concrètement de neutraliser, pour le calcul des allégements, la revalorisation exceptionnelle de 2 % du Smic au 1er novembre 2024.

Le 2° du I modifie le III de l'article L. 241-13 précité. Il comprend des mesures de coordination (a et b) et supprime la disposition selon laquelle la rémunération prise en compte pour la détermination du taux d'allégement est minorée par la déduction forfaitaire spécifique au titre de frais professionnels (DFS).

Le II prévoit que l'intégration de la PPV aux revenus pris en compte ne s'applique qu'à compter des primes versées à compter du 10 octobre 2024.

b) Impact financier

Selon l'évaluation préalable, les I et II correspondraient à un gain de 0,4 milliard d'euros en 2024. Celui-ci correspond exclusivement à la mesure relative à la prime de partage de la valeur.

L'impact de la neutralisation de la hausse du Smic au 1er novembre 2024 n'est en revanche pas chiffré.

2. Le renforcement de la sécurité juridique pour les cotisants

Le IV du présent article propose de modifier l'article L. 243-6-2 du code de la sécurité sociale.

Actuellement, cet article prévoit que lorsqu'un cotisant a appliqué la législation relative aux cotisations et contributions sociales selon l'interprétation admise par une circulaire ou une instruction du ministre chargé de la sécurité sociale, la sécurité sociale ne peut retenir une interprétation différente de celle admise par l'administration.

Le IV du présent article renforce ce dispositif, en particulier en l'étendant à l'ensemble des organismes chargés du recouvrement des cotisations et contributions de sécurité sociale (y compris l'Ircantec92(*)), et en introduisant dans le code de la sécurité sociale une référence au Bulletin officiel de la sécurité sociale, créé en 2021.

3. L'habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance pour réformer certains dispositifs

a) Des conséquences importantes sans disposition spécifique

• En l'absence de disposition spécifique, les dispositifs TO-DE et Lodéom verraient leurs allégements dégressifs automatiquement réduits au niveau du Smic de 2 points en 2025 et 2 points supplémentaires en 2026

En l'absence de disposition spécifique, la réforme des allégements généraux impacterait fortement dès 2025 deux dispositifs, qui consistent également en des allégements de cotisations patronales :

- le dispositif en faveur des employeurs agricoles de travailleurs occasionnels et de demandeurs d'emploi, dit « TO-DE » ;

- le dispositif instauré par la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer, dit « Lodéom »93(*).

Ces deux dispositifs coûtent respectivement environ 0,6 milliard d'euros et 1,4 milliard d'euros par an aux administrations publiques.

En 2025, la baisse de 2 points des allégements dégressifs au niveau du Smic s'y appliquerait automatiquement (du fait des références des articles définissant leurs barèmes à l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, qui définit les allégements généraux « de droit commun »).

En 2026, s'ajouterait la baisse supplémentaire de 2 points au niveau du Smic des allégements dégressifs.

• Le « rabotage » (en 2025) puis la suppression des bandeaux (en 2026) concerneraient l'ensemble des dispositifs

Par ailleurs, l'ensemble des dispositifs spécifiques seraient concernés par le « rabotage » des bandeaux en 2025 puis leur suppression en 2026.

En effet, les bandeaux sont d'application générale et concernent donc également les bénéficiaires des dispositifs spécifiques.

Si les conséquences seraient marginales en 2025, en 2026 l'impact serait important, du fait de la disparition des bandeaux.

b) La proposition du présent article : l'habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance

Le Gouvernement aurait pu décider de neutraliser la réforme pour ces deux dispositifs et de se laisser une année de réflexion pour les modifier, le cas échéant, dans le cadre du PLFSS 2026. En particulier, cela aurait laissé le temps aux acteurs concernés de réagir aux conclusions de la récente mission Igas-IGF d'évaluation du dispositif Lodéom.

Le V du présent article fait toutefois le choix d'une habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance afin de prendre les mesures d'adaptation nécessaires. Du fait d'une formulation très générale94(*), cette habilitation ne serait d'ailleurs pas limitée à ces deux dispositifs. Ainsi, l'évaluation préalable mentionne également l'aide à domicile auprès de publics fragiles (AAD) et les zones France ruralités revitalisation (ZRR).

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

Le Gouvernement a transmis cet article au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

A. Le reprofilage des allégements généraux : une réforme bienvenue mais qui doit faire l'objet d'ajustements

1. Une réforme bienvenue en son principe

La commission des affaires sociales ne peut qu'approuver le principe d'un reprofilage des allégements généraux, visant notamment à les supprimer là où ils sont inefficaces.

En particulier, lors de l'examen du futur article 20 de la LFSS 202495(*), la commission a considéré que les allégements généraux pour les salaires élevés, en particulier au-delà de 2,5 Smic, devaient être supprimés.

Le caractère imparfait du barème actuel, avec un profil constitué d'un « toboggan » suivi de deux « marches d'escalier », ces dernières incitant à ne pas accroître les salaires de 2,5 Smic et 3,5 Smic, est en outre connu depuis longtemps.

La commission considère que la mise en place de la réforme en deux étapes est un bon compromis entre la nécessité de donner aux entreprises de la visibilité (ce qui implique de fixer dès à présent le barème de 2026) et de prendre en compte leurs contraintes techniques (d'où la nécessité pour 2025 d'un barème plus proche, par sa structure, du barème actuel).

2. Une réforme qui doit être ajustée

a) En l'état, le présent article entraînerait la destruction nette de plusieurs dizaines de milliers d'emplois

Cet article implique de trouver le bon équilibre entre recherche d'économies, incitation à la désmicardisation, préservation de l'emploi et préservation de la compétitivité industrielle. La détermination de cet équilibre relève par nature d'un choix politique. Pour sa part, la commission considère que, compte tenu notamment de l'évolution probablement défavorable de l'emploi en 2025, la réforme des allégements généraux devrait davantage préserver l'emploi.

Schématiquement, la mesure proposée augmente les coûts salariaux entre 1 et 1,3 Smic (ce qui détruit des emplois), le réduit entre 1,3 et 1,8 Smic (ce qui crée des emplois) et les augmente à nouveau entre 1,8 Smic et 3,5 Smic (ce qui détruit des emplois).

Comme l'ont souligné les spécialistes de l'emploi auditionnés par la rapporteure générale, il n'y a aucun doute sur le fait que l'effet global de la mesure sur l'emploi serait négatif, la seule incertitude portant sur le nombre d'emplois détruits.

Dans une interview aux Échos96(*), le président du Medef a déclaré : « Nous sommes totalement opposés à cette mesure. Il y aurait très peu de gagnants, mais beaucoup de perdants. (...) In fine, cela détruira plusieurs centaines de milliers de postes, dans les secteurs très pourvoyeurs d'emplois sur les territoires, en proximité : la propreté, la restauration collective, l'aide à la personne... (...) Les travaux de MM. Bozio et Wasmer ont été dénaturés quand on y a ajouté un objectif de réduction des déficits publics ».

Cet ordre de grandeur paraît exagéré.

Le Gouvernement, pour sa part, n'a publié aucune estimation. L'évaluation préalable se contente d'indiquer : « L'impact sur l'emploi est fortement discuté par les économistes. Si plusieurs études semblaient considérer une forte élasticité-coût du travail essentiellement au niveau du Smic, des travaux récents et qui n'ont pas pu être intégrés dans les modélisations gouvernementales indiquent plutôt que les emplois à bas salaires sont en réalité moins exposés à la concurrence internationale. »

Toutefois, selon les prévisions économiques de l'OFCE du 16 octobre 2024, la mesure détruirait 50 000 emplois au bout de trois ans (dont 15 000 dès 2025)97(*).

Ces estimations correspondent à celles réalisées par la commission98(*), qui suggèrent environ 40 000 destructions d'emplois sur la base du barème de 2025 et 50 000 destructions d'emplois sur la base de celui de 202699(*).

Il faut bien entendu considérer ces estimations avec prudence.

L'augmentation du chômage : une réduction d'un milliard d'euros
de l'amélioration du solde ?

Selon les prévisions financières de l'Unédic de juin 2024, les allocations brutes et les aides correspondraient en 2025 à des dépenses 34,9 milliards d'euros (pour des dépenses totales de 43,1 milliards d'euros), pour une prévision de 2,4 millions de chômeurs indemnisés, ce qui correspond à des dépenses de 15 000 euros par chômeur.

Si l'on prend en compte la perte de cotisations sociales, le coût est d'environ 20 000 euros par chômeur.

Le surcoût de dépenses d'assurance-chômage peut donc être estimé à environ un milliard d'euros si la mesure détruit 50 000 emplois.

b) Des mesures d'accompagnement efficaces semblent se heurter à des difficultés juridiques et pratiques insurmontables

Lors de son audition par la commission le 22 octobre 2024, Antoine Bozio a suggéré de reporter l'effet de la mesure pour les secteurs de la propreté et du gardiennage, qui ont la double caractéristique d'avoir une forte proportion de salariés proches du Smic et des contrats pluriannuels qui ne leur permettent pas de modifier leurs prix rapidement.

Selon la Dares, fin 2021 les salariés de la branche « Nettoyage, manutention, récupération et sécurité » étaient au nombre de 900 000, dont 200 000 pour la prévention et la sécurité et 560 000 la propreté.

Toutefois il semble juridiquement délicat d'exclure des secteurs du champ d'application de la mesure tout en respectant le principe d'égalité devant la loi. Par ailleurs, la prise en compte de critères propres à chaque entreprise (comme, par exemple, la part des contrats pluriannuels dans le chiffre d'affaires) représenterait un coût de gestion considérable et serait source de fraudes.

c) Adapter le barème proposé pour 2025 et 2026

La commission s'est donc efforcée de trouver des scénarios alternatifs minimisant les destructions d'emplois, tout en demeurant compatibles avec l'objectif de « désmicardisation ».

• En 2025 : maintenir l'allégement actuel inchangé au niveau du Smic (au lieu de le réduire de deux points) et placer les points de sortie des bandeaux à 2,1 et 3,1 Smic (au lieu de 2,2 et 3,2 Smic).

Dans le cas du barème de 2025, la commission propose de maintenir l'allégement dégressif inchangé au niveau de Smic (le présent article prévoyant de le réduire de 2 points). Les points de sortie des bandeaux seraient en revanche ramenés à 2,1 Smic pour le bandeau maladie (au lieu de 2,2 Smic pour le PLFSS et 2,5 Smic selon le droit actuel) et 3,1 Smic pour le bandeau famille (au lieu de 3,2 Smic selon le PLFSS et 3,5 Smic selon le droit actuel).

La formule utilisée pour calculer le coefficient de dégressivité serait inchangée par rapport à celle prévue pour 2025 par l'évaluation préalable.

La mesure réduirait le rendement de la réforme d'environ un milliard d'euros. Les destructions nettes d'emplois seraient nécessairement très faibles, voire nulles, dès lors que les emplois dont le coût augmenterait correspondraient tous à des rémunérations supérieures à 2,1 Smic.

La commission a adopté un amendement n° 121 proposant de retenir ce barème pour 2025.

Barème pour 2025 : comparaison du barème proposé par le présent article
et de celui proposé par la commission

Barèmes pour les entreprises de plus de 50 salariés.

Source : Commission des affaires sociales

• En 2026 : maintenir l'allégement actuel inchangé au niveau du Smic et prévoir une sortie entre 2 et 2,1 Smic

Le Gouvernement indique, dans l'évaluation préalable du présent article, qu'un autre barème a été envisagé :

« Dans l'hypothèse d'une réforme-fusion des dispositifs, un maintien d'un taux de coefficient important au niveau du SMIC combiné au maintien d'une dégressivité linéaire aurait également pu être envisagée. Si, par rapport à la situation actuelle, elle présente aussi comme caractéristique intéressante une plus importante réduction de la pente pour les niveaux de rémunérations proches du SMIC ainsi que le maintien du taux d'exonération actuel à ce niveau, elle nécessite, à objectifs financiers identiques, un point de sortie de l'exonération beaucoup plus réduit (entre 2 et 2,1 SMIC environ) ».

Les estimations de la commission suggèrent en effet qu'un tel dispositif, avec un point de sortie à 2,05 Smic et un coefficient de dégressivité calculé selon la même formule que l'évaluation préalable, conduirait à des recettes analogues.

Ce barème présenterait en outre l'intérêt de créer des emplois (environ 20 000 selon les estimations indicatives de la commission, avec un « pic » vers 1,3-1,4 Smic), ce qui majorerait l'amélioration du solde public (d'environ 0,4 milliard d'euros selon cette estimation, là où les 5 milliards d'euros d'amélioration du solde indiqués par le Gouvernement devraient être réduits d'environ 1 milliard d'euros du fait de l'augmentation du chômage100(*)).

La commission a adopté un amendement n° 122 proposant de retenir ce barème à partir de 2026.

Barème à partir de 2026 : comparaison du barème proposé par le présent article
et de celui proposé par la commission

Barèmes pour les entreprises de plus de 50 salariés.

Source : Commission des affaires sociales

Certes, le « rapport Bozio-Wasmer », à coût inchangé, détruit quelques dizaines de milliers d'emplois à proximité du Smic et en crée à peu près autant autour de 1,4 Smic. Toutefois ces destructions et créations d'emplois ne sont pas ce par quoi le « scénario central » du rapport est censé contribuer à la « désmicardisation ». Ce qui peut contribuer à la « désmicardisation », qui est un mécanisme de long terme, c'est que le barème proposé par le rapport ne présente plus les « marches » correspondant à la fin des bandeaux et, surtout, correspond à une pente plus faible pour les bas salaires.

Le barème proposé par la commission correspond à une moindre réduction de cette pente que dans celui proposé par le présent article dans sa rédaction initiale. Toutefois la pente serait réduite par rapport au droit actuel.

Par ailleurs, comme indiqué supra, l'idée qu'il existerait en France un phénomène de « trappe à bas salaire » ne fait pas consensus parmi les spécialistes de l'emploi.

En outre, à moyen terme la désmicardisation sera rendue difficile par l'augmentation du coût de l'emploi proche du Smic.

Le « scénario central » du rapport Bozio-Wasmer se justifiait par le fait qu'à coût constant, les destructions d'emplois proches du Smic étaient en principe compensées par les créations d'emplois autour de 1,4 Smic. Toutefois dès lors que, comme le présent article, on ajoute à l'objectif de « désmicardisation » celui de réaliser des économies, les destructions d'emplois proches du Smic (du fait d'allégements de cotisations quasiment identiques à ce niveau à celles du « rapport Bozio-Wasmer »101(*)) ne sont plus compensées par des créations d'emplois ailleurs.

La commission a en outre adopté un amendement n° 123 proposant d'instaurer un comité chargé d'évaluer la réforme des allégements généraux.

B. Neutraliser la mesure pour les dispositifs « Lodéom » et « TO-DE »

1. Figer les régimes spécifiques

Comme on l'a indiqué, le V du présent article propose d'habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance afin de prendre les mesures d'adaptation nécessaires à l'ensemble des régimes consistant en des allégements dégressifs cumulables avec les actuels bandeaux famille et maladie.

En effet, en l'absence de disposition spécifique, si les dispositifs TO-DE et Lodéom seraient fortement concernés dès 2025, du fait de la réduction des allégements généraux au niveau du Smic, les autres dispositifs spécifiques le seraient surtout à partir de 2026, avec la disparition des bandeaux (cf. supra).

Du fait des craintes que suscite l'habilitation du Gouvernement à modifier les régimes par ordonnance, la commission juge préférable de les figer sous leur forme actuelle. Cela ne dispense pas de s'interroger sur leur efficacité, et le cas échéant de les réformer, par exemple dans le PLFSS 2026.

2. Habiliter le Gouvernement à corriger le fait que certains dispositifs deviendraient moins favorables que le nouveau droit commun à partir de 2026

a) Figer totalement les dispositifs TO-DE et AAD les rendrait moins favorables que le droit commun entre 1,5 et 1,8 Smic à partir de 2026

Les dispositifs spécifiques sont nombreux et complexes, et ne peuvent être présentés en détail dans le cadre du présent rapport. Comme le montre le graphique ci-après, de nombreux dispositifs - zones France ruralités revitalisation (ZRR), zones franches urbaines (ZFU), certaines versions du dispositif Lodéom102(*), etc. - sont déjà moins favorables que le droit commun à proximité du Smic.

Comparaison des réductions de cotisations et de contributions patronales spécifiques et du barème de droit commun actuel

AAD : aide à domicile en faveur de publics fragiles. BER : bassins d'emploi à redynamiser. LODEOM (ou Lodéom) : dispositif instauré par la loi du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer. TODE (ou TO-DE) : dispositif en faveur des employeurs agricoles de travailleurs occasionnels et de demandeurs d'emploi. ZFU : zones franches urbaines. ZRD : zones de restructuration de la défense. ZRR : France ruralités revitalisation.

Source : Commission des affaires sociales, d'après Antoine Bozio, Étienne Wasmer, Les politiques d'exonérations de cotisations sociales : une inflexion nécessaire, 3 octobre 2024

Si les dispositifs spécifiques étaient maintenus inchangés en 2025, cette incohérence à proximité du Smic ne serait pas corrigée par le texte actuel du PLFSS, mais elle ne serait pas non plus aggravée. L'avantage de ces dispositifs par rapport au droit commun serait en outre accru entre 2,2 et 2,5 Smic et entre 3,2 et 3,5 Smic, si dans leur cas les points de sortie des bandeaux étaient maintenus. La situation serait analogue avec le barème proposé pour 2025 par la commission.

En revanche, si les dispositifs spécifiques étaient maintenus inchangés en 2026, une nouvelle incohérence apparaîtrait, qui est que le dispositif TO-DE et celui en faveur des organismes d'aide à domicile en faveur de publics fragiles (AAD) deviendraient moins favorables que le régime de droit commun entre 1,5 et 1,8 Smic environ. Il en irait de même avec le barème proposé pour 2026 par la commission.

Comparaison des réductions de cotisations et de contributions patronales spécifiques et du barème de droit commun proposé pour 2026 par le PLFSS

AAD : aide à domicile en faveur de publics fragiles. BER : bassins d'emploi à redynamiser. LODEOM (ou Lodéom) : dispositif instauré par la loi du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer. TODE (ou TO-DE) : dispositif en faveur des employeurs agricoles de travailleurs occasionnels et de demandeurs d'emploi. ZFU : zones franches urbaines. ZRD : zones de restructuration de la défense. ZRR : zones France ruralités revitalisation.

Source : Commission des affaires sociales, d'après le PLFSS 2025 et Antoine Bozio, Étienne Wasmer, Les politiques d'exonérations de cotisations sociales : une inflexion nécessaire, 3 octobre 2024

b) Limiter l'habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance à la résolution de ce problème

Certes, cela ne remettrait pas fondamentalement en cause le caractère incitatif des dispositifs TO-DE et AAD, qui emploient des personnes dont la rémunération moyenne est faible.

Par ailleurs, certains régimes (comme certaines versions du dispositif Lodéom) sont déjà moins favorables que le droit commun à proximité du Smic (cfsupra).

Enfin, rien n'empêcherait de résoudre ce problème, qui n'apparaîtrait qu'en 2026, dans le cadre du prochain PLFSS.

Toutefois, pour donner de la visibilité aux bénéficiaires des régimes concernés, il est proposé d'habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance afin de corriger ces problèmes, par exemple en reculant le point de sortie des allégements dégressifs vers 1,9 Smic (la forme de la courbe étant alors modifiée au niveau réglementaire).

Ainsi, la commission a adopté un amendement n° 124 de sa rapporteure générale, tendant à neutraliser l'impact de cet article sur les régimes spécifiques. L'habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance serait limitée au cas précité et à la codification de la neutralisation de la suppression des bandeaux.

La commission propose d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.

Article 7
Rationalisation des exonérations de cotisations sociales pour les contrats d'apprentissage, les entreprises d'armement maritime, les jeunes entreprises innovantes et les jeunes entreprises de croissance

Cet article propose de réduire et de rationaliser les exonérations de cotisations sociales, salarié ou employeur, dont bénéficient certains publics. Il vise à assujettir sur une assiette limitée les apprentis en matière de contribution sociale généralisée (CSG) et de contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS). Il entend également restreindre l'exonération de cotisations employeur, d'allocations familiales et d'assurance chômage dont bénéficient les entreprises d'armement maritime aux seuls navires à passagers. Enfin, il supprime l'exonération de cotisations employeur dont bénéficient les jeunes entreprises innovantes (JEI) et les jeunes entreprises de croissance (JEC).

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé : la réduction ou la suppression d'exonérations de cotisations sociales dont la justification apparaît excessivement dérogatoire ou limitée

A. Les apprentis bénéficient d'un régime social favorable sur l'ensemble de leur rémunération

1. Le droit existant : une exemption totale de contributions sociales sur les rémunérations à mettre en regard avec le développement croissant de l'apprentissage

a) Un régime social favorable aux apprentis

Prévu à l'article L. 6221-1 du code du travail, le contrat d'apprentissage est un contrat de travail particulier conclu entre un apprenti ou son représentant légal et un employeur. Dans ce cadre, l'employeur s'engage à verser un salaire à l'apprenti, dont le montant minimal est fixé selon l'âge et le diplôme préparé par l'apprenti103(*). Ce montant minimal est inférieur au Smic, en contrepartie de quoi l'employeur s'engage à assurer à l'apprenti une formation professionnelle complète, dispensée pour partie en entreprise et pour partie en centre de formation d'apprentis ou section d'apprentissage.

La rémunération des apprentis constitue un revenu d'activité au sens du droit de la sécurité sociale104(*), pour autant elle bénéficie d'un double régime de faveur par rapport au droit commun. D'une part, les rémunérations des apprentis sont les seuls revenus d'activité intégralement exonérés de contribution sociale généralisée (CSG) et de contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS)105(*). D'autre part, ces revenus bénéficient d'une exonération partielle de cotisations sociales salariales, puisque seule la part supérieure à 79 % du Smic - soit 1 395 euros par mois en 2024 - y est soumise106(*).

Si le coût de l'exonération de cotisations sociales salariales est compensé à la sécurité sociale par des dotations de la mission « Travail, emploi et administration des ministères sociaux » du budget général de l'État, ce n'est pas le cas de l'exonération de CSG et de CRDS, antérieure à la loi du 25 juillet 1994107(*) qui a posé le principe d'une compensation intégrale par l'État des exonérations de cotisations et des contributions de sécurité sociale.

Le régime fiscal de la rémunération des apprentis

La rémunération des apprentis est également exonérée d'impôt sur le revenu à hauteur d'un Smic annuel108(*) - soit 20 815 euros. Cette exonération constitue une dépense fiscale d'autant plus coûteuse que le rattachement de l'apprenti au foyer fiscal parental, cas le plus commun du fait de l'âge des apprentis, permet de bénéficier d'une demie-part fiscale sans être imposé sur les revenus de l'apprenti.

L'évaluation de cette dépense fiscale est difficile du fait de l'absence de données sur la part des apprentis rattachés au foyer fiscal parental, mais la revue de dépense menée par l'inspection générale des affaires sociales et l'inspection générale des finances109(*) l'estime à plus de 459 millions d'euros, ce qui représente 0,6 % du produit total de l'impôt sur le revenu.

Source : D'après l'Igas et l'IGF

Par comparaison, le régime dérogatoire dont bénéficient les apprentis est plus favorable que celui afférent aux élèves et étudiants en période de stage en milieu professionnel110(*). Pour les stagiaires, les cotisations salariales sont calculées pour la part de la gratification qui excède 15 % du plafond de la sécurité sociale par heure de stage effectuée au cours d'un mois111(*) - soit 4,35 euros par heure.

b) Les exonérations dont bénéficient les apprentis représentent un coût croissant du fait de la dynamique de l'apprentissage

La loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a fortement contribué au développement de l'apprentissage, notamment en relevant la limite d'âge y rendant éligible112(*), et s'est accompagnée de la création d'une aide unique à l'apprentissage pouvant aller jusqu'à 6 000 euros à l'embauche. Ces mesures volontaristes ont conduit en 2022 le président de la République à fixer l'objectif d'un million de contrats d'apprentissages signés d'ici à 2027.

Dynamique des entrées en apprentissage
selon le niveau d'étude (2017-2022)

Source : Dares

De fait, le nombre d'entrée en apprentissage a été multiplié par 2,7 entre 2018 et 2023 d'après les chiffres de la Dares, en passant de 321 000 contrats à 852 000. Cette dynamique a particulièrement été portée par l'essor de l'apprentissage dans l'enseignement supérieur. Or, les grilles de salaires minimaux applicables étant liées à l'âge et au niveau de diplôme préparé, ce sont aussi ces publics qui bénéficient le plus des exonérations sociales et fiscales prévues par la loi.

Évolution des contrats d'apprentissage
selon le diplôme préparé entre 2018 et 2022

Source : Dares

L'augmentation du recours à l'apprentissage s'est traduite par un doublement de la dépenses publiques en faveur de l'apprentissage, de 6,1 milliards d'euros en 2018 à 13,9 milliards d'euros en 2022113(*) - contre 11 milliards d'euros consentis par les entreprises. Au sein de cet ensemble, le montant des seules exonérations de cotisations sociales liées à l'apprentissage s'élèverait à 1,5 milliard d'euros en 2023, tandis que celui des pertes de recettes de contributions sociales (CSG-CRDS) est estimé à 1,2 milliard d'euros114(*).

La progression de ces exonérations, intégrales pour de nombreux apprentis, peut conduire à s'interroger, dans la mesure où ces derniers acquièrent des droits sociaux contributifs durant l'exécution de leur contrat d'apprentissage, du moins pour la partie liée aux cotisations sociales salariales115(*).

Les trimestres effectués en contrat d'apprentissage sont en effet pris en compte pour le calcul de l'assurance retraite116(*), et une partie des apprentis est également éligible à l'indemnisation chômage à la sortie du contrat - ce qui représente d'après l'Unédic près de 375 millions d'euros de dépense en 2021.

Chiffrage des effets d'une réforme des exonérations
par la revue de dépense Igas-IGF consacrée à l'apprentissage

La revue de dépense effectuée souligne que, si 5 % de la masse salariale des apprentis excède le seuil de 0,79 Smic, 25 % est située au-dessus de 0,5 Smic. Ces données permettent à la fois de calculer le gain financier à l'assujettissement aux cotisations sociales salariales et à la CSG-CRDS des apprentis dès 0,5 Smic :

Source : Revue de dépense Igas IGF

2. Le droit proposé : assujettir aux contributions sociales la part de la rémunération des apprentis qui excède un demi-Smic

Le présent article propose de rapprocher le régime social des apprentis du droit commun. Pour cela, il assujettit la part de leur rémunération excédant 50 % du Smic à la CSG/CRDS. Parallèlement le pouvoir règlementaire doit abaisser le plafond des exonérations de cotisations salariales des apprentis à 50 % du Smic. L'impact pour les finances publiques de l'assujettissement des rémunérations des apprentis à la CSG/CRDS est estimé à 360 millions d'euros par an, tandis que la mesure règlementaire l'accompagnant engendrerait une économie de 300 millions d'euros sur le budget de l'État.

Pour ce faire, le 1° du A du I du présent article insère un 7° au II de l'article L. 136-1-1 du code de la sécurité sociale, qui précise les conditions d'assujettissement des apprentis à la CSG/CRDS pour la part de leur rémunération qui excède 50 % du Smic. En conséquence, le 2° du présent article abroge le a du 1° du III de l'article précité qui excluait de l'assiette de la CSG/CRDS des revenus des apprentis.

B. Le régime spécial de sécurité sociale des marins présente des exonérations de charges patronales afin de répondre à la concurrence internationale à laquelle sont soumis les navires français

1. Le droit en vigueur : le régime spécial de sécurité sociale des marins comprend des exonérations de charges patronales afin de répondre à la concurrence internationale à laquelle sont soumis les navires français

a) Les entreprises d'armement maritime bénéficient d'exonérations spécifiques de cotisations employeur d'allocations familiales et de contributions à l'assurance chômage

Les entreprises du secteur maritime bénéficient d'un régime spécial de sécurité sociale, géré par l'établissement national des invalides de la marine (Énim), dont les bases sont antérieures à la création du régime général et remontent à l'ordonnance sur la marine de 1681. La principale spécificité de ce régime réside dans la modalité de calcul des cotisations sociales, qui ne s'effectue pas sur la base du salaire réel mais sur la base d'un salaire forfaitaire, lui-même fixé par arrêté ministériel pour chacune des 280 fonctions répertoriées à bord d'un navire, modulé par plus d'une dizaine de critères dont l'âge et le type du navire dans le quel exerce le marin.

À cette spécificité liée à l'assiette des cotisations s'ajoutent des exonérations spécifiques pour les employeurs d'équipages affiliés à l'Énim :

- la loi du 3 mai 2005 relative à la création du registre international français117(*) a ainsi institué une exonération de cotisations sociales employeur maladie et vieillesse, dites « charges Enim », pour l'ensemble des entreprises d'armement ;

la loi de finances pour 2007118(*) a créé des exonérations de cotisations employeur d'allocations familiales et d'assurance chômage, dites « charges non-Enim », pour les seules entreprises de navires de passagers ;

la loi du 16 juin 2016 pour l'économie bleue119(*) a étendu le bénéfice des « charges non-Enim » à l'ensemble des navires de commerce, qu'ils soient à passager, de transport ou de services maritimes.

L'article L. 5553-11 du code des transports précise les conditions dans lesquelles les entreprises d'armement maritime peuvent bénéficier des exonérations dites « charges non-Enim », relatives aux cotisations d'allocations familiales et de contributions à l'assurance chômage. Ces exonérations s'appliquent à la triple condition :

- qu'elles s'appliquent à l'équipages et aux gens de mer d'un navire de commerce dirigé et contrôlé à partir d'un établissement stable situé sur le territoire français, battant pavillon français ou d'un autre État membre de l'Union européenne, d'un État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse ;

- que ce navire soit affecté à des activités de transport ou à des activités de services maritimes qui relèvent des orientations de l'Union européenne sur les aides d'État au transport maritime120(*), qui sont soumises à titre principal à une concurrence internationale121(*) ;

- qu'au moins un quart des membres de l'équipage du navire soit des ressortissants de l'Union européenne, de l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse.

b) L'augmentation du périmètre des navires bénéficiaires des exonérations dites « charges non-Enim » semble avoir dépassé le champ des entreprises soumises à une forte concurrence internationale

En 2021, l'exonération de cotisations patronales d'allocations familiales et de contributions à l'assurance chômage pour les navires exposés à la concurrence internationale aurait concerné 382 navires et environ 10 000 marins, ce qui représente un tiers des affiliés à l'Énim, pour un déficit de cotisations estimé de 47 millions d'euros122(*).

Un rapport de la Cour des comptes123(*) relatif au régime spécial des marins souligne les limites de ces exonérations. D'une part que l'interprétation de la notion d'exposition à la concurrence internationale est relativement extensive, dans la mesure où des entreprises de transport fluvial ou de nettoyage des navires à quai, pour lesquelles la concurrence internationale est par construction minime, sont concernées. D'autre part, les navires de fret et de service semblent peu soumis à la concurrence internationale, qui s'exprime le plus souvent par la compétitivité-prix, dans la mesure où les rémunérations perçues par les marins employés par ces navires sont comprises entre 2,5 et 4 Smic124(*). A contrario, les emplois relevant de l'activité des navires de transport à passager sont moins qualifiés, et semblent plus sensibles à la compétitivité-prix.

2. Le droit proposé : un retour au périmètre des exonérations « Charges non-Enim » d'avant 2016, au bénéfice des seuls navires de transport de passagers

Le présent article procède au recentrage des exonérations employeur de cotisations d'allocations familiales et de contributions à l'assurance chômage au bénéfice des seuls navires de transports de passagers. Cette mesure réduirait, selon l'étude d'impact, le montant des compensations de de cette exonération par l'État de l'ordre de 20 millions d'euros.

Le 1° du II modifie l'article L. 5553-11 du code des transports en supprimant les mentions de la cotisation d'allocations familiales et de la contribution à l'assurance chômage dans les allègements dont bénéficie l'ensemble des entreprises d'armement maritime.

Le 2° du même II insère un alinéa au sein de l'article du même code, qui ouvre le bénéfice des exonérations précitées aux seuls équipages exerçant à bord de navires de transports de passagers au sens de la convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine en mer, faite à Londres le 1er novembre 1974.

C. La suppression des exonérations de cotisations sociales employeur dont bénéficient la majorité des jeunes entreprises innovantes accompagne le recentrage fiscal de ce dispositif

1. Le droit en vigueur : les différents régimes de jeunes entreprises mobilisent les exonérations de cotisations sociales en faveur du soutien à l'innovation

a) Une multiplication des dispositifs de soutien aux jeunes entreprises

Le dispositif des « jeunes entreprises innovantes » (JEI)125(*) a été créé dès 2003 afin de favoriser les dépenses de recherche des petites et moyennes entreprises (PME) récemment créées. Ayant subi de nombreux ajustements depuis sa création, sa finalité et ses caractéristiques principales demeurent les mêmes : soutenir la diffusion de l'innovation dans l'ensemble des territoires et du tissu économique national en accordant le bénéfice de dispositions sociales et fiscales dérogatoires.

La loi de finances pour 2024126(*) est venue rénover le dispositif de la JEI ainsi que celui de la jeune entreprise de croissance (JEC) et créé la jeune entreprise universitaire (JEU).

• Les critères rénovés ouvrant au régime de la JEI supposent que, à la clôture de son exercice, l'entreprise concernée :

- soit composée de moins de 250 salariés ;

- réalise un chiffre d'affaires inférieur à 50 millions d'euros, ou enregistre un bilan inférieur à 43 millions d'euros ;

- ait été créée depuis moins de huit ans ;

- soit détenue directement ou indirectement à 50 % au moins par des personnes physiques ou par des sociétés d'investissement127(*), des associations reconnues d'utilité publique à caractère scientifique, des établissements publics de recherche ou une société elle-même qualifiée de jeune entreprise innovante ;

- n'ait pas été créée dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension d'activités préexistantes ou d'une reprise de telles activités.

En plus de ces critères structurels, l'entreprise prétendant au statut du JEI doit réaliser des dépenses de recherche représentant au moins 15 % de ses charges fiscalement déductibles au titre de cet exercice.

• Les jeunes entreprises universitaires (JEU) ont été créées en 2008, comme catégorie spécifique de JEI. Les JEU ne se voient pas imposer la condition de dépenses consacrées à la recherche et au développement, mais en contrepartie elles doivent être détenues au moins à 10 % par des étudiants ou du personnel lié à l'université128(*) et d'inscrire de manière principale son activité dans la valorisation des travaux de recherche d'un de ses actionnaires.

La catégorie des jeunes entreprises de croissance (JEC) a été créée par la loi de finances pour 2024129(*), et concerne les entreprises répondant aux mêmes conditions que les JEI mais dont les dépenses de recherche et développement représentent au moins 5 % de leur bilan. En revanche, les entreprises prétendant au statut de JEC doivent répondre à des critères de performance économique définis par voie réglementaire130(*) :

- avoir connu une augmentation d'au moins 100 % de leur effectif, avec un plancher à dix salariés, par rapport à la clôture de l'exercice de l'année n-2 ;

- avoir maintenu le montant de leurs dépenses de recherche par rapport à l'exercice précédent.

b) Les jeunes entreprises bénéficient de dispositifs fiscaux et sociaux dérogatoires constituant un avantage comparatif déterminant

• Sur le plan fiscal, les JEI bénéficient d'une exonération de l'impôt sur le revenu ou sur les sociétés pour leur premier exercice bénéficiaire si elles ont été créées avant le 31 décembre 2023131(*), et peuvent bénéficier, le cas échéant, d'une délibération des communes et de leurs groupements les exonérants pour sept ans de cotisation foncière des entreprises (CFE)132(*) et de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB)133(*) si elles ont été créées avant le 31 décembre 2025. Depuis le 1er janvier 2025, l'exonération de l'impôt sur le revenu ou les sociétés a été remplacée par une réduction de l'impôt sur le revenu au titre de la « réduction Madelin »134(*).

• Sur le plan du régime social, les JEI bénéficient d'une exonération de cotisations à la charge de l'employeur pour les seuls revenus d'activité versés aux salariés des jeunes entreprises innovantes et aux mandataires sociaux participant à titre principal aux projets de recherche135(*). Ces exonérations sont cependant limitées à l'assiette des rémunérations inférieures à 4,5 fois le Smic, et plafonnées à cinq fois le plafond annuel de la sécurité sociale la même année.

c) Le régime social de faveur dont bénéficient les jeunes entreprises utilise le levier social pour financer l'innovation

Les exonérations de charges patronales dont bénéficient les jeunes entreprises concernent une échelle de rémunération largement supérieure aux allègements généraux, puisqu'elle s'étend jusqu'à 4,5 Smic contre 3,5 dans le droit commun en vigueur, et atteint un taux d'exonération plus élevé.

L'augmentation du nombre d'établissements et de salariés concernés par ce régime a conduit au doublement de la masse d'exonération de cotisations sociales entre 2014 et 2023, passant de 139 millions à 270 millions d'euros (hors JEC).

Source : annexe 2 du Placss 2023

Si ces exonérations ne pèsent pas sur l'équilibre des finances sociales, dans la mesure où elles sont financées par la mission « Recherche et enseignement supérieur » du budget de l'État, elles limitent néanmoins la lisibilité du financement de l'innovation. Ce manque de lisibilité est d'autant plus marqué que, par le jeu des revalorisations progressives du Smic liées à l'inflation qui a alimenté le montant des exonérations, le volet social du dispositif JEI représentait déjà 96 % de la dépense publique en faveur de ces entreprises en 2022.

2. Le droit proposé : un recentrement des dispositifs des jeunes entreprises passant par une suppression des exonérations de cotisation sociales

Le III du présent article modifie le I de l'article 131 de la loi de finances pour 2004, en restreignant le champ d'application de l'exonération de cotisations employeur aux seules entreprises remplissant l'ensemble des critères propres aux jeunes entreprises universitaires (JEU).

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

Le Gouvernement a transmis cet article au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

Ces dispositions répondent à la nécessité de rationaliser les exonérations de cotisations sociales, qui participent à la désocialisation du financement de la protection sociale, et contribuent à l'illisibilité des régimes par empilement successifs de dispositifs dérogatoires.

Concernant les apprentis, la commission rejoint l'intérêt d'assujettir les rémunérations à la CSG/CRDS dans un contexte où le recours à l'apprentissage a doublé en quelques années. Cette exonération intégrale suscitait des interrogations, dans la mesure où il s'agissait de la seule rémunération d'activité en bénéficiant, alors même que la situation des apprentis était très proche d'autres publics - tel que les stagiaires - qui n'en avaient jamais bénéficié.

La commission est sensible à l'effet nominal de « perte de salaire » pour les apprentis en cours de contrat d'apprentissage, qui verraient leur rémunération baisser au 1er janvier 2024, et a pu s'interroger sur une limitation du dispositif aux seuls contrats nouvellement créés. Cependant, cette voie conduirait à une inégalité difficile à justifier pour deux apprentis au sein d'une même entreprise. Par ailleurs, la revalorisation de 2 % du Smic au 1er janvier 2024 - sur lequel est indexée la rémunération des apprentis - compensera cette perte pour les apprentis dont la rémunération est la plus proche de 0,5 Smic.

Concernant les exonérations au bénéfice des employeurs du secteur maritime, la commission partage la nécessité de limiter le bénéfice de ce dispositif aux seuls contrats effectivement soumis à une concurrence internationale, c'est-à-dire à ceux qui sont signés dans les domaines d'activité à haute intensité de main d'oeuvre peu qualifiée.

Enfin, au sujet du dispositif en faveur des jeunes entreprises innovantes, la commission considère que les exonérations sociales ne sont peut-être pas le vecteur à privilégier pour le soutien à l'innovation. Cependant, il convient que le recentrage du soutien à l'innovation sur le volet fiscal et sur le financement direct de l'innovation en faveur des PME, annoncé par le Gouvernement, soit effectif. À défaut, le présent article conduirait in fine à limiter la diffusion de l'innovation dans le tissu économique français.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article additionnel après l'article 7
Contribution de solidarité par le travail en faveur de l'autonomie des personnes âgées et des personnes en situation de handicap

Cet article additionnel vise à augmenter de sept heures la durée annuelle de travail, remplaçant l'actuelle journée de solidarité par une contribution de solidarité par le travail, en vue de renforcer le financement des actions en faveur des personnes âgées et des personnes en situation de handicap.

La commission propose d'adopter cet article additionnel ainsi rédigé.

I - Depuis 2004, la « journée de solidarité » finance des actions en faveur de l'autonomie des personnes âgées et des personnes en situation de handicap

A. Le principe et les modalités d'accomplissement de la journée de solidarité

1. Le principe de la journée de solidarité

La journée de solidarité a été instituée par la loi du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées136(*), en vue de financer des actions dans le champ de l'autonomie. Elle faisait partie d'un vaste plan gouvernemental de solidarité pour l'autonomie, présenté à la suite de la canicule de l'été 2003 qui avait mis en lumière les insuffisances de l'accompagnement des personnes âgées en France.

Concrètement, pour les travailleurs du secteur privé et du secteur public, la journée de solidarité prend la forme d'une journée de travail supplémentaire non rémunérée137(*). En contrepartie, les employeurs versent à l'État la contribution de solidarité pour l'autonomie (CSA), au taux de 0,3 %.

2. Les modalités d'accomplissement de la journée de solidarité

a) Dans le secteur privé

En application de l'article L. 3133-11 du code du travail, les modalités d'accomplissement de la journée de solidarité sont fixées par accord collectif (accord d'entreprise ou d'établissement, convention ou accord de branche). Cet accord peut prévoir que la journée de solidarité se traduit par :

- le travail d'un jour férié précédemment chômé autre que le 1er mai ;

- le travail d'un jour de repos accordé au titre de l'accord collectif relatif au temps de travail ;

- ou toute autre modalité permettant le travail de sept heures précédemment non travaillées en application de stipulations conventionnelles ou des modalités d'organisation des entreprises.

Initialement, à défaut d'accord collectif, la journée de solidarité était fixée au lundi de Pentecôte, se traduisant par la suppression d'un jour férié. En 2008, le législateur a souhaité introduire davantage de souplesse en prévoyant que désormais, l'employeur peut définir unilatéralement les modalités d'accomplissement de la journée de solidarité après consultation du comité social et économique138(*).

b) Dans le secteur public

Pour les fonctionnaires et agents non titulaires des fonctions publiques, la journée de solidarité peut être accomplie selon les mêmes modalités que dans le secteur privé, détaillées ci-avant. Elles sont fixées :

- dans la fonction publique territoriale, par une délibération de l'organe exécutif de l'assemblée territoriale compétente, après avis du comité technique concerné ;

- dans la fonction publique hospitalière, par une décision des directeurs des établissements, après avis des instances concernées ;

- dans la fonction publique de l'État, par un arrêté du ministre compétent pris après avis du comité technique ministériel concerné.

3. L'extension du dispositif aux pensions de retraite et d'invalidité

En 2013, par souci d'égalité, le législateur a étendu le dispositif aux retraités via la création de la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie (Casa).

La Casa est prélevée au taux de 0,3 % sur les retraites, les pensions d'invalidité et les allocations de préretraite. Les bénéficiaires de l'allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa) et de l'allocation supplémentaire d'invalidité (Asi) en sont exonérés139(*).

B. L'affectation des recettes de la journée de solidarité à la branche autonomie de la sécurité sociale

1. La contribution de solidarité pour l'autonomie (CSA)

La mise en place de la journée de solidarité a eu pour corollaire la création de la contribution de solidarité pour l'autonomie (CSA).

Ce prélèvement social constitue la contrepartie financière de la journée de travail supplémentaire dont bénéficient les employeurs. La CSA, versée à l'État par les employeurs, est fixée au taux de 0,3 % ce qui correspond à la valeur ajoutée estimée produite en une journée de travail.

La CSA est assise sur la même assiette que les cotisations patronales d'assurance maladie, soit la masse salariale, et recouvrée dans les mêmes conditions que lesdites cotisations. Elle est versée chaque mois via la déclaration sociale nominative (DSN).

2. Le produit de la contribution de solidarité pour l'autonomie et son utilisation par la CNSA

Le produit de la CSA est affecté à la Caisse nationale de solidarité par l'autonomie (CNSA)140(*), également créée par la loi du 30 juin 2004141(*). Celle-ci a pour principale mission de contribuer au financement de l'accompagnement de la perte d'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées, dans le respect de l'égalité de traitement des personnes concernées sur l'ensemble du territoire142(*). Depuis le 1er janvier 2021, elle assure la gestion de la branche autonomie de la sécurité sociale143(*).

D'après les données de la CNSA, en 2023, la journée de solidarité a rapporté 2,4 milliards d'euros à la branche autonomie via le produit de la CSA. La Casa a quant à elle rapporté 0,9 milliard d'euros144(*). En vingt ans, au total, la journée de solidarité a rapporté 40 milliards d'euros au bénéfice des personnes âgées et des personnes en situation de handicap.

Produit de la contribution de solidarité pour l'autonomie (CSA)

(en milliards d'euros)

Source : Rapport de Laurent Vachey (2020) et CNSA

La journée de solidarité représente près de 6,5 % des ressources de la branche en 2023 (8,9 % en incluant la Casa). Sa part s'est progressivement réduite sous l'effet de la progression des dépenses de la branche autonomie (+23 % entre 2021 et 2024) et de la diversification des ressources qui lui sont affectées.

Affectées à la CNSA, les sommes récoltées au titre la journée de solidarité contribuent à financer145(*) :

- le fonctionnement et la modernisation des établissements et services médico-sociaux qui accueillent des personnes âgées et des personnes en situation de handicap ;

- la couverture d'une partie des dépenses des conseils départementaux en matière d'allocation personnalisée d'autonomie (APA) et de prestation de compensation du handicap (PCH) ;

- le fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) ;

- des actions de prévention de la perte d'autonomie ;

- de nouvelles formes d'habitat pour les personnes âgées et les personnes en situation de handicap comme l'habitat inclusif et l'accueil familial ;

- l'accompagnement des proches aidants de personnes en perte d'autonomie.

II - Le dispositif proposé : instituer une contribution de solidarité par le travail pour répondre aux besoins dans le champ de l'autonomie

A. Le constat : la branche autonomie fait face à des besoins de financement élevés et incompressibles

1. Les besoins, déjà élevés, vont poursuivre leur progression

La branche autonomie de la sécurité sociale fait face à des besoins de financement structurels, auxquels il ne sera pas possible de répondre sans la création de ressources nouvelles.

Dans le champ du grand âge, la hausse des besoins est principalement liée à des déterminants démographiques. Le vieillissement de la population, qui s'explique à la fois par l'arrivée des générations du « baby-boom » à des âges élevés et par l'amélioration de l'espérance de vie, se traduit par une hausse du nombre de personnes en risque de perte d'autonomie. Selon les évaluations de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees), l'effectif des personnes âgées en perte d'autonomie, estimé à 1,3 million de personnes en 2022, devrait atteindre près de 2 millions à horizon 2050146(*).

Dans ce contexte et au regard de la multiplicité des enjeux qui entourent d'ores et déjà la politique du grand âge - déploiement du virage domiciliaire, adaptation de l'offre des établissements d'hébergement des personnes âgées dépendantes (Ehpad) et autres établissements et services médico-sociaux, attractivité des métiers, renforcement de la prévention -, le rapport Libault a estimé qu'à horizon 2030, les besoins de financements supplémentaires s'élèvent à 10,4 milliards d'euros par rapport à 2018 pour le seul champ de l'autonomie des personnes âgées147(*).

S'agissant du handicap, la satisfaction des besoins impliquera nécessairement une hausse des moyens alloués. D'une part, l'amélioration de la reconnaissance des handicaps et des réponses médico-sociales apportées induit automatiquement une hausse des dépenses, bien qu'un renforcement de la politique de prévention serait de nature à l'atténuer. En outre, de même que pour le grand âge, le renforcement de l'attractivité des métiers de l'accompagnement exigera l'investissement de moyens supplémentaires.

Enfin, en sus de ces défis structurels, il convient de souligner que les perspectives financières de la branche autonomie, à périmètre inchangé, se sont dégradées sous l'effet du financement de mesures récentes d'une part, et du moindre dynamisme économique d'autre part. Le présent PLFSS anticipe un solde négatif de -0,4 milliard d'euros pour l'année 2025148(*), et de -2,5 milliards d'euros en 2028149(*).

Perspectives pluriannuelles des comptes de la branche autonomie

(en milliards d'euros)

 

2024 (p)

2025 (p)

2026 (p)

2027 (p)

2028 (p)

Recettes

40,9

42

42

43,9

45,1

Dépenses

40

42,4

44

45,7

47,6

Solde

0,9

- 0,4

- 1,9

- 1,8

- 2,5

Source : PLFSS 2025

2. Dans ce contexte, il apparaît opportun de faire appel à la solidarité par le travail

Afin d'apporter rapidement des solutions de financement en faveur de la politique de l'autonomie, la commission considère, dans le droit-fil des conclusions de son récent rapport sur la situation des Ehpad150(*), que la solidarité par le travail apparaît la plus indiquée.

Au regard du contexte économique et du niveau déjà très élevé des prélèvements obligatoires, la hausse du niveau de la contribution sociale généralisée (CSG) ou de la taxe sur les salaires, qui sont les deux autres principales sources de financement de la CNSA, pénaliserait le pouvoir d'achat des ménages ou augmenterait le coût du travail, ce qui risquerait de freiner l'activité économique.

À l'inverse, l'impact d'une augmentation de sept heures de la durée annuelle de travail serait bénéfique à l'activité économique, tout en renforçant nettement les moyens affectés à la politique de l'autonomie. Le rapport de Laurent Vachey sur la branche autonomie151(*) estimait, en 2020, que l'impact brut sur les finances publiques serait d'environ 2,3 milliards d'euros et l'effet net de l'ordre de 1,9 milliard d'euros, en prenant en compte la contribution versée par les employeurs publics.

La commission est pragmatique s'agissant de l'avenir de la politique de l'autonomie : sans ressources nouvelles, il sera impossible de répondre aux besoins identifiés dans les champs du grand âge et du handicap.

Elle considère que l'augmentation de sept heures de la durée annuelle de travail permettrait d'apporter une première solution, rapide et pérenne, à ces besoins. Alors que la durée de travail des salariés français à temps plein reste l'une des plus faibles en Europe, la contribution des travailleurs, par le biais de quelques heures de travail supplémentaires, aux mesures destinées à l'autonomie apparaît justifiée. Elle l'est d'autant plus que chaque individu ou presque est un jour concerné, directement ou indirectement, par la question de la perte d'autonomie.

La commission estime ainsi que le gain de ressources, estimé à 2,5 milliards d'euros, est indispensable pour préserver l'accompagnement des personnes âgées, des personnes en situation de handicap et de leurs aidants face à la croissance des besoins. Cette première mesure devra s'accompagner d'une réflexion plus globale sur la réforme du secteur médico-social, qu'il s'agisse des établissements ou de l'aide à domicile, afin d'en renforcer les moyens et d'en simplifier le fonctionnement.

B. Le dispositif proposé : l'augmentation de sept heures de la durée annuelle de travail en faveur de l'autonomie

L'amendement n°125, présenté par la rapporteure générale, propose de porter le nombre d'heures de travail annuelles effectuées au titre de la solidarité pour l'autonomie à quatorze au lieu de sept. Le dispositif est renommé « contribution de solidarité par le travail » et reprend en grande partie les conditions existantes pour la journée de solidarité, en donnant toutefois un maximum de souplesse aux acteurs de terrain pour en déterminer les modalités.

1. Les modalités d'accomplissement des sept heures de travail

Le I modifie la section 3 du chapitre III du titre III du livre Ier de la troisième partie du code du travail.

La section est rebaptisée « Contribution de solidarité par le travail » ( du I). Cette contribution est inscrite à l'article L. 3133-7 du code du travail, en lieu et place de la journée de solidarité. Elle prend la forme d'un temps de travail supplémentaire non rémunéré pour les salariés, et de la contribution de solidarité pour l'autonomie (CSA) pour les employeurs ( du I).

Le du I prévoit qu'un accord d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche fixe les modalités d'accomplissement des heures de travail effectuées au titre de la contribution de solidarité par le travail. Cet accord peut prévoir toute modalité permettant le travail de quatorze heures précédemment non travaillées en application de stipulations conventionnelles ou des modalités d'organisation des entreprises, à l'exception d'heures de travail effectuées le 1er mai. À défaut d'accord collectif, ces modalités sont définies par l'employeur après consultation du comité social et économique (du I).

Le du I dispose que le travail accompli dans le cadre de la contribution de solidarité par le travail, qui ne peut excéder quatorze heures, ne donne pas lieu à rémunération. Pour les salariés à temps partiel, la durée de travail accomplie dans le cadre de cette contribution est réduite proportionnellement à la durée contractuelle.

Le précise que les heures effectuées ne s'imputent pas sur le contingent annuel d'heures supplémentaires et ne donnent lieu à aucune contrepartie obligatoire sous forme de repos.

Le prévoit une disposition pour qu'un salarié qui change d'employeur en cours d'année conserve, à son actif, les heures déjà réalisées au titre de la contribution de solidarité par le travail.

Le III et le V appliquent la contribution de solidarité par le travail à la fonction publique. Il précise quelles sont les autorités compétentes pour fixer les modalités de sa mise en oeuvre dans les fonctions publiques de l'État, hospitalière et territoriale en reprenant les dispositions existantes pour la journée de solidarité. Comme pour le secteur privé, les employeurs publics peuvent décider de toute modalité permettant le travail de quatorze heures précédemment non travaillées.

Le II et le IV opèrent diverses coordinations. Les modalités d'application de la contribution de solidarité par le travail dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin sont précisées afin de tenir compte du régime concordataire ( du II et IV). Le dispositif ne s'applique pas à Saint-Pierre-et-Miquelon ( du II).

2. La contribution versée par les employeurs

En contrepartie de la hausse de sept heures de la durée annuelle de travail, le VI modifie le premier alinéa de l'article L. 137-40 du code de la sécurité sociale, afin de porter le montant de la contribution de solidarité pour l'autonomie (CSA) au taux de 0,6 % contre 0,3 % aujourd'hui. Son assiette et les modalités de son recouvrement restent inchangées.

Dès 2025, le produit de la CSA devrait ainsi doubler et s'établir aux alentours de 5 milliards d'euros - contre 2,5 milliards d'euros attendus pour l'année 2024 -, augmentant d'autant les recettes perçues par la CNSA.

3. L'entrée en vigueur du dispositif

Le VII dispose que le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2025.

La commission propose d'adopter cet article additionnel dans la rédaction de l'amendement n° 125.

Article 7 bis (nouveau)
Suppression du critère fiscal d'assujettissement à la CSG et à la CRDS
et précision de l'obligation incombant aux bénéficiaires de pensions
de vieillesse résidant à l'étranger de justifier annuellement
de leur existence par la production d'un certificat de vie délivré
par le consulat français

Cet article inséré par l'Assemblée nationale procède à deux modifications distinctes. En premier lieu, il supprime l'un des deux critères d'assujettissement à la contribution sociale généralisée (CSG) et à la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) qu'est la domiciliation fiscale en France.

En second lieu, il précise les modalités de contrôle annuel de l'existence des bénéficiaires de pensions de vieillesse des régimes de retraite obligatoire résidant à l'étranger, en créant une obligation incombant à ces bénéficiaires de fournir un certificat de vie délivré par le consulat français de leur pays de résidence.

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

I - Le dispositif proposé : soumettre les retraités vivant à l'étranger et percevant des pensions de régimes français à la CSG et à la CRDS, ainsi qu'à l'obligation de fournir annuellement un certificat d'existence de vie délivré par le consulat français de leur pays de résidence.

A. Le droit existant : l'assujettissement à la CSG et à la CRDS est subordonné à un double critère fiscal et social

1. Nature juridique de la CSG et de la CRDS

a) La contribution sociale généralisée (CSG)

La contribution sociale généralisée (CSG) est un impôt au sens de l'article 34 de la Constitution, ainsi qu'une cotisation sociale au sens de l'article 13 du règlement CEE n° 1408/71, dans la mesure où son affectation est exclusivement dédiée au financement de la protection sociale. Elle a été créée par la loi de finances pour 1991152(*), afin de diversifier le mode de financement de la protection sociale, et codifiée par la loi du 22 juillet 1993 relative aux pensions de retraite et à la sauvegarde de la protection sociale. Elle est prélevée sur les revenus d'activité, de remplacement (pension de retraite, allocation chômage), du patrimoine et de placements. Ses recettes sont supérieures à 100 milliards d'euros par an et sont affectées à l'assurance maladie, aux prestations familiales, au Fonds de solidarité vieillesse ainsi qu'à la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA). Son taux varie en fonction du type de revenus : il est actuellement de 9,2 % sur les revenus d'activité, du patrimoine et de placement, de 8,3 % sur les pensions de retraite et d'invalidité au taux normal153(*) et de 6,2 % pour les indemnités journalières et allocations chômage.

b) La contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS)

La contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) est un impôt affecté au remboursement de la dette sociale qui a été institué par l'ordonnance du 24 janvier 1996, initialement pour une durée de 13 ans. Son existence a ensuite été prolongée jusqu'à l'extinction des missions de la caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades), à laquelle son produit est affecté. Son assiette est assise sur toutes les catégories de revenus d'activité, de remplacement et du capital, et elle est soumise à un taux de 0,5 % qui n'a pas évolué depuis sa création.

2. Conditions d'assujettissement à la CSG et à la CRDS

a) L'assujettissement à la CSG et à la CRDS est soumis à un double critère social et fiscal

Les conditions d'assujettissement à la CSG et à la CRDS sont codifiées à l'article L. 136-1 du code de la sécurité sociale, et relèvent de deux ordres : les assurés doivent d'une part être domiciliés fiscalement en France, et d'autre part être à la charge d'un régime obligatoire français d'assurance maladie.

Ainsi, ne sont pas redevables de la CSG et de la CRDS :

- un ressortissant français résidant en France mais qui exerce une activité salariée dans un autre État membre, et qui est en conséquence rattaché au régime de sécurité sociale de ce dernier ;

- un retraité qui perçoit une pension de retraite d'un des régimes obligatoires de la sécurité sociale mais qui vit et est domicilié fiscalement à l'étranger.

b) Ces critères répondent à des impératifs conventionnels

La Cour de justice des communautés européennes a estimé que l'affectation sociale de la CSG sur les revenus d'activité et de remplacement lui confère la nature juridique d'une cotisation et non d'un impôt.

En conséquence, elle a considéré154(*) que la CSG et la CRDS relevaient de la règle de l'unicité de la législation applicable155(*), selon laquelle une personne ne peut relever que de la législation d'un seul État membre pour les prestations et les contributions et cotisations qui s'y rapportent. Cette position a ensuite été reprise par la Cour de cassation156(*).

La CJCE, devenue la Cour de justice de l'Union européenne, a également eu l'occasion de rappeler157(*) que la règlementation européenne prohibait toute norme de niveau national qui aurait pour effet qu'un travailleur européen résidant dans un État membre et affilié au régime de sécurité sociale d'un autre État membre contribue au financement du régime de sécurité sociale de son État de résidence, auquel il n'est pas affilié. Il verserait alors des contributions à fonds perdus qui ne lui accorderaient aucun bénéfice. Une telle situation constitue une entrave à la libre circulation des travailleurs et génère une inégalité de traitement avec les personnes résidant dans ce même État qui sont uniquement tenues de cotiser au régime de sécurité sociale de celui-ci.

Le critère de domiciliation fiscale en France conditionnant l'assujettissement à la CSG et à la CRDS permet d'éviter que des citoyens français résidant dans un autre État membre et qui seraient affiliés au régime de sécurité social de cet État, puissent être assujettis à la CSG et à la CRDS et se retrouvent dans une situation qui ne serait pas conforme au droit européen.

B. L'obligation annuelle de rapporter la preuve d'être en vie incombant aux retraités percevant des pensions des régimes obligatoires de la sécurité sociale

1. Les retraités percevant des pensions de régimes français et vivant à l'étranger doivent justifier annuellement de leur existence

La Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav) verse chaque année 3,8 milliards de pensions de retraite à des retraités vivant à l'étranger.

Afin de lutter contre la fraude en matière sociale, la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013 a créé en son article 83 l'obligation, pour les bénéficiaires d'une pension de vieillesse d'un régime de retraite obligatoire résidant à l'étranger, de fournir au moins une fois par an à leur caisse de retraite un justificatif d'existence. À défaut, ils encourent la suspension du versement de leur pension de retraite. Il était également prévu que les régimes obligatoires de retraite puissent mutualiser la gestion des certificats d'existence. Ce justificatif d'existence prend souvent la forme d'un certificat de vie. Afin de faciliter les démarches des assurés, la France a conclu des conventions bilatérales d'échanges automatiques de données d'état civil avec le Luxembourg, l'Allemagne, la Suisse, la Belgique, l'Espagne et l'Italie.

2. Cette preuve peut désormais être apportée en utilisant la biométrie

La loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021 a réécrit ces dispositions, qui figurent désormais aux articles L. 161-24 et suivants du code de la sécurité sociale, en complétant le dispositif précité. Les bénéficiaires d'une pension de retraite d'un régime français vivant à l'étranger peuvent désormais rapporter la preuve de leur existence par l'utilisation de dispositifs permettant l'usage de données biométriques, dans des conditions précisées par décret en Conseil d'État pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés.

Concrètement, les retraités vivant à l'étranger peuvent utiliser une application permettant la comparaison entre une photographie ou vidéo de leur visage prise avec leur smartphone, et une pièce d'identité biométrique.

C. Le dispositif proposé : la suppression du critère fiscal d'assujettissement à la CSG et à la CRDS et l'obligation pour les bénéficiaires de pension de vieillesse des régimes de retraite obligatoire résidant à l'étranger de fournir un certificat de vie

1. La suppression du critère fiscal permettrait d'assujettir à la CSG et à la CRDS les retraités percevant des pensions de régime français et vivant à l'étranger

L'article 7 bis prévoit en son 1° de modifier l'article L. 136-1 du code de la sécurité sociale, qui détaille les critères d'assujettissement à la CSG et à la CRDS, afin de supprimer au 1° la condition de domiciliation fiscale en France.

En réaction à la dégradation brutale et non anticipée du déficit public, et notamment de la branche vieillesse, les députés auteurs de l'amendement adopté avaient pour intention de soumettre les retraités percevant des pensions de retraite versées par des organismes français à la CSG ainsi qu'à la CRDS, afin de participer à l'effort collectif de redressement des comptes publics.

2. La lutte contre la fraude sociale serait renforcée par l'obligation, pour les retraités vivant à l'étranger, de se présenter au consulat français pour obtenir un certificat de vie

Le 2° de l'article 7 bis complète la règle énoncée à l'article L. 161-24 du code de la sécurité sociale, selon laquelle un bénéficiaire d'une pension de vieillesse d'un régime de retraite obligatoire résidant à l'étranger est tenu de justifier annuellement de son existence auprès de l'organisme ou du service de l'État lui versant sa pension, en fournissant un certificat de vie délivré par le consulat français de son pays de résidence.

Cette précision de la preuve de vie attendue, qui serait délivrée par le consulat français, et non plus par un officier public ministériel (notaire) ou une administration d'un pays tiers, permet de renforcer le contrôle du versement des pensions de retraite et la lutte contre la fraude.

Elle n'empêche toutefois pas le recours à l'utilisation de dispositifs permettant l'usage de données biométriques, qui figure à l'article L. 161-24-1 et qui présente ces dispositifs comme des alternatives de preuve matérielle de vie.

II - La position de la commission

La lutte contre la fraude sociale constitue l'une des priorités de la commission des affaires sociales, qui partage la volonté des auteurs de l'article 7 bis de renforcement du contrôle de l'existence des retraités percevant des pensions de vieillesse de régimes obligatoires et vivant à l'étranger.

La commission est néanmoins sensible aux difficultés de déplacement que peuvent rencontrer des personnes âgées pour se rendre au consulat français de leur pays de résidence. Aussi, propose-t-elle d'inverser l'ordre des moyens de preuve par lesquels ces retraités peuvent justifier de leur existence, en priorisant le recours à des systèmes de données biométriques, qu'elle souhaite rendre obligatoires à compter du 1er janvier 2028, tout en permettant aux retraités qui le préfèrent de justifier annuellement de leur existence en fournissant un certificat de vie délivré par le consulat français.

L'utilisation de la biométrie par le biais d'une application à télécharger sur son smartphone, qui compare des vidéos ou photos prises par l'appareil, à une pièce d'identité biométrique, fonctionne selon un système de reconnaissance faciale très fiable, qui permet de lutter efficacement contre la fraude. Ce moyen est facile d'accès pour tous les utilisateurs de smartphone. Aussi, dans un souci de simplification des démarches qui incombent aux retraités vivant à l'étranger, la commission souhaite donner la priorité à ce dispositif.

En revanche, il apparaît que la proposition visant à supprimer le critère de domiciliation fiscale en France comme condition d'assujettissement à la CSG et à la CRDS n'est pas conforme au droit européen du fait de son caractère indistinct. En effet, les retraités vivant à l'étranger, notamment dans un autre pays de l'Union européenne et percevant des pensions de retraite française, sont généralement affiliés au régime de sécurité sociale de leur État de résidence, de sorte qu'ils ne peuvent être soumis à la CSG et à la CRDS sans méconnaître la règle de l'unicité de la législation applicable posée par la CJUE. Sur la proposition du rapporteur de la branche vieillesse, elle a donc adopté un amendement n° 126 afin de maintenir le critère de domiciliation.

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté, qui vise à revenir sur la suppression du critère de domiciliation fiscale comme condition d'assujettissement à la CSG et à la CRDS et à généraliser l'usage de systèmes de données biométriques pour les retraités vivant à l'étranger et percevant des pensions de régimes français.

Article 8
Transferts financiers au sein des administrations de sécurité sociale
et avec le budget de l'État (« article tuyau »)

Cet article tend :

- à modifier la répartition de la taxe sur les salaires pour réaliser divers transferts entre branches (I) ;

- à affecter les excédents du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) à la Cnav (II) ;

- à permettre l'équilibrage par l'État des régimes spéciaux fermés dans le cadre de la réforme des retraites de 2023 (III et V) ;

- à réaliser une coordination avec le plafonnement de la compensation des allégements généraux réalisés par la LFSS pour 2024 (IV).

La commission suggère de modifier le I de cet article pour corriger une erreur matérielle dans les taux et une erreur de référence.

Elle propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

I - Le dispositif proposé 

A. Des transferts entre branches à préciser

Le I du présent article propose, comme chaque année, de réaliser des transferts entre branches de la sécurité sociale, en modifiant la clé de répartition du produit de la taxe sur les salaires, figurant à l'article L. 131-8 du code de la sécurité sociale.

Ces transferts sont synthétisés par le tableau page suivante.

1. Des transferts à mettre en cohérence avec les justifications de l'évaluation préalable

On remarque que les transferts résultant de ces modifications de taux, tels qu'ils résultent de la prévision de taxe sur les salaires figurant dans le rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale d'octobre 2024, sont légèrement différents à la somme des transferts indiqués dans l'évaluation préalable (cf. comparaison des lignes D et I). Les taux devraient en fait être ceux de la dernière ligne du tableau (ligne L).

La direction de la sécurité sociale (DSS) indique qu'il s'agit d'une erreur matérielle (non-prise en compte du transfert de 11,1 millions d'euros de la branche maladie vers la branche famille résultant de l'article 5158(*)), que la commission propose de corriger.

Les transferts de taxe sur les salaires proposés par le présent article

(en millions d'euros)

     

Vieillesse

Famille

Maladie

A

Modifications de l'article L. 131 -8 du code de la sécurité sociale proposées par le présent article

Fraction actuelle (en %)

55,57

15,80

23,55

B

Fraction proposée (en %)

52,96

14,31

27,65

C

Écart (en points)

-2,61

-1,49

4,10

D

Transfert correspondant*

- 465,0

- 265,5

730,5

E

Justifications figurant dans l'évaluation préalable

Réinvestissement dans le système des retraites du rendement généré par la réforme des retraites pour le régime de la fonction publique d'État

69,0

 

- 69,0

F

Article 5 (cumul de l'exonération applicable aux jeunes agriculteurs et des taux réduits de droit commun des cotisations maladie et famille)

 

11,1

- 11,1

G

Article 6 (réforme des allègements généraux de cotisations patronales - transfert discrétionnaire

 

- 266,0

266,0

H

Article 6 (réforme des allègements généraux de cotisations patronales) - répartition de la moindre recette d'IS

- 534,0

 

534,0

I

Total des montants justifiés

- 465,0

- 254,9

719,9

J

Écarts des montants justifiés par rapport aux montants effectivement transférés

0,0

10,6

- 10,6

K

Taux à adopter pour rendre l'article conforme aux justifications de l'évaluation préalable

Augmentations de taux correspondantes (points)

-2,61

-1,43

4,04

L

Taux correspondant aux transferts indiqués dans l'évaluation préalable (%)

52,96

14,37

27,59

* Calcul de la commission des affaires sociales, sur la base du montant de taxe sur les salaires prévu en 2025 par le rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale d'octobre 2024 (17 818 millions d'euros).

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après le présent article et son évaluation préalable

2. Un article indissociable de l'article 38 du PLF

Le tableau ci-avant doit être mis en relation avec l'article 38 du PLF 2025, qui modifie le 9° de l'article L. 131 -8 précité du code de la sécurité sociale pour réduire de 916 millions d'euros la part de TVA affectée à la sécurité sociale (cf. tableau ci-après). On rappelle que l'affectation à un tiers d'une fraction d'une recette fiscale de l'État relève du domaine exclusif de la loi de finances.

La TVA étant perçue par la seule branche maladie (conformément à l'article L. 131-8 précité), il convient ensuite de répartir les sommes concernées entre les différentes branches en modifiant la répartition de la taxe sur les salaires. C'est ce que fait le présent article.

La réduction de la part de TVA affectée à la sécurité sociale par l'article 38 du PLF 2025

(en millions d'euros)

 

Total

Dont branche maladie

Dont Acoss

Fraction actuelle (en %)

28,57

23,39

5,18

Nouvelle fraction (en %)

28,14

22,96

5,18

Écart (en points)

- 0,43

- 0,43

0

Transfert correspondant à la modification de la fraction

- 916

- 916

0

Dont :

     

Compensation des gains de la réforme des retraites de 2023 pour la fonction publique d'État (FPE)

69

69

0

Cumul de l'exonération « jeunes agriculteurs » et des taux réduits de cotisations maladie/famille (art. 5 du PLFSS)

25

25

0

Réforme des allègements généraux (art. 6 du PLFSS) - perte de recettes liée à l'effet - retour sur l'impôt sur les sociétés (IS)

- 1 000

-1 000

0

Reprise de la dotation exceptionnelle à l'Établissement français du sang

- 10

- 10

0

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après l'article 38 du PLF 2025 et son évaluation préalable

On précise que l'article 38 du PLF :

- comprend une réduction de 10 millions d'euros de la TVA affectée à la branche maladie, au titre de la reprise de la dotation exceptionnelle versée en 2024 à l'Établissement français du sang (EFS) (cf. dernière ligne du tableau ci-avant). On rappelle que l'article 70 de la LFSS 2024 a réformé le financement de l'EFS, afin notamment de pérenniser une dotation annuelle versée par l'assurance maladie à l'EFS, qui selon l'étude d'impact devait s'élever à 100 millions d'euros ;

- prévoit que dans le cas particulier de l'exercice 2025, la TVA affectée à la sécurité sociale résultant de la fraction de 5,18 % affectée à l'Acoss (pour lui permettre de compenser les allégements généraux de cotisations patronales pour l'Unédic) est réduite de 3,35 milliards d'euros en 2025 (soit 750 millions d'euros de plus qu'en 2024), au titre de la reprise de même montant sur les excédents de l'Unédic. Il s'agit du montant prévu par un arrêté du 27 décembre 2023159(*). Selon l'évaluation préalable, « pour 2025, l'Unédic a un solde prévisionnel excédentaire de 3 milliards d'euros, net de la reprise des 3,35 milliards d'euros ».

3. Certains transferts indiqués dans l'évaluation préalable n'appellent pas de commentaire particulier

a) Le « réinvestissement dans le système des retraites du rendement généré par la réforme des retraites pour le régime de la fonction publique d'État »

Le « réinvestissement dans le système des retraites du rendement généré par la réforme des retraites pour le régime de la fonction publique d'État »160(*) (ligne E du premier tableau du présent commentaire), de 69 millions d'euros, n'appelle pas de commentaire particulier.

Certes, aucune disposition de la LFRSS 2023 ne prévoit de transfert de la branche maladie vers la branche retraite.

Toutefois un tel transfert, de 194 millions d'euros, a déjà été réalisé par la LFSS 2024, avec l'approbation de la commission. Selon l'évaluation préalable, il s'agit de prendre en compte la « montée en charge de la réforme », impliquant de porter ce montant à 263 millions d'euros.

La compensation à la sécurité sociale est effectuée par l'article 38 du PLF, qui attribue à ce titre 69 millions d'euros à la sécurité sociale, soit concrètement à la branche maladie, seule à percevoir de la TVA.

Il convient donc de réaffecter, au moyen d'une modification de la répartition de la taxe sur les salaires, ces 69 millions d'euros à la branche famille. C'est ce que fait le présent article.

b) La prise en compte de l'article 5 (cumul de l'exonération applicable aux jeunes agriculteurs et des taux réduits de droit commun des cotisations maladie et famille)

L'article 5 du PLFSS permet le cumul de l'exonération applicable aux jeunes agriculteurs et des taux réduits de droit commun des cotisations maladie et famille.

Selon son étude d'impact, il coûte 25 millions d'euros par an. La compensation à la sécurité sociale est effectuée par l'article 38 du PLF, qui attribue à ce titre 25 millions d'euros à la sécurité sociale, soit concrètement à la branche maladie, seule à percevoir de la TVA.

Il convient donc de réaffecter, au moyen d'une modification de la répartition de la taxe sur les salaires, une partie de ces 25 millions d'euros à la branche famille. C'est ce que fait le présent article.

Le montant de taxe sur les salaires que le présent article prévoit de réaffecter à la branche famille, de 11,1 millions d'euros, correspond bien au coût prévisionnel pour la branche figurant dans l'évaluation préalable de l'article 5.

4. La décision de transférer 266 millions d'euros de la branche famille vers la branche maladie dans le cadre de la réforme des allégements généraux

La réforme des allégements généraux par l'article 6 du PLFSS devrait se traduire, selon son évaluation préalable, par des cotisations patronales supplémentaires de 5,1 milliards d'euros, dont 0,3 milliard d'euros pour la branche famille.

Le présent article propose de réaffecter 266 millions d'euros de la branche famille vers la branche maladie, considérant de facto qu'il n'y a pas de raison que les recettes supplémentaires de l'article 6 bénéficient à la branche famille. Certes, l'évaluation préalable de l'article 8 indique qu'il ne s'agit de réaffecter à la branche maladie qu'« une partie de l'effet » dont aurait pu bénéficier la branche famille ; toutefois, si l'on prend en compte le fait que le montant de 0,3 milliard d'euros précité est un arrondi, c'est de fait la quasi-totalité, voire la totalité, de ces recettes supplémentaires, qui seraient transférées de la branche famille à la branche maladie.

B. Autres dispositions du présent article

1. L'affectation des excédents du FSV à la Cnav

Le II du présent article prévoit que lorsque, à la clôture d'un exercice, le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) présente un résultat excédentaire, celui-ci est transféré, à hauteur d'un montant fixé par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget, à la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav), qui l'enregistre en fonds propres dans ses comptes.

Les sommes en jeu pourraient être significatives, comme le montre le tableau ci -après.

Prévisions du présent PLFSS pour les recettes, dépenses et solde du FSV

(en milliards d'euros)

 

2023

2024 (p)

2025 (p)

2026 (p)

2027 (p)

2028 (p)

Recettes

20,4

21,4

22

22,8

23,5

24,2

Dépenses

19,3

20,6

21,3

21,9

21,6

21,1

Solde

1,1

0,8

0,7

0,9

1,9

3,1

Source : PLFSS 2025

Selon l'évaluation préalable du présent article, « cette affectation est estimée à 0,8 milliard d'euros en 2025 pour l'exercice 2024 et à 0,7 milliard d'euros en 2026 pour l'exercice 2025 ». C'est donc la totalité des excédents prévisionnels de 2024 et 2025 qui serait ainsi transférée.

L'excédent actuel et prévu du FSV vient notamment du fait que celui-ci finance non seulement le minimum vieillesse, mais aussi les cotisations d'assurance vieillesse des chômeurs, d'autant plus faibles que le taux de chômage est faible.

Cette disposition correspond à une simple opération financière, sans effet sur le solde de la Cnav et du FSV.

2. Deux dispositions destinées à permettre l'équilibrage par l'État des régimes spéciaux fermés dans le cadre de la réforme des retraites de 2023

L'article 15 de la LFSS 2024 prévoit qu'à partir du 1er janvier 2025, la Cnav devra équilibrer deux régimes spéciaux déficitaires - la Caisse de prévoyance et de retraite du personnel ferroviaire (CPRPF) et la caisse de retraites du personnel de la RATP (CRP RATP) - à la place de l'État.

La Cnav doit percevoir pour ce faire des crédits budgétaires prévus en loi de finances.

Ainsi, le III du présent article modifie l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale, qui détermine les contributions assurant la couverture des charges de l'assurance vieillesse. Il y ajoute en effet les sommes versées par l'État pour l'équilibre de la CPRPF et de la CRP RATP dans le cadre de la réforme des retraites de 2023.

Le droit actuel prévoit que l'équilibrage de la CPRPF et de la CRP RATP est réalisé à compter de l'exercice au cours duquel ces régimes auraient épuisé leurs réserves. Selon les termes de l'évaluation préalable du présent article, « il est proposé dans un souci de simplification de prévoir que les réserves qui ne suffisent pas à faire face aux engagements pour 2025 soient transférées à la branche vieillesse qui aura en tout état de cause à assurer l'équilibrage du système pour ce même exercice ».

Aussi, le V du présent article prévoit que les fonds propres, tels que constatés à la clôture de l'exercice 2024, de la CPRPF et de la CRP RATP, « font l'objet, au plus tard le 30 juin 2025, d'une reprise par la Caisse nationale d'assurance vieillesse, qui les enregistre en fonds propres dans ses propres comptes ». Il est précisé que « les modalités de cette reprise, ainsi que des actifs correspondants, sont fixées par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget ». En effet, selon les termes de l'évaluation préalable, « l'opération ne pouvant être définitivement fixée qu'à la clôture de l'exercice 2024, il est proposé que le montant exact du transfert soit fixé par arrêté début 2025 après cette clôture ».

3. Une disposition de coordination avec le plafonnement de la compensation à l'Unédic des allégements généraux résultant de la LFSS 2024

Enfin, le IV du présent article prévoit, selon les termes de l'exposé des motifs, de « mettre en cohérence le taux de prélèvement au titre du risque de non-recouvrement avec le périmètre des sommes qui sont effectivement versées à l'Unédic ».

On rappelle que l'article 16 de la LFSS 2024 (« article-tuyau ») a modifié le 7° bis de l'article L. 225-1-1 du code de la sécurité sociale pour prévoir que la compensation par l'Acoss à l'Unédic du dispositif de réduction dégressive des contributions patronales d'assurance chômage se fait « dans la limite d'un montant fixé par arrêté des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget ».

Actuellement, le troisième alinéa du 5° bis de l'article L. 225-1-1 précité prévoit que les sommes versées par l'Urssaf aux différents régimes sont égales au « montant des sommes dues par les redevables, après application d'un taux forfaitaire fixé au regard du risque de non-recouvrement d'une partie de ces sommes ».

Il en résulte que bien que la compensation par l'Acoss à l'Unédic des allégements de cotisations sociales patronales ait été réduite par l'article 16 de la LFSS 2024, le prélèvement sur l'Unédic au titre du non-recouvrement est calculé sans prendre en compte cette réduction.

Le IV du présent article propose donc de compléter le 7° bis de l'article L. 225-1-1 précité pour prévoir que « les sommes excédant [le montant de la compensation par l'Acoss] ne peuvent se voir appliquer le taux forfaitaire » prévu au troisième alinéa du 5°.

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

Le Gouvernement a transmis cet article au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

Comme indiqué supra, le présent article prévoit un transfert de 266 millions d'euros de la branche famille vers la branche maladie, correspondant à peu près au montant estimé du supplément de cotisations patronales permises par la réforme des allégements généraux par l'article 6 (0,3 milliard d'euros selon l'évaluation préalable de l'article 6).

Dans le cadre de l'examen du PLFSS 2024, le Sénat, à l'initiative de sa commission des affaires sociales, a adopté un amendement majorant de 2 milliards d'euros la part de la taxe sur les salaires affectée à la branche famille et diminuant à due concurrence celle affectée à la branche maladie.

En effet, l'article 20 de la LFSS 2023 avait transféré à la Cnaf 60 % de la charge des indemnités journalières (IJ) pour congé de maternité et l'intégralité des IJ relatives à l'adoption et à l'accueil de l'enfant. Le Gouvernement n'avait pas transféré les ressources correspondantes. La commission considère à la fois, d'une part, que ce transfert ne se justifiait pas et, d'autre part, qu'il symbolise l'absence d'ambition de la politique familiale du précédent Gouvernement alors même que l'évolution du taux de natalité devait figurer au premier rang de ses préoccupations.

La commission est toutefois consciente du fait que la dégradation de la situation des finances publiques en 2024 ne permet pas de transférer 2 milliards d'euros de cette branche vers la branche famille.

Si le transfert de 266 millions d'euros de la branche famille vers la branche maladie peut s'expliquer au regard de la situation financière préoccupante de la branche maladie, la commission restera vigilante au fait que la branche famille dispose des moyens nécessaires pour répondre à ses propres enjeux.

La commission a adopté un amendement n° 127 de sa rapporteure générale corrigeant l'erreur matérielle indiquée supra (non-prise en compte, dans le calcul des parts de taxe sur les salaires, du transfert de 11,1 millions d'euros de la branche maladie vers la branche famille résultant de l'article 5161(*)), ainsi qu'une erreur de référence.

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

Article 8 bis (nouveau)
Validation de l'immatriculation Urssaf des entreprises étrangères
sans établissement stable en France non agricoles

Cet article vise à conférer à l'Urssaf un rôle de contrôle et de validation de toute immatriculation d'entreprises étrangères sans établissement stable en France non agricoles au registre national des entreprises.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

A. Le droit actuel : l'obligation pour les entreprises étrangères sans établissement stable en France non agricoles de s'inscrire au registre national des entreprises sans contrôle ou validation

La loi du 22 mai 2019, dite « PACTE », a créé un guichet unique des entreprises visant à unifier les formalités exécutées par ces dernières lors de leur création, de modification de situation ou de cessation de leur activité. En complément, un registre national des entreprises a été créé. Ce dernier devait devenir au 1er janvier 2023 un registre unique d'immatriculation pour toutes les entités ayant une activité économique sur le territoire français. Le guichet unique sera finalement mis en place au 1er janvier 2025. L'Institut national de la propriété industrielle est l'opérateur en charge du guichet unique des formalités des entreprises (GUFE) et du registre national des entreprises (RNE).

Le 6° de l'article L. 123-36 du code de commerce prévoit que les entreprises étrangères sans établissement stable en France ayant une activité en France s'inscrivent au RNE. Les informations et les dépôts des pièces sont prévues par un décret en Conseil d'État162(*). La notion d'établissement stable est définie par chaque convention fiscale bilatérale. Le droit de l'Union européenne l'appréhende comme « tout établissement autre que le siège de l'activité économique visé à l'article 10 du présent règlement, qui se caractérise par un degré suffisant de permanence et une structure appropriée, en termes de moyens et techniques, lui permettant de recevoir et d'utiliser les services qui sont fournis pour les besoins propres de l'établissement »163(*). Afin d'éviter toute double imposition, dans le cadre de conventions fiscales bilatérales, le statut d'entreprise étrangère sans établissement stable en France permet à ces entités de ne pas être imposable en France mais dans le pays de domicile.

Toutes les entités mentionnées à l'article L. 123-36 précité disposent une autorité de validation et de contrôle de leur immatriculation, modification de situation et cessation d'activité, à l'exception des entreprises étrangères sans établissement stable en France non agricoles. Pourtant, même les entreprises étrangères sans établissement stable en France agricoles voient l'ensemble de ces procédures être contrôlées et validées par les caisses départementales ou pluridépartementales de la mutualité sociale agricole.

Si l'article L. 123-38 du code du commerce prévoit que la fourniture, de mauvaise foi, d'informations inexactes ou incomplètes dans le cadre d'une immatriculation, d'une modification de situation ou d'une radiation du registre national des entreprises est sanctionné de 4 500 euros d'amende et de six mois d'emprisonnement, les entreprises étrangères sans établissement stable en France non agricoles ne sont pas soumises à un processus de contrôle et de validation de l'immatriculation, la modification de situation ou la cessation d'activité.

L'absence d'autorité de validation et de contrôle pour les entreprises étrangères sans établissement stable en France non agricoles apparaît donc à la fois comme une exception mais aussi une source éventuelle de fraudes.

B. L'ajout d'une autorité de contrôle et de validation

Le présent article, issu d'un amendement du Gouvernement et retenu par ce dernier dans le texte transmis au Sénat, prévoit de conférer à l'Urssaf un rôle de contrôle et de validation de l'immatriculation, la modification de situation et la cessation d'activité des entreprises sans établissement stable en France non agricoles.

Le risque de fraude par la création d'entreprises étrangères fictives sans établissement stable en France non agricoles est renforcé par l'absence d'une compétence de contrôle et de validation attribuée à une autorité. Cet article vise ainsi à harmoniser les procédures relatives à l'immatriculation au registre national des entreprises, mais aussi à lutter contre la fraude.

II - La position de la commission

La commission des affaires sociales approuve l'attribution à l'Urssaf d'une compétence de validation et de contrôle de toutes les procédures liées à l'immatriculation des entreprises étrangères sans établissement stable en France non agricole à la fois pour assurer la cohérence et l'uniformité des procédures entre toutes les entreprises, mais aussi pour lutter contre un facteur de fraude.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article 8 ter (nouveau)
Données recueillies dans le cadre de la déclaration sociale nominative (DSN) et du prélèvement à la source pour les revenus autres (Pasrau)

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale, prévoit la déclaration des sommes non-imposables dans le cadre du prélèvement à la source pour les revenus autres (Pasrau).

Il permet par ailleurs l'utilisation des données issues de la déclaration sociale nominative (DSN) et du dispositif Pasrau pour la conception, la conduite ou l'évaluation des politiques publiques. Plusieurs modifications rédactionnelles sont également apportées.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

A. La déclaration sociale nominative (DSN) et le dispositif de prélèvement à la source pour les revenus autres (Pasrau) ont été récemment généralisés dans un objectif de simplification des démarches

1. Les règles de la déclaration sociale nominative (DSN) et du dispositif de prélèvement à la source pour les revenus autres (Pasrau)

La déclaration sociale nominative (DSN) est une déclaration en ligne, réalisée tous les mois par les employeurs à partir de la fiche de paie. Elle leur permet de payer leurs cotisations sociales et de transmettre les données relatives à leurs salariés aux organismes sociaux (caisse primaire d'assurance maladie, organismes complémentaires de santé, Urssaf, France Travail notamment).

L'article L. 133-5-3 du code de la sécurité sociale dispose que la DSN établit, pour chacun des salariés ou assimilés, le lieu d'activité et les caractéristiques de l'emploi et du contrat de travail, les montants des rémunérations, des cotisations et contributions sociales et la durée de travail retenus ou établis pour la paie de chaque mois et les dates relatives au contrat de travail. Ces données servent notamment :

- au recouvrement des cotisations, des contributions sociales et de certaines impositions et à la vérification de leur montant ;

- à l'ouverture et au calcul des droits des salariés en matière d'assurances sociales, de formation et de prévention des effets de l'exposition à certains facteurs de risques professionnels ;

- au versement de certains revenus de remplacement ;

- et à l'accomplissement par les administrations et organismes destinataires de leurs missions.

La DSN a été ouverte à partir de 2013 aux entreprises volontaires puis généralisée à l'ensemble des employeurs du secteur privé au 1er janvier 2017164(*) et du secteur public au 1er janvier 2022165(*).

Pour les revenus qui ne transitent pas par la DSN, le dispositif applicable est celui du prélèvement à la source pour les revenus autres (Pasrau).

Le Pasrau s'applique d'une part, à tout organisme versant des sommes imposables autres que des salaires transmis via la DSN, et d'autre part, à tout organisme versant des prestations sociales y compris les organismes de protection sociale complémentaire.

Sont ainsi concernés les organismes qui versent des indemnités journalières (maladie, accident du travail, maternité, congés payés), des pensions de retraite ou d'invalidité, des allocations chômage ou de préretraite ou tout autre revenu qui n'est pas déclaré via la DSN.

La liste non exhaustive de ces organismes comprend notamment la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam) et la Mutualité sociale agricole (Msa) au titre des régimes de santé de base, les organismes conventionnés du régime social des indépendants (RSI), les régimes de retraite dont la caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav), et France Travail au titre de l'assurance chômage.

Ces organismes déclarent chaque mois, en ligne via le dispositif Pasrau, les revenus et prestations versés en précisant leur détail.

2. Les apports de la DSN et du Pasrau en matière de simplification et de modernisation des démarches

La création de la DSN et du dispositif Pasrau s'inscrivent dans un objectif de simplification des démarches.

Le déploiement de ces deux outils a notamment permis la mise en oeuvre du prélèvement à la source. Cette modalité de prélèvement de l'impôt sur le revenu fait intervenir un tiers collecteur (le plus souvent l'employeur) pour retenir le montant de l'impôt sur les paiements qu'il verse (salaires, traitements, pensions, revenus de remplacement) au profit du contribuable, et le verser directement à l'administration fiscale. Elle a permis de mettre fin au décalage d'un an entre la perception des revenus et le paiement de l'impôt correspondant.

Au-delà de cette réforme, le déploiement de la DSN répond à un objectif de simplification. Cette déclaration mensuelle unique s'est en effet substituée à de nombreuses déclarations relatives aux prélèvements sociaux des entreprises. Dans le prolongement de la création de la DSN, le Pasrau a été conçu comme une version allégée, élaborée spécifiquement pour le prélèvement à la source des revenus autres que les salaires. Selon la Cour des comptes, ce choix a permis de mutualiser l'effort de transformation publique entre sphère fiscale et sphère sociale166(*).

3. La poursuite de la modernisation des démarches

Dans la continuité de la réforme du prélèvement à la source, d'autres chantiers ont été lancés pour moderniser le système d'octroi des prestations sociales, améliorer le recouvrement et lutter contre la fraude.

Un dispositif de ressources mensuelles (DRM) a notamment été mis en production en 2019167(*). Alimenté par des données de la DSN et du dispositif Pasrau, il agrège un ensemble de données relatives aux salaires et aux revenus de remplacement de l'ensemble de la population. Les projets qui s'appuient sur ce dispositif s'inscrivent dans la mise en oeuvre du principe « Dites-le-nous une fois »168(*), en allégeant voire supprimant certaines démarches déclaratives des usagers, tout en sécurisant les données utilisées pour le calcul des droits aux prestations.

B. Le dispositif proposé : élargir le périmètre et l'usage des données recueillies dans le cadre de la DSN et du dispositif Pasrau

1. Compléter les informations transmises dans le cadre du dispositif Pasrau

À ce jour, la loi ne prévoit pas explicitement la déclaration du versement de sommes non imposables dans le cadre du dispositif Pasrau. Il en résulte que les données recueillies ne sont pas exhaustives, empêchant le plein déploiement du dispositif de ressources mensuelles (DRM) évoqué précédemment.

La loi dispose actuellement que les organismes concernés par le dispositif Pasrau doivent déclarer les sommes versées lorsque celles-ci sont imposables ou soumises à cotisations ou contributions sociales. Le a) du  du II modifie l'article L. 133-5-3 du code de la sécurité sociale pour que l'obligation de déclaration concerne toute somme, qu'elle soit ou non imposable.

Par ailleurs, la déclaration sociale nominative des employeurs ne porte actuellement que sur les rémunérations qu'ils versent. Le  du II modifie l'article du code de la sécurité sociale susmentionné pour préciser que la déclaration sociale nominative s'applique également aux employeurs dans le cas où ils versent des revenus de remplacement à leurs salariés ou à leurs anciens salariés.

Enfin, plusieurs modifications rédactionnelles sont apportées à ce même article (b) du  du II et ).

2. Permettre l'utilisation des données issues des déclarations dans le cadre de projets numériques innovants

Dans le cadre des réformes menées par le Gouvernement pour simplifier et renforcer l'accès aux droits sociaux, notamment celle de la solidarité à la source, plusieurs projets numériques innovants sont à l'étude. Pour les mener à leur terme, l'utilisation des données issues des DSN et du dispositif Pasrau s'avère nécessaire.

Afin de garantir l'accès à ces données, le  insère un paragraphe II quater à l'article L. 133-5-3 du code de la sécurité sociale, disposant que les données issues des déclarations sociales nominatives peuvent être utilisées pour la conception, la conduite ou l'évaluation des politiques publiques.

3. Dispositions de coordination

Le I opère une mesure de coordination.

L'article 13 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023169(*)transféré aux URSSAF le recouvrement de la contribution sociale généralisée (CSG) et de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) due sur les revenus de remplacement des personnes assujetties au régime agricole, et dont la collecte est réalisée au moyen du dispositif Pasrau.

Le présent article modifie l'article L. 761-5 du code rural et de la pêche maritime afin de transférer aux mêmes URSSAF le recouvrement des prélèvements sociaux dus par les salariés agricoles assujettis au régime local d'assurance complémentaire obligatoire des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle.

II - La position de la commission

La commission estime qu'il est nécessaire de mener à son terme le chantier de la modernisation de la délivrance des prestations sociales et du recouvrement, dans un double objectif de simplification des démarches des usagers et de lutte contre la fraude.

Elle comprend ainsi l'intérêt d'élargir le périmètre des données recueillies dans le cadre de la DSN et du dispositif Pasrau, pour garantir une centralisation exhaustive de l'information.

Par ailleurs, elle ne s'oppose pas à l'usage des données issues de ces déclarations pour mener à bien des projets de modernisation numérique, tant que cet usage respecte la règle de proportionnalité et la sécurisation des données.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article 8 quater (nouveau)
Élargissement du droit de communication aux organismes du recouvrement pour lutter contre la fraude

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale, élargit le droit de communication des agents des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales à l'ensemble des actions de contrôle et de lutte contre la fraude.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

A. Le droit de communication a été octroyé aux agents des organismes de sécurité sociale pour renforcer le contrôle et la lutte contre le travail dissimulé

1. Le droit de communication des organismes de sécurité sociale

Le droit de communication au profit des agents des organismes de sécurité sociale a été institué par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008170(*), à la suite d'une réflexion engagée par le comité national de lutte contre la fraude en matière de protection sociale171(*).

L'objectif était alors d'aligner autant que possible les prérogatives accordées aux agents des organismes de sécurité sociale sur celles dont disposent les agents de l'administration fiscale. Ainsi, les agents des organismes de sécurité sociale qui assurent le versement des prestations et les agents de contrôle des Urssaf et des caisses de MSA se sont vu attribuer un droit d'obtention des informations et des documents qui leurs sont nécessaires, sans que cela puisse toutefois porter atteinte au secret professionnel.

Ce droit de communication s'exerce :

- pour les agents des organismes chargés de la gestion d'un régime obligatoire de sécurité sociale, dans le cadre du contrôle de la sincérité ou de l'exactitude des déclarations souscrites ou l'authenticité des pièces produites en vue de l'attribution et du paiement des prestations services par lesdits organismes ;

- pour les agents de contrôle des Urssaf et des caisses de MSA, dans le cadre de leurs missions de contrôle et de lutte contre le travail dissimulé ;

- pour les agents des organismes de sécurité sociale, afin de recouvrer les prestations versées indûment ou des prestations recouvrables sur la succession ;

- et s'agissant des agents des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales, pour le recouvrement des créances relatives à une infraction aux interdictions de travail dissimulé172(*).

Le législateur a souhaité calquer le plus possible ce droit de communication sur le droit existant pour les administrations fiscales. Aussi, l'article L. 114-20 du code de la sécurité sociale, qui précise envers quelles personnes s'exerce le droit de communication, se réfère aux dispositions du livre des procédures fiscales relatives aux conditions d'exercice du droit de communication des agents de l'administration fiscale.

En outre, l'article L. 114-21 du même code garantit, en cas d'usage du droit de communication par un organisme de sécurité sociale, que celui-ci est dans l'obligation de motiver sa décision à l'égard de la personne physique ou morale, qu'il s'agisse de la suppression du service d'une prestation ou du recouvrement d'une somme. À cet effet, l'organisme doit communiquer, avant l'application de la décision, une copie des documents motivant la décision si la personne en fait la demande.

2. L'opportunité d'un élargissement du droit de communication

La lutte contre la fraude sociale reste, à ce jour, un objectif central pour les pouvoirs publics.

Bien que l'ampleur du phénomène soit, par définition, difficile à évaluer, un récent rapport du Haut conseil du financement de la protection sociale173(*) estime que la fraude sociale (sur les recettes et les prestations) représenterait 13 milliards d'euros par an. Les fraudes constatées et stoppées ne s'élèveraient qu'à 2,1 milliards d'euros, dont 0,5 milliard évité avant le versement de la prestation.

Pour y faire face, les sources et les méthodes de contrôle ont été progressivement diversifiées notamment via l'élargissement du droit de communication. Ce renforcement du réseau de lutte contre la fraude au sein des organismes de recouvrement a notamment permis de mettre en évidence de nouveaux types de fraude, contre lesquels le Gouvernement estime que le droit de communication existant demeure trop limité.

B. Le dispositif proposé : étendre le droit de communication des agents du recouvrement

Le  du présent article étend le droit de communication prévu à l'article L. 114-19 du code de la sécurité sociale aux directeurs et directeurs comptables et financiers des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales et aux agents placés sous leur autorité, dans le cadre des actions de contrôle et de lutte contre la fraude.

Le champ d'application du droit de communication dont disposent les agents concernés est ainsi élargi, le droit existant le limitant au cadre du recouvrement des créances relatives à une infraction aux interdictions de travail dissimulé.

Le  opère une coordination rédactionnelle au même article.

II - La position de la commission

La commission, constante dans son volontarisme en matière de lutte contre la fraude sociale, ne peut qu'encourager le Gouvernement à renforcer les dispositifs de contrôle et de lutte contre la fraude au sein des organismes de recouvrement.

Les dispositions proposées par cet article permettront d'adapter et d'enrichir les sources d'information des corps de contrôle, contribuant à l'amélioration de la détection des fraudes.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article 8 quinquies (nouveau)
Ajustements techniques au dispositif de précompte des cotisations
et contributions sociales par les plateformes de mise en relation
sur le chiffre d'affaires reversé aux micro-entrepreneurs qui les utilisent

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, opère certains ajustements techniques au dispositif de prélèvement des cotisations et contributions sociales par les plateformes de mise en relation sur les sommes versées à leurs utilisateurs, introduit par la LFSS pour 2024 et entrant en vigueur au 1er janvier 2027.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé : des ajustements techniques au dispositif de précompte des cotisations et contributions par les plateformes sur les sommes versées à leurs vendeurs exerçant en qualité de micro-entrepreneurs

A. Le droit existant : afin de lutter contre la sous-déclaration, la LFSS pour 2024 a instauré un dispositif de prélèvement des cotisations et contributions par les plateformes de mise en relation

L'article 6 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024 a mis à la charge des plateformes de mise en relation une obligation de déclaration et de précompte des cotisations dues par les quelque 206 000 micro-entrepreneurs qui l'utilisent.

Cette mesure, qui entrera en vigueur au 1er janvier 2027, a pour principal objectif de lutter contre la sous-déclaration auprès de l'Urssaf Caisse nationale, qui estimait, selon l'étude d'impact de la mesure, que 69 % des micro-entrepreneurs utilisant une plateforme déclaraient des chiffres d'affaires inférieurs aux montants enregistrés par celles-ci, et que 55 % d'entre eux ne déclaraient rien.

Le chiffre d'affaires non déclaré par ces travailleurs est estimé à 814 millions d'euros en 2021 et à 927 millions d'euros en 2022. Les cotisations et contributions éludées se seraient dès lors élevées à 144 millions d'euros en 2021 et à 175 millions d'euros en 2022174(*).

Cette mesure de prélèvement concernera notamment les micro-entrepreneurs et les assimilés salariés relevant du régime « micro-RG ». Le dispositif de précompte s'appliquera aux cotisations et contributions sociales, ainsi qu'aux taxes, et, en cas recours à cette option, au versement libératoire de l'impôt sur le revenu dus par ces derniers au titre de la part de leur chiffre d'affaires ou des recettes versées par la plateforme175(*).

Les micro-entrepreneurs étant exonérés de TVA sous condition de chiffre d'affaires176(*), la taxe sur la valeur ajoutée sera exclue de ce précompte.

La réforme du circuit de déclaration et de paiement des cotisations
dues par les micro-entrepreneurs utilisant des plateformes
portée par l'article 6 de la LFSS pour 2024

Source : Fiches d'évaluation préalable du PLFSS pour 2024 (annexe 9)

B. Le dispositif proposé : des ajustements techniques et opérationnels afin d'assurer la bonne mise en oeuvre du dispositif au 1er janvier 2027

Dans le cadre des travaux préparatoires de mise en oeuvre de la mesure portée à l'article 6 de la LFSS pour 2024, le présent article rectifie certains mécanismes du dispositif de précompte des cotisations dues par les seuls micro-entrepreneurs et restreint le périmètre d'application de la phase pilote.

Il modifie tout d'abord le I de l'article L. 613-6-1 du code de la sécurité sociale afin d'exclure des sommes précomptées certaines taxes dont peuvent être redevables les micro-entrepreneurs, à savoir les taxes industrielles et artisanales, ainsi que les taxes sur les métaux précieux, bijoux et objets d'art, qui figurent à l'article 150 VI du code général des impôts, ainsi qu'au chapitre Ier du titre VII du livre IV du code des impositions sur les biens et services. Ces taxes ne seraient donc plus recouvrées par les plateformes, mais directement par la puissance publique.

Il rajoute à l'article L. 613-6-1 précité deux alinéas :

- le premier sécurise la mise en oeuvre de ce dispositif de précompte afin qu'il ne s'applique qu'une fois les informations nécessaires connues, soit à l'issue d'un délai défini par arrêté et qui court à compter du début, ou de la reprise, d'une activité sur une plateforme ;

- le second crée un mécanisme permettant à l'Urssaf Caisse nationale de régulariser les sommes prélevées lors du précompte dans l'hypothèse où un vendeur micro-entrepreneur serait redevable de la TVA. La définition de ce mécanisme est renvoyée à un décret.

Enfin, le présent article modifie, en son II, l'article 6 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, afin de restreindre le périmètre de la phase pilote qui débutera en 2026 aux seules plateformes volontaires, dont la liste sera fixée par arrêté, et non plus selon des critères prédéterminés.

II - La position de la commission

La commission des affaires sociales fait de la lutte contre la fraude une priorité absolue. À ce titre, elle est favorable aux ajustements proposés, qui doivent assurer la bonne mise en oeuvre du prélèvement par les plateformes de mise en relation, des cotisations et contributions dues par les micro-entrepreneurs, sur le chiffre d'affaires qu'elles leur reversent.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article 9
Clauses de sauvegarde des médicaments et dispositifs médicaux

Cet article vise à préciser l'assiette, les modalités de liquidation, d'appel et de recouvrement des clauses de sauvegarde des médicaments et des dispositifs médicaux. Il fixe, pour l'année 2025, les seuils de déclenchement de ces deux clauses. Enfin, il porte trois mesures transitoires destinées à permettre et faciliter l'entrée en vigueur de la réforme de la clause de sauvegarde des médicaments au titre de l'année 2025 prévue par la LFSS pour 2024.

La commission propose d'adopter cet article modifié par les amendement(s) qu'elle a adoptés.

I - Le dispositif proposé

A. Réformée en 2024, la clause de sauvegarde est progressivement devenue un outil de régulation budgétaire de premier plan

1. Conçue comme un outil de régulation de dernier recours, la clause de sauvegarde a été profondément réformée en 2024

Depuis sa création par la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 1999177(*), la clause de sauvegarde a été conçue comme une corde de rappel budgétaire, destinée à permettre le respect de l'Ondam dans le cas où les outils de régulation infra-annuelle et microéconomique du secteur ne permettraient pas de respecter le niveau de dépenses d'assurance maladie prévues.

Le dispositif a, depuis, subi de nombreuses modifications. La LFSS pour 2019178(*) lui a donné sa forme actuelle, en substituant aux « taux Lv » et « taux Lh », qui visaient respectivement à maîtriser l'évolution des dépenses de ville et des dépenses hospitalières, un unique « montant M » visant le chiffre d'affaires de l'ensemble des entreprises du secteur. La LFSS pour 2024179(*) a, de son côté, profondément réformé l'assiette, les modalités de liquidation et d'appel de la clause de sauvegarde à compter du 1er janvier 2026.

a) La clause de sauvegarde est conçue comme une corde de rappel budgétaire

(1) La clause de sauvegarde des médicaments

• Depuis la LFSS pour 2019, la clause de sauvegarde des médicaments se déclenche lorsque l'activité du secteur dépasse le seuil déterminé, c'est-à-dire lorsque le chiffre d'affaires réalisé au cours d'une année civile par l'ensemble des entreprises exploitant une ou plusieurs spécialités pharmaceutiques est supérieur au montant M fixé annuellement en LFSS. Dans ce cas, l'ensemble de ces entreprises est assujetti à une contribution, affectée à la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam)180(*).

La définition, chaque année, d'un montant M a vocation à inciter, collectivement et individuellement, les entreprises du secteur à maintenir leur chiffre d'affaires en-deçà de ce seuil : la clause de sauvegarde constitue en principe un outil de régulation de dernier ressort, déclenché dans le seul cas où les outils de régulation infra-annuelle (remises, baisses de prix négociées avec le CEPS) n'ont pas suffi à maintenir les dépenses de médicaments à un niveau susceptible d'assurer le respect de l'Ondam voté.

• Lorsque le chiffre d'affaires minoré des remises excède toutefois le montant M, un barème progressif lui est alors appliqué :

- la part inférieure à 1,005 fois le montant M est soumise à un taux de prélèvement de 50 % ;

- la part comprise entre 1,005 et 1,01 fois le montant M à un taux de 60 % ;

- la part supérieure à 1,01 fois le montant M, enfin, est soumise à un taux de 70 %.

Les modalités de répartition de la contribution ainsi liquidée ont été révisées à compter de la clause de sauvegarde pour 2023181(*). Désormais, la contribution est répartie :

- à concurrence de 70 %, au prorata de leur chiffre d'affaires - part dite « activité » ;

- à concurrence de 30 %, en fonction de la progression de leur chiffre d'affaires par rapport à l'année précédente - part dite « croissance »182(*).

• Des règles de plafonnement et d'abattement peuvent, enfin, conduire à moduler la contribution due par chaque entreprise.

D'une part, le montant de la contribution due par chaque entreprise redevable ne peut, en principe, excéder 10 % de son chiffre d'affaires hors taxes réalisé au titre des médicaments concernés réalisé en France métropolitaine et dans les départements, régions et collectivités d'outre-mer concernés183(*).

D'autre part, un mécanisme d'abattement est prévu par le code de la sécurité sociale. Les entreprises qui ont conclu avec le CEPS une convention en cours de validité au 31 décembre de l'année au titre de laquelle la contribution est due, portant sur 90 % au moins du chiffre d'affaires de l'année, peuvent signer un accord prévoyant le versement de l'ensemble ou d'une partie de la contribution sous forme de remises. Lorsque ce versement est égal ou supérieur à 95 % du montant de la contribution due, l'entreprise est exonérée de cette dernière.

Ce taux peut être abaissé entre 80 % et 95 % lorsque l'entreprise a, par convention avec le CEPS, consenti une baisse du prix net d'une ou plusieurs spécialités qu'elle exploite184(*) :

- 90 % lorsque les économies générées sont inférieures ou égales à 0,70 % du chiffre d'affaires ;

- 85 % lorsqu'elles sont comprises entre 0,70 % et 3 % du chiffre d'affaires ;

- 80 % lorsqu'elles sont supérieures à 3 % du chiffre d'affaires185(*).

• L'assiette de la clause de sauvegarde a été progressivement élargie pour comprendre l'ensemble des médicaments pris en charge, entièrement ou partiellement, par l'assurance maladie.

Celle-ci correspond au chiffre d'affaires réalisé au cours de l'année civile en France métropolitaine, en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin au titre des médicaments par l'ensemble des entreprises assurant l'exploitation, l'importation ou la distribution parallèle de spécialités pharmaceutiques186(*).

Sont pris en compte pour le calcul du chiffre d'affaires les médicaments :

- dispensés en ville et inscrits au remboursement187(*) ;

- inscrits sur la liste de rétrocession et pouvant, en conséquence, être rétrocédés par des pharmacies à usage intérieur à des patients188(*) ;

- pris en charge en sus de la tarification à l'activité hospitalière et relevant de la « liste en sus » pour les activités de médecine, chirurgie et obstétrique (MCO)189(*) ou de soins de suite de réadaptation (SSR)190(*) ;

- bénéficiant d'une autorisation ou d'un cadre de prescription compassionnelle191(*) ou d'une autorisation d'importation parallèle192(*) ;

- bénéficiant du régime dérogatoire de prise en charge à l'issue de la période d'accès précoce193(*) ;

- ceux pris en charge au titre de l'accès direct194(*).

Depuis la LFSS pour 2023, sont également intégrés à l'assiette les médicaments acquis par Santé publique France pour faire face aux menaces sanitaires graves ou aux défaillances du marché195(*). La LFSS pour 2024 a, toutefois, exclu les médicaments acquis par Santé publique France et indiqués dans le traitement de la covid-19, dont la liste est fixée par arrêté, de l'assiette de la contribution due au titre de la même année196(*).

Le chiffre d'affaires, ainsi calculé, est minoré du montant des remises conventionnelles consenties par les exploitants au moment de la négociation avec le Comité économique des produits de santé (CEPS) du prix de leurs spécialités ou postérieurement. L'assiette de la clause de sauvegarde des médicaments ne comprend ainsi que la part des ventes du secteur pharmaceutique ayant, in fine, donné lieu à une prise en charge totale ou partielle de l'assurance maladie197(*).

• La procédure de déclaration et de recouvrement de la clause de sauvegarde a été réformée par la LFSS pour 2023198(*) et prévoit que :

- les entreprises redevables de la contribution sont tenues de remettre à un Urssaf la déclaration permettant de déterminer le chiffre d'affaires réalisé au cours de l'année avant le 1er avril de l'année n+1 ;

- avant le 15 juillet de l'année n+1, le CEPS communique à l'Urssaf les éventuelles différences identifiées avec les données dont il dispose et, à l'Acoss, le montant des remises négociées pour chaque entreprise redevable ;

- l'Urssaf communique sans délai aux entreprises une éventuelle différence signalée par le CEPS, celles-ci disposant d'un délai de 15 jours pour rectifier leur déclaration ;

- l'Urssaf notifie au plus tard le 1er octobre de l'année n+1, à chaque entreprise, le montant de la contribution dont elle est redevable.

- les entreprises concernées doivent verser la contribution, au plus tard, le 1er novembre de l'année n+1.

Pour fiabiliser la procédure et inciter les entreprises à respecter le calendrier prévu, la LFSS pour 2023 a également instauré une sanction en cas de retard de déclaration. Ainsi, lorsque l'entreprise redevable méconnaît le délai de déclaration ou de rectification, l'Urssaf met à sa charge une majoration forfaitaire pour déclaration tardive, affectée à la Cnam, égale à 0,05 % du chiffre d'affaires hors taxes total déclaré par période de quinze jours de retard, sans pouvoir être inférieure à 2 000 ni excéder 100 000 euros199(*).

(2) La clause de sauvegarde des dispositifs médicaux

Plus récente, la clause de sauvegarde des dispositifs médicaux a été créée par la LFSS pour 2020200(*). Sur le modèle de la clause relative aux médicaments, elle met à la charge des exploitants de dispositifs médicaux inscrits sur la liste des produits et prestations remboursables (LPPR) une contribution, dès lors que le montant remboursé par l'assurance maladie au cours de l'année civile, minoré des remises conventionnelles, est supérieur à un montant Z déterminé chaque année en LFSS201(*).

• L'assiette de cette contribution est toutefois réduit : elle ne concerne que les dispositifs médicaux pris en charge par l'assurance maladie et distribués en établissement de santé au titre de la liste en sus202(*) ainsi que, depuis 2022, ceux pris en charge à titre transitoire203(*). En sont donc exclus les dispositifs médicaux :

- dispensés par un distributeur détaillant - pharmacien d'officine, opticien, audioprothésiste, prestataire de santé ;

- pris en charge en établissement de santé au sein des groupements homogènes de séjour (GHS) de la tarification à l'activité.

• En outre, l'assiette de la clause et les règles de calcul de la contribution diffèrent de celles traditionnellement retenues pour les médicaments.

Le seuil de déclenchement de la clause des dispositifs médicaux repose non sur le chiffre d'affaires du secteur, mais sur le montant remboursé par l'assurance maladie. Ce n'est que lorsque ce montant remboursé est supérieur au montant Z, fixé annuellement en LFSS, que la contribution est mise à la charge des exploitants.

Dans ce cas, celle-ci est égale à 90 % de la différence entre le montant remboursé par l'assurance maladie, minoré des remises, et le montant Z.

La contribution due par chaque exploitant est déterminée au prorata du montant remboursé par l'assurance maladie au titre des produits et prestations qu'il exploite. Elle ne peut excéder 10 % de ce montant remboursé204(*).

• Enfin, la procédure d'appel et le calendrier de recouvrement diffèrent également, dans la mesure où la liquidation de la contribution repose sur des éléments connus de l'assurance maladie et des établissements de santé.

La Cnam et l'Agence technique de l'information sur l'hospitalisation (ATIH) sont chargées de transmettre directement à l'Urssaf Caisse nationale les montants remboursés, le CEPS de transmettre les montants des remises205(*). Comme pour les médicaments et depuis la LFSS pour 2024, la contribution doit être versée au plus tard le 1er novembre de l'année n+1206(*).

b) La LFSS pour 2024 a réformé la clause de sauvegarde des médicaments

La clause de sauvegarde des médicaments a été profondément réformée par la LFSS pour 2024207(*), qui a visé à simplifier la procédure de liquidation et d'appel de la clause en la rapprochant de celle applicable aux dispositifs médicaux. Cette réforme doit entrer en vigueur le 1er janvier 2026 et s'appliquera, en conséquence, à la contribution due par les entreprises au titre de l'année 2025.

• Cette réforme modifie, d'abord, l'assiette de la clause pour asseoir celle-ci non plus sur le chiffre d'affaires des entreprises, mais sur le montant remboursé par l'assurance maladie aux assurés sociaux au cours de l'année civile, minoré des remises consenties par les entreprises, des marges des distributeurs, des honoraires de dispensation et des taxes en vigueur208(*).

Elle révise, en conséquence, la règle de calcul de la contribution en prévoyant que celle-ci sera égale, désormais, à 90 % de la différence entre le montant remboursé par l'assurance maladie et le montant M.

La contribution demeure, en revanche, répartie entre les entreprises assujetties, à concurrence de 70 %, au prorata du montant remboursé par l'assurance maladie au titre des médicaments qu'elles exploitent, importent ou distribuent et, à concurrence de 30 %, en fonction de la progression de ce montant remboursé par rapport à l'année précédente.

Enfin, le plafond de la contribution due par chaque entreprise est également adapté à la nouvelle assiette. Celui-ci ne s'élèvera plus à 10 % de son chiffre d'affaires hors taxes, mais à 12 % du montant remboursé par l'assurance maladie au titre des médicaments que l'entreprise exploite, importe ou distribue209(*).

• La LFSS pour 2024 a, en conséquence, revu les modalités de liquidation et d'appel de la clause.

Désormais, il n'appartiendra plus à chaque entreprise de déclarer son chiffre d'affaires, mais à la Cnam, à l'Atih et à Santé publique France de transmettre à l'Urssaf Caisse nationale, avant le 15 juillet de l'année n+1 et selon des modalités prévues par décret, les montants totaux remboursés par l'assurance maladie pour chaque entreprise. Le CEPS demeure, lui, chargé de transmettre à l'Urssaf Caisse nationale, pour la même date, les montants des remises prises en compte pour les entreprises redevables210(*).

L'Urssaf Caisse nationale devra communiquer sans délai aux entreprises redevables la liste des médicaments pris en compte dans le calcul du montant remboursé.

La réforme a, enfin, laissé inchangées :

- la date à laquelle l'Urssaf doit notifier à chaque entreprise le montant de la contribution dont elle est redevable, fixée au 1er octobre de l'année n+1 ;

- la date à laquelle la contribution doit être intégralement versée par chaque entreprise redevable, fixée au 1er novembre de l'année n+1.

Le Gouvernement a défendu cette réforme en indiquant que celle-ci visait à alléger les contraintes déclaratives des entreprises et résoudre les difficultés de liquidation et de recouvrement observées ces dernières années211(*). Les règles actuelles faisant dépendre le calcul de la clause des déclarations transmises par les entreprises, chaque erreur ou retard individuel est, en effet, susceptible de ralentir la procédure collective de liquidation.

2. Dans un contexte de fort dynamisme des dépenses de médicaments, le rendement de la clause a très fortement augmenté

Malgré l'effectivité des outils microéconomiques de régulation et du fait du dynamisme des dépenses, la clause de sauvegarde a été presque systématiquement déclenchée ces dix dernières années, et son rendement a fortement crû. En conséquence, le Gouvernement a cherché à stabiliser ce dernier.

a) Le dynamisme des dépenses et l'insuffisance des outils de régulation

• Portées par le vieillissement de la population, le développement des maladies chroniques et une grappe d'innovations récentes, les ventes de médicaments ont connu une croissance soutenue ces dernières années.

D'après le CEPS, le chiffre d'affaires global hors taxes des médicaments remboursables s'est ainsi établi, en 2022, à 33,4 milliards d'euros. En hausse de près de 10 % par rapport à 2021212(*), ce montant marque une accélération sensible du dynamisme des dépenses.

Une telle tendance apparaît dans les deux principales catégories de dépenses :

- les médicaments délivrés en pharmacies d'officine, dont les ventes progressent de 9,7 % entre 2021 et 2022 pour atteindre 23,2 milliards d'euros, portées notamment par la commercialisation en ville de molécules innovantes à un prix élevé213(*) ;

- les médicaments figurant sur la « liste en sus » hospitalière, réunissant les molécules les plus onéreuses financées indépendamment des GHS et de la tarification à l'activité, dont les ventes ont augmenté de 12,3 % sur la même période, portées notamment par la progression d'anticancéreux innovants.

Ventes de médicaments remboursables (2012-2022)

(en milliards d'euros)

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après des données publiées par le CEPS (2024)

Dans un périmètre différent, incluant les médicaments rétrocédés comme les remises conventionnelles consenties par les industriels à l'assurance maladie, la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) des ministères sociaux fait état d'une augmentation de la consommation de médicaments en ambulatoire de 5,3 % entre 2021 et 2022. Cette progression, constatée pour la deuxième année consécutive, contraste avec une baisse presque continue observée entre 2014 et 2020214(*).

• Deux principaux outils de régulation microéconomique permettent au CEPS de maîtriser l'augmentation des dépenses de l'assurance maladie, sans toutefois suffire à contenir le dynamisme observé ces dernières années.

D'une part, le comité procède à des campagnes de baisse de prix sur des produits d'ores et déjà inscrits au remboursement, selon des critères fixés par le code de la sécurité sociale215(*) - ancienneté de l'inscription, prix net des médicaments à même visée thérapeutique, etc. - ou dans certaines situations prévues par l'accord-cadre conclu avec Les Entreprises du médicament (Leem)216(*).

Les économies attendues des baisses de prix sont, chaque année, précisées dans les annexes au projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) et s'élèvent à plusieurs centaines de millions d'euros. D'après le CEPS, ces baisses de prix se sont traduites, en 2022, par près de 842 millions d'euros d'économies.

Économies permises par les baisses de prix (2012-2022)

(en millions d'euros)

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après des données publiées par le CEPS (2024)

D'autre part, le CEPS négocie avec les entreprises des remises, remboursées par l'exploitant à l'assurance maladie sans venir pour autant réduire le prix facial affiché. Deux principaux types de remises peuvent être distingués :

- les remises dites « produits »217(*), qui peuvent être subordonnées à la réalisation d'une ou plusieurs conditions - accord prix/volume, plafonnement de la dépense totale, etc. - ou, au contraire, inconditionnelles - remises « à la première boîte » ;

- les remises associées aux procédures d'accès dérogatoires : autorisations d'accès précoce218(*) ou d'accès compassionnel219(*).

Soutenu, notamment, par l'arrivée sur le marché de thérapies innovantes et onéreuses, le montant des remises a très fortement crû ces dernières années : entre 2012 et 2022, celui des remises « produits » aurait, d'après les données publiées par le CEPS, été multiplié par plus de douze.

Remises « produits » et « accès dérogatoires » brutes facturées (2012-2022)

(en millions d'euros)

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après des données publiées par le CEPS (2024)

Malgré leur efficacité, ces outils de régulation apparaissent insuffisants pour maîtriser la croissance importante des dépenses de médicaments constatée ces dernières années.

Dans l'annexe au PLFSS déposé relative à l'Ondam, le Gouvernement fait état d'une nette accélération de la progression des dépenses d'assurance maladie relatives aux produits de santé depuis 2019. Ainsi, le taux de croissance annuel moyen des dépenses suivies s'est établi :

- pour la période 2010-2019, à 1,5 % : 0,6 % pour les médicaments et 4,4 % pour les dispositifs médicaux ;

- pour la période 2019-2023, hors covid-19, à 2,8 % : 2,1 % pour les médicaments et 3,7 % pour les dispositifs médicaux.

Le Gouvernement estime que les dépenses brutes, avant application des recettes atténuatives - remises et clause de sauvegarde - et des mesures d'économies, pourraient croître en 2025 de 9,5 % pour les médicaments et de 4,4 % pour les dispositifs médicaux220(*).

b) L'augmentation du rendement de la clause de sauvegarde

• Sous l'effet du dynamisme des dépenses de médicaments et du fait de l'insuffisance des mécanismes de régulation microéconomique, la clause de sauvegarde, pourtant conçue comme une corde de rappel budgétaire, a agi ces dernières années en véritable dispositif fiscal, au rendement comparable à celui des outils de régulation traditionnellement mobilisés par le CEPS.

À l'exception de l'année 2020, la clause a, en effet, systématiquement été déclenchée ces dernières années. Depuis 2022, le Gouvernement tient d'ailleurs compte de cette évolution en anticipant, désormais, un déclenchement du dispositif et en estimant, en conséquence, un rendement attendu dans les annexes jointes aux PLFSS déposés221(*).

Surtout, le produit de la clause de sauvegarde a très fortement augmenté ces dernières années. Alors qu'il demeurait, depuis 2015, inférieur à 200 millions d'euros, il s'est établi à 671 millions d'euros pour 2021 et 1,2 milliard d'euros pour 2022, d'après le CEPS222(*).

Le rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2023 soulignait l'importance prise par le dispositif, en indiquant que celui-ci suffit à ramener le taux de croissance annuel moyen des dépenses de produits de santé, pour la période 2019-2022, de 3,4 % à 2,5 %223(*).

• La LFSS pour 2024 a cherché à maîtriser cette croissance du rendement de la clause de sauvegarde.

Pour ce faire, elle a, d'une part, révisé à la hausse le montant M pour 2023, réduisant de 120 millions d'euros la recette attendue au titre de la même année pour la maintenir à 1,6 milliard d'euros224(*). Cette révision avait pour contrepartie un engagement des industriels sur des objectifs renforcés de baisse de prix et de maîtrise des volumes de vente225(*).

La même loi a, d'autre part, fixé le montant M pour 2024 à 26,4 milliards d'euros, de manière à contenir le rendement de la clause de sauvegarde due au titre de l'année 2024 au même montant de 1,6 milliard d'euros226(*).

Ce niveau de rendement stabilisé demeure supérieur de 32 % à celui observé en 2022 et de 138 % à celui observé en 2021.

Produit de la clause de sauvegarde des médicaments après abattements

(en millions d'euros)

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, sur la base de données publiées par le CEPS (2024)

B. L'article 9 vise à préciser les modalités de liquidation, d'appel et de recouvrement de la clause de sauvegarde et à stabiliser son rendement

L'article 9 porte, d'abord, diverses mesures destinées à préciser l'assiette, les modalités de liquidation, d'appel et de recouvrement des clauses de sauvegarde. Il fixe, ensuite, les seuils de déclenchement M et Z pour 2025. Il prévoit, enfin, trois mesures transitoires destinées à permettre le calcul de la clause de sauvegarde des médicaments pour 2025.

1. Mesures précisant l'assiette des clauses de sauvegarde

L'article 9 précise, d'abord, plusieurs règles entourant l'assiette des clauses de sauvegarde des médicaments et dispositifs médicaux.

• Le a) du 1° du I exclut, d'abord, de l'assiette de la clause de sauvegarde des médicaments l'écart rétrocession indemnisable227(*) et l'écart médicament indemnisable228(*). Ces deux dispositifs permettent de récompenser les établissements de santé qui parviennent à négocier des spécialités inscrites sur la liste de rétrocession ou la liste en sus à un prix inférieur au tarif de responsabilité négocié, au niveau national, par le CEPS. Dans ce cas, l'assurance maladie rembourse à l'établissement une part de l'écart constaté, fixée par arrêté à 50 %229(*).

Ces mécanismes permettent, en conséquence, d'intéresser les établissements négociateurs tout en limitant le sur-remboursement consenti par l'assurance maladie. La possibilité, pour les entreprises, de déduire ces montants de l'assiette de la clause de sauvegarde constitue une incitation supplémentaire à la négociation.

• Le b) du 1° du I complète, par ailleurs, la liste des médicaments pris en compte pour le calcul du montant remboursé par l'assurance maladie en modifiant l'article L. 138-10 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue de la LFSS pour 2024.

Il remplace ainsi, d'abord, la référence aux médicaments « inscrits » sur les listes des spécialités remboursables aux assurés sociaux définies à l'article L. 162-17 du code de la sécurité sociale, par une référence aux médicaments « pris en charge ou remboursés au titre de leur inscription » sur ces listes.

Il précise, par ailleurs, que l'assiette comprend les médicaments inscrits, pour certaines de leurs indications seulement, sur les listes en sus de médecine, chirurgie, obstétrique et odontologie (MCO)230(*) comme de soins de suite et de réadaptation (SSR)231(*).

Enfin, il ajoute à la liste prévue par l'article L. 138-10 du code de la sécurité sociale modifié :

- les médicaments, ou les indications, pris en charge par l'assurance maladie dans le cadre du dispositif dit « AMM miroir »232(*) ;

- les médicaments prescrits en dehors des indications couvertes par leur autorisation de mise sur le marché et pris en charge « hors AMM »233(*).

Le 1° du I entrerait en vigueur le 1er janvier 2026, avec la réforme de la clause de sauvegarde des médicaments portée par la LFSS pour 2024.

• Les 6° et 7° du I, enfin, modifient les articles L. 138-19-8 et L. 138-19-9 du code de la sécurité sociale pour exclure la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) de l'assiette de calcul de la clause de sauvegarde des dispositifs médicaux.

Selon l'évaluation préalable du présent article, « cette clarification est d'autant plus nécessaire que le taux de TVA est variable selon les modalités d'inscription des dispositifs médicaux (5,5 % ou 20 %) »234(*).

2. Mesures précisant les modalités de liquidation

L'article 9 apporte, par ailleurs, des précisions relatives aux modalités de liquidation de la clause de sauvegarde des médicaments.

• Le a) du 2° du I réécrit, d'abord, le III de l'article L. 138-12 du code de la sécurité sociale.

Il précise que, lorsque le montant remboursé par l'assurance maladie, au titre des médicaments commercialisés par une entreprise, minoré des marges, honoraires de dispensation et taxes exclus de l'assiette de la clause de sauvegarde, est inférieur à celui des remises consenties par cette même entreprise, le montant de la contribution due par cette dernière au titre de la clause de sauvegarde est nul.

Selon l'évaluation préalable du présent article, de telles contributions négatives peuvent survenir « dans de très rares cas (...), par exemple lorsqu'une spécialité a un faible taux de prise en charge et un montant important de remises conventionnelles »235(*).

• Le b) du 2° du I complète, par ailleurs, le même article L. 138-12 par deux paragraphes.

Le premier précise que, lorsqu'une entreprise cesse l'exploitation d'une spécialité et la transfère à une autre entreprise, la date d'entrée en vigueur de l'arrêté déterminant le changement d'exploitant publié au Journal officiel est retenue comme date de référence pour le calcul des montants remboursés par l'assurance maladie imputés à chaque entreprise.

Le second paragraphe reprend le plafonnement de la contribution à 12 % du montant total remboursé par l'assurance maladie au titre des médicaments de chaque entreprise, auparavant porté par le III de l'article L. 138-12.

• Le 2° du I entrerait en vigueur le 1er janvier 2026, et serait applicable à la liquidation de la contribution due pour 2025.

3. Mesures relatives à la procédure d'appel et de recouvrement

• Le 3° du I de l'article 9 complète l'article L. 138-13 du code de la sécurité sociale pour prévoir que le CEPS notifie à chaque entreprise le montant de la remise exonératoire dont elle est redevable, dans le délai prévu au II de l'article L. 138-15, soit au plus tard le 1er octobre de l'année n+1.

• Le a) du 4° du I modifie l'article L. 138-15 du code de la sécurité sociale pour :

- avancer du 15 juillet au 15 juin de l'année n+1 la date à laquelle la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam), l'Agence technique de l'information sur les hospitalisations (ATIH) et l'Agence nationale de santé publique (ANSP) doivent communiquer à l'Acoss le montant total remboursé par l'assurance maladie au titre des médicaments de chaque entreprise ;

- reculer du 15 au 31 juillet de l'année n+1 la date à laquelle le CEPS doit communiquer à l'Acoss le montant des remises consenties par chaque entreprise redevable ;

- préciser que les entreprises concernées sont réputées avoir accepté la liste des médicaments pris en compte dans le calcul de la clause de sauvegarde, en l'absence de demande de rectification de leur part dans un délai de vingt jours à compter de sa communication « sans délai » par l'Acoss.

• Le b) du 4° du I réécrit le IV de l'article L. 138-15, rendu obsolète par la réforme de la procédure d'appel et de liquidation de la clause de sauvegarde portée par la LFSS pour 2024.

Il propose, ainsi, de substituer aux dispositions prévoyant une majoration forfaitaire mise à la charge des entreprises méconnaissance les délais de déclaration, des dispositions prévoyant que, lorsque la communication du montant total remboursé par la Cnam, l'Atif et l'ANSP ne peut être réalisée pour le 15 juin du fait d'un défaut ou d'une absence de transmission des données :

- la date à laquelle les Urssaf notifient à chaque entreprise le montant de la contribution dont elle est redevable, fixée au 1er octobre de l'année n+1, est retardée à due concurrence ;

- la date à laquelle chaque entreprise redevable verse intégralement la contribution due, fixée au 1er novembre de l'année n+1, est reportée un mois après cette dernière notification.

• Les 3° et 4° du I entreraient en vigueur le 1er janvier 2026, avec la réforme de la clause de sauvegarde portée par la LFSS pour 2024. Ils seraient applicables à l'appel et au recouvrement de la contribution due pour 2025.

4. Abrogation des dispositions relatives à l'hépatite C

Le 5° du I de l'article 9 abroge, en outre, les dispositions du code de la sécurité sociale relatives à la contribution à la charge des entreprises exploitant des médicaments dédiés au traitement de l'hépatite C, portées par les articles L. 138-19-1 à L. 138-19-7 du code de la sécurité sociale.

Instaurées par la LFSS pour 2015 suite à l'entrée sur le marché de traitements innovants et onéreux contre le virus de l'hépatite C236(*), ces dispositions demeuraient inutilisées depuis 2018237(*).

5. Fixation des montants M et Z pour 2025

De manière habituelle, l'article 9 du PLFSS fixe, pour l'année 2025, les seuils de déclenchement des clauses de sauvegarde des médicaments et des dispositifs médicaux.

Le II de l'article fixe, ainsi, le montant Z pour 2025 à 2,27 milliards d'euros. Ce montant est inférieur à celui fixé pour 2024, qui s'établissait à 2,31 milliards d'euros. Cette diminution s'explique, toutefois, par l'exclusion de la TVA de l'assiette de la clause de sauvegarde. Selon l'évaluation préalable de l'article, il résulte de l'application d'un taux de progression des dépenses concernées de 4,1 %, après exclusion de la TVA.

Le III de l'article fixe, pour 2025, le montant M à 23,3 milliards d'euros. Ce montant est inférieur à celui fixé pour 2024, qui s'établissait à 26,4 milliards d'euros. Cette diminution s'explique, toutefois, par la réforme de l'assiette de la clause de sauvegarde des médicaments, portée par la LFSS pour 2024 et applicable à compter de l'année 2025.

Selon l'évaluation préalable, le montant M pour 2025, exprimé en chiffre d'affaires, se serait établi à 27,89 milliards d'euros. Il permettrait, en conséquence, une progression de 5,6 % des dépenses. Le Gouvernement indique viser ainsi une « stabilisation des rendements de la clause de sauvegarde par rapport aux déclenchements attendus pour les années 2023 et 2024238(*). »

6. Mesures transitoires relatives à la clause de sauvegarde des médicaments pour 2025

Enfin, le IV de l'article 9 porte diverses mesures transitoires destinées à permettre l'entrée en vigueur de la réforme de l'assiette de la clause de sauvegarde des médicaments et la liquidation de la contribution due au titre de l'année 2025.

• Le 1° du IV précise, d'abord, les modalités de calcul de la part « croissance » de la clause de sauvegarde pour 2025, afin de tenir compte de l'intégration progressive des médicaments acquis par Santé publique France dans l'assiette de la clause. En effet, la loi avait exclu, pour 2024, les médicaments indiqués dans le traitement de la covid-19 de l'assiette de la clause de sauvegarde239(*). Cette exclusion risquerait de majorer artificiellement, en 2025, la part de la clause de sauvegarde calculée en fonction de la progression observée du montant remboursé. Afin de neutraliser cet effet, l'article 9 prévoit d'imputer sur l'année 2024 les montants relatifs au périmètre retenu en 2025.

• Le 2° du IV vise, lorsque les montants remboursés par l'assurance maladie au titre des médicaments en accès compassionnel dispensés en rétrocession pour l'année 2024 ne sont pas connus, à leur substituer les montants remboursés pour l'année 2025. En conséquence, la part « croissance » de la clause de sauvegarde due au titre de l'année 2025 sera nulle pour ces médicaments.

L'évaluation préalable indique qu'il demeure pour ces médicaments, en 2024, « des codes prestations non affinés regroupant plusieurs spécialités ou présentations différentes », qui ne permettront pas d'associer un montant remboursé à une entreprise. Elle affirme, en revanche, que « Pour le 1er janvier 2025, l'ensemble des médicaments en accès compassionnels sera remboursé avec un code UCD ce qui fournira l'information de l'exploitant. »240(*)

• Le 3° du IV, enfin, propose d'exclure de l'assiette de la clause de sauvegarde les spécialités en importation dans le cadre de ruptures et de tensions d'approvisionnement dispensées en rétrocession pour lesquelles aucun code de suivi individuel n'a été créé par l'assurance maladie.

Ces médicaments présentent, d'après l'évaluation préalable, des difficultés similaires d'encodage.

Les dispositions du IV entreront en vigueur au 1er janvier 2026, pour le calcul de la clause de sauvegarde due au titre de l'année 2025.

II - Le dispositif transmis par le Sénat

L'Assemblée nationale a adopté huit amendements rédactionnels du rapporteur général, M. Yannick Neuder, et un amendement rédactionnel du Gouvernement.

Le Gouvernement a transmis au Sénat cet article modifié par ces amendements adoptés par l'Assemblée nationale, en application de l'article LO. 111-7 du code de la sécurité sociale.

Le Gouvernement a transmis au Sénat cet article ainsi modifié.

III - La position de la commission

1. Sur la fixation des montants M et Z pour 2025

La commission des affaires sociales regrette que la clause de sauvegarde, conçue comme un mécanisme de dernier recours permettant le respect de l'Ondam voté, soit désormais devenue de manière pérenne un outil de régulation à part entière des dépenses de médicaments.

Elle a déjà formulé de nombreuses inquiétudes face à cette évolution, à l'occasion de l'examen du projet de loi d'approbation des comptes de la sécurité sociale pour 2022 comme du PLFSS pour 2024. Désormais systématiquement déclenchée pour un rendement très important, la clause de sauvegarde n'en demeure pas moins un outil imparfait de régulation des dépenses des produits de santé.

• Elle apparaît, d'abord, particulièrement imprévisible. Le montant dû au titre de la clause de sauvegarde au titre de l'année n n'est connu des entreprises concernées qu'à la fin de l'année n+1241(*). Le législateur, lui, est contraint de débattre chaque année d'un seuil de déclenchement « M » pour l'année suivante, sans être en mesure de connaître précisément le rendement attendu du dispositif pour l'année n+1, pour l'année n ou, même, pour l'année n-1 du fait des retards régulièrement constatés dans sa liquidation.

À cet égard, la commission a relevé que le produit de la clause de sauvegarde s'est révélé, en 2021 comme en 2022, particulièrement éloigné de celui que le Gouvernement anticipait dans l'évaluation préalable242(*). Elle observe également que les données définitives relatives à la clause de sauvegarde pour 2023 demeuraient indisponibles au début du mois de novembre 2024. Le Leem, interrogé par la rapporteure générale, indiquait ne pas être en mesure d'estimer la contribution due par les entreprises et identifier « un risque de dépassement par rapport aux engagements gouvernementaux (1,6 Md€) pour 2023243(*). »

• Bien que les modalités de répartition de la clause de sauvegarde entre industriels aient été modifiées par la LFSS pour 2023244(*), afin de tenir compte de la croissance des entreprises concernées, le dispositif demeure toutefois largement indiscriminé.

Si plusieurs mesures permettent, dans la fixation du prix des médicaments245(*) comme dans la définition des remises tarifaires246(*), de tenir compte de la criticité thérapeutique d'un médicament ou de la sécurité d'approvisionnement du marché français, les critères légaux de la clause de sauvegarde ne permettent pas une telle prise en compte. Le rapport de la commission d'enquête sénatoriale sur la pénurie de médicaments et les choix de l'industrie pharmaceutique française relevait, à ce sujet, que la clause de sauvegarde « ne permet pas d'adapter l'effort demandé à l'entreprise à la nature des médicaments qu'elle commercialise, aux priorités de santé publique ou à [sa] santé financière »247(*).

• La commission rappelle, par ailleurs, que le rapport de la mission relative à la régulation des produits de santé, confiée par la Première ministre d'alors, Élisabeth Borne, à six personnalités qualifiées248(*), jugeait « plus équitable et économiquement efficace de privilégier les négociations individuelles par laboratoires que de réguler par la clause de sauvegarde ». Il invitait, en conséquence, le Gouvernement à « fixer un objectif de décroissance rapide de [la clause] pour retrouver un niveau de l'ordre de grandeur des montants historiques (soit moins de 500 millions d'euros) et [accepter] de négocier des baisses de prix plus importantes »249(*).

La commission regrette que, compte tenu de la structure actuelle de la régulation des dépenses de médicaments et de l'efficacité des différents outils mobilisables, cet objectif apparaisse aujourd'hui hors de portée. Elle a souligné que l'augmentation rapide du montant M, ces dernières années, permettait seulement de maintenir le rendement de la clause à 1,6 milliard d'euros, un niveau historiquement élevé et incompatible avec l'objet initial comme avec les limites, désormais bien documentées, du dispositif.

• S'agissant de la clause de sauvegarde des dispositifs médicaux, la commission a favorablement accueilli l'augmentation prévue de 4,1 % du montant Z.

Elle a toutefois souligné que ce taux d'évolution s'applique à une base fortement contestée par les représentants du secteur. Le Syndicat national de l'industrie des technologies médicales (Snitem), auditionné par la rapporteure générale, a notamment dénoncé « un Z qui, à l'origine, a été fixé à un niveau trop bas », ne tenant pas suffisamment compte de l'effet de la crise sanitaire sur le chiffre d'affaires du secteur250(*).

2. Sur la réforme de la clause de sauvegarde des médicaments et les mesures de clarification portées par l'article 9

• S'agissant de la réforme de l'assiette de la clause de sauvegarde des médicaments, applicable pour la première fois à la contribution due au titre de l'année 2025, la commission a formulé, à nouveau, les inquiétudes soulignées lors de l'examen du PLFSS pour 2024.

En fondant le calcul de la contribution sur les dépenses remboursées par l'assurance maladie plutôt que sur le chiffre d'affaires déclaré par les industriels, cette réforme est susceptible d'avoir, en effet, des conséquences importantes sur la répartition de la charge entre entreprises. Elle concentre l'effort sur les industriels dont le portefeuille est composé de produits présentant un taux de prise en charge élevé soit, notamment, les médicaments innovants de la liste en sus, ceux intervenant dans le traitement des affections de longue durée (ALD) et ceux présentant un service médical rendu important.

Ce faisant, la réforme entraîne une redistribution de la contribution contraire aux préconisations de plusieurs travaux récents du Sénat. La commission des affaires sociales a, en effet, déjà eu l'occasion de regretter que « la clause de sauvegarde frappe les médicaments indépendamment de leur criticité thérapeutique ou industrielle »251(*). La commission d'enquête relative à la pénurie de médicaments invitait de la même manière, à l'été 2023, à « mieux tenir compte de la criticité thérapeutique [...] des médicaments dans la répartition de la clause de sauvegarde »252(*).

• La commission relève, au surplus, que ces effets redistributifs demeurent largement méconnus.

Le Leem a, ainsi, souligné lors de son audition que les « effets redistributifs [de la réforme] n'ont à ce jour pas fait l'objet d'expertises » et demande, en conséquence, « de reporter d'un an l'entrée en application de la réforme afin de documenter ces effets »253(*). Les évaluations préalables du Gouvernement, annexées aux PLFSS pour 2024 et 2025, ne permettent pas davantage de documenter ces effets.

La commission des affaires sociales demeure attachée à ce que la clause de sauvegarde soit affinée, pour mieux tenir compte des enjeux de santé publique et de la criticité thérapeutique des médicaments qu'elle vise. Elle juge problématique l'entrée en vigueur d'une réforme dont les effets redistributifs, potentiellement contraires à cet objectif, demeurent largement méconnus de l'ensemble des acteurs impliqués.

En conséquence, la commission a adopté un amendement n° 128 de sa rapporteure générale, visant à reporter d'un an l'entrée en vigueur de la réforme de l'assiette de la clause de sauvegarde et à modifier, en conséquence, le montant M pour 2025. Celui-ci s'établirait à 27,89 milliards d'euros, soit un montant présenté comme équivalent par le Gouvernement dans son évaluation préalable, dans le cadre d'une contribution demeurant fondée sur le chiffre d'affaires.

Afin de stabiliser la répartition de la clause de sauvegarde et pour tenir compte de leur contribution à la maîtrise des dépenses d'assurance maladie, la commission a également adopté un amendement n° 129 de sa rapporteure générale plafonnant à 2 % du chiffre d'affaires réalisé la contribution mise à la charge de chaque entreprise pour les spécialités génériques et les spécialités de référence soumises à un tarif forfaitaire de responsabilité. Ce plafond, adopté par le Sénat lors de l'examen du PLFSS pour 2024 à l'initiative du Gouvernement254(*), s'applique à la contribution due pour l'année 2024 et demeurerait, ainsi, applicable en 2025. Ainsi que la commission l'avait déjà proposé l'année dernière, cet amendement vise également à plafonner, dans les mêmes proportions, la contribution assise sur les médicaments matures et peu onéreux, dont le prix de vente au public serait inférieur à un seuil, fixé par décret pour chaque classe thérapeutique.

La commission appelle le Gouvernement à mieux documenter les effets redistributifs de la réforme de l'assiette envisagée pour permettre son entrée en vigueur au 1er janvier 2027 et son application à la clause de sauvegarde pour 2026.

La commission propose d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.

Article additionnel après l'article 9
Améliorer l'information du Parlement sur les dépenses de produits
de santé lors de l'examen du PLFSS

Cet article additionnel vise à améliorer l'information du Parlement sur les dépenses de produits de santé et leur régulation lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS). Pour cela, il contraint le comité économique des produits de santé (CEPS) à transmettre au Parlement, au plus tard le 30 septembre de l'année suivant celle à laquelle il se rapporte, son rapport d'activité ou, à défaut, un rapport d'activité provisoire.

La commission propose d'adopter cet article additionnel ainsi rédigé.

I - Le rôle du CEPS dans la régulation des dépenses de produits de santé et l'information du Parlement

• Organisme interministériel placé sous l'autorité conjointe des ministres chargés de la santé, de la sécurité sociale et de l'économie, le comité économique des produits de santé (CEPS) joue un rôle central dans la régulation des dépenses de produits de santé.

Le CEPS est ainsi, d'abord, chargé par la loi :

- d'élaborer la politique économique du médicament et des dispositifs médicaux, en application de la LFSS adoptée et des orientations qu'il reçoit des ministres compétents ;

- d'assurer un suivi périodique des dépenses, afin de vérifier si l'évolution de celles-ci demeurent compatibles avec le respect de l'Ondam voté255(*).

Pour cela, le CEPS est organisé en deux sections, respectivement chargées des médicaments et des dispositifs médicaux. Il comprend un président et deux vice-présidents, quatre représentants de l'État, trois représentants des caisses nationales d'assurance maladie et un représentant de l'Union des organismes d'assurance maladie complémentaire (Unocam)256(*).

• Le CEPS intervient dans la conception et la mise en oeuvre de l'ensemble des outils de régulation des dépenses de produits de santé.

Le CEPS est chargé, d'abord, de fixer le prix des médicaments. La loi prévoit, ainsi, que le prix de vente au public des médicaments dispensés en officine est fixé par convention entre l'exploitant et le CEPS ou, à défaut, par décision unilatérale de ce dernier. Le prix fixé tient compte, principalement, de l'amélioration du service médical rendu (ASMR) par le médicament257(*).

Le comité intervient également dans la négociation des remises tarifaires, correspondant à des sommes confidentielles remboursées par l'exploitant à l'assurance maladie ne réduisant pas le prix facial affiché. Ces sommes, dont le versement peut ou non être ou non subordonnée à la réalisation d'une ou plusieurs conditions, sont fixées par convention entre l'exploitant et le CEPS ou, à défaut, par décision de ce dernier258(*). Les remises, dont le montant a fortement augmenté ces dernières années, sont devenues un outil de régulation des dépenses de premier plan. En 2022, hors clause de sauvegarde et dispositifs d'accès dérogatoires, elles s'élevaient à 5,7 milliards d'euros259(*).

Le CEPS conduit également, chaque année, des campagnes de baisses de prix destinées atteindre l'objectif d'économies adopté par le Parlement en LFSS. Depuis la LFSS pour 2017, le code de la sécurité sociale énumère les critères généraux pouvant justifier de telles baisses. Celles-ci sont négociées avec les exploitants et fixées par convention ou, à défaut, par décision unilatérale du CEPS260(*). Pour l'année 2025, l'objectif de baisses de prix fixé par le Gouvernement s'élève à 1 milliard d'euros pour les médicaments et 200 millions d'euros pour les dispositifs médicaux261(*).

Enfin, le CEPS participe à la liquidation et au recouvrement de la clause de sauvegarde, sous la forme de remises spécifiques262(*).

• Sur l'ensemble de ces éléments, le CEPS contribue de manière déterminante à l'information du Parlement.

En application de la loi, le comité est, en effet, chargé d'établir un rapport d'activité remis chaque année au Parlement263(*). Ce rapport comprend notamment :

- une description des principes généraux applicables et de la doctrine élaborée par le CEPS en matière de fixation et de révision des prix et des tarifs applicables aux produits de santé ;

- une analyse des marchés du médicament et des dispositifs médicaux et des dépenses qui y sont associées ;

- le niveau et la répartition des baisses de prix et des remises négociées par le CEPS au cours de l'année considérée ;

- le montant de l'assiette et de la contribution due au titre de la clause de sauvegarde de l'année considérée, ainsi que le taux d'abattement observé264(*).

Aucun des documents annexés au PLFSS265(*) par le Gouvernement ne contient ce niveau d'information et d'analyse sur le marché des produits de santé, sa régulation économique et financière.

Ces éléments sont pourtant indispensables à l'élaboration et à l'examen des dispositions du PLFSS visant, chaque année, à fixer le seuil de déclenchement de la clause de sauvegarde et, plus largement, à établir les objectifs de l'année suivante en matière de maîtrise des dépenses de produits de santé.

II - La nécessité de renforcer l'information du Parlement lors de l'examen du PLFSS

• La date à laquelle le rapport d'activité du CEPS peut être transmis constitue, en conséquence, un enjeu important pour le Gouvernement comme pour le Parlement.

Dans un relevé d'observations définitives récent, la Cour des comptes observait que la publication de ce rapport était systématiquement intervenue avec retard depuis 2020 : le rapport d'activité de 2019 a été publié en septembre 2020, celui de 2020 l'a été en décembre 2021, celui de 2021 a été publié fin décembre 2022 et celui de 2022, en janvier 2024. La Cour observe, pourtant, que « la logique institutionnelle voudrait que la direction de la sécurité sociale, chargée de préparer les lois de financement de la sécurité sociale, en soit destinataire au plus tard au début de l'été suivant l'exercice concerné, afin d'orienter le contenu du PLFSS de l'année suivante266(*). »

Pour les mêmes raisons, le Parlement devrait pouvoir disposer de ces informations pour examiner le PLFSS déposé. Le Sénat a, en ce sens et à l'initiative du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, adopté des amendements lors de l'examen des PLFSS pour 2023267(*) et 2024268(*), visant à avancer au 15 septembre de l'année suivante la date de publication du rapport d'activité du CEPS. Ces amendements ont reçu le soutien de la commission des affaires sociales du Sénat et, s'agissant du PLFSS pour 2023, de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale269(*). Ils n'ont, toutefois, pas été retenus dans les textes sur lesquels le Gouvernement a engagé sa responsabilité en nouvelle lecture.

Dans son amendement visant à supprimer ces dispositions du PLFSS pour 2023, le Gouvernement mettait en avant que certaines informations « ne sont pas disponibles au 15 septembre de l'année n+1, du fait notamment des retards pouvant intervenir dans les déclarations de chiffre d'affaires des entreprises pharmaceutiques » nécessaires pour la liquidation de la clause de sauvegarde270(*).

Pour dépasser ces difficultés, la Cour des comptes suggère, dans son relevé d'observations définitives récent, une « scission du rapport d'activité en deux à compter de 2024 (s'agissant de l'activité de 2023), avec une publication des éléments disponibles à l'été »271(*).

• Soucieuse d'améliorer l'information du Parlement lors de l'examen des LFSS tout en préservant le périmètre et la qualité du rapport publié annuellement par le CEPS, la commission propose de retenir cette solution. Elle a adopté, en ce sens, un amendement n° 130 portant article additionnel.

Cet amendement vise à modifier l'article L. 162-17-3 du code de la sécurité sociale pour prévoir que le rapport annuel d'activité du CEPS est remis au Parlement avant le 30 septembre de l'année suivant celle à laquelle il se rapporte. Dans les cas où ce rapport ne pourrait être établi avant cette date, le CEPS devrait remettre au Parlement, dans le même délai, un rapport d'activité provisoire comportant l'ensemble des données utiles disponibles à cette date.

Le caractère indispensable de ces informations pour l'examen des dispositions fixant, chaque année, le seuil de déclenchement de la clause de sauvegarde justifie leur place en deuxième partie du PLFSS.

La commission propose d'adopter cet article additionnel dans la rédaction de l'amendement n° 130.

Article 9 bis (nouveau)
Réforme de la contribution sur les boissons à sucres ajoutés

Cet article, inséré à l'Assemblée nationale par un amendement de M. Cyrille Isaac-Sibille et plusieurs de ses collègues du groupe Les Démocrates, vise à renforcer la fiscalité sur les boissons sucrées en adaptant le barème actuel de la taxe fixé par l'article 1613 ter du code général des impôts.

La commission propose d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.

I - Le dispositif proposé

A. La contribution sur les boissons sucrées : une efficacité limitée, un consensus pour la réformer

La France a été précurseur en instaurant dès 2012 une contribution sur les boissons sucrées. Si elle a été réformée en 2018 pour lui conférer un caractère progressif et donc, plus incitatif, les évaluations conduites par divers experts démontrent toutefois qu'elle produit des effets limités.

1. Une taxe peu incitative au format complexe

a) Un format complexe et peu lisible

• L'article 1613 ter du code général des impôts prévoit la perception d'une contribution sur les boissons et les préparations liquides pour boissons destinées à la consommation humaine contenant des sucres ajoutés, c'est-à-dire celles dans lesquelles la présence de sucres résulte d'une adjonction intentionnelle lors du processus de fabrication.

Cette contribution a été instituée par l'article 27 de la loi de finances initiale (LFI) pour 2012. Son montant a été fixé à 7,31 euros par hectolitre, indépendamment de la teneur en sucres ajoutés contenu dans la boisson. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 a modifié le barème de cette taxe en le corrélant au taux de sucre ajouté contenu dans la boisson272(*). Le barème fixé par cette loi, désormais progressif, se décompose en quinze tranches fiscales. Il est reproduit ci-après.

Au-delà de quinze kilogrammes de sucres ajoutés par hectolitre, pour chaque kilogramme supplémentaire, le montant est majoré de 2,21 euros par hectolitre de boisson. Les boissons contenant moins d'un demi-kilogramme de sucres ajoutés par hectolitre ne sont pas soumises à la contribution.

À l'inverse de celle sur les produits du tabac ou de l'alcool, la fiscalité sur les boissons non alcooliques n'est pas encadrée par le droit européen ; ses règles relèvent donc uniquement de la législation nationale.

Tarif de la contribution sur les boissons contenant des sucres ajoutés

Quantité de sucre
(en kg de sucres ajoutés
par hl de boisson)

Tarif applicable
(en euros par hl de boisson)

Inférieure ou égale à 1

3,17

2

3,7

3

4,22

4

4,74

5

5,8

6

6,86

7

7,91

8

10,02

9

12,13

10

14,23

11

16,34

12

18,45

13

20,56

14

22,67

15

24,78

• Les boissons concernées par cette contribution sont les suivantes :

- les colas, boissons aux fruits, limonades, limes, tonics ;

- les boissons à base de lait (notamment le lait aromatisé ou chocolaté), de cacao, de café, de thé ou de sirops ;

- les boissons à base de soja, de céréales, de graines ou de fruits à coque, y compris lorsque ces boissons sont présentées comme des substituts de lait ;

- les préparations toniques susceptibles d'être consommées sans être diluées, lorsqu'elles ne constituent pas des médicaments ;

- les jus de fruits ou de légumes dilués.

En revanche, sont exclus du champ de la contribution le lait, la crème de lait et les yaourts à boire, les sirops et les fruits ou légumes mixés de type smoothies lorsqu'ils ne sont pas mélangés à des jus.

b) Un effet peu incitatif

• Si l'on considère que la taxe sur les boissons à sucres ajoutés poursuit un objectif comportemental, ses impacts doivent être évalués de deux points de vue : l'évolution du prix des produits ciblés, dont la hausse devrait décourager leur achat par les consommateurs ; la transformation de la composition des produits par les industriels, compte tenu de leur intérêt à bénéficier d'un niveau de taxation plus faible.

L'impact de la contribution sur les boissons à sucres ajoutés a fait l'objet d'une évaluation, dans son format issu de la révision opérée en 2018, par une équipe de recherche interdisciplinaire sous le patronage de l'École des hautes études en santé publique (EHESP)273(*). Celle-ci conclut à des pratiques hétérogènes de la part des fabricants et à un nombre de reformulations limité, témoignant d'un faible impact de la taxe. Le rapport constate finalement « une faible baisse des achats de sucres en provenance de boissons existantes ciblées par la taxe, notamment en comparaison aux effets bien plus importants documentés au Royaume-Uni ».

• Au Royaume-Uni, la contribution sur les boissons sucrées a eu un effet substantiellement plus important que celui constaté en France. Cette taxe présente un format relativement simple et lisible : son barème est fixé en deux tranches, avec des différentiels de taxation significatifs d'une tranche à l'autre, créant des effets de seuils importants. Le barème de la taxe britannique ménage en outre une tranche « vierge » pour permettre aux boissons présentant un taux de sucres inférieur à 5 milligrammes par litre d'échapper à la taxation.

L'évaluation de cette taxe démontre qu'après son entrée en vigueur, environ un tiers des marques de boissons à sucres ajoutés ou avec édulcorants ont procédé à des reformulations.

Comparaison des taxes sur les boissons sucrées au Royaume-Uni et en France

 

Royaume-Uni

(taux de sucres total)

France

(taux de sucres ajoutés)

Boissons contenant moins de 50 g de sucres pour 1 litre

(soit moins de 5 kg de sucres par hectolitre)

Pas de taxe

De 3,03 € à 4,55 € pour 1 kg à 4 kg de sucres ajoutés par hectolitre

Boissons contenant 50 g à 80 g de sucres pour 1 litre

(soit 5 à 8 kg de sucres par hectolitre)

18 pence (0,21 €) par litre

21 € pour 5 à 8 kg de sucres par hectolitre

De 5,56 € à 9,6 €
pour 5 à 8 kg de sucres ajoutés par hectolitre

Boissons contenant plus de 80 g de sucres pour 1 litre

(soit plus de 8 kg de sucres par hectolitre)

24 pence (0,28 €) par litre

28 € pour plus de 8 kg de sucres par hectolitre

De 11,62 € à 23,74 €
pour 9 à 15 kg de sucres ajoutés par hectolitre

Source : Mecss du Sénat, rapport d'information n° 638

• Par ailleurs, il convient de relever que le montant des recettes fiscales issues de cette contribution est en croissance constante depuis 2018, ce qui témoigne de l'augmentation continue de la consommation de boissons à sucres ajoutés. En 2023, le produit de la contribution sur les boissons à sucres ajoutés s'élevait à 443 millions d'euros. Il est intégralement affecté à la branche « assurance maladie, invalidité et maternité » du régime de protection sociale des personnes non salariées des professions agricoles (2° de l'article L. 722-8 code rural).

2. Un consensus pour faire évoluer la taxe sur les boissons à sucres ajoutés

Le barème actuel, trop complexe, est également peu lisible pour les industriels, ce qui ne favorise pas leur repositionnement sur le marché. Alors que l'impact recherché réside principalement dans l'incitation des industriels à opérer une reformulation de la composition de leurs produits, le caractère très progressif de la contribution ne les incite que peu à baisser le taux de sucres ajoutés pour limiter l'impact de la taxe.

• La mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) du Sénat a récemment conduit des travaux sur la fiscalité comportementale, qui la conduisent à recommander de renforcer la fiscalité appliquée aux boissons à sucres ajoutés274(*). Dans le rapport auquel ces travaux ont donné lieu, les sénatrices Elisabeth Doineau et Cathy Apourceau-Poly, comparant les effets de la taxe française et ceux de la taxe britannique, relevaient :

« Alors que le format de la taxe française sur les boissons sucrées apparaît complexe et peu incitatif, une fiscalité simplifiée, lisible dans ses objectifs et aisément compréhensible par les acteurs du marché faciliterait donc le repositionnement des industriels. En agissant avec peu de tranches fiscales et des effets de seuil significatifs, les fabricants sont davantage incités à reformuler la composition de leurs produits et les reports d'achats des consommateurs sont plus nets, en raison d'effets marqués sur les prix. »

En conséquence, les rapporteures ont recommandé de réformer le barème de la taxe sur les boissons à sucres ajoutés, en augmentant ses taux et en limitant le nombre de tranches d'imposition, afin de renforcer son efficacité et d'accentuer sa visée comportementale (proposition n° 11).

• De même, les députés Cyrille Isaac-Sibille et Thierry Frappé, à l'occasion des travaux concluant le Printemps social de l'évaluation à l'Assemblée nationale, préconisaient de réformer le dispositif de la contribution sur les boissons à sucres ajoutés en revalorisant son montant et en simplifiant son format, sur le modèle de la taxe britannique275(*).

• Enfin, dans une note de juillet 2023, le Conseil des prélèvements obligatoires recommandait de renforcer l'efficacité de la fiscalité sur les boissons à sucres ajoutés en augmentant le barème de la contribution, voire en élargissant son assiette aux boissons à base de soja et aux sirops276(*).

B. Une révision de la contribution sur les boissons sucrées qui s'inspire du modèle britannique

1. Un barème fiscal simplifié

Cet article propose de simplifier le barème de la contribution sur les sucres ajoutés en ne conservant que trois tranches au lieu de quinze. Son format s'inspire donc de la taxe en vigueur au Royaume-Uni.

Toutefois, la première tranche fait bien l'objet d'une taxation alors que la taxe britannique préserve une tranche vierge pour permettre aux boissons faiblement sucrées d'échapper à la taxe.

Barème proposé par cet article

Quantité de sucre (en kilogrammes de sucre ajouté par hectolitre de boisson)

Tarif applicable
(en euros par hectolitre de boisson)

Inférieure à 5

3,5

Entre 5 et 8

21

Au-delà de 8

28

2. Un barème fiscal revalorisé par rapport au droit actuel

Le barème fiscal proposé constitue une nette revalorisation des taux actuellement en vigueur.

En effet, par rapport au barème fiscal actuel, le premier palier serait à peine en-deçà de la moyenne des tarifs appliqués pour les boissons contenant jusqu'à 5 kilogrammes de sucre ajouté par hectolitre de boisson (cette moyenne équivaut aujourd'hui à 3,79 euros), le second palier correspondrait à un triplement de la moyenne des tarifs appliqués pour les boissons contenant entre 5 et 8 kilogrammes de sucre ajouté par hectolitre de boisson (cette moyenne équivaut aujourd'hui à 7,3 euros) et à une hausse de 60 % du tarif moyen des dernières tranches (qui équivaut actuellement à 17,7 euros en moyenne).

Comparaison du tarif proposé par cet article et du tarif moyen actuel

Quantité de sucre
(en kg de sucre ajouté par hl de boisson)

Tarif moyen actuel
(en euros par hl de boisson)

Tarif projeté
(en euros par hl de boisson)

Inférieure à 5

3,79

3,5

Entre 5 et 8

7,3

21

Au-delà de 8

17,7

28

Cette revalorisation vise d'une part à inciter plus fortement les industriels à baisser le taux de sucres ajoutés dans leurs boissons, d'autre part à produire un effet plus important sur le prix des boissons et donc le comportement des consommateurs. Au global, ce barème devrait à court terme engendrer une augmentation du rendement de la taxe.

Selon le Gouvernement, cet article augmenterait le produit de la taxe sur les boissons sucrées de 150 millions d'euros à comportements inchangés.

II - La position de la commission

• Le surpoids, l'obésité et les diverses maladies chroniques qui leur sont associées telles que les maladies cardio-vasculaires, le diabète de type 2 ou les cancers, représentent un véritable fardeau économique et sanitaire. On estime ainsi que la seule obésité serait responsable de 27 000 décès chaque année en France et présenterait un coût évalué à 9,5 milliards d'euros.

L'OMS recommande la mise en oeuvre de taxes sur les boissons sucrées comme un instrument de politique sanitaire. Au cours des dix dernières années, près d'une cinquantaine de pays dans le monde s'est doté de ce type de taxe, à l'instar de la France. Ce mouvement reflète une adhésion générale à la taxation d'un aliment de faible qualité nutritionnelle et aisément substituable dans le panier des consommateurs.

Loin d'être régressive, la fiscalité comportementale vise au contraire à corriger des inégalités nutritionnelles préexistantes. Ainsi, le programme national nutrition santé (PNNS) de 2019-2023 indique que les individus dont le niveau d'étude équivaut au primaire ou au collège ont une consommation de boissons de type sodas deux fois plus élevée que celle des individus dont le niveau d'étude équivaut au moins à bac + 4 et leur consommation de fruits est 1,5 fois moins élevée. Cet effet de correction des inégalités nutritionnelles qui se reflètent dans le profil socio-économique des individus est également souligné par le Haut Conseil de la santé publique.

• Ayant récemment approuvé les conclusions des travaux conduits sur la fiscalité comportementale par les sénatrices Elisabeth Doineau et Cathy Apourceau-Poly dans le cadre de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss)277(*), la commission soutient le renforcement de la taxation des boissons à sucres ajoutés en l'inscrivant dans une visée comportementale.

À cet égard, elle propose a minima de rehausser le tarif de la première tranche par rapport aux tarifs actuellement appliqués, soit 3,79 euros pour les boissons contenant jusqu'à 5 kilogrammes de sucre ajouté par hectolitre. L'amendement n° 131 permet ainsi de fixer le montant de la première tranche à 4 euros par hectolitre, contre 3,5 euros dans la rédaction de l'article issue des travaux de l'Assemblée nationale.

Elle propose également d'augmenter le tarif de la dernière tranche qui pèse sur les boissons les plus sucrées et donc, les plus défavorables du point de vue de l'équilibre nutritionnel. Alors que l'augmentation pratiquée par la deuxième tranche du nouveau barème correspond à un triplement de la moyenne des tarifs appliqués pour les boissons contenant entre 5 et 8 kilogrammes de sucre ajouté, la hausse pratiquée par la dernière tranche n'engendre qu'une hausse de 60 % de la moyenne des tarifs actuellement pratiqués pour les boissons contenant plus de 8 kilogrammes de sucre ajouté par hectolitre. L'amendement n° 132 vise à ainsi à fixer le tarif de la dernière tranche à 35 euros par hectolitre de boisson, pour correspondre à un doublement de la moyenne des tarifs actuels pour les boissons entrant dans cette tranche fiscale.

• La commission relève par ailleurs que la contribution sur les boissons édulcorées n'a pas été révisée depuis 2012. Celle-ci conserve un caractère linéaire, son montant étant fixé forfaitairement à 3,17 euros par hectolitre, sans corrélation avec le taux d'édulcorants contenu dans le produit. Cette contribution ne produit donc aucun effet désincitatif vis-à-vis des industriels ou des consommateurs.

Pourtant, si les édulcorants permettent une réduction de l'apport calorique global, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) considère qu'il n'existe pas d'élément probant permettant d'encourager, dans le cadre d'une politique de santé publique, la substitution des sucres par des édulcorants intenses. Cet objectif de réduction des apports en sucres doit être atteint par la réduction globale du goût sucré de l'alimentation, et ce dès le plus jeune âge. En outre, d'autres études plus récentes indiquent un lien entre la consommation d'édulcorants de synthèse et un risque accru de cancer.

Par l'amendement n° 133, la commission propose donc de renforcer la fiscalité sur les boissons édulcorées en instaurant un barème progressif à deux seuils, en substitution au barème actuel fixé à l'article 1613 quater du code général des impôts. Le premier seuil est augmenté par rapport au tarif actuellement en vigueur et ne s'appliquerait plus qu'aux boissons contenant jusqu'à 120 milligrammes d'édulcorants de synthèse par litre ; un second seuil serait créé, d'un montant supérieur, qui s'appliquerait aux boissons contenant des édulcorants de synthèse au-delà de cette concentration.

La commission propose d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.

Article additionnel après l'article 9 bis
Renforcement de la fiscalité sur les jeux

Cet article additionnel vise à renforcer la fiscalité sur les jeux d'argent et de hasard et à créer une contribution sur les publicités et les offres promotionnelles relatives à ces jeux.

Il ne porte pas sur les paris hippiques, physiques et en ligne, afin de ne pas fragiliser l'équilibre financier de la filière hippique.

La commission propose d'adopter cet article additionnel ainsi rédigé.

I - L'addiction au jeu : une problématique de santé publique

• L'ouverture à la concurrence du marché des jeux en ligne par la loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 pour le poker, les paris sportifs et les paris hippiques, a engendré un fort développement de ce secteur d'activité.

En 2023, le marché français des jeux d'argent réalise un produit brut de 13,4 milliards d'euros, soit une augmentation de 3,5 % par rapport à 2022, et de 2,3 milliards d'euros pour le seul secteur des jeux en ligne, soit une hausse de 7,2 % par rapport à l'année précédente. En 2019, les jeux les plus vendus ou pratiqués sont les jeux de loterie, suivis des paris sportifs.

Composition du secteur des jeux d'argent et de hasard

Source : « Les jeux d'argent et de hasard : un secteur en mutation, des enjeux de régulation », rapport de la Cour des comptes, septembre 2023

L'assurance maladie indique qu'entre 2,4 et 2,9 millions de joueurs en ligne étaient dénombrés en 2017. 13 % d'entre eux sont considérés comme des « joueurs excessifs », soit une proportion en nette progression depuis 2012. En cinq ans, les montants misés par les joueurs ont été multipliés par 2,8. En outre, bien que les jeux d'argent et de hasard soient interdits aux mineurs, une enquête Escapad278(*) de l'Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT) portant sur un public de 17 ans montre qu'en 2017, 38,9 % des jeunes de cet âge avaient joué au moins à un type de ces jeux dans l'année, et que 10,1 % d'entre eux y avaient joué dans la semaine.

• L'addiction au jeu est une addiction comportementale reconnue comme une pathologie, pour laquelle existent des dispositifs de prévention et de prise en charge spécifiques. Ce type d'addiction induit de nombreuses conséquences négatives pour les individus concernés : difficultés financières, problèmes familiaux, isolement social, troubles anxieux et troubles de l'humeur, consommation accrue d'alcool, de tabac et de cannabis...

L' ordonnance n° 2019-1015 du 2 octobre 2019 a réformé l'organisation de la régulation des jeux d'argent et de hasard. Elle inscrit parmi les objectifs poursuivis par l'État au titre de sa politique d'encadrement de l'offre et de la consommation des jeux la prévention du jeu excessif et la protection des mineurs. Outre que le renforcement de la fiscalité prévu par le présent article contribue à la poursuite de cet objectif, il permettrait de générer de nouvelles recettes affectées à la branche maladie.

II - Le dispositif proposé

• Le présent article renforce, d'une part, la fiscalité sur les jeux d'argent et de hasard, notamment les jeux automatiques des casinos, les paris sportifs, les jeux de cercle et les jeux de cercle en ligne.

À cet égard, le présent article rehausse :

- de 11,2 % à 11,9 % le taux de la contribution due sur une fraction égale à 68 % du produit brut des jeux automatiques des casinos (1° du I modifiant l'article L. 136-7-1 du code de la sécurité sociale) ;

- de 6,6 % à 7,6 % le taux de la contribution sur le produit brut des jeux pour les paris sportifs commercialisés en réseau physique de distribution, et de 10,6 % à 15 % pour les paris sportifs en ligne (2° du I modifiant l'article L. 137-21 du code de la sécurité sociale) ;

- le prélèvement sur les jeux de cercle en ligne, actuellement fixé à 0,2 % du montant des sommes engagées par les joueurs, en le fixant à 10 % du montant du produit brut des jeux, constitué par la différence entre les sommes misées par les joueurs et les sommes versées ou à reverser aux gagnants (3° du I modifiant l'article L. 137-22 du code de la sécurité sociale).

Le prélèvement sur les jeux de cercle en ligne est également étendu aux jeux de cercle organisés sous forme de tournois (4° du I modifiant l'article L. 137-23 du code de la sécurité sociale).

• Le présent article prévoit, d'autre part, d'instaurer une contribution sur la publicité et les offres promotionnelles des opérateurs développant des activités de jeux d'argent et de hasard.

En insérant dans le code de la sécurité sociale un nouvel article L. 137-27 (4° du I), il crée une contribution au profit de la Caisse nationale de l'assurance maladie pesant sur les opérateurs se livrant à l'exploitation de divers jeux d'argent et de hasard, notamment les casinos, les jeux de loterie, les paris sportifs en réseau physique de distribution et les paris sportifs et jeux de cercle en ligne279(*).

Cette contribution, dont le taux est fixé à 15 %, est assise sur le montant des charges des opérateurs précités comptabilisées au titre des frais de publication et des achats d'espaces publicitaires, ainsi que des prestations externalisées de même nature.

• Enfin, le présent article abroge l'article L. 2333-57 du code général des collectivités territoriales, qui prévoit que les casinos installés à bord des navires de commerce transporteurs de passagers battant pavillon français, à l'exception de ceux immatriculés à Wallis-et-Futuna, sont soumis :

- à la contribution sur le produit brut des jeux automatiques des casinos (III de l'article  L. 136-7-1 du code de la sécurité sociale) que le présent article rehausse de 11,2 % à 11,9 % ;

- à une contribution de 3 % assise sur la totalité du produit brut des jeux dans les casinos régis par la loi du 15 juin 1907 relative aux casinos.

Cette abrogation permet de clarifier et d'harmoniser le régime de la fiscalité des jeux applicable à l'ensemble des casinos.

• Il est prévu que les dispositions du présent article s'appliquent aux contributions et prélèvements dus à compter de l'exercice 2025.

Le rendement de cet article additionnel est estimé à environ 0,2 milliard d'euros.

La commission propose d'adopter cet article additionnel dans la rédaction de l'amendement n° 134.

Article additionnel après l'article 9 bis
Anticipation de la hausse de prix du paquet de cigarettes

Cet article vise à augmenter le barème de l'accise sur les produits du tabac afin de s'approcher dès 2025 de l'objectif d'un paquet de cigarettes à 13 euros en 2027 figurant dans le plan national de lutte contre le tabac (PNLT) 2023-2027.

La commission propose d'adopter cet article additionnel ainsi rédigé.

I - La fiscalité, outil le plus efficace pour réduire la prévalence du tabagisme

A. Le tabagisme : 75 000 morts prématurées par an et une contribution au déficit public d'une quinzaine de milliards d'euros

Selon l'Observatoire français des drogues et toxicomanies (OFDT), en 2019, 73 189 décès prématurés auraient été imputables au tabac. Compte tenu d'une espérance de vie à la naissance de 83 ans, ces personnes perdraient 14 années de vie pour le tabac (décès à 69 ans en moyenne).

Par ailleurs, le coût net du tabac pour les finances publiques serait de 1,7 milliards d'euros.

 
 
 

Nombre de décès prématurés

Coût net pour
les finances publiques*

Coût social total

* Cette estimation ne prend pas en compte l'impact négatif sur le PIB.

Source : Pierre Kopp, Le coût social des drogues : estimation en France en 2019, OFDT, juillet 2023

Toutefois, comme souligné par la commission dans un récent rapport d'information280(*), l'impact de la perte de PIB sur les finances publiques pourrait susciter un déficit supplémentaire de plus de dix milliards d'euros.

B. L'inefficacité de la fiscalité du tabac n'est qu'apparente

1. Une prévalence du tabagisme toujours forte malgré le niveau élevé de la fiscalité

a) Une fiscalité élevée

En France, la fiscalité des produits du tabac rapporte à la sécurité sociale 13 milliards d'euros par an.

Un paquet de 20 cigarettes était vendu au 1er janvier 2024 environ 12 euros, dont environ 8 euros d'accise sur les tabacs, 2 euros de TVA, 1 euro de rémunération du buraliste et 1 euro de marge du fabriquant.

La France fait partie des six États de l'OCDE où le prix du paquet de cigarettes est le plus élevé. En Europe, seuls le Royaume-Uni et l'Irlande ont des tarifs supérieurs.

b) Une prévalence du tabagisme elle aussi élevée

On pourrait donc s'attendre, compte tenu des moyens mis en oeuvre, à ce que la politique de lutte contre le tabagisme soit un succès.

Pourtant, contrairement aux autres États couvertes par l'OCDE, la France affiche une prévalence du tabagisme à peu près stable depuis 1960, malgré l'effet de la hausse de la fiscalité de 2018-2020.

Proportion de fumeurs quotidiens parmi la population de 15 ans et plus
selon l'OCDE (1960-2022)

(en %)

Source : D'après l'OCDE

2. la fiscalité : l'outil le plus efficace, même s'il ne peut suffire

Si on regarde attentivement le graphique ci-avant, on constate toutefois que les deux fortes hausses de la fiscalité, en 2003-2004 et en 2017-2020, ont coïncidé avec une baisse de la prévalence du tabagisme.

Ainsi, selon l'OMS, « l'augmentation des taxes sur les produits du tabac est la mesure de lutte antitabac la plus efficace »281(*).

Cela était reconnu par le précédent Gouvernement, même s'il ne prévoyait pas d'augmentation de la fiscalité des cigarettes. Ainsi, comme Aurélien Rousseau, alors ministre de la santé et de la prévention, l'indiquait dans son « édito » au PNLT 2023-2027, « le levier du prix, c'est ce qui fonctionne le mieux ».

La quasi-totalité des études disponibles concernent l'élasticité-prix de la demande de cigarettes (c'est-à-dire la manière dont le prix influe sur le nombre total de cigarettes vendues), et non la manière dont la prévalence du tabagisme (c'est-à-dire la proportion de fumeurs dans la population) dépend d'une augmentation du prix de la cigarette, qui est ce qui importe du point de vue de la santé publique.

Certaines études282(*) suggèrent qu'aux Etats-Unis l'élasticité-prix de la demande de cigarettes proviendrait pour environ la moitié de la baisse du nombre de fumeurs et la moitié de celle du nombre de cigarettes par fumeur.

Il ne semble pas exister de telle étude dans le cas de la France.

On observe toutefois que même s'il n'existe pas de corrélation, au sens statistique du terme, entre croissance du prix du paquet de cigarettes et évolution du taux de prévalence du tabagisme, la première conditionne fortement la seconde, comme le montre le graphique ci-après.

Impact de la croissance du prix du paquet de cigarettes sur
la prévalence du tabagisme (2001-2022)

Les prévalences absentes ont été interpolées de manière linéaire.

Source : Mecss du Sénat, d'après des données de l'OFDT

Schématiquement, si une année donnée le prix des cigarettes augmente de moins de 4 %, la prévalence du tabagisme augmente ; si elle augmente de plus de 4 %, elle diminue (d'environ 0,2 point pour une augmentation autour de 5 %).

3. Une occasion historique : sécuriser par la fiscalité la sortie des jeunes du tabagisme

La perspective d'une baisse importante de la prévalence du tabagisme au cours des prochaines décennies est aujourd'hui enfin envisageable, du fait de sa récente diminution parmi les lycéens, dont on peut espérer qu'elle s'étendra à l'ensemble de la population au fil du renouvellement générationnel.

Cette baisse résulte notamment du prix élevé de la cigarette, qui dissuade l'entrée dans le tabagisme.

Usage du tabac au lycée

(en %)

Source : Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT)

Le revenu moyen d'une classe d'âge augmente au cours du temps, du fait de la croissance du PIB, mais aussi du fait que le revenu augmente en fonction de l'âge.

La reprise d'une certaine augmentation de la fiscalité du tabac (en plus de l'indexation actuelle sur l'inflation des tarifs et minima de perception) est donc nécessaire si l'on veut s'assurer que les personnes qui ne sont pas entrées dans le tabagisme au lycée n'y entrent pas plus tard.

4. Des « effets pervers » de la fiscalité à relativiser

a) La diminution du nombre de buralistes vient essentiellement d'autres facteurs

Il n'y a pas de corrélation évidente entre les hausses de prix des cigarettes et l'évolution du nombre de buralistes (cf. graphique ci-après). De fait, ceux-ci ne réalisent qu'une faible part de leurs marges sur la vente de produits du tabac.

Évolution du nombre de buralistes

Source : Confédération des buralistes

Il résulte du mécanisme de la « remise » qu'une augmentation du prix du tabac se traduit normalement par une augmentation des bénéfices des buralistes sur la vente des produits du tabac283(*). Par ailleurs, les produits du tabac représentent moins de la moitié des ventes des buralistes284(*) et une part bien plus faible de leurs marges285(*). L'impact de la hausse du prix du tabac sur les bénéfices des buralistes, indirect et difficilement chiffrable, vient essentiellement du fait que le tabac joue le rôle de « produit d'appel ».

D'autres facteurs ont joué un rôle, comme une image moins favorable des produits du tabac, la désertification des centres-villes et les départs à la retraite.

b) Il n'est pas prouvé que le marché parallèle se développe et que la fiscalité y contribue

Par ailleurs, l'argument de l'industrie du tabac selon lequel les hausses de prix favoriseraient l'augmentation du marché parallèle (c'est-à-dire le commerce transfrontalier légal, la contrebande et la contrefaçon) doit être relativisé.

Ses estimations, figurant dans une étude annuelle commandée au cabinet KPMG par Philip Morris et reposant sur des données fournies par l'industrie du tabac, s'appuient sur une méthodologie peu transparente et sont contestées, notamment, par la Direction générale des finances publiques (DGFiP), la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) et l'Observatoire français des drogues et des tendances addictives (ODFT).

Par ailleurs, comme le montrent les graphiques ci-après, selon les chiffres de l'industrie du tabac, l'augmentation continue depuis 2010 de la part du marché parallèle proviendrait essentiellement de la diminution du nombre de cigarettes vendues par les buralistes, l'augmentation du nombre de cigarettes vendues dans le cadre du marché parallèle étant bien moins spectaculaire, et concentrée sur les seules années 2021 et 2022.

Principales estimations du marché parallèle

en % du nombre total de cigarettes

en milliards de cigarettes

 
 

Source : Mecss du Sénat, d'après les sources indiquées

C. Les conditions d'une trajectoire de forte augmentation de la fiscalité du tabac ne semblent toutefois pas réunies

Aussi, un récent rapport d'information286(*) de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) de la commission des affaires sociales du Sénat préconise287(*) de renouer avec une augmentation des prix du tabac significativement supérieure à l'inflation, afin notamment de conforter la forte baisse de la prévalence du tabagisme quotidien chez les lycéens.

Toutefois les conditions d'une trajectoire de forte augmentation du prix du tabac ne semblent pas réunies. En effet, une telle augmentation impliquerait tout d'abord de mieux évaluer le nombre de cigarettes vendues dans le cadre du marché parallèle. Elle impliquerait aussi, comme cela a été souligné lors de l'examen en séance du présent PLFSS par l'Assemblée nationale, de renforcer la lutte contre le commerce illicite, mais aussi contre le commerce transfrontalier licite, en particulier en promouvant une révision en ce sens des directives tabac. Aussi, le rapport précité de la Mecss assortit sa proposition d'augmenter les prix du tabac d'une proposition concernant ces différents sujets288(*).

II - Le dispositif proposé : une augmentation temporaire du barème de l'accise sur les produits du tabac

A. Une fiscalité correspondant à plus de 80 % du prix des cigarettes

1. Un produit de plus de 13 milliards d'euros

Le produit de l'accise sur les tabacs est de plus de 13 milliards d'euros.

Malgré la diminution de la consommation qu'elle a entraînée, l'augmentation des tarifs et taux de l'accise en 2017-2020 en a fortement accru le produit, comme le montre le graphique ci-après.

Produit de l'accise sur les tabacs

(en millions d'euros)

Source : DGFiP

Plus de 80 % du produit de l'accise sont assis sur les cigarettes, comme le montre le tableau ci-après.

Répartition par catégorie du produit de l'accise sur le tabac

(en euros)

 

Total 2023

Cigarettes

10 941 173 953

Tabac à rouler

1 977 215 953

Cigares

317 077 182

Tabac à priser ou à mâcher

25 387 975

TOTAL

13 260 855 064

Source : Direction générale des douanes et droits indirects

2. Un prix de vente dont plus de la moitié correspond à l'accise sur le tabac

Le prix de vente des différents produits est fixé par les fabricants et homologué par arrêté sur l'ensemble du territoire.

À partir de ce prix de vente sont calculés :

- la « remise », qui constitue la rémunération du buraliste et dont le taux est actuellement de 10,19 % ;

- l'accise sur les produits du tabac, égale soit à un minimum de perception, soit à la somme du prix de vente multiplié par le taux de l'accise et du tarif de l'accise. Les minima, taux et tarifs diffèrent selon la catégorie fiscale289(*). Les minima et tarifs sont indexés chaque 1er janvier sur l'inflation par arrêté. La LFSS 2023 a supprimé la disposition selon laquelle leur évolution annuelle ne pouvait excéder 1,8 %290(*) ;

- la TVA dite « en dedans », correspondant à 16,6667 % du prix de vente291(*).

À titre d'illustration, le tableau ci-après décompose le prix d'un paquet de cigarettes au 1er janvier 2024.

Celui-ci est d'environ 12 euros, dont 8 euros d'accise (taux en % du prix de vente plus tarif à l'unité), 2 euros de TVA (taux de 16,6667 % du prix de vente), 1 euro pour le buraliste (taux de 10,09 % du prix de vente) et 1 euro pour le fabricant (par différence).

Décomposition du prix d'un paquet de 20 cigarettes (1er janvier 2024)

(en euros)

Structure du prix

Taux / Tarif

Cigarettes
« bas de marché »

Cigarettes « premium »

Prix de vente au détail (pour un paquet de 20 cigarettes)

 

11,50

12,50

Accise hors minimum de perception

     

Taux de l'accise

55 %

6,33

6,88

Tarif de l'accise (en € pour 1 000 unités)

71,30

1,43

1,43

Minimum de perception (en € pour 1 000 unités) - non concerné ici

371,40

7,43

7,43

TVA « en dedans » sur le prix de vente au détail

16,6667 %

1,92

2,08

Remise brute du débitant de tabac

10,19 %

1,17

1,27

Marge du fabricant

 

0,66

0,84

Total

 

11,5

12,5

Source : Direction générale des douanes et droits indirects

3. Une accise reposant sur un pourcentage du prix de vente et un prix unitaire indexé sur l'inflation

Pour chaque catégorie de produits, l'accise repose sur un pourcentage du prix de vente et un prix unitaire indexé sur l'inflation.

Le tableau ci-après indique le barème applicable en 2024.

Taux, tarif et minima de perception applicables en 2024
pour l'accise sur les tabacs

Catégorie fiscale

Paramètres de l'accise

Montant

Cigares et cigarillos

Taux (%)

36,3

Tarif (€/1 000 unités)

54,7

Minimum de perception
(€/1 000 unités)

296,6

Cigarettes

Taux (%)

55

Tarif (€/ 1000 unités)

71,3

Minimum de perception
(€/1 000 unités)

371,4

Tabacs fine coupe destinés à
rouler les cigarettes

Taux (%)

49,1

Tarif (€/1 000 grammes)

99,7

Minimum de perception
(€/1 000 grammes)

345,4

Tabacs à chauffer commercialisés
en bâtonnets

Taux (%)

51,4

Tarif (€/1 000 unités)

30,2

Minimum de perception
(€/1 000 unités)

268

Autres tabacs à chauffer

Taux (%)

51,4

Tarif (€/1 000 grammes)

113,9

Minimum de perception
(€/1 000 grammes)

1011,3

Autres tabacs à fumer ou à inhaler
après avoir été chauffés

Taux (%)

51,4

Tarif (€/1 000 grammes)

35,2

Minimum de perception
(€/1 000 grammes)

149,5

Tabacs à priser

Taux (%)

58,1

Tabacs à mâcher

Taux (%)

40,7

Source : Arrêté du 22 décembre 2023 modifiant l'arrêté du 13 décembre 2022 constatant divers tarifs et seuils de régimes d'impositions relatifs à certaines impositions sur les biens et services

B. Le dispositif proposé par le présent article additionnel

1. Une augmentation temporaire de la fiscalité pour approcher dès à présent son produit de 2027

Cet article additionnel propose d'accélérer la hausse du prix des cigarettes par une augmentation de la fiscalité, en approchant dès à présent l'objectif, fixé par le plan national de lutte contre le tabac (PNLT) 2023-2027, d'un prix moyen du paquet de vingt cigarettes de 13 euros. L'impact de cette hausse de la fiscalité sur le prix du paquet de cigarettes dépendra toutefois de la réaction des industriels du tabac.

Les prix des produits du tabac sont libres mais doivent être uniques sur l'ensemble du territoire et homologués par arrêté. Afin de laisser aux industriels du tabac le temps d'ajuster leurs prix, l'augmentation de l'accise ne serait effective qu'à compter du 1er mars 2025.

2. Un produit que l'on peut estimer à environ 200 millions d'euros en 2025 compte tenu des changements de comportement espérés

À comportements inchangés, le montant de l'accise serait accru d'environ 0,7 milliard d'euros en 2025. Toutefois cet article additionnel n'a pas pour objet d'augmenter les recettes, mais bien d'infléchir les comportements. Après prise en compte de la moindre consommation de cigarettes, le rendement serait d'environ 0,2 milliard d'euros.

L'augmentation de la fiscalité proposée par cet amendement remplace une augmentation progressive du prix par une « marche » plus haute, sans modifier la cible de prix fixée en 2027 par le PNLT.

Le renouvellement de mesures remplaçant une hausse de prix continue par des hausses « en marche d'escalier », sans remettre en cause la tendance de long terme, pourrait être une manière efficace de lutter contre le tabagisme, sans amener le prix des cigarettes à des niveaux très élevés, difficilement soutenables sur la durée. L'évaluation ex post de la mesure proposée par cet amendement sera l'occasion d'apprécier l'efficacité de cette utilisation de l'outil fiscal. 

La commission propose d'adopter cet article additionnel dans la rédaction de l'amendement n° 135.

Article 9 ter (nouveau)
Extension des remises commerciales aux médicaments
biosimilaires et hybrides substituables

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale et retenu par le Gouvernement dans le texte transmis au Sénat, vise à étendre aux exploitants de médicaments hybrides et biosimilaires substituables la possibilité de consentir aux pharmaciens d'officines des remises, ristournes et avantages commerciaux.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

A. Les pharmacies d'officine peuvent bénéficier de remises commerciales augmentées sur les médicaments génériques

Le code de la sécurité sociale autorise les exploitants de médicaments à consentir des remises, ristournes et avantages commerciaux aux pharmacies d'officine, destinés à favoriser la pénétration de leurs produits et à adapter son prix aux réalités économiques.

• Les remises, ristournes et avantages commerciaux sont encadrés par le code de la sécurité sociale.

Celui-ci prévoit notamment, d'abord, un plafonnement des gestes commerciaux consentis à hauteur :

- de 2,5 % du prix fabricant hors taxes (PFHT), pour l'ensemble des médicaments ;

- de 50 %, au plus, du PFHT, pour les médicaments inscrits au répertoire des groupes génériques, les spécialités de référence dont le prix de vente au public est identique à celui des autres spécialités du même groupe générique ou les spécialités non génériques soumises à un tarif forfaitaire de responsabilité292(*).

Pour cette dernière catégorie de médicaments, le plafond des remises, ristournes et avantages commerciaux pouvant être consentis par l'exploitant est précisé par voie réglementaire. Un arrêté de 2014 le fixe à 40 % du PFHT par année civile et par ligne de produits, pour chaque officine293(*).

Le code de la sécurité sociale prévoit également que les gestes commerciaux consentis aux pharmacies d'officine par les fournisseurs doivent déclarés au comité économique des produits de santé (CEPS). En cas d'absence de déclaration dans les délais requis, ou lorsque celle-ci s'avère manifestement inexacte, le CEPS peut fixer une pénalité financière annuelle à la charge du fournisseur fautif, dans la limite de 5 % du chiffre d'affaires hors taxes réalisé au titre des ventes concernées294(*).

• Sur les produits génériques ou les spécialités de référence soumises à un tarif forfaitaire de responsabilité, les avantages commerciaux consentis apparaissent élevés.

D'après le rapport de la commission d'enquête sénatoriale sur la pénurie de médicaments, publié en 2023, « le CEPS relève que le niveau relativement élevé et croissant des remises commerciales accordées par les exploitants de produits génériques constitue le signe d'une rentabilité du secteur. Le comité indique que ces remises étaient en 2021, en moyenne, de 24 % du PFHT, pour un plafond fixé par arrêté ministériel à 40 % par produit. »295(*)

Ces gestes commerciaux permettent, notamment, de favoriser la pénétration des médicaments concernés dans les ventes officinales et d'adapter leur prix à l'évolution des réalités économiques.

Parce que les remises, ristournes et avantages commerciaux agissent en indicateur de la rentabilité de certains produits, le code de la sécurité sociale les fait figurer parmi les critères justifiant que des baisses de prix soient négociées ou imposées par le CEPS. Celui-ci doit, en effet, tenir compte dans ses plans de baisses de prix du « prix d'achat constaté de la spécialité concernée et des médicaments à même visée thérapeutique par les établissements de santé ou les distributeurs de gros ou de détail, compte tenu des remises, ristournes et avantages commerciaux et financiers assimilés de toute nature consentis »296(*).

• Ce plafond dérogatoire visant les gestes commerciaux des fournisseurs, appliqué aux médicaments génériques et spécialités de référence soumises à un tarif forfaitaire de responsabilité, n'est pas applicable aux médicaments biosimilaires et hybrides dont l'assurance maladie cherche, par ailleurs, à favoriser la pénétration.

Ces derniers pourraient, pourtant, permettre la réalisation d'économies substantielles. Dans son rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale de 2017, la Cour des comptes estimait ainsi qu'en prenant pour hypothèse une substitution à 80 % des huit principaux biomédicaments dont le brevet arrivait à expiration avant 2020, l'assurance maladie pourrait économiser plus de 680 millions d'euros297(*). Le CEPS applique, en effet, des taux de décote initiale, en ville, de 20 % pour le médicament biologique de référence et de 40 % pour le biosimilaire298(*).

Ce potentiel d'économies est, de plus, aujourd'hui limité par le faible nombre de médicaments biosimilaires que les pharmaciens sont autorisés à substituer au médicament biologique de référence. En application de la loi, le pharmacien ne peut délivrer, par substitution au médicament biologique prescrit, un médicament biosimilaire que lorsque :

- celui-ci appartient au même groupe biologique similaire que le médicament prescrit ;

- le prescripteur n'a pas exclu cette substitution par une mention expresse et justifiée portée sur l'ordonnance ;

- ce groupe biologique similaire figure sur une liste, accompagnée le cas échéant de conditions de substitution et d'information du prescripteur et du patient, fixée par arrêté après avis de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM)299(*).

Un arrêté d'octobre 2024 est venu ajouter un groupe biologique similaire à la liste prévue par la loi, qui demeure toutefois limitée à trois groupes300(*).

La pénétration des biosimilaires, dans la délivrance officinale, demeure relativement faible. D'après l'assurance maladie, au 1er mai 2024, 67 noms de marques de médicaments biosimilaires étaient commercialisés pour 13 classes thérapeutiques différentes. En ville, les remboursements associés à ces classes thérapeutiques s'élevaient à 1,9 milliard d'euros, dont 780 millions d'euros seulement pour les médicaments biosimilaires, soit un taux de pénétration d'environ 32 %. L'assurance maladie indique pourtant que « des niveaux élevés (supérieurs à 80 %) de pénétration des médicaments génériques et des médicaments biosimilaires constituent un enjeu majeur pour la soutenabilité du système de santé et sa capacité à financer un égal accès à l'innovation thérapeutique »301(*).

B. L'article 9 ter vise à permettre aux industriels de consentir des remises commerciales sur les médicaments hybrides et les médicaments biosimilaires substituables

L'article 9 ter, issu de quatre amendements identiques de M. Thibault Bazin (Droite Républicaine), Mme Justine Gruet (Droite Républicaine), M. Frédéric Valletoux (Horizons et indépendants) et M. Bertrand Bouyx (Horizons et indépendants) adoptés par l'Assemblée nationale, vise à étendre aux médicaments hybrides et biosimilaires substituables la faculté de consentir aux pharmaciens d'officine des remises, ristournes et avantages commerciaux importants.

Pour ce faire, le 1° de l'article intègre, à l'article L. 138-9 du code de la sécurité sociale, les spécialités hybrides substituables et les médicaments biologiques similaires dont la substitution est autorisée par arrêté à la liste des spécialités pouvant faire l'objet pour lesquelles les fournisseurs peuvent consentir des remises, ristournes et avantages commerciaux et financiers renforcés, dans la limite d'un plafond ne pouvant pas dépasser 50 % du PFHT et fixé par arrêté.

Le 2° de l'article modifie, en conséquence, l'article L. 138-9-1 du même code pour prévoir que les fournisseurs de médicaments hybrides et biosimilaires substituables sont tenus de déclarer au CEPS, par année civile et par spécialité, les remises, ristournes et avantages commerciaux et financiers consentis, ainsi que les chiffres d'affaires hors taxes réalisés au titre de ces spécialités.

II - La position de la commission

Consciente des enjeux financiers associés à une plus grande pénétration des médicaments hybrides et biosimilaires dans le secteur officinal, la commission a soutenu sans réserve ces dispositions.

Elle souligne que la substitution par les pharmaciens d'officine constitue, à cet égard, un outil essentiel. À cet égard, la commission a souligné regretter que la liste des spécialités biosimilaires substituables demeure si restreinte, plusieurs années après l'introduction de ce dispositif. Elle juge indispensable que cette liste soit, compte tenu des études réalisées, rapidement élargie et appelle le Gouvernement à simplifier encore, en ce sens, le droit existant.

Pour les spécialités d'ores et déjà substituables, l'augmentation des remises commerciales consenties par les laboratoires devraient permettre de favoriser leur développement. En conséquence, la rapporteure générale a proposé à la commission d'adopter le présent article.

La commission propose d'adopter cet article sans modification

Article 9 quater (nouveau)
Taxe sur les publicités sur les prothèses auditives
au profit de la Caisse nationale d'assurance maladie

Cet article, inséré à l'Assemblée nationale par un amendement de Mme Stéphanie Rist et plusieurs de ses collègues et retenu par le Gouvernement dans le texte transmis au Sénat, vise à instituer une taxe perçue sur les dépenses de publicité pour les dispositifs d'aides auditives engagées par les entreprises produisant ou commercialisant ces dispositifs, au profit de la Caisse nationale d'assurance maladie.

La commission propose de supprimer cet article.

I - Le dispositif proposé

A. Portées par le succès de la réforme du 100 % santé dans le domaine des prothèses auditives, des pratiques commerciales agressives se sont multipliées au détriment des consommateurs et de la maîtrise des dépenses de santé

Selon la Drees, les prothèses auditives représentaient en 2022 un marché d'environ deux milliards d'euros, dont 42 % est à la charge de l'assurance maladie obligatoire. Par ailleurs, ce marché concerne une population spécifique : en 2021, 1,5 % de la population a acheté un appareil auditif, dont 79 % de personnes de 65 ans ou plus302(*).

1. Le succès de la réforme du 100 % santé a permis d'améliorer la couverture de la population en équipements d'aides auditives

La réforme du 100 % santé vise à faciliter l'accès à certains biens de santé parmi lesquels les aides auditives. Elle consiste en la définition d'un panier de biens dans les champs dentaire, optique et des dispositifs d'aides auditives, pour lequel les assurés titulaires d'un contrat de santé responsable et solidaire n'ont aucun reste à charge, après remboursement de leurs dépenses par l'assurance-maladie et les complémentaire santé.

Lancée en 2018 et pleinement appliquée depuis le 1er janvier 2021, la réforme a permis selon plusieurs études une amélioration de la couverture en équipement de la population. En 2022, à la demande de la commission des affaires sociales du Sénat, la Cour des comptes avait établi un premier bilan de la réforme303(*). Elle indiquait alors qu'en 2021, 1,4 millions d'appareils avaient été vendus contre 0,8 million en 2018. Surtout, alors que 72 % des personnes ayant acheté des audioprothèses en 2018 avaient déjà consommé ces produits dans les huit années précédentes, cette part chutait à 48 % pour les personnes qui avaient acheté des audioprothèses en 2021. Cette évolution traduit une part importante de nouveaux recourant et donc d'amélioration du taux d'équipement.

Selon une étude plus récente publiée par l'Institut de recherche et documentation en économie de santé (Irdes) et menée dans plusieurs pays européens, la France connait désormais un taux d'équipement parmi les plus élevée d'Europe. Ainsi 46 % des personnes souffrant de déficience auditive seraient couvertes, juste derrière le Royaume-Uni avec 53 % mais largement devant des pays comme la Suède avec 37 %304(*).

Cette forte augmentation de la couverture en équipements auditifs concerne tant les appareils couverts par le panier 100 % santé que l'achat de prothèses auditives en dehors de ce panier. Ainsi, selon le Drees, le nombre de personnes recourant au panier libre en 2021 ou en 2022 (plus de 470 000 personnes) est supérieur au nombre total de personnes recourant à des prothèses auditives en 2018 (415 000 personnes)305(*).

Toutefois, le dynamisme économique du secteur qui peut résulter de la mise en place du 100 % santé ne doit pas entraîner un surcoût pour les finances publiques ni se faire au détriment des consommateurs via notamment un « sur-appareillage ».

2. Un consensus pour limiter les dérives constatées dans le secteur

De fait, le marché français est l'un des plus dynamiques en termes d'équipement en audioprothèses. L'amélioration de la solvabilité du secteur a pu attirer certaines entreprises motivées par une vision de court terme centrée sur la vente d'appareillage au détriment notamment du suivi par l'audioprothésiste. À ce titre, un rapport de l'Igas de 2021 évoquait une « progression forte du taux d'appareillage à laquelle il convient de prêter attention » et invitait les pouvoirs publics à une vigilance accrue dans « la surveillance des pratiques promotionnelles »306(*).

Dès 2020, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) avait engagé un vaste plan de contrôle dans les secteurs de l'audiologie et de l'optique. Sur plus de 1 000 contrôles effectués dans 710 établissements (dont 36 % de centres audio et de points de vente optique et audio), un taux de non-conformité de 72 % avait alors été trouvé.

Dans sa communication précitée à la commission des affaires sociales, la Cour des comptes alertait également sur l'importance d'établir un meilleur contrôle des campagnes promotionnelles. À ce titre, la DGCCRF a engagé en 2023 une nouvelle vague de contrôles sur les établissements au regard du taux de non-conformité et de l'importance des contournements délibérés de la réforme. Ces pratiques sont d'autant plus condamnables dans le domaine des équipements médicaux où le consommateur, du fait de l'asymétrie d'information, s'en remet le plus souvent à l'expertise des professionnels.

B. L'instauration d'une taxe sur les dépenses de publicités afin de mieux contrôler le secteur

1. Des publicités déjà strictement encadrées

En application de l'article L. 5213-3 du code de la santé publique, la réglementation autorise la publicité pour les dispositifs médicaux qui présentent un faible risque pour la santé humaine. L'arrêté du 21 décembre 2012 précise que la liste de ces dispositifs pouvant faire l'objet de publicité comprend les dispositifs de classe I et de classe IIa, catégories auxquelles appartiennent les dispositifs d'aides auditives.

Toutefois, cette publicité est strictement encadrée.

Le code de la sécurité sociale dans son l'article L. 165-8 interdit la mention dans les publicités auprès du public « que ces produits sont remboursés, même partiellement, par les régimes obligatoires d'assurance maladie ou par un régime complémentaire est interdite ». L'information au consommateur sur les conditions de remboursement doit dès lors être fournie sur le lieu et au moment de la vente. Les infractions aux dispositions de cet articles sont punies de 37 500 euros d'amende, dont le montant maximum peut être portée à 50 % des dépenses de publicité constituant l'infraction.

Le code de la santé publique précise les modalités dans lesquelles la publicité autorisée peut s'exercer. Ainsi, les articles L. 5213-1 et suivants ainsi que les décrets pris pour leur application indiquent que la publicité ne doit pas faire mention du fait que le dispositif médical est pris en charge, en totalité ou partie, par les régimes obligatoires d'assurance maladie ou par un régime complémentaire. Mais également que la publicité ne peut faire apparaître la consultation médicale ou l'intervention chirurgicale comme superflue. Toutefois, dans le cadre des dispositifs d'aides auditives de classe I ou IIa sont autorisées des publicités comportant « des offres de primes, objets ou produits quelconques ou d'avantages matériels directs ou indirects de quelconque nature que ce soit »307(*).

Enfin, l'article L. 4361-7 du code de la santé publique précise que « la location, le colportage, les ventes itinérantes, les ventes dites de démonstration, les ventes par démarchage et par correspondance des appareils de prothèse auditive sont interdites ».

2. L'instauration d'une taxe sur les dépenses de publicité

Le présent article vise à compléter le chapitre V du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale relatif aux ressources autres que les cotisations par une section intitulée « Taxation des publicités relatives aux appareils de prothèse auditive », constituée d'un article L. 245-13 (nouveau).

Le I de l'article L. 245-13 précise que la taxe est instituée sur « les dépenses de publicité portant sur la promotion des aides auditives ». En revanche, il exclut du champ de la taxation les prestations mentionnées au deuxième alinéa de l'article L. 4361-1 du code de la santé publique. Ainsi les publicités portant sur le « choix, l'adaptation, la délivrance, le contrôle d'efficacité immédiate et permanente de la prothèse auditive et l'éducation prothétique du déficient de l'ouïe appareillé » ne rentrent pas dans le champ de la taxe proposée.

Le II de l'article L. 245-13 indique que sont redevables de cette taxe l'ensemble des entreprises produisant ou commercialisant les aides auditives mentionnées au chapitre 3 du titre II de la liste des produits et prestations (LPP), sans distinction relatives à leur statut ou leur chiffre d'affaires.

Son IV fixe le taux de cette taxe à 40 % du montant hors taxe des dépenses de publicité. Ce taux monte à 80 % lorsque la publicité mentionne un avantage promotionnel ou une opération commerciale.

Enfin, son VI précise que le produit de cette taxe est versé à la Caisse nationale d'assurance maladie. Ce paragraphe assure ainsi la recevabilité de cet article au regard des dispositions organiques relatives aux lois de financement de la sécurité sociale.

II - La position de la commission

Si la commission soutient l'objectif de mettre un terme aux pratiques commerciales et publicitaires abusives et de protéger les consommateurs, notamment les plus vulnérables, de ces pratiques agressives, elle s'interroge sur la pertinence de l'outil fiscal pour y parvenir.

Une telle taxe affecterait l'ensemble des acteurs de secteur, au risque de fragiliser considérablement les plus petites entreprises souvent implantées localement, au lieu de viser uniquement les entreprises ayant effectivement des pratiques promotionnelles abusives.

De plus l'absence d'étude approfondie sur l'impact de cette mesure, notamment au regard de son assiette ou de ses modalités de recouvrement, et le caractère extrêmement dissuasif des taux proposés amènent la commission à considérer cet article avec circonspection. Par ailleurs, dans le temps qui lui était imparti la commission n'a pas pu évaluer avec précisions l'impact d'une telle disposition.

Dans ce cadre, la rapporteure générale a souhaité déposer un amendement n° 136 de suppression de cet article.

La commission propose de supprimer cet article.

TITRE II

CONDITIONS GÉNÉRALES DE L'ÉQUILIBRE FINANCIER DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Article 10
Approbation du montant de la compensation
des exonérations mentionné à l'annexe 4

Cet article a pour objet d'approuver le montant prévisionnel de la compensation des exonérations, réductions ou abattements d'assiette de cotisations ou contributions de sécurité sociale qui font l'objet de l'annexe 4 du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

Cet article fait partie des dispositions devant obligatoirement figurer dans la loi de financement de la sécurité sociale, conformément aux dispositions de la loi organique du 14 mars 2022.

Article L.O. 111-3-4 du code de la sécurité sociale
(extrait)

« Dans sa partie comprenant les dispositions relatives aux recettes et à l'équilibre général pour l'année à venir, la loi de financement de l'année :

(...)

c) Approuve le montant de la compensation mentionnée à l'annexe prévue au 2° de l'article L.O. 111-4-1 du présent code ; »

Il propose d'approuver un montant de 6,45 milliards d'euros correspondant au montant prévisionnel de la compensation des exonérations, réductions ou abattements d'assiette de cotisations ou contributions de sécurité sociale, mentionné à l'annexe 4 jointe au présent PLFSS. Il s'agit des exonérations dites « ciblées compensées », faisant l'objet d'une compensation au moyen de crédits budgétaires inscrits au projet de loi de finances308(*).

Ce montant est l'arrondi de celui, de 6,448 milliards d'euros, figurant page 57 de l'annexe 4 au présent PLFSS.

Il est en diminution de 7,1 milliards d'euros par rapport à celui de la LFSS 2024.

Cette diminution marque une inflexion par rapport à l'augmentation continue observée ces dernières années, comme le montre le graphique ci-après.

Montants approuvés par les LFSS 2020 à 2025

(en milliards d'euros)

Source : Commission des affaires sociales, d'après les LFSS 2020 à 2024 et le PLFSS 2025

Le tableau figurant page 57 de l'annexe 4 montre que cette diminution concerne en particulier les contrats d'apprentissage et les jeunes entreprises innovantes, dont l'article 7 propose de rendre le régime moins favorable.

De manière plus générale, le montant global des allègements et exonérations recouvre des exonérations et allègements de différentes natures que l'on peut distinguer comme suit :

Synthèse des exonérations par nature (Robss)

(en milliards d'euros)

 

2022

2023

2024 (p)

2025 (p)

Allègements généraux

58,4

65,4

65,9

66,9

Exonérations compensées

6,6

6,7

6,7

6,9

Exonérations non compensées

2,5

2,7

2,9

2,9

Total

67,6

74,8

75,4

76,7

Remarque : ces montants, exprimés en droits constatés, ne sont pas directement comparables aux montants prévisionnels des exonérations compensées inscrits dans les LFSS, exprimés en comptabilité de caisse. Ainsi, le montant prévu pour 2025, de 6,9 milliards d'euros selon le tableau, est de 6,45 milliards d'euros selon le présent article.

Source : Annexe 4 au PLFSS

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

Le Gouvernement a transmis cet article au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

La commission a approuvé le présent article, dont il convient de rappeler qu'il présente un caractère estimatif et informatif - et non normatif. Il ne saurait évidemment constituer une quelconque limite aux crédits budgétaires que l'État consacrera à ces compensations en 2025.

On souligne par ailleurs que le présent article ne porte que sur une faible part des compensations d'exonérations. Selon l'article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, « toute mesure de réduction ou d'exonération de cotisations de sécurité sociale, instituée à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi n° 94-637 du 25 juillet 1994 relative à la sécurité sociale, donne lieu à compensation intégrale aux régimes concernés par le budget de l'État pendant toute la durée de son application ». Cette compensation intégrale s'interprète comme une compensation par crédits du budget de l'État, à l'euro, des pertes de recettes occasionnées pour la sécurité sociale.

Toutefois, dans le cas des allégements généraux de cotisations sociales patronales, la compensation est en quasi-totalité réalisée par affectation de recettes fiscales (très majoritairement de la TVA) pour « solde de tout compte ». Ainsi, les recettes des régimes obligatoires de base peuvent se trouver fortement réduites quand, du fait d'une inflation élevée, une forte croissance du Smic suscite une croissance des cotisations sociales inférieure à celle de la masse salariale, comme cela s'est produit en 2023.

Impact des allégements généraux de cotisations sociales patronales
sur les comptes de la sécurité sociale

Les allégements généraux de cotisations sociales patronales, en forte augmentation depuis la crise sanitaire, ont atteint en 2023 un montant de 65,5 milliards d'euros, dont :

- 26,9 milliards d'euros pour les allégements dégressifs ;

- 28,4 milliards d'euros pour le « bandeau maladie » (ex-CICE) (jusqu'à 2,5 Smic) ;

- 10,2 milliards d'euros pour le « bandeau famille » (jusqu'à 3,5 Smic).

Les allégements généraux dégressifs

Les allégements généraux dégressifs étaient compensés jusqu'en 2010 par un panier de recettes fiscales (dont la composition a été modifiée par les lois de finances successives), évoluant selon sa dynamique propre et dont le produit était réparti entre les branches au prorata de leur poids dans les allégements généraux. Depuis la LFSS pour 2011, les recettes constituant ce panier sont définitivement affectées aux régimes de sécurité sociale selon des clés définies par arrêté.

La LFSS pour 2019, qui a élargi le champ des allégements généraux aux cotisations Agirc-Arrco et d'assurance chômage, a prévu une compensation à l'euro près à ces organismes via l'Urssaf caisse nationale, qui est désormais attributaire d'une fraction de TVA à ce titre. Le dispositif prévoit que tout déséquilibre de cette opération se répercute directement sur le solde des branches du régime général. Alors que jusqu'en 2021, le solde du dispositif était excédentaire, il a été déficitaire en 2022 (- 0,5 milliard d'euros) et 2023 (- 1,5 milliard d'euros), grevant d'autant le solde du régime général.

Le « bandeau maladie »

Le « bandeau maladie » a fait l'objet d'une compensation « pour solde de tout compte » en LFSS pour 2019, qui a affecté à la Cnam 23,13 % de TVA (cette recette évoluant indépendamment de la dynamique du bandeau).

Le « bandeau famille »

Le « bandeau famille » a fait l'objet d'une compensation à la Cnaf via un transfert en 2015 puis en 2016 des dépenses d'aides au logement au budget de l'État.

Source : D'après le rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale de mai 2024

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article 11
Tableaux d'équilibre 2025 et FSV

Cet article détermine les tableaux d'équilibre pour 2025 du Fonds de solidarité vieillesse et des différentes branches des régimes obligatoires de base de sécurité sociale.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

Cet article fait partie des dispositions devant obligatoirement figurer dans la loi de financement de la sécurité sociale, conformément aux dispositions de la loi organique du 14 mars 2022.

Article L.O. 111-3-4 du code de la sécurité sociale
(extraits)

« Dans sa partie comprenant les dispositions relatives aux recettes et à l'équilibre général pour l'année à venir, la loi de financement de l'année :

(...)

2° Détermine, pour l'année à venir, de manière sincère, les conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale, compte tenu notamment des conditions économiques générales et de leur évolution prévisible. Cet équilibre est défini au regard des données économiques, sociales et financières décrites dans le rapport prévu à l'article 50 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances. À cette fin, la loi de financement de l'année :

a) Prévoit les recettes de l'ensemble des régimes obligatoires de base, par branche, ainsi que celles des organismes concourant au financement de ces régimes ;

(...)

d) Retrace l'équilibre financier de la sécurité sociale dans des tableaux d'équilibre établis pour l'ensemble des régimes obligatoires de base, par branche, ainsi que pour les organismes concourant au financement de ces régimes ;

(...) »

Il présente le tableau d'équilibre contenant, par branche, les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses des régimes obligatoires de base de sécurité sociale pour 2025. Ce tableau est depuis la LFSS 2023 désormais le seul à être approuvé par le Parlement, le nouveau cadre organique ne prévoyant plus d'approbation des tableaux d'équilibre du régime général.

Ce tableau, qui agrège les régimes obligatoires de base et le FSV, fait apparaître une prévision de déficit consolidé de 16 milliards d'euros selon la répartition par branche suivante.

Tableau d'équilibre des régimes obligatoires de base de sécurité sociale
et du Fonds de solidarité vieillesse pour l'année 2025

(en milliards d'euros)

 

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

247,4

260,8

- 13,4

Accidents du travail et maladies professionnelles

17,1

17,0

0,2

Vieillesse

297,1

300,2

- 3,1

Famille

59,7

59,7

0,0

Autonomie

42,0

42,4

- 0,4

Toutes branches (hors transferts entre branches)

644,4

661,1

- 16,7

Toutes branches (hors transferts entre branches) y compris Fonds de solidarité vieillesse

645,4

661,5

- 16,0

Source : Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025

Dans le cas du FSV, les recettes, les dépenses et le solde seraient de respectivement 22,0, 21,3 et 0,7 milliards d'euros.

Les prévisions pour 2025 ont été commentées par la rapporteure générale dans le tome I du rapport général. En particulier, les prévisions de dépenses de la branche maladie paraissent optimistes. Si l'Ondam augmentait de 3,5 % au lieu de 2,8 %, cela majorerait les dépenses de 1,8 milliard d'euros.

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

Le Gouvernement a transmis cet article au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

L'approbation de cet article obligatoire est avant tout une prise d'acte des prévisions du Gouvernement par le Parlement.

Quant aux conséquences des votes du Sénat, par exemple sur les soldes des branches famille et maladie, il reviendra au Gouvernement d'en tenir compte dans la suite de la navette.

Sous le bénéfice de ces observations, la commission a approuvé l'adoption du présent article.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article 12
Objectif d'amortissement de la dette sociale
et prévisions sur les recettes du FRR et du FSV

Cet article détermine, pour l'année 2025, l'objectif d'amortissement de la dette sociale ainsi que les prévisions de recettes du Fonds de réserve pour les retraites et de recettes mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

Cet article fait partie des dispositions devant obligatoirement figurer dans la loi de financement de la sécurité sociale, conformément aux dispositions de la loi organique du 14 mars 2022.

Article L.O. 111-3-4 du code de la sécurité sociale
(extraits)

« Dans sa partie comprenant les dispositions relatives aux recettes et à l'équilibre général pour l'année à venir, la loi de financement de l'année :

(...)

2° Détermine, pour l'année à venir, de manière sincère, les conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale, compte tenu notamment des conditions économiques générales et de leur évolution prévisible. Cet équilibre est défini au regard des données économiques, sociales et financières décrites dans le rapport prévu à l'article 50 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances. À cette fin, la loi de financement de l'année :

(...)

b) Détermine l'objectif d'amortissement au titre de l'année à venir des organismes chargés de l'amortissement de la dette des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement et prévoit, par catégorie, les recettes affectées aux organismes chargés de la mise en réserve de recettes à leur profit ; »

Le I du présent article fixe l'objectif d'amortissement au titre de l'année à venir de la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) à 16,28 milliards d'euros (après 16 milliards d'euros pour la LFSS 2024). Au 31 décembre 2025, l'amortissement cumulé représenterait ainsi 275,0 milliards d'euros. La dette nette à amortir par la Cades devrait s'élever à 121,5 milliards d'euros au 31 décembre 2025.

Le Fonds de réserve pour les retraites (FRR) n'étant plus affectataire d'aucune recette depuis la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, le II du présent article propose logiquement de maintenir l'absence de recettes du fonds en 2025.

Contrairement aux années précédentes, le présent article ne comprend pas de III relatif au Fonds de solidarité vieillesse (FSV). Selon les indications de la direction de la sécurité sociale, cela vient du fait que, contrairement au FRR, le FSV n'a plus de mission de mise en réserve depuis la LFSS pour 2016.

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

Le Gouvernement a transmis cet article au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

L'objectif d'amortissement de la dette sociale est purement prévisionnel. Il correspond à l'écart entre la prévision de ressources de la Cades (en quasi-totalité constituée par la CRDS et une fraction de CSG) et ses prévisions de charges (constituées par la charge d'intérêt).

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article 13
Liste et plafonds de trésorerie des régimes et organismes habilités à recourir à des ressources non permanentes et allongement de la durée des ressources permanentes auxquelles l'Acoss peut recourir

Cet article vise à :

- fixer les limites de recours à des ressources non permanentes pour les organismes de financement de la sécurité sociale ;

- autoriser l'Acoss à s'endetter à l'horizon de deux ans (contre un actuellement).

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

A. Plafonds de trésorerie

Le I de cet article fait partie des dispositions devant obligatoirement figurer dans la loi de financement de la sécurité sociale, conformément aux dispositions de la loi organique du 14 mars 2022.

Article L.O. 111-3-4 du code de la sécurité sociale
(extraits)

« Dans sa partie comprenant les dispositions relatives aux recettes et à l'équilibre général pour l'année à venir, la loi de financement de l'année :

(...)

2° Détermine, pour l'année à venir, de manière sincère, les conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale, compte tenu notamment des conditions économiques générales et de leur évolution prévisible. Cet équilibre est défini au regard des données économiques, sociales et financières décrites dans le rapport prévu à l'article 50 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances. À cette fin, la loi de financement de l'année :

(...)

e) Arrête la liste des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement habilités à recourir à des ressources non permanentes, ainsi que les limites dans lesquelles leurs besoins de trésorerie peuvent être couverts par de telles ressources. »

Le présent article propose donc d'habiliter l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss)309(*), la Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines (CANSSM) et la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL)310(*) à recourir à des ressources non permanentes afin de couvrir leurs besoins de trésorerie.

Le présent article fixe les plafonds de recours à ces ressources non permanentes comme suit :

Proposition de plafonds pour 2025

(en millions d'euros)

 

Rappel des plafonds
de la LFSS 2023

Rappel des plafonds
de la LFSS 2024

Plafonds proposés pour 2025

Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss)

45 000

45 000

65 000

Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA)

350

0

0

Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF (CPRP SNCF)

550

595

0

Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF (CPRP SNCF)

400

350

0

Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines (CANSSM)

450

450

450

Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL)

7 500

11 000

13 200

Source : LFSS 2023 et 2024, PLFSS 2025

Le plafond d'emprunt de l'Acoss augmente donc fortement, passant de 45 milliards d'euros à 65 milliards d'euros. Cela s'explique par le déficit prévisionnel important de la sécurité sociale en 2025 et la fin des reprises de dette par la Cades.

L'annexe 3 au PLFSS pour 2025 précise qu'en 2025, l'Acoss devrait débuter l'année avec un solde net prévisionnel de trésorerie de - 7,6 milliards d'euros. Après la prise en compte des mesures du PLFSS 2025, le solde moyen net devrait s'établir à - 16,4 milliards d'euros. Le solde moyen brut serait de - 41,3 milliards d'euros en 2025, avec un besoin de financement maximal de -57,7 milliards d'euros le 15 décembre 2025.

Le plafond demandé, de 65 milliards d'euros, laisse donc une marge de sécurité de 7,3 milliards d'euros.

Prévisions de soldes de trésorerie de l'Acoss pour 2024 et 2025

(en millions d'euros)

Source : Annexe 3 du PLFSS pour 2025

Comme l'année dernière, le plafond de la CNRACL augmente fortement (13,2 milliards d'euros, après 11 milliards d'euros en 2024, 7,5 milliards d'euros en 2023 et 4,5 milliards d'euros en 2022), du fait des déficits que continue d'enregistrer cette caisse. En effet, l'augmentation de quatre points en 2025 du taux de cotisation employeur à la CNRACL ne fera que réduire de 2,3 milliards d'euros son déficit.

Pour ce qui concerne les autres organismes, le plafond serait nul. L'exposé des motifs du présent article précise à cet égard que cela n'empêcherait pas l'Acoss de leur accorder, le cas échéant, des avances de trésorerie311(*).

B. Autorisation de l'Acoss à s'endetter à deux ans, avec une durée moyenne d'un an

Le II de cet article propose modifier l'article L. 139-3 du code de la sécurité sociale, pour prévoir que l'Acoss (et plus généralement les régimes obligatoires de base de la sécurité sociale), qui ne peut actuellement s'endetter qu'à douze mois, puisse désormais s'endetter à vingt-quatre mois, avec une « durée moyenne annuelle pondérée [...] inférieure ou égale à douze mois ».

Il s'agit en effet de permettre à l'Acoss de s'endetter effectivement à un an. En effet, pour des raisons techniques, la limite actuelle d'un an ne permet pas à l'Acoss de s'endetter à cette échéance, ce qui, compte tenu de la structuration de la demande sur le marché, l'amène à s'endetter en moyenne à un horizon de seulement quelques mois.

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

Le Gouvernement a transmis cet article au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

Les montants d'emprunt à court terme proposés par le I du présent article semblent adaptés et laissent une marge de manoeuvre raisonnable aux différents organismes concernés.

Il est à souligner que le cadre organique mis en place en 2022 offre au Parlement un meilleur suivi de ces autorisations, l'article L.O. 111-9-2 du code de la sécurité sociale prévoyant désormais que les décrets de relèvement soient pris en Conseil d'État, après avis des commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat saisies au fond des projets de loi de financement de la sécurité sociale.

L'extension de la durée d'emprunt maximale de l'Acoss, proposée par le II du présent article, contribuera utilement à sécuriser le financement de la sécurité sociale. Toutefois il s'agira toujours d'emprunt à court terme, dont la crise de liquidité rencontrée par l'Acoss en 2020 a montré le caractère risqué en cas de paralysie du marché. Cette disposition ne dispense donc pas de se doter dès que possible d'une trajectoire crédible de retour de la sécurité sociale à l'équilibre, afin de réaliser de nouveaux transferts de dette à la Cades.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article 14
Approbation du rapport sur l'évolution pluriannuelle
du financement de la sécurité sociale

Cet article propose d'approuver le rapport sur l'évolution pluriannuelle du financement de la sécurité sociale constituant l'annexe à la future LFSS.

Le rapport prévoit une aggravation du déficit de la sécurité sociale, qui, sur la base d'hypothèses pourtant optimistes en matière de croissance du PIB et de l'Ondam, passerait de 16 milliards d'euros en 2025 à 19,9 milliards d'euros en 2020.

La commission propose d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.

I - Le dispositif proposé

Cet article fait partie des dispositions devant obligatoirement figurer dans la loi de financement de la sécurité sociale, conformément à la loi organique du 14 mars 2022.

Article L.O. 111-4 du code de la sécurité sociale

« Le projet de loi de financement de l'année est accompagné d'un rapport décrivant, pour les quatre années à venir, les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses des régimes obligatoires de base, par branche, les prévisions de recettes et de dépenses des organismes concourant au financement de ces régimes, ainsi que l'objectif national de dépenses d'assurance maladie. Ces prévisions sont établies de manière cohérente avec les perspectives d'évolution des recettes, des dépenses et du solde de l'ensemble des administrations publiques présentées dans le rapport joint au projet de loi de finances de l'année en application de l'article 50 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

Le rapport précise les hypothèses sur lesquelles repose la prévision de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie pour les quatre années à venir. Ces hypothèses prennent en compte les facteurs concourant à l'évolution tendancielle de cet objectif ainsi que l'impact attendu des mesures nouvelles.

En outre, ce rapport présente, pour chacun des exercices de la période de programmation de la loi de programmation des finances publiques en vigueur, les écarts cumulés entre, d'une part, les prévisions de dépenses des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et des organismes concourant à leur financement qui figurent dans cette même loi et, d'autre part, les objectifs de dépenses décrits dans ce rapport.

Le rapport précise les raisons et hypothèses expliquant ces écarts ainsi que, le cas échéant, les mesures prévues par le Gouvernement pour les réduire. »

Conformément aux dispositions organiques rappelées supra, le rapport constituant l'annexe de la future LFSS312(*) détaille, pour les années 2024 à 2028, les prévisions de recettes, les objectifs de dépenses et les soldes par risque pour les régimes obligatoires de base et par branche pour le régime général.

Le tableau ci-après reprend, par branche, les prévisions de recettes, de dépenses et de solde des Robss figurant dans le rapport annexé qu'il est proposé d'approuver.

Prévisions des recettes, dépenses et soldes
de l'ensemble des régimes obligatoires de base et du FSV

(en milliards d'euros)

 

2023

2024 (p)

2025 (p)

2026 (p)

2027 (p)

2028 (p)

Maladie

Recettes

232,8

239

247,4

254,2

262

269,5

Dépenses

243,9

253,6

260,8

268,3

276,2

284,4

Solde

-11,1

-14,6

-13,4

-14,2

-14,3

-14,9

Accidents du travail et maladies professionnelles

Recettes

16,8

16,7

17,1

17

17,6

18,1

Dépenses

15,4

16

17

17,4

18,2

18,6

Solde

1,4

0,7

0,2

-0,4

-0,6

-0,5

Famille

Recettes

56,8

58,3

59,7

60,9

63

64,9

Dépenses

55,7

57,9

59,7

61,4

62,8

64

Solde

1

0,4

0

-0,5

0,2

0,9

Vieillesse

Recettes

272,5

287,4

297,1

307,6

315,9

322,1

Dépenses

275,1

293,7

300,2

309,3

318,6

328,2

Solde

-2,6

-6,3

-3,1

-1,7

-2,7

-6,1

Autonomie

Recettes

37

40,9

42

42

43,9

45,1

Dépenses

37,6

40

42,4

44

45,7

47,6

Solde

-0,6

0,9

-0,4

-1,9

-1,8

-2,5

Régimes obligatoires de base de sécurité sociale consolidés

Recettes

598,5

624,2

644,4

662,4

682,1

699,1

Dépenses

610,4

643

661,1

681

701,2

722,1

Solde

-11,9

-18,9

-16,7

-18,6

-19,1

-23

Recettes, dépenses et soldes des régimes obligatoires de base et du Fonds de solidarité vieillesse

Recettes

600

625,3

645,4

663,6

684,3

702,5

Dépenses

610,7

643,4

661,5

681,4

701,6

722,4

Solde

-10,8

-18

-16

-17,7

-17,2

-19,9

Source : Annexe au PLFSS pour 2025

Cette programmation, et les hypothèses sous-jacentes, ont été présentées dans le tome I du présent rapport général.

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

Le Gouvernement a transmis cet article au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

Il y a un an, le Sénat, à l'initiative de sa commission des affaires sociales, a supprimé l'article correspondant du PLFSS 2024, au motif qu'il prévoyait une aggravation du déficit de la sécurité sociale, qui devait alors passer de 8,7 milliards d'euros en 2023 à 17,2 milliards d'euros en 2027.

Si le présent article prévoit toujours un déficit de 17,2 milliards d'euros en 2027, sa prévision de déficit est nettement supérieure à celle de la LFSS 2023 pour l'exercice 2024 et lui est légèrement supérieure pour les exercices 2025 et 2026, et le déficit augmenterait encore en 2028 pour approcher 20 milliards d'euros.

Solde de la sécurité sociale (Robss+FSV) : comparaison
des prévisions du PLFSS 2025 avec celles de la LFSS 2024

(en milliards d'euros)

Source : Commission des affaires sociales, d'après la LFSS 2024 et le PLFSS 2025

Par cohérence, la commission des affaires sociales ne peut approuver le présent article sans modifier le rapport annexé.

Certes, en pratique ces prévisions ne prennent en compte que les mesures actuellement prévues, en particulier dans le cadre du PLFSS ou de futurs textes réglementaires. On pourrait donc a priori considérer qu'elles ont un caractère purement informatif, indiquant ce que serait la trajectoire à politiques inchangées.

Pourtant, l'article L.O. 111 4 précité du code de la sécurité sociale indique que le rapport décrit, « pour les quatre années à venir, les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses des régimes obligatoires de base ». Selon la lettre de la loi organique, ce rapport ne devrait donc pas avoir une vocation purement prévisionnelle, sur la base des mesures existantes ou prévues, mais devrait bien correspondre à une programmation, indiquant clairement les objectifs de dépenses.

Or, il est manifeste qu'en l'état, le rapport annexé n'est pas cohérent avec la programmation de finances publiques à moyen terme de la France, le plan budgétaire et structurel national à moyen terme (PSMT) adressé à la Commission européenne fin octobre 2024. En effet, comme indiqué dans le tome I du rapport général, le PSMT implique de réaliser chaque année un effort structurel primaire entre 0,7 et 0,8 point de PIB, et donc de prendre des mesures d'environ 25 milliards d'euros, qui reposeront forcément en partie sur la sécurité sociale.

La commission juge donc nécessaire de préciser que les prévisions du rapport annexé s'entendent à politiques inchangées par rapport aux mesures prévues.

C'est pourquoi elle a adopté un amendement n° 137, insérant une mention en ce sens au début du rapport annexé.

Elle a également adopté un amendement n° 138 modifiant le rapport annexé pour prévoir que la hausse de 12 points du taux des cotisations à la CNRACL doit se faire sur quatre ans, et non trois.

La commission propose d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.

TROISIÈME PARTIE

DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES
POUR L'EXERCICE 2025

TITRE IER

DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES

Article 15
Régulation des dépenses dans le champ conventionnel

Cet article vise à renforcer les outils de régulation des dépenses dans les secteurs de la biologie médicale et de l'imagerie. Il fixe à 300 millions d'euros, par ailleurs, pour les années 2025 à 2027, le niveau minimal d'économies à réaliser dans le champ de l'imagerie.

La commission propose d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.

I - Le dispositif proposé

A. Face au dynamisme des dépenses d'imagerie et de biologie, les outils existants de régulation apparaissent insuffisants

1. Le dynamisme des dépenses de biologie et d'imagerie

a) Le secteur de la biologie s'est fortement concentré et connaît une rentabilité importante

• Les dépenses de biologie apparaissent spontanément dynamiques, portées par une forte croissance des volumes ces dernières années.

Sur la période 2014-2021, la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam) estime le rythme spontané d'évolution des dépenses à 3,5 % par an. Celui-ci est notamment porté par une croissance annuelle des volumes de 2,8 % sur la même période. Ce dynamisme est freiné par des baisses tarifaires régulières, fondées sur les gains de productivité observés dans le secteur, qui ont permis de réduire la progression des dépenses de 1,7 % par an en moyenne313(*). Pour l'année 2025, la croissance spontanée des dépenses s'établirait, d'après le Gouvernement, à 3,2 %314(*).

La croissance annuelle du nombre d'actes semble s'accélérer. Après exclusion des dépistages relatifs à la covid-19, celle-ci s'est établie à 4 % entre 2019 et 2021, et à 3,9 % entre 2018 et 2019. Selon la Cnam, cette croissance est essentiellement le fait d'une augmentation du nombre d'actes prescrits par ordonnance - 7,7 en moyenne en 2021, contre 7,1 en 2019315(*). Sur les cinq premiers mois de 2024, d'après le rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS), l'augmentation des dépenses de biologie est portée par un fort « effet volume » (+ 5,5 %), atténué par des baisses tarifaires (pour un effet prix de - 4,6 %)316(*).

L'activité de biologie des laboratoires privés est concentrée sur une vingtaine d'actes, parmi le millier d'actes inscrits à la nomenclature des actes de biologie médicale (NABM), qui représentaient, en 2021, 72 % de l'activité en volume et 56 % des remboursements. Figurent parmi ceux-ci le dosage de la créatine, en très forte croissance, ou de la ferritine317(*).

• Le secteur apparaît, en outre, particulièrement profitable. D'après la Cnam, en 2022, l'excédent brut d'exploitation (EBE) y atteindrait 25 % du chiffre d'affaires et le résultat net, 26 % du chiffre d'affaires.

Ces indicateurs sont globalement en hausse depuis le milieu des années 2010318(*). Entre 2016 et 2022, le rapport entre le résultat net et le chiffre d'affaires serait ainsi, d'après la Cnam, passé de 10 % à 26 %.

Excédent brut d'exploitation et résultat net des laboratoires,
rapportés au chiffre d'affaires du secteur (2016-2022)

en %

Source : commission des affaires sociales du Sénat, d'après des données Cnam (2024)

• Le secteur est caractérisé, enfin, par un très haut niveau de concentration et un mouvement avancé de financiarisation.

Ainsi que le relève un rapport d'information récent de la commission des affaires sociales relatif à la financiarisation de l'offre de soins319(*), le nombre de structures juridiques a sensiblement diminué dans le secteur. Selon la Cnam, alors la France comptait 2 625 structures à la fin de l'année 2009, elles n'étaient plus que 377 à la fin de l'année 2021. Cette même année, les six plus grands groupes de biologie privés (Biogroup-LCD, Cerballiance, Inovie, Synlab, Eurofins et Unilabs) concentraient à eux seuls 62 % des sites de biologie médicale recensés sur le territoire national320(*).

Si la place de ces six grands groupes dans l'offre de biologie médicale varie sensiblement d'une région à l'autre, le rapport d'information relevait toutefois que la biologie constituait, en ville, « sans doute le secteur le plus nettement financiarisé. »321(*)

b) Le dynamisme des dépenses d'imagerie s'est accéléré ces dernières années

• Les dépenses relatives aux actes d'imagerie médicale, en ville, proviennent tant de la rémunération des actes techniques d'imagerie, relevant de la classification commune des actes médicaux (CCAM), que de la prise en charge, sous forme de forfaits techniques, des frais d'amortissement et de maintenance des appareils d'imagerie lourde.

Le rapport à la CCSS de juin 2021 estimait qu'en 2019, la quasi-totalité des honoraires des radiologues provenaient des actes d'imagerie (69 % du total) et des forfaits techniques (29 %), le reste correspondant à d'autres actes techniques ou consultations322(*).

D'après la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) des ministères sociaux, les revenus des radiologues se classent parmi les plus élevés au sein des spécialités médicales exerçant en libéral. En 2019, ainsi, le revenu libéral moyen des radiologues s'élevait à 202 600 euros, contre 146 200 euros pour l'ensemble des spécialistes et 116 800 euros pour l'ensemble des médecins, y compris les médecins généralistes323(*).

La part relative des actes et des forfaits techniques varie sensiblement en fonction de la technologie utilisée. Les forfaits constituaient ainsi, d'après la Cour des comptes, en 2020, près des deux tiers des dépenses en matière d'imagerie par résonance magnétique (IRM) ou de scannographie324(*). Ces actes d'imagerie lourde représentaient, en 2019, 48 % des montants remboursés par l'assurance maladie pour seulement 19 % des actes réalisés325(*).

• Ces dépenses ont connu une croissance soutenue ces dernières années.

D'après la Cnam, les remboursements d'assurance maladie du régime général pour les activités d'imagerie médicale - hors échographie - en secteur libéral ont, ainsi, crû de 6,2 % par an en moyenne entre 2021 et 2023, contre 3 % par an en moyenne entre 2013 et 2019.

En 2023, ces remboursements s'élevaient à 3,4 milliards d'euros, dont 1,4 milliard d'euros de forfaits techniques. Les actes relevant de la radiologie et de l'imagerie médicale représentaient, à eux seuls, 41 % des sommes remboursées et 42 % des actes relevant de la CCAM.

Montants remboursés pour les actes d'imagerie et forfaits techniques (2010-2023)

(en millions d'euros)

Source : commission des affaires sociales du Sénat, d'après des données Cnam (2024)

Cette augmentation est, pour l'essentiel, portée par une croissance des volumes, en particulier en matière d'imagerie lourde. La Cour des comptes observe, ainsi, que sur la période 2017-2019, le nombre total d'examens a augmenté de 3,4 %, les progressions les plus marquées concernant l'imagerie lourde et, notamment, l'IRM qui a connu une croissance de 12,9 %326(*). Sur la période 2019-2021, le nombre total d'actes n'a augmenté que de 0,7 %, grâce notamment à la diminution de 4,8 % des actes de radiologie. Toutefois, la croissance constatée des dépenses a été portée par l'augmentation du nombre de scannographies, plus onéreuses327(*).

• Enfin, l'imagerie de ville est, comme la biologie médicale, fréquemment citée parmi les secteurs faisant l'objet d'un phénomène de financiarisation.

La Cnam relève ainsi, en 2024, que « Dans ce secteur, la financiarisation du système de santé conduit au regroupement croissant des professionnels dans des sociétés d'exercice libéral mais aussi au développement des activités de radiologie par certains centres de santé. »328(*)

Le rapport d'information précité de la commission des affaires sociales du Sénat a, par ailleurs, constaté la progression de groupes d'imagerie privés financiarisés, portés par des besoins d'investissement importants et des départs en retraite de nombreux praticiens détenteurs de cabinets indépendants et à la recherche de repreneurs. D'après certains acteurs interrogés, ce mouvement de financiarisation pourrait toucher 20 % à 30 % du secteur, pourtant traditionnellement fragmenté329(*).

2. Les dispositifs existants de régulation des dépenses

a) Les accords triennaux de maîtrise des dépenses de biologie

• Les tarifs de biologie médicale dépendent, d'une part, de leur inscription et de leur cotation au sein de la nomenclature - exprimée en nombre de lettres-clés - et, d'autre part, de la valeur de la lettre clé associée, fixée par la convention conclue entre l'assurance maladie et les directeurs de laboratoires de biologie médicale (LBM)330(*).

Deux principaux outils permettent, ainsi, à l'assurance maladie de procéder à des baisses tarifaires dans le secteur. D'une part, une diminution de cotation ciblée peut viser un ou plusieurs actes pour réduire leur valeur exprimée en nombre de lettres-clés. D'autre part, une baisse de la valeur de la lettre-clé permet de réduire, à due proportion, le tarif associé à chacun des actes inscrits. L'avenant 11 à la convention nationale, signé le 10 janvier 2023, a ainsi prévu une baisse du prix de la lettre B à compter du 1er février 2023, pour la fixer à 0,26 euro en France métropolitaine, à 0,30 euro dans les Antilles et à 0,32 euro en Guyane et à la Réunion331(*).

• Permises par les gains de productivité réalisés par le secteur et justifiées par la croissance spontanée des dépenses, des mesures de régulation des dépenses de biologie médicale ont été mises en oeuvre ces dernières années.

Entre 2006 et 2013, ainsi, l'assurance maladie a, à plusieurs reprises, diminué la cotation de nombreux actes de biologie médicale afin contenir la progression spontanée des dépenses.

Surtout, depuis 2014, des protocoles triennaux ont été conclus avec la profession, permettant une régulation couplée des prix et des volumes des actes courants de biologie, à l'exclusion des actes innovants ou relevant de la gestion de crise sanitaire.

Trois protocoles ont, ainsi, été mis en oeuvre pour les années 2014 à 2021, qui ont permis de contenir la croissance des dépenses de biologie entrant dans leur champ :

- le protocole pour la période 2014-2016, d'abord, qui a fixé un objectif de croissance annuelle des remboursements de 0,25 % ;

- le protocole pour la période 2017-2019, ensuite, qui a reconduit le même objectif ;

- le protocole triennal pour les années 2020-2022, enfin, qui a porté cet objectif de croissance à 0,4 % pour 2020, 0,5 % pour 2021 et 0,6 % pour 2022332(*).

Compte tenu de la très forte croissance du chiffre d'affaires du secteur observée durant la crise sanitaire, et l'effet inflationniste des dépenses liées à la covid-19 se trouvant hors du champ de la régulation, la LFSS pour 2023 a prévu qu'un nouvel accord devrait être conclu avant le 1er février 2023 afin de générer une économie d'au moins 250 millions d'euros dès la première année. Dans le cas contraire, elle autorisait le Gouvernement à baisser unilatéralement les tarifs des actes de biologie médicale non liés à la gestion de la crise sanitaire, par arrêté, afin d'atteindre cet objectif d'économies333(*).

Malgré un vaste mouvement de contestation de la profession, les partenaires conventionnels ont pu signer :

- l'avenant 11 à la convention nationale, le 10 janvier 2023, portant une baisse de la lettre-clé B pour l'année 2023 et définissant un cadre de travail en vue de la définition d'une trajectoire pluriannuelle pour 2024-2026334(*) ;

- un nouveau protocole triennal pour les années 2024 à 2026, le 27 juillet 2023335(*), prévoyant une progression des dépenses de 0,4 % par an sur la période et diverses mesures de maîtrise des volumes destinées à y contribuer.

• Ces protocoles se sont révélés efficaces pour maîtriser les dépenses de biologie médicale ces dix dernières années.

D'après la Cnam, les dispositifs de régulation négociés ont permis de réaliser, entre 2014 et 2021, 545 millions d'euros d'économies et de contenir à 0,9 % l'augmentation annuelle moyenne des dépenses, pour une croissance spontanée estimée à 3,5 % par an sur la même période.

Ces économies ont été réalisées, principalement, par la mise en oeuvre de baisses ciblées de cotation. Des baisses temporaires généralisées de l'ensemble des actes de biologie, par la diminution de la valeur de la lettre B, ont été activées en 2016 et 2018 pour des rendements de 26 et 21 millions d'euros.

Alors que le dynamisme des dépenses apparaît largement fondé sur la croissance des volumes, l'efficacité des efforts de maîtrise du nombre d'actes apparaît, en revanche, plus faible. La Cnam relève, ainsi, que « Le bilan de la gestion du risque est plus contrasté avec un rendement de 104 millions d'euros sur la période 2014-2021, en partie imputable aux actions visant à réduire le nombre de dosages en vitamine D 336(*)».

Économies réalisées dans le cadre des protocoles de biologie depuis 2014

en millions d'euros

Source : commission des affaires sociales du Sénat, d'après des données Cnam (2022)

b) La régulation des dépenses d'imagerie

Les actes d'imagerie comme les forfaits techniques font l'objet d'une régulation tarifaire limitée.

• Les tarifs des actes d'imagerie médicale dépendent de leur inscription dans la CCAM, de leur hiérarchisation au sein de celle-ci et des tarifs fixés conventionnellement.

L'inscription d'un acte à la nomenclature et sa hiérarchisation sont décidées par l'Uncam, après avis de la Haute Autorité de santé (HAS) et sur la base d'un rapport du Haut conseil des nomenclatures, établi en application d'une méthode préalablement validée par la commission de hiérarchisation des actes professionnels337(*). La tarification des actes d'imagerie est fixée par la convention médicale conclue entre l'Uncam et les syndicats représentatifs des médecins338(*).

En conséquence, et ainsi que le relevait la Cour des comptes en 2022, « Une modification des tarifs des actes n'est possible que dans le cadre d'un avenant à la convention médicale (...), dont les délais de conclusion sont généralement incompatibles avec les besoins d'une régulation infra-annuelle des dépenses »339(*).

• Les forfaits techniques ont pour objectif de rémunérer les frais d'amortissement et de fonctionnement de l'appareil (locaux, équipement principal et annexe, maintenance, personnel non médical, consommables, frais de gestion, assurance, etc.)340(*).

Ces forfaits sont également fixés par la convention médicale341(*). Ils font l'objet d'avis de la commission des équipements matériels lourds d'imagerie médicale, transmis au directeur général de l'Uncam et, par lui, aux syndicats représentatifs des médecins généralistes et spécialistes.

La LFSS pour 2017342(*) avait permis au directeur général de l'Uncam, à défaut d'accord conventionnel sur l'évolution des forfaits techniques après avis de la commission des équipements matériels lourds d'imagerie médicale, de fixer unilatéralement ces forfaits. La Cour des comptes relevait toutefois, en 2022, les limites de cette procédure en constatant que « l'Uncam n'a pas accès aux données comptables des exploitants d'appareils, ce qui l'empêche de connaître le niveau réel des coûts en question »343(*).

Pour améliorer l'information de l'Uncam, la LFSS pour 2023344(*) a autorisé celle-ci à conduire, tous les trois ans, une étude nationale des charges du secteur, comprenant le recueil, auprès d'un échantillon représentatif de professionnels, d'éléments relatifs à l'évolution des charges associées aux équipements, à l'organisation ou au fonctionnement des structures les utilisant345(*).

La même LFSS a supprimé la faculté confiée à l'Uncam de fixer unilatéralement les forfaits techniques. Elle a, en revanche, permis aux ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, dans un délai de quatre mois à compter de la promulgation de la loi, d'arrêter ces tarifs346(*).

• Afin de contenir leur progression, plusieurs protocoles de régulation des dépenses d'imagerie ont été mis en place ces quinze dernières années.

Alors que des mesures ponctuelles de maîtrise des dépenses avaient été prises au coup par coup à partir de 2007, pour un montant total d'économies de 228,5 millions d'euros, des protocoles d'accord pluriannuels ont été conclus par l'Uncam et la Fédération nationale des médecins radiologues (FNMR) à compter de 2010 permettant :

- pour la période 2011-2012, des baisses tarifaires et une réduction des volumes, pour un montant total d'économies de 166,7 millions d'euros ;

- pour la période 2013-2015, des baisses tarifaires et la diminution des forfaits techniques, pour un montant total d'économies estimé, en 2016, à 176 millions d'euros.

La Cour des comptes observait toutefois, dans une communication à la commission des affaires sociales du Sénat d'avril 2016, que ces protocoles d'accord n'avaient permis de compenser « ni l'augmentation du recours à l'imagerie ni la hausse du nombre d'actes », et qu'ils n'avaient davantage « développé de vision prospective de l'évolution des dépenses entre les techniques d'imagerie en fonction de leur bénéfice médical »347(*).

Plus récemment, un protocole a été conclu entre l'Uncam et la FNMR, couvrant la période 2018-2020, et portant des objectifs en matière pertinence des actes. Le rapport à la CCSS de juin 2021 observait, toutefois, que ces objectifs n'avaient été que très partiellement atteints - à hauteur de 60 % en 2018 et 30 % en 2019. Ainsi que le relevait la Cour des comptes en 2022, « cette insuffisance de résultats n'a pas été compensée par des mesures tarifaires »348(*).

Les négociations engagées en vue du renouvellement de ce protocole, arrivé à expiration en 2020, se sont interrompues en raison de la revendication, portée par la FNMR, de la suppression de la faculté, pour le directeur général de l'Uncam, de fixer unilatéralement le montant des forfaits techniques.

Dans son rapport dit « Charges et produits » pour 2025, la Cnam souligne que pour « contenir les montants remboursés en lien avec les actes d'imagerie, un nouveau protocole d'accord pour les années 2025 à 2027 pourrait être négocié avec la profession, avec comme objectif de réaliser des économies de l'ordre de 100 millions d'euros par an et revenir ainsi sur une tendance historique d'évolution de cette dépense dans la lignée des protocoles signés avec la profession depuis 2007 »349(*).

• Enfin, la convention médicale de 2024350(*) porte des engagements réciproques des partenaires conventionnels en faveur d'une meilleure maîtrise des volumes. La diminution des actes d'imagerie redondants ou non pertinents figure, ainsi, parmi les 15 programmes d'actions partagés identifiés en matière de pertinence et de qualité des soins351(*).

La convention fixe pour objectif commun de diminuer de 8 % les actes d'imagerie identifiés352(*). Pour cela, l'assurance maladie s'est, notamment, engagée :

- à construire des campagnes d'information régulières pour les prescripteurs, coconstruites avec les représentants des radiologues ;

- à renforcer le rôle du médecin radiologue, en lui permettant de modifier la demande initiale d'imagerie ;

- à outiller les professionnels avec, par exemple, la mise à disposition de lettres d'adressage types ou la saisine de la HAS sur des recommandations alternatives tenant compte de l'offre de soins.

En contrepartie, les médecins se sont notamment engagés :

- à respecter les recommandations de bonne pratique sur les demandes d'imagerie médicale et respecter le principe de sobriété des prescriptions ;

- à s'assurer de l'absence d'examens redondants, notamment par la consultation du dossier médical partagé (DMP) avant chaque demande d'imagerie353(*).

B. L'article 15 vise à renforcer la régulation des dépenses dans les secteurs de la biologie et de l'imagerie

Le présent article vise à renforcer les outils de régulation des dépenses dans ces deux secteurs et à garantir, pour les années 2025 à 2027, un niveau minimal d'économies dans le champ de l'imagerie.

1. La création de nouveaux outils de régulation des dépenses

Le I de l'article rétablit, d'abord, trois articles du code de la sécurité sociale afin de confier aux partenaires conventionnels, à l'Uncam et au Gouvernement de nouveaux outils de maîtrise des dépenses.

Le 1° du I modifie l'intitulé de la section 2.2 du chapitre II du titre VI du livre Ier de la partie législative du code de la sécurité sociale, pour y faire figurer les accords de maîtrise des dépenses créés par l'article 15. Cette section serait, ainsi, renommée « Accords de maîtrise des dépenses, accords de bon usage et contrats de bonne pratique des soins ».

Le 2° du I rétablit, au sein de cette section, trois articles abrogés.

• L'article L. 162-12-18 rétabli porterait les dispositions relatives aux nouveaux accords de maîtrise des dépenses. Ces accords pourraient être conclus, à l'échelle nationale et dans les champs de l'imagerie et de la biologie, respectivement par les parties à la convention médicale354(*) et par les parties à la convention des LBM355(*). Ils définiraient pour une période pluriannuelle :

- des objectifs quantitatifs ou une trajectoire de maitrise des dépenses ;

- les engagements des partenaires conventionnels mis en oeuvre pour respecter ces objectifs ;

- les modalités de suivi du respect de ces objectifs ;

- les mesures correctrices, enfin, pouvant être adoptées en cas de non-respect, annuel ou infra-annuel, des objectifs ou de la trajectoire définis.

L'Uncam devrait informer de son intention d'ouvrir une négociation en vue de la conclusion d'un accord de maîtrise des dépenses les organisations syndicales représentatives de la profession concernée, l'Union nationale des organismes complémentaires d'assurance maladie (Unocam) et les conseils nationaux des ordres professionnels.

La validité de l'accord de maîtrise des dépenses serait subordonnée au respect des conditions applicables aux conventions professionnelles. En conséquence, les accords devront être signés par une ou plusieurs organisations reconnues représentatives au niveau national et ayant réuni, aux élections à l'Union régionale des professionnels de santé (URPS), au moins 30 % des suffrages exprimés au niveau national356(*).

Le directeur général de l'Uncam devrait transmettre l'accord signé aux ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, qui l'approuveraient dans des conditions identiques à celles applicables à la convention médicale. En conséquence, les accords seront réputés approuvés si les ministres n'ont pas fait connaître aux signataires, dans le délai de 21 jours à compter de la réception du texte, qu'ils s'opposent à son approbation du fait de sa non-conformité aux lois et règlements en vigueur, pour des motifs de santé publique ou de sécurité sanitaire ou, enfin, parce qu'il est porté atteinte au principe d'égal accès aux soins357(*).

• L'article L. 162-12-19 rétabli prévoit qu'en cas de non-respect des objectifs quantitatifs ou de la trajectoire fixés par un accord de maîtrise des dépenses, constaté annuellement ou en cours d'année, et lorsque les mesures correctrices ne sont pas adoptées ou se révèlent insuffisantes, le directeur général de l'Uncam peut, par dérogation aux dispositions prévoyant la fixation de ces tarifs par les conventions professionnelles358(*), décider unilatéralement de baisses de tarifs.

Les conditions d'application de ces dispositions devraient être fixées par décret en Conseil d'État. Selon l'étude d'impact jointe au PLFSS déposé, ce décret devra notamment définir les conditions dans lesquelles le non-respect des objectifs fixés pourra être constaté et autoriser, en conséquence, les baisses unilatérales359(*).

• Enfin, l'article L. 162-12-20 rétabli permet aux ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale de saisir, afin de concourir au respect de l'Ondam, les partenaires conventionnels pour qu'un accord de maîtrise des dépenses soit conclu dans un délai de quatre mois à compter de la saisine.

À défaut d'accord valablement conclu dans ce délai, l'article autorise les ministres à adopter par arrêté des mesures de baisse des tarifs pendant une durée de quatre mois.

2. La fixation d'un niveau minimal d'économies pour l'imagerie

Enfin, le II de l'article 15 fixe à 300 millions d'euros, pour les trois prochaines années, le niveau minimal d'économies devant être réalisé dans le champ de l'imagerie.

Pour ce faire, il prévoit qu'en l'absence, au 30 avril 2025, d'accord de maîtrise des dépenses d'imagerie médicale permettant de réaliser un tel montant d'économies sur les années 2025 à 2027, le directeur général de l'Uncam peut procéder, jusqu'au 30 juin 2025, à des baisses de tarifs d'imagerie permettant d'atteindre le montant d'économies prescrit.

L'étude d'impact jointe au projet de loi déposé anticipe, en conséquence, « une économie de l'ordre de 100 millions d'euros par an au cours des trois prochaines années »360(*).

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

Le Gouvernement a transmis cet article au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

1. Sur les accords de maîtrise des dépenses et l'imagerie

• Constatant leur forte croissance spontanée dans les secteurs de la biologie médicale et de l'imagerie, la commission a jugé souhaitable la mise en place d'outils supplémentaires de maîtrise des dépenses d'assurance maladie dans ces deux secteurs.

Elle a, en conséquence, favorablement accueilli les dispositions relatives aux nouveaux accords de maîtrise des dépenses, susceptibles de favoriser la recherche, par l'assurance maladie et les représentants des professionnels de santé, de mesures négociées de régulation des prix et des volumes. Elle observe, à cet égard, que les protocoles triennaux négociés dans le champ de la biologie médicale ont permis, depuis 2014, de réaliser plus de 500 millions d'euros d'économies et de réguler, ainsi, efficacement des dépenses pourtant dynamiques.

Afin de renforcer l'implication des représentants des professionnels de santé dans l'application des accords de maîtrise des dépenses, la commission a adopté, à l'initiative de sa rapporteure, un amendement n° 140 prévoyant que ces derniers fixent les modalités de suivi, par les partenaires conventionnels, du respect des objectifs fixés et des engagements pris.

• La commission juge nécessaire la conclusion d'un tel accord dans le secteur de l'imagerie médicale, marqué ces dernières années par une croissance très rapide des dépenses, supérieure à 6 % par an. Elle relève que la Cour des comptes observe, dans son rapport de 2022 relatif au secteur, que « les dispositifs de régulation des dépenses de soins de ville consacrées à l'imagerie médicale apparaissent neutralisés : le protocole conclu avec les représentants de la profession est arrivé à expiration et les perspectives de conclusion à court terme d'un nouvel accord sont incertaines, les actions de gestion du risque par les organismes d'assurance maladie sont suspendues et le recours à la procédure de révision des forfaits techniques reste difficile... »361(*).

Dans ce contexte, la commission a approuvé les dispositions du présent article fixant un objectif d'économies, pour la période 2025-2027, sur les dépenses d'imagerie médicale d'au moins 300 millions d'euros. Elle a toutefois souhaité laisser aux partenaires conventionnels davantage de temps pour négocier ces mesures, en allongeant le délai dans lequel les partenaires conventionnels devront négocier un nouvel accord de maîtrise des dépenses.

À l'initiative de sa rapporteure, la commission a, en conséquence, adopté un amendement n° 142 repoussant :

- du 30 avril au 30 juin 2025, la date à laquelle devra être conclu un accord de maîtrise des dépenses dans le champ de l'imagerie ;

- du 30 juin au 31 juillet 2025, la date jusqu'à laquelle le directeur général de l'Uncam pourra, en l'absence d'accord conclu avant le 30 juin, baisser unilatéralement les tarifs pour atteindre le montant d'économies prescrit.

2. Sur la faculté pérenne de baisser unilatéralement les tarifs

• La commission, qui demeure attachée à l'exercice conventionnel et au caractère négocié des tarifs applicables aux professionnels libéraux, a, en revanche, accueilli avec circonspection les dispositions visant à confier au directeur général de l'Uncam et aux ministres une faculté pérenne de baisser unilatéralement les tarifs.

Ce type de mesures doit, selon elle, demeurer exceptionnel et requérir un vote du Parlement. La LFSS pour 2023 autorisait, ainsi, le Gouvernement à baisser unilatéralement les tarifs des actes de biologie médicale dans le cas où ne serait pas conclu, avant le 1er février 2023, un accord permettant la réalisation d'une économie d'au moins 250 millions d'euros dans le secteur362(*). Le présent projet de loi soumet, par ailleurs, le même type d'autorisation à la décision du Parlement.

La commission craint qu'à l'inverse, une autorisation pérenne de baisser unilatéralement les tarifs confiée à l'assurance maladie ou au Gouvernement n'affaiblisse excessivement l'exercice conventionnel et n'écarte durablement les professionnels de santé de la recherche de solutions de maîtrise des dépenses.

Elle souligne, au surplus, que la croissance des dépenses de biologie et d'imagerie est largement portée par une augmentation des volumes qui requiert, pour être jugulée, la coopération des professionnels de santé. Les programmes d'actions partagés363(*) créés par la dernière convention médicale et visant à améliorer la pertinence des prescriptions comme la qualité des soins constituent, à cet égard, une innovation intéressante. Assortis d'un nouvel observatoire conventionnel de la pertinence et de la qualité des soins364(*), chargé de suivre la dynamique des dépenses de prescription et la mise en oeuvre des programmes d'actions, ils permettront d'associer durablement les professionnels de santé à l'effort d'efficience nécessaire.

Pour ces raisons, la commission a adopté un amendement n° 141 de sa rapporteure, supprimant du texte transmis les dispositions qui autorisent, d'une part, les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale et, d'autre part, le directeur général de l'Uncam, à procéder unilatéralement à des baisses de tarifs dans le cas où aucun accord de maîtrise des dépenses n'aurait été conclu, ou dans celui où l'accord existant se révélerait insuffisant.

Elle appelle les partenaires conventionnels à prendre en compte le contexte financier actuel de l'assurance maladie et à oeuvrer en faveur d'une meilleure efficience de la dépense de santé. Le Gouvernement pourra, en cas de blocage, demander à nouveau au Parlement l'autorisation de procéder à une baisse de tarifs.

3. Sur l'indépendance des professionnels de santé et le maillage territorial de l'offre de soins

• Le récent rapport d'information de la commission des affaires sociales du Sénat relatif à la financiarisation de l'offre de soins a souligné le risque qu'une régulation des dépenses fondée pour l'essentiel sur des baisses tarifaires n'affaiblisse les structures indépendantes dans des secteurs partiellement ou majoritairement financiarisés.

Il relevait ainsi que la maîtrise des dépenses dans ces secteurs apparaît délicate, « a fortiori lorsque cette régulation a vocation à promouvoir une modération tarifaire justifiée par les gains d'efficience observés chez les grands groupes financiarisés, que les structures indépendantes ne seraient pas en capacité de générer »365(*). En 2019, l'Autorité de la concurrence relevait également : « Au final, cette volonté de réduction des dépenses publiques, dans un contexte plutôt favorable à l'augmentation des volumes, pourrait se traduire par une baisse des marges unitaires et ainsi renforcer les incitations des acteurs à se concentrer pour augmenter leurs volumes propres. »

La taille des sites de biologie médicale et, en conséquence, leur degré de vulnérabilité financière variant grandement d'un territoire à l'autre, les baisses de prix peuvent également avoir un effet sur l'accès territorial aux soins. Une étude de 2023 du cabinet de conseil Roland Berger soulignait ainsi l'existence de départements concentrant « une part élevée de petits sites, plus vulnérables financièrement », et présentant, en conséquence, un risque renforcé de « baisse de l'accès au service pour la population »366(*).

Auditionné par la rapporteure, le réseau Les Biologistes indépendants a également souligné les risques de concentration et de financiarisation associés aux politiques déployées de régulation tarifaire367(*).

En conséquence et à l'initiative de la rapporteure, la commission a adopté un amendement n° 139 visant à inclure, parmi les éléments définis par les accords de maîtrise des dépenses, des objectifs quantitatifs ou qualitatifs en matière de répartition territoriale de l'offre de soins et de protection de l'indépendance des professionnels de santé. Les partenaires conventionnels seraient également chargés de suivre la réalisation de ces objectifs et d'adopter, dans le cas contraire, des mesures correctrices.

La commission propose d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.

Article 15 bis (nouveau)
Réguler les structures de soins non programmés

Cet article, inséré à l'Assemblée nationale par un amendement du Gouvernement, vise à reconnaître et à réguler les structures de soins non programmées.

La commission propose d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.

I - Le dispositif proposé

A. Le développement non régulé des structures de soins non programmés

1. La faiblesse de l'offre de soins ambulatoires : un contexte propice au développement des structures de soins non programmées

• L'accès aux soins de premier recours souffre d'insuffisances. Les études montrent que la désertification médicale progresse dans de nombreux territoires, en lien avec une démographie médicale déclinante. Les effectifs de médecins généralistes sont passés de 100 000 en 2012 à 94 500 en 2021, soit une baisse de 5,6 %. En parallèle, le ministère de la santé indique que 700 000 patients chroniques en ALD ne disposent pas de médecin traitant.

Cette raréfaction de l'offre de soins ambulatoires déborde sur l'hôpital, dont les services d'urgence sont régulièrement saturés. Également confrontés à une pénurie de médecins urgentistes, de nombreux hôpitaux ont choisi de mettre en place des organisations graduées au sein de leurs services d'urgences, avec une régulation renforcée de l'accueil des patients, voire des ouvertures modulées.

• En parallèle, la demande de soins tend à s'accroître, sous l'effet du vieillissement de la population et de la chronicisation croissante de certaines pathologies. Les usagers du système de santé sont de plus en plus en attente de réponses rapides voire immédiates à leurs besoins de soins, y compris pour ce qui relève de prises en charge bénignes et non urgentes.

Les structures de soins non programmées constituent alors une réponse à cette demande et peuvent contribuer à favoriser l'accès aux soins dans des territoires sous-denses, tout en désengorgeant les services hospitaliers d'accueil des urgences.

• Les soins non programmés recouvrent à la fois une activité régulée, qui correspond à l'offre organisée dans le cadre du service d'accès aux soins (SAS) et de la permanence des soins ambulatoires (PDSA), mais aussi une activité non régulée, hors SAS et hors PDSA. Pour mémoire, la PDSA s'étend de 20 heures à 8 heures tous les jours, et comprend les dimanches et jours fériés ainsi que le samedi après-midi à partir de 14 heures.

L'offre de soins non programmés revêt des formes diverses : elle peut être assurée par des cabinets médicaux, éventuellement constitués en maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP), par des centres de santé, ou par des établissements de santé accueillant des soins non programmés en journée, éventuellement avec le concours de médecins libéraux.

Dans ce contexte, l'organisation de l'accès aux soins de premier recours apparaît déterminante pour réguler la demande de soins non programmés.

2. Des dérives anticipées et désormais identifiées

• Si les agences régionales de santé (ARS) ont entrepris de cartographier l'offre de soins non programmés sur leur territoire, le nombre de ces structures ne semble pas recensé de façon systématique à ce jour.

La création des structures de soins non programmés répond à des initiatives locales, qui peuvent résulter ou non d'un projet de territoire. La création de ces structures ne nécessitant pas d'autorisation préalable, les ARS n'ont aujourd'hui aucun droit de regard sur leur ouverture, ni aucune capacité à en réguler étroitement le fonctionnement.

Néanmoins, l'assurance maladie et le ministère de la santé partagent le constat d'une prolifération de ces structures, qui peuvent prospérer sur des pratiques tarifaires peu éthiques, et contribuer à fragiliser le modèle d'exercice de la médecine libérale.

• L'identification des enjeux et des potentielles dérives associées à l'émergence et au développement des structures de soins non programmés n'est pas nouvelle. En 2018, un rapport du député de la Charente Thomas Mesnier sur l'organisation de l'accès aux soins non programmés relevait l'importance d'encadrer l'activité de ces structures. Il soulignait, à propos du développement de cette nouvelle offre :

« Si un tel effort de renfort et d'organisation de ce service public confié aux médecins n'était pas entrepris, il ne fait guère de doute que des initiatives privées à but lucratif, qui sélectionnent les patients, et dont on voit déjà l'émergence, se développeront de façon désorganisée avec le risque qu'elles encouragent une approche consumériste, ignorant les parcours de soins et la recherche d'un égal accès aux soins sur le territoire, et qu'elles contribuent au désengagement des professionnels de santé. »

• L'assurance maladie s'est clairement saisie de cette question à l'occasion de la dernière convention médicale signée en juin 2024 avec les syndicats de médecins libéraux. Dans ses articles 49 à 52, cette convention organise des dispositifs visant à « améliorer la prise en charge des soins non programmés tout en évitant certaines dérives constatées »368(*). En particulier, les mesures retenues par les partenaires conventionnels visent à renforcer l'accueil et l'offre en amont de la PDSA, pour recentrer cette dernière sur l'urgence, et à privilégier la prise en charge des soins non programmés dans un cadre régulé.

Mesures inscrites dans la convention signée entre l'assurance maladie
et les médecins libéraux le 4 juin 2024

1. Prise en charge non programmée en dehors des horaires de la PDSA

Pour valoriser les prises en charge non programmées hors PDSA, la convention prévoit :

- la possibilité pour les médecins effecteurs de coter une majoration supplémentaire lorsqu'ils acceptent de prendre en charge un patient en dehors de sa patientèle médecin traitant entre 19 heures et 21 heures sur demande de la régulation SAS369(*) ;

- la possibilité pour les médecins traitants de coter une majoration supplémentaire lorsqu'ils acceptent de prendre en charge un patient de leur patientèle médecin traitant entre 19 heures et 21 heures sur demande du centre de régulation médicale des urgences370(*) ;

- la création d'une majoration pour les visites à domicile lorsque le médecin intervient chez le patient dans un délai de 24 heures suivant l'appel de la régulation SAS, facturable uniquement si la visite est facturée à tarif opposable371(*).

Ces majorations permettent de valoriser les médecins qui ouvriraient des créneaux supplémentaires en fin de journée ou accepteraient de se déplacer au domicile du patient, pour prendre en charge des soins non programmés, dans un cadre régulé, et limiter ainsi le report sur les horaires de PDSA.

2. Prise en charge non programmée aux horaires de la PDSA

Afin de mieux encadrer la rémunération des prises en charge non régulées, aux horaires de la PDSA, la convention prévoit de leur appliquer une majoration de 5 euros, non cumulable avec les majorations de PDSA pour les actes régulés372(*). Par ailleurs, la convention introduit :

- une revalorisation du tarif des visites à domicile aux horaires de la PDSA à partir du 1er janvier 2026 ;

- une définition de la notion d'urgence pour l'application de certaines majorations, ces dernières n'étant plus facturables en téléconsultation ;

- la clarification, enfin, des conditions de facturation de certains actes techniques.

3. Un renforcement des actions de contrôle

Dans une circulaire relative à la mise en oeuvre de la convention médicale, l'assurance maladie souligne : « Afin de s'assurer du bon usage des majorations facturées dans le cadre de la prise en charge de soins non programmés et s'assurer qu'elles permettent réellement de répondre aux besoins des patients, les partenaires conventionnels ont marqué leur volonté de mener des plans de contrôles par les caisses primaires »373(*).

Constatant, par ailleurs, dans son dernier rapport dit « Charges et produits », que certains centres de soins non programmés « ont une pratique d'optimisation, d'une part, peu compatible avec les règles de prise en charge par l'assurance maladie et, d'autre part, qui peut conduire à une désorganisation des territoires », l'assurance maladie juge « opportun, dans un contexte de rationalisation des soins non programmés et des valorisations associées, et également pour s'assurer de leur intégration au sein de l'offre de ville et en partenariat avec l'offre hospitalière, de stabiliser le cadre de régulation des centres de soins non programmés à travers la diffusion d'un cahier des charges national. »374(*)

• À l'occasion d'un récent rapport sur la financiarisation de l'offre de soins375(*), enfin, le Sénat a également mis l'accent sur les pratiques de facturation opportunistes voire abusives employées par des centres de soins non programmés, appelant à conditionner l'ouverture de tout centre de soins primaires à une autorisation préalable par le directeur général de l'ARS.

B. Une volonté de réguler l'offre des structures de soins non programmés

Le présent article propose de créer un nouveau chapitre au sein du titre II « Autres services de santé » du livre III de la sixième partie du code de la santé publique, qui comprend déjà un chapitre relatif aux centres de santé (chapitre III). Ce chapitre III quinquies, intitulé « Structures de soins non programmées » serait constitué d'un unique article L. 6323-6.

1. Les structures et les professionnels concernés par la mesure

Le premier alinéa du nouvel article L. 6323-6 du code de la santé publique précise que les structures de soins non programmées sont des cabinets médicaux ou des centres de santé pratiquant des soins de premier recours et exerçant à titre principal une activité de soins non programmés. Les conditions de leur organisation, de leur accessibilité, les modalités d'orientation des patients et les activités qu'elles assurent sont définies dans un cahier des charges. Ce cahier des charges est fixé par décret.

Le deuxième alinéa indique que les professionnels exerçant dans ces structures se déclarent - s'ils sont libéraux - ou sont déclarés - lorsqu'ils sont salariés par un centre de santé - à la caisse primaire d'assurance maladie et à l'ARS compétentes. En outre, les professionnels exerçant au sein de ces structures sont tenus de participer au service d'accès aux soins (SAS) et à la PDSA.

Le troisième alinéa prévoit que le bénéfice de certains financements ou actes remboursables peut être conditionné au respect de dispositions inscrites dans l'une des conventions professionnelles mentionnées à l'article L. 162-14-1 du code de la sécurité sociale376(*).

2. Des conditions d'application largement renvoyées au niveau réglementaire

Enfin, le quatrième et dernier alinéa renvoie l'essentiel des conditions d'application du présent article au décret, notamment les modalités de définition de l'activité de soins non programmés et de fixation du cahier des charges.

II - La position de la commission

• La commission souscrit à la nécessité de fixer un cadre de régulation général à l'activité et au fonctionnement des structures de soins non programmées qui ont largement proliféré ces dernières années.

En complément des mesures de régulation tarifaire inscrites dans la convention signée entre l'assurance maladie et les médecins libéraux en juin 2024, l'inscription dans la loi des principes régissant le fonctionnement de ces structures permettra de sécuriser l'insertion de ces structures dans l'offre de soins locale et de prévenir les dérives actuellement constatées.

• Toutefois, la commission constate que l'article, dans sa version issue des travaux de l'Assemblée nationale, renvoie l'essentiel de la définition de ce cadre de régulation à la voie réglementaire. En conséquence, pour fixer clairement l'intention du législateur, la commission propose :

- de préciser que l'activité de soins non programmés ne recouvre pas la prise en charge des patients relevant de l'urgence vitale (amendement n° 143), ceux-ci devant être orientés vers des services d'accueil des urgences (SAU) ;

- de prévoir que le contenu du cahier des charges au respect duquel seraient tenues les structures de soins programmés est fixé par arrêté, sur le modèle de ce qui est applicable aux maisons de santé, qu'il précise notamment les délais de prise en charge des patients, et que les projets de santé élaborés par les centres de santé et les maisons de santé377(*) respectent le cahier des charges précité (amendement n° 144) ;

- d'indiquer que les conditions dans lesquelles les professionnels exerçant au sein des structures de soins non programmés sont tenus de participer au SAS et à la PDSA sont déterminées par décret (amendement n° 145).

La commission propose d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.

Article 15 ter (nouveau)
Avancer la date d'entrée en vigueur de la réforme
du financement pour le traitement du cancer par radiothérapie

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale et retenu par le Gouvernement dans le texte transmis au Sénat, prévoit d'avancer la date de mise en oeuvre de la réforme du financement de la radiothérapie au 1er octobre 2025 au lieu du 1er janvier 2026.

La commission propose d'adopter cet article sans modification

I - Le dispositif proposé

A. Une réforme attendue qui s'inscrit dans un cadre plus global de réforme du financement des activités hospitalières

La réforme du financement par forfait de l'activité de traitement du cancer par radiothérapie adoptée dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024378(*) vise à améliorer l'adéquation des financements de ces traitements avec l'évolution des techniques et des matériels médicaux.

Des modèles de tarification distincts

Le secteur public ou privé non lucratif facture à l'assurance maladie son activité de radiothérapie - les séances de préparation ou d'irradiation - selon des tarifs associés à des groupements homogènes de séjours (GHS).

Ces règles de codage datent de 2010 et intègrent la facturation des techniques de modulation d'intensité ou en conditions stéréotaxiques.

Dans le secteur libéral, les structures facturent à l'acte selon la classification commune des actes médicaux (CCAM), sur le fondement, pour les séances d'irradiation, d'une codification inchangée depuis 2004 alors qu'elle devait être transitoire.

Source : Cour des comptes, RALFSS 2022

Le mode de financement actuel apparaît inadapté en ce qu'il désincite à l'innovation : les nouvelles techniques permettent un nombre réduit de séances, au bénéfice du patient, mais se révèlent finalement moins rémunératrices pour les établissements de santé. Comme le soulignait alors la Cour des comptes : « la tarification à la séance n'incite pas les établissements aux évolutions de prise en charge permettant de réduire le nombre de séances, comme cela est possible grâce à l'hypofractionnement »379(*). La Cour pointait également un risque d'une évolution des dépenses liées à l'activité de radiothérapie non maitrisée. Ainsi, la Cour constatait que les dépenses de radiothérapie avaient augmenté, entre 2015 et 2020, beaucoup plus fortement que l'enveloppe globale de l'Objectif national de dépenses d'Assurance maladie (Ondam) qui lui était destinée.

La réforme issue de la LFSS pour 2023 prévoyait alors que l'activité de traitement du cancer par radiothérapie soit financée par des forfaits déterminés notamment au regard de la technique de radiothérapie utilisée et des caractéristiques des patients. Elle vise également à uniformiser les modes de financement selon les secteurs afin d'éviter les distorsions tarifaires et une mauvaise allocation des ressources entre les secteurs public et privé non lucratif d'une part et le secteur privé lucratif d'autre part.

La commission avait alors salué « une mesure bienvenue au regard de l'évolution des distorsions connues et de l'évolution des protocoles ». Elle avait toutefois regretté que cette réforme ne s'intègre pas mieux avec celle plus globale du financement des activités hospitalières ainsi qu'avec la révision de la nomenclature des actes de radiothérapie. Le Gouvernement avait d'ailleurs finalement inséré cette réforme au sein de l'article 49 de la LFSS pour 2024 afin de l'intégrer pleinement dans la réforme du financement de la tarification des activités.

B. Avancer au 1er octobre 2025 la date d'entrée en vigueur de la réforme

Le présent article, issu d'un amendement du rapporteur général de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, prévoit d'avancer cette date d'entrée en vigueur. L'amendement prévoyait initialement une date d'entrée en vigueur au 1er janvier 2025, ce qui, pour le Gouvernement, était « techniquement impossible à mettre en oeuvre ». Il a été sous-amendé en séance afin de remplacer cette date par une échéance de compromis fixée au 1er octobre 2025 afin, selon les propos du rapporteur général en séance, de « ne pas mettre les professionnels en difficulté pour des raisons techniques ».

En application de l'article L. 162-22-3 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction résultant de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, cette disposition concerne à la fois les activités de traitement du cancer par radiothérapie, mais aussi les activités de traitement de l'insuffisance rénale chronique par épuration extrarénale.

II - La position de la commission

La commission s'est interrogée sur la pertinence d'avancer de trois mois l'entrée en vigueur d'une réforme systémique des financements de la radiothérapie. Cependant, tous les acteurs s'accordent sur la nécessité de revoir ce modèle de financement. La commission rappelle que les premiers travaux en ce sens ont été engagés il y a plus de 10 ans dans le cadre de l'expérimentation prévue par la loi n° 2013-1203 du 23 décembre 2013 de financement de la sécurité sociale pour 2014.

Il importe de mettre fin dans les meilleurs délais à l'obsolescence du modèle de financement des actes de radiothérapie et de dialyse, au regard de l'évolution des pratiques et des enjeux sous-jacents au développement de cette activité. Dès lors, avancer l'entrée en vigueur des dispositions législatives relatives à la forfaitisation des actes de radiothérapie et de dialyse au 1er octobre 2025 permettrait, sans mettre les acteurs de terrain en difficulté, d'assurer l'application effective de la réforme dès le 1er janvier 2026.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article 15 quater (nouveau)
Demande de rapport sur le référentiel des actes innovants
hors nomenclature

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale et retenu par le Gouvernement dans le texte transmis au Sénat, consiste en une demande de rapport visant à évaluer la prise en charge des actes inscrits au référentiel des actes innovants hors nomenclature (RIHN).

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

A. Le RIHN, un registre permettant la prise en charges d'actes innovants de biologie et d'anatomopathologie non encore inscrits à une nomenclature justifiant le remboursement en droit commun

La prise en charge des actes de biologie médicale et d'anatomocytopathologie est conditionnée à une inscription à la nomenclature des actes de biologie médicale (NABM), inclue dans la liste des actes et prestations définissant les actes et prestations remboursables réalisés par les professionnels de santé380(*).

Toutefois, à l'instar de l'accès précoce pour les médicaments, il existe un dispositif de prise en charge précoce, transitoire et dérogatoire pour les actes innovants381(*) de biologie médicale et d'anatomocytopathologie dans l'attente d'une inscription à la NABM : l'inscription sur le référentiel des actes innovants hors nomenclature (RIHN), créé par une instruction de la DGOS en date du 31 juillet 2015382(*) et depuis consacré par la loi383(*). Cette prise en charge est conditionnée au recueil de données permettant l'évaluation ultérieure de l'acte.

L'inscription sur le RIHN s'opère sur une période de trois ans, à l'issue desquels la Haute Autorité de santé (HAS) évalue l'acte en vue d'une éventuelle inscription sur la NABM si les données cliniques et médico-économiques recueillies tendent à démontrer l'existence d'un service attendu suffisant. Les actes insuffisamment matures peuvent être maintenus au sein du RIHN pour une période de deux ans, et les actes suffisamment matures sont également maintenus au sein du RIHN jusqu'à l'avis de la HAS concernant l'inscription à la NABM.

B. Le passage à une prise en charge de droit commun, insuffisamment dynamique, conduit à créer un goulet d'étranglement et à maintenir une prise en charge au titre du RIHN pour des actes ne présentant plus de caractère innovant

Toutefois, d'importantes carences dans le recueil des données conduisent à créer un goulet d'étranglement au sein du RIHN en empêchant ou ralentissant l'évaluation en vue d'une prise en charge de droit commun : la HAS note que « cela a fortement limité les évaluations en sortie de RIHN en vue du remboursement par l'Assurance maladie ».

Il en résulte un manque de dynamisme dans le passage du RIHN à la NABM : entre 2015 et 2021, seuls sept actes du RIHN ont été inscrits à la NABM. Par conséquent, année après année, un stock d'actes « bloqués » sur le RIHN s'est constitué. Les mesures visant à fluidifier la sortie du RIHN, prévues par l'article 51 de la LFSS pour 2023384(*), n'ont pas permis de pallier ces faiblesses, comme l'avait pressenti la commission des affaires sociales du Sénat lorsqu'elle avait eu à se prononcer sur ces dispositions.

C. Un financement sur une enveloppe fermée, incompatible avec le stock d'actes bloqués sur le RIHN et à la source de surcoûts pour les établissements et d'un accès à l'innovation réduit pour les patients

Le financement des actes inscrits sur le RIHN385(*) est assuré sur l'Ondam, par la dotation nationale de financement des missions d'intérêt général d'aide à la contractualisation (Migac)386(*) et, plus précisément, par la dotation au titre des missions d'enseignement, de recherche, de référence et d'innovation (Merri).

L'enveloppe dédiée, nommée Merri G03, est fermée et dotée de 493,29 millions d'euros pour 2022.

Dans ces conditions, l'engorgement du RIHN lié au goulet d'étranglement en sortie génère une importante tension sur le financement des actes du RIHN. Le stock d'actes « bloqués », qui ne présentent plus nécessairement de caractère innovant, sature à lui seul l'enveloppe et fait obstacle à la prise en charge de nouveaux actes innovants.

Le coût des actes innovants de biologie ou d'anatomocytopathologie, parfois important, doit donc être supporté par les établissements de santé sur leur budget propre, une fois l'enveloppe nationale consommée : il en résulte une atteinte à « l'équité d'accès aux actes inscrits sur le RIHN » puisque seuls certains établissements peuvent consentir à l'effort financier nécessaire.

Pour l'année 2021, selon la direction de la sécurité sociale, la dotation « a permis de couvrir 51 % des coûts supportés par les établissements de santé pour ces activités (le coût associé aux activités prises en compte pour le calcul correspondait à un total de 790 M€ pour une enveloppe limitée à 406 M€) ».

Les premiers pénalisés en sont les patients, dont l'accès à l'innovation en biologie se trouve réduit, à rebours de l'objectif affiché du RIHN.

D. Le dispositif proposé : une demande de rapport sur le RIHN

L'article 15 quater consiste en une demande de rapport afin d'évaluer le RIHN et le niveau de financement des actes innovants de biologie et d'anatomopathologie hors nomenclature par rapport aux besoins. Ce rapport doit aboutir à des propositions pour améliorer la prise en charge des actes innovants de biologie et d'anatomopathologie.

II - La position de la commission

La commission des affaires sociales avait exprimé toutes ses réserves sur la réforme proposée par l'article 51 de la LFSS pour 2023, que l'article 15 quater entend évaluer. La rapporteure avait alors affirmé « douter fortement que la réponse apportée soit suffisante pour renverser la tendance », notant notamment que le calendrier annoncé pour la gestion dynamique de la liste n'était « pas des plus rassurants ».

Force est de constater que, plus de deux ans après l'entrée en vigueur de ces dispositions, la situation du RIHN n'a pas fondamentalement évolué. Le goulet d'étranglement qui étreint la prise en charge précoce des actes innovants de biologie et d'anatomocytopathologie est toujours présent, les actes désormais courants continuent de s'accumuler sur le RIHN dans l'attente de leur inscription à la NABM et, en bout de chaîne, les pertes de chance induites pour les patients perdurent.

Par conséquent, la commission des affaires sociales soutient sans réserve l'esprit de cet amendement.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article 15 quinquies (nouveau)
Demande de rapport sur le bilan des articles 33 et 36 de la LFSS 2023
et sur l'indexation automatique du tarif des actes infirmiers
sur le taux d'inflation

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale et retenu par le Gouvernement dans le texte transmis au Sénat, consiste en une demande de rapport visant à réaliser le bilan des articles 33 et 36 de la LFSS pour 2023 et à étudier l'opportunité de la mise en place d'un mécanisme d'indexation automatique du tarif des actes infirmiers sur l'inflation

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

I - Le dispositif proposé : une demande de rapports au Gouvernement sur trois sujets distincts relatifs aux compétences et aux modalités d'exercice du métier d'infirmier

A. L'extension de la compétence d'administration et de prescription des vaccins par les pharmaciens, les sages-femmes et les infirmiers

L'article 33 de la LFSS pour 2023 a étendu la compétence d'administration et de prescription de vaccins aux pharmaciens, sages-femmes et infirmiers ainsi qu'aux étudiants en troisième cycle des études de médecine et aux étudiants en troisième cycle des études pharmaceutiques.

Il encadre strictement ces nouvelles compétences en précisant que la liste des vaccins et, le cas échéant, les personnes susceptibles d'en bénéficier, seraient déterminées par arrêté du ministre chargé de la santé après avis de la HAS et de l'ANSM pour ce qui est de la prescription, et de la seule HAS pour ce qui est de l'administration.

Les décrets du 8 août 2023 précisent les modalités dans lesquelles les sages-femmes387(*), d'une part, et des pharmaciens d'officine, des infirmiers et des pharmaciens exerçant au sein des pharmacies à usage intérieur, des professionnels de santé exerçant au sein des laboratoires de biologie médicale et des étudiants en troisième cycle des études pharmaceutiques388(*), d'autre part, peuvent exercer ces nouvelles compétences.

L'extension des compétences vaccinales chez les infirmiers

En application de L. 4311-1 du code de la santé publique et du décret n° 2023-736 du 8 août 2023 pris pour son application, les infirmiers peuvent désormais :

prescrire l'ensemble des vaccins mentionnés dans le calendrier des vaccinations aux personnes âgées de onze ans et plus, à l'exception de certains vaccins chez les personnes immunodéprimées ;

administrer l'ensemble des vaccins mentionnés dans le calendrier des vaccinations aux personnes âgées de onze ans et plus ;

prescrire et administrer les vaccins contre la grippe saisonnière aux personnes âgées de onze ans et plus.

L'article R. 4311-5-1 du code de la santé publique précise que dans « le cas où l'infirmier n'a pas suivi l'enseignement spécifique à la prescription de vaccins dans le cadre de sa formation initiale » il doit justifier d' « une attestation de formation délivrée par un organisme ou une structure de formation respectant les objectifs pédagogiques [...] permettant de connaître notamment les caractéristiques des maladies à prévention vaccinale, la traçabilité des vaccinations et les principales recommandations du calendrier vaccinal ».

B. L'expérimentation tendant à autoriser les infirmiers à signer les certificats de décès.

L'article 36 de la LFSS pour 2023 prévoyait d'expérimenter, pendant un an et dans la limite de six régions, l'autorisation des infirmiers à signer les certificats de décès. L'objectif de cette expérimentation est d'évaluer la faisabilité et l'acceptabilité par les infirmiers diplômés d'État de cette nouvelle compétence ainsi que les conséquences sur l'amélioration des délais de certification. Constatant les difficultés rencontrées dans de nombreux territoires pour faire appel, dans un délai raisonnable, à un médecin dont la signature du certificat de décès permet d'engager les démarches funéraires, la commission avait soutenu cette expérimentation.

Toutefois, fin 2023, presqu'un an après le vote de cette disposition par le Parlement, l'expérimentation n'était toujours pas lancée. C'est pourquoi, le Sénat avait alors adopté dans le cadre de l'examen de la proposition de loi visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels un amendement visant à étendre l'expérimentation prévue à l'ensemble du territoire national et à aligner ses modalités de financement sur celles appliquées aux médecins.

Le décret d'application de ces nouvelles dispositions ayant été publié le 23 avril 2024, l'expérimentation dans sa forme actuelle n'est mise en oeuvre que depuis cette date et doit se poursuivre jusqu'au 25 avril 2025. Elle fait l'objet d'un suivi quantitatif hebdomadaire par les ARS ainsi que d'une évaluation qualitative à intervalles réguliers par les services de l'État. Le présent article demande au Gouvernement de transmettre un rapport au Parlement sur cette expérimentation.

C. L'opportunité de la mise en place d'un mécanisme d'indexation automatique du tarif des actes infirmiers sur l'inflation

La nomenclature générale des actes professionnels (NGAP) précise les modalités de cotation des actes infirmiers remboursés par l'assurance maladie. Un acte est défini par une lettre-clé, permettant de respecter le secret professionnel, déterminant une valeur unitaire et affectée d'un coefficient permettant de déterminer son tarif. Ainsi la valeur de chaque acte peut être déterminée par la formule : (lettre-clé) x coefficient.

La valeur des lettres-clés est négociée entre les syndicats représentatifs de la profession et l'Ucam (Union nationale des caisses d'assurance maladie). Les lettres-clés des principaux actes réalisés par les infirmiers [AMI (acte médico-infirmier), AIS (acte de soins infirmier) et DI (démarche de soins infirmiers)] n'ont pas fait l'objet d'une revalorisation significative depuis 2009. Cette absence de revalorisation pèse aujourd'hui fortement sur l'activité des infirmiers.

Dans ce cadre, le présent article vise à demander un rapport sur l'opportunité de modifier le système de revalorisation des actes infirmiers en y intégrant une indexation sur l'évolution de l'inflation.

II - La position de la commission

• La commission des affaires sociales constate que l'article 16 bis du texte transmis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 47-1 de la Constitution, pérennise l'expérimentation visant à autoriser les infirmiers à certifier les décès (cf. commentaire de l'article 16 bis). Dès lors, la demande d'un rapport au Parlement sur la question semble sans objet. La rapporteure a souhaité, par son amendement n° 146, supprimer, par cohérence, cette demande de rapport.

• Concernant l'extension des professionnels pouvant prescrire et administrer des vaccins aux personnes de 11 ans et plus, la commission avait estimé que cette disposition permettait de répondre aux attentes des professionnels de santé et de participer à l'amélioration de la couverture vaccinale sur l'ensemble du territoire. Une telle extension était par ailleurs conforme aux recommandations formulées par la Haute Autorité de santé. La commission a estimé pertinent d'établir un bilan de l'application de cette disposition au regard de son caractère essentiel pour l'amélioration de l'organisation des soins. En effet, le bilan de la campagne de vaccination 2023-2024 réalisé par Santé publique France montre une dégradation de la couverture vaccinale contre la grippe389(*) et une stabilisation de l'adhésion à la vaccination à 83,7 %.

Dans ce cadre, l'amélioration de la protection de la population vis-à-vis des maladies infectieuses et l'adhésion à la vaccination constituent un enjeu majeur de santé publique.

• Enfin, concernant la question de la revalorisation des actes infirmiers, la commission des affaires sociales soutient sans réserve l'esprit de cette demande, adoptée à l'unanimité à l'Assemblée nationale, qui vise à mettre en lumière les difficultés rencontrées quotidiennement par les infirmiers dans l'exercice de leur métier. L'absence ou la faible revalorisation des actes ainsi que l'augmentation des charges induite par l'inflation mettent en danger la viabilité économique de certains cabinets d'infirmiers.

Toutefois, afin que cette demande de rapport ne se transforme pas en prétexte pour reculer une nouvelle fois l'examen d'une loi spécifique à la profession, la rapporteure a déposé un amendement n°146 afin d'avancer le délai dans lequel ce rapport devra être rendu par le Gouvernement et d'en modifier le champ pour l'intégrer pleinement aux travaux préparatoires à l'examen de ce futur texte.

Dans ce cadre, la commission appelle le Gouvernement, à agir au plus vite en faveur d'une véritable redéfinition du métier infirmier, en lien avec la revalorisation de leurs compétences. En effet, elle estime que le malaise et les difficultés que connaît la profession ne relèvent pas de la seule revalorisation de leurs actes mais d'une réflexion plus globale sur l'attractivité du métier et la reconnaissance de son rôle central dans notre offre de soins. Ce travail, auquel la commission des affaires sociales prendra toute sa part, permettra ensuite à la négociation conventionnelle d'établir les modalités de revalorisation et de tarification des nouveaux actes.

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

Article 16
Extension du champ de l'accompagnement
à la pertinence des prescriptions

Cet article vise à étendre la procédure d'accompagnement à la pertinence des prescriptions, mise en place par la LFSS pour 2024 pour les produits de santé et prestations associées, aux actes remboursables et transports prescrits.

La commission propose d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.

I - Le dispositif proposé

A. Pour renforcer l'efficience des dépenses de santé, l'assurance maladie cherche à améliorer la pertinence des prescriptions

1. La notion de pertinence des prescriptions et les enjeux financiers associés

· La pertinence des soins et prescriptions constitue un enjeu sanitaire et financier majeur pour l'assurance maladie et fréquemment mis en avant.

Selon la Haute Autorité de santé (HAS), « un soin est qualifié de pertinent lorsqu'il est nécessaire, en phase avec les besoins du patient, et approprié dans son indication. La pertinence des soins permet d'éviter les traitements inadéquats avec des risques potentiels pour les patients et des dépenses inutiles pour la collectivité. C'est une notion évolutive (...) en raison de l'évolution des techniques ou des connaissances »390(*).

L'amélioration de la pertinence des soins est recherchée par l'assurance maladie dans le cadre d'une politique dite de « maîtrise médicalisée » des dépenses de santé. Celle-ci regroupe l'ensemble des actions mises en oeuvre pour réduire le nombre d'actes et produits non justifiés médicalement ou pour lesquels il existe, à efficacité égale, des actes et des produits de moindre coût391(*).

Les enjeux attachés à la pertinence des soins et à l'efficience des dépenses de santé sont également soulignés à l'international. Un rapport de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) de 2017 estimait, ainsi, que « près d'un cinquième des dépenses de santé apportent une contribution nulle, ou très limitée, à l'amélioration de l'état de santé de la population. En d'autres termes, les pouvoirs publics pourraient dépenser beaucoup moins dans ce domaine sans que cela n'ait d'impact sur la santé des patients »392(*).

· La pertinence des soins constitue également, pour les professionnels de santé, une obligation légale et déontologique.

Si la liberté de prescription figure parmi les « principes déontologiques fondamentaux » listés par le code de la sécurité sociale393(*), les médecins sont toutefois tenus, dans tous leurs actes et prescriptions, « d'observer la plus stricte économie compatible avec la qualité, la sécurité et l'efficacité des soins »394(*).

Le code de déontologie médicale fait, par ailleurs, obligation au médecin, dès lors qu'il accepte de répondre à une demande, d'assurer personnellement au patient des soins consciencieux, dévoués et fondés sur les données acquises de la science395(*). Compte tenu de ces données, le médecin doit limiter ses prescriptions à ce qui est nécessaire à la qualité, à la sécurité et à l'efficacité des soins396(*).

Si les recommandations de bonnes pratiques produites par la HAS demeurent, en elles-mêmes, dépourvues de caractère contraignant, elles participent toutefois, selon une jurisprudence établie du Conseil d'État, à la réunion et à la mise à disposition des professionnels de santé des données acquises de la science, sur lesquelles doivent être fondés les soins397(*).

· Le montant des dépenses remboursables associées à des prescriptions médicales est élevé et croissant ces dernières années.

D'après la Cnam, il s'établit en 2022 à 57 milliards d'euros, les principaux postes de prescription étant les médicaments (18,5 milliards d'euros), les indemnités journalières (12,5 milliards d'euros) et les dispositifs médicaux de la liste des produits et prestations remboursables (6,7 milliards d'euros). Entre 2019 et 2022, les dépenses remboursables prescrites ont, par ailleurs, connu un taux de croissance annuel moyen (TCAM) de 3 %, compris entre 6,7 % et 1,1 % selon les postes398(*). Les prescriptions de médecins généralistes représenteraient, en 2022, près de 74 % du total des prescriptions médicales, soit 42,1 milliards d'euros.

Montant remboursable en 2022 et TCAM 2019-2022
par poste de prescription

(en milliards d'euros et en %)

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après des données Cnam (2024)

Sur l'ensemble de ces postes, des marges de progrès dans l'efficience des dépenses de santé sont identifiées.

En matière de médicaments, l'assurance maladie observe, par exemple, d'importants phénomènes de surprescription - en nombre de patients ou en durée de traitements unitaires -, et un volume important de prescriptions réalisées hors des indications thérapeutiques remboursables (ITR) qui demeurent, en principe, les seules prises en charge.

Les indications thérapeutiques remboursables

En vue de leur admission au remboursement, les médicaments disposant d'une autorisation de mise sur le marché (AMM) du fait d'une balance bénéfice / risque favorable399(*) doivent être évalués par la Haute Autorité de santé (HAS)400(*) qui apprécie, notamment, le bien-fondé de l'inscription du médicament au regard du service médical rendu401(*).

L'inscription sur les listes des spécialités remboursables est prononcée, indication par indication, sur le fondement de cet avis402(*). On parle alors d'indication thérapeutique remboursable (ITR).

Les médecins sont tenus de signaler sur l'ordonnance le caractère non remboursable des produits lorsqu'ils prescrivent une spécialité en dehors des indications thérapeutiques ouvrant droit au remboursement403(*). L'assurance maladie indique, toutefois, identifier de nombreuses prescriptions hors ITR ne portant pas cette mention404(*).

En matière de dispositifs médicaux, l'assurance maladie indique constater un taux de croissance élevé des dépenses, de l'ordre de 4 % par an en moyenne depuis 2016, et souhaiter lutter « contre le gaspillage observé de certains dispositifs médicaux en cohérence avec les objectifs nécessaires de sobriété. » Les compléments nutritionnels oraux, les dispositifs d'autosurveillance de la glycémie ou les pansements prescrits suite à une intervention chirurgicale apparaissent prioritairement visés405(*).

Une progression très dynamique des dépenses de biologie médicale est également observée. La Cnam constate, notamment, la persistance d'actes peu utiles dans le parcours de soins. Seuls 9 % des dosages de vitamine D, par exemple, correspondraient à l'une des six indications recommandées par la HAS. De la même manière, les triples dosages ou les doubles dosages des hormones thyroïdiennes ne seraient justifiés que dans de très rares cas406(*).

En matière d'imagerie, une forte croissance des volumes d'actes est observée, qui conduit la Cnam à recommander, notamment, aux médecins requérants de s'assurer systématiquement de l'absence d'examens redondants par une consultation préalable du DMP407(*). L'Académie nationale de médecine a également mis en avant, dans un rapport de 2021, que « seulement une demande d'imagerie sur sept était correctement libellée » et mentionnait, notamment, l'indication ou le motif de l'examen, pour permettre au radiologue de répondre efficacement à la demande408(*).

Enfin, en matière de transports, le très fort taux de progression des dépenses, qui ont augmenté de 9,3 % entre 2022 et 2023, a poussé l'assurance maladie à élaborer une feuille de route pluriannuelle de maîtrise des dépenses de transport et le législateur, dans la LFSS pour 2024, à favoriser le développement du recours aux transports partagés lorsque l'état du patient est jugé compatible avec cette modalité de prise en charge409(*).

2. Les outils mis en place par les pouvoirs publics et l'assurance maladie

Afin d'améliorer la pertinence des prescriptions, de maîtriser les dépenses d'assurance maladie et de promouvoir le bon usage, plusieurs outils ont été mis en place par le législateur et l'assurance maladie.

· La procédure d'accord préalable permet, ainsi, au service du contrôle médical de l'assurance maladie de confirmer la prise en charge d'un acte ou d'un traitement avant son exécution. Elle a vocation à s'appliquer aux actes et traitements lorsque :

- leur nécessité doit être appréciée au regard d'indications déterminées ou de conditions particulières d'ordre médical, notamment lorsqu'il existe un risque de non-respect de ces indications ou de mésusage ;

- leur justification, du fait de leur caractère innovant ou risqué, doit être préalablement vérifiée eu égard notamment à l'état du bénéficiaire et aux alternatives thérapeutiques possibles ;

- ils sont particulièrement coûteux pour l'assurance maladie, ou le recours à une autre prestation se révèle moins coûteux410(*).

À défaut de réponse du service du contrôle médical dans un délai de 15 ou, pour les prestations les plus complexes ou coûteuses, de 21 jours, l'accord est réputé avoir été donné411(*).

La procédure d'accord préalable s'applique, notamment, à certains examens et analyses de laboratoire, à certains appareillages médicaux et aux transports de plus de 150 kilomètres, en série, en avion ou en bateau412(*).

· Certains médicaments sont, par ailleurs, soumis à des règles particulières de prescription.

Il en va ainsi des médicaments soumis à prescription restreinte : médicaments réservés à l'usage hospitalier413(*), médicaments à prescription hospitalière414(*), à prescription initiale hospitalière415(*) ou dont la prescription est réservée à des médecins spécialistes416(*).

Les médicaments d'exception, par ailleurs, ne sont pris en charge qu'après information du service du contrôle médical et s'ils sont prescrits dans le respect d'indications prévues par une fiche d'information thérapeutique417(*).

La prescription de médicaments classés comme stupéfiants ne peut, enfin, s'effectuer que par une ordonnance papier sécurisée, indiquant en toutes lettres la quantité prescrite, les doses ou concentrations de substances418(*).

· La convention médicale, conclue le 4 juin 2024, vise également à renforcer et valoriser la pertinence des prescriptions et la qualité des soins. Elle mobilise, pour ce faire, plusieurs leviers.

La convention fixe, d'abord, 15 programmes d'actions partagés, reposant sur des engagements réciproques de l'assurance maladie et des médecins et assortis d'objectifs permettant de suivre leur mise en oeuvre419(*). Les engagements de l'assurance maladie visent, notamment, à mieux diffuser les référentiels de bonne pratique définis par la HAS et le ministère, à développer un accompagnement dédié et à mieux outiller les médecins, en leur permettant d'analyser leur pratique et de la comparer à celle de leurs confrères420(*).

Les médecins s'engagent, de leur côté, à prescrire aux meilleurs standards de pertinence et par ordonnance numérique, ainsi qu'à recourir à l'ensemble des téléservices de l'assurance maladie421(*).

Exemples de programmes d'actions partagés
engagés par la convention médicale de 2024

1. Programme n° 2 : Lutte contre l'antibiorésistance422(*)

Constatant que, malgré une baisse tendancielle observée depuis 2012, la France restait en 2021 au 5e rang des pays européens en matière de consommation d'antibiotiques, avec une utilisation supérieure de 30 % à la moyenne européenne, le programme n° 2 vise à diminuer la prescription d'antibiotiques de 10 % dès 2025 et de 25 % à l'horizon 2027.

2. Programme n° 4 : Conformité des prescriptions médicales aux indications thérapeutiques remboursables (ITR)423(*)

Mettant en avant des problèmes importants de conformité - un tiers des remboursements actuels de médicament de la classe des antidiabétiques analogues GLP-1 seraient réalisés hors ITR - la convention vise à promouvoir l'utilisation des outils d'accompagnement à la prescription de l'assurance maladie pour les molécules sélectionnées par le ministère :

- nouvelle procédure d'accompagnement à la pertinence des prescriptions ;

- ordonnances de médicaments d'exception, pour une liste de molécules que l'assurance maladie s'engage à actualiser.

3. Programme n° 10 : Diminution des actes d'imagerie redondants ou non pertinents424(*)

Constatant que la dynamique des dépenses d'imagerie s'est accrue de plus de 200 millions d'euros, fin 2023, par rapport au tendanciel de ces dernières années, le programme n° 10 vise à diminuer les actes d'imagerie redondants voire inutiles et à améliorer la pertinence des demandes.

La convention met également en place quatre dispositifs d'intéressement, devant permettre un partage financier des économies permises par l'amélioration de la pertinence et de la sobriété des prescriptions, parmi lesquels figurent :

- un dispositif d'intéressement à la prescription de médicaments biosimilaires, dès l'initiation du traitement ou en remplacement d'un médicament bioréférent425(*) ;

- un dispositif d'intéressement à la dé-prescription des inhibiteurs de la pompe à protons (IPP), dans les situations jugées non pertinentes selon les recommandations de bonnes pratiques de la HAS426(*).

La convention met en place, en outre, un nouveau ratio de sobriété annuel427(*), devant permettre :

- de mieux informer les médecins sur leur pratique de prescription, en comparant le montant correspondant à une moyenne nationale après correction pour tenir compte des caractéristiques de sa patientèle ;

- de rémunérer les médecins ayant les pratiques de prescription les plus sobres.

Enfin, la convention médicale prévoit la création d'un observatoire national de la pertinence et de la qualité, chargé de suivre la réalisation des objectifs partagés. En cas d'écart, les partenaires se sont engagés à proposer ensemble des actions correctives428(*).

· La LFSS pour 2024429(*) a inséré, enfin, dans le code de la sécurité sociale une nouvelle procédure d'accompagnement des professionnels à la pertinence des prescriptions. Celle-ci prévoit que la prise en charge par l'assurance maladie d'un produit de santé et de ses prestations associées peut être subordonnée au renseignement, sur un formulaire, par le prescripteur d'éléments relatifs aux circonstances et aux indications de la prescription lorsque le produit et les prestations présentent :

- un intérêt particulier pour la santé publique ;

- un impact financier pour les dépenses d'assurance maladie ;

- ou un risque de mésusage.

Lorsque le recours à ce formulaire est exigé, celui-ci doit être présenté au pharmacien ou à un autre professionnel de santé en vue de la prise en charge par l'assurance maladie du produit de santé et des prestations concernées430(*).

Un décret du 30 octobre 2024431(*) est venu préciser les modalités de mise en oeuvre de la procédure, en prévoyant notamment :

- que ce document indique si la prescription respecte les indications ouvrant droit au remboursement ou les recommandations de la HAS ;

- que, pour l'établissement de ce document, le prescripteur a, en principe, recours à un téléservice dédié ou, par exception, peut compléter un questionnaire disponible sur le site de l'assurance maladie qu'il doit adresser, par voie postale ou système de communication sécurisé mis en place par l'assurance maladie, au service du contrôle médical placé auprès de l'organisme d'assurance maladie de l'assuré432(*).

Ce nouveau dispositif a vocation, selon l'assurance maladie, à « accompagner les prescripteurs lors de la prescription de certains médicaments présentant un risque de mésusage (hors ITR) en les aidant à s'assurer du respect de l'ITR (...). Cet accompagnement a priori du respect de l'ITR prendra la forme d'un nouveau téléservice simple et rapide directement accessible par le prescripteur permettant des vérifications sur trois ou quatre critères principaux uniquement. 

L'assurance maladie indique que les premiers médicaments concernés par ce dispositif seront les antidiabétiques analogues du GLP-1 puis les benzodiazépines, mais précise que des réflexions sont menées « pour augmenter le panel des produits qui feront l'objet d'un accompagnement à la prescription »433(*).

B. L'article 16 étend et précise la procédure d'accompagnement à la pertinence des prescriptions

L'article 16 vise, d'une part, à étendre la procédure d'accompagnement à la pertinence des prescriptions aux actes et transports de patients prescrits et, d'autre part, à préciser ses modalités d'application.

· Pour ce faire, le 1° du I rétablit l'article L. 162-1-7-1 du code de la santé publique, abrogé.

Cet article prévoirait désormais que la prise en charge par l'assurance maladie d'un produit de santé et de ses prestations associées, d'un acte inscrit au remboursement434(*) ou d'un transport de patient peut être subordonnée, en cas d'impact financier pour l'assurance maladie ou de risque de mésusage, à la présentation par le patient d'un document, établi par le prescripteur, indiquant, à l'exclusion de toute autre donnée médicale, que sa prescription respecte les indications ouvrant droit au remboursement ou les recommandations de la HAS.

Afin d'établir ce document, le prescripteur doit renseigner, dans des conditions prévues par voie réglementaire, des éléments permettant de vérifier si sa prescription s'inscrit ou non dans le cadre de ces indications ou recommandations, transmis au service du contrôle médical.

Lorsqu'il constate l'absence du document, ou lorsque ce document indique qu'une prescription ne s'inscrit pas dans les indications remboursables ou les recommandations, le professionnel appelé à exécuter la prescription doit recueillir l'accord du patient pour délivrer ou réaliser les produits, actes et prestations non pris en charge.

La liste des produits, actes et prestations soumis à cette procédure devrait être fixée par arrêté par les ministres en charge de la santé et de la sécurité sociale. Ces arrêtés précisent la nature des informations à renseigner par le prescripteur pour transmission au service du contrôle médical.

· Le 2° du I abroge, en conséquence, l'article L. 162-19-1 du code de la sécurité sociale portant l'actuelle procédure d'accompagnement à la pertinence des prescriptions.

· Le 3° du I modifie l'article L. 314-1 du code de la sécurité sociale pour ajouter la nouvelle procédure d'accompagnement à la pertinence des prescriptions parmi les conditions auxquelles peut être subordonnée la prise en charge de certaines prestations d'assurance maladie. Les caisses d'assurance maladie sont chargées, avec l'appui des services médicaux et dans le respect du secret professionnel et médical, d'en vérifier le respect.

Les assurés sociaux et les professionnels de santé ayant réalisé les actes ou prestations, ou délivré les produits sont tenus, le cas échéant, de fournir à la caisse ou au service du contrôle médical les éléments nécessaires à ces vérifications. En cas d'anomalie, la caisse ou le service médical apprécient les responsabilités respectives de chacun de ces acteurs.

· Enfin, le II de l'article rend ces dispositions applicables à Mayotte.

· La fiche d'évaluation préalable annexée par le Gouvernement au projet de loi déposé indique que, dans les faits, l'extension de cette procédure devrait concerner principalement les prescriptions de transport et d'examens de biologie. Elle précise que « dans un second temps, cette mesure pourrait être étendue à d'autres actes, comme les examens d'imagerie médicale ».

S'agissant des transports, le Gouvernement indique souhaiter inciter le prescripteur à prioriser les prescriptions de transports destinées aux patients présentant des déficiences ou des incapacités, en réservant les ambulances aux seuls patients le nécessitant. Dans l'hypothèse d'un report de 10 % des transports vers un mode de prise en charge moins onéreux, une économie de 114 millions d'euros pourrait être réalisée à compter de 2027.

En matière de biologie, le Gouvernement indique espérer une économie de 47 millions d'euros par an, en visant en particulier :

- les dosages de vitamine D, dont le mésusage est évalué à 25 millions d'euros ;

- les dosages du taux de thyréostimuline (THS), dont le mésusage est évalué à environ 15 millions d'euros ;

- les examens cytobactériologiques des urines, dont le mésusage est évalué à 36 millions d'euros.

Enfin, le Gouvernement précise souhaiter déployer, dans un premier temps, la mesure auprès des prescripteurs de ville, en l'absence de visibilité sur la date de déploiement du téléservice à l'hôpital435(*).

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

Le Gouvernement a transmis cet article au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

· La commission juge que la pertinence des prescriptions constitue un enjeu sanitaire et financier de premier plan.

À côté des baisses tarifaires et de la limitation du volume des actes de soins, la maîtrise médicalisée des dépenses de santé constitue un levier de régulation financière acceptable par l'ensemble des parties prenantes, censé n'affecter la prise en charge du patient que pour en améliorer la qualité thérapeutique au regard des données acquises de la science.

Malgré les moyens affectés à cette politique, la commission relève que d'importantes marges de progrès semblent demeurer. La Cour des comptes observait encore, en 2023, que « la maîtrise médicalisée des dépenses mise en oeuvre par l'assurance maladie n'est pas parvenue à ce jour à mettre un terme aux actes et prescriptions inutiles et redondant »436(*).

La Cour relevait, notamment, de nombreuses lacunes dans les actions mises en oeuvre : « multiplication des messages sans réelle priorisation ni persistance dans le temps ; données communiquées aux professionnels pour qu'ils situent leur pratique insuffisamment individualisées ; ciblage des prescripteurs à partir d'écarts calculés par rapport à la moyenne et non par rapport à une bonne pratique ; campagnes visant les praticiens de médecine générale et insuffisamment les spécialistes, les praticiens hospitaliers ou les autres professionnels de santé... »437(*).

À cet égard, la commission souligne que d'importants progrès ont été réalisés à l'occasion la conclusion, en 2024, de la nouvelle convention médicale. La mise en place de programmes d'actions partagés, de dispositifs d'intéressement et d'indicateurs permettant aux médecins de situer leur pratique de prescription constituent des avancées réelles, susceptibles de mieux associer les praticiens aux efforts d'amélioration de la pertinence.

· Parce que la maîtrise médicalisée des dépenses requiert la coopération active de l'ensemble des professionnels impliqués dans la chaîne de prescription et de dispensation, la commission a souligné être attentive à la manière dont les nouveaux outils mis en place sont accueillis et pris en main par les praticiens.

À cet égard, elle regrette que les dispositions du présent article aient suscité une assez large incompréhension, exprimée lors des auditions conduites par la rapporteure. Les professionnels ont, en particulier, indiqué craindre que la procédure mise en place se révèle lourde, et réduise encore le temps que chacun d'entre eux est susceptible d'accorder à la prise en charge du patient. Ils ont également exprimé des inquiétudes relatives au champ de la procédure, lequel apparaît peu limité par les dispositions transmises.

Pour tenir compte de ces inquiétudes et afin de favoriser une entrée en vigueur réussie de la procédure, la commission a adopté plusieurs amendements de sa rapporteure visant à recentrer le dispositif.

L'amendement n° 147, d'abord, précise que celui-ci n'aurait vocation à s'appliquer qu'à des produits de santé, actes et transports présentant un coût particulièrement élevé pour l'assurance maladie ou un risque avéré de mésusage. En visant l'ensemble des produits, actes et transports ayant un « impact financier pour l'assurance maladie », les dispositions transmises semblaient pouvoir concerner l'ensemble des prestations remboursables.

L'amendement n° 150, ensuite, précise au niveau législatif qu'un téléservice dédié est mis à la disposition du prescripteur pour le renseignement des éléments destinés à justifier sa prescription. La commission souligne l'importance attachée à la simplicité d'utilisation de ce téléservice, afin de ne pas réduire inutilement le temps médical disponible.

En outre, l'amendement n° 149 supprime les références aux recommandations de la HAS. Si ces dernières contribuent à la mise à disposition des professionnels de santé des données acquises de la science, aux côtés, notamment, des recommandations internationales ou des productions des sociétés savantes, elles demeurent dépourvues de caractère contraignant. En conséquence, faire du respect des recommandations de la HAS un critère nécessaire au remboursement du produit, de l'acte ou du transport prescrit n'a pas paru opportun à la commission. Celle-ci soutient pleinement, en revanche, la nécessité de faire respecter le périmètre des ITR.

· Enfin, la commission a souhaité faire de cette procédure un outil utile pour lutter contre les actes redondants.

Pour ce faire, elle a adopté un amendement n° 148 de la rapporteure, permettant de demander au prescripteur de confirmer qu'il a consulté le dossier médical partagé (DMP) du patient préalablement à sa prescription. Il appartiendra au Gouvernement de désigner par arrêté les produits, actes et prestations soumis à cette obligation.

La commission relève, à cet égard, que la consultation préalable du DMP figure parmi les engagements des médecins, dans le cadre de la dernière convention médicale, visant à réduire les actes d'imagerie redondants438(*).

La commission propose d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.

Article additionnel après l'article 16
Favoriser l'utilisation du DMP

Cet article additionnel vise à favoriser la consultation et l'alimentation du dossier médical partagé (DMP) par les professionnels de santé exerçant en ville comme en établissement de santé. Pour cela, il intègre la consultation et le renseignement du DMP parmi les critères conventionnels de rémunération des professionnels libéraux et parmi les critères de l'incitation financière à la qualité des établissements de santé.

La commission propose d'adopter cet article additionnel ainsi rédigé.

I - Le rôle du dossier médical partagé dans la maîtrise des dépenses de santé

• Malgré leur montant élevé et leur place dans l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam), les dépenses de soins de ville apparaissent insuffisamment régulées.

Les soins de ville constituent le premier objectif de l'Ondam en montant et excèdent, depuis 2021 en exécution439(*) et depuis 2022 en prévision440(*), 100 milliards d'euros par an. Parmi elles, les honoraires des professionnels de santé représentent presque 40 % du total et les produits de santé, plus de 30 %441(*).

Malgré leur importance, les dépenses de soins de ville apparaissent, de manière structurelle, difficilement régulables. La Cour des comptes a, par exemple, souligné que les écarts entre la prévision en LFSS initiale et l'exécution constatée du sous-objectif soins de ville étaient fréquemment supérieurs à ceux constatés pour les établissements de santé442(*). La prépondérance de la rémunération à l'acte des professionnels libéraux, l'absence de régulation prix-volume et la faible responsabilisation des patients sont fréquemment citées parmi les facteurs explicatifs.

Pour contenir le dynamisme spontané des dépenses de soins de ville, les efforts de maîtrise médicalisée des dépenses ont, toutefois, été renforcés ces dernières années. Celle-ci répond à l'obligation, faite aux médecins, d'observer la plus stricte économie, dans leurs actes et prescriptions, compatible avec la qualité, la sécurité et l'efficacité des soins443(*). Autrement dit, la maîtrise médicalisée consiste à limiter les actes et prescriptions non justifiés au regard des données acquises de la science444(*) et, à efficacité égale, à privilégier les solutions les moins onéreuses.

La maîtrise médicalisée a acquis une place importante dans les outils de régulation des dépenses de santé, particulièrement en ville445(*). En 2025, 900 millions d'euros d'économies nouvelles sont attendus des actions de maîtrise médicalisée et de lutte contre la fraude, qui visent également à assurer la pertinence des prescriptions446(*). Ces actions viseront principalement les indemnités journalières, pour 440 millions d'euros, et les professionnels de santé, pour 200 millions d'euros.

Répartition des mesures de maîtrise médicalisée
et de lutte contre la fraude en 2025

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après les documents annexés au PLFSS pour 2025

• En permettant aux professionnels de santé impliqués dans la prise en charge du patient de prendre connaissance des consultations, actes et prescriptions précédemment réalisés, le dossier médical partagé (DMP) constitue un outil important de coordination des soins, d'organisation des parcours et d'amélioration de la pertinence des prescriptions. Celui-ci est susceptible de contribuer, en particulier, à limiter le nombre d'actes inutiles ou redondants.

Depuis la loi « santé » de 2019, le DMP est adossé à l'espace numérique de santé (ENS, ou « Mon espace santé »)447(*), créé automatiquement pour chaque patient en l'absence d'opposition expresse de ce dernier448(*).

Lancé en janvier 2022, ce dispositif a permis une très forte augmentation du nombre de documents téléchargés dans les DMP. La mission d'information de la commission des affaires sociales relative aux données de santé a toutefois souligné, en 2023, que cette croissance devait être relativisée, le niveau d'appropriation de l'outil variant d'un secteur à l'autre et selon la profession considérée. Elle soulignait, en particulier, que le rythme de versement en médecine de ville demeurait encore décevant449(*).

Nombre de documents versés dans le DMP
par habitant en rythme annuel (janvier 2021 - septembre 2024)

Source : Données publiées par l'Agence du numérique en santé

Dans son rapport relatif à l'application des lois de la sécurité sociale de 2024, la Cour des comptes observe également :

- que malgré l'augmentation sensible du nombre de documents chargés annuellement dans les DMP (56 millions en 2022, 148 millions en 2023), ce flux reste nettement inférieur à l'objectif de 250 millions fin 2023, du fait notamment de la réticence de nombreux médecins libéraux à procéder aux vérifications d'identité de patients nécessaires450(*), et au retard pris dans la mise à jour de certains logiciels professionnels ;

- que le nombre de consultations du DMP demeure faible, en établissement de santé comme en ville : en mars 2023, seuls 22 établissements auraient consulté un DMP451(*).

L'utilisation du DMP constitue pourtant une obligation légale pour l'ensemble des professionnels de santé. Quel que soit leur mode et leur lieu d'exercice, ceux-ci sont chargés de reporter dans le DMP les éléments diagnostiques et thérapeutiques nécessaires à la coordination des soins452(*) dont la liste est fixée par un arrêté de 2022453(*). Celle-ci comprend, notamment, les comptes rendus d'examens de biologie médicale ou d'imagerie, la prescription de produits de santé ou d'examens de biologie ou d'imagerie, ainsi que le volet de synthèse médicale réalisé par le médecin traitant au moins une fois par an.

II - La nécessité de renforcer les outils d'incitation à l'utilisation du DMP en ville et en établissement de santé

• Observant que les incitations à utiliser l'outil « apparaissent éclatées et ne concernent qu'inégalement les différentes professions de santé », le rapport de la mission d'information sénatoriale recommandait notamment de renforcer les incitations conventionnelles à l'utilisation du DMP et de les étendre à l'ensemble des professions de santé en demeurant dépourvues454(*).

La Cour des comptes suggère, par ailleurs, dans son rapport précité, de faire de l'utilisation du DMP l'un des critères des dotations d'incitation financière à la qualité (IFAQ) versées aux hôpitaux publics et aux cliniques privées455(*).

• Afin d'améliorer l'efficience des dépenses de santé et la coordination entre professionnels, la commission juge indispensable de renforcer incitations financières à l'utilisation du DMP par les professionnels. C'est pourquoi, à l'initiative de sa rapporteure, elle a adopté un amendement n° 152 portant article additionnel en ce sens.

Le  de ce nouvel article vise à modifier l'article L. 162-14-1 du code de la sécurité sociale relatif aux conventions régissant les rapports entre l'assurance maladie et les professionnels de santé libéraux, pour prévoir que celles-ci fixent les conditions de rémunération des professionnels de santé en fonction de la consultation et du renseignement du DMP. Les partenaires conventionnels pourront s'emparer de ces dispositions pour intégrer ce critère, notamment, aux dispositifs de rémunération forfaitaire portés par les conventions.

Le 2° de l'article ajoute, par ailleurs, le développement du numérique, la consultation et le renseignement des DMP des patients parmi les indicateurs fondant l'IFAQ dont bénéficient les établissements de santé.

La commission propose d'adopter cet article additionnel dans la rédaction de l'amendement n° 152.

Article additionnel après l'article 16
Responsabilisation des patients dans la prise de rendez-vous

Cet article additionnel vise à mettre à la charge des patients n'honorant pas un rendez-vous auprès d'un professionnel de santé, en ville, une somme forfaitaire, au bénéfice de l'assurance maladie. Cette somme peut être partiellement reversée au professionnel de santé en indemnisation, dans les conditions fixées par les conventions professionnelles.

La commission propose d'adopter cet article additionnel ainsi rédigé.

I - Les rendez-vous non honorés : un phénomène fréquent source de gaspillage du temps médical

• Si l'appréciation du phénomène demeure délicate et donne lieu à des estimations variables, la proportion des rendez-vous pris auprès d'un professionnel de santé en ville qui ne seraient pas honorés apparaît toutefois significative.

L'Académie nationale de médecine et le Conseil national de l'ordre des médecins ont ainsi publié, au début de l'année 2023, un communiqué soulignant leur inquiétude face à ce phénomène, qu'ils estiment concerner 6 à 10 % des patients disposant d'un rendez-vous chaque semaine456(*). Près des deux tiers de ces défections concerneraient un premier rendez-vous.

La Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam), sans pouvoir établir de chiffrage précis, recommande toutefois la plus grande prudence sur ces données et évoque un taux d'annulation des rendez-vous qui pourrait s'établir entre 3 et 4 %457(*). Consciente des difficultés induites par les rendez-vous non honorés, elle proposait toutefois, dans son rapport dit « Charges et produits » pour 2024458(*), l'organisation d'une campagne nationale d'information sur le bon usage du système de santé et, notamment, la conduite à tenir en cas d'annulation de rendez-vous. Celle-ci a été lancée le 8 octobre 2023459(*).

Cette estimation est cohérente avec les statistiques publiées annuellement, désormais, par Doctolib. Celles-ci révèlent que le taux de rendez-vous non honorés sans information préalable du praticien - que la plateforme nomme « pas venu, pas prévenu » - s'élevait à 3,3 % pour les médecins en juin 2024, contre 4,1 % en février 2023. Celui-ci varie sensiblement d'une profession ou d'une spécialité à l'autre, et atteint 4,7 % pour les chirurgiens-dentistes460(*).

• Les rendez-vous non honorés peuvent avoir plusieurs conséquences indésirables sur le système de santé.

D'une part, lorsque le patient n'annule pas son rendez-vous suffisamment en avance pour permettre au professionnel d'accueillir un autre patient, les rendez-vous non honorés entraînent une perte de temps de consultation pour le professionnel de santé, particulièrement préjudiciable dans le contexte de tension démographique actuel. L'Académie nationale de médecine et l'ordre des médecins estimaient, ainsi, à près de deux heures le temps perdu chaque semaine par les médecins461(*).

D'autre part, lorsqu'aucune consultation n'a pu être organisée en lieu et place du rendez-vous non honoré, le professionnel de santé est susceptible de subir une perte de rémunération. Les honoraires associés à une consultation ne peuvent, en effet, être réclamés par les professionnels de santé qu'à l'occasion d'actes réellement effectués462(*).

S'il est toujours possible aux professionnels, hors les cas d'urgence ou ceux dans lesquels ils manqueraient ainsi à leurs devoirs d'humanité, de refuser leurs soins pour des raisons professionnelles ou personnelles463(*), et ainsi de refuser un patient n'ayant pas honoré ses précédents rendez-vous, cette protection apparaît faible. Elle ne permet pas d'indemniser le professionnel de santé pour le temps perdu, ni de responsabiliser réellement les patients. Elle se révèle, par ailleurs, inefficace face aux nouveaux patients, pour lesquels le taux de rendez-vous non honorés sans information préalable apparaît sensiblement plus élevé : selon Doctolib, il atteignait 5,4 % en juin 2024464(*).

II - La nécessité de responsabiliser davantage les patients et de permettre l'indemnisation des professionnels

• La commission juge indispensable de responsabiliser davantage les patients dans la prise de rendez-vous. Elle souhaite, de cette manière, contribuer à réduire le nombre de rendez-vous annulés au dernier moment ou auxquels les patients ne se présentent pas, sans raison légitime et sans en informer le praticien, pour augmenter le temps de consultation des professionnels de santé.

Dans le même objectif, elle souhaite que les actions de sensibilisation des patients mises en oeuvre par l'assurance maladie puissent être poursuivies et intensifiées.

• En conséquence et à l'initiative de sa rapporteure, la commission a adopté un amendement n° 151, semblable à ceux qu'elle avait déjà adoptés lors de l'examen de la proposition de loi portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé465(*) et du PLFSS pour 2024466(*). Celui-ci vise à mieux responsabiliser les patients et à permettre l'indemnisation des professionnels de santé.

Le  de ce nouvel article insérerait, au sein du code de la sécurité sociale, un nouvel article prévoyant qu'un décret en Conseil d'État fixe les conditions dans lesquelles, lorsqu'un rendez-vous auprès d'un professionnel de santé de ville n'a pas été honoré par l'assuré, une somme forfaitaire est mise à la charge de ce dernier. Son montant serait fixé par décret et affecté à l'assurance maladie.

La somme pourrait être réglée directement par l'assuré à sa caisse, prélevée sur son compte bancaire avec son autorisation ou récupérée, par l'organisme d'assurance maladie, sur les prestations postérieures de toute nature.

Le  modifie les dispositions du code de la sécurité sociale relatives aux conventions régissant les relations entre les professionnels de santé et l'assurance maladie, pour prévoir que ces dernières peuvent fixer les modalités et conditions d'indemnisation des professionnels au titre des rendez-vous non honorés pour lesquels l'assurance maladie a mis une somme forfaitaire à la charge de l'assuré.

Pour chaque profession concernée467(*), les partenaires conventionnels pourraient ainsi décider qu'une partie de la somme forfaitaire acquittée par l'assuré est reversée en indemnisation au professionnel de santé.

La commission propose d'adopter cet article additionnel dans la rédaction de l'amendement n° 151.

Article additionnel après l'article 16
Sécurisation de la carte Vitale

La commission a adopté, à l'initiative de la rapporteure pour la branche maladie, un amendement portant article additionnel, visant à mieux sécuriser la carte Vitale afin de lutter contre la fraude aux prestations sociales.

Cet amendement portant article additionnel inscrit dans la loi le principe que la carte Vitale, qu'elle soit matérielle ou dématérialisée, présente un caractère sécurisé.

Il vise également à favoriser et à accélérer le déploiement de l'application sécurisée « carte Vitale », en incitant financièrement les professionnels de santé à accepter la carte Vitale dématérialisée et en avançant au 1er juillet 2025 la généralisation du déploiement de cette application à l'échelle nationale.

La commission propose d'adopter cet article additionnel ainsi rédigé.

I - La sécurisation des cartes Vitale est un impératif pour lutter efficacement contre les fraudes aux prestations sociales

A. Le défaut de sécurisation de carte Vitale génère une fraude évitable aux prestations sociales

Alors que la branche Maladie accusera, à en croire les estimations du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale, un déficit prévisionnel de 13,4 milliards d'euros en 2025, il n'est plus temps d'attendre pour agir contre la fraude aux prestations de l'assurance maladie, dont le poids sur les finances sociales n'est plus à démontrer.

Dans son rapport 2023 sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale468(*), la Cour des comptes estime entre 1,1 et 1,3 milliard d'euros le coût de la fraude et des fautes sur un champ ne recouvrant que six catégories d'actes et prestations à la charge de l'assurance maladie (soins infirmiers et de masso-kinésithérapie, actes des médecins généralistes, produits de santé délivrés par les pharmacies d'officine, transport de patients et complémentaire santé solidaire), ne recouvrant que 27 % du total des prestations légales versées par la branche.

L'extrapolation de ces données, certes fragile sur un plan statistique, porterait donc entre 4,1 et 4,8 milliards d'euros l'estimation du montant total de la fraude et des fautes aux prestations d'assurance maladie.

Le détournement des cartes Vitale constitue un mécanisme de fraude répandu.

Les stratagèmes de fraude découlant de l'insuffisante sécurisation de la carte Vitale sont nombreux et divers. Les principaux sont la facturation de soins fictifs en tiers payant par un professionnel de santé, l'utilisation d'une carte Vitale détournée au bénéfice d'une personne ne remplissant pas les conditions nécessaires à une prise en charge par l'assurance maladie ou l'utilisation d'une carte Vitale d'un assuré dont les droits sont fermés.

1. Aucune donnée ne permet d'étayer l'affirmation des pouvoirs publics selon laquelle le nombre de cartes Vitale surnuméraires serait résiduel

Comme le note la Cour des comptes, « l'existence de plusieurs cartes Vitale au nom d'un même assuré peut faciliter ces détournements ». Si le précédent Gouvernement n'a eu de cesse d'affirmer que le nombre de cartes surnuméraires n'excédait pas les 1 000 unités, la preuve n'en a jamais été fournie. La Cour des comptes entendait expertiser ce chiffrage, mais n'a jamais été mise en mesure de le faire, faute de transmission des données nécessaires pour lui permettre d'effectuer une comparaison entre le nombre de cartes Vitale en validité par tranche d'âge et la structure démographique de la population ressortant des recensements de l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee).

Le système d'opposition aux carte Vitale en cas de perte ou de vol, prévu à l'article R. 161-33-3 du code de la sécurité sociale, n'apparaît, quant à lui, aujourd'hui pas suffisamment efficient pour être un vecteur efficace de lutter contre la fraude.

2. Les insuffisances dans la vérification de la validité des cartes Vitales avant versement des prestations

Si, en droit, la fin du bénéfice des droits aux prestations d'assurance maladie entraîne l'impossibilité d'utiliser la carte Vitale469(*), les professionnels de santé470(*) n'opèrent pas systématiquement de vérification que les droits d'un assuré sont ouverts sur le service dédié de l'assurance maladie471(*), ce qui peut entraîner des versements indus.

B. L'expérimentation bienvenue d'une application « carte Vitale » sécurisée, comportant des éléments biométriques

1. Une application « carte Vitale » sécurisée

Afin de lutter contre la fraude et d'accompagner le mouvement de dématérialisation rendu possible par la révolution numérique, la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) et le groupement d'intérêt économique (GIE) Sesam Vitale ont développé une application « carte Vitale », téléchargeable depuis un smartphone ou une tablette.

Cette application s'inscrit dans une logique de sécurisation de la carte Vitale.

Elle contient, comme l'application France Identité, des éléments biométriques. L'assuré doit en effet photographier son visage et sa pièce d'identité472(*) pour permettre l'activation de l'application, conditionnée à la concordance entre les deux images et la correspondance entre le numéro de sécurité sociale déclaré et les données du justificatif d'identité.

En outre, elle repose, comme de nombreuses applications, sur un mécanisme d'authentification à deux facteurs, ce qui est une source de sécurisation du dispositif.

Enfin, l'application « carte Vitale » procède à une synchronisation en temps réel de la situation d'ouverture des droits, ce qui fait obstacle à l'utilisation de l'application par un assuré ne justifiant plus des conditions d'ouverture des droits aux prestations de l'assurance maladie.

2. Une expérimentation au déploiement lent progressif

Démarrés en 2017, les travaux sur l'application « carte Vitale » ont abouti à une expérimentation engagée en 2019 et étendue, en 2023, de deux à six départements.

En 2024, l'expérimentation a été étendue à dix-sept départements supplémentaires, et couvre désormais vingt-trois départements. La généralisation de l'expérimentation est attendue pour fin 2025, selon la Cnam.

La carte Vitale dématérialisée, déjà inscrite dans la loi473(*), viendrait en complément et non en remplacement de la carte Vitale matérielle.

II - Le dispositif proposé : l'inscription dans la loi du caractère sécurisé de la carte Vitale, et l'accélération du déploiement de l'application « carte Vitale » sécurisée

Depuis plusieurs années, le Sénat décrie l'insuffisance de la sécurisation de la carte Vitale et les fraudes associées, qui constituent des dépenses évitables pour l'assurance maladie dans un contexte financier contraint et dégradé.

L'inaction face à l'ampleur de la fraude à la carte Vitale serait d'autant moins audible que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale réclame des efforts conséquents à tous les assurés, et, plus largement, à tous les acteurs du système de santé, afin d'endiguer le déficit de nos finances sociales.

En responsabilité, la commission des affaires sociales du Sénat a donc adopté un amendement visant à renforcer la sécurisation de la carte Vitale et à accélérer le déploiement de l'application « carte Vitale » sécurisée.

Le 1° de l'amendement portant article additionnel inscrit dans la loi le caractère « sécurisé » de la carte Vitale, qu'elle soit sous forme matérielle ou dématérialisée. Si elles sont adoptées, ces dispositions contraindront les pouvoirs publics à tirer les conséquences de la volonté du législateur et à mener des actions devant limiter l'envergure de la fraude à la carte Vitale.

Le 3° de l'amendement prévoit d'accélérer le calendrier de généralisation de l'expérimentation de l'application « carte Vitale » sécurisée : aujourd'hui prévue fin 2025, elle serait avancée au 1er juillet.

Afin d'accompagner le déploiement rapide de l'application sécurisée pour rendre le versement des prestations sociales plus sûr et améliorer le service rendu aux professionnels comme aux assurés, le 2° de l'amendement prévoit enfin des mécanismes conventionnels de rémunération des professionnels de santé qui auraient mis à jour leur logiciel et accepteraient l'utilisation de la carte Vitale dématérialisée.

La commission propose d'adopter cet article additionnel ainsi rédigé.

Article additionnel après l'article 16
Amélioration de la coordination entre assurance maladie obligatoire et complémentaires santé en matière de lutte contre la fraude

La commission a adopté, à l'initiative de la rapporteure pour la branche maladie, un amendement portant article additionnel, visant à mieux coordonner l'action de l'assurance maladie obligatoire et celle des complémentaires santé en matière de lutte contre la fraude.

La commission propose d'adopter cet article additionnel ainsi rédigé.

I - La coopération entre assurance maladie obligatoire et complémentaires santé : un angle mort de la lutte contre la fraude

A. Des défaillances dans la lutte contre la fraude, liées à une organisation en silo entre assurance maladie obligatoire et complémentaires santé

En matière de lutte contre la fraude, l'assurance maladie obligatoire (AMO) et l'assurance maladie complémentaire (AMC) semblent aujourd'hui agir chacune de leur côté, sans réelle coordination. La récente mission d'information sénatoriale sur les complémentaires santé474(*) pointe ainsi du doigt une organisation de la lutte contre la fraude « en silo ».

Alors que la branche Maladie accusera, à en croire les estimations du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale, un déficit prévisionnel de 13,4 milliards d'euros en 2025, il n'est pourtant plus temps d'attendre pour agir contre la fraude aux prestations, compte tenu des enjeux financiers associés et de l'objectif d'intérêt public sous-tendu. Lors de leur audition par la mission d'information précitée, deux organismes complémentaires avaient communiqué les montants de fraude qu'ils avaient détectées sur leur périmètre : 52 millions d'euros pour Malakoff Humanis et 45 millions d'euros pour Harmonie mutuelle. On peut imaginer qu'avec davantage de coordination et de coopération pour détecter les cas de fraude, ce à quoi AMO comme AMC ont intérêt, ces montants pourraient encore s'accroître.

B. Un cadre législatif restrictif, inadapté aux enjeux actuels

Pour expliquer les difficultés d'articulation entre AMO et AMC en matière de lutte contre la fraude, la mission d'information précitée pointe du doigt un « cadre législatif restrictif » et « inadapté aux enjeux actuels du traitement des données de santé ».

Lorsqu'une fraude est suspectée par l'assurance maladie et que celle-ci déclenche les contrôles et enquêtes nécessaires, l'article L. 114-9 du code de la sécurité sociale, qui traite de la question, se borne en effet à poser le principe d'une information des complémentaires santé qui pourraient être affectées par le mécanisme de fraude suspecté, lorsque ces dernières peuvent être identifiées.

Le même article ne prévoit, réciproquement, aucune modalité d'information de l'assurance maladie obligatoire en cas de suspicion d'une fraude chez une complémentaire santé.

Selon France Assureurs, cette « base légale pour un échange d'informations sur la fraude [n'est] ni suffisante ni opérante »475(*). Le directeur général de la Cnam ne voit pour sa part « que des avantages à ce que l'on partage mieux avec les complémentaires santé les éléments dont nous disposons » pour renforcer la lutte contre la fraude476(*).

II - Le dispositif proposé : améliorer la coordination et la coopération entre AMO et AMC en matière de lutte contre la fraude

L'amélioration de la coordination entre AMO et AMC, et notamment l'instauration d'un cadre de transferts de données sécurisé permettant une approche commune de la détection des fraudes pourrait constituer une opportunité pour lutter plus efficacement contre la fraude.

Tel est l'objet de l'amendement portant article additionnel adopté par la commission des affaires sociales.

En son 1°, il remplace l'information des complémentaires santé affectées lorsque l'assurance maladie déclenche une procédure pour fraude par un nouveau mécanisme. Celui-ci prévoit, lorsqu'une plainte pour fraude est déposée au nom ou pour le compte de l'assurance maladie, que celle-ci soit tenue de communiquer au procureur de la République le nom et les coordonnées des complémentaires concernées ainsi que toute information qu'elle détiendrait sur le préjudice causé auxdites complémentaires - ce qui constitue une nouveauté.

En son 2°, l'amendement insère un nouvel article L. 114-9-1 au code de la sécurité sociale, régissant les modalités de partages d'informations entre AMO et AMC en cas de suspicion de fraude préalable à une potentielle action en justice. Il ouvre la possibilité que l'AMO et l'AMC puissent mutuellement se communiquer des données en cas de suspicion de fraude.

Un partage de données de l'AMO serait possible lorsque les investigations menées par l'assurance maladie en cas de suspicion de fraude semblent concluantes, tandis qu'un partage de données de l'AMC serait conditionné à la connaissance, par la complémentaire santé, d'informations ou de faits pouvant être de nature à constituer une fraude477(*).

Les échanges de données ainsi prévus seraient circonscrits dans le respect du droit à la protection des données, et encadrés, dans le détail, par un décret en Conseil d'État pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés.

Seules les informations strictement nécessaires à l'identification de l'auteur ou de la nature des faits de fraude suspectés pourront être communiquées478(*) par l'assurance maladie à la complémentaire santé, et celle-ci ne pourra pas conserver ces données au-delà d'une durée strictement nécessaire afin de préparer, d'exercer et de suivre une action en justice. Une information est également prévue lorsque l'AMO procède à un déconventionnement.

Les mêmes limites s'appliqueraient aux données transférées de l'AMC vers l'AMO, si ce n'est que les informations transmises pourraient être conservées le temps de déclencher ou poursuivre une procédure de contrôle ou d'enquête, de préparer, d'exercer et de suivre une action en justice, ou de prononcer certaines autres sanctions, comme des déconventionnements ou des sanctions administratives.

Les données échangées, qui transiteront par un intermédiaire présentant un haut niveau de sécurité479(*), ne pourront être utilisées qu'à des fins de lutte contre la fraude sous peine de sanctions pénales et devront être supprimées sans délai si la suspicion est levée. Une obligation de secret professionnel s'appliquera pour tous les collaborateurs des complémentaires santé qui auraient à transmettre des données à l'assurance maladie, ou à connaître des données qui en proviennent.

La commission propose d'adopter cet article additionnel ainsi rédigé.

Article 16 bis (nouveau)
Signature des certificats de décès par les infirmiers

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale et retenu par le Gouvernement dans le texte transmis au Sénat, vise à pérenniser l'expérimentation autorisant, pour un an, les infirmiers volontaires à signer des certificats de décès.

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

I - Le dispositif proposé

A. Les certificats de décès sont établis par les médecins et, par expérimentation, par les infirmiers

1. La signature des certificats de décès par les médecins

• La signature d'un certificat de décès est réservée par la loi, en principe, aux médecins ou futurs médecins.

Le code général des collectivités territoriales prévoit, ainsi, que l'autorisation de fermeture d'un cercueil ne peut être délivrée qu'au vu d'un certificat attestant le décès, établi par :

- un médecin en activité ou retraité, quels que soient la spécialité et le secteur conventionnel ;

- un étudiant en cours de troisième cycle des études de médecine en France ;

- un praticien à diplôme étranger hors Union européenne (Padhue) autorisé à poursuivre un parcours de consolidation des compétences en médecine480(*).

Il ne peut être fait appel, pour établir un certificat de décès, à un médecin retraité sans activité qu'en cas d'impossibilité pour un médecin en activité de le faire dans un délai raisonnable481(*).

La possibilité de signer des certificats de décès a été ouverte aux étudiants de troisième cycle et Padhue en PCC par la loi « Santé » de 2019482(*), afin de réduire les délais de signature et de permettre aux familles d'engager sans attendre les opérations consécutives à un décès.

• L'établissement d'un certificat de décès constitue un enjeu administratif, médico-légal, de santé publique et de veille sanitaire. Celui-ci comprend483(*) :

- un volet administratif (commune du décès, date et heure de décès, nom, prénoms, date de naissance du défunt, etc.) ;

- un volet médical relatif aux causes du décès ;

- un volet médical complémentaire, lorsqu'une autopsie médicale a dû être réalisée dans le but d'obtenir un diagnostic sur les causes du décès484(*), ou lorsqu'une autopsie judiciaire a été ordonnée485(*).

Seuls les volets administratif et médical sont établis par le médecin, l'étudiant ou le Padhue qui constate et atteste, sur place, le décès. Le volet médical complémentaire est établi par le médecin qui procède à l'autopsie médicale ou judiciaire486(*).

Le volet médical est transmis à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) ou à l'organisme chargé par lui de gérer le système de collecte des certificats de décès487(*).

• Les certificats de décès réalisés au domicile du patient sont pris en charge par l'assurance maladie, à hauteur d'un tarif forfaitaire que les médecins sont tenus de respecter488(*). Ce tarif forfaitaire est fixé, par arrêté, à 100 euros et rémunère la visite réalisée comme les frais afférents489(*).

Un décret précise que ne sont valorisés et pris en charge que les certificats de décès réalisés :

- la nuit entre 20 heures et 8 heures ;

- les samedis, dimanches, jours fériés, lundis précédant un jour férié et vendredis suivant un jour férié ;

- dans les zones sous-denses déterminées par arrêté du directeur général de l'agence régionale de santé (ARS)490(*).

2. L'expérimentation autorisant les infirmiers à signer les certificats de décès

• Constatant qu'il demeure difficile, dans certains territoires, de faire appel à un médecin, un étudiant ou un Padhue dans un délai raisonnable, et compte tenu de la détresse des familles contraintes d'attendre, la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2023 a autorisé les infirmiers, à titre expérimental et pour un an, à signer les certificats de décès491(*).

Un arrêté devait fixer la liste des territoires participants, dans la limite de six régions.

• Constatant que les actes réglementaires nécessaires à son application n'avaient toujours pas été pris, presque un an après l'adoption de la LFSS pour 2023, la loi visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels de décembre 2023492(*) a étendu l'expérimentation à l'ensemble du territoire national.

Les modalités de cette expérimentation ont, depuis, été précisées par décret493(*). Celui-ci prévoit notamment :

- que les infirmiers volontaires peuvent établir et signer le certificat de décès d'une personne majeure, lorsque celle-ci est décédée à son domicile ou dans un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), à l'exclusion des situations où le caractère violent de la mort est manifeste ;

- que la participation est ouverte aux infirmiers diplômés d'État (IDE), inscrits au tableau de l'ordre et diplômés depuis au moins trois ans ;

- que les infirmiers volontaires bénéficient d'une formation de douze heures au moins, à l'épidémiologie et à l'examen clinique du processus mortel, ainsi qu'aux aspects administratifs et juridiques des certificats de décès ;

- que peuvent faire appel aux infirmiers volontaires les services d'aide médicale urgente (Samu), les services de police ou de gendarmerie, ou le médecin traitant qui ne peut se déplacer au domicile d'un patient décédé.

B. L'article 16 bis vise à pérenniser la faculté donnée aux infirmiers de signer les certificats de décès

L'article 16 bis, issu d'un amendement de Mme Nicole Dubré-Chirat (Ensemble pour la République) adopté par l'Assemblée nationale, vise à pérenniser l'expérimentation permettant aux infirmiers de signer les certificats de décès.

Pour ce faire, il complète l'article L. 2223-42 du code général des collectivités territoriales, afin de prévoir que l'autorisation de fermeture du cercueil peut être délivrée au vu d'un certificat attestant le décès, établi par un infirmier dans des conditions déterminées par un décret pris après avis du Conseil national de l'ordre des infirmiers.

II - La position de la commission

La commission a accueilli très favorablement ces dispositions. Elle juge nécessaire la pérennisation de l'expérimentation lancée en avril 2024, qu'elle avait elle-même proposé d'étendre à l'ensemble du territoire national lors de l'examen de la proposition de loi visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels494(*).

Elle observe, à cet égard, que la pérennisation de l'expérimentation apparaît attendue par les professionnels de santé impliqués. Le Conseil national de l'ordre des infirmiers (CNOI), auditionné, a ainsi affirmé devant la commission : « Les certificats de décès rédigés par les infirmiers sont (...) de bonne qualité et aucune difficulté de mise en oeuvre n'a été relevée. Nous attendons du PLFSS qu'il pérennise cette mesure. À défaut, l'expérimentation s'achèvera en avril 2025 »495(*).

Lors de la même audition, le Conseil national de l'ordre des médecins (CNOM) a souligné que « La mesure répond à un besoin de proximité de la famille à un moment particulier et à une pression de l'état civil pour pouvoir enclencher ce qui est la fin d'un chemin. »496(*)

La rapporteure a souligné que cette pérennisation devrait être accompagnée par les pouvoirs publics. Elle relève que, d'après le CNOI, moins de 50 % des infirmiers volontaires ont pu être, jusque-là, formés.

À son initiative, la commission a adopté un amendement n° 155 réécrivant l'article 16 bis, pour prévoir que les frais relatifs à l'examen nécessaire à l'établissement du certificat de décès sont, par dérogation aux dispositions régissant les conventions professionnelles des infirmiers, pris en charge par l'assurance maladie ou la branche autonomie dans des conditions fixées par arrêté.

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

Article 16 ter (nouveau)
Demande de rapports portant d'une part, sur les travaux du Haut conseil des nomenclatures et, d'autre part, sur l'établissement d'une liste annuelle des mesures prioritaires destinées à améliorer la pertinence des soins

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale et retenu par le Gouvernement dans le texte transmis au Sénat, prévoit la transmission au Parlement de deux rapports portant d'une part, sur les travaux du Haut conseil des nomenclatures et, d'autre part, sur une étude annuelle des mesures prioritaires destinées à améliorer la pertinence des soins.

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

I - Le dispositif proposé

A. L'établissement d'une liste annuelle de mesures prioritaires relatives à l'amélioration de la pertinence des soins

Le présent article issu d'un amendement de Frédéric Valletoux et plusieurs de ses collègues et retenu par le Gouvernement dans le texte transmis au Sénat, vise à demander au ministre chargé de la santé d'établir chaque année et préalablement à l'examen par le Parlement de la loi de financement de la sécurité sociale, une liste de mesures prioritaires destinées à améliorer la pertinence des soins dispensés aux assurés.

La notion de pertinence des soins peut se définir comme la « réalisation d'un soin approprié, strictement nécessaire, adapté aux besoins des patients et conforme aux meilleurs standards cliniques »497(*). La commission des affaires sociales a depuis plusieurs années fait de l'amélioration de la pertinence des soins un enjeu stratégiquement clé pour la pérennité de notre système de santé. Dans son rapport de 2017 sur l'amélioration de la pertinence des soins, M. Jean-Marie Vanlerenberghe, alors rapporteur général, indiquait alors qu'améliorer la pertinence des soins revenait à « protéger le patient des risques potentiels de l'intervention inutile ou excessive du système de santé, mais aussi du sous usage ou du mésusage des soins »498(*).

Des soins non appropriés, sans valeur ajoutée pour la santé sont synonymes de dépenses non pertinentes pour le système de santé. Dans un rapport de janvier 2017, l'OCDE montrait que près d'un cinquième des dépenses de santé « apportent une contribution nulle, ou très limitée, à l'amélioration de l'état de santé de la population »499(*). Le Panorama de la santé 2023 de l'OCDE montre que la France reste, avec la Grèce et l'Espagne, parmi les pays prescrivant le plus d'antibiotiques au sein de l'OCDE500(*) alors même que, selon le rapport, « la surconsommation, la sous-consommation ou le mésusage des antibiotiques et d'autres médicaments sur ordonnance contribuent à la résistance accrue aux antimicrobiens et représentent des dépenses inutiles ».

Dans ce cadre, le présent article prévoit que le Gouvernement remette au Parlement, chaque année avant le 15 septembre, une liste de mesures prioritaires destinées à améliorer la pertinence des soins. Cette liste devra intégrer des objectifs chiffrés et inclure un bilan des mesures entreprises l'année précédente.

B. La demande de rapport au Parlement relatif aux travaux du Haut conseil des nomenclatures

Le Haut conseil des nomenclatures, créé par l'article 38 de la loi de financement de sécurité sociale pour 2020, a pour mission de définir une méthodologie de description et de hiérarchisation des actes et d'étudier les nouveaux actes et les prestations en vue de leur inscription sur la liste des actes et prestations (LAP) définie par l'article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale.

En effet, alors que, du fait notamment de l'évolution rapide des techniques médicales, la classification commune des actes médicaux (CCAM) ne décrivait plus correctement la totalité des actes réalisés par les médecins, le législateur avait souhaité engager une révision complète des plus de 13 000 actes actuellement présents dans la CCAM. Cette nomenclature n'avait pas été revue depuis 2004 et, en l'absence d'une telle révision, les tarifs de la CCAM restent calculés sur des bases anciennes, conduisant à une perte d'efficience du système de soins. Ainsi, des actes obsolètes sont encore inscrits tandis que des actes plus récents et plus fréquents ne sont pas eux-mêmes décrits.

L'article 38 de la LFSS pour 2020 prévoyait alors que l'ensemble des actes et prestations inscrits sur une liste mentionnée à l'article L.162-1-7 du code de la sécurité sociale feraient l'objet d'un examen en vue d'une nouvelle hiérarchisation dans un délai de cinq ans, soit au cours de l'année 2025.

Dans ce cadre, le présent article souhaite que le Gouvernement transmette au Parlement, avant le 15 juillet 2025, un rapport sur les travaux réalisés par le Haut conseil et comportant des pistes d'amélioration de ses travaux.

II - La position de la commission

La commission soutient la nécessité de mener à bien le travail de révision de la nomenclature des actes. Toutefois, au regard du calendrier des travaux du Haut conseil sur la réforme de la classification des actes médicaux qui devraient s'achever à la fin de l'année 2025, il lui parait peu pertinent de solliciter un rapport en juillet 2025, alors que la phase finale des travaux sera certainement engagée. Par ailleurs, conformément à la loi, le Haut conseil publie chaque année un rapport annuel permettant de préciser l'avancée de ses activités.

Dès lors, estimant cette demande de rapport superflue et conformément à sa pratique habituelle relative à de telles demandes, elle a adopté un amendement n° 156, à l'initiative de sa rapporteure, visant à supprimer le II du présent article.

En revanche, au regard du caractère essentiel de l'amélioration de la pertinence des soins et de la nécessité d'inscrire cet objectif dans l'ensemble des réflexions sur le financement de la sécurité sociale, la commission a considéré que la transmission, chaque année par le Gouvernement, d'une liste des mesures prioritaires d'amélioration de la pertinence des soins constituerait un élément important de l'amélioration de l'information du Parlement.

Toutefois, la commission veillera à ce que cette liste établie par le Gouvernement ne vienne pas dupliquer le travail réalisé chaque année par la Caisse nationale d'assurance maladie dans le cadre du rapport sur l'évolution des charges et des produits de l'Assurance Maladie, ainsi que les travaux de la Haute Autorité de santé, mais puisse constituer une véritable feuille de route politique réalisée en bonne coordination avec les différents acteurs.

Sous réserve de ces observations, elle a souhaité conserver cette disposition dans le texte.

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

Article 17
Conventionnement des entreprises de taxis avec l'Assurance maladie

Cet article vise à réformer les relations conventionnelles entre l'Assurance maladie et les taxis en renforçant les prérogatives de la convention nationale, notamment en matière de régulation tarifaire.

La commission propose d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.

I - Le dispositif proposé

A. Face à la croissance des dépenses de transport sanitaire, des modalités de régulation progressivement renforcées

1. Sur prescription médicale, l'assurance maladie prend en charge les frais de transport des assurés obligés de se déplacer pour recevoir des soins

a) Des conditions de prise en charge encadrées

Aux termes de l'article L. 160-8 du code de la sécurité sociale, l'assurance maladie obligatoire prend en charge les « frais de transport des personnes se trouvant dans l'obligation de se déplacer pour recevoir les soins ou subir les examens appropriés à leur état »501(*). Les frais de transport encourus au titre d'une convocation, par exemple du service médical de l'Assurance maladie, sont également remboursables.

Cette prise en charge est conditionnée à une prescription médicale502(*) justifiée par l'état de santé du patient et précisant le mode de transport retenu503(*) et le motif du déplacement. Le cas échéant, elle peut être soumise à l'accord préalable de l'Assurance maladie504(*).

Les différents modes de transports pouvant faire l'objet d'une prise en charge
par l'Assurance maladie obligatoire

L'assurance maladie peut couvrir différents modes de déplacement505(*), faisant intervenir différentes professions.

Les transporteurs sanitaires, conventionnés avec l'assurance maladie506(*), peuvent opérer des ambulances, permettant le transport couché, ou des véhicules sanitaires légers (VSL), permettant le transport assis de trois patients au plus.

Les frais de transport en taxi peuvent également faire l'objet d'une prise en charge lorsque l'entreprise est signataire d'une convention avec la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM), établie sur le modèle d'une convention-type nationale507(*). Il convient de noter que la régulation des taxis revient au ministère chargé des transports, et non au ministère chargé de la sécurité sociale, comme les transporteurs sanitaires.

L'assurance maladie peut également rembourser des frais liés à la prise de transports en commun terrestres, maritimes ou aériens, ainsi qu'à l'utilisation de transports individuels.

La prise en charge des frais de transport s'opère, en principe, sur la base du mode de transport le moins onéreux compte tenu des conditions de transport et de la prescription médicale508(*).

Un transport assis professionnalisé, en taxi ou VSL, peut par exemple être prescrit lorsque le patient présente une déficience rendant nécessaire le respect de règles d'hygiène particulières, une déficience physique rendant nécessaire une aide au déplacement sans portage, ou une déficience intellectuelle rendant nécessaire l'aide d'une tierce personne pour la transmission des informations nécessaires à l'équipe soignante509(*).

b) Un taux de prise en charge limité à 55 % en droit commun, mais en pratique proche de 100 %

L'Assurance maladie prend à sa charge une part des frais de transport des patients dans la limite d'un tarif, appelé base de remboursement.

• La base de remboursement

Pour les véhicules sanitaires légers, la base de remboursement est déterminée, en fonction des caractéristiques du trajet, par la convention nationale conclue avec l'Assurance maladie. Celle-ci fixe un forfait dépendant des caractéristiques géographiques (Île-de-France, zones urbaines, zones rurales et zones montagneuses), dû pour chaque trajet, auquel s'ajoute un tarif kilométrique proportionnel à la distance parcourue et, le cas échéant, une survalorisation pour les trajets courts. Dans certains cas, la prise en charge et des majorations peuvent être facturables. Des préceptes analogues sont applicables aux ambulances.

Pour les taxis conventionnés, les tarifs applicables sont indexés sur les tarifs des courses dont les composantes sont fixées, dans chaque département, par des arrêtés préfectoraux sur la base d'un cadrage national. Ils reposent sur trois paramètres : le forfait de prise en charge, le tarif kilométrique et le tarif horaire ; auquel peuvent s'ajouter des frais d'approche ou des suppléments.

• Le taux de prise en charge

Conformément aux dispositions de l'article R. 160-5 du code de la sécurité sociale, le taux de prise en charge des dépenses de transport sanitaire par l'assurance maladie obligatoire est de 55 %. Sur décision de l'Uncam510(*), ce taux a récemment évolué à la baisse : avant le 1er août 2023, la prise en charge de l'assurance maladie représentait 65 % des frais de transport.

Par dérogation, les patients en ALD présentant des déficiences ou incapacités bénéficient d'une prise en charge à 100 % des bases de remboursement511(*) sur leurs frais de transport si ces derniers sont en lien avec l'ALD512(*).

Cette particularité explique que, dans les faits, la sécurité sociale prenne en charge 93,3 %513(*) des dépenses de transport sanitaires514(*) en 2022 ; soit une part bien supérieure au taux de prise en charge de droit commun. Cela classe la France parmi les pays qui assurent la meilleure prise en charge du transport sanitaire515(*) - la dépense publique est par exemple de 70,7 % en Belgique, de 61,3 % en Autriche ou de 46,5 % en Suisse.

Au titre de l'acquittement de la franchise médicale516(*), dont le montant a récemment doublé517(*), la prise en charge par l'assurance maladie est minorée de quatre euros518(*) par transport sanitaire, dans la limite de huit euros par jour519(*) et cinquante euros par an520(*).

2. La dynamique importante des dépenses de transport sanitaire, portés par l'augmentation de la prévalence des affections de longue durée et un recours accru aux taxis plutôt qu'aux transporteurs sanitaires

a) Les frais de transport : un poste de dépenses particulièrement dynamique pour l'assurance maladie

En 2023, les dépenses de transport sanitaire ont atteint 6,3 milliards d'euros en base de remboursement, un total en hausse de 9 % selon le rapport « Charges et produits » pour 2025, ce qui confirme l'accélération de la montée en charge de ce poste après une croissance annuelle moyenne de 3,7 % sur la période 2016-2022.

Évolution de la dépense remboursable en transport sanitaire de 2016 à 2023

(en millions d'euros)

Source : Commission des affaires sociales du Sénat d'après données du rapport « Charges et produits » 2025

b) La hausse des frais de transport est portée par un effet volume lié à la hausse de la prévalence des ALD

La hausse des dépenses remboursables de transport est d'abord liée à un effet volume. Le nombre d'assurés ayant eu recours, sur l'année, à un transport sanitaire a augmenté de 580 000 entre 2019 et 2023 et atteint désormais 6,45 millions - il s'agit là d'une hausse de 10 % en quatre ans.

Évolution du nombre d'assurés ayant recouru à un transport sanitaire depuis 2016

Source : Commission des affaires sociales du Sénat d'après données du rapport « Charges et produits » 2025

Cette évolution s'explique notamment par le vieillissement de la population et l'accroissement de la prévalence des affections de longue durée, qui lui est corrélé. Les frais de transports des assurés en ALD constituent, en 2022, 90,7 % de l'effort total de la sécurité sociale sur ce champ, l'oncologie et la dialyse représentant, à eux seuls, plus du tiers de la dépense.

L'effet volume se répercute inégalement sur les acteurs : le chiffre d'affaires moyen des entreprises cumulant taxis conventionnés, VSL et ambulances a augmenté de 41 % entre 2017 et 2021, tandis que les entreprises ne disposant que de taxis conventionnés ont vu leur chiffre d'affaires se contracter de 15 % sur la période. Le secteur est marqué par une vague de concentration, avec l'absorption de plus petites entreprises par des entreprises bicéphales disposant d'une vaste flotte de véhicules. La flotte de taxis monocéphale reste principalement composés de petites entreprises voire d'artisans, travaillant sur des plages horaires souvent étendues.

c) La part des taxis au sein de ces dépenses est en constante augmentation, ce qui génère un effet prix

Cet effet volume se double d'un effet prix, qui procède de deux dynamiques.

D'une part, on note une augmentation des dépenses moyennes remboursées par trajet pour l'ensemble des transporteurs, notamment imputables aux revalorisations conventionnelles. La dernière en date est l'avenant 11 à la convention nationale des transporteurs sanitaires, entré en vigueur en mai 2023. La dépense moyenne a ainsi augmenté de 33 euros à 35 euros entre 2018 et 2023 pour les VSL, et de 98 euros à 115 euros pour les ambulances, qui bénéficient également d'un changement globalement favorable de tarification des transports urgents préhospitaliers dans le cadre du service d'aide médicale urgente (Samu). Les taxis suivent la même tendance, avec une dépense moyenne en hausse de huit euros depuis 2018, et qui atteint désormais 61 euros.

Évolution de la dépense moyenne en base de remboursement
par mode de transport

Source : Rapport « Charges et produits » 2025.

Ces revalorisations interviennent dans un contexte inflationniste, marqué par une hausse du prix du carburant et du salaire minimum, si bien que, malgré la hausse de la dépense solvabilisée par l'assurance maladie, les marges du secteur ont tendance à se réduire. Là encore, la situation est marquée par une grande hétérogénéité : les entreprises de taxis conventionnés dégagent un excédent brut d'exploitation en part du chiffre d'affaires allant de 13 % pour celles disposant de plus de trois taxis en flotte à 27 % pour celles n'en disposant que d'un seul, tandis qu'il plafonne entre 5 % et 8 % pour les entreprises bicéphales. Les purs transporteurs sanitaires à faible flotte sont particulièrement en difficulté, avec une rentabilité en nette baisse et limitée, en 2021, à 2 % (10 % en 2017).

D'autre part, la structure des transports remboursés se déforme progressivement avec un déport des VSL vers les taxis, en moyenne plus onéreux. Cela conduit à renforcer la dynamique de renchérissement de la prise en charge des frais de transport par l'Assurance maladie. La part des taxis dans les dépenses remboursées est ainsi passée de 39,1 % en 2016 à 45,8 % en 2023, avec une hausse de 870 000 assurés transportés chaque année sur la période. Sur la même période, on constate que la part des VSL est en retrait de 3,7 points, et que le nombre d'assurés transportés n'a connu qu'une augmentation contenue (+ 150 000).

Répartition des dépenses remboursées par mode de transport

Source : Rapport « Charges et produits » 2025

3. Les outils de régulation mis en place visent à privilégier les modes de transports les moins onéreux

Face au dynamisme des dépenses de transport sanitaire, les pouvoirs publics et l'Assurance maladie ont mis en place plusieurs dispositifs de régulation destinés à privilégier les modes de transport les moins onéreux maîtriser la croissance constatée des volumes prescrits.

a) Le développement recherché du transport partagé

• Permettant d'améliorer la réponse aux besoins de transport, de réduire l'empreinte écologique du secteur et de réduire le coût des trajets, le transport partagé constitue l'un des axes de maîtrise des dépenses privilégiés par l'Assurance maladie.

Majoritaire dans certains pays d'Europe, la part du transport partagé parmi les véhicules sanitaires légers augmente depuis trois ans en France mais demeure inférieure à 20 %. L'Assurance maladie indiquer viser un taux de transport partagé de 30 % à la fin de l'année 2024, de 45 % à la fin de l'année 2025 et de plus de 50 % à la fin de l'année 2026521(*).

Taux annuels de transport partagé parmi les véhicules sanitaires légers

En % des trajets facturés

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après des données Cnam (2024)

Afin d'atteindre ces objectifs, des actions sont entreprises afin d'inciter transporteurs, prescripteurs et patients à recourir davantage à ce mode de transport.

• La LFSS pour 2024522(*), d'abord, vise à inciter financièrement les patients à accepter le transport partagé.

Pour ce faire, la loi prévoit désormais que, lorsqu'un patient refuse un transport partagé en VSL ou taxi conventionné, alors que son état de santé est jugé compatible avec une telle solution par le prescripteur, la prise en charge de ses frais de transport sera réduite par l'application d'un coefficient de minoration523(*) et il ne pourra bénéficier d'une dispense d'avance de frais524(*).

Le décret nécessaire pour l'application de ces dispositions n'a, toutefois, toujours pas été publié.

• La convention médicale de 2024 fait, ensuite, du développement du transport partagé l'un des programmes d'actions partagés définis, en matière de pertinence et de qualité des soins, par les partenaires conventionnels525(*).

Constatant que le tiers des dépenses de transport sont issues de prescriptions réalisées par des professionnels libéraux et que, parmi celles-ci, 58 % sont réalisées par des médecins généralistes, les médecins se sont notamment engagés :

- à respecter la règle de la prescription du transport le moins onéreux compatible avec l'état de santé du patient ;

- à encourager le transport partagé, sauf exception liée à l'état de santé du patient.

L'Assurance maladie, de son côté, s'est engagée à mettre en oeuvre des actions renforcées d'information et d'accompagnement et à mener une campagne de présentation des nouvelles règles relatives aux transports partagés à destination de l'ensemble des publics concernés - prescripteurs, transporteurs, assurés526(*).

• Enfin, l'Assurance maladie a également mis en place plusieurs outils conventionnels destinés à inciter les transporteurs à proposer du transport partagé.

L'avenant n° 10 à la convention nationale des transporteurs sanitaires privés a, ainsi, mis en place un dispositif d'intéressement des transporteurs aux économies obtenues par le recours au transport partagé527(*) et, à l'inverse, une pénalité applicable aux entreprises réalisant moins de 5 % de transport partagé528(*).

L'avenant n° 11, conclu en 2022, a par ailleurs conditionné la revalorisation tarifaire qu'il porte à la réalisation de gains d'efficience par le développement des transports partagés529(*).

L'Assurance maladie indique envisager, enfin, de faire du transport partagé « l'un des axes majeurs des discussions » conventionnelles à venir avec les taxis530(*).

b) L'amélioration de la pertinence des transports et la lutte contre la fraude

Au-delà du développement du transport partagé, diverses mesures de régulation ont été mises en place par l'Assurance maladie afin d'améliorer la pertinence des prescriptions de transports, d'inciter à l'utilisation du véhicule personnel ou des transports en commun et de lutter contre la fraude.

• Les outils de régulation visent, d'abord, à améliorer la pertinence des prescriptions de transport, en ville comme à l'hôpital, en assurant l'effectivité du principe selon lequel ces frais sont pris en charge sur la base du trajet le moins onéreux531(*).

À l'hôpital, l'Assurance maladie vise, notamment, à accompagner le déploiement de plateformes de commande de transports permettant de vérifier la conformité des prescriptions à l'état de santé du patient. D'après elle, « À terme, tous les établissements qui prescrivent un grand nombre de transports, notamment les centres hospitaliers universitaires (CHU), devront mettre en place ce type de plateformes. » Dans certains établissements, elle envisage également d'expérimenter le recours à des salariés de l'Assurance maladie, en lien avec les services centralisés de commande de transports, chargés de rappeler la réglementation et d'accompagner les prescriptions532(*).

En ville, la convention médicale de 2024 prévoit notamment le déploiement d'outils de data visualisation permettant au médecin de suivre son activité de prescription de transports et de la comparer à celle de ses confrères533(*). Les médecins se sont également engagés à orienter les patients pouvant se déplacer sans assistance vers l'utilisation d'un véhicule personnel ou des transports en commun.

• L'assurance maladie a, par ailleurs, mis en oeuvre diverses mesures destinées à inciter les patients à l'utilisation du véhicule personnel et des transports collectifs, lorsque leur état de santé le permet.

La plateforme numérique « Mes remboursements simplifiés » permet, ainsi, aux assurés de déclarer en ligne leur demande de remboursement liée à une prescription médicale de transport et d'y joindre des pièces justificatives.

• Enfin, plusieurs outils ont été mis en place afin de lutter contre la fraude en matière de prescription et d'effection de transports sanitaires.

L'assurance maladie a déployé des outils de géolocalisation permettant de vérifier la conformité de la facturation et la réalité des courses effectuées. L'avenant n° 11 à la convention nationale des transporteurs sanitaires privés prévoit, à cet égard, la mise en place d'une tarification majorée qui bénéficie aux transporteurs équipés de véhicules disposant d'un système de géolocalisation certifié par l'assurance maladie534(*).

L'assurance maladie prévoit également la généralisation du service électronique de facturation intégré (SEFI), permettant une facturation intégrée au logiciel métier du transporteur, à l'ensemble des taxis conventionnés535(*).

c) Les limites de la régulation conventionnelle actuelle des taxis

Malgré l'augmentation rapide des dépenses de transport sanitaire en taxi, portée par la place croissante du taxi dans les modes de transport utilisés, la régulation conventionnelle demeure, dans ce secteur, aujourd'hui fortement limitée.

• En matière de répartition territoriale de l'offre, la loi permet seulement :

- de subordonner le conventionnement à une durée d'existence préalable de l'autorisation de stationnement ;

- à l'organisme local d'assurance maladie de refuser les demandes de conventionnement des entreprises de taxis lorsque le nombre de véhicules faisant l'objet d'une convention dans le territoire excède un nombre fixé par le directeur général de l'ARS pour le territoire concerné sur le fondement de critères tenant compte des caractéristiques démographiques, géographiques et d'équipement sanitaire du territoire ainsi que du nombre de véhicules affectés au transport de patients536(*).

• En matière de régulation tarifaire, les conventions conclues entre les entreprises et les organismes locaux d'assurance maladie se bornent à fixer les tarifs de responsabilité, lesquels sont indexés sur les tarifs des courses fixés par arrêtés préfectoraux sur la base d'un cadrage national.

La dernière convention-type, portée par une décision de décembre 2023 du directeur général de l'Uncam537(*), prévoit ainsi :

- la prise en compte partielle, pour 2024, de la revalorisation des tarifs préfectoraux, après abattement de 30 % ;

- une augmentation des taux de remise, en fonction de la croissance observée des montants remboursés de transports de taxi entre l'année 2022 et 2023 : si le taux de croissance est compris entre 3,5 et 7 %, par exemple, l'augmentation des taux de remise doit compenser à hauteur de 50 % l'augmentation des tarifs préfectoraux538(*).

• D'après la fiche d'évaluation préalable annexée par le Gouvernement au projet de loi déposé, met en avant plusieurs difficultés associées à l'encadrement actuel du conventionnement :

- les conditions pouvant être définies au conventionnement des taxis ne permettent pas de poursuivre « un double objectif de pertinence et d'adéquation des ressources aux besoins des territoires » ;

- les conventions-types ne permettraient pas une régulation économique efficace du secteur ;

- des facturations au patient, de gré à gré, sont observées dans certains territoires et conduiraient à majorer le reste à charge du patient, sans possibilité d'action pour l'assurance maladie539(*).

B. L'article 17 vise à refondre le cadre conventionnel applicable aux entreprises de taxis

Afin de mieux maîtriser la croissance des dépenses associées et d'améliorer leur efficience, l'article 17 du PLFSS propose de refondre les dispositions du code de la sécurité sociale encadrant les relations conventionnelles entre l'Assurance maladie et les entreprises de taxis.

• Pour ce faire, le I de l'article remplace, à l'article L. 322-5 du code de la sécurité sociale, les dispositions régissant le conventionnement des taxis par de nouvelles dispositions.

Celles-ci prévoient que les frais de transport en taxi ne peuvent donner lieu à remboursement que si l'entreprise a préalablement conclu une convention avec un organisme local d'assurance maladie, pour une durée au plus égale à cinq ans, conforme à une convention-cadre nationale.

Serait annexée à cette convention-cadre une convention type déterminant :

- les conditions de réalisation des transports ;

- les conditions dans lesquelles l'assuré peut être dispensé de l'avance de frais ;

- les conditions, relatives aux besoins territoriaux de transport des patients, subordonnant l'accès et le maintien du conventionnement des entreprises de taxis, qui peuvent être adaptées au niveau local ;

- les montants forfaitaires facturables par trajets et les tarifs kilométriques facturables, qui peuvent être différents selon les départements, ainsi que les suppléments facturables, notamment pour le transport de personnes à mobilité réduire (PMR) et, le cas échéant, les conditions de facturation de suppléments locaux ;

- les règles de facturation et de tarification des transports partagés ;

- le cas échéant, des dispositifs d'aide à l'équipement des taxis conventionnés ;

- les conditions d'évolution des montants forfaitaires, des tarifs kilométriques, des suppléments et des tarifs des transports partagés sur la période de validité de la convention.

Au niveau départemental, la convention conclue entre les entreprises de taxis et l'organisme local d'assurance maladie préciserait les conditions au conventionnement et les dispositions tarifaires applicables dans le territoire concerné. L'entreprise de taxi conventionnée ne pourrait facturer, pour un transport de patient, que les frais définis dans la convention locale, sous peine d'une amende ne pouvant excéder, pour une personne morale, 15 000 euros540(*).

La convention-cadre nationale serait établie par le directeur général de l'Uncam, après avis des organisations professionnelles nationales les plus représentatives du secteur, est approuvée par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale. Elle est réputée approuvée si les ministres n'ont pas fait connaître leur opposition au directeur général, dans un délai de 21 jours à compter de la réception du texte.

• Le II supprime le quatrième alinéa de l'article L. 322-5 du code de la sécurité sociale, qui permettait aux organismes locaux d'assurance maladie de refuser des demandes de conventionnement lorsque le nombre de véhicules conventionnés dans le territoire excédait un nombre fixé par le directeur général de l'ARS.

La nouvelle architecture conventionnelle permettant de définir des conditions au conventionnement, relatives aux besoins territoriaux constatés, ces dispositions deviendraient inutiles.

• Le III prévoit que les conventions conclues par l'organisme local d'assurance maladie antérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi demeureront en vigueur pendant un délai de deux mois à compter de la publication de la convention-cadre nationale.

II - Le dispositif transmis au Sénat

Le Gouvernement a transmis au Sénat cet article modifié par un amendement rédactionnel du rapporteur général, adopté par l'Assemblée nationale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

Le Gouvernement a transmis au Sénat cet article ainsi modifié.

III - La position de la commission

• La commission a favorablement accueilli ces dispositions, destinées à améliorer la régulation de l'offre territoriale de transport sanitaire en taxi et les outils de maîtrise des dépenses à la disposition de l'assurance maladie.

Elle relève, à cet égard, que les dépenses de transport sanitaire ont fortement augmenté depuis 2016, et que ce mouvement semble s'accélérer ces dernières années. Le taux de croissance de 9 % constaté en 2023, apparaît, à cet égard, inquiétant.

Compte tenu du contexte financier de la branche, la commission soutient les efforts déployés par l'assurance maladie pour maîtriser la croissance des dépenses de transport sanitaire et inciter les professionnels de santé à respecter les conditions légales et réglementaires de prescription. Elle invite les partenaires conventionnels à suivre avec attention l'application des engagements partagés portés, en la matière, par la convention médicale de 2024.

La commission a jugé que les dispositions du présent article, en permettant à l'assurance maladie de mieux réguler la répartition territoriale de l'offre et les tarifs remboursables par l'assurance maladie au titre du transport en taxi, favorisaient utilement la poursuite de tels efforts.

Elle alerte néanmoins sur les mesures visant à renforcer les conditions d'accès au conventionnement pour les taxis. Si celles-ci peuvent être utiles localement, dans des départements particulièrement bien dotés, il ne faut pas oublier que les taxis jouent un rôle déterminant dans l'accès territorial aux soins, notamment dans les territoires ruraux.

• La commission a souligné que l'efficacité de cette politique de régulation dépendrait, en partie, de la capacité de l'assurance maladie à y associer, dans les territoires, les entreprises de taxis.

En conséquence, à l'initiative de sa rapporteure, elle a adopté un amendement n° 161 permettant à la convention-cadre nationale de définir des dispositifs d'intéressement, destinés à valoriser la participation des entreprises de taxis aux efforts de maîtrise des dépenses et de lutte contre la fraude. Elle souhaite par là permettre à l'assurance maladie de rémunérer, notamment, le développement de l'offre de transports partagés et la mise en place d'outils de géolocalisation, permettant de contrôler la réalité des courses effectuées par les taxis conventionnés.

La commission juge que les dispositifs d'intéressement et de modulation tarifaire prévus dans le cadre de la convention nationale des transporteurs sanitaires constituent des exemples intéressants, dont l'assurance maladie pourrait s'inspirer.

Dans la même logique, la commission a adopté un amendement n° 160 de sa rapporteure, visant à prévoir que des aides à l'équipement puissent être versées aux entreprises de taxis en vue de l'acquisition d'outils de géolocalisation. Ceux-ci, déjà déployés sur plus de la moitié des véhicules sanitaires légers et ambulances, concourent, en effet, à l'efficience du transport sanitaire et à la lutte contre la fraude. 

• Enfin, à l'initiative de sa rapporteure, la commission a adopté un amendement n° 157 insérant les dispositions relatives au conventionnement des taxis dans un nouvel article L. 322-5-2-1 du code de la sécurité sociale, distinct de celui portant les dispositions générales applicables à la prise en charge des transports sanitaires.

La commission a également adopté deux amendements rédactionnels, n° 158 et 159.

La commission propose d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.

Article 17 bis (nouveau)
Renforcer l'accès aux soins gynécologiques des femmes
en situation de handicap

Cet article, inséré à l'Assemblée nationale par un amendement du Gouvernement, vise à faciliter l'accès aux soins gynécologiques des femmes en situation de handicap et à promouvoir un accompagnement à la vie affective et sexuelle.

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

I - Le dispositif proposé

A. L'expérimentation « Handigynéco » : une réponse aux difficultés d'accès aux soins gynécologiques des personnes en situation de handicap

1. Des difficultés d'accès aux soins gynécologiques et à la prévention en santé sexuelle

• Selon les données d'une enquête réalisée en 2016-2017, un tiers seulement des femmes en situation de handicap résidant dans un établissement social ou médico-social bénéficiait d'un suivi gynécologique régulier. Selon cette même enquête, plus d'un quart d'entre elles n'avait jamais eu de frottis cervico-utérin et près de neuf sur dix n'avaient jamais réalisé de mammographie541(*).

Les difficultés d'accès aux soins des personnes en situation de handicap, et notamment d'accès aux soins gynécologiques, sont multifactorielles. Elles s'expliquent notamment par le manque d'accessibilité des locaux et l'absence de matériel adapté, le défaut de formation des professionnels aux spécificités des différents handicaps et la faible mobilité des personnes handicapées. En outre, lorsqu'elles éprouvent des difficultés de communication et d'expression, les personnes en situation de handicap peuvent nécessiter une durée de consultation plus longue pour répondre à leurs besoins, y compris en termes de compréhension des enjeux de la consultation.

• Face à ces constats, la feuille de route en santé sexuelle pour 2021-2024 qui décline la Stratégie nationale de santé sexuelle, a défini une action 18 consistant à « tenir compte des besoins particuliers liés aux situations de vie des personnes en situation de handicap ». L'expérimentation « Handigynéco » constitue une traduction concrète de cette action.

2. L'expérimentation du programme « Handigynéco » vise à répondre à ces difficultés

• Initialement déployée en Île-de-France, l'expérimentation du programme « Handigynéco » a ensuite été développée en Bretagne et en Normandie en 2022, avant d'être généralisée au niveau national en 2023. Pour appuyer la mise en oeuvre de l'expérimentation, des crédits ont été délégués à hauteur de 3,268 millions d'euros au sein du fonds d'intervention régional (FIR).

La démarche « Handigynéco » consiste à faire intervenir des sages-femmes ou des médecins préalablement formés aux spécificités du handicap dans des établissements accueillant des personnes en situation de handicap. Elle vise à favoriser l'accès à la prévention et aux soins courants de gynécologie des femmes accueillies en FAM et MAS, ainsi qu'à sensibiliser l'ensemble des usagers et les professionnels de ces établissements à la vie affective et sexuelle.

Étapes du déploiement de la démarche « Handigynéco »

Source : ARS Île-de-France, Vyv3 Île-de-France

Dans ce cadre et pour accompagner les ARS dans la conduite de leurs actions, la direction générale de la santé a diffusé une note datée du 16 février 2024 relative à l'organisation d'une offre en santé sexuelle permettant l'accès à une prise en charge gynécologique et à une information /sensibilisation à la vie affective et sexuelle, adaptées aux personnes en situation de handicap accueillies en foyer d'accueil médicalisé (FAM) et en maison d'accueil spécialisée (MAS). Cette note rappelle que les publics visés par le dispositif « Handigynéco » doivent bénéficier :

- d'un suivi gynécologique régulier, qui recouvre une information sur la sexualité, la contraception et l'hygiène, les examens gynécologiques de dépistage des infections sexuellement transmissibles et des cancers du col de l'utérus et du sein), ainsi que d'éventuels examens complémentaires ;

- d'une sensibilisation à la santé sexuelle, c'est-à-dire à la vie affective et sexuelle, incluant les enjeux relatifs aux violences sexistes et sexuelles.

• À l'occasion de la conférence nationale du handicap du printemps 2023, la nécessité de renforcer la prévention en santé et de rendre plus accessible l'offre en santé sexuelle a été réaffirmée. Précisément, le projet de généraliser le dispositif d'accès aux soins gynécologiques « Handigynéco » a été inscrit dans les objectifs de la conférence nationale542(*).

En 2023, en Île-de-France et en Normandie, ce sont respectivement 36 sages-femmes qui ont été formées en Île-de-France et 29 en Normandie ; 100 FAM et MAS ont participé à l'expérimentation en Île-de-France pour 520 femmes suivies, et 66 structures en Normandie pour 412 femmes suivies. En revanche, il n'existe pas à ce jour d'évaluation nationale du dispositif.

B. La création d'un dispositif pérenne d'accès aux soins gynécologiques pour les personnes en situation de handicap accueillies en établissement médicosocial

Le présent article modifie le code de la santé publique (I) et le code de la sécurité sociale (II) pour créer un dispositif d'accès aux soins gynécologiques des femmes en situation de handicap pris en charge dans les conditions de droit commun par l'assurance maladie.

1. Des consultations longues de gynécologie médicale et des séances d'éducation à la vie sexuelle et affective pour les usagers accueillis en établissement médicosocial

Au sein du code de la santé publique, le I du présent article modifie le chapitre Ier « Politique de santé » du titre Ier du livre IV de la première partie « Protection générale de la santé ».

• En premier lieu, il insère un nouvel article L. 1411-6-4 après l'article L. 1411-6-2 consacré aux rendez-vous de prévention543(*). Ce nouvel article crée :

- des consultations longues de gynécologie médicale au bénéfice des femmes en situation de handicap accueillies ou résidant dans un établissement médicosocial ;

- des séances d'éducation à la vie sexuelle et affective et de sensibilisation aux violences sexuelles et sexistes pour l'ensemble des personnes accueillies ou résidant dans ces mêmes établissements.

Les établissements visés sont ceux mentionnés aux 2°, 7° et 12° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, c'est-à-dire les établissements qui assurent une éducation adaptée et un accompagnement social ou médico-social aux mineurs ou jeunes adultes handicapés (2°), ceux qui accueillent des personnes handicapées, qui apportent une assistance à domicile ou assurent un accompagnement médico-social en milieu ouvert (7°), et les établissements ou services à caractère expérimental (12°). Ces établissements incluent principalement les FAM et les MAS.

• En second lieu, l'article L. 1411-7 du code de la santé publique est modifié pour tirer les conséquences de l'insertion du nouvel article L. 1411-6-4. La référence à ce nouvel article est ainsi directement mentionnée aux 1° et 6° de l'article L. 1411-7 afin que l'objet, le nombre et la périodicité des consultations de gynécologie et des séances d'éducation et de sensibilisation soient définis par un arrêté du ministre chargé de la santé.

2. Une prise en charge par l'assurance maladie dans les conditions de droit commun

• Les modifications apportées au code de la sécurité sociale visent à assurer une prise en charge des consultations longues de gynécologie médicale dans les conditions de droit commun.

À cette fin, un 5° bis est inséré à l'article L. 160-8 du code de la sécurité sociale qui liste les frais couverts par l'assurance maladie, pour y inscrire la couverture des frais relatifs « aux actes et aux traitements à visée préventive » réalisés au titre de l'article L. 1411-6-4 précité.

La référence à ce nouveau 5° bis est insérée au premier alinéa du I de l'article L. 160-13 du même code, afin de prévoir la participation des assurées à la prise en charge des prestations mentionnées à l'article L. 1411-6-4, soit des consultations longues de gynécologie médicale, dans des conditions de droit commun. En conséquence, celles-ci seront prises en charge à hauteur de 70 % par l'assurance maladie obligatoire, moins la participation forfaitaire de deux euros pour les assurés majeurs, et de 30 % par les complémentaires santé.

• Enfin, à l'instar des rendez-vous de prévention, il est créé un article ad hoc, en l'espèce l'article L. 162-38-3, pour prévoir que le tarif des consultations longues de suivi gynécologique et en santé sexuelle créées par l'article L. 1411-6-4 du code de la santé publique sera défini par un arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et de la santé. Ce faisant, cet article déroge à diverses dispositions du code de la sécurité sociale régissant les relations des professionnels de santé avec l'assurance maladie :

- l'article L. 162-1-7, qui fixe le principe du remboursement ou de la prise en charge par l'assurance maladie des actes et prestations inscrits sur la liste des actes et prestations (LAP) et qui détermine la procédure d'inscription sur cette liste ;

- l'article L. 162-5, qui porte sur les conventions nationales régissant les rapports entre les organismes d'assurance maladie et les médecins et en déterminent le contenu ;

- l'article L. 162-9, qui porte sur les conventions nationales régissant les rapports entre les organismes d'assurance maladie et, notamment, les sages-femmes, et en déterminent le contenu ;

- l'article L. 162-14-1, qui mentionne les diverses conventions nationales régissant les relations de l'assurance maladie avec les professions de santé ainsi que les accords conventionnels interprofessionnels intéressant plusieurs professions de santé.

Évaluation du coût du dispositif « Handigynéco »

Le coût de la mesure pour l'assurance maladie obligatoire est évalué à 2,8 millions d'euros par an, pour la prise en charge à 70 % d'une consultation longue de suivi gynécologique fixée à 52 euros.

Cette évaluation se fonde sur l'hypothèse d'un taux de recours à 60 %, qui est celui observé en région Île-de-France au cours du déploiement de l'expérimentation.

En revanche, le Gouvernement ne précise pas le coût associé à la réalisation des séances collectives et des ateliers d'éducation à la vie affective et sexuelle.

II - La position de la commission

• La commission soutient l'économie générale de cette mesure, qui contribue à mettre en oeuvre la feuille de route en santé sexuelle et favorise le droit à la santé pour les personnes en situation de handicap.

Le recours à un arrêté ministériel pour déroger au champ de la négociation conventionnelle apparaît justifié par la complexité que peut représenter l'organisation de négociations interprofessionnelles - médecins et sages-femmes - pour une mesure très ciblée.

• La commission souhaite néanmoins insister sur plusieurs points :

la mise en oeuvre des consultations longues de suivi gynécologique doit s'inscrire dans le cadre d'un parcours gynécologique global, en articulation avec les professionnels de santé exerçant en ville, les cabinets d'imagerie médicale, les laboratoires de biologie médicale et, le cas échéant, les établissements de santé ;

les professionnels de santé appelés à intervenir dans les établissements sociaux et médicosociaux visés doivent être formés aux spécificités du handicap, et les professionnels exerçant au sein des FAM et des MAS doivent également être formés à accompagner les personnes accueillies dans le cadre d'une éducation à la vie affective et sexuelle.

• Par ailleurs, la commission souligne l'ambiguïté du texte qui lui est soumis, qui fait référence à la prise en charge des seuls actes et traitements « à visée préventive » réalisés au titre de cette nouvelle mesure. Dès lors que les consultations longues de gynécologie médicale constituent des actes de soins courants et ont vocation à être pris en charge dans les conditions de droit commun, cette précision semble superflue.

La commission propose d'adopter le présent article modifié par un amendement de consolidation rédactionnelle n° 162.

Article 17 ter (nouveau)
Annualisation des examens de prévention bucco-dentaire
pour les jeunes de 3 à 24 ans

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale et retenu par le Gouvernement dans le texte transmis au Sénat, vise à réviser la périodicité des examens de prévention bucco-dentaire pour les jeunes de 3 à 24 ans, afin de passer d'un examen tous les trois ans à un examen par an, conformément aux stipulations de la convention nationale des chirurgiens-dentistes.

Corrélativement, comme le prévoit ladite convention, il revoit le modèle de prise en charge de ces examens afin d'associer les complémentaires santé au financement tout en maintenant le principe d'une dispense intégrale d'avance de frais.

La commission propose d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.

I - Le dispositif proposé

A. Le dispositif M'T Dents prévoit un examen de prévention bucco-dentaire tous les trois ans pour les jeunes de 3 à 24 ans, intégralement pris en charge par l'Assurance maladie

1. Le dispositif M'T Dents, le programme de prévention bucco-dentaire à l'attention des enfants et des jeunes adultes

Le dispositif M'T Dents, introduit en LFSS pour 2005544(*) et déployé à compter de 2007, consiste en une série d'examens de prévention bucco-dentaire intégralement pris en charge par la sécurité sociale, à l'attention de l'enfant et du jeune adulte. Les examens bucco-dentaires de prévention, réalisés par un chirurgien-dentiste ou un médecin qualifié en stomatologie en ville ou en établissement, sont proposés tous les trois ans.

Le dispositif M'T Dents poursuit plusieurs objectifs, à la frontière entre le préventif et le curatif. Lors de l'examen de prévention, le praticien est ainsi chargé de vérifier la santé des dents et des gencives du patient, et d'agir en faveur de l'éducation thérapeutique du patient545(*), notamment en prodiguant des conseils d'hygiène bucco-dentaire individualisés pour chaque âge. En tant que de besoin, le dentiste peut, en outre, lors de cet examen, réaliser un acte de soins, ou proposer un ou plusieurs rendez-vous complémentaires si plusieurs actes sont nécessaires.

L'examen bucco-dentaire peut, le cas échéant, être complété par des radiographies ou par un programme de soins546(*).

Le dispositif, initialement cantonné à des examens dans l'année suivant les six ans, neuf ans et douze ans de l'enfant, a connu un élargissement de son champ en LFSS pour 2019547(*) et propose désormais un examen de prévention dans l'année suivant le troisième anniversaire de l'enfant, puis tous les trois ans jusqu'à l'année suivant le vingt-quatrième anniversaire de l'assuré.

Les examens de prévention bucco-dentaire présentent, aux termes de l'article L. 2132-2-1 du code de la santé publique, un caractère obligatoire pour les mineurs : charge est alors laissée au praticien d'attester de la réalisation de ces examens sur le carnet de santé de l'enfant. Les examens prévus pour les majeurs sont, quant à eux, facultatifs.

2. Le régime de prise en charge dérogatoire, fondé sur la gratuité, vise à assurer une participation aussi large que possible des assurés, mais n'empêche pas un taux de non-recours proche de 50 %

a) Un régime de prise en charge intégrale avec dispense d'avance de frais

Afin d'assurer une participation aussi large que possible au dispositif, le législateur a fait le choix d'exonérer les examens bucco-dentaires de prévention de ticket modérateur, dans le cadre du dispositif M'T Dents548(*). Il s'agit là d'une prise en charge à 100 % de la base de remboursement de la sécurité sociale, dérogatoire du droit commun, qui prévoit un ticket modérateur de 40 %549(*) sur les honoraires des chirurgiens-dentistes et les soins dentaires550(*).

Sur présentation de la carte vitale551(*) et du formulaire M'T Dents reçu par courrier ou courrier électronique, cette prise en charge à 100 % s'applique à la fois sur l'examen bucco-dentaire en lui-même, mais également sur les soins conservateurs552(*), chirurgicaux et radiographiques qui sont prescrits ou réalisés au cours de l'examen bucco-dentaire de prévention, sous réserve que ceux-ci soient commencés dans les trois mois suivant l'examen et se terminent dans les six mois553(*). Les soins prothétiques et orthodontiques ne sont, en revanche, pas compris dans le dispositif554(*).

Les actes des chirurgiens-dentistes n'étant pas soumis à une participation forfaitaire555(*) et les dépassements d'honoraires en la matière étant proscrits, le reste à charge sur le dispositif M'T Dents est nul pour les assurés, quel que soit leur âge.

En outre, le tiers-payant s'applique de droit à l'ensemble des examens conduits dans le cadre du dispositif M'T Dents : les assurés sont donc également dispensés de toute avance de frais.

b) Une participation au dispositif encore insuffisante, mais des résultats certains

Malgré le régime de prise en charge dérogatoire retenu et le caractère obligatoire des examens pour les mineurs, un important non-recours au dispositif persiste et concerne près de la moitié de la population visée. Selon les données de la Drees, en 2022, le taux de recours atteignait 51,6 %, un total assez stable par rapport à 2021 (51,1 %). Le dispositif a connu une baisse de participation durable et sensible depuis la crise sanitaire, de l'ordre de 5 points.

Cette moyenne cache toutefois des disparités dans le recours en fonction des examens, le taux de participation diminuant avec l'âge.

Pour les assurés qui recourent au dispositif, les résultats sont certains : les examens M'T Dents détectent au moins une carie chez 40 % des participants, et 70 % d'entre eux ont suivi, après leur examen de prévention, des soins dentaires leur permettant de voir leur affection totalement ou partiellement soignée.

B. La convention nationale conclue avec les chirurgiens-dentistes prévoit de renforcer l'ambition de ces examens de prévention bucco-dentaire, avec le concours des complémentaires santé

Dans le cadre de l'objectif « Génération sans carie », la convention nationale des chirurgiens-dentistes libéraux, signée le 21 juillet 2023 par l'Uncam, l'Unocam et les syndicats représentatifs de chirurgiens-dentistes libéraux, prévoit une révision de la périodicité des examens de prévention bucco-dentaire.

L'article 24.2.1 de la convention prévoit ainsi qu'à compter du 1er janvier 2025, les jeunes de 3 à 24 ans inclus bénéficient chaque année - et non tous les trois ans - d'un examen de prévention et des soins nécessaires. Cette périodicité correspond à l'espacement maximal recommandé entre deux consultations chez le chirurgien-dentiste afin de prévenir autant que faire se peut l'apparition de pathologies bucco-dentaires.

La convention556(*) prévoit également une revalorisation de 10 euros de l'ensemble des actes associés aux examens de prévention bucco-dentaire.

Pour financer l'investissement supplémentaire requis, la convention envisage d'associer les complémentaires santé au financement de la campagne. Celles-ci sont, du reste, les principales financeuses des soins bucco-dentaires avec 56,5 % de la consommation de soins et de biens médicaux associée en 2022. L'article 24.2.1.4 de la convention précitée stipule ainsi que « les partenaires conventionnels conviennent de mettre en place un groupe de travail pour définir les modalités pratiques de mise en place, de portage et de suivi conjoint par l'Assurance maladie obligatoire et les organismes complémentaires de cet examen annuel de prévention ».

La convention fixe toutefois explicitement le principe d'« une absence de reste à charge » pour les bénéficiaires, avec un engagement des partenaires conventionnels à « définir et proposer les solutions » pour ce faire.

Par ailleurs, le même article de la convention prévoit explicitement que l'assuré bénéficie « de l'examen de prévention sans avance de frais », ce qui suppose d'appliquer le tiers-payant à la fois sur la part obligatoire et sur la part complémentaire.

C. Le dispositif proposé : transposer dans la loi les dispositions conventionnelles permettant d'annualiser les examens de prévention bucco-dentaire chez les jeunes

L'article 17 ter vise à retranscrire dans la loi la révision de la périodicité de l'examen de prévention bucco-dentaire pour les jeunes de 3 à 24 ans, et la réforme des modalités de financement qui en découle.

Cet article est issu de deux amendements identiques du Gouvernement et de Cyrille Isaac-Sibille et ses collègues du groupe Démocrates, adoptés par l'Assemblée nationale et retenus par le Gouvernement dans le texte transmis au Sénat en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

1. L'annualisation des examens de prévention bucco-dentaire

Le I de l'article 17 ter modifie l'article L. 2132-2-1 du code de la santé publique, qui régit les examens de prévention bucco-dentaire, afin de prévoir que ces derniers puissent avoir lieu annuellement entre l'année qui suit le troisième anniversaire de l'enfant et celle qui suit le vingt-quatrième anniversaire du jeune adulte. Le 1° procède à cette modification pour les assurés mineurs, pour lesquels le caractère obligatoire des examens est maintenu, et le 2° pour les majeurs.

2. L'association des complémentaires santé au financement des examens de prévention bucco-dentaire

Le II de l'article 17 ter prévoit la réforme du mode de financement des examens de prévention bucco-dentaire, conformément aux stipulations de la convention nationale.

Le 1° du II ajoute les examens de prévention bucco-dentaire aux situations dans lesquelles un ticket modérateur s'applique, en modifiant l'article L. 160-13 du code de la sécurité sociale.

En conséquence, le 2° du II retire ces examens de la liste de situations associées à une exonération de ticket modérateur, figurant à l'article L. 160-14 du code de la sécurité sociale.

De même, le 3° du II réécrit l'article L. 162-1-12 du code de la sécurité sociale sans conserver la mention d'une prise en charge en totalité par les régimes obligatoires de base d'assurance maladie.

Les complémentaires santé, qui prennent en charge l'intégralité du ticket modérateur dans le cadre du contrat responsable et solidaire557(*), seraient désormais associées au financement des examens de prévention bucco-dentaire.

3. Le maintien d'un principe de dispense d'avance de frais, y compris sur la part complémentaire nouvellement créée

Le 3° du II réécrit l'article L. 162-1-12 du code de la sécurité sociale afin de maintenir le principe d'une dispense d'avance de frais pour l'assuré au titre des examens de prévention bucco-dentaire et des soins associés réalisés dans les six mois suivants, sauf pour les inlay-onlay, les soins prothétiques et d'orthopédie dento-faciale, hors du champ du dispositif. À l'exception des inlay-onlay, non mentionnés explicitement dans l'article en vigueur, il s'agit d'une reprise d'un principe déjà contenu dans l'article L. 162-1-12 du code de la sécurité sociale, avec l'ajout du caractère intégral de la dispense d'avance de frais, afin de couvrir également la part prise en charge par l'assurance maladie complémentaire.

4. Une entrée en vigueur à compter du 1er avril 2025

Le III de l'article 17 ter prévoit une entrée en vigueur des réformes conventionnelle et législative des examens de prévention bucco-dentaire à compter du 1er avril 2025.

II - La position de la commission

La commission souscrit pleinement à l'objectif de ce dispositif, judicieusement introduit par les partenaires conventionnels au sein de la convention nationale avec les chirurgiens-dentistes signée le 21 juillet 2023. Elle se félicite donc de cette transcription législative fidèle à l'intention des partenaires conventionnels, qui permettra la mise en oeuvre effective des mesures qu'il contient.

La périodicité actuelle de l'examen, soit une fois tous les trois ans, ne correspond pas avec la fréquence de consultations de routine chez le chirurgien-dentiste recommandée par les autorités sanitaires. La Cnam estime, par exemple, qu'« un contrôle régulier au moins une fois par an chez son chirurgien-dentiste est indispensable ».

Par conséquent, si le dispositif M'T Dents participe sans conteste à démocratiser l'hygiène bucco-dentaire et à améliorer la santé bucco-dentaire, la fréquence de réalisation des examens est insuffisante pour inculquer, dès le plus jeune âge, les bons réflexes de suivi avec une consultation au moins une fois par an chez le chirurgien-dentiste.

Dans le contexte financier particulièrement dégradé que connaît la branche Maladie, la participation des organismes complémentaires au financement des examens de prévention bucco-dentaire apparaît comme une condition sine qua non au renforcement du dispositif et à son annualisation, qui contribuera à faire naître, chez les assurés, l'automatisme de consulter au moins une fois par an son chirurgien-dentiste afin de prévenir l'apparition de pathologies bucco-dentaires ou, le cas échéant, de traiter ces pathologies à un stade précoce.

Il en résultera à la fois une amélioration de la santé bucco-dentaire en population générale, et, à terme, une diminution des dépenses de soins dentaires.

La convention prévoyant explicitement une absence de reste à charge associée à la réalisation de ces examens et la dispense d'avance de frais pour les bénéficiaires, retranscrite par le présent article, la réforme des modalités de financement de l'examen bucco-dentaire doit être neutre pour les assurés. C'est pourquoi la commission a adopté plusieurs amendements en ce sens. L'amendement n° 164, adopté par la commission, précise dans la loi que la prise en charge totale du ticket modérateur sur les examens de prévention bucco-dentaire rentre dans le cahier des charges du contrat responsable et solidaire, qui concerne 95 % de la population couverte par une complémentaire santé. Enfin, l'amendement n° 163 de la commission spécifie dans la loi que le tiers-payant sur l'examen de prévention bucco-dentaire doit s'appliquer obligatoirement et intégralement sur la part couverte par l'AMO comme sur la part couverte par l'AMC.

Enfin, la commission appelle le Gouvernement à procéder par lettre de couverture pour garantir, à titre dérogatoire, la prise en charge intégrale par l'assurance maladie des frais liés aux examens de prévention bucco-dentaire pour les seuls assurés qui ne disposent pas de complémentaire santé et qui pourraient, à ce titre, être exposés à un reste à charge - cela pourrait concerner 3 % à 4 % des bénéficiaires.

La commission des affaires sociales s'inquiète toutefois du taux de participation au dispositif, aujourd'hui encore insuffisant du fait d'un manque de sensibilisation à l'importance du suivi bucco-dentaire, et appelle le Gouvernement, la Cnam et les organismes de complémentaire santé à renforcer la communication sur le sujet, notamment à destination des publics défavorisés, dont le taux de participation est particulièrement bas. Elle appelle donc à ce que les « campagnes de sensibilisation [...] à la santé orale et à la réalisation annuelle de l'EBD » mentionnées par l'article 24 de la convention soient pleinement déployées.

La commission propose d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.

Article 17 quater (nouveau)
Créer des centres de santé et de médiation en santé sexuelle

Cet article, inséré à l'Assemblée nationale par un amendement du Gouvernement, vise à créer une nouvelle catégorie de centres de santé, les centres de santé et de médiation en santé sexuelle.

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

I - Le dispositif proposé

A. Des indicateurs de santé sexuelle défavorables qui justifient un renforcement de l'offre de prévention, de dépistage et de soins

1. Une recrudescence du VIH et des IST constatée prioritairement parmi certaines populations

• Selon Santé publique France, environ 5 000 personnes ont découvert leur séropositivité VIH en 2023. Ce nombre est en augmentation régulière depuis 2020 et touche plus particulièrement les personnes nées à l'étranger (55 %), notamment les femmes contaminées lors de rapports hétérosexuels, ainsi que les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (40 %). En outre, 43 % des infections sont découvertes à un stade tardif de l'infection et 27 % à un stade avancé.

Par ailleurs, l'incidence des infections sexuellement transmissibles (IST) bactériennes est également en augmentation régulière depuis 2020. En revanche, les taux de dépistage des infections sexuellement transmissibles (IST) bactériennes s'améliorent, en particulier l'infection à Chlamydia trachomatis, l'infection à gonocoque et la syphilis.

• Afin de favoriser l'accès au dépistage, le dispositif VIH-Test, qui permet la réalisation d'un dépistage gratuit sans ordonnance et sans rendez-vous depuis le 1er janvier 2022, a été étendu au dépistage de quatre nouvelles IST depuis le 1er septembre 2024. Désormais, tout patient peut se rendre en laboratoire de biologie médicale pour bénéficier d'un dépistage incluant à la fois le VIH et les infections suivantes : chlamydia trachomatis, gonocoque, syphilis et hépatite B. Ces dépistages sont pris en charge à 100 % pour les moins de 26 ans et à 60 % pour le reste de la population.

2. Une expérimentation probante de centres de santé sexuelle d'approche communautaire à Paris, Lyon, Marseille et Montpellier

L'expérimentation de centres de santé sexuelle d'approche communautaire répond à l'action n° 15 de la première feuille de route 2018-2020 de la stratégie nationale de santé sexuelle (SNSS).

• Déployée dans le cadre de l'article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2018, elle a été autorisée par la publication d'un arrêté du 27 novembre 2020558(*) et conduite à partir de 2021 sur quatre centres à Paris, Lyon, Montpellier et Marseille. Trois associations ont été sélectionnées pour porter ces centres de santé : Aides, Virages Santé et le Groupe SOS.

L'objectif principal poursuivi par l'expérimentation consiste à améliorer l'offre globale de santé sexuelle disponible pour des populations cibles spécifiquement identifiées comme des populations à risques en raison de leur exposition au VIH, aux IST et aux hépatites virales. Ces centres de santé, positionnés en complémentarité avec les Cegidd559(*), assurent des missions d'accueil, de prévention, de dépistage et d'accès aux soins en premier recours. Ils s'appuient sur la médiation sanitaire pour développer une approche communautaire, afin de favoriser l'adhésion des usagers les plus éloignés du soin.

• L'évaluation réalisée en juin 2023 par les Hospices civils de Lyon560(*) souligne, parmi les points positifs :

- une meilleure accessibilité à l'offre de soins et de dépistage pour les populations spécifiquement ciblées, en particulier les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes et les personnes trans (certaines files actives demeurent toutefois peu représentées, telles que les travailleuses du sexe et les femmes ayant des rapports sexuels avec les femmes) ;

- une réduction des délais entre le dépistage et la mise sous traitement grâce à des mises sous prophylaxie préexposition au VIH (PrEP) plus précoces ;

- l'importance de l'ancrage préalable des structures associatives porteuses des centres pour favoriser l'adhésion des usagers.

En revanche, plusieurs difficultés sont relevées :

- l'existence d'obstacles réglementaires autour de la délivrance des traitements ;

- la nécessité d'approfondir la coopération interprofessionnelle pour favoriser l'inclusion des personnes accueillies dans des parcours de soins cohérents et suivis ;

- une insuffisante reconnaissance de l'activité de médiation communautaire.

Coût estimé de l'expérimentation des centres de santé sexuelle
d'approche communautaire

• Le coût total de l'expérimentation menée est évalué à 15,2 millions d'euros sur deux ans et demi. Le coût moyen d'un centre sur l'année 2023 est estimé à 1,7 million d'euros. L'expérimentation a pris fin le 30 septembre 2023 pour les quatre centres de santé expérimentateurs.

La direction générale de la santé évalue le coût du dispositif à 1,8 million d'euros par centre au terme d'une période d'amorçage de deux ans, dont 1,5 million d'euros imputables aux forfaits à l'activité et 300 000 euros de dotations.

• Il est prévu de pérenniser les quatre structures actuellement en fonctionnement, d'en déployer deux nouvelles en 2026, puis une en 2027 et deux en 2028, pour finalement totaliser neuf centres sur le territoire national.

B. Une nouvelle offre en santé sexuelle spécifiquement orientée vers des publics cibles

Le présent article prévoit d'insérer un nouvel article L. 6323-1-14-1 dans le chapitre III « Centres de santé » du titre II du livre III de la sixième partie du code de la santé publique. Cet article crée les centres de santé et de médiation en santé sexuelle (CSMSS), qui sont des centres de santé spécialisés en santé sexuelle.

1. Des missions spécifiques et un accompagnement communautaire grâce à la médiation en santé

• Le I du nouvel article L. 6323-1-14-1 précité prévoit que les centres de santé et de médiation en santé sexuelle assurent une diversité de missions :

- une mission de lutte contre les virus de l'immunodéficience humaine (VIH) et contre les infections sexuellement transmissibles (IST) au titre du I de l'article L. 3121-2 ;

- des missions spécifiquement listées par le I et plus précisément, la mise en oeuvre des parcours complets en santé sexuelle, notamment par la prise en charge infectiologique, gynécologique, endocrinologique, addictologique et psychologique des patients ;

un accompagnement communautaire, à l'appui de la médiation en santé.

L'article L. 1110-13 du code de la santé publique auquel il est fait renvoyé précise que la médiation en santé vise « à améliorer l'accès aux droits, à la prévention et aux soins des personnes éloignées des systèmes de prévention et de soins, en prenant en compte leurs spécificités ». 

Le I du nouvel article L. 6323-1-14-1 précise par ailleurs qu'il déroge au dernier alinéa de l'article L. 6323-1 du même code, aux termes duquel « les centres de santé sont ouverts à toutes les personnes sollicitant une prise en charge médicale ou paramédicale relevant de la compétence des professionnels y exerçant ».

• Le II du nouvel article L. 6323-1-14-1 indique que l'ouverture des centres de santé et de médiation en santé sexuelle est subordonnée à une autorisation du directeur général de l'agence régionale de santé (ARS), après sélection dans le cadre d'un appel à manifestations d'intérêts. Elle est également subordonnée au respect d'un cahier des charges défini par un arrêté ministériel.

• Le III vise à préciser :

- que toute personne ne peut pas être accueillie dans l'un des centres de santé et de médiation en santé sexuelle ;

- que la procédure par laquelle une caisse primaire d'assurance maladie peut placer un centre de santé hors de la convention nationale régissant les rapports entre les organismes d'assurance maladie et les centres de santé n'est pas applicable à ces centres. En effet, les articles qui déterminent l'objet et le contenu de cette convention nationale ne serait pas applicables aux centres de santé et de médiation en santé sexuelle.

• Le IV du nouvel article L. 6323-1-14-1 prévoit que le contenu du projet de santé, les conditions dans lesquelles les professionnels de santé du centre y sont associés ainsi que la liste des informations devant être transmises par le centre à l'ARS sont définis par un arrêté ministériel.

2. Un dispositif de financement hybride

Le V du futur article L. 6323-1-14-1 prévoit de déroger aux conditions de remboursement de la liste des actes et prestations (article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale) ainsi qu'aux modalités de financement des centres de santé qui sont fixées aux articles L. 162-32 à L. 162-32-4 du code de la sécurité sociale.

Les modalités de financement de ces centres seront déterminées par un arrêté du ministre chargé de la santé et de la sécurité sociale. Selon le Gouvernement, le financement de ces centres reposera sur des forfaits à l'activité (dépistage, traitement et PreP) et des dotations. Ce modèle, « retravaillé à l'issue de la période d'expérimentation afin de tenir compte des résultats de l'évaluation »561(*), doit permettre d'allouer un financement calqué sur l'activité de chacun des centres, à l'inverse d'un financement reposant uniquement sur des dotations.

3. Une prise en charge à 100 %

Le présent article modifie l'article L. 160-14 du code de la sécurité sociale afin de prévoir que les frais occasionnés par une prise en charge dans l'un des centres de santé et de médiation en santé sexuelle créés par l'article L. 6323-1-14-1 du code de la santé publique font l'objet d'une prise en charge intégrale par la sécurité sociale. Cet article dresse en effet la liste des actes et prestations pour lesquels la participation de l'assuré peut être limitée ou supprimée.

Le Gouvernement justifie cette prise en charge intégrale par le fait qu'un grand nombre d'actes de prévention et de dépistage en matière de santé sexuelle est déjà exonéré de participation de l'assuré.

II - La position de la commission

• Le rapport d'évaluation de l'expérimentation réalisé par les Hospices civils de Lyon témoigne d'une amélioration de l'accès à l'offre en santé sexuelle pour les publics ciblés par les centres de santé et de médiation sexuelle. En cela, le dispositif semble donc remplir les objectifs qu'il se fixait.

• Toutefois, le rapport d'évaluation soulève également des interrogations les interactions entre ces centres et les Cegidd, les périmètres d'action de chacun et leur articulation, notamment562(*) :

- il constate qu'en pratique, les ressources de ces centres ont été mutualisées avec celles des Cegidd, ce qui a pu engendrer des lourdeurs administratives et des frais de gestion du fait des doubles facturations ;

- il pointe le risque de faire de ces centres de santé et de médiation en santé sexuelle « des « CeGIDD 2.0 » qui ne se distingueraient que par leur approche communautaire et/ou leur caractère non hospitalier », tout en recommandant d'accorder l'habilitation Cegidd à chacun des centres de santé et de médiation en santé sexuelle ;

- il relève enfin une perte de performance des Cegidd, localement, qui serait liée à « un effet « pervers » de la double casquette ».

Si la commission soutient une mesure visant à vaincre des inégalités en santé et s'inscrivant dans une démarche « d'aller vers », elle invite le Gouvernement à engager un questionnement plus général sur la structuration de l'offre en santé sexuelle sur le territoire et sur l'adéquation de cette offre aux besoins des usagers.

 Dans un souci de clarification rédactionnelle, la commission a adopté un amendement n° 165.

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

Article 17 quinquies (nouveau)
Couplage de la campagne de vaccination contre les méningocoques
à la campagne de vaccination contre le papillomavirus humain

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale et retenu par le Gouvernement dans le texte transmis au Sénat, vise à coupler la campagne de vaccination contre les infections invasives à méningocoques avec celle contre le papillomavirus humain, déployée depuis 2024 chez les 11-14 ans, en lui appliquant le même régime de prise en charge intégrale et de rémunération des professionnels. Il répond ainsi à une recommandation de la Haute Autorité de santé.

La commission propose d'adopter cet article additionnel sans modification.

I - Le dispositif proposé

A. La recrudescence des cas d'infections invasives à méningocoques depuis la fin de la crise sanitaire constitue un enjeu important de santé publique

1. Les infections invasives à méningocoques : des pathologies peu fréquentes mais associées à un haut niveau de létalité, notamment chez les jeunes

Les infections invasives à méningocoques regroupent diverses pathologies causées par une classe de bactéries, les méningocoques, dont il existe douze souches. Parmi elles, cinq représentent la grande majorité des cas - il s'agit des sérogroupes A, B, C, W et Y.

La rencontre avec l'agent pathogène, résultant d'une transmission humaine par voie aérienne à partir des sécrétions rhino-pharyngées, se traduit le plus souvent par un portage asymptomatique. Elle peut toutefois, dans de rares cas, engendrer une infection invasive à méningocoques, qui prend principalement la forme d'une méningite ou d'une méningococcémie.

Ces pathologies sont caractérisées par leur caractère fulgurant, par leur haut niveau de létalité - autour de 10 %, et par les séquelles invalidantes persistantes qui peuvent y être associées. Certains sérogroupes, notamment le W, sont particulièrement virulents et présentent une mortalité deux fois supérieure à celle d'autres souches.

2. Une incidence en progression depuis la fin de la crise sanitaire

Les infections invasives à méningocoques touchent principalement les jeunes enfants de moins de cinq ans et les adolescents et les jeunes adultes de 11 à 24 ans.

La crise sanitaire liée à l'épidémie de covid-19 avait provoqué une diminution de l'incidence de ces pathologies, les mesures dites « barrières » ayant freiné sa propagation.

Toutefois, la fin progressive de ces mesures s'est traduite par une reprise épidémique particulièrement dynamique sur le champ des infections invasives à méningocoques, avec une hausse de 72 % de l'incidence entre 2022 et 2023.

Nombre de cas d'infections invasives à méningocoques
déclarés par mois, depuis 2015

Source : Haute Autorité de santé

Cette reprise épidémique, concentrée sur les jeunes, est d'autant plus préoccupante qu'on constate une progression du sérogroupe W, associé à une létalité accrue, chez les enfants et les nourrissons.

Si le nombre de cas déclarés reste limité, avec 560 cas en 2023, la gravité de ces pathologies et le fait que les populations les plus exposées soient les jeunes enfants et tout particulièrement les nourrissons de moins d'un an en font un enjeu de santé publique de premier plan.

B. Dans ce contexte, la HAS a actualisé ses recommandations sanitaires en matière de vaccination

Saisie par le ministère de la santé dans le contexte de reprise épidémique, la Haute Autorité de santé (HAS) a fait évoluer, dans une recommandation validée par le collège le 7 mars 2024, la stratégie vaccinale proposée concernant les infections invasives à méningocoques.

1. Une vaccination obligatoire pour les jeunes enfants : une recommandation de la HAS applicable à compter du 1er janvier 2025

Face à la dynamique épidémique et à la létalité des invasions invasives à méningocoque, notamment chez les plus jeunes, la Haute Autorité recommande désormais de rendre obligatoire la vaccination des nourrissons de moins d'un an pour les cinq principaux sérogroupes de méningocoques présents en France.

Conformément aux recommandations de la HAS, le vaccin obligatoire contre le méningocoque C563(*) sera remplacé, à compter du 1er janvier 2025, par un vaccin obligatoire couvrant les souches A, C, W et Y564(*), avec une dose unique à six mois et un rappel à douze mois.

La HAS préconise également que le vaccin pour le sérogroupe B, séparé du précédent, et recommandé par la HAS depuis 2021, soit intégré à la liste des vaccins obligatoires. En conséquence, un décret en Conseil d'État prévoit de rendre ce vaccin obligatoire565(*) à compter du 1er janvier 2025. Le schéma retenu comprend deux doses suivies d'une dose de rappel.

Les vaccins obligatoires

L'article L. 3111-2 du code de la santé publique prévoit une liste de vaccinations obligatoires, sauf contre-indication médicale. Les vaccins concernés sont :

- le vaccin contre la diphtérie ;

- le vaccin contre le tétanos ;

- le vaccin contre la poliomyélite ;

- le vaccin contre la coqueluche ;

- le vaccin contre la rougeole, les oreillons et la rubéole ;

- le vaccin contre l'haemophilus influenza de type B ;

- le vaccin contre l'hépatite B ;

- le vaccin contre le pneumocoque ;

- la vaccination contre le méningocoque de type C et, à compter du 1er janvier 2025, de type B, W et Y.

La vaccination contre la fièvre jaune est également obligatoire en Guyane.

2. Une campagne de vaccination généralisée chez les 11-14 ans, dont l'âge-cible coïncide avec celui de la campagne menée pour le papillomavirus humain

En complément, la Haute Autorité recommande la vaccination généralisée contre les souches A, C, W et Y entre 11 et 14 ans selon un schéma à une dose, indépendamment du statut vaccinal de l'adolescent. Elle maintient son absence de recommandation concernant la souche B en population générale.

Cette tranche d'âge cible correspond à celle de la campagne menée dans les collèges contre le papillomavirus humain (HPV), à destination de tous les élèves de cinquième. La vaccination, entièrement prise en charge par la sécurité sociale566(*), est réalisée directement au sein des établissements scolaires et des établissements d'enseignement adapté par des professionnels des centres de vaccination et, le cas échéant, par des médecins, sages-femmes, infirmiers ou pharmaciens exerçant en libéral, en centre de santé, agents publics ou retraités. Les étudiants de 3e cycle en médecine et pharmacie peuvent également participer. La vaccination en ville reste possible, mais ne bénéficie pas du régime de prise en charge intégrale : le vaccin est alors remboursé à 65 %567(*) par l'assurance maladie

La première édition de cette campagne, encadrée par l'article 37 de la LFSS pour 2024568(*), s'est tenue à l'automne 2023.

Cette campagne s'est traduite par une augmentation de 17 points de la couverture vaccinale chez les jeunes de 11 ans, dont 50 % sont désormais vaccinés. Cette hausse de la couverture ne procède pas uniquement de l'effet de la campagne menée dans les établissements scolaires et de la prise en charge intégrale qui y est associée : les objectifs fixés en la matière n'ont pas été atteints, faute notamment d'une adhésion suffisante dans les établissements privés. Toutefois, le déploiement de la campagne dans les établissements scolaires a engendré un effet d'entraînement sur la ville.

C. Le dispositif proposé : appliquer les recommandations de la HAS sur la vaccination des 11-14 ans

Issu d'un amendement du Gouvernement et retenu par lui dans le texte transmis au Sénat en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale, l'article 17 quinquies vise à coupler la campagne de vaccination contre le papillomavirus humain et celle, prise en application des nouvelles recommandations de la Haute Autorité de santé, contre les infections invasives à méningocoques. La co-administration de ces deux vaccins est en effet possible, selon la direction générale de la santé.

Pour ce faire, le 1° prévoit la prise en charge intégrale du vaccin contre les infections invasives à méningocoques dans le cadre de la campagne menée dans les établissements scolaires et d'enseignement adapté, sur le modèle des dispositions déjà en vigueur pour celui contre le papillomavirus humain.

Le 2° prévoit, au titre de la participation à la campagne de vaccination contre les infections invasives à méningocoques, les mêmes modalités de participation et de rémunération des professionnels que celles s'appliquant à la campagne contre le papillomavirus humain.

Selon les données de la direction générale de la santé, le coût des vaccins pour la sécurité sociale pourrait représenter 2,2 millions d'euros en 2025, en tablant sur une couverture vaccinale de 20 % dans les collèges. Une hausse prévisionnelle de la participation de 10 points par an justifie une montée en charge de l'ordre de 1,1 million d'euros supplémentaires chaque année.

Les frais liés à la rémunération prévue pour les professionnels vaccinant pourraient être partiellement mutualisés avec ceux dus pour la campagne HPV, qui se sont élevés à 1,9 million d'euros pour 2023.

Un budget est également à prévoir pour assurer la communication autour de ce dispositif afin d'assurer une participation accrue des collégiens : le surcoût ne devrait pas dépasser les 2,1 millions d'euros prévus pour la campagne HPV : bien que les stratégies de communications diffèrent, certains coûts logistiques pourront être mutualisés.

II - La position de la commission

La commission accueille favorablement les dispositions de l'article 17 quinquies, qui répondent à un enjeu de santé publique déterminant dans un contexte de reprise épidémique rapide des infections invasives à méningocoque.

Conformément à la position définie par la HAS, la commission estime qu'il est nécessaire de renforcer la couverture vaccinale afin de protéger la population, et au premier rang les nourrissons qui sont particulièrement vulnérables.

La solution retenue, celle du couplage de la campagne de vaccination contre les méningocoques avec celle contre le papillomavirus humain, permettra de donner davantage de visibilité au dispositif pour assurer la progression de la couverture. Les moyens mis en oeuvre pourront également être mutualisés, dans une logique d'efficience bienvenue compte tenu de la situation dégradée des comptes sociaux.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article 17 sexies (nouveau)
Suppression de la condition d'adressage préalable
pour l'accès à MonSoutienPsy

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale et retenu par le Gouvernement dans le texte transmis au Sénat, vise à supprimer la condition tenant à l'adressage du patient par le médecin traitant, un médecin, une sage-femme ou les professionnels de santé des établissements scolaires, pour l'accès au dispositif MonSoutienPsy.

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

I - Le dispositif proposé

A. Le dispositif MonSoutienPsy a été progressivement ouvert mais souffre encore du manque de psychologues conventionnés

1. Mis en place en 2022, le dispositif a été progressivement renforcé depuis

• Le dispositif MonSoutienPsy, mis en place par la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2022569(*), permet la prise en charge par l'assurance maladie de séances d'accompagnement psychologique, en ambulatoire, réalisées auprès d'un psychologue exerçant en libéral, dans un centre de santé ou une maison de santé570(*). Mis en oeuvre depuis avril 2022, le dispositif constitue une innovation : jusque-là, seules les consultations à l'hôpital ou en établissement médico-social étaient prises en charge.

Le nombre de séances prises en charge est limité à huit par année civile571(*), mais le Gouvernement a annoncé souhaiter le porter à douze.

Leur tarification, fixée par arrêté572(*), a été augmenté de 40 à 50 euros pour la première séance, appelée « entretien d'évaluation », et de 30 à 50 euros pour les séances suivantes573(*). Ce montant, qui correspond aux honoraires perçus par le psychologue, est pris en charge à hauteur de 60 % par l'assurance maladie obligatoire. La loi fait interdiction aux psychologues de pratiquer des dépassements d'honoraires sur des séances prises en charge574(*).

• Deux principales conditions d'éligibilité au dispositif sont fixées par la loi, qui ont été progressivement assouplies :

- le psychologue réalisant la séance doit avoir été sélectionné et être signataire d'une convention avec l'assurance maladie ;

- le patient doit avoir été adressé au psychologue par son médecin traitant ou, à défaut, par un médecin ou une sage-femme impliqué dans sa prise en charge, ou par les professionnels de santé des établissements scolaires travaillant ensemble de manière coordonnée575(*).

Le champ des professionnels susceptibles d'adresser le patient a été progressivement élargi. Si la faculté d'adressage était initialement limitée aux médecins, la loi de 2023 visant à favoriser l'accompagnement des couples confrontés à une interruption spontanée de grossesse576(*) a, toutefois, ouvert celle-ci aux sages-femmes impliquées dans la prise en charge d'une femme ou, en cas d'interruption spontanée de grossesse, de son partenaire. La LFSS pour 2024 a, par ailleurs, permis aux professionnels de santé des établissements scolaires d'adresser un patient577(*).

Un décret de février 2022578(*), enfin, précise les conditions d'éligibilité des psychologues comme des patients en prévoyant :

- que les psychologues doivent être inscrits auprès de l'agence régionale de santé de leur lieu d'exercice et disposer d'une expérience professionnelle en psychologie clinique ou psychopathologie d'au moins trois ans579(*) ;

- que le patient doit être âgé de trois ans ou plus et présenter, pour les majeurs, une souffrance psychique ou trouble psychiatrique mineur et, pour les mineurs, une situation de mal-être ou de souffrance psychique pouvant susciter l'inquiétude de l'entourage580(*).

2. Un dispositif limité par le manque de psychologues conventionnés

Dans un premier bilan publié dans son rapport « Charges et produits » de 2023, l'assurance maladie faisait état d'une montée en charge du dispositif. Au 31 mai 2023, ainsi, 144 848 patients avaient été inclus dans le dispositif par 39 441 médecins, pour environ 665 000 séances prises en charge.

Toutefois, l'assurance maladie dénombrait seulement 2 325 psychologues partenaires, sur les plus de 20 000 qui y seraient éligibles. La faible rémunération des séances, leur durée inadaptée à certains troubles visés par le dispositif et la condition d'adressage mise en place figurent parmi les principaux facteurs explicatifs mis en avant par les syndicats de psychologues.

L'assurance maladie relevait, en outre, que la répartition géographique des psychologues conventionnés « demeure hétérogène sur le territoire ». La Lozère, à la date de ce bilan, n'en comprenait aucun.

En conséquence, pour favoriser le conventionnement, l'assurance maladie recommandait « la suppression de la condition d'expérience professionnelle de trois ans »581(*).

B. L'article 17 septies vise à supprimer la condition d'adressage des patients

L'article 17 sexies, issu de trois amendements identiques de MM. Frédéric Valletoux (Hozizons et Indépendants), Cyrille Isaac-Sibille (Les Démocrates) et de Mme Stéphanie Rist (Ensemble pour la République), adoptés par l'Assemblée nationale et retenus par le Gouvernement dans le texte transmis au Sénat, vise à supprimer la condition d'adressage préalable.

Pour ce faire, le I supprime les dispositions relatives à l'adressage par les médecins, sages-femmes et professionnels de santé des établissements scolaires dans l'article L. 162-58 du code de la sécurité sociale. Il substitue également aux dispositions prévoyant la fixation annuelle, par le Gouvernement, du nombre et de la répartition des psychologues pouvant proposer des séances prises en charge des dispositions autorisant seulement les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale à fixer un tel nombre. Enfin, il apporte à l'article L. 162-58 diverses améliorations rédactionnelles.

Le II prévoit que ces nouvelles dispositions sont applicables aux séances d'accompagnement psychologique réalisées par des psychologues ayant signé une convention préalablement à l'entrée en vigueur de la présente loi.

Le III, enfin, rend ces dispositions applicables à Mayotte.

II - La position de la commission

La commission a favorablement accueilli ces dispositions, susceptibles de faciliter l'accès à un psychologue conventionné et de permettre une économie de temps médical.

Alors que le Premier ministre a désigné la santé mentale en grande cause nationale pour 2025, la commission juge souhaitable de faciliter ainsi l'accès des patients au dispositif MonSoutienPsy. Les premiers éléments de bilan publiés confirment l'intérêt du dispositif, en révélant son effet positif « sur le plan de la santé mentale et du fonctionnement social. »582(*)

La commission invite le Gouvernement à évaluer, dans les prochains mois, l'effet des mesures prises - augmentation des tarifs, suppression de l'adressage, augmentation du nombre de séances - sur le nombre de psychologues conventionnés et leur répartition territoriale. L'implication de la profession apparaît, en effet, nécessaire au succès du dispositif.

Soutenant le dispositif transmis, la commission seulement a adopté un amendement n° 166 de sa rapporteure corrigeant une erreur rédactionnelle.

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

Article 17 septies (nouveau)
Extension du champ de l'expérimentation de l'accès direct
aux masseurs-kinésithérapeutes en CPTS

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale et retenu par le Gouvernement dans le texte transmis au Sénat, vise à étendre à vingt départements au plus l'expérimentation de l'accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes membres appartenant à une communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS).

La commission propose de supprimer cet article.

I - Le dispositif proposé

A. L'expérimentation de l'accès direct aux kinésithérapeutes en CPTS

1. Les masseurs-kinésithérapeutes : une profession dite « prescrite »

• Exerçant des actes de prévention, de diagnostic kinésithérapique et de traitement des troubles du mouvement ou de la motricité de la personne et des déficiences ou des altérations des capacités fonctionnelles583(*), les masseurs-kinésithérapeutes ont vu leurs compétences et leur formation progressivement enrichies ces dernières années.

Les prescriptions et les actes ouverts aux masseurs-kinésithérapeutes ont, en effet, été progressivement élargis. La loi « Santé » de 2016584(*) leur a permis, sauf indication contraire du médecin, d'adapter, dans le cadre d'un renouvellement, les prescriptions médicales initiales d'actes de masso-kinésithérapie datant de moins d'un an585(*). En 2021, les masseurs-kinésithérapeutes ont, par ailleurs, été autorisés à prescrire, sauf indication contraire du médecin, les produits de santé nécessaires à l'exercice de leur profession586(*).

La formation des masseurs-kinésithérapeutes a également été profondément réformée en 2015587(*). Sa durée a été allongée à cinq ans et son organisation, progressivement universitarisée. L'obtention du diplôme d'État donne désormais accès au grade de master. L'inspection générale des affaires sociales (Igas) observe que « la réingénierie de la formation achevée fin 2015 et l'universitarisation des études constituent des évolutions importantes pour la profession et peuvent légitimer un nouveau positionnement dans l'offre de soins »588(*).

• Le masseur-kinésithérapeute demeure, toutefois, une profession « prescrite ».

Le code de la santé publique dispose, ainsi, que « lorsqu'il agit dans un but thérapeutique, le masseur-kinésithérapeute pratique son art sur prescription médicale [...] ».

Les décrets de compétence précisent le champ des actes réalisés sur prescription médicale, qui s'étend du bilan kinésithérapique589(*) à l'ensemble des traitements de rééducation590(*). Certains d'entre eux ne sont, en outre, autorisés qu'à la condition qu'un médecin puisse intervenir à tout moment : c'est le cas des élongations vertébrales par tractions mécaniques, de la rééducation cardio-vasculaire de sujets atteints d'infarctus du myocarde récent ou de la rééducation respiratoire591(*).

Le masseur-kinésithérapeute relève du parcours de soins coordonnés592(*) introduit par la loi en 2004593(*) : la prise en charge des consultations non prescrites par le médecin traitant est réduite.

2. Une ouverture de l'accès direct aux masseurs-kinésithérapeute, à titre expérimental en CPTS

L'accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes a progressivement été mis en place par la loi.

• La LFSS pour 2022, d'abord, avait autorisé l'expérimentation d'un accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes dans le cadre des structures d'exercice coordonné, pour une durée de trois ans et dans six départements.

Le décret nécessaire à son lancement n'ayant, toutefois, pas été publié, cette expérimentation n'a jamais été mise en oeuvre. La commission des affaires sociales du Sénat, qui avait soutenu ces dispositions, a jugé « ce retard d'autant plus regrettable qu'une mission de l'Igas avait, dès février 2022, émis de nombreuses recommandations relatives au champ et aux modalités de mise en oeuvre et d'évaluation de cette expérimentation »594(*).

• Face à cette inertie, la loi portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé a, en 2023, autorisé de manière pérenne l'accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes595(*) :

- dans les établissements de santé et les établissements et services sociaux et médico-sociaux ;

- en ville, dans le cadre des structures d'exercice coordonné les plus intégrées : maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP), centres de santé CS), équipes de soins primaires (ESS) et spécialisés (ESP).

Cet accès direct est limité à huit séances par patient, dans le cas où celui-ci n'a pas eu de diagnostic médical préalable. Un bilan initial et un compte rendu des soins réalisés par le masseur-kinésithérapeute doivent, par ailleurs, systématiquement être adressés au médecin traitant du patient ainsi qu'à ce dernier, et reportés dans le dossier médical partagé (DMP)596(*).

Par ailleurs, la loi a prévu une nouvelle expérimentation autorisant, en ville, l'accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes n'appartenant pas à une MSP, un CS, une ESS ou une ESP mais exerçant dans le cadre d'une CPTS. Cette expérimentation est autorisée pour une durée de cinq ans, dans six départements dont deux d'outre-mer. Un décret, pris après avis de la Haute Autorité de santé (HAS) et de l'Académie nationale de médecine, devait préciser ses modalités de mise en oeuvre et d'évaluation.

Sur ce fondement, la HAS a adopté un avis en novembre 2023597(*), préconisant d'encadrer strictement l'expérimentation en :

- proposant une formation complémentaire pour les masseurs-kinésithérapeutes diplômés avant 2019 ;

- limitant l'expérimentation à la population adulte, à huit séances pour les troubles musculo-squelettiques.

Les seuls cas dans lesquels la HAS envisage que l'expérimentation s'applique sans limitation du nombre de séances sont caractérisés par la formulation préalable d'un diagnostic par un médecin.

Un décret de juin 2024598(*) a, finalement, plus d'un an après la promulgation de la loi, fixé les modalités de mise en oeuvre de l'expérimentation. Celui-ci ne prévoit aucune formation complémentaire mais limite, en revanche, l'accès direct à huit séances en l'absence de diagnostic médical préalable. Il prévoit, en outre, que l'expérimentation débute deux mois après sa parution, soit à la fin du mois d'août 2024, pour une durée de cinq ans.

B. L'article 17 septies vise à étendre le périmètre de l'expérimentation à vingt départements au plus

L'article 17 septies, issu d'un amendement de Mme Stéphanie Rist (Ensemble pour la République) adopté par l'Assemblée nationale et retenu par le Gouvernement dans le texte transmis au Sénat, modifie la loi de 2023 pour étendre l'expérimentation de l'accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes en CPTS à vingt départements au plus, fixés par arrêté du Premier ministre et du ministre en charge de la santé.

II - La position de la commission

• La mise en oeuvre de l'accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes s'étant révélée particulièrement malaisée, la commission a été amenée à se prononcer à son égard à de multiples reprises.

Elle a souligné, lors de l'examen du PLFSS pour 2022 comme de la proposition de loi portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé, qu'une telle mesure pouvait « contribuer à libérer du temps médical pour les médecins prescripteurs et [...] faciliter l'accès aux masseurs-kinésithérapeutes pour les patients ».

En conséquence, la commission a soutenu, lors de l'examen de ces deux textes, l'accès des patients à un masseur-kinésithérapeute sans prescription médicale préalable en établissement de santé, en ESMS et, en ville, dans les structures d'exercice coordonné les plus intégrées, partageant une patientèle commune.

Tel n'est pas le cas, en revanche, des CPTS, qui contribuent de manière déterminante à l'organisation de l'offre de soins au niveau local, mais ne constituent pas des structures effectrices. L'hétérogénéité des CPTS ne permet pas, en outre, de garantir l'existence en leur sein d'une coordination suffisante entre professionnels de santé.

• La commission demeure attachée à l'équilibre trouvé lors de l'examen de la proposition de loi, en 2023. Elle juge que le cadre de l'expérimentation prévu par le texte pertinent, et souhaite que celle-ci soit menée à son terme et solidement évaluée dans la perspective d'une éventuelle généralisation.

La commission observe, à cet égard, que la HAS a récemment recommandé d'encadrer strictement cette expérimentation. L'Igas, dans son rapport de 2022 relatif à l'accès direct aux actes de masso-kinésithérapie, relevait elle-même que « selon de nombreux interlocuteurs de la mission, le caractère souple et récent [des CPTS] ne permet pas encore une coordination effective entre les professionnels qui les composent »599(*).

Compte tenu de ces éléments, la commission a adopté un amendement n° 167 de sa rapporteure supprimant l'article 17 septies du texte transmis. Elle souhaite que l'expérimentation, récemment lancée et attendue depuis presque trois ans, soit poursuivie.

La commission propose de supprimer cet article.

Article 17 octies (nouveau)
Expérimentation de la prise en charge des tests de détection
de la soumission chimique

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale et retenu par le Gouvernement dans le texte transmis au Sénat, vise à expérimenter la prise en charge par l'assurance maladie de tests permettant de détecter une soumission chimique, y compris sans dépôt de plainte.

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

I - Le dispositif proposé

A. La soumission chimique, un phénomène en essor qui constitue un véritable problème de santé publique

1. La soumission chimique consiste en l'administration à des fins criminelles ou délictuelles de substances psychoactives à l'insu de la victime ou sous la menace

Selon la définition donnée par l'édition 2022 de l'enquête de vigilance prospective et annuelle coordonnée par le centre d'addictovigilance de Paris sous la houlette de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), « la soumission chimique est l'administration à des fins criminelles (viols, actes de pédophilie) ou délictuelles (violences volontaires, vols) de substances psychoactives à l'insu de la victime ou sous la menace ».

Soumission chimique, vulnérabilité chimique
et agressions facilitées par les substances

La soumission chimique ne doit pas être confondue avec la vulnérabilité chimique, qui désigne les actes délictuels ou criminels facilités par l'état de fragilité d'une personne induit par une consommation volontaire de psychoactifs.

Soumission et vulnérabilité chimiques sont regroupés sous le terme d'agressions facilitées par les substances.

Si la soumission chimique n'est pas spécifiquement définie dans la loi française, les actes de soumission chimique relèvent de l'article 222-15 du code pénal au titre de l'administration de substances nuisibles ayant porté atteinte à l'intégrité physique ou psychique d'autrui. Les peines associées dépendent des conséquences subies par la victime et de la qualité de celle-ci : les peines maximales encourues s'échelonnent de trois ans d'emprisonnement dans le cas où l'administration de substances nuisibles cause moins de huit jours d'incapacité de travail à vingt ans de réclusion criminelle lorsqu'elle entraîne la mort sans intention de la donner600(*).

La soumission chimique suppose l'utilisation de substances psychoactives afin d'altérer le niveau de conscience de la victime. Si les données de la base d'appels Drogue Info Service montrent « la persistance de l'idée reçue selon laquelle le GHB serait l'unique drogue du violeur »601(*), l'acide gamma-hydroxybutyrique (GHB) ne représente, en fait, que 5 % des soumissions chimiques vraisemblables en 2022.

Selon l'enquête précitée, les psychoactifs en cause sont majoritairement des médicaments sédatifs (57 % des cas en 2022) : principalement des anxiolytiques comme les benzodiazépines (25,2 %), des antihistaminiques (12,6 %) et des antalgiques opioïdes (11 %) à l'image du tramadol ou de la codéine.

Les substances non médicamenteuses, principalement des psychotropes illégaux, représentent 43,3 % des cas de soumission chimique vraisemblable - la MDMA, la cocaïne, le cannabis et le GHB représentant à eux quatre 75 % de cette catégorie.

2. Une augmentation « exponentielle » des cas suspectés

Le centre d'addictovigilance de Paris coordonne, en lien avec l'ANSM, tous les ans depuis 2003 une enquête de vigilance et de prospective au sujet de la soumission chimique. Cette enquête révèle, chaque année, le nombre de signalements suspects à la justice, de soumissions chimiques possibles et de soumissions chimiques vraisemblables.

Pour 2022, l'enquête recense 883 cas de soumissions chimiques possibles ou vraisemblables contre 436 en 2021, soit un doublement en un an.

Le centre d'addictovigilance de Paris évoque une augmentation « exponentielle », qu'il corrèle avec la libération de la parole sur les réseaux sociaux. Cette libération de la parole coïncide avec une attention médiatique accrue autour d'affaires judiciaires très commentées, qui ont contribué à donner une place à la question de la soumission chimique dans le débat public.

Il s'agit là d'un recensement des seuls signalements reportés à la justice, un décompte loin de mesurer l'ampleur réelle du phénomène selon l'association spécialisée M'endors pas, selon laquelle le phénomène est encore « largement sous-estimé » dès lors qu' « aucune enquête n'est en mesure de comptabiliser de façon exhaustive le nombre de victimes de soumission chimique par an en France du fait de la complexité de la problématique (faible judiciarisation des affaires, difficultés de la révélation de la preuve qui nécessiterait a minima une systématisation des analyses toxicologiques) ».

Les cas de soumission chimique vraisemblable sont principalement associés à des agressions sexuelles (62,9 %), des violences physiques ou des vols, avec des victimes majoritairement féminines (82,5 %). Aucun âge n'est épargné, mais près du quart des victimes présumées sont des mineurs, et l'âge médian est de 24 ans.

Sur des statistiques globales prenant également en compte les vulnérabilités chimiques, l'Île-de-France concentre plus de la moitié des signalements : c'est la région la plus touchée devant les Hauts-de-France. Les signalements sont concentrés dans les lieux festifs (47 % des cas), mais des suspicions existent également dans des lieux privés, notamment chez les mineurs, et dans des lieux publics non festifs.

3. La soumission chimique pose un important problème de santé publique

La soumission chimique, et plus encore depuis que les cas suspectés augmentent à un rythme très rapide, constitue un véritable problème de santé publique associé à des conséquences cliniques lourdes à court terme et à moyen ou long terme. À court terme, la soumission chimique est associée à des comas, des chutes et des contaminations à des infections sexuellement transmissibles. Selon l'enquête précitée, à long terme, il n'est pas rare que les victimes développent des troubles de l'usage de substances, des angoisses, des réactions phobiques, voire tentent de mettre un terme à leurs jours.

B. La subordination de la prise en charge des tests permettant de détecter une soumission chimique à un dépôt de plainte apparaît inadapté à la situation des victimes de soumission chimique

Les tests ou analyses permettant de détecter une soumission chimique peuvent être pris en charge lorsque la victime présumée dépose plainte.

Toutefois, l'amnésie totale ou partielle associée à près des deux tiers des cas de soumission chimique en raison des substances psychoactives utilisées peut dissuader le dépôt de plainte chez les victimes. Alors que les souvenirs de l'agression ou de l'intoxication sont imprécis, les victimes redoutent fréquemment de ne pas savoir répondre aux questions posées lors du dépôt de plainte, voire doutent tout simplement de l'existence même de l'agression.

En l'absence de dépôt de plainte, aucune prise en charge n'est possible pour ces tests relevant de la médecine légale et non inscrits comme remboursables à la nomenclature des actes de biologie médicale (NABM). Selon le Conseil national de l'Ordre des médecins (Cnom), le coût des analyses et tests nécessaires peut avoisiner 1 000 euros pour les victimes, constituant une barrière financière très dissuasive au recours.

Dans ces conditions, le Cnom a demandé aux pouvoirs publics, dans un communiqué en date du 24 octobre 2024, « de prendre des mesures concrètes pour faciliter l'accès aux tests et analyses, en prenant en charge leur coût dans le cadre de l'Assurance maladie ».

C. Le dispositif proposé : expérimenter la prise en charge par l'Assurance maladie des tests permettant de détecter une soumission chimique, y compris sans dépôt de plainte

L'article 17 octies, issu d'un amendement de Mme Josso et ses collègues du groupe Démocrates retenu par le Gouvernement dans le texte transmis au Sénat, vise, en son I, à expérimenter le remboursement par l'Assurance maladie de tests permettant de détecter une soumission chimique, y compris sans dépôt de plainte. Cette expérimentation durerait trois ans.

Le II de l'article renvoie à un décret pris au plus tard le 1er mars 2025 la définition des modalités de mise en oeuvre de l'expérimentation. Il renvoie également au pouvoir réglementaire la définition d'une liste de territoires participant à l'expérimentation, dans la limite de trois régions.

Le III de l'article prévoit qu'un rapport d'évaluation de l'expérimentation soit adressé par le Gouvernement au Parlement dans les six mois qui suivent son terme.

II - La position de la commission

La commission soutient sans réserve l'expérimentation du remboursement des tests de détection de la soumission chimique.

La commission estime en effet que la conditionnalité de la prise en charge de ces tests à un dépôt de plainte n'est pas adaptée à la réalité de la situation des victimes potentielles, souvent en proie à une amnésie totale ou partielle.

Faire la démarche de porter plainte, d'ouvrir une procédure judiciaire et s'exposer à être interrogé sur des faits présuppose de soupçonner ou de présumer fortement qu'un acte justifiant le dépôt de plainte s'est produit.

L'association M'endors pas indique ainsi que « le fait de ne pas avoir de souvenirs clairs de l'agression ou de l'agresseur, et de ne pas en reconnaître les symptômes, rendent particulièrement difficile la prise de conscience de son statut de victime », et donc le dépôt de plainte.

Or lorsque les victimes sont confrontées à une amnésie totale ou partielle sur les faits, les éléments dont elles disposent ne sont souvent pas assez décisifs pour les conduire à porter plainte, ce qui, dans les faits, les prive d'accès aux tests et analyses nécessaires afin de déterminer si une substance psychoactive a été administrée.

Le dépôt de plainte doit aujourd'hui précéder les résultats du test, alors même que ces derniers peuvent influer sur le souhait de porter plainte. Il apparaîtrait donc plus adapté de renverser cette conception des choses.  

Les tests et analyses visant à détecter une soumission chimique devraient pouvoir être effectués en cas de doute, notamment lié à l'amnésie, et bénéficier d'une prise en charge par l'Assurance maladie, indépendamment de tout dépôt de plainte. Le cas échéant, des résultats d'analyse indiquant la présence de substances psychoactives permettraient aux victimes de déposer plainte plus facilement si elles le souhaitent, puisque celles-ci auraient connaissance au préalable de la matérialité de l'administration d'une substance psychoactive, malgré l'amnésie qui peut les frapper.

La commission a adopté un amendement n° 168 visant à élargir le dispositif en incluant non seulement les tests, mais aussi les analyses visant à détecter une potentielle soumission chimique dans l'expérimentation de prise en charge par l'assurance maladie.

La commission souhaite également qu'une attention particulière soit portée à la fiabilité des autotests qui pourraient être vendus et pris en charge dans le cadre de l'article 17 octies. Si, pour des raisons d'accès aux soins, le Sénat n'a pas souhaité limiter, par la loi, la prise en charge aux seules analyses réalisées dans des laboratoires de biologie, il reste que les tests et analyses visant à détecter la soumission chimique sont particulièrement sophistiqués, si bien qu'aux dires du Conseil national de l'ordre des médecins, ils « ne peuvent être réalisés que dans des laboratoires de toxicologie experts ». Afin de garantir la fiabilité des résultats des tests et analyses et d'éviter autant que faire se peut des situations de faux négatif et de faux positif, dont les conséquences pourraient être particulièrement néfastes, il semble indispensable de conditionner le remboursement d'autotests de détection de la soumission chimique à un haut niveau de qualité.

La docteure Ghada Hatem-Ganzer, fondatrice de la Maison des Femmes du 93, estime qu'à ce jour, « ni les médecins traitants ni les spécialistes ne sont familiers des conséquences de la soumission chimique sur leurs patients », ce qui peut mener à de longues périodes d'errance thérapeutique pour les victimes.

La commission fait donc siennes les recommandations du Cnom, qui « rappelle que les médecins, souvent en première ligne pour recevoir et accompagner ces victimes, doivent être formés à identifier les signes de soumission chimique, mais surtout disposer des outils nécessaires pour en confirmer la présence ». Face à l'essor des pratiques de soumission chimique, il est urgent de donner aux médecins les moyens de détecter et d'accompagner les victimes.

La commission appelle enfin le Gouvernement à mener des campagnes de sensibilisation en population générale comme chez les professionnels de santé.

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

Article 17 nonies (nouveau)
Demande de rapport sur les dépenses de prévention inscrites
en loi de financement de la sécurité sociale

Cet article, inséré à l'Assemblée nationale suite à l'adoption d'un amendement du groupe Socialistes et apparentés, vise à évaluer les dépenses consacrées aux mesures de prévention inscrites en loi de financement de la sécurité sociale.

La commission propose de supprimer cet article.

I - Le dispositif proposé

A. Des dépenses de prévention en santé encore limitées et principalement portées par l'assurance maladie

L'un des axes de la stratégie nationale de santé 2018-2022 prévoit de renforcer la prévention en santé602(*). L'expression « virage de la prévention », popularisée à cette occasion, devait illustrer l'investissement prioritaire du Gouvernement dans les actions de prévention alors que la France accuse un retard certain en la matière. La Cour des comptes, dans un rapport de 2021 sur la prévention en santé, relevait ainsi les « résultats médiocres » obtenus par la France dans le champ de la prévention en santé, par comparaison avec ses voisins européens et ce, « malgré un effort budgétaire comparable »603(*).

La loi de financement de la sécurité sociale, véhicule budgétaire annuel pour les dépenses d'assurance maladie, peut prévoir diverses mesures en matière de prévention. En 2022, les dépenses de prévention en santé s'élèvent à 12,6 milliards d'euros et à 6,1 milliards d'euros en excluant les dépenses liées à la lutte contre l'épidémie de la covid-19.

L'épidémie de covid-19 a profondément modifié la répartition des dépenses de prévention par financeur, l'assurance maladie contribuant désormais pour près des deux tiers à ces dépenses, contre un tiers avant la crise sanitaire.

B. Un rapport au Parlement pour évaluer les dépenses de prévention inscrites en loi de financement de la sécurité sociale

Cet article propose que le Gouvernement remette au Parlement un rapport évaluant les mesures de prévention inscrites dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 et plus précisément, les mesures suivantes :

- l'article 37 relatif à la campagne nationale de vaccination contre les infections à papillomavirus humains (HPV) dans les collèges ;

- l'article 38 qui permet d'élargir la liste des vaccinations contre les méningocoques ;

- l'article 39 relatif à la délivrance en pharmacie de préservatifs intégralement pris en charge pour les moins de 26 ans, sans avance de frais et sans condition de prescription ;

- l'article 44 qui autorise l'État à mettre en place un programme de dépistage systématique du cytomégalovirus chez la femme enceinte ;

- l'article 46 relatif à la mise en oeuvre et aux modalités de prise en charge des parcours de soins coordonnés renforcés.

Ce rapport, qui serait remis dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la loi de financement de la sécurité sociale, examinerait plus largement l'opportunité de distinguer des dépenses associées à des mesures de prévention inscrites en loi de financement de la sécurité sociale et d'identifier les économies réalisées dans ce cadre.

II - La position de la commission

La commission réaffirme son attachement aux politiques de prévention en santé, encore trop peu développées en France.

Elle souscrit à la nécessité de suivre et d'évaluer les dépenses de prévention, comme les dépenses afférentes à toute mesure inscrite en loi de financement de la sécurité sociale. Elle constate également que pour les mesures évoquées dans le présent article et inscrites en LFSS pour 2024, plusieurs font bel et bien l'objet d'un suivi par le Gouvernement et que des données sur les conditions de leur mise en oeuvre sont disponibles.

Ainsi, à propos de la campagne nationale de vaccination contre le HPV, près de 117 000 élèves ont été vaccinés au collège au cours de la première période, soit 14,4 % des élèves scolarisés en cinquième. Ce taux relativement décevant est néanmoins compensé par un effet d'entraînement de la vaccination réalisée en ville. Au global, c'est donc 48 % de la classe d'âge visée qui a reçu au moins une dose du vaccin contre le HPV, contre 31 % en 2022. Le coût global de la campagne de vaccination - incluant les vacations des professionnels de santé, l'achat des vaccins et la campagne de communication - serait inférieur au coût prévisionnel inscrit en LFSS pour 2024.

Concernant l'élargissement de la liste des vaccinations contre les méningocoques, la mesure devant entrer en vigueur le 1er janvier 2025, il n'est pas possible d'en établir un bilan. Le projet de LFSS pour 2025, dans son article 17 quinquies introduit à l'Assemblée nationale, prévoit d'ailleurs de coupler la campagne de vaccination contre les méningocoques avec celle contre le HPV réalisée dans les collèges.

La délivrance en pharmacie de préservatifs intégralement pris en charge pour les moins de 26 ans rencontre un certain succès. Sur les 21 premières semaines de 2024, 5,7 millions de préservatifs ont été pris en charge à 100 % pour 1,2 million d'euros, contre 6,4 millions de préservatifs délivrés pour un montant de 1,4 million d'euros sur la même période en 2023. À ce stade, l'impact financier anticipé devrait être inférieur au coût prévisionnel estimé en LFSS selon le Gouvernement.

Quant à la possibilité de mettre en oeuvre un dépistage systématique du cytomégalovirus chez la femme enceinte, la Haute Autorité de santé n'a à ce stade pas rendu son avis. La mesure ne peut donc faire l'objet d'aucune évaluation. En février 2024, le Haut Conseil de la Santé Publique a toutefois maintenu son précédent avis datant de 2018, qui consiste à ne pas recommander ce dépistage de manière systématique.

Enfin, la création d'un cadre global et pérenne pour mettre en place des parcours de soins coordonnés renforcés s'inscrit dans la continuité d'une diversité d'expérimentations conduites depuis plusieurs années et faisant l'objet d'un suivi au titre de l'article dit « 51 ».

La commission, suivant sa position constante sur les demandes de rapport non justifiés par une circonstance ou une nécessité particulières, propose, avec l'amendement n° 169, de supprimer cet article.

Article 18
Plafonnement des dépenses d'intérim des personnels non médicaux

Cet article propose de créer un dispositif de plafonnement des dépenses d'intérim des personnels non médicaux dans les établissements publics de santé et les établissements publics médicosociaux. Ce faisant, il modifie le dispositif de plafonnement en vigueur pour les dépenses d'intérim des personnels médicaux dans les établissements publics de santé.

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

I - Le dispositif proposé

A. Un recours croissant et peu régulé à l'intérim dans les établissements publics de santé et médicosociaux

1. Le développement non maîtrisé des dépenses d'intérim s'inscrit dans un contexte de forte tension sur les ressources humaines

a) Le contexte : une tension sur les ressources humaines non médicales qui s'aggrave dans les établissements

· L'accroissement des besoins en santé, soutenu par le vieillissement de la population et la chronicisation de diverses pathologies, entretient la dynamique des recrutements dans les secteurs sanitaire et médicosocial. Dans le secteur hospitalier public, les effectifs ont ainsi augmenté de 15 % entre 2003 et 2021604(*). Cette tendance est appelée à se poursuivre, puisque les infirmiers, les sages-femmes et les aides-soignants figurent parmi les métiers qui devraient être les plus créateurs d'emplois d'ici à 2030605(*).

Toutefois, les établissements publics de santé et médicosociaux ont connu une dégradation assez nette des taux de vacances d'emplois des personnels soignants dans la période post-covid. Le taux d'emplois vacants, par catégories de personnels, constitue un bon indicateur des tensions pesant sur les ressources humaines dans les établissements de santé et médicosociaux. Selon une enquête de la Fédération hospitalière de France (FHF) publiée au printemps 2022, entre 2019 et 2022, le taux d'emplois infirmiers vacants avait ainsi plus que doublé dans les établissements publics de santé hors CHU, passant de 3 % à 6,6 %. Il avait par ailleurs quasiment doublé dans les établissements du secteur médicosocial public, évoluant de 7,5 % à 13,1 % sur la même période606(*).

Au global, 99 % des établissements déclarent faire face à des difficultés de recrutement, dont 80 % de façon permanente607(*). Chez les personnels paramédicaux, les difficultés semblent se concentrer sur certaines catégories professionnelles, en particulier les infirmiers anesthésistes (Iade), les infirmiers de bloc opératoire (Ibode), les manipulateurs en électroradiologie médicale (Merm) et certains métiers de la filière rééducation. La réforme des autorisations d'équipements matériels lourds à partir de 2023 a accentué ces difficultés sur les Merm en libérant de nombreuses autorisations dans le secteur privé.

Évolution des tensions dans certains métiers depuis 2011

Source : Dares, Les tensions sur le marché du travail en 2022, novembre 202

Note de lecture : Entre 2011 et 2022, l'indicateur synthétique de tension sur le marché du travail du métier infirmier est ainsi passé de 0,8 à plus de 2.

b) Une conséquence : l'envolée des dépenses d'intérim principalement portée par les personnels non médicaux

· Au sens strict, l'intérim consiste en la mise à disposition d'un praticien salarié par une entreprise de travail temporaire auprès d'un client utilisateur (article L. 1251-1 du code du travail), en l'espèce les établissements publics de santé et médicosociaux. Toute prestation d'intérim exige non seulement la conclusion d'un contrat de travail entre le praticien et l'entreprise d'intérim, qui est l'employeur direct, ainsi qu'un contrat de mise à disposition entre l'entreprise de travail temporaire et le client utilisateur.

L'intérim n'est que l'une des formes que peut revêtir l'emploi temporaire dans les établissements publics de santé et médicosociaux. Il se distingue notamment :

- des prestations dites « de placement » ou de mise en relation telles que définies à l'article L. 1251-4 du code du travail,

- des contrats de gré à gré directement conclus entre un établissement employeur et un praticien sans intermédiation.

· Si le recours aux prestations d'intérim n'a cessé de croître dans les établissements publics de santé et médicosociaux depuis 2017, le taux de recours à l'intérim y demeure limité. Entre 2017 et 2023, ce taux de recours est passé de 0,2 % à 0,4 % dans les établissements de santé publics et privés, toutes catégories d'effectifs confondues608(*). Par comparaison, le recours à l'intérim s'établit à 1,7 % dans l'ensemble du secteur tertiaire.

Taux de recours des établissements de santé publics et privés à l'intérim

Source : Drees-Dares, Focus, n° 50, septembre 2023609(*)

Néanmoins, cette augmentation notable est principalement portée par le recours aux infirmiers temporaires, en nette hausse à partir de 2021. La direction de la recherche, des études, de l'évaluation et de la statistique (Drees) et la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), co-auteures d'une publication sur l'intérim dans les établissements de santé publics et privés, relèvent ainsi qu'au 1er trimestre 2023, le taux de recours aux infirmiers intérimaires est trois fois supérieur à celui des autres catégories de personnels soignants, et jusqu'à quatre fois supérieur à celui du personnel médical.

· Entre 2014 et 2023, les dépenses en intérim ont été multipliées par six pour le personnel paramédical. Elles s'élèvent à 462 millions d'euros pour les personnels paramédicaux des établissements publics de santé et à 50,6 millions d'euros dans les établissements publics sociaux et médico-sociaux610(*). Parallèlement, les dépenses d'intérim du personnel médical progressaient de 160 %.

Certains acteurs hospitaliers évoquent des différentiels de rémunération variant en moyenne de 18 % à 40 % par rapport au coût du personnel titulaire ; plus significativement, des établissements mentionnent une rémunération des intérimaires jusqu'à 2,5 fois supérieure à celle d'un personnel titulaire, rapportée au coût horaire611(*). Surtout, les directeurs hospitaliers alertent sur l'inflation des frais de gestion pratiqués par les agences d'intérim, qui peuvent atteindre jusqu'à 3,6 fois le montant de la rémunération du professionnel, pour les territoires et les professions les plus en tension612(*). Cette pratique de facturation répandue abriterait des mécanismes de reversements complémentaires non réglementaires au professionnel intérimaire par l'entreprise de travail temporaire.

· Il convient toutefois d'observer que ces données masquent la réalité bien plus large du recours à l'emploi temporaire au sein des établissements publics de santé et médicosociaux.

Le recours à des contrats de durée courte, voire très courte (24h, 48h), s'est en effet fortement développé pour le personnel médical, en s'accompagnant d'une hausse importante des rémunérations. Surtout, les conférences de directeurs et de présidents de CME décrivent un développement massif aux contrats dits de type 2, qui sont des contrats aux conditions de rémunération dérogatoires et particulièrement attractives. Le recours à ces contrats, normalement réservés aux spécialités en tension, s'est accru en l'absence de véritable régulation par les ARS. Cette situation induit des problématiques similaires à celles occasionnées par un recours trop peu encadré à l'intérim613(*).

Concernant spécifiquement les personnels paramédicaux, la DGOS indique que le recours aux contrats est encore plus massif que pour les personnels médicaux et que ceux-ci revêtent des formes très variées, ce qui tendrait à complexifier leur encadrement.

c) Une situation qui fragilise les établissements dans leurs recrutements, leur activité et leurs finances

Alors que le recours à l'intérim a vocation à offrir une souplesse aux établissements pour pallier une difficulté de fonctionnement ponctuelle (absentéisme, congés...), celui-ci s'est mué en un mode de recrutement permanent pour une partie du secteur sanitaire et médicosocial public. Ainsi que le relève la Cour des comptes, « Lorsque le recours aux emplois temporaires est nécessaire pour assurer le fonctionnement courant, et non plus répondre à des situations conjoncturelles, il traduit une fragilité structurelle de l'hôpital et pèse lourdement sur sa situation financière »614(*).

L'inflation des dépenses d'intérim - et plus largement, des dépenses de personnels temporaires ou non permanents - pèse sur les budgets des établissements compte tenu du coût moyen des prestations, globalement plus élevé que le coût moyen d'un personnel permanent, et de la progression constante de ce coût.

Par ailleurs, le phénomène de « surenchère sur le marché de l'emploi »615(*) qu'alimente l'intérim des professionnels soignants génère une concurrence délétère entre les personnels permanents d'une part et les personnels intérimaires et temporaires d'autre part, du fait d'une iniquité de leurs situations respectives. Ces derniers bénéficient en effet de conditions de rémunération et d'indemnisation plus attractives, qui excèdent les salaires moyens encadrés par les grilles indiciaires de la fonction publique hospitalière (cf. encadré infra). Le recours croissant à l'intérim fragilise donc directement l'attractivité de l'emploi permanent dans les établissements publics du secteur sanitaire et médicosocial.

Enfin, l'instabilité des équipes soignantes et la moindre attractivité dont peut pâtir le secteur public, notamment en raison de la charge que représente la permanence des soins, principalement assurée par le secteur public, ont un impact mécanique sur le capacitaire des établissements. En 2022, près de 70 %des fermetures de lits à l'AP-HP étaient dues à un manque de personnels616(*), avec une situation particulièrement critique pour les infirmiers. La crise sanitaire de la covid-19, éprouvante pour les soignants, semble avoir accentué ces difficultés. La problématique de fidélisation à laquelle font face les hôpitaux s'illustre dans un constat : près d'une infirmière hospitalière sur deux a quitté l'hôpital ou a changé de métier après dix ans de carrière617(*).

Source : Drees, Études et Résultats n° 1277, juillet 2023

2. Les diverses mesures d'encadrement de l'intérim ont jusqu'à présent globalement échoué à réguler le phénomène

a) Une première tentative d'encadrement visant le plafonnement des dépenses d'intérim médical dans les établissements publics de santé (2016)

Dans la continuité du rapport réalisé par le député Olivier Véran ayant alerté sur les dérives constatées des pratiques intérimaires à l'hôpital public618(*), la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé a instauré un premier cadre législatif visant à réguler les conditions de recours à l'intérim. L'article 136 de cette loi crée ainsi un dispositif de plafonnement journalier des dépenses susceptibles d'être engagées par un établissement public de santé au titre d'une mission de travail temporaire.

Les textes réglementaires d'application de ces dispositions619(*) prévoient quant à eux les modalités de ce plafonnement. Précisément, le plafond journalier du salaire brut d'un praticien intérimaire pour 24 heures de travail effectif est fixé à 1 410,69 euros bruts, hors remboursement d'éventuels frais professionnels refacturés par l'entreprise de travail temporaire à l'établissement public de santé620(*).

En l'absence de contrôle effectif, ce cadre législatif et réglementaire a pourtant échoué à endiguer l'inflation des dépenses d'intérim et du montant des rémunérations des praticiens intérimaires. De nombreuses dérives (cf. encadré infra) et divers contournements des textes ont été documentés, la régulation étant demeurée essentiellement cosmétique.

Des dérives jugées préoccupantes par la Cour des comptes

Dans son relevé d'observations définitives consacrées à l'intérim médical et à la permanence des soins dans les hôpitaux publics, la Cour des comptes établit des constats inquiétants symptomatiques du déséquilibre persistant existant entre l'offre (ressources humaines médicales et, désormais, paramédicales) et la demande (établissements recruteurs) sur le marché de l'emploi des personnels soignants.

Les établissements, contraints d'assurer la continuité et la permanence des soins au titre de leur mission de service public, « peuvent être conduits à consentir à de sensibles dépassements » tout en étant « conscients de l'illégalité et du caractère répréhensible du non-respect des plafonds réglementaires en termes de rémunération ».

La Cour des comptes fait état de pratiques de rémunération allant jusqu'à 1 300 € bruts pour une plage de 24 heures en Auvergne-Rhône-Alpes et atteignant même 2 700 € bruts en Nouvelle-Aquitaine, soit bien au-delà des plafonds réglementaires - le montant plafond était en effet fixé à 1 287,05 € avant d'être réévalué par un arrêté du 6 novembre 2023 à 1 389,83 €.

Une campagne de contrôles comptables pilotée par la direction générale des finances publiques dans tous les hôpitaux de France en début d'année 2023 a établi le caractère largement répandu de ces pratiques irrégulières.

Les acteurs auditionnés par la rapporteure dans le cadre de l'examen du PLFSS pour 2025 ont indiqué que les pratiques de contournement du plafonnement du coût de l'intérim médical consistent notamment à déclarer une durée de travail supérieure à celle réellement effectuée, et à augmenter le montant des frais accessoires (transport, hébergement) et des frais de commission facturés par l'entreprise de travail temporaire, dont une part est ensuite rétrocédée à l'intérimaire.

b) Une volonté de réguler les dérives de l'intérim médical et paramédical récemment réaffirmée par le législateur (2021)

· Compte tenu des dérives et contournements précités, la loi « Rist » n° 2021-502 du 26 avril 2021 visant à améliorer la confiance dans le système de santé par la confiance et la simplification a introduit de nouvelles dispositions dans le code de la santé publique621(*) visant à assurer un contrôle effectif des rémunérations des praticiens temporaires.

Précisément, le nouvel article L. 6146-4 renforce le contrôle exercé par le comptable public sur les établissements publics de santé et crée un dispositif d'alerte du directeur général d'ARS compétent pour saisir le tribunal administratif lorsqu'il est informé de la conclusion d'actes irréguliers. En présence d'un acte manifestement irrégulier, il revient au comptable public de bloquer le mandat de paiement, dans l'attente de la régularisation de l'acte par l'ordonnateur, c'est-à-dire l'établissement employeur. Cette disposition législative exerce donc un « effet couperet » immédiat.

Dans un contexte post-crise où les établissements publics de santé ont souffert d'une accentuation des tensions sur les ressources humaines et d'une reprise d'activité entravée, l'application de cette mesure s'est vue différée au mois de mars 2023. Au terme d'un peu plus d'un an d'application, la DGOS indique qu'environ 1% des mandats de paiement portant sur des prestations d'intérim font actuellement l'objet d'un rejet par le comptable public.

· En outre, avec la loi « Valletoux » n° 2023-1268 du 27 décembre 2023 visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels, le législateur a fixé un cadre interdisant l'exercice des professionnels médicaux et non médicaux en qualité d'intérimaire en début de carrière622(*). Les personnels non médicaux visés par ce dispositif sont les sages-femmes et l'ensemble des professionnels relevant du livre III de la quatrième partie du code de la santé publique, notamment les infirmiers, les aides-soignants, les manipulateurs en électroradiologie et les techniciens de laboratoire médial. Les mêmes dispositions s'appliquent aux professionnels exerçant dans les établissements sociaux et médicosociaux du secteur public.

Un décret a récemment fixé la durée de cette interdiction à deux ans pour les personnels paramédicaux précités623(*) ; un autre décret doit être publié pour fixer la durée d'interdiction applicable aux personnels médicaux.

La charge de cette vérification repose sur l'entreprise de travail temporaire, qui atteste auprès de l'établissement bénéficiant de la prestation que la condition de durée minimale d'exercice préalable est bien remplie.

B. L'instauration d'un dispositif de plafonnement des dépenses d'intérim des personnels paramédicaux dans les établissements publics de santé et médicosociaux

1. Une mesure de plafonnement des dépenses d'intérim qui s'inspire des dispositions en vigueur pour les personnels médicaux

a) L'élargissement à l'intérim paramédical des dispositions relatives à l'intérim médical

L'article L. 6146-3 du code de la santé publique prévoit la possibilité pour les établissements publics de santé de recourir à des missions de travail temporaire dans les conditions prévues à l'article 9-3 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, c'est-à-dire à des prestations d'intérim au sens strict, à l'exclusion des prestations de mise en relation et des contrats de gré à gré. L'article précité, désormais abrogé, renvoie en effet à l'article L. 1251-1 du code du travail selon lequel « le recours au travail temporaire a pour objet la mise à disposition temporaire d'un salarié par une entreprise de travail temporaire au bénéfice d'un client utilisateur pour l'exécution d'une mission ».

Les dispositions de cet article ont été introduites par la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, afin de reconnaitre et d'encadrer les conditions du recours à l'intérim médical dans les établissements publics de santé, qui contribue à fragiliser l'organisation des équipes médicales et instaure une concurrence des rémunérations avec les personnels permanents de ces établissements.

· Le a) du 1° du I. du présent article propose donc d'ouvrir le champ de ces dispositions aux personnels non médicaux des établissements publics de santé. D'une part, dans un souci de précision, il substitue les termes « des médecins, des odontologistes, des pharmaciens » aux termes « des personnels médicaux, odontologistes et pharmaceutiques »624(*) ; d'autre part, il y adjoint les mots « des sages-femmes et des professionnels relevant du livre III de la quatrième partie du présent code ». Ce faisant, l'article propose d'élargir substantiellement le périmètre du premier alinéa de l'article L. 6146-3 puisque les personnels relevant du livre III de la quatrième partie du code de la santé publique sont les suivants : les infirmiers, les masseurs-kinésithérapeutes et pédicures-podologues, les ergothérapeutes et psychomotriciens, les orthophonistes et orthoptistes, les manipulateurs en électroradiologie et les techniciens de laboratoire médial, les audioprothésistes et opticiens-lunetiers, les diététiciens, les aides-soignants, les auxiliaires de puériculture, les ambulanciers, les assistants dentaires et les assistants de régulation médicale.

Par ailleurs, le même a) actualise la référence juridique figurant au premier alinéa de l'article L. 6146-3 précité en substituant l'article L. 334-3 du code général de la fonction publique à celle de l'article 9-3 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière. L'ordonnance n° 2021-1574 du 24 novembre 2021 portant partie législative du code général de la fonction publique a en effet abrogé ce dernier article.

· Suivant la même logique, le 2° du présent article étend aux personnels non médicaux le champ des dispositions de l'article L. 6146-4 du code de la santé publique, actuellement restreint aux personnels médicaux, en substituant le terme de « professionnel de santé » à celui de « praticien », et en supprimant la référence à l'article L. 6152-1 du même code.

Ces modifications permettent ainsi de soumettre les prestations d'intérim du personnel paramédical au contrôle renforcé du comptable public.

b) L'adoption d'un dispositif harmonisé de plafonnement des dépenses d'intérim médical et paramédical

· Le b) du 1° du I. du présent article propose de modifier la rédaction du deuxième alinéa de l'article L. 6146-3 du code de la santé publique, qui pose le principe d'un plafonnement journalier des dépenses d'intérim pour le recours à un praticien en ces termes :

« Le montant journalier des dépenses susceptibles d'être engagées par praticien par un établissement public de santé au titre d'une mission de travail temporaire prévue au premier alinéa du présent article ne peut excéder un plafond dont les conditions de détermination sont fixées par voie réglementaire. »

· La rédaction proposée par le présent article se distingue des dispositions actuellement en vigueur sur plusieurs points essentiels.

En premier lieu, il est fait référence aux conditions dans lesquelles les prestations d'intérim peuvent faire l'objet d'un plafonnement : tel est le cas « Lorsqu'il existe une tension sur les ressources ».

En deuxième lieu, la rédaction indique que cette tension sur les ressources doit se refléter dans le coût du personnel mis à disposition par une entreprise de travail temporaire rapporté au coût de l'emploi d'un professionnel permanent. De cette façon, elle suggère, sans pour autant l'indiquer clairement, qu'il doit exister un différentiel non négligeable entre le coût d'un emploi permanent direct par l'établissement et celui de la mise à disposition par une entreprise de travail temporaire.

En troisième lieu, la rédaction mentionne la possibilité de tenir compte « des spécificités territoriales » pour la détermination du plafond de dépenses. Cette précision suggère que des montants plafonds différents pourraient être fixés selon les territoires - sans que ne soit précisée l'unité géographique à laquelle est fait référence - eu égard aux caractéristiques propres à chacun. Pourtant, si l'on admet que les montants des prestations d'intérim peuvent être variables d'une région à une autre, les rémunérations versées aux personnels permanents des établissements, fixées en référence à une grille indiciaire et, le cas échéant, à diverses indemnités, ne bénéficient pas de la même souplesse. On suppose donc que l'écart de rémunération entre un professionnel « permanent » et un intérimaire pourra être d'autant plus élevé que le territoire est en proie à d'importantes tensions sur les ressources humaines.

En quatrième lieu, une différence notable avec la rédaction actuelle tient au caractère apparemment conditionnel du dispositif. En effet, il est indiqué que le montant des dépenses « peut être plafonné » dans des conditions déterminées par voie réglementaire. Le nouveau dispositif semble donc aménager une marge de manoeuvre au pouvoir réglementaire pour déterminer le montant plafond des dépenses susceptibles d'être engagées. Cette précaution peut être justifiée par le fait que toutes les catégories de professionnels précitées ne sont pas concernées, ou pas concernées au même titre, par le recours à l'intérim.

2. Une mesure dupliquée dans les établissements publics sociaux et médicosociaux

Par effet de miroir avec le code de la santé publique, il est proposé de dupliquer les mêmes dispositions dans le code de l'action sociale et des familles en rétablissant l'article L. 313-23-3. Celles-ci se verraient appliquées dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux relevant des 1°, 2°, 4°, 6° et 7° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, c'est-à-dire à titre principal les établissements agissant dans le champ de la protection de l'enfance et de l'aide sociale à l'enfance, l'accueil des mineurs et jeunes adultes handicapés, l'accueil et l'accompagnement des personnes âgées et des personnes handicapées.

Les personnels concernés sont ceux visés à l'article L. 313-23-4 du même code, créé par la loi n° 2023-1268 du 27 décembre 2023 visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels, dite loi Valletoux. Cet article a instauré une mesure d'interdiction de recours à l'intérim pour certains personnels avant que ceux-ci n'aient exercé dans un autre cadre pour une durée fixée à deux ans par décret. Ces personnels, visés également par la mesure du présent article, sont les suivants : les médecins, les infirmiers, les aides-soignants, les éducateurs spécialisés, les assistants de service social, les moniteurs-éducateurs et les accompagnants éducatifs et sociaux.

3. Une entrée en vigueur applicable aux contrats conclus à compter du 1er juillet 2025

Le III du présent article indique que les dispositions s'appliquent aux contrats conclus à partir du 1er juillet 2025. Ne sont donc pas concernés les contrats conclus avant cette date, même s'ils produisent leurs effets après le 1er juillet 2025.

Cette modalité d'entrée en vigueur reprend celle ayant guidé l'application des dispositions de la loi « Rist » sur le contrôle comptable des dépenses d'intérim médical625(*).

II. Le dispositif transmis au Sénat

Le Gouvernement a transmis au Sénat cet article modifié par son amendement n° 2351, adopté à l'Assemblée nationale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale. Cet amendement permet d'étendre la mesure de plafonnement des rémunérations des personnels intérimaires aux préparateurs en pharmacie.

Le Gouvernement a transmis au Sénat cet article ainsi modifié.

III - La position de la commission

À titre liminaire, la commission émet des réserves sur la recevabilité de cette mesure dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Consciente des tensions aigues rencontrées par les établissements publics de santé et médicosociaux dans les recrutements de personnels paramédicaux, la commission soutient néanmoins le principe de cette mesure afin de lutter contre la surenchère salariale, tout en soulignant ses limites.

Elle appelle en conséquence à renforcer l'attractivité du secteur hospitalier public par des mesures ciblées, à conforter les organisations mutualisées à l'échelle territoriale et à consolider la démographie des professionnels de santé.

1. Une mesure susceptible d'être déclarée irrecevable par le Conseil constitutionnel

Le Gouvernement justifie la place de cet article en loi de financement de la sécurité sociale en ce qu'elle conduirait à diminuer les charges salariales des établissements publics de santé et médicosociaux financés par l'Ondam. Précisément, le Gouvernement estime qu'un plafonnement des rémunérations des personnels non médicaux intérimaires permettrait de générer une économie de l'ordre de 22,5 millions d'euros en année pleine626(*).

Il convient pourtant de rappeler que si les établissements publics de santé et médicosociaux relèvent des organismes dépendant des assurances sociales (ODASS), leurs dépenses n'entrent pas dans le champ des lois de financement de la sécurité sociale.

À ce titre, le Conseil constitutionnel a censuré comme cavalier social l'article 42 de la LFSS pour 2023627(*) qui visait à encadrer les possibilités de recours à l'intérim pour des personnels en début de carrière628(*), considérant que ces dispositions n'ont pas d'effet ou ont un effet trop indirect sur les dépenses des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement.

La commission émet donc des réserves sur la recevabilité de cet article, que le Conseil constitutionnel aura à examiner.

2. Encadrer les dépenses d'intérim : un remède insuffisant qui consiste à traiter les conséquences d'une démographie professionnelle sous tension plutôt que les causes initiales du phénomène

· L'opportunité d'un dispositif de plafonnement des dépenses d'intérim des personnels paramédicaux peut être questionnée, au regard du bilan des mesures d'encadrement déjà en vigueur pour les personnels médicaux (poursuite de la surenchère salariale, multiplication des contrats dérogatoires de type 2, contournements des dispositions de plafonnement par l'augmentation de frais annexes facturés par l'entreprise d'intérim et reversés aux personnels intérimaires...).

Les conférences de directeurs et de présidents de CME des hôpitaux décrivent un phénomène de professionnalisation des intérimaires, et plusieurs acteurs ont même souligné l'effet pernicieux de l'instauration d'un plafond de rémunération qui peut contribuer à tirer à la hausse les rémunérations des intérimaires.

Le plafonnement des dépenses d'intérim médical à compter de 2017 n'a ainsi nullement contribué à réguler les conditions de recours à l'emploi temporaire ; il en a surtout modifié la forme, en favorisant le recours à des contrats de gré à gré plutôt qu'à l'intérim. Le développement des contrats de type 2 constitue ainsi depuis quelques années « un facteur majeur de dérégulation des rémunérations des praticiens hospitaliers », même s'il a pu contribuer à fidéliser certains praticiens à l'hôpital public.

Pour les personnels paramédicaux, l'important recours aux contrats de gré à gré risque d'aboutir aux mêmes stratégies de contournement et à des difficultés de contrôle qu'anticipe la DGOS, sans toutefois disposer à date de solution pour bien calibrer le contrôle comptable sur ces contrats.

· Au global, le développement du recours à l'intérim et à de nouvelles formes d'emploi temporaire est symptomatique d'une démographie professionnelle sous tension et d'une moindre attractivité de l'exercice hospitalier.

La perte d'attractivité constatée est multifactorielle : elle tient à la fois à la pénibilité particulière associée à l'exercice hospitalier, liée tant à la mission de permanence des soins qu'à la charge en soins que représentent les patients complexes, ainsi qu'à l'importance accordée à la possibilité de concilier les contraintes de la vie professionnelle avec la vie personnelle.

Or l'intérim est perçu comme un mode d'exercice offrant une grande liberté d'organisation de son temps de travail, outre les rémunérations avantageuses qu'il permet. Il en résulte une offre intérimaire parfois volatile, qui contribue à faire peser des risques sur la continuité des soins dans certains territoires.

Pour les professions les plus en tension (Iade, Ibode, Merm), la concurrence dans le recrutement s'observe non seulement avec le secteur privé lucratif et le secteur libéral, mais également entre établissements publics.

· Si les acteurs soulignent la nécessité du recours à l'intérim, ils indiquent également qu'un recours excessif à l'intérim dans certains services nuit à la qualité et à la sécurité des soins dès lors que les professionnels intérimaires méconnaissent leur environnement de travail, les protocoles ainsi que l'équipe soignante à laquelle ils doivent s'intégrer dans l'urgence. De plus, les établissements ne maîtrisent pas, en général, le profil des intérimaires auxquels ils recourent et dont les compétences seraient parfois aléatoires. Enfin et au global, un recours prépondérant et régulier à l'intérim porte atteinte à la stabilité des équipes et des organisations.

· Pour atteindre les objectifs que se fixe la présente mesure, l'encadrement de l'intérim devrait donc s'accompagner :

- d'une politique d'attractivité et de fidélisation vis-à-vis des personnels hospitaliers, qui intègre la valorisation des sujétions associées à une pénibilité particulière (travail de nuit et de week-end), l'organisation des plannings et d'une charge de travail soutenable, la construction de parcours de carrière et l'accès à la formation ;

- du renforcement des organisations permettant de mutualiser les ressources humaines et les lignes de permanence des soins à l'échelle territoriale ;

- d'une consolidation de la démographie des professionnels paramédicaux, ce qui implique d'augmenter les quotas de formation de certains professionnels tels que les infirmiers.

Si les revalorisations actées dans le cadre du Ségur de la santé et les mesures ciblées en faveur de la fonction publique ont renforcé l'attractivité de la fonction publique hospitalière, la commission souligne la nécessité de poursuivre la politique engagée dès 2020 d'augmentation du nombre d'étudiants infirmiers et d'élèves aides-soignants.

3. Un dispositif néanmoins utile à soutenir

Une fois ces réserves exprimées, la commission adhère néanmoins à l'économie générale du dispositif qui vise à maîtriser le caractère inflationniste du recours à l'intérim. Elle considère toutefois que la rédaction proposée peut être renforcée.

· En premier lieu, l'opportunité de conditionner l'encadrement de l'intérim à l'existence d'une tension sur les ressources humaines n'est pas certaine, dès lors que 80 % des établissements publics de santé déclarent faire face à des problématiques de recrutement de façon permanente et 19 % de façon ponctuelle. La mention de cette condition apparaît superfétatoire, et c'est pourquoi la commission propose de la supprimer.

· En deuxième lieu, la commission relève l'imprécision de la rédaction relative au rapport qui devrait exister entre le coût d'un personnel intérimaire et celui d'un personnel permanent et reflétant une tension sur les ressources humaines. En effet, la rédaction proposée par le Gouvernement ne permet pas de saisir avec suffisamment de netteté l'intention du législateur. La commission rejoint le principe d'un plafond relativement plus élevé que la rémunération moyenne des personnels permanents, pour conserver une soupape d'attractivité afin de pallier des situations de tension qui doivent demeurer ponctuelles. Elle propose donc de modifier la rédaction initiale pour que l'existence d'un différentiel significatif de rémunération entre un intérimaire et un personnel permanent soit clairement inscrite dans le texte. Les conditions de détermination de ce différentiel sont renvoyées à un décret.

· En troisième lieu, la commission considère que le principe de ce dispositif ne saurait être aléatoire et doit s'imposer pour l'ensemble des établissements publics de santé et médicosociaux.

En conséquence de ces observations, elle a adopté l'amendement n° 170.

· Enfin, la rapporteure considère que la réussite de ce dispositif, ciblé sur les seuls établissements du secteur public, est largement dépendante des pratiques des établissements du secteur privé lucratif et non lucratif, qui ne seraient pas soumis au même dispositif de plafonnement de leurs dépenses d'intérim. À cet égard, elle rappelle que la mise en oeuvre du contrôle des dépenses d'intérim médical en 2023 s'est accompagnée d'un engagement de l'ensemble des fédérations - FHF, Fehap, Unicancer, FHP, Fnehad - visant à appliquer de façon uniforme les montants plafonds des prestations d'intérim fixés pour les établissements du secteur public.

La rapporteure appelle au renouvellement de cet engagement pour lutter collectivement contre la surenchère des dépenses d'intérim et éviter une concurrence salariale dérégulée entre secteurs. Elle souhaite que le Gouvernement encourage les acteurs à adhérer à un tel engagement au niveau national.

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

Article 19
Lutter contre les pénuries de produits de santé

Cet article vise à sécuriser l'approvisionnement des médicaments et améliorer l'anticipation et la gestion des ruptures, en étendant le champ d'application divers leviers d'épargne de médicaments, en permettant l'identification et la prise en charge de dispositifs médicaux alternatifs en cas de rupture, en renforçant les sanctions visant les exploitants ne respectant pas leurs obligations et en améliorant l'articulation entre le système de tarification classique et les procédures d'achat public de médicaments.

La commission propose d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.

I - Le dispositif proposé

A. Les phénomènes de pénurie s'aggravent de manière constante et justifient la mise en place de dispositifs visant à les juguler

1. L'aggravation des phénomènes de pénurie de médicaments

 Les pénuries et tensions d'approvisionnement en médicaments constituent un phénomène complexe, mondial et en constante aggravation, alimenté par de nombreux facteurs structurels. Parmi eux, une commission d'enquête sénatoriale629(*) identifiait récemment :

- la rapide augmentation de la demande mondiale, solvabilisée de manière croissante par la mise en place et le renforcement des systèmes de protection sociale nationaux630(*) ;

- la fragmentation industrielle et géographique du secteur, portée par le recours croissant des laboratoires à la sous-traitance d'étapes de fabrication, singulièrement pour les produits matures peu rentables631(*) ;

- la production en flux tendu, rendant l'approvisionnement sensible à des incidents industriels pourtant fréquents et imprévisibles632(*) ;

- les choix stratégiques de certains laboratoires, privilégiant les produits innovants et onéreux au détriment de produits matures moins avantageusement tarifés633(*), illustrés récemment par les débats entourant une possible vente du laboratoire Biogaran par Servier634(*) ou de la filiale Opella par Sanofi635(*).

· Face à l'aggravation des difficultés d'approvisionnement, les pouvoirs publics ont cherché ces dernières années à mieux appréhender les phénomènes de pénurie de médicaments.

Depuis l'intervention d'un décret de septembre 2012636(*) et, au niveau législatif, de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2024, les ruptures d'approvisionnement sont définies dans le code de la santé publique. Elles correspondent à l'incapacité pour une pharmacie d'officine ou une pharmacie à usage intérieur de dispenser un médicament à un patient dans un délai de 72 heures637(*), qui peut être réduit à l'initiative du pharmacien lorsque la poursuite optimale du traitement l'impose638(*).

Ces ruptures d'approvisionnement peuvent être imputables à une rupture de stock, laquelle est définie comme l'impossibilité de fabriquer ou d'exploiter un médicament639(*).

Les obligations déclaratives des exploitants ont, également, progressivement été renforcées. La loi de modernisation de notre système de santé de 2016640(*) a, ainsi, fait obligation aux industriels de déclarer à l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) tout risque de rupture et toute rupture de stock sur les médicaments qu'ils exploitent. La loi relative à l'organisation et à la transformation du système de santé (OTSS) de 2019641(*) a renforcé cette obligation en précisant que les exploitants doivent procéder à cette déclaration dès qu'ils ont connaissance de tels risques642(*).

 Le nombre de ruptures de stock et de risques de rupture déclarés par les exploitants à l'ANSM a fortement augmenté ces dernières années. En 2023, 4 925 déclarations ont ainsi été adressées à l'ANSM, dont 1 555 pour des ruptures de stock et 3 370 pour des risques de rupture. Le nombre total de déclarations réalisées a été multiplié par près de 2,3 depuis 2021 et près de 3,3 depuis 2019.

Nombre de ruptures de stock et de risques de rupture déclarés
à l'ANSM par les exploitants (2014-2023)

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après des données publiées par l'ANSM

Les ruptures et risques de rupture recensés touchent l'ensemble des quatorze classes thérapeutiques distinguées par la nomenclature anatomique, thérapeutique et chimique (dite « classification ATC »). D'après l'ANSM, concentrent toutefois le plus fort nombre de difficultés déclarées les médicaments :

- du système cardio-vasculaire (1 430 déclarations en 2023) ;

- du système nerveux (1 086 déclarations en 2023) ;

- anti-infectieux à usage systémique (679 déclarations en 2023)643(*).

Les difficultés d'approvisionnement concernent, enfin, majoritairement des produits matures. Selon la commission d'enquête sénatoriale relative à la pénurie de médicaments et aux choix de l'industrie pharmaceutique française, entre 60 % et 70 % des déclarations de rupture visent des médicaments dont l'autorisation de mise sur le marché (AMM) a été octroyée il y a plus de dix ans644(*). Les causes les plus fréquemment mises en avant tiennent à des capacités de production insuffisante, aux augmentations conjoncturelles de la demande et au défaut d'approvisionnement en matière première645(*).

2. Le renforcement des obligations des exploitants et distributeurs

Pour juguler les phénomènes de pénurie, les contraintes légales et réglementaires imposées aux exploitants et aux distributeurs ont progressivement été renforcées. Pour l'essentiel, celles-ci sont concentrées sur les médicaments d'intérêt thérapeutique majeur (MITM), que la loi « santé » de 2016646(*) a définis comme étant ceux pour lesquels une interruption de traitement :

- est susceptible de mettre en jeu le pronostic vital des patients à court ou moyen terme ;

- ou représente une perte de chance importante pour les patients au regard de la gravité ou du potentiel évolutif de la maladie647(*).

 Les exploitants ont, d'abord, été responsabilisés de manière croissante dans l'anticipation et la gestion des ruptures.

En matière d'anticipation, les industriels sont, depuis la LFSS pour 2020648(*), tenus d'établir et d'actualiser un plan de gestion des pénuries (PGP) pour chacun des MITM qu'ils exploitent649(*). Ces derniers doivent, notamment, tenir compte des risques relatifs au cycle de fabrication et de distribution de la spécialité concernée et identifier les médicaments susceptibles de constituer une alternative thérapeutique. Ils peuvent prévoir d'autres sites de fabrication de matières premières, de formulation ou de conditionnement650(*).

Par ailleurs, les industriels sont également appelés à permettre une meilleure gestion des périodes de tension. Ils sont tenus de disposer de centres d'appel d'urgence permanents accessibles aux pharmaciens651(*) et de mettre en oeuvre, en situation de rupture et en lien avec l'ANSM, les mesures prévues par les PGP transmis652(*).

Surtout, la LFSS pour 2020653(*) a contraint les industriels à constituer un stock de sécurité destiné au marché national, destiné à être exploité dans les périodes de tension pour laisser aux acteurs le temps de mettre en oeuvre les mesures de résolution appropriées. Ces stocks doivent correspondre à au moins deux mois de couverture des besoins pour les MITM et une semaine pour les médicaments ne relevant pas de cette catégorie. Pour les MITM ayant fait l'objet de risques de rupture ou de ruptures réguliers dans les deux années civiles précédentes, le directeur général de l'ANSM peut augmenter le stock de sécurité obligatoire, jusqu'à quatre mois de couverture des besoins654(*).

 Les obligations des grossistes-répartiteurs ont également été renforcées.

La loi « Médicaments » de 2011655(*), précisée par un décret de septembre 2012656(*), leur a ainsi imposé de respecter les obligations de service public suivantes :

- disposer d'un assortiment de médicaments comportant au moins neuf dixièmes des présentations commercialisées en France ;

- livrer toute commande dans les vingt-quatre heures au sein de leurs territoires respectifs de répartition ;

- être en mesure de satisfaire la consommation de sa clientèle habituelle durant au moins deux semaines et à tout moment, à l'exception des samedis après 14 heures, dimanches et jours fériés ;

- participer, le samedi après 14h, le dimanche et les jours fériés, à un système d'astreinte inter-entreprises destiné à répondre aux éventuels besoins urgents signalés par les pharmaciens d'officine de garde ou le préfet657(*).

Depuis 2016, la loi interdit, enfin, aux grossistes-répartiteurs d'exporter des MITM pour lesquels une rupture ou un risque de rupture a été mis en évidence et qui figurent, en conséquence, sur une liste établie par l'ANSM658(*). Ils ne sont, par ailleurs, autorisés à exporter les autres médicaments que dans la mesure où ils ont rempli leurs obligations de service public659(*).

 La commission d'enquête sénatoriale précitée a toutefois souligné que ces obligations demeuraient inégalement appliquées.

La qualité des PGP transmis est, selon l'ANSM elle-même et d'après les contrôles réalisés par la commission d'enquête, varie fortement d'un exploitant à l'autre660(*).

Si l'ANSM dispose d'un pouvoir de sanction financière introduit par la loi « Médicaments » et progressivement renforcé depuis, susceptible de s'appliquer aux exploitants ne respectant pas les obligations prévues661(*), ces sanctions demeuraient, jusqu'à 2022, peu utilisées. Elles n'ont concerné, entre 2018 et 2022 que des manquements à l'obligation de déclaration d'une rupture ou d'un risque de rupture662(*).

Toutefois, le nombre et le montant des sanctions proposées par l'ANSM ont fortement augmenté depuis deux ans. Six sanctions ont été prononcées par l'ANSM en 2023, dont trois ont concerné des manquements aux obligations relatives à la constitution d'un stock de sécurité, pour un montant total de près de 560 000 euros. En 2024, l'ANSM a par ailleurs d'ores et déjà prononcé 36 sanctions, dont 33 concernaient des manquements à l'obligation de constitution d'un stock renforcé de quatre mois et une concernait l'obligation d'établir un PGP, pour un montant total de plus de 8,25 millions d'euros.

Nombre et montant des sanctions financières
prononcées par l'ANSM (2018-2024)

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après des données publiées par l'ANSM

3. Les mesures prises par l'ANSM et les efforts de maîtrise des prescriptions et des dispensations

Indépendamment des obligations imposées aux exploitants et distributeurs, les pouvoirs publics ont pris des mesures ces dernières années visant à mieux gérer ou prévenir les phénomènes de pénurie.

 Plusieurs évolutions législatives et réglementaires ont d'abord visé à mieux maîtriser le volume des prescriptions ou améliorer la gestion des pénuries.

Pour maîtriser les prescriptions d'antibiotiques, encore importantes en France, la réalisation de tests rapides d'orientation diagnostique (Trod) par les pharmaciens et d'autres professionnels de santé a, ainsi, été permise par un arrêté de 2016663(*) et progressivement encouragée. La LFSS pour 2020 a, ainsi, créé le dispositif des ordonnances conditionnelles664(*), permettant au prescripteur de conditionner la délivrance de certains médicaments à la réalisation de tests et à l'obtention de résultats déterminés. La LFSS pour 2024665(*) a, par ailleurs, permis aux pharmaciens de délivrer sans ordonnance certains médicaments après réalisation d'un Trod666(*).

D'autres mesures ont visé à favoriser la dispensation de médicaments alternatifs en cas de rupture. La loi « santé » de 2016 a, ainsi, permis à l'ANSM d'autoriser les pharmacies d'officine à dispenser des médicaments disposant d'une autorisation d'importation de l'ANSM en situation de rupture d'un MITM667(*). La loi relative à l'organisation et à la transformation du système de santé de 2019 a, par ailleurs, autorisé les pharmaciens, en cas de rupture ou de risque de rupture de stock, à remplacer un MITM prescrit par un autre médicament conformément à une recommandation établie par l'ANSM et publiée sur son site internet668(*).

La loi de 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire a, en outre, permis la délivrance à l'unité de certains médicaments en officine, lorsque leur forme le permet669(*).

La LFSS pour 2024 a, enfin, entendu renforcer les leviers d'épargne de médicaments en permettant au ministre chargé de la santé, en cas de rupture d'approvisionnement, de rendre obligatoire par arrêté le recours à l'ordonnance de dispensation conditionnelle ou la délivrance de médicaments à l'unité. Ces mesures doivent prendre fin sans délai lorsqu'elles ne sont plus nécessaires670(*).

 L'ANSM est amenée, par ailleurs, à intervenir directement lorsqu'une rupture ou un risque de rupture lui est signalé sur un MITM, en tenant compte du PGP transmis par l'exploitant.

L'Agence indique ainsi qu'en 2023, 47,5 % des déclarations de rupture ou de risque de rupture reçues ont donné lieu à au moins une mesure de gestion de pénurie671(*). Plus de 90 % des mesures prises ont consisté en :

- la mise en oeuvre d'un contingentement quantitatif, soit d'une distribution en quantité limitée pour maintenir une livraison continue et équitable des stocks disponibles ;

- la constitution d'un stock de dépannage, permettant de répondre à d'éventuels besoins urgents.

Mesures prises par l'ANSM en 2023
suite à des déclarations de rupture ou de risque de rupture

Source : commission des affaires sociales, d'après des données publiées par l'ANSM

La LFSS pour 2024 a renforcé et sécurisé juridiquement les capacités d'action de l'ANSM, en prévoyant qu'en cas de rupture ou de risque de rupture d'un MITM ou d'un vaccin, son directeur général peut, après mise en oeuvre d'une procédure contradictoire, prendre les mesures de police sanitaire nécessaires pour garantir un approvisionnement approprié et continu672(*).

4. La situation des dispositifs médicaux

· Des difficultés d'approvisionnement sont également observées dans le secteur, très hétérogène, des dispositifs médicaux.

Selon l'ANSM, auditionnée par la rapporteure, 104 signalements de rupture auraient été recensés, ainsi, en 2022, 116 en 2023 et 96 dans les dix premiers mois de l'année 2024673(*).

Un rapport de la commission des affaires sociales du Sénat constatait, par ailleurs, en 2022, que « Ces ruptures concerneraient une grande variété de dispositifs, des consommables (électrodes de défibrillation, consommable de pompe à perfusion) aux dispositifs implantables (assistance circulatoire mécanique, prothèses vasculaires). En l'absence de procédure de déclaration, par les opérateurs, des risques de pénurie, l'ANSM n'est pas toujours en mesure d'identifier en amont ni de résoudre ces difficultés »674(*).

· Si l'encadrement légal et réglementaire de l'approvisionnement en médicaments a progressivement été enrichi ces dernières années, il demeure en revanche lacunaire dans le secteur des dispositifs médicaux.

Des dispositions ont été adoptées dans la loi de 2023 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne, qui demeurent toutefois largement inappliquées. Celles-ci faisaient obligation aux opérateurs identifiant un risque de rupture sur des dispositifs médicaux indispensables de mettre en oeuvre les mesures nécessaires pour éviter sa réalisation et, dans le cas où celles-ci se révèleraient insuffisantes, d'informer l'ANSM de l'existence de ce risque, sous peine de sanction financière675(*).

Les actes réglementaires nécessaires à l'application de ces dispositions n'ont toutefois pas encore été publiés et le Gouvernement met en avant, pour le justifier, un risque d'incompatibilité avec le droit de l'Union européenne676(*).

B. L'article 19 vise à sécuriser l'approvisionnement en médicaments

1. L'extension de dispositifs d'épargne de médicaments

Le 1° du I de l'article 19 modifie l'article L. 5121-33-1 du code de la santé publique pour permettre de recourir, en cas de rupture d'approvisionnement ou afin de préserver la disponibilité des médicaments dont la demande fait l'objet de variations saisonnières, à deux dispositifs d'épargne de médicaments créés par la LFSS pour 2024 et limités jusque-là aux situations de rupture. Le ministre chargé de la santé pourra désormais, dans ces situations, rendre obligatoire par arrêté le recours à l'ordonnance de dispensation conditionnelle ou la délivrance de médicaments à l'unité.

Le 2° du I étend, par ailleurs, la faculté de substitution, par le pharmacien d'officine, d'un MITM conformément à une recommandation établie par l'ANSM, jusque-là limitée aux situations de rupture. Désormais, les pharmaciens pourront procéder à de telles substitutions lorsqu'un simple risque de rupture a été mis en évidence ou déclaré.

Selon la fiche d'évaluation préalable annexée au projet de loi, l'objectif est de mieux « anticiper une éventuelle rupture sèche en remplaçant par un autre produit, toujours sur la base d'une recommandation de l'ANSM. » Le Gouvernement indique également attendre de la délivrance à l'unité d'amoxicilline et amoxicilline - acide clavulanique une économie d'environ 6 millions d'euros, correspondant aux médicaments inutilement dispensés à la boîte677(*).

2. L'identification et la prise en charge de dispositifs médicaux alternatifs en cas de rupture

Le 3° du I, complète le titre Ier du livre II de la cinquième partie du code de la santé publique, par un nouveau chapitre relatif à la lutte contre les ruptures d'approvisionnement de dispositifs médicaux composé d'un nouvel article L. 5215-1.

Celui-ci prévoit que, lorsque l'interruption ou la cessation attendue de la fourniture d'un dispositif médical inscrit sur la liste des produits et prestations remboursables (LPPR) est susceptible d'entraîner un préjudice grave ou un risque de préjudice grave pour les patients ou la santé publique, les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale peuvent déterminer par arrêté, pris sur proposition de l'ANSM, les dispositifs médicaux alternatifs et les indications correspondantes ainsi que les conditions dérogatoires de leur prise en charge par l'assurance maladie.

Lorsqu'un dispositif médical alternatif n'est pas inscrit sur la LPPR et qu'il n'existe aucune alternative disponible qui soit prise en charge par l'assurance maladie, son exploitant peut bénéficier d'une prise en charge dérogatoire temporaire dans la limite du tarif de prise en charge du dispositif indisponible. Cette prise en charge est accordée pour une durée maximale d'un an. Le dispositif doit mis sur le marché conformément à la réglementation européenne applicable ou bénéficier d'une autorisation de l'ANSM.

Un arrêté ministériel peut modifier les conditions d'octroi, de distribution et de facturation des dispositifs concernés. Les modalités de la prise en charge dérogatoire temporaire sont, par ailleurs, définies par un décret en Conseil d'État.

3. Le renforcement des sanctions visant les exploitants

L'article 19 vise, en outre, à renforcer les sanctions applicables aux exploitants qui ne respecteraient pas leurs obligations en matière de sécurisation de l'approvisionnement.

· Le a) du 4° du I, d'abord, porte, d'abord, les astreintes pouvant être assorties à une sanction de l'ANSM, tant que l'exploitant ne s'est pas conformé à ses prescriptions, de 30 % à 50 % du chiffre d'affaires journalier moyen réalisé en France par l'entreprise au titre du dernier exercice clos pour le produit considéré. Il rend, par ailleurs, cette astreinte supérieure au droit commun applicable à deux nouveaux manquements :

- le fait, pour l'exploitant qui cesse la fabrication d'un MITM ne faisant plus l'objet d'une protection au titre des droits de la propriété intellectuelle ou industrielle, quand l'ANSM l'informe que les alternatives disponibles ne permettent pas de couvrir le besoin de manière pérenne, de ne pas rechercher activement une autre entreprise pour assurer la reprise effective de l'exploitation du médicament678(*) ;

- le fait, pour l'exploitant d'un MITM ou d'un vaccin, de ne pas mettre en oeuvre les mesures de police sanitaire prises, en cas de rupture ou de risque de rupture, par le directeur général de l'ANSM679(*).

· Le b) du 4° du I porte le montant des sanctions pouvant être prononcées par l'ANSM de 30 % à 50 % du chiffre d'affaires réalisé lors du dernier exercice clos pour le produit ou le groupe de produits concernés. Il porte également le plafond de cette sanction d'un million à cinq millions d'euros pour une personne morale.

Il rend également cette sanction applicable à de nouveaux manquements en matière de publicité auprès du public, notamment pour un médicament soumis à prescription médicale, remboursable, ou dont l'autorisation de mise sur le marché ou l'enregistrement l'interdit680(*).

· Enfin, le c) du 4° modifie le IV de l'article L. 5471-1 du code de la santé publique, pour autoriser l'ANSM à publier les décisions de sanction financière prononcées sur son site internet, pour une période d'un an à compter de leur publication. Il précise toutefois que cette durée de publication peut être réduite par l'ANSM dans des conditions définies par décret en Conseil d'État.

Jusque-là, les sanctions financières ne pouvaient être publiées sur le site internet de l'ANSM que pendant un mois ou, le cas échéant, jusqu'à la régularisation de la situation681(*).

La fiche d'évaluation préalable annexée au projet de loi précise que ces mesures d'aggravation des sanctions financières, qui visent à « en renforcer le caractère dissuasif » devront toutefois être articulées « avec la formalisation d'une doctrine sur les sanctions »682(*).

4. L'amélioration de l'articulation entre le système de tarification classique et les procédures d'achat public de médicaments

Enfin, le II de l'article 19 vise à mieux articuler le système de tarification classique des médicaments et les procédures d'achat public.

Pour ce faire, le 1° du II modifie l'article L. 162-16-4 du code de la sécurité sociale, pour prévoir que la fixation du prix de vente au public des médicaments inscrits sur la liste des médicaments remboursables dispensés en ville tient compte du prix ou du tarif du médicament, déduction faite des différentes remises ou taxes en vigueur, fixé dans le cadre d'un achat national par Santé publique France683(*) ou d'un achat conjoint européen684(*).

Le 2° du II insère, dans le code de la sécurité sociale, un nouvel article L. 162-19-2 prévoyant que, lorsqu'une spécialité pharmaceutique est acquise par Santé publique France ou dans le cadre d'un achat conjoint européen pour répondre à un besoin de santé publique et mise à la disposition des patients en vue de son administration, les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale peuvent suspendre les procédures d'inscription au remboursement et de tarification pour cette spécialité et l'ensemble des spécialités comparables ou à même visée thérapeutique, pour une durée ne pouvant excéder l'épuisement du stock acquis, dans la limite de deux ans.

Dans la fiche d'évaluation préalable annexée au projet de loi, le Gouvernement indique que cette suspension permettrait « d'éviter la coexistence de deux régimes concurrents d'accès aux spécialités et le risque de double paiement pour l'assurance maladie »685(*).

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

Le Gouvernement a transmis cet article au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

La commission a favorablement accueilli ces dispositions, destinées à confier au Gouvernement et à l'ANSM de nouveaux outils de lutte contre les ruptures d'approvisionnement. Elle relève qu'à la suite de la commission d'enquête sénatoriale de 2023 et malgré les nombreuses mesures prises, ce phénomène a continué à s'aggraver.

1. Sur les sanctions financières et les dispositifs médicaux

· La commission a soutenu, d'abord, le renforcement des sanctions pouvant être prononcées par l'ANSM à l'encontre des exploitants ne respectant pas leurs obligations en matière de sécurisation de l'approvisionnement.

Elle observe, d'abord, que l'ANSM a veillé à préciser sa politique de sanction ces dernières années. L'agence a ainsi publié, en août 2022, de nouvelles lignes directrices relatives aux sanctions financières, décrivant notamment la méthode suivie pour déterminer leur montant afin d'en améliorer la prévisibilité686(*).

Par ailleurs, l'ANSM semble déterminée à renforcer les contrôles diligentés et sanctions prononcées. Alors que la commission d'enquête sénatoriale regrettait que les sanctions prononcées, entre 2018 et 2022, demeurent « particulièrement faibles en nombre comme en montant », ainsi que « l'absence de diversité dans les manquements sanctionnés », d'importants progrès semblent avoir été réalisés depuis. L'ANSM a, ainsi, sanctionné pour la première fois, en 2023 et 2024, des manquements à l'obligation de production des PGP ou de constitution de stocks de sécurité. Le montant cumulé de ces sanctions s'est révélé très supérieur à ceux constatés les années précédentes.

Afin d'assurer l'effectivité des obligations faites aux industriels en matière d'approvisionnement, la commission juge souhaitable que les manquements les plus graves puissent faire l'objet de sanctions renforcées. Elle appelle l'ANSM à mettre à jour sa doctrine dans l'objectif de maintenir la proportionnalité et la prévisibilité des sanctions prononcées.

Enfin, la commission a relevé que l'allongement de la durée de publicité des sanctions, sur le site internet de l'ANSM, avait été recommandé par la commission d'enquête sénatoriale687(*). Elle a soutenu cette mesure, destinée à accroître le risque réputationnel associé aux sanctions et, en conséquence, leur caractère dissuasif.

· La commission a également soutenu les dispositions du texte permettant l'identification et la prise en charge de dispositifs médicaux alternatifs, lorsqu'une rupture d'approvisionnement est susceptible d'entraîner de graves effets sanitaires.

Elle souligne que les tensions d'approvisionnement semblent s'aggraver dans le secteur des dispositifs médicaux qui ne fait pas encore l'objet, pour autant, d'un encadrement comparable à celui mis en place pour les médicaments.

2. Sur les leviers d'épargne de médicaments

La commission a accueilli les dispositions visant à renforcer et étendre les leviers d'épargne de médicaments avec davantage de circonspection. Ces outils, devant permettre de réduire les volumes dispensés des médicaments présentant un risque de rupture, apparaissent, en effet, inégalement efficaces et opportuns.

· En particulier, la commission n'a pas jugé souhaitable d'étendre la possibilité, pour le Gouvernement, de rendre obligatoire la dispensation à l'unité aux situations de risque de rupture et à l'ensemble des médicaments dont la demande fait l'objet de variations saisonnières. Elle avait déjà, lors de l'examen du PLFSS pour 2024, souligné qu'une telle mesure n'avait aucun effet utile sur les traitements chroniques, dont la dispensation demeurera récurrente, et se révélait inapplicable aux formes galéniques concentrant pourtant les difficultés d'approvisionnement, soit les formes pédiatriques et injectables.

Au surplus, les représentants des pharmaciens d'officine, auditionnés, ont souligné qu'une telle mesure serait pour eux contraignante et chronophage. Celle-ci apparaît d'autant plus difficilement acceptable pour la profession que la fiche d'évaluation préalable, jointe par le Gouvernement au projet de loi déposé, indique qu'aucun surcoût n'est attendu de la mesure, les pharmaciens atteignant déjà le plafond applicable à la rémunération dédiée à la dispensation à l'unité par la seule délivrance de stupéfiants.

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, la commission a jugé souhaitable de supprimer du texte transmis les dispositions étendant ce levier d'épargne. Elle a, pour cela, adopté l'amendement n° 173 de la rapporteure.

· La commission a, en revanche, soutenu les dispositions du texte visant à étendre la faculté, pour le ministre, de rendre obligatoire par arrêté le recours à l'ordonnance de dispensation conditionnelle.

Le Sénat avait adopté, à l'initiative de la commission, un amendement en ce sens lors de l'examen du PLFSS pour 2024688(*) qui n'avait, finalement, pas été retenu par le Gouvernement dans le texte sur lequel il avait engagé, en nouvelle lecture, sa responsabilité à l'Assemblée nationale.

La commission observe, en effet, que les ordonnances de dispensation conditionnelles permettent de favoriser le bon usage des médicaments et, notamment, de limiter la surconsommation d'antibiotiques. Elle relève que les médecins se sont engagés, dans la convention conclue en 2024 avec l'assurance maladie, à réduire les prescriptions d'antibiotiques par l'utilisation de Trod ou, à défaut, d'ordonnances conditionnelles689(*). La réalisation de Trod apparaît, par ailleurs, désormais dûment valorisée dans la convention pharmaceutique690(*).

· La commission a également jugé souhaitable une extension de la faculté de substitution, par le pharmacien d'officine, d'un MITM en cas de tension d'approvisionnement.

Elle a, toutefois, jugé que les dispositions du texte transmis demeuraient, en la matière, trop restrictives. En étendant la faculté de substitution aux situations de risque de rupture, tout en subordonnant celle-ci à la publication préalable d'une recommandation établie par l'ANSM, elles ne permettront pas aux pharmaciens de contribuer efficacement à la maîtrise des volumes dispensés.

Les représentants des pharmaciens d'officine ont en effet souligné que ces recommandations demeurent « exceptionnelles » et que, lorsqu'elles ne sont pas publiées, « les pharmaciens ne disposent ni d'alternatives, ni de moyens pour proposer une solution au patient ».

En conséquence, la rapporteure appelle le Gouvernement à faciliter encore la substitution de médicaments en rupture ou présentant un risque de rupture par les pharmaciens d'officine, en ne subordonnant pas celle-ci à la publication préalable d'une recommandation de l'ANSM.

3. Sur l'amélioration de l'effectivité des obligations tenant à l'établissement de PGP et à la constitution de stocks de sécurité

Enfin, la commission a souhaité améliorer l'effectivité des obligations faites aux exploitants d'établir des PGP et de constituer des stocks de sécurité, en adoptant deux amendements de sa rapporteure.

· L'amendement n° 172 vise à permettre au directeur général de l'ANSM de soumettre les PGP de certains MITM, faisant l'objet de ruptures ou de risques de rupture réguliers, à des exigences renforcées de formalisation.

La commission d'enquête sénatoriale avait, en effet, relevé la grande hétérogénéité des PGP et appelé l'ANSM à « assurer un contrôle effectif de la crédibilité et de l'exhaustivité des PGP, en priorisant les médicaments essentiels ou à fort risque de rupture »691(*).

· La commission a également adopté un amendement n° 171 qui prévoit que le décret en Conseil d'État fixe les conditions dans lesquelles les stocks de sécurité constitués doivent être utilisés, en cas de rupture ou de risque de rupture d'approvisionnement, pour maintenir un approvisionnement approprié et continu du marché national.

La commission propose d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.

Article 20
Conditionner la prise en charge de certains dispositifs médicaux numériques à une utilisation effective par le patient

Cet article prévoit de renforcer l'utilisation des données d'usage des dispositifs médicaux numériques.

Il vise à aménager le cadre d'inscription des dispositifs médicaux numériques sur la liste des produits et prestations afin d'ouvrir la possibilité de subordonner ou de moduler la prise en charge par l'Assurance maladie en fonction des données d'utilisation effective.

L'article fixe également le principe d'une prise en compte de l'observance dans la stratégie thérapeutique, puisque le prescripteur sera amené à réévaluer à intervalles réguliers la pertinence et l'efficacité du dispositif médical numérique en fonction des remontées de données - si toutefois le patient consent à les partager.

La commission propose d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.

I - Le dispositif proposé : une prise en compte de l'observance dans la prise en charge au service d'une amélioration de la pertinence des prescriptions

A. Pour être pris en charge en ville par la sécurité sociale, un dispositif médical doit témoigner d'un service attendu suffisant pour justifier son inscription à la liste des produits et prestations

1. L'inscription sur la liste des produits et prestations remboursables par la sécurité sociale : un préalable nécessaire à la prise en charge des dispositifs médicaux

Pour être éligible à une prise en charge partielle ou totale en ville par la sécurité sociale, un dispositif médical doit être inscrit sur une liste de remboursement : la liste des produits et prestations remboursables (LPP), mentionnée à l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale. La subordination du remboursement à l'inscription sur une liste est ordinaire en droit de la sécurité sociale : il existe également une liste des actes et prestations pour les actes ou prestations réalisés par les professionnels de santé692(*), ou encore une liste des médicaments remboursables en ville693(*).

L'inscription sur la LPP est prononcée par arrêté des ministres de la santé et de la sécurité sociale, le cas échéant après avis de la commission nationale d'évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé (Cnedimts), constituée au sein de la Haute Autorité de santé (HAS)694(*).

Qu'est-ce qu'un dispositif médical ?

L'article L. 5211-1 du code de la santé publique et le droit européen695(*) définissent les dispositifs médicaux comme « tout instrument, appareil, équipement, logiciel, implant, réactif, matière ou autre article, destiné par le fabricant à être utilisé, seul ou en association, chez l'homme pour l'une ou plusieurs des fins médicales mentionnées ci-après et dont l'action principale voulue dans ou sur le corps humain n'est pas obtenue par des moyens pharmacologiques ou immunologiques ni par métabolisme, mais dont la fonction peut être assistée par de tels moyens :

1° Diagnostic, prévention, surveillance, prédiction, pronostic, traitement ou atténuation d'une maladie ;

2° Diagnostic, contrôle, traitement, atténuation d'une blessure ou d'un handicap ou compensation de ceux-ci ;

3° Investigation, remplacement ou modification d'une structure ou fonction anatomique ou d'un processus ou état physiologique ou pathologique ;

4° Communication d'informations au moyen d'un examen in vitro d'échantillons provenant du corps humain, y compris les dons d'organes, de sang et de tissus. »

Le même article caractérise également les accessoires de dispositif médical comme « tout article qui, sans être lui-même un dispositif médical, est destiné par son fabricant à être utilisé avec un dispositif médical donné, ou avec plusieurs d'entre eux, pour permettre une utilisation de ce dispositif médical conforme à sa destination, ou pour contribuer spécifiquement et directement à la fonction médicale du dispositif médical selon sa destination ».

On retrouve, sous le terme de dispositif médical, 20 000 types de produits de santé aussi différents que des lunettes, des véhicules pour personnes handicapées, des béquilles, des masques pour traiter l'apnée du sommeil, des sparadraps, des prothèses capillaires, des implants mammaires, des prothèses de hanche, des thermomètres ou des cathéters. Certains dispositifs médicaux dits « numériques » fonctionnent avec un logiciel informatique : c'est par exemple le cas des dispositifs médicaux permettant la télésurveillance médicale pour des insuffisances rénale, cardiaque ou respiratoire, le diabète ou l'oncologie.

Seuls les dispositifs médicaux à usage individuel et matures peuvent être inscrits sur la LPP, sous réserve qu'ils apportent une plus-value thérapeutique, diagnostique ou de compensation du handicap696(*).

L'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale prévoit également que l'inscription sur la liste peut être « subordonnée au respect de spécifications techniques, d'indications thérapeutiques ou diagnostiques et de conditions particulières de prescription, d'utilisation et de distribution ». Pour être pris en charge, les dispositifs médicaux doivent notamment être marqués CE, c'est-à-dire qu'ils doivent satisfaire aux exigences générales en matière de sécurité et de performance définies à l'échelle européenne.

L'inscription sur la liste peut avoir lieu en nom de marque ou en description générique.

• L'inscription en description générique s'adresse aux dispositifs médicaux présentant des caractéristiques techniques et des indications communes à celles d'autres dispositifs médicaux déjà inscrits à la LPP : ils bénéficient à ce titre d'une procédure allégée, fondée sur un principe d'auto-inscription sans évaluation de la Cnedimts, sur simple déclaration à l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). Pour avoir accès au remboursement, le fabricant doit se faire délivrer un code d'identification individuelle du produit par les services du ministère de la santé697(*).

La Cnedimts réévalue toutefois l'inscription de la ligne générique sur la LPP au plus tous les dix ans.

Une inscription en ligne générique renforcée, avec des conditions plus restrictives, est certes prévue depuis 2015698(*) par l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale, mais « cette disposition n'a, à ce jour, pas encore été utilisée » selon la HAS.

• L'inscription en nom de marque concerne quant à elle les produits innovants, dont les caractéristiques techniques ou l'indication ne sont analogues à celles d'aucun produit déjà inscrit sur la LPP. Une inscription sous nom de marque est également possible lorsqu'un produit dont les caractéristiques techniques correspondent à une ligne générique et répondant aux mêmes indications présente un intérêt particulier en termes d'efficacité ou de tolérance justifiant son individualisation.

Pour chaque inscription sous nom de marque, la Cnedimts donne alors un avis sur le bien-fondé d'une prise en charge par l'assurance maladie au regard d'un dossier médico-technique fourni par l'exploitant au dépôt de sa demande d'inscription, faisant figurer des données cliniques.

L'inscription à la LPP sous nom de marque est assurée pour une durée maximale de cinq ans.

2. L'inscription sur la LPP est conditionnée à l'atteinte d'un service attendu suffisant

Que ce soit pour une procédure de réévaluation d'une ligne générique ou d'évaluation d'un produit sous nom de marque, l'avis de la Cnedimts concernant le bien-fondé de la prise en charge repose sur l'évaluation d'un service attendu (SA) ou d'un service rendu (SR), conformément à l'article R. 165-2 du code de la sécurité sociale.

Des dispositions analogues existent pour les médicaments, avec le conditionnement du remboursement à un niveau de service médical rendu (SMR) suffisant.

Seuls deux niveaux existent : en cas de SA ou SR suffisant, la Cnedimts estime que le dispositif doit être éligible au remboursement. A contrario, « les produits ou prestations dont le service attendu est insuffisant pour justifier l'inscription au remboursement ne sont pas inscrits sur la liste » de remboursement699(*). Cela constitue une différence avec la prise en charge des médicaments, qui présente plusieurs niveaux de service médical rendu, associés chacun à un taux de remboursement spécifique700(*).

L'évaluation du caractère suffisant du service attendu repose sur deux critères701(*) :

• l'intérêt du produit. Celui-ci est évalué au regard de la comparaison entre ses effets thérapeutiques, diagnostics ou de compensation du handicap et des risques liés à son utilisation - il s'agit là d'un rapport bénéfices / risques fondé sur l'analyse des données cliniques fournies par l'exploitant.

Est également prise en compte la place du produit dans la stratégie thérapeutique ou de compensation du handicap compte tenu de l'offre existante : un dispositif médical innovant, qui serait à utiliser en première intention thérapeutique serait plus susceptible de recueillir un SA suffisant qu'un autre dispositif qui constituerait un recours de deuxième ou de troisième intention eu égard aux alternatives déjà sur le marché ;

• l'intérêt de santé publique du produit au regard de son impact sur la santé de la population (mortalité, qualité de vie), sur le système de soins, sur les politiques de santé publique ou de sa capacité à répondre à un besoin sanitaire non couvert.

Lorsque le service attendu ou rendu est suffisant, la Cnedimts fixe l'amélioration du service attendu ou rendu (ASA / ASR) du produit par rapport aux comparateurs pertinents, et précise les recommandations d'utilisation du produit ainsi que son conditionnement.

Le niveau d'ASA - majeure (ASA I), importante (ASA II), modérée (ASA III), mineure (ASA IV) ou inexistante (ASA V) - influe sur la fixation par le comité économique des produits de santé (CEPS) du tarif de responsabilité702(*) associé au produit, par convention avec l'exploitant ou le distributeur au détail ou, à défaut, par décision du CEPS. D'autres critères peuvent s'y adjoindre, comme la sécurité d'approvisionnement du marché français703(*).

Après inscription du dispositif sur la LPP, la sécurité sociale prend en charge 60 %704(*) du tarif de responsabilité du dispositif médical, sauf pour le grand appareillage et les dispositifs dispensés dans le cadre d'une affection de longue durée705(*), qui font l'objet d'une prise en charge à 100 %.

Dans certains cas, par exemple pour la prescription de dispositifs de pression positive continue pour le traitement de l'apnée du sommeil, l'arrêté d'inscription peut subordonner la prise en charge à une « entente préalable »706(*) avec l'assurance-maladie, accordée après avis du médecin-conseil.

B. L'observance peut sensiblement faire varier le service attendu d'un dispositif médical, ce qui justifierait d'utiliser les données d'utilisation des dispositifs médicaux numériques afin de moduler la prise en charge et d'adapter la prescription

1. Un service attendu dépendant de l'observance

Si la Cnedimts se fonde sur le service attendu d'un dispositif médical pour justifier de son éligibilité au remboursement, celui-ci peut varier, dans les faits, en fonction de l'observance du traitement par le patient.

L'arrêté d'inscription à la LPP des dispositifs médicaux à pression positive continue, utilisés dans le traitement de l'apnée du sommeil, rappelle ainsi que « toute observance de moins de 56 heures par période de 28 jours doit être considérée comme médiocre et son efficacité sujette à caution ».

Par conséquent, une observance insuffisante peut conduire la sécurité sociale à prendre en charge des dépenses inefficaces ou, du moins, inefficientes, au titre de l'équipement en dispositif médical.

En outre, le défaut d'utilisation effective par le patient peut être un signe d'une mauvaise adhésion thérapeutique, qui doit interroger le prescripteur sur un éventuel changement de stratégie thérapeutique pour opter pour des thérapeutiques moins contraignantes ou mieux adaptées à la situation de l'assuré.

Dans le cas des dispositifs médicaux de pression positive continue (PPC), par exemple, l'orthèse d'avancée mandibulaire constitue un traitement alternatif parfois mieux supporté par les patients.

Or, si l'observance est inobservable pour les dispositifs médicaux non numériques, le code de la sécurité sociale autorise, dans le cadre de la télé-observance ou du télésuivi, le recueil de données relatives à l'utilisation effective de dispositifs médicaux numériques inscrits au remboursement par les patients atteints d'une affection chronique707(*). Le recueil est opéré par les prestataires de dispositifs médicaux numériques, avec le consentement du patient.

2. Le droit permet aujourd'hui de moduler le tarif de responsabilité ou le prix d'un dispositif médical numérique en fonction des données d'utilisation...

Afin de valoriser les données d'utilisation effective, l'article L. 165-1-3 du code de la sécurité sociale prévoit que les tarifs de responsabilité ou les prix limite de vente associés à un dispositif médical numérique puissent être modulés en fonction des données d'observance, sans toutefois que cette modulation tarifaire ne puisse avoir d'incidence sur la qualité de l'accompagnement par les prestataires.

Il s'agit là d'une mécanique vertueuse d'incitation pour les prestataires de services à domicile (Psad, ou PSDM pour prestataire de services et distributeurs de matériel), qui assurent la mise à disposition à domicile des services et dispositifs médicaux utilisés par les patients, à mieux accompagner les patients pour favoriser l'adhésion thérapeutique et l'observance.

En effet, du tarif de responsabilité dépend la rémunération de ces professionnels par l'assurance maladie au titre de la mise à disposition des dispositifs médicaux. Faire varier le niveau de la rémunération des Psad en fonction de l'observance constatée les encourage à opérer un suivi attentif de l'utilisation des dispositifs par les patients et à se rapprocher des patients insuffisamment observants afin de comprendre les obstacles rencontrés, de dispenser des conseils d'utilisation. Les prestataires sont invités à faire preuve de pédagogie pour sensibiliser les patients à la conditionnalité de l'efficacité du traitement à une utilisation suffisante.

De plus, la modulation des tarifs de responsabilité conduit l'assurance maladie à moins dépenser au titre de la mise à disposition de dispositifs médicaux peu ou pas utilisés par les patients. La participation de l'assurance maladie - soit le produit entre le taux de remboursement, 60 % en droit commun, et le tarif de responsabilité - est en effet mécaniquement réduite en cas de diminution du tarif de responsabilité.

Selon le syndicat national de l'industrie et des technologies médicales (Snitem), ce dispositif est aujourd'hui « utilisé uniquement dans le cas du télésuivi des patients apnéiques » bénéficiant d'un traitement par pression positive continue. L'Union nationale des prestataires de dispositifs médicaux (UNPDM) indique que les montants de forfait en fonction de l'observance pour les dispositifs de PPC sont les suivants :

« - forfait à 15,58 € [pour une] observance supérieure à 112h d'utilisation par période de 28 jours consécutifs ;

- forfait à 9,74 € [pour une] observance entre 56h [et 112h] d'utilisation par période de 28 jours consécutifs ;

- forfait à 4,00 € [pour une] observance inférieure à 56h d'utilisation par période de 28 jours consécutif[s] ».

En cas de refus par le patient de transmettre ses données médicales, le prestataire est soumis à un forfait minoré, ce qui constitue également une incitation pour le prestataire à convaincre le patient de l'intérêt de la transmission de ses données d'observance.

L'article L. 165-1-3 du code de la sécurité sociale prévoit également la possibilité, pour le prestataire en lien avec le prescripteur, de conduire des actions visant à favoriser la bonne utilisation du dispositif médical lorsque les données d'utilisation le justifient. Le cas échéant, la loi invite le prescripteur à réévaluer sa prescription pour se tourner vers une alternative thérapeutique mieux adaptée aux besoins du patient.

3. ... sans toutefois pouvoir utiliser les données d'utilisation pour moduler ou conditionner la prise en charge

Toutefois, l'article L. 165-1-3 du code de la sécurité sociale précise explicitement qu' « une moindre utilisation du dispositif médical ne peut en aucun cas conduire à une augmentation de la participation de l'assuré mentionnée au I de l'article L. 160-13 aux frais afférents à ce dispositif et à ses prestations associées », c'est-à-dire à une hausse du ticket modérateur.

Le taux de prise en charge par l'assurance maladie et l'existence même de cette dernière sont donc indépendants des données d'utilisation effective du dispositif médical, même si celles-ci induisent, de fait, une variation du service attendu.

Deux arrêtés du 9 janvier 2013708(*) et du 22 octobre 2013709(*) avaient toutefois introduit une notion de modulation de la prise en charge en fonction des données d'observance télétransmises, pour des appareils exerçant une pression positive continue dans le cadre du traitement contre l'apnée du sommeil. Ces derniers faisaient varier le forfait de prise en charge en fonction des données d'utilisation effectives, télétransmises ou relevées à domicile par le prestataire. Une moindre utilisation était associée à un forfait de prise en charge diminué et, si le manque d'observance se poursuivait plus de huit semaines sous ce forfait minoré, l'arrêté prévoyait que « la prise en charge par l'AMO cesse ». Sans restitution de l'appareil par le patient, celui-ci devenait également redevable d'une indemnité d'immobilisation de 20 euros par semaine au prestataire à compter de la treizième semaine de sous-observance en forfait minoré. Cette indemnité ne pouvait faire l'objet d'une prise en charge par l'AMO.

Toutefois, par un arrêt du 28 novembre 2014710(*), le Conseil d'État a annulé pour incompétence ces arrêtés, estimant que les ministres avaient outrepassé les pouvoirs accordés par le législateur qui entendaient, par l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale, « subordonner [le] remboursement [des dispositifs médicaux] au respect de modalités de mise en oeuvre de ces dispositifs médicaux et prestations, et non à une condition d'observation de son traitement par le patient ».

Le droit en vigueur n'autorise donc pas, en général, à moduler la prise en charge de l'assurance maladie en fonction des données d'observance.

4. L'exception de la télésurveillance

Sur le champ restreint de la télésurveillance, la loi autorise toutefois la subordination de la prise en charge ou du remboursement par la sécurité sociale à l'utilisation effective du dispositif médical numérique711(*). Dans ces conditions, l'activité de télésurveillance médicale ne saurait faire l'objet d'un remboursement en cas de refus de transmission des données.

Le contrôle de l'utilisation effective de la solution de télésurveillance repose sur des indicateurs individualisés712(*) figurant dans l'arrêté d'inscription à la liste des activités de télésurveillance médicale713(*) - l'équivalent de la LPP pour les solutions de télésurveillance médicale. Si ces objectifs ne sont pas atteints, l'« opérateur prend sans délai toute mesure pour que le patient soit orienté vers une autre modalité de prise en charge et il est mis fin à la prise en charge ou au remboursement de l'activité » aux termes de l'article R. 162-97 du code de la sécurité sociale.

La télésurveillance médicale

La télésurveillance médicale constitue, avec la téléconsultation, la téléexpertise, la téléassistance médicale et la réponse médicale dans le cadre de la régulation médicale du service d'accès aux soins, une modalité de la télémédecine714(*).

Aux termes du 3° de l'article R. 6116-1 du code de la santé publique, la télésurveillance médicale « a pour objet de permettre à un professionnel médical d'interpréter à distance les données nécessaires au suivi médical d'un patient et, le cas échéant, de prendre des décisions relatives à la prise en charge de ce patient. L'enregistrement et la transmission des données peuvent être automatisés ou réalisés par le patient lui-même ou par un professionnel de santé ».

En ce que la télésurveillance médicale implique obligatoirement un médecin chargé de l'interprétation de données médicales, elle doit être distinguée de deux pratiques qui ne font intervenir obligatoirement que les Psad : la télé-observance, qui se limite à la mesure à distance de l'observance, et le télésuivi, qui permet de surveiller à distance l'observance et le bon fonctionnement du dispositif médical numérique.

Ces dispositions, introduites par la LFSS pour 2022715(*), ne sont toutefois pas encore pleinement applicables aujourd'hui selon le Snitem, « les indicateurs mentionnés n'[ayant] pas encore été identifiés par la Cnedimts ».

5. Le remboursement de dispositifs médicaux numériques malgré une faible observance contribue à la forte dynamique des dépenses de dispositifs médicaux

En 2022, la consommation de biens médicaux hors optique médicale représentait 12,7 milliards d'euros, dont 8,3 milliards d'euros solvabilisés par l'Assurance maladie obligatoire (AMO).

Pour l'AMO, les dispositifs médicaux représentent un poste particulièrement dynamique, avec un taux de croissance annuel moyen de 4,2 % entre 2017 et 2023. Entre 2022 et 2023, l'évolution a même atteint 4,6 %.

Les dispositifs de PCC correspondent à une dépense de 945 millions d'euros pour l'AMO en 2024 selon l'UNPDM, présentant un caractère particulièrement dynamique, avec un taux de croissance annuel moyen de 7,9 % entre 2016 et 2022 (+ 270 millions d'euros)716(*).

Au sein de ce total, les dépenses de l'assurance maladie en faveur de dispositifs médicaux peu ou pas observés ne sont pas négligeables. Selon les données de l'Assurance maladie citées par l'étude d'impact, « la dépense remboursée pour des patients qui ne sont pas au niveau attendu d'observance, sans information sur cette dernière, ou encore non télésuivis atteint 100 M€ en 2023 » pour les seuls dispositifs de pression positive continue dans le cadre du traitement de l'apnée du sommeil.

Selon l'union nationale des prestataires de dispositifs médicaux (UNPDM), « malgré les efforts d'accompagnement mise en oeuvre, selon les données de nos adhérents, environ 6 % des patients télé-suivis ont une utilisation insuffisante de leur appareil de ventilation PPC ». La faible observance sur ce champ s'explique, selon l'UNPDM, par diverses raisons :

« - une intolérance au port du masque pouvant être source d'inconfort ou d'irritation cutanée ;

- des effets secondaires indésirables, tels qu'une sécheresse nasale dues à l'air pulsé ou des maux de tête résultant d'une pression excessive ;

- la difficulté de s'habituer à dormir avec un dispositif sur le visage et un appareil branché à côté du lit ;

l'aspect continu du traitement qui peut aussi induire de l'impatience ou du rejet ».

« Considérant qu'en dessous de deux heures d'utilisation quotidienne, le bénéfice du traitement est très faible », la revue de dépenses de l'IGF et l'Igas sur les dispositifs médicaux, réalisée au printemps 2024, préconise « une baisse ou une suppression du remboursement des forfaits correspondant à cette durée d'utilisation », qui pourrait passer par « une modification législative permettant de subordonner le remboursement à l'utilisation effective de certains dispositifs médicaux ». Les inspections indiquent que la suppression des forfaits correspondants pourrait se traduire en une économie de 23 millions d'euros pour la sécurité sociale.

Alternativement, les inspections recommandent une baisse réglementaire du tarif responsabilité avec un maintien éventuel du prix limite de vente afin d'inciter le patient à l'observance.

C. Le dispositif proposé : utiliser les données d'utilisation pour réévaluer la pertinence de la prescription et pour subordonner ou moduler la prise en charge de certains dispositifs médicaux numériques à une utilisation effective

L'article 20 modifie uniquement l'article L. 165-1-3 du code de la sécurité sociale, relatif à l'utilisation des données d'utilisation des dispositifs médicaux numériques pour réévaluer la prescription, les tarifs de responsabilité ou les prix limite de vente des dispositifs concernés.

1. Donner une assise législative à la subordination de la prise en charge ou de la modulation de prise en charge par l'assurance maladie d'un dispositif médical numérique à son utilisation effective

La troisième phrase du 2° de l'article 20 prévoit indirectement que les données d'observance - et plus largement les données permettant d'attester du respect de conditions d'utilisation prévues dans l'arrêté d'inscription sur la LPP - puissent être utilisées pour conditionner la prise en charge ou la modulation de la prise en charge de certains dispositifs médicaux numériques.

Dans ce cas, la même phrase fait obligation aux distributeurs au détail, incluant notamment les Psad, de transmettre ces données à l'assurance maladie ou, le cas échéant, à un tiers de confiance non défini. Elle renvoie à un décret en Conseil d'État après avis de la commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) les conditions encadrant cette transmission.

La transmission des données d'utilisation est soumise à l'accord du patient, sans toutefois qu'il soit précisé quelle incidence l'absence de consentement peut avoir sur la prise en charge, contrairement à la rédaction retenue dans le cas de la télésurveillance. La dernière phrase du 2° prévoit tout de même explicitement que tout défaut de transmission du fait du distributeur au détail est inopposable au patient.

La rédaction retenue se réfère par ailleurs par erreur à « l'arrêté mentionné à l'article L. 165-1 », c'est-à-dire l'arrêté fixant la liste des descriptions génériques renforcées, pour évoquer l'arrêté d'inscription des dispositifs médicaux sur la LPP.

2. Améliorer la pertinence des prescriptions de dispositifs médicaux

Le c) du 1° de l'article 20 ouvre droit au distributeur au détail d'un dispositif médical numérique de recueillir, en plus des données nécessaires au traitement, les données nécessaires à l'évaluation de la pertinence de celui-ci.

Alors que l'article L. 165-1-3 se borne aujourd'hui à préciser que le prescripteur réévalue, le cas échéant, sa prescription au regard de ces données, le 2° de l'article 20 renforce ses prérogatives en matière de contrôle de la pertinence de ses prescriptions. Il sera désormais attendu du prescripteur qu'il réévalue « de façon régulière » « la pertinence et l'efficacité » de sa prescription, un processus qui peut le mener à ne pas renouveler la prescription.

En conséquence, le 4° de l'article 20 fait obligation au distributeur au détail d'informer le patient, concomitamment au recueil de son consentement pour l'utilisation de ses données d'utilisation, que les données transmises peuvent conduire à ne pas renouveler la prescription, notamment en cas de faible observance.

3. Un élargissement du champ du dispositif pour faire dépendre le remboursement de l'assurance maladie obligatoire de l'observance dans des cas aujourd'hui non encore anticipés

L'article 20 prend soin d'élargir le champ du dispositif prévu à l'article L. 165-1-3 afin qu'à l'avenir, d'autres dispositifs médicaux numériques puissent, si besoin, être concernés par une modulation du tarif de responsabilité ou de la prise en charge par l'assurance maladie en fonction des données d'observance.

En ce sens, le a) du 1° supprime la limitation aux seules affections chroniques de la portée de l'article L. 165-1-3.

En outre, le b) du 1° et les deux premières phrases du 2° et le 3° remplacent la notion de « prestataires » par celle, plus large, de « distributeurs au détail ». Cela permettra que les distributeurs au détail ne faisant pas partie des prestataires mentionnés à l'article L. 5232-3 du code de la santé publique puissent participer au recueil des données d'observance (1°), bénéficier de leur télétransmission (première phrase du 2°) et déployer, en lien avec le prescripteur, des actions ayant pour objet de favoriser une bonne utilisation du dispositif médical (deuxième phrase du 2°). Par le 3°, l'ensemble des distributeurs au détail, et non seulement les prestataires, se voient interdire de diminuer la qualité de leur prise en charge en cas de diminution du tarif de responsabilité du fait d'une observance insuffisante.

4. Une baisse anticipée de 20 millions d'euros des dépenses de l'assurance maladie obligatoire en 2026

L'étude d'impact indique que la mesure, qui pourrait entrer en vigueur mi-2025, pourrait permettre d'atteindre des économies de 20 millions d'euros en 2025, puis en 2026. Il est étonnant que le rendement de la mesure ne soit pas accru par l'effet année pleine en 2026.

En outre, en renforçant le contrôle de l'assurance maladie sur la facturation, l'étude d'impact indique que 10 millions d'euros d'économies supplémentaires peuvent être attendues de la correction de 1 % de facturations erronées, à compter de 2027.

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

L'Assemblée nationale n'ayant pas examiné cet article, le Gouvernement l'a transmis au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

La commission accueille favorablement ces dispositions, visant à améliorer la pertinence des prescriptions. Elles bénéficieront tant à l'assurance maladie, qui ne se verra plus contrainte de prendre en charge des dispositifs médicaux numériques dont le service rendu est limité voire nul du fait d'une sous-observance qu'aux patients concernés, qui pourront, grâce au suivi opéré par le médecin, bénéficier d'une amélioration de leur prise en charge en basculant sur un traitement de seconde intention, qu'ils seront susceptibles de mieux tolérer.

L'article 20 recueille également l'assentiment de l'UNPDM, qui rappelle que « de façon générale, en tant que prestataires, nous sommes favorables au recueil d'informations relatives la bonne utilisation des dispositifs médicaux, à leur efficacité ou à leur sécurité, dans la mesure où les données transmises permettent d'améliorer la prise en charge des patients en adaptant la prescription et le suivi nécessaire, en restreignant les mésusages éventuels et en supprimant les traitements non pertinents ou insuffisamment efficients ».

La situation financière particulièrement dégradée de l'assurance maladie exige que son effort soit concentré sur la prise en charge de frais présentant une valeur ajoutée pour le patient ou le système de soins, et est à ce titre incompatible avec le maintien de 100 millions d'euros de dépenses pour des dispositifs de pression positive continue ne faisant pas l'objet d'une utilisation suffisante, ce qui induit une efficacité du traitement très faible.

La prise en charge du traitement de l'apnée du sommeil par des dispositifs de pression positive continue est, à ce stade, la seule que le Gouvernement entend subordonner à une utilisation effective, par le contenu de l'article 20. Notons que les dépenses associées à des dispositifs de PPC sous observés sont non seulement peu efficientes, mais également contreproductives en ce qu'elles diffèrent d'autant la prescription d'un traitement de deuxième intention, l'orthèse d'avancée mandibulaire, que le patient peut être susceptible de mieux supporter.

Par conséquent, le législateur et le pouvoir réglementaire ont déjà prévu que les tarifs de responsabilité puissent être modulés à la baisse pour les dispositifs de PPC sous-utilisés, dans une logique d'incitation des Psad à davantage accompagner les assurés qui ont du mal à respecter l'observance requise. Ce mécanisme vertueux n'a toutefois « pas significativement ralenti la hausse » des dépenses encourues par l'assurance maladie pour le remboursement de dispositifs de PPC inefficaces car sous-observés, selon la revue de dépenses sur les dispositifs médicaux, publiée par les inspections générales des finances et des affaires sociales717(*).

Afin d'améliorer l'efficience de la prise en charge des dispositifs de PPC, il appartient donc au législateur d'adapter le cadre en vigueur pour permettre de responsabiliser plus fortement les patients, aujourd'hui non affectés par la baisse du forfait en cas de sous-observance. En ce sens, l'article 20 encouragera les patients à renforcer leur utilisation des dispositifs de PPC afin d'obtenir des résultats thérapeutiques, et accélérera le passage à un traitement de deuxième intention pour les patients pour lesquels la PPC n'est pas adaptée.

La commission a adopté un amendement n° 174 afin de mieux encadrer les conditions dans lesquelles la prise en charge de l'assurance maladie peut être suspendue en cas de sous-observance. Cet amendement procède à quatre principales modifications.

L'amendement prévoit, d'abord, que la Cnedimts se prononce, dans son avis portant sur l'inscription du dispositif médical numérique à la liste des produits et prestations, sur les modalités selon lesquelles peuvent être utilisées les données collectées, de la même manière qu'elle le fait lorsqu'une modulation du tarif de responsabilité est prévue en fonction de l'observance. Il s'agit là de renvoyer à une autorité scientifiquement compétente la détermination des seuils d'observance en-deçà desquels le service rendu est trop faible pour justifier une prise en charge par l'assurance maladie.

Deuxièmement, l'amendement vise à encadrer le dispositif afin de faire obstacle à ce qu'une sous-observance sur une période courte, par exemple des vacances, puisse entraîner une suspension de prise en charge par l'assurance maladie : il prévoit ainsi que la suspension de la prise en charge soit conditionnée au non-respect des conditions d'utilisation sur une période se prolongeant au-delà d'un seuil défini par décret.

Troisièmement, l'amendement n° 174 prévoit que le prescripteur et le distributeur au détail soient informés sans délai de la suspension de la prise en charge du dispositif médical numérique par l'assurance maladie, afin de permettre une réévaluation rapide de la stratégie thérapeutique à mettre en oeuvre et d'éviter, surtout, que le patient puisse se retrouver sans thérapie. Notons que l'apnée du sommeil induit des risques cardiaques accrus ou encore de la somnolence au volant : le maintien d'une prise en charge thérapeutique est donc indispensable. L'article 20 doit conduire à faire évoluer la stratégie thérapeutique si elle n'est pas adaptée au patient, mais en aucun cas à priver le patient de toute thérapie.

Enfin, l'amendement vise à préciser que, lorsque la prise en charge ou la modulation de la prise en charge est conditionnée à l'utilisation effective d'un dispositif médical numérique, le refus opposé par le patient de transmettre ses données d'utilisation fait obstacle à la prise en charge. Il s'agit là d'une harmonisation avec le régime législatif de prise en charge de la télésurveillance médicale. De telles dispositions semblent nécessaires pour assurer l'effectivité de cet article : si elles n'étaient pas intégrées, les patients non ou insuffisamment observants n'auraient qu'à refuser de transmettre leurs données d'utilisation pour continuer de bénéficier d'une prise en charge du dispositif médical insuffisamment utilisé, ce qui réduirait considérablement la portée du dispositif.

Un autre amendement n° 175, adopté par la commission, supprime la phrase de l'article L. 165-1-3 du code de la sécurité sociale prévoyant que le ticket modérateur de l'assuré ne puisse en aucun cas varier en fonction de l'observance, ces dispositions apparaissant incompatibles avec celles de l'article 20.

La commission des affaires sociales restera attentive, dans le déploiement du dispositif, à son acceptabilité pour les patients. L'UNPDM a en effet, lors de son audition, exprimé quelques réserves à ce sujet puisqu'elle indique que « le télé-suivi peut parfois être vécu par quelques-uns comme une surveillance pesante, voire infantilisante, s'apparentant à du fichage ou à une mise sous tutelle imposée par l'autorité médico-administrative ».

Enfin, la commission prendra garde à ce que la charge administrative liée au suivi de l'observance pour les Psad et les médecins ne soit pas excessive.

La commission propose d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.

Article 21
Modification des paramètres de l'expérimentation relative au régime de financement des établissements accueillant des personnes âgées et dépendantes

Cet article modifie les paramètres de l'expérimentation relative au régime de financement des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) et des unités de soins de longue durée (USLD). Il augmente le nombre de départements pouvant y participer et reporte la date limite de candidature. Il en modifie également les dispositions financières.

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

I - Le dispositif proposé

A. Le financement des Ehpad et des USLD, qui repose sur trois sections tarifaires distinctes, est aujourd'hui largement remis en cause

1. Le financement des Ehpad et des USLD repose sur trois sections tarifaires distinctes

Les personnes âgées dépendantes qui nécessitent un accompagnement médico-social peuvent être amenées à résider dans des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) ou, minoritairement, dans des unités de soins de longue durée (USLD).

Le mode de financement de ces deux catégories d'établissements est similaire et se décompose en trois sections tarifaires, qui relèvent de règles et de financeurs différents : une section « soins », une section « dépendance » et une section « hébergement ».

a) La section « soins »

La section « soins » sert à financer le personnel soignant et les équipements médicaux. Elle est intégralement prise en charge par la sécurité sociale (branche autonomie pour les Ehpad, branche maladie pour les USLD) via les ARS. Les dépenses de soins des Ehpad sont plus précisément financées par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) dans le cadre de l'objectif global de dépenses (OGD).

Le montant du forfait global relatif aux soins est arrêté chaque année par le directeur général de l'ARS. Il prend notamment en compte le niveau de dépendance moyen - évalué à l'aide de la grille AGGIR - et les besoins en soins des résidents - recueillis à l'aide du référentiel « PATHOS » -, validés au plus tard le 30 juin de l'année précédente.

Le cas échéant, ce forfait inclut des financements complémentaires relatifs à des modalités d'accueil particulières ou à la mission de centre de ressources territorial (CRT) ; tenant compte de l'activité réalisée ; visant à financer des mesures de revalorisation des personnels ou visant à financer des actions de prévention de la perte d'autonomie718(*).

b) La section « dépendance »

La section « dépendance » finance les prestations d'aide et de surveillance des personnes âgées en perte d'autonomie (aides-soignants, psychologues...). Elle est financée par les conseils départementaux à hauteur de 70 % en moyenne par le biais d'une prestation individuelle, l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) en établissement. Les 30 % restants sont financés par les résidents (reste à charge).

La sécurité sociale contribue également, indirectement, au financement de la section dépendance. La CNSA verse un concours aux départements destiné à couvrir une partie de leurs dépenses d'APA719(*). En 2022, 41,5 % des dépenses d'APA étaient ainsi financées par la CNSA720(*).

Le montant du forfait global relatif à la dépendance est fixé par un arrêté du président du conseil départemental721(*). Il est égal à la somme722(*) :

- du résultat de l'équation tarifaire relative à la dépendance calculée sur la base du niveau de perte d'autonomie des personnes hébergées par l'établissement ; ce résultat étant modulé en fonction de l'activité réalisée par l'établissement723(*) ;

- des financements complémentaires définis dans le Cpom.

Le forfait global « dépendance » de chaque établissement est donc largement déterminé par une équation nationale, qui repose sur l'appréciation des besoins des résidents à l'aide de la grille AGGIR.

Toutefois, c'est au président du conseil départemental qu'il revient de fixer, chaque année et au plus tard le 1er avril, le « point GIR départemental »724(*) qui sert de référence pour calculer les forfaits globaux dépendance. Plus la valeur de ce point GIR départemental est élevée, plus le montant du forfait alloué par le département aux établissements augmente.

La participation des résidents au titre de la section dépendance est quant à elle déterminée en fonction de leurs ressources, suivant le barème national de l'APA en établissement.

c) La section « hébergement »

La section « hébergement » correspond aux dépenses d'hôtellerie, de restauration et d'animation. Elle est à la charge du résident qui peut toutefois bénéficier, en fonction de son niveau de ressources, de l'aide sociale à l'hébergement (ASH) financée par les départements.

2. Ce régime de financement est aujourd'hui largement remis en cause

a) Des critiques qui portent à la fois sur l'architecture des financements, les coûts de gestion et les inégalités territoriales

Premièrement, la tripartition du financement des établissements est de moins en moins pertinente.

Plus particulièrement, la frontière entre les sections « soins » et « dépendance » s'est atténuée. En effet, le profil des résidents accueillis en Ehpad a évolué : les progrès médicaux et le développement de l'offre de services et de soins à domicile se sont traduits par une entrée plus tardive en établissement. Il en résulte que le public accueilli en Ehpad est de plus en plus âgé (l'âge moyen est de près de 87 ans) et dépendant (le GIR moyen pondéré725(*) est passé de 696 en 2015 à 705 en 2019)726(*). Ce phénomène, qui devrait s'accentuer dans les années à venir, conduit au recoupement d'une grande partie des besoins liés à la perte d'autonomie et aux soins.

Dans ce contexte et alors que la situation de chaque résident gagnerait à être appréciée dans sa globalité, il apparaît que la distinction entre soins et entretien de l'autonomie a perdu de sa pertinence en plus de conduire à un défaut de lisibilité pour les résidents et leurs familles.

Deuxièmement, la complexité du régime de financement implique des coûts de gestion importants pour les établissements.

L'existence de trois sections, financées par des acteurs différents, oblige en effet les Ehpad à suivre des règles budgétaires et comptables strictes et complexes, et à réaliser un suivi de leurs ressources auprès des différents financeurs que sont les ARS, les départements et les résidents.

Troisièmement, ce régime de financement induit des inégalités territoriales, bien que celles-ci se réduisent sensiblement depuis 2018. En effet, le montant du forfait global relatif à la dépendance qui est alloué aux Ehpad dépend en partie d'une variable locale, la valeur de point « GIR », qui est déterminée par le conseil départemental.

Dispersion des valeurs de point GIR de 2018 à 2023
(hors Guyane et Saint-Pierre-et-Miquelon)

Source : CNSA

En 2023, selon la CNSA, la valeur maximale de point GIR était de 9,47 euros en Corse, et sa valeur minimale de 6,60 euros dans les Alpes-de-Haute-Provence727(*). Ainsi, à situation strictement égale en termes de résidents, deux Ehpad se trouvant dans deux départements différents peuvent se voir verser des forfaits globaux relatifs à la dépendance d'un montant différent.

b) Le besoin de simplification du régime de financement des Ehpad et des USLD fait consensus, moyennant une redéfinition claire des rôles respectifs des ARS et des départements

La simplification du régime de financement via la fusion des sections « soins » et dépendance » a été suggérée à plusieurs reprises.

En 2019, le rapport remis par Dominique Libault sur le grand âge et l'autonomie recommandait déjà cette fusion728(*). Plus récemment, en 2023, dans son rapport sur la prise en charge des personnes âgées en établissement, Christine Pirès-Beaune rappelle que la fusion des sections soins et dépendance est un besoin de simplification souhaité de longue date729(*).

De son côté, la Cour des comptes suggère, dans un rapport remis à la commission des affaires sociales du Sénat en 2022, de « fusionner les sections soins et dépendance sous l'égide des ARS, afin de simplifier la tarification des Ehpad et de réduire les disparités départementales »730(*) tout en alertant sur la nécessité d'assurer la neutralité budgétaire globale de la réforme.

Enfin, lors des auditions conduites par le rapporteur, les fédérations représentatives du secteur de l'hébergement des personnes âgées ont unanimement réaffirmé leur soutien à cette réforme et appelé à une généralisation rapide.

La fusion des sections soins et dépendance suppose toutefois de s'attarder sur ses effets sur la gouvernance des établissements.

Dans le scénario qui est sur le point d'être expérimenté, la responsabilité du nouveau forfait unique serait confiée aux ARS. En effet, au regard de la médicalisation croissante des Ehpad, la gestion de ce nouveau forfait par l'État est apparue l'option la plus pertinente.

S'agissant du rôle qui serait laissé aux départements, la Cour des comptes estime que, outre l'habilitation à l'aide sociale731(*) et le contrôle des établissements, ceux-ci conserveraient une place importante auprès des Ehpad, notamment via la participation au pilotage des établissements désignés « centres de ressources »732(*). Plus généralement, la Cour recommande de conforter le rôle des départements en matière de politique de maintien à domicile, de prévention et d'organisation territoriale de l'offre.

B. Dans l'objectif de simplifier le régime de financement des Ehpad et des USLD, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 prévoit l'expérimentation de la fusion des sections soins et dépendance

1. La fusion des sections soins et dépendance sous l'égide des ARS

a) La mise en place d'un forfait global unique relatif aux soins et à l'autonomie en lieu et place des actuels forfaits soins et dépendance

L'article 79 de la LFSS pour 2024733(*) prévoit l'expérimentation d'un nouveau régime de financement des Ehpad, des petites unités de vie et des USLD dans un double objectif de simplification et de réduction des inégalités territoriales.

Dans les départements volontaires, ces établissements percevront un forfait global unique relatif aux soins et à l'autonomie en remplacement des actuels forfaits soins et dépendance, versés respectivement par l'ARS et le département.

Le forfait global unique de chaque Ehpad correspondra à la somme des forfaits actuels relatifs aux soins et à la dépendance, après prise en compte de la nouvelle valeur de point GIR.

Le montant du forfait tiendra également compte des taux de reconduction de l'Assurance maladie, des créations de places nouvelles et de l'actualisation des évaluations de l'état de dépendance et des besoins en soins des résidents734(*). Il pourra également inclure des financements complémentaires, par exemple, pour tenir compte de l'activité réalisée, de l'atteinte des objectifs du Cpom, ou encore financer des actions de prévention.

Dans le cadre de cette expérimentation, il est prévu que les ARS fixent la valeur de point GIR dans les départements expérimentateurs. Cette fixation sera encadrée au niveau national, afin de permettre une convergence à la hausse des valeurs de point GIR, aujourd'hui très disparates en fonction des territoires.

Selon les informations transmises par la DGCS au rapporteur, le Gouvernement a retenu une fixation à hauteur du troisième quartile de la distribution nationale des valeurs de point GIR, soit environ 7,87 € en 2024. Plus précisément, en 2025, la valeur de point GIR des départements expérimentateurs sera égale à 7,87 € pour ceux dont la valeur de point arrêtée au titre de 2024 est inférieure ; ou identique à la valeur de point arrêtée au titre de 2024 lorsque celle-ci est supérieure à 7,87 €.

S'agissant des USLD, les modalités de détermination et d'allocation du forfait global unique doivent être déterminées par voie réglementaire.

c) La participation financière des résidents

Le principe de la participation financière des résidents aux dépenses d'entretien de l'autonomie est maintenu.

Le dispositif prévoit en effet que les résidents acquittent, au titre de la prise en charge de leur perte d'autonomie, une participation journalière aux dépenses d'entretien et de l'autonomie. Les modalités de détermination et de mise en oeuvre de cette participation seront fixées par voie réglementaire.

La participation financière des résidents pourra être prise en charge par l'aide sociale à l'hébergement (ASH) dans les mêmes conditions que pour le régime de financement de droit commun.

d) Les modalités de gouvernance du nouveau régime de financement

Le nouveau forfait global unique relatif aux soins et à l'autonomie est placé sous la responsabilité des ARS. C'est au directeur général de l'ARS que revient la charge d'en fixer chaque année le montant, tandis que son versement est assuré par l'organisme payeur de l'assurance maladie territorialement compétent.

En cohérence, il est prévu que dans les départements expérimentateurs, le Cpom, normalement conclu par l'établissement avec le président du conseil départemental et le directeur général de l'ARS, n'est conclu qu'avec le directeur général de l'ARS. Le président du conseil départemental peut toutefois être associé à la négociation et à la signature du contrat s'il en fait la demande. Une disposition analogue est prévue pour les USLD.

Enfin, dans le cadre de l'expérimentation, il est prévu que le directeur général de l'ARS se substitue au président du conseil départemental pour l'exécution des engagements du département au titre du forfait global relatif à la dépendance. Les engagements pris par les départements au titre de la pluriannualité budgétaire ou rattachables à l'hébergement ne sont en revanche pas concernés.

Les départements conservent malgré tout un rôle important dans la gouvernance des Ehpad.

Ils restent compétents en matière d'autorisation et de contrôle des Ehpad, et plus globalement, dans le suivi de l'adaptation de l'offre aux besoins de leur territoire. Par ailleurs, ils conservent leur compétence en matière de tarification de la section hébergement dans les Ehpad habilités à l'aide sociale.

Certains départements demeurent toutefois réticents à l'égard de la fusion des sections soins et dépendance sous l'égide des ARS. Si certains départements se montrent intéressés, d'autres expriment en effet la crainte d'une gestion strictement budgétaire et éloignée du terrain de la part des ARS.

2. Les dispositions financières relatives à l'expérimentation

a) Les coûts relatifs à l'expérimentation

Le financement de l'expérimentation reposera, d'une part, sur la reprise de recettes aux départements expérimentateurs développée ci-dessous (estimée à 575 millions d'euros)735(*) et, d'autre part, sur une mesure nouvelle inscrite dans l'objectif global de dépenses (OGD) figurent dans le présent PLFSS à hauteur de 156 millions d'euros.

D'après la DGCS, les options retenues sont globalement favorables aux départements, qui dégagent un gain provenant des modalités de calcul du montant de recettes rétro-compensées d'une part ; et de la dynamique de ces recettes, moins importante que celle des dépenses nettes des concours versés aux départements d'autre part.

b) La rétro-compensation de recettes au profit de l'État et de la Sécurité sociale

Les départements expérimentateurs se voyant retirer la charge de la section « dépendance », la loi prévoit le calcul d'une rétro-compensation de recettes au profit de l'État et de la Sécurité sociale. Son montant est égal à la somme :

- de la moyenne, sur les trois dernières années, des dépenses constatées au titre de l'APA en établissement du département concerné d'une part ;

- et de la valorisation financière, définie par décret, des emplois qui cessent d'être affectés à la tarification du forfait global relatif à la dépendance en raison de la participation du département à l'expérimentation d'autre part.

Les conditions d'imputation de ce montant seront définies par décret.

3. Les modalités de participation à l'expérimentation

Telle que prévue par la LFSS pour 2024, l'expérimentation doit démarrer au 1er janvier 2025 pour une durée de quatre ans dans les départements volontaires (vingt au maximum). Pour se porter candidats, les départements devaient transmettre la délibération de leur assemblée au représentant de l'État sur leur territoire au plus tard le 30 avril 2024.

Selon les données fournies par la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS), vingt-sept départements se sont portés volontaires pour participer à l'expérimentation, témoignant d'un fort intérêt. Ces départements sont l'Aude, le Cantal, la Charente-Maritime, la Corrèze, les Côtes-d'Armor, la Creuse, le Finistère, la Guyane, la Haute-Garonne, la Haute-Marne, la Réunion, les Landes, le Lot, le Lot- et-Garonne, la Lozère, le Maine-et-Loire, la Mayenne, la Métropole de Lyon, le Morbihan, la Nièvre, le Pas-de-Calais, les Pyrénées-Orientales, la Savoie et la Seine-Saint-Denis ; trois départements, l'Aisne, la Loire-Atlantique et le Vaucluse s'étant manifestés après la date butoir.

La liste des départements retenus pour mener l'expérimentation sera fixée par décret.

C. Le présent article propose d'étendre l'expérimentation à trois départements supplémentaires et en modifie les dispositions financières

Le présent article modifie l'article 79 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024 pour apporter des ajustements aux modalités de mise en oeuvre de l'expérimentation.

1. La hausse du nombre de départements expérimentateurs

Le 1° porte le nombre maximum de départements pouvant participer à l'expérimentation à vingt-trois, et ce dès le 1er janvier 2025 (b) et c) du 3°).

Initialement, la loi prévoyait la participation de vingt départements à l'expérimentation, en distinguant une première vague à compter du 1er janvier 2025 et une seconde vague à compter du 1er janvier 2026.

2. Le report de la date de dépôt des candidatures

Le a) du décale la date butoir pour la transmission de la candidature du département au représentant de l'État au 31 octobre 2024.

Initialement, la loi prévoyait que la décision devait être transmise au plus tard le 30 avril 2024. Or, certains départements n'ont pas pu transmettre leur délibération à temps mais ont revanche remis un courrier d'intention de délibérer en faveur d'une candidature.

3. La modification des dispositions financières

Le 2° précise les modalités de la rétro-compensation de recettes versée par les départements expérimentateurs à la sécurité sociale.

Le c) du 2° retire du calcul du montant de la rétro-compensation la valorisation financière des emplois qui cessent d'être affectés à la tarification du forfait global relatif à la dépendance. Les a), b), d) et e) du 2° procèdent à des coordinations rédactionnelles.

Le b) du 2° prévoit par ailleurs que les dépenses engagées par le département au titre de l'APA en établissement au cours des trois années précédant l'entrée en vigueur de l'expérimentation sont « transmises à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie », et non plus « retracées dans son compte de gestion ».

Le d) du 2° précise par ailleurs que pour les départements qui participent à l'expérimentation, le montant des concours de la CNSA versés au titre de l'APA en établissement est fixé par décret en tenant compte du montant des dépenses de l'année précédente.

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

L'Assemblée nationale n'ayant pas examiné cet article, le Gouvernement l'a transmis au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

Lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, la commission s'était prononcée en faveur de l'expérimentation de la fusion des sections soins et dépendance dans les Ehpad et les USLD736(*).

Elle avait considéré qu'il s'agissait d'une étape nécessaire pour, à terme, réformer le régime de financement dans un double souci de simplification et de réduction des inégalités territoriales. La quasi-totalité des acteurs auditionnés par le rapporteur dans le cadre du présent PLFSS ont d'ailleurs renouvelé leur soutien à cette expérimentation, et appelé à une généralisation rapide737(*).

Face à ce constat, la commission salue la hausse du nombre de départements appelés à participer à l'expérimentation, qui permettra d'en dresser un bilan plus complet.

Néanmoins, la commission considère qu'il conviendrait de raccourcir la durée de l'expérimentation : il s'agit d'une réforme très attendue par le secteur, qui semble d'ores-et-déjà convaincu de son utilité, et il n'apparaît pas souhaitable de faire cohabiter deux systèmes de financement sur une aussi longue période au risque d'accentuer les inégalités territoriales.

La commission a ainsi adopté l'amendement n° 176 portant la durée de l'expérimentation à deux ans, et adaptant en conséquence les dispositions portant sur les demandes de rapports.

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

Article 22
Réforme du mode de calcul de la pension de retraite de base
des non-salariés agricoles

Cet article réforme la pension de retraite de base des non-salariés agricoles afin d'en aligner le mode de calcul sur le régime général. Il supprime les retraites forfaitaire et proportionnelle pour calculer la retraite de base sur les vingt-cinq meilleures années de revenus. La mesure prendra effet rétroactivement au 1er janvier 2026, la CCMSA n'étant pas en capacité de l'appliquer avant le 1er janvier 2028.

La commission propose d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.

I - Le dispositif proposé : le calcul de la retraite de base des non-salariés agricoles sur les vingt-cinq meilleures années de revenus

A. L'état du droit : la pension de retraite des non-salariés agricoles, particulièrement complexe, se divise en plusieurs parts et bénéficie de l'encadrement de minima

1. Le régime des non-salariés agricoles regroupe différents statuts d'assurés ayant en commun l'exercice d'une activité professionnelle agricole non salariée

L'affiliation au régime des non-salariés des professions agricoles est ouverte aux personnes non salariées réalisant des activités dites « agricoles » dans des entreprises et des exploitations ad hoc, dont la liste figure à l'article L. 722-1 du code rural et de la pêche maritime.

Ces activités recoupent l'élevage, le dressage, les travaux agricoles, forestiers, ou encore la conchyliculture (élevage des coquillages) et la pisciculture (élevage de poissons).

Par ailleurs, le temps de travail en lien avec des activités de prolongement de la production, telles que le conditionnement et la transformation de produits agricoles et les activités d'agrotourisme, compte pour apprécier l'affiliation au régime des non-salariés.

Les différents statuts des non-salariés agricoles

Le chef d'exploitation ou d'entreprise agricole 738(*), qui dirige et met en valeur une exploitation ou une entreprise dont l'importance atteint l'un des critères de l'activité minimale d'assujettissement, à savoir :

1° La superficie mise en valeur est au moins égale à la surface minimale d'assujettissement, fixée par arrêté préfectoral pour chaque département et chaque type de culture ;

2° Dans le cas où la condition fixée au 1° ne peut être appréciée, le temps de travail nécessaire à la conduite de l'activité doit être au moins égal à 1 200 heures par an ;

3° Pour les cotisants exploitant un quart de la surface minimale d'assujettissement ou travaillant entre 150 et 1 200 heures par an sans avoir fait valoir leurs droits à la retraite, le revenu professionnel doit être au moins égal à l'assiette forfaitaire applicable aux cotisations d'assurance maladie, invalidité et maternité, soit 800 Smic horaire.

L'aide familial est une personne âgée d'au moins 16 ans, ascendant, descendant, frère, soeur ou allié du même degré du chef d'exploitation agricole, ou de son conjoint, qui vit sur l'exploitation et participe à sa mise en valeur sans être salarié.

Le conjoint collaborateur : ce statut a été créé en 1999 afin de permettre aux personnes mariées, pacsées ou vivant en concubinage avec un chef d'exploitation ou d'entreprise agricole exerçant une activité non rémunérée sur l'exploitation et l'entreprise, de bénéficier d'une protection sociale au même titre que les aides familiaux, en contrepartie de cotisations sociales relativement faibles. Depuis le 1er janvier 2022, ce statut est limité à 5 ans, durée au terme de laquelle le conjoint devrait opter entre le statut de co-exploitant ou de salarié.

L'associé d'exploitation s'entend d'une personne non salariée, âgée de 18 ans révolus et de moins de 35 ans, descendant, frère, soeur ou allié du même degré du chef d'exploitation agricole ou de son conjoint, qui a pour activité principale la participation à la mise en valeur de l'exploitation739(*). Les personnes bénéficiant de ce statut depuis le 18 mai 2005 sont également soumises à une durée maximale de 5 ans, au terme de laquelle ils doivent opter pour le statut de co-exploitant ou de salarié.

2. Le système de retraite des non-salariés agricoles se décompose en trois étages

a) La pension de retraite de base des non-salariés agricoles comprend une pension de retraite forfaitaire et une pension de retraite proportionnelle

La pension de retraite de base des non-salariés agricoles se définit selon une architecture à deux étages, que sont la pension de retraite forfaitaire, identique pour une même durée d'assurance, et la pension de retraite proportionnelle, calculée selon un système par points.

La pension de retraite forfaitaire est ouverte au titre de l'assurance vieillesse individuelle (AVI) aux seuls chefs d'exploitation, aides familiaux et conjoints collaborateurs exerçant leur activité à titre exclusif.

Son montant maximal est égal à celui de l'allocation aux vieux travailleurs salariés (AVTS), soit 328,07 euros par mois au 1er janvier 2024.

Elle est calculée au prorata de la durée d'assurance requise pour l'obtention d'une pension à taux plein : lorsque la durée d'activité est inférieure à cette durée minimale, son montant y est proportionnel.

Le financement de cette retraite forfaitaire est assuré par une cotisation de 3,32 % sur le revenu, dans la limite du plafond annuel de la sécurité sociale (Pass) et sur une assiette minimale de 800 Smic horaire.

Mode de calcul de la pension de retraite forfaitaire des non-salariés agricoles

Source : Commission des affaires sociales du Sénat

La pension de retraite proportionnelle est versée au titre de l'assurance vieillesse agricole (AVA) et repose sur un système par points.

Le nombre de points acquis est fonction des cotisations versées et de la durée d'assurance. Avant 1990, les cotisations étaient calculées sur la base d'un « revenu cadastral » arrêté dans chaque département et selon chaque type d'activité. Depuis cette date, les cotisations sont calculées sur le revenu professionnel dégagé par l'exploitant.

Le barème d'acquisition des points n'est pas purement proportionnel à l'assiette de cotisation, mais assure une redistribution en faveur des plus modestes.

Le nombre de points acquis par annuité diffère selon le statut du non-salarié agricole : les chefs d'exploitation valident entre 23 et 114 points selon leur revenu professionnel, tandis que les membres de sa famille, que sont les collaborateurs et aides familiaux, cotisent sur une assiette forfaitaire qui leur confère 16 points par annuité.

Par ailleurs, les chefs d'exploitation agricoles cotisent également à l'AVA pour le compte des collaborateurs et aides familiaux qui les assistent.

Mode de calcul de la pension de retraite proportionnelle
des non-salariés agricoles

Source : Commission des affaires sociales du Sénat

Enfin, les personnes ayant exercé une activité agricole non salariée à titre accessoire, en parallèle d'une activité salariée, ne peuvent prétendre qu'à une pension de retraite proportionnelle740(*).

b) À la retraite de base s'ajoute depuis 2003 un système de retraite complémentaire obligatoire (RCO)

Le régime de retraite complémentaire obligatoire a été créé en 2003 et étendu aux conjoints collaborateurs et aux aides familiaux en 2011741(*).

Il fonctionne également par points, qui sont acquis pour les périodes en activité postérieures à 2003 et 2011, et gratuits par année d'activité pour les périodes antérieures à ces dates. Les cotisations sont assises sur les revenus professionnels au taux de 4 % selon une assiette minimale, et les droits acquis sont proportionnels aux cotisations, sans plafond.

Mode de calcul de la pension de retraite complémentaire
des non-salariés agricoles

Source : Commission des affaires sociales du Sénat

3. Le montant des pensions de retraites des non-salariés agricoles, parmi les plus faibles, est garanti par des minima qui s'appliquent aux pensions de base comme complémentaires

a) La pension majorée de référence permet de porter la retraite de base des travailleurs non salariés agricoles au niveau du minimum contributif du régime général

Instaurée en 2009, la pension majorée de référence est une pension différentielle, dont le montant correspond à la différence entre le montant de la retraite de base (forfaitaire et proportionnelle) servie à l'assuré, et un plafond, autrefois différencié selon la qualité d'exploitant, conjoint collaborateur ou aide familial, et désormais unifié à celui du minimum contributif majoré (MiCo) du régime général, soit 892,49 euros depuis le 1er janvier 2024.

Pour en bénéficier, les assurés doivent remplir les conditions suivantes :

- justifier, dans un ou plusieurs régimes obligatoires, de la durée d'assurance ouvrant droit à une pension à taux plein, ou avoir atteint l'âge d'annulation de la décote (67 ans) ;

- faire valoir tous ses droits à la retraite de base et complémentaires, et avoir liquidé les éventuelles pensions de réversion auxquelles il a droit.

Si l'assuré n'a pas été affilié au régime des travailleurs non-salariés agricoles durant toute sa carrière, le montant de la PMR est calculé au prorata de la durée d'assurance qu'il y a accomplie par rapport à la durée d'assurance requise pour l'obtention d'une pension à taux plein.

Enfin, lorsque le montant des pensions de droit propre et dérivé servies par les régimes obligatoires de base et complémentaire excède le seuil d'écrêtement de 1012,02 euros, la majoration de pension est réduite à due concurrence de ce dépassement.

b) Le complément différentiel de points de retraite complémentaire porte celle-ci à un niveau minimal équivalent à 85 % du Smic

Le complément différentiel de points de retraite complémentaire (CDRCO) est ouvert depuis 2014 aux chefs d'exploitation ou d'entreprise agricoles qui justifient, d'une part, d'avoir exercé 17,5 années en cette qualité au régime des non-salariés agricoles, et d'autre part, d'avoir accompli au sein d'un ou plusieurs régimes obligatoires la durée d'assurance requise pour l'obtention d'une pension à taux plein.

À défaut, le montant du CDRCO est calculé au prorata de la durée d'assurance accomplie en qualité de chef d'exploitation ou d'entreprise agricole par rapport à la durée d'assurance requise pour l'obtention d'une retraite à taux plein.

Le CDRCO permet de rehausser la pension de retraite à niveau minimal fixé depuis 2020742(*) à 85 % du Smic agricole en vigueur le 1er janvier de l'année de liquidation de la pension, soit 1 173 euros par mois en 2024.

Tout comme la pension majorée de référence, le complément différentiel de points de retraite complémentaire est soumis à un seuil d'écrêtement. Si le montant des pensions de droit propre servies à l'assuré par l'ensemble des régimes obligatoires de base et complémentaires, y compris le CDRCO, excède 85 % du Smic, alors la majoration est réduite à due concurrence du dépassement.

Les conjoints collaborateurs et les aides familiaux ne bénéficient pas du CDRCO.

La pension de retraite globale des travailleurs non salariés agricoles

Source : Commission des affaires sociales du Sénat

B. Le dispositif proposé : le calcul des pensions de retraite agricoles sur les vingt-cinq meilleures années de revenus

1. Une réforme du mode de calcul de la retraite de base des non-salariés agricoles selon les vingt-cinq années d'assurance était attendue au 1er janvier 2026

La loi n° 2023-87 du 13 février 2023 visant à calculer la retraite de base des non-salariés agricoles en fonction de leurs vingt-cinq meilleures années de revenus, adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale et le Sénat, comportait un article unique indiquant que la Nation se fixait pour objectif de déterminer, à compter du 1er janvier 2026 au lieu de 2024 dans la version initiale, le montant de la pension de base des travailleurs non salariés des professions agricoles en fonction des 25 années civiles d'assurance les plus avantageuses.

Le Gouvernement était néanmoins tenu de remettre, dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la loi, un rapport précisant les modalités de mise en oeuvre de cette réforme, dans le respect des spécificités du régime agricole et la garantie du niveau des pensions et des droits acquis.

Ce rapport, rédigé par l'inspection générale des affaires sociales (Igas) et le conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER), a été remis au Parlement le 30 janvier 2024.

Deux spécificités techniques doivent être prises en compte dans l'élaboration des scenarii de réforme. La première est que la caisse de mutualité sociale agricole ne conserve pas les archives de revenus de ses assurés ayant permis le calcul des retraites proportionnelles, au-delà d'une durée de dix ans, de sorte que tous les revenus antérieurs à 2016 sont perdus. La deuxième est que son système informatique doit subir une rénovation d'ampleur afin de pouvoir intégrer de nouveaux paramètres de calcul des pensions, de sorte qu'il n'était pas assuré qu'il soit opérationnel avant le 1er janvier 2028.

Les différents scenarii retenus par le rapport prenaient en considération l'impossibilité de liquider les pensions des assurés à partir de leurs seuls revenus antérieurs à l'année 2016, de sorte que cette règle était soit appliquée à compter de cette date, soit à compter de l'entrée en vigueur de la réforme, au 1er janvier 2026. Plusieurs scenarii procédaient ainsi à un système de double liquidation des retraites des non-salariés agricoles, conservant le système à points pour les revenus antérieurs à 2016, et appliquant les vingt-cinq meilleures années de revenus postérieurs à cette date.

Dans un souci d'exhaustivité, il convient de présenter quelques scenarii qui n'ont toutefois pas été retenus dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Ainsi, un scénario dit 2B fusionnant la retraite forfaitaire et la retraite proportionnelle en une retraite de base n'étant plus constituée que d'une retraite proportionnelle à points, et qui prendrait en compte les vingt-cinq meilleures années de points, avait été voté par le Sénat sous la forme d'une proposition de loi portée par Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales.

Il était ainsi accordé aux assurés, pour chaque année de leur carrière, un nombre de points égal au nombre annuel moyen de points acquis pendant leurs 25 années d'assurance les plus avantageuses. Le montant de la pension de retraite correspondait alors au produit du nombre total de points attribués selon ces modalités par la valeur de service du point.

Mode de calcul de la pension de retraite des non-salariés agricoles
proposé au terme du scénario retenu par le Sénat

Source : Commission des affaires sociales du Sénat

Le rapport de l'Igas et du CGAAER retenait pour sa part un scénario dit 4C, qui conservait les règles actuelles de liquidation des pensions pour la partie de carrière antérieure à 2016, et liquidait la partie de carrière postérieure à 2015 selon la règle de calcul des vingt-cinq meilleures années de revenus. Le nombre de meilleures années à retenir était calculé en appliquant un coefficient de proratisation aux années avec revenus.

Mode de calcul de la pension de retraite des non-salariés agricoles
préconisé par le rapport de l'IGAS et du CGAAER

Partie de la pension correspondant à la partie de la carrière antérieure à 2016

Partie de la pension correspondant à la partie de la carrière postérieure à 2015

Source : Commission des affaires sociales du Sénat

Il convient également de souligner que ce scénario avait été retenu après que le Gouvernement eut écarté les scénarii consistant à sélectionner les vingt-cinq meilleures années de points, arguant qu'une telle sélection serait contraire à la logique d'accumulation de points de ce type de système de retraite.

2. Le choix d'un alignement du mode de calcul sur le régime général

a) La retraite de base des non-salariés agricoles partageait déjà certains paramètres communs avec les régimes alignés

Malgré sa forme particulière, la pension de retraite de base des non-salariés agricoles partageait déjà certains paramètres avec les régimes alignés, que sont :

- l'existence d'un âge légal de départ en retraite ;

- l'existence d'une durée d'assurance requise pour l'obtention d'une pension à taux plein, d'un mécanisme de décote et de surcote, applicable tant à la retraite forfaitaire qu'à la retraite proportionnelle, et d'un âge d'annulation de la décote, fixé à 67 ans743(*) ;

- le plafonnement du montant global de la pension de base à 50 % du Pass744(*) ;

- l'indexation des pensions sur l'inflation, dans les mêmes conditions que dans les régimes alignés745(*), contrairement à d'autres régimes par points, comme l'Agirc-Arrco, qui déterminent le coefficient de revalorisation des pensions qu'ils servent de façon à assurer leur équilibre financier.

b) La réforme prévoit la création d'une nouvelle pension de base fondée sur les vingt-cinq meilleures années de revenus, tous régimes confondus

Le scénario retenu à terme par le Gouvernement est celui d'une liquidation des pensions des non-salariés agricoles sur les vingt-cinq meilleures années de revenus, sur le modèle du régime général et des régimes alignés (salariés du privé, salariés agricoles et non-salariés non agricoles).

La pension de retraite des régimes alignés est calculée en appliquant au revenu annuel moyen des vingt-cinq meilleures années un taux dépendant de la durée d'assurance. Le taux plein s'élève à 50 %.

Les pensions de retraite forfaitaire proportionnelle seraient ainsi fusionnées en une retraite de base, calculée comme celle des régimes alignés, en prenant en compte les vingt-cinq meilleures années de revenus.

Cet alignement permettrait répartir les vingt-cinq meilleures années de revenus des polypensionnés, qui représentent 85 % des non-salariés agricoles, entre le régime des non-salariés agricole et les régimes alignés au prorata des durées d'assurance accomplies dans chacun des régimes.

Mode de calcul de la pension de retraite de base des non-salariés agricoles
pour les salariés ayant démarré leur carrière après 2016

Source : Commission des affaires sociales du Sénat

Une telle réforme ne pourra être mise en oeuvre que pour les non-salariés agricoles ayant démarré leur carrière agricole après 2016, eu égard au fait que la CCMSA ne conserve pas les revenus antérieurs à cette date. Elle trouverait donc à s'appliquer en 2041 au plus tôt.

Pour cette raison, le Gouvernement propose de retenir d'ici à cette date un autre scénario, afin de respecter l'objectif fixé par le législateur d'une réforme du mode de calcul de la retraite des non-salariés agricoles sur leurs vingt-cinq meilleures années de revenus entrant en vigueur 1er janvier 2026.

Pour la partie de carrière accomplie au sein du régime des non-salariés agricoles, les années seront réparties entre les périodes avant et après 2016, au prorata de la durée d'assurance accomplie sur chacune des périodes.

Seront prises en compte les vingt-cinq meilleures années de points acquis avant 2016, comme dans le scénario de type 2B retenu par le Sénat, et les vingt-cinq meilleures années de revenus postérieurs à 2015.

Enfin, pour les polypensionnés, l'ensemble de la retraite sera liquidé au prorata des années accomplies dans chacun des régimes, les vingt-cinq meilleures années de revenus étant prises en compte au titre de leur carrière dans les régimes alignés.

Le Gouvernement justifie le choix de scénario par le fait que les polypensionnés, qui représentent 85 % des non-salariés agricoles, gagneront à voir pris en compte les 25 meilleures années de revenus sur l'ensemble de leur carrière, tous régimes confondus.

L'étude d'impact de l'article 22 cite en exemple 3 cas de polypensionnés sortant gagnants de la réforme :

- un salarié ayant gagné des revenus entre 1 et 2,5 Smic et exercé en qualité de chef d'exploitation pendant 10 ans avec des revenus fluctuants, dont certains atteignent 800 Smic. La prise en compte des 25 meilleures années de revenus améliorerait sa pension de 23 % ;

- un salarié ayant perçu en cette qualité un revenu égal à 0,5 Pass pendant 10 ans, puis un revenu égal à un Pass en qualité de chef d'exploitation, pour une durée non renseignée. Il bénéficie de la suppression du système de points fondé sur un barème, pour un gain de 4 % du montant de sa pension totale après la réforme ;

- un chef d'exploitation ayant perçu pendant 10 ans un revenu de 0,5 Pass puis pendant 15 ans un revenu équivalent à un Pass, puis achève sa carrière en tant que salarié avec ce même revenu. La réforme supprime les années les moins rémunératrices de sa pension de non-salarié agricole et améliore sa pension de 3 % en 2028.

En revanche, parmi la population monopensionnée du régime des non-salariés agricoles, seuls ceux qui ont d'activité supérieurs à 800 Smic, et qui bénéficient d'un faible effet redistributif du barème de points, gagneront à la prise en compte des 25 meilleures années de revenus.

Tel serait le cas d'un monopensionné dont le revenu est égal au salaire moyen sur l'ensemble de sa carrière. Selon l'étude d'impact, sa pension s'améliorerait en 2028 de 10 % à la suite de la réforme.

c) Les difficultés informatiques auxquelles se heurte la CCMSA justifient que la réforme s'appliquera au 1er janvier 2028 et rétroactivement, au 1er janvier 2026

Si le texte de l'article 22 du PLFSS pour 2025 prévoit que la réforme consistant à calculer la retraite de base des non-salariés agricoles sur les vingt-cinq meilleures années s'appliquera au 1er janvier 2026, cette application se fera de manière rétroactive. En effet, une clause de sauvegarde trouvera à s'appliquer entre le 1er janvier 2026 et le 31 décembre 2027, période pendant laquelle les nouvelles pensions seront liquidées selon le droit actuellement en vigueur.

Au 1er janvier 2028, le système informatique de la CCMSA serait en capacité d'isoler les vingt-cinq meilleures années sur le système de points pour les revenus antérieurs à 2016, et sur les revenus postérieurs à 2016. Les pensions versées pendant ces deux années pour les seuls pensionnés ayant liquidé leur pension après le 1er janvier 2026 seront ainsi recalculées, et la réforme appliquée rétroactivement. S'il apparaît que le montant de la pension après application de la réforme est plus favorable à celui calculé sur le droit antérieur, des rappels de pensions seront versés au pensionné et le montant de la pension sera révisé. En revanche, s'il apparaît inversement que la pension liquidée selon les règles nouvelles est moins élevée que celle obtenue en application du droit antérieur, le trop-perçu ne sera pas réclamé et le montant de la pension calculé sur le droit antérieur serait acquis définitivement.

3. L'extension des minima de pension

La réforme du mode de calcul de la retraite de base des non-salariés agricoles s'accompagne de mesures visant à revaloriser les minima de pension et à en étendre le bénéfice aux non-salariés agricoles exerçant leur activité professionnelle à titre secondaire.

Mesures de convergence entre les régimes alignés et non salariés agricoles
entrant en vigueur au 1er janvier 2026

 Relèvement du plafond d'écrêtement tous régimes de la pension majorée de référence (PMR) (1 073 € brut en 2023) à celui du minimum contributif (MiCo) (1 387 € brut).

 Exclusion des nouvelles pensions de droit propre et dérivé issues du cumul emploi-retraite dans le calcul de la PMR et du complément différentiel de points de retraite (CD de RCO).

 Extension du bénéfice de la PMR et du CD de RCO aux non-salariés exerçant leur activité à titre secondaire, en contrepartie de l'augmentation de leur effort contributif afin de converger vers celui des travailleurs indépendants (cf commentaire de l'article 3). Cette mesure s'appliquera au titre des années cotisées à compter du 1er janvier 2026.

 Ouverture de droits à pension au titre des années incomplètes et des périodes d'exercice d'un mandat local.

 Extension du cumul emploi retraite générateur de nouveaux droits à pension au cumul emploi retraite sur dérogation préfectorale, au titre du maintien de l'activité à défaut de repreneur.

 Simplification du dispositif de surcote parentale sur une seule période de référence, et non plus l'ensemble des périodes discontinues entre la surcote parentale et la surcote de droit commun.

 Liquidation du dispositif de pension d'orphelin dans le cadre de la liquidation unique des régimes alignés (LURA).

Le Gouvernement sollicite enfin une habilitation à légiférer par ordonnance pour transposer la réforme du mode de calcul de la pension de retraite de base dans les départements d'outre-mer. L'assiette sociale des non-salariés agricoles ultramarins, qui est actuellement assise sur la superficie réelle pondérée de l'exploitation, doit être réformée par ordonnance que le Gouvernement a été habilité à prendre aux termes de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024.

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

L'Assemblée nationale n'ayant pas examiné cet article, le Gouvernement l'a transmis au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

La commission se félicite de la mise en oeuvre d'une réforme du mode de calcul de la retraite de base des non-salariés agricoles selon les 25 années d'assurance les plus avantageuses, qu'elle appelait de ses voeux.

Elle regrette toutefois que la mise en oeuvre de celle-ci sur la partie de retraite correspondant aux années cotisées au régime des non-salariés agricoles antérieurement à 2016 ne puisse se faire qu'à compter du 1er janvier 2028, et non au 1er janvier 2026.

Soucieuse du fait qu'il n'y ait pas de perdants, elle a étudié avec attention l'impact du scénario retenu par le Gouvernement sur les monopensionnés dont le revenu était inférieur à 800 Smic et qui bénéficiaient ainsi de l'effet redistributif du barème de points sur lequel est assise la retraite proportionnelle.

Il apparaît néanmoins que les mesures d'alignement du plafond d'écrêtement de la pension majorée de référence (PMR) sur celui du minimum contributif (MiCo), d'une part, et l'extension des minima de pension aux non-salariés exerçant à titre secondaire, d'autre part, permettent de réduire sensiblement le nombre de perdants parmi cette population. Selon les précisions apportées par la direction de la sécurité sociale, la part de perdants est de l'ordre de 2 % avec une perte moyenne de 30 euros bruts.

La commission est également sensible à l'objectif de convergence entre les régimes, qui permettra de faciliter la liquidation des 958 000 non-salariés agricoles exerçant en qualité de poly-pensionnés auprès d'autres régimes, qui sortiront incontestablement gagnants de la réforme.

Elle propose deux amendements. Le premier, le n° 177, a vocation à protéger les aides familiaux, qui ne peuvent exercer en cette qualité au-delà d'une durée de cinq ans, et qui n'auraient pas opté pour un autre statut à l'issue de ce délai tout en continuant à travailler au sein de l'exploitation agricole. La commission propose d'instaurer à leur encontre une présomption de salariat, afin de leur octroyer un statut protecteur et de lutter contre le travail dissimulé. Le second, le n° 178, est d'ordre rédactionnel.

La commission propose d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.

Article 23
Décalage de la revalorisation des pensions et prestations
d'assurance vieillesse au 1er juillet

Cet article vise à décaler de manière pérenne la revalorisation annuelle des pensions et prestations d'assurance vieillesse au 1er juillet au lieu du 1er janvier.

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

I - Le dispositif proposé : le décalage au 1er juillet de la revalorisation sur l'inflation des pensions et prestations d'assurance vieillesse

A. Depuis 2018, les pensions de retraites sont revalorisées sur l'inflation au 1er janvier de chaque année

1. Le principe d'indexation des pensions sur l'inflation est inscrit dans la loi depuis 2003

Afin de maintenir le niveau de vie des retraités, les pensions de retraite sont revalorisées annuellement sur l'inflation hors tabac.

Pratiquée depuis 1987, l'indexation sur l'inflation des pensions de vieillesse servies par le régime général et les régimes alignés a été consacrée en son principe à l'article L. 161-23-1 du code de la sécurité sociale par la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites.

Cette même loi a également étendu le principe de l'indexation sur l'inflation aux pensions de retraite des fonctionnaires746(*). Avant cette date, l'indexation des pensions des fonctionnaires retraités était fonction des revalorisations de traitement des fonctionnaires en activité.

Les pensions de retraite sont désormais revalorisées chaque année en fonction de l'évolution des prix à la consommation, selon un coefficient défini à l'article L. 161-25 du code de la sécurité sociale.

Jusqu'en 2015, le coefficient de revalorisation prenait en compte l'inflation prévisionnelle de l'année en cours, établie par la Commission économique des comptes de la Nation. En cas d'écart avec l'inflation finalement constatée, il était rectifié par arrêté.

Les lois financières pour 2016 ont simplifié cet exercice, en prenant en compte l'inflation constatée par l'Insee. Désormais, les prestations sont revalorisées sur la base de l'inflation moyenne des douze derniers mois, constatée l'avant-dernier mois précédant le mois de la revalorisation.

Depuis 2016, le législateur a également mis en place un « bouclier » afin de prévenir l'évolution à la baisse des prestations en cas d'inflation négative. Dans l'hypothèse d'une baisse des prix, le coefficient de revalorisation égal à l'inflation est porté à un. Les montants sont maintenus à leur niveau antérieur, ce qui signifie qu'ils augmentent en termes réels.

Concrètement, pour une revalorisation qui interviendrait au 1er janvier 2025, le coefficient de revalorisation correspondrait au taux de variation entre la valeur moyenne des indices des prix à la consommation hors tabac de novembre 2023 à octobre 2024 et de novembre 2022 à octobre 2023.

Ce coefficient s'applique aux différents régimes de retraite, ainsi qu'aux salaires portés au compte et à certaines prestations de sécurité sociale telles que les pensions d'invalidité, les rentes AT-MP et l'allocation de solidarité aux personnes âgées747(*).

2. La date de revalorisation annuelle des pensions de retraite a fait l'objet de plusieurs modifications successives

Depuis 2019748(*), la revalorisation du montant des retraites et des prestations non contributives intervient au 1er janvier de chaque année, tandis que d'autres prestations sont, elles, revalorisées le 1er avril selon le même principe.

Les prestations revalorisées le 1er janvier

Les prestations de la branche vieillesse : les pensions de base, la retraite complémentaire du BTP, la retraite complémentaire des contractuels de la fonction publique, l'allocation de solidarité, la pension majorée de référence des exploitants agricoles et le seuil d'écrêtement, la retraite complémentaire des travailleurs indépendants, les pensions de retraite additionnelle des enseignants du privé, les prestations de vieillesse et de réversion, l'allocation de veuvage, le minimum contributif non majoré et majoré ; le minimum des pensions de réversion, la majoration forfaitaire pour enfant à charge, la rente forfaitaire des retraites ouvrières et paysannes , les prestations non contributives que sont l'allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa), ainsi que les anciennes prestations constituant le minimum vieillesse.

Les prestations revalorisées le 1er avril

 Les prestations familiales : revalorisation des bases mensuelles sur lesquelles sont calculées les prestations de la branche famille.

 Les prestations d'invalidité et les rentes AT-MP des régimes de sécurité sociale : les pensions d'invalidité, l'indemnité en capital AT-MP, les rentes AT-MP et le salaire minimum de rentes AT-MP, la prestation complémentaire pour recours à tierce personne, la majoration pour tierce personne AT-MP, l'allocation supplémentaire d'invalidité.

 Les plafonds de ressources pour la complémentaire santé : couverture maladie complémentaire (CMU-c) et aide au paiement d'une complémentaire santé (ACS).

 Les prestations hors champs de la sécurité sociale mais relevant du champ de l'article L. 161-25 : le revenu de solidarité active, l'allocation pour demandeur d'asile, l'allocation temporaire d'attente, l'aide à la réinsertion familiale et sociale des anciens migrants, la prestation transitoire de solidarité, l'allocation aux adultes handicapés.

 Les prestations hors champ de la sécurité sociale et de l'article L. 161-25 : la prime d'activité, les allocations pour le logement et l'aide médicale d'État.

La date de revalorisation des pensions de retraite a changé plusieurs fois au cours des dernières décennies, et n'a pas toujours été alignée sur celle des prestations non contributives.

Entre 2009 et 2013, les pensions ont été revalorisées au 1er avril de chaque année. Cette date a ensuite été décalée au 1er octobre en 2014, et figure désormais au 1er janvier depuis 2018.

Les dates de revalorisation des pensions de retraite et des prestations de solidarité vieillesse n'ont pas toujours concordé. Les secondes étaient revalorisées au 1er avril de chaque année jusqu'à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, qui a fixé leur revalorisation au 1er janvier. Cette harmonisation a également permis une anticipation de la revalorisation exceptionnelle du montant maximum de l'Aspa.

Portée par le décret n° 2018-227 du 30 mars 2018, cette revalorisation a consisté en une hausse mensuelle cumulée de 100 euros accordée entre le 1er janvier 2018 et le 1er janvier 2020 pour une personne seule, et de 155,25 euros pour un couple. Au 1er janvier 2024, l'Aspa s'élève à 1 012,02 euros par mois pour une personne seule et à 1 571,16 euros par mois pour un couple.

3. Plusieurs dérogations à la règle de revalorisation des pensions sur l'inflation sont intervenues ces dernières années

En 2018, les pensions n'ont pas été revalorisées sur l'inflation.

Entre 2019 et 2020, les lois de financement de la sécurité sociale ont dérogé à la règle de revalorisation des pensions de base décrite précédemment.

Ainsi, en 2019, toutes les pensions de retraite, à l'exception de certains minima sociaux, dont le minimum vieillesse, ont été revalorisées à un niveau inférieur à l'inflation pour toutes les pensions, soit 0,3 %. Et, en 2020, seules les pensions de retraite inférieures à 2 000 euros bruts par mois ont été revalorisées sur l'inflation des douze derniers mois, qui était de 1,0 %. De façon dérogatoire à la règle, les pensions supérieures à ce seuil ont été revalorisées à un niveau de 0,3 %, inférieur à l'inflation.

B. Le présent article propose de décaler de manière pérenne la revalorisation des pensions et prestations d'assurance vieillesse sur l'inflation au 1er juillet

1. Ce décalage s'appliquerait à la plupart des prestations de vieillesse, à l'exception des prestations du minimum vieillesse

Le présent article propose de modifier la règle de revalorisation des pensions et prestations d'assurance vieillesse sur l'inflation au 1er janvier, posée à l'article L. 161-23-1 du code de la sécurité sociale.

Il prévoit ainsi de décaler de manière pérenne la date de revalorisation annuelle des pensions et autres prestations d'assurance vieillesse, ainsi que des rémunérations servant au calcul des pensions, au 1er juillet.

Afin de préserver les plus faibles revenus, ce décalage ne s'appliquerait toutefois pas aux prestations de solidarité du minimum vieillesse que sont l'Aspa et l'allocation de solidarité vieillesse, lesquelles continueraient à être revalorisées au 1er janvier.

Les prestations qu'il est proposé de revaloriser le 1er juillet

Les prestations de vieillesse qui entrent dans le champ matériel de l'article L. 161-23-1 du code de la sécurité sociale : les pensions de retraite de base de droit direct, les pensions de réversion, les majorations pour enfant à charge et l'allocation veuvage.

Les minima de pension que sont le minimum contributif du régime général et des régimes alignés (MiCo), le minimum garanti des fonctionnaires (MiGa) et la pension majorée de référence (PMR) de la retraite de base du régime des non-salariés agricoles.

Par le jeu des renvois, ce décalage s'appliquerait également aux pensions de retraites de base des fonctionnaires, des professionnels libéraux et des avocats, des assurés du régime des marins, des exploitants agricoles, aux pensions de vieillesse des assurés du régime des ministres des cultes, ainsi qu'aux pensions de retraite complémentaires des retraités contractuels de la fonction publique (Ircantec) et des travailleurs indépendants.

En revanche, les régimes de retraite pilotés par les partenaires sociaux ne seraient pas concernés par cette mesure. La plupart des pensions de retraite complémentaires en seraient ainsi exclues.

L'Agirc Arrco a annoncé que les retraites complémentaires des salariés du privé seraient revalorisées de 1,6% au 1er novembre 2025, ce qui correspond à une sous-indexation sur l'inflation (prévue à1,8%).

Détail des régimes concernés par le décalage au 1er juillet de la revalorisation des pensions et prestations d'assurance vieillesse par régime

La mesure s'applique aux régimes délimités par le cadre jaune.

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après la Cour des comptes

2. Cette mesure améliorerait le solde des administrations publiques de près de 4 milliards d'euros

a) Une amélioration du solde de près de 4 milliards d'euros pour les administrations publiques, dont 3 milliards pour la sécurité sociale

Selon l'étude d'impact du présent article, le décalage au 1er juillet de la revalorisation des pensions et prestations d'assurance vieillesse sur l'inflation annuelle améliorerait le solde 2025 de la sécurité sociale (régimes obligatoires de base) de 2,9 milliards d'euros et celui de l'État d'1 milliard d'euros.

Avec un rendement global de 3,9 milliards d'euros, cette mesure est l'une des plus importantes du présent PLFSS en termes financiers, avec la réforme des allégements généraux par l'article 6.

Toutefois, selon le rapport économique, social et financier (Resf) annexé au projet de loi de finances, la mesure n'améliorerait réellement le solde des administrations publiques que de 3,6 milliards d'euros. En effet, elle aurait pour effet de réduire le produit de l'impôt sur le revenu.

Le décalage de revalorisation étant permanent, tel est également le cas de l'économie budgétaire associée749(*).

b) Un impact global venant de moindres dépenses de la sécurité sociale

Le rendement de 3,9 milliards d'euros précité correspond à de moindres dépenses de la sécurité sociale.

Les économies permises en 2025 par le décalage de la revalorisation

La mesure aurait un double effet : sur le volume des pensions revalorisées d'une part, le volume total des pensions revalorisées étant moindre au 1er juillet qu'au 1er janvier 2025, et sur le montant de la revalorisation d'autre part, le coefficient de revalorisation appliqué au 1er juillet 2025 étant moindre qu'au 1er janvier 2025.

En effet, le coefficient de revalorisation au 1er janvier 2025 serait de 2,3 %, contre 1,8 % au 1er juillet 2025.

Cela s'explique par le fait que le coefficient de revalorisation retenu au 1er janvier 2025 correspondrait au taux de variation entre la valeur moyenne des indices des prix à la consommation hors tabac de novembre 2023 à octobre 2024 et de novembre 2022 à octobre 2023, alors que le coefficient de revalorisation retenu au 1er juillet 2024 est égal au taux de variation entre la valeur moyenne des indices des prix à la consommation hors tabac de mai 2024 à avril 2025 et de mai 2023 à avril 2024.

Or, les mois de novembre à avril 2023, qui ne sont pas comptabilisés dans le coefficient du 1er juillet 2025, ont vu l'IPCHT augmenter de 2,7 %.

Évolution de l'IPCHT entre novembre 2022 et septembre 2024

IPCHT : indice des prix à la consommation hors tabac

Source : Insee

c) La « récupération » d'un milliard d'euros par l'État du fait de moindres compensations des régimes de retraite

L'État verse à certains régimes obligatoires de base une contribution d'équilibre. Tel est en particulier le cas du régime de retraite des fonctionnaires de l'État.

Le présent article, en réduisant les dépenses de ces régimes, dits « équilibrés », réduit d'autant les contributions versées par l'État750(*).

C'est ce qui explique que les 4 milliards d'euros de moindres dépenses de la sécurité sociale se traduisent in fine par une amélioration du solde de 3 milliards d'euros pour la sécurité sociale (du fait de recettes réduites d'1 milliard d'euros) et d'1 milliard d'euros pour l'État (du fait de dépenses réduites d'1 milliard d'euros).

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

L'Assemblée nationale n'ayant pas examiné cet article, le Gouvernement l'a transmis au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

La commission a constamment défendu le pouvoir d'achat des retraités et s'est d'ailleurs opposée aux différentes mesures de non-indexation ou de sous-indexation des revalorisations de pensions intervenues depuis la fin des années 2010 et rappelées dans le présent commentaire. Elle a, à l'inverse, pleinement soutenu la revalorisation anticipée des pensions au moment du pic d'inflation de 2022, lors de l'examen de la loi du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat.

C'est ce même souci de préserver à long terme le niveau des pensions tout en assurant la soutenabilité financière du système de retraites qui l'avait conduite, de longue date, à soutenir une augmentation progressive de l'âge de départ à la retraite avant que la loi de financement rectificative de la sécurité sociale du 14 avril 2023 porte une telle mesure.

Toutefois, la commission considère que la dégradation brutale et imprévue des finances publiques, notamment de la sécurité sociale et de sa branche vieillesse, impose incontestablement un effort ponctuel de la part de tous - actifs, employeurs et retraités.

Cette nécessité doit néanmoins préserver des principes clés pour la commission :

- d'une part, le maintien du principe de la revalorisation annuelle des pensions et d'une revalorisation intervenant, sur cette base, en 2025 ;

- d'autre part, la protection du pouvoir d'achat des retraités les plus modestes.

C'est pourquoi la commission a adopté un amendement n° 194 au présent article afin d'une part, de maintenir le principe d'une revalorisation de l'ensemble des pensions au 1er janvier, à un montant équivalent à la moitié de l'inflation, et d'autre part, de revaloriser les pensions dont le montant est inférieur à celui du Smic sur la totalité de l'inflation au 1er juillet. Pour ces retraités, le manque à gagner issu de la moindre revalorisation entre janvier et juillet sera ensuite compensé par un versement unique intervenant en juillet.

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

Article 24
Mieux prendre en compte le préjudice personnel en consacrant la dualité des prestations d'incapacité permanente de la branche AT-MP

Cet article propose d'inscrire dans la loi la nature duale des prestations d'incapacité permanente versées par la branche AT-MP. La rente viagère et l'indemnité en capital n'indemniseraient donc plus seulement, comme c'est le cas depuis le revirement de jurisprudence de la Cour de cassation en date du 20 janvier 2023, le préjudice professionnel, mais également le déficit fonctionnel permanent.

En conséquence, cet article révise les modalités de calcul des prestations d'incapacité permanente en les revalorisant : à leur montant actuel, désormais caractérisé comme la part professionnelle des prestations, serait ajoutée une part fonctionnelle, déterminée en fonction d'un taux d'incapacité fonctionnelle nouvellement créé et inspiré du barème du concours médical, et partiellement convertible en capital pour les assurés lourdement atteints.

La commission propose d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.

I - Le dispositif proposé...

A. Les prestations d'incapacité permanente versées par la branche AT-MP permettent une réparation forfaitaire et rapide pour les assurés

1. Le compromis historique de la branche AT-MP : une réparation forfaitaire et non intégrale contre une présomption d'imputation du sinistre à l'activité professionnelle

La politique d'indemnisation de la branche AT-MP repose sur un compromis social ancien, construit puis consolidé par trois grandes lois.

Le droit commun de la réparation corporelle réclame, en vertu de l'article 1353 du code civil, au demandeur d'apporter la preuve de la commission d'une faute afin d'ouvrir droit à une réparation, qui présente alors un caractère intégral. Toutefois, il est apparu, dès le XIXe siècle, que cet équilibre ne convenait pas aux accidents du travail. L'asymétrie dans la relation entre l'employeur et l'employé rend en effet difficile pour le salarié d'attaquer son employeur en justice, sans évoquer le coût et le temps que suppose une telle procédure. Du reste, dans bien des cas, apporter la preuve de la faute de l'employeur pour un accident du travail se serait avéré redoutablement complexe.

La loi du 9 avril 1898751(*) a donc posé les jalons du compromis social historique en dispensant le salarié victime d'un accident du travail d'avoir à apporter la preuve de la faute de son employeur devant le juge pour bénéficier d'une indemnisation, en contrepartie de quoi le salarié ne perçoit pas une indemnisation intégrale mais forfaitaire des préjudices subis, et ne peut, hors cas particulier752(*), agir contre l'employeur en justice, ce dernier bénéficiant d'une immunité civile753(*) en la matière.

Par la suite, la loi du 25 octobre 1919 a étendu le champ du compromis historique aux maladies professionnelles, en leur appliquant des préceptes similaires à ceux qui régissent la réparation des accidents du travail.

La définition des AT-MP

La loi encadre la définition des accidents du travail et des maladies professionnelles :

• l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale définit l'accident du travail comme « l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail », quelle qu'en soit la cause ;

• l'article L. 411-2 du même code définit l'accident de trajet comme « l'accident survenu à un travailleur pendant le trajet d'aller ou de retour » entre la résidence stable et le travail, ou le lieu de déjeuner et le travail. Le régime des accidents du travail s'applique aux accidents de trajet ainsi caractérisés ;

• l'article L. 461-1 du même code caractérise la maladie professionnelle comme « toute maladie désignée dans un tableau » ou « essentiellement et directement causée par le travail ».

En 2022, 935 000 sinistres ont été recensés parmi les assurés du régime général, dont 744 000 accidents du travail, 124 000 accidents de trajet et 67 000 maladies professionnelles.

Troisième volet du triptyque, la loi du 30 octobre 1946754(*) a intégré les accidents du travail et les maladies professionnelles à la sécurité sociale, en en faisant une branche à part entière. Il s'opère donc une mutualisation du risque AT-MP entre les employeurs, qui cotisent en contrepartie afin de financer, seuls, la branche.

Ces trois grandes lois ont façonné les piliers de l'indemnisation AT-MP, toujours appliqués aujourd'hui : la responsabilité présumée de l'employeur, c'est-à-dire la responsabilité sans faute, le caractère forfaitaire de la réparation, et le caractère amiable de la procédure.

Ces piliers ont permis de façonner un système de réparation rapide et prévisible pour les salariés, prenant en compte l'asymétrie dans la relation entre les employeurs et les employés. En outre, le compromis historique préserve les employeurs contre une réparation judiciaire intégrale et non mutualisée, qui les exposerait à des procédures longues et coûteuses et, parfois, à des indemnisations d'un montant de nature à déstabiliser les finances d'une entreprise.

Le développement progressif du champ de la réparation intégrale et l'émergence de régimes de réparation dérogatoires du droit commun, qui, par certains aspects, sont plus favorables que la réparation AT-MP755(*), ne doivent pas invisibiliser l'héritage du compromis historique, auxquels les partenaires sociaux restent unanimement attachés756(*).

2. Les prestations de la branche AT-MP en cas d'incapacité permanente : une rente viagère pour les assurés les plus lourdement atteints, une indemnité en capital pour les autres

Lorsque des lésions consécutives à un AT-MP diminuent durablement les capacités physiques ou mentales d'un assuré, la caisse de sécurité sociale fixe, après stabilisation ou consolidation de l'état de santé, un taux d'incapacité permanente « d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité »757(*), critiqué car imprécis et obsolète758(*).

Si le taux d'incapacité permanente (IPP) excède 10 %, l'assuré est éligible au versement d'une rente viagère. Dans le cas contraire, la réparation prend la forme d'une indemnité en capital.

a) L'indemnité forfaitaire en capital pour les assurés dont le taux d'incapacité permanente est inférieur à 10 %

Au régime général, un assuré présentant un taux d'IPP inférieur à 10 %759(*) a droit au versement, par la branche AT-MP, d'une indemnité en capital760(*) forfaitaire et indépendante du salaire. Revalorisée tous les ans en fonction de l'inflation, son montant varie de 484,53 euros et 4 844,30 euros en fonction du taux d'IPP.

Montant de l'indemnité en capital en fonction du taux d'incapacité permanente

Taux d'incapacité permanente

Montant de l'indemnité en capital

1 %

484,53 €

2 %

787,56 €

3 %

1 150,85 €

4 %

1 816,43 €

5 %

2 301,09 €

6 %

2 846,07 €

7 %

3 451,36 €

8 %

4 117,70 €

9 %

4 844,30 €

Source : Commission des affaires sociales du Sénat d'après l'article D. 434-1 du code de la sécurité sociale, après application des coefficients d'évolution

Cette indemnité est versée en une fois et n'est soumise à aucun prélèvement socio-fiscal. « Jamais à la hauteur des préjudices subis » selon la Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés (Fnath), l'indemnité en capital est pourtant la seule réparation à laquelle les victimes puissent prétendre en droit commun des AT-MP.

Les indemnités en capital représentent, en 2023, 115 millions d'euros à la charge de la branche AT-MP, soit 2 % des prestations versées au titre de l'incapacité permanente, pour près des deux tiers des victimes indemnisées.

Répartition des dépenses d'incapacité permanente du régime général
par taux d'IPP

Source : Rapport annuel 2022 de l'assurance maladie - risques professionnels

b) La rente viagère pour les assurés dont le taux d'incapacité permanente est supérieur à 10 %

Lorsque le taux d'IPP de l'assuré excède 10 %761(*), le régime général762(*) de la branche AT-MP verse trimestriellement ou mensuellement763(*) une rente viagère764(*).

La rente versée aux ayants-droit

La rente peut également être versée à des tiers au sinistre, notamment au conjoint, aux descendants de moins de 25 ans ou aux ascendants à charge en cas de sinistre fatal ou lorsque, au choix du titulaire de la rente, une partie de celle-ci est reversée à son époux ou son partenaire de pacte civil de solidarité.

Le montant mensuel de rente versée est égal au produit entre une fonction du salaire, dite salaire utile, et une fonction du taux d'incapacité, dite taux d'incapacité utile. Ce montant n'est soumis à aucun prélèvement socio-fiscal.

· La détermination du salaire utile : une modulation du salaire réel à la hausse ou à la baisse

Le salaire utile correspond à une modulation à la hausse ou à la baisse765(*) de la rémunération effective totale perçue lors des douze mois précédant l'arrêt de travail provoqué par le sinistre766(*).

Lorsque le salaire de l'assuré est inférieur au salaire minimum des rentes, soit 21 547,85 euros767(*), le salaire utile de l'assuré est automatiquement porté à ce niveau : il s'agit alors d'une modulation à la hausse du salaire réel.

A contrario, le salaire est modulé à la baisse pour devenir le salaire utile dès lors qu'il dépasse deux fois le salaire minimum des rentes : la fraction comprise entre deux et huit768(*) fois ce montant est écrêtée au tiers dans le salaire utile, tandis que la part qui excède huit fois le salaire minimum des rentes769(*) n'est pas prise en compte.

Comparaison entre salaire et salaire utile

Niveau du salaire

Niveau du salaire utile

Salaire inférieur au salaire minimum
des rentes (21 547,85 euros)

Salaire minimum des rentes

Salaire compris entre une et deux fois
le salaire minimum des rentes (21 547,85 euros à 43 095,7 euros)

Salaire réel

Salaire compris entre deux et huit fois
le salaire minimum des rentes (43 095,7 euros à 172 382,8 euros)

Somme de deux fois le salaire minimum

des rentes et du tiers de la part du salaire excédant deux fois le salaire minimum

des rentes

Salaire supérieur à huit fois
le salaire minimum des rentes (172 382,8 euros)

Quatre fois le salaire minimum des rentes

Source : Commission des affaires sociales du Sénat

· Le taux d'incapacité utile : une modulation à la baisse du taux d'IPP réel

Afin de déterminer le taux d'incapacité utile, la caisse de sécurité sociale divise par deux la fraction du taux d'incapacité n'excédant pas 50 % et, le cas échéant, multiplie par 1,5 la part du taux d'incapacité excédant 50 %770(*).

Concrètement, si le taux d'incapacité ne dépasse pas 50 %, le taux utile correspond à la moitié du taux d'incapacité. S'il dépasse 50 %, le taux utile correspond à la somme de 25 % et de la partie du taux d'incapacité dépassant 50 %, multipliée par 1,5.

Taux d'incapacité utile en fonction du taux d'incapacité permanente

Source : Commission des affaires sociales du Sénat

Deux exemples de calcul de la rente viagère AT-MP

Cas n° 1 : un assuré dont le taux d'incapacité est de 40 % et dont le salaire réel est de 40 000 euros. Les règles exposées supra indiquent que le taux utile est ici de 20 %, et que le salaire utile est de 40 000 euros. Le montant annuel de la rente est donc de 20 % de 40 000 euros, soit 8 000 euros.

Cas n° 2 : un assuré dont le taux d'incapacité est de 70 % et dont le salaire réel est de 16 000 euros. Conformément aux règles exposées supra, le taux utile est égal à 50 %, et le salaire utile est porté au salaire minimum des rentes. Le montant annuel de la rente est donc de 10 773,87 euros.

Les rentes versées par la branche AT-MP atteignent 5,7 milliards d'euros en 2023. Le montant annuel moyen des rentes versées par le régime général atteint 2 421 euros en 2022, soit 202 euros par mois.

3. Le cas de la faute inexcusable de l'employeur : une réparation majorée aux frais de l'employeur fautif, et une réparation intégrale sur certains champs non déjà couverts par les prestations AT-MP

Par dérogation au principe d'immunité civile s'appliquant à l'employeur en cas d'AT-MP, sa faute inexcusable peut être retenue par le juge de la sécurité sociale771(*) en cas de manquement d'une particulière gravité aux obligations de sécurité qui lui incombent.

La faute inexcusable de l'employeur (FIE) ouvre droit à une double amélioration de la réparation pour les victimes :

- d'une part, l'indemnisation versée par la branche AT-MP est alors majorée772(*) aux frais de l'employeur fautif, qu'il s'agisse d'une indemnité en capital ou d'une rente. La majoration, encadrée par la loi773(*), est versée en capital par l'employeur fautif ou par son assureur, puis redistribuée à l'assuré par la branche AT-MP sous la forme d'un capital si le taux d'IPP est inférieur à 10 %, et d'une rente sinon ;

- d'autre part, l'assuré reconnu victime d'une FIE peut obtenir la réparation intégrale en capital « du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées, de ses préjudices esthétiques et d'agrément ainsi que celle du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle »774(*), dès lors que l'assuré peut démontrer que ces postes de préjudice ne sont pas déjà réparés par la rente - en vertu du principe de non double indemnisation. La formulation de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, particulièrement elliptique, est source d'hétérogénéité d'interprétation entre juridictions et, donc, d'inéquité entre les assurés.

B. La visée des prestations d'incapacité permanente AT-MP : un débat juridique nourri aux conséquences très concrètes pour les assurés

1. La situation avant le revirement de jurisprudence de la Cour de cassation : la dualité des prestations d'incapacité permanente

La loi est silencieuse sur la visée des prestations d'incapacité permanente versées par la rente AT-MP : les articles L. 434-1 et L. 434-2 du code de la sécurité sociale se bornent à rappeler respectivement qu' « une indemnité en capital est attribuée à la victime d'un accident du travail atteinte d'une incapacité permanente inférieure à un pourcentage déterminé » et que « lorsque l'incapacité permanente est égale ou supérieure à un taux minimum, la victime a droit à une rente », sans préciser les postes de préjudice indemnisés.

Dans ce contexte, des controverses juridiques nourries sont nées quant à la visée des prestations d'incapacité permanente de la branche : n'indemnisent-elles que le préjudice professionnel, c'est-à-dire les pertes de salaires encourues, ou bien présentent-elles un caractère dual et couvrent-elles également le déficit fonctionnel permanent, c'est-à-dire la perte de potentiel physique et intellectuel ?

Définition du déficit fonctionnel permanent

Le rapport Dintilhac775(*) décrit le déficit fonctionnel permanent comme « la réduction définitive du potentiel physique, psychosensoriel, ou intellectuel résultant de l'atteinte à l'intégrité anatomo-physiologique médicalement contestable, donc appréciable par un examen clinique approprié complété par l'étude des examens complémentaires produits, à laquelle s'ajoutent les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques, normalement liés à l'atteinte séquellaire décrite ainsi que les conséquences habituellement et objectivement liées à cette atteinte dans la vie de tous les jours ».

Dans le silence de la loi, le juge s'est prononcé. Contrairement à une croyance répandue, la dualité de la rente n'est pas un élément du compromis social de 1898, et il a fallu attendre les années 2000 pour qu'elle soit consacrée par le juge judiciaire. Ce n'est en effet que par plusieurs avis et arrêts776(*) entre 2007 et 2009 que la Cour de cassation a reconnu aux prestations d'incapacité permanente un caractère dual, c'est-à-dire à la fois professionnel et fonctionnel.

La reconnaissance d'un caractère dual aux prestations d'incapacité permanente de la branche a un corollaire : le déficit fonctionnel permanent étant couvert par l'indemnisation AT-MP, il ne peut, en conséquence, pas faire partie des postes de préjudices indemnisables intégralement par le juge en cas de FIE, en vertu du principe de non double indemnisation.

2. Depuis le revirement de jurisprudence de la Cour de cassation, les prestations d'incapacité permanentes ne sont réputées couvrir que le déficit professionnel, ce qui ouvre droit à une réparation intégrale en capital en cas de faute inexcusable de l'employeur

La position de la Cour de cassation n'était toutefois pas partagée par l'ensemble des juridictions, le Conseil d'État estimant, quant à lui, que la rente n'avait qu'une visée professionnelle777(*).

Qui plus est, rien ne permettait de distinguer, au sein de la rente ou de l'indemnité en capital, une part professionnelle et une part fonctionnelle. Pire, le mode de calcul de la rente exposé supra induisait que le déficit physique et intellectuel d'un assuré était directement proportionnel au salaire de ce dernier.

Dans ces conditions, la Cour de cassation a opéré un revirement de jurisprudence par deux arrêts du 20 janvier 2023778(*) : elle estime désormais que la rente ne présente pas de caractère dual, mais a seulement pour objet de réparer le déficit professionnel. Elle se fonde pour cela sur l'impossibilité d'indemniser le DFP, par nature extraprofessionnel, en fonction du salaire ainsi que sur la difficulté pour la victime de FIE d'administrer la preuve que la rente n'indemnise pas le déficit fonctionnel permanent.

Ce revirement de jurisprudence est dépourvu de conséquence pour les victimes d'AT-MP sans FIE : l'inclusion ou non du DFP dans les postes de préjudices indemnisés n'ayant, pour eux, qu'une portée symbolique puisque cela ne modifie ni leur éligibilité à une prestation, ni son montant.

En revanche, pour les victimes de faute inexcusable de l'employeur, les arrêts du 20 janvier 2023 se traduisent par une amélioration conséquente de l'indemnisation à laquelle ils ont droit, parfois de l'ordre de la centaine de milliers d'euros. En faisant sortir le déficit fonctionnel permanent des postes de préjudice indemnisés par la rente, la Cour de cassation ouvre en effet le droit aux victimes de FIE de percevoir une réparation intégrale en capital de ce poste de préjudices, à la charge de l'employeur fautif.

Le revirement de jurisprudence de la Cour de cassation avait donc suscité l'enthousiasme des associations d'accidentés du travail. La Fnath estime que cette évolution constitue « une grande avancée pour les victimes et une mesure de justice [attendue] depuis de nombreuses années ».

3. À l'unisson, les partenaires sociaux ont appelé le législateur à prendre les mesures nécessaires pour réaffirmer le caractère dual des prestations d'incapacité permanente de la branche AT-MP

a) L'accord national interprofessionnel du 15 mai 2023 appelle le législateur à prendre toutes les mesures nécessaires pour réaffirmer la dualité de la rente

Les partenaires sociaux ont quant à eux estimé que la solution retenue par la Cour de cassation induisait un risque de judiciarisation de la réparation des AT-MP en provoquant une amélioration considérable de la réparation par voie contentieuse déconnectée de toute revalorisation de l'indemnisation amiable.

Or salariés comme employés ont à perdre à un système plus judiciarisé, dès lors que la réparation y serait plus imprévisible et moins rapide.

C'est pourquoi les partenaires sociaux représentatifs à l'échelle nationale ont signé à l'unanimité, le 15 mai 2023, un accord national interprofessionnel779(*) (ANI) préconisant que « les moyens de la branche AT-MP soient effectivement consacrés à [...] améliorer les modalités de réparation » par la voie amiable tout en accompagnant ce souhait d'un appel au législateur à « prendre toutes les mesures nécessaires afin de garantir que la dualité de la rente ne soit pas remise en cause ».

b) Une tentative de transposition de l'ANI échouée parce qu'insuffisamment fidèle : l'article 39 du PLFSS pour 2024

Le Gouvernement a entendu retranscrire les demandes formulées par les partenaires sociaux dans le cadre de l'ANI par l'article 39 du PLFSS pour 2024.

Toutefois, les modalités de transposition retenues par le Gouvernement, jugées insuffisamment fidèles à l'esprit de l'ANI par les syndicats, ont provoqué un dissensus entre les partenaires sociaux à l'origine du retrait de l'article. Le Gouvernement avait en effet prévu la création d'une part fonctionnelle à la rente, qui se serait ajoutée à une part professionnelle correspondant au montant actuel de la rente décoté. Certaines victimes auraient été perdantes et, pour les autres, la rédaction retenue rendait les améliorations de réparation très incertaines, d'autant plus que l'effort financier annoncé était en-deçà des attentes.

La commission des affaires sociales du Sénat avait alors déploré « une réforme mal comprise et inapplicable en l'état », pointant du doigt le « manque de préparation évident de cette réforme par le Gouvernement ».

c) Par un relevé de décisions du comité de suivi de l'ANI, les partenaires sociaux ont précisé leur demande

Dans le but d'aboutir à des modalités partagées de transposition de l'ANI dans le droit positif, les discussions entre partenaires sociaux ont repris, courant 2024, au sein d'un groupe de travail avec l'ingénierie de la direction de la sécurité sociale et de la direction des risques professionnelles de la Cnam.

Ce travail a abouti, le 25 juin 2024, à la publication d'un relevé de décisions signé par l'ensemble des partenaires sociaux représentatifs à l'échelle nationale à l'exception de la CGT. Ce relevé de décision liste précisément les mesures réclamées par les partenaires sociaux afin de réaffirmer la nature duale de la rente et de revaloriser les prestations d'incapacité permanente.

Les partenaires sociaux signataires souhaitent que les prestations d'incapacité permanente AT-MP - rente comme indemnité en capital - soient désormais composées d'une part professionnelle et d'une part fonctionnelle.

La part professionnelle, visant à compenser les pertes de gains futurs, serait exactement égale au montant total auquel a droit un assuré aujourd'hui au titre de la réparation AT-MP.

La part fonctionnelle serait quant à elle calculée comme le produit entre un taux d'incapacité fonctionnelle ad hoc inspiré du barème du concours médical et la fraction de la valeur d'un point d'incapacité, inspirée du barème Mornet utilisé dans le droit de la réparation corporelle.

En cas de faute inexcusable de l'employeur, l'assuré bénéficierait d'une majoration tant de la part professionnelle que de la part fonctionnelle, à la charge de l'employeur.

Pour les assurés présentant un taux d'IPP élevé, de plus de 50 %, les partenaires sociaux préconisent également d'introduire une possibilité de convertir une partie de la part fonctionnelle de la rente en capital, permettant un gain financier rapide pour les assurés afin de subvenir aux frais d'adaptation encourus. La sortie en capital serait limitée au plafond annuel de la sécurité sociale, soit 46 368 euros.

C. Le dispositif proposé : réaffirmer la dualité des prestations d'incapacité permanente, et en tirer les conséquences en modifiant avantageusement leur mode de calcul

L'article 24 entend transposer en droit positif les demandes effectuées par les partenaires sociaux dans le cadre de l'ANI du 15 mai 2023 et précisées dans le relevé de décisions du comité de suivi de l'ANI en date du 25 juin 2024.

L'article 24 consacre législativement la dualité des prestations d'incapacité permanente de la branche et crée, conformément aux demandes exprimées par les partenaires sociaux, une part fonctionnelle venant s'ajouter au montant actuel des prestations, qui devient la part professionnelle.

1. La consécration législative de la dualité des prestations d'incapacité permanente de la branche

Le 1° du I consacre législativement la dualité des prestations d'incapacité permanente de la branche par le biais du premier alinéa de l'article L. 434-1-A du code de la sécurité sociale que l'article 24 propose de créer dans la partie du code relative aux prestations d'incapacité permanente de la branche AT-MP.

Celui-ci dispose explicitement que l'indemnisation de l'incapacité permanente par la branche « comprend celle due au titre de son incapacité permanente professionnelle et celle due au titre de son incapacité permanente fonctionnelle ».

2. Afin d'évaluer le préjudice fonctionnel, la création d'un taux d'incapacité fonctionnelle inspiré du barème du concours médical

Les deuxième et troisième alinéa de l'article L. 434-1-A du code de la sécurité sociale que le 1° du I propose de créer distinguent deux taux d'incapacité permanente, l'une professionnelle et l'autre fonctionnelle, qui se substitueraient au seul taux utilisé aujourd'hui.

Le deuxième alinéa de l'article L. 434-1-A proposé définit le taux d'incapacité permanente professionnelle en reprenant, en substance, la définition du taux d'IPP, figurant au premier alinéa de l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale, que le a) du 3° du I de l'article 24 se propose en conséquence de supprimer.

Une modification rédactionnelle est toutefois à noter entre les deux versions : la nomenclature de « barème indicatif d'invalidité » aujourd'hui utilisée mais impropre puisqu'induisant une confusion avec la pension d'invalidité servie par la branche maladie, est remplacée par celle de « barème indicatif d'incapacité professionnelle des accidents du travail et maladies professionnelles ». Il est également précisé que ce barème est défini par arrêté des ministres chargés du travail et de la santé. Le f) du 3° du I de l'article 24 opère une modification rédactionnelle similaire en substituant la notion d'incapacité à celle d'invalidité.

Le troisième alinéa de l'article L. 434-1 A proposé définit le taux d'incapacité permanente fonctionnelle, déterminé en fonction des atteintes persistant après la consolidation qui relèvent du déficit fonctionnel permanent. Ce taux serait défini en fonction d'un barème indicatif déterminé selon les mêmes modalités que le taux d'incapacité permanente professionnelle. Il n'est pas fait référence au barème du concours médical, duquel les partenaires sociaux souhaitent s'inspirer, probablement car de telles précisions n'apparaissent pas relever du domaine législatif.

3. La traduction de la dualité des prestations d'incapacité permanente : la scission en une part fonctionnelle et une part professionnelle

a) Pour l'indemnité en capital

Les b) et c) du 2° du I modifient l'article L. 434-1 du code de la sécurité sociale, régissant l'éligibilité et le montant de l'indemnité en capital.

Aux termes du b) du 2° du I, la part professionnelle de l'indemnité en capital sera déterminée dans les mêmes conditions que l'indemnité en capital dans sa globalité dans le droit en vigueur : en fonction d'un barème forfaitaire dépendant du seul taux d'incapacité professionnelle.

Il est toutefois précisé que la part professionnelle est due même si la consolidation intervient alors que le bénéficiaire est titulaire d'une pension de retraite - une disposition prise pour lever toute ambiguïté et faire échec à la lecture d'une inéligibilité des retraités à la part professionnelle des prestations d'incapacité permanente au motif qu'ils n'auraient pas encouru de pertes professionnelles.

Le c) du 2° du I ajoute un alinéa à l'article L. 434-1 précisant que le montant de la part correspondant au DFP de la victime est fonction du taux d'incapacité permanente fonctionnelle, selon un barème forfaitaire fixé par décret.

Le montant de la part professionnelle et de la part fonctionnelle de l'indemnité en capital sera, comme c'est le cas aujourd'hui, revalorisé au 1er avril au niveau de l'inflation hors tabac, et pourra être révisé en cas d'augmentation respectivement des taux d'incapacité professionnelle et fonctionnelle.

b) Pour la rente

Le c) du 3° du I modifie l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale, régissant la rente viagère, afin de la scinder en une part professionnelle et une part fonctionnelle.

La part correspondant à la perte de gains professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité, sera calculée selon les mêmes modalités que l'est la rente dans le droit en vigueur ; à savoir comme le produit entre deux valeurs (1° proposé de l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale) :

- le taux d'incapacité, devenu taux d'incapacité permanente professionnelle, qui « peut être réduit ou augmenté en fonction de la gravité des lésions » - une formule qui reprend, à une modification rédactionnelle près, la rédaction désignant actuellement le taux utile dans l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale ;

- le salaire annuel tel qu'issu de l'application de la formule dégressive mentionnée au dernier alinéa de l'article L. 434-16 ou porté au niveau du salaire minimum des rentes s'il est inférieur à ce montant, c'est-à-dire le salaire utile.

La part correspondant au déficit fonctionnel permanent de la victime sera, quant à elle et conformément à la demande des partenaires sociaux, déterminée comme le produit entre :

- le nombre de points d'incapacité permanente fonctionnelle multiplié par un pourcentage défini par arrêté. Il s'agit là d'une transformation analogue à celle du taux d'IPP en taux utile, visant à n'indemniser qu'une fraction du déficit subi dans une logique forfaitaire ;

- la valeur d'un point d'incapacité, fixée par un référentiel prenant en compte l'âge de la victime et défini par arrêté. Il n'est pas fait explicitement référence au barème Mornet, duquel les partenaires sociaux souhaitent s'inspirer, probablement car de telles précisions n'apparaissent pas relever du domaine législatif.

4. L'ouverture d'une possibilité de capitaliser une partie de la rente sur la seule part fonctionnelle et sous condition d'un taux d'incapacité fonctionnel minimal

Conformément à la demande des partenaires sociaux, le c) du 3° du I de l'article 24 prévoit également qu'une partie de la part fonctionnelle de la rente puisse être versée en capital dans des conditions définies par arrêté. Cette potentialité serait réservée aux seuls assurés dépassant un certain taux d'incapacité permanente fonctionnelle, défini par décret. Le seuil de 50 % est évoqué par le Gouvernement.

La part versée en capital est exclue de la revalorisation annuelle des prestations au niveau de l'inflation hors tabac, en vertu du 6° du I de l'article 24, modifiant l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale.

5. Les conséquences sur le régime de la faute inexcusable de l'employeur

Les 7° et 8° du I de l'article 24 tirent les conséquences de la consécration de la dualité des prestations d'incapacité permanente de la branche et des modifications de leur mode de calcul sur le régime d'indemnisation de la faute inexcusable de l'employeur.

a) Sur la majoration des prestations

Le a) du 7° du I de l'article 24 modifient l'article L. 452-2 du code de la sécurité sociale, régissant la majoration des prestations AT-MP en cas de FIE. Il prévoit que la majoration de la rente en cas de FIE concerne tant la part professionnelle que la part fonctionnelle.

La part professionnelle ne peut excéder, après majoration, la fraction du salaire correspondant à la réduction de capacité professionnelle, tandis que le d) du 7° du I prévoit que la part fonctionnelle majorée ne puisse excéder le montant total du nombre de points d'incapacité fonctionnelle multiplié par la valeur d'un point d'incapacité permanente fonctionnelle.

L'indemnité en capital pourra également être majorée, sans toutefois que la majoration puisse dépasser le montant initial de l'indemnité, mais cela ne nécessite pas de modification législative.

b) Sur les postes de préjudices indemnisables par voie contentieuse

Tirant les conséquences du fait que la rente répare désormais le déficit fonctionnel permanent après consolidation, le 8° du I de l'article 24 proscrit que ce poste de préjudices puisse être également indemnisé par voie contentieuse.

L'article L. 452-3, déterminant les modalités d'accès à la réparation contentieuse en cas de FIE et les postes de préjudices réparables, est modifié pour prévoir désormais que « l'ensemble des préjudices n'ayant pas fait l'objet d'une réparation forfaitaire » au titre de la réparation AT-MP peut faire l'objet d'une indemnisation intégrale en capital par la voie contentieuse (a) du 8° du I). Cette formulation clarifie l'application du principe de non double indemnisation : tout ce qui est indemnisé par la branche ne peut l'être par le juge ; mais tout ce qui n'est pas indemnisé par la branche peut l'être par le juge.

Le b) du 8° du I tire les conséquences de l'intégration du DFP après consolidation dans les postes de préjudices indemnisés par la rente, en excluant les « souffrances physiques et morales [...] endurées »780(*) après consolidation des postes de préjudices indemnisables au contentieux. La rédaction proposée prévoit que seules pourront être indemnisées au contentieux les souffrances physiques et morales endurées avant la date de consolidation.

6. Une commission des garanties créée pour permettre aux partenaires sociaux de veiller au bon calibrage des paramètres réglementaires de la réforme

Le II de l'article 24 crée, au sein de la CAT-MP, une commission des garanties composée de partenaires sociaux, chargée de suivre la mise en oeuvre de la réforme et consultée sur les textes réglementaires d'application requis : arrêté définissant le barème d'incapacité permanente fonctionnelle, arrêté définissant le barème de valorisation d'un point d'incapacité permanente fonctionnelle pour l'indemnité en capital et pour la rente, arrêté définissant le pourcentage forfaitaire de prise en compte du déficit fonctionnel dans le calcul de la part fonctionnelle de la rente, arrêté définissant les conditions dans lesquelles la part fonctionnelle de la rente peut être convertie partiellement en capital.

Cette commission permettra aux partenaires sociaux de veiller à ce que la transcription de la réforme par le pouvoir réglementaire soit fidèle à leur intention partagée dans l'ANI et le relevé de décisions associé.

7. Une application à compter du 1er juin 2026 au plus tard

Le III de l'article 24 renvoie à un décret, et au plus tard au 1er juin 2026, la date d'entrée en vigueur de l'ensemble des dispositions de l'article, qui ne concernera que les victimes dont la consolidation est postérieure à l'entrée en vigueur.

Un tel délai est explicable par les difficultés techniques générées par la création d'un taux d'incapacité permanente fonctionnelle. Il s'agira, dans un premier temps, de déterminer le barème applicable pour l'incapacité permanente fonctionnelle, ainsi que celui applicable à la valorisation de l'incapacité fonctionnelle. Une fois que le premier barème sera défini, il sera également nécessaire de former les médecins-conseil à ce nouveau barème afin qu'ils puissent se l'approprier en vue d'une application homogène et équitable sur le territoire.

8. Diverses modifications rédactionnelles rendues nécessaires par la réforme

Les a) du 2° du I, b), d) et e) du 3° du I, le 4° du I, le b) et le c) du 7° du I visent tous à tirer les conséquences de la transformation du taux d'incapacité permanente en taux d'incapacité permanente professionnelle, et du montant actuel des prestations en la part professionnelle du montant de ces prestations. Il est à noter que ce sera bien le taux d'incapacité professionnel qui déterminera si la victime est éligible à une rente ou à une indemnité en capital, le taux d'incapacité fonctionnelle n'étant utilisé que pour déterminer le montant de la part fonctionnelle associée à la prestation et l'éligibilité à la conversion d'une partie de la rente en capital.

Le 5° du I opère à une coordination rendue nécessaire par la restructuration du droit en vigueur par le droit proposé.

9. Un impact financier progressif mais certain

L'étude d'impact annexée au PLFSS prévoit un coût total capitalisé de la mesure à 497,5 millions d'euros, scindé entre 442 millions d'euros pour les rentes et 55,5 millions d'euros pour les indemnités en capital. Le coût serait réparti entre le régime général (454 millions d'euros dont 400 millions d'euros au titre de la rente et 54 millions d'euros au titre de l'indemnité en capital) et celui des salariés agricoles.

La montée en charge sera toutefois très progressive : compte tenu de l'entrée en vigueur prévisionnelle en juin 2026, les dépenses supplémentaires au titre de 2025 sont nulles et atteignent 49 millions d'euros en 2026. En année pleine, c'est-à-dire en 2027, 105 millions d'euros de dépenses prévisionnelles supplémentaires sont à prévoir, un total qui devrait augmenter de 17,9 millions d'euros par an, à mesure que les nouveaux rentiers entrent en dispositif.

La possibilité de capitaliser une partie du déficit fonctionnel permanent devrait représenter un coût annuel de 22 millions d'euros pour le régime général.

Enfin, la réforme devrait permettre à nouveau aux caisses de sécurité social d'agir au titre du recours contre tiers pour récupérer la majoration versée aux victimes de FIE au titre du déficit fonctionnel permanent auprès des employeurs coupables. Cette possibilité devrait augmenter de 60 millions d'euros les recettes de la branche en année pleine.

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

L'Assemblée nationale n'ayant pas examiné cet article, le Gouvernement l'a transmis au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

La commission se félicite des modalités de transposition retenues par le Gouvernement, qui apparaissent largement conformes aux demandes des partenaires sociaux.

Le projet du Gouvernement satisfait à de nombreuses recommandations du rapport de la Mecss sur la branche AT-MP781(*).

La commission salue la consécration législative de la dualité de la rente, soutenue par le rapport précité782(*) et les partenaires sociaux. En revalorisant la réparation par la voie contentieuse sans porter d'amélioration à la réparation amiable, la solution retenue par la Cour de cassation créait un écart considérable entre les deux voies de réparation incitant les victimes à recourir à la voie contentieuse. En cela, elle fragilisait le compromis historique et portait en elle le risque d'une judiciarisation du système de réparation, dans lequel la réparation serait plus incertaine, mais surtout beaucoup plus lente, ce qui nuirait tant aux employeurs qu'aux employés.

En outre, dans un contexte juridique marqué par l'importance accrue accordée au DFP, la rapporteure juge opportun que les prestations d'incapacité permanente de la branche AT-MP soient modernisées pour couvrir désormais ce poste de préjudices, selon des modalités propres. Il s'agit là d'une valorisation symbolique et bienvenue des souffrances et des déficiences subies par les victimes dans leur vie personnelle, qui trouve également une traduction financière.

La commission se félicite de la plupart des modalités de mise en oeuvre de la réforme, qui correspondent à des recommandations communes des partenaires sociaux et de la Mecss.

En prévoyant que la part fonctionnelle s'ajoute au montant des prestations versées actuellement, qui deviendraient leur part professionnelle, l'article 24 du PLFSS pour 2025 conduira, s'il est adopté, à revaloriser les prestations d'incapacité permanente pour l'ensemble des assurés, sans faire de perdants, à la différence de l'article 39 du PLFSS pour 2024.

L'investissement consenti, près de 500 millions d'euros à terme, est deux fois supérieur à celui annoncé pour l'article 39 : il permettra de répondre aux attentes légitimes de revalorisation des prestations d'incapacité permanente.

Il s'agit là d'une évolution indispensable : le rapport de la Mecss précité décrie l'insuffisance des prestations d'incapacité permanente de la branche, provoquant une baisse significative de niveau de vie pour les victimes. En particulier, la rapporteure partage l'analyse de la Fnath selon laquelle l'indemnité en capital n'est « jamais à la hauteur des préjudices subis ».

Elle salue donc l'extension de la notion de dualité aux indemnités en capital, qui faisait partie des recommandations du rapport783(*) - la mouture de l'article 39 ne concernait quant à elle que la rente. L'indemnité en capital se verra ainsi considérablement revalorisée, à hauteur de 50 % à en croire l'étude d'impact.

La rapporteure s'étonne toutefois que l'investissement prévisionnel sur les indemnités en capital annoncé dans l'étude d'impact, soit 57,9 millions d'euros en année pleine, soit inférieur de près de moitié à la trajectoire inscrite dans le relevé de décisions du comité de suivi de l'ANI, qui préconisait un effort de 107 millions d'euros. La rapporteure appelle donc le Gouvernement à transcrire fidèlement la volonté des partenaires sociaux jusque dans ses mesures réglementaires d'application, et incite la commission des garanties à apporter une attention particulière à cette question.

Concernant l'indemnité en capital, la commission a adopté un amendement n° 182, soutenu par les partenaires sociaux, visant à calquer le mode de calcul de sa part fonctionnelle sur celui de la part fonctionnelle de la rente : l'intérêt serait, notamment, que ce montant devra dépendre de l'âge de la victime. Les plus jeunes, incapacités plus durablement, s'en verront mieux indemnisés.

Bien que limitée dans son initiative par l'irrecevabilité financière qui aurait été opposée à un tel amendement, la rapporteure aurait souhaité, conformément à la recommandation n° 16 du rapport, faire dépendre la part professionnelle de l'indemnité en capital du salaire. Celle-ci est aujourd'hui déterminée forfaitairement, sans référence à la rémunération, ce qui constitue une curiosité compte tenu l'objectif qui lui est fixé de compenser les pertes de salaires encourues. La rapporteure rappelle que, compte tenu du niveau très faible de l'indemnité en capital par rapport au préjudice subi, sa volonté était que le montant forfaitaire actuellement versé devienne le montant plancher de la part professionnelle de l'indemnité en capital, atteint lorsque la rémunération de l'assuré est inférieure au salaire minimum des rentes.

La commission souscrit enfin à la volonté de donner davantage de marges de manoeuvre financières aux assurés atteints d'une incapacité fonctionnelle lourde, en leur ouvrant droit à convertir en capital une fraction de la part fonctionnelle de leur rente. Cela leur permettra de réaliser les investissements nécessaires à l'adaptation de leur environnement de vie.

La rapporteure salue, enfin, la création de la commission des garanties. Les paramètres de la réforme, dont dépendra son ambition, relèvent pleinement du domaine réglementaire, et il est opportun que les partenaires sociaux puissent se prononcer sur les projets de textes associés et veiller à la fidélité de la transcription réglementaire de la réforme à l'intention des partenaires sociaux. Cette démarche renforce la confiance entre les pouvoirs publics et les partenaires sociaux. Conformément aux demandes exprimées par les partenaires sociaux, la commission a adopté un amendement n° 190 afin de pérenniser cette commission des garanties, dont la durée de vie est aujourd'hui limitée à quatre ans, afin qu'elle puisse se reconstituer pour se prononcer sur toute évolution des textes réglementaires d'application. À l'initiative de sa rapporteure, elle a adopté un autre amendement n° 189 prévoyant que les associations de victimes, sans être intégrées à la commission des garanties, soient entendues au moins une fois par an par ladite commission. En cela, la commission entend concilier la volonté exprimée par les partenaires sociaux que la commission des garanties reste strictement paritaire, et le besoin d'une prise en compte du regard des associations de victimes pour associer l'ensemble des acteurs à la prise de décisions.

Si l'article 24 va dans le bon sens, la rapporteure regrette toutefois que celui-ci ne réponde pas à l'ensemble des enjeux concernant les victimes de FIE. Le rapport précité de la Mecss estime, à cet égard, que « compte tenu du consensus entourant l'insuffisance de l'indemnisation en faute inexcusable », « il est essentiel que les victimes de faute inexcusable de l'employeur fassent l'objet d'un traitement particulier et soient, en tout état de cause, mieux loties qu'avant le revirement de jurisprudence de la Cour de cassation ».

En effet, la consécration de la dualité de la rente a pour corollaire nécessaire, pour les victimes de FIE, une baisse de l'indemnisation de court terme : il n'est désormais plus loisible à ces dernières d'obtenir en justice une indemnisation en capital du déficit fonctionnel permanent dès lors que celui-ci est indemnisé par les prestations AT-MP.

Le projet du Gouvernement, conforme à l'intention des partenaires sociaux, prévoit, en contrepartie, de revaloriser leur indemnisation de long terme, puisque les victimes de FIE bénéficieraient désormais d'une rente majorée tant sur la part professionnelle que sur la part fonctionnelle.

Or cette avancée attendue sur les revenus de long terme ne suffit pas, selon la rapporteure, à répondre au besoin d'amélioration de la réparation des victimes de FIE : il apparaît souhaitable de renforcer l'indemnisation de court terme afin de rapprocher au plus les victimes de FIE de leur situation actuelle. Deux propositions du rapport avaient été faites en ce sens.

La rapporteure se félicite que la recommandation n° 12 du rapport, concernant la clarification du champ précis de l'indemnisation au contentieux, ait pu trouver une traduction législative. La définition par la négative des champs indemnisables par le juge comme ceux n'ayant pas déjà été indemnisés par la rente permettra, en outre, de faire rentrer de nouveaux postes comme le préjudice sexuel dans le champ des préjudices indemnisables intégralement au contentieux en cas de FIE.

Elle regrette toutefois que la recommandation n° 13 ne figure pas dans le texte. Celle-ci préconisait d'ouvrir à toutes les victimes de FIE la possibilité de convertir en capital une partie de la part fonctionnelle de la rente. Compte tenu du fait que la branche AT-MP reçoit de l'employeur fautif ou de son assureur le montant de majoration de la part fonctionnelle de la rente sous forme de capital, il semble difficilement compréhensible que les victimes de FIE ne puissent pas se voir simplement répercuter ce montant et percevoir a minima la majoration de la part fonctionnelle de leur rente sous forme de capital afin d'améliorer leur indemnisation de court terme. La commission a donc adopté un amendement n° 188 afin de prévoir que la majoration de la part fonctionnelle de la rente pour les victimes de faute inexcusable de l'employeur puissent, sur option, la recevoir en capital.

Enfin, la rapporteure rappelle au Gouvernement sa volonté que soit apportée une transcription législative ou réglementaire à tout le contenu de l'ANI du 15 mai 2023, et pas uniquement à son contenu relatif aux prestations d'incapacité permanente.

La commission a également adopté un amendement n° 185 visant à laisser inchangée la règle du taux utile, ainsi que sept amendements rédactionnels et de coordination juridique.

La commission propose d'adopter cet article modifié par les amendements qu'elle a adoptés.

Article additionnel après l'article 24
Renforcer la lutte contre les impayés pour les assistantes
maternelles et les salariés de particuliers employeurs

Cet article vise à renforcer les dispositifs permettant de sécuriser le paiement des assistantes maternelles en prévoyant notamment la suspension du CMG au parent employeur et l'obligation d'adhérer au dispositif « Pajemploi + » en cas d'impayés.

La commission propose d'adopter cet article additionnel ainsi rédigé.

I - Les assistantes maternelles : une profession essentielle pour l'accueil du jeune enfant mais qui doit faire face à un risque particulièrement élevé d'impayés de la part des parents employeurs.

A. Une profession essentielle au secteur de la petite enfance mais qui connaît une importante crise d'attractivité

Les assistantes maternelles sont un élément central de l'offre d'accueil de la petite enfance en France. Composée à 99,4 % de femmes, la profession constitue sur bien des territoires le premier mode d'accueil du jeune enfant, particulièrement dans les zones rurales. Selon les chiffres de l'Observatoire national de la petite enfance, 24 % des enfants de moins de trois ans avaient été accueillis par une assistante maternelle en 2021. La même année, les assistantes maternelles offraient 696 000 places d'accueil, ce qui représente 53 % de l'offre globale d'accueil formel. Il s'agit à ce titre d'une situation unique en Europe. En effet, d'après une étude comparative menée par la Cnaf, les assistantes maternelles constituent 3,5 % des places d'accueil au Portugal, 16 % en Allemagne et 28 % au Danemark.

Toutefois, l'offre d'accueil des assistantes maternelles se réduit fortement ces dernières années (- 48 000 places entre 2019 et 2021) en lien avec la baisse du nombre d'assistantes maternelles. Ainsi, en 2022, on compte 248 000 assistantes maternelles en activité et 236 300 ayant effectivement gardé au moins un enfant de moins de 3 ans. Soit une baisse de près de 100 000 assistantes maternelles en 10 ans (- 97 700). Cette diminution est le symptôme de la perte d'attractivité du métier du fait de l'évolution des conditions de travail et d'emploi.

Évolution du nombre d'assistantes maternelles salariées entre 2010 et 2022

Source : Commission des affaires sociales d'après les données Urssaf - Pajemploi

Le secteur des assistants maternels et des salariés des particuliers employeurs se caractérise par une très forte atomicité - 3,4 millions de particuliers emploient 1,4 million de salariés - et par une grande instabilité des relations professionnelles dans le temps, chaque salarié changeant d'employeur de nombreuses fois au cours de sa carrière au gré des besoins du foyer, des déménagements ou de la scolarisation des enfants. Par ailleurs, les assistantes maternelles peuvent être amenées à être employées par un particulier employeur, un service d'accueil (crèche familiale), une personne morale de droit public (collectivités territoriales telles municipalités, conseils généraux ou établissements publics de santé/sociaux ou médico-sociaux) ou une personne morale de droit privé (associations).

De plus malgré les revalorisations salariales, le salaire des assistantes maternelles reste en deçà de celui de métiers comparables. Ce salaire est encadré entre un minimum - une rémunération horaire de 3,24 euros en 2023 - et un maximum - du fait du plafonnement pour que les parents puissent bénéficier du complément de libre choix de mode de garde fixé à 5 fois le Smic par jour soit 57,60 euros en 2023. Ainsi, le salaire net annuel moyen était en 2022 de 14 600 euros. La rémunération mensuelle nette est en augmentation et dépasse celles des aides à domicile pour s'établir à 97 % du Smic mensuel à temps plein (contre seulement 70 % de celui-ci en 2005), pour près de 42 heures de travail hebdomadaire. Ce rattrapage des rémunérations doit cependant être nuancé, d'une part, par la hausse importante de la qualification moyenne des assistantes maternelles et, d'autre part, par l'évolution du prix de l'immobilier et du logement.

Dans ce cadre et alors que certaines projections font état de 120 000 assistantes maternelles en activité qui pourraient faire valoir leurs droits à retraite d'ici 2030, le précédent gouvernement avait lancé un plan d'action en faveur des assistantes maternelles afin de valoriser la profession. En parallèle, l'Igas a été chargée, au printemps 2024, d'une mission portant sur la qualité d'accueil chez les assistantes maternelles à domicile et en Maison d'assistantes maternelles (MAM), et l'attractivité de la profession.

B. Un métier particulièrement exposé aux risques d'impayés.

La déclaration d'un salaire versé dans le dispositif Pajemploi sans versement effectif du salaire est constitutif d'une fraude et doit être considérée comme telle. Elle donne lieu à la récupération des sommes indûment versées par les caisses de sécurité sociale, selon les modalités prévues à l'article L. 531-8 et aux articles L. 553-1 et suivants du code de la sécurité sociale.

Pourtant, du fait de la relation directe avec l'employeur et de la dépendance de l'employé à la déclaration faite par l'employeur auprès de l'Urssaf ainsi que de l'instabilité des relations contractuelles, le risque de faire face à des impayés peut être particulièrement élevé dans ce secteur. 

Lors des travaux préparatoires à l'examen du présent projet de loi de financement pour la sécurité sociale, le rapporteur a été alerté de la persistance des difficultés rencontrées par les assistantes maternelles face aux risques d'impayés de la part des parents employeurs. Le Syndicat professionnel des assistants maternels et des assistants familiaux (Spamaf) et l'Union fédérale nationale des associations de familles d'accueil et assistants maternels (Ufnafaam) ont fait part de grandes difficultés procédurales pour obtenir gain de cause dans ces situations.

Ce problème est récurrent depuis plusieurs années. Déjà lors de l'examen du projet de loi de financement pour 2023, le Gouvernement avait confirmé, en réponse à un amendement du rapporteur sur la question, avoir été « informé à plusieurs reprises » par les représentants associatifs et syndicaux de ces situations d'impayés. En 2021, l'Ursaaf aurait reçu 1 800 signalements, émanant à la fois de salariés, d'organismes comme la CAF ou de contrôles effectués sur les déclarations des employeurs. Toutefois, le volume réel d'impayés reste difficile à estimer. Le rapporteur estime nécessaire qu'une étude soit menée sur l'ensemble du territoire afin de quantifier précisément le phénomène.

Pour simplifier les démarches des employeurs et sécuriser les rémunérations des employés, le dispositif de recouvrement des cotisations et contributions sociales Pajemploi a été mis en place par les Urssaf pour les gardes d'enfants à domicile et les assistants maternels.

Ce dispositif, généralisé depuis le 1er janvier 2021784(*), permet aux employeurs de déléguer aux Urssaf la déclaration du salarié, l'émission des bulletins de salaire, le calcul et le recouvrement des cotisations et, dans le cadre du Pajemploi+, de procéder à la retenue à la source de l'impôt sur le revenu et de verser la rémunération nette de cotisations et d'impôts au salarié. Le service assure le versement de la rémunération sur le compte bancaire du salarié dans un délai de quatre jours suivant la déclaration sociale de la famille. Pajemploi prélève parallèlement sur le compte bancaire des parents-employeurs la somme restant à leur charge.

Circuit de paiement lorsque l'employeur opte pour l'intermédiation

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, rapport sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, n° 77 (2018-2019), Tome II, p. 204

Par ailleurs, à la suite de travaux menés avec les organisations syndicales, un fonds de garantie des salaires impayés a été mis en place. En effet, bien souvent, en cas de procédure judiciaire, les assistantes maternelles non rémunérées sont confrontées à l'insolvabilité des parents. Depuis le mois d'octobre 2024, Pajemploi + garantit ainsi deux mois d'impayés. Cette garantie devrait être étendue à trois mois en 2025 selon les annonces faites par le Gouvernement au mois d'octobre 2024.

II - Le dispositif proposé

L'amendement n° 191 déposé à l'initiative du rapporteur vise à renforcer les dispositifs permettant de sécuriser le bon versement du salaire des assistantes maternelles ou de la personne employée à domicile pour une garde d'enfant.

A. Suspendre le versement du CMG en cas d'impayés

Premièrement, dans le cas où le dispositif « Pajemploi + » n'est pas activé, il suspend immédiatement le versement du complément de libre choix de mode de garde (CMG) au foyer qui ne s'acquitte pas du salaire de l'assistante maternelle ou de la personne employée à domicile pour une garde d'enfant. Pour cela, cet article modifie l'article L. 531-5 du code de la sécurité sociale afin de prévoir que le versement du CMG est suspendu « sans délai » lorsqu'une déclaration d'impayé est faite par l'employeur.

B. Rendre obligatoire pajemploi + en cas d'impayés

Deuxièmement, il prévoit de rendre obligatoire pour l'employeur visé par un signalement d'impayé l'usage du dispositif « Pajemploi + ». Cette condition serait nécessaire afin que l'employeur puisse de nouveau bénéficier du complément de libre choix de mode de garde. Le paiement du salarié est alors effectué par l'Urssaf Pajemploi + qui se charge ensuite de récupérer le montant auprès de l'employeur. Cette disposition permettra ainsi d'éviter toute récidive.

C. Prévoir que la désactivation du dispositif ne peut se faire qu'après accord du salarié

Enfin, le présent article modifie l'article L. 133-5-12 du code de la sécurité sociale afin de ne rendre possible la désactivation du service Pajemploi + qu'après accord de l'employeur et de l'employé. En effet, plusieurs syndicats ont fait part au rapporteur des risques engendrés par la possibilité pour l'employeur de désactiver de manière unilatérale le service et ainsi, notamment en fin de contrat, percevoir le CMG sans payer le solde de tout compte. L'activation du service « Pajemploi + » résultant d'un accord entre l'employé et l'employeur, le rapporteur estime qu'il est cohérent de prévoir qu'il ne peut être mis fin l'utilisation du dispositif qu'après accord des deux parties prenantes. Par ailleurs, les règles de désactivation automatique du service fixées au VI du même article restent applicables.

Ces dispositifs poursuivent tous le même but : sécuriser la profession d'assistante maternelle et ainsi renforcer son attractivité. Ils s'inscrivent en complément de la garantie d'impayés mise en place par Pajemploi afin d'apporter une réponse à l'insolvabilité de certains parents employeurs. Par ailleurs, ils permettront d'améliorer la lutte contre les fraudes à la caisse d'allocations familiales commises par les employeurs mauvais payeurs qui continuent malgré tout de percevoir des aides.

La commission propose d'adopter cet article additionnel dans la rédaction de l'amendement n° 191.

Article additionnel après l'article 24
Détermination annuelle du plafond tarifaire
des micro-crèches pour le bénéfice du CMG

Cet article prévoit que le Gouvernement fixe annuellement par décret le montant horaire maximal de tarification que les micro-crèches « Paje » peuvent pratiquer et au-delà duquel le complément de libre choix de mode de garde (CMG) « structure » ne peut plus être versé aux ménages.

La commission propose d'adopter cet article additionnel ainsi rédigé.

I - Un plafond horaire maximal non actualisé depuis 2016.

Si la tarification des micro-crèches est libre, elle doit s'inscrire dans un plafond afin de pouvoir bénéficier des financements via le CMG « structure ». Cet encadrement a été mis en place par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 afin notamment de réguler les pratiques tarifaires de certains établissements. Les micro-crèches « Paje » ne peuvent donc pas pratiquer un tarif horaire supérieur à ce plafond sauf à ce que les familles faisant appel à leurs services pour assurer la garde de leur enfant se voient privées du bénéfice du CMG « structure ».

Ce plafond introduit au dernier alinéa de l'article L. 531-6 du code de la sécurité sociale par la LFSS pour 2014 n'a pas été révisé depuis le 1er septembre 2016 et est fixé à 10 euros par heure aux termes de l'article D. 531-23 du même code.

Comme ce fut le cas lors de précédents PLFSS, le rapporteur a été alerté par la fédération française des entreprises de crèches (FFEC) sur ce défaut d'actualisation régulière alors même que le secteur de la petite enfance a beaucoup évolué. Ceci ne semble pas participer d'une politique publique efficiente. À titre de comparaison, la Cnaf dans son barème national des aides aux partenaires 2024 fixe le prix moyen horaire des crèches financées par la prestation de service unique à 11,70 euros de l'heure.

Dans son étude sur le financement des micro-crèches, l'Igas indiquait que le tarif horaire moyen se situait en 2022 à 7,4 euros en 2022. Mais le rapport précisait également que 45 % des établissements atteignaient le plafond de 10 euros par heure et que « de manière à garantir une qualité d'accueil minimale et une juste rémunération des professionnels, celui-ci a vocation à terme à progresser si les coûts des structures augmentent »785(*). En effet, l'absence d'actualisation peut entraîner une pression sur les prix pratiqués par les micro-crèches faisant peser un risque sur la qualité de l'accueil dans ces établissements.

II - Le dispositif proposé : permettre d'adapter le plafond horaire maximal à l'évolution des coûts supportés par les établissements d'accueil du jeune enfant. 

Dans ce cadre, le présent article prévoit que le montant horaire maximal prévu au dernier alinéa de l'article L. 531-6 soit fixé annuellement et selon des modalités précisées par décret.

Le rapporteur ne souhaite pas remettre en cause le mécanisme de régulation tarifaire mis en place par ce plafonnement horaire mais simplement libérer les possibilités de revalorisations salariales ou les décisions d'investissement des gestionnaires de crèches en adaptant au mieux ce plafond avec la réalité de l'évolution des coûts.

Par ailleurs, cette disposition doit s'inscrire en complément des travaux en cours visant à clarifier le périmètre de la tarification et notamment la problématique des « frais annexes ». Ces frais souvent facturés aux parents et non intégrés dans le montant horaire maximal viennent alourdir le reste à charge des familles. Assurer une évolution du montant horaire maximal permettra de mieux intégrer ces coûts dans la tarification et d'harmoniser, au bénéfice des familles, les pratiques parfois très différentes d'une structure à l'autre.

Il apparaît également important au rapporteur, dans un contexte d'inquiétude quant à la qualité de l'accueil au sein des établissements d'accueil du jeune enfant, de poursuivre en parallèle les réflexions sur l'alignement des normes applicables aux micro-crèches « Paje » sur celles applicables aux établissements d'accueil du jeune enfant financés par la prestation de service unique (PSU).

La commission propose d'adopter cet article additionnel dans la rédaction de l'amendement n°192.

TITRE II

DOTATIONS ET OBJECTIFS DE DÉPENSES DES BRANCHES ET DES ORGANISMES CONCOURANT AU FINANCEMENT DES RÉGIMES OBLIGATOIRES

Article 25
Dotations et transferts des régimes obligatoires de base

Cet article fixe pour 2025 les dotations de l'assurance maladie et de la branche autonomie au fonds pour la modernisation et l'investissement en santé (FMIS), ainsi que celle de l'assurance maladie à l'office national d'indemnisation des accidents médicaux (Oniam).

Il fixe également la contribution de la branche autonomie aux agences régionales de santé, ainsi que le reversement de la branche AT-MP au titre de la sous-déclaration et des dépenses engendrées par les dispositifs de prise en compte de la pénibilité, et les dotations de cette branche aux fonds de l'amiante.

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté. Celui-ci vise à prévoir la fixation par la loi des dotations aux opérateurs du champ de la santé et à inscrire ce montant pour 2024.

I - Le dispositif proposé

A. Une baisse continue de la dotation de l'assurance maladie au FMIS, confirmée en 2025

• La dotation au FMIS s'établirait à 633 millions d'euros en 2025, soit une diminution de 40 % par rapport à 2023.

• Un décrochage du montant de la dotation allouée au fonds par l'assurance maladie intervient à compter de 2024, qui fait suite à trois années de dotations supérieures à 1 milliard d'euros, après la création du fonds en 2021.

Le FMIS contribue notamment au soutien du plan d'action « 4000 maisons de santé pluriprofessionnelles », qui fixe l'objectif quantitatif à atteindre d'ici à 2027 pour ces structures d'exercice coordonné en ville. Les crédits du FMIS permettent également d'accompagner la création de six nouvelles facultés d'odontologie en termes d'investissement immobilier et en équipements.

Financeur

Dotation 2021

Dotation 2022

Dotation 2023

Dotation 2024

Dotation 2025

Régimes obligatoires d'assurance maladie

1 035

1 015

1 062

894

633

Branche Autonomie

90

90

87

90

86

• Le fonds perçoit par ailleurs une dotation de la branche autonomie, fixée à 86 millions d'euros en 2025 par le présent article. Cette dotation correspond au financement, par la branche autonomie, du programme « Établissements et services sociaux et médico-sociaux numérique ».

Au total, 441 millions d'euros sont fléchés vers ce programme, dont 355 millions d'euros ont été répartis sur les années 2021 à 2024. Il vise à généraliser l'utilisation du dossier usager informatisé (DUI) dans les ESMS, l'objectif étant de déployer un DUI pour chaque personne accompagnée. Ce dossier permet de recueillir l'ensemble des données utiles pour rendre compte des besoins d'une personne afin de faciliter la conception, la mise en oeuvre et l'évaluation des plans personnalisés d'accompagnement.

Le fonds pour la modernisation et l'investissement en santé

À la suite des conclusions du Ségur de la santé en 2020, l'article 49 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 a transformé le fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP) en un nouveau fonds pour la modernisation et l'investissement en santé.

Ce fonds, à vocation transversale, permet de soutenir les investissements immobiliers et numériques au sein des établissements sanitaires et médico-sociaux. Le périmètre du FMIS s'étend également aux structures d'exercice coordonné en ville. En particulier, il accompagne les projets validés au niveau national dans le cadre de l'ancien Comité interministériel de la performance et de la modernisation de l'offre de soins (COPERMO) puis du Comité national de l'investissement en santé (CNIS) qui lui a succédé dans le cadre du Ségur.

Les ressources du fonds sont principalement constituées de dotations de l'assurance maladie et de la branche autonomie.

Le fonds est géré par la Caisse des dépôts et consignations, les délégations de crédits étant opérées par le ministère des solidarités et de la santé.

B. La fixation du montant de la contribution de la branche autonomie aux ARS

Le III du présent article fixe à 190 millions d'euros le montant plafonné de la contribution de la branche autonomie aux ARS au titre de leurs actions en direction des personnes âgées et des personnes en situation de handicap. Cette contribution est également encadrée par la convention d'objectifs et de gestion (COG) État-CNSA 2022-2026. En 2025, cette contribution permettra de financer786(*) :

- le développement des groupes d'entraide mutuelle (GEM) et les collectifs d'entraide et d'insertion sociale et professionnelle (CEISP) en vue de leur généralisation nationale (76,6 millions d'euros) ;

- le financement des dispositifs d'appui à la coordination (DAC) (99,2 millions d'euros) ;

- le financement des centres régionaux d'études, d'actions et d'informations (Creai) en faveur des personnes vulnérables (1,2 million d'euros) ;

- le soutien à l'usage, par les établissements et services médico-sociaux et les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), de « ViaTrajectoire », un système d'information mis en place pour simplifier l'admission en établissement (1,5 million d'euros).

C. Une poursuite de la revalorisation de la dotation de l'Oniam

• Le III du présent article fixe la dotation de l'assurance maladie à l'Oniam à 181,5 millions d'euros pour 2025, soit une hausse de 13,3 % par rapport à 2024 et de 34 % par rapport à 2023.

 

Dotation 2020

Dotation 2021

Dotation 2022

Dotation 2023

Dotation 2024

Dotation 2025

Oniam

150

130

135,3

135

160,2

181,2

Les missions de l'Oniam sont financées pour partie par l'assurance maladie (indemnisation des accidents médicaux, des contaminations par le VIH, le VHC, le VHB et le HTLV) et pour partie par l'État (les accidents médicaux résultant de la vaccination obligatoire et les dommages consécutifs à des mesures sanitaires d'urgence, à la prise du Benfluorex ainsi qu'à la prise de valproate de sodium).

L'Office national d'indemnisation des accidents médicaux,
des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Oniam)

L'Oniam est un établissement public à caractère administratif de l'État créé par la loi du 4 mars 2002 et placé sous la tutelle du ministre chargé de la santé. Il est chargé d'organiser des dispositifs de règlement amiable, mais aussi de gérer les différents contentieux en matière d'indemnisation des victimes de dommages imputables à :

- des accidents médicaux, affections iatrogènes ou infections nosocomiales ;

- des accidents survenus dans le cadre de la recherche biomédicale ;

- des accidents dus à des dommages résultant de mesures sanitaires d'urgence ;

- des accidents dus à la prise de benfluorex (Mediator) ou de valproate de sodium (Dépakine) ;

- des contaminations d'origine sanguine par le VIH, le virus de l'hépatite C, celui de l'hépatite B, le virus T-lymphotropique humain ou encore des contaminations par la maladie de Creutzfeldt-Jakob par la voie de traitement par l'hormone de croissance extractive.

Un nouveau contrat d'objectifs et de performance couvrant la période 2025-2027 devrait être signé avant la fin de l'année 2024.

• Les prévisions de dépenses d'indemnisation pour 2024 dans le périmètre de l'assurance maladie (accidents médicaux, contaminations transfusionnelles VIH, VHC, VHB et HTLV) et des missions relevant du programme 204 de l'État (VO/MSU/benfluorex/valproate de sodium) sont estimées à 186 millions d'euros, conformément aux prévisions budgétaires initiales.

Dépenses d'indemnisation de l'Oniam

 

2019

2020

2021

2022

2023

Dépenses d'indemnisation
en millions d'euros

161

134

180

162

188

Évolution

+ 5,23 %

- 16,77 %

+ 33,34 %

+ 10 %

+ 16 %

Source : Réponses au questionnaire de la rapporteure préparatoire au PLFSS

• Le ministère indique que les tendances observées en 2024 devraient se poursuivre en 2025, avec une stagnation du nombre de dossiers en commission de conciliation et d'indemnisation (CCI) et une augmentation du coût moyen d'indemnisation par dossier, justifiant une prévision de dépenses à la hausse.

S'il est attendu une stabilisation des dépenses amiables, les dépenses d'indemnisation contentieuses devraient en revanche demeurer « dynamiques sous l'effet de la poursuite de l'accroissement des contentieux directs conduisant à une condamnation de l'Oniam en capital comme en versements de rentes »787(*).

D. Des dotations à la charge de la branche AT-MP encore en nette hausse, qui mettent en péril l'équilibre financier de la branche

1. Le reversement de la branche AT-MP au titre de la sous-déclaration, en hausse de 400 millions d'euros en 2025, devrait conduire la branche à une situation déficitaire dès 2026

Le défaut de détection des pathologies d'origine professionnelle du fait d'une insuffisante sensibilisation des professionnels de santé aux enjeux AT-MP, la méconnaissance par les assurés de leurs droits, la lourdeur des procédures déclaratives ou encore la crainte de répercussions à la suite de la déclaration d'une affection comme AT-MP peuvent conduire les assurés à ne pas solliciter une prise en charge au titre de la législation des AT-MP. Ce phénomène, appelé « sous-déclaration » des AT-MP, est indubitable puisqu'il est largement documenté par divers rapports.

Qu'elle découle d'une sous-déclaration à proprement parler ou d'une sous-reconnaissance, elle aboutit en une prise en charge indue par la branche maladie de prestations en nature et en espèces qui devraient relever de la branche AT-MP.

En compensation de ces sommes, l'article L. 176-1 du code de la sécurité sociale prévoit depuis 1997788(*) que la branche AT-MP du régime général est redevable d'un « versement annuel » à la branche maladie du même régime. Initialement restreint aux maladies professionnelles, ce versement a été étendu, en 2002, aux accidents du travail. En application de l'article L. 176-2 du code de la sécurité sociale, le montant du versement est défini par la loi de financement de la sécurité sociale.

Le VII de l'article 25 fixe, pour 2025, le montant de ce versement à 1,6 milliard d'euros, un montant en hausse de 400 millions d'euros par rapport à 2024.

Le montant du versement annuel n'a toujours fait que croître : depuis le retour à l'équilibre de la branche AT-MP en 2013, son montant a doublé, au bénéfice d'une branche maladie toujours déficitaire. En 2025, le transfert à la branche maladie représentera 9,4 % des dépenses de la branche, une part plus haute qu'elle ne l'a jamais été.

Évolution du versement de la branche AT-MP
à la branche maladie au titre de la sous-déclaration

(en millions d'euros)

Source : Commission des affaires sociales du Sénat.

Le transfert est fixé au niveau de la fourchette basse de l'estimation réalisée par le dernier rapport de la commission chargée d'évaluer le coût réel pour la branche maladie de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles, le cas échéant en lissant la montée en charge.

Cette commission, présidée par un magistrat à la Cour des comptes et composée de représentants de sociétés savantes et de représentants de diverses administrations, remet en effet tous les trois ans, au Gouvernement et au Parlement, un rapport évaluant le coût réel pour la branche maladie de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles789(*). La commission « met en regard une prévalence estimée en population générale, à partir de données épidémiologiques, et les cas reconnus par la branche AT-MP »790(*), puis chiffre sur cette base le coût de la sous-déclaration en fonction des coûts moyens encourus par la branche Maladie pour chaque pathologie.

Le dernier rapport en date, rendu en juin 2024, estime le coût de la sous-déclaration entre 2,0 et 3,8 milliards d'euros. Ce total est significativement supérieur à la précédente évaluation qui faisait état d'un montant compris 1,2 et 2,1 milliards d'euros - déjà en nette hausse par rapport à l'évaluation de 2017, qui misait entre 815 et 1 530 millions d'euros. La sous-déclaration des AT-MP aurait donc été multipliée par deux et demi entre 2017 et 2024. La commission explique cette évolution par quatre piliers principaux :

l'évolution du coût de la prise en charge avec la hausse des prix en santé (négociations conventionnelles, Ségur de la santé), qui représente le tiers de l'accroissement estimé ;

l'évolution stagnante ou baissière des cas reconnus par la branche AT-MP qui induit une hausse de la sous-déclaration dès lors que la prévalence ne suit pas la même tendance en population générale ;

l'actualisation des estimations sur la base de nouveaux travaux scientifiques ;

l'extension progressive du champ des sinistres couverts : le rapport 2024 marque notamment l'introduction de la sous-déclaration au titre de la souffrance psychique en lien avec le travail.

Fourchettes hautes et basses des trois dernières estimations de la commission chargée d'évaluer le coût réel de la sous-déclaration

(en millions d'euros)

Source : Commission des affaires sociales du Sénat

La hausse du montant attendu du transfert - de 1,2 milliard à 2,0 milliards - est telle que le Gouvernement a fait le choix de lisser la montée en charge sur plusieurs années. En 2025, le régime général de la branche AT-MP devra déjà consentir à 50 % de l'effort supplémentaire puisque la dotation est portée à 1,6 milliard d'euros. Comme le Gouvernement l'indique dans l'exposé des motifs, « le montant du transfert vers la branche maladie augmentera par la suite progressivement pour atteindre la fourchette basse de l'estimation de la commission, soit 2 milliards d'euros ».

La hausse du transfert en faveur de la branche maladie explique à elle seule791(*) la dégradation du solde de la branche AT-MP, qui devrait plonger dans une situation déficitaire dès 2026. Sans l'augmentation du transfert, la branche AT-MP serait en effet excédentaire de 0,6 milliard d'euros en 2025 (contre 0,2 milliard d'euros prévisionnels), à l'équilibre en 2026 (contre 0,4 milliard d'euros de déficit), puis en excédent de 0,2 milliard d'euros en 2027 (contre 0,6 milliard d'euros de déficit) et de 0,3 milliard d'euros en 2028 (contre 0,5 milliard d'euros de déficit).

Solde prévisionnel de la branche AT-MP avec et sans hausse du transfert
à la branche maladie au titre de la sous-déclaration

Source : Commission des affaires sociales du Sénat

2. Les dotations de la branche AT-MP du régime général aux fonds de l'amiante augmentent de 228 millions d'euros, sans que l'État ne participe à l'effort de refinancement

a) La dotation de la branche AT-MP au Fiva poursuit sa forte dynamique et est fixée à 465 millions d'euros pour 2025, contre moins de 7 millions d'euros pour l'État

Le V de l'article 25 fixe à 465 millions d'euros la contribution de la branche AT-MP au fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva), l'établissement public administratif créé par l'article 53 de la LFSS pour 2021792(*) chargé d'assurer la réparation intégrale de l'ensemble des préjudices subis par les victimes de l'amiante - professionnelles ou environnementales - sur le territoire français et par leurs ayants droit.

Les 465 millions d'euros de dotation pour 2025 sont à comparer avec les 335 millions d'euros accordés au fonds en 2024 et avec les 220 millions d'euros consentis les années précédentes. En deux ans, la subvention au fonds chargé d'assurer la réparation intégrale des victimes environnementales et professionnelles de l'amiante fait donc plus que doubler. Plusieurs facteurs expliquent cette hausse.

D'une part, les dépenses du Fiva sont particulièrement dynamiques. L'accroissement des dépenses du Fiva est liée à un effet volume, avec une hausse de 16,7 % de nouvelles demandes sur un an entre août 2023 et août 2024. Si le nombre de nouveaux demandeurs connaît une diminution tendancielle liée à l'évolution spontanée de la population ayant été exposée à l'amiante, l'année 2024 marque une inversion de tendance dans un contexte marqué par des efforts nourris du fonds pour lutter contre le non-recours et déployer une politique d'aller-vers793(*).

S'y ajoute un effet prix lié à l'effet année pleine de la revalorisation de 10,5 % du barème d'indemnisation des préjudices extrapatrimoniaux décidée par le Fiva en 2023 et à la revalorisation des rentes Fiva (+ 4,6 % au 1er avril 2024). La DSS ajoute que « l'indexation des rentes sur l'inflation à compter du 1er avril impacte, enfin, également le niveau des dépenses ».

L'effet prix se nourrit également des conséquences de la jurisprudence récente de la Cour de cassation, qui, par deux arrêts du 20 janvier 2023794(*) a mis fin à la dualité de la rente, ce qui a indirectement affecté le Fiva. En effet, le Fiva indemnise intégralement le déficit fonctionnel permanent des victimes de l'amiante par le versement d'une rente. Afin d'éviter toute double indemnisation, le Fiva pouvait, jusqu'à récemment, déduire du montant de rente qu'il devait verser celui attribué par la branche AT-MP au titre du déficit fonctionnel permanent. Or la rente AT-MP est réputée n'avoir qu'une vocation professionnelle, et donc ne plus indemniser le déficit fonctionnel permanent depuis les arrêts de la Cour de cassation en date du 20 janvier 2023. Le Fiva ne peut donc plus déduire la rente AT-MP du montant de ses rentes de déficit fonctionnel, ce qui a des conséquences financières certaines sur le fonds : le coût moyen d'un dossier est passé de 37 500 euros à 56 100 euros pour les victimes et de 9 300 euros à 10 500 euros pour les ayants droit. L'adoption de l'article 24 du PLFSS qui réaffirme la dualité de la rente pourrait, à cet égard, contribuer à réduire progressivement les charges du Fiva à compter de 2026.

Au total, les dépenses exécutées du fonds en 2024 devraient excéder de 44 millions d'euros les prévisions, ce qui se traduit par un déficit prévisionnel de 35 millions d'euros pour le fonds.

Dans ce contexte, une révision à la hausse de la dotation de la branche AT-MP du régime général semble nécessaire, d'autant plus que le Fiva a connu, jusqu'en 2023, une politique dite de « prélèvement sur fonds de roulement », consistant à mobiliser les excédents passés du fonds en lui attribuant une dotation volontairement insuffisante à la couverture de ses frais. Or, du fait de cette stratégie et de la hausse des dépenses précitée, le fonds de roulement du Fiva est désormais consommé et affiche des valeurs en-deçà du seuil prudentiel d'un mois de dépenses : un rebasage de la dotation est donc indispensable pour retrouver ces niveaux prudentiels.

Alors que la branche AT-MP est fortement mobilisée pour le financement du Fiva, avec un doublement de la subvention en deux ans, l'État entend, comme l'an dernier, maintenir constante sa dotation à 8 millions d'euros. Ce montant ne permet pas de couvrir les frais d'indemnisation des victimes environnementales ou non assurées du Fiva, alors même que celles-ci ne pourraient pas prétendre à une indemnité AT-MP de droit commun.

b) La dotation de la branche AT-MP au Fcaata augmente de 98 millions d'euros pour équilibrer le résultat net cumulé du fonds dans un contexte de rebond des bénéficiaires

Le VI de l'article 25 fixe la dotation de la branche AT-MP du régime général au fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Fcaata) à 453 millions d'euros en 2025 contre 355 millions d'euros en 2024, soit une hausse de 98 millions d'euros. La contribution du régime AT-MP des salariés agricoles devrait se limiter à 0,1 million d'euros.

Créé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999795(*), le Fcaata est un fonds sans personnalité juridique, qui finance des dispositifs de préretraite au bénéfice des anciens travailleurs de l'amiante.

Le fonds verse l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Acaata), qui constitue un revenu de remplacement équivalent à 65 % du salaire796(*) pour les travailleurs de l'amiante éligibles à un mécanisme de préretraite et qui ont, à ce titre, interrompu leur activité professionnelle avant l'âge légal de départ à la retraite. L'âge à partir duquel l'Acaata peut être versée dépend de la durée d'exposition797(*). Les travailleurs atteints d'une maladie professionnelle provoquée par l'amiante et ceux dont la durée d'exposition professionnelle à l'amiante a excédé 30 ans peuvent cesser leur activité dès 50 ans.

Le Fcaata finance, en sus, la prise en charge de cotisations d'assurance vieillesse volontaire et complémentaire, et verse une compensation à la Cnav au titre du maintien à 60 ans de l'âge légal du départ en retraite pour les travailleurs de l'amiante.

Charges prévisionnelles du Fcaata pour 2025

(en millions d'euros)

Source : Commission des affaires sociales du Sénat d'après la DSS

L'activité du fonds tend à se réduire du fait du tarissement du flux de nouveaux bénéficiaires. Alors qu'entre 2006 et 2010, le stock d'allocataires était supérieur à 30 000, il est tombé sous la barre des 8 000 en 2023. Cela a résulté en un redimensionnement à la baisse du budget du fonds, moins sollicité : la dotation de la branche AT-MP, seul financeur, tutoyait le milliard d'euros annuel à la fin de la décennie 2000, et a été réduite jusque 327 millions d'euros en 2022.

Toutefois, le fonds a connu, en 2023 et 2024, une hausse imprévue des dépenses liée à un rebond du nombre d'allocataires concernés, combinée à une hausse de l'Acaata moyenne de 7,8 % en 2024 selon la direction de la sécurité sociale. Alors que les dépenses d'Acaata pour 2024 et 2025 étaient estimées à 198,9 et 184,2 millions d'euros lors du précédent PLFSS, celles-ci ont été nettement revues à la hausse avec des prévisions d'Acaata brute à 222,6 millions d'euros pour 2024 et 230,2 millions d'euros pour 2025. Les dépenses globales du fonds atteindraient, en 2025, 403,3 millions d'euros. Ce niveau constituerait un palier et les dépenses resteraient par la suite aux alentours de 405 millions d'euros.

Cette trajectoire s'expliquerait principalement par un effet incitatif au recours lié au décalage de l'âge légal de départ en retraite porté par la LFRSS pour 2023, qui n'a nullement affecté le dispositif, le rendant plus attractif. S'y adjoindrait un effet périmètre, du fait de l'ouverture de l'éligibilité à l'Acaata de salariés de nouveaux ports798(*).

La croissance inattendue du nombre de bénéficiaires se traduit, en 2024, par un déficit prévisionnel conséquent, atteignant 33,5 millions d'euros. Celui-ci s'ajoute au déficit cumulé du fonds de 16,6 millions pour atteindre, en prévisionnel, 50,0 millions d'euros.

La dotation de la branche AT-MP au Fcaata est fixée afin de couvrir les dépenses prévisionnelles du fonds - 403 millions d'euros en 2025 - et d'équilibrer son résultat cumulé, ce qui nécessite 50 millions d'euros supplémentaires.

Le déficit cumulé épongé, la dotation de la branche AT-MP devrait diminuer en 2026 et 2027 : il avoisinerait alors 400 millions d'euros.

3. Les dispositifs de prévention de la pénibilité continuent leur montée en charge

La majoration « M4 »799(*) s'appliquant aux cotisations AT-MP des employeurs, fixée à 0,03 % des salaires en 2024800(*), permet à la branche de financer deux dispositifs de prévention de la pénibilité : le départ en retraite anticipé pour certains assurés présentant un taux d'incapacité permanente d'au moins 10 % à la suite d'un sinistre professionnel, et le compte professionnel de prévention (C2P).

Le régime des salariés agricoles finance également ces deux dispositifs pour ses assurés en reflétant leurs coûts dans le calcul du taux de cotisation applicable, aux termes de l'article L. 751-13-1 du code rural et de la pêche maritime.

• Le dispositif de retraite anticipée pour incapacité

Aux termes de l'article L. 351-1-4 du code de la sécurité sociale, certains assurés présentant un taux d'incapacité permanente (IPP) supérieur à 10 % consécutivement à un sinistre professionnel ne sont pas soumis à l'âge légal de 64 ans801(*), mais à un âge dérogatoire. Celui-ci est fixé à 60 ans lorsque le taux d'IPP excède 20 %802(*), et à deux ans sous l'âge légal, soit 62 ans, lorsque l'assuré a été exposé au moins 17 ans à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels en lien direct avec son803(*) affection804(*) et que celle-ci a provoqué un taux d'IPP compris entre 10 %805(*) et 20 %.

L'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale prévoit que les dépenses supplémentaires occasionnées à la branche vieillesse du fait des dispositifs de départ en retraite anticipée pour incapacité soient couvertes par une contribution de la branche AT-MP.

Pour 2025, l'exposé des motifs de l'article 25 indique que le montant du transfert de la branche AT-MP à la branche vieillesse au titre des dispositifs de départ à la retraite anticipée pour incapacité représentera 116 millions d'euros pour le régime général, et 9,2 millions pour le régime agricole ; soit 125,2 millions d'euros.

Le transfert connaît une hausse de 19 % par rapport à 2024, probablement pour partie liée à l'entrée en vigueur de la réforme des retraites.

• Les dépenses imputables au compte professionnel de prévention

Le compte professionnel de prévention (C2P), issu de la transformation du compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P)806(*) par l'ordonnance du 22 septembre 2017807(*), ouvre des droits aux salariés exposés à certains facteurs de risques professionnels. Les salariés exposés cumulent des points sur leur compte en fonction du nombre de trimestres d'exposition au risque et, depuis la LFRSS pour 2023, du nombre de facteurs de risques808(*). Depuis la LFRSS pour 2023, le C2P est déplafonné809(*).

Ils peuvent ensuite convertir ces points pour financer une formation ou un projet de reconversion professionnelle, bénéficier d'un passage à mi-temps avec maintien de salaire ou valider des trimestres de majoration de durée d'assurance vieillesse et ainsi partir plus tôt à la retraite. La LFRSS pour 2023 et ses décrets d'application810(*) ont conduit à revaloriser la valeur du point pour la formation et le mi-temps avec maintien de salaire.

Aux termes de l'article L. 4116-21 du code du travail, il revient aux organismes nationaux de la branche AT-MP du régime général et du régime agricoles de financer, « chacune pour ce qui la concerne », les dépenses engendrées par le C2P.

L'exposé des motifs de l'article 44 estime à 105 millions d'euros les dépenses au titre du C2P pour le régime général en 2024 et à 0,5 million d'euros pour le régime des salariés agricoles. Conséquence de la réforme du C2P prévue par la LFRSS pour 2023, la montée en charge du dispositif se poursuit donc, après avoir engendré un coût pour le régime général de la branche AT-MP de 60,3 millions d'euros en 2022 et 96 millions d'euros en 2023.

Le VIII de l'article 25 fixe, pour 2025, à 220,7 millions d'euros les montants des dépenses engagées au titre du dispositif de retraite anticipée pour incapacité et du C2P pour la branche AT-MP du régime général, et à 9,7 millions d'euros pour celle du régime des salariés agricoles. Ces montants correspondent à la somme des dépenses évoquées par l'exposé des motifs au titre du dispositif de retraite anticipée pour incapacité et au titre du C2P.

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

L'Assemblée nationale n'ayant pas examiné cet article, le Gouvernement l'a transmis au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

A. Une autorisation parlementaire de dépenses très limitée

• La commission avait souligné, à l'occasion de la mission sur les organismes et les fonds financés par les régimes obligatoires de base de la sécurité sociale811(*), « que le degré d'autorisation parlementaire sur les subventions de la sécurité sociale aux Offrob était insatisfaisant et empêchait les parlementaires de défendre les moyens accordés à ces agences, dont le rôle sanitaire est pourtant essentiel. »

D'une part, outre le FMIS et l'Oniam dont les dotations sont fixées par le présent article, il existe une multiplicité d'opérateurs exclusivement financés par l'assurance maladie dont le montant des dotations n'est toutefois pas fixé par le législateur.

Pour mémoire, dans un souci de simplification et de lisibilité du modèle de financement des structures, le financement de certains opérateurs de santé historiquement co-financés par l'État et l'assurance maladie a été progressivement transféré à la charge exclusive de l'assurance maladie. Ces opérations ont conduit à des élargissements successifs du sixième sous-objectif de l'ONDAM.

En 2015, trois opérateurs jusqu'alors co-financés par l'État dans le cadre de la mission « Santé » de la loi de finances ont ainsi été transférés en totalité à l'assurance maladie : l'Agence technique de l'information sur l'hospitalisation (ATIH), la Haute autorité de santé (HAS) et le Centre national de gestion (CNG). L'Agence de la biomédecine (ABM) et l'École des hautes études en santé publique (EHESP) ont suivi le même mouvement en 2018, encore prolongé en 2019 par les transferts de Santé publique France (SPF) et de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) dans le cadre de la loi n°2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020.

Bilan des dotations de l'assurance maladie
à certains établissements publics, hors dotations exceptionnelles

Établissement

Dotation 2023

Dotation 2024

Dotation 2025

Office national d'indemnisation des victimes d'accidents médicaux

135,3

160,2

181,2

Agence de la biomédecine

52,2

53,4

55

Établissement français du sang

54,7

100

110

Agence technique de l'information
sur l'hospitalisation

10

11,5

12,1

Centre national de gestion

27,6

43,6

44,3

École des hautes études en santé publique

45,2

45,2

45,2

Agence nationale d'appui
à la performance

17,21

20,3

19,8

Agence du numérique en santé

67,48

114,2

69

Agence nationale de santé publique
(Santé publique France)

211,96

200,1

335*
(dont dépenses exceptionnelles)

Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé

140,28

142,6

145

Haute Autorité de santé

53,9

72

74

* L'annexe 2 au PLFSS n'indique pas, dans la dotation prévue au titre de l'année 2025, la part relevant des missions socle de Santé publique France et celle correspondant aux dépenses exceptionnelles, notamment de gestion de crise. En 2024, aux 200 millions d'euros de dotation se sont ajoutés 100 millions d'euros au titre de la gestion de crise.

Après avoir constaté l'évolution particulièrement dynamique de certaines dotations en 2024 - + 58 % pour les crédits alloués au CNG, + 33 % pour la dotation de la Haute Autorité de santé et + 11 % pour celle de l'Anap -la commission relève que les évolutions projetées pour 2025, globalement haussières, apparaissent plus mesurées.

Quelques situations attirent néanmoins l'attention :

- l'EFS connaît une augmentation de ses crédits de 10 % ;

- l'ANS voit sa subvention amputée de 39,6 % et retrouve un niveau proche de celui de 2023, après un montant exceptionnellement élevé en 2024 ;

- quant à Santé publique France, à périmètre constant (missions socle et dépenses exceptionnelles), sa dotation augmenterait de 11,7 %.

D'autre part, le contenu de l'annexe 2 au PLFSS, qui présente les comptes des organismes ou fonds financés par des régimes obligatoires de base, se contente d'une information trop lacunaire pour éclairer les parlementaires. Celle-ci se borne en effet bien souvent à des éléments d'exécution et peu à une analyse prospective de l'évolution des dépenses. Seuls la Cades, le FSV et le FRR présentent des données comptables et financières plus détaillées, y compris prospectives.

Éléments sur la trajectoire des dotations versées aux agences sanitaires
par l'assurance maladie

La situation de l'EFS s'inscrit dans le cadre de la LFSS pour 2024 qui a rénové le modèle de financement de l'EFS. La LFSS pour 2024 a en effet prévu la pérennisation d'une dotation de l'assurance maladie pour compenser un modèle économique devenu structurellement déséquilibré, qui reposait presque exclusivement sur les recettes issues des cessions de produits sanguins labiles aux établissements de santé et au laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies (LFB). Cette dotation assure le financement de ses missions de service public assurées par l'EFS, non prises en compte dans la tarification de ses cessions, et permet d'accompagner sa modernisation interne et la conduite de projets.

L'ANS, qui a succédé à l'Agence nationale des systèmes d'information partagés de santé (ASIP) en 2019, est financée par de multiples vecteurs au sein desquels la dotation de l'assurance maladie représente la part la plus importante. OEuvrant à la mise en oeuvre opérationnelle de la politique du numérique en santé, l'ANS est constituée sous forme de groupement d'intérêt public (GIP) entre l'État, la CNAM, la CNSA, les ARS et les Groupements Régionaux d'Appui au Développement de la e-Santé (GRADeS). Cet opérateur avait bénéficié en 2024 d'une dotation de l'assurance maladie de 114 millions d'euros, couplée à une dotation de 55 millions d'euros au titre du programme Ségur numérique. En 2025, le montant de la dotation assurance maladie, de 69 millions d'euros, s'accompagne d'une dotation de 110 millions d'euros au titre du Ségur numérique.

Les dotations versées à Santé publique France ont connu une augmentation substantielle, passant de 150,2 millions d'euros à 200,1 millions d'euros entre 2020 et 2024 (+ 33 %). Les prévisions pour 2025 s'inscrivent donc dans la continuité des années précédentes. L'annexe 2 au PLFSS pour 2025 ne précise pourtant pas, dans le montant total, quelle part relève des missions socle de l'agence et quelle part finance des dépenses exceptionnelles. Ce défaut de précision ne garantit pas l'information éclairée des parlementaires, en méconnaissance de l'article L.O. 111-4-1 du code de la sécurité sociale.

• Le PLFSS est pourtant le véhicule chargé de sanctionner la justification de ces dépenses prévisionnelles. L'obligation organique812(*) faite au Gouvernement de présenter, pour l'année en cours et les trois années suivantes, les comptes prévisionnels des agences financées par la sécurité sociale n'est toujours pas respectée dans le PLFSS pour 2025, au détriment de l'information du Parlement et de la visibilité offerte aux agences sur leur trajectoire de recettes.

En conséquence, la rapporteure souligne cette année encore la nécessité de suivre l'évolution des dotations allouées aux opérateurs sur plusieurs années, de même que les moyens humains dont ils bénéficient.

À cet égard, le travail précité réalisé au titre de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) du Sénat apporte un éclairage utile sur les dynamiques propres aux ressources des organismes et fonds financés par l'assurance maladie (Offrob).

• Dans un contexte de contrainte forte sur les dépenses sociales, il convient néanmoins de veiller à la soutenabilité des missions nouvelles données aux autorités sanitaires et aux capacités des principales autorités et agences sanitaires à assurer leur mission, notamment de sécurité sanitaire, dans des conditions satisfaisantes de qualité, de transparence et de délais.

Tout en relevant les évolutions positives apportées au plafond d'emplois de certaines agences à l'image de l'ANSM et de la HAS, la commission constate à nouveau la relative modération des moyens de certaines agences qui ont pourtant vu leurs missions être renforcées. C'est le cas de la Haute Autorité de santé et de l'Agence de la biomédecine. La commission souscrit ainsi à l'analyse de la mission d'information précitée selon laquelle « la prise en compte des besoins en effectifs de certaines agences demeure parfois insuffisante ».

• Enfin, la rapporteure prend acte de la non-reconduction du fonds d'urgence de 100 millions d'euros aux établissements et services médico-sociaux en difficulté, qui peut interroger au regard de la persistance et de la gravité des difficultés rencontrées par certains établissements et services. Elle rappelle la nécessité de mesures structurelles pour améliorer durablement leur situation financière.

B. Les transferts à la charge de la branche AT-MP pèsent exagérément sur sa soutenabilité financière

À titre liminaire, la commission note que le choix du Gouvernement de fusionner en un seul article les dotations des branches Autonomie, Maladie et AT-MP, autrefois réparties sur deux articles, est révélateur de sa conception d'une sécurité sociale avec des branches interchangeables et solidaires financièrement les unes des autres.

Cette vision justifierait que la branche AT-MP, parce qu'excédentaire, abonde les branches déficitaires de la sécurité sociale et d'autres entités nécessitant des financements.

Or la commission ne voit pas en la sécurité sociale un « pot commun », dans lequel les excédents de certaines branches auraient à financer ou à compenser tout ou partie du déficit des autres. L'organisation de la sécurité sociale en différentes branches impose une analyse financière à l'échelle de la branche et non seulement une analyse agrégée. Cette observation est plus vraie encore en ce qui concerne la branche AT-MP, qui présente la spécificité forte d'être quasi-intégralement financée par des cotisations à la charge de l'employeur.

1. La hausse du transfert à la branche maladie au titre de la sous-déclaration : un effort important pour la branche AT-MP, qui n'a pas empêché des améliorations de la réparation et de la prévention

La commission des affaires sociales dénonce, depuis plusieurs années, le choix d'affecter les excédents de la branche AT-MP à la branche Maladie en augmentant le transfert au titre de la sous-déclaration sans procéder aux investissements nécessaires en matière de réparation et de prévention - il s'agit pourtant là de la vocation première de la branche.

Cette année, la commission constate que l'article 24 du PLFSS comporte une amélioration considérable de la réparation par la branche AT-MP, avec un coût pour la branche qui devrait, à terme, atteindre 500 millions d'euros. Elle note également la poursuite de la montée en charge rapide de dispositifs financés par la branche et concourant à intensifier l'investissement en faveur de la prévention - à commencer par le Fipu et le C2P, même si celle-ci reste insuffisante par rapport aux préconisations du récent rapport de la Mecss sur la branche AT-MP813(*).

En outre, la rapporteure a pu entendre le président de la commission chargée d'estimer le coût réel de la sous-déclaration des AT-MP. Celui-ci a confirmé que la méthodologie de calcul de la sous-déclaration la valorisait aux tarifs de la branche Maladie et prenait bien en compte, lorsqu'elle existait, la sur-déclaration des AT-MP. Sous ces réserves, la rapporteure estime que le montant de sous-déclaration estimé n'est pas insincère.

Par conséquent, la commission ne s'opposera pas, cette année, au niveau du transfert au titre de la sous-déclaration. Toutefois, elle se réserve le droit de revenir sur cette position les années futures, notamment si l'augmentation du transfert conduit, comme le PLFSS pour 2025 le prévoit, à plonger la branche AT-MP dans une situation déficitaire.

En effet, le défaut de fiabilité et la volatilité des estimations, malgré tous les efforts des experts de la commission chargée d'évaluer le coût de la sous-déclaration, demeurent préoccupants dans l'optique de leur utilisation pour aiguiller des choix de politique publique. Ce défaut de fiabilité est inhérent à l'exercice qui lui est confié, à savoir l'estimation d'un contrefactuel inobservable. La commission elle-même concède que « par définition, les personnes qui ne recourent pas à une prise en charge AT-MP alors qu'elles y seraient éligibles sont absentes des fichiers administratifs, et la complexité des diagnostics médicaux et de l'imputabilité professionnelle requerrait des bases de données très riches pour pouvoir repérer précisément les personnes concernées, ce qui n'existe pas ». Le manque de fiabilité des données explique tout à la fois l'incapacité de la commission à réduire l'ampleur de la fourchette donnée, qui varie quasiment du simple au double, et la volatilité des estimations d'une année sur l'autre.

Dès lors, la commission s'opposera à toute augmentation de cotisations au titre des AT-MP si elle estime que ces dernières sont rendues nécessaires par une situation déficitaire de la branche provoquée par l'augmentation du transfert à la branche Maladie. Si le montant préconisé par la commission chargée d'évaluer le coût réel de la sous-déclaration devient insoutenable pour la branche AT-MP, la commission des affaires sociales s'opposera à son utilisation comme standard de fixation du transfert à la branche maladie, et plaidera pour geler la part du transfert dans les dépenses de la branche à un niveau donné.

2. Vers un rééquilibrage de l'effort financier en faveur du Fiva ?

La commission salue la hausse des transferts publics en faveur du Fiva, rendue indispensable par le rebond de l'activité et l'atteinte de niveaux de fonds de roulement préoccupants.

La branche AT-MP doit prendre sa juste part dans cet effort nécessaire, mais l'État doit en faire de même. La commission regrette donc que l'État projette, comme l'an dernier, de maintenir constante sa dotation à un montant de 8 millions d'euros tandis que, dans le même temps, la branche AT-MP a doublé son effort en deux ans pour le porter à 453 millions d'euros.

La commission déplore que le montant de dotation de l'État, anecdotique avec 1,5 % des ressources publiques du fonds, ne permette pas, loin s'en faut, de couvrir les frais d'indemnisation des victimes environnementales ou non assurées du Fiva, alors même que celles-ci ne pourraient pas prétendre à une indemnité AT-MP de droit commun. Ces victimes représentent en effet 18 % des assurés indemnisés par le Fiva, selon la DSS. Pourtant, de l'aveu même de la DSS, « la dotation de l'État au FIVA vise l'indemnisation des victimes professionnelles au titre de l'État employeur et les victimes environnementales, dont l'indemnisation relève de la solidarité nationale ».

Elle appelle donc l'État, reconnu responsable du scandale de l'amiante, à intensifier son effort financier en faveur du Fiva.

C. Renforcer le contrôle du Parlement grâce à une inscription dans la loi du montant de la dotation de l'assurance maladie aux opérateurs de santé

 La commission estime plus sincère de fixer par la loi la dotation des principaux opérateurs publics de santé, eu égard à leurs missions et au montant des dotations qui leur sont allouées.

Les dotations concernées sont celles de l'Agence nationale de santé publique (Santé publique France), l'Agence nationale de sécurité du médicament, la Haute Autorité de santé et l'Agence de la biomédecine. La nécessité de prévoir des dotations exceptionnelles en cours d'exercice budgétaire imposerait donc un retour devant le Parlement. C'est le sens de l'amendement n° 193 adopté par la commission.

En outre, la rapporteure rappelle qu'aux termes de la nouvelle rédaction de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale concernant les dotations aux organismes, en cas de relèvement des dotations, par dotation exceptionnelle notamment, une information immédiate des commissions des affaires sociales est attendue pour justifier ces dépenses non prévues.

Article L.O. 111-9-2-2 du code de la sécurité sociale

« Lorsque, en cours d'exercice, le montant de la dotation mentionnée au b du 2° de l'article L.O. 111-4-1 affectée à un organisme fait l'objet d'une augmentation de plus de 10 %, les commissions parlementaires saisies au fond des projets de loi de financement de la sécurité sociale en sont informées sans délai. »

 La commission considère que les dotations allouées aux opérateurs précités relèvent de dépenses pilotables. En conséquence, reprenant les conclusions de la mission d'information sur les organismes et fonds financés par les régimes obligatoires de base de la sécurité sociale, « il apparaît souhaitable, au vu des enjeux financiers concernés, de développer la portée de l'autorisation parlementaire »814(*).

Suivant les recommandations formulées par ses rapporteures et renouvelant la position déjà adoptée les années passées, l'amendement n° 193 vise à prévoir la fixation annuelle par la loi des dotations aux opérateurs financés exclusivement par l'assurance maladie.

La commission rappelle également qu'au titre de l'article L.O. 111-4-1 du code de la sécurité sociale, il est fait obligation au Gouvernement de présenter, dans les annexes au PLFSS, « pour l'année en cours et les trois années suivantes, les comptes prévisionnels [...] des organismes financés par les régimes obligatoires de base », étant entendu que cette annexe fait figurer « le montant de la dotation [...] pour l'année en cours et de la dotation prévisionnelle [...] pour l'année à venir ».

La commission ne peut que regretter que, cette année encore, les dispositions organiques relatives à l'information du Parlement n'aient pas été respectées. Pis encore, la commission constate la dégradation du niveau d'information transmise au Parlement pour voter les rares dotations de niveau législatif. En effet, contrairement à son édition du PLFSS 2024, l'annexe 2 du PLFSS pour 2025 ne fait plus aucune mention des charges et recettes prévisionnelles du Fiva et du Fcaata. Tel n'était déjà pas le cas dans l'annexe 2 du PLFSS pour 2024 concernant les opérateurs de santé financés par l'assurance maladie. En conséquence, l'information communiquée au Parlement dans le PLFSS pour 2025 ne satisfait les dispositions de l'article L.O. 111-4-1 pour aucun des quinze organismes et fonds financés par les régimes obligatoires de base.

La commission propose d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

Article 26
Objectif de dépenses de la branche maladie, maternité, invalidité et décès

Cet article fixe pour 2025 le montant de l'objectif des dépenses de la branche maladie, maternité, invalidité et décès.

En dépit de réserves relatives à la soutenabilité des dépenses d'assurance maladie sur le moyen terme, la commission propose d'adopter cet article sans modification et de fixer l'objectif de dépenses de la branche à 260,8 milliards d'euros pour 2025.

I - Le dispositif proposé

Conformément à l'article L.O. 111-3-5 du code de la sécurité sociale, cet article fixe l'objectif de dépenses de la branche maladie, maternité, invalidité et décès pour 2025. Cet objectif de dépenses couvre le champ de l'ensemble des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale.

À titre liminaire, il convient de rappeler que la LFSS pour 2021 a opéré un changement substantiel de périmètre du fait de la création d'une cinquième branche autonomie, dorénavant chargée des dépenses de prestations dont la branche maladie assurait précédemment le financement.

 L'article 26 fixe l'objectif de dépenses de la branche maladie, maternité, invalidité et décès à 260,8 milliards d'euros pour 2025.

L'Ondam et l'objectif de dépenses de la branche maladie

L'objectif de dépenses de la branche maladie est à distinguer de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam) fixé à l'article 27 du PLFSS :

- d'une part, les deux reposent sur des concepts de nature distincte : l'Ondam retient une approche économique, interrégimes et interbranches, alors que les dépenses des régimes relèvent d'une approche comptable ;

- d'autre part, si l'Ondam contribue pour 84,5 % aux prestations servies au titre du risque maladie815(*), son champ et celui de la branche maladie ne se recoupent pas intégralement : l'Ondam intègre ainsi les prestations de soins de la branche AT-MP (prestations en nature et indemnités journalières compensant l'incapacité temporaire) et les dépenses de la branche autonomie relatives aux établissements médicosociaux ; en revanche, il ne prend pas en compte certaines prestations d'assurance maladie. C'est notamment le cas des prestations en espèces de maternité et paternité (indemnités journalières) ou des prestations invalidité-décès, ainsi que de certaines dépenses de prévention.

Prévisions de recettes, de dépenses et solde de la branche maladie,
maternité, invalidité et décès en 2024 et 2025

(en milliards d'euros)

 

Prévision 2024 initiale
(LFSS pour 2024)

Prévision 2024 rectifiée
(PLFSS 2025)

Prévision pour 2025
(PLFSS 2025)

Recettes

243,4

239

247,4

Dépenses

251,9

253,6

260,8

Solde

- 8,5

- 14,6

- 13,4

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après les sources indiquées

Les dépenses de la branche maladie pour 2025 augmenteraient ainsi de 8,9 milliards d'euros par rapport à la prévision initialement fixée pour 2024, et de 7,2 milliards d'euros par rapport à la prévision actualisée. Cet objectif de dépense représente une hausse de 2,8 % entre l'exécution 2024 et la prévision pour 2025. Quant aux recettes de la branche, leur progression serait pénalisée par un rendement moindre de la TVA.

Après une nouvelle dégradation de son solde qui s'établirait à 14,6 milliards d'euros en 2024, soit un déficit supérieur de 6,1 milliards d'euros par rapport à la prévision initiale, le déficit de la branche maladie connaîtrait une légère diminution en 2025, atteignant 13,4 milliards d'euros, du fait essentiellement de l'effet combiné des articles 6816(*) et 8817(*) du PLFSS, qui (après prise en compte de l'article 38 du PLF818(*)) augmenteraient ses recettes de 2 milliards d'euros.

Évolution du déficit de la branche maladie entre 2019 et 2028

(en milliards d'euros)

Source : Commission des affaires sociales, données du projet d'annexe à la future LFSS (ancienne annexe A), PLFSS pour 2025

Le solde de la branche se dégraderait à nouveau à partir de 2026 pour se maintenir à un niveau supérieur à 14 milliards d'euros jusqu'en 2028, où il atteindrait un solde déficitaire de 14,9 milliards d'euros.

• En 2025, les charges de la branche progresseraient de 2,8 %, soutenues à la fois par la hausse des prestations relevant de l'Ondam (+ 2,6 %), particulièrement par les soins de ville, et par celle des prestations hors Ondam (+ 4,7 %).

Sur le champ des prestations hors Ondam, les dépenses sont principalement soutenues par le coût dynamique des pensions d'invalidité, avec une projection de revalorisation de 2,6 % en moyenne annuelle, ainsi que par les indemnités journalières de maternité et de paternité, du fait d'un léger rebond des naissances et d'un effet prix lié à l'augmentation des salaires.

• Enfin, les dépenses de prévention progresseraient substantiellement sous l'effet de la montée en charge du compte professionnel de prévention, du fonds d'investissement dans la prévention de l'usure professionnelle et de la mise en place d'un fonds pour l'usure professionnelle, auquel sont alloués 100 millions d'euros.

Charges nettes de la CNAM-maladie, 2022-2025

(en millions d'euros)

Source : Rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale, octobre 2024

• En parallèle, les hypothèses établies par le Gouvernement conduisent à projeter, pour la branche maladie, des mesures contribuant à une amélioration du solde pour un montant total de 5,3 milliards d'euros, dont819(*) :

- des réductions de dépenses de 2,6 milliards d'euros, principalement grâce à la hausse du ticket modérateur sur les consultations de médecins et de sages-femmes, à la baisse envisagée du plafond des indemnités journalières de 1,8 à 1,4 Smic brut mensuel, et à des mesures de maîtrise tarifaire des produits de santé ;

- de nouvelles recettes d'un montant 2,5 milliards d'euros, grâce à la refonte des allègements généraux de cotisations sociales.

Enfin, la hausse du transfert reçu en provenance de la CNAM-AT au titre de la sous-déclaration des accidents du travail permettrait d'accroître les recettes de la branche maladie de 400 millions d'euros.

Structure des recettes de la branche maladie

Un mouvement ancien d'évolution du panier de recettes de la branche maladie a conduit à une réduction structurelle de la part des cotisations.

Les cotisations, versées par les actifs et les personnes inactives couvertes au titre de la PUMa, représentaient près de la moitié des recettes de la branche en 2017. Si leur part relative est aujourd'hui inférieure à 40 %, elles demeurent néanmoins la ressource prépondérante de la branche.

La contribution sociale généralisée (CSG), qui avait atteint près de 46 % des ressources de la branche maladie en 2018, n'en représente aujourd'hui que moins du quart.

Parmi les autres taxes et contributions, la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) représente une ressource importante, à hauteur de près de 20 % (comprise dans le compartiment « autres taxes et contributions » ci-dessous).

Ventilation des recettes de la branche maladie en 2025

Source : Commission des affaires sociales, données du rapport des comptes de la sécurité sociale, octobre 2024

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

L'Assemblée nationale n'ayant pas examiné cet article, le Gouvernement l'a transmis au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

La rapporteure souligne la progression sensible des dépenses de la branche maladie (+ 8,9 milliards d'euros par rapport à la prévision initiale pour 2024) et alerte sur la poursuite de la dégradation du solde de la branche au-delà de 2025.

La branche maladie, qui représente environ 40 % des dépenses des Robss et du FSV, pèse dans l'aggravation de la situation des Robss et du FSV, dont le déficit atteindrait 18 milliards d'euros en 2024 puis 16 milliards d'euros en 2025. La Cour des comptes évoque à ce propos une dégradation « d'une ampleur inédite hors contexte de crise »820(*).

C'est dans ce cadre que s'inscrit l'actualisation de la prévision de déficit de la branche à 14,6 milliards d'euros en 2024, sous l'effet d'une progression de l'Ondam rectifiée à 3,3 % et de recettes moins dynamiques qu'attendues.

Perspectives pluriannuelles des comptes de la branche maladie

(en milliards d'euros)

 

2023 (p)

2024 (p)

2025 (p)

2026 (p)

2027 (p)

2028 (p)

Recettes

232,8

239

247,4

254,2

262

269,5

Dépenses

243,9

253,6

260,8

268,3

276,2

284,4

Solde

- 11,1

- 14,6

- 13,4

- 14,2

- 14,3

- 14,9

Source : Données PLFSS pour 2025, projet d'annexe à la future LFSS

Évolution des perspectives de recettes, de dépenses et de solde
de la branche maladie entre 2018 et 2028

(en milliards d'euros)

Source : Commission des affaires sociales, données PLFSS pour 2025, projet d'annexe à la future LFSS

• Pour 2025, le Haut Conseil des finances publiques, saisi pour avis sur le PLF et le PLFSS, juge le scénario macroéconomique retenu globalement fragile821(*). Il estime également que le taux de progression de l'Ondam à 2,8 % repose sur des hypothèses d'économies très incertaines et insuffisamment documentées.

La capacité du Gouvernement à tenir les objectifs d'économies qu'il s'est fixé est donc déterminante pour le respect de la trajectoire. Dans ce contexte, la rapporteure regrette à nouveau l'absence de précisions plus détaillées concernant les hypothèses d'évolution des dépenses et des recettes de la branche pour les années à venir.

• Néanmoins, malgré la projection d'un Ondam contenu jusqu'en 2028, la trajectoire fixée ne permettrait pas de résorber le déficit de la branche. Celui-ci continuerait même à s'aggraver jusqu'en 2028.

Évolution prévisionnelle des dépenses de l'Ondam jusqu'en 2028

 

2024

2025

2026

2027

2028

Ondam

3,3 %

2,8 %

2,9 %

2,9 %

2,9 %

Source : PLFSS 2025, projet d'annexe à la future LFSS

Ainsi que le souligne le comité d'alerte de l'Ondam dans son avis du 26 juillet 2024, à moyen terme, la branche maladie concentrerait avec la branche vieillesse l'essentiel du déficit des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale, en raison notamment de dépenses pérennes nées à l'occasion de la crise sanitaire. Parmi ces dépenses, les mesures de revalorisation salariale des personnels hospitaliers représentent 11 milliards d'euros annuels.

• Face à cette situation, la commission renouvelle ses alertes sur la soutenabilité des dépenses de la branche maladie et sur les conditions d'un hypothétique retour à l'équilibre, horizon qui semble s'éloigner durablement. La Cour des comptes relève au surplus que cette situation « ne permet pas d'absorber des dépenses exceptionnelles en cas de crise ni de préparer notre système social aux conséquences financières du vieillissement de la population »822(*).

Le déficit accumulé apparaît désormais structurel et l'absence de perspective de retour à l'équilibre de la branche impose de redéfinir une stratégie de financement qui soit à la fois crédible et soutenable.

La commission alerte toutefois le Gouvernement sur les mesures consistant à dégager des marges de manoeuvre financières par des reports de charges sur les ménages, telles que le relèvement du ticket modérateur sur les consultations de médecins et de sage-femmes. Sur ce point, elle souhaite que d'autres recettes puissent être mobilisées pour compenser une moindre hausse de ce ticket modérateur.

· Dans un contexte où la situation de la branche maladie apparaît durablement fragilisée, la maîtrise des dépenses exige non seulement des efforts significatifs et un pilotage rigoureux à court et moyen termes, mais également une réflexion sur des réformes structurelles de plus grande ampleur et de long terme, qui permettent d'organiser un meilleur accès aux soins dans les territoires, tout en tenant compte de la rareté des ressources et de la contrainte budgétaire. L'ensemble des acteurs sont appelés à y contribuer, à l'initiative et sous l'impulsion du Gouvernement.

Aussi, est-ce sous ces réserves que la commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article 27
Ondam et sous-Ondam

Cet article fixe pour 2025 le montant de l'Objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) ainsi que le montant des sous-objectifs qui le composent.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

A. Un Ondam en progression de 9 milliards d'euros par rapport au montant voté en LFSS pour 2024

Conformément à l'article L.O. 111-3-5 du code de la sécurité sociale, cet article fixe l'objectif national de dépenses d'assurance maladie pour l'année à venir.

• En 2025, l'Ondam augmenterait de 2,8 % pour atteindre 263,9 milliards d'euros, ce qui représente une hausse de 7,8 milliards d'euros par rapport au montant rectifié pour 2024 et de 9 milliards d'euros par rapport au montant voté en LFSS 2024.

• La ventilation entre sous-objectifs est déterminée comme suit.

Ventilation de l'Ondam pour 2025 entre sous-objectifs

(en milliards d'euros)

 

Taux d'évolution 2024/2025

Montant prévisionnel 2025

Total

2,8 %

263,9

Dépenses de soins de ville

2 %

111,6

Dépenses relatives aux
établissements de santé

3,1 %

108,8

Dépenses en établissements et services pour personnes âgées

6 %

17,7

Dépenses en établissements et services pour personnes handicapées

3,3 %

15,7

Dépenses relatives au FIR et au soutien national à l'investissement

- 0,5 %

6,6

Autres prises en charge

10,2 %

3,5

NB : En 2025, les changements de périmètre qui affectent l'Ondam à hauteur de 575 millions d'euros proviennent principalement de la mise en oeuvre de l'expérimentation de la tarification des Ehpad et des unités de soins de longue durée (USLD), qui vise à fusionner les sections soins et dépendance et conduit à transférer certaines dépenses supportées par les départements à la sécurité sociale.

Comparaison des sous-objectifs de l'Ondam pour 2024 et 2025

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après PLFSS 2025

• Les deux principaux sous-objectifs, relatifs aux soins de ville et aux établissements de santé, progressent respectivement de 2 % et de 3,1 %.

• Le sous-objectif relatif aux soins de ville progresse de 2 %, soit 2,1 milliards d'euros. Outre la tendance d'évolution spontanée de ces dépenses, ce montant intègre près de 1,6 milliard d'euros au titre des revalorisations conventionnelles, dont :

- 1 milliard d'euros pour le financement de la nouvelle convention médicale conclue le 4 juin 2024 (dont 0,6 milliard d'euros au titre de la seule hausse de la consultation de médecine générale à 30 euros), qui s'ajoute au coût du règlement arbitral conclu en 2023 (estimé à 0,7 milliard d'euros) ;

- 0,4 milliard d'euros pour la montée en charge de plusieurs avenants conventionnels, conclus notamment avec les masseurs-kinésithérapeutes, les chirurgiens-dentistes et les transporteurs sanitaires ;

- 0,1 milliard d'euros pour l'avenant à la convention pharmaceutique de juin 2024.

Parmi les mesures nouvelles, 100 millions d'euros sont également consacrés aux mesures de lutte contre la précarité menstruelle.

• Le sous-objectif relatif aux établissements de santé progresse de 3,1 %, soit près de 3,3 milliards d'euros en 2025. Cette évolution intègre l'augmentation du taux de cotisation employeurs pour la CNRACL à hauteur de 1,1 milliard d'euros.

In fine, les dépenses consacrées à des mesures nouvelles ciblées en établissements de santé s'élèvent à 0,8 milliard d'euros, le reste correspondant à l'évolution courante des charges des établissements.

La prévision repose en outre sur des objectifs d'économies fixés à hauteur de près de 1,3 milliard d'euros, grâce à la mobilisation de divers leviers : optimisation du processus d'achat, poursuite du virage ambulatoire et régulation des dépenses d'intérim de personnels.

Décomposition de l'évolution des financements alloués au sous-objectif relatif
aux dépenses des établissements de santé en 2025

(en milliards d'euros)

Source : Annexe 5 au PLFSS

• Les sous-objectifs relatifs aux établissements et services accueillant des personnes âgées et handicapées progressent au global de 4,7 %, pour atteindre 33,4 milliards d'euros. Ce montant intègre la hausse du taux de cotisation de la CNRACL ainsi que le surcoût lié à la fusion des sections des Ehpad pour un coût total de 0,3 milliard d'euros.

• Les crédits liés au fonds d'intervention régional (FIR) et au soutien à l'investissement connaissent une régression de 0,5 %, du fait du tarissement de certains crédits d'investissement immobiliers et numériques au titre du Ségur de la santé. Ce sous-objectif intègre par ailleurs une dépense nouvelle : la revalorisation des indemnités de permanence des soins des personnels médicaux dans les établissements privés à but lucratif.

• Enfin, le sixième sous-objectif enregistre une forte progression, portée par l'augmentation des dotations allouées aux opérateurs financés par l'assurance maladie, diverses mesures d'amélioration de l'offre médicosociale hors OGD823(*) et un recours accru aux soins des Français à l'étranger.

B. Un taux de progression qui impose une rigoureuse maîtrise des dépenses

1. Un net ralentissement de la dynamique de dépenses en 2025

• L'Ondam connaît une dynamique de dépenses exceptionnelle depuis 2019. Son rythme de progression est ainsi passé de 2,4 % par an en moyenne entre 2015 et 2019 à 5,2 % par an entre 2019 et 2023, et à 4,5 % entre 2019 et 2025. Entre 2019 et 2025, le montant de l'Ondam a évolué de 200,2 milliards d'euros à près de 264 milliards d'euros, soit un bond de 31,8 %.

Évolution de l'Ondam sur les dix dernières années

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après LFSS et PLFSS 2025

• Les hypothèses de construction de l'Ondam pour 2025 reposent sur une normalisation du contexte macroéconomique, notamment un ralentissement de l'inflation, estimée à 1,8 %, et une consolidation de la reprise d'activité des établissements de santé.

Si la progression de l'Ondam a été portée par un ensemble de facteurs exceptionnels depuis 2019 (cf. infra), l'Ondam 2025 intègre enfin une prévision de stabilisation des dépenses au titre du covid-19 à 0,5 milliard d'euros, soit un montant équivalent à celui enregistré après rectification de l'Ondam 2024.

Principe de construction de l'Ondam sur 2019-2025

Source : Annexe 5 au PLFSS

L'Ondam rapporté au produit intérieur brut (PIB)

L'augmentation de l'Ondam rapporté au PIB est une tendance qui précède la crise sanitaire. Celle-ci s'observe dès le début des années 2000, dans un contexte de ralentissement de la croissance économique et, parallèlement, de hausse soutenue des dépenses de santé.

L'Ondam a ensuite « connu une hausse structurelle importante et soudaine par rapport à la situation pré-crise »824(*), résultant directement des dépenses de crise et de lutte contre l'épidémie, puis du Ségur de la santé, notamment des dépenses issues des revalorisations salariales aux fins de soutenir l'attractivité du secteur hospitalier.

Le poids de l'Ondam semble aujourd'hui se stabiliser autour de 8,8 % du PIB en 2025, contre 8,2 % avant la crise sanitaire et 7 % au moment de la création de l'objectif de dépense en 1997.

2. Des mesures d'économies à hauteur de 4,9 milliards d'euros

• Le Gouvernement indique que le taux de progression spontané de l'Ondam atteindrait 4,7 % en l'absence de mesures d'économies. Ces mesures d'économies, chiffrées à 4,9 milliards d'euros, résultent à la fois de mesures de régulation et d'efficience et de transferts de charges. Elles sont détaillées ci-après.

En outre, des actions de maîtrise médicalisée et de lutte contre la fraude d'un montant de 900 millions d'euros, intégrées dans la progression tendancielle évaluée à 4,7 %, s'ajoutent à ce montant d'économies.

Répartition des mesures de maîtrise médicalisée
des dépenses et de lutte contre la fraude pour 2025

(en milliards d'euros)

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après le PLFSS 2025

Note de lecture : sur un total de 900 millions d'euros de mesures de maîtrise médicalisée des dépenses et de lutte contre la fraude, 440 millions concernent des économies sur les indemnités journalières.

• La construction de l'Ondam 2025 repose sur des mesures d'efficience et de régulation, jugées incertaines par le comité d'alerte :

1,6 milliard d'euros de régulation sur les produits de santé (baisses de prix des médicaments et maîtrise des volumes) ;

- 0,7 milliard d'euros ciblant l'optimisation du processus d'achat et le virage ambulatoire dans les établissements de santé ;

- 0,6 milliard d'euros de régulation sur les dépenses de ville (protocole de biologie médicale, transports sanitaires, protocole radiologie, etc.).

• L'Ondam 2025 opère également des transferts de charges :

- à hauteur de 1,7 milliard d'euros aux entreprises, directement ou indirectement via leurs cotisations de prévoyance (abaissement du plafond des IJ825(*)) et organismes complémentaires (relèvement du ticket modérateur sur les consultations des médecins et sage-femmes) ;

- à hauteur de 0,3 milliard d'euros aux assurés, du fait de l'effet en année pleine de la mesure de doublement des participations forfaitaires et franchises instaurée en 2024.

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

L'Assemblée nationale n'ayant pas examiné cet article, le Gouvernement l'a transmis au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

A. Des incertitudes sur la capacité à maîtriser la dynamique de dépense dès 2025

Dans son avis du 30 octobre 2024, le comité d'alerte a jugé que le PLFSS pour 2025 « fixe un objectif ambitieux de ralentissement de l'évolution des dépenses relevant de l'Ondam » et « s'accompagne de risques élevés de dépassement s'agissant des dépenses de soins de ville et de soins en établissement de santé »826(*).

1. Une dynamique des dépenses de ville insuffisamment régulée depuis plusieurs années

• Le dynamisme des dépenses de ville constaté ces dernières années fait peser des doutes sur la capacité collective des acteurs à atteindre les objectifs fixés en 2025.

En 2024, le dépassement de l'Ondam d'1,2 milliard d'euros résulte presque intégralement d'une non-maîtrise du sous-objectif relatif aux soins de ville827(*). De plus, après neutralisation de l'impact des évènements exceptionnels, l'objectif des soins de ville est en dépassement de 3,1 % en moyenne entre 2019 et 2023, contre 2,2 % pour l'objectif des établissements de santé828(*).

• Or, la prévision d'Ondam pour 2025 repose largement sur des mesures d'efficience et de régulation dans le secteur des soins de ville, que le Haut Conseil des finances publiques a jugé trop peu documentées et incertaines. Celui-ci a en effet relevé « la difficulté à générer des économies de cette ampleur », ce qui « le conduit à considérer que la trajectoire d'Ondam pour 2025 apparaît très optimiste »829(*).

Si la commission considère que la poursuite des efforts de maîtrise médicalisée des dépenses et de recherche d'efficience est indispensable, elle s'interroge sur une potentielle surestimation de ces mesures d'économies, qui fragiliserait la crédibilité de la trajectoire arrêté par le PLFSS.

· La commission exprime également sa préoccupation quant au report de charges supporté par les ménages du fait de la hausse du ticket modérateur sur les consultations de médecins et de sage-femmes. Elle appelle à ce que cette hausse soit la plus limitée possible et à ce que le Gouvernement identifie des sources de recettes alternatives pour compenser cette moindre hausse.

2. Un Ondam fortement contraint pour les établissements de santé, qui risque d'aggraver leur situation financière déjà préoccupante

• Le taux de progression de 3,1 % du sous-objectif relatif aux établissements de santé mérite d'être déconstruit. Déduction faite du coût de la cotisation CNRACL, le sous-objectif ne progresse plus que de 2 % à peine. Si l'on y soustrait encore l'impact de l'inflation, la progression du 2sous-objectif n'est plus que marginale.

L'Ondam 2025 fait ainsi l'impasse sur l'enjeu central de la revalorisation des tarifs et dotations, lesquels ne permettent plus de couvrir les charges auxquelles font face les établissements de santé. La Fédération hospitalière de France (FHF) regrette une décorrélation croissante entre les tarifs et les coûts, qui s'accentue depuis la crise sanitaire et qui met sous tension les établissements de santé en créant les conditions d'une progressive asphyxie financière.

En outre, dans ce contexte très dégradé, les impacts de la réforme du financement des établissements de santé demeurent mal appréhendés. Le modèle cible du dispositif pour les soins critiques, qui doit entrer en vigueur en 2025, n'est toujours pas connu. Les acteurs regrettent les conditions de conduite de cette réforme, « sans vision systémique et sans visibilité suffisante sur les études d'impact »830(*). De même concernant la réforme du dispositif d'incitation financière à la qualité (Ifaq), les différentes fédérations hospitalières s'inquiètent de ne disposer d'aucune visibilité quant aux impacts anticipés du nouveau modèle, au sein des établissements et entre secteurs. Dans un contexte qui nécessite de sécuriser les ressources des établissements, l'entrée en vigueur du dispositif prévue en 2025 peut désormais sembler prématurée.

La conférence des directeurs généraux de CHU, qui alerte sur la dégradation des indicateurs financiers des établissements, souligne que « la dégradation conséquente de la capacité d'autofinancement ne permet plus, pour la moitié des CHU, de rembourser le capital de leur dette ni de faire face à leurs besoins d'investissement. » Le déficit des CHU a ainsi doublé chaque année entre 2021 et 2023, passant de 200 millions d'euros à 800 millions d'euros. Il devrait atteindre un milliard d'euros en 2024.

· La commission invite le Gouvernement à définir une trajectoire d'augmentation des cotisations à la CNRACL plus soutenable au regard des besoins de financement des établissements publics de santé et médicosociaux. Le desserrement de cette nouvelle contrainte, qui revient à faire peser sur la branche maladie un déficit de financement de la branche vieillesse, pourrait être envisagée grâce à un lissage de la hausse de cotisations sur une durée plus longue, par exemple quatre ans au lieu de trois. Une telle mesure permettrait de dégager une marge de l'ordre de 300 millions d'euros sur l'Ondam.

3. Des efforts significatifs à soutenir dans la durée

• Le PLFSS pour 2025 fixe une trajectoire pour l'Ondam qui apparaît fortement contrainte jusqu'en 2028, compte tenu des dépassements observés chaque année d'une part, et des enjeux de santé publique qui exigent de financer des besoins nouveaux et croissants d'autre part.

Les taux de progression prévisionnels de l'Ondam - 2,9 % chaque année entre 2026 et 2028 - imposent donc un effort substantiel de maîtrise des dépenses dans les prochaines années. La trajectoire projette néanmoins un taux de progression supérieur à celui observé entre 2015 et 2019, qui s'élevait en moyenne à 2,4 %.

• La commission constate toutefois que cette trajectoire rigoureuse ne permet pas de résorber le déficit de la branche maladie d'ici à 2028, qui continuera au contraire à s'aggraver.

Face à cette situation, la commission juge indispensable de se doter d'une vision prospective qui dépasse le cadre du PLFSS et qui définisse un horizon pluriannuel pour engager des réformes structurelles.

B. Au-delà de 2025, engager des réformes structurelles pour consolider le financement et l'organisation du système de santé

• Alors que les besoins de santé s'accroissent et que le système de santé fait face à de lourds enjeux, l'adaptation des modèles de prise en charge des patients et l'organisation d'une offre de soins graduée et efficiente, préservant des équilibres territoriaux pérennes, doivent constituer des priorités d'action.

La construction de ces nouveaux modèles doit s'inscrire dans une vision pluriannuelle et prospective, et se faire en partenariat avec les principaux acteurs de santé, professionnels de ville et établissements de santé. Les fédérations hospitalières ont ainsi exprimé leurs attentes et préoccupations à propos de la simplification de la gouvernance du système de santé et de la territorialisation de l'offre de soins.

Au global, les mesures d'efficience doivent relever de réformes plus structurelles impulsées par le Gouvernement, notamment l'approfondissement des groupements hospitaliers des territoires (GHT), la consolidation des projets territoriaux de santé, la rationalisation des implantations de plateaux techniques de recours et, plus largement, la construction de filières et de parcours de soins cohérents et non redondants à l'échelle des territoires. L'accomplissement des missions de service public, au premier rang desquelles figure l'organisation de la permanence des soins, doivent également être sécurisées. Enfin, la prévention doit être mise au coeur des politiques de santé et encouragée grâce à un modèle de financement adapté.

• L'impératif de maîtrise des dépenses de santé implique des choix conscients et raisonnés, qui ne sacrifient pas l'investissement de long terme. À cet égard, la commission souligne l'importance d'accompagner les grandes opérations d'investissement, notamment immobilier et dans le numérique, et de continuer à soutenir l'innovation en santé.

Elle alerte également sur la question cruciale de l'évolution des tarifs hospitaliers pour 2025, qui conditionnera la capacité des établissements de santé à accompagner la dynamique d'activité constatée en 2024, c'est-à-dire à répondre aux besoins de prise en charge des usagers. L'ensemble des fédérations expriment ainsi leur crainte d'une évolution négative des tarifs et d'un sous-financement chronique de certains activités complexes et de recours. Les hôpitaux, qui ont démontré leur résilience tout au long de la crise sanitaire, ne pourront assumer une stabilité des tarifs sans aggraver significativement et durablement leur situation, jusqu'à mettre en péril la pérennité de l'offre dans certains territoires.

L'évolution des tarifs doit non seulement permettre de soutenir prioritairement les activités sous-financées et répondant aux besoins de santé, mais également d'impulser et de conduire les transformations de l'offre de soins.

En conclusion, l'effort de maîtrise budgétaire ne doit donc pas conduire à un délitement progressif de l'offre de soins qui deviendrait inévitable en l'absence de restructurations anticipées et accompagnées.

· En responsabilité, la commission invite donc le Gouvernement à prendre des mesures immédiates visant à desserrer la contrainte financière contenue dans l'Ondam :

- en lissant la hausse des cotisations à la CNRACL sur une durée plus longue, compatible avec les besoins des établissements publics de santé et médicosociaux ;

- en actant une contribution de la branche autonomie au financement du remboursement des fauteuils roulants, mesure qui devrait représenter environ 400 millions d'euros pour l'assurance maladie.

Sous ces réserves, la commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article 28
Objectif de dépenses de la branche AT-MP

Cet article fixe l'objectif de dépenses de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) à 17,0 milliards d'euros sur l'ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale pour l'année 2025.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

A. L'année 2023, marquée par un excédent de 1,4 milliard d'euros, a confirmé la bonne santé financière de la branche AT-MP

En 2023, la branche AT-MP a, pour la dixième fois en onze exercices, dégagé un solde excédentaire, à hauteur de 1,4 milliard d'euros.

1. En 2023, les recettes de la branche AT-MP ont atteint 16,8 milliards d'euros sur le champ des Robss

Les recettes de la branche AT-MP ont poursuivi leur croissance dynamique en 2023, avec un rebond de 3,8 % sur le champ des Robss. Cette évolution s'explique par la hausse, en réponse à l'inflation, de 5,7 % de la masse salariale du secteur privé, sur laquelle sont assises les cotisations sociales responsables de 97 % des recettes du régime général.

Les recettes ont toutefois été moins dynamiques que ne l'annonçait la LFSS pour 2024, qui prévoyait une hausse de 6,2 %. La différence avec les recettes réalisées provient de la surestimation de 0,6 point, en LFSS pour 2024, de la progression de la masse salariale.

2. En 2023, les dépenses de la branche AT-MP ont atteint 15,4 milliards d'euros sur le champ des Robss

Les dépenses de la branche AT-MP ont connu une hausse plus rapide que celle des recettes, mesurée à 6,6 % en 2023 sur le champ des Robss. Cette évolution a été portée par la forte dynamique des prestations en espèces, avec une hausse de 13,2 % du montant des indemnités journalières versées en deux ans, et par une plus forte contribution de la branche AT-MP au titre de la sous-déclaration, passée de 1,1 milliard d'euros à 1,2 milliard d'euros. Les rentes AT-MP, portées par des revalorisations liées à l'inflation, ont également progressé de 4,3 % entre 2022 et 2023.

Les dépenses de la branche AT-MP en 2023 sont conformes, à 100 millions d'euros près, aux prévisions réalisées par le Gouvernement dans la LFSS pour 2024.

B. La branche AT-MP, amputée en recettes par le « swap » de taux avec la branche vieillesse, devrait tout de même dégager un excédent de 0,7 milliard d'euros en 2024 sur le champ des Robss

Une baisse des recettes en 2024 liée au « swap » de taux avec la branche vieillesse combinée à une hausse dynamique de 3,9 % des dépenses explique une contraction de l'excédent de la branche en 2024.

L'excédent prévisionnel pour 2024, 0,7 milliard d'euros sur le champ des Robss, est considérablement inférieur aux prévisions figurant en LFSS pour 2024. En effet, les prévisions en recettes ne se sont pas réalisées du fait d'une masse salariale du secteur privé en berne (3,2 % dans les dernières prévisions, contre une estimation de 3,9 % dans la LFSS pour 2024).

Prévisions des recettes, dépenses
et solde de la branche AT-MP pour 2024

 

LFSS pour 2024

PLFSS pour 2025

Recettes

17,1

16,7

Dépenses

16

16

Solde

1,1

0,7

Source : Commission des affaires sociales d'après LFSS pour 2024, PLFSS pour 2025

1. En 2024, les recettes de la branche AT-MP atteindraient 16,7 milliards d'euros sur le champ des Robss, un total en diminution de 1 % par rapport à 2023.

Les recettes de la branche AT-MP ont régressé de près de 1 % en 2024. En effet, la hausse de 3,2 % de la masse salariale dans le privé831(*) n'a pas suffi à compenser les effets du « swap » de taux décidé lors de la LFRSS pour 2023.

Pour rappel, une baisse du taux de cotisations en AT-MP avait été actée lors de la réforme des retraites afin de neutraliser le coût pour les employeurs d'une hausse symétrique au profit de la branche vieillesse, initialement fixée à 0,1 point mais finalement rehaussée à 0,12 point afin de pallier le coût des amendements dépensiers adoptés sur ce texte et de poursuivre l'objectif de l'équilibre de la branche vieillesse à horizon 2030.

Aux 800 millions d'euros de cotisations transférés en 2024, s'ajoutera, par la suite, un second transfert, prévu pour 2026.

Les autres produits de la branche, qui comprennent notamment le résultat financier engendré par les excédents cumulés de son régime général, abondent les recettes de plus de 620 millions d'euros, un total en hausse de 13,8 % lié à la hausse des taux d'intérêt.

2. En 2024, les dépenses de la branche AT-MP devraient avoisiner 16,0 milliards d'euros sur le champ des Robss, soit 3,9 % de plus qu'en 2023

Conformément aux prévisions de la dernière LFSS, les dépenses de la branche AT-MP devraient atteindre 16,0 milliards d'euros en 2024, soit 600 millions d'euros de plus qu'en 2023.

La dynamique des dépenses de la branche est principalement liée à l'évolution des prestations légales nettes (+ 561 millions d'euros, + 4,6 %), mais la progression continue des transferts à la charge de la branche pèse également sur son budget.

Trajectoire de recettes et dépenses de la branche AT-MP depuis 2014

Source : Commission des affaires sociales du Sénat d'après données PLFSS pour 2025 et Placss pour 2023

Selon les dernières données disponibles, datant d'octobre 2024, les prestations de la branche AT-MP seraient portées assez équitablement par les indemnités journalières et par les rentes.

Les prestations d'incapacité temporaire, composées des indemnités journalières et des prestations en nature, représentent des dépenses de 6,3 milliards d'euros en 2024, soit une hausse de 311 millions d'euros sur un an (+ 5,2 %). Les prestations d'incapacité permanente, représentant 5,9 milliards d'euros de dépenses en 2024, ressortent quant à elles en hausse de 174 millions d'euros, soit 3,0 % sur un an ; une évolution uniquement liée à un effet revalorisation - les rentes ont été augmentées de 4,6 % au 1er avril 2024, après 5,6 % de hausse l'année précédente.

Les transferts à la charge de la branche ont également été dynamiques en 2024. Si, tout comme celui au Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Fcaata), le transfert à la branche maladie est resté stable à 1,2 milliard d'euros, le transfert au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva) est passé de 220 millions d'euros à 353 millions d'euros pour permettre au fonds de financer des dépenses en hausse, portées par la revalorisation du barème d'indemnisation des préjudices extrapatrimoniaux. Il convient également de noter que, jusqu'en 2023, la dotation au fonds avait été fixée à un niveau volontairement insuffisant afin d'épuiser les réserves financières qu'il avait précédemment constituées : l'évolution de la contribution de la branche AT-MP reflète donc également un rebasage lié à la fin de la stratégie de prélèvement sur le fonds de roulement du Fiva.

Le régime général représente l'essentiel des dépenses de la branche AT-MP, avec 14,3 milliards d'euros (+ 3,7 %). Les régimes agricoles, que ce soit celui des salariés (692 millions d'euros, + 2,2 %) ou des exploitants (372 millions d'euros, - 0,9 %) affichent, parmi les autres régimes obligatoires de base, les dépenses les plus importantes, suivis de celui des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers (233 millions d'euros, + 5,2 %) et du régime minier (161 millions d'euros, - 14,3 %)832(*).

Les charges du régime général (AT-MP)

Les dépenses du régime général se décomposent entre des prestations, certaines étant dans le champ de l'Ondam, et d'autres en dehors, des transferts, et d'autres charges.

Les prestations sociales, marquées par une croissance dynamique de 5,0 %, représentent plus des trois quarts des dépenses du régime général et atteignent 10,9 milliards d'euros en 2024. Ces dépenses sont réparties entre prestations relevant du champ de l'Ondam et n'en relevant pas :

les prestations du champ de l'Ondam atteignent 5,8 milliards d'euros et sont constituées de prestations en nature en ville (456 millions d'euros) ou en établissement (499 millions d'euros) et de prestations en espèces via le versement d'indemnités journalières visant à compenser l'incapacité temporaire (4,8 milliards d'euros). Leur croissance de 5,4 % en 2024 est intégralement portée par des indemnités journalières (+ 7,2 %), affectées par la hausse de 3,2 % des salaires ;

les prestations hors du champ de l'Ondam passeraient au-dessus de la barre des 5 milliards d'euros (5,2 milliards d'euros) et connaîtraient une évolution moins dynamique, attendue à 4,5 %. Les prestations d'incapacité permanente, qu'elles soient sous forme de rentes viagères ou d'indemnités en capital, sont notifiées à 4,6 milliards d'euros, soit 90 % du sous-total. Leur évolution positive de 2,7 %, portée par la revalorisation des rentes consécutive à l'inflation, explique pour moitié la trajectoire des prestations hors Ondam. L'autre moitié de la hausse provient principalement des actions de prévention, qui atteindraient 252 millions d'euros, un total en hausse de 51 % sur un an. Cette évolution s'explique par la montée en charge du compte personnel de prévention (C2P) et du fonds d'investissement dans la prévention de l'usure professionnelle (Fipu), respectivement élargi et créé par la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023. Les allocations de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Acaata) augmenteraient quant à elles de 17 millions d'euros du fait de l'élargissement du champ bénéficiaires potentiels et d'un intérêt supplémentaire au recours lié au décalage de l'âge légal de départ à la retraite ;

Évolution des prestations versées par le régime général
de la branche AT-MP depuis 2022

(en millions d'euros)

Source : Commission des affaires sociales du Sénat d'après données du rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale d'octobre 2024

les transferts représentent, en 2024, 2,4 milliards d'euros pour le régime général de la branche AT-MP, soit 17 % des charges du régime. Le transfert à la branche maladie au titre de la sous-déclaration représente la moitié de ce total. Le régime général de la branche AT-MP finance également d'autres transferts, que ce soit avec d'autres régimes obligatoires de base (372 millions d'euros) à l'image du régime minier, à d'autres branches (205 millions d'euros pour la branche vieillesse) ou à divers fonds (380 millions d'euros, dont 353 millions d'euros pour le Fiva) ;

- les autres charges du régime général de la branche AT-MP atteignent 965 millions d'euros en 2024 et sont quasi-intégralement composées de charges de gestion courante pour 963 millions d'euros.

Répartition des dépenses du régime général
de la branche AT-MP en 2024

Source : Commission des affaires sociales du Sénat d'après données du rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale d'octobre 2024

C. La branche AT-MP devrait retrouver l'équilibre en 2025 du fait d'une hausse inédite des transferts à sa charge

Le PLFSS pour 2025 prévoit un retour à l'équilibre financier de la branche AT-MP dès 2025, avec un solde prévisionnel de 0,2 milliard d'euros, soit 0,9 milliard de moins que les prévisions précédentes.

Deux explications principales peuvent être apportées pour justifier cet écart.

D'une part, les recettes de la branche AT-MP devraient être moins dynamiques que prévu, avec des recettes prévisionnelles de 17,1 milliards d'euros sur le champ des Robss, contre 17,7 milliards d'euros estimés en LFSS pour 2024. Pour cause, les prévisions de croissance en LFSS pour 2024 (1,4 % en 2024, 1,7 % en 2025) ont été revues à la baisse en PLFSS pour 2025 (1,1 % en 2024, 1,1 % en 2025), ce qui pèse sur la masse salariale du secteur privé, sur laquelle sont assises les cotisations. Celle-ci devait évoluer favorablement de 3,9 % en 2024 et 3,4 % en 2025 selon la LFSS pour 2024, quand les données corrigées pour le PLFSS pour 2025 indiquent plutôt + 3,2 % en 2024 et + 2,8 % en 2025 dans le PLFSS pour 2025.

D'autre part, les dépenses à la charge de la branche ont été réévaluées de 400 millions d'euros, passant de 16,6 à 17,0 milliards d'euros pour 2025. Cette évolution est uniquement explicable par une nouvelle hausse inédite des transferts à la charge de la branche, à hauteur de 639 millions d'euros supplémentaires.

Le dernier rapport de la commission chargée d'évaluer le coût réel de la sous-déclaration des AT-MP, daté de juin 2024, chiffre désormais entre 2 et 3,8 milliards d'euros le montant indûment pris en charge par la branche maladie en lieu et place de la branche AT-MP. Cela constitue un quasi-doublement par rapport aux précédentes estimations, réalisées en 2021, qui tablaient sur une fourchette entre 1,2 et 2,1 milliards d'euros. Conformément à sa doctrine en la matière, le Gouvernement souhaite s'inscrire dans une trajectoire d'augmentation du transfert à chaque exercice jusqu'en 2027, année au cours de laquelle le montant transféré par la branche maladie à la branche AT-MP devrait atteindre 2 milliards d'euros, soit la borne basse de l'estimation de la commission.

Dès 2025, la contribution de la branche AT-MP augmenterait de 400 millions d'euros pour atteindre 1,6 milliard d'euros.

Outre cette évolution, les contributions aux fonds amiante augmenteraient à raison de 210 millions d'euros sur un an. Le Fiva comme le Fcaata ont connu une hausse des demandes d'indemnisation à l'origine d'une situation financière dégradée, justifiant la hausse des dotations de la branche AT-MP.

La branche AT-MP continuerait enfin d'accompagner les dispositifs d'aménagement de la carrière prévus au titre de la pénibilité et du départ en retraite anticipé pour les victimes d'AT-MP présentant une incapacité permanente. Les transferts associés représenteraient, en 2025, 220,7 millions d'euros au régime général et 9,7 millions d'euros au régime agricole, un total supérieur de 29 millions d'euros à l'effort consenti en 2024.

En ce qui concerne les prestations, celles-ci devraient augmenter de 3,9 % en 2025 sur le champ des régimes obligatoires de base, portées par les prestations du champ de l'Ondam (+ 3,6 %), et notamment les indemnités journalières. Les prestations hors Ondam n'augmenteraient qu'assez peu (+ 1,4 %), compte tenu de la faible revalorisation attendue avec le ralentissement de l'inflation.

L'évolution des prestations au régime général

Au régime général, les prestations légales nettes augmenteraient de 4,3 % en 2025 (11,4 milliards d'euros), avec une hausse de 3,8 % des prestations sur le champ de l'Ondam et de 4,9 % pour les prestations hors de ce champ.

Sur le champ de l'Ondam, les indemnités journalières atteindraient 5,0 milliards d'euros, soit une hausse de 3,8 %. Il s'agirait d'une contraction dans la dynamique observée depuis 2022, marquée par des taux de croissance de 7 % à 9 % dans un contexte de hausse générale des salaires en réponse à l'inflation. De leur côté, les prestations en nature se monteraient à 1,0 milliard d'euros.

Les prestations hors du champ de l'Ondam seraient portées par des dépenses de prévention en hausse de 70 % avec la montée en charge du Fipu et du C2P, et qui atteindraient désormais 430 millions d'euros. La croissance des prestations d'incapacité permanente resterait contenue à 1,5 %, pour un montant total prévisionnel versé de 4,7 milliards d'euros.

Les prestations versées ne seront pas affectées par la réforme de la rente et de l'indemnité en capital portée par l'article 24 du texte puisque l'entrée en vigueur prévisionnelle de ce dispositif est fixée à la mi-2026.

Décomposition de l'évolution du solde 2025 de la branche AT-MP
entre les estimations de la LFSS pour 2024 et du PLFSS pour 2025

(en milliards d'euros)

Source : Commission des affaires sociales du Sénat d'après données LFSS pour 2024, PLFSS pour 2025

D. Les perspectives pluriannuelles des comptes de la branche

La branche AT-MP plongerait, dès 2026, dans une situation légèrement mais durablement déficitaire.

Le solde se détériorerait considérablement en 2026 pour atteindre - 0,4 milliard d'euros, du fait d'un effet « ciseaux » provoqué, en recettes, par le nouveau transfert de cotisations à la branche vieillesse dans le cadre du « swap » de taux adopté en LFRSS pour 2023 et, en dépenses, par la poursuite de la montée en charge du transfert à la branche maladie, en vue d'atteindre 2 milliards d'euros en 2027. Il en résulterait des recettes de 17,0 milliards d'euros, inférieures de 100 millions d'euros à leur niveau de 2025, et des dépenses en progression de 400 millions d'euros pour atteindre 17,4 milliards d'euros.

Le solde serait ensuite stabilisé aux alentours de - 0,5 milliard d'euros, avec 0,6 milliard d'euros de déficit prévisionnel en 2027, puis 0,5 milliard en 2028.

Solde prévisionnel de la branche AT-MP entre 2022 et 2028

(en milliards d'euros)

Source : Commission des affaires sociales du Sénat d'après données de la LFSS pour 2024, PLFSS pour 2025

Ces résultats constituent une dégradation considérable par rapport au prévisionnel de la LFSS pour 2024, qui indiquait 0,8 milliard d'euros d'excédent en 2026, puis 1,0 milliard en 2027. L'écart à la trajectoire s'explique tant en recettes qu'en dépenses.

En recettes, l'écart à la trajectoire de la LFSS pour 2024 représente 0,7 milliard d'euros en 2027. La moindre évolution de la masse salariale dans le privé en 2024 et 2025 ne serait pas compensée par un rebond par la suite : les recettes de la branche AT-MP connaîtraient donc un « saut de base » défavorable, provoquant un écart durable entre les cotisations espérées dans la trajectoire de la LFSS pour 2024, et celles effectivement perçues.

En dépenses, la dynamique non anticipée, responsable d'un surcoût de 900 millions d'euros en 2027 pour la branche, est intégralement le fait de la progression des transferts, à commencer bien sûr par la hausse prévisionnelle de 800 millions d'euros de celui à la branche maladie. La réforme des prestations d'incapacité permanente portée par l'article 24 du PLFSS aurait un effet minime sur les dépenses de la branche (+ 49 millions d'euros en 2026, + 105 millions d'euros en 2027). D'une part, l'entrée en vigueur est prévue pour la mi-2026, le dispositif ne prendra donc effet en année pleine qu'en 2027. En outre, la montée en charge de la réforme de la rente se fera de manière échelonnée, puisqu'elle ne concernera que les nouveaux bénéficiaires.

Recettes, dépenses et soldes observés et prévisionnels de la branche AT-MP

Source : Commission des affaires sociales du Sénat d'après données PLFSS pour 2024 et PLACSS pour 2022

Les excédents de la branche AT-MP depuis 2013 ont toutefois permis non seulement d'apurer la dette constituée par la branche lors de la crise économique de 2008, mais également de constituer des excédents accumulés prévisionnels de 8,3 milliards d'euros en 2024. Malgré la dégradation du solde de la branche, la branche devrait conserver un excédent cumulé pendant encore une décennie au moins. Fatalement, les déficits prévisionnels de la branche entameront progressivement ces excédents cumulés, qui devraient n'atteindre plus que 7,0 milliards d'euros à horizon 2028, un total près de 5 milliards d'euros inférieur au prévisionnel de la LFSS pour 2024.

Excédents cumulés de la branche AT-MP depuis 2021

(en milliards d'euros)

Source : Commission des affaires sociales du Sénat d'après données Placss pour 2023 et PLFSS pour 2025

E. Le dispositif proposé : la fixation de l'objectif de dépenses de la branche à 17,0 milliards d'euros pour 2025

L'article 28 fixe, pour l'année 2025, à 17,0 milliards d'euros l'objectif de dépenses de la branche AT-MP sur le champ des régimes obligatoires de base de sécurité sociale. La fixation de cet objectif compte parmi les dispositions obligatoires de la LFSS de l'année.

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

L'Assemblée nationale n'ayant pas examiné cet article, le Gouvernement l'a transmis au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

La commission regrette la dégradation des perspectives pluriannuelles du solde de la branche AT-MP.

Le Gouvernement a choisi de réattribuer l'excédent de la branche à d'autres entités dont la situation financière est plus dégradée, à commencer par la branche maladie.

La commission prend acte de ce choix, qui dénote une vision de la sécurité sociale reposant sur une fongibilité et une solidarité entre les branches, et, plus largement, entre les administrations publiques.

La rapporteure ne partage pas cette philosophie, et estime au contraire que l'intérêt de la répartition de la sécurité sociale en branches est de pouvoir piloter chacune de manière autonome, avec un budget dédié. En particulier, la rapporteure rappelle que la branche AT-MP présente de nombreuses spécificités, à commencer par son mode de financement reposant intégralement sur les employeurs. Dans ce contexte, et bien que la rapporteure partage le souci de parvenir à l'équilibre des finances sociales, elle rappelle que les ressources de la branche devraient, par priorité, être affectées à la réparation et à la prévention des risques professionnels.

La commission rappelle, en outre, son incompréhension quant à la répartition de l'effort de refinancement du Fiva. Il lui apparaît injuste que la branche AT-MP en porte intégralement la charge, alors que l'État, reconnu responsable du scandale de l'amiante, maintient sa dotation constante, à un niveau dix fois inférieur à celui qu'il devrait symboliquement prendre en charge pour couvrir l'indemnisation des victimes environnementales et de l'État employeur. La nouvelle hausse de 113 millions d'euros des subventions publiques au Fiva est nécessaire et indispensable pour le fonds. Elle devrait néanmoins reposer pour partie sur l'État.

En tout état de cause, la commission s'opposera, dans les prochaines années, à toute hausse de cotisations réclamée aux entreprises si elle estime que ces dernières ont été rendues nécessaires par l'augmentation des transferts à la charge de la branche AT-MP, et non par la dynamique sous-jacente des prestations et des dépenses de prévention.

Pour autant, la commission salue la transposition fidèle des demandes des partenaires sociaux afin d'améliorer la réparation de l'incapacité permanente, chiffrée dans la trajectoire pluriannuelle annexée au PLFSS. S'il est vrai que cette réforme pourrait encore être perfectionnée en prenant mieux en compte la spécificité des victimes de FIE, comme le suggère le récent rapport833(*) de la mission d'évaluation et de contrôle (Mecss) du Sénat sur la branche AT-MP, elle constitue une avancée importante pour les victimes d'accident du travail et de maladies professionnelles affectés par une incapacité permanente, sur le chemin d'une réparation plus protectrice. Il convient donc de se réjouir des modalités de transcription retenues par le Gouvernement, et de l'inclusion de la revalorisation des prestations d'incapacité permanente dans la trajectoire financière de la branche.

Il faut également saluer l'effort réalisé par la branche en matière de prévention, avec le déploiement du Fipu, la montée en charge du C2P, et la nouvelle convention d'objectifs et de gestion qui, si elle ne va pas assez loin, procède déjà d'une logique vertueuse d'accentuation de l'effort de la branche en faveur de la prévention.

Malgré ses réserves concernant la hausse des transferts à la charge de la branche AT-MP, et considérant que l'objectif de dépenses affiché dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale répond aux priorités de la branche en améliorant la réparation et en investissant davantage sur la prévention, la commission propose d'adopter cet article sans modification.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article 29
Objectif de dépenses de la branche vieillesse

Cet article tend à fixer l'objectif de dépenses de la branche vieillesse pour 2025 à 300,2 milliards d'euros.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

A. Un objectif de dépenses de 300,2 milliards d'euros en 2025

Le présent article, disposition obligatoire des LFSS de l'année, fixe l'objectif de dépenses de la branche vieillesse834(*) à 300,2 milliards d'euros en 2025, ce qui représenterait une augmentation de 2,2 % par rapport à la prévision révisée pour 2024.

Le déficit de la branche vieillesse s'est aggravé entre l'année 2023, où il a été de 2,6 milliards d'euros, et l'année 2024, où il serait de 6,3 milliards d'euros.

L'alourdissement en 2024 des dépenses de pensions de retraite versées par les régimes de base (+ 6,8 %) s'explique principalement par les revalorisations de pensions en lien avec le choc d'inflation. Les retraites ont ainsi été revalorisées de 5,3 % au 1er janvier 2024, à la suite d'une indexation sur l'inflation de l'année précédente835(*).

Il convient toutefois de relever l'évolution tendancielle de hausse des dépenses liées aux pensions de retraites, qui s'explique par la hausse des effectifs de retraités, en raison du départ à la retraite des générations du baby-boom et de l'allongement de la durée d'espérance de vie, ainsi que par l'augmentation de la pension moyenne des retraités liée à l'amélioration des carrières et de leur durée, et à la participation toujours plus élevée des femmes au marché du travail.

Selon le rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale d'octobre 2024 - qui ne prend pas en compte les mesures du PLFSS, comme le report au 1er juillet de la revalorisation des pensions -, les dépenses de pensions de retraite ralentiraient spontanément en 2025, en raison d'une moindre revalorisation sur l'inflation (+ 2,3 % au 1er janvier 2025).

En parallèle, malgré les effets de la réforme des retraites du 14 avril 2023, les recettes de la branche vieillesse ont pâti d'une croissance de la masse salariale moins soutenue que l'an passé (+ 3,2 % en 2024 contre 5,7 % en 2023).

B. Les projections du solde de la branche vieillesse du PLFSS sont en amélioration par rapport aux projections passées

1. Les projections du déficit de la branche vieillesse sont moins défavorables que par le passé, malgré une tendance à la hausse en 2028

Le graphique ci-après compare les prévisions à moyen terme du solde de la branche vieillesse de la LFSS pour 2024 et celles du présent PLFSS pour 2025.

Comme on peut le constater, les projections de la LFSS pour 2024 correspondaient à une dégradation rapide du déficit, qui devait atteindre 13,6 milliards d'euros en 2027.

Ces projections supposaient une croissance des dépenses supérieure en moyenne de 1 point à celle des recettes. Les dépenses de retraite étant d'environ 300 milliards d'euros par an, il en serait résulté une augmentation du déficit d'environ 3 milliards d'euros par an.

Prévisions du solde de la branche vieillesse (hors FSV) du PLFSS 2025
comparées à celles de la LFSS 2024

(en milliards d'euros)

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après la LFSS 2024 et le présent PLFSS

2. La réduction projetée du déficit repose sur des mesures attendues en 2025 ainsi que sur la réforme des retraites de 2023

L'amélioration du solde de la branche vieillesse résulte de deux mesures portées par le présent PLFSS.

La première, le décalage au 1er juillet de la revalorisation des pensions sur l'inflation (article 23 du présent PLFSS), aurait un double effet sur le volume des pensions revalorisées, qui est moindre qu'au 1er janvier, et sur le montant de la revalorisation, le coefficient de revalorisation appliqué au 1er juillet étant, selon les projections, moindre qu'au 1er janvier au regard de la décélération de l'inflation constatée (soit 0,9 % au lieu de 2,3 % selon le rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale d'octobre 2024).

Selon l'évaluation préalable de l'article 23, cette mesure réduirait les dépenses de la branche vieillesse de 4 milliards d'euros et améliorerait son solde de 3 milliards d'euros836(*).

La deuxième mesure, la refonte des allègements généraux de cotisations patronales (article 6 du PLFSS), augmenterait les recettes - et améliorerait le solde - de la branche vieillesse de 2,7 milliards d'euros. Après prise en compte de la réduction de la TVA affectée à la sécurité sociale837(*) pour compenser la perte de recettes d'impôt sur les sociétés résultant pour l'État de la mesure, le gain net pour la branche vieillesse serait de 2,2 milliards d'euros.

Enfin, les prévisions du PLFSS pour 2025 intègrent une mesure de nature réglementaire qui consiste en le relèvement en 2025, 2026 et 2027 du taux de cotisation des employeurs à la Caisse nationale de retraite des agents de la fonction publique hospitalière (CNRACL) à hauteur de 4 points par an, soit 12 points au total.

En l'absence de mesure, le déficit cumulé de la CNRACL était projeté à 38 milliards d'euros en 2028, et aurait représenté les trois quarts du déficit de la branche vieillesse en 2027838(*).

La situation de la CNRACL reste toutefois préoccupante en raison de la dégradation de son ratio démographique, qui était de 1,4 en 2023, et devrait être de 1,2 en 2028 puis se stabiliser à 0,8 en 2040, ainsi que du poids financier de sa dette, dont le paiement constitue le deuxième poste de dépense de la caisse, soit 144 millions d'euros de frais financiers liés aux intérêts839(*).

L'augmentation des dépenses de retraite est appelée à se poursuivre en raison du vieillissement de la population. Selon les estimations du Conseil d'orientation des retraites (COR) dans son rapport de juin 2024, elles continueraient de progresser, passant - régimes complémentaires compris -de 13,4 % du PIB en 2023 à 13,7 % en 2027, avant de diminuer à 13,2 % en 2070 du fait du report de l'âge de la retraite à 64 ans.

Enfin, le plein effet de la réforme des retraites est attendu en 2032. Elle améliorerait le solde de 6 milliards d'euros en 2027840(*), une projection portée à 8 milliards d'euros par l'annexe à la future LFSS841(*), sur le solde 2028 de la branche vieillesse des Robss.

Programmation de solde de branche vieillesse par la LFRSS 2023,
la LFSS 2024 et le présent PLFSS

(en milliards d'euros)

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après les LFSS 2018 à 2023 et le présent PLFSS

Comme le montre le graphique ci-avant, le déficit diminuerait fortement en 2025, se stabiliserait à peu près en 2026 et 2027, puis reprendrait son augmentation en 2028. Cette évolution s'explique essentiellement par les mesures prévues par le PLFSS : en 2025 l'ensemble des mesures sur les recettes et les dépenses améliorerait le solde d'environ 8 milliards d'euros842(*), en 2026 et en 2027 seule jouerait la hausse du taux de cotisation à la CNRACL et en 2028 le déficit reprendrait son évolution spontanée.

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

L'Assemblée nationale n'ayant pas examiné cet article, le Gouvernement l'a transmis au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

La commission prend acte des prévisions de dépenses de la branche vieillesse pour l'exercice 2025.

Elle accueille favorablement les projections moins défavorables que les années passées de son déficit à moyen terme. Elle rappelle toutefois que les modifications qu'elle propose aux articles 6 (réforme des allégements généraux) et 23 (report de la revalorisation des pensions), de même qu'à la trajectoire prévue pour l'augmentation du taux de cotisation à la CNRACL (qui relève du domaine réglementaire), conduiront à ajuster les prévisions de déficit.

Le présent article devra également être ajusté, afin de tenir compte des modifications apportées à l'article 23.

Ces différents ajustements pourront être réalisés dans la suite de la navette.

La commission relève la situation difficile de la CNRACL et l'impact de la hausse du taux de cotisation annoncé sur les finances des établissements de santé et des collectivités.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article 30
Objectifs de dépenses de la branche famille

Cet article propose de fixer l'objectif de dépenses de la branche famille à 59,7 milliards d'euros.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

A. En 2024, l'excédent de la branche famille se réduirait de plus de moitié pour atteindre 0,4 milliard d'euros

En 2024, les recettes de la branche devraient s'élever à 58,3 milliards d'euros, soit une augmentation de 2,6 % par rapport à 2023. Cette croissance des recettes modérée s'explique en partie par le ralentissement de l'inflation constaté en 2024. La hausse des cotisations diminuerait en effet à + 3,3 % en lien avec la décélération de la masse salariale du secteur privé.

Les dépenses devraient atteindre 57,9 milliards d'euros, soit une hausse beaucoup plus faible qu'en 2023 (+ 3,9 % contre près de + 9 % entre 2022 et 2023).

En 2024, les prestations totales versées par la Cnaf augmenteraient de 4,2 %. La forte hausse des prestations extralégales (+ 8 %) serait largement portée par la montée en charge de l'investissement en faveur du service public de la petite enfance. Les prestations légales quant à elles augmenteraient de 3,5 %. Par ailleurs, la baisse de la natalité, moins forte qu'en 2023843(*), entraînera une hausse des dépenses relatives aux indemnités journalières (IJ) maternité et paternité versées par la branche famille. Toutefois, les effets du recul de la natalité continueraient à peser sur l'évolution du volume des dépenses pour concerner l'ensemble des prestations d'accueil du jeune enfant (CMG844(*) notamment) et non plus les seuls primes de naissances ou prestation partagée d'éducation de l'enfant.

À noter que les majorations de pensions de retraite pour enfants à charge versées par la branche vieillesse mais financées par la branche famille progresseraient nettement (+ 6 %). Enfin, concernant l'allocation journalière de présence parentale (AJPP), celle-ci augmenterait toujours fortement mais de façon moindre que lors des deux années précédentes (+ 40 % en 2022 et 2023 et + 35 % en 2024), passant ainsi de 210 à 283 millions d'euros845(*).

Projection des dépenses de prestations familiales légales en 2024

(en milliards d'euros)

Source : Commission des affaires sociales du Sénat d'après le rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale d'octobre 2024

B. L'exercice 2025 serait marqué par l'absence d'excédent de la branche pour la première fois depuis l'exercice 2018 (hors exercice 2020 et la crise covid)

Le présent article fixe l'objectif de dépenses de la branche famille à 59,8 milliards d'euros pour l'année 2025. Il s'agit d'une disposition obligatoire de la LFSS de l'année.

Les recettes de la branche progresseraient plus modérément pour atteindre 59,7 milliards d'euros en 2025 (+ 2,5 % par rapport à 2024) dans un contexte anticipé de ralentissement de l'inflation et donc de décélération de l'augmentation de la masse salariale du secteur privé.

Les dépenses de la branche connaîtraient en 2025 une croissance inférieure à 2024 (+ 3,1 % contre + 3,9 %) portée notamment par la mise en oeuvre de la réforme du CMG prévue dans la LFSS pour 2023. Les effets de cette réforme pourraient cependant être compensés par un effet volume moindre sur les prestations dans leur ensemble en raison de la baisse des naissances en 2023 et 2024.

La réforme du complément de libre choix de mode garde
dit « emploi direct »

Le complément de libre choix de mode de garde dit « emploi direct » est une prestation versée aux familles employant un salarié à domicile ou une assistante maternelle. La LFSS pour 2023 prévoit de transformer le CMG « emploi direct » en prestation linéaire et de rapprocher le barème des modes d'accueil individuels avec celui des établissements d'accueil collectifs des jeunes enfants afin de rendre ces modes de garde plus accessibles. L'entrée en vigueur de cette réforme est fixée au 1er septembre 2025.

Les personnes entendues et les contributions reçues par le rapporteur ont toutes fait part de leurs inquiétudes quant à la mise en place de cette réforme, pourtant très attendue par les acteurs de l'accueil individuel, et notamment sur la réalité de la baisse du reste à charge pour le plus grand nombre de familles possible. À ce titre, l'annexe 9 du PLFSS 2023 indiquait que « 43 % des bénéficiaires actuels subiraient une perte moyenne de 32 euros ». Le chiffre définitif dépendra pour beaucoup des modalités d'application et de calculs qui doivent être prévues par décret.

C'est pourquoi, la commission apportera la plus grande vigilance aux conditions d'application de cette réforme afin, d'une part, de limiter le plus possible le nombre de familles perdantes et, d'autre part, d'assurer une réelle amélioration de l'employabilité des assistantes maternelles. Elle rappelle que cette profession doit faire face à une véritable crise d'attractivité et que plus d'un assistant maternel sur quatre pourrait partir à la retraite d'ici à 2030.

Concernant le coût total de la réforme846(*), il était estimé par l'étude d'impact à 297 millions d'euros en année pleine. D'après les éléments fournis par la Cnaf au rapporteur, son coût final devrait être conforme à ces prévisions. Toutefois, la commission sera attentive à ce que les arbitrages retenus (coût horaire de référence, plafond horaire de prise en charge...) permettent d'assurer effectivement les financements nécessaires à la mise en oeuvre de la réforme.

Par ailleurs la commission des comptes de la sécurité sociale prévoit une hausse de 3 % de la prise en charge des congés de maternité et de paternité par la branche famille en raison des prévisions de croissance des salaires et d'un rebond attendu des naissances en 2025 (+ 0,3% selon l'Insee).

Les dépenses de prestations extralégales continueraient quant à elles d'augmenter fortement à hauteur de 700 millions d'euros (+ 9,9 %) toujours liées aux investissements en faveur du service public de la petite enfance portés par le fonds national d'action sociale (Fnas).

Évolution des prévisions des dépenses et des recettes
de la branche famille pour 2025

(en milliards d'euros)

 

Dépenses

Recettes

Solde

LFSS 2024

60,0

60,4

0,4

PLFSS 2025

59,7

59 ,7

0

Source : PLFSS 2025

Solde de la branche famille 2015-2028

(en milliards d'euros)

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après l'annexe au PLFSS

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

L'Assemblée nationale n'ayant pas examiné cet article, le Gouvernement l'a transmis au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

La commission accueille favorablement, dans un contexte budgétaire très contraint, l'objectif de dépenses pour 2025 qui, en comparaison des dépenses attendues pour 2024, correspond à une augmentation de 3,1 %, soit 1,8 milliard d'euros. Elle souligne cependant que ces dépenses supplémentaires ne sont pas l'illustration d'une politique familiale ambitieuse mais répondent simplement au besoin de financement des dispositions prises lors des précédentes lois de financement de la sécurité sociale, comme la réforme du complément du libre choix du mode de garde, aux engagements de la convention d'objectifs et de gestion de la Cnaf et à la revalorisation automatique de la base mensuelle de calcul des allocations familiales qui traduit les effets de l'inflation.

La commission note que les comptes de la branche famille, déjà dégradés de 2 milliards d'euros, en raison du transfert depuis la Cnam par la LFSS pour 2023 de la dépense des indemnités journalières maternité post-natales, subiront un nouveau transfert dans le cadre de la réforme des allègements généraux prévue à l'article 6 du projet de loi de financement. En effet, la quasi-totalité des gains attendus de cette réforme pour la branche famille, soit 266 millions d'euros, seraient reversés, en 2025, à la branche maladie dans le cadre des transferts financiers entre les branches prévus par l'article 8.

En effet, selon le PLFSS, la branche famille sera à l'équilibre en 2025 et déficitaire en 2026 pour la première fois depuis 2017 (hors année 2020 et crise de la covid-19). Si les prévisions pluriannuelles de la branche laissent entrevoir un retour à un excédent budgétaire dans les prochaines années, la commission s'interroge sur sa capacité à répondre aux nombreux défis auxquels elle devra faire face dans les prochaines années : mise en place du service public de la petite enfance, création d'un véritable congé de naissance, réforme du financement des établissements d'accueil du jeune enfant... Les chantiers d'ampleur et réformes attendues par l'ensemble des acteurs et les familles ne manquent pas. Dans ce cadre, la commission appelle une nouvelle fois à ne pas faire de la politique familiale une simple variable d'ajustement des politiques sociales de notre pays et à mettre en place un véritable plan d'action en faveur de toutes les familles.

Sous le bénéfice de ces observations, la commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article 31
Objectif de dépenses de la branche autonomie

Cet article fixe à 42,4 milliards d'euros l'objectif de dépenses de la branche autonomie pour 2025.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

A. Le périmètre de la branche autonomie intègre des dépenses en croissance continue depuis 2021

1. La structure financière de la branche autonomie

Depuis 2021, la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) assure la gestion financière de la branche autonomie de la sécurité sociale, créée par la loi du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l'autonomie847(*).

Les financements publics consacrés à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et en situation de handicap s'élèvent, en 2023, à 90,2 milliards d'euros. La branche autonomie y contribue à hauteur de 41 %, le reste des financements étant pris en charge par l'État (23 %), d'autres branches de la sécurité sociale (25 %), les départements (14 %) ainsi que l'Association de gestion du fonds pour l'insertion des personnes handicapées (Agefiph) et le Fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP) (1 %)848(*).

Le périmètre de la branche autonomie comprend le financement des établissements et services médico-sociaux (ESMS), la participation au financement d'un certain nombre de prestations individuelles (principalement la prestation de compensation du handicap - PCH, l'allocation personnalisée d'autonomie - APA et l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé - AEEH), des interventions en faveur de la prévention de la perte d'autonomie, la recherche et l'innovation, le soutien des services d'aide à domicile et, enfin, une contribution à l'investissement des ESMS.

Le fonctionnement de la cinquième branche est en partie décentralisé, les départements disposant d'une large compétence en matière d'autonomie.

Cela se traduit par un certain nombre de concours financiers versés par la CNSA aux départements, afin de couvrir une partie de leurs dépenses allouées à l'autonomie. Ces concours financiers se sont multipliés et diversifiés au fil des réformes, faisant progresser leur montant total de 3,4 milliards d'euros en 2021 à près de 5,6 milliards d'euros849(*) en 2024. Il en existe à ce jour treize, les plus importants visant à couvrir une partie des dépenses liées à l'APA (53 % du montant total des concours) et à la PCH (17 %), ainsi que le tarif plancher applicable aux services d'aide à domicile (7 %).

Résultats de la branche autonomie en 2023

(en milliards d'euros)

Dépenses

37,6

Financement des établissements et services médico-sociaux (ESMS) : prestations financées par l'objectif global de dépenses, subventions d'investissement et fonds d'urgence

30,5

Prestations en espèce (Allocation d'éducation de l'enfant handicapé, Assurance vieillesse des parents au foyer, Assurance vieillesse des aidants, Allocation journalière du proche aidant, Aide aux aidants)

1,7

Concours versés aux départements (Allocation personnalisée d'autonomie, Prestation de compensation du handicap, Tarif plancher, Aide à la vie partagée, Dotation complémentaire - dotation qualité, etc.)

4,8

Fonctions support (concours et dotation Maisons départementales des personnes handicapées, subventions de fonctionnement, participation aux dépenses du Fonds d'intervention régional)

0,4

Charges de gestion courante

0,2

Recettes

37,0

Contribution sociale généralisée (CSG)

32,6

Contribution solidarité autonomie (CSA)

2,4

Contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie (Casa)

0,9

Taxe sur les salaires

0,8

Autres

0,3

Résultat

- 0,6

Source : Rapport à la Commission des comptes de la Sécurité sociale, octobre 2024

2. La progression des dépenses de la branche autonomie

Depuis sa création, les dépenses de la branche autonomie ont connu une forte augmentation, passant de 32,6 milliards d'euros en 2021 à 37,6 milliards en 2023, soit une hausse d'environ 15 %. Les prévisions de dépenses pour l'année 2025, fixées à 42,4 milliards d'euros, portent cette hausse à plus de 30 %.

Progression des dépenses de la branche autonomie

(en milliards d'euros)

Source : Commission des affaires sociales

De fait, depuis 2021, un certain nombre de mesures nouvelles ont été appliquées en faveur de l'attractivité des métiers et de l'adaptation de l'offre médico-sociale aux besoins démographiques.

En sus des mesures présentées dans le tableau ci-après, la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 a créé une assurance vieillesse pour les aidants (AVA) et réformé l'assurance vieillesse du parent au foyer (AVPF)850(*). En outre, la loi « Bien Vieillir » du 8 avril 2024 a acté la création d'une aide financière pour soutenir la mobilité et le travail partenarial des aides à domicile, traduite dans le présent PLFSS par une enveloppe de 100 millions d'euros851(*).

Mesures nouvelles financées par la branche autonomie depuis 2020

(en milliards d'euros)

Adaptation de l'offre

1,3

Investissement Ségur

Juillet 2020

0,4

Réforme de la tarification et création de places en services de soins infirmiers à domicile (Ssiad)

LFSS 2022

0,2

Tarif plancher national pour les services d'aide à domicile prestataires (SAAD)

LFSS 2023

0,4

Mesures conférence nationale du handicap (CNH)

Avril 2023

0,2

Renforcement de la qualité

0,9

Renforcement des ressources humaines en Ehpad

LFSS 2022 et 2023

0,4

Création d'une dotation qualité pour les SAD

LFSS 2022

0,3

Création des centres de ressources territoriaux (CRT)

LFSS 2022

0,05

Mise en place d'heures de convivialité à domicile

LFSS 2023

0,1

Attractivité des métiers

4,7

Revalorisations Ségur

Juillet 2020

2,2

Accords « Laforcade »

Février-mai 2021

0,6

Branche de l'aide à domicile (BAD)

Juillet 2021

0,3

Conférence des métiers

Février 2022

0,5

Revalorisations salariales de juillet 2022

Juillet 2022

0,7

Revalorisations salariales de juillet 2023

Juillet 2023

0,5

Total

7

Source : Annexe 7 du PLFSS pour 2025, d'après les données de la DSS

B. En 2023 et 2024, la branche autonomie est restée proche de l'équilibre budgétaire

1. En 2023, la branche autonomie a été déficitaire

Contrairement aux exercices 2021 et 2022, en 2023, la branche autonomie a été déficitaire (- 0,6 milliard d'euros).

Les dépenses de la CNSA ont atteint 37,6 milliards d'euros, soit une augmentation de 6,9 % par rapport à 2022.

Elles ont été tirées à la hausse par plusieurs mesures résultant de lois de financement de la sécurité sociale antérieures à 2023 et qui sont montées en charge (mesures salariales dans les ESMS, mise en place d'un tarif plancher et d'une dotation qualité pour les services d'aide à domicile, PCH parentalité, etc.) ou par des mesures mises en place par la LFRSS pour 2023, comme la création d'une assurance vieillesse des aidants (AVA).

Les recettes de la CNSA se sont quant à elles élevées à 37 milliards d'euros en 2023, soit une augmentation de 4,5 % par rapport à 2022.

Les recettes ont ainsi progressé moins rapidement que les dépenses. Cela est dû au moindre dynamisme de la masse salariale du secteur privé (assiette de la CSG et de la CSA), qui a toutefois été suffisant pour contribuer, aux côtés du dynamisme des retraites (assiette de la Casa), à la hausse des recettes. En outre, la branche autonomie a bénéficié de l'affectation de 0,32 point de taxe sur les salaires supplémentaire, pour compenser la prise en charge, par la branche, de l'assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF).

2. En 2024, la branche autonomie renouerait avec une situation légèrement excédentaire

Selon les prévisions du rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale852(*), en 2024, la branche autonomie serait de nouveau excédentaire à hauteur de 0,9 milliard d'euros.

D'une part, les recettes connaîtraient un fort dynamisme (+ 10,6 %). Cette hausse est due, pour sept points, à la réaffectation en faveur de la branche autonomie de 0,15 point de CSG jusque-là attribués à la Cades, soit un montant estimé à 2,6 milliards d'euros853(*). En outre, les produits de CSG progresseraient de + 3,6 % hors réaffectation, la CSA augmenterait à un rythme comparable à celui de la masse salariale du secteur privé (+ 3,3 %) et la Casa serait elle aussi dynamique, grâce à la revalorisation des pensions de retraite (+ 5,3 %) qui en constituent l'assiette.

D'autre part, les dépenses de la CNSA seraient elles aussi en nette augmentation (+ 6,4 %), portées notamment par la hausse de 4,6 % de l'objectif global de dépenses (OGD). Les dépenses d'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH) poursuivraient leur croissance tendancielle (+ 8,1 %) et les transferts à la charge de la CNSA seraient eux aussi dynamiques.

C. À partir de 2025, les perspectives pluriannuelles se dégradent malgré des besoins en constante augmentation

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 prévoyait, pour l'année 2025, un solde positif pour la branche autonomie (0,7 milliard d'euros). Cet excédent devait ensuite s'éroder progressivement sous l'effet du dynamisme tendanciel des dépenses, pour atteindre l'équilibre en 2027854(*).

Les prévisions fournies par le présent PLFSS sont bien plus pessimistes, puisqu'elles prévoient que la branche autonomie sera déficitaire dès l'année 2025, et que le solde continuera de se détériorer jusqu'en 2028 pour atteindre - 2,5 milliards d'euros855(*).

Perspectives pluriannuelles des comptes de la branche autonomie

(en milliards d'euros)

 

2024 (p)

2025 (p)

2026 (p)

2027 (p)

2028 (p)

 

LFSS 2024

PLFSS 2025

LFSS 2024

PLFSS 2025

LFSS 2024

PLFSS 2025

LFSS 2024

PLFSS 2025

PLFSS 2025

Recettes

41,2

40,9

42,1

42

43,3

42

44,7

43,9

45,1

Dépenses

40

40

41,4

42,4

43

44

44,7

45,7

47,6

Solde

1,2

0,9

0,7

- 0,4

0,3

- 1,9

0

- 1,8

- 2,5

Source : LFSS 2024 et PLFSS 2025

Les besoins de financements n'en demeurent pas moins en constante augmentation, dans le champ du grand âge comme dans celui du handicap.

S'agissant du grand âge, la hausse des besoins est principalement liée à des déterminants démographiques. Le vieillissement de la population, qui résulte à la fois de l'arrivée des générations du « baby-boom » à des âges élevés et de l'amélioration de l'espérance de vie, se traduit par une hausse du nombre de personnes en risque de perte d'autonomie. La direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) estime que l'effectif des personnes âgées en perte d'autonomie éligibles à l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), estimé à 1,3 million en 2022, atteindra près de 2 millions à horizon 2050856(*). Le rapport Libault857(*) estime ainsi qu'à horizon 2030, les besoins de financements supplémentaires s'élèvent à 10,4 milliards d'euros par rapport à 2018 pour le seul champ de l'autonomie des personnes âgées.

Dans le champ du handicap, l'amélioration de la reconnaissance des handicaps et des réponses médico-sociales apportées induit automatiquement une hausse des dépenses, bien qu'un renforcement de la politique de prévention serait de nature à l'atténuer. Aucune étude n'a toutefois permis d'estimer précisément les besoins de financement.

D. Les enjeux de la branche autonomie en 2025

1. En 2025, la branche autonomie serait déficitaire

Le présent PLFSS anticipe un solde négatif de - 0,4 milliard d'euros pour la branche autonomie en 2025. L'objectif de dépenses est fixé à 42,4 milliards d'euros (+ 2,4 milliards par rapport aux dépenses de l'année 2024), tandis que les recettes sont estimées à 42 milliards d'euros (niveau stable).

Les dépenses seraient en forte progression (+ 6 %), portées à la fois par le dynamisme des prestations à la charge de la CNSA (+ 6,7 %) et par la hausse des dépenses qui relèvent de l'OGD (+ 6,7 %). L'évolution des recettes d'impositions (CSG, CSA, Casa, taxe sur les salaires) devrait au contraire ralentir et s'établir à + 2,5 %, en raison du faible dynamisme de la masse salariale du secteur public.

2. La hausse des dépenses vise à financer des mesures nouvelles ainsi que la montée en charge de mesures récentes

a) Les mesures qui relèvent du périmètre de l'objectif global de dépenses

Pour rappel, l'objectif de dépenses de la branche autonomie est fixé par le présent article à 42,4 milliards d'euros, soit une hausse de 2,4 milliards d'euros par rapport à l'année 2024 (+ 6 %). Cette trajectoire financière intègre une augmentation de 1,9 milliard d'euros de l'objectif global de dépenses (OGD) en 2025.

En effet, l'OGD est porté à 33,4 milliards d'euros, soit une hausse de 6 % (4,7 % à champ constant) par rapport à l'année 2024858(*), dont 6,2 % pour l'OGD personnes âgées et 3 % pour l'OGD personnes handicapées. Au regard du contexte budgétaire très contraint et de l'évolution globale de l'Ondam fixée à 2,8 %, la hausse des moyens alloués à la branche autonomie représente un effort important.

L'objectif global de dépenses d'autonomie à destination des établissements
et services médico-sociaux

Le financement des prestations des établissements et services médico-sociaux (ESMS) pour les personnes âgées en perte d'autonomie et pour les personnes en situation de handicap à la charge des organismes de sécurité sociale est subordonné à un « objectif global de dépenses » (OGD) qui constitue une sous-partie de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) voté en LFSS. Depuis la création de la branche autonomie, l'OGD est financé par l'affectation de recettes propres à la CNSA.

D'après l'annexe 7 du PLFSS, les mesures nouvelles financées dans le cadre de cette hausse de l'OGD s'élèvent à 1,2 milliard d'euros.

Mesures nouvelles financées dans le cadre de l'OGD en 2025

(en milliards d'euros)

Mesures

Personnes âgées

Personnes en situation de handicap

Ensemble

Mesures salariales

0,15

0,04

0,19

Mesures Ehpad (dont créations de postes)

0,38

0,00

0,38

Mesures domicile

0,06

0,01

0,08

Créations pour installation de places

0,07

0,26

0,33

Surcoûts expérimentation fusion des sections

0,16

0,00

0,16

Refinancement des mises en réserve

0,10

0,04

0,13

Mesures de régulation

- 0,02

- 0,04

- 0,05

Ensemble des mesures

0,9

0,3

1,2

Source : Annexe 7 du PLFSS

Ces mesures nouvelles visent à renforcer la qualité et la quantité de l'offre :

- les mesures salariales comprennent notamment la montée en charge de mesures récentes de revalorisation sur les nuits, jours fériés et dimanches (50 millions d'euros hors compensation de la hausse des taux de cotisation patronale à la CNRACL) ;

- les mesures Ehpad correspondent au recrutement de 6 500 professionnels dans le cadre du plan des 50 000 recrutements à horizon 2030 (380 millions d'euros) ;

- les mesures domicile permettront la montée en charge de la réforme de la tarification des services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) et la création des services autonomie à domicile, ainsi que les solutions de répit pour les familles ;

- enfin, les créations de places concernent en quasi-totalité le déploiement de 15 000 solutions médicosociales auprès des personnes en situation de handicap, dans le cadre du plan de création de 50 000 solutions d'ici 2030 (270 millions d'euros).

Toutefois, il convient de relever qu'une partie des mesures nouvelles visent en réalité à compenser des surcoûts supportés par la branche autonomie, ne constituant donc pas à proprement parler une hausse des moyens alloués au renforcement de l'offre.

D'une part, parmi les mesures salariales, 140 millions d'euros sont provisionnés pour compenser la hausse de 4 points des cotisations versées par les employeurs territoriaux et hospitaliers à la CNRACL859(*). Sur ce point, les auditions du rapporteur ont permis de soulever l'inquiétude des employeurs publics. Selon la Fédération hospitalière de France, l'impact global pour les ESMS concernés serait de 375 millions d'euros. Ainsi, la compensation intégrée dans l'OGD, qui ne concerne que les personnels financés par la section soins860(*), ne devrait couvrir que 40 % de la hausse des cotisations. La Fédération hospitalière de France (FHF) craint que certains établissements, du fait de leurs difficultés financières, limitent les recrutements ou creusent encore davantage leur déficit.

D'autre part, l'expérimentation du système de financement des Ehpad se traduit par un surcoût d'environ 160 millions d'euros pour la branche en 2025, soit 18 % du montant total des mesures nouvelles.

b) Les mesures financées en dehors du périmètre de l'objectif global de dépenses

Outre les dépenses couvertes par l'OGD, d'autres mesures devraient participer à la hausse des dépenses de la branche autonomie.

Premièrement, le Gouvernement a annoncé la création d'un fonds de 140 millions d'euros pour accompagner la transformation des établissements accueillant des personnes âgées. D'après les données transmises par la direction générale de la cohésion sociale (DGCS) au rapporteur, ce fonds sera réparti entre le financement de la rénovation des Ehpad structurants de leurs territoires (60 millions d'euros), le développement de l'habitat intermédiaire (40 millions d'euros), le soutien à l'innovation technique et technologique (19,5 millions d'euros), le soutien aux Ehpad ultramarins (17 millions d'euros) et, enfin, l'appui aux transitions énergétique et écologique (4 millions d'euros).

Le rapporteur s'inquiète toutefois de la non-reconduction du fonds d'urgence de 100 millions d'euros dédié au soutien des Ehpad en difficulté. S'il conçoit que ce soutien doit demeurer exceptionnel, certains établissements connaissent toujours, en cette fin d'année 2024, une situation extrêmement critique.

Deuxièmement, conformément à la loi « Bien Vieillir » du 8 avril 2024861(*), la branche autonomie déploiera, dès 2025, une nouvelle aide financière de 100 millions d'euros pour permettre aux départements de soutenir la mobilité et le travail partenarial des aides à domicile sur leurs territoires.

Enfin, la hausse des dépenses de la branche accompagnera la montée en charge d'autres mesures récentes dédiées au renforcement de l'aide à domicile. Il s'agit principalement du tarif plancher applicable aux services d'aide à domicile, de la création d'une dotation qualité versée aux services d'aide et d'accompagnement à domicile en contrepartie d'améliorations de la qualité de service, et de la mise en place d'un temps dédié au lien social.

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

L'Assemblée nationale n'ayant pas examiné cet article, le Gouvernement l'a transmis au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

Au regard de la contrainte qui pèse sur les finances publiques et de l'évolution de l'Ondam global (+ 2,8 %), la hausse de 4,7 % à champ constant de l'objectif de dépenses de la branche autonomie représente un effort important, bien que les financements demeurent bien en-deçà des besoins.

Dans le champ des personnes âgées, la dynamique de l'objectif global de dépenses devrait permettre de renforcer les effectifs et donc le taux d'encadrement en Ehpad.

Toutefois, comme l'a déjà souligné la commission l'année dernière, les besoins restent loin d'être couverts. En effet, si l'ambition du Gouvernement est d'atteindre 50 000 professionnels supplémentaires à horizon 2030, le rapport El Khomri de 2019862(*) estimait que 93 000 postes supplémentaires étaient nécessaires. De surcroît, lors de son audition, la FHF a émis la crainte qu'une partie des ressources censée financer les recrutements soit en réalité mobilisée pour réduire les déficits. Les financements dédiés aux recrutements, principalement alloués aux Ehpad de manière automatique et forfaitaire, ne font en effet l'objet d'aucune sanctuarisation.

Par ailleurs, et alors qu'il est nécessaire de favoriser le maintien à domicile des personnes âgées, les mesures récentes en faveur des services d'aide à domicile devraient renforcer l'attractivité et la qualité de service du secteur. La commission sera attentive aux effets produits par ces différents dispositifs.

Dans le champ du handicap, le PLFSS ne contient aucun article spécifique. La commission constate toutefois que le déploiement des 50 000 solutions à destination des personnes en situation de handicap se poursuit, et elle sera attentive à sa traduction concrète sur le terrain.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

Article 32
Prévisions des charges des organismes concourant au financement
des régimes obligatoires (FSV)

Cet article tend à fixer la prévision de charges du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) pour 2025. La commission propose d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

Le Fonds de solidarité vieillesse (FSV), établissement public de l'État à caractère administratif, a été créé par la loi n° 93-936 du 22 juillet 1993 relative aux pensions de retraite et à la sauvegarde de la protection sociale, pour prendre en charge les avantages d'assurance vieillesse à caractère non contributif relevant de la solidarité nationale. Ses produits sont intégralement constitués de CSG sur les revenus du capital et de remplacement.

Le présent article dispose que pour l'année 2025, les « prévisions des charges » des « organismes concourant au financement des régimes obligatoires de sécurité sociale », c'est-à-dire du FSV, sont de 21,3 milliards d'euros. Il s'agit d'une disposition obligatoire de la LFSS de l'année.

Le projet d'annexe à la future LFSS863(*) montre que le FSV demeurerait excédentaire, comme c'est le cas depuis 2022.

Recettes, dépenses et solde du FSV

(en milliards d'euros)

Source : Placss 2023 (2020-2022), annexe à la future LFSS (2023-2028)

En effet, près des deux tiers des charges du FSV sont les cotisations au titre des périodes assimilées de chômage. Ainsi, en 2022 il a retrouvé un excédent avec un résultat net de 1,3 milliard d'euros, consécutif notamment à la baisse du nombre de chômeurs.

Après une progression de 6,8 % des dépenses du FSV en 2024, principalement due à la revalorisation des prestations sur l'inflation de l'année 2023, l'année 2025 serait marquée par une décélération des recettes comme des dépenses du FSV. La CSG assise sur les revenus de remplacement ralentirait ainsi de 5,2 points, eu égard à la moindre revalorisation (+ 1,7 %) des pensions et prestations d'assurance vieillesse, qui serait de surcroît décalée au 1er juillet. En revanche, la progression des dépenses ralentirait de moitié par rapport à 2024 (+ 3,3 %), en raison d'une plus faible revalorisation des prestations sur l'inflation, ainsi que d'un léger recul des effectifs de chômeurs (- 0,3 %).

Compte tenu des transferts de dette du fonds à la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) intervenus de 2020 à 2022, le FSV présentait fin 2023 un excédent cumulé de 1,1 milliard d'euros.

II - Le dispositif transmis au Sénat : une transmission sans modification

L'Assemblée nationale n'ayant pas examiné cet article, le Gouvernement l'a transmis au Sénat dans sa version initiale, en application de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

III - La position de la commission

La commission prend acte de la prévision de charges du FSV pour l'exercice 2025 et se félicite de son prompt retour à l'équilibre financier, atténuant ainsi le déficit global de la branche vieillesse.

La perspective d'un excédent durable invite toutefois à s'interroger quant à l'opportunité d'une éventuelle affectation d'une fraction de la CSG actuellement fléchée vers le fonds à la branche vieillesse, dont selon le présent PLFSS le déficit atteindrait 6,1 milliards d'euros en 2028, ou à la Cades, dont la dette résulte partiellement des déficits cumulés de la branche vieillesse.

La commission propose d'adopter cet article sans modification.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 13 novembre 2024, sous la présidence de M. Philippe Mouiller, président, la commission procède à l'examen du rapport sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 : Mmes Élisabeth Doineau, rapporteure générale chargée des équilibres généraux, Corinne Imbert, rapporteure pour l'assurance maladie, Marie-Pierre Richer, rapporteure pour les accidents du travail et les maladies professionnelles, Pascale Gruny, rapporteur pour l'assurance vieillesse, M. Olivier Henno, rapporteur pour la famille, et Mme Chantal Deseyne, rapporteur pour l'autonomie.

M. Philippe Mouiller, président. - Mes chers collègues, nous examinons ce matin le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2025. L'exercice est en l'occurrence d'autant plus important que, comme vous le savez, l'Assemblée nationale n'a pas pu aller au bout de l'examen du texte.

En application de l'article 47-1 de la Constitution et de l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale, le Gouvernement a transmis au Sénat le texte qu'il avait initialement présenté, modifié par les amendements adoptés par l'Assemblée nationale et acceptés par lui.

Je vous rappelle que la procédure d'adoption de cette loi financière diffère de celle des lois ordinaires : c'est le texte transmis par le Gouvernement qui sera examiné en séance publique par le Sénat.

Nous procéderons tout d'abord à une discussion générale, avec, concrètement, une présentation, suivie d'un échange, de la rapporteure générale, puis de chaque rapporteur de branche. Nous nous prononcerons ensuite sur les amendements proposés par les rapporteurs. Les amendements que nous adopterons seront non pas intégrés au texte, mais défendus en séance par nos rapporteurs, au nom de la commission.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - Nous voici donc réunis pour examiner le PLFSS pour 2025.

Les PLFSS existent depuis l'exercice 1997. Celui que nous examinons aujourd'hui est probablement celui dont les enjeux sont les plus forts, au regard notamment des sommes concernées. Je vous les présenterai en m'appuyant sur une série de diapositives. (Mme la rapporteure générale projette un diaporama.)

Tout d'abord, la situation des finances publiques, et des finances sociales en particulier, connaît une dégradation sans précédent - M. le Premier président de la Cour des comptes l'a souligné devant notre commission la semaine dernière - hors période de crise. En 2024, le déficit public serait de 6,1 points de PIB, pour une prévision de 4,4 points de PIB. Le déficit de la sécurité sociale serait de 18 milliards d'euros, pour une prévision en loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2024 de 10,5 milliards d'euros. Pour l'ensemble des administrations de sécurité sociale, il y aurait un déficit de 0,6 milliard d'euros, pour une prévision d'excédent de 17,3 milliards d'euros.

Ensuite, la discussion du PLF et du PLFSS se passe cet automne sous la surveillance de l'Union européenne et des marchés financiers.

Comme vous le savez, la France est à nouveau sous procédure de déficit excessif. Un autre fait nouveau, dont on ne parle quasiment pas dans la presse, est que le pacte de stabilité a été réformé au mois d'avril et que les programmes de stabilité n'existent désormais plus. Voilà quinze jours, nous avons débattu en séance du plan budgétaire et stratégique à moyen terme (PSMT). Bien que celui-ci soit valable quatre ans, il est possible de négocier un retour sous les trois points de PIB en sept ans, ce que le Gouvernement a l'intention d'obtenir. Cela implique que les pouvoirs publics envoient un message clair de maîtrise des comptes cet automne.

Pour ce qui est des marchés financiers, pour l'instant, la situation n'a rien de dramatique. Mais il faut tout de même souligner que la France emprunte aujourd'hui à des taux supérieurs à ceux du Portugal, analogues à ceux de l'Espagne et proches de ceux de l'Italie. En cas de nouvelle crise de la dette, nous serions en première ligne. Il faut en avoir conscience, aucun mécanisme n'est prévu au sein de la zone euro pour aider un État ayant perdu la confiance des investisseurs du fait d'une politique qui serait considérée comme irresponsable.

Après la dissolution, nous nous sommes demandé ce qui se passerait en cas de rejet du PLFSS. Nous nous sommes dit que, comme les PLFSS n'existent que depuis 1997, cela ne poserait probablement pas de problème majeur. Mais, en approfondissant le sujet, nous nous sommes rendu compte qu'une disposition organique prévoit que l'autorisation de la sécurité sociale de s'endetter ne peut figurer que dans une LFSS. Vous le savez, dans chaque LFSS, se trouve un article autorisant la sécurité sociale à emprunter - il s'agit, cette année, de l'article 13. Normalement, un tel article ne peut pas se trouver dans un autre texte.

Si le PLFSS n'était pas adopté, on peut supposer que le Gouvernement proposerait une loi ad hoc, prévoyant simplement l'autorisation d'emprunter, et que le Conseil constitutionnel ne la censurerait pas, au nom du « principe de continuité de la vie nationale », ou bien que la sécurité sociale emprunterait même sans avoir de base juridique pour cela. Mais ces solutions sont un peu acrobatiques, si je puis dire. Elles comportent des incertitudes juridiques. En tout état de cause, elles enverraient un mauvais message à nos créanciers.

J'en viens maintenant aux mesures de redressement prévues par le Gouvernement. Si les principaux chiffres qui vous sont présentés diffèrent d'un document à l'autre et peuvent a priori sembler contradictoires, il n'en est rien en réalité. Les chiffres du dossier de presse, qui sont les plus couramment cités, viennent d'un rapport annexé au projet de loi de finances (PLF), le rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques (ou Resf). C'est sur cette base que l'on arrive à des mesures de 14,8 milliards d'euros. Selon les chiffres du PLFSS, en particulier ceux de son annexe 3, les mesures seraient de 12,4 milliards d'euros.

La principale différence tient au fait que les chiffres du dossier de presse concernent l'ensemble des administrations publiques (APU), donc notamment l'État, et prennent en compte les effets sur ses recettes fiscales. Par exemple, la mesure sur les retraites rapporte 3 milliards d'euros à la sécurité sociale et 1 milliard d'euros à l'État, soit 4 milliards d'euros au total, mais le montant figurant dans le dossier de presse est de seulement 3,6 milliards d'euros, parce que l'on estime que l'État perdra 0,4 milliard d'euros d'impôt sur le revenu.

Un élément pourrait a priori sembler relever du paradoxe : malgré l'importance des mesures, le déficit de la sécurité sociale ne baisserait que de 2 milliards d'euros. En effet, alors que le Gouvernement prévoit entre 10 milliards d'euros et 15 milliards d'euros de mesures de réduction du déficit, celui-ci passerait de 18 milliards d'euros cette année à 16 milliards d'euros l'année prochaine, soit une baisse de 2 milliards d'euros seulement.

Certains éléments dégradent le solde ; d'autres l'améliorent. L'augmentation du déficit vient du fait qu'en 2025, spontanément, les dépenses tendront à augmenter plus vite que le PIB, quand les recettes tendront à augmenter moins vite que le PIB. Certes, des mesures de réduction du déficit sont prévues, mais nous regrettons qu'elles ne soient pas un peu plus importantes... Les facteurs d'augmentation du déficit, si on les additionne, sont à peu près égaux au montant total des mesures de réduction du déficit. En fait, les mesures de redressement sont juste suffisantes pour faire un peu mieux que stabiliser la situation.

En 2025, les mesures de redressement ne compenseraient pas totalement les révisions défavorables de 2024 et des évolutions propres à 2025.

Comment sommes-nous passés du déficit prévu pour 2025 par la LFSS pour 2024, soit 15,4 milliards d'euros, au déficit prévu pour 2025 par le PLFSS pour 2025, soit 16 milliards d'euros ? En d'autres termes, pourquoi, malgré l'importance des mesures de redressement, le déficit pour 2025 est-il un peu plus important que ce qui était prévu par la LFSS pour 2024 ?

Le déficit 2024 devrait être supérieur de 7,6 milliards d'euros à la prévision. C'est lié, pour l'essentiel, au fait que les recettes de la branche maladie devraient être très inférieures aux prévisions. En effet, la branche maladie est la seule à percevoir de la TVA. Or les recettes de la TVA devraient être très inférieures aux prévisions en 2024, en raison notamment d'une croissance plus tirée par les exportations.

Il y a, certes, des mesures de redressement. Mais si l'on prend en compte la dégradation des prévisions propres à 2025, les effets négatifs l'emportent au total légèrement sur les effets positifs.

J'en viens maintenant aux prévisions de solde de la sécurité sociale qui figurent dans le PLFSS.

Le déficit a été ramené à 10,8 milliards d'euros en 2023. Avec un déficit de près de 20 milliards d'euros en 2022, on pourrait se dire que c'est encourageant. Mais considérons la programmation de la LFSS pour 2024 et du PLFSS pour 2025. Ce dernier, malgré l'importance des mesures de redressement qu'il comprend, ne prévoit pas d'amélioration par rapport à la trajectoire de la LFSS pour 2024, la nouvelle trajectoire étant même un peu plus dégradée, avec un déficit de près de 20 milliards d'euros en 2028.

On remarque que, par une curieuse coïncidence, peut-être aussi pour éviter d'afficher une dégradation par rapport à la LFSS pour 2024, le déficit prévu pour 2027, de 17,2 milliards d'euros, est exactement le même que celui de la LFSS pour 2024.

Jusqu'en 2019, avant la crise sanitaire, on était vraiment sur le chemin d'un retour à l'équilibre. Mais la crise sanitaire nous a emmenés vers les tréfonds du déficit. Nous avions pu remonter progressivement, avec un déficit de l'ordre de 11 milliards d'euros en 2023. Mais, cette année, alors que nous sommes hors crise sanitaire - certes, d'autres facteurs entrent en jeu -, le déficit est à 18 milliards d'euros. La prévision est très difficile à défendre. Malgré les mesures envisagées par le Gouvernement, que nos amendements visent à modifier, la trajectoire est toujours plus négative d'une année sur l'autre. Comment pourrons-nous prolonger la mission de la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) et nous présenter devant les marchés financiers dans de bonnes conditions si nos déficits sont de plus en plus importants chaque année ?

J'en viens aux perspectives et aux mesures qu'il convient d'envisager ; certaines seront douloureuses.

Les projections que je viens d'exposer reflètent paradoxalement un certain optimisme. Si on retient des hypothèses plus « naturelles » pour l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) et la croissance du PIB, on parvient à un déficit de 30 milliards d'euros en 2028. Je vous indiquais des chiffres analogues voilà un an.

Mais il faut bien garder à l'esprit que les projections annexées aux LFSS ne sont pas de vraies programmations. Elles ne décrivent pas les intentions du Gouvernement. Celui-ci ne souhaite évidemment pas que le déficit soit d'encore 20 milliards d'euros en 2028 ; le ministre chargé du budget et des comptes publics l'a d'ailleurs indiqué quand nous l'avons auditionné. Les projections annexées aux LFSS prennent seulement en compte les mesures de la LFSS et les mesures réglementaires que le Gouvernement prévoit à ce moment-là. Mais elles ne prennent en compte, par construction, aucune mesure les années suivantes. Je vous proposerai d'ailleurs tout à l'heure un amendement au rapport annexé visant à préciser ce point.

En fait, le PSMT, qui remplace les programmes de stabilité, ne pourra pas être respecté sans mesures supplémentaires sur la sécurité sociale. Il n'évoque pas les administrations de sécurité sociale, mais on voit mal comment le Gouvernement pourrait le respecter sans réaliser chaque année des économies supplémentaires d'au moins 5 milliards d'euros sur la sécurité sociale. C'est moins que les 10 à 15 milliards d'euros de 2025, mais c'est tout de même très important.

Ce que je vous propose au travers de mon amendement n'est donc qu'une solution d'attente. Il faut évidemment fixer une trajectoire crédible de retour à l'équilibre. Celle-ci, nous le savons bien, ne pourra émaner que de réformes de fond, relatives, en particulier, à la santé ou à l'autonomie. En la matière, c'est bien dans cet esprit d'amorce d'une réforme plus globale qu'il conviendra d'analyser les propositions que nous formulerons.

C'est seulement à cette condition qu'il sera possible de réaliser de nouveaux transferts de dette à la Cades. Un tel transfert devra nécessairement être bientôt réalisé, afin que la dette sociale ne s'accumule pas à l'Urssaf Caisse nationale, ce qui, comme son directeur général l'a récemment souligné lors de son audition, serait dangereux. En effet, l'Urssaf Caisse nationale ne peut emprunter qu'à court terme, ce que l'article 13 du PLFSS ne remet pas en cause. Comme vous le savez, le transfert de dette sociale à la Cades pour des sommes significatives impliquera de repousser l'échéance d'amortissement de la dette sociale, actuellement fixée à 2033, ce qui nécessitera une disposition organique.

En coopération étroite avec le président de notre commission, les rapporteurs de branche et moi-même proposons un certain nombre de modifications, avec plusieurs fils rouges : d'abord, ne pas dégrader un solde déjà préoccupant, ce qui suppose, même si c'est difficile et douloureux, des efforts de tous ; ensuite, répartir cet effort de manière équitable entre les assurés, les actifs, les retraités, les employeurs et les acteurs de la sécurité sociale ; enfin, dans un cadre aussi contraint, préserver l'emploi, les petites retraites et soulager les finances tendues des établissements de santé, ainsi que des collectivités territoriales.

Toutes les mesures que nous proposons pour y parvenir ne sont pas législatives, et certaines mesures législatives sont financièrement irrecevables. Nous aurons donc parfois besoin de l'accord du Gouvernement, avec lequel nous avons eu de nombreuses discussions, qui ne sont d'ailleurs pas terminées.

Il nous semble indispensable de lâcher du lest sur la réforme des allégements de cotisation et sur le report de la revalorisation des retraites, selon un équilibre que nous vous détaillerons. Il faudrait en outre étaler la hausse de taux de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) sur quatre ans au lieu de trois ans. Cela représente un moindre coût de 600 millions d'euros en 2025 pour les hôpitaux et les collectivités. Un amendement à l'annexe matérialisera cette volonté. Nous comptons aussi sur un geste du Gouvernement pour aider les Ehpad et les départements pour l'aide à domicile. La sagesse semble également impliquer de ne pas baisser de dix points le ticket modérateur sur les consultations médicales.

Toutes ces mesures représentent un coût de l'ordre de 3 milliards d'euros. Pour ne pas dégrader le solde, nous devons donc trouver 3 milliards d'euros de recettes ou de moindres dépenses. Plusieurs leviers sont mobilisés. Je pense notamment à la fiscalité comportementale, ainsi qu'à des ambitions renforcées en matière de lutte contre la fraude et les actes redondants.

Nous proposerons enfin d'instaurer une « contribution de solidarité par le travail », reposant sur sept heures de travail supplémentaires par an, dans une forme à définir librement par les acteurs de terrain ; il ne s'agit donc pas de supprimer un jour férié, comme on l'entend parfois. Cela permettra d'assurer le financement à long terme de la branche autonomie. Dans l'immédiat, cette ressource permettrait le financement du soutien aux Ehpad et aux départements, dont je vous ai parlé précédemment. Elle permettrait aussi de financer des dépenses nouvelles, comme la réforme de la prise en charge des fauteuils, annoncée par le Président de la République en début d'année.

J'aimerais à présent évoquer plus précisément l'article 6 du PLFSS, qui porte sur un sujet très compliqué, celui des allégements généraux de cotisations patronales. Le Gouvernement propose une réforme en deux étapes.

Selon le barème actuel, ce que l'on appelle le « bandeau famille », qui correspond à des allégements de cotisations famille, s'arrête à 3,5 Smic, quand le « bandeau maladie », qui correspond à des allégements de cotisations maladie, s'arrête à 2,5 Smic. Les allégements dégressifs, eux, s'arrêtent à 1,6 Smic.

Selon le barème proposé pour 2025 dans le PLFSS, le « bandeau famille » s'arrêterait à 3,2 Smic, contre 3,5 Smic aujourd'hui, quand le « bandeau maladie » s'arrêterait à 2,2 Smic, contre 2,5 Smic aujourd'hui. Pour un Smic, les allégements seraient inférieurs de deux points par rapport au barème actuel. Techniquement, il n'est pas trop compliqué pour les entreprises de passer du barème actuel à ce nouveau barème.

Selon le barème proposé pour 2026, qui fait suite au rapport Bozio-Wasmer, il y aurait une réduction en pente douce jusqu'à 3 Smic, ce qui ferait à la fois des gagnants et des perdants. Pour un Smic, les allégements seraient inférieurs de quatre points par rapport au barème actuel. Mais, autour de 1,5 Smic, le régime serait plus favorable qu'aujourd'hui.

Il y a des arbitrages à faire, dépendant de nos priorités.

Si l'on considère que seule importe la recherche d'économies, on peut se contenter de la rédaction actuelle de l'article 6. Je rappelle que les allégements généraux se sont envolés. Le total des allégements a atteint 80 milliards d'euros, dont 65 milliards d'euros pour la sécurité sociale.

Si l'on veut davantage inciter les entreprises à augmenter les salaires, l'article 6 va dans le bon sens, sans être la panacée. Comme les allégements diminuent un peu moins vite, les entreprises sont un peu plus incitées à augmenter les salaires. Il ne faut tout de même pas attendre des miracles, surtout à court terme, alors que le coût des salariés au Smic va augmenter.

Si l'on veut éviter des destructions nettes d'emploi - les économistes que nous avons auditionnés indiquent qu'il y en aura nécessairement -, on peut faire mieux. Il faudrait que, pour un Smic, le barème de 2026 soit aussi proche que possible du barème actuel. En effet, c'est surtout l'emploi proche du Smic qui est sensible au coût. Selon l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), la mesure contenue dans le PLFSS détruirait 50 000 emplois au bout de trois ans.

Mais si l'on veut faire le maximum pour préserver la compétitivité de l'industrie, dont les salaires sont plus élevés que dans le reste de l'économie, il faut maintenir les allégements aussi élevés que possible autour de 2 Smic.

Il n'est pas possible d'atteindre tous ces objectifs en même temps. Il faut faire des économies dans un esprit de justice, en veillant à ne pas détruire les emplois. Je rappelle combien la conjoncture est difficile ; songeons aux plans sociaux ou à la situation des petites entreprises.

Il y a donc forcément un arbitrage de nature politique à faire. La rédaction finale sera nécessairement le fruit d'un compromis. Nous devrons toutefois le voter, car il n'y a pas de proposition alternative. Aussi, vous proposerai-je des amendements tendant à protéger l'emploi, mais ne remettant évidemment pas en cause la nécessité de réaliser des économies.

Nous n'avons jamais été confrontés à de tels enjeux lors de l'examen d'un projet de loi de financement de la sécurité sociale. Les sommes sont impressionnantes. Surtout, le texte définitif devrait dans une large mesure être celui du Sénat.

Pour moi, comme, je le crois, pour chacun d'entre vous, ce qui compte avant tout, c'est de maintenir notre protection sociale au plus haut niveau. Mais nous perdons toute liberté d'action si nous avons un déficit chronique qui s'accentue chaque année. Il existe même un risque que des administrations ne puissent plus verser les pensions et les allocations. Nous devons donc être prudents et faire preuve de courage. Ce sera certainement douloureux. Mais le pire serait de ne pas avoir la volonté et le courage de faire des propositions à la hauteur des enjeux.

Mme Annie Le Houerou. - Madame la rapporteure générale, je vous remercie de cette présentation didactique. Mais ce PLFSS nous paraît très loin de répondre aux attentes de nos concitoyens. Vous l'avez souligné, il ne réduit pas les déficits ; il augmente très timidement les recettes et diminue drastiquement les dépenses, qui sont mises à la charge des malades. Nous refusons la vision politique qui consiste à laisser filer le déficit pour démontrer l'inefficacité de notre système de sécurité sociale, issu du Conseil national de la Résistance (CNR).

Depuis des années, les gouvernements successifs de M. Macron organisent la financiarisation de notre système de santé et la privatisation de notre protection sociale. Pour notre part, nous soutiendrons l'hôpital public et, plus généralement, les services publics. Nous souhaitons préserver notre modèle, ce qui implique d'assurer l'équilibre budgétaire des différentes branches de la sécurité sociale.

Nous estimons qu'une alternative est possible. Nous ne voulons pas que les déficits soient à la charge des malades, comme le prévoit votre majorité gouvernementale, alors que 80 milliards d'euros d'exonérations diverses ont été accordés aux plus aisés depuis 2017.

Face à un budget assez insincère et dangereux pour la pérennité de notre modèle, notre groupe proposera des recettes là où les exonérations ont démontré leur inefficacité, ce dont même les économistes les plus libéraux conviennent. Si nous jugeons positivement l'intention du gouvernement Barnier de réduire les allégements généraux, nous voulons aller plus loin et dégager au moins 8 milliards d'euros de recettes sur ces exonérations, pour les flécher vers les hôpitaux, mais aussi vers la branche autonomie. Nous agirons sur la fiscalité comportementale pour financer le reste à charge des patients, et nous supprimerons la hausse du ticket modérateur.

Nous démontrerons ainsi que notre groupe aborde l'examen du PLFSS avec sérieux et une volonté constructive de répondre aux besoins de santé des Français.

M. Bernard Jomier. - Alors que vous, majorité sénatoriale, alertez, comme nous, depuis plusieurs années sur la dérive des comptes sociaux, vous ne proposez aucune trajectoire de retour à l'équilibre. C'est une faute. En validant la trajectoire pluriannuelle du Gouvernement, vous validez un déficit public de 60 milliards d'euros sur quatre ans.

Il n'est plus tenable de faire supporter la dette par la Cades. Nous démontrerons, par une action sérieuse et crédible qui ne mettra pas en cause l'emploi dans notre pays, la possibilité d'un retour à l'équilibre en trois ans. La gauche sait ramener les finances sociales à l'équilibre : en 2018, nous étions proches de l'équilibre. Or, dans vos amendements, vous proposez seulement de vous en prendre au travail.

Mme Cathy Apourceau-Poly. - Exactement !

M. Bernard Jomier. - Supprimer un jour férié, comme vous l'envisagez, c'est faire perdre à ceux qui travaillent ce jour-là les majorations dont ils bénéficient.

Nous proposerons une trajectoire crédible de retour à l'équilibre en trois ans. Trois ans, c'est également le délai nécessaire pour mettre au point un nouveau mode d'adoption du budget santé. La logique actuelle de construction de l'Ondam nous conduit dans l'impasse.

M. Alain Milon. - Sur le diaporama de la rapporteure générale, il est fait référence à des « économies Ondam ». De quoi s'agit-il ?

M. Daniel Chasseing. - Je souscris aux analyses de Mme la rapporteure générale. Le Gouvernement fait, me semble-t-il, preuve de courage pour éviter la mise sous tutelle de notre pays. Il me paraît tout à fait acceptable d'essayer de ramener le déficit, aujourd'hui à 6,1 % du PIB, à 5 %.

Avec la désindexation des retraites, la diminution des exonérations de cotisations et la modération des dépenses, le déficit serait de 16 milliards d'euros en 2025. Alors qu'une trajectoire de redressement est engagée, remettre en cause la retraite à 64 ans relèverait de l'irresponsabilité, voire de la folie.

Il semble pertinent d'étaler la hausse du taux de la CNRACL sur quatre ans plutôt que trois ; les collectivités, les hôpitaux et les Ehpad sont en difficulté. La suppression de la taxe d'habitation et celle de la redevance ont diminué les recettes publiques de 25 milliards d'euros ; une telle somme aurait pu être mobilisée pour nos aînés. L'effort qui est aujourd'hui proposé en faveur de ces derniers représente une quarantaine de minutes de travail supplémentaire par mois, sachant que la dépendance va augmenter très rapidement. Ne nous plaçons pas dans une position de refus. La mesure envisagée sur les allégements détruira peut-être des emplois, mais elle n'en est pas moins nécessaire pour avoir des recettes.

Je soutiendrai le texte qui nous est présenté, afin d'éviter la mise sous tutelle de notre pays.

Mme Cathy Apourceau-Poly. - Le présent PLFSS n'a pas pu être adopté à l'Assemblée nationale, du fait de l'obstruction non pas de la gauche, mais du Gouvernement et de ses soutiens. Quel déni de démocratie quand des amendements majoritairement votés par les députés sont purement et simplement supprimés !

Ce PLFSS, qui prévoit pour 2025 un déficit de 16 milliards d'euros, dont 13,4 milliards d'euros pour la branche maladie et 3,1 milliards d'euros pour la branche vieillesse, ne répondra pas aux attentes de celles et ceux qui font tourner la France au quotidien, dans les hôpitaux ou comme aides à domicile. Pire : avec votre amendement tendant à les faire travailler sept heures de plus gratuitement, vous allez aggraver leur situation. Il est tout de même un peu osé de prétendre que nous n'aurions pas de coeur en nous opposant à une telle mesure, quand c'est l'augmentation totalement incontrôlée des exonérations de cotisations qui assèche les recettes de la sécurité sociale et entraîne l'étatisation de son budget.

Nous déposerons des amendements pour nous attaquer aux 88 milliards d'euros de baisses de cotisations, un chiffre en hausse de 10 % chaque année. Puisque vous cherchez de l'argent, nous allons vous en proposer, et même beaucoup : en prenant à celles et ceux qui vivent bien au détriment de celles et ceux qui vivent mal.

Mme Anne Souyris. - Le groupe Écologiste - Solidarité et Territoires cherchera également une alternative aux mesures envisagées dans ce PLFSS. Ce projet de budget ne permettra pas du tout de sauver la sécurité sociale telle que nous la connaissons. C'est un cautère sur une jambe de bois. N'allons-nous pas voir la fin de la sécurité sociale et, grâce à la financiarisation de santé, la prise en charge de notre sécurité sociale par les assurances d'ici à 2030 ?

Il faut, nous dites-vous, être réalistes. Certes, mais il faut aussi de la volonté politique. Y aurait-il un tel déficit si le Gouvernement ne faisait pas les poches de la sécurité sociale chaque fois qu'il veut aider les entreprises ?

Il y a donc des choix politiques à faire, en regardant les choses en face. Nous approuvons votre intention de revoir les allégements de cotisations sociales ; mais ce n'est évidemment pas suffisant.

Nous proposerons d'autres mesures sur les recettes. Notre objectif est de sauver la sécurité sociale. Car nous voyons bien que certains de nos Ehpad risquent de ne pas passer l'hiver. Qu'adviendra-t-il de nos aînés à court terme, à moyen terme et à long terme ?

Le PLFSS qui nous est présenté ne permet ni de sauver la situation ni de construire l'avenir. La question de la prévention en est totalement absente.

Enfin, j'insiste sur l'importance de la fiscalité comportementale. J'espère que nous pourrons avancer en la matière.

M. Olivier Henno. - Je salue le travail de Mme la rapporteure générale et ses propositions relatives aux urgences du moment qui retentissent d'un écho particulier dans les territoires : ses propositions relatives à la CNRACL, aux Ehpad, aux difficultés financières des départements. Je suis d'accord pour dire que 16 à 18 milliards d'euros de déficit pour la sécurité sociale, toutes branches confondues, ce n'est évidemment pas tenable. Il est vrai que notre système de protection sociale est en danger, car nous ne pouvons durablement reporter nos dépenses de santé sur les générations à venir et les leur faire supporter. Nous identifions ici une forme de fuite en avant, à la limite de la responsabilité. Les conditions mêmes de la préparation des budgets pour 2025 ne permettaient pas d'aborder ces questions de fond, mais il faudra s'y employer dans les prochains mois et les prochaines années. En effet, si nous continuons sur la pente d'une distribution continuelle et d'un financement par la dette, ce sont nos capacités d'investissement, partant notre capacité à aborder l'avenir, qui s'affaibliront.

Là où je diverge, c'est sur la question de savoir s'il s'agit d'un problème tenant aux recettes ou d'un problème relatif aux dépenses. Sur les recettes, il convient de ne pas oublier que les allégements, entrepris avec le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), et la politique de l'offre ont permis une baisse du taux de chômage. À l'oublier, nous risquerions de connaître des lendemains difficiles sur le terrain de l'emploi. Je crois que le problème principal tient aux dépenses de santé et de retraite, et que la grande question devant nous est celle de leur régulation. Nous ne saurions longtemps dépenser 2 % de plus de notre PIB que tous les autres pays européens ou développés, sans en obtenir une satisfaction de nos concitoyens bien supérieure à celle qu'ils ont aujourd'hui. Il n'est pas non plus possible de maintenir des dépenses de santé ou des dépenses sociales qui augmentent chaque année beaucoup plus rapidement que notre PIB.

Bien sûr que, sur cette pente, notre système de protection sociale est menacé de mort ! Il l'est non en raison de notre niveau de recettes, mais à cause de dépenses sociales que nous n'arrivons pas à maîtriser. La question majeure est donc celle de leur régulation, sans laquelle aucun système ne peut tenir.

M. François Patriat. - La situation est tellement difficile et grave que penser que nous en sortirons par une attitude binaire consistant à dépenser toujours plus et, dans le même temps, à en faire invariablement supporter le poids aux plus riches m'apparaît totalement irréaliste. Nous n'en sortirons que par des économies et des efforts par le travail. Et si j'ai régulièrement vu des propositions de loi qui prévoyaient davantage de dépenses, je n'en ai jamais lu qui tendaient à un niveau de dépense moindre.

Sur les exonérations de charges, la France est le pays où le coût du travail est le plus élevé ; nul ne l'ignore. Considérer que réduire un peu le coût du travail permettra de créer de l'emploi me semble évident. Les exonérations ont certainement quelque utilité si l'on reconnaît qu'elles conduisent les employeurs à recruter davantage. Or on envisage, par exemple, une baisse des aides sur l'apprentissage. On ne peut dire tout et son contraire. Pour notre part, nous avons soutenu et nous soutiendrons encore une politique de l'offre, celle d'un partage des efforts, mais avec un niveau de prélèvement moindre sur les entreprises.

On ne peut cependant laisser dire que le dernier gouvernement n'a rien entrepris. Quel gouvernement a mis 19 milliards d'euros dans le Ségur de la santé ? Quel autre gouvernement a-t-il autant investi dans les maisons de santé, dont le nombre a été multiplié par huit ou dix depuis sept ans. J'en ai personnellement créé quinze en Bourgogne, quand il n'en existait pas dans les régions limitrophes.

Des économies, nous pouvons en réaliser à l'hôpital, pour un montant qui se chiffrerait peut-être en milliards. Je vous donne l'exemple des prothèses cardiaques. En France, leur coût est compris entre 11 000 et 14 000 euros, contre 5 900 euros en Allemagne, pour un modèle identique. Nous surpayons ces produits. Par ailleurs, nous identifions une multiplication des actes redondants ainsi que la possibilité de mieux gérer l'hôpital et son personnel administratif.

Madame la rapporteure générale, nous soutiendrons les mesures d'économies que vous proposez, y compris celles qui supposent de travailler un peu plus. La France est le pays d'Europe où l'on travaille le moins et où le coût du travail est le plus élevé. Ne pas en prendre conscience aujourd'hui est une aberration.

Mme Silvana Silvani. - Nous le savons, le mot d'ordre est de faire des économies. Le débat porte sur le poids respectif des dépenses et des recettes. C'est une façon d'aborder le sujet. Cependant, en dépit de nos divergences politiques, je n'ai aucun doute sur le fait que personne, ici, n'oublie que nous parlons de la santé, l'aspect peut-être le plus humain qui soit du budget. Et il s'agirait de réaliser des économies sur notre propre santé ? On ne peut y arriver qu'en déshumanisant le débat. C'est difficile. Le choix est politique, qui consiste à décréter la nécessité d'économies dans ce domaine.

Depuis longtemps, nous sommes chaque année, concernant le financement de la sécurité sociale, en dessous des besoins. Je rappelle que le précédent budget avait été rejeté à l'unanimité. Vous présentez des arguments, mais plutôt que de changer de posture, il s'agirait d'envisager de poursuivre dans la même voie, qui consiste à la fois à conserver et à réduire l'existant. Des débats presque analogues à ceux que nous tenons ont eu lieu l'année dernière ; nous n'allons pas dans le mur, nous y sommes déjà !

Je dirai un mot sur les exonérations et les allégements de charges. Nous ne sommes pas forcément d'accord sur leur utilité. Ont-ils agi sur le taux de chômage ? Peut-être, mais la smicardisation de la société, que les allégements ont renforcée, a également été dénoncée. Le refus de revenir sur ces allégements tend à l'entretenir. Nous sommes donc confrontés à des contradictions. À cet égard, la ministre de la santé semble réétudier certaines propositions du PLFSS.

Mme Émilienne Poumirol. - La ligne que nous défendrons est, vous l'avez compris, une ligne de responsabilité et celle du choix de sauver notre protection sociale, en proposant une trajectoire progressive, sans brutalité. L'intervention de M. Patriat me conduit cependant à réagir, en ce qu'il simplifie à l'excès nos positions en suggérant que, à gauche nous ne parlerions que d'augmenter les recettes, quand, à droite, il ne serait que question de diminuer les dépenses.

Nous n'en prenons pas moins, de notre côté, en considération le fait qu'il existe également un problème d'organisation générale de notre système de santé et que des problèmes concernent la pertinence des soins. Je constate surtout une financiarisation toujours plus marquée de notre système et des dépenses effectivement toujours plus incontrôlées. Des efforts sont indéniablement à faire sur ces dépenses, en particulier sous l'angle de la redondance de certains actes, lesquels sont liés à une financiarisation qui n'a d'autre but que celui d'augmenter les dividendes à reverser.

Notre vision n'est donc pas binaire. Elle ne consiste nullement à dire qu'il n'y a qu'un chemin à emprunter.

Mme Monique Lubin. - Certaines déclarations me surprennent. Avant les élections européennes et la dissolution, il n'y avait pas une séance de questions au Gouvernement, pas une discussion sur une proposition ou un projet de loi, sans qu'un ministre nous explique que tout allait désormais mieux. Aujourd'hui, j'entends que la situation n'est rien moins que catastrophique. Que s'est-il donc passé ?

M. François Patriat. - Les recettes ont diminué !

Mme Monique Lubin. - Il s'agirait donc d'une baisse de recettes que personne n'avait vu arriver ! Arrêtons avec cela !

J'entends aussi qu'il faut abaisser le niveau des dépenses. Je vous invite à exposer aux Français celles des dépenses auxquelles vous pensez ! Ce genre d'affirmation reste plus facile à soutenir entre nous que sur le terrain. Allez donc dire aux Français que nous allons diminuer les dépenses de l'hôpital, de retraite et de protection sociale ! Ce serait n'avoir décidément rien compris à ce qui s'est passé en juillet dernier dans ce pays. Et je me demande parfois si l'on est bien en prise ici avec la réalité...

Depuis 2017, l'addition des baisses fiscales successives représente un total de 500 milliards d'euros. Où désormais trouver un tel montant ? On vient maintenant nous expliquer qu'il faudra diminuer les dépenses. Mais pourquoi avoir d'abord rogné ainsi sur les recettes ? Le ruissellement attendu n'a jamais eu lieu. C'est plutôt un effet délétère que nous constatons aujourd'hui. Reviendra-t-il aux seuls salariés d'en supporter le coût ? Cela ne ferait qu'aggraver la situation politique dans notre pays, où les salariés comprennent qu'ils sont les « vaches à lait », quand à certains, en revanche, on ne demande jamais rien.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - Je vous remercie de l'ensemble de vos contributions. Elles sont la promesse de riches échanges dans l'hémicycle, importants pour nos concitoyens.

Vous l'avez dit, il est ici question de politique : il s'agit de savoir comment on finance notre protection sociale ; et il est vrai qu'on ne résout pas la question avec le présent PLFSS. Ce n'est d'ailleurs pas aujourd'hui notre ambition, tant nous savons qu'il faudra entreprendre des réformes structurelles, dont certaines sont attendues de longue date et échappent au champ d'un texte financier.

Je suis d'accord pour dire qu'il nous manque une loi sur l'autonomie et le grand âge, afin de structurer notre système pour faire face au vieillissement de la population. De même, nous avons connu ces dernières années des difficultés dans le domaine de la santé, et je n'évoque pas le problème du déficit de l'assurance maladie. Nous faisons tous le même constat, celui du manque de professionnels de santé et d'un hôpital qui va mal.

Cependant, on nous envie à l'étranger la prise en charge de nos malades en France. Je rencontre parfois des familles qui, vivant à l'étranger, reviennent en France pendant les vacances pour se faire soigner. Pendant les jeux Olympiques, les athlètes ont unanimement salué la qualité de leur prise en charge. On le voit, nous sommes capables de l'excellence, mais nous n'avons pas suffisamment travaillé sur les aspects d'organisation ainsi que sur une véritable stratégie qui réponde à l'attente d'efficience de nos compatriotes.

Nous aurions dû nous interroger sur la vision que nous leur donnerions de notre système de santé. Nous nous en sommes tenus au quotidien, en réglant les problèmes de déficit dans l'urgence. Ce qu'il manque par exemple tout particulièrement dans ce PLFSS tient à la prévention. Le terme y a disparu, comme il a disparu de l'intitulé du portefeuille ministériel de la santé. Sans doute avons-nous les uns et les autres une part de responsabilité, car, à défaut pour les gouvernements successifs d'agir, rien ne nous empêche de formuler nos propres propositions pour l'avenir.

Madame Le Houerou, si notre vision politique diffère sensiblement, notre ambition, elle, est la même, à savoir répondre du mieux possible à l'ensemble des Français. Ce PLFSS prévoit un moindre déficit, mais sans mesures supplémentaires le déficit restera élevé. Je rappelle que nous n'avions jamais atteint un tel niveau d'efforts, de l'ordre de 10 à 15 milliards d'euros. Pensons donc au prochain PLFSS et faisons preuve d'imagination pour dresser le panorama de ce que pourrait être l'avenir. De toute évidence, les propositions des uns et des autres ne seront pas forcément les mêmes.

Je reviens par ailleurs sur l'idée d'insincérité. Jamais je n'aurais accepté de vous présenter un projet de budget que je considérerais comme insincère sans vous le dire. Même s'il ne plaît pas à l'ensemble des parlementaires et qu'il ne plaira pas à l'ensemble des Français, le PLFSS pour 2025 me semble sincère. Je m'en suis assurée auprès des ministères concernés.

Quant à la politique de prévention, elle suppose du moyen et du long terme. Ce PLFSS prévoit d'abord des mesures à effet rapide. Pour autant, la prévention n'est pas à négliger. Si l'on veut éviter une augmentation spontanée des dépenses de santé, il reste même impératif d'élaborer, dans les années à venir, une véritable politique dans ce domaine.

Monsieur Jomier, comme mon collègue Olivier Henno, rapporteur pour la branche famille, je pense en matière d'allégements de charges sociales au CICE. Il n'a pas donné lieu à une situation de créations d'emplois optimale. On estime en effet à environ 100 000 - et c'est une estimation haute - le nombre d'emplois que le dispositif a permis de créer. Tant à droite qu'à gauche de l'échiquier politique, des propositions ont été faites dans l'intention d'améliorer les choses ; les résultats n'ont cependant pas toujours été au rendez-vous.

Votre remarque selon laquelle nos propositions reposent sur le travail est fondée. Une remise en cause totale supposerait un débat d'envergure nationale. Les allégements généraux ont été conçus afin de permettre à des entreprises de créer de l'emploi et, surtout, afin de rendre compétitive l'économie française. Je rappelle que la Chine subventionne sans réserve sa production, à l'instar des États-Unis. Dans ce contexte, continuer à faire peser l'intégralité du système sur le travail nous exposerait à perdre notre industrie. Nous avons, en définitive, cherché une forme d'équilibre.

Monsieur Milon, dans la diapositive que j'ai présentée, les économies de 4,9 milliards d'euros sur l'Ondam correspondant au montant figurant dans l'annexe à la future LFSS. Ce ne sont pas des économies que nous proposons nous-mêmes.

Monsieur Chasseing, merci de votre soutien. Je sais que la question du vieillissement de la population vous tient à coeur. La proposition, précédemment avancée dans un rapport de plusieurs de nos collègues, d'une contribution par le travail en vue de financer l'autonomie représente en effet un effort supplémentaire. Elle constitue une contribution de solidarité, comme l'a été cette journée instituée voilà quelque temps. Elle est celle que, à ce stade, nous retenons.

Madame Apourceau-Poly, ne laissons pas à penser que si nos propositions ne sont pas les vôtres elles sont inhumaines. Je réponds en même temps à Mme Silvani. Mon engagement politique, comme je le suppose pour la plupart d'entre vous, tient à ma décision d'aider les autres et d'apporter des solutions. Nous pouvons ensuite entretenir des visions politiques radicalement différentes, mais veillons néanmoins à nous respecter.

Madame Souyris, je soutiens totalement cette idée que vous avez exposée en matière de prévention. Par ailleurs, revenir à un déficit de la sécurité sociale qui soit supportable, qui nous permette d'avancer sereinement avec une véritable stratégie sur le plan, notamment, de la santé et sur celui de l'autonomie, prendra du temps. Le PLFSS autorise une petite avancée, je le concède, sur les allégements ; mais, dans la situation actuelle, j'invite à prendre garde de ne pas mettre les entreprises en trop grande difficulté.

Madame Silvani, nos amendements visent à protéger les salaires avoisinant le Smic. Pour une partie d'entre eux, ils correspondent à des emplois non délocalisables et sont souvent consacrés à l'aide à la personne. En dépit de dispositions spécifiques à l'aide à domicile, les entreprises concernées seraient touchées par la baisse de l'allégement proposée par le Gouvernement. Je veux les en protéger, comme les entreprises de propreté ou de gardiennage, dont les contrats ne sont pas toujours renégociables et dont les marges de profit sont des plus restreintes. Je ne vous proposerai donc pas de maintenir le choix du Gouvernement, car nous nous efforçons de préserver l'entreprise et, par elle, l'emploi de nos concitoyens.

Monsieur Henno, je partage vos propos sur la maîtrise des coûts et sur la régulation. Ne nous en tenons cependant pas uniquement aux recettes en plus et aux dépenses en moins ; j'aimerais que nous considérions progressivement aussi la possibilité de dépenses « en mieux ». J'ai toujours évoqué la qualité de la dépense : 1 euro dépensé doit être 1 euro utile. Nous voyons autour de nous l'exemple de dépenses qui nous paraissent exagérées. Si chacun, évidemment, doit se montrer responsable, nous sommes obligés de prévoir de la régulation. Sur les indemnités journalières (IJ), sur la consommation de soins et de médicaments, ne pas y procéder laisse le champ libre à certains de considérer la santé presque comme un produit de consommation.

Monsieur Patriat, les propositions d'exonérations de charges cherchent en effet à rendre le produit du travail dans notre pays plus compétitif par rapport aux enjeux internationaux qui prévalent. Nous voulons surtout rompre la dynamique des trois dernières années, au cours desquelles nous avons constaté une progression exponentielle du montant des allégements généraux, sans non plus supprimer par trop ces allégements.

Nous nous penchons tout spécialement sur la désmicardisation, car un nombre croissant de travailleurs - les économistes nous le disent - perçoivent le Smic. Celui-ci a en effet beaucoup augmenté avec l'inflation. La baisse, désormais constatée, de cette dernière devrait produire un étalement plus marqué des salaires. Il faut éviter ce qui, dans le système actuel, permet aux grosses entreprises d'opérer une forme d'optimisation sur le niveau de certains salaires.

Madame Poumirol, vous nous invitez à ne pas faire de caricatures, ni d'un côté ni de l'autre. J'en suis d'accord et nous tâcherons d'être à cet égard responsables. J'apprécie d'ailleurs que, au Sénat, nous nous écoutions et nous respections au-delà de nos divergences, de même que nous n'entretenons pas de visions binaires et savons manier les nuances.

Madame Lubin, vous avez exprimé votre point de vue sur les salariés qui seraient considérés comme des « vaches à lait ». Dans les propositions que traduisent nos amendements, nous essayons d'équilibrer l'effort à consentir sur l'ensemble des parties prenantes. Nous nous efforçons ainsi de préserver les petites retraites du report de l'indexation, de préserver en matière d'allégements généraux les salaires les plus bas, ou encore sur la CNRACL de préserver la situation budgétaire des départements et des hôpitaux. Je reconnais que nous n'avons pas trouvé de solution miracle et nos propositions réclament un effort de tous.

Mme Corinne Imbert, rapporteure pour la branche assurance maladie. - Nous avons tous des raisons d'être un peu déçus par ce PLFSS, mais ces raisons ne sont pas toutes les mêmes. Je rappellerai que le Gouvernement a disposé de peu de temps pour en élaborer le texte.

Si celui-ci contient des mesures d'économies nécessaires, son contenu reste toutefois insuffisant compte tenu de la situation financière dégradée de la branche et des attentes des Français en matière d'accès aux soins. Certains ont parlé de budget paramétrique... Le PLFSS n'est certes pas un projet de santé pour la France. Il gagnerait toutefois à traduire une vision politique plus affinée pour la santé publique.

Comme il est d'usage, je commencerai par un état de la situation financière de la branche maladie et par une revue de l'Ondam.

En 2024, le déficit de la branche devrait s'établir à 14,6 milliards d'euros, soit une dégradation de plus de 6 milliards d'euros par rapport à la prévision inscrite en LFSS pour 2024. Pour 2025, le Gouvernement fixe l'objectif de dépenses de la branche à 260,8 milliards d'euros et envisage un léger redressement de son déficit. Il suffit pourtant de regarder au-delà de 2025 pour constater que le solde de la branche maladie devrait continuer à se détériorer jusqu'en 2028, au moins, pour atteindre 14,9 milliards d'euros. Les mesures envisagées par le Gouvernement, discutables pour certaines d'entre elles - je pense notamment au relèvement du ticket modérateur -, ne suffiront donc pas à combler le besoin structurel de financement de la branche. C'est ainsi, une fois de plus, un horizon durable de déficits qui nous est présenté, et qui nous place collectivement en situation de grande fragilité, mais aussi devant nos responsabilités.

Alerter sur la soutenabilité des dépenses de la branche maladie est malheureusement devenu un exercice rhétorique trop fréquent ; anticiper le risque de dépassement de l'Ondam aussi.

En 2024, le dépassement constaté à hauteur de 1,2 milliard d'euros ne répond plus à un contexte de crise. Les dépenses liées à la gestion de la covid-19 sont devenues résiduelles, et c'est bien le dynamisme des dépenses de soins de ville qui explique, pour l'essentiel, ce nouveau dérapage. Concernant les établissements de santé, le secteur public connaît enfin une reprise d'activité soutenue en 2024, ce qui constitue un signal positif, malgré la poursuite de la dégradation de leur situation financière.

Pour 2025, les perspectives sont à peine plus réjouissantes. Le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) a jugé globalement fragile le scénario macroéconomique retenu par le Gouvernement, et a relevé le caractère très optimiste des hypothèses de construction de l'Ondam. Celui-ci progresserait de 2,8 %, ce qui représente 7,8 milliards d'euros de dépenses supplémentaires par rapport à l'exécution 2024.

Quand on sait que l'Ondam a crû en moyenne de 4,5 % par an entre 2019 et 2025, et bondi de 64 milliards d'euros en six ans, cette projection impose un net ralentissement de la dépense, qui repose sur un effort d'économies sans précédent. Sont ainsi attendus 4,9 milliards d'euros de moindres dépenses, dont 1,2 milliard au titre des baisses de prix sur les médicaments, outre un quantum de 900 millions d'euros qui serait récupéré grâce à des mesures de maîtrise médicalisée des dépenses et de lutte contre la fraude.

Le risque de surestimation de ces économies, qui relèvent pour une large part de mesures de régulation et d'efficience, n'est pas tout à fait négligeable. Les soins de ville sont largement mis à contribution, mais les dépassements constatés chaque année démontrent la difficulté à contenir ces dépenses. Tenir la trajectoire de l'Ondam devrait donc s'avérer particulièrement ardu. Cette ambition exige, en tout cas, un pilotage resserré et un partenariat de confiance avec les professionnels de santé.

Permettez-moi à présent de m'arrêter quelques instants sur la situation des établissements de santé.

Dans les conditions actuelles, la répercussion sur les employeurs hospitaliers de la hausse des cotisations à la CNRACL n'apparaît pas soutenable. Les hôpitaux connaissent, depuis 2020, une dégradation préoccupante de leur situation financière. En 2023, leur déficit cumulé effleurait les 2 milliards d'euros, soit le triple du déficit d'avant-crise. En 2024, malgré la reprise d'activité, leur déficit continuera à s'aggraver. Cette situation a des impacts très concrets : allongement des délais de paiement des fournisseurs, freins au recrutement quand 70 % des dépenses d'un établissement relèvent de sa masse salariale, dégradation des principaux indicateurs financiers se traduisant par une moindre capacité à investir. C'est pourquoi, en responsabilité, nous appelons le Gouvernement à lisser la trajectoire d'augmentation des cotisations à la CNRACL sur une durée plus longue, compatible avec les besoins de financement des établissements. Cette situation me semble, par ailleurs, exiger une réflexion de fond sur le modèle et les conditions d'organisation de notre offre de soins dans les territoires.

Dans ce contexte budgétaire durablement dégradé, nous devons continuer à oeuvrer pour la santé des Français, tout en maîtrisant plus effectivement les dépenses de la branche. Les amendements que je vous soumettrai ce matin, destinés à améliorer le texte lacunaire qui nous est transmis, cherchent à ménager cet équilibre.

Commençons par les dispositions de ce texte destinées à mieux maîtriser les dépenses de santé.

Le Gouvernement souhaite, d'abord, renforcer les outils de régulation des dépenses dans deux secteurs où celles-ci se révèlent particulièrement dynamiques : la biologie et l'imagerie médicale. Pour cela, l'article 15 crée de nouveaux « accords de maîtrise des dépenses », destinés à permettre aux partenaires conventionnels d'établir une trajectoire négociée d'évolution des dépenses et des mesures correctrices afin de la faire respecter. Dans les cas où la conclusion de tels accords s'est révélée impossible, ou lorsque les mesures correctrices négociées apparaissent insuffisantes, le texte autorise l'assurance maladie ou le Gouvernement à baisser unilatéralement les tarifs applicables. Enfin, l'article 15 porte un objectif de 300 millions d'euros d'économies sur trois ans pour l'imagerie médicale, permises par un accord conclu avant le 30 avril prochain ou, à défaut, par des baisses unilatérales de tarifs.

Si la maîtrise des dépenses est nécessaire dans ces deux secteurs, je vous soumettrai plusieurs amendements visant à rappeler l'attachement de notre commission à l'exercice conventionnel. Parce que les baisses de tarifs unilatérales devraient demeurer exceptionnelles et, surtout, faire l'objet d'une autorisation systématique du Parlement, je vous proposerai de supprimer du texte les dispositions autorisant de manière pérenne le Gouvernement et l'assurance maladie à y recourir.

L'article 15 ter rejoint cet objectif de rationalisation des dépenses en avançant au 1er octobre 2025 la date d'entrée en vigueur de la réforme du financement des actes de radiologie, qui permettra, dans un secteur sensible, d'assurer l'adéquation entre les modalités de financement et l'évolution des techniques médicales.

Le PLFSS qui nous est soumis porte également des dispositions visant à étendre aux actes et transports sanitaires la nouvelle procédure « d'accompagnement à la pertinence des prescriptions », introduite par la dernière LFSS pour les médicaments et dispositifs médicaux. L'article 16 prévoit de demander au professionnel de santé de confirmer, au moyen d'un document dédié, que sa prescription respecte les indications thérapeutiques remboursables et les recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS). Si ce document n'est pas présenté, ou lorsqu'il révèle que les indications et recommandations ne sont pas suivies, le pharmacien ou le professionnel chargé d'exécuter la prescription doit avertir le patient que la prestation ne sera pas prise en charge.

Je vous proposerai d'entendre les inquiétudes des professionnels de santé, en recentrant la procédure sur les produits les plus coûteux ou présentant le plus grand risque de mésusage, et en supprimant les références aux recommandations de la HAS. Celles-ci étant dépourvues de caractère obligatoire, il n'apparaît pas souhaitable, en effet, d'en faire un critère suffisant pour refuser la prise en charge. En revanche, je vous soumettrai un amendement visant à lutter contre les actes inutiles et redondants. Celui-ci permettra d'utiliser cette procédure pour vérifier que le prescripteur a consulté, au préalable, le dossier médical partagé (DMP) du patient.

L'article 20 vise également à renforcer la pertinence des prescriptions : il permet de conditionner la prise en charge de dispositifs médicaux numériques à leur utilisation effective et d'instaurer une réévaluation régulière de l'efficacité de la prescription à l'aune des données d'utilisation. L'article vise en premier lieu les dispositifs de pression positive continue (PPC) pour l'apnée du sommeil : l'assurance maladie affecte chaque année 100 millions d'euros à la prise en charge de ces dispositifs dont le service rendu est incertain, voire inexistant, du fait d'une sous-observance. Dans une logique d'accompagnement du patient vers une stratégie thérapeutique plus adaptée, je proposerai que le prescripteur soit informé sans délai de toute suspension de prise en charge. Je vous soumettrai également un amendement visant à assurer qu'une sous-observance ponctuelle, par exemple pendant les vacances, ne puisse pas donner lieu à une interruption du remboursement.

L'article 17 tend à réformer les relations conventionnelles entre l'assurance maladie et les taxis, dans un contexte de forte dynamique de la dépense associée. Il est proposé de maintenir l'articulation actuelle entre une convention nationale et des conventions signées localement par chaque entreprise, tout en renforçant les prérogatives de la convention nationale, notamment en matière de régulation tarifaire et de contrôle du conventionnement. La convention nationale pourra notamment définir l'encadrement tarifaire des courses, modulable en fonction des territoires. Je vous proposerai que la convention-cadre puisse, en outre, prévoir des mécanismes d'intéressement destinés à valoriser la participation des entreprises de taxis aux efforts de maîtrise des dépenses et de lutte contre la fraude.

La régulation des dépenses d'intérim dans les établissements publics de santé, à l'article 18, devrait également contribuer à l'effort de maîtrise de la dépense. Cette mesure constitue pourtant un remède insuffisant face à une difficulté plus profonde. Le développement du recours à l'intérim est, en effet, symptomatique d'une démographie professionnelle sous tension et d'une moindre attractivité de l'exercice hospitalier. Si la mesure peut permettre de répondre à l'iniquité des situations des professionnels au sein des établissements, c'est d'abord en relevant les quotas de formation qu'il convient d'agir, en construisant des parcours de carrière qui fidélisent les professionnels et en partageant mieux la charge de la permanence des soins entre les secteurs public et privé.

Parce que nous nous devons d'être ambitieux sur le volet de la maîtrise des dépenses et de la lutte contre la fraude, je vous proposerai d'adopter plusieurs amendements portant articles additionnels pour enrichir la copie transmise par le Gouvernement.

Un premier amendement propose d'inciter les professionnels de santé, en ville comme à l'hôpital, à utiliser le DMP pour prévenir les actes redondants. La consultation et l'alimentation du DMP figureront, ainsi, parmi les critères de l'incitation financière à la qualité des établissements et pourront être valorisées, en ville, par les conventions professionnelles.

Pour contribuer à la maîtrise des dépenses, je travaille également à un amendement visant à faciliter la substitution des biosimilaires aux médicaments biologiques de référence prescrits et appelle le Gouvernement à le soutenir. Si la pénétration des biosimilaires demeure relativement faible en France, leur développement est souhaité par l'assurance maladie. Ils constituent un réservoir d'économies de plusieurs centaines de millions d'euros à terme.

Afin de limiter les fraudes aux prestations sociales, qui, on le sait, pèsent lourdement sur les dépenses de la branche, je vous soumettrai un amendement visant à renforcer la sécurisation de la carte vitale. Je souhaite que soit accélérée au 1er juillet prochain la généralisation de l'application sécurisée « Carte vitale », aujourd'hui expérimentée dans 23 départements, en complément et non en remplacement de la carte physique. Afin d'accompagner le déploiement rapide de la réforme, je propose que soient créés des mécanismes conventionnels afin d'inciter financièrement les professionnels à accepter la carte vitale dématérialisée et sécurisée.

Je porterai sur le même thème un amendement prévoyant de renforcer les modalités de coopération entre l'assurance maladie obligatoire et les complémentaires santé en matière de lutte contre la fraude, le cadre actuel étant de l'aveu, de tous les acteurs, dysfonctionnel, car excessivement restrictif.

Le texte initial ne contenait, et c'est regrettable, aucune mesure relative à la prévention ni à l'accès aux soins, mais le texte transmis s'est enrichi, au cours du débat parlementaire, d'articles qui feront oeuvre utile pour améliorer l'état de santé de la population.

L'article 17 ter réforme ainsi le dispositif « M'T Dents », qui permet aux jeunes de 3 à 24 ans d'effectuer une consultation de prévention bucco-dentaire et de bénéficier des soins associés tous les trois ans, sans reste à charge. Dans le cadre de l'objectif « Génération sans carie » et conformément à la convention nationale des chirurgiens-dentistes, l'article 17 ter rendra ces consultations annuelles. Cette révision de la périodicité permettra, dès le plus jeune âge, d'inculquer les bonnes habitudes de suivi bucco-dentaire. Pour financer les dépenses nouvelles induites, l'article prévoit d'associer les complémentaires santé au dispositif.

Je partage le souci, inscrit dans la convention dentaire, que ces examens de prévention ne provoquent de reste à charge pour aucun jeune. Pour les assurés disposant d'une complémentaire santé, je vous proposerai d'inscrire ce point dans le cahier des charges du contrat solidaire et responsable, qui représente plus de 95 % du marché. Pour ceux qui n'en ont pas, j'invite le Gouvernement à maintenir, à titre dérogatoire, la prise en charge intégrale par la sécurité sociale.

L'article 17 quinquies tire les conséquences des récentes recommandations vaccinales de la HAS sur les infections invasives à méningocoques, des pathologies virulentes surtout chez les plus jeunes, et en recrudescence sur notre territoire. Il prévoit donc de coupler la campagne de vaccination contre ces pathologies avec celle contre le papillomavirus humain, déployée depuis l'automne 2023 en milieu scolaire chez les élèves de cinquième, en lui appliquant le même régime de prise en charge intégrale et de rémunération des professionnels. Cette solution, reposant sur la coadministration des deux vaccins, permettra de donner davantage de visibilité au dispositif, tout en profitant de gains d'efficience bienvenus.

L'inscription dans le droit commun de l'expérimentation « Handigynéco », à l'article 17 bis, constitue une déclinaison de la feuille de route en santé sexuelle. Cette mesure ciblée permettra d'améliorer l'accès aux soins gynécologiques des personnes en situation de handicap. Le Gouvernement a également souhaité porter une autre mesure dans le champ de la santé sexuelle, qui consiste à créer des centres de santé et de médiation en santé sexuelle, à l'article 17 quater. Ces centres ont fait l'objet d'une expérimentation, pendant plus de deux ans, qui s'est avérée probante en matière d'accès à l'offre pour les populations ciblées par la mesure. Les conditions d'organisation de ces centres soulèvent néanmoins un questionnement plus général sur la structuration de l'offre en santé sexuelle, en lien avec les centres gratuits d'information, de dépistage et de diagnostic (Cegidd), et sur les modèles des actions « d'aller vers », qui s'inscrivent ici dans une approche communautaire.

Plusieurs mesures adoptées par l'Assemblée nationale visent, par ailleurs, à améliorer l'accès des Français à des professionnels susceptibles de les prendre en charge.

Il nous est proposé, d'abord, de pérenniser la faculté des infirmiers de signer les certificats de décès, faisant actuellement l'objet d'une expérimentation. Nous avons soutenu, déjà, l'extension de cette expérimentation à l'ensemble du territoire national. D'après l'ordre, que nous avons entendu, il s'agit d'un franc succès. Je vous proposerai, en conséquence, de soutenir cette mesure en appelant le Gouvernement à engager les efforts de formation nécessaires.

Je vous inviterai également à adopter les dispositions supprimant la condition d'adressage dans le dispositif MonSoutienPsy. Celles-ci faciliteront l'accès des patients aux séances d'accompagnement psychologique prises en charge dans ce cadre. Là encore, des efforts devront toutefois être déployés pour convaincre les psychologues d'y participer et adapter le format des séances aux besoins constatés.

À l'article 15 bis, je vous proposerai de soutenir les dispositions visant à mieux encadrer l'activité des centres de soins non programmés. Si ces centres peuvent permettre d'améliorer sensiblement l'accès aux soins de premier recours, certains d'entre eux ont toutefois des pratiques tarifaires opportunistes ou une activité susceptible de déstabiliser localement celle des autres structures. Je vous soumettrai plusieurs amendements visant à préciser les conditions de cet encadrement directement dans la loi.

Je vous proposerai, en revanche, de supprimer l'article 17 septies, qui étend à vingt départements, contre six aujourd'hui, l'expérimentation de l'accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes en communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS). Cette expérimentation a débuté il y a quelques mois seulement, et son périmètre résultait d'un équilibre trouvé en commission mixte paritaire, lors de l'examen de la loi de 2023 portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé. Les CPTS, par ailleurs, n'offrent pas les mêmes garanties que d'autres structures en matière de coordination interprofessionnelle.

Enfin, comme chaque année, le PLFSS qui nous est transmis porte diverses mesures destinées à lutter contre les pénuries de médicaments, qui continuent de s'aggraver. Tel est l'objet de l'article 19. Je vous proposerai de soutenir la mesure, proposée par le Sénat l'année dernière, consistant à permettre au Gouvernement de rendre obligatoire le recours aux ordonnances conditionnelles non seulement en situation de rupture, mais également lorsqu'est identifié un risque de rupture ou une variation saisonnière de la demande. En revanche, je vous inviterai à supprimer les dispositions du texte qui étendent au même périmètre le recours à la dispensation à l'unité : cette mesure, refusée par les pharmaciens, n'est efficace ni dans le cas de traitements chroniques - par définition récurrents - ni dans celui des médicaments présentés sous forme pédiatrique ou injectable, qui concentrent pourtant une large part des difficultés d'approvisionnement.

En ce qui concerne la prise en charge, l'essentiel des mesures du PLFSS se situe précisément en dehors du texte, avec la proposition très controversée d'augmenter de 30 % à 40 % le ticket modérateur sur les actes des médecins et des sages-femmes. Cette évolution, qui relèverait du domaine réglementaire, pourrait dégager 1,1 milliard d'euros pour la branche maladie. Attachée à l'accès aux soins et à l'existence d'un système de sécurité sociale protecteur pour les malades, je ne puis soutenir totalement cette mesure, qui conduirait à une privatisation accrue du financement sur des actes pivots.

Toutefois, j'estime que, alors que la sécurité sociale rembourse une part toujours croissante des dépenses de santé, la question de la répartition de la charge avec les complémentaires santé ne doit pas être un sujet tabou. Celles-ci doivent prendre leur part, non pas uniquement sur la consultation du médecin, qui est au coeur de notre système de santé, mais sur d'autres postes de dépenses. Je salue donc la position de la ministre de la santé, qui s'est dite ouverte à étudier d'autres options ; je crois pouvoir affirmer que le Sénat se tient à sa disposition pour évoquer des mesures alternatives permettant un transfert de charges d'un niveau similaire.

Quelques mots, enfin, sur l'article 17 octies, qui prévoit une expérimentation de la prise en charge de tests visant à détecter la soumission chimique. Ces tests, dont le coût peut atteindre 1 000 euros, ne sont aujourd'hui remboursables qu'à condition qu'une plainte soit déposée. Cette solution n'est pas adaptée à la réalité de la situation des victimes potentielles, souvent en proie à une amnésie totale ou partielle. Les tests et également les analyses - je porterai un amendement en ce sens - devraient pouvoir être effectués et pris en charge en cas de doute, et les victimes orientées vers un dépôt de plainte, le cas échéant.

Vous l'avez compris, mes chers collègues, l'année 2025 constitue une première étape cruciale pour engager le redressement de nos comptes sociaux. La situation exige des choix politiques clairs et assumés, dans lesquels, j'en suis convaincue, le Sénat prendra sa part. Sur l'Ondam, il est impératif de décider la hausse des cotisations à la CNRACL sur une durée plus longue, sous peine d'asphyxier financièrement les établissements de santé au moment où se confirme la reprise d'activité, condition nécessaire au rééquilibrage progressif de leurs budgets.

Plus largement, le déséquilibre profond de la branche maladie appelle des mesures de soutien immédiates. À cet égard, nous appuyons la réflexion engagée autour d'une contribution de la branche autonomie pour participer au desserrement de la contrainte financière pesant sur la branche maladie. Je laisse le soin au rapporteur de la branche autonomie, Chantal Deseyne, de revenir sur ce point.

Avec ce PLFSS, le Gouvernement entend défendre un texte d'« action » et de « responsabilité ». Pour ce qui est de l'action, je crois que nous pouvons aller beaucoup plus loin, en travaillant sur la pertinence des soins et la responsabilisation du patient, en définissant des équilibres territoriaux pérennes entre la ville et l'hôpital, et en impulsant résolument une dynamique de prévention. S'agissant des responsabilités, le Sénat prendra les siennes pour participer au rétablissement de nos comptes sociaux, en contribuant à enrichir le débat et en étant force de proposition.

Mme Florence Lassarade. - Compte tenu du peu d'adhésion au vaccin contre le papillomavirus en milieu scolaire, la vaccination contre les méningocoques, dont on sait qu'il est nécessaire qu'une forte proportion de la population y ait recours pour qu'elle soit efficace, ne risque-t-elle pas de donner peu de résultats ? Pour le nourrisson, par exemple, la vaccination à 5 mois contre le méningocoque C a rencontré si peu de succès qu'il a fallu prévoir un rappel après l'âge d'un an. En définitive, est-ce dans le PLFSS que l'on doit aborder le sujet des vaccinations qui, outre le coût financier, représentent un enjeu d'abord humain ?

Mme Céline Brulin. - Il me semble déceler une contradiction dans le rapport qui nous a été présenté. En effet, si notre rapporteure conclut que l'année 2025 doit être une étape cruciale dans le redressement des comptes sociaux, elle a commencé son rapport en mettant en évidence le risque d'une surestimation des économies qui pourront être réalisées et de la difficulté à tenir la trajectoire de l'Ondam. Personne ne semble donc croire que les mesures proposées sont réellement de nature à redresser les comptes sociaux.

En revanche, si l'on considère la situation des établissements hospitaliers, et quel qu'en soit le type, chacun sait que la hausse des cotisations à la CNRACL, même lissée, ainsi que vous le suggérez, sur une durée de quatre ans au lieu de trois, ajoutée à l'inflation revient à faire obstacle à toute augmentation effective de leurs budgets, alors même qu'ils accumulent les déficits depuis plusieurs années. L'ampleur du phénomène actuel montre qu'il s'agit d'un problème structurel. Quant aux nombreuses mesures - elles peuvent apparaître légitimes - relatives à l'efficience, à la lutte contre la fraude, à la pertinence des prescriptions médicales ou à une meilleure dispensation des soins, elles ne me semblent pas à même de répondre aux difficultés que vivent de plus en plus les Français : ne pas trouver de médecin et faire face à des pénuries de médicaments.

Enfin, je n'ai pas bien compris la nature de votre position sur la hausse du ticket modérateur. Je garde à l'esprit qu'il s'agit d'une mesure d'ordre réglementaire, c'est-à-dire à la main du Gouvernement. Nous ne perdrons pas non plus de vue que l'an passé, nous avons examiné le PLFSS sans savoir si le Gouvernement déciderait, ou non, d'augmenter les franchises et les forfaits, ce qu'il a finalement fait. Pouvez-vous nous éclairer sur le sujet ? Cela paraît nécessaire au regard aussi bien du souci de transparence et de sincérité que nous partageons que de celui d'intéresser nos concitoyens à des débats dont les conséquences seront lourdes sur leur vie quotidienne.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. - Je remercie la rapporteure d'avoir insisté sur l'utilisation du DMP. Nous verrons ce que les médecins en feront et ce que la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) exigera d'eux. Cependant, il s'agit d'un outil indispensable, car trop d'actes redondants et non pertinents sont pratiqués. Il faut insister auprès de la ministre pour qu'il soit utilisé.

Avons-nous enfin l'estimation complète du montant des fraudes sociales à l'assurance maladie ? Il nous manquait toujours les chiffres concernant les établissements hospitaliers.

Mme Véronique Guillotin. - Je m'interroge sur les centres de santé sexuelle : ces structures sont-elles complémentaires de celles du planning familial ou s'agit-il d'une redondance ?

J'aimerais avoir des précisions sur les mesures liées au ticket modérateur, qui constituent l'un des points les plus crispants de ce texte.

Enfin, pourriez-vous donner quelques précisions techniques sur l'amendement relatif aux tests visant à détecter la soumission chimique ?

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Madame Lassarade, effectivement, la participation lors de la campagne de vaccination contre le papillomavirus au collège n'a pas été à la hauteur des espérances. En revanche, l'opération a eu un effet d'entraînement pour la médecine de ville et nous avons gagné 17 points de couverture vaccinale sur la tranche d'âge concernée. Nous pouvons espérer obtenir le même effet d'entraînement en introduisant la mesure permettant aux collégiens d'être vaccinés sans reste à charge et en milieu scolaire contre les infections invasives à méningocoques.

Madame Brulin, que faire si nous ne prenons pas de mesures, à part continuer de constater que le déficit se creuse ? Nous ne parvenons pas à nous remettre de la pandémie. Je le rappelais lors de mon intervention : entre 2019 et aujourd'hui, les dépenses de l'Ondam ont augmenté de 64 milliards d'euros. Pour autant, nous avons l'impression que ces montants ne seront jamais suffisants.

En ce qui concerne la pertinence des soins et les bonnes prescriptions, personne ne peut s'y opposer. Cette question renvoie chacun à sa responsabilité : le patient, les prescripteurs et les effecteurs. Je distingue ce sujet de celui de la difficulté d'accès aux soins, même si certaines mesures de lutte contre les redondances, grâce au DMP notamment, permettent aussi de libérer du temps médical.

Sur la question du ticket modérateur, qui intéressait Mme Brulin et Mme Guillotin, les discussions sont en cours avec le Gouvernement. D'un point de vue personnel, je n'étais pas favorable à une augmentation de 10 points du ticket modérateur sur les actes médicaux, mais je ne suis pas opposée à l'idée d'un transfert de charges aux complémentaires santé. Nous obtiendrons peut-être une solution intermédiaire. Cependant, la situation est telle qu'elle nous engage tous ; que faire après avoir dépensé tant de milliards supplémentaires pour l'Ondam ?

Monsieur Vanlerenberghe, je n'ai pas d'éléments supplémentaires sur la fraude dans les établissements hospitaliers.

En ce qui concerne les tests visant à détecter la soumission chimique, l'article vise à expérimenter une prise en charge par l'assurance maladie. Lors de leur audition, les responsables du Conseil national de l'ordre des médecins (Cnom) ont proposé d'inclure dans la prise en charge non seulement les tests, mais aussi des analyses complémentaires, effectuées par des laboratoires d'expertise toxicologique. Leur préconisation vise à faire en sorte que les tests et les analyses puissent avoir lieu avant le dépôt de plainte. L'amendement vise à suivre les recommandations du Cnom.

Enfin, le planning familial regroupe des structures associatives, qui peuvent être intégrées dans des structures hospitalières. Les centres de santé sexuelle visent certains publics, ceux de la population homosexuelle. À cet égard, je rappellerai l'objectif d'éradication du sida dans notre pays à l'horizon 2030 ; nous n'y sommes pas.

Mme Pascale Gruny, rapporteur pour la branche vieillesse. - Nous faisons face à une situation fortement dégradée des finances publiques, qui n'a pas été anticipée. Cette situation nous oblige et nous devons accompagner le Gouvernement dans ses efforts de redressement budgétaire, afin de ne pas laisser le déficit public s'aggraver davantage. Il y va de notre responsabilité envers les générations à venir.

Je suis particulièrement préoccupée par la tendance à l'augmentation du nombre de retraités, liée à l'arrivée à la retraite des baby-boomers, ainsi qu'à l'augmentation de l'espérance de vie.

Jusqu'en 2017, la branche vieillesse a été excédentaire de 2 milliards d'euros. Son déficit s'est depuis creusé et, selon les prévisions du Conseil d'orientation des retraites (COR), la part des dépenses de retraite dans le PIB s'établirait à 13,7 % en 2030, alors qu'elle s'élève à 13,4 % en 2023.

Hors Fonds de solidarité vieillesse (FSV), le déficit de la branche s'aggrave particulièrement cette année, s'élevant à 6,3 milliards d'euros, contre 2,6 milliards d'euros l'an passé. Cette augmentation tient principalement aux revalorisations de pensions de retraite versées par les régimes de base à la suite du choc inflationniste. Vous le savez, les retraites et les prestations d'assurance vieillesse sont revalorisées annuellement au 1er janvier, pour prendre en compte l'inflation de l'année précédente. Ainsi, elles ont été revalorisées de 5,3 % au 1er janvier 2024, ce qui a contribué à alourdir de 6,8 % les dépenses des régimes de base.

Face à cette dérive préoccupante du déficit de la branche, évalué à 13,6 milliards d'euros en 2027 dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, le Gouvernement propose un certain nombre de mesures visant à contenir les dépenses.

La première mesure figure à l'article 23 et décale au 1er juillet la date de revalorisation des pensions de retraite. Selon l'étude d'impact, cette mesure réduirait les dépenses de la branche vieillesse de 4 milliards d'euros et améliorerait son solde de 3 milliards d'euros. Elle aurait un double effet sur les pensions, qui seraient moins revalorisées en volume, mais également en valeur, compte tenu du contexte actuel de décélération de l'inflation. Selon les prévisions de la Commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS), le coefficient de revalorisation appliqué en janvier 2025 serait de 2,3 %, contre 0,9 % pour juillet 2025.

Afin de préserver les plus faibles revenus, cette mesure ne s'appliquerait pas aux prestations non contributives que constituent le minimum vieillesse et l'allocation de solidarité aux personnes âgées, qui s'élève à 1 012,02 euros par mois pour une personne seule et à 1 571,16 euros par mois pour un couple.

Si l'effort contributif doit être partagé par tous, notre commission a toujours eu à coeur de préserver le pouvoir d'achat des retraités les plus modestes, et tel est l'objet de l'amendement que je présenterai. Je souhaite que toutes les retraites soient revalorisées au 1er janvier 2025, à hauteur de la moitié de l'inflation, et que les pensions dont le montant est inférieur à celui du Smic - soit 1 490 euros brut - bénéficient d'une seconde revalorisation pérenne au 1er juillet. Pour ces petites retraites, le manque à gagner issu de cette revalorisation moindre sera ensuite compensé par un versement unique qui interviendra en juillet. Cet ajustement permettrait de préserver le pouvoir d'achat des retraités les plus vulnérables, tout en respectant notre objectif de réduction des dépenses.

La deuxième mesure améliorera le solde de la branche vieillesse de 2,7 milliards d'euros. Elle figure à l'article 6 et consiste en une refonte des allégements généraux de cotisations patronales. J'y suis favorable, toujours dans un objectif de redressement.

La troisième mesure ne figure pas dans le PLFSS, car elle relève du niveau réglementaire. Il s'agit de la hausse, en 2025, 2026 et 2027, du taux de cotisation des employeurs à la CNRACL à hauteur de 4 points par an, soit 12 points au total. Nous avons reçu, avec Mme la rapporteure générale, le président du conseil d'administration de la CNRACL et vous avez été nombreux à suivre son audition. Comme il nous l'a justement expliqué, cette caisse a procédé à de nombreux recrutements dans les années 1980 et a longtemps profité d'un ratio démographique plus favorable que ceux des autres régimes. Or les personnels alors recrutés arrivent aujourd'hui à la retraite et le ratio démographique connaît une tendance à la baisse. Pour mémoire, il était de 1,4 en 2023 et serait de 0,8 en 2040, selon les prévisions. La situation de la CNRACL est aujourd'hui très préoccupante : sa dette financière représente son deuxième poste de dépenses puisque 144 millions d'euros sont consacrés aux frais financiers liés aux intérêts.

Cette hausse du taux de cotisation pèsera lourdement sur les finances publiques de nos collectivités et des hôpitaux, qui sont déjà exsangues. En 2023, 70 % des établissements hospitaliers étaient en situation de déséquilibre financier. Je souhaite aider la CNRACL à retrouver le chemin de l'équilibre et m'associe à l'amendement de Mme la rapporteure générale, qui vise à étaler cette hausse sur quatre années, au lieu de trois, et à augmenter de 3 points par an le taux de cotisation, au lieu de 4. Je forme également le voeu que la dette de la CNRACL puisse être rachetée à l'avenir par la Cades.

Parmi les mesures de redressement de la branche vieillesse, j'évoquerai enfin la réforme des retraites, qui produira son plein effet en 2032. Selon les prévisions, elle permettrait d'augmenter de 8 milliards d'euros le solde de la branche vieillesse des régimes obligatoires de base en 2028. Cette réforme était nécessaire, n'en déplaise à ses détracteurs. Je crains toutefois qu'elle ne soit pas la dernière, compte tenu de la hausse projetée du déficit de la branche vieillesse à l'horizon 2028.

Je vais désormais vous parler d'un autre sujet important porté par le PLFSS pour 2025, qu'est la réforme du mode de calcul de la retraite de base des non-salariés agricoles. La loi du 13 février 2023 visant à calculer la retraite de base des non-salariés agricoles en fonction des vingt-cinq années d'assurance les plus avantageuses, portée par le député Julien Dive et adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale comme par le Sénat, prévoyait que le mode de calcul de la retraite de base des non-salariés agricoles soit réformé au 1er janvier 2026. Un rapport a été rendu le 30 janvier dernier par l'inspection générale des affaires sociales (Igas) et le Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER), qui préconisait différents scenarii pour cette réforme.

La retraite de base des non-salariés agricoles est complexe : elle se compose d'une part de retraite forfaitaire, dont le montant est identique pour une même durée d'assurance, et d'une part de retraite proportionnelle, calculée selon un barème de points qui est particulièrement redistributif pour les faibles revenus. Ces deux parts avaient vocation à fusionner et les cotisations qui les financent à être refondues.

Toutefois, nous avions défendu une solution alternative à celle qui est retenue ici, dans la proposition de loi pour améliorer les retraites agricoles déposée par le président Mouiller, dont j'avais été rapporteur et qui avait été adoptée par le Sénat le 19 mars dernier. Nous souhaitions que la retraite de base unifiée soit intégralement calculée sur un système par points, qui prendrait en compte les vingt-cinq meilleures années de points. Le Gouvernement propose ici un autre scénario, selon lequel la retraite de base unifiée serait calculée sur les vingt-cinq meilleures années de revenus, comme c'est le cas pour le régime général et les régimes alignés.

Cette approche a le mérite de faire converger les régimes de retraite et d'augmenter la pension des polypensionnés, qui représentent 85 % des non-salariés agricoles. Nous avions une inquiétude quant au sort des monopensionnés, qui bénéficiaient de l'effet redistributif du barème de points. Cependant, nous sommes rassurés par le relèvement du plafond d'écrêtement de la pension majorée de référence, qui passerait cette année même de 1 073 euros brut au niveau du minimum contributif, soit 1 387 euros brut. Cette population bénéficiera ainsi de l'effet de rattrapage des minima de pension. Enfin, si la hausse de cotisation engendrée par l'alignement des taux et de l'assiette minimale sur celui des travailleurs indépendants sera élevée pour les non-salariés agricoles exerçant leur activité à titre secondaire, ces derniers se verront ouvrir en contrepartie de nouveaux droits, et bénéficieront désormais des minima de pension.

Cette réforme, prévue aux articles 3 et 22, semble poursuivre notre objectif d'augmentation du niveau des pensions de retraite des non-salariés agricoles, tout en améliorant le financement de ce régime par des cotisations qui seront plus élevées. Je souhaite que nous l'adoptions, mais j'insisterai sur un point. Le Parlement a voté l'entrée en vigueur de cette réforme au 1er janvier 2026, ce qui correspond à une attente forte du monde agricole. Or l'article 22 prévoit que les pensions liquidées entre le 1er janvier 2026 et le 31 décembre 2027 seront calculées sur le droit actuellement en vigueur et qu'un recalcul sera effectué au 1er janvier 2028, selon les nouvelles dispositions. Il s'agirait ainsi d'une application rétroactive au 1er janvier 2026. Le Gouvernement indique désormais que le système informatique de la Mutualité sociale agricole (MSA) serait finalement en mesure de calculer les retraites selon les vingt-cinq meilleures années d'assurance au 1er janvier 2026. Je souhaite que cet objectif soit tenu.

Le PLFSS est encore riche de mesures pour la branche vieillesse. La situation financière est fragile et je sais pouvoir compter sur votre sens des responsabilités. Néanmoins, nous garderons à coeur la protection de nos citoyens les plus vulnérables.

Je vous remercie.

Mme Monique Lubin. - Ainsi, la mesure annoncée par M. Wauquiez nous arrive par le biais de votre amendement. Je voudrais que tout le monde se rende bien compte qu'elle constitue une belle arnaque ! Si le Gouvernement avait respecté la règle, il aurait augmenté les retraites au 1er janvier, à hauteur de l'inflation, soit environ 2 %. Cependant, il avait décidé de reporter l'augmentation au 1er juillet, date à laquelle l'inflation serait moindre. Finalement, Laurent Wauquiez a annoncé qu'il avait trouvé un arrangement avec le Gouvernement - on ne sait pas trop à quel titre ! - et que les pensions seraient bien revalorisées au 1er janvier, mais seulement à hauteur de la moitié de l'inflation. Pour tous les retraités qui perçoivent plus que le Smic, même très légèrement, la revalorisation s'arrêtera là. Les retraites augmenteront donc seulement d'environ 1 % et la prochaine revalorisation sera calculée sur cette base. Un petit rattrapage est prévu au mois de juillet pour les retraites inférieures au Smic.

Nous ne serons jamais d'accord sur les retraites, mais continuerons d'en débattre. Vous dites, madame le rapporteur, que nous avons un problème de dépenses. Cependant, nous considérons qu'il s'agit plutôt d'un problème de recettes. En effet, les dépenses sont connues. Le COR le dit bien, l'effet de masse de l'arrivée à la retraite des gens nés juste après la guerre est passé. Par ailleurs, nous connaissons les effets de l'allongement de la durée de la vie.

En ce qui concerne les non-salariés agricoles, nous sommes d'accord avec les mesures votées par le Sénat.

M. Daniel Chasseing. - L'espérance de vie des hommes atteint aujourd'hui 79 ans et celle des femmes 85 ans. En 1980, ces chiffres s'élevaient respectivement à 70 et 78 ans. De plus, nous comptions alors 4 millions de retraités, alors qu'ils étaient 17 millions en 2020 et qu'ils seront 21 millions en 2040.

La retraite à 64 ans doit s'accompagner d'un consensus avec les partenaires sociaux, pour mettre en place des retraites progressives et choisies, en tenant compte des carrières longues et pénibles. Le COR prévoit une dégradation des retraites. De plus, la réforme menée par François Hollande et Marisol Touraine prévoyait le passage à 43 années de cotisation ; il s'agissait non pas de punir les travailleurs, mais de répondre à une difficulté annoncée de paiement des retraites.

Selon l'article 23, la revalorisation des pensions devrait avoir lieu au 1er juillet. J'ai rencontré des membres de syndicats de retraités, qui ne conçoivent pas que les retraites inférieures au Smic ne soient pas revalorisées en raison des difficultés rencontrées. L'amendement proposé va dans leur sens et je m'y associe.

La hausse du taux de cotisation à la CNRACL à hauteur de 12 points paraît compliquée pour les collectivités locales et les hôpitaux. Il serait bon de trouver une solution. Les hôpitaux sont en difficulté, mais je rappelle que nous avons augmenté d'environ 1 milliard d'euros les salaires, qui n'avaient pas augmenté depuis 2012.

Mme Corinne Bourcier. - La situation de notre système de protection sociale est grave et il faut avoir le courage de prendre des mesures d'économie, qui ne pourront satisfaire tout le monde. L'effort doit être partagé par tous : actifs et retraités. Avant, on prenait sa retraite bien plus tard, alors que l'espérance de vie était bien plus basse. Et puis la retraite a été fixée à 60 ans et nous avons connu une hausse de l'espérance de vie. Il était donc nécessaire de réformer. Nombre de retraités ont un niveau de vie assez confortable. Je ne suis pas favorable à ce que l'effort pèse sur les petites retraites, dont beaucoup de bénéficiaires connaissent déjà des difficultés. Je soutiendrai toutes les mesures qui visent à ne pas les impacter.

M. Alain Milon. - L'arnaque date du temps de M. Hollande, puisqu'il y avait alors une sous-indexation nette des retraites...

Mme Laurence Rossignol. - Il n'y avait pas d'inflation !

M. Alain Milon. - Du temps de M. Hollande, la durée de cotisation a été allongée à 43 ans. En conséquence, nos concitoyens partaient à la retraite à 63 ans et huit mois. La vraie arnaque est là, et elle a été soutenue par nos collègues de la gauche.

Mme Cathy Apourceau-Poly. - Je souscris à l'idée que l'effort doit être partagé par tous et nous proposerons des mesures visant à augmenter les recettes, pour nous assurer que ce soit bien le cas. Pour l'instant, les efforts sont surtout demandés aux salariés, aux retraités et aux personnes les plus fragilisées.

Nous vivons de plus en plus vieux, mais les gens veulent vieillir en restant en bonne santé. Malheureusement, l'ajout d'années de travail supplémentaires a un impact sur la santé, et je pense notamment à celles et ceux qui effectuent les métiers les plus pénibles.

Enfin, je rappelle que l'ensemble des retraités seront touchés par l'indexation proposée et qu'ils perdront tous du pouvoir d'achat.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. - En ce qui concerne la revalorisation, je me réjouis qu'on ne touche pas aux petites retraites. D'ailleurs, je n'aurais pas vu d'inconvénient à ce que les retraites les plus élevées ne soient pas revalorisées. Il y avait des moyens de le faire, mais on a préféré un système un peu baroque. Je ne reviendrai pas sur l'escroquerie intellectuelle de M. Wauquiez : 2 % au 1er juillet ou 1 % au 1er janvier, puis en juillet, c'est la même chose.

Mme Lubin explique que nous avons un problème de recettes. Il existe trois grands régimes de retraite : celui du privé, celui du public et celui des libéraux. Le dernier est à l'équilibre et celui du privé pourrait l'être, notamment en rapprochant la complémentaire Agirc-Arrco, qui est très bien gérée, du régime de base. En ce qui concerne le régime des salariés du public, il n'y a pas de recettes. En effet, le système est largement déficitaire puisque nous comptons 30, voire 40 milliards d'euros de déficit de cotisations, que l'État finance avec de la dette. De plus, il n'est pas question d'allégements généraux, qui ne concernent que les entreprises. J'ignore donc où vous pouvez trouver des recettes pour le public, si ce n'est au travers de l'impôt.

Mme Silvana Silvani. - En ce qui concerne la revalorisation, je voudrais rappeler que les retraites ne sont pas des allocations. Les retraités ont travaillé et cotisé. Les mots « arnaque » et « escroquerie » ont été prononcés ; j'ajouterai que toucher aux retraites relève du vol.

Concernant la CNRACL et la proposition de Mme Gruny d'étaler les points supplémentaires, il s'agirait en fin de compte de la même somme. Cependant, je souscris à l'idée que la Cades entre en jeu. Mais pourquoi attendre ?

Enfin, j'en viens à la réforme des retraites, dont vous dites qu'elle devrait être effective en 2032. Nous commençons à entendre une petite musique, selon laquelle il faudrait de nouveau réformer, ce qui démontrerait que la réforme n'a pas produit les effets escomptés.

Mme Pascale Gruny, rapporteur. - Madame Lubin, vous devriez être ravie puisque nous revenons à la date du 1er janvier pour la revalorisation ! Par ailleurs, les retraites ont été revalorisées de 5,3 % l'an dernier, ce qui n'est pas arrivé pour la plupart des salaires. Il n'y a pas d'argent magique. La revalorisation aura lieu cette année au 1er janvier et au 1er juillet. Nous reviendrons ensuite à une revalorisation pérenne au 1er juillet.

Concernant la démographie, nous comptons moins d'actifs et pouvons nous inquiéter pour les générations futures, car la natalité est en berne.

Monsieur Chasseing, nous avons réformé les retraites dans le cadre d'une LFSS. Nous avions des amendements sur des sujets tels que les retraites progressives ou les carrières longues, que nous n'avons pas pu faire passer, car les mesures n'étaient pas financées. Nous espérons pouvoir revenir sur ces sujets.

Monsieur Milon, vous évoquez la réforme de M. Hollande, mais nous pouvons aussi mentionner celle des 35 heures, qui a entraîné une baisse du temps de travail et du financement de la sécurité sociale ; nous ressentons toujours son incidence.

Quand j'ai commencé à travailler, la retraite était fixée à 65 ans et les gens n'étaient pas en très bonne santé quand ils arrêtaient de travailler. La prévention reste essentielle pour que les gens partent à la retraite en bonne santé.

En ce qui concerne l'intervention de la Cades pour la CNRACL, il faut voter une loi organique, ce qui explique que ce changement ne puisse advenir tout de suite.

M. Olivier Henno, rapporteur pour la branche famille. - Je ne citerai que deux chiffres pour commencer : 2,9 milliards d'euros - le montant de l'excédent de la branche famille en 2021 - et 0 - le montant de son solde en 2025. La disparition de l'excédent a eu lieu en quatre ans, alors même qu'aucune réforme structurelle d'ampleur n'a été mise en place pendant la période.

Même si les prévisions pluriannuelles de la branche laissent entrevoir un retour à l'excédent budgétaire dans les prochaines années, je m'interroge sur sa capacité à répondre aux nombreux défis auxquels elle devra faire face.

Pour 2025, l'objectif de dépenses de la branche famille est fixé à 59,7 milliards d'euros, ce qui représente une hausse de 3,1 %. Les recettes étant estimées à 59,7 milliards d'euros, le solde serait au strict équilibre. Pour rappel, la LFSS de 2024 prévoyait encore un excédent de 400 millions d'euros pour 2025.

Ce dynamisme des dépenses n'est pas tant la conséquence de nouvelles réformes ambitieuses que du financement nécessaire des dispositions prises lors des précédentes LFSS, parmi lesquelles l'extension du complément de libre choix du mode de garde (CMG) aux familles monoparentales, pour la garde de leur enfant de 6 à 12 ans, ainsi que des effets de l'indexation des prestations légales sur l'inflation. Dans le contexte budgétaire très contraint, je salue cet effort financier, même si je serai attentif à ce que les arbitrages réglementaires qui seront pris en 2025 permettent d'assurer les financements nécessaires à la mise en oeuvre de la réforme.

Ce dynamisme résulte aussi d'un effort conséquent quant aux prestations extralégales finançant les accueils collectifs. Le Fonds national d'action sociale (Fnas) de la branche augmenterait ainsi ses dépenses de 9,9 % en 2025, soit une augmentation de 700 millions d'euros, en lien avec la mise en place du service public de la petite enfance. Avec nos collègues Pascale Gruny et Laurent Burgoa, nous avons récemment entendu les représentants des associations d'élus communaux : tous ont souligné le travail essentiel mené par les caisses d'allocations familiales (CAF) dans les territoires, aussi bien en termes d'accompagnement que d'aide à l'investissement et de soutien à l'ingénierie de nos collectivités. Ce n'est pas forcément le cas du soutien de l'État, qui prévoit à ce stade une enveloppe de 86 millions d'euros, seulement pour compenser les nouvelles compétences obligatoires dévolues aux communes à compter du 1er janvier 2025. D'aucuns estiment qu'il est nécessaire que cette enveloppe soit revue à la hausse, mais il s'agit d'une question que nous examinerons dans le cadre du projet de loi de finances.

J'en reviens à la trajectoire financière de la branche, qui n'est pas rassurante. Selon le Gouvernement, le solde de la branche sera en déficit de 500 millions d'euros en 2026 et en excédent de 200 millions d'euros à peine en 2027. Réduit artificiellement de 2 milliards d'euros en 2022, avec le transfert du financement des indemnités journalières du congé paternité et du congé maternité post-naissance, ce solde ne donne pas les marges de manoeuvre suffisantes pour les réformes attendues par les professionnels et les familles.

J'ai déjà eu l'occasion de dire notre déception à l'égard de ce PLFSS, qui ne comporte aucun article « famille », à l'exception de l'objectif de dépenses. J'ai tout de même souhaité déposer deux amendements portant articles additionnels, sur des sujets précis mais qui ne sont pas sans importance.

Afin de lutter contre les impayés toujours nombreux que rencontrent les assistantes maternelles, j'ai souhaité prévoir dans la loi la suspension immédiate du versement du CMG au foyer qui ne s'acquitte pas du salaire de l'assistante maternelle ou de la personne employée à domicile pour une garde d'enfant. Il s'agit également de rendre obligatoire, pour l'employeur, l'usage du dispositif d'intermédiation « Pajemploi + » en cas d'impayé, avant de pouvoir bénéficier à nouveau du CMG. Enfin, la désactivation de « Pajemploi + » ne pourrait se faire qu'après accord mutuel de l'employeur et de l'employé. Ces dispositions ont le même objet : sécuriser la profession d'assistante maternelle et renforcer son attractivité alors que, selon certaines projections, près de 40 % d'entre elles pourraient partir à la retraite d'ici à 2030.

Le second amendement prévoit que le Gouvernement fixe chaque année le plafond limitant le tarif horaire que les microcrèches peuvent pratiquer afin que les familles puissent bénéficier du CMG « structure ». Depuis 2016, ce plafond est fixé à 10 euros par heure pour les microcrèches dite « Paje », ce qui ne correspond pas à la réalité de l'évolution du coût de l'accueil en crèche, notamment du fait de l'inflation. Ce défaut d'actualisation peut également exercer une pression sur les prix, qui serait préjudiciable à la qualité de l'accueil en crèche. À titre de comparaison, dans son barème national des aides aux partenaires pour 2024, la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) fixe le prix moyen horaire des crèches financées par la prestation de service unique à 11,70 euros de l'heure. Cette évolution ne remettrait pas en question les travaux en cours menés par le Gouvernement pour clarifier le périmètre de la tarification et notamment la question des « frais annexes », souvent facturés aux parents et non intégrés dans le tarif maximal, qui viennent alourdir le reste à charge des familles.

Enfin, j'interrogerai le Gouvernement en séance sur ses intentions concernant la réforme du tiers payant du CMG « structure », qui bénéficie aux familles recourant à une microcrèche ou à un prestataire de garde à domicile. Cette réforme a été adoptée dans la LFSS de 2019, pour une application initiale en 2022. Cependant, en 2022, le Gouvernement a demandé un premier report à 2024, arguant de difficultés techniques. L'an dernier, il nous a été demandé de différer à 2026 l'entrée en vigueur de cette réforme, sans étude d'impact ni précision supplémentaire. Or, lors de son audition devant notre commission, le directeur général de la Cnaf a indiqué que l'intention de la Caisse était « plutôt de ne pas mettre en oeuvre la réforme très complexe du CMG tiers payant ». Des explications sont nécessaires quant à l'application de cette réforme votée par le Parlement et attendue par les familles et les établissements d'accueil du jeune enfant.

Dans ce contexte, l'absence de mesures nouvelles doit être mise à profit pour entamer ou reprendre les travaux sur les réformes structurelles nécessaires à la relance de la natalité dans notre pays : mise en place du service public de la petite enfance, création d'un véritable congé de naissance, réforme du financement des établissements d'accueil du jeune enfant ou encore retour à l'universalité des allocations familiales. Les chantiers d'ampleur et les réformes attendues ne manquent pas.

La politique familiale n'est pas et ne doit pas être une simple variable d'ajustement des politiques sociales de notre pays. Bien qu'essentielles, les revalorisations automatiques de prestations légales et des efforts financiers de la Cnaf ne suffisent pas à faire une politique familiale. Il faut mettre en place un plan d'action en faveur de toutes les familles, y compris de celles des classes moyennes qui, comme le rappelle la Cour des comptes dans son rapport 2024 sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, sont exclues par les seuils de ressources des barèmes, sans disposer toutefois des ressources nécessaires pour satisfaire leur désir d'enfants.

En effet, concernant la natalité, notre pays se trouve sur une trajectoire inquiétante. En 2023, le nombre de naissances était inférieur de près de 20 % au niveau de 2010 et, l'indice conjoncturel de fécondité s'établissait à 1,68 enfant, ce qui ne s'était presque jamais vu depuis la Seconde Guerre mondiale. En 2020, une étude de l'Union nationale des associations familiales (Unaf) évaluait le « désir d'enfants » des Françaises et des Français à 2,39 enfants. Il est temps de mettre en oeuvre les conditions permettant de répondre à cette attente.

Mme Laurence Rossignol. - Je vous félicite, monsieur le rapporteur, d'avoir réussi à faire un rapport sur la branche famille de ce PLFSS, qui est sans ambition et muet. Cependant, elle résume et incarne le bilan des gouvernements qui se succèdent depuis l'élection d'Emmanuel Macron : ils ont réussi à rendre quasi déficitaire une branche famille excédentaire. C'est à l'image de ce qu'ils ont fait à la France.

Concernant la mise en place du CMG jusqu'à 12 ans pour les familles monoparentales, il nous faudra effectivement être vigilants. Il serait bien que le Gouvernement ne la retarde pas davantage en faisant traîner les décrets d'application.

Je suis perplexe quant au service public de la petite enfance. Les 86 millions d'euros prévus ne sont accompagnés d'aucune piste sérieuse, alors que nous avons découvert que la présence des structures privées à but lucratif pour l'accueil des jeunes enfants est délétère pour la qualité d'accueil. L'absence d'argent et la compétence obligatoire entraînent des délégations de service public (DSP) aux moins-disants, ce qui n'est pas acceptable pour l'accueil des jeunes enfants. Nous avons un désaccord profond sur la manière dont ce service public est envisagé par le Gouvernement et sur les moyens de financement prévus, qui ne sont pas suffisants.

Par ailleurs, la majorité de cette assemblée est enfin dans la majorité gouvernementale. Depuis des années, je vous écoute, lors de nos débats, manifester de grandes appétences pour une vraie politique familiale, qui soit susceptible de faire remonter le taux de natalité. Je m'attendais donc à voir mise en oeuvre cette politique, mais je suis déçue, car le PLFSS ne comporte vraiment pas grand-chose en la matière.

Mme Silvana Silvani. - Nous constatons une absence totale de perspective et de projet pour la branche famille. De plus, les chiffres annoncés laissent présager que la branche sera confrontée, dès l'année prochaine, à la même problématique que les autres branches : il faudra se demander comment faire des économies pour résorber le déficit.

Néanmoins, les propositions formulées à la fin de votre intervention sont intéressantes, porteuses de développements et d'espoir ; il est dommage qu'il s'agisse seulement d'une perspective.

Je vous rejoins sur les 86 millions d'euros : rapportée à l'ensemble des communes à même de prendre en charge ces questions, la somme est dérisoire, presque insultante. Elle viendra aussi alourdir le budget des communes. Je regrette que l'accompagnement des communes ne soit pas évoqué dans le cadre de ce transfert de compétences, notamment en termes de formation des élus à la prise en charge, qui n'est pas anodine quand il s'agit de petite enfance. Je regrette aussi que nous n'ayons pas tiré les leçons des pratiques du secteur privé.

Vous l'avez signalé, il n'y a toujours rien sur le congé parental.

Enfin, je vous remercie d'avoir parlé des assistantes maternelles, de leurs conditions de travail et de leur rémunération. En général, les professionnels sont les grands absents du PLFSS.

M. Olivier Henno, rapporteur. - Madame Rossignol, la période 2012-2017 n'a pas été la plus féconde en matière de politique familiale, notamment pour les classes moyennes, en raison de la remise en cause de l'universalité des allocations familiales. De plus, ce PLFSS a été écrit en quinze jours et ne peut offrir une occasion de revisiter les chantiers qui en ont besoin.

Dans les années à venir, nous devrons mettre en oeuvre le service public de la petite enfance, qui est attendu par de nombreuses personnes souhaitant avoir des enfants et de nombreuses familles ; il s'agira d'un défi.

Mme Chantal Deseyne, rapporteur pour la branche autonomie. - En dépit d'un contexte budgétaire très contraint, ce PLFSS préserve la branche autonomie. L'objectif de dépenses pour 2025 s'élève à 42,4 milliards d'euros, soit une hausse de 6 % par rapport à l'année 2024. Cette trajectoire intègre une hausse de 4,7 %, à champ constant, du sous-objectif national de dépenses d'assurance maladie relatif aux établissements et services médico-sociaux. Au regard de l'évolution globale de l'Ondam fixée à 2,8 %, l'effort consenti en faveur de la branche autonomie n'est pas mince.

La hausse des dépenses devrait permettre de financer à la fois la montée en charge de mesures récentes et le déploiement de mesures nouvelles. Celles-ci n'ont pas de traduction dans le PLFSS, car elles relèvent du domaine réglementaire, mais le Gouvernement les a détaillées dans l'annexe 7.

Pour ce qui relève du sous-Ondam médico-social, l'objectif de dépenses augmente de 1,9 milliard d'euros, dont 1,2 milliard d'euros venant financer des mesures nouvelles.

Certaines mesures récentes devraient monter en charge. Je pense notamment aux revalorisations salariales sur les nuits, jours fériés et dimanches, et aux réformes portant sur le domicile - tarification des services de soins infirmiers, création de services autonomie et développement de solutions de répit pour les familles.

Par ailleurs, 380 millions d'euros seront fléchés vers le recrutement de 6 500 professionnels en Ehpad, et 270 millions d'euros vers le déploiement de 15 000 nouvelles solutions médico-sociales pour les personnes en situation de handicap. Des moyens seront également alloués au financement de l'expérimentation menée dans les Ehpad, à hauteur de 160 millions d'euros, concernant la fusion des sections soins et dépendance.

Enfin, 140 millions d'euros sont provisionnés afin de compenser la hausse de 4 points des cotisations versées par les employeurs territoriaux et hospitaliers à la CNRACL. Sur ce point, je partage l'inquiétude des employeurs publics. L'augmentation des cotisations versées par les établissements sociaux et médico-sociaux à la CNRACL, estimée à 375 millions d'euros, ne sera compensée qu'à hauteur de 40 %. Les établissements, à défaut de creuser encore davantage leur déficit, pourraient choisir de répercuter cette hausse sur de moindres recrutements.

En dehors du périmètre du sous-Ondam, d'autres mesures devraient participer à la hausse des dépenses de la branche autonomie.

D'une part, le Gouvernement compte mettre en place un fonds de 140 millions d'euros pour accompagner la transformation des établissements. Ces moyens seront alloués à la rénovation des Ehpad, au développement de l'habitat intermédiaire, au soutien à l'innovation, à l'appui à la transition écologique et aux Ehpad ultramarins. En revanche, le Gouvernement n'envisage pas, à ce stade, de reconduire le fonds d'urgence de 100 millions d'euros destiné aux établissements et services médico-sociaux en difficulté. Si nous pouvons concevoir que ce soutien doit demeurer exceptionnel, et que les efforts doivent se concentrer sur des mesures structurelles, nous devrons rester vigilants concernant la situation financière toujours très critique de nombreux établissements et services.

D'autre part, la hausse des dépenses accompagnera la montée en charge d'autres mesures récentes liées au renforcement de l'aide à domicile. Cela concerne notamment le tarif plancher applicable aux services d'aide à domicile, le déploiement de la dotation qualité et la mise en place d'un temps dédié au temps social.

Conformément à la loi sur le bien vieillir, la branche autonomie déploiera, dès 2025, une aide financière de 100 millions d'euros afin de permettre aux départements de soutenir la mobilité et le travail partenarial des aides à domicile.

Il convient d'admettre, après avoir dressé le détail des financements alloués à l'autonomie pour l'année 2025, qu'un effort est consenti. Pour autant, notre vigilance concernant les perspectives financières de la branche doit demeurer intacte. En effet, les prévisions du Gouvernement se dégradent. La dernière LFSS prévoyait, pour l'année 2025, un solde positif pour la branche autonomie. Cet excédent devait ensuite s'éroder progressivement pour atteindre l'équilibre en 2027. Le présent PLFSS est bien plus pessimiste : il anticipe un déficit de 400 millions d'euros dès 2025, puis une détérioration continue du solde pour atteindre moins 2,5 milliards d'euros en 2028. Dans le même temps, comme vous le savez, les établissements et les services médico-sociaux font face à d'importantes difficultés financières. Les départements, eux aussi, sont exsangues financièrement et leur politique sociale en pâtit.

Or, et ce constat est sans appel, la branche autonomie devra répondre, à très court terme, à des besoins de financement massifs et incompressibles. Je ne m'étendrai pas sur ces besoins que notre commission connaît déjà très bien.

Le vieillissement de la population produira ses effets les plus concrets d'ici à quelques années. Dès 2030, la génération du baby-boom passera la barre des 85 ans. Cela nous laisse peu de temps pour restructurer l'offre de services et d'hébergement, réussir le virage domiciliaire et faire naître des vocations pour répondre aux besoins de recrutement.

Dans le champ du handicap également, le secteur espère des réformes structurantes. Au-delà des enjeux de l'attractivité des métiers et de la réforme de l'aide à domicile, les attentes se concentrent en grande partie sur le remboursement intégral des fauteuils roulants, qui avait été annoncé par le précédent gouvernement. Sur ce point, les concertations sont toujours en cours, et le ministre des solidarités espère arriver à un accord avant la fin de l'année.

Face à cet état des lieux, il nous appartient de proposer des solutions. Nous devons faire oeuvre de pragmatisme. Sans ressources nouvelles, il ne sera pas possible de répondre aux besoins identifiés. J'estime que la mise en place d'une contribution de solidarité par le travail, se traduisant par sept heures annuelles de travail non rémunéré, serait une première solution. Sans peser sur le coût du travail, elle mettrait chaque travailleur à contribution pour une cause qui nous concerne tous. Cette mesure rapporterait près de 2,5 milliards d'euros à la branche autonomie. Contrairement à ce que j'ai pu lire ou entendre, la suppression d'un jour férié n'est pas envisagée. Il s'agit bien d'une contribution par le travail et, à mes yeux, cela répond à la définition de la solidarité : donner un peu de soi et de son temps.

Une partie de ces nouvelles recettes pourrait utilement abonder la branche maladie pour mener à bien la réforme de la prise en charge des fauteuils roulants. En effet, il semble justifié que la branche contribue au remboursement des aides techniques destinées aux personnes en situation de handicap, mais il appartiendra au Gouvernement d'en décider.

Si la mise en place de la contribution de solidarité par le travail venait à être adoptée par le Parlement, celle-ci n'épuiserait pas la question du financement. Nous devrons poursuivre notre réflexion, notamment sur la généralisation d'une assurance dépendance obligatoire, et ne s'interdire aucune piste.

J'en viens maintenant au contenu de ce PLFSS qui, en dehors de l'objectif de dépenses de la branche, ne présente qu'un seul article dans le champ de l'autonomie. L'article 21 propose d'ajuster les paramètres de l'expérimentation relative au financement des Ehpad et des unités de soins de longue durée (USLD). Pour rappel, il s'agit, dans les départements volontaires et pour une durée de quatre ans, de fusionner les sections de financement soins et dépendance sous l'égide des agences régionales de santé (ARS). Le Gouvernement propose d'augmenter le nombre de départements participants de 20 à 23, et de repousser la date limite de candidature afin de prendre en compte les dossiers déposés tardivement. Les modalités de la rétro-compensation de recettes versée par les départements à la sécurité sociale sont, par ailleurs, précisées.

L'année dernière, le Sénat s'était prononcé en faveur de cette expérimentation dans un double souci de simplification du régime de financement des Ehpad et de réduction des inégalités territoriales. La quasi-totalité des acteurs auditionnés dans le cadre de ce PLFSS ont renouvelé leur soutien à cette expérimentation, et appelé à une généralisation rapide.

La hausse du nombre de départements appelés à participer à l'expérimentation est donc une bonne nouvelle, même si quelques départements volontaires devront être écartés, le Gouvernement faisant état de 27 candidatures. Toutefois, cette réforme est très attendue par le secteur, déjà convaincu de son utilité, et il n'apparaît pas souhaitable de faire cohabiter deux systèmes de financement différents sur une aussi longue période, au risque d'accentuer les inégalités territoriales. Je propose donc d'adopter un amendement visant à réduire la durée de l'expérimentation de quatre à deux ans.

Si ce projet de loi est maigre en nouvelles mesures, nous pouvons lui donner une tout autre envergure en adoptant la contribution de solidarité par le travail. Par ailleurs, la question de l'autonomie occupera notre commission dans les prochains mois. Avec Marie-Pierre Richer et Corinne Féret, nous ferons le bilan de la loi de 2005 sur le handicap, ce qui nous donnera l'occasion de formuler des recommandations. Dans le domaine du grand âge, à défaut d'un projet de loi, notre commission saura être force de proposition pour permettre au pays d'affronter plus sereinement le défi du vieillissement.

Mme Corinne Féret. - Madame le rapporteur, nous ne faisons pas la même lecture de ce PLFFS. Le rapport souligne une augmentation des dépenses. Je rappelle que la plupart de ces dépenses sont prévues par la loi ; je pense notamment aux applications liées à la loi sur le bien vieillir. L'aide de 100 millions d'euros destinée aux départements concerne le volet mobilité et les salariés qui interviennent à domicile.

Si l'on applique la loi, un manque évident apparaît : l'article 10 de la loi sur le bien vieillir. Celui-ci indiquait que, d'ici au 31 décembre 2024, serait adoptée une loi de programmation permettant de financer la lutte contre le « mur du vieillissement » de la population ; rien, dans ce budget, ne va en ce sens.

Le recrutement de 6 500 personnes pour intervenir auprès des personnes âgées est très insuffisant. Je rappelle que, dans un premier temps, il était prévu de créer 50 000 emplois à l'horizon 2027 ; on a reporté l'échéance à 2030. Dans ce PLFSS, nous sommes très loin de l'engagement pris.

De la même façon, le fonds d'urgence attribué aux départements n'est pas renouvelé. Aucun financement n'est prévu pour accompagner les départements et les établissements accueillant des personnes en perte d'autonomie. Tout le monde sait que les Ehpad se trouvent actuellement en difficulté, mais il n'est rien proposé dans ce PLFSS.

La loi sur le grand âge n'apparaît pas non plus. Cela aurait pu être une loi-cadre posant un engagement du Parlement, mais rien n'est précisé sur le sujet.

Vous proposez la création d'une contribution de solidarité par le travail. Autrement dit, une journée travaillée gratuitement. Auparavant, il s'agissait de travailler plus pour gagner plus ; désormais, il s'agit de travailler plus pour gagner moins. À nos yeux, cette proposition est inacceptable. La solidarité ne consiste pas à demander un effort aux seuls salariés afin d'apporter une maigre obole. Pour les salariés, ce serait une deuxième journée de travail sans être rémunéré. Dans la mesure où il existe onze jours fériés dans l'année, pourquoi ne pas aller plus loin ? J'établis le lien avec les jours fériés, car il est apparemment trop délicat d'en supprimer.

Nous nous opposons à cette contribution. Nous dénonçons cette seule proposition de recettes nouvelles, alors que d'autres solutions existent. Dans ce débat, nous démontrerons que les salariés ne doivent pas être les seuls à contribuer au rééquilibrage des finances et à la préservation de la branche autonomie. Cela fait dix ans que l'on sort des rapports sur les moyens nécessaires pour répondre au vieillissement de la population, et nous sommes encore, en 2024, à constater que ceux-ci sont très insuffisants.

Mme Cathy Apourceau-Poly. - Chaque année, nous disons la même chose, et les choses s'aggravent. Nous avons eu récemment l'occasion d'évoquer tous ces sujets avec le ministre auditionné. Nous avons notamment insisté sur la nécessaire revalorisation des métiers et sur le virage domiciliaire à prendre. La grande loi attendue ne viendra certainement pas avec ce gouvernement.

Ce sont toujours les mêmes qui paient : les salariés, les retraités, les jeunes. Plutôt que de s'acharner encore une fois sur les salariés, je propose une journée sans dividendes ; comme cela, nous récupérerons de l'argent.

Vous n'avez pas fait le choix d'une journée fériée, car cela dérangerait trop de monde, notamment les travailleurs et les associations d'anciens combattants. Pour éviter cela, on choisit de faire payer les salariés. Au train où vont les choses, on prendra chaque année une nouvelle journée aux salariés. Tant que l'on ne s'attaque pas aux profits et aux dividendes, on ne s'en sortira pas.

M. Daniel Chasseing. - Pour rappel, le pouvoir d'achat ne se crée que par le travail.

Les crédits pour la branche autonomie augmentent de 6 %, avec, notamment, une revalorisation des salaires, un effort pour la rénovation des Ehpad, le renforcement de l'aide à domicile et le soutien à la mobilité. Ce dernier point est très important, les aides à domicile ayant souvent des difficultés à financer leurs indemnités kilométriques.

Le nombre de personnes de plus de 85 ans va doubler entre 2020 et 2040. Sur la même période, nous passerons de 480 000 à 650 000 personnes très dépendantes, concernées par les groupes iso-ressources (GIR) 1 et 2.

Depuis longtemps, nous attendons une loi sur le grand âge. En 2016, la loi relative à l'adaptation de la société au vieillissement (ASV) avait un contenu très faible. Ensuite, la loi sur le bien vieillir, plus étoffée, manquait de financements pour assurer la prise en charge des aînés et renforcer les personnels. Nous sommes encore aujourd'hui à 0,35 équivalent temps plein (ETP) par patient ; il faudrait au moins parvenir à 0,75. Cela correspond à près de 50 000 emplois.

Si la trajectoire est confirmée pour 2030, avec 6 500 emplois supplémentaires en Ehpad dès 2025, l'effort n'est pas négligeable.

Naturellement, les salaires doivent augmenter dans la mesure du possible. Mais, dans notre pays, il doit être possible de mettre en place une journée par an de solidarité, soit 40 minutes par mois, pour les aînés. Avec les 2,5 milliards d'euros qui entreraient alors dans les caisses, nous pourrions créer 30 ou 40 000 emplois. Au regard de l'état de nos finances, et après la suppression de la taxe d'habitation et de la redevance que je déplore, je suis favorable à cette journée supplémentaire de solidarité.

Mme Pascale Gruny. - Au sujet de cette journée de solidarité, nous n'avons pas le choix. Ou alors, il convient de passer à un régime assurantiel ; mais, si l'on devait s'y résoudre, tout le monde pourrait-il en bénéficier ? C'est la raison pour laquelle nous faisons appel à la solidarité. Il ne s'agit pas d'un jour férié. L'organisation de cette contribution solidaire doit être souple pour les entreprises.

Mme Chantal Deseyne, rapporteur. - Vous déplorez la suppression du fonds d'urgence, mais, par définition, un tel fonds n'a pas vocation à être pérennisé. Par ailleurs, la contribution solidaire permettrait précisément de venir en aide aux établissements en difficulté.

Vous déplorez également l'absence de mesures audacieuse, ce PLFSS pour la branche autonomie s'en tenant au financement de mesures déjà annoncées ; je partage, en partie, ce constat. Sur les 50 000 ETP annoncés, un recrutement de 6 500 est prévu en 2025. Il convient également de reconnaître les difficultés de recrutement, car les métiers ne sont pas attractifs et nous manquons de personnels formés. Il s'agit de monter en puissance sur ce sujet.

Une loi sur le grand âge et l'autonomie est nécessaire. Comme vous, je l'attends avec impatience. Je rappelle que Mme Delaunay déjà, puis Mme Buzyn l'ont annoncée, mais elle ne voit toujours pas le jour.

Je ne reviens pas sur la contribution de solidarité par le travail. Chacun a fait les commentaires qu'il jugeait utiles. Si j'étais cynique, je dirais que l'on pourrait également revenir aux 39 heures ; comme cela, il n'y aurait plus de problèmes.

Je partage les commentaires de M. Chasseing sur le renforcement du maintien à domicile et le soutien à la mobilité.

Dans le rapport, j'avais également évoqué la piste assurantielle. Le vieillissement de la population constitue un véritable défi. Nos taux de cotisations et d'imposition sont très élevés ; cela n'est plus supportable et il faut trouver d'autres dispositifs.

Mme Marie-Pierre Richer, rapporteure pour la branche accidents du travail et maladies professionnelles. - Ce PLFSS marque la fin d'une ère pour la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP). Après avoir réalisé des excédents sur onze des douze derniers exercices, la branche devrait boucler un budget à l'équilibre en 2025 avec un solde positif de 0,2 milliard d'euros, puis plonger, à partir de 2026, dans une situation légèrement, mais durablement déficitaire, avec un solde prévisionnel négatif de 0,4 milliard d'euros en 2026 ; 0,6 milliard d'euros en 2027 et 0,5 milliard d'euros en 2028.

Avec des écarts de trajectoire supérieurs à 1 milliard d'euros en 2026 et 2027, ces prévisions sont très loin de celles qui ont été adoptées dans la LFSS de 2024, qui anticipaient une poursuite de l'excédent structurel de la branche auquel nous nous étions habitués.

Comment expliquer cette dégradation soudaine des comptes de la branche ? Celle-ci résulte d'un effet ciseaux lié à la faible croissance, voire à la diminution des recettes pour ce qui concerne l'année 2026, conjuguée à une hausse des dépenses dynamique.

Dès 2024, une baisse de 0,12 point des taux de cotisation a amputé les recettes de la branche AT-MP. Cette baisse, actée pendant la réforme des retraites, garantit la neutralité financière pour les employeurs d'une hausse miroir des cotisations pour la branche vieillesse, afin de participer au redressement des comptes de cette dernière. Ce procédé - le fameux « swap » de taux sur lequel j'ai déjà eu l'occasion de m'exprimer - a amputé de 800 millions d'euros les recettes de la branche en 2024 ; un second transfert, prévu pour 2026, la plongera dans le déficit.

Par ailleurs, les prévisions de croissance de la masse salariale du secteur privé ont été revues à la baisse, dans un contexte macroéconomique morne, marqué par une croissance ralentie. Cette moindre dynamique de la masse salariale, sur laquelle sont assises les cotisations, se traduit également par des baisses durables de recettes pour la branche.

Les dépenses, quant à elles, sont principalement portées par l'accroissement du poids des transferts. Elles sont également alimentées par des améliorations notables pour la réparation et une politique de prévention plus ambitieuse.

Les dépenses de prévention du régime général de la branche devraient augmenter de 65 % en 2024 ; il convient de s'en réjouir. Pour 2025 et les années suivantes, la poursuite de la montée en charge du fonds d'investissement dans la prévention de l'usure professionnelle (Fipu), à hauteur de 150 millions d'euros par an, et la progression des aides financières directes aux entreprises, portée par la nouvelle convention d'objectifs et de gestion (COG), avec 120 millions d'euros disponibles d'ici à 2028, contribueront à dessiner les ébauches d'un futur virage préventif pour la branche. On peut également se féliciter de la montée en charge des dépenses prévisionnelles du compte professionnel de prévention (C2P), doté de 9 millions d'euros supplémentaires en 2025 pour répondre aux enjeux de l'adaptation des parcours professionnels des salariés exposés à des facteurs de risque.

L'effort consenti est certes encore insuffisant par rapport à l'objectif de 7 % des dépenses investies pour la prévention, fixé par la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss), mais il s'agit tout de même d'un premier pas.

Désormais, il importe de mettre en oeuvre un véritable accompagnement ciblé des entreprises, dans une démarche « d'aller vers ». Cette stratégie a fait ses preuves, notamment avec le programme sur les « troubles musculosquelettiques (TMS) Pros », qui se traduit par une réduction sensible des sinistres pour les entreprises, et dont les résultats prometteurs doivent conduire à poursuivre le développement. Cette approche nécessite de procéder à de nombreux recrutements dans les services des caisses, ce qui suppose d'améliorer l'attractivité de ces métiers trop longtemps délaissés.

La réparation n'est pas oubliée avec l'article 24 du PLFSS et les revalorisations ambitieuses qu'il porte pour l'indemnisation des victimes d'incapacité permanente. Cet article 24 - seul article de lettres concernant la branche - vise à retranscrire une partie de l'accord national interprofessionnel (ANI) du 15 mai 2023 sur la branche AT-MP, précisé depuis par un relevé de décisions signé par l'ensemble des partenaires sociaux à l'exception de la CGT. Il constitue la version revue et corrigée de l'article 39 du dernier PLFSS, retiré du texte pour ses modalités de transposition jugées insuffisamment fidèles à l'esprit de l'ANI par les syndicats.

Lorsqu'un sinistre d'origine professionnelle provoque une incapacité permanente chez un assuré, celui-ci bénéficie d'une indemnisation par la branche AT-MP, qui prend la forme d'une indemnité en capital lorsque l'incapacité est inférieure à 10 %, et sinon d'une rente viagère. L'assuré bénéficie de ces prestations sans avoir à prouver la faute de son employeur, en contrepartie de quoi la réparation proposée présente un caractère forfaitaire et non intégral ; tel est le compromis social historique issu de la loi du 9 avril 1898.

La victime d'AT-MP peut toutefois percevoir, en cas de faute inexcusable de son employeur (FIE), une indemnisation intégrale des seuls postes de préjudice non déjà indemnisés par la branche AT-MP. Dans ce cas, une majoration de l'indemnité en capital ou de la rente servie par la branche est également prévue, aux frais de l'employeur fautif.

Depuis quinze ans, la question des postes de préjudices indemnisés par ces prestations suscite la controverse juridique. Ne couvrent-elles que les pertes de salaire encourues, c'est-à-dire le déficit professionnel ? Ou visent-elles également à réparer le déficit fonctionnel permanent, qui retrace la perte de potentiel physique et intellectuel subie ? La loi est restée silencieuse sur la question.

Alors que la Cour de cassation estimait, depuis 2009, que les prestations d'incapacité permanente de la branche revêtaient un caractère dual, couvrant à la fois le déficit professionnel et le déficit fonctionnel permanent, des arrêts du 20 janvier 2023 l'ont conduite à revenir sur sa position. Depuis, la rente et l'indemnité en capital sont réputées couvrir uniquement le déficit professionnel.

La solution retenue par la Cour de cassation n'a toutefois pas trouvé grâce aux yeux des partenaires sociaux, qui ont estimé que la fin du caractère dual des prestations d'incapacité permanente pouvait mettre en péril le compromis historique auquel ils sont unanimement attachés. En effet, en sortant le déficit fonctionnel permanent des postes de préjudice indemnisés par la rente, on le faisait rentrer dans les postes de préjudice pouvant être indemnisés intégralement par le juge en cas de FIE. Il en résultait une revalorisation considérable de l'indemnisation par voie contentieuse, parfois de l'ordre de la centaine de milliers d'euros, non accompagnée d'une amélioration de la réparation amiable. Cela a laissé craindre une judiciarisation du contentieux AT-MP. Ni les salariés ni les employeurs n'avaient intérêt à celle-ci, car elle aurait été associée à une réparation plus lente, incertaine et imprévisible.

Avec l'ANI du 15 mai 2023, les partenaires sociaux ont fait part de leur souhait, partagé par le récent rapport de la Mecss, que soit affirmé dans la loi le caractère dual des prestations d'incapacité permanente. L'article 24 en tire les conséquences, d'une manière qui apparaît globalement fidèle à l'intention des partenaires sociaux. Il revalorise l'indemnité en capital et la rente AT-MP en créant, en plus de leur montant actuel qui deviendra la part professionnelle de ces prestations, une nouvelle part fonctionnelle, conformément aux préconisations de notre rapport. Cette réforme, fruit de deux ans de travail des partenaires sociaux avec l'aide des pouvoirs publics, conduira à revaloriser l'indemnisation par la branche de l'ensemble des victimes d'AT-MP présentant une incapacité permanente.

L'effort financier associé pour la branche atteindra 500 millions d'euros à terme, soit deux fois plus que l'investissement prévu pour l'article 39, avec une montée en charge progressive. Il s'agit d'une évolution bienvenue alors que les études disponibles montrent l'insuffisance des prestations AT-MP, afin d'éviter une baisse considérable du niveau de vie des victimes. La consécration d'une part fonctionnelle à l'indemnité en capital, non prévue dans l'article 39, mais bien comprise dans l'article 24, apparaît, à ce titre, particulièrement judicieuse.

La part fonctionnelle des prestations sera définie en fonction d'un taux d'incapacité spécifique et distinct du taux d'incapacité permanente professionnelle, inspiré du barème du concours médical. Les médecins-conseils devront être formés à ce nouveau barème afin d'assurer son application uniforme. La part fonctionnelle de la rente sera déterminée comme le produit de ce taux et du pourcentage de la valeur d'un point d'incapacité, dépendant de l'âge de la victime et inspirée du barème Mornet.

Dans la mesure où le texte transmis prévoit que la part fonctionnelle de l'indemnité en capital soit déterminée de manière forfaitaire, je vous propose un amendement, soutenu par les partenaires sociaux, visant à aligner le mode de calcul sur celui de la part fonctionnelle de la rente, notamment afin que l'âge de la victime soit pris en compte. La définition des barèmes et des paramètres réglementaires de la réforme ainsi que la formation des médecins requerront un travail considérable, justifiant une date d'entrée en vigueur prévue au 1er juin 2026.

Les victimes présentant un fort taux d'incapacité fonctionnelle pourront, en outre, convertir une partie de la part fonctionnelle de leur rente en capital. Cette évolution, plébiscitée par notre rapport, apparaît opportune puisqu'elle permettra aux victimes concernées de toucher une somme considérable à court terme, afin de réaliser les investissements nécessaires à l'adaptation de leur environnement de vie.

Il faut saluer la création de la commission des garanties, organe paritaire qui s'assurera de la conformité des paramètres réglementaires de la réforme à l'intention des partenaires sociaux. Cette commission s'inscrit dans le cadre d'une relation de confiance mutuelle entre les pouvoirs publics et les partenaires sociaux ; prévue pour une durée de quatre ans, je vous propose un amendement afin de la pérenniser. De manière à prendre en compte la demande légitime des associations de victimes de participer aux travaux sans remettre en cause le caractère paritaire de la gestion de la branche, je propose également que celles-ci puissent être entendues, au moins une fois par an, par la commission des garanties.

Toutefois, je regrette que l'article 24 ne réponde pas pleinement aux enjeux concernant les victimes de FIE, dont le niveau de réparation est perçu comme insuffisant par les experts juridiques. L'intégration du déficit fonctionnel permanent dans la rente implique pour elles qu'il ne soit plus possible d'en obtenir réparation intégrale en capital sur décision du juge. Même si leur réparation à long terme est majorée par l'augmentation de leur rente, leur indemnisation à court terme s'en trouve affaiblie.

Pour pallier ce problème, je vous soumets un amendement issu des recommandations du rapport, ouvrant droit à toutes les victimes de FIE de toucher en capital plutôt qu'en rente la majoration de la part fonctionnelle de leur réparation. Cette solution, neutre sur le plan actuariel pour la sécurité sociale, permettra que la réforme soit juste pour tous les assurés, y compris ceux victimes de FIE ; je pense notamment aux victimes de maladies professionnelles agressives comme des cancers, dont l'espérance de vie rend inadaptée la réparation par rente.

Je rappelle enfin ma volonté que soit apportée une transcription législative ou réglementaire à l'ensemble du contenu de l'ANI du 15 mai 2023, qui excède le sujet de la réparation et prévoit des progrès attendus sur l'aide humaine et la prévention.

La trajectoire de la branche AT-MP consent, pour les prochaines années, un effort considérable pour la réparation et la prévention. C'est la raison pour laquelle je vous invite à adopter l'article 28 fixant l'objectif de dépenses de la branche à 17 milliards d'euros pour 2025, ce qui devrait permettre à la branche de dégager un excédent de 0,2 milliard d'euros cette année.

J'en viens à la question épineuse des transferts, principaux responsables de la dégradation de la situation financière de la branche. Selon l'article 25 du PLFSS, ceux-ci devraient atteindre, au cumulé, 2,7 milliards d'euros en 2025, soit 639 millions d'euros supplémentaires par rapport à 2024. La branche versera, outre les transferts au fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva) et à la branche maladie, 453 millions d'euros au Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Fcaata) et 125,2 millions d'euros à la branche vieillesse au titre du dispositif de retraite anticipée pour incapacité permanente - des montants en hausse, du fait principalement des conséquences de la réforme des retraites.

Le transfert à la branche maladie au titre de la sous-déclaration atteindra 1,6 milliard d'euros en 2025, soit 9 % des dépenses de la branche et 400 millions d'euros supplémentaires par rapport à 2024. Il continuera ensuite d'augmenter pour atteindre 2 milliards d'euros à l'horizon 2027. Il s'agit de la fourchette basse de la nouvelle estimation de la commission chargée d'évaluer le coût réel de la sous-déclaration, parue l'été dernier, qui chiffre désormais ce montant entre 2 et 3,7 milliards d'euros, contre 1,2 à 2,1 milliards d'euros dans le précédent rapport datant de 2021.

J'ai auditionné son président, qui m'a donné des garanties sur la sincérité de son mode de calcul, fondé sur les tarifs de la branche maladie et prenant en compte la sur-déclaration des AT-MP. La hausse des estimations repose principalement sur l'inflation des coûts de prise en charge et l'actualisation des données épidémiologiques. Dans les prochaines années, la branche fournira un effort notable en faveur de la prévention et de la réparation, à un niveau inédit depuis le retour aux excédents. Cela montre que la hausse prévisionnelle des transferts n'empêche pas la branche d'agir en parallèle sur ses vocations premières, à savoir la prévention et la réparation des AT-MP.

Par conséquent, cette année, je ne porterai pas d'amendement afin de diminuer le niveau du transfert au titre de la sous-déclaration. Toutefois, cette position devra être réévaluée si l'augmentation des transferts conduit effectivement la branche AT-MP à une situation déficitaire. La volatilité des estimations de la sous-déclaration, inhérente à l'exercice, reste en effet préoccupante pour justifier leur utilisation et aiguiller des décisions de politique publique. Je m'opposerai à toute augmentation des cotisations AT-MP si j'estime que celle-ci est rendue nécessaire par une situation déficitaire de la branche, provoquée par l'augmentation du transfert à la branche maladie.

Pour conclure, je souhaite évoquer la dotation au Fiva, qui enfle encore de 130 millions d'euros en 2025 pour atteindre désormais 465 millions d'euros ; la branche AT-MP aura doublé son effort en deux ans. Pendant ce temps, je regrette que l'État n'ait pas augmenté d'un centime sa dotation. Celle-ci est devenue anecdotique, à hauteur de 8 millions d'euros, soit 1,5 % des ressources publiques du fonds. Cette dotation ne permet pas, loin s'en faut, de couvrir les frais d'indemnisation des victimes environnementales ou non éligibles à une indemnité AT-MP de droit commun, que l'État est pourtant censé prendre en charge.

La hausse des transferts publics en faveur du Fiva est indispensable compte tenu de la situation financière du fonds ; c'est la raison pour laquelle je ne souhaite pas prendre le risque de le fragiliser en proposant un amendement qui réduirait la dotation de la branche AT-MP, et parie sur le fait que le Gouvernement prendra en responsabilité l'engagement d'augmenter en conséquence la dotation de l'État en projet de loi de finances. En séance publique, j'appellerai à nouveau le Gouvernement à rééquilibrer l'effort financier en faveur du Fiva, afin que l'État y prenne enfin sa juste part.

Mme Marion Canalès. - Par rapport à ses voisins européens, la France se singularise en matière d'AT-MP. Après la Lituanie, Malte et la Lettonie, elle arrive en quatrième position en termes de sinistralité, avec environ 5 décès pour 100 000 salariés. On a ainsi recensé 738 décès en 2022, contre 514 en 2016. La direction générale du travail (DGT) avait convenu qu'il était désormais très difficile de descendre en dessous du seuil de 650 décès.

En dépit de l'ampleur du phénomène du mal-travail et de la sinistralité, cette branche parvient chaque année à être excédentaire ; selon la rapporteure, il s'agit sans doute de l'une des dernières années. Le mal-travail entraîne un coût à la fois humain et économique ; ce dernier est évalué, à 3 ou 4 % du PIB.

Il convient également de relever la sous-déclaration des accidents du travail, évaluée auparavant entre 1 et 2 milliards d'euros par an, et désormais entre 2 et 3,7 milliards d'euros. En dépit de cette sous-déclaration, nous arrivons parmi les premiers pays d'Europe en termes de sinistralité. Un travail doit être mené sur le sujet.

Madame la rapporteure, vous vous opposez à l'augmentation des cotisations dans certains cas spécifiques. Mais, pour répondre à la pénibilité et aux accidents du travail dans le domaine de la sous-traitance, l'enjeu est de penser un cadre juridique qui responsabiliserait les donneurs d'ordre. L'étude de la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) montre la surexposition des salariés aux accidents du travail dans les entreprises de sous-traitance.

Dans ces entreprises, on dénombre beaucoup de femmes. Cela me conduit à évoquer le sujet des femmes et du travail. Dans son rapport d'information sur la santé des femmes au travail, la délégation aux droits des femmes avait noté une augmentation de 42 % des accidents du travail pour les femmes ces dernières années. La délégation avait également pointé, dans le tableau des maladies professionnelles, la sous-reconnaissance des pathologies affectant les femmes. Nous déplorons un manque de données et de statistiques fiables, et il conviendra à l'avenir de commettre des rapports sur ces sujets, en commençant déjà par donner un écho au rapport d'information de la délégation.

De nombreuses associations ont demandé à participer aux travaux de la commission des garanties. Un amendement prévoit des avancées. Mais ne pouvait-on pas les intégrer pleinement aux travaux de la commission, en leur donnant une voix consultative pour ne pas déstabiliser le système paritaire ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. - J'ai reçu une proposition d'amendement de l'association nationale de défense des victimes de l'amiante (Andeva) concernant le remboursement en capital. L'association souhaite que, si la victime d'une faute inexcusable de l'employeur le demande, il puisse lui être versé, au lieu d'une rente, un forfait sous forme de capital. Elle souhaite que cette mesure soit inscrite dans la loi et ne s'applique pas seulement par décret. Madame la rapporteure, que pensez-vous de cette proposition ?

Mme Céline Brulin. - Je partage l'inquiétude de la rapporteure sur la trajectoire de la branche par rapport aux efforts importants que réclament la prévention et l'indemnisation des AT-MT. Je partage également son alerte concernant le financement du Fiva, avec une part de l'État qui s'amoindrit au fil du temps. Cette branche ne doit pas une variable d'ajustement pour pallier les difficultés des autres branches.

Vous avez évoqué la baisse des taux de cotisations des employeurs afin de compenser la hausse, inscrite dans la réforme des retraites, des cotisations pour la branche vieillesse. La première année, cette hausse des cotisations avait été compensée pour les collectivités. Est-ce toujours le cas ?

Pour faire lien avec la CNRACL, les employeurs publics seront confrontés à une hausse de 4 points, peut-être ramenée à 3 points, dans les prochaines années. Pour les employeurs privés, la hausse des cotisations pour la branche vieillesse a été compensée par une baisse des cotisations de la branche AT-MP. Cela vous semble-t-il logique que l'on augmente le coût du travail dans le secteur public alors que l'on cherche à la stabiliser, voire à le diminuer, dans le secteur privé ?

Mme Marie-Pierre Richer, rapporteure. - Madame Canalès, les données concernant la sinistralité européenne ne sont pas immédiatement comparables. En effet, la définition des sinistres varie selon les pays. La France est située à ce niveau, car la définition d'un sinistre professionnel est plus large que dans d'autres pays.

Il existe des AT-MP dissimulés, avec notamment des clauses d'intéressement en cas de baisse de la sinistralité. Il s'agit de combattre cette sous-déclaration et, au regard des auditions, tout le monde s'y emploie.

Concernant la sous-traitance, il est vrai qu'elle permet aux entreprises donneuses d'ordre de se décharger du risque AT-MP. Si le cadre actuel devait évoluer, il faudrait veiller à ménager un équilibre adéquat, qui ne conduirait pas à déresponsabiliser les sous-traitants. Le problème était plus marqué pour les entreprises d'intérim, mais un récent décret qui augmente la contribution à la branche des entreprises utilisatrices.

Je ne reviens pas sur le sujet, déjà évoqué, de la santé des femmes au travail. J'ai contribué, avec trois autres sénatrices, à un rapport sur le sujet. L'an dernier, vous aviez déjà proposé un amendement à ce sujet.

Les TMS commencent à être pris en compte dans le calcul du coût de la sous-déclaration. Cela peut expliquer l'augmentation de la fourchette, même si je reste perplexe sur le sujet.

Concernant la commission des garanties, je propose un amendement afin que, au moins une fois par an, les associations soient entendues. Je rappelle que cette commission découle de la commission AT-MP, laquelle n'est composée que de partenaires sociaux Intégrons à la commission des garanties les associations de victimes, même avec voix consultative, serait donc curieux.

Enfin, pour répondre à M. Vanlerenberghe, même si cela ne va pas aussi loin que le souhaiteraient les associations, je propose un amendement afin de pouvoir indemniser en capital les victimes de FIE, sur option.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 2

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - L'amendement n°  118 prévoit de soutenir les établissements de santé en majorant le sous-objectif relatif aux établissements de santé à hauteur de 200 millions d'euros. De ce fait, il minore les cinquième et sixième sous-objectifs, à hauteur de 100 millions d'euros chacun, ce qui permet de rehausser le montant global de l'Ondam.

L'amendement n° 118 est adopté.

Article 4

L'amendement n°  119 est adopté.

Article 5 quater

L'amendement n°  120 est adopté.

Article 6

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - L'amendement n°  121 prévoit, dans le cas du barème proposé pour 2025, de maintenir les allégements actuels au niveau du Smic et d'aller jusqu'à 2,1 Smic - au lieu de 2,2 - pour le bandeau maladie, et jusqu'à 3,1 Smic - au lieu de 3,2 - pour le bandeau famille.

L'amendement n° 121 est adopté.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - L'amendement n°  122 vise à modifier le barème proposé pour 2026, là encore afin de protéger l'emploi. Il supprime la réduction des allégements au niveau du Smic ; il était prévu 2 points de baisse des allégements en 2025 et 2 points supplémentaires en 2026. En contrepartie, il prévoit la sortie du dispositif à 2,05 Smic.

L'amendement n° 122 est adopté.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - Sur la question essentielle des allégements généraux, l'amendement n°  123 concerne la mise en place d'un comité de suivi. Dès l'année prochaine, il conviendra de se réunir avec l'ensemble des acteurs concernés.

L'amendement n° 123 est adopté.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - Nous voulons protéger les dispositifs qui concernent les territoires ultramarins, ainsi que ceux qui sont liés aux travailleurs occasionnels-demandeurs d'emploi (TO-DE), tous deux aujourd'hui en crise. L'amendement n°  124 prévoit de conserver des allégements pour ces dispositifs.

L'amendement n° 124 est adopté.

Après l'article 7

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - L'amendement n°  125 prévoit de renforcer le financement de la branche autonomie. En échange du bénéfice de ces heures de travail non rémunérées, une contribution de solidarité pour l'autonomie, dont le taux sera porté de 0,3 % à 0,6 %, sera demandée aux employeurs.

L'amendement n° 125 est adopté.

Article 7 bis

Mme Pascale Gruny, rapporteur. - L'amendement n°  126 concerne le certificat de vie. Il s'agit de généraliser l'utilisation de données biométriques. Sont concernées les personnes qui vivent à l'étranger et perçoivent des pensions de retraite. À défaut de fournir des éléments biométriques, elles pourront réaliser un certificat au consulat français de leur lieu de résidence.

L'amendement n° 126 est adopté.

Article 8

L'amendement de correction n°  127 est adopté.

Article 9

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - L'amendement n°  128 vise à reporter l'entrée en vigueur de la réforme de l'assiette de la clause de sauvegarde.

L'amendement n° 128 est adopté.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - Par l'amendement n°  129, il est proposé de plafonner la clause de sauvegarde pesant sur les médicaments génériques, les spécialités de référence soumises à un tarif forfaitaire de responsabilité et les spécialités de référence matures et peu onéreuses à 2 % du chiffre d'affaires réalisé par l'entreprise au titre de ces spécialités.

L'amendement n° 129 est adopté.

Après l'article 9

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - L'amendement n  130 reprend une demande formulée à l'origine par le groupe Écologiste - Solidarité et Territoires que nous soutenons, car elle tend à améliorer l'information du Parlement. Il s'agit d'imposer au Comité économique des produits de santé (CEPS) de remettre un rapport d'activité relatif à l'année précédente ou, à défaut, un rapport d'activité provisoire avant le 30 septembre.

L'amendement n° 130 est adopté.

Article 9 bis

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - L'amendement n°  131 vise à rehausser le tarif de la première tranche fiscale applicable aux boissons à sucres ajoutés. Il s'inscrit dans la continuité des propositions que nous avons formulées avec Cathy Apourceau-Poly dans notre rapport d'information sur la fiscalité comportementale remis au printemps dernier. Les taxes sur les boissons sucrées sont aujourd'hui illisibles en France.

L'amendement n° 131 est adopté.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - L'amendement n°  132 a le même objectif, mais porte sur la dernière tranche du nouveau barème proposé.

L'amendement n° 132 est adopté.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - Je tenais à ce que l'augmentation des taxes sur les boissons sucrées s'accompagne d'une augmentation de la taxe sur les boissons contenant des édulcorants. Nous le savons aujourd'hui : un certain nombre de ces produits sont cancérigènes, d'où cet amendement n°  133.

L'amendement n° 133 est adopté.

Après l'article 9 bis

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - L'amendement n°  134 vise à renforcer la fiscalité sur les casinos, les paris sportifs, les jeux de cercle et les jeux de cercle en ligne, afin de prévenir le risque du jeu excessif et pathologique. Le monde hippique et son économie de territoire sont exclus du dispositif pour être préservés.

L'amendement n° 134 est adopté.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - L'amendement n°  135 s'inscrit également dans la continuité de notre rapport sur les addictions. Il est proposé d'augmenter un peu plus vite que prévu le prix du paquet de cigarettes.

L'amendement n° 135 est adopté.

Article 9 quater

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - Si la commission soutient l'objectif de lutter contre les publicités excessives, elle demande au Gouvernement de mieux cibler la mesure. Le secteur des audioprothèses n'est pas le seul concerné - celui des lunettes l'est également - et il ne paraît pas pertinent de taxer l'ensemble des acteurs, d'où l'amendement de suppression n°  136.

L'amendement n° 136 est adopté.

Article 14

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - Selon la pratique, l'annexe au PLFSS est une simple prévision, sur la base des mesures en vigueur ou prévues. Pourtant, elle est généralement considérée comme une programmation, ce qui, dans le cas présent, n'est manifestement pas le cas.

Par l'amendement n°  137, il est proposé d'indiquer explicitement que l'annexe ne tient pas lieu de programmation. Le financement de la dette sociale impliquera de réaliser à brève échéance de nouveaux transferts de dette à la Cades, ce qui ne sera possible qu'après avoir adopté une trajectoire explicite de retour à l'équilibre.

M. Philippe Mouiller, président- Les annexes sont en effet un moyen de donner une orientation au Gouvernement sans lui imposer de trajectoire, ce qui serait anticonstitutionnel.

L'amendement n° 137 est adopté.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - L'amendement n°  138 tend à étaler sur quatre ans au lieu de trois la hausse de 12 points des cotisations à la CNRACL dues par les employeurs.

L'amendement n° 138 est adopté.

Article 15

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Par l'amendement n°  139, il s'agit d'inclure dans les accords de maîtrise des dépenses des objectifs quantitatifs et qualitatifs en matière de répartition territoriale de l'offre de soins et de protection de l'indépendance des professionnels de santé. Cette proposition figurait dans le rapport d'information relatif à la financiarisation de l'offre de soins, que nous avions remis avec Olivier Henno et Bernard Jomier.

L'amendement n° 139 est adopté.

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  140 tend à compléter la liste des éléments fixés par les accords de maîtrise des dépenses créés par le présent article.

L'amendement n° 140 est adopté.

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  141 vise à supprimer les dispositions qui autorisent, d'une part, le directeur général de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie et, d'autre part, les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, à procéder unilatéralement à des baisses de tarifs.

L'amendement n° 141 est adopté.

Mme Corinne Imbert, rapporteure- L'amendement n°  142 tend à allonger le délai dans lequel l'assurance maladie et les syndicats de médecins peuvent valablement conclure un accord de maîtrise des dépenses dans le champ de l'imagerie permettant de réaliser au moins 300 millions d'euros d'économies sur les trois ans à venir.

L'amendement n° 142 est adopté.

Article 15 bis

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  143 vise à définir directement dans la loi, sans renvoyer cette question au décret, les soins non programmés.

L'amendement n° 143 est adopté.

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  144 tend à renforcer l'encadrement des structures de soins non programmés prévu par cet article.

L'amendement n° 144 est adopté.

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  145 prévoit qu'un décret devra préciser les conditions dans lesquelles les professionnels exerçant dans une structure de soins non programmés sont tenus de participer au service d'accès aux soins (SAS) et à la permanence des soins ambulatoires (PDSA).

L'amendement n° 145 est adopté.

Article 15 quinquies

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  146 a pour objet de mieux intégrer dans le cadre de l'examen d'une vraie loi « infirmiers » la demande de rapport relatif à l'application de l'extension de la compétence vaccinale notamment pour les infirmiers et à la valorisation des actes infirmiers. Une fois n'est pas coutume, notez-le, nous maintenons cette demande de rapport !

M. Philippe Mouiller, président. - Dans la mesure où la demande émane du Gouvernement, on peut en effet imaginer qu'elle sera suivie d'effet !

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Nous soutenons l'esprit de cet article. Je souhaite que ce rapport soit utile et qu'il ne soit pas utilisé comme un prétexte pour reculer une nouvelle fois l'examen d'une loi spécifique à la profession d'infirmier. C'est pourquoi nous avançons la date de trois mois.

L'amendement n° 146 est adopté.

Article 16

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  147 vise à mieux encadrer le périmètre de la nouvelle procédure d'accompagnement à la pertinence des prescriptions portée par cet article.

L'amendement n° 147 est adopté.

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  148 vise à permettre au Gouvernement d'utiliser la procédure d'accompagnement à la pertinence des prescriptions pour vérifier si le prescripteur a consulté le dossier médical partagé du patient préalablement à la prescription.

L'amendement n° 148 est adopté.

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Par l'amendement n°  149, il est proposé de supprimer de l'article 16 les références aux recommandations de la HAS, qui demeurent dépourvues en elles-mêmes de caractère contraignant. Les recommandations internationales ou des sociétés savantes contribuent également à éclairer les professionnels.

L'amendement n° 149 est adopté.

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  150 tend à préciser que l'assurance maladie doit mettre à la disposition du prescripteur un téléservice dédié permettant de vérifier si sa prescription s'inscrit ou non dans les indications thérapeutiques remboursables. Afin de ne pas réduire le temps médical, ce téléservice devra être aussi simple que possible. 

L'amendement n° 150 est adopté.

Après l'article 16

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  151 a pour objet d'instaurer une « taxe lapin », c'est-à-dire sur les rendez-vous non honorés chez un professionnel de santé.

L'amendement n° 151 est adopté.

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  152 tend à favoriser l'utilisation du dossier médical partagé, en ville comme à l'hôpital. 

L'amendement n° 152 est adopté.

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Afin de s'assurer du versement à bon droit des prestations maladie, l'amendement n°  153 vise à sécuriser la carte vitale, sous forme matérielle comme immatérielle.

L'amendement n° 153 est adopté.

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  154 tend à améliorer la coordination et la coopération entre l'assurance maladie et les organismes complémentaires d'assurance maladie en matière de lutte contre la fraude.

L'amendement n° 154 est adopté.

Article 16 bis

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  155 a pour objet la généralisation de la signature des certificats de décès par les infirmières volontaires. Il prévoit que les frais relatifs à l'examen nécessaire à l'établissement du certificat de décès sont, par dérogation, pris en charge par l'assurance maladie ou la branche autonomie dans des conditions fixées par arrêté. 

L'amendement n° 155 est adopté.

Article 16 ter

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  156 supprime en partie une demande de rapport.

L'amendement n° 156 est adopté.

Article 17

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  157 vise à insérer les dispositions relatives au conventionnement des taxis dans un article distinct du code de la sécurité sociale. 

L'amendement n° 157 est adopté.

L'amendement rédactionnel n°  158 est adopté, de même que l'amendement rédactionnel n°  159.

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Mon amendement n°  160 prévoit que des aides à l'équipement puissent être versées aux entreprises de taxis en vue de l'acquisition d'outils de géolocalisation. Le but est de lutter contre la fraude.

Mme Marie-Claude Lermytte. - Qui paiera ces GPS ?

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Ce ne sont pas des GPS, mais de petits boîtiers.

M. Philippe Mouiller, président. - Il s'agit d'objets spécifiquement conçus pour contrôler le kilométrage des courses, afin d'éviter les abus.

L'amendement n° 160 est adopté.

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  161 vise à permettre à la convention-cadre nationale de définir des dispositifs de rémunération et d'intéressement incitant les entreprises de taxis à contribuer aux efforts de maîtrise des dépenses, de développement des transports partagés et de lutte contre la fraude.

L'amendement n° 161 est adopté.

Article 17 bis

L'amendement rédactionnel n°  162 est adopté.

Article 17 ter

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  163 tend à expliciter que la dispense intégrale d'avance de frais prévue au titre de l'examen de prévention bucco-dentaire et des soins associés couvre à la fois la part prise en charge par l'assurance maladie et celle qui est prise en charge par l'assurance complémentaire. 

L'amendement n° 163 est adopté.

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  164 prévoit une prise en charge intégrale du ticket modérateur sur les examens de prévention bucco-dentaire dans le cadre du contrat solidaire et responsable.

L'amendement n° 164 est adopté.

Article 17 quater

L'amendement rédactionnel n°  165 est adopté.

Article 17 sexies

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  166 tend à corriger une erreur matérielle.

L'amendement n° 166 est adopté.

Article 17 septies

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  167 a pour objet de supprimer l'article 17 septies. Celui-ci revient en effet sur l'accord trouvé en commission mixte paritaire lors de l'examen de la proposition de loi visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels. Il s'agit de l'accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes en CPTS : cet article étend l'expérimentation à vingt départements. L'expérimentation a débuté au mois d'août 2024. Il est un peu tôt pour en modifier les critères. De plus, les CPTS ne sont pas des espaces d'exercice coordonné entre professionnels de santé partageant une patientèle commune, contrairement aux équipes de soins primaires, aux maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP) ou aux centres de santé.

L'amendement n° 167 est adopté.

Article 17 octies

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  168 vise à étendre le champ de l'expérimentation de la prise en charge par la sécurité sociale aux tests et analyses réalisés afin de détecter une soumission chimique, plutôt qu'aux seuls tests effectués en ce sens.

L'amendement n° 168 est adopté.

Article 17 nonies

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  169 a pour objet de supprimer l'article 17 nonies.

L'amendement n° 169 est adopté.

Article 18

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  170 vise à préciser la rédaction de cet article, notamment sur le différentiel qui devrait exister entre le coût d'un personnel intérimaire et celui d'un personnel permanent. Il concerne l'encadrement de l'intérim dans les professions non médicales.

L'amendement n° 170 est adopté.

Article 19

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  171 tend à préciser le régime applicable aux stocks de médicaments. Certains industriels sont actuellement tentés de ne pas les libérer en cas de pénurie, pour ne pas être pénalisés.

L'amendement n° 171 est adopté.

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  172 vise à permettre au directeur général de l'Agence nationale de sécurité des médicaments et des produits de santé (ANSM) de soumettre à des exigences renforcées de formalisation les plans de gestion des pénuries (PGP) des médicaments d'intérêt thérapeutique majeur (MITM) qui font régulièrement l'objet de tensions d'approvisionnement. La commission d'enquête sénatoriale avait relevé l'hétérogénéité des PGP produits par les exploitants. 

L'amendement n° 172 est adopté.

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  173 prévoit d'étendre aux situations de risque de rupture de stock de médicaments ou de variation saisonnière de la demande la faculté du ministre de rendre obligatoire le recours à l'ordonnance conditionnelle, mais de laisser inchangé, en revanche, le périmètre dans lequel il peut rendre obligatoire la dispensation à l'unité. 

L'amendement n° 173 est adopté.

Article 20

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  174 a pour objet de réécrire le dispositif de subordination de la prise en charge à l'utilisation effective de certains dispositifs médicaux numériques, en en reprenant la substance, mais en apportant des modifications de fond.

L'amendement n° 174 est adopté.

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  175 vise à conférer au dispositif de l'article 20 tout son caractère opérationnel.

L'amendement n° 175 est adopté.

Article 21

Mme Chantal Deseyne, rapporteur. - L'amendement n°  176 tend à réduire la durée de l'expérimentation relative à la fusion des sections soins et dépendance.

L'amendement n° 176 est adopté.

Article 22

L'amendement rédactionnel n°  177 est adopté.

Mme Pascale Gruny, rapporteur. - L'amendement n°  178 a pour objet d'apporter une précision sur l'aide familial agricole, qui ne peut conserver ce statut plus de cinq ans.

L'amendement n° 178 est adopté.

Article 23

Mme Pascale Gruny, rapporteur. - L'amendement n°  194 tend à modifier la revalorisation des retraites prévue le 1er janvier prochain, comme cela a été évoqué lors de la discussion générale.

L'amendement n° 194 est adopté.

Article 24

Les amendements de coordination n°  179 et n°  181 sont adoptés.

L'amendement rédactionnel n°  180 est adopté.

Mme Marie-Pierre Richer, rapporteure. - L'amendement n°  182 a pour objet d'aligner les modalités de calcul de la part fonctionnelle de l'indemnité en capital sur celle qui est prévue pour la part fonctionnelle de la rente AT-MP.

L'amendement n° 182 est adopté.

L'amendement de coordination juridique n°  183 est adopté, de même que l'amendement rédactionnel n°  184.

Mme Marie-Pierre Richer, rapporteure. - Conformément à la volonté des partenaires sociaux, l'amendement n°  185 vise à expliciter que la volonté du législateur est de laisser inchangée la règle du taux utile.

L'amendement n° 185 est adopté, de même que les amendements de coordination juridique n°  186 et n°  187.

Mme Marie-Pierre Richer, rapporteure. - L'amendement n°  188 vise à transposer dans le droit la recommandation n° 13 du récent rapport de la Mecss intitulé Branche AT-MP : vers un juste équilibre entre réparation et prévention des risques professionnels en prévoyant que les victimes d'un AT-MP avec faute inexcusable de l'employeur puissent, sur option, convertir partiellement la part fonctionnelle de leur rente en capital. Cette évolution est particulièrement attendue.

L'amendement n° 188 est adopté.

Mme Marie-Pierre Richer, rapporteure. - L'amendement n°  189 tend à permettre aux associations nationales de victimes d'être entendues au moins une fois par an par la commission des garanties.

L'amendement n° 189 est adopté.

Mme Marie-Pierre Richer, rapporteure. - L'amendement n°  190 vise à pérenniser la commission des garanties, dont la durée de vie était initialement fixée à quatre ans.

L'amendement n° 190 est adopté.

Après l'article 24

M. Olivier Henno, rapporteur. - L'amendement n°  191 prévoit la suspension du versement du complément de libre choix du mode de garde en cas de défaut de paiement du salaire dû à l'assistante maternelle ou à l'employée à domicile.

L'amendement n° 191 est adopté.

M. Olivier Henno, rapporteur. - Par l'amendement n°  192, il est proposé que le Gouvernement fixe chaque année le plafond tarifaire que les micro-crèches peuvent pratiquer pour que les familles puissent bénéficier du complément de libre choix du mode de garde.

L'amendement n° 192 est adopté.

Article 25

Mme Corinne Imbert, rapporteure. - L'amendement n°  193 s'inscrit dans la continuité du rapport d'information réalisé par Élisabeth Doineau et Annie Le Houerou pour le compte de la Mecss sur les organismes et fonds financés par les régimes obligatoires de base (Offrob). Il vise, d'une part, à fixer le principe de la détermination par la LFSS du montant des dotations de la branche maladie à l'ensemble des fonds et organismes qu'elle subventionne et, d'autre part, à fixer formellement cette dotation pour 2025 à Santé publique France, l'Agence de biomédecine, l'ANSM et la HAS.

L'amendement n° 193 est adopté.

La commission propose au Sénat d'adopter le projet de loi de financement de la sécurité sociale, sous réserve de l'adoption de ses amendements.

TABLEAU DES AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION

Auteur

Objet

Article 2
Rectification de l'Ondam et des sous-objectifs de l'Ondam

Mme DOINEAU

118

Majoration des crédits alloués au sous-objectif "établissements de santé" de l'Ondam et minoration à due concurrence des 5e et 6e sous-objectifs

Article 4
Pérennisation de l'exonération en faveur des employeurs agricoles
de travailleurs occasionnels et de demandeurs d'emploi (TO-DE)

Mme DOINEAU

119

Suppression d'une demande de rapport au Gouvernement sur les conditions de travail des saisonniers agricoles

Article 5 quater
Rapport sur la réforme de l'assiette sociales des travailleurs indépendants

Mme DOINEAU

120

Suppression d'une demande de rapport sur la mise en oeuvre de la révision de l'assiette des cotisations et contributions sociales des travailleurs indépendants

Article 6
Réforme des allègements généraux de cotisations patronales

Mme DOINEAU

121

Modification du barème des allégements généraux proposé pour 2025

Mme DOINEAU

122

Modification du barème des allégements généraux proposé à partir de 2026

Mme DOINEAU

123

Instauration d'un comité de suivi

Mme DOINEAU

124

Neutralisation de la réforme des allégements généraux pour les dispositifs spécifiques (Lodéom...)

Article additionnel après l'article 7

Mme DOINEAU

125

Instauration d'une contribution de solidarité par le travail

Article 7 bis
Suppression du critère fiscal d'assujettissement à la CSG et à la CRDS
et précision de l'obligation incombant aux bénéficiaires de pensions
de vieillesse résidant à l'étranger de justifier annuellement
de leur existence par la production d'un certificat de vie délivré
par le consulat français

Mme GRUNY

126

Généralisation de l'usage de données biométriques afin de permettre aux retraités vivant à l'étranger et percevant une pension de retraite d'un régime français de s'acquitter de leur obligation de justifier annuellement de leur existence pour percevoir leur pension

Article 8
Transferts financiers au sein des administrations de sécurité sociale
et avec le budget de l'État (« article tuyau »)

Mme DOINEAU

127

Correction d'une erreur matérielle

Article 9
Clauses de sauvegarde des médicaments et dispositifs médicaux

Mme DOINEAU

128

Report de l'entrée en vigueur de la réforme de l'assiette de la clause de sauvegarde

Mme DOINEAU

129

Plafonnement de la clause de sauvegarde pesant sur certains médicaments

Article additionnel après l'article 9

Mme DOINEAU

130

Transmission au Parlement du rapport d'activité du CEPS

Article 9 bis
Réforme de la contribution sur les boissons à sucres ajoutés

Mme DOINEAU

131

Augmentation du barème de la première tranche de la contribution sur les boissons à sucres ajoutés

Mme DOINEAU

132

Augmentation du barème de la dernière tranche de la contribution sur les boissons à sucres ajoutés

Mme DOINEAU

133

Réforme du barème de la taxe sur les boissons édulcorées

Articles additionnels après l'article 9 bis

Mme DOINEAU

135

Majoration de l'accise sur les tabacs

Mme DOINEAU

134

Renforcement de la fiscalité sur les jeux d'argent et de hasard et instauration d'une contribution sur les publicités relatives à ces jeux

Article 9 quater
Taxe sur les publicités sur les prothèses auditives
au profit de la Caisse nationale d'assurance maladie

Mme DOINEAU

136

Suppression de l'article (taxe sur la publicité pour les audioprothèses)

Annexe - Rapport décrivant les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses par branche des régimes obligatoires de base et du régime général, les prévisions de recettes
et de dépenses des organismes concourant au financement de ces régimes
ainsi que l'objectif national des dépenses d'assurance-maladie pour les années 2025 à 2028

Mme DOINEAU

137

Précision que le rapport annexé décrit une simple prévision

Mme DOINEAU

138

Étalement sur quatre ans de l'augmentation des taux de la CNRACL

Article 15
Régulation des dépenses dans le champ conventionnel

Mme IMBERT

139

Fixation par les partenaires conventionnels d'objectifs quantitatifs ou qualitatifs en matière de répartition territoriale de l'offre de soins et de protection de l'indépendance des professionnels de santé

Mme IMBERT

140

Implication des partenaires conventionnels dans le suivi de l'application des accords

Mme IMBERT

141

Suppression de la faculté pérenne confiée à l'assurance maladie et au Gouvernement de baisser unilatéralement les tarifs

Mme IMBERT

142

Allongement du délai de conclusion d'un accord de maîtrise des dépenses dans le secteur de l'imagerie

Article 15 bis
Réguler les structures de soins non programmés

Mme IMBERT

144

Renforcement de l'encadrement des structures de soins non programmés

Mme IMBERT

143

Renforcement de l'encadrement des structures de soins non programmés

Mme IMBERT

145

Renforcement de l'encadrement des structures de soins non programmés

Article 15 quinquies
Demande de rapport sur le bilan des articles 33 et 36 de la LFSS 2023
et sur l'indexation automatique du tarif des actes infirmiers
sur le taux d'inflation

Mme IMBERT

146

Modification du champ du rapport demandé au Gouvernement afin de renforcer l'information et le contrôle du Parlement sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale

Article 16
Extension du champ de l'accompagnement
à la pertinence des prescriptions

Mme IMBERT

149

Suppression du critère de prise en charge tenant au respect des recommandations de la HAS

Mme IMBERT

147

Restriction du périmètre de la procédure aux produits, actes ou transports particulièrement coûteux ou présentant un risque avéré de mésusage

Mme IMBERT

148

Consultation préalable du dossier médical partagé

Mme IMBERT

150

Mise à disposition du prescripteur d'un téléservice dédié

Articles additionnels après l'article 16

Mme IMBERT

151

Instauration d'une « taxe lapin » sur les consultations non honorées

Mme IMBERT

152

Renforcement des incitations pour les professionnels à utiliser le dossier médical partagé en ville et en établissement

Mme IMBERT

153

Sécurisation de la carte vitale et accélération du déploiement de l'application carte vitale sécurisée

Mme IMBERT

154

Amélioration de la coordination entre assurance maladie obligatoire et complémentaires santé dans la lutte contre la fraude

Article 16 bis
Signature des certificats de décès par les infirmiers

Mme IMBERT

155

Fixation des modalités de prise en charge des frais relatifs à l'établissement du certificat de décès par les infirmiers

Article 16 ter
Demande de rapports portant d'une part, sur les travaux du Haut conseil des nomenclatures
et, d'autre part, sur l'établissement d'une liste annuelle
des mesures prioritaires destinées à améliorer la pertinence des soins

Mme IMBERT

156

Suppression de la demande de rapport sur l'avancée des travaux du Haut conseil des nomenclatures

Article 17
Conventionnement des entreprises de taxis avec l'Assurance maladie

Mme IMBERT

157

Insertion des dispositions dans un article de code réservé au transport par taxi

Mme IMBERT

158

Rédactionnel

Mme IMBERT

159

Rédactionnel

Mme IMBERT

161

Définition, au sein de la convention cadre nationale des taxis, de mesures d'intéressement concourant à la maitrise des dépenses, au développement des transports partagés et à la lutte contre la fraude

Mme IMBERT

160

Définition d'aides à l'acquisition d'outils de géolocalisation dans la convention cadre nationale des taxis

Article 17 bis
Renforcer l'accès aux soins gynécologiques des femmes
en situation de handicap

Mme IMBERT

162

Clarification rédactionnelle

Article 17 ter
Annualisation des examens de prévention bucco-dentaire
pour les jeunes de 3 à 24 ans

Mme IMBERT

164

Intégration de la prise en charge intégrale du ticket modérateur sur les examens de prévention bucco-dentaire dans le cahier des charges du contrat solidaire et responsable

Mme IMBERT

163

Dispense d'avance de frais sur les parts obligatoire et complémentaire des examens de prévention bucco-dentaire

Article 17 quater
Créer des centres de santé et de médiation en santé sexuelle

Mme IMBERT

165

Suppression d'une redondance rédactionnelle

Article 17 sexies
Suppression de la condition d'adressage préalable
pour l'accès à MonSoutienPsy

Mme IMBERT

166

Correction d'une erreur matérielle

Article 17 septies
Extension du champ de l'expérimentation de l'accès direct
aux masseurs-kinésithérapeutes en CPTS

Mme IMBERT

167

Suppression de l'article

Article 17 octies
Expérimentation de la prise en charge des tests de détection
de la soumission chimique

Mme IMBERT

168

Élargissement de l'expérimentation à la prise en charge d'analyses visant à détecter une soumission chimique

Article 17 nonies
Demande de rapport sur les dépenses de prévention inscrites
en loi de financement de la sécurité sociale

Mme IMBERT

169

Suppression de l'article

Article 18
Plafonnement des dépenses d'intérim des personnels non médicaux

Mme IMBERT

170

Clarification de la rédaction relative aux conditions de l'encadrement des dépenses d'intérim

Article 19
Lutter contre les pénuries de produits de santé

Mme IMBERT

171

Fixation par décret des conditions d'utilisation des stocks de sécurité

Mme IMBERT

172

Autorisation accordée au directeur général de l'ANSM de soumettre à des exigences renforcées les PGP des médicaments faisant l'objet de tensions d'approvisionnement régulières

Mme IMBERT

173

Suppression de l'extension du périmètre de l'obligation de dispensation à l'unité

Article 20
Conditionner la prise en charge de certains dispositifs médicaux numériques
à une utilisation effective par le patient

Mme IMBERT

174

Encadrement et clarification du dispositif

Mme IMBERT

175

Possibilité de modulation de la prise en charge de l'assurance maladie en fonction de l'utilisation effective de dispositifs médicaux numériques

Article 21
Modification des paramètres de l'expérimentation relative au régime de financement
des établissements accueillant des personnes âgées et dépendantes

Mme DESEYNE

176

Réduction de quatre à deux ans de la durée de l'expérimentation relative au régime de financement des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes et des unités de soins de longue durée

Article 22
Réforme du mode de calcul de la pension de retraite de base
des non-salariés agricoles

Mme GRUNY

177

Correction d'une erreur rédactionnelle afin d'appliquer de manière rétroactive les dispositions de l'article 22 aux non salariés exerçant en qualité de collaborateurs agricoles du 1er janvier 2022 au 1er janvier 2025.

Mme GRUNY

178

Présomption de salariat de l'aide familial agricole n'ayant pas opté pour un autre statut à l'expiration de la durée maximale de 5 années pendant laquelle il peut exercer en cette qualité.

Article 23
Décalage de la revalorisation des pensions et prestations
d'assurance vieillesse au 1er juillet

Mme GRUNY

194

Modification de la mesure d'économie portée à l'article 23 pour revaloriser toutes les pensions de retraite au 1er janvier au montant de la moitié de l'inflation, et faire bénéficier les retraites inférieures au Smic d'une revalorisation sur l'inflation au 1er juillet ainsi que d'un rattrapage du manque à gagner entre janvier et juillet.

Article 24
Mieux prendre en compte le préjudice personnel en consacrant
la dualité des prestations d'incapacité permanente de la branche AT-MP

Mme RICHER

179

Coordinations juridiques

Mme RICHER

180

Rédactionnel

Mme RICHER

181

Coordinations juridiques

Mme RICHER

182

Alignement du mode de calcul de la part fonctionnelle de l'indemnité en capital sur celui de la part fonctionnelle de la rente

Mme RICHER

183

Coordinations juridiques

Mme RICHER

184

Rédactionnel

Mme RICHER

185

Maintien en l'état de la règle du taux utile dans le calcul des rentes

Mme RICHER

186

Coordination juridique

Mme RICHER

187

Coordination juridique

Mme RICHER

188

Possibilité pour toutes les victimes de faute inexcusable de l'employeur de bénéficier d'une indemnisation en capital sur la majoration de la part fonctionnelle de leur rente

Mme RICHER

189

Information et audition des associations de victimes, à leur demande, sur tout projet de texte d'application de l'article 24

Mme RICHER

190

Pérennisation de la commission des garanties

Articles additionnels après l'article 24

M. HENNO

191

Suspension du versement du complément du mode de garde en cas de défaut de paiement du salaire dû à l'assistante maternelle ou à l'employé à domicile

M. HENNO

192

Détermination annuelle du plafond tarifaire des micro-crèches pour le bénéfice du CMG

Article 25
Dotations et transferts des régimes obligatoires de base

Mme IMBERT

193

Inscription dans la loi du montant des dotations aux organismes et fonds financés par l'assurance maladie

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, visualiser les apports de chaque assemblée, comprendre les impacts sur le droit en vigueur, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

https://www.senat.fr/dossier-legislatif/plfss2025.html


* 1 Voir notamment la proposition de loi organique n° 492 (2020-2021) tendant à renforcer le pilotage financier de la sécurité sociale et à garantir la soutenabilité des comptes sociaux de M. Jean-Marie Vanlerenberghe et le rapport du Sénat n° 825 (2020-2021) sur la proposition de loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale.

* 2 Sur la base de l'estimation de la croissance potentielle par la Commission européenne (mai 2024), de 1,1 % (soit identique à la prévision de croissance effective du Gouvernement) et de la prévision d'augmentation des prix du PIB du Gouvernement, l'augmentation du PIB potentiel en valeur serait de 3,5 % en 2024, contre 5,4 % pour les dépenses de la sécurité sociale.

* 3 Les montants présentés prennent en compte la mobilisation des mises en réserve de début d'année.

* 4 Le graphique présente la progression de l'Ondam entre 2023 et 2024 sur la base des données rectifiées pour l'Ondam 2023. En 2023, le sous-objectif relatif aux soins de ville s'établit finalement à 105,2 milliards d'euros contre 105 milliards d'euros selon la LFSS pour 2024, et le sous-objectif relatif aux établissements de santé s'établit à 103 milliards d'euros contre 102,5 milliards d'euros selon la LFSS pour 2024.

* 5 Les données citées dans l'encadré sont issues du rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale d'octobre 2024.

* 6 Réponse de la Fédération hospitalière de France (FHF) au questionnaire transmis par la rapporteure.

* 7 Cour des comptes, rapport annuel sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, mai 2024.

* 8 Avis du comité d'alerte sur l'évolution des dépenses de l'assurance maladie, daté du 26 juillet 2024.

* 9 Articles L. 722-4 et suivants du code rural et de la pêche maritime.

* 10 Article L. 321-6 du code de la sécurité sociale.

* 11 Cette cotisation est actuellement fixée à un taux de 2,24 % mais selon les données figurant en annexe 9 du PLFSS pour 2025, ce taux serait de 2,36 % au 1er janvier 2026.

* 12 Il s'agit des taux fixés au 1er janvier 2025 par l'article 3 du décret n° 2024-688 du 5 juillet 2024.

* 13 Loi n° 55-1052 du 6 août 1955 portant statut des Terres australes et antarctiques françaises et de l'île de La Passion-Clipperton.

* 14 Loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale.

* 15 Loïc Peyen, Rapport sur l'intelligibilité du droit dans les Terres australes et antarctiques françaises, 2022.

* 16 Articles L. 766-4 à L. 766-12 du code de la sécurité sociale.

* 17 Cour des comptes, Les Terres australes et antarctiques françaises et le groupement économique (GIE) Marion Dufresne II, 2022.

* 18 Décision n° 471203 du 9 février 2024 du Conseil d'Etat statuant au contentieux (FR:CECHR :2024:471203.20240209).

* 19 Le taux de droit commun de la cotisation annuelle du régime complémentaire obligatoire d'assurance vieillesse des travailleurs indépendants relevant de l'article L. 631-1 du code de la sécurité sociale, hors régime micro-social, était fixé, par l'article D. 635-7 de ce code, à 7 %. Les travailleurs indépendants pouvaient choisir un taux de cotisation nul. Toutefois, seuls 0,1 % d'entre eux avaient fait ce choix.

* 20 Décret n° 2024-484 du 30 mai 2024 modifiant les taux globaux de cotisations et contributions de certains travailleurs indépendants exerçant dans le cadre de la microentreprise.

* 21 Projet annuel de performances, programme 381, p. 6.

* 22 Article 62 de la loi n° 95-95.

* 23 Avis n° 188 (1994-1995) de la commission des affaires sociales du Sénat de M. Bernard Seillier, déposé le 21 décembre 1994.

* 24 Article D. 741-58 du code rural et de la pêche maritime.

* 25 Loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019.

* 26 Article D. 741-60 du code rural et de la pêche maritime.

* 27 La CCMSA ne dispose toutefois pas de données sur la proportion d'exploitants agricoles optant pour les allègements généraux.

* 28 Article 16 de la loi n° 2020 1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021.

* 29 Ce surplus est à diviser par deux pour 2025.

* 30 Conférence de presse de M. Gabriel Attal, Premier ministre, sur la crise agricole, le 21 février 2024.

* 31 Cf. commentaire de l'article 6.

* 32 Cet assouplissement est issu de l'article 13 de la loi n° 2010-237 du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010.

* 33 La loi d'orientation agricole n° 2006-11 du 5 janvier 2006.

* 34 L'article D. 521-4 du code rural et de la pêche maritime, aujourd'hui abrogé, disposait que la mise à disposition de salarié se faisait dans un plafond de 30 % puis de 49 % de la masse salariale totale de la Cuma.

* 35 Loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.

* 36 Décret n° 2016-1402 du 18 octobre 2016.

* 37 Amendements de M. Monnet, M. Potier, Mme Hamelet, M. Le Gac, M. Buchou, M. Fabrice Brun, Mme Duby-Muller, Mme Brulebois, M. Lepers, Mme Laporte, M. Neuder et M. Mandon.

* 38 Article 8 de la loi n° 99-1140 du 29 décembre 1999 de financement de la sécurité sociale pour 2000.

* 39 Rapport n° 58 (1999-2000), tome IV, fait par M. Charles Descours, au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 9 novembre 1999.

* 40 Cette hausse était motivée par la réduction des taux de droit commun, en contrepartie de la création de la CSG, réduisant l'avantage comparatif des jeunes agriculteurs par rapport à leurs confrères.

* 41 Également déterminés par la loi jusqu'à la codification des dispositions en 2000.

* 42 Des ajustements à ces âges sont possibles dans des conditions prévues à l'article D. 731-51 du code rural et de la pêche maritime.

* 43 Article D. 731-52 du code rural et de la pêche maritime.

* 44 Prévue à l'article L. 131-6-4 du code de la sécurité sociale.

* 45 Loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018.

* 46 Article L. 613-1 du code de la sécurité sociale.

* 47 Article L. 722-4 du code rural et de la pêche maritime.

* 48 Article D. 613-1 du code de la sécurité sociale.

* 49 Article 3 de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat.

* 50 Codifié au deuxième alinéa de l'article L. 731-13 du code rural et de la pêche maritime.

* 51 Les modalités de ce droit d'option sont prévues à l'article D. 731-51 du code rural et de la pêche maritime.

* 52 Conférence de presse de M. Gabriel Attal, Premier ministre, sur la crise agricole, le 21 février 2024.

* 53 Cour des comptes, La politique d'installation des nouveaux agriculteurs et de transmission des exploitations agricoles, communication à la commission des finances du Sénat, avril 2023.

* 54 Le gain varie selon l'année d'application de l'exonération JA.

* 55 Loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018.

* 56 Ceux-ci se partagent traditionnellement entre gérants de SARL/EURL, les dirigeants de SA/SAS/SASU et les autres dirigeants assimilés salariés (SNC, GIE).

* 57 Loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024.

* 58 Le prélèvement social des micro entrepreneurs était déjà unifié, puisqu'il s'agit aussi bien en matière fiscale que sociale du chiffre d'affaires réalisé déduit de frais professionnels forfaitaires.

* 59 Article D. 136-5 du code de la sécurité sociale.

* 60 Exposé sommaire de l'amendement n°2342 à l'Assemblée nationale.

* 61 Articles 151 et 238 quindecies du code général des impôts.

* 62 Loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024.

* 63 Cette définition est notamment codifiée à l'article L. 136-3 du code de la sécurité sociale prévoyant l'assiette de la CSG.

* 64 Les indemnités journalières ou prestations versées au titre de la maladie (hors affection de longue durée, la maternité, paternité et l'accueil de l'enfant).

* 65 Article L. 731-14 du code de la sécurité sociale.

* 66 Voir le commentaire de l'article 5 bis.

* 67 Ordonnance relative à l'amélioration de la santé publique, à l'assurance maladie, maternité, invalidité, décès et autonomie, au financement de la sécurité sociale à Mayotte et à la caisse de sécurité sociale de Mayotte.

* 68 Loi organique n° 2010-1486 du 7 décembre 2010 relative au Département de Mayotte.

* 69 Loi n° 2010-1487 du 7 décembre 2010 relative au Département de Mayotte.

* 70 Ordonnance n° 2013-837 relative à l'adaptation du code des douanes, du code général des impôts, du livre des procédures fiscales et d'autres dispositions législatives fiscales et douanière applicables à Mayotte a précisé les conditions de cette application et prévu les adaptations nécessaires à la situation de Mayotte.

* 71 Annexe 9 du PLFSS 2025, p. 10.

* 72 Article 92 de la loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale.

* 73 Hors micro-entrepreneurs.

* 74 Urssaf Mayotte, « Reprise du recouvrement des cotisations pour les travailleurs indépendants à Mayotte », communiqué d'août 2024.

* 75 Loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024.

* 76 Ce chiffre de 800 000 emplois figure notamment dans un article publié en janvier 2006 par Yannick L'Horty (« Dix ans d'évaluation des exonérations sur les bas salaires », in Connaissance de l'emploi, n° 24, janvier 2006), synthétisant la quinzaine d'études qui avaient été faites sur le sujet.

* 77 « Une partie du débat sur l'efficacité du CICE a été accaparée par la comparaison des effets emploi entre les deux équipes de recherche mandatées par France Stratégie (effets nuls pour le LIEPP, effets positifs pour le TEPP), entraînant des commentaires précis de plusieurs discutants ainsi qu'une tentative de réconciliation des résultats par l'Insee. Le comité de suivi du CICE a retenu finalement l'ordre de grandeur de 100 000 emplois créés ou sauvegardés » (France Stratégie, 2018, 2020) » (Antoine Bozio, Étienne Wasmer, Les politiques d'exonérations de cotisations sociales : une inflexion nécessaire, 3 octobre 2024).

* 78 Yannick L'Horty, Philippe Martin, Thierry Mayer, « Baisses de charges : stop ou encore ? », Les notes du Conseil d'analyse économique, n° 49, janvier 2019.

* 79 Marc Ferracci, Jérôme Guedj, « Rapport d'information en conclusion des travaux de la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale sur le contrôle de l'efficacité des exonérations de cotisations sociales », n° 1685 (XVIe législature), 28 septembre 2023.

* 80 Mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale.

* 81 Antoine Bozio, Étienne Wasmer, Mission sur l'articulation entre les salaires, le coût du travail et la prime d'activité : quels effets sur l'emploi, le niveau des salaires et l'activité économique ?, document d'étape, 25 avril 2024.

* 82 Antoine Bozio, Étienne Wasmer, Les politiques d'exonérations de cotisations sociales : une inflexion nécessaire, 3 octobre 2024.

* 83 Le rapport propose toutefois trois autres scénarios, dénommés « scénario adapté aux moins de 26 ans », « suppression des bandeaux » et « recyclage des bandeaux », augmentant les recettes de respectivement 0,8 milliard d'euros, 12,2 milliards d'euros et 0,8 milliard d'euros.

* 84 Cf. en particulier Yannick L'Horty, Philippe Martin, Thierry Mayer, « Baisses de charges : stop ou encore ? », Les notes du Conseil d'analyse économique, n° 49, janvier 2019.

* 85 Pierre Cahuc, Gilbert Cette et Yannick L'Horty.

* 86 L'élasticité de l'emploi à son coût est le taux d'évolution de l'emploi quand son coût augmente de 1 %. Par exemple si cette élasticité est de - 1, une augmentation du coût salarial de 1 % suscite une diminution de l'emploi de 1 %.

* 87 Pour les entreprises de plus de 50 salariés.

* 88 La direction de la sécurité sociale (DSS) considère que l'impact de l'intégration de la prime de partage de la valeur se traduira en 2025 non par un effet plus important qu'en 2024 (par le passage en année pleine), mais par le recours des entreprises à d'autres formes de complément de salaire.

* 89 Le tableau figurant dans l'évaluation préalable indique un impact nul sur le solde de l'Unédic.

* 90 Source : Cour des comptes, rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, mai 2024.

* 91 Impôt sur le revenu, cotisations salariales, contributions sociales y compris CSG.

* 92 Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités.

* 93 En Guadeloupe, en Guyane, en Martinique et à La Réunion.

* 94 L'habilitation concernerait les « réductions dégressives de cotisations patronales dont le bénéfice est cumulable avec les réductions prévues aux articles L. 241-2-1 [bandeau maladie] et L. 241-6-1 [bandeau famille] du code de la sécurité sociale dans leur rédaction antérieure à la présente loi mais ne peut se cumuler avec les dispositions prévues à l'article L. 241-13 [allégement dégressif] ».

* 95 Cet article tendait à exprimer les seuils jusqu'auxquels s'appliquent les bandeaux maladie et famille en multiples du Smic de fin 2023, réduisant ainsi progressivement les seuils maximaux des bandeaux en multiples du Smic de l'année en cours (cf. I.A.3 supra).

* 96 « Patrick Martin : « Baisser les allègements de charges détruira des centaines de milliers d'emplois », Les Échos, 9 octobre 2024.

* 97 Observatoire français des conjonctures économiques, « La croissance à l'épreuve du redressement budgétaire, Perspectives 2024-2025 pour l'économie française », OFCE policy brief n° 137, 16 octobre 2024.

* 98 Principales hypothèses (inspirées du « rapport Bozio-Wasmer ») : élasticité de l'offre de travail par les entreprises à son coût de - 0,6 au niveau du Smic, dont la valeur absolue diminue linéairement jusqu'à ce qu'elle devienne égale à - 0,1 à partir de 2 Smic ; augmentation du coût du travail sans impact sur le salaire brut au niveau du Smic, cet impact augmentant linéairement pour être « capté » pour 60 % par de moindres salaires à partir de 1,2 Smic.

* 99 Malgré la similitude du résultat global, les barèmes de 2025 et 2026 auraient des conséquences très différentes. Dans le cas du barème 2025, les allégements n'étant accrus pour aucun niveau de salaire, il n'y aurait que des destructions d'emplois, concentrées sur les salaires proches du Smic. Dans le cas du barème de 2026 en revanche, les destructions d'emplois, toujours concentrées sur les salaires proches du Smic, et plus nombreuses, seraient en partie compensées par des créations d'emplois autour de 1,5 Smic.

* 100 Selon l'hypothèse d'un coût de 20 000 euros par chômeur (se répartissant entre 15 000 euros d'indemnisation et 5 000 euros de moindres cotisations).

* 101 Le présent article propose une réduction des allégements de 4 points au niveau du Smic, contre 4,05 points selon le « rapport Bozio-Wasmer ».

* 102 Lodéom SPM et Lodéom SPM renforcée.

* 103 Article L. 6222-27 du code du travail.

* 104 Article L. 136-1-1 du code de la sécurité sociale.

* 105 Le a du 1° du III de l'article L. 136-1-1 du code de la sécurité sociale procède à cette exclusion. Pour rappel, le taux de CSG applicable aux revenus d'activité salariée est de 9,2 % - dont 6,8 % déductible de l'impôt sur le revenu - et celui de CRDS, non déductible de l'impôt sur le revenu pour sa part correspond à 0,5 %.

* 106 Article L. 6243-2 du code de la sécurité sociale.

* 107 Loi n° 94-637 du 25 juillet 1994 relative à la sécurité sociale.

* 108 Article 81 bis du code général des impôts.

* 109 Igas-IGF, Revue des dépenses publiques d'apprentissage et de formation professionnelle, mars 2024.

* 110 Article L124-1 du code de l'éducation nationale.

* 111 Au titre du b du 1° du III de l'article L. 136-1-1 du code de la sécurité sociale.

* 112 Elle est désormais de vingt-neuf ans, contre vingt-six ans auparavant.

* 113 Revue de dépense Igas-IGF.

* 114 Ibid.

* 115 La décision du Conseil constitutionnel n° 90-285 du 28 décembre 1990 relative à la loi de finances pour 1991 ayant qualifié la CSG d'imposition de toute nature visée par l'article 34 de la constitution, elle n'est pas constitutive d'acquisition de droit.

* 116 Décret n° 2014-1514 du 16 décembre 2014 portant application des dispositions relatives aux cotisations de sécurité sociale des apprentis et fixant les modalités de prise en compte des périodes d'apprentissage au titre de l'assurance vieillesse.

* 117 Loi n° 2005-412 du 3 mai 2005 relative à la création du registre international français.

* 118 Article 137 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 de finances pour 2007.

* 119 Loi n° 2016-816 du 20 juin 2016 pour l'économie bleue, dite « loi Leroy ».

* 120 Communication C(2004) 43 de la Commission européenne.

* 121 Cette condition est assurée par les services de l'État qui procèdent à la délivrance d'une autorisation préalable le cas échéant.

* 122 D'après l'Enim.

* 123 Cour des comptes, L'Établissement national des invalides de la marine, 2024.

* 124 Annexe n°9 du PLFSS.

* 125 Codifié aux articles 44 sexies A et 44 sexies-0 A du code général des impôts.

* 126 Article 69 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024.

* 127 Sociétés de capital-risque, fonds communs de placement à risque, fonds professionnels de capital investissement, sociétés financières d'innovation.

* 128 Étudiants, personnes titulaires depuis moins de cinq ans d'un diplôme conférant le grade de master ou d'un doctorat, ou personnes affectées à des activités d'enseignement ou de recherche.

* 129 Article 44 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024.

* 130 Décret n° 2024-464 du 24 mai 2024 relatif à la définition des indicateurs de performance économique prévus au c du 3° de l'article 44 sexies-0 A du code général des impôts.

* 131 L'article 44 sexies A du code général des impôts précise également qu'elles bénéficient d'un abattement de 50 % sur les bénéfices dégagés lors de l'exercice immédiatement postérieur à la période d'exonération.

* 132 Articles 1466 D du code général des collectivités territoriales.

* 133 Articles 1383 D du code général des collectivités territoriales.

* 134 Article 199 terdecies-0 A du code général des impôts.

* 135 Article 131 de la loi de finances pour 2004.

* 136 Loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées (titre II).

* 137 Article L. 3133-7 du code du travail.

* 138 Article L. 3133-12 du code du travail.

* 139 Article L. 137-41 du code du travail.

* 140 Article L. 14-10-4 du code de l'action sociale et des familles.

* 141 Loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées (titre III).

* 142 Article L. 14-10-1 du code de l'action sociale et des familles.

* 143 Loi n° 2020 992 du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l'autonomie (article 5).

* 144 CNSA, Les chiffres clés de l'aide à l'autonomie 2024, juin 2024.

* 145 CNSA, De la journée de solidarité au Service public de l'autonomie, communiqué de presse, mai 2024.

* 146 Projections du nombre de personnes âgées en perte d'autonomie par lieu de vie (modèle LIVIA), DREES, mise à jour du 6 mars 2024.

* 147 Dominique Libault, Grand âge, le temps d'agir, concertation « Grand âge et autonomie », mars 2019.

* 148 Annexe du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025.

* 149 Se référer au commentaire de l'article 31.

* 150 Rapport d'information fait au nom de la commission des affaires sociales par Chantal Deseyne, Solange Nadille et Anne Souyris, Ehpad : un modèle à reconstruire, septembre 2024.

* 151 Laurent Vachey, La branche autonomie : périmètre, gouvernance et financement, septembre 2020.

* 152 Loi n° 90-1168 du 29 décembre 1990 de finances pour 1991.

* 153 Il existe également un taux médian et un taux réduit, respectivement de 6,6 % et 3,8 % selon le niveau de la pension.

* 154 CJCE, 15 février 2000, aff. C-34/98 et C-169-98, Commission européenne c/ France.

* 155 Cette règle est posée par l'article 13 du règlement CEE n° 1408/71 portant coordination des régimes de sécurité sociale des États membres.

* 156 Cass. soc., 15 juin 2000, n° 98-12.469 et Cass. soc., 18 octobre 2001, n° 00-12. 463.

* 157 CJCE, 26 février 2015, aff. C-623/13, Ministre de l'économie et des finances c/ Gérard de Ruyter.

* 158 Cumul de l'exonération applicable aux jeunes agriculteurs et des taux réduits de droit commun des cotisations maladie et famille.

* 159 Arrêté du 27 décembre 2023 fixant la répartition de la fraction de la taxe sur la valeur ajoutée affectée à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale ainsi que le plafonnement de la compensation prévu au 7° bis de l'article L. 225-1-1 du code de la sécurité sociale. Selon cet arrêté, cette reprise (via une moindre compensation des allégements généraux) est de 2 milliards d'euros en 2023, 2,6 milliards d'euros en 2024, 3,35 milliards d'euros en 2025 et 4 milliards d'euros en 2025.

* 160 Selon les termes de l'évaluation préalable.

* 161 Cumul de l'exonération applicable aux jeunes agriculteurs et des taux réduits de droit commun des cotisations maladie et famille.

* 162 Article L. 123-37 du code du commerce et décret n° 2022-1014 du 19 juillet 2022 relatif au Registre national des entreprises et portant adaptation d'autres registres d'entreprises.

* 163 Règlement d'exécution (UE) n° 282/2011 du Conseil du 15 mars 2001 portant mesures d'exécution de la directive 2006/112/CE relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée.

* 164 Ordonnance n° 2015-682 du 18 juin 2015 relative à la simplification des déclarations sociales des employeurs, article 9 ; décret n° 2016-611 du 18 mai 2016 fixant les délais limites pour la transmission obligatoire de la déclaration sociale nominative, article 1er.

* 165 Loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un État au service d'une société de confiance, article 43 ; décret n° 2018-1048 du 28 novembre 2018 fixant les dates limites pour la transmission obligatoire de la déclaration sociale nominative pour les régimes mentionnés aux 1°, 2° et 3° de l'article R. 711-1 du code de la sécurité sociale, article 1er.

* 166 Cour des comptes, La mise en oeuvre du prélèvement à la source, novembre 2021.

* 167 Décret n° 2019-969 du 18 septembre 2019 relatif à des traitements de données à caractère personnel portant sur les ressources des assurés sociaux.

* 168 Principe codifié à l'article L. 114-8 du code des relations entre le public et l'administration.

* 169 Loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023 (article 13).

* 170 Loi n° 2007-1786 du 19 décembre 2007 de financement de la sécurité sociale pour 2008 (article 115).

* 171 Comité créé par le décret n°2006-1296 du 23 octobre 2006 créant un Comité national de lutte contre la fraude en matière de protection sociale.

* 172 Article L. 114-19 du code de la sécurité sociale.

* 173 Haut conseil du financement de la protection sociale, Lutte contre la fraude sociale : état des lieux et enjeux, juillet 2024.

* 174 Fiches d'évaluation préalable des articles du PLFSS pour 2024 (annexe 9), pages 38 et 42.

* 175 Nouvel article L. 613-6-1 du code de la sécurité sociale.

* 176 Article 293 B du code général des impôts.

* 177 Article 31 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999.

* 178 Article 21 de la loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019.

* 179 Article 28 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024.

* 180 Article L. 138-16 du code de la sécurité sociale.

* 181 Article 18 de la loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023.

* 182 Article L. 138-12 du code de la sécurité sociale.

* 183 Ibid.

* 184 Article L. 138-13 du code de la sécurité sociale.

* 185 Arrêté du 31 janvier 2022 fixant le barème prévu à l'article L. 138-13 du code de la sécurité sociale.

* 186 Article L. 138-10 du code de la sécurité sociale.

* 187 Premier alinéa de l'article L. 162-17 du code de la sécurité sociale.

* 188 Deuxième alinéa de l'article L. 162-17 du code de la sécurité sociale.

* 189 Article L. 162-22-7 du code de la sécurité sociale.

* 190 Article L. 162-23-6 du code de la sécurité sociale.

* 191 Articles L. 5121-12 et 5121-12-1 du code de la sécurité sociale.

* 192 Article L. 5124-13 du code de la sécurité sociale.

* 193 Article L. 162-16-5-1-2 du code de la sécurité sociale.

* 194 Article 62 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022.

* 195 Article L. 1413-4 du code de la santé publique.

* 196 IV de l'article 28 de la loi n° 2023-1250 du26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024.

* 197 Article L. 138-11 du code de la sécurité sociale.

* 198 Article 18 de la loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 précitée.

* 199 Article 138-15 du code de la sécurité sociale.

* 200 Article 23 de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020.

* 201 Article L. 138-19-8 du code de la sécurité sociale.

* 202 Article L. 162-22-7 du code de la sécurité sociale.

* 203 Article L. 165-1-5 du code de la sécurité sociale.

* 204 Article L. 138-19-10 du code de la sécurité sociale.

* 205 Article L. 138-19-9 du code de la sécurité sociale.

* 206 Article L. 138-19-12 du code de la sécurité sociale.

* 207 Article 28 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024.

* 208 Article L. 138-10 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue de la LFSS pour 2024.

* 209 Article L. 138-12 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue de la LFSS pour 2024.

* 210 Article L. 138-15 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue de la LFSS pour 2024.

* 211 Annexe n° 9 « Fiches d'évaluation préalable des articles du projet de loi » jointe au PLFSS pour 2024, p. 114.

* 212 Comité économique des produits de santé, Rapport d'activité 2022, janvier 2024, p. 71.

* 213 Le CEPS décompose, chaque année, l'évolution observée des ventes en ville en trois effets distincts : l'effet prix correspondant à l'évolution des prix unitaires, l'effet boîtes correspondant à l'évolution du nombre de boîtes vendues et l'effet structure reflétant, le cas échéant, le déport des ventes vers les spécialités les plus onéreuses. L'effet structure explique l'essentiel de la progression des ventes en ville observée depuis 2018.

* 214 Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques, Les dépenses de santé en 2022. Résultats des comptes de la santé, 2023, p. 88.

* 215 Article L. 162-16-4 du code de la sécurité sociale.

* 216 Accord-cadre du 5 mars 2021 entre le Comité économique des produits de santé et Les Entreprises du médicament (Leem).

* 217 Article L. 162-18 du code de la sécurité sociale.

* 218 Article L. 162-16-5-1-1 du code de la sécurité sociale.

* 219 Article L. 162-16-5-2 du code de la sécurité sociale.

* 220 Annexe n° 5 « Ondam et dépenses de santé » jointe au PLFSS pour 2025, p. 35.

* 221 Évaluations préalables annexées aux PLFSS pour 2022, 2023, 2024 et 2025.

* 222 Rapport d'activité 2022 du CEPS, p. 66.

* 223 Rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale. Résultats 2022. Prévisions 2023 et 2024, septembre 2023, p. 73.

* 224 Article 4 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024.

* 225 Annexe n° 9 « Fiches d'évaluation préalable des articles du projet de loi » jointe au PLFSS pour 2024, p. 6.

* 226 Article 28 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024.

* 227 Défini au III de l'article L. 162-16-5 du code de la sécurité sociale.

* 228 Défini au III de l'article L. 162-16-6 du code de la sécurité sociale.

* 229 Arrêté du 12 février 2015 fixant la fraction d'écart médicament indemnisable en rétrocession mentionnée au II de l'article L. 162-16-5 du code de la sécurité sociale.

* 230 Article L. 162-22-7 du code de la sécurité sociale.

* 231 Article L. 162-23-6 du code de la sécurité sociale.

* 232 Article L. 162-18-1 du code de la sécurité sociale.

* 233 Article L. 5121-12-1-2 du code de la santé publique.

* 234 Annexe 9 « Fiches d'évaluation préalable des articles du projet de loi », p. 63.

* 235 Ibid.

* 236 Article 3 de la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 de financement de la sécurité sociale pour 2015.

* 237 L'article 30 de la loi n° 2016-1827 du 23 décembre 2016 de financement de la sécurité sociale pour 2017 fixait encore, en application de ces dispositions, un « montant W » à 600 millions d'euros.

* 238 Annexe 9 « Fiches d'évaluation préalable des articles du projet de loi », p. 64.

* 239 IV de l'article 28 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024.

* 240 Annexe 9 « Fiches d'évaluation préalable des articles du projet de loi », p. 62.

* 241 En application de l'article L. 138-13 du code de la sécurité sociale, celui-ci est communiqué à chaque entreprise, au plus tard, le 1er octobre de l'année suivante.

* 242 Rapport n° 789 (2022-2023) de Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale, déposé le 28 juin 2023, p. 44.

* 243 Réponses écrites du Leem au questionnaire transmis par la rapporteure générale.

* 244 Article 18 de la loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023.

* 245 Voir, notamment, l'article L. 162-16-4 du code de la sécurité sociale, modifié par l'article 65 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022 pour permettre la prise en compte de la sécurité d'approvisionnement du marché français que garantit l'implantation des sites de production dans la fixation du prix.

* 246 Voir, par exemple, les avoirs sur remises au titre du guichet du Conseil stratégique des industries de santé (CSIS) permis par l'article 29 de l'accord-cadre du 5 mars 2021 précité, visant les entreprises ayant réalisé des investissements dans l'Union européenne et notamment en France.

* 247 Rapport n° 828 (2022-2023), Pénurie de médicaments : Trouver d'urgence le bon remède, tome I, déposé le 4 juillet 2023, p. 265.

* 248 Agnès Audier, Claire Biot, Frédéric Collet, Anne-Aurélie Epis de Fleurian, Magali Leo et Mathilde Lignot Leloup, Pour un “new deal” garantissant un accès égal et durable des patients à tous les produits de santé, août 2023.

* 249 Ibid., pp. 63-64.

* 250 Réponses écrites au questionnaire adressé par la rapporteure générale.

* 251 Rapport n° 789 (2022-2023) de Mme Élisabeth Doineau sur le projet de loi d'approbation des comptes de la sécurité sociale pour l'année 2022, déposé le 28 juin 2023, p. 43.

* 252 Rapport n° 828 (2022-2023) Pénurie de médicaments : Trouver d'urgence le bon remède, tome I, déposé le 4 juillet 2023, p. 263.

* 253 Réponses écrites du Leem au questionnaire transmis par la rapporteure générale.

* 254 Amendement n° 1328 du Gouvernement au PLFSS pour 2024, adopté par le Sénat.

* 255 Article L. 162-17-3 du code de la sécurité sociale.

* 256 Articles L. 162-17-3 et D. 162-2-1 du code de la sécurité sociale.

* 257 Article L. 162-16-4 du code de la sécurité sociale.

* 258 Article L. 162-18 du code de la sécurité sociale.

* 259 Rapport d'activité du CEPS pour 2022, p. 62.

* 260 Article L. 162-16-4 du code de la sécurité sociale.

* 261 Annexe n° 5 Ondam et dépenses de santé jointe au PLFSS pour 2025 déposé, p. 36.

* 262 Article 138-13 du code de la sécurité sociale.

* 263 Article L. 162-17-3 du code de la sécurité sociale.

* 264 Rapport d'activité du CEPS pour 2022.

* 265 Article L.O. 111-4-1 du code de la sécurité sociale.

* 266 Cour des comptes, relevé d'observations définitives, Le CEPS : un organisme à conforter pour une régulation plus efficace, 29 octobre 2024.

* 267 Amendement n° 919 de Mme Poncet Monge au PLFSS pour 2023, adopté par le Sénat.

* 268 Amendement n° 779 de Mme Souyris au PLFSS pour 2024, adopté par le Sénat.

* 269 Rapport fait au nom de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, en nouvelle lecture, sur le PLFSS pour 2023, p. 115.

* 270 Amendement n° 837 au PLFSS pour 2023 déposé à l'Assemblée nationale, en nouvelle lecture, par le Gouvernement.

* 271 Cour des comptes, relevé d'observations définitives, Le CEPS : un organisme à conforter pour une régulation plus efficace, 29 octobre 2024.

* 272 Article 19 de la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018.

* 273 Yann Le Bodo, Françoise Jabot, Éric Breton, Fabrice Étilé, Sébastien Lecocq, Christine Boizot-Szantai, Chantal Julia, Marine Friant-Perrot, Soda tax, rapport de recherche sur l'élaboration, la mise en oeuvre et les effets de la taxe soda appliquée en France depuis juillet 2018, mai 2024.

* 274 Elisabeth Doineau, Cathy Apourceau-Poly, La fiscalité comportementale en santé : stop ou encore ? rapport d'information n° 638 (2023-2024), mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) du Sénat, 29 mai 2024.

* 275 Cyrille Isaac-Sibille, Thierry Frappé, « Les mesures récentes relatives à la « fiscalité comportementale », in Rapport d'information en conclusion des travaux du Printemps social de l'évaluation, n° 1318 (XVIe législature), commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, 2 juin 2023.

* 276 Capucine Grégoire, Pierre Prady, La fiscalité nutritionnelle, Les notes du CPO, n° 5, juillet 2023.

* 277 Élisabeth Doineau, Cathy Apourceau-Poly, La fiscalité comportementale en santé : stop ou encore ?, rapport d'information n° 638 (2023-2024), mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) du Sénat, 29 mai 2024.

* 278 Enquête sur la santé et les consommations lors de la journée défense et citoyenneté.

* 279 Article L. 320-6 du code de la sécurité intérieure.

* 280 Élisabeth Doineau, Cathy Apourceau-Poly, La fiscalité comportementale en santé : stop ou encore ?, rapport d'information n° 638 (2023-2024), mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) du Sénat, 29 mai 2024.

* 281 Organisation mondiale de la Santé, Rapport de l'OMS sur l'épidémie mondiale de tabagisme, 2021 - Les produits nouveaux et émergents, 2021.

* 282 Centers for Disease Control and Prevention (CDC), « Response to increases in cigarette prices by race/ethnicity, income, and age groups-United States, 1976-1993 », Morbidity and Mortality Weekly Report (MMWR), 31 juillet 1998 ; 47(29):605-9. Selon cet article, aux Etats-Unis, en 1976-1993, l'élasticité-prix aurait été de - 0,15 pour la prévalence et de - 0,10 pour la consommation, conduisant à une élasticité-prix totale de - 0,25. Cet ordre de grandeur est repris dans International Agency for Research on Cancer (IARC), « Effectiveness of Tax and Price Policies for Tobacco Control », IARC handbooks of cancer prevention: tobacco control, volume 14, 2011.

* 283 La rémunération des buralistes, ou « remise », est fixée réglementairement en proportion du prix de vente des cigarettes (elle est actuellement fixée à 10,19 %). En supposant une élasticité-prix de la demande de - 0,4, une augmentation de 10 % du prix des cigarettes réduit le nombre de cigarettes vendues de 4 % et augmente le chiffre d'affaires (et donc la rémunération des buralistes) de (0,96×1,1-1)×100 = 5,6 %.

* 284 Selon la confédération des buralistes, en 2021 la part du tabac dans le chiffre de ventes des buralistes était de 45 % en moyenne.

* 285 Les marges sont plus importantes pour des activités comme le bar, la restauration, la vente de cigarettes électroniques, la restauration légère.

* 286 Élisabeth Doineau, Cathy Apourceau-Poly, La fiscalité comportementale en santé : stop ou encore ?, rapport d'information n° 638 (2023-2024), mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) du Sénat, 29 mai 2024.

* 287 Proposition n° 4 : « Augmenter le prix des produits du tabac d'au moins 3,25 % par an hors inflation jusqu'en 2040, par la fiscalité et par une augmentation du taux de rémunération des buralistes ».

* 288 Proposition n° 5 : « Chiffrer selon une méthodologie fiable et transparente le nombre de cigarettes vendues dans le cadre du marché parallèle, et réduire ce nombre, par un renforcement de la lutte contre le commerce illicite, par des actions de prévention ciblées dans le cas du commerce transfrontalier licite, et en promouvant une révision en ce sens des directives tabac (harmonisation des prix à la hausse, application obligatoire des règles sur l'approvisionnement proportionné des marchés prévues par le protocole de 2012 à la convention de l'OMS sur la lutte antitabac) ».

* 289 Cigares et cigarillos, cigarettes, tabac à rouler, tabacs à chauffer commercialisés en bâtonnets, autres tabacs à chauffer, autres tabacs à fumer ou à inhaler après avoir été chauffés, tabacs à priser, tabacs à mâcher.

* 290 Elle prévoit en outre que la fiscalité du tabac est dorénavant liée à l'inflation de l'année précédente (et non plus à celle de l'année n-2), à partir de la prévision de l'indice des prix figurant dans le rapport économique, social et financier (Resf) joint au projet de loi de finances pour l'année de la révision.

* 291 Le prix de vente étant par nature TTC, la TVA qui s'applique est égale au taux normal de TVA (ici, 20 %, soit 0,2) divisé par la somme de 1 et du taux normal (ici, 1+0,2 = 1,2).

* 292 Article L. 138-9 du code de la sécurité sociale.

* 293 Arrêté du 22 août 2014 fixant les plafonds de remises, ristournes et autres avantages commerciaux et financiers assimilés prévus à l'article L. 138-9 du code de la sécurité sociale.

* 294 Article L. 138-9-1 du code de la sécurité sociale.

* 295 Rapport n° 828 (2022-2023) Pénurie de médicaments : Trouver d'urgence le bon remède, tome I, déposé le 4 juillet 2023.

* 296 Article L. 162-16-4 du code de la sécurité sociale.

* 297 Cour des comptes, Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, septembre 2017, p. 377.

* 298 Article 25 de l'accord-cadre du 5 mars 2021 entre le Comité économique des produits de santé et Les Entreprises du médicament (Leem).

* 299 Article L. 5125-23-2 du code de la santé publique.

* 300 Arrêté du 31 octobre 2024 portant modification de l'arrêté du 12 avril 2022 modifié fixant la liste des groupes biologiques similaires substituables par le pharmacien d'officine et les conditions de substitution et d'information du prescripteur et du patient telles que prévues au 2° de l'article L. 5125-23-2 du code de la santé publique.

* 301 Cnam, Améliorer la qualité du système de santé et maîtriser les dépenses. Propositions de l'assurance maladie pour 2025, pp. 367 et 368.

* 302 Drees, Les dépenses de santé en 2022 - Résultats des comptes de la santé - Édition 2023

* 303 Communication publiée en annexe de : Corinne Imbert, 100 pour cent santé : des promesses partiellement tenues, un suivi à renforcer, rapport n° 832, 2021-2022, 27 juillet 2022.

* 304 Irdes, Financement et accès aux aides auditives en Europe : une comparaison entre la France, l'Angleterre, la Belgique et la Suède, Questions d'économie de la santé, octobre 2024.

* 305 Drees, La complémentaire santé : acteurs, bénéficiaires, garanties - Édition 2024

* 306 Igas, Évaluation de la filière auditive, novembre 2021.

* 307 Article R. 5213-1 du code de la santé publique.

* 308 Les montants de la compensation par l'État, reposant sur un calcul en comptabilité de caisse, ne peuvent pas être directement rapprochés des coûts des exonérations figurant dans les tableaux habituellement utilisés pour chiffrer le coût des exonérations, établis sur la base des droits constatés.

* 309 Malgré le changement de nom au 1er janvier 2021 de l'Acoss, devenue « Urssaf Caisse nationale », le code de la sécurité sociale se réfère toujours à l'« Agence centrale des organismes de sécurité sociale ».

* 310 Contrairement à ce qui a été le cas en 2023, la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) n'aurait pas de besoins de financement en 2024.

* 311 Selon l'exposé des motifs, « les ressources mobilisées par l'Acoss doivent permettre de couvrir également, outre l'ensemble des besoins de financement du régime général de sécurité sociale, ceux du régime des exploitants agricoles, du régime de sécurité sociale dans les mines, du régime spécial de la Caisse de prévoyance et retraite du personnel ferroviaire et du régime d'assurance vieillesse des fonctionnaires locaux et hospitaliers (CNRACL), auxquels l'Acoss est autorisée à accorder des avances de trésorerie ».

* 312 Cette annexe se distingue en cela des annexes 1 à 9 du PLFSS, destinées à l'information du citoyen et du Parlement et qui n'ont pas vocation à être annexées à la future LFSS.

* 313 Cnam, Améliorer la qualité du système de santé et maîtriser les dépenses. Propositions de l'assurance maladie pour 2023, p. 206.

* 314 Annexe 5 « Ondam et dépenses de santé », p. 30.

* 315 Cnam, Améliorer la qualité du système de santé et maîtriser les dépenses. Propositions de l'assurance maladie pour 2023, p. 209.

* 316 Rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale, octobre 2024, p. 83.

* 317 Cnam, Améliorer la qualité du système de santé et maîtriser les dépenses. Propositions de l'assurance maladie pour 2023, pp. 211-212.

* 318 Cnam, Améliorer la qualité du système de santé et maîtriser les dépenses. Propositions de l'assurance maladie pour 2025, p. 268.

* 319 Rapport d'information n° 776 (2023-2024) Financiarisation de l'offre de soins : une OPA sur la santé ? de Mme Corinne Imbert, MM. Bernard Jomier et Olivier Henno, déposé le 25 septembre 2024, p. 36.

* 320 Cnam, Améliorer la qualité du système de santé et maîtriser les dépenses. Propositions de l'assurance maladie pour 2023, juillet 2022, p. 196.

* 321 Rapport d'information n° 776 (2023-2024) Financiarisation de l'offre de soins : une OPA sur la santé ?, op. cit., p. 34.

* 322 Rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale, juin 2021, p. 133.

* 323 Drees, Revenus des médecins libéraux : une hausse de 1,9 % par an en euros constants entre 2014 et 2017, mars 2022.

* 324 Cour des comptes, Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, octobre 2022, p. 172.

* 325 Rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale, juin 2021, p. 134.

* 326 Cour des comptes, Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, octobre 2022, p. 178.

* 327 Cour des comptes, Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, octobre 2022, op., cit., p. 172.

* 328 Cnam, Améliorer la qualité du système de santé et maîtriser les dépenses. Propositions de l'assurance maladie pour 2025, p. 383.

* 329 Rapport d'information n° 776 (2023-2024) Financiarisation de l'offre de soins : une OPA sur la santé ? de Mme Corinne Imbert, MM. Bernard Jomier et Olivier Henno, déposé le 25 septembre 2024.

* 330 Article L. 162-14 du code de la sécurité sociale.

* 331 Arrêté du 26 janvier 2023 portant approbation de l'avenant n° 11 à la convention nationale organisant les rapports entre les directeurs de laboratoires privés d'analyses médicales et l'assurance maladie.

* 332 Cnam, Améliorer la qualité du système de santé et maîtriser les dépenses. Propositions de l'assurance maladie pour 2023, p. 203.

* 333 Article 51 de la loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023.

* 334 Arrêté du 26 janvier 2023 portant approbation de l'avenant n° 11 à la convention nationale organisant les rapports entre les directeurs de laboratoires privés d'analyses médicales et l'assurance maladie.

* 335 Cnam, Signature d'un nouveau protocole d'accord fixant le cadre d'évolution des tarifs pour 2024 à 2026, 28 juillet 2023.

* 336 Ibid., p. 207.

* 337 Article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale.

* 338 Article L. 162-5 du code de la sécurité sociale.

* 339 Cour des comptes, Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, op. cit., p. 181.

* 340 Annexe n° 1 à la convention médicale approuvée par l'arrêté du 20 juin 2024 portant approbation de la convention nationale organisant les rapports entre les médecins libéraux et l'assurance maladie.

* 341 Article L. 162-1-9-1 du code de la sécurité sociale.

* 342 Article 99 de la loi n° 2016-1827 du 23 décembre 2016 de financement de la sécurité sociale pour 2017.

* 343 Cour des comptes, Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, op. cit., p. 182.

* 344 Article 49 de la loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023.

* 345 Article L 162-1-9-1 du code de la sécurité sociale.

* 346 Amendement n° 856 du Gouvernement considéré comme adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture. Dans son exposé sommaire, le Gouvernement affirmait souhaiter rappeler ainsi « la prééminence de la négociation conventionnelle ».

* 347 Cour des comptes, L'imagerie médicale. Communication à la commission des affaires sociales du Sénat, avril 2016, p. 82.

* 348 Cour des comptes, Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, op. cit., p. 184.

* 349 Cnam, Améliorer la qualité du système de santé et maîtriser les dépenses. Propositions de l'assurance maladie pour 2025, p. 366.,

* 350 Arrêté du 20 juin 2024 portant approbation de la convention nationale organisant les rapports entre les médecins libéraux et l'assurance maladie.

* 351 Article 60 de la convention médicale de 2024.

* 352 Article 61 de la convention médicale de 2024.

* 353 Article 61-10 de la convention médicale de 2024.

* 354 Article L. 162-5 du code de la sécurité sociale.

* 355 Article L. 162-14 du code de la sécurité sociale.

* 356 Article L. 162-14-1-2 du code de la sécurité sociale.

* 357 Article L. 162-5 du code de la sécurité sociale.

* 358 Article L. 162-14-1 du code de la sécurité sociale et s'agissant des rémunérations liées à l'acquisition et au fonctionnement des équipements matériels lourds d'imagerie médicale, article L. 162-1-9-1 du même code.

* 359 Annexe 9 Fiches d'évaluation préalable des articles du projet de loi, p. 82.

* 360 Ibid., p. 84.

* 361 Cour des comptes, Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, octobre 2022, p. 172.

* 362 Article 51 de la loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023.

* 363 Article 60 de la convention médicale de 2024.

* 364 Article 72 de la convention médicale de 2024.

* 365 Rapport d'information n° 776 (2023-2024) Financiarisation de l'offre de soins : une OPA sur la santé ?, op. cit., p. 111.

* 366 Roland Berger, Etude du secteur des laboratoires de biologie médicale libérale français, rapport final, 29 juin 2023.

* 367 Réponses écrites du réseau Les Biologistes indépendants au questionnaire transmis par la rapporteure.

* 368 Titre 4 de la convention médicale de 2024.

* 369 Article 49-2 de la convention médicale de 2024.

* 370 Article 49-4 de la convention médicale de 2024.

* 371 Article 49-2 de la convention médicale de 2024.

* 372 Article 50-2 de la convention médicale de 2024.

* 373 Circulaire 25-2024 de l'assurance maladie présentant les dispositions de la convention médicale signée le 4 juin 2024 et approuvée par arrêté du 20 juin 2024, 31 juillet 2024

* 374 Cnam, Améliorer la qualité du système de santé et maîtriser les dépenses. Propositions de l'assurance maladie pour 2025, p. 244.

* 375 C. Imbert, B. Jomier, O. Henno, Financiarisation de l'offre de soins : une OPA sur la santé ?, rapport d'information fait au nom de la commission des affaires sociales, septembre 2024.

* 376 Sont visées les conventions des médecins, des laboratoires de biologie médicale, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et des auxiliaires médicaux, des infirmiers, des masseurs-kinésithérapeutes et des transporteurs sanitaires.

* 377 Les centres de santé et les maisons de santé élaborent des projets de santé conformément aux articles L. 6323-1-11 et L. 6323-3 du code de la santé publique.

* 378 Article 49 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024.

* 379 Cour des comptes - Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, 2022.

* 380 Article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale.

* 381 Au sens de l'article R. 165-63 du code de la sécurité sociale

* 382 Instruction DGOS/PF4 n° 2015-258 relative aux modalités d'identification, de recueil des actes de biologie médicale et d'anatomocytopathologie hors nomenclature éligibles au financement au titre de la Merri G03.

* 383 Article L. 162-1-24 du code de la sécurité sociale.

* 384 Loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023.

* 385 Article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale.

* 386 Article L. 162-22-13 du code de la sécurité sociale.

* 387 Décret n° 2023-737 du 8 août 2023

* 388 Décret n° 2023-736 du 8 août 2023

* 389 La couverture est estimée à 54,0 % chez les 65 ans et plus lors de la saison 2023-2024, soit une baisse de 2,2 points par rapport à la saison précédente et de 25,4 %chez les moins de 65 ans à risque de forme grave de grippe, soit une baisse de 6,2 points par rapport à la saison précédente. (Santé Publique France, Vaccination en France. Bilan de la couverture vaccinale en 2023, avril 2024).

* 390 Haute Autorité de santé, article « Pertinence des soins - Les professionnels en action » mis en ligne le 15 janvier 2018 et mis à jour le 12 juin 2019.

* 391 Cour des comptes, Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, mai 2023, p. 254.

* 392 OCDE, « Lutter contre le gaspillage dans les systèmes de santé », 2017, p. 3.

* 393 Article L. 162-2 du code de la sécurité sociale.

* 394 Article L. 162-2-1 du code de la sécurité sociale.

* 395 Article R. 4127-32 du code de la santé publique.

* 396 Article R. 4127-8 du code de la santé publique.

* 397 Conseil d'État, Association Autisme Espoir vers l'école, 1ère et 4e chambres réunies, 23 décembre 2020, n° 428284, publié au recueil Lebon.

* 398 Cnam, Améliorer la qualité du système de santé et maîtriser les dépenses. Propositions de l'assurance maladie pour 2025, p. 356.

* 399 Article L. 5121-8 du code de la santé publique.

* 400 Article R. 163-4 du code de la santé publique.

* 401 Article R. 163-18 du code de la sécurité sociale.

* 402 Article R. 163-4 du code de la sécurité sociale.

* 403 Article L. 162-4 du code de la sécurité sociale.

* 404 Pour certains médicaments, jusqu'à un tiers de patients traités en dehors des ITR. Voir Cnam, Améliorer la qualité du système de santé et maîtriser les dépenses. Propositions de l'assurance maladie pour 2025, p. 355.

* 405 Cnam, Améliorer la qualité du système de santé et maîtriser les dépenses. Propositions de l'assurance maladie pour 2025, p. 371.

* 406 Ibid., p. 374.

* 407 Voir, à ce sujet, le commentaire de l'article 15 du présent projet de loi.

* 408 Académie nationale de médecine, Relations entre clinique et imagerie : état de la situation actuelle, propositions d'amélioration, mars 2021.

* 409 Article 69 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024.

* 410 Article L. 315-2 du code de la sécurité sociale.

* 411 Article D. 315-5 du code de la sécurité sociale.

* 412 Article R. 322-10-4 du code de la sécurité sociale.

* 413 Article R. 5121-83 du code de la santé publique.

* 414 Article R. 5121-85 du code de la santé publique.

* 415 Article R. 5121-88 du code de la santé publique.

* 416 Article R. 5121-91 du code de la santé publique.

* 417 III de l'article R. 163-2 du code de la sécurité sociale.

* 418 Article R. 5132-5 du code de la santé publique.

* 419 Article 60 de la convention médicale de 2024.

* 420 Article 60-1 de la convention médicale de 2024.

* 421 Article 60-2 de la convention médicale de 2024.

* 422 Article 61-2 de la convention médicale de 2024.

* 423 Article 61-4 de la convention médicale de 2024.

* 424 Article 61-10 de la convention médicale de 2024.

* 425 Article 62 de la convention médicale de 2024.

* 426 Article 63 de la convention médicale de 2024.

* 427 Articles 66 et suivants de la convention médicale de 2024.

* 428 Article 73 de la convention médicale.

* 429 Article 73 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024.

* 430 Article L. 162-19-1 du code de la sécurité sociale.

* 431 Décret n° 2024-968 du 30 octobre 2024 relatif au document destiné à renforcer la pertinence des prescriptions médicales.

* 432 Article R. 161-45 du code de la sécurité sociale.

* 433 Cnam, Améliorer la qualité du système de santé et maîtriser les dépenses. Propositions de l'assurance maladie pour 2025, p. 356.

* 434 Dans les conditions prévues à l'article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale.

* 435 Annexe n° 9 Fiches d'évaluation préalable des articles du projet de loi, pp. 87 et suivantes.

* 436 Cour des comptes, Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, mai 2023, p. 276.

* 437 Ibid., p. 267.

* 438 Article 61-10 de la convention médicale de 2024.

* 439 Voir le commentaire de l'article 1er du PLFSS pour 2023 : en exécution, le sous-objectif relatif aux dépenses de soins de ville s'est élevé à 105,2 milliards d'euros en 2021 contre 98,9 milliards d'euros prévus en LFSS initiale.

* 440 Article 114 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022 : en prévision, le sous-objectif relatif aux dépenses de soins de ville s'élevait à 102,5 milliards d'euros.

* 441 Cour des comptes, Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale 2023, « Après la crise sanitaire, un Ondam à conforter comme outil de pilotage des dépenses de santé », p. 99.

* 442 Cour des comptes, Accélérer la réorganisation des soins de ville pour en garantir la qualité et maîtriser la dépense. Contribution à la revue des dépenses publiques, juillet 2023, pp. 10 et 11.

* 443 Article L. 162-2-1 du code de la sécurité sociale.

* 444 Le fait d'assurer au patient des soins fondés sur les données acquises de la science fait partie des obligations déontologiques des professionnels de santé. Pour les médecins, elle figure à l'article R. 4127-32 du code de la santé publique.

* 445 Cour des comptes, Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale 2023, « La maîtrise médicalisée des dépenses de santé : une régulation inaboutie », pp. 254 et suivantes.

* 446 Annexe 5 au PLFSS 2025, Ondam et dépenses de santé, p. 29.

* 447 Article L. 1111-14 du code de la santé publique.

* 448 Article L. 1111-13-1 du code de la santé publique.

* 449 Rapport d'information n° 873 (2022-2023), déposé le 12 juillet 2023, fait au nom de la commission des affaires sociales sur les données de santé par Mme Catherine Deroche, p. 15.

* 450 Pour fiabiliser l'identification des patients, une procédure dite de « qualification de l'identifiant de santé » a été prévue, impliquant la vérification par le médecin d'une pièce d'identité du patient à haut niveau de confiance, au moins une fois.

* 451 Cour des comptes, Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, mai 2024, chapitre X « Mon Espace santé : des conditions de réussite encore à réunir ».

* 452 Article L. 1111-15 du code de la santé publique.

* 453 Arrêté du 26 avril 2022 fixant la liste des documents soumis à l'obligation prévue à l'article L. 1111-15 du code de la santé publique.

* 454 Ibid., p. 137

* 455 Cour des comptes, Rapport 2024 sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, op. cit., recommandation n° 36.

* 456 Communiqué commun de l'Académie nationale de médecine et du Conseil national de l'ordre des médecins, Rendez-vous non honorés, 27 janvier 2023.

* 457 Rapport n° 328 (2022-2023) de Mme Corinne Imbert, déposé le 8 février 2023, p. 32.

* 458 Cnam, Améliorer la qualité du système de santé et maîtriser les dépenses. Propositions de l'assurance maladie pour 2024, proposition n° 9.

* 459 Cnam, Une campagne de communication consacrée à la protection du système de soin, 5 octobre 2023 : https://assurance-maladie.ameli.fr/actualite/une-campagne-de-communication-consacree-la-protection-du-systeme-de-soin.

* 460 Doctolib, communiqué de presse « Doctolib actualise ses statistiques annuelles sur les rendez-vous non honorés », 3 juillet 2024.

* 461 Communiqué commun de l'Académie nationale de médecine et du Conseil national de l'ordre des médecins, op. cit.

* 462 Cette règle est fixée, pour les médecins, dans le code déontologique de la profession à l'article R. 4127-53 du code de la santé publique.

* 463 Article R. 4127-47 du code de la santé publique pour les médecins.

* 464 Doctolib, communiqué de presse « Doctolib actualise ses statistiques annuelles sur les rendez-vous non honorés », op. cit.

* 465 Amendements n° COM-52 de Mme Corinne Imbert et n° COM-40 de Mme Élisabeth Doineau.

* 466 Amendement n° 272 de Mme Corinne Imbert, au nom de la commission des affaires sociales.

* 467 Médecins généralistes et médecins spécialistes, chirurgiens-dentistes, sages-femmes, infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, auxiliaires médicaux, laboratoires d'analyse médicale.

* 468 Cour des comptes, Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, mai 2023.

* 469 Article R. 161-33-3 du code de la sécurité sociale.

* 470 En dehors du cas des pharmaciens.

* 471 Le service ADR permet à un professionnel de santé de vérifier que les droits d'un assuré sont ouverts.

* 472 R. 161-33-13 du code de la sécurité sociale.

* 473 Articles L. 161-31 et R. 161-33-1 du code de la sécurité sociale.

* 474 Sénat, Complémentaires santé, mutuelles : l'impact sur le pouvoir d'achat des Français, rapport d'information n° 770 (2023-2024), déposé le 24 septembre 2024.

* 475 Réponses écrites au questionnaire du rapporteur de la mission d'information précitée.

* 476 Compte rendu du 9 avril 2024 sur la mission d'information précitée.

* 477 Dans les deux cas, des décrets en Conseil d'État pourront rajouter des conditions.

* 478 Il est précisé, pour les seuls transferts de données venant de l'AMO, que les données à caractère personnel concernant la santé sont strictement limitées à la nature des actes et prestations concernés par la fraude.

* 479 Celui-ci devra présenter des garanties d'indépendance vis-à-vis des complémentaires santé.

* 480 Article L. 2223-42 du code général des collectivités territoriales.

* 481 Article R. 2213-1-1-1 du code général des collectivités territoriales.

* 482 Article 12 de la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé.

* 483 Article R. 2213-1-1 du code général des collectivités territoriales.

* 484 Article L. 1211-2 du code de la santé publique.

* 485 Article 230-28 du code de procédure pénale.

* 486 Article R. 2213-1-1 du code général des collectivités territoriales.

* 487 Article R. 2213-1-2 du code général des collectivités territoriales.

* 488 Article L. 162-5-14-2 du code de la sécurité sociale.

* 489 Arrêté du 10 mai 2017 relatif au forfait afférent à l'examen nécessaire à l'établissement du certificat de décès réalisé au domicile du patient.

* 490 Article D. 162-30 du code de la sécurité sociale.

* 491 Article 36 de la loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023.

* 492 Article 3 de la loi n° 2023-1268 du 27 décembre 2023 visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels.

* 493 Décret n° 2024-375 du 23 avril 2024 modifiant le décret n° 2023-1146 du 6 décembre 2023 déterminant les modalités de mise en oeuvre de l'expérimentation prévue par l'article 36 de la loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023.

* 494 Amendement n° 221 de la commission des affaires sociales, adopté par le Sénat.

* 495 Audition de Mme Sylvaine Mazière Tauran pour le Conseil national de l'ordre des infirmiers, dans le cadre de l'examen du PLFSS pour 2025, le mardi 29 octobre 2024.

* 496 Audition du Pr Stéphane Oustric pour le Conseil national de l'ordre des médecins, dans le cadre de l'examen du PLFSS pour 2025, le mardi 29 octobre 2024.

* 497 Irdes, La pertinence des soins en France - Les principaux dispositifs et leur évaluation - novembre 2018.

* 498 Rapport d'information n° 668 (2016-2017) de M. Jean-Marie Vanlerenberghe fait au nom de la commission des affaires sociales et publié le 20 juillet 2017.

* 499 OCDE, Lutter contre le gaspillage dans les systèmes de santé, janvier 2017.

* 500 OCDE, Panorama de la santé, édition 2023.

* 501 Les motifs précis, incluant les transports liés à une hospitalisation, les transports par ambulance justifiés par l'état du patient, les transports à plus de 150 kilomètres, ou les transports en série, sont énumérés à l'article R. 322-10 du code de la sécurité sociale.

* 502 Article L. 322-5 du code de la sécurité sociale.

* 503 Article L. 162-4-1 du code de la sécurité sociale.

* 504 Article R. 322-10-4 du code de la sécurité sociale.

* 505 Article R. 322-10-1 du code de la sécurité sociale.

* 506 Article L. 322-5-2 du code de la sécurité sociale.

* 507 Article L. 322-5 du code de la sécurité sociale.

* 508 Article L. 322-5 du code de la sécurité sociale.

* 509 Arrêté du 23 décembre 2006 fixant le référentiel de prescription des transports prévu à l'article R. 322-10-1 du code de la sécurité sociale.

* 510 Décision du 18 juillet 2023 fixant le taux de la participation des assurés sociaux aux frais de transport sanitaire pris en charge au titre de l'article R. 160-5 du code de la sécurité sociale.

* 511 3° de l'article L. 160-14 du code de la sécurité sociale.

* 512 Décret n° 2011-258 du 10 mars 2011.

* 513 Drees, Les dépenses de santé en 2022, édition 2023.

* 514 Relevant de la consommation de soins et de biens médicaux.

* 515 Elle est accompagnée par l'Espagne (99,6 %), la Suède (98,6 %), le Canada (98,4 %) ou l'Allemagne (96,6 %).

* 516 III de l'article L. 160-13 du code de la sécurité sociale.

* 517 Décret n° 2024-114 du 16 février 2024 relatif à la participation des assurés aux frais de santé en application des II et III de l'article L. 160-13 du code de la sécurité sociale.

* 518 Article D. 160-9 du code de la sécurité sociale.

* 519 Article D. 160-11 du code de la sécurité sociale.

* 520 Article D. 160-10 du code de la sécurité sociale.

* 521 Cnam, Améliorer la qualité du système de santé et maîtriser les dépenses. Propositions de l'Assurance maladie pour 2025, p. 291.

* 522 Article 69 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024.

* 523 Article L. 322-5 du code de la sécurité sociale.

* 524 Article L. 322-5-1 du code de la sécurité sociale.

* 525 Article 60 de la convention médicale de 2024.

* 526 Article 61-12 de la convention médicale de 2024.

* 527 Article 4 de l'avenant n° 10 à la convention nationale des transporteurs sanitaires privés, signé le 22 décembre 2020.

* 528 Article 5 de l'avenant n° 10 précité.

* 529 Article 14.1 de l'avenant n° 11 à la convention nationale des transporteurs sanitaires privés, signé le 13 avril 2022.

* 530 Cnam, Améliorer la qualité du système de santé et maîtriser les dépenses. Propositions de l'Assurance maladie pour 2025, p. 292.

* 531 Article L. 322-5 du code de la sécurité sociale.

* 532 Cnam, Améliorer la qualité du système de santé et maîtriser les dépenses. Propositions de l'Assurance maladie pour 2025, p. 293.

* 533 Article 61-12 de la convention médicale de 2024.

* 534 Article 1er de l'avenant n° 11 à la convention nationale des transporteurs sanitaires privés, signé le 13 avril 2022.

* 535 Cnam, Améliorer la qualité du système de santé et maîtriser les dépenses. Propositions de l'Assurance maladie pour 2025, p. 294.

* 536 Article L. 322-5 du code de la sécurité sociale.

* 537 Décision du 11 décembre 2023 relative à l'établissement d'une convention type à la destination des entreprises de taxi et des organismes locaux d'assurance maladie.

* 538 Article 6-1 de la covnention-type des taxis pour 2024.

* 539 Annexe n° 9 « Fiches d'évaluation préalable des articles du projet de loi », p. 96.

* 540 Article L. 1111-3-5 du code de la santé publique.

* 541 Étude « Handigynéco - Île-de-France », réalisée en 2016-2017 par la direction de l'autonomie de l'ARS Île-de-France.

* 542 Conférence nationale du handicap, dossier de presse, 26 avril 2023.

* 543 Un article L. 1411-6-3, créé par la loi n° 2024-317 du 8 avril 2024, entrera en vigueur le 1er janvier 2025, justifiant la numérotation de ce nouvel article en L. 1411-6-4.

* 544 Article 38 de la loi n° 2005-1579 du 19 décembre 2005 de financement de la sécurité sociale pour 2006.

* 545 Alimentation, brossage, protection en cas de pratique sportive...

* 546 Article 24.2.1.1 de la convention nationale des chirurgiens-dentistes du 21 juillet 2023.

* 547 Article 51 de la loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019.

* 548 17° de l'article L. 160-14 du code de la sécurité sociale.

* 549 Toutefois, certains actes susceptibles d'être réalisés principalement par des médecins sont associés à un taux de ticket modérateur de 30 %.

* 550 3° bis de l'article R. 160-5 du code de la sécurité sociale. Ce taux, précédemment fixé à 30 %, a été relevé à 40 % à compter du 15 octobre 2023, conformément au décret n° 2023-701 du 31 juillet 2023 relatif à la participation des assurés sociaux aux honoraires des chirurgiens-dentistes et actes relevant des soins dentaires.

* 551 Le cas échéant, celle du parent lorsque l'enfant n'en dispose pas.

* 552 Détartrage, traitement des caries, par exemple.

* 553 Article L. 162-1-12 du code de la sécurité sociale.

* 554 Article L. 162-1-12 du code de la sécurité sociale et article 24.2.1.2 de la convention nationale des chirurgiens-dentistes du 21 juillet 2023.

* 555 II de l'article L. 160-13 du code de la sécurité sociale.

* 556 Article 24.2.1.3 de la convention nationale des chirurgiens-dentistes libéraux.

* 557 Articles L. 871-1 et R. 871-2 du code de la sécurité sociale.

* 558 Arrêté du 27 novembre 2020 relatif à l'expérimentation nationale de centres de santé sexuelle d'approche communautaire et fixant la liste des établissements expérimentateurs.

* 559 Centres gratuits d'information, de dépistage et de diagnostic.

* 560 Rapport d'évaluation finale de l'expérimentation « centres de santé sexuelle d'approche communautaire », juillet 2023.

* 561 Selon l'exposé des motifs de l'amendement n° 2232 déposé par le Gouvernement.

* 562 Rapport d'évaluation finale de l'expérimentation « centres de santé sexuelle d'approche communautaire », juillet 2023.

* 563 Article L. 3111-2 du code de la santé publique.

* 564 Article 38 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024, Article R. 3111-2-1 du code de la santé publique tel que modifié par le décret n° 2024-694 du 5 juillet 2024 relatif à l'obligation vaccinale contre les méningocoques de type B et ACWY.

* 565 Article 38 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024, Article R. 3111-2-1 du code de la santé publique tel que modifié par le décret n° 2024-694 du 5 juillet 2024 relatif à l'obligation vaccinale contre les méningocoques de type B et ACWY.

* 566 Article L. 160-14 du code de la sécurité sociale.

* 567 Article R. 160-5 du code de la sécurité sociale.

* 568 Loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024.

* 569 Article 79 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021.

* 570 Article L. 162-58 du code de la sécurité sociale.

* 571 Article R. 162-69 du code de la sécurité sociale.

* 572 Article R. 162-69 du code de la sécurité sociale.

* 573 Article 2 de l'arrêté du 8 mars 2022 relatif aux tarifs, codes de facturation et critères d'inclusion du dispositif de prise en charge de séances d'accompagnement psychologique.

* 574 Article L. 162-58 du code de la santé publique.

* 575 Article L. 162-58 du code de la sécurité sociale.

* 576 Article 4 de la loi n° 2023-567 du 7 juillet 2023 visant à favoriser l'accompagnement des couples confrontés à une interruption spontanée de grossesse dite fausse couche.

* 577 Article 79 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022.

* 578 Décret n° 2022-195 du 17 février 2022 relatif à la prise en charge des séances d'accompagnement réalisées par un psychologue.

* 579 Article R. 162-60 du code de la sécurité sociale.

* 580 Article 1er de l'arrêté du 8 mars 2022 relatif aux tarifs, codes de facturation et critères d'inclusion du dispositif de prise en charge de séances d'accompagnement psychologique.

* 581 Caisse nationale d'assurance maladie, Améliorer la qualité du système de santé et maîtriser les dépenses. Propositions de l'assurance maladie pour 2024, juillet 2023, p. 119.

* 582 Ibid., p. 117.

* 583 Article L. 4321-1 du code de la santé publique.

* 584 Article 123 de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.

* 585 Article L. 4321-1 du code de la santé publique.

* 586 Article 12 de la loi n° 2021-502 du 26 avril 2021 visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification.

* 587 Décret n° 2015-1110 du 2 septembre 2015 relatif au diplôme d'État de masseur-kinésithérapeute.

* 588 Igas, Expérimentation de l'accès direct aux actes de masso-kinésithérapie, février 2022, p. 3.

* 589 Article R. 4321-2 du code de la santé publique.

* 590 Article R. 4321-5 du code de la santé publique.

* 591 Loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.

* 592 Article L. 162-5-3 du code de la sécurité sociale.

* 593 Loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie.

* 594 Igas, Expérimentation de l'accès direct aux actes de masso-kinésithérapie, février 2022.

* 595 Article 3 de la loi n° 2023-379 du 19 mai 2023 portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé.

* 596 Article L. 4321-1 du code de la santé publique.

* 597 Avis n° 2023.0037/AC/SBP du 9 novembre 2023 du collège de la HAS relatif au projet de décret concernant l'expérimentation prévue par l'article 3 de la loi du 19 mai 2023 portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé permettant l'exercice en accès direct des masseurs-kinésithérapeutes dans le cadre d'une CPTS.

* 598 Décret n° 2024-618 du 27 juin 2024 relatif à l'expérimentation permettant aux masseurs-kinésithérapeutes participant à une communauté professionnelle territoriale de santé d'exercer leur art sans prescription médicale.

* 599 Igas, Expérimentation de l'accès direct aux actes de masso-kinésithérapie, février 2022, p. 66.

* 600 Articles 222-7 à 222-14-1 du code pénal pour le détail des peines encourues.

* 601 Résultats de l'enquête 2022 sur la soumission chimique du centre d'addictovigilance de Paris.

* 602 La stratégie nationale de santé pour 2023-2033 fait actuellement l'objet d'une consultation publique et n'est pas définitive. Elle devrait néanmoins consacrer la prévention et la promotion de la santé comme l'une de ses grandes finalités.

* 603 Cour des comptes, La politique de prévention en santé, Les enseignements tirés de l'analyse de trois grandes pathologies, novembre 2021.

* 604 Drees, Les établissements de santé en 2022, Edition 2024, p. 57.

* 605 France Stratégie et Dares, rapport Métiers 2030, prospective des métiers et des qualifications, 2022.

* 606 Fédération hospitalière de France (FHF), enquête sur la situation RH des établissements publics de santé et médicosociaux, avril/mai 2022.

* 607 Ibid.

* 608 A-L. Biotteau (Dares) et C. Dixte (Drees), « À l'hôpital, un taux de recours faible à l'intérim mais en nette hausse depuis six ans », n° 50, septembre 2023.

* 609 Les taux de recours pour 2022 et 2023 reposent sur une estimation.

* 610 Annexe 9 au PLFSS pour 2025.

* 611 Réponses de la conférence des directeurs de centres hospitaliers au questionnaire transmis par la rapporteure.

* 612 Réponses de la conférence des directeurs des centres hospitaliers universitaires (CHU) au questionnaire transmis par la rapporteure.

* 613 Les emplois de praticiens contractuels et cliniciens ont ainsi progressé de 24 % entre 2017 et 2022 tandis que leurs rémunérations augmentaient en parallèle de 61 % : dans Cour des comptes, Intérim médical et permanence des soins dans les hôpitaux publics - Exercices 2017-2022, relevé d'observations définitives.

* 614 Cour des comptes, Intérim médical et permanence des soins dans les hôpitaux publics - Exercices 2017-2022, relevé d'observations définitives.

* 615 Annexe 9 au PLFSS pour 2025.

* 616 Cour des comptes, Rapport 2024 sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, mai 2024, p. 291.

* 617 Drees, Études et Résultats n°1277, juillet 2023.

* 618 Rapport du député Olivier Véran, Hôpital cherche médecins coûte que coûte, Essor et dérives du marché de l'emploi médical temporaire à l'hôpital public, décembre 2013.

* 619 Décret n° 2017-1605 du 24 novembre 2017 relatif au travail temporaire des praticiens intérimaires dans les établissements publics de santé et arrêté du 24 novembre 2017 fixant le montant plafond des dépenses engagées par un établissement public de santé au titre d'une mission de travail temporaire.

* 620 Ce plafond, initialement fixé à 1 170,04 euros bruts, a fait l'objet de revalorisations successives.

* 621 Article 33 de la loi n° 2021-502 du 26 avril 2021 visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification.

* 622 Article 29 de la loi n° 2023-1268 du 27 décembre 2023 visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels.

* 623 Décret n° 2024-583 du 24 juin 2024.

* 624 Les personnels médicaux recouvrent en effet les sage-femmes au sens du livre Ier de la quatrième partie du code de la santé publique.

* 625 Instruction ministérielle DGOS/RH5/PF1/DGFIP/2023/33 du 17 mars 2023 relative au contrôle des dépenses d'intérim médical dans les établissements publics de santé.

* 626 Annexe 9 au PLFSS pour 2025.

* 627 Décision n° 2022-845 DC du 20 décembre 2022.

* 628 Ces dispositions avaient été reprises à l'article 29 de la loi « Valletoux » du 27 décembre 2023 visant à améliore l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels.

* 629 Rapport n° 828 (2022-2023) « Pénurie de médicaments : Trouver d'urgence le bon remède », tome I, déposé le 4 juillet 2023.

* 630 Ibid., pp. 83 à 85 : entre 2012 et 2022, la consommation mondiale de médicaments a augmenté de plus de 36 %.

* 631 Ibid., pp. 76 à 83.

* 632 Ibid., p. 88.

* 633 Ibid., pp. 100 à 109.

* 634 Voir notamment Philippe Mouiller, « Biogaran : une perte de souveraineté sanitaire », Les Échos, 30 juillet 2024.

* 635 Le directeur général de Sanofi déclarait récemment au journal Le Monde « Sanofi ambitionne de devenir un pure player de la biopharmacie. », dans Le Monde, « Vente du Doliprane : “Sanofi et l'État ont tous deux fait des compromis” », 22 octobre 2024.

* 636 Décret n° 2012-1096 du 28 septembre 2012 relatif à l'approvisionnement en médicaments à usage humain.

* 637 Article R. 5124-49-1 du code de la santé publique.

* 638 Article L. 5121-29 du code de la santé publique.

* 639 Article R. 5124-49-1 du code de la sécurité sociale.

* 640 Article 151 de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.

* 641 Article 48 de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020.

* 642 Article L. 5121-32 du code de la santé publique.

* 643 Ces données sont disponibles sur la plateforme de consultation mise à disposition par l'ANSM : https://data.ansm.sante.fr/ruptures.

* 644 Rapport n° 828 (2022-2023) « Pénurie de médicaments : Trouver d'urgence le bon remède », tome I, déposé le 4 juillet 2023, p. 105.

* 645 Données disponibles sur la plateforme de l'ANSM précitée.

* 646 Article 151 de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.

* 647 Article L. 5111-4 du code de la santé publique.

* 648 Article 48 de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020.

* 649 Article L. 5121-31 du code de la santé publique.

* 650 Article R. 5124-49-5 du code de la santé publique.

* 651 Article R. 5124-49-1 du code de la santé publique.

* 652 Article L. 5121-32 du code de la santé publique.

* 653 Article 48 de la loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019.

* 654 Article R. 5124-49-4 du code de la santé publique.

* 655 Article 47 de la loi n° 2011-2012 du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé.

* 656 Décret n° 2012-1096 du 28 septembre 2012 relatif à l'approvisionnement en médicaments à usage humain.

* 657 Article R. 5124-59 du code de la santé publique.

* 658 Article L. 5121-30 du code de la santé publique.

* 659 Article L. 5124-17-3 du code de la santé publique.

* 660 Rapport n° 828 (2022-2023) « Pénurie de médicaments : Trouver d'urgence le bon remède », op. cit., pp. 115 et 127 à 129.

* 661 Article L. 5121-9 du code de la santé publique.

* 662 Rapport n° 828 (2022-2023) « Pénurie de médicaments : Trouver d'urgence le bon remède », op. cit., pp. 116 à 118.

* 663 Arrêté du 1er août 2016 déterminant la liste des tests, recueils et traitements de signaux biologiques qui ne constituent pas un examen de biologie médicale, les catégories de personnes pouvant les réaliser et les conditions de réalisation de certains de ces tests, recueils et traitements de signaux biologiques modifié.

* 664 Article L. 5121-12-1-1 du code de la santé publique.

* 665 Article 52 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024.

* 666 Article L. 5125-1-1 A du code de la santé publique.

* 667 Article L. 5121-33 du code de la santé publique.

* 668 Article L. 5121-12-1-1 du code de la santé publique.

* 669 Article L. 5123-8 du code de la santé publique.

* 670 Article L. 5121-33-1 du code de la santé publique.

* 671 Soit 2 341 déclarations ayant donné lieu à au moins une mesure sur 4 925 déclarations reçues. Ces données sont disponibles sur la plateforme précitée : https://data.ansm.sante.fr/ruptures.

* 672 Article L. 5121-33-3 du code de la santé publique.

* 673 Réponses écrites de l'ANSM au questionnaire transmis par la rapporteure.

* 674 Rapport n° 186 (2022-2023) de Mme Pascale Gruny, fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 7 décembre 2022, p. 82.

* 675 Article L. 5211-5-1 du code de la santé publique.

* 676 Rapport d'information n° 624 (2023-2024) de Mme Sylvie Vermeillet sur le bilan de l'application des lois au 31 mars 2024, déposé le 22 mai 2024, p. 266.

* 677 Annexe n° 9 Fiches d'évaluation préalable du projet de loi, pp. 109 et 111.

* 678 II de l'article L. 5124-6 du code de la santé publique.

* 679 Article L. 5121-33-3 du code de la santé publique.

* 680 Manquements listés à l'article L. 5422-18 du code de la santé publique.

* 681 Article R. 5312-2 du code de la santé publique.

* 682 Annexe n° 9 « Fiches d'évaluation préalable du projet de loi », p. 110.

* 683 Article L. 1413-4 du code de la santé publique.

* 684 Règlement (UE) 2022/2371 du Parlement européen et du Conseil du 23 novembre 2022 concernant les menaces transfrontières graves pour la santé et abrogeant la décision n° 1082/2013/UE.

* 685 Annexe n° 9 « Fiches d'évaluation préalable du projet de loi », p. 110.

* 686 Lignes directrices relatives à la détermination des sanctions financières, décision de la directrice générale de l'ANSM du 8 août 2022.

* 687 Recommandation n° 25 de la commission d'enquête.

* 688 Amendement n° 293 de la commission des affaires sociales au PLFSS pour 2024, adopté par le Sénat.

* 689 Article 61-2 de la convention médicale de 2024.

* 690 La réalisation de Trod est tarifée depuis l'avenant n° 18 à l'ancienne convention pharmaceutique, conclu à la fin de l'année 2019.

* 691 Rapport n° 828 (2022-2023) Pénurie de médicaments : Trouver d'urgence le bon remède, tome I, déposé le 4 juillet 2023, p. 165.

* 692 Article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale.

* 693 Article L. 162-17 du code de la sécurité sociale.

* 694 Articles L. 161-37 et L. 165-1 du code de la sécurité sociale.

* 695 Règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017.

* 696 Voir infra.

* 697 Articles R. 165-48-1 et R. 165-48-2 du code de la sécurité sociale

* 698 Article 60 de la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 de financement de la sécurité sociale pour 2015.

* 699 Article R. 165-2 du code de la sécurité sociale.

* 700 Article R. 160-5 du code de la sécurité sociale.

* 701 Article R. 165-2 du code de la sécurité sociale.

* 702 Article L. 165-2 du code de la sécurité sociale.

* 703 Article L. 165-2 du code de la sécurité sociale.

* 704 Article R. 160-5 du code de la sécurité sociale.

* 705 Article L. 160-14 du code de la sécurité sociale.

* 706 Article R. 165-23 du code de la sécurité sociale.

* 707 Article L. 165-1-3 du code de la sécurité sociale.

* 708 Arrêté du 9 janvier 2013 portant modification des modalités d'inscription et de prise en charge du dispositif médical à pression positive continue pour le traitement de l'apnée du sommeil et prestations associées au chapitre 1er du titre Ier de la liste des produits et prestations remboursables prévue à l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale.

* 709 Arrêté du 22 octobre 2013 portant modification des modalités d'inscription et de prise en charge du dispositif médical à pression positive continue pour traitement de l'apnée du sommeil et prestations associées au chapitre 1er du titre Ier de la liste des produits et prestations remboursables prévue à l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale.

* 710 Conseil d'État, 28 novembre 2014, req. n° 366931.

* 711 Article L. 162-56 du code de la sécurité sociale.

* 712 Article R. 162-97 du code de la sécurité sociale.

* 713 Article L. 162-52 du code de la sécurité sociale.

* 714 Article L. 6316-1 du code de la santé publique.

* 715 Article 36 de la loi n° 2021-1753 de financement de la sécurité sociale pour 2022.

* 716 Inspection générale des finances et Inspection générale des affaires sociales, « Revue de dépenses : les dispositifs médicaux », mars 2024.

* 717 IGF et Igas, Revue de dépenses : les dispositifs médicaux, mars 2024.

* 718 1° du I de l'article L. 314-2 du code de l'action sociale et des familles (CASF).

* 719 Art. L. 223-8 et L. 223-9 du code de la sécurité sociale.

* 720 Cette moyenne masque des disparités importantes entre départements, dont les taux de couverture en 2022 varient de 14 % à 59 % d'après les données fournies par la CNSA au rapporteur.

* 721 2° du I de l'article L. 314-2 du CASF.

* 722 Art. R. 314-172 du CASF.

* 723 Art. R. 314-174 du CASF.

* 724 Art. R. 314-175 du CASF.

* 725 Le « groupe iso-ressources moyen pondéré » (GMP) désigne le niveau de perte d'autonomie moyen des personnes hébergées.

* 726 Source : Lieux de vie et d'accompagnement des personnes âgées en perte d'autonomie - Annexe 7 : L'accueil et l'accompagnement des personnes âgées en perte d'autonomie en établissement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), Igas, février 2024.

* 727 Synthèse des valeurs de points GIR 2023 et des GIR moyens pondérés départementaux 2023, CNSA, mai 2024.

* 728 Concertation « Grand âge et autonomie », rapport de M. Dominique Libault, mars 2019.

* 729 Garantir la prise en charge des personnes âgées en établissement, encadrer leur reste à charge, rapport à la Première ministre de Mme Christine Pires-Beaune, juin 2023.

* 730 Cour des comptes, La prise en charge médicale des personnes âgées en Ehpad, février 2022.

* 731 Le conseil départemental est chargé d'habiliter les établissements à l'aide sociale, pour tout ou partie de leur capacité d'accueil. L'habilitation permet aux résidents éligibles de bénéficier de l'aide sociale à l'hébergement (ASH).

* 732 Les centres de ressources ont été créés par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 (article 47). Portés par des Ehpad ou des services à domicile, ils visent à proposer des solutions d'accompagnement permettant aux personnes âgées de vieillir chez elles le plus longtemps possible.

* 733 Loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024 (article 79).

* 734 Source : réponse au questionnaire adressé par la rapporteure à la direction générale de la cohésion sociale (DGCS).

* 735 Source : réponse au questionnaire de la direction générale de la cohésion sociale (DGCS).

* 736 Initialement, l'article 37 du PLFSS pour 2024 prévoyait la création d'un nouveau régime de financement, laissant aux départements le choix d'y adhérer ou non. À l'initiative du Sénat, cette disposition a été remplacée par la mise en place d'une expérimentation.

* 737 Les fédérations représentatives des établissements d'hébergement pour personnes âgées se sont unanimement montrées favorables à la réforme. Il n'y a en revanche pas de position unanime des départements sur l'expérimentation.

* 738 Articles L. 722-4 et suivants du code rural et de la pêche maritime.

* 739 Article L. 321-6 du code de la sécurité sociale.

* 740 Article L. 732-28 du code rural et de la pêche maritime.

* 741 Loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, article 90.

* 742 Loi n° 2020-839 du 3 juillet 2020 visant à assurer la revalorisation des pensions de retraite agricole en France continentale et dans les outre-mer, article 1er.

* 743 Articles L. 732-25 et L. 732-25-1 du code rural et de la pêche maritime.

* 744 Articles L. 732-26 et R. 732-60 du code rural et de la pêche maritime.

* 745 Article L. 732-24 du code rural et de la pêche maritime.

* 746 Article L. 16 du code des pensions civiles et militaires de retraite.

* 747 Article L. 816-2 du code de la sécurité sociale.

* 748 Article 41 de la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018.

* 749 Selon l'évaluation préalable du présent article, celle-ci serait (pour l'État et la sécurité sociale) de 3,9 milliards d'euros en 2025, 4,09 milliards d'euros en 2026 et 4,17 milliards d'euros en 2027.

* 750 La direction de la sécurité sociale (DSS) indique que la convention retenue dans les projections du PLFSS est équivalente à la convention d'équilibre permanent des régimes équilibrés (EPR) du Conseil d'orientation des retraites (COR), avec un ajustement automatique des recettes du régime de la fonction publique d'État (FPE) aux variations de ses dépenses, afin d'assurer l'équilibre du régime.

* 751 Loi concernant les responsabilités des accidents dont les ouvriers sont victimes dans leur travail.

* 752 Il s'agit du cas de faute inexcusable ou volontaire de l'employeur, abordé au 3 du A du I de ce commentaire.

* 753 Article L. 451-1 du code de la sécurité sociale.

* 754 Loi n° 46-2426 du 30 octobre 1946 sur la prévention et la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles.

* 755 Comme par exemple celui des accidents de circulation ou des accidents médicaux. Voir à ce sujet le rapport d'information de la Mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale du Sénat : Marie-Pierre Richer et Annie Le Houerou, Branche AT-MP : vers un juste équilibre entre réparation et prévention des risques professionnels, Rapport d'information n° 18 (2024-2025), déposé le 9 octobre 2024.

* 756 Accord national interprofessionnel du 15 mai 2023 relatif aux accidents du travail et aux maladies professionnelles.

* 757 Article L. 434-2 du code de la sécurité sociale.

* 758 Marie-Pierre Richer et Annie Le Houerou, Branche AT-MP : vers un juste équilibre entre réparation et prévention des risques professionnels, Rapport d'information n° 18 (2024-2025), déposé le 9 octobre 2024.

* 759 Article R. 434-1 du code de la sécurité sociale

* 760 Article L. 434-1 du code de la sécurité sociale.

* 761 Article R. 434-1 du code de la sécurité sociale.

* 762 Des modalités d'indemnisation différentes existent dans d'autres régimes : la rente Atexa définie à l'article L. 752-6 du code rural et de la pêche maritime, pour les non-salariés agricoles, dépend du gain forfaitaire annuel et du taux d'incapacité permanente et n'est servie qu'à partir d'un taux d'IPP de 30 %. Les fonctionnaires peuvent, quant à eux, percevoir une rente d'invalidité et, en cas de mise à la retraite pour invalidité, une pension de retraite.

* 763 Selon que le taux d'IPP excède 50 % ou non.

* 764 Article L. 434-2 du code de la sécurité sociale.

* 765 Article L. 434-16 du code de la sécurité sociale.

* 766 Article L. 434-15 du code de la sécurité sociale.

* 767 Article R. 434-27 du code de la sécurité sociale après application des coefficients de revalorisation.

* 768 Article R. 434-28 du code de la sécurité sociale.

* 769 Article R. 434-28 du code de la sécurité sociale.

* 770 Article R. 434-2 du code de la sécurité sociale.

* 771 Article L. 452-4 du code de la sécurité sociale. La FIE peut également être reconnue par voie amiable, mais ce cas est, en pratique, plus rare.

* 772 Article L. 452-1 du code de la sécurité sociale.

* 773 Article L. 452-2 du code de la sécurité sociale : la majoration ne peut conduire à ce que la rente excède la fraction du salaire annuel de l'assuré correspondant à sa réduction de capacité, ni à ce que l'indemnité en capital excède deux fois le montant de droit commun.

* 774 Article L. 452-3 du code de la sécurité sociale.

* 775 Rapport du groupe de travail chargé d'élaborer une nomenclature des préjudices corporels, juillet 2005.

* 776 Cass. Avis, 29 oct. 2007, n° 07-00015, 07-00016 et 07-00017, Cass. Crim., 19 mai 2009, n° 08-86.050, 08-86.485 et 08-82.666, Cass. 2è civ., 11 juin 2009, n° 07-21.768, 08-17.581 et 08-16.089.

* 777 CE, 8 mars 2013, n° 361273, Lebon - CE, 5 mars 2008, n° 272447, Lebon.

* 778 Cass. ass. plen., 20 janvier 2023, n° 20-23.673 et 21-23.947.

* 779 Accord national interprofessionnel du 15 mai 2023 relatif aux accidents du travail et aux maladies professionnelles.

* 780 Cette notion se superpose largement avec le déficit fonctionnel permanent, sans pour autant lui équivaloir.

* 781 Mecss, Marie-Pierre Richer et Annie Le Houerou, Branche AT-MP : vers un juste équilibre entre réparation et prévention des risques professionnels, Rapport d'information n° 18 (2024-2025), déposé le 9 octobre 2024.

* 782 Proposition n° 10.

* 783 Proposition n° 15.

* 784 Décret n° 2019-613 du 19 juin 2019 relatif à la simplification des déclarations sociales des employeurs.

* 785 Igas, Micro-crèches : modèles de financement et qualité d'accueil, janvier 2024.

* 786 Source : réponse au questionnaire transmis à la direction générale de la cohésion sociale (DGCS).

* 787 Annexe 2 au PLFSS pour 2025.

* 788 Ce transfert a été instauré par la loi n° 96-1160 du 27 décembre 1996 de financement de la sécurité sociale pour 1997.

* 789 Article L. 176-2 du code de la sécurité sociale.

* 790 Réponses écrites de la commission au questionnaire de la rapporteure.

* 791 D'autres éléments s'y ajoutent, comme le « swap » de taux avec la branche vieillesse ou l'effort accru de la branche en faveur de la réparation et de la prévention, mais la hausse du transfert explique à elle seule le déficit prévisionnel de la branche AT-MP pour 2026 et les années suivantes.

* 792 Loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 de financement de la sécurité sociale pour 2001.

* 793 L'article 89 de la LFSS pour 2024 confère symboliquement au Fiva la mission d'« identifier » les bénéficiaires potentiels.

* 794 Cass., Ass. Plen., 20 janvier 2023, n° 20-23673 et 21-23947.

* 795 Article 41 de la loi n° 98-1194 de financement de la sécurité sociale pour 1999.

* 796 Le montant de l'Acaata est compris entre 1 260 et 4 443 euros brut par mois. Pour les assurés ayant touché entre 1 938 et 3 864 euros brut sur les douze derniers mois, l'Acaata est égale à 65 % du salaire de référence. Le taux de remplacement est accru pour les bas salaires, et diminué pour les hauts salaires.

* 797 L'âge d'ouverture du droit à l'Acaata est fixé à 60 ans moins le tiers de la durée d'exposition.

* 798 L'arrêté du 29 décembre 2022 modifiant et complétant la liste des ports susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante en faveur des ouvriers dockers professionnels et personnels portuaires assurant la manutention a inscrit de nouveaux ports sur la liste ouvrant droit à la cessation anticipée d'activité : Ajaccio, Bayonne, Boulogne-sur-Mer, Brest, Lorient, Nice, Port La Nouvelle, Port-Vendres, Roscoff.

* 799 Article D. 242-6-9 du code de la sécurité sociale.

* 800 Arrêté du 27 décembre 2023 fixant le montant des majorations prévues à l'article D. 242-6-9 du code de la sécurité sociale pour l'année 2024.

* 801 Article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale.

* 802 Article D. 351-1-9 du code de la sécurité sociale.

* 803 Contrairement au dispositif prévu pour les assurés présentant un taux d'IPP supérieur à 20 %, aucun cumul n'est possible entre affections.

* 804 Articles L. 351-1-4 et D. 351-1-10 du code de la sécurité sociale.

* 805 Article D. 351-1-10 du code de la sécurité sociale.

* 806 Lequel avait été créé par la loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites.

* 807 Ordonnance n° 2017-1389 du 22 septembre 2017 relative à la prévention et à la prise en compte des effets de l'exposition à certains facteurs de risques professionnels et au compte professionnel de prévention.

* 808 Article L. 4163-5 du code du travail.

* 809 Il était auparavant plafonné à 100 points.

* 810 Article R. 4163-11 du code de la sécurité sociale, modifié par le décret n° 2023-759 du 10 août 2023 relatif au fonds d'investissement dans la prévention de l'usure professionnelle et au compte professionnel de prévention.

* 811 Sénat, rapport d'information sur les organismes et fonds financés par les régimes obligatoires de base de la sécurité sociale, mission d'évaluation et de contrôle des comptes de la sécurité sociale, Mmes Doineau et Le Houerou, juillet 2023.

* 812 Article L.O. 111-4-1 du code de la sécurité sociale.

* 813 Mecss, Marie-Pierre Richer et Annie Le Houerou, Branche AT-MP : vers un juste équilibre entre réparation et prévention des risques professionnels, Rapport d'information n° 18 (2024-2025), déposé le 9 octobre 2024.

* 814 Ibid.

* 815 Selon les données du rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale, octobre 2024.

* 816 Réforme des allégements généraux de cotisations sociales patronales, qui augmente les recettes de la branche de 2,2 milliards d'euros.

* 817 « Article-tuyau », qui réalise des transferts de recettes entre branches en modifiant la répartition de la taxe sur les salaires et augmente les recettes de la branche de 0,8 milliard d'euros.

* 818 Cet article réduit la TVA affectée à la sécurité sociale (et donc à la branche maladie, seule à disposer de recettes de TVA) d'un milliard d'euros au titre de la compensation par la sécurité sociale à l'État de la diminution des recettes d'impôt sur les sociétés résultant de l'article 6.

* 819 Annexe 3 au PLFSS 2025, p. 11 (tableau 4 - tableau d'équilibre financier pour 2025).

* 820 Cour des comptes, La situation financière de la sécurité sociale - un déficit devenu structurel malgré les mesures envisagées pour 2025, communication à la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale et à la commission des affaires sociales du Sénat, octobre 2024.

* 821 Avis du Haut Conseil des finances publiques sur le PLF et le PLFSS pour 2025.

* 822 Ibid.

* 823 Objectif global de dépenses, qui regroupe les 3e et 4e sous-objectifs de l'Ondam.

* 824 Annexe 5 du PLFSS.

* 825 Voir infra.

* 826 Avis du comité d'alerte sur le respect de l'Ondam, 30 octobre 2024.

* 827 Le dépassement provient principalement des indemnités journalières, des honoraires médicaux et des produits de santé.

* 828 Le taux de progression de l'objectif relatif aux établissements de santé intègre l'impact des dispositifs de garanties financières et de soutien à l'activité pour compenser les pertes liées à la crise.

* 829 Haut Conseil des finances publiques, avis relatif aux projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2025, 8 octobre 2024.

* 830 Réponse de la conférence des directeurs de centres hospitaliers au questionnaire transmis par la rapporteure.

* 831 Portée par la création de 65 700 emplois salariés aux deux premiers trimestres 2024.

* 832 Les informations concernant les régimes autres que le régime général datent de mai 2024, et non d'octobre 2024 en l'absence d'actualisation de ces données dans la dernière publication de la commission des comptes de la sécurité sociale.

* 833 Marie-Pierre Richer, Annie Le Houerou, Branche AT-MP : vers un juste équilibre entre réparation et prévention des risques professionnels, rapport d'information n° 18 (2024-2025), 9 octobre 2024.

* 834 Les soldes indiqués dans le présent commentaire s'entendent hors Fonds de solidarité vieillesse (FSV).

* 835 L'article L. 161-25 du code de la sécurité sociale prévoit la revalorisation annuelle des pensions de retraite le 1er janvier, sur la base de l'évolution en moyenne annuelle des prix à la consommation (hors tabac) entre les deux périodes de septembre à octobre précédentes.

* 836 L'écart entre ces deux montants vient du fait que les contributions d'équilibre versées par l'État à certains régimes seraient réduites d'un milliard d'euros.

* 837 La réduction de la TVA affectée à la sécurité sociale résulte de l'article 38 du PLF 2025, et la répartition entre branches de cette moindre recette de l'article 8 du présent PLFSS.

* 838 Cour des comptes, rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale de mai 2024.

* 839 Audition du président du conseil d'administration de la CNRACL par la rapporteure générale et le rapporteur de la branche vieillesse de la commission des affaires sociales du Sénat, le 5 novembre 2024.

* 840 Cour des comptes, La situation financière de la sécurité sociale - un déficit devenu structurel malgré les mesures envisagées pour 2025, communication à la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale et à la commission des affaires sociales du Sénat, octobre 2024.

* 841 Ex-annexe B.

* 842 Il s'agit en quasi-totalité du report au 1er juillet de la revalorisation des retraites (3 milliards d'euros), de la réforme des allégements généraux (2,2 milliards d'euros après prise en compte de la réduction de la TVA affectée à la sécurité sociale) et de l'augmentation des taux de la CNRACL (2,3 milliards d'euros).

* 843 Le rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale d'octobre 2024 prévoit une baisse des naissances de 0,9 % en 2024 par rapport à 2023 contre - 6,7 % entre 2022 et 2023

* 844 Complément de libre choix du mode de garde.

* 845 Le recours à l'AJPP a considérablement augmenté sur les dernières années en raison de l'adoption de la loi du 15 novembre 2021 visant à améliorer les conditions de présence parentale auprès d'un enfant dont la pathologie nécessite un accompagnement soutenu qui permet de la verser simultanément ou alternativement aux deux membres du couple.

* 846 Deux autres réformes du CMG entreront en vigueur en 2025 :

- l'extension du bénéfice du CMG aux familles monoparentales pour la garde de leurs enfants âgés de 6 à 12 ans, pour un coût estimé en année pleine à 319 millions d'euros pour la branche famille ;

- la possibilité de partager son versement entre les deux parents en cas de résidence alternée, pour un coût estimé en année pleine à 12 millions d'euros pour la branche famille.

* 847 Loi n° 2020-992 du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l'autonomie (article 5).

* 848 Annexe 7 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025.

* 849 CNSA, Les chiffres clés de l'aide à l'autonomie 2024, juin 2024.

* 850 Loi n° 2023-270 du 14 avril 2023 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 (article 25).

* 851 La création de ce fonds, qui relève du domaine réglementaire, est comptabilisée dans la progression des dépenses de la branche autonomie hors objectif global de dépenses (OGD) d'après les données fournies par le dossier de presse du PLFSS.

* 852 Rapport à la Commission des comptes de la Sécurité sociale, octobre 2023, page 26.

* 853 Loi n° 2020-992 du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l'autonomie (article 3).

* 854 Loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024 (annexe A).

* 855 Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 (annexe).

* 856 Projections du nombre de personnes âgées en perte d'autonomie par lieu de vie (modèle LIVIA), DREES, mise à jour du 6 mars 2024.

* 857 Concertation « Grand âge et autonomie », rapport de M. Dominique Libault, mars 2019.

* 858 Hausse calculée sur la base de l'OGD 2024 arrêté en loi de finances pour 2024, soit 31,5 milliards d'euros. Le PLFSS 2025 rectifie son montant à 31,3 milliards d'euros, en raison du maintien du gel de la réserve prudentielle (0,2 milliard d'euros).

* 859 Source : réponse au questionnaire de la direction générale de la cohésion sociale (DGCS).

* 860 Les Ehpad sont financés par le biais de trois sections. La section soins est financée par la sécurité sociale par le biais de l'OGD, tandis que les deux autres sections, dépendance et hébergement, sont financées par les départements et les résidents (reste à charge).

* 861 Loi n° 2024-317 du 8 avril 2024 portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir et de l'autonomie (article 20).

* 862 Myriam El Khomri, Plan de mobilisation nationale en faveur de l'attractivité des métiers du grand âge, rapport remis à la ministre des solidarités et de la santé, octobre 2019.

* 863 Ex-annexe B.

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