EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mardi 8 novembre 2022, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a procédé à l'examen du rapport de M. Jean-François Rapin et de Mme Vanina Paoli-Gagin, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Recherche et enseignement supérieur ».
M. Claude Raynal , président . - Nous passons à l'examen de la mission « Recherche et enseignement supérieur »
Mme Vanina Paoli-Gagin , rapporteur spécial de la mission « Recherche et enseignement supérieur » . - Les deux programmes qui portent les crédits dédiés à l'enseignement supérieur bénéficient cette année encore d'une hausse importante, pour atteindre 18 milliards d'euros. L'augmentation s'élève à près de 750 millions d'euros en crédits de paiement (CP), soit une progression de 4,3 % par rapport à 2022.
Compte tenu de la masse salariale des universités, près de la moitié des nouveaux crédits sont consacrés à la mise en place pour 2023 de la compensation de la hausse du point d'indice pour les établissements d'enseignement publics. Il est à noter qu'aucune mesure de compensation n'aura été mise en place pour les mois de juillet à décembre 2022, pour lesquels les universités devront mobiliser leurs fonds propres.
Je partage avec mon collègue Jean-François Rapin la satisfaction de voir que l'ensemble des engagements figurant dans la loi de programmation de la recherche (LPR) sont respectés dans ce budget. La poursuite de la mise en oeuvre de cette LPR contribue, en effet, à la croissance de la mission « Enseignement supérieur » à hauteur de 140 millions d'euros. Ces crédits sont essentiellement destinés aux personnels, via des mesures de revalorisation salariale et d'élargissement des voies de recrutement. Le projet de loi de finances (PLF) pour 2023 prévoit, en outre, la création de 413 emplois, dont 385 au titre de la LPR.
Nous pouvons, je le pense, nous féliciter du renforcement des moyens consacrés aux universités, qui contribue à leur redonner des marges de manoeuvre et à limiter les tensions sur leur masse salariale.
Nouveauté de ce budget, 35 millions d'euros supplémentaires sont prévus pour la mise en place expérimentale des contrats d'objectifs et de moyens pluriannuels avec une dizaine d'universités. L'idée me semble être intéressante, mais les montants destinés à être contractualisés sont à ce stade extrêmement faibles à l'échelle des crédits accordés aux universités. Nous n'en sommes pour l'instant qu'à la phase de définition de cette expérimentation, mais nous serons attentifs à la négociation en cours entre le ministère et les universités.
Permettez-moi toutefois de souligner un point de vigilance. Du fait de la taille de leur patrimoine immobilier et des infrastructures de recherche qu'ils hébergent, les établissements d'enseignement supérieur sont particulièrement touchés par la crise énergétique. Le surcoût en 2022 s'élèverait à 40 à 50 % de plus par rapport à 2021, soit 100 millions d'euros. Concernant 2023, et bien que l'évaluation des surcoûts potentiels soit un exercice délicat, le ministère estime que le surcoût énergétique s'élèvera à 400 millions d'euros par rapport à 2022.
En 2022, les universités devront mobiliser leurs fonds de roulement pour tenir compte de ces hausses. En 2023, elles devraient bénéficier du fonds de compensation du surcoût de l'énergie qui devrait être créé dans le cadre du projet de loi de finances rectificative (PLFR). La ministre avait annoncé un fonds doté de 275 millions d'euros, dont plus de 200 pour les établissements d'enseignement supérieur. Cette aide devrait être versée au prorata des surcoûts aux universités, en fonction de la situation financière ad hoc de chacune d'entre elles et du coût de l'énergie dans leurs dépenses.
Si, sur le principe, cela semble être un signal très positif pour les universités, seuls 150 millions d'euros de nouveaux crédits sont en réalité ouverts par ce PLFR. Il semblerait que les 125 millions complémentaires soient en partie financés sur les crédits dégagés par la baisse du nombre d'étudiants boursiers.
Le constat de la vulnérabilité des établissements d'enseignement supérieur aux difficultés énergétiques m'amène à évoquer les enjeux cruciaux en matière d'investissement dans le patrimoine immobilier universitaire. J'ai déjà souligné à plusieurs reprises l'ampleur du défi, considérant le caractère parfois vétuste et souvent énergivore du patrimoine immobilier universitaire. Alors qu'il est impératif de lancer un plan massif de rénovation de ce patrimoine, seuls 30 millions d'euros supplémentaires sont consacrés, dans le PLF, à l'immobilier universitaire. Cet effort ponctuel demeure insuffisant et ne permettra pas à la France de respecter les objectifs ambitieux qu'elle s'est fixés en matière de transition énergétique. Le coût de l'inaction serait bien supérieur à celui des dépenses engagées par anticipation, et nous devons tenir compte de plusieurs décennies de délaissement du patrimoine immobilier universitaire. Je vous le redis, nous ne pourrons repousser indéfiniment le plan de rénovation immobilière de grande ampleur qui s'avère indispensable.
J'en viens maintenant aux moyens consacrés à la vie étudiante, qui constituent l'autre pan de la mission pour son volet « Enseignement supérieur ». En 2021 et 2022, ils avaient enregistré une hausse très importante. Le PLF 2023 prévoit cependant une stabilisation des crédits.
Le montant des bourses sur critères sociaux a été revalorisé de 4 % à la rentrée de 2022, afin de tenir compte de l'inflation. Le coût de cette mesure s'élèvera à 85,1 millions d'euros en 2023, mais les crédits dédiés restent cependant identiques à ceux qui ont été prévus l'année dernière, du fait de la baisse attendue du nombre d'étudiants boursiers. En outre, cette revalorisation ne permettra pas de couvrir l'érosion du pouvoir d'achat découlant de l'inflation constatée en 2022 et 2023.
En parallèle, la subvention versée au réseau des oeuvres universitaires progressera de 35,6 millions d'euros par rapport à 2022 pour financer notamment la prolongation du ticket de resto U à 1 euro pour les étudiants boursiers et du gel des loyers dans les résidences étudiantes. Le coût du repas à 1 euro s'élèvera à 51 millions d'euros en 2023, pour 430 000 étudiants bénéficiaires.
La situation financière du réseau des centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires (Crous), qui avait été très exposé pendant la crise sanitaire, continue de s'améliorer. Là encore, je voudrais soulever un point d'attention. La hausse des coûts des denrées alimentaires pourrait engendrer un effet ciseaux, puisque le nombre de repas servis augmenterait alors de façon parallèle. Les prévisions à date du Centre national des oeuvres universitaires et scolaires (CNOUS) font état d'une possible répercussion à la hausse des effets du repas à 1 euro pour la fin de l'année, pour un coût total de l'ordre de 50 millions d'euros. La fréquentation des restaurants universitaires croît en parallèle très rapidement, l'activité à la rentrée 2022 étant supérieure de 20 %, voire 30 %, à l'année précédente.
Au-delà de ces quelques remarques, la mission dans son volet « Enseignement supérieur » bénéficiant de hausses de crédits conséquentes, permettant le respect de la trajectoire définie en loi de programmation, je vous propose d'en adopter les crédits.
M. Jean-François Rapin , rapporteur spécial de la mission « Recherche et enseignement supérieur » . - Les crédits des programmes « Recherche » de la mission devraient atteindre, en 2023, 12,8 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) comme en crédits de paiement (CP), soit une hausse de plus de 7 % par rapport à l'année précédente. Cette évolution résulte essentiellement de l'enveloppe supplémentaire de 330 millions d'euros allouée aux organismes de recherche du programme 172, ainsi que de la forte hausse des crédits dédiés à la recherche spatiale.
Avant d'entrer dans les détails, je tire deux premiers constats de cette augmentation.
D'abord, j'exprimerai une satisfaction. La trajectoire proposée pour 2023 respecte la hausse prévue par la LPR. Ce sera la troisième année que cette loi sera mise en oeuvre : nos avions alors salué l'ambition inscrite sur le papier en faveur de la recherche. À l'échelle de la mission, ce sont ainsi 400 millions d'euros supplémentaires qui sont prévus pour 2023 afin de respecter les engagements pris dans le cadre de cette loi, et nous pouvons nous en féliciter.
Cependant, la trajectoire de la LPR a été établie en 2020 en volume, c'est-à-dire sans tenir compte de l'inflation. À l'époque, en tant que rapporteur pour avis sur ce texte, je vous avais averti sur les risques qui en découlaient. Il est vrai que l'inflation était alors très faible, ce que n'avait pas manqué de mettre en avant le Gouvernement, mais elle devrait s'élever cette année à 5,4 %. En euros constants, les 400 millions d'euros de hausse au titre de la LPR en 2023 équivalent ainsi à 385 millions d'euros en 2022.
En conséquence, la loi de programmation aura surtout protégé la mission « Recherche et enseignement supérieur » d'une érosion de ses moyens par l'inflation. La clause de revoyure figurant dans ce texte prévoyait une actualisation de la programmation au moins tous les trois ans - j'espère que cette occasion sera saisie en 2023.
Par ailleurs, de nombreuses infrastructures de recherche sont très consommatrices d'électricité et seront donc très impactées par la hausse des coûts énergétiques en 2023. À titre d'exemple, la hausse du coût de l'énergie est estimée à 60 millions d'euros pour le seul nucléaire civil par le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA). Le PLFR que nous discuterons la semaine prochaine prévoit que 55 millions d'euros devraient revenir en 2022 aux établissements de recherche, intégralement couverts par l'annulation de la réserve de précaution.
L'enjeu pour les organismes est donc de stabiliser au minimum les activités de recherche afin de maintenir la continuité de l'activité expérimentale. Espérons que la mobilisation des ressources propres des opérateurs et le dégel de la réserve y pourvoiront.
J'en viens maintenant aux détails de ce budget.
Les organismes de recherche bénéficient au total de plus de 7 milliards d'euros de crédits, en hausse de 370 millions d'euros par rapport à l'année précédente. Une part importante est destinée à financer la hausse du point d'indice en 2023, à hauteur de 130 millions d'euros. Les efforts portés par la LPR expliquent le reste de l'augmentation constatée en 2023. Celle-ci concerne notamment l'amélioration des carrières dans la recherche, la rémunération des doctorants et l'augmentation des moyens alloués aux laboratoires et aux grandes infrastructures de recherche nationales et internationales.
Il est indéniable que ces moyens nouveaux redonneront des marges de manoeuvre aux organismes de recherche. Alors que la subvention pour charges de service public versée aux opérateurs subissait une lente érosion année après année, le budget pour 2023 confirme l'inversion de tendance qui avait pu être espérée en 2022.
J'évoquerai maintenant le redressement financier de l'Agence nationale de la recherche (ANR), qui se poursuit cette année.
En 2023, les crédits de l'ANR au titre du programme 172 devraient s'élever à 1,226 milliard d'euros en AE et 961 millions d'euros en CP, soit une hausse de 15,4 % en AE et de 8,6 % en CP.
Les hausses de crédits des deux dernières années permettront d'atteindre un taux de succès sur les appels à projets de 23,7 % en 2023, contre 16 % en 2020. Le taux de préciput - dont je rappelle qu'il s'agit de la somme versée aux organismes de recherche lorsqu'une de leur équipe a remporté un appel d'offre, afin d'inciter les organismes de recherche à se porter candidats - a également progressé, pour atteindre 25 % dès 2021, contre 19 % en 2020. Il s'élèvera à 200 millions d'euros et 28,5 % en 2023.
De manière générale, le redressement financier de l'ANR constitue un signal très encourageant pour nos chercheurs. Il me semble que nous devons être attentifs aux enjeux d'articulation avec les appels à projets européens, afin que les appels à projets nationaux et européens ne se concurrencent pas.
Je salue enfin la rebudgétisation au sein de la mission du programme 191 - Recherche duale pour 150 millions d'euros. Les crédits avaient été déplacés au profit de la mission « Plan de relance » en 2021 et 2022. Le passage par la mission « Plan de relance » de ces crédits ne se justifiait pas par leur nature et a permis de masquer une baisse des montants accordés au programme depuis 2020. En d'autres termes, la création de cette ligne sur la mission « Plan de relance » n'aura pas permis d'accroître les moyens consacrés à la recherche duale en 2021 et 2022, mais aura, au contraire, accompagné leur diminution.
Enfin, le budget de la recherche spatiale représenterait, en 2023, 1,7 milliard d'euros, soit une hausse de 74 millions d'euros à périmètre constant. Ainsi, les moyens globaux alloués au Centre national d'études spatiales (Cnes) progresseront en 2023 de 10 %.
Néanmoins, plus de la moitié de ces montants sont in fine transférés à l'Agence spatiale européenne (ESA). Les fonds à destination de cette dernière devront d'ailleurs sans doute augmenter au cours des prochains mois, notamment pour financer le surcoût lié au retard du projet Ariane 6, estimé à environ 200 millions d'euros. La participation de la Russie au programme étant incertaine, il semble d'autant plus indispensable d'envisager que le budget soit réévalué.
En conclusion, dans la mesure où le budget 2023 se révèle conforme à la LPR, je souhaite que notre commission des finances propose au Sénat d'adopter les crédits de cette mission.
Mme Laure Darcos , rapporteure pour avis de la commission de la culture sur la mission « Recherche et enseignement supérieur » . - La prééminence de la question des surcoûts énergétiques est revenue lors de chaque audition. Sur l'enveloppe supplémentaire de 275 millions d'euros annoncée par Sylvie Retailleau pour les opérateurs de l'enseignement supérieur et de la recherche (ESR), 55 millions seront alloués aux seuls frais de surcoût énergétique. La ministre est ouverte à une clause de revoyure l'année prochaine, ce qui est de bon augure pour abonder le budget de cette mission dans les années à venir. Le « 1% culture scientifique » est très prisé par les appels à projets de l'ANR, ce qui permet de diffuser la culture scientifique auprès de nos concitoyens au travers de différents programmes. Je partage l'avis du rapporteur spécial sur le vote des crédits.
M. Stéphane Piednoir , rapporteur pour avis de la commission de la culture sur la mission « Recherche et enseignement supérieur » . - Je me réjouis de la convergence de points de vue entre les rapporteurs spéciaux de la commission des finances et les rapporteurs pour avis de la commission de la culture. J'attire votre attention sur la non-compensation du point d'indice en 2022 - près de 180 millions d'euros ne sont pas compensés - et celle du glissement vieillesse technicité (GVT) et les conséquences sur le budget des universités.
Concernant l'enveloppe supplémentaire de 275 millions d'euros obtenue par la ministre Retailleau, nous attendons d'en savoir plus sur la ventilation de ces crédits.
J'appelle à la mise en place depuis plusieurs années d'un grand plan Campus. Les passoires thermiques existent notamment en région parisienne. Sur le financement des Crous, il n'y a aucun lien entre la fréquentation des restaurants universitaires et la dotation accordée - la dotation est à moyens constants. Il est étonnant que l'on ne tienne pas compte de l'augmentation très significative de la fréquentation des restaurants universitaires depuis le confinement et qui s'explique également par le renchérissement du coût de la vie. J'ai également proposé à la commission de la culture d'émettre un avis favorable à l'adoption de ces crédits.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Les problèmes d'énergie, de consommation et de dépenses supplémentaires vont-ils provoquer des fermetures anticipées d'établissement ou un possible retard de la rentrée universitaire ? Quelles sont les éventuelles annonces de soutien du Gouvernement, et à quelle hauteur ? Le bouclier énergétique va concerner quasiment tous les secteurs d'activité, qu'en est-il des universités ?
M. Antoine Lefèvre . - Je partage l'inquiétude de mes collègues à propos de l'insuffisance des crédits alloués à la rénovation de l'immobilier universitaire, et sur la question des passoires thermiques. Savez-vous combien d'universités envisageraient aujourd'hui, pour lutter contre le surcoût d'énergie, de revenir à des cours en distanciel ou d'allonger les périodes de vacances scolaires ?
M. Michel Canévet . - Les crédits supplémentaires sont principalement destinés à lutter contre le surcoût énergétique, mais où en est-on de la mise à niveau du parc immobilier ? Les 12 milliards d'euros des fonds de roulement des établissements d'enseignement supérieur sont-ils prévus pour anticiper des investissements ou pour couvrir les frais courants des établissements, car le montant est élevé ?
Par ailleurs, j'aimerais savoir si l'ANR est efficace pour relancer la recherche dans notre pays ou bien si elle est, au contraire, un frein à l'engagement d'autres actions de recherche.
M. Rémi Féraud . - La jeunesse a été la grande abandonnée au cours de la crise du covid. Depuis, des centaines d'étudiants fréquentent des banques alimentaires, notamment à Paris. Or, face à l'inflation, les crédits alloués aux restaurants universitaires risquent d'être insuffisants en 2023. Le Sénat ne peut-il pas demander un effort budgétaire supplémentaire en faveur la vie étudiante ? Cela constituerait un symbole important et cela permettrait d'éviter l'écueil d'un budget sous-évalué.
M. Didier Rambaud . - Je souhaite attirer l'attention sur un volet méconnu de la recherche française, la recherche polaire. J'assiste dans mon département à la fonte et à la disparition de glaciers. Je rappelle que la France est une nation polaire grâce à l'excellence de sa recherche, par exemple avec l'Institut polaire Paul-Émile Victor. Il convient d'accorder les moyens nécessaires à la poursuite des recherches dans ce domaine.
M. Claude Raynal , président . - J'ai une interrogation à propos des montants transférés entre 1993 à 2020 du budget de la recherche vers l'ESA. L'année 2020 est-elle une exception ?
Mme Vanina Paoli-Gagin , rapporteur spécial . - Les universités pourront bénéficier du fonds de compensation du surcoût de l'énergie qui sera créé dans le projet de loi de finances rectificative, mais son périmètre, ses modalités et les conditions d'éligibilité n'ont pas encore été définis précisément. Comme je l'ai indiqué, les crédits nouveaux ne représentent en réalité que 150 millions d'euros. Les établissements pourront également bénéficier du dispositif général appelé « amortisseur électricité ».
Certains d'entre vous nous ont interrogés sur une éventuelle modification des conditions d'enseignement pour réduire la facture énergétique. Je rappelle que les universités sont autonomes. Elles peuvent décider d'organiser des cours en distanciel ou en présentiel à leur choix. Le Gouvernement ne semble pas avoir le souhait de fermer les universités au-delà de la période des vacances universitaires. L'université de Strasbourg a annoncé qu'elle allait fermer ses portes deux semaines supplémentaires cet hiver pour faire face à l'envolée des prix de l'énergie. Il s'agit d'une initiative locale. La généralisation d'une telle mesure n'est pas envisagée, et ne me semble d'ailleurs pas souhaitable, tant pour des raisons d'ordre psychologique, dans la mesure où les étudiants ont déjà connu l'expérience du covid, que pour des raisons financières : en raison de l'inertie énergétique des bâtiments, il revient plus cher de remettre en marche des locaux après les avoir fermés une semaine supplémentaire que de les laisser ouverts. J'ajoute que fermer temporairement un établissement d'enseignement supérieur qui abrite des laboratoires de recherche risquerait de mettre en péril des expérimentations en cours.
M. Jean-François Rapin , rapporteur spécial . - Notamment dans le nucléaire !
Mme Vanina Paoli-Gagin , rapporteur spécial . - M. Féraud a raison de souligner l'effet de ciseaux pour les Crous à cause de la hausse des coûts des denrées alimentaires, qui devrait s'établir à 10 % en 2023. Il faut financer les repas à 1 euro : alors que le coût d'un repas est de 8 euros environ, la compensation de l'État s'élève seulement à 3,5 euros, et la différence est à la charge des restaurants universitaires.
La Cour des comptes a publié un rapport sur le patrimoine immobilier des universités, dont les conclusions vont dans le même sens que notre rapport de 2020 : il manque 8 ou 9 milliards d'euros pour remettre à niveau les 18 millions de mètres carrés de locaux universitaires. Une part importante du parc immobilier est notée D ou moins dans le classement relatif à la performance énergétique des bâtiments, et comme le parc continue à se dégrader, on peut craindre que la situation n'empire.
M. Jean-François Rapin , rapporteur spécial . - Les établissements de recherche ne devraient pas fermer temporairement pour limiter les surcoûts énergétiques. Nous avons noté un « avant » et un « après » cette annonce lors des auditions que nous avons menées. Monsieur Canévet, le projet de loi de finances rectificative prévoit que 55 millions d'euros devraient revenir en 2022 aux laboratoires de recherche pour les aider à compenser le surcoût de l'énergie.
La France avait une dette importante envers l'Agence spatiale européenne en 2017. Celle-ci a été comblée en 2019 et 2020. La hausse de crédits en 2020 s'explique également par les engagements pris par la France lors de la conférence interministérielle de l'ESA à Séville cette même année.
En ce qui concerne l'ANR, mon opinion a évolué par rapport à quelques années plus tôt. On pouvait raisonnablement craindre que cet organisme ne parvienne pas à financer la recherche. Aujourd'hui, le taux de succès sur les appels à projets s'élève à près de 25 % et le montant des financements octroyés s'élève à plus de 1 milliard d'euros. On peut donc considérer que l'objectif a été atteint. L'ANR est un bon opérateur. Le taux de préciput a également progressé. Il s'élèvera à 200 millions d'euros et 28,5 % en 2023. Il est vrai qu'il existe une forme de concurrence avec les appels à projets européens. L'ANR en a pris conscience. Les opérateurs ont d'ailleurs souvent embauché des chargés de projets pour monter les dossiers et répondre aux appels à projets européens.
Les opérateurs de recherche sur les pôles doivent passer par l'ANR. Le champ de ses appels à projets est vaste.
Mme Laure Darcos , rapporteure pour avis . - L'Institut polaire français Paul-Émile Victor estime qu'il a besoin de 3 millions d'euros. Sylvie Retailleau a annoncé le déblocage d'une enveloppe d'urgence de 1 million d'euros. Nous devrons rester vigilants sur ce point.
M. Jean-François Rapin , rapporteur spécial . - Je précise que le fonds de compensation sera créé dans le PLFR. C'est pourquoi ses modalités restent encore imprécises.
La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».
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Réunie à nouveau le jeudi 17 novembre 2022, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé sa décision.