Rapport général n° 163 (2021-2022) de Mme Sylvie VERMEILLET , fait au nom de la commission des finances, déposé le 18 novembre 2021

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N° 163

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2021-2022

Enregistré à la Présidence du Sénat le 18 novembre 2021

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances , adopté par l'Assemblée nationale, pour 2022 ,

Par M. Jean-François HUSSON,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 25

RÉGIMES SOCIAUX ET DE RETRAITE

COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE : PENSIONS

Rapporteure spéciale : Mme Sylvie VERMEILLET

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Thierry Meignen, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 4482 , 4502 , 4524 , 4525, 4526 , 4527 , 4597 , 4598 , 4601 , 4614 et T.A. 687

Sénat : 162 et 163 à 169 (2021-2022)

L'ESSENTIEL

Le compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions » et la mission « Régimes sociaux et de retraite » permettent de dresser chaque année un état des lieux d'une partie du financement public des systèmes des retraites. Ce panorama incomplet - puisqu'il n'embrasse pas la totalité des canaux de financement de l'État vers les régimes d'assurance-vieillesse - vient illustrer les différences entre les régimes visés par ces programmes budgétaires et le droit commun en matière de retraites.

Si le rapport budgétaire n'a pas à évaluer la pertinence du choix opéré à l'époque de la création de ces régimes de privilégier la garantie d'un accès bonifié à l'assurance-vieillesse au détriment d'avantages salariaux, il peut néanmoins interroger sur le périmètre du soutien de la solidarité nationale au financement de droits spécifiques.

Les dépenses du CAS Pensions et de la mission « Régimes sociaux et de retraite » représentent 30 % des dépenses d'assurance vieillesse en France.

Répartition des prestations de retraites entre les différents régimes de base
en 2020

Source : commission des finances du Sénat, d'après le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale, septembre 2021

L'examen de la contribution de l'État aux régimes spéciaux et aux pensions civiles et militaires s'inscrit dans un contexte d'augmentation constante des dépenses d'assurance vieillesse, tous régimes confondus. Le Conseil d'orientation des retraites table ainsi sur une augmentation des dépenses de retraites de 1,4 % par an jusqu'en 2025 puis de 1,6 ou 1,7 % jusqu'en 2030, en fonction du taux de croissance. Deux éléments conditionnent une telle hausse : la progression continue de l'espérance de vie et une croissance insuffisamment élevée sur le long terme pour garantir un niveau d'emploi favorable à l'équilibre du système en général. Le déficit du régime des retraites devrait ainsi représenter 0,7 % du PIB à l'horizon 2030. Les dépenses de retraites devraient représenter 13,7 % du PIB en 2022. Elles seraient ensuite comprises entre 11,3 % et 13 % au cours de la période 2030-2070, en fonction du scenario macro-économique retenu.

Reste une interrogation sur le niveau des retraites. Le COR constatait en 2018 que le niveau de vie moyen des retraités était légèrement supérieur à celui de l'ensemble de la population (+ 2,9 %). Ce niveau devrait cependant baisser à long terme pour atteindre une fourchette entre 77 et 86 % en 2070. Ce constat dresse une perspective où les cotisants actuels voient leur contribution augmenter en volume et en durée pour bénéficier à terme d'une pension moins élevée mais versée sur une plus longue durée, posant la question de l'équité inter-générationnelle.

Les soldes du système des retraites en 2030, 2060 et 2070 dépendent, en outre, en large partie de scenarii macro-économiques et d'hypothèses potentiellement optimistes. S'agissant des régimes visés par le compte d'affectation spéciale « Pensions » ou la mission « Régimes sociaux et de retraite », l'utilisation de ces données macro-économiques peut apparaître, compte tenu de la nature même des cotisants, pour partie inopportune. Les variables d'ajustement visent plus, dans ces cas, les conditions d'accès à la retraite (âge, durée de cotisation), les avantages spécifiques de ces régimes, le mode de revalorisation mais aussi le mode d'équilibrage retenu par l'État pour le financement de ces régimes.

I. QUEL AVENIR POUR LA MISSION « RÉGIMES SOCIAUX ET DE RETRAITE » ?

Le montant global des crédits demandés dans le cadre du présent projet de loi de finances s'élève à 6,06 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP), soit des montants en baisse de 1,55 % par rapport à la loi de finances pour 2021. Cette diminution s'inscrit dans la continuité de celle observée lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2021. Cette logique pourrait cependant être remise en cause, à moyen terme, par la progression des dépenses de certains régimes.

Évolution des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite »
par programme

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

La baisse des crédits concerne les trois programmes et la plupart des actions contenues en leur sein. La seule exception tient à l'action 04 du programme 198 visant le régime des retraites des personnels de la RATP, l'un des deux régimes spéciaux encore ouverts visés par la mission.

A. UNE MAQUETTE BUDGÉTAIRE QUI NE COUVRE PAS LA TOTALITÉ DE L'EFFORT DE L'ÉTAT EN FAVEUR DES RÉGIMES SPÉCIAUX

La mission « Régimes sociaux de retraite » du budget général est structurée autour de trois programmes recensant les subventions versées par l'État à plusieurs régimes spéciaux. Elle ne reflète cependant qu'imparfaitement la réalité de l'action de l'État en faveur des régimes spéciaux de retraite en France. Elle ne vise pas ainsi tous les régimes spéciaux pour lesquels l'État verse une subvention d'équilibre, à l'image des caisses de retraites de l'Opéra de Paris ou de la Comédie française. Le régime de retraite de la branche des industries électriques et gazières (IEG), le régime des non-salariés agricoles, le régime des retraites des avocats (CNBF) et celui des clercs et des employés de notaire sont, quant à eux, directement financés au moyen de taxes affectées. La répartition des caisses au sein des programmes de la mission n'est pas non plus sans poser de question, au regard du degré d'ouverture de ces régimes. Dans ces conditions, la maquette budgétaire ne permet pas de disposer d'une approche complète et cohérente des régimes spéciaux bénéficiant de financements publics, ce qui contraste avec le souhait affiché par le Gouvernement lors de la présentation du projet de loi portant réforme des retraites en 2020 de simplifier l'architecture du système des retraites en France et de clarifier son rôle dans le financement des régimes spéciaux.

B. LA QUESTION DES COÛTS DE GESTION

Les crédits versés aux fins de paiement des pensions sont à court terme difficilement modifiables. Reste la question des coûts de gestion. Les indicateurs mis en place, année après année, dans les projets annuels de performance soulignent une difficulté à les faire baisser. Le cas est particulièrement patent s'agissant du coût unitaire d'une primo-liquidation de pension de retraite. Une progression des coûts de gestion est également observable s'agissant des dépenses de gestion pour 100 euros de prestations servies.

C. UNE MINORATION DES CRÉDITS EN TROMPE-L'OEIL

La baisse, relative, des crédits dédiés à la mission « Régimes sociaux et de retraite » dans le présent projet de loi de finances ne saurait occulter l'important déséquilibre financier des caisses qu'elle subventionne. Cette situation délicate résulte tout à la fois d'un ratio démographique défavorable et de la permanence d'avantages spécifiques coûteux et insuffisamment financés par les cotisations. Compte-tenu de cette insuffisance, la diminution en valeur absolue du financement de l'État ne saurait présumer d'un désengagement à court-moyen terme.

Évolution du ratio démographique des régimes de retraite de la SNCF, de la RATP et des Marins

22012

22013

22014

22015

22016

22017

22018

22019

22020

SSNCF

00,68

00,68

00,68

00,67

00,66

00,65

00,64

00,63

00,60

RRATP

00,89

00,89

00,88

00,88

00,86

00,85

00,84

00,84

00,85

MMarins

00,30

00,30

00,30

00,30

00,30

00,30

00,30

00,28

00,27

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Les incidences du déséquilibre démographique et des avantages spécifiques sur la situation financière des régimes spéciaux demeurent cependant insuffisamment documentées , alors qu'elles conditionnaient pourtant une partie du projet de loi portant création d'un système universel des retraites présenté par le Gouvernement avant la crise sanitaire.

Seule une estimation des dispositifs explicites a été réalisée, en 2016. Cette estimation exclut l'effet de bonification de durée d'assurance ou la prise en compte des six derniers mois de salaire comme base de calcul de la pension. Elle aboutit à un coût prévisionnel de 3,76 milliards d'euros en 2020 pour quatre régimes - SNCF, Mines, RATP, Marins - visés par la mission « Régimes sociaux et de retraite ». Pour mémoire, la subvention d'équilibre versée par l'État à ces quatre caisses dans le présent projet de loi de finances a atteint 5,93 milliards d'euros en 2020. Le montant des cotisations perçues par la SNCF, l'ENIM ou le régime des mines est ainsi inférieur à celui des dispositifs explicites servis par ces caisses. Il est à peine supérieur s'agissant de la RATP.

D. UNE DÉPENDANCE MARQUÉE AU FINANCEMENT PUBLIC

Pour les cinq plus gros régimes spéciaux subventionnés (SNCF, RATP, CANSSM, ENIM et SEITA) par la mission « Régimes sociaux et de retraite », le besoin de financement actualisé à horizon 2120 s'élève à 523,7 milliards d'euros. Cet indicateur permet de mesurer le montant des crédits qu'il faudrait placer aujourd'hui pour couvrir les besoins de financement futurs.

Le financement public représente aujourd'hui entre 60 % (Caisse de la RATP) et 82 % (Caisse des mines) des principaux régimes des retraites visés par la mission.

Recettes des principaux régimes de retraites visés par la mission en 2022

(en millions d'euros)

CPRP SNCF

CRP RATP

Marins

Mines

Subvention d'équilibre

3 273

751

791

947

Cotisations

1 862

503

141

6

Compensation démographique

56

-36

76

199

Autres recettes

2

1

8

1

Total recettes

5 193

1 255

1 016

1 153

Part de la subvention dans les ressources de la Caisse

63 %

60 %

78 %

82 %

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire

E. LES ÉCUEILS D'UNE RÉFORME DES RÉGIMES SPÉCIAUX

Les leviers disponibles pour tempérer le recours à la solidarité nationale en vue de financer les régimes spéciaux sont connus. L'alignement sur le droit commun constitue bien évidemment le principal biais. Un rapprochement est déjà en oeuvre, il reste néanmoins plus lent ou moins ambitieux que celui mis en place entre le régime de retraite de la fonction publique et le régime général, qu'il s'agisse de l'augmentation de l'âge de cotisation ou de la révision des règles de cotisation. Là encore, le Gouvernement n'a pas évalué l'impact financier d'une évolution de ces paramètres et ne dispose pas toujours des éléments pour estimer le poids de certains avantages spécifiques (absence de taux de cotisation spécifique pour les avantages spéciaux du régime de la RATP par exemple).

Au-delà de ce constat, pour partie incompréhensible dans l'hypothèse d'une réforme des régimes spéciaux, la rapporteure spéciale rappelle le coût des précédentes réformes visant à l'alignement sur une partie des règles de droit commun . Ainsi, s'agissant de la SNCF, pour la période 2011-2020, les gains cumulés pour le régime, soit environ 4,1 milliards d'euros, étaient inférieurs aux coûts cumulés pour l'entreprise estimés à 4,7 milliards d'euros.

L'ouverture à la concurrence de la RATP pourrait, par ailleurs, constituer une opportunité en vue d'une réduction du nombre de pensionnés et donc de la dépense publique. La reprise des lignes de bus par d'autres entreprises devrait ainsi donner lieu au transfert de personnels RATP au sein des entreprises concessionnaires. Ces personnels continueront cependant de bénéficier du statut RATP s'agissant de l'assurance vieillesse.

II. LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « PENSIONS » : LE MIRAGE DE L'EXCÉDENT

Le compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions » a été créé en 2006 afin de retracer les opérations relatives aux pensions et avantages accessoires gérés par l'État. Il est composé de trois programmes :

- le programme 741 « Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d'invalidité » , qui regroupe l'essentiel des crédits du CAS;

- le programme 742 « Ouvriers des établissements industriels de l'État » qui finance les dépenses du Fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels d'État (FSPOEIE) ;

- le programme 743 « Pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et autres pensions » .

A. UNE NOUVELLE AUGMENTATION DES DÉPENSES ATTENDUES EN 2022

Le montant global des crédits demandés dans le cadre du présent projet de loi de finances s'élève à 60,98 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP), soit une progression de 1,25 % par rapport aux montants ouverts en loi de finances pour 2021. Cette majoration s'inscrit dans la continuité de celle observée en loi de finances pour 2021. Elle est inégalement répartie puisque seul le programme 741 « Pensions civiles et militaires de retrait et allocations temporaire d'invalidité » enregistre une progression.

Évolution des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite »
par programme depuis 2019

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

L'augmentation limitée, dans le présent projet de loi de finances, des crédits affectés au CAS est, cependant, à replacer dans le cadre d'une progression de plus de 31 % des dépenses du CAS Pensions depuis 2007.

Montant des dépenses du CAS Pensions depuis 2007

( en millions d'euros )

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Aux termes de l'article 21-II de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances, un compte d'affectation spéciale (CAS) doit être équilibré à tout instant afin qu'en cours d'année. Le montant prévisionnel des recettes est établi à 61,2 milliards d'euros en 2022, ce qui dénote une certaine stabilité des ressources par rapport à l'exercice précédent (+ 0,4 %).

B. UNE PROGRESSION MODÉRÉE DES DÉPENSES DE PENSIONS DES FONCTIONNAIRES CIVILS ET MILITAIRES DE L'ÉTAT ATTENDUE EN 2022 QUI NE REFLÈTE QUE PARTIELLEMENT LE DÉFI DÉMOGRAPHIQUE AUQUEL VA ÊTRE CONFRONTÉ CE RÉGIME

Le programme 741 « Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d'invalidité » devrait enregistrer une majoration de ses crédits de 1,48 % en 2022. Cette augmentation dépasse la moyenne observée depuis 2011, les dépenses progressant depuis cette date de 0,9 % par an. La revalorisation des pensions de base de 1,1 % au 1 er janvier 2022 (0,4 % en 2021) et de 1,6 % pour les pensions d'invalidité au 1 er avril 2022 (0,1 % en 2021) devrait conduire à majorer les pensions de 493 millions d'euros, contre 172 millions d'euros en 2021.

Si la crise sanitaire a eu un impact sur les dépenses de pensions en 2020 et en 2021, elle n'a pas bouleversé la trajectoire du ratio démographique du régime des fonctionnaires , l'exercice 2020 marquant une nouvelle dégradation de celui-ci. Le COR estime que le nombre de retraités de droit direct devrait augmenter jusqu'en 2035 environ en raison du départ à la retraite des générations nombreuses du baby-boom. S'agissant des fonctionnaires civils, il passerait ainsi de 2 à 2,2 millions, avant de redescendre en dessous du seuil de 2 millions à horizon 2055. Il convient de rappeler à ce stade que les effectifs des retraités de la fonction publique d'État progressent de manière continue depuis 1990, au rythme moyen de 2,4 % par an.

Il convient de rappeler à ce stade que les effectifs contractuels ont augmenté de 2,5 % par an en moyenne dans la fonction publique d'État (y compris établissements publics administratifs) sur la période 2009-2019. Ils représentent désormais 18,8 % de l'ensemble des effectifs. Ces agents affiliés à la Caisse nationale d'assurance-vieillesse (CNAV) pour le régime de retraite de base et, s'agissant du régime complémentaire à l'Ircantec, pour les agents contractuels de droit public et à l'Agirc-Arrco, pour les agents contractuels de droit privé.

Ratio démographique corrigé du régime des retraites
de la fonction publique d'État entre 2015 et 2020

22015

22016

22017

22018

22019

22020

11,05

11,02

11,00

00,97

00,98

00,95

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

La progression des crédits dédiés aux pensions civiles et militaires de retraite en 2022 devrait une nouvelle fois conduire à renforcer le poids de ces dépenses au sein du budget de l'État . Depuis la création du CAS en 2006, la croissance moyenne des dépenses de pensions (+ 2,8 % entre 2006 et 2019) est en effet largement supérieure à celle du budget général dans son intégralité (+ 1,6 % entre 2006 et 2019).

En repoussant sine die son projet de réforme des retraites, le Gouvernement ne répond pas pas pourtant à cette augmentation tendancielle même si les pistes poursuivies ne répondaient en première analyse qu'imparfaitement au défi proposé. Les modalités d'un alignement sur le régime général au sein d'un système universel et la conversion des droits acquis en points s'avéraient complexes et interrogeaient sur leur coût à moyen terme. Force est de constater que l'estimation de ces dispositions n'a pas été depuis précisée, en dépit du souhait de l'exécutif de relancer son projet de réforme.

La rapporteure spéciale rappelle qu'un certain nombre de leviers ont par ailleurs été déjà utilisés, qu'il s'agisse de l'allongement de la durée de cotisation ou le report de l'âge de liquidation. L'augmentation du taux de cotisation salariale envisagée dans le projet de réforme devait par ailleurs être doublée d'un élargissement de l'assiette de cotisation aux primes et d'une réévaluation des rémunérations de certaines catégories de fonctionnaires. Toute réflexion sur la progression du taux de cotisation salariale ainsi que sur les modalités de calcul de la pension, conduit logiquement, par souci d'équité, à aborder celle des compléments de rémunération ou la revalorisation de celle-ci en début de carrière. Reste que cette ambition peut annuler tout impact vertueux d'une majoration des taux, en conduisant à un renchérissement des pensions.

C. UN EXCÉDENT HYPOTHÉTIQUE

Le besoin de financement actualisé du régime s'élevait à 88,3 milliards d'euros à l'horizon 2070. Le calcul de cet indicateur suppose que les taux de contribution employeur n'augmentent pas sur la période, ce qui peut apparaître en contradiction avec l'obligation organique d'équilibre du compte d'affectation spéciale.

Le montant du besoin de financement actualisé reste largement supérieur au solde cumulé du CAS depuis 2006. Celui-ci agrège les soldes annuels du compte. Ce solde cumulé est destiné à vérifier le respect de la contrainte organique d'équilibre. Le solde annuel du CAS « Pensions » devrait demeurer positif à la fin 2021, atteignant 600 millions d'euros. Ce solde est inférieur à celui observé fin 2020 : 1,26 milliard d'euros. Le solde cumulé du CAS depuis sa création devrait s'élever, dans ces conditions, à 9,7 milliards d'euros, soit 1,8 mois de prestations. Cet excédent ne constitue cependant pas des réserves et est reversé au budget de l'État.

Évolution du solde cumulé du CAS Pensions depuis 2006

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

L'exercice 2022 devrait coïncider avec une nouvelle réduction du solde annuel, établi de manière prévisionnelle à 261,2 millions d'euros, soit une baisse de 34 % par rapport au solde prévu pour 2021. Il convient de rappeler à ce stade que le CAS a bénéficié de majorations de recettes importantes entre 2018 et 2020, années de mise en oeuvre du rapprochement du taux de cotisation salariale avec celui du régime général.

La quasi-totalité des dépenses du CAS « Pensions » correspondent à des dépenses dites de « guichet » et ne peuvent donc être pilotées en cours d'exercice. Les recettes peuvent, quant à elles, bénéficier d'un ajustement en fin d'année du taux de contribution employeurs. Cette faculté n'a, cependant, pas été utilisée depuis décembre 2013. La direction du budget estime aujourd'hui qu'il n'est pas, pour autant, souhaitable de modifier, par à-coups, le niveau des taux de contribution au CAS Pensions et de répondre de la sorte à la dégradation du solde à venir . Dans ces conditions, les dépenses du CAS devraient excéder ses recettes à l'horizon 2023, année de fin de montée en charge des dernières réformes paramétriques.

Il convient, dans ces conditions, de s'attendre, à moyen terme, à une montée en charge des dépenses de l'État aux fins d'équilibre du compte. Le projet annuel de performances 2022 du CAS ne présente, pour autant, ni projections de solde ni prévisions de recettes pour l'avenir à moyen et long terme des régimes de retraites de la fonction publique.

Réunie le mardi 2 novembre 2021, sous la présidence de M. Dominique de Legge, vice-président, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat d'adopter sans modifications les crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et du compte d'affectation spéciale « Pensions ».

Réunie à nouveau le jeudi 18 novembre 2021, sous la présidence de M. Claude Raynal, président et après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale, la commission a confirmé sa décision de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission et du compte d'affectation spéciale. Elle a également décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 61.

L'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, la rapporteure spéciale avait reçu 95 % des réponses à son questionnaire budgétaire sur la mission « Régimes sociaux et de retraite » et 97 % des réponses à son questionnaire budgétaire relatif au compte d'affectation spéciale « Pensions ».

AVANT-PROPOS

Le compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions » et la mission « Régimes sociaux et de retraite » permettent de dresser chaque année un état des lieux d'une partie du financement public des systèmes de retraite. Ce panorama incomplet - puisqu'il n'embrasse pas la totalité des canaux de financement de l'État vers les régimes d'assurance-vieillesse - vient illustrer les différences entre les régimes visés par ces programmes budgétaires et le droit commun en matière de retraites.

Si le rapport budgétaire n'a pas à évaluer la pertinence du choix opéré à l'époque de la création de ces régimes de privilégier la garantie d'un accès bonifié à l'assurance-vieillesse au détriment d'avantages salariaux, il peut néanmoins interroger sur le périmètre du soutien de la solidarité nationale au financement de droits spécifiques. Il fera, en ce sens, oeuvre utile en vue d'étayer le souhait du législateur manifesté à plusieurs reprises ces dernières années de rapprocher les règles des régimes spéciaux et de la fonction publique de celles du régime général.

S'agissant de ce rapprochement et de la singularité des régimes spéciaux, la rapporteure spéciale rappelle qu'une rapide cartographie des 42 caisses des retraites existant en France permet de cerner cinq groupes 1 ( * ) :

- les professions libérales ;

- les indépendants et travailleurs agricoles ;

- les régimes spéciaux ;

- les fonctions publiques ;

- les salariés.

Les différents régimes tendent ainsi à refléter la spécificité des activités qu'ils représentent. Celle-ci justifie pour partie, à l'heure actuelle, le choix de certains paramètres de financement ou de modalités d'ouvertures des droits. L'alignement des régimes spéciaux financés par l'État sur le droit commun peut se justifier au nom d'une volonté de réduire la dépense publique et de réviser les droits acquis à l'aune de l'évolution des conditions de travail. Cet alignement ne suppose pas pour autant une uniformisation de tous les régimes spéciaux, dès lors que ceux-ci ne sont pas dépendants d'une subvention d'équilibre de l'État et apparaissent en mesure de faire face au défi démographique.

Les dépenses du CAS Pensions et de la mission « Régimes sociaux et de retraite » représentent 30 % des dépenses d'assurance vieillesse en France

Les seules pensions de la fonction publique d'État, visées par le CAS « Pensions » représentaient en 2020, 23 % des dépenses d'assurance-vieillesse et celles des régimes spéciaux 7 %. Les pensions servies par les régimes de retraite de base ont atteint 241,9 milliards d'euros en 2020 (+ 2,2 % par rapport à 2019) et devraient atteindre 246,1 milliards d'euros en 2021 (+ 1,7 % par rapport à 2020).

Répartition des prestations de retraites entre les différents régimes de base
en 2020

Source : commission des finances du Sénat, d'après le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale, septembre 2021

Le régime de la fonction publique d'État représentait, par ailleurs, 16,6 % des ressources du système de retraite français en 2019.

L'examen de la contribution de l'État aux régimes spéciaux et aux pensions civiles et militaires s'inscrit dans un contexte d'augmentation constante des dépenses d'assurance vieillesse, tous régimes confondus

Dans son rapport de juin 2021, le Conseil d'orientation des retraites (COR) estime ainsi que le déficit des régimes de retraites devrait représenter 0,4 % du PIB en 2021, puis 0,6 % du PIB en 2025 et 0,7 % du PIB à l'horizon 2030.

Le COR note néanmoins que la crise sanitaire n'a pas débouché sur une réelle diminution des dépenses de retraites. Il convient en outre de rappeler qu'avant même la crise, le COR tablait sur une augmentation des dépenses de retraites de 1,4 % par an jusqu'en 2025 puis de 1,6 ou 1,7 % jusqu'en 2030, en fonction du taux de croissance . Cette projection reposait, notamment, sur une indexation des pensions sur les prix et une prolongation du rythme des gains d'espérance de vie (2 ans de plus entre 2016 et 2030), alors même que la tendance semble moins marquée ces dernières années.

Cette tendance à la majoration de la part des dépenses de retraites dans le PIB n'est pas spécifique à la France. La plupart des pays occidentaux font face au même défi.

Part des dépenses de retraites dans le PIB par pays en 2002 et 2017

Source : Conseil d'orientation des retraites, 8 ème rapport annuel, juin 2021

En France comme ailleurs, la progression des dépenses est plus rapide que celle des recettes. Deux éléments conditionnent une telle hausse :

- une progression continue de l'espérance de vie : le ratio entre le nombre de personnes âgées de 20 à 59 ans et celui des personnes de 60 ans devrait ainsi passer de 1,9 en 2020 à 1,3 en 2070, le rapport entre le nombre de cotisants et le nombre de retraités, tous régimes confondus, passant de 1,7 en 2019 à 1,3 à l'horizon 2070. Ce vieillissement de la population induit une augmentation du nombre de pensionnés et un prolongement de la durée de retraite ;

- une croissance insuffisamment élevée sur le long terme pour garantir un niveau d'emploi favorable à l'équilibre du système en général. Cette question du niveau d'emploi prend d'ailleurs une acuité particulière dans le cadre de la sphère publique, au regard du souhait récurrent de limiter la dépense et donc, pour partie, le recrutement.

Durée de retraite en proportion de la durée de vie totale
(moyennes par génération)

Source : Conseil d'orientation des retraites, 8 ème rapport annuel, juin 2021

Les dépenses de retraite représentaient 14,7 % du PIB en 2020. Cette proportion est pour partie conjoncturelle, compte-tenu de l'atonie de l'activité. Elles devraient retrouver l'étiage d'avant crise au cours de l'exercice 2022, s'établissant ainsi à 13,7 % du PIB. Elles seraient ensuite comprises entre 11,3 % et 13 % au cours de la période 2030-2070, en fonction du scenario macro-économique retenu. Dans son rapport de juin 2021, le COR relève en effet que les dépenses de retraite tous régimes confondus sont à législation constante amenées à décroitre en pourcentage du PIB à partir de 2030.

Les soldes du système des retraites en 2030, 2060 et 2070 dépendent en large partie de ce scenario macro-économique et d'hypothèses potentiellement optimistes au regard de la crise imprévue que la France vient de traverser. Il convient de rappeler à ce stade que les prévisions du COR reposent sur quatre scénarios de gains de productivité du travail à long terme (scénarios 1,0 %, 1,3 %, 1,5 % et 1,8 %) associés à un taux de chômage à terme de 7 %. Ces variables n'ont été que partiellement atteintes au cours des trente dernières années.

Pour tempérer l'impact de ces variables, une des clés peut consister à modifier les paramètres d'accession à la pension. On en dénombre trois principaux : l'âge de liquidation, la durée et le niveau de cotisation et, enfin le mode de revalorisation des pensions.

Des leviers de réforme spécifiques

S'agissant des régimes visés par le compte d'affectation spéciale « Pensions » ou la mission « Régimes sociaux et de retraite », l'utilisation des données macro-économiques peut apparaître, compte tenu de la nature même des cotisants, pour partie inopportune.

Les variables d'ajustement visent plus, dans ces cas, les droits et avantages spécifiques à ces régimes de retraites, mais aussi le mode d'équilibrage retenu par l'État pour le financement de ces régimes. Trois options existent :

- la convention EEC (effort de l'État constant) où la contribution de l'État aux régimes de la fonction publique et à ceux visés par la mission « Régimes sociaux et de retraite » s'exprime en part de PIB et évolue en fonction ;

- la convention TCC (taux de cotisation constant), aux termes de laquelle le taux de contribution patronale à ces régimes est figé ;

- la convention EPR (équilibre permanent des régimes) qui prévoit un équilibre, année après année.

Le choix de cette convention est déterminant sur le solde global du système des retraites, le COR estimant que la convention EPR, soit celle retenue actuellement, contribuerait à la dégrader.

Le deuxième facteur propice à une maîtrise des dépenses de retraites tient aux trois leviers précédemment évoqués. Force est de constater que la plupart ont déjà été pour partie actionnés via les réformes adoptées en 2003 et en 2010 et permettent donc d'envisager à moyen terme un recul de la dépense publique en matière de retraites.

Reste une interrogation sur le niveau des pensions. La pension brute devrait représenter, tous régimes confondus, selon le COR, entre 31,6 % et 36,5 % du revenu brut en 2070, contre 50,1 % aujourd'hui. L'adossement très progressif des régimes spéciaux et de celui de la fonction publique au régime général mis en place ces dernières années devrait contribuer à la baisse de ce ratio. Le COR constatait, par ailleurs, en 2018 que le niveau de vie moyen des retraités était légèrement supérieur à celui de l'ensemble de la population (+ 2,9 %). Ce niveau est relativement stable depuis 1996. Il devrait cependant baisser à long terme pour atteindre une fourchette comprise entre 90 et 95 % du niveau de vie de l'ensemble de la population à l'horizon 2040 puis entre 77 et 86 % en 2070.

Niveau de vie relatif des retraités par le passé et en projection (niveau de vie moyen des retraités rapporté à celui de l'ensemble de la population)

Source : Conseil d'orientation des retraites, rapport annuel de juin 2021

Ce constat dresse une perspective où les cotisants actuels voient leur contribution augmenter en volume et en durée pour bénéficier à terme d'une pension moins élevée mais versée sur une plus longue durée, posant la question de l'équité-intergénérationnelle.

Des budgets potentiellement remis en cause par une mise en oeuvre rapide d'une partie de la réforme des retraites

Si le débat budgétaire permet d'approcher la question des paramètres des régimes des retraites et des conditions de leur équilibre, il ne constitue cependant qu'une photographie partielle à un instant T. La présentation des budgets 2022 de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et du CAS « Pensions » s'inscrit à cet égard dans un contexte particulier, celui d'une interrogation, au sein de l'exécutif, sur les suites à donner au projet de loi portant réforme des retraites adopté par l'Assemblée nationale en première lecture en février 2020 mais ajourné en raison de la crise sanitaire. L'hypothèse d'une réforme uniquement paramétrique et centrée sur la disparition des régimes spéciaux est ainsi régulièrement avancée.

De fait, le montant des engagements de l'État en matière de retraite ou celui de sa participation au financement des régimes spéciaux tels que présentés dans les documents budgétaires pourraient s'avérer caduques en cas de réforme rapide.

PREMIÈRE PARTIE
QUEL AVENIR POUR LA MISSION « RÉGIMES SOCIAUX ET DE RETRAITE » ?

La mission « Régimes sociaux de retraite » du budget général est structurée autour de trois programmes recensant les subventions versées par l'État à plusieurs régimes spéciaux.

Le programme 195 « Régimes de retraites des mines, de la SEITA et divers » regroupe les dotations attribuées :

- au fonds spécial de retraite de la caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines ;

- au régime de retraite de la SEITA ;

- à la Caisse des retraites des régimes ferroviaires d'outre-mer ;

- au régime des personnels de l'ORTF.

Le programme 197 « Régimes de retraites et de sécurité sociale des marins » est spécifiquement dédié aux métiers de cette filière. Il contribue au financement pour moitié de l'Établissement national des invalides de la marine (ENIM), établissement public administratif placé sous la tutelle des ministères chargés de la mer, du budget et de la sécurité sociale en charge de la couverture des risques maladie (89 794 affiliés en décembre 2020) et vieillesse (109 920 pensions en décembre 2020). La subvention versée au titre du programme 197 concourt au financement du risque vieillesse et des dispositifs d'action sociale en lien avec le risque vieillesse. 1 % de cette somme concourt au financement de la charge de service public de l'ENIM.

Le programme 198 « Régimes sociaux et de retraites des transports terrestres » concerne principalement les régimes de la SNCF et de la RATP. Il vise également le complément de pension des conducteurs routiers, les pensions des anciens agents des chemins de fer d'Afrique du Nord et d'outre-mer et les pensions de certains agents des chemins de fer secondaires (Caisse autonome mutuelle de retraite - CAMR). Le programme comprend en outre le financement du congé de fin d'activité des chauffeurs-routiers. Le programme 198 « Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres » concentre 69 % des crédits de la mission.

La mission ne couvre pas les régimes de la fonction publique, visés au sein du compte d'affectation spéciale « Pensions » (cf infra ).

Répartition des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite »
par programme

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

Le montant global des crédits demandés dans le cadre du présent projet de loi de finances s'élève à 6,06 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP), soit des montants en baisse de 1,55 % par rapport à la loi de finances pour 2021. Cette diminution s'inscrit dans la continuité de celle observée lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2021. Cette tendance pourrait cependant être remise en cause, à moyen terme, par la progression des dépenses de certains régimes.

Il convient de relever à ce stade que l'impact de la poursuite de la crise sanitaire en 2021 sur les régimes spéciaux visés par la mission concerne essentiellement les cotisations. S'agissant du régime de la SNCF, la régularisation des indus de cotisation du dernier trimestre 2020 ajoutée à l'exonération des cotisations au titre du dispositif d'activité partielle devrait conduire à majorer le besoin d'équilibre de la caisse de 18,8 millions d'euros. L'activité partielle conduit également à majorer le besoin d'équilibre du régime de la RATP de 3,7 millions d'euros.

Ces effets avaient déjà été relevés en exécution 2020 2 ( * ) . Les principales caisses de la mission (SNCF, RATP, ENIM, Mines) ne disposent pas cependant des données permettant d'identifier les cotisants ayant choisi de reporter leur départ en retraite en raison de la crise sanitaire en 2020 ou en 2021. Tout juste peuvent-elles documenter la progression du nombre de décès, la hausse étant cependant considérée comme légère.

Évolution des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite »
par programme

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

La baisse des crédits concerne les trois programmes et la plupart des actions contenues en leur sein. La seule exception tient à l'action 04 du programme 198 visant le régime des retraites des personnels de la RATP, l'un des deux régimes spéciaux encore ouverts visés par la mission.

Évolution des crédits de paiement de la mission « Régimes sociaux et de retraite »

(en euros)

LFI 2021

PLF 2022

Évolution

Programme 195 : Régimes de retraites des mines, de la SEITA et divers

1 148 714 460

1 078 412 475

-6,12 %

Action 01 : Versement au fonds spécial de retraite de la caisse autonome de sécurité sociale dans les mines

1 011 251 217

947 282 750

-6,33 %

Action 02 : Régime de retraite de la SEITA

136 263 707

130 110 219

-4,52 %

Action 04 : Caisse des retraites des régies ferroviaires d'outre-mer

1 099 536

929 506

-15,46 %

Action 07 : Versements liés à la liquidation de l'ORTF

100 000

90 000

-10 %

Programme 197 : Régime de retraite et de sécurité sociale des marins

809 570 163

791 309 370

-2,26 %

Action 01 : Régime de retraite et de sécurité sociale des marins

809 570 163

791 309 370

-2,26 %

Programme 198 : Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres

4 195 016 143

4 188 330 026

-0,16 %

Action 03 : Régime de retraite du personnel de la SNCF

3 290 378 055

3 273 160 169

-0,52 %

Action 04 - Régime de retraite du personnel de la RATP

737 000 000

751 300 000

+1,94 %

Acton 05 - Autres régimes

167 638 088

163 869 857

-2,25 %

Total

6 153 300 766

6 058 051 871

-1,55 %

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

La rapporteure spéciale s'interroge enfin sur le maintien d'une réserve de précaution (4 % des crédits votés). La pertinence d'une mise en réserve pour des dispositifs de « quasi-guichet », qui offrent peu de possibilité de redéploiements peut en effet se poser. Prévue par l'article 51 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances, la réserve de précaution rend indisponible, dès le début de la gestion, une fraction des crédits ouverts en lois de finances, elle constitue pour le Gouvernement une enveloppe de crédits plus facilement mobilisables pour faire face aux aléas survenant en cours de gestion. Ces évènements semblent plus circonscrits s'agissant de la mission « Régimes sociaux et de retraite ».

I. UNE MAQUETTE BUDGÉTAIRE QUI NE COUVRE PAS LA TOTALITÉ DE L'EFFORT DE L'ÉTAT EN FAVEUR DES RÉGIMES SPÉCIAUX

A. PLUSIEURS RÉGIMES SPÉCIAUX NE SONT PAS RETRACÉS DANS LA MISSION

La mission « Régimes sociaux et de retraite » ne reflète qu'imparfaitement la réalité de l'action de l'État en faveur des régimes spéciaux de retraite en France.

Elle ne vise pas ainsi tous les régimes spéciaux pour lesquels l'État verse une subvention d'équilibre, à l'image des caisses de retraites de l'Opéra de Paris ou de la Comédie française. Le financement de ces deux régimes relève du programme 131 « Création » de la mission « Culture », le régime de l'Opéra de Paris percevant par ailleurs un pourcentage des recettes de billetterie.

Le régime de retraite de la branche des industries électriques et gazières (IEG), le régime des non-salariés agricoles, le régime de retraite des avocats (CNBF) et celui des clercs et des employés de notaire sont, quant à eux, financés au moyen de taxes affectées.

Financements en direction des régimes spéciaux non visés par la mission « Régimes sociaux et de retraite » en 2020

(en millions d'euros)

Régime

Subvention d'équilibre de l'État

Taxe affectée

Régime de base des non-salariés agricoles

-

2 770

(39,9 % du droit de consommation sur les alcools, droit sur la circulation des vins, cotisation sur les alcools de plus de 18°, droit de circulation sur les bières, droit de consommation sur les produits intermédiaires)

Salariés de la branche des industries électriques et gazières (IEG)

-

1 665

(contribution tarifaire d'acheminement - CTA)

Régime des clercs et employés de notaires

-

332

(taxe sur les émoluments)

Régime complémentaire obligatoire des non-salariés agricoles

-

280

(13,81 % du droit de consommation sur les alcools)

Régime des avocats

-

4 (droits de plaidoiries)

Régime des agents de l'Opéra national de Paris

18

1

Régime des agents de la Comédie française

4

-

Total

22

5 052

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Cette absence au sein de la mission remet en cause la pertinence de la maquette budgétaire qui ne permet pas, dans ces conditions, de disposer d'une approche complète des régimes spéciaux bénéficiant de financements publics .

Le rattachement de ces régimes à cette mission apparaîtrait pourtant en cohérence avec le souhait affiché par le Gouvernement lors de la présentation du projet de loi portant réforme des retraites en 2020 de simplifier l'architecture du système des retraites en France et de clarifier son rôle dans le financement des régimes spéciaux.

B. UNE RÉPARTITION PEU LOGIQUE DES CAISSES AU SEIN DES PROGRAMMES

La répartition des caisses au sein des programmes n'est pas non plus sans poser de question.

Les programmes regroupent notamment des régimes dont le degré d'ouverture divergent. Le programme 198 intègre ainsi deux régimes spéciaux au destin inégal, celui de la RATP, régime ouvert et celui de la SNCF, fermé depuis le 1 er janvier 2020. Un regroupement des deux régimes ouverts (RATP et régime des retraites des marins) au sein d'un même programme pourrait peut-être faciliter la lisibilité de l'action de l'État à leur égard. Il participerait, là encore, de la logique de clarification qu'entendait initialement poursuivre le Gouvernement lors de la présentation de son projet de réforme des retraites.

Il convient, en outre, de relever que le programme 198 « Régimes sociaux et de retraites des transports terrestres », principalement dédié aux régimes de la SNCF et de la RATP, comprend également le financement du congé de fin d'activité des chauffeurs-routiers, retracé au sein de l'action n° 05. La logique de ce dispositif diffère pourtant de celle d'un régime spécial de retraites.

Régimes couverts par la mission - Principales caractéristiques en 2022

Caisse

Nombre de cotisants

Nombres de pensionnés

(prévisionnel)

Pensions versées

(en euros)

Subvention de l'État

(en euros)

Programme 195 - Régimes de retraite des mines de la SEITA et divers

Régime des retraites des mines

981

208 000

1 141 120 000

947 282 750

Régime des retraites de la SEITA

-

6 995
(en 2021)

139 900 000

130 110 219

Office de
radiodiffusion-télévision française (ORTF)

-

55
(en 2021)

100 000
(en 2021)

90 000

Caisse de retraites des régies ferroviaires d'outre-mer (CRRFOM)

-

55

1 026 561

929 506

Programme 197 - Régime de retraite et de sécurité sociale des marins

Régime des retraites des marins (régime ouvert)

28 503

104 759

994 347 529

791 309 370

Programme 198 - Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres

Régime des retraites de la SNCF

116 635

236 561

5 204 600 000

3 273 160 169

Régime des retraites de la RATP (régime ouvert)

42 803

52 275

1 215 200 000

751 300 000

Chemins de fer d'Afrique du Nord et du Niger -Méditerranée

-

2 889

NR

18 710 000

Transports urbains tunisiens et marocains

-

57

NR

400 857

Réseau franco-éthiopien

-

4

NR

43 000

Anciens agents des chemins de fer secondaires d'intérêt local

-

56

NR

15 000

Complément de retraite des conducteurs routiers

755

NR

1 376 000

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

C. LA QUESTION DES COÛTS DE GESTION

Les crédits versés aux fins de paiement des pensions sont à court terme difficilement modifiables. Reste la question des coûts de gestion. Les indicateurs mis en place, année après année, dans les projets annuels de performance soulignent une difficulté à les faire baisser.

Si la progression de ceux-ci peut à la rigueur s'entendre, s'agissant de petits régimes fermés ou nécessitant des reconstitutions de carrière parfois complexes, à l'image du régime des marins, elle reste difficilement intelligible s'agissant de grosses structures à l'instar des régimes des retraites de la RATP ou de la SNCF.

Le cas est particulièrement patent s'agissant du coût unitaire d'une primo-liquidation de pension de retraite. Celui-ci rapporte les frais de personnels liés au processus d'une liquidation de pension au nombre de dossier de droit direct et de droit dérivé dans l'année. La plupart des régimes s'avèrent incapables de tenir les objectifs fixés par les indicateurs contenus dans le projet annuel de performance.

Coût unitaire d'une primo liquidation de pension de retraite

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

Cette progression est également observable s'agissant des dépenses de gestion pour 100 euros de prestations servies.

Dépenses de gestion pour 100 euros de prestations versées

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

Ces indicateurs permettent une analyse plus fine que les chiffres bruts transmis par les caisses des retraites visées par la mission.

La Caisse de Retraites du Personnel (CRP) RATP, dont les coûts de gestion apparaissent comme parmi les plus faibles, affiche ainsi une diminution des frais de gestion de 6 % en 2020. Le contexte sanitaire justifie pour partie cette baisse sensible, avec une consommation moins importante des enveloppes « frais de personnel » et « investissement ». Reste à déterminer, dans un contexte de reprise, si cette tendance est durable. La Convention d'objectif et de gestion (COG) 2022-2026 insiste sur la poursuite de cette baisse. La rapporteur spéciale note que celle-ci n'anticipe pas, cependant, les conséquences d'une ouverture à la concurrence voire d'une intégration au sein d'un régime universel.

Ce document a cependant le mérite d'exister, les objectifs de la prochaine convention d'objectifs et de gestion signée entre la Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF et l'État pour la période 2022-2026 n'étaient pas encore définis fin septembre 2021. Une mission de l'inspection générale des affaires sociales devait être lancée début septembre 2021 pour évaluer la COG en vue de son renouvellement en 2022. Un rapport est ainsi attendu pour le 1 er trimestre 2022. La CRP SNCF a également enregistré une baisse globale de ses frais de gestion en 2020, pour des raisons identiques à celles observées au sein de la CRP RATP.

Les négociations de la troisième COG de l'établissement national des invalides de la marine (ENIM), en charge de la gestion du régime de retraite des marins, devraient, de leur côté, se dérouler au dernier trimestre 2021 pour une entrée en vigueur en 2022.

II. DES PERSPECTIVES INCERTAINES

A. UNE MINORATION DES CRÉDITS EN TROMPE L'OEIL

1. Déséquilibre démographique et avantages spécifiques constituent des caractéristiques communes aux régimes spéciaux...

La baisse, relative, des crédits dédiés à la mission « Régimes sociaux et de retraite » dans le présent projet de loi de finances ne saurait occulter l'important déséquilibre financier des caisses qu'elle subventionne. Cette situation délicate résulte tout à la fois d'un ratio démographique défavorable et de la permanence d'avantages spécifiques coûteux et insuffisamment financés par les cotisations. Compte-tenu de cette insuffisance, la diminution en valeur absolue du financement de l'État ne saurait présumer d'un désengagement à court-moyen terme.

Le déséquilibre démographique est, bien évidemment, accentué dans les régimes fermés qui voient leur population de cotisants décroître. Ainsi, le régime des mines présente un nombre très limité de cotisants alors que celui de la Seita ne dispose plus d'un seul cotisant. La loi du 27 juin 2018 pour un nouveau pacte ferroviaire a, de son côté, transformé le régime de retraites de la SNCF en un régime fermé, matérialisé par l'arrêt des recrutements sous statut au 1 er janvier 2020 3 ( * ) . Cette fermeture induit à terme, une attrition des volumes de cotisations et, par conséquent, une augmentation du besoin de financement du régime. Celle-ci est cependant atténuée par la mise en place, en loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 4 ( * ) , d'une compensation entre les régimes de droit commun auxquels seront désormais affiliés les nouveaux salariés recrutés par le groupe SNCF, en l'espèce la CNAV et l'Agirc-Arrco, et la CPRP SNCF 5 ( * ) .

Évolution du ratio démographique des régimes de retraite de la SNCF, de la RATP et des marins 6 ( * )

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

SNCF

0,68

0,68

0,68

0,67

0,66

0,65

0,64

0,63

0,60

RATP

0,89

0,89

0,88

0,88

0,86

0,85

0,84

0,84

0,85

Marins

0,30

0,30

0,30

0,30

0,30

0,30

0,30

0,28

0,27

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Les différents régimes spéciaux ouverts financés par la mission se caractérisent, par ailleurs, par des âges d'ouverture des droits à retraite plus précoces que 62 ans pour la grande majorité des agents affiliés. Ces âges précoces sont associés à des bonifications de durée.

En outre, les durées d'assurance de référence de ces régimes sont plus faibles que les autres régimes, même si elles convergent désormais toutes vers la durée harmonisée de 172 trimestres. Comme au sein de la fonction publique, la liquidation s'effectue, par ailleurs, sur la base de la rémunération des 6 derniers mois.

2. ... mais restent imparfaitement évaluées par le Gouvernement

Les incidences du déséquilibre démographique et des avantages spécifiques sur la situation financière des régimes spéciaux demeurent cependant insuffisamment documentées, alors qu'elles conditionnaient pourtant une partie du projet de loi portant création d'un système universel des retraites présenté par le Gouvernement avant la crise sanitaire.

La rapporteure spéciale s'étonne à cet effet que dans une réponse au questionnaire budgétaire, la direction du budget indique qu'aucune analyse des déséquilibres de chacun des régimes subventionnés n'ait été effectuée en faisant ressortir la situation démographique et les effets des avantages spécifiques. Cette étude nécessiterait, en effet, « des développements informatiques coûteux et de nombreuses hypothèses pour mesurer a posteriori, dans les pensions déjà liquidées, ce qui pourrait être désormais assimilé à un avantage spécifique au régime ». Cette absence d'évaluation fragilise la crédibilité de toute réforme desdits régimes. Elle limite également la portée de l'examen des crédits de la mission, qui ne peut donc permettre d'évaluer précisément la part des avantages spécifiques actuellement financée par le budget de l'État. La rapporteure spéciale rappelle que si la solidarité nationale doit permettre de pallier le déséquilibre démographique de ces régimes, son rôle dans le financement d'avantages dérogatoires au droit commun reste sujet à caution.

Le Gouvernement admet dans une autre réponse au questionnaire budgétaire que le coût de ces dispositifs de solidarité au sein des régimes spéciaux est relativement mal appréhendé , à l'exception des suppléments de pension (majorations de pension pour enfants par exemple). Les dispositifs sont en effet fondus dans les masses de prestations des assurés et font rarement l'objet d'un suivi spécifique par les régimes.

Seule une estimation des dispositifs explicites a été réalisée, en 2016, par la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques du ministère des solidarités et de la santé 7 ( * ) . Cette estimation exclut l'effet de bonification de durée d'assurance ou la prise en compte des six derniers mois de salaire comme base de calcul de la pension. Cette évaluation, aboutit à un coût prévisionnel de 3,76 milliards d'euros en 2020 pour quatre régimes - SNCF, Mines, RATP, Marins - visés par la mission « Régimes sociaux et de retraite ». Le coût des dispositifs explicites serait relativement stable en 2025 pour atteindre 3,73 milliards d'euros.

Estimation du coût des dispositifs « explicites » de solidarité au sein des régimes des retraites de la SNCF, de la RATP, des mines et des marins
en 2016, en 2020 et en 2025

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Pour mémoire, la subvention d'équilibre versée par l'État à ces quatre caisses dans le présent projet de loi de finances a atteint 5,93 milliards d'euros en 2020. Le montant des cotisations perçues par la SNCF, l'ENIM ou le régime des mines est ainsi inférieur à celui des dispositifs explicites servis par ces caisses. Il est à peine supérieur s'agissant de la RATP.

Cotisations perçues et coûts de dispositifs explicites en 2020 au sein des régimes des retraites de la SNCF, de la RATP, des mines et des marins

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

B. UNE DÉPENDANCE AU FINANCEMENT PUBLIC ET AUX COMPENSATIONS DÉMOGRAPHIQUES

1. Un besoin de financement établi à plus de 523 milliards d'euros à l'horizon 2120

Pour les cinq plus gros régimes spéciaux subventionnés (SNCF, RATP, CANSSM, ENIM et SEITA) par la mission « Régimes sociaux et de retraite », le besoin de financement actualisé à horizon 2120 s'élève à 523,7 milliards d'euros avec une hypothèse de taux d'actualisation net d'inflation de - 1,23 %.

Cet indicateur permet de mesurer le montant des crédits qu'il faudrait placer aujourd'hui pour couvrir les besoins de financement futurs. Il correspond donc aux réserves nécessaires pour compenser les déficits futurs du système. La valeur du besoin de financement reste tributaire du taux d'actualisation retenu, en l'espèce celui du rendement au 31 décembre 2020 de l'obligation assimilée du trésor indexée sur l'inflation européenne (OAT€) de maturité 2036.

S'agissant des régimes spéciaux visés par la mission, 48 % de ce besoin de financement actualisé relève du régime des retraites de la SNCF. L'horizon 2120 correspond d'ailleurs à son année d'extinction probable.

Évolution du besoin de financement des principaux régimes spéciaux à l'horizon 2120 en fonction du taux d'actualisation

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Le besoin de financement annuel du régime des mines sera réduit d'environ 90 % à compter de 2050, soit cinquante ans avant son extinction définitive. Le besoin de financement de la SEITA est le plus modeste, atteignant 2,2 milliards d'euros, le régime étant appelé à disparaître en 2080.

2. Le financement public constitue la principale ressource des régimes spéciaux couverts par la mission, qu'ils soient ouverts ou fermés

Le financement public représente entre 60 % (Caisse de la RATP) et 82 % (Caisse des mines) des ressources des principaux régimes des retraites visés par la mission.

Recettes des principaux régimes de retraites visés par la mission en 2022

(en millions d'euros)

CPRP SNCF

CRP RATP

ENIM

Mines

Subvention d'équilibre

3 273

751

791

947

Cotisations

1 862

503

141

6

Compensation démographique

56

-36

76

199

Autres recettes

2

1

8

1

Total recettes

5 193

1 255

1 016

1 153

Part de la subvention dans les ressources de la Caisse

63 %

60 %

78 %

82 %

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire

3. La solidarité nationale s'exprime également par les compensations démographiques versées par les autres régimes obligatoires d'assurance vieillesse

Prévue aux articles L. 134-1 et L. 134-2 du code de la Sécurité Sociale, la compensation généralisée ou démographique consiste en un mécanisme de rééquilibrage financier entre les régimes obligatoires d'assurance vieillesse. Elle vise à pallier les inégalités provenant des déséquilibres démographiques et des disparités de capacités contributives entre les différents régimes d'assurance vieillesse. Elle se traduit par des transferts de solidarité entre régimes, en faveur de ceux disposant des ratios démographiques les plus déséquilibrés.

Les régimes des mines, des marins, de la SNCF et de la RATP sont concernés par les transferts prévus entre les 12 régimes de salariés 8 ( * ) et les 4 régimes de non-salariés 9 ( * ) . Le montant de ces transferts est calculé en prenant pour hypothèse la constitution d'un régime unique fictif versant à chaque retraité de droit direct âgé de 65 ans ou plus, une prestation commune, unique, égale à la pension moyenne la plus basse des régimes de salariés.

La caisse autonome nationale de la Sécurité sociale dans les mines (CANSSM) est aujourd'hui le principal bénéficiaire de ce mécanisme et devrait ainsi bénéficier de 199 millions d'euros en 2022, même si une décrue est observable depuis 2017 (-17,4 %). On observe par ailleurs une montée en charge de la compensation versée au régime de la SNCF, multipliée par 13 depuis 2017.

Compensations démographiques versées aux quatre principaux régimes
de la mission « Régimes sociaux et de retraite » entre 2017 et 2022

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

La CANSSM reste, avec le régime des exploitants agricoles (2,58 milliards d'euros prévus en 2022) et celui des salariés agricoles (2,49 milliards d'euros), le principal bénéficiaire de ce dispositif, même si les montants perçus sont nettement inférieurs.

Le régime de la RATP devrait, quant à lui, faire partie des 6 régimes contributeurs, à hauteur de 36 millions d'euros en 2022. Cette somme reste inférieure aux transferts estimés pour la Caisse nationale d'assurance-vieillesse - CNAV (3,96 milliards d'euros) ou pour la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales - CNRACL (1,02 milliard d'euros).

Régimes contributeurs au mécanisme de compensation démographique en 2022

(en millions d'euros)

Régime

Montant

CNAV

3 960

CNRACL

1 020

Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales

450

Caisse nationale des Barreaux de France

110

Caisse nationale des industries électriques et gazières

40

RATP

36

Total

5 616

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

C. LES ÉCUEILS D'UNE RÉFORME DES RÉGIMES SPÉCIAUX

1. Des outils partiellement utilisés

Les leviers disponibles pour tempérer le recours à la solidarité nationale en vue de financer les régimes spéciaux sont connus. L'alignement sur le droit commun constitue bien évidemment le principal biais.

Un rapprochement est déjà en oeuvre, il reste néanmoins plus lent ou moins ambitieux que celui mis en place entre le régime de retraite de la fonction publique et le régime général. Ainsi, s'agissant de la réforme de 2008 portant sur la durée d'assurance, la Cour des comptes relève que l'ensemble des réformes est entré en vigueur avec un décalage significatif de 4,5 ans par rapport au régime de la fonction publique et 14,5 ans par rapport au régime général 10 ( * ) .

a) L'âge de liquidation des retraites

La réforme des retraites de 2010 qui a procédé au relèvement des bornes d'âge de deux ans dans la fonction publique dans les mêmes conditions qu'au régime général a, comme la précédente, été étendue aux régimes spéciaux par une série de décrets adoptés en 2011 avec un calendrier de mise en oeuvre différée. La montée en charge du relèvement des bornes d'âge n'a débuté qu'à compter du 1 er janvier 2017, à raison de quatre mois par génération, à partir de la génération 1967. Le relèvement de deux ans ne sera de fait effectif qu'en 2024.

Ainsi, au sein des régimes spéciaux, les pensions peuvent être liquidées à compter de l'âge légal de droit commun (60 ans relevé progressivement à 62 ans) ou à des âges anticipés (entre 52 ans et 57 ans en fonction de la spécificité des métiers). Aucune condition d'âge n'est requise pour certaines situations et pour certaines catégories d'assurés (pour les parents de trois enfants à titre dérogatoire jusqu'en 2017, mais aussi en tant que parent d'un enfant handicapé ou conjoint atteint d'une infirmité ou d'une maladie incurable).

La Cour des comptes rappelait en juillet 2019 que les écarts entre les âges de liquidation constatés au sein des régimes spéciaux et ceux relevés au sein du régime général ou au sein de celui de la fonction publique ne reflétaient pas des différences manifestes d'espérance de vie à 60 ans 11 ( * ) . Celle des hommes était estimée en 2010 à 22,1 ans à la SNCF, à 22,0 ans à la RATP et à 22,4 ans au sein de la population française.

Âge de liquidation et régimes spéciaux

Plusieurs catégories d'assurés bénéficient d'un âge d'ouverture avancé :

- les assurés relevant des catégories actives (55/57 ans) ou insalubres (50/52 ans en fonction de l'entrée dans les cadres) au sein des régimes de la fonction publique, des industries électriques et gazières et de la RATP ;

- les affiliés au régime de la SNCF ont vu l'âge de liquidation porté de 55 à 57 ans, les agents de conduite bénéficiant d'un âge de départ anticipé porté progressivement de 50 à 52 ans ;

- les agents de la Banque de France peuvent bénéficier d'un départ anticipé à 55 / 57 ans ;

- les machinistes, électriciens, régisseurs et pompiers civils ainsi que les emplois comportant des fatigues exceptionnelles reconnus par décret affiliés au régime de la Comédie-Française bénéficient d'un âge d'ouverture des droits à 57 ans ;

- les assurés du Port autonome de Strasbourg bénéficient d'une l'ouverture des droits à 60 ans, cet âge étant ramené à 58 ans réduit pour les ouvriers disposant de 35 ans de services effectifs ;

- les affiliés du régime de retraite de l'Opéra national de Paris bénéficient d'âge variant en fonction de la profession : l'âge d'ouverture des droits pour les danseurs est de 40 ans (limite d'âge 42 ans), pour les artistes des choeurs de 50 ans porté progressivement à 57 ans en 2029 (limite d'âge 60 ans). Pour les personnels techniques, l'âge sera porté de 55 ans à 57 ans en 2024 (si fatigues exceptionnelles) ou à 62 ans en 2029 (limite d'âge : 67 ans). Les artistes de l'orchestre, chefs de chant et pianistes accompagnateurs bénéficient d'un âge de liquidation fixé à 60 ans (avec une limite d'âge 62 ans), l'âge de liquidation des autres personnels étant porté de 60 à 62 ans en 2024 (limite d'âge portée à 67 ans).

Les pensions servies par l'ENIM sont de plusieurs types : pension d'ancienneté, proportionnelle, spéciale, ou anticipée, dont les conditions d'attribution varient.

Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire budgétaire

La rapporteure spéciale a demandé au Gouvernement une estimation du nombre de pensionnés des régimes visés par le programme 198 dans les années à venir compte-tenu d'un âge de liquidation porté à 62 ou 64 ans. Il lui a été répondu que cette évaluation, qui nécessiterait une étude approfondie avec les caisses de retraite concernées et en lien avec les services de la direction de la sécurité sociale et de la direction du budget, n'a pas encore été réalisée. Une telle réponse peut interroger dans la mesure où la disparition des régimes spéciaux, leur alignement sur le droit commun, le relèvement de l'âge de liquidation constituaient l'un des principaux enjeux du projet de loi portant réforme des retraites.

Âge moyen de départ en retraite en 2020 pour les pensionnés directs

Caisse

Âge moyen

Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF

58 ans et 6 mois

Conducteurs

54 ans et 1 mois

Autres agents

59 ans

Caisse de retraite du personnel de la RATP

56,46 ans

Caisse des retraites des marins

60,2 ans 12 ( * )

Régime des retraites des mines (chiffre 2015)

58,8 ans

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

b) L'alignement des règles de liquidation

Un autre instrument de réduction du coût des régimes spéciaux consiste en une mise en adéquation complète des règles de liquidation avec celles observées au sein du régime général. Là encore, aucune étude n'est à la disposition du Gouvernement pour évaluer un tel impact. Si la formule de calcul de la pension est identique à celle de la fonction publique, le salaire de référence intègre certaines primes, ce qui n'est pas le cas au sein de la fonction publique.

Cet élargissement de l'assiette de liquidation n'est qu'imparfaitement compensé par le prélèvement de cotisations afférentes. Le taux constaté pour les affiliés au régime de la SNCF est ainsi plus faible (9,06 %) que celui des fonctionnaires (11,1 %) ou des salariés du régime général (11,31 %).

Le mode de liquidation contribue donc à alourdir la charge des principales caisses couvertes par la mission et majorer le recours à une subvention d'équilibre. La valeur moyenne des pensions directes nouvellement liquidées versées par la CPRP SNCF a ainsi progressé de 14,5 % en 10 ans. Il convient de noter à ce titre que, s'agissant de cette caisse, la majoration des pensions nouvellement liquidées tempère la baisse régulière du nombre de pensionnés.

Valeur moyenne des pensions annuelles nouvellement liquidées
versées par la CRPR SNCF

(en euros)

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022
(p)

Pension directe

26 104

26 359

26 709

26 740

27 139

27 921

27 825

28 168

29 241

29 548

29 890

Réversion

10 490

10 723

10 871

10 934

10 942

11 015

11 019

11 271

11 569

11 674

11 791

Source : commission des finances du sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Bien que moins nette, une évolution similaire est observée au sein du régime de la RATP. La progression de la valeur moyenne mensuelle des pensions directes nouvellement liquidées servies par le régime entre 2012 et 2022 devrait atteindre 7,1 %.

Valeur moyenne des pensions mensuelles nouvellement liquidées
versées par la CRP RATP

(en euros)

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Pension directe

2 509

2 344

2 461

2 617

2 653

2 720

2 514

2 550

2 468

2 468

2 689

Pension de droit dérivé

816

796

861

872

905

924

934

929

944

1 058

1 071

Source : commission des finances du sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Pour mémoire, la pension moyenne brute de droit s'élevait à 1 503 euros pour les personnes retraitées résidant en France en 2019. Elle atteignait 1103 euros pour les affiliés aux régimes de la CNAV et de l'AGIRC-ARCCO 13 ( * ) .

2. Un alignement incomplet et coûteux : le cas de la caisse de retraite du personnel de la RATP
a) L'absence de T2

Le régime spécial des personnels de la Régie autonome des transports parisiens (RATP), établissement public industriel et commercial, était géré jusqu'au 1 er janvier 2006 par un service dédié au sein dudit établissement. Il bénéficiait d'un triple financement :

- les cotisations salariales ;

- les cotisations patronales ;

- une dotation du syndicat des transports d'Île-de-France (STIF), remboursée par l'État.

Deux éléments ont conduit à la création d'une caisse autonome dédiée à la gestion des retraites du personnel de la RATP :

- la transformation du STIF en établissement public régional aux termes de la loi du 13 août 2004 a conduit au transfert du financement des retraites directement à l'État ;

- la nécessité de provisionner au bilan de l'EPIC les engagements de retraites, solution comptablement impossible au regard du niveau de fonds propres de la RATP.

Parallèlement à la création de la CRP RATP, le régime devait en principe être adossé au régime général, à l'instar de la solution retenue pour les retraites des industries électriques et gazières . L'impossibilité de trouver un accord avec la Caisse nationale d'assurance-vieillesse sur les modalités financières de cet adossement ont conduit à ajourner celui-ci.

Cet alignement n'aurait été cependant qu'artificiel. Le régime de la RATP se caractérise en effet par l'absence de définition d'un taux de cotisation destiné à financer les droits spécifiques au régime (T2). Le taux de cotisation patronale aux régimes spéciaux est en effet en principe composé :

- d'une première partie (T1), qui équivaut aux cotisations qui devraient être versées si les salariés relevaient des dispositions de droit commun ;

- d'une seconde partie (T2), destinée à financer les droits spécifiques aux régimes spéciaux (départ anticipé, bonification, majoration de pension au moment de la liquidation).

Cette solution retenue logiquement pour le régime de retraite des personnels de la SNCF n'a pas été mise en oeuvre pour la caisse de retraite du personnel de la RATP. En résulte un taux unique de cotisations patronales, établi à 18,84 % en 2020, qui ne représente de fait que le taux qui devrait être retenu si les salariés de la RATP relevaient du droit commun.

Cette position serait justifiée par le fait que les droits spécifiques du régime des retraites de la RATP seraient moins importants que ceux mis en place au sein du régime spécial des salariés de la SNCF. Par ailleurs, le décret du 26 décembre 2005 14 ( * ) relatif aux conventions financières entre l'État et la RATP prévoit que jusqu'à 45 000 emplois sous statut, les droits sont couverts par l'État, à charge pour l'entreprise de contribuer au-delà de ce seuil, qui n'a jamais été atteint.

Évolution des taux de cotisation auprès des régimes de la SNCF
et de la RATP

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

CPRP SNCF

Taux salarial

7,85 %

7,85 %

7,85 %

7,85 %

8,05 %

8,15 %

8,2 %

8,52 %

8,79 %

9,06 %

9,60%

T1

22,44 %

22,46 %

22,91 %

22,49 %

22,89 %

23,42 %

23,73 %

23,52 %

23,25 %

23,90%

23,63 %,

T2

12,73 %

11,26 %

11,26 %

11,35 %

11,58 %

11,72 %

11,81 %

13,23 %

13,85 %

13,99 %

13,99 %

CRP RATP

Taux salarial

12,00 %

12,00 %

12,00 %

12,00 %

12,20 %

12,30 %

12.35%

12.50%

12.55%

12.95%

12.95 %

Taux patronal

17,95 %

18,03 %

18,01 %

18,06 %

18,39 %

18,56 %

19%

19.06%

19.29%

19.18%

18.84%

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Il en résulte cependant que le coût des avantages spécifiques est directement financé par la solidarité nationale, via la subvention d'équilibre versée par l'État.

b) Le mirage de l'ouverture à la concurrence

L'évolution de la situation financière du régime de la RATP dépend aujourd'hui en large partie des choix que devra effectuer la société face à l'ouverture progressive de ses activités à la concurrence d'ici à 2039 15 ( * ) . 18 000 salariés sont ainsi actuellement affectés au département « Bus » appelé à être ouvert à la concurrence en 2024. La RATP a développé un plan de transformation « Défis 2025 ». Celui-ci prévoit la mise en place, en lieu et place d'une entreprise unique, d'un groupe intégré qui devrait permettre un transfert d'activité vers des filiales de droit privé.

Dans ces conditions, il est possible de s'interroger sur le fait que les salariés ainsi transférés continuent à cotiser auprès du régime spécial ou sur le fait de les reverser vers le régime général.

Si elle devrait mécaniquement conduire à une attrition du nombre de cotisants au régime spécial, l'ouverture à la concurrence de la RATP pourrait cependant ne pas être aussi vertueuse qu'attendu pour les comptes du régime et pour le budget de l'État à moyen terme. La reprise des lignes de bus par des concurrents devrait ainsi donner lieu au transfert de personnels RATP au sein des entreprises concessionnaires. Ces personnels continueront cependant de bénéficier du statut RATP s'agissant de l'assurance vieillesse, sans pour autant que leur nouvelle entreprise ne majore sa participation, via la mise en place effective d'un T2, au financement du régime. Dans ces conditions, l'État devrait poursuivre son subventionnement, même si les personnels concernés n'appartiennent plus effectivement à la RATP.

c) Le coût de l'alignement

L'ouverture à la concurrence représente une opportunité en vue de simplifier le statut des personnels de la RATP et leur accès aux avantages spécifiques du régime spécial. Celui-ci peut en effet varier au cours d'une même journée de travail, complexifiant au maximum le calcul des droits. L'ouverture à la concurrence constitue donc à moyen terme un levier en vue d'une réforme du régime spécial et de son adossement effectif au régime général.

Un alignement est déjà en cours comme en témoigne la majoration du nombre de trimestres (164 depuis 2019 contre 150 en 2008), l'instauration depuis 2009, d'un mécanisme de décote et de surcote ou l'indexation des pensions sur l'inflation et non plus sur les rémunérations d'activité. La majoration des cotisations salariales est quant à elle effective depuis 2014 et les nouveaux salariés ne bénéficient plus des bonifications propres aux personnels roulants et de maintenance.

Reste que ces mesures d'alignement ont donné lieu, au cours des négociations, à la création d'échelons de rémunération supplémentaires et à l'attribution d'une prime de compensation. Ces bonifications ont eu mécaniquement des incidences sur le calcul des pensions. In fine , la réforme s'est avérée, d'après la Cour des comptes 16 ( * ) , coûteuse à court-moyen terme, alors qu'elle devait contribuer à rectifier la trajectoire déficitaire du régime. Il conviendra donc d'être extrêmement vigilant sur les conséquences d'un approfondissement éventuel de la réforme.

La rapporteure spéciale relève qu'un surcoût du même ordre avait été observé au sein du régime de la SNCF. La Cour des comptes estimait ainsi que, pour la période 2011-2020, les gains cumulés pour le régime, soit environ 4,1 milliards d'euros, étaient inférieurs aux coûts cumulés pour l'entreprise estimés à 4,7 milliards d'euros. Elle envisageait néanmoins un gain net de l'ordre de 1,2 milliard d'euros à l'horizon 2035.

3. La question des réserves et des actifs immobiliers

La rapporteure spéciale relève que les actifs immobiliers de certaines caisses pourraient également entrer en ligne de compte au moment de la réévaluation inévitable de la subvention de l'État. Ceux détenus par la CPRP SNCF étaient ainsi évalués à 45,5 millions d'euros fin 2020. Il convient de rappeler à ce stade que le processus de vente du parc immobilier du régime minier a débuté, de son côté, en 2005. La convention d'objectifs et de gestion pour la période 2018-2021 prévoyait ainsi une cession de 4 500 m² en 2018, 4 000 m² en 2019 et en 2020 et enfin 3 500 m² pour 2021.

La CPRP SNCF dispose, en outre, de réserves estimées à 17,7 millions d'euros fin 2020. Elles résultent du transfert des caisses de retraite des anciens réseaux de chemins de fer à la SNCF, lors de la création de celle-ci en 1938. Face aux difficultés de la Caisse à obtenir des avances de trésorerie auprès des institutions financières, ces réserves sont venues abonder le fonds de roulement en 2011. Reste que depuis avril 2019, les besoins de trésorerie du régime sont couverts par l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, la CPRP SNCF n'ayant donc plus besoin de se refinancer auprès des banques. Dans ces conditions, la question du maintien des réserves peut être posée, avec d'autant plus de pertinence que le régime est nécessairement équilibré par l'État 17 ( * ) .

DEUXIÈME PARTIE
LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « PENSIONS » :
LE MIRAGE DE L'EXCÉDENT

Le compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions » a été créé en 2006 afin de retracer les opérations relatives aux pensions et avantages accessoires gérés par l'État. Il est composé de trois programmes :

- le programme 741 « Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d'invalidité » , qui regroupe l'essentiel des crédits du CAS. Le programme couvre, en effet, l'ensemble des opérations relatives au régime de retraite et d'invalidité des fonctionnaires de l'État fonctionnaires civils, magistrats et militaires ainsi que leurs conjoints et orphelins ;

- le programme 742 « Ouvriers des établissements industriels de l'État » qui finance les dépenses du Fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels d'État (FSPOEIE), créé en 1928 et géré par la Caisse des dépôts et consignations, et du Fonds rente accident du travail des ouvriers civils des établissements militaires (RATOCEM) ;

- le programme 743 « Pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et autres pensions » .

Répartition des crédits du CAS Pensions par programme

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

Les autres agents employés par l'État ne sont pas affiliés aux régimes de pension retracés dans le CAS Pensions. Pour l'essentiel contractuels, ils sont affiliés à la Caisse nationale d'assurance-vieillesse (CNAV) pour le régime de retraite de base et, s'agissant du régime complémentaire :

- à l'Ircantec, pour les agents contractuels de droit public ;

- à l'Agirc-Arrco, pour les agents contractuels de droit privé.

Il convient de rappeler à ce stade que les effectifs contractuels ont augmenté de 2,5 % par an en moyenne dans la fonction publique d'État (y compris établissements publics administratifs) sur la période 2009-2019. Ils représentent désormais 18,8 % de l'ensemble des effectifs.

Le CAS Pensions ne couvre pas, non plus, les retraites servies aux agents de la fonction publique hospitalière et de la fonction publique territoriale, affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL).

Les régimes de retraites des agents publics au 31 décembre 2020

Régime

Nombre de cotisants

(en millions)

Nombre de retraités

(en millions)

Pensions versées

(en milliards d'euros)

Régime des fonctionnaires civils et des militaires de l'État

2

2,5

55,2

CNRACL

2,2

1,4

22,2

IRCANTEC

1,1

2,2

3,2

FSPOEIE

0,02

0,1

1,9

Source : commission des finances du Sénat, rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique, annexée au projet de loi de finances pour 2022

Les régimes de la fonction publique d'État, de la CNRACL et le FSPOEIE représentent 32,3 % des dépenses de retraites de l'ensemble des régimes de base. Ils regroupent 15,1 % des pensions servies et réunissent 14,9 % des cotisants.

I. UNE NOUVELLE AUGMENTATION DES DÉPENSES ATTENDUE EN 2022

A. UNE PROGRESSION DES DÉPENSES DE 1,25 %

Le montant global des crédits demandés dans le cadre du présent projet de loi de finances s'élève à 60,98 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP), soit une progression de 1,25 % par rapport aux montants ouverts en loi de finances pour 2021. Cette majoration s'inscrit dans la continuité de celle observée en loi de finances pour 2021.

Évolution des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite »
par programme depuis 2019

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

La majoration des crédits en 2022 est inégalement répartie puisque seul le programme 741 « Pensions civiles et militaires de retrait et allocations temporaire d'invalidité » enregistre une progression .

Répartition des crédits de paiement par programmes et par action
en 2021 et en 2022

(en euros)

LFI 2021

PLF 2022

Évolution

Programme 741 : Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d'invalidité

56 743 576 489

57 584 626 487

+1,48 %

Action 01 : Fonctionnaires civils relevant du code des pensions civiles et militaires de retraites

46 445 597 839

47 340 094 383

+1,93 %

Action 02 : Militaires relevant du code des pensions civiles et militaires des retraites

10 165 711 087

10 109 413 465

-0,55 %

Action 03 : Allocations temporaires d'activité

132 277 5563

135 118 639

+2,15 %

Programme 742 : Ouvriers des établissements industriels de l'État

1 937 512 232

1 930 789 335

-0,35 %

Action 01 : Prestations vieillesse et invalidité

1 872 999 809

1 869 491 483

-0,19 %

Action 03 : Autres dépenses spécifiques

1 779 576

1 541 590

-13,37 %

Action 04 : Gestion du régime

6 131 000

6 108 323

-0,37 %

Actions 05 : Rentes accidents du travail des ouvriers civils des établissements militaires

56 601 847

53 647 939

-5,22 %

Programme 743 : Pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et autres pensions

1 543 513 468

1 460 576 618

-5,37 %

Action 01 : Reconnaissance de la Nation

645 573 500

604 858 370

-5,37 %

Action 02 : Réparation

850 860 000

808 549 719

-4,97 %

Action 03 : Pensions d'Alsace-Moselle

16 000 000

16 000 000

0 %

Action 04 : Allocations de reconnaissance des anciens supplétifs

18 880 968

19 135 829

+1,35 %

Action 05 : Pensions des anciens agents de chemin de fer franco-éthiopien

45 000

43 000

-4,44 %

Action 06 : Pensions des sapeurs-pompiers et anciens agents de la défense passive victimes d'accidents

12 054 000

11 900 000

-1,28 %

Acton 07 - Pensions de l'ORTF

100 000

90 000

-10 %

Total

60 224 602 189

60 975 992 740

+1,25 %

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

L'augmentation limitée, dans le présent projet de loi de finances, des crédits affectés au CAS est, cependant, à replacer dans le cadre d'une progression de plus de 31 % des dépenses du CAS Pensions depuis 2007.

Montant des dépenses du CAS Pensions depuis 2007

( en millions d'euros )

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

B. UN COMPTE NÉCESSAIREMENT ÉQUILIBRÉ

Aux termes de l'article 21-II de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances, un compte d'affectation spéciale (CAS) doit être équilibré à tout instant afin qu'en cours d'année , le total des dépenses engagées ou ordonnancées au titre d'un compte d'affectation spéciale ne puisse excéder le total des recettes constatées. Aux dépenses du CAS répondent donc des recettes, constituées pour l'essentiel des cotisations salariales (programmes 741 et 742) et des contributions de l'État (cotisations patronales pour les programmes 741 et 742 et subventions d'équilibre s'agissant des régimes visés par les programme 742 et 743) destinées à garantir l'équilibre du compte.

Le montant prévisionnel des recettes est établi à 61,2 milliards d'euros en 2022, ce qui dénote une certaine stabilité des ressources par rapport à l'exercice précédent (+ 0,4 %).

Évolution des recettes du CAS Pensions entre 2021 et 2022

(en euros)

LFI 2021

PLF 2022

Évolution

Pensions civiles et militaires de retraites et allocations temporaires d'invalidité

57 504 544 087

57 856 184 037

+0,6 %

Ouvriers des établissements industriels de l'État

1 935 578 185

1 920 441 993

-0,8 %

Pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et autres pensions

1 543 513 468

1 460 576 918

-5,4 %

Total

60 983 365 740

61 237 202 498

+0,4 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

S'agissant du programme 741 qui concentre l'essentiel des recettes, les cotisations salariales devraient enregistrer, en 2022, une baisse de 83 millions d'euros, par rapport à la prévision retenue en loi de finances pour 2021, passant de 5,977 milliards d'euros à 5,894 milliards d'euros (- 1,4 %). La modération des rémunérations salariales, la stabilité des emplois et la fin des effets de la convergence du taux sur celui du secteur privé expliquent pour partie ce ralentissement. Le taux de cotisation salariale avait atteint 11,10 % en 2020 contre 10,29 % en 2017, via des augmentations successives de 0,27 point ces trois dernières années. Les différentes hausses de taux de cotisation avaient ainsi augmenté les recettes du CAS Pension respectivement de 165,7 millions d'euros, 168,5 millions d'euros et 171,1 millions d'euros entre 2018 et 2020.

Une convergence progressive des taux de cotisations salariales
avec ceux retenus par le régime général

(en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Cette atonie des cotisations salariales sera pour partie compensée par la progression des contributions employeurs versées au titre du programme 741. Il convient de rappeler qu'afin de faire face à la progression des dépenses et de répondre à l'obligation organique d'équilibrer le compte, les taux de contribution ont nettement progressé depuis 2006. Les taux civils ont progressé de 3,05 points de pourcentage par an entre 2006 et 2014 et les taux militaires de 3,26 points. Ils n'ont plus évolué depuis 2014. En 2021, le taux moyen de contribution employeur au CAS Pensions s'établit à 86,7 %.

Évolution du taux de cotisation employeur de l'État depuis 2006

Année

Taux de cotisation employeur de l'État

Pension de retraite - civils

Pensions militaires

Allocation temporaire d'invalidité - civils

2006

49,90%

100,00%

0,30 %

2007

50,74%

101,05%

0,31 %

2008

55,71%

103,50%

0,31 %

2009

58,47%

108,39%

0,32 %

2010

62,14%

108,63%

0,33 %

2011

65,39%

114,14%

0,33%

2012

68,59%

121,55%

0,33%

2013

71,78%

126,07%

0,32%

Depuis 2014

74,28%

126,07%

0,32%

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

La contribution de l'État est directement versée par les ministères employeurs.

Contributions employeurs par ministère en 2017-2020 et prévues pour 2021 et 2022

(en millions d'euros)

Source : direction du budget

II. UNE PROGRESSION MODÉRÉE DES DÉPENSES DE PENSIONS DES FONCTIONNAIRES CIVILS ET MILITAIRES DE L'ÉTAT ATTENDUE EN 2022 QUI NE REFLÈTE QUE PARTIELLEMENT LE DÉFI DÉMOGRAPHIQUE AUQUEL VA ÊTRE CONFRONTÉ CE RÉGIME

A. UNE PROGRESSION DES DÉPENSES DU CAS « PENSIONS » IMPUTABLE AU PROGRAMME 741 « PENSIONS CIVILES ET MILITAIRES DE RETRAITE »

1. Les hypothèses retenues

Le programme 741 « Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d'invalidité » devrait enregistrer une majoration de ses crédits de 1,48 % en 2022.

Cette augmentation dépasse la moyenne observée depuis 2011, les dépenses progressant depuis cette date de 0,9 % par an. Cette progression repose sur plusieurs hypothèses :

- une revalorisation des pensions de base de 1,1 % au 1 er janvier 2022 (0,4 % en 2021) et de 1,6 % pour les pensions d'invalidité au 1 er avril 2022 (0,1 % en 2021) ce qui devrait conduire à majorer les pensions de 493 millions d'euros, contre 172 millions d'euros en 2021. Le ralentissement de l'inflation, sur laquelle les pensions sont indexées, en raison de la crise sanitaire expliquait en 2021 leur faible revalorisation ;

- la liquidation de nouvelles pensions en 2022 à hauteur de 869 millions d'euros, dont 718 millions d'euros au titre des pensions directes, contre 865 millions d'euros en 2021 ;

- l'extension en année pleine des dépenses de pensions entrée en paiement en cours d'année 2021 et dont l'effet budgétaire est estimé à 840 millions d'euros (contre 801 millions d'euros en 2021 pour les pensions liquidées en 2020) ;

- un retour du niveau de sortie des pensions, s'agissant des anciens fonctionnaires civils, comparable à celui d'avant crise (60 900 décès estimés).

En ce qui concerne le programme 742 « Ouvriers des établissements industriels de l'État », la baisse du nombre total de pensionnés - 94 185 attendus au 31 décembre 2022 contre 95 370 au 31 décembre 2021 - conduit à contrebalancer les effets de la revalorisation des pensions.

S'agissant du programme 743 « Pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et autres pensions », la diminution des crédits dédiés s'inscrit dans la continuité de celle observée lors des exercices précédents. Il convient de rappeler à ce stade que les dépenses prévues par ce programme ne procèdent pas d'une logique contributive et qu'il est financé par les versements provenant de programmes supports du budget général. La tendance baissière des deux actions les plus importantes du programme (01 « Reconnaissance de la Nation » et 02 « Réparations », soit 96,8 % des crédits du programme) résulte d'une diminution régulière des populations concernées par le versement de ces rentes.

2. L'impact de la crise sanitaire est limité aux exercices 2020 et 2021

L'impact de la crise sanitaire s'agissant de la mortalité s'est concentré sur l'année 2020. Le nombre de sorties des pensions civiles était déjà orienté à la hausse ces dernières années, compte-tenu du vieillissement de la population de retraités du régime : + 1,9 % en moyenne annuelle entre 2016 et 2019, soit un rythme supérieur à l'évolution du nombre de retraités, + 1,2 % en moyenne sur la même période. 2020 constitue une réelle rupture, avec une progression des décès de 10,2 % entre 2019 et 2020. Les sorties de pension de militaires enregistrent également une hausse significative en 2020, mais de manière moins marquée (+ 5,8 %).

En tenant compte de l'accroissement tendanciel des décès, la surmortalité imputable à la crise sanitaire en 2020 est estimée à 8,1 %, pour les anciens fonctionnaires civils, soit 4 200 décès supplémentaires, s'agissant des seules pensions directes . En tenant compte des pensions de réversion perçues par les conjoints des affiliés décédés, la surmortalité concerne 5 500 personnes (+ 7,5 %). Ce surcroît de mortalité conduit à une baisse des dépenses de pension estimée à 36 millions d'euros en 2020.

33 800 décès ont été constatés entre janvier et mai 2021, soit 800 de plus qu'attendus. Au total sur 2021, en supposant une mortalité habituelle sur le reste de l'année, l'impact de la crise sanitaire sur les dépenses de pension pourrait consister en une baisse de 151 millions d'euros des dépenses liées aux pensions civiles. Cette diminution intègre l'impact du surplus de décès attendu en 2021 et l'effet en année pleine de la surmortalité constatée en 2020.

L'impact de la crise ne se limite pas aux seuls décès. Le service des retraites de l'État a ainsi constaté une baisse marquée des demandes de départ aux mois de mars, avril et mai 2020, évaluée respectivement à - 30 %, - 31 % et - 19 %. Le report des départs à la retraite aurait concerné 2 600 personnes en 2020, soit 4 % des départs totaux, et 1 200 en 2021. L'économie budgétaire ainsi générée est estimée à 19 millions d'euros pour 2020 et 87 millions d'euros pour 2021. Cette situation est cependant transitoire, les demandes de départs civils et militaires ayant retrouvé leur niveau d'avant crise.

Plus largement, la crise sanitaire ne semble pas avoir eu d'impact sur le ratio démographique corrigé 18 ( * ) du régime des fonctionnaires , l'exercice 2020 marquant une nouvelle dégradation de celui-ci.

Ratio démographique corrigé du régime des retraites de la fonction publique d'État entre 2015 et 2020

2015

2016

2017

2018

2019

2020

1,05

1,02

1,00

0,97

0,98

0,95

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

3. L'augmentation des dépenses liées aux pensions civiles illustre la dégradation du ratio démographique du régime

La majoration annoncée des dépenses du programme 741 en 2022, même modeste, illustre la dégradation à court terme du rapport démographique du régime, corroborant les projections du COR établies en juin 2017.

Évolution du rapport démographique corrigé du régime de retraite
de la fonction publique d'État

2020

2030

2040

2050

2060

2070

0,9

0,8

0,8

0,9

0,9

0,9

Source : Conseil d'orientation des retraites, juin 2017

Le COR estime que le nombre de retraités de droit direct devrait augmenter jusqu'en 2035 environ en raison du départ à la retraite des générations nombreuses du baby-boom. S'agissant des fonctionnaires civils, il passerait ainsi de 2 à 2,2 millions, avant de redescendre en dessous du seuil de 2 millions à horizon 2055. Il convient de rappeler à ce stade que les effectifs des retraités de la fonction publique d'État progressent de manière continue depuis 1990, au rythme moyen de 2,4 % par an.

Évolution du nombre de retraités de la fonction publique d'État depuis 1990

Source : commission des finances du Sénat d'après le rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique annexé au projet de loi de finances pour 2022

Le vieillissement des effectifs constitue par ailleurs une réalité. Fin 2019, plus d'un fonctionnaire civil sur trois était âgé de 50 ans ou plus, illustrant ainsi les recrutements massifs opérés dans les années soixante-dix, qui ont profité aux générations dites du baby-boom (générations 1947-1950).

Le COR relève, dans le même temps, que les effectifs de cotisants du régime devraient connaitre une baisse jusqu'en 2035 avant de se stabiliser autour de 1,9 million de personnes . Il en résulterait un solde technique négatif jusqu'à l'horizon 2040. Le solde technique résulte de la différence entre les cotisations encaissées et les prestations versées. Il n'inclue pas les compensations inter régîmes et les dépenses de gestion.

Évolution du solde technique du régime de retraite de la fonction publique

(en milliards d'euros)

2030

2040

2050

2060

2070

-10,6

-5,3

4,6

12,4

15,9

Source : Conseil d'orientation des retraites, juin 2017

Il convient de rappeler à ce stade qu'une réduction pérenne du nombre de fonctionnaires a logiquement pour conséquence de diminuer les cotisations salariales et patronales versées au CAS « Pensions ». L'impact précis d'une baisse des effectifs sur les recettes est cependant difficilement quantifiable car il dépend largement des modalités de sa mise en oeuvre, en particulier de la catégorie d'emploi visée. Néanmoins, en se fondant sur la moyenne de cotisations et contributions versées pour un fonctionnaire civil en 2020 - 26 037 euros par agent - , la direction du budget estime qu'une suppression de 20 000 postes par an sur une période de cinq ans conduirait, toutes choses égales par ailleurs, à une diminution des ressources du CAS Pensions de 0,5 milliard d'euros la première année, et de 2,6 milliards d'euros à l'issue de la cinquième année.

À l'inverse, en maintenant le nombre des effectifs cotisants au régime de la fonction publique d'État au niveau atteint en 2017 - soit 2,04 millions d'agents - les cotisations et contributions perçues augmenteraient de 2,5 milliards d'euros en 2030 et de 5,1 milliards d'euros en 2070.

4. Une nouvelle progression qui souligne la part croissante des pensions civiles et militaires de retraites dans le budget de l'État

La progression des crédits dédiés aux pensions civiles et militaires de retraite en 2022 devrait une nouvelle fois conduire à renforcer le poids de ces dépenses au sein du budget de l'État .

Depuis la création du CAS en 2006, la croissance moyenne des dépenses de pensions (+ 2,8 % entre 2006 et 2019) est en effet largement supérieure à celle du budget général dans son intégralité (+ 1,6 % entre 2006 et 2019) 19 ( * ) . La part du budget de l'État consacrée à la charge des pensions civiles et militaires de retraite atteignait ainsi 12,8 % en 2019 contre 8,4 % en 1990.

Part du budget de l'État consacrée aux pensions civiles et militaires de retraites

(en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat d'après les données de la direction du budget

B. QUELS INSTRUMENTS POURRAIENT ÊTRE MIS EN OEUVRE EN VUE DE TEMPÉRER UNE PROGRESSION INÉVITABLE DES DÉPENSES ?

La dotation prévue pour le CAS « Pensions » dans le présent projet de loi de finances confirme l'augmentation tendancielle des dépenses de retraites, à laquelle le Gouvernement, en repoussant sine die son projet de réforme des retraites, ne répond pas par ailleurs.

Les pistes poursuivies dans son projet de réforme initial ne répondaient en première analyse qu'imparfaitement au défi proposé. Les modalités d'un alignement sur le régime général au sein d'un système universel et la conversion des droits acquis en points s'avéraient complexes et interrogeaient sur leur coût à moyen terme. L'absence d'évaluation du coût du dispositif lors de la présentation du texte avait d'ailleurs suscité les réserves du Conseil d'État, qui avait jugé lacunaire l'étude d'impact.

Force est de constater que l'estimation de ces dispositions n'a pas été depuis précisée, en dépit du souhait de l'exécutif de relancer son projet de réforme. La direction du budget a ainsi indiqué dans de nombreuses réponses au questionnaire budgétaire de la rapporteure spéciale que dans l'attente d'une reprise effective du processus de réforme, aucune information nouvelle n'était disponible au-delà des éléments liés à la réforme initialement envisagée, en particulier l'étude d'impact associée au projet de loi instituant un système universel de retraite.

1. Des leviers limités pour agir sur les droits : l'impact des réformes de 2003, 2010 et 2014

Une partie des leviers destinés à réduire ou étaler la dépense ont d'ores et déjà été utilisés, via les réformes des retraites de 2003, 2010 et 2014.

Principales conséquences pour le régime de la fonction publique d'État
des réformes des retraites mises en oeuvre depuis 2003

La loi du 21 août 2003 20 ( * ) prévoit :

- un alignement de la durée de cotisation des fonctionnaires sur celles du salariés du privé : 40 annuités en 2008 puis 41,25 ans en 2014 ;

- l'instauration d'un système de décote (qui existait déjà pour les salariés du privé) et de surcote en fonction de l'âge de départ en retraite ;

- la mise en place d'un mécanisme de départ anticipé pour les carrières longues (assurés ayant commencé à travailler entre 14 et 16 ans) ;

- la création d'un régime additionnel de retraite pour les agents titulaires (RAFP) permettant de cotiser sur les primes ;

- la revalorisation des pensions en fonction de l'inflation et non plus de la valeur du point d'indice de la fonction publique.

La loi du 9 novembre 2010 21 ( * ) prévoit :

- le relèvement de l'âge de départ en retraite à 62 ans en 2018 ;

- le recul de l'âge de la suppression de la décote à 65 ans,

- la poursuite de l'allongement de la durée de cotisation, portée à 41,5 annuités ;

- l'alignement progressif du taux de cotisation vieillesse des fonctionnaires sur celui des salariés du privé ;

- le recul progressif de l'âge de départ en retraite pour « carrière longue », jusqu'alors fixé avant 60 ans et l'extension de ce dispositif aux salariés ayant travaillé avant 18 ans ;

- la mise en place d'un dispositif de départ anticipé pour pénibilité ;

- l'amélioration de la prise en compte du congé de maternité et des périodes de chômage non indemnisé en début de carrière.

La loi du 20 janvier 2014 22 ( * ) prévoit notamment :

- un allongement de la durée de cotisation à 43 annuités (172 trimestres) pour la génération 1973 et les suivantes ;

- le décalage de 6 mois de la date de revalorisation ;

- une réforme du cumul emploi-retraite, rendant plus contraignantes les conditions d'accès à ce dispositif.

Source : commission des finances du Sénat

L'âge conjoncturel de départ à la retraite des fonctionnaires civils progresse ainsi tendanciellement pour s'élever en 2020 à 63 ans et 3 mois pour les sédentaires et 60 ans et 4 mois pour les actifs. L'âge conjoncturel progresse également en 2020 pour les militaires pour atteindre 49 ans et 1 mois.

Âge conjoncturel au départ, pour les civils (actif / sédentaire) et les militaires,
exprimé en années

2016

2017

2018

2019

2020

Civil

Femme

62,25

62,03

62,18

62,35

62,55

Homme

61,92

61,86

62,22

62,32

62,69

Ensemble

62,11

62,00

62,24

62,33

62,59

Civil actif

Femme

59,93

59,78

60,21

60,62

60,61

Homme

59,31

59,19

59,73

59,93

60,09

Ensemble

59,61

59,50

59,98

60,28

60,36

Civil sédentaire

Femme

62,81

62,64

62,67

62,79

63,03

Homme

63,12

63,10

63,27

63,26

63,62

Ensemble

62,96

62,88

62,96

62,98

63,26

Militaire

Femme

49,95

49,59

49,54

48,73

49,41

Homme

49,26

49,07

48,82

48,30

48,98

Ensemble

49,40

49,19

49,02

48,44

49,09

Militaire Armée

Femme

Effectif insuffisant

Effectif insuffisant

Effectif insuffisant

Effectif insuffisant

Effectif insuffisant

Homme

47,65

47,56

47,21

46,55

47,46

Ensemble

47,82

47,68

47,41

46,70

47,59

Militaire Gendarme

Femme

Effectif insuffisant

Effectif insuffisant

Effectif insuffisant

Effectif insuffisant

Effectif insuffisant

Homme

53,69

53,41

53,50

53,48

53,41

Ensemble

53,66

53,41

53,50

53,42

53,29

Source : DGFiP, Service des retraites de l'État, bases des affiliés

L'âge moyen de départ par génération progresse également pour les fonctionnaires civils , en particulier pour les sédentaires du fait de la hausse de l'âge légal d'ouverture des droits. L'âge légal passe de 60 ans pour les générations nées avant juillet 1951 à 61 ans et 2 mois pour la génération 1953.

L'augmentation de la durée d'assurance et la mise en place de la décote et de la surcote, incitent, en outre, de plus en plus au maintien en activité. Ainsi, 94 % des départs pour ancienneté avaient en 2020 une durée de référence égale ou supérieure à 165 trimestres. Ce taux s'établissait à 65 % en 2016.

Les effets de la réforme des retraites de 2003 sur les départs des militaires sont également visibles. Près de 90 % des militaires retraités disposaient d'une durée de référence de 150 trimestres et moins, ce taux est passé à 73 % pour les départs de 2006 et à 30 % en 2020. Il convient de rappeler que, s'agissant de militaires, c'est l'année à laquelle est atteinte la condition de durée qui détermine le nombre de trimestres de référence.

La réforme de 2010 a, de son côté, induit des conditions plus restrictives dans l'attribution du minimum garanti en termes d'âge ou de durée de services. La proportion de bénéficiaires du minimum garanti au sein des fonctionnaires civils liquidant une pension, qui était de l'ordre de 8 à 9 % au cours des années 2006 à 2010, s'établit en 2020 à un peu plus de 4 %. Cette proportion reste fortement liée au motif de départ en retraite. Elle atteint un peu moins de 18 % pour les départs pour invalidité, contre un peu plus de 3 % pour les départs de type vieillesse en 2020. La part des pensions pour vieillesse portées au minimum garanti des sous-officiers des armées demeure faible et se stabilise autour de 4 %.

Le décret n° 2012-847 du 2 juillet 2012 relatif à l'âge d'ouverture du droit à pension de vieillesse a prévu l'extension du dispositif de retraite anticipée pour carrière longue et a eu, dans un premier temps, pour conséquence une forte augmentation du nombre de départs anticipés pour carrière longue, avec une augmentation de plus de 50 % sur quatre ans et un pic à 9 622 départs en 2017. La tendance s'est depuis inversée : on dénombrait ainsi 6 813 départs en 2020. L'augmentation de l'âge de début de carrière constatée ces dernières années devrait contribuer à accélérer cette décrue.

La réforme de 2010 a enfin prévu l'extinction du dispositif permettant aux parents de trois enfants ayant effectué quinze ans de services de partir à la retraite sans condition d'âge. L'accès à ce dispositif a été fermé pour les parents qui ne réunissaient pas les conditions au 1 er janvier 2012. Il demeure accessible aux autres, avec un calcul moins favorable. Un dispositif transitoire garantissant le maintien des règles antérieures pour les fonctionnaires qui étaient à moins de cinq ans de leur âge normal d'ouverture des droits au 1 er janvier 2011 a cependant été mis en place, conduisant à un supplément important de départs de parents de trois enfants en 2011 : 18 010 départs ont été dénombrés sur ce motif pour les civils alors que le niveau moyen était inférieur à 7 000 auparavant. Dès 2012, les départs au titre de la législation des parents de trois enfants étaient inférieurs à 4 000. La baisse des départs se poursuit en 2020 avec 2 515 départs contre 2 628 en 2019. La quasi-intégralité des bénéficiaires sont des femmes.

2. Les limites d'un changement de base de calcul

Le projet de loi portant réforme des retraites prévoyait une révision du mode de calcul des pensions, au travers d'une conversion des droits acquis en points, plus facilement pilotables. Il s'avère que cette option est délicate à mettre en oeuvre s'agissant de la fonction publique d'État.

En effet, interrogé dans le cadre du présent projet de loi de finances, le service des retraites de l'État (SRE) reconnaît que la reconstitution de carrière pourrait s'avérer plus que complexe. Si le SRE tient, en effet, les comptes individuels retraites (CIR) des agents de l'État et des militaires qui sont alimentés par une déclaration annuelle spécifique des ministères et des grands établissements publics pour l'ensemble de leurs agents, ces transferts de données personnelles sont limités au seul besoin d'en connaître, conformément aux recommandations de la CNIL. Les comptes contiennent donc les informations utiles à l'information retraite et à la liquidation des pensions comme l'état-civil, la situation familiale ou la carrière administrative. Ils intègrent également des informations concernant les dispositifs qui ouvrent actuellement des droits lors de la liquidation comme, par exemple, l'indemnité de sujétion spéciale de la Police, l'indemnité mensuelle de technicité Finances, la prime de sujétions spéciales de l'administration pénitentiaire, indemnité de risque pour les fonctionnaires des douanes. En l'état actuel, ces informations ne permettent pas, en tout cas, la reconstitution d'un historique du salaire complet, en incluant la totalité des primes, ni de définir précisément les cotisations versées.

3. La révision de l'assiette de cotisation

L'une des solutions en vue de répondre à la dégradation du solde technique du régime de la fonction publique pourrait constituer en une progression du taux de cotisation salariale. Le projet de loi portant réforme des retraites retenait ainsi une telle option. Il prévoyait en effet un alignement du taux de cotisation salariale de la fonction publique, actuellement établi à 11,10 % sur celui retenu pour le secteur privé dans le cadre de la réforme : 11,25 %.

Cette majoration devait cependant aller de pair avec un élargissement de l'assiette de cotisation, afin de prendre en compte les primes. Il convient de rappeler à ce stade que la masse salariale des fonctionnaires civils de la fonction publique d'État employés par l'État s'est élevée en 2020 à 52,9 milliards d'euros. Les traitements indiciaires, qui donnent lieu à cotisation retraite, représentent 80 % de cette somme. Les 20 % restants sont constitués de primes et d'indemnités, qui ne donnent pas lieu à cotisation. La masse salariale indemnitaire représente environ 10,3 milliards d'euros. Le régime additionnel de la fonction publique (RAFP) permet, quant à lui de cotiser sur une partie de ces primes, dans la limite de 20 % du traitement indiciaire brut perçu. Certaines primes ne sont, par ailleurs, pas intégrées dans le calcul, à l'image de l'indemnité sujétion spéciale police (ISSP) ou de l'indemnité mensuelle de technicité (IMT). Dans ces conditions, seule 63 % de la masse salariale indemnitaire entre dans l'assiette de cotisation du RAFP, soit 6,5 milliards d'euros. 646 millions d'euros ont ainsi été prélevés en 2020.

Modifié par le Gouvernement avant l'adoption du texte par l'Assemblée nationale, l'article 18 du projet de loi ordinaire prévoyait ainsi la mise en place d'une période de transition de 20 ans, afin d'assurer en 2043 la convergence des cotisations salariales et la prise en compte intégrale des primes. En 2025, les primes devaient être retenues dans la limite d'un plafond égal à 40 % du traitement indiciaire brut perçu, ce taux étant porté à 70 % en 2026. La cotisation sur les primes serait par ailleurs augmentée d'au moins 0,25 point par an pour atteindre 11,25 % par an en 2043. Par ailleurs, les employeurs publics devaient être amenés entre 2025 et 2043 à prendre en charge une partie de la majoration prévue et déroger ainsi au ratio 40 % cotisations salariales / 60 % part patronale retenu par le projet de loi pour définir le taux de cotisation au système universel. Une fois cette période de transition achevée, le nouveau taux devait engendrer, chaque année, 1,8 milliard d'euros de cotisations salariales supplémentaires au titre de la fonction publique d'État.

Cette option allait évidemment dans le sens d'une meilleure équité. Elle posait cependant un certain nombre d'interrogations à court et moyen terme sur le montant du soutien financier de l'État durant la période de transition et, par la suite, sur l'effet en matière de montant de pension. Aucun élément sur le coût final d'un tel élargissement de l'assiette de cotisation n'était en effet détaillé dans l'étude d'impact.

Le débat sur la réforme des retraites a également conduit le Gouvernement à réévaluer les rémunérations de certains emplois, à l'image des enseignants. 400 millions d'euros en 2021 puis 500 millions d'euros en année pleine sont ainsi dégagés afin de renforcer l'attractivité du métier et valoriser, notamment, le début de carrière. Là encore, aucun impact sur les retraites n'a été mis en avant.

Ce dispositif vient compléter le protocole « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » (protocole PPCR), mis en place en loi de finances pour 2016, afin d'améliorer la situation des agents et de moderniser la fonction publique de carrière. Le protocole prévoit notamment la rénovation des carrières et la revalorisation des grilles de rémunérations des agents de toutes les catégories, dans les trois versants de la fonction publique. Sont ainsi mis en place :

- un rééquilibrage de la rémunération des fonctionnaires en faveur du traitement indiciaire, par la mise en oeuvre d'un dispositif de transformation d'une partie du régime indemnitaire en points d'indices ;

- la mise en place d'un cadencement unique d'avancement d'échelon à compter de la date de publication des décrets de revalorisation indiciaire.

Ces mesures de revalorisation indiciaire, couplées aux revalorisations du point d'indice de + 0,6 % en 2016 et 2017, ont un double effet sur la trajectoire financière des régimes de retraite de la fonction publique :

- elles induisent une augmentation rapide des recettes perçues , due à l'accroissement des assiettes de rémunération soumises à cotisation (employeur et salarié) ;

- elles ont un impact immédiat sur le niveau des pensions entrées en paiement à partir de 2016-2017 compte tenu de l'évolution des indices moyens à la liquidation, soutenant progressivement et durablement la croissance de la pension moyenne servie par les régimes de retraite. Le coût budgétaire de la réforme sur les dépenses de pensions des régimes publics s'élèverait ainsi à 216 millions d'euros en 2020.

Il apparaît de fait que toute réflexion sur la progression du taux de cotisation salariale ainsi que sur les modalités de calcul de la pension, conduit, par souci d'équité, à aborder celle des compléments de rémunération ou la revalorisation de celle-ci en début de carrière. Reste que cette ambition peut annuler tout impact vertueux d'une majoration des taux, en conduisant à un renchérissement des pensions .

III. UN EXCÉDENT HYPOTHÉTIQUE

A. DES ENGAGEMENTS DE RETRAITES ESTIMÉS À 130 % DU PIB FIN 2020

Le CAS Pensions ne donne qu'une photographie à l'instant t des besoins de financement annuel du régime des retraites de la fonction publique.

La hausse des dépenses constatée dans le projet de budget ne saurait ainsi occulter une majoration plus problématique, celle des engagements de retraite de l'État . Leur évaluation permet de déterminer l'effort financier que devra consentir l'État pour honorer les droits à retraite déjà constitués. Le montant est publié chaque année au sein du compte général de l'État. Il intègre la valeur actualisée des pensions versées aux retraités et aux cotisants actuels, au prorata pour ces derniers, des années de service effectuées. L'estimation intègre, en outre, un taux d'actualisation qui fait référence au taux des emprunts d'État à long terme, en l'espèce l'OAT 2036.

Ainsi calculés, les engagements de retraite de l'État constatés à la fin de l'exercice 2020 s'élevaient, en retenant le taux d'actualisation utilisé pour le compte général de l'État - soit -1,23 % net d'inflation -, à 2 769 milliards d'euros, soit une progression de 354 milliards d'euros sur un an (+ 15,7 %). Reste que le taux d'actualisation retenu en 2019 s'établissait à - 0,72 %. Le montant des engagements de retraites de l'État représente en tout état de cause 130 % du PIB. 47 % des engagements concernent des agents de la fonction publique déjà retraités à fin décembre 2020.

Ce montant peut apparaître artificiel. Il évolue, en effet, d'année en année en fonction du taux d'actualisation. Une hausse d'un point du taux d'actualisation a pour effet de réduire de presque 400 milliards d'euros les engagements de l'État au titre des retraites de ses agents. En appliquant le même taux que celui retenu en 2019, le montant des engagements aurait atteint 2 430 milliards d'euros, soit 25 milliards d'euros de moins que le montant constaté en 2019. Il apparaît par ailleurs nécessairement incomplet compte tenu des incertitudes entourant les droits des agents actuellement en activité.

Le besoin de financement actualisé du régime ou dette implicite ex ante permet de compléter utilement cet indicateur. La dette implicite ex ante mesure, en effet, la masse d'argent qu'il faudrait placer aujourd'hui pour couvrir les besoins de financement futurs. Elle correspond donc aux réserves nécessaires pour compenser les déficits futurs du système. Calculé avec un taux d'actualisation de - 1,23 %, il s'élevait à 88,3 milliards d'euros à l'horizon 2070. Ce montant reste largement supérieur à l'excédent cumulé du CAS, qui devrait s'établir fin 2022 à 9,95 milliards d'euros, et qui ne constitue pas, par ailleurs, de réelles réserves (cf s upra ).

Le calcul du besoin de financement actualisé du régime suppose que les taux de contribution employeur n'augmentent pas sur la période, ce qui peut apparaître en contradiction avec l'obligation organique d'équilibre du compte d'affectation spéciale.

Évolution des engagements de retraites de l'État et du besoin de financement
en fonction du taux d'actualisation à fin 2020

(en milliards d'euros)

Taux d'actualisation

-1,23 %

0 %

1 %

1,5 %

Montant des engagements

2 789

2 052

1 662

1 510

Retraités

1 310

1 085

946

887

Actifs

1 458

967

717

623

Besoin de financement

88,319

90,330

86,348

83,414

Source : commission des finances du Sénat, d'après le compte général de l'État 2020

B. L'ABSENCE DE RÉSERVES

Pour vérifier le respect de la contrainte organique d'équilibre du CAS, un indicateur comptable a été créé, dénommé « solde cumulé », qui doit être positif à tout instant. Ce solde cumulé agrège les soldes annuels du compte depuis sa création.

Le solde annuel du CAS « Pensions » devrait demeurer positif à la fin 2021, atteignant 600 millions d'euros. Ce solde est inférieur à celui observé fin 2020 : 1,26 milliard d'euros.

Le solde cumulé du CAS depuis sa création devrait s'élever, dans ces conditions, à 9,7 milliards d'euros, soit 1,8 mois de prestations. Cet excédent technique ne constitue cependant pas des réserves et est reversé au budget de l'État.

Évolution du solde cumulé du CAS Pensions depuis 2006

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

L'exercice 2022 devrait coïncider avec une nouvelle réduction du solde annuel, établi de manière prévisionnelle à 261,2 millions d'euros, soit une baisse de 34 % par rapport au solde prévu pour 2021.

La progression des cotisations attendue en 2022 - 61,24 milliards d'euros contre 60,98 lors de l'exercice précédent - ne compense que faiblement la majoration des dépenses et affecte directement la capacité du CAS à dégager un excédent plus important.

La dégradation du solde est principalement liée à l'action 01 « Fonctionnaires civils relevant du code des pensions civiles et militaires de retraites » du programme 741. Ainsi, en 2021, si le solde d'exercice du programme devrait être à nouveau excédentaire, à hauteur de 567 millions d'euros, la seule action 01 devrait enregistrer un solde négatif de 373 millions d'euros. La baisse tendancielle du solde d'exercice du programme 741 s'explique d'ailleurs depuis 2018 par la diminution du solde de cette action, appelée à se poursuivre au cours des prochains exercices.

Solde cumulé du CAS Pensions en fin d'exercice depuis 2017

(en milliards d'euros)

2017

2018

2019

2020

2021 (p)

2022 (p)

CAS Pensions

5,10

6,45

7,86

9,12

9,69

9,95

Programme 741

5,04

6,44

7,78

9,04

9,61

9,88

Programme 742

0,03

0,08

0,07

0,07

0,07

0,06

Programme 743

0,03

0,03

0,01

0,01

0,01

0,01

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Il convient de rappeler à ce stade que le CAS a bénéficié de majorations de recettes importantes entre 2018 et 2020, années de mise en oeuvre du rapprochement du taux de cotisation salariale avec celui du régime général. La conjonction de la revalorisation du point fonction publique en 2016 et 2017 et de la mise en place du protocole d'accord « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR) entre 2016 et 2021 a permis également de majorer les recettes du CAS, leur impact sur les dépenses de pension étant différé.

Le CAS avait, par ailleurs, bénéficié, s'agissant des dépenses, d'une faible inflation sur la période 2013-2018 qui a limité les revalorisations des pensions puis une revalorisation maîtrisée des pensions en 2019, une revalorisation différenciée (selon le niveau de pension) en 2020 et une faible inflation en 2021 qui limite le niveau des revalorisations.

L'affichage d'un solde cumulé positif de près 10 milliards d'euros en 2022 ne doit pas, cependant, masquer la réelle utilisation de ces excédents, qui ne constituent en rien une « cagnotte ». Le montant correspondant au niveau du solde cumulé ne se traduit pas, en effet, par une immobilisation de trésorerie sur un compte de l'État. En outre, ce solde n'ouvre pas droit à la consommation de crédits budgétaires supplémentaires par rapport aux crédits ouverts en loi de finances initiale. Il n'existe pas, dans ces conditions, de réserves destinées à faire face à la progression attendue des dépenses.

La quasi-totalité des dépenses du CAS « Pensions » correspondent à des dépenses dites de « guichet » et ne peuvent donc être pilotées en cours d'exercice. Les recettes peuvent, quant à elles, bénéficier d'un ajustement en fin d'année du taux de contribution employeurs. Cette faculté n'a, cependant, pas été utilisée depuis décembre 2013. De fait, si les taux de contribution demeurent inchangés, les dépenses du CAS devraient excéder ses recettes à l'horizon 2023, année de fin de montée en charge des dernières réformes paramétriques. Une diminution du solde cumulé du CAS Pensions est donc inévitable.

La direction du budget estime aujourd'hui qu'il n'est pas, pour autant, souhaitable de modifier, par à-coups, le niveau des taux de contribution au CAS Pensions et de répondre de la sorte à la dégradation du solde à venir . Il s'agit, selon elle, de ne pas perturber les signaux donnés aux employeurs quant aux conséquences financières de long terme des recrutements d'agents titulaires. Elle envisage même de normaliser ces taux, via la mise en place d'une subvention d'équilibre du budget général au CAS Pensions, afin d'une part de simplifier la budgétisation et le suivi de l'exécution de la masse salariale, et d'autre part de limiter les biais de comparaison entre le recrutement de fonctionnaires et de contractuels.

En tout état de cause, il convient de s'attendre, à moyen terme, à une montée en charge des dépenses de l'État aux fins d'équilibre du compte. Le projet annuel de performances 2022 du CAS ne présente, pour autant, ni projections ni prévisions pour l'avenir à moyen et long terme des régimes de retraites de la fonction publique. La réforme reportée des retraites et l'instauration d'un système universel à partir de 2025 auraient pu répondre à cette absence de prospective. Reste que l'étude d'impact du projet de loi présentée en février 2020 se bornait à indiquer que la contribution de l'État au système de retraite serait intégralement maintenue en 2025, avant d'évoluer « selon la nature et la dynamique des dépenses qu'elle vise à couvrir » et d'intégrer les conséquences financières de la suppression des régimes spéciaux et de certaines catégories actives. Les cotisations d'équilibre devraient de fait être « remplacées par des transferts » Ce nouveau dispositif n'était cependant, pas détaillé plus avant.

Le texte n'apportait de fait de réponses que sur les cotisations salariales. Il prévoyait en effet que le taux global de cotisation retraite atteigne 28,12 %, avec une part employeur fixée à 60 % et une part salariale à 40 %. Le taux de cotisation salariale aurait ainsi été fixé à 11,25 % et le taux de cotisation employeur à 16,67 %. La rapporteure spéciale rappelle qu'en moyenne, sur la période récente, une hausse de 0,1 point du taux de cotisation salariale équivaut à des recettes supplémentaires à hauteur de 60 millions d'euros.

LES MODIFICATIONS APPORTÉES
PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté, en première délibération, les crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » avec modifications.

À l'initiative du Gouvernement, elle a adopté un amendement revalorisant les crédits de la mission à hauteur de 44,3 millions d'euros (AE = CP) afin d'intégrer le versement d'une indemnité inflation aux personnes disposant d'un revenu inférieur à 2 000 euros bruts mensuels. Cette somme est répartie de la sorte :

- 17,4 millions au programme 195 « Régimes de retraite des mines, de la SEITA et divers » ;

- 10,7 millions d'euros au programme 197 « Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins » ;

- 16,2 millions d'euros au programme 198 « Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres ».

L'Assemblée nationale a également adopté, en première délibération, les crédits du compte d'affectation spéciale « Pensions » avec modifications.

Elle a, en effet, adopté, à l'initiative du Gouvernement, un premier amendement rehaussant les crédits du compte de 107,8 millions d'euros (AE = CP) afin, là aussi, de tenir compte du versement de l'indemnité inflation aux personnes disposant d'un revenu inférieur à 2 000 euros bruts mensuels.

Ces crédits sont ventilés de la façon suivante :

- 102,8 millions d'euros versés au programme 741 « Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d'invalidité ;

- 5 millions d'euros affectés au programme 742 « Ouvriers des établissements industriels de l'État ».

L'Assemblée nationale a, en outre, adopté, à l'initiative du Gouvernement, un second amendement majorant les crédits du CAS à hauteur de 2,17 millions d'euros (AE = CP). Cette somme, affectée au programme 743 « Pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et autres pensions », vise à revaloriser les allocations de reconnaissance et viagères des anciens membres des formations supplétives en Algérie.

EXAMEN DE L'ARTICLE RATTACHÉ

ARTICLE 61 (nouveau)

Révision des conditions de prise en compte des disponibilités prises pour éducation d'un enfant dans la constitution du droit à pension

Le présent article prévoit de relever, dans l'optique de la constitution du droit à pension, l'âge maximal de l'enfant, dont l'éducation constitue le but d'une disponibilité ou d'un congé pour convenances personnelles pris par un fonctionnaire, de 8 à 12 ans. Cette modification est destinée à mettre en cohérence le droit à pension avec celui du droit au congé parental. Elle n'a pas donné lieu, de la part du Gouvernement, à une évaluation financière précise. Par ailleurs, si le principe d'une prise en compte du congé parental dans la constitution du droit à pension ne constitue pas un avantage propre au régime de la fonction publique, les conditions d'accès au congé parental divergent entre fonctionnaires et salariés affiliés au régime général, ce qui fragilise l'objectif affiché par ailleurs d'une harmonisation à terme.

Nonobstant ces réserves, la commission propose d'adopter cet article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : LA PRISE EN COMPTE DES DISPONIBILITÉS POUR ÉLEVER UN ENFANT DANS LA CONSTITUTION DES DROITS À PENSION DES FONCTIONNAIRES D'ÉTAT

Le d du 1° de l'article L9 du code des pensions civiles et militaires de retraites prévoit que la mise en disponibilité pour élever un enfant de moins de huit ans ou la prise d'un congé pour convenances personnelles dans le même but entre en compte dans la constitution du droit à pension .

La durée du temps passé dans cette position retenue est plafonnée, pour la constitution du droit à pension, à trois ans par enfant né ou adopté à partir du 1 er janvier 2014.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ À L'ASSEMBLÉE NATIONALE : UN RELÈVEMENT DE 8 À 12 ANS DE L'ÂGE MAXIMAL DE L'ENFANT POUR L'ÉDUCATION DUQUEL UNE MISE EN DISPONIBILITÉ PEUT ÊTRE PRISE EN COMPTE DANS LE DROIT À PENSION DES FONCTIONNAIRES D'ÉTAT

À l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté un article additionnel modifiant l'article L9 du code des pensions civiles et militaires de retraite relevant, dans l'optique de la constitution du droit à pension, l'âge maximal de l'enfant, dont l'éducation constitue le but d'un congé parental ou d'une disponibilité pris par un fonctionnaire, de huit à douze ans .

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UNE MODIFICATION NON CHIFFRÉE QUI NE PERMET PAS UNE HARMONISATION ENTRE LES RÉGIMES DE RETRAITE

Codifiant un des axes de l'accord relatif à l'égalité entre les femmes et les hommes dans la fonction publique du 30 novembre, l'article 4 du décret n° 2020-529 du 5 mai 2020 modifiant les dispositions relatives au congé parental des fonctionnaires et à la disponibilité pour élever un enfant a relevé de huit à douze ans l'âge maximal de l'enfant au titre duquel une disponibilité pour éducation peut être accordée de droit à un fonctionnaire.

Le présent article additionnel prend acte de ce relèvement et propose de mettre en cohérence le code des pensions civiles et militaires.

La prise en compte de cette période dans la constitution du droit à pension ne constitue pas un avantage propre au régime de la fonction publique. Aux termes de l'article L351-5 du code de la sécurité sociale, le congé parental d'éducation donne également droit, s'agissant des assurés du régime général, à une majoration de la durée d'assurance égale à la durée de la période d'interruption de l'activité, plafonnée à douze trimestres. Le congé parental d'éducation prend cependant fin au plus tard au troisième anniversaire de l'enfant (article L1225-48 du code du travail).

Si elle conçoit la nécessité de mettre en cohérence le régime d'octroi du congé parental avec celui de sa prise en compte dans le calcul des droits à pensions, la rapporteure spéciale s'interroge cependant sur l'opportunité d'un tel alignement alors que le projet de réforme des retraites porté par le Gouvernement privilégiait, jusqu'à sa mise en sommeil, une harmonisation des règles entre salariés du secteur privé et fonctionnaires. Or, force est de constater que le droit au congé parental ne répond pas aux mêmes conditions selon qu'il s'agisse d'un assuré au régime général ou d'un affilié auprès du régime de la fonction publique d'État. L'écart entre les bornes d'âge - trois ans d'un conté contre douze ans de l'autre - serait ainsi accentué.

La rapporteuse spéciale regrette, en outre, que le coût du dispositif original et le nombre de ses bénéficiaires comme une évaluation des incidences financières du relèvement de la borne d'âge maximal n'aient pu lui être transmis afin de disposer d'une information précise pour examiner cet article.

Nonobstant ces réserves et dans l'attente d'une réforme des retraites d'ampleur, la commission propose d'adopter sans modification cet article.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 2 novembre 2021, sous la présidence de M. Dominique de Legge, vice-président, la commission a examiné le rapport de Mme Sylvie Vermeillet, rapporteure spéciale, sur la mission « Régimes sociaux et de retraite » et le compte d'affectation spéciale « Pensions ».

M. Dominique de Legge , président . - Nous poursuivons nos travaux avec la mission « Régimes sociaux et de retraite » et avec le compte d'affectation spéciale « Pensions ».

Je salue la présence parmi nous de René-Paul Savary, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales.

Mme Sylvie Vermeillet , rapporteure spéciale de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et du compte d'affectation spéciale « Pensions » . - Le compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions » et la mission « Régimes sociaux et de retraite » constituent une partie du financement public des systèmes de retraite, à savoir les pensions gérées par l'État pour presque 61 milliards d'euros, ainsi que certains régimes spéciaux déficitaires pour 6,06 milliards. Ces deux budgets sont importants, mais je précise que l'ensemble des dépenses de retraite, régimes de base et complémentaires, s'est élevé à 335 milliards d'euros en 2020.

Ainsi, les 67 milliards qui font l'objet de mon rapport spécial concentrent les versements de pensions auxquelles l'État doit consentir, principalement les pensions civiles et militaires, les pensions d'invalidité et les subventions d'équilibre versées aux régimes des retraites de la SNCF, de la RATP, des marins et des mines.

Cependant, l'État subvient également à d'autres régimes, mais par d'autres moyens, notamment celui des taxes affectées : il s'agit du régime des industries électriques et gazières (IEG), de celui des clercs et employés de notaires, de celui des avocats et de celui des non-salariés agricoles.

L'État verse également une subvention d'équilibre au régime des agents de l'Opéra de Paris et à celui des agents de la Comédie-française, mais ces régimes échappent à la mission dont je vous parle. Il est bien difficile de comprendre pourquoi ...

À la fin, entre les régimes de base et les régimes complémentaires, les régimes intégrés, les régimes ouverts et les régimes fermés, les régimes excédentaires ou déficitaires, les régimes équilibrés par taxes affectées ou par subvention, les transferts entre régimes, etc. comment comparer valablement quoi que ce soit ? Comment extraire l'équité que chacun recherche ?

Réunir dans une seule et même mission tous les systèmes qui ont besoin du financement de l'État, sous quelque forme que ce soit, serait un bon début.

Mettre à plat les contributions de l'État aux régimes spéciaux est indispensable : lorsqu'un régime ne compte plus assez de cotisants pour subvenir aux pensions de ses retraités, alors indiscutablement la solidarité nationale doit venir à son secours. Mais lorsqu'à cette occasion, celle-ci finance aussi des avantages spécifiques, il est légitime de savoir lesquels et combien, avant d'y consentir.

En ce qui concerne la mission « Régimes sociaux et de retraite », le montant global des crédits demandés dans le cadre du projet de loi de finances pour 2022 s'élève donc à 6,06 milliards d'euros, dont 3,273 milliards pour le régime de la SNCF, 751 millions pour le régime de la RATP, 1,4 million pour le financement du congé de fin d'activité des chauffeurs routiers, 18,7 millions pour le régime des chemins de fer d'Afrique du Nord et du Niger-Méditerranée, 401 000 euros pour le régime des transports urbains tunisiens et marocains, 43 000 euros pour le régime du réseau ferroviaire franco-éthiopien - au sein duquel il ne reste que quatre pensionnés -, 791 millions pour les marins, 947 millions pour le régime des mines, 130 millions pour la Seita, 930 000 euros pour les régies ferroviaires d'outre-mer - qui ne compte que 55 pensionnés - et 90 000 euros pour l'ORTF - 55 pensionnés lui aussi.

Le déséquilibre démographique est, bien évidemment, accentué dans les régimes fermés qui voient leur population de cotisants décroître. Ainsi, le régime des mines ne compte plus que 981 cotisants, celui de la Seita plus un seul. Je rappelle que, depuis le 1 er janvier 2020, le régime SNCF est fermé ; par conséquent, le besoin de financement par l'État ne peut que croître.

À l'intérieur de chaque régime, les incidences du déséquilibre démographique et des avantages spécifiques sont à l'évidence insuffisamment documentées : comment dès lors aborder une réforme si l'on ne connaît pas le coût de chaque mesure ? Durant mes auditions, j'ai pu vérifier qu'aucune caisse de retraite n'a mis à profit la pause de vingt mois depuis l'arrêt de la réforme des retraites pour préparer celle-ci et éclaircir ses comptes.

Lors de la création de la caisse de retraite de la RATP en 2006, le régime devait en principe être adossé au régime général et mettre en place un taux de cotisation patronal (T2) destiné à financer les droits spécifiques du régime : celui-ci n'a pas été mis en place, sous prétexte que les avantages du régime de la RATP seraient moins importants que ceux du régime de la SNCF, qui a créé un T2. Il en résulte que les droits spécifiques à la RATP sont tranquillement financés par la solidarité nationale ...

En 2016, une estimation du service statistique des ministères sociaux, la Drees, a évalué une partie des droits spécifiques cumulés des régimes SNCF, RATP, mines et marins à 3,8 milliards d'euros. Or le total des cotisations de ces quatre régimes s'élève à 2,5 milliards d'euros ... Chacun peut donc mesurer l'ampleur de l'effort national.

Que faire ? Malheureusement, les réformes passées n'ont jamais diminué les coûts pour l'État, parce qu'à grand renfort de mesures compensatoires les valeurs moyennes de liquidation des pensions ont sans cesse augmenté.

De plus, l'ouverture à la concurrence n'est qu'un leurre. Reprenons l'exemple de la RATP : 18 000 salariés du département bus sont concernés par la mise en concurrence d'ici à 2024. Si l'un des concurrents de la RATP devait remporter un marché, le transfert des personnels RATP fait que ceux-ci continueront de bénéficier de leur statut, qui sera toujours financé par l'État.

J'en viens au CAS « Pensions », d'un montant de 60,98 milliards d'euros en 2022.

Il concerne d'abord les pensions civiles et militaires de retraite et les allocations temporaires d'activité, pour 57,6 milliards d'euros, avec une revalorisation des pensions de base de 1,1 % au 1 er janvier 2022 contre 0,4 % en 2021.

Il concerne ensuite les ouvriers des établissements industriels de l'État, pour 1,9 milliard d'euros.

Il concerne enfin les pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre pour 1,5 milliard d'euros, revalorisées de 1,6 % au 1 er avril 2022 contre 0,1 % en 2021.

Le CAS devant être équilibré en permanence, la contribution dite employeur de chaque ministère est supérieure aux dépenses prévisionnelles. Cependant, celles-ci progressent plus vite que les recettes. Le taux de cotisation patronale est en effet fixe depuis 2014 : 74,28 % pour les civils et 126,07 % pour les militaires.

Le Conseil d'orientation des retraites (COR) estime que le nombre de retraités de droit direct devrait augmenter jusqu'en 2035 environ en raison du départ à la retraite des générations nombreuses du baby-boom. S'agissant des fonctionnaires civils, il passerait de 2 à 2,2 millions avant de redescendre en dessous de 2 millions en 2055.

Sachant par ailleurs que les contractuels de la fonction publique cotisent à la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) et à une caisse de retraite complémentaire, l'Ircantec, on comprend bien que les cotisations des titulaires ne vont pas suffire longtemps à maintenir l'équilibre du CAS.

Fin 2021, le CAS devrait cumuler 9,7 milliards d'euros d'excédent, mais la contribution de 2021 à cet excédent ne sera que de 600 millions, alors qu'elle était de 1,26 milliard en 2020. Pour mémoire, le besoin de financement du régime est estimé à 88 milliards d'euros ... Pour autant, le projet annuel de performance 2022 du CAS ne présente ni projection de solde ni prévision de recettes pour l'avenir à moyen et long terme de ces régimes de retraite.

Je voudrais faire un petit focus sur la crise sanitaire : le surcroît de mortalité a conduit à une baisse des dépenses de pensions, pour le CAS, de 36 millions d'euros en 2020 et de 151 millions en 2021. Le service des retraites de l'État a également constaté un report des départs à la retraite pour 2 600 personnes en 2020 et 1 200 en 2021 : l'économie budgétaire est estimée à 19 millions pour 2020 et à 87 millions pour 2021.

Pour terminer, je souhaite livrer à votre réflexion un enjeu qui me paraît capital dans la perspective d'une future réforme des retraites.

Actuellement, la classe active cotise à des taux qui sont les plus élevés que nous ayons jamais connus, sur une assiette de plus en plus large et pour une durée de plus en plus longue. Son espérance de vie augmente certes toujours, mais moins vite qu'auparavant : l'espérance de vie des femmes se rapproche, en effet, de celle des hommes en raison, notamment, du développement des cancers et du palier constaté dans le traitement de nombreuses maladies, notamment les maladies cardio-vasculaires.

Lorsque la classe active actuelle sera en retraite, la pension dont elle bénéficiera sera, sous l'effet des réformes passées, bien faible au regard du niveau de vie des plus jeunes.

En 1970, un retraité percevait en moyenne 70 % des revenus d'un actif, contre 108 % en 2015 ; avec les réformes, la baisse des taux de remplacement, et une revalorisation des pensions moindre que celle des salaires, un retraité percevra, en 2070, en moyenne, 80 % des revenus d'un actif, soit 30 points de moins environ qu'aujourd'hui. Attention, parce que ce recul va toucher les générations à qui l'on demande déjà de travailler plus longtemps : est-il juste de demander à la même génération de faire deux fois l'effort ? Il faudra y prendre garde dans la réforme, qui apparaît par ailleurs nécessaire.

Quoi qu'il en soit, je vous propose d'adopter les crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et du compte d'affectation spéciale « Pensions ».

M. René-Paul Savary , rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales . - Comme chaque année, je déplore qu'on ne dispose pas d'une vision globale des crédits engagés sur les retraites, puisque la loi de financement de la sécurité sociale ne vise pas les crédits dédiés par l'État aux régimes spéciaux et à celui de la fonction publique, ni les moyens engagés dans les régimes complémentaires. Ce défaut est regrettable lorsqu'on envisage une réforme.

La crise sanitaire a eu des répercussions moindres qu'on a pu le dire sur les chiffres des retraites, car si les personnes âgées ont été plus touchées que les autres, les moindres dépenses de retraite ne sont pas significatives par rapport à la masse globale. Nous faisons les mêmes constats que vous sur la diminution des pensions par rapport aux salaires.

Une remarque sur l'effet du recul de l'âge de départ pour un taux plein : cet effet est à relativiser, sachant qu'un retraité sur deux n'est pas actif au moment où il prend sa retraite. Il faut noter aussi qu'à partir de 2023 ou 2024, les dépenses du CAS « Pensions » dépasseront les recettes, du fait de l'inflation, des départs en retraite, et de la moindre croissance. Or, rien n'est proposé pour anticiper, le Gouvernement se rassure avec les 10 milliards d'euros d'avance de ce compte, mais ce n'est pas suffisant.

Nos analyses correspondent aux vôtres, nous faisons les mêmes constats et je proposerai également un avis favorable à l'adoption de ces crédits.

M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Merci pour cet état des lieux exhaustif et d'attirer notre attention sur ces effets différenciés de la réforme selon les générations.

Vous avez évoqué les difficultés à obtenir des réponses précises sur l'évolution des trajectoires des régimes spéciaux et sur le régime de la fonction publique en cas de réforme paramétrique, voire systémique. Doit-on en conclure que les administrations concernées font une « politique de l'autruche », ne donnant pas les moyens de se projeter, notamment à partir des données relatives à l'espérance de vie ?

Mme Sylvie Vermeillet , rapporteure spéciale . - Dans la pause de 20 mois qui dure depuis que la réforme des retraites est à l'arrêt, personne n'a continué le travail d'études et de projection. Or nous avons besoin d'informations. On me répond que le sujet est complexe, mais c'est une raison supplémentaire pour l'examiner. Heureusement que le COR nous fournit des projections sur l'espérance de vie, le solde migratoire, la natalité, laquelle faiblit, ce qui est à prendre en compte nécessairement.

M. Vincent Éblé . - L'examen de cette mission et du CAS réduit notre rôle à constater ce que coûtent les retraites des fonctionnaires et la part des régimes spéciaux pris en charge par l'État, au lieu de trancher entre des politiques publiques. Dans ces conditions, mon groupe s'abstiendra.

M. Arnaud Bazin . - Les moyennes recouvrent des réalités très diverses et peuvent dissimuler des problèmes particuliers, comme celui des très faibles pensions. Nous connaissons tous des cas de fonctionnaires territoriaux qui arrivent en bout de carrière quasi complète, mais qui se retrouvent avec une pension très faible. Cette question fait-elle l'objet d'un traitement particulier dans la réforme envisagée ?

M. Marc Laménie . - Votre rapport nous alerte sur un point : en 2120, donc dans un siècle, les besoins de financement pour le régime spécial de la SNCF atteindraient 523 milliards d'euros : comment parvenez-vous à un tel résultat ?

M. Pascal Savoldelli . - Cette mission comporte une partie technique avec des effets mécaniques, mais elle a aussi une dimension politique puisque la majorité a, en filigrane, un projet de réforme des retraites. On nous dit que l'allongement de la vie aurait un coût, mais il faut examiner les choses en détail et ne pas omettre de dire que l'espérance de vie est de treize années moindre pour les 5 % des Français les plus pauvres que pour les 5 % les plus riches. Ensuite, nous ne voterons pas les crédits de cette mission, car nous sommes opposés à la réforme qui se dessine : on dit qu'elle doit mettre fin aux régimes spéciaux, mais en réalité, la capitalisation va multiplier les régimes spéciaux, chaque branche aura le sien, et même chaque grande entreprise - ce n'est pas notre choix.

M. Jean-Marie Mizzon . - Pensez-vous que la pénibilité pourra être prise en compte dans la réforme des retraites ?

Mme Sylvie Vermeillet , rapporteure spéciale . - La question des très faibles pensions est posée, l'idée d'une majoration de la pension minimale faisait partie du projet de réforme des retraites et était détaillée au sein de l'étude d'impact. Reste la question centrale de l'équité entre les fonctions publiques et les statuts.

Le besoin de financement permet de mesurer le montant des crédits qu'il faudrait placer aujourd'hui pour couvrir les besoins de financement futurs, en appliquant un taux d'actualisation correspondant à celui de l'obligation du Trésor à quinze ans. L'horizon 2120 correspond à l'année d'extinction du régime spécial de la SNCF.

Je suis tout à fait consciente que l'espérance de vie n'est pas la même selon le niveau de richesse, mais la question posée est celle de la contribution publique aux régimes spéciaux. Dès lors qu'on fait appel à la solidarité nationale, on est en droit de savoir quels sont les avantages et les coûts des régimes spéciaux. Je souhaite que le Parlement ait tous les éléments d'appréciation à sa disposition, ce n'est pas le cas aujourd'hui.

La prise en compte de la pénibilité est nécessaire, mais son coût doit également être évalué. Nous n'avons pas beaucoup avancé avant la suspension de la réforme, même si des corps de métiers se sont fait entendre mieux que d'autres.

M. René-Paul Savary , rapporteur pour avis . - Un dernier mot s'agissant du projet de réforme des retraites, en passant à une retraite par points, on passe à un système où celui qui aura peu cotisé touchera très peu. Une autre difficulté tient au fait qu'il faut en réalité prendre en compte l'espérance de vie en bonne santé.

La commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et du compte d'affectation spéciale « Pensions ».

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 18 novembre 2021, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a procédé à l'examen définitif de l'équilibre, des missions, des budgets annexes, des comptes spéciaux et des articles rattachés de la seconde partie.

M. Jean-François Husson , rapporteur général . - La commission a adopté sans modification les crédits de la mission et du compte d'affectation spéciale. En première délibération, l'Assemblée nationale a adopté les crédits de la mission tels que modifiés par un amendement de crédits et ceux du compte d'affectation spéciale tels que modifiés par deux amendements de crédits. L'Assemblée nationale a par ailleurs adopté, sur le compte d'affectation spéciale, un article additionnel 61.

Après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale, la rapporteure spéciale vous propose de confirmer l'adoption des crédits de la mission et du compte d'affectation spéciale tels que modifiés par l'Assemblée nationale. Les conséquences de la suppression de l'indemnité inflation par le Sénat dans le cadre du PLFR seront tirées dans le cadre de la séance publique.

Mme Sylvie Vermeillet , rapporteure spéciale . - L'article 61 porte sur les modalités de prise en compte dans la constitution du droit à pension, au sein du régime de la fonction publique, des disponibilités prises pour élever un enfant. Il aligne le droit à pension sur le droit à l'accès au congé parental.

Je remarque cependant l'absence d'évaluation préalable du coût du dispositif actuel et de celui de la modification apportée. Les différences des conditions d'octroi de ce congé parental entre régime de la fonction publique et régime général seraient accentuées, ce qui peut paraître contraire à l'objectif d'harmonisation retenu dans le projet de réforme des retraites. Nonobstant ces réserves, un rejet de l'article serait excessif. Je vous propose un avis favorable.

Après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale, la commission confirme sa décision de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission et du compte d'affectation spéciale tels que modifiés par l'Assemblée nationale. Elle décide de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 61.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Service des retraites de l'État (SRE)

- M. Guillaume TALON, chef de service ;

- M. Philippe CHATAIGNON, chef du bureau financier et des statistiques.

Direction du budget (DB)

- Mme Marie CHANCHOLE, sous-directrice de la 6e sous-direction ;

- M. Richard BORDIGNON, chef du bureau des retraites et régimes spéciaux.

Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM)

- M. Marc PAPINUTTI, directeur général ;

- Mme Élise TEXIER, sous-directrice du droit social des transports terrestres ;

- Mme Gabrielle DERUCHE, chargée d'étude au bureau du droit social des transports ferroviaires ou guidés et des réseaux de transports publics urbains.

Direction des affaires maritimes (DAM)

- M. Thierry COQUIL, directeur ;

- M. Philippe GABRIEL, chef du bureau de la sécurité sociale des marins.

Établissement national des invalides de la marine (ENIM)

- Mme Malika ANGER-BOURESSAM, directrice ;

- Mme Sandrine TARDIF, cheffe du département des finances et des moyens généraux.

Caisse de retraites du personnel de la RATP (CRP RATP)

- M. Christophe ROLIN, directeur.

Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS)

- M. Yann-Gaël AMGHAR ; directeur général.

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

https://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjlf2022.html


* 1 François-Xavier Albouy, Jean-Hervé Lorenzi, Alain Villemeur et Matthieu Noguès, « La réforme des retraites : cinq conditions impératives », Chaire Transitions démographiques et transitions économiques, septembre 2019.

* 2 L'exonération de cotisations versées au régime des marins s'est élevée de son côté à 1,6 million d'euros en 2020, le coût du dispositif d'activité partielle étant estimé à 5,9 millions d'euros.

* 3 Loi n° 2018-515 du 27 juin 2018 pour un nouveau pacte ferroviaire.

* 4 Article 25 de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020.

* 5 La convention tripartite du 18 janvier 2021 prévoit ainsi que les deux régimes versent à la CPRP SNCF une dotation correspondant à l'équivalent des cotisations perçues pour les nouveaux salariés de la SNCF. Le montant de cette compensation est estimé à 56 millions d'euros en 2022. L'État assure quant à ainsi le besoin de financement restant et correspondant au différentiel de taux de cotisations entre les régimes de droit commun et le régime spécial, soit environ 40 % de la perte de cotisations pour la CPRP SNCF liées à la fermeture du statut.

* 6 Le ratio démographique consiste en le rapport entre d'une part la somme du nombre de retraités directs et la moitié de retraités de droit dérivé et, d'autre part, le nombre de cotisants.

* 7 Dossier solidarité et santé, Droits familiaux et dispositifs de solidarité du système de retraite, n° 72, janvier 2016.

* 8 Les régimes de salariés sont les suivants : Caisse nationale d'assurance-vieillesse - CNAV, Régime des salariés agricoles, régime des fonctionnaires civils et militaires de l'État, caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales - CNRACL, Fonds spécial des ouvriers des établissements industriels de l'État - FSPOEIE, Régime des mines, CRP RATP, CPRP SNCF, Régime des marins, régime des industries électriques et gazières, régime des clercs et des employés de notaires, Banque de France).

* 9 Les quatre régimes de non-salariés sont les suivants : Exploitants agricoles, Caisse nationale des barreaux français, Sécurité sociale des travailleurs indépendants et Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales.

* 10 Cour des comptes, Continuer à adapter le système de retraite pour résorber les déficits et renforcer l'équité, Les enjeux structurels pour la France - octobre 2021.

* 11 Les régimes spéciaux de retraite de la RATP, de la SNCF et des industries électriques et gazières, juillet 2019.

* 12 L'âge moyen de départ en retraite est supérieur à 55 ans en raison de la part importante de pensions spéciales, accordées aux marins disposant de moins de 15 ans de services. Ces pensions, contrairement aux pensions d'ancienneté ou proportionnelles obtenues après 15 ans de service, ne sont accordées qu'à partir de l'âge de 60 ans (sauf si le marin détient une autre pension servie par l'État ou par un autre régime de sécurité sociale). L'effet indirect de la réforme des retraites de 2010 conduit à un report significatif du nombre de pensions spéciales liquidées.

* 13 Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des .statistiques du ministère des solidarités et de la santé, Les retraités et les retraites - édition 2021.

* 14 Décret n° 2005-1636 du 26 décembre 2005 relatif aux conventions financières passées par le régime spécial de retraites du personnel de la Régie autonome des transports parisiens, au taux et à l'assiette des cotisations perçues par ce régime et modifiant le décret n° 59-157 du 7 janvier 1959 relatif à l'organisation des transports de voyageurs en Ile-de-France.

* 15 Les bus seront mis en concurrence en 2024, les tramways en 2029 et les RER et métros en 2039.

* 16 Les régimes spéciaux de retraite de la RATP, de la SNCF et des industries électriques et gazières, juillet 2019.

* 17 L'article 14 de la loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021 prévoit déjà une reprise des réserves du régime de prévoyance de la CPRP par la caisse nationale d'assurance-maladie.

* 18 Le rapport démographique corrigé est le rapport entre d'une part la somme du nombre de retraités directs et la moitié de retraités de droit dérivé et, d'autre part, le nombre de cotisants.

* 19 La tendance a pu s'inverser en 2020 et en 2021 en raison de la croissance du budget général lui-même, appelé à répondre aux incidences de la crise sanitaire Cette inversion n'est, cependant, pas appelée à durer.

* 20 Loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites.

* 21 Loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites.

* 22 Loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites.

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