Rapport n° 857 (2020-2021) de Mme Catherine DI FOLCO , fait au nom de la commission des lois, déposé le 29 septembre 2021

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N° 857

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2020-2021

Enregistré à la Présidence du Sénat le 29 septembre 2021

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de loi tendant à permettre l' examen par le Parlement de la ratification de l' ordonnance n° 2021-702 du 2 juin 2021 portant réforme de l' encadrement supérieur de la fonction publique de l' État ,

Par Mme Catherine DI FOLCO,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. François-Noël Buffet , président ; Mmes Catherine Di Folco, Marie-Pierre de La Gontrie, MM. Christophe-André Frassa, Jérôme Durain, Marc-Philippe Daubresse, Philippe Bonnecarrère, Mme Nathalie Goulet, M. Alain Richard, Mmes Cécile Cukierman, Maryse Carrère, MM. Alain Marc, Guy Benarroche , vice-présidents ; M. André Reichardt, Mmes Laurence Harribey, Jacky Deromedi, Agnès Canayer , secrétaires ; Mme Éliane Assassi, MM. Philippe Bas, Arnaud de Belenet, Mmes Catherine Belrhiti, Esther Benbassa, MM. François Bonhomme, Hussein Bourgi, Mme Valérie Boyer, M. Mathieu Darnaud, Mmes Françoise Dumont, Jacqueline Eustache-Brinio, M. Pierre Frogier, Mme Françoise Gatel, MM. Ludovic Haye, Loïc Hervé, Mme Muriel Jourda, MM. Patrick Kanner, Éric Kerrouche, Jean-Yves Leconte, Henri Leroy, Stéphane Le Rudulier, Mme Brigitte Lherbier, MM. Didier Marie, Hervé Marseille, Mme Marie Mercier, MM. Thani Mohamed Soilihi, Jean-Yves Roux, Jean-Pierre Sueur, Mmes Lana Tetuanui, Claudine Thomas, Dominique Vérien, M. Dany Wattebled .

Voir les numéros :

Sénat :

807 et 858 (2020-2021)

L'ESSENTIEL

Réunie le 29 septembre 2021 sous la présidence de François-Noël Buffet (Les Républicains - Rhône), la commission des lois du Sénat a examiné, sur le rapport de Catherine Di Folco (Les Républicains - Rhône), la proposition de loi n° 807 (2020-2021) tendant à permettre l'examen par le Parlement de la ratification de l'ordonnance n° 2021-702 du 2 juin 2021 portant réforme de l'encadrement supérieur de la fonction publique de l'État.

Concrétisant l'annonce phare du Président de la République de la suppression de l'École nationale d'administration et du système dit des « grands corps », cette ordonnance modifie en profondeur la conception et le fonctionnement de la haute fonction publique de l'État , tels qu'ils résultaient de l'ordonnance du 9 octobre 1945, prise par le Général de Gaulle, relative à la formation, au recrutement et au statut de certaines catégories de fonctionnaires.

Poursuivant les objectifs louables de dynamisation des carrières, de refonte de la formation et d'ouverture de l'encadrement supérieur de la fonction publique de l'État, l'ordonnance n'en remet pas moins en cause un certain nombre de principes consubstantiels, depuis 1945, à la haute fonction publique française, à savoir : le primat d'une fonction publique de carrière , la mise en oeuvre d'une logique de corps , ou encore l'indépendance des fonctions juridictionnelles et des inspections générales.

Compte tenu du refus du Gouvernement de s'engager à faire examiner par le Parlement la ratification de cette ordonnance, le Gouvernement s'étant borné, le 29 juillet dernier, à satisfaire à son obligation constitutionnelle de déposer un projet de ratification, la proposition de loi présentée permet opportunément d'ouvrir le débat parlementaire sur le bien-fondé des mesures prises.

Au regard des incertitudes d'ordre réglementaire et jurisprudentiel pesant sur l'appréciation de la portée exacte de l'ordonnance du 2 juin 2021 et du manque de visibilité en l'état sur l'intégralité de la réforme engagée par le Gouvernement , la commission a décidé, sur la proposition de son rapporteur, de ne pas adopter l'article unique de la proposition de loi.

I. L'ORDONNANCE DU 2 JUIN 2021 PORTANT RÉFORME DE L'ENCADREMENT SUPÉRIEUR DE LA FONCTION PUBLIQUE DE L'ÉTAT, TRADUCTION DE L'ENGAGEMENT PRÉSIDENTIEL À RÉFORMER LA HAUTE FONCTION PUBLIQUE DE L'ÉTAT

A. UNE RÉFORME DE LA HAUTE FONCTION PUBLIQUE DE L'ÉTAT ANNONCÉE PAR LE POUVOIR EXÉCUTIF POUR ACCROÎTRE LA DIVERSITÉ DES PARCOURS ET RENFORCER LA CULTURE COMMUNE DE L'ACTION PUBLIQUE

Missionné en mai 2019 pour formuler des propositions de réforme de la haute fonction publique, Frédéric Thiriez , avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, a remis son rapport au Premier ministre le 18 février 2020 . Dans son discours du 8 avril 2021 prononcé à l'occasion de la convention managériale de l'État, le Président de la République a confirmé, sur le fondement des conclusions la mission Thiriez, la suppression de l'École nationale d'administration (ENA) et la création d'un Institut du service public, destiné à former les élèves administrateurs de l'État.

L'ordonnance du 2 juin 2021 s'inspire ainsi, mais en partie seulement, du rapport de la mission Thiriez ; elle n'en comporte pas moins des dispositions induisant une nette rupture avec le système hérité de l'ordonnance du 9 octobre 1945.

B. L'ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE DE RATIFICATION PAR LE SÉNAT

1. Le champ de l'habilitation posé par la loi du 6 août 2019

L'article 59 de la loi n°2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique a habilité le Gouvernement à prendre par ordonnances, dans un délai de dix-huit mois, toute mesure relevant du domaine de la loi, notamment pour, tout « en garantissant le principe d'égal accès aux emplois publics, fondé notamment sur les capacités et le mérite, et dans le respect des spécificités des fonctions juridictionnelles, réformer les modalités de recrutement des corps et cadres d'emplois de catégorie A afin de diversifier leurs profils, harmoniser leur formation initiale, créer un tronc commun d'enseignements et développer leur formation continue afin d'accroître leur culture commune de l'action publique, aménager leur parcours de carrière en adaptant les modes de sélection et en favorisant les mobilités au sein de la fonction publique et vers le secteur privé ».

L'article 59 de la loi précitée a ainsi ouvert un large champ d'habilitation ; les garde-fous qu'il comporte toutefois - le respect du principal égal accès aux emplois publics, fondé « sur les capacités et le mérite », ainsi que la prise en compte « des spécificités des fonctions juridictionnelles » - sont largement issus de la rédaction adoptée par le Sénat à la suite du travail réalisé par la commission des lois 1 ( * ) .

2. Les délais d'habilitation et de dépôt d'un projet de loi de ratification

Si le délai d'habilitation du Gouvernement à édicter des ordonnances sur le fondement de l'article 59 de la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 était initialement de dix-huit mois , expirant ainsi au 7 février 2021, il a été allongé de quatre mois - soit jusqu'au 7 juin 2021 - par l'article 14 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 modifiée d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 2 ( * ) . Publiée le 2 juin 2021, l'ordonnance a donc respecté - de peu - le délai d'habilitation.

En outre, l 'article 38 de la Constitution impose, à peine de caducité, le dépôt d'un projet de loi de ratification de l'ordonnance avant la date fixée par la loi d'habilitation. Le dernier alinéa de l'article 59 de la loi du 6 août 2019 prévoyait à cet égard un délai de trois mois à compter de la publication de l'ordonnance ; le projet de loi de ratification déposé à l'Assemblée nationale le 29 juillet 2021 3 ( * ) a donc bien respecté ce délai.

Le calendrier de l'habilitation et de l'ordonnance

3. Un débat de ratification de l'ordonnance à l'initiative du Sénat

Dans sa rédaction issue de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 , l'article 38 de la Constitution exige que la ratification des ordonnances soit explicite : « elles ne peuvent être ratifiées que de manière expresse ».

Interrogée au Sénat lors de son audition par la commission des lois le 26 mai 2021 4 ( * ) , puis lors de la séance de questions d'actualité au Gouvernement du 2 juin 2021 5 ( * ) , la ministre de la transformation et de la fonction publiques, Amélie de Montchalin, n'a pas souhaité formuler d'engagement du Gouvernement à demander au Parlement une ratification expresse.

Si un projet de loi de ratification 6 ( * ) a bien été déposé à l'Assemblée nationale dans le délai imparti de trois mois à compter de la publication de l'ordonnance, rien n'indique à ce stade que le Gouvernement inscrira ce texte à l'ordre du jour du Parlement.

Dans ce contexte, la présente proposition de loi, déposée par quatre présidents de groupes politiques (le groupe Les Républicains, le groupe Socialiste, écologiste et républicain, le groupe Union centriste et le groupe Écologiste - Solidarité et Territoires), le président de la commission des lois, François-Noël Buffet, et Jean-Pierre Sueur , entend donner l'occasion au Sénat de débattre des choix faits par l'ordonnance, dans le cadre de la procédure de ratification.

En se saisissant lui-même de la question, le Sénat est ainsi à l'origine de la première discussion au Parlement d'une proposition de loi de ratification d'une ordonnance .

II. AU-DELÀ D'UNE RÉFORME DE LA FORMATION ET DES PARCOURS, L'ORDONNANCE PROCÈDE À UN CHANGEMENT DE PARADIGME DE LA HAUTE FONCTION PUBLIQUE DE L'ÉTAT

A. LES TROIS OBJECTIFS DE L'ORDONNANCE : DYNAMISER LES PARCOURS DE CARRIÈRE DE L'ENCADREMENT SUPÉRIEUR, ADAPTER LA FORMATION INITIALE ET CONTINUE , DÉCLOISONNER LA HAUTE FONCTION PUBLIQUE DE L'ÉTAT

1. Dynamiser les parcours de carrière de l'encadrement supérieur

Dans la lignée des conclusions du rapport Thiriez, l'ordonnance vise à instaurer une gestion des ressources humaines de l'État à un niveau interministériel et reposant sur les principes d'évaluation, de mobilité et d'ouverture.

L'article 2 de l'ordonnance crée ainsi une stratégie pluriannuelle de l'État relative au pilotage des ressources humaines de l'encadrement supérieur, définie à partir des lignes directrices de gestion interministérielles 7 ( * ) édictées par le Premier ministre après consultation du Conseil supérieur de la fonction publique de l'État.

Afin de tenir compte des spécificités de l'encadrement supérieur , l'article 3 introduit de nouvelles modalités d'évaluation 8 ( * ) , qui seraient réalisées par des instances collégiales ministérielles ou interministérielles. Le cadre d'accompagnement des agents pour lesquels une transition professionnelle serait recommandée à l'issue des évaluations est prévu par l'article 4 de l'ordonnance ; le recours à une rupture conventionnelle 9 ( * ) pourra notamment être proposé.

2. Rénover la formation initiale et continue pour accroître la culture commune de l'action publique

Mettant en avant l'objectif d'adapter la formation des cadres supérieurs de l'État aux enjeux actuels et à venir, et de renforcer la culture commune de l'action publique, l'article 5 de l'ordonnance crée l'Institut national du service public (INSP), établissement public de l'État, placé sous la tutelle du Premier ministre et du ministre chargé de la fonction publique, chargé d'assurer la formation initiale et continue du futur corps des administrateurs de l'État et d'autres corps de fonctionnaires ou de magistrats susceptibles d'exercer des fonctions d'encadrement supérieur dans la fonction publique de l'État 10 ( * ) .

Un décret en Conseil d'État précisera les missions de l'INSP ainsi que les contours du « tronc commun » qui s'intègrera à la scolarité des élèves de quatorze écoles de service public 11 ( * ) .

3. Décloisonner la haute fonction publique de l'État

L'ordonnance entend poursuivre une logique d'organisation des carrières fondée sur les métiers et les compétences, et non en fonction de l'appartenance à un corps .

a) Réformer le système des grands corps

Reprenant l'esprit du rapport Thiriez, l'ordonnance réaménage en profondeur le système dit « des grands corps » en réservant un traitement différencié aux corps juridictionnels.

Les actuels corps de sortie à l'issue de l'ENA

• La fonctionnalisation des inspections générales

L'article 6 de l'ordonnance ouvre la voie à la fonctionnalisation des emplois au sein des services d'inspection générale ( Inspection générale de l'administration, Inspection générale des affaires sociales et Inspection générale des finances ), qui seront désormais occupés par des « agents exerçant des fonctions d'inspection générale au sein de services d'inspection générale, recrutés, nommés et affectés pour une durée renouvelable ».

Dans la mesure où l'appartenance au corps constitue actuellement, à elle seule, la garantie de l'indépendance et de la neutralité des inspecteurs, la fonctionnalisation des emplois au sein des services d'inspection générale va de pair avec la nécessaire inscription, au niveau législatif, de ces garanties. L'article 6 encadre ainsi strictement les cas où il pourra être mis fin aux fonctions des chefs de services et à celles des agents exerçant des missions d'inspection générale.

• La suppression des corps et la généralisation des statuts d'emplois

Si l'ordonnance du 2 juin 2021 ne traite pas en tant que telle des statuts des corps de fonctionnaires autres que juridictionnels - ces statuts relevant de la seule compétence du pouvoir réglementaire -, son article 10 ouvre néanmoins la voie à une généralisation des statuts d'emplois.

Présentés par le Gouvernement comme un facteur de souplesse et de mobilité, les statuts d'emplois pourront déroger à certaines dispositions du statut général de la fonction publique ne correspondant pas aux besoins des missions en question. Ainsi, le corps préfectoral ou encore le corps diplomatique seraient supprimés et remplacés respectivement par des statuts d'emplois propres aux fonctions préfectorales et diplomatiques.

• De nouvelles modalités d'accès aux fonctions juridictionnelles et de déroulement de carrière pour les membres des juridictions administratives et financières

L'ordonnance vise tout d'abord, dans la lignée du rapport Thiriez, à différer l'accès aux fonctions juridictionnelles , en transformant le Conseil d'État et la Cour des comptes, qui figurent actuellement parmi les corps de sortie à l'issue de l'ENA, en corps de débouché , accessibles seulement après une première expérience dans l'administration. Ainsi, les grades d'auditeurs au Conseil d'État et à la Cour des comptes seront supprimés et remplacés par des statuts d'emploi d'auditeur , d'une durée maximale de trois ans, accessibles aux administrateurs de l'État et aux membres des corps et cadres d'emplois de niveau comparable justifiant d'au moins deux ans d'expérience préalable 12 ( * ) .

Les auditeurs seront nommés par arrêté du vice-président du Conseil d'État ou du premier président de la Cour des comptes, après un passage devant un comité consultatif , composé de façon paritaire de membres du Conseil d'État ou de la Cour des comptes, et de personnalités qualifiées ; des garanties d'indépendance équivalentes à celles des membres du Conseil d'État ou de la Cour des comptes leur seront par ailleurs octroyées.

De plus, afin de dynamiser les parcours de carrière, l'ordonnance conditionne l'accès aux grades intermédiaires et supérieurs des fonctions juridictionnelles à l'accomplissement de mobilités. Ainsi, une mobilité statutaire obligatoire est instaurée aux grades de maître des requêtes au Conseil d'État 13 ( * ) , de conseiller de tribunal administratif et de cour administrative d'appel (TA-CAA) 14 ( * ) , de conseiller référendaire à la Cour des comptes et de conseiller de chambre régionale et territoriale des comptes (CRC) 15 ( * ) , afin d'accéder aux grades respectifs de conseiller d'État, de premier conseiller de TA-CAA, de conseiller maître à la Cour des comptes et de premier conseiller de CRC.

De nouveaux parcours au sein des corps juridictionnels :
l'exemple de la Cour des comptes

Enfin, l'ordonnance ouvre l'accès au Conseil d'État et à la Cour des comptes au-delà des personnes issues de l'auditorat, en conférant un pouvoir de consultation à une commission dite d'intégration 16 ( * ) , composée du vice-président du Conseil d'État ou du premier président de la Cour des comptes, d'un membre du Conseil d'État ou de la Cour des comptes, et de trois personnes qualifiées nommées respectivement par le Président de la République, le président du Sénat et le président de l'Assemblée nationale.

Par ailleurs, le vivier de recrutement des maîtres des requêtes en service extraordinaire au Conseil d'État et des conseillers référendaires en service extraordinaire à la Cour des comptes serait élargi.

b) Généraliser le recours aux contractuels

Poursuivant le mouvement lancé par l'article 16 de la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique, l'ordonnance ouvre de nombreuses fonctions au sein de l'encadrement supérieur de l'État à certains agents contractuels. Sont ainsi concernées les fonctions, y compris juridictionnelles, de maîtres des requêtes en service extraordinaire au Conseil d'État 17 ( * ) et celles de conseillers référendaires en service extraordinaire à la Cour des comptes 18 ( * ) . De manière inédite, les fonctions de magistrat des CRC sont ouvertes aux agents contractuels justifiant « d'au moins six années d'activités professionnelles les qualifiant particulièrement » pour leur exercice 19 ( * ) .

B. UN CALENDRIER DE MISE EN oeUVRE ENCORE INCERTAIN

1. Une entrée en vigueur au 1er janvier 2022 pour la plupart des dispositions

Les dispositions de la présente ordonnance entrent en vigueur le 1 er janvier 2022 20 ( * ) . Certaines dispositions modifiées par l'ordonnance continueront néanmoins de s'appliquer temporairement après l'entrée en vigueur de celle-ci, afin de garantir les principes de sécurité juridique et de confiance légitime.

2. Un chantier réglementaire complémentaire très attendu

Pas moins de dix-neuf mesures réglementaires sont attendues. Parmi elles, seul un décret a pour l'heure été publié au Journal officiel , à savoir le décret n° 2021-1216 du 22 septembre 2021 fixant la liste des corps et cadres d'emplois dont les membres peuvent être nommés auditeurs au Conseil d'État et à la Cour des comptes .

Le calendrier des mesures réglementaires a été précisé comme suit par le cabinet de la ministre de la transformation et de la fonction publiques 21 ( * ) :

- les décrets concernant respectivement le statut du corps des administrateurs de l'État, la création de l'INSP et la création de la DIESE 22 ( * ) devraient être pris d'ici la fin de l'année 2021 23 ( * ) ;

- les textes relatifs à la création de statuts d'emplois font actuellement l'objet d'une concertation avec les ministères intéressés et devraient paraître d'ici la fin de l'année 2021 ou le début de l'année 2022 ;

- les autres textes relatifs au périmètre de l'encadrement supérieur de l'État, aux lignes directrices de gestion interministérielle, au dialogue social, à l'évaluation et aux transitions professionnelles, sont en cours d'élaboration et seront adoptés au premier trimestre 2022 .

Les mesures réglementaires attendues

Article de l'ordonnance

Objet du décret

Article 1

Liste des emplois et agents concernés par les dispositions des articles 2, 3 et 4 de l'ordonnance

Article 2

Lignes directrices de gestion interministérielle

Article 3

Évaluation des agents publics

Article 4

Transition professionnelle des agents publics

Article 5

Organisation et fonctionnement de l'INSP

Article 6

Nominations, parcours et mobilités au sein des services d'inspection générale

Article 7

Nomination au grade de conseiller d'État

Liste des corps ou cadres d'emploi comparables au corps d'administrateurs de l'État à partir de laquelle les auditeurs au Conseil d'État peuvent être nommés

Nomination des maîtres des requêtes en service extraordinaire et élargissement du vivier de recrutement

Composition de la commission d'intégration (règle de la parité)

Application de la section « dispositions relatives au comité consultatif et à la commission d'intégration »

Recrutement des magistrats de TA-CAA parmi les membres du corps des administrateurs de l'État

Article de l'ordonnance

Objet du décret

Article 8

Liste des corps ou cadres d'emploi comparables au corps d'administrateurs de l'État à partir de laquelle les auditeurs à la Cour des comptes peuvent être nommés

Nomination des conseillers référendaires en service extraordinaire à la Cour des comptes et élargissement du vivier de recrutement

Obligation de mobilité statutaire pour l'accès au grade de conseiller maître

Nomination au grade de conseiller référendaire par la commission d'intégration

Recrutement des conseillers de CRC parmi les membres du corps des administrateurs de l'État

Ouverture du concours de magistrat de CRC

Article 9

Nouvelle procédure de recrutement de maîtres des requêtes en service extraordinaire au Conseil d'État et de conseillers référendaires en service extraordinaire à la Cour des comptes

Article 10

Statuts d'emploi

Source : commission des lois

III. ESTIMANT QUE LES CONDITIONS N'ÉTAIENT PAS RÉUNIES POUR APPRÉHENDER L'ORDONNANCE DANS TOUTE SA PORTÉE, LA COMMISSION N'A PAS ADOPTÉ LA PROPOSITION DE LOI VISANT À LA RATIFIER

La commission a jugé que la double incertitude affectant l'ordonnance du 2 juin 2021 portant réforme de l'encadrement supérieur de l'État ne lui permettait pas de se prononcer, à ce stade, sur la ratification.

En effet, l'ordonnance a fait l'objet de plusieurs questions prioritaires de constitutionnalité (QPC), déposées pendant l'été par l'Association des anciens élèves de l'ENA, l'Union syndicale des magistrats administratifs, le Syndicat de la juridiction administrative et l'Association des magistrats de la Cour des comptes. Lors de l'audience de jugement du 20 septembre 2021, le rapporteur public a proposé le renvoi d'une partie de ces QPC au Conseil constitutionnel.

Par ailleurs, à l'heure où la quasi-totalité des décrets d'application reste encore à paraître, il est apparu difficile à la commission de se prononcer sur des dispositions législatives qui prendront leur sens entier une fois l'important chantier réglementaire abouti.

Au surplus, le Gouvernement n'a pas à ce stade suffisamment clarifié sa position s'agissant des statuts de corps qu'il entendait supprimer , ni des statuts d'emploi qu'il entendait créer . Sur ce point, l'ordonnance ouvre en effet un champ des possibles particulièrement vaste et la commission s'est refusée à donner au Gouvernement un blanc-seing en la matière .

Ainsi, la commission a estimé qu'elle manquait de visibilité et qu'elle ne pouvait, en l'état, mener la réflexion de fond qu'impose une réforme d'une telle ampleur ; c'est pourquoi elle a décidé de ne pas adopter la proposition de loi . Le débat en séance publique, permis par le dépôt de cette proposition de loi, n'en constituera pas moins l'occasion précieuse, pour tous les membres de la Haute assemblée, de contraindre le Gouvernement à apporter toutes les précisions utiles sur sa réforme et de s'exprimer sur le sujet.

*

* *

La commission n'a pas adopté la proposition de loi. En application du premier alinéa de l'article 42 de la Constitution, la discussion portera en séance sur le texte initial de la proposition de loi.

Ce texte sera examiné en séance publique le 6 octobre 2021.

EXAMEN DE L'ARTICLE UNIQUE

Article unique
Ratification de l'ordonnance n° 2021-702 du 2 juin 2021 portant réforme
de l'encadrement supérieur de la fonction publique de l'État

L'article unique de la proposition de loi tend à ratifier l'ordonnance n° 2021-702 du 2 juin 2021 portant réforme de l'encadrement supérieur de la fonction publique de l'État.

Estimant que les conditions n'étaient pas réunies pour appréhender la portée exacte de l'ordonnance ainsi que les choix qu'elle permet au Gouvernement d'opérer en matière de statuts, la commission n'a pas adopté l'article unique de la proposition de loi.

1. Une ordonnance qui constitue le volet législatif d'une réforme annoncée depuis 2019 pour accroître la diversité des parcours et renforcer la culture commune de l'action publique

Dans son discours du 25 avril 2019 en clôture du grand débat national 24 ( * ) , le Président de la République a annoncé son intention de « supprimer, entre autres, l'ENA [...] pour bâtir quelque chose qui fonctionne mieux [...] », précisant : « Sur ce sujet, je ne crois pas du tout au rafistolage : [...] si vous gardez les mêmes structures, les habitudes sont trop fortes, les habitudes sont là ». Il a posé à cette occasion les jalons d'une réforme profonde de la haute fonction publique en identifiant trois axes : la diversification du mode de recrutement, l'ouverture de la haute fonction publique et la dynamisation de la gestion des carrières.

1.1. Les conclusions de la mission Thiriez

Confiée à Frédéric Thiriez 25 ( * ) , avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, la mission sur la réforme de la haute fonction publique a remis son rapport au Premier ministre le 18 février 2020 .

a) Décloisonner la haute fonction publique

Afin de lutter contre le « corporatisme » que favoriserait la multiplicité des corps et des écoles de service public, d'encourager les mobilités professionnelles et d'accroître la culture commune de l'action publique, il est apparu nécessaire à la mission Thiriez de « décloisonner » la fonction publique.

Le rapport propose ainsi d' instaurer une formation initiale commune pour les cadres supérieurs des trois versants de la fonction publique , d'une durée de six mois et dispensée aux lauréats des concours de l'École nationale d'administration (ENA), de l'Institut national des études territoriales (INET), de l'École nationale supérieure de sécurité sociale (EN3S), de l'École des hautes études en santé publique (EHESP), de l'École nationale de la magistrature (ENM), de l'École nationale supérieure de la police (ENSP) et de l'École nationale de l'administration pénitentiaire (ENAP), avant leur entrée dans ces différentes écoles d'application

En outre, le rapport Thiriez a souligné la nécessité de repenser le système dit des « grands corps » , qui, s'il est dépourvu d'une base juridique, bénéficie d'un ancrage très fort dans les esprits et les habitudes. Ainsi, les élèves sortis dans la « botte » 26 ( * ) deviennent membres du Conseil d'État, de la Cour des comptes, de l'Inspection générale des finances (IGF), de l'Inspection générale de l'administration (IGA) ou encore de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS).

Les actuels corps de sortie à l'issue de l'ENA

Tenant compte de la spécificité des corps juridictionnels , la mission a formulé deux propositions distinctes.

La mission a ainsi estimé possible de « fonctionnaliser » les corps d'inspection 27 ( * ) , c'est-à-dire, de supprimer les corps et de transformer les postes permanents des services d'inspection en emplois fonctionnels, afin de permettre aux services d'inspection de disposer de fonctionnaires connaissant bien le fonctionnement de l'administration, d'une part, et d'offrir en cours de carrière ces postes à des cadres supérieurs expérimentés, d'autre part. Dès lors, les emplois correspondants ne seraient plus proposés à l'issue de la scolarité à l'ENA, mais seraient réalloués aux administrations centrales de l'État ; les membres des inspections seraient recrutés par la voie du détachement à différents stades de la carrière, pour une durée déterminée, parmi les fonctionnaires de catégorie A ayant l'expérience requise 28 ( * ) .

En revanche, la fonctionnalisation des corps juridictionnels (Conseil d'État et Cour des comptes) se heurte à des obstacles constitutionnels et conventionnels majeurs ( voir encadré ci-dessous ). C'est pourquoi la proposition du rapport Thiriez 29 ( * ) vise à en différer l'accès , afin que les postes concernés ne soient plus offerts en sortie d'école, mais seulement accessibles au terme de quatre années de service en tant qu'administrateur civil ; la sélection serait assurée par un jury composé de membres du corps et de personnalités qualifiées, et présidé par une personnalité indépendante. Les candidats reçus seraient titularisés à ce qui correspond actuellement au deuxième grade du corps (maître des requêtes au Conseil d'État ; conseiller référendaire à la Cour des comptes).

Les obstacles constitutionnels et conventionnels
à la fonctionnalisation des corps juridictionnels

La suppression des grands corps juridictionnels et la transformation de leurs emplois en emplois susceptibles d'être occupés pour une durée déterminée en cours de carrière est exclue en raison de règles constitutionnelles et conventionnelles.

Les principes d'indépendance et d'inamovibilité des magistrats judiciaires 30 ( * ) , administratifs 31 ( * ) et financiers 32 ( * ) sont en effet constitutionnellement garantis et encadrent les conditions de gestion de leur carrière.

Par ailleurs, la Cour européenne des droits de l'homme a jugé que les garanties apportées contre l'ingérence de l'exécutif dans la gestion des carrières des membres du Conseil d'État sont des garanties essentielles au respect de l'indépendance de la juridiction 33 ( * ) et que les modalités de nomination et de déroulement des carrières des membres du Conseil d'État sont compatibles avec les exigences de l'article 6.1 de la convention.

b) Dynamiser les parcours de carrière

D'après les conclusions de la mission conduite par Frédéric Thiriez, le renforcement de l'attractivité des carrières publiques et la lutte contre les situations apparaissant comme acquises passent également par la dynamisation des parcours de carrière. À cette fin, le rapport Thiriez a notamment proposé d'affirmer le pilotage stratégique interministériel confié à la Direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP) 34 ( * ) en poursuivant la mutation engagée en 2016 35 ( * ) . La gestion renouvelée des carrières des cadres supérieurs doit s'appuyer, en outre, sur le renforcement de l'évaluation, de la formation et de l'accompagnement des cadres supérieurs 36 ( * ) . Enfin, alors que la mobilité au sein de la fonction publique de l'État s'établit à seulement 6,9 % par an 37 ( * ) , la mission Thiriez a suggéré de favoriser les mobilités interprofessionnelles, y compris avec le secteur privé 38 ( * ) .

En outre, le rapport Thiriez a souhaité tirer les conséquences de l'ouverture des emplois de direction aux contractuels , autorisée par la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique. Si l'article 16 de cette loi prévoit que « les agents contractuels nommés à ces emplois suivent une formation les préparant à leurs nouvelles fonctions, notamment en matière de déontologie ainsi que d'organisation et de fonctionnement des services publics », la mission Thiriez a souhaité augmenter les chances de réussite de cette mesure en intégrant les agents contractuels concernés à la formation à temps partiel prévue pour les fonctionnaires dans le futur Institut des hautes études du service public (IHESP) 39 ( * ) . Par ailleurs, la mission a estimé nécessaire de cibler , pour les recrutements de contractuels, des cadres dont les compétences peuvent apporter une valeur ajoutée, notamment dans les domaines de la communication, du numérique et des ressources humaines.

1.2. Du rapport à l'ordonnance

Si les propositions formulées par la mission Thiriez n'ont pas été immédiatement suivies d'effet après la remise du rapport, le Président de la République a confirmé, dans son discours du 8 avril 2021 prononcé à l'occasion de la convention managériale de l'État , la suppression de l'ENA et la création d'un Institut du service public, destiné à former les élèves administrateurs de l'État et à intégrer un tronc commun de formation à quatorze écoles de service public.

Alors que la mission Thiriez avait proposé des recommandations pour les trois versants de la fonction publique , l'ordonnance n°2021-702 du 2 juin 2021 se restreint à la réforme de l'encadrement supérieur de l'État seul ; elle n'en comporte pas moins des dispositions induisant une nette rupture avec le système hérité de l'ordonnance du 9 octobre 1945.

1.3. Un débat de ratification de l'ordonnance à l'initiative du Sénat

a) La nécessité d'une ratification expresse

Dans sa rédaction issue de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 , l'article 38 de la Constitution exige que la ratification des ordonnances soit explicite : « elles ne peuvent être ratifiées que de manière expresse ».

À ce titre, les décisions QPC du Conseil constitutionnel du 28 mai 2020 et du 3 juillet 2020 ont pu être perçues comme une remise en cause de l'obligation d'une ratification expresse. Dans ce contexte, la proposition de loi constitutionnelle garantissant le respect des principes de la démocratie représentative et de l'État de droit en cas de législation par ordonnance, déposée par Jean-Pierre Sueur et plusieurs de ses collègues au Sénat le 22 juillet 2021 40 ( * ) , propose notamment d'ajouter à l'article 38 de la Constitution la précision selon laquelle « les dispositions des ordonnances relevant du domaine législatif n'acquièrent force de loi qu'à compter de leur ratification expresse » 41 ( * ) .

Pour autant, la portée des décisions du Conseil constitutionnel évoquées semble circonscrite au cadre de la question prioritaire de constitutionnalité.

Les décisions du Conseil constitutionnel
du 28 mai et du 3 juillet 2020

Dans sa décision n°2020-843 QPC du 28 mai 2020 , le Conseil constitutionnel a rappelé que, « conformément au dernier alinéa de l'article 38 de la Constitution, à l'expiration du délai de l'habilitation [...], les dispositions de [l']ordonnance ne pouvaient plus être modifiées que par la loi dans les matières qui sont du domaine législatif » 42 ( * ) . De façon inédite , néanmoins, le Conseil en déduit qu' « à compter de cette date, elles doivent être regardées comme des dispositions législatives ». Or, ce terme fait écho à la notion de « disposition législative » qui figure à l'article 61-1 de la Constitution, relatif à la question prioritaire de constitutionnalité. Le Conseil constitutionnel a ainsi procédé à un revirement par rapport à la décision n° 2011-219 QPC du 10 février 2012 43 ( * ) , et s'est, pour l'avenir, reconnu compétent pour contrôler, par la voie de la QPC, la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des dispositions d'une ordonnance non ratifiée, à la double condition que ces dispositions interviennent dans des matières du domaine législatif et que le délai d'habilitation fixé par le Parlement ait expiré.

Dans la décision n°2020-851/852 QPC du 3 juillet 2020 , le Conseil constitutionnel a confirmé le revirement opéré dans la décision n° 2020-843 QPC précitée, tout en précisant l'étendue du contrôle qu'il lui appartient désormais d'exercer sur les dispositions d'une ordonnance non ratifiée en QPC : en ajoutant les termes de « au sens de l'article 61-1 de la Constitution » 44 ( * ) , le Conseil constitutionnel a effet précisé qu'il faisait ici référence à la notion de disposition législative telle qu'introduite par le constituant de 2008.

En revanche - et de manière inchangée -, il revient au Conseil d'État de contrôler la conformité de l'ordonnance aux autres règles et principes de valeur constitutionnelle, aux engagements internationaux de la France, aux limites fixées par le Parlement dans la loi d'habilitation et aux principes généraux du droit , ainsi qu'à des règles de compétence, de forme et de procédure. II peut ainsi l'annuler si elle est illégale pour l'un de ces motifs, quel que soit le sort réservé par le Conseil constitutionnel à une QPC qui lui aura été transmise.

b) La première discussion au Parlement d'une proposition de loi de ratification d'une ordonnance

Interrogée au Sénat lors de son audition par la commission des lois le 26 mai 2021 45 ( * ) , puis lors de la séance de questions d'actualité au Gouvernement du 2 juin 2021 46 ( * ) , la ministre de la transformation et de la fonction publiques, Amélie de Montchalin, n'a pas souhaité formuler d'engagement du Gouvernement à demander au Parlement une ratification expresse.

Si un projet de loi de ratification 47 ( * ) a été finalement déposé à l'Assemblée nationale dans le délai imparti de trois mois à compter de la publication de l'ordonnance, rien n'indique à ce stade que le Gouvernement inscrira ce texte à l'ordre du jour du Parlement.

Dans ce contexte, la présente proposition de loi, déposée par quatre présidents de groupes politiques (le groupe Les Républicains, le groupe Socialiste, écologiste et républicain, le groupe Union centriste et le groupe Écologiste - Solidarité et Territoires), le président de la commission des lois, François-Noël Buffet, et Jean-Pierre Sueur entend donner l'occasion au Sénat de débattre des choix faits par l'ordonnance, dans le cadre de la procédure de ratification.

2. Une ordonnance réformant en profondeur la conception et le fonctionnement de la haute fonction publique de l'État

L'ordonnance n° 2021-702 du 2 juin 2021 portant réforme de l'encadrement supérieur de la fonction publique de l'État comporte seize articles. Composée de trois chapitres, elle vise trois objectifs :

- dynamiser les parcours de carrière de l'encadrement supérieur ;

- adapter la formation initiale et continue aux enjeux nationaux et internationaux actuels ;

- décloisonner la haute fonction publique de l'État.

2.1. Les dispositions générales relatives à l'encadrement supérieur de l'État (chapitre I er )

Le chapitre I er , comprenant les articles 1 à 6, regroupe des dispositions générales relatives à l'encadrement supérieur de l'État.

a) La notion d'« encadrement supérieur de l'État »

L'article 1 er précise le périmètre visé en énumérant les agents concernés par ces dispositions.

Ainsi, les articles 2, 3 et 4 de l'ordonnance sont applicables :

- aux agents qui occupent, au sein des administrations de l'État, les emplois supérieurs dont la nomination est laissée à la décision du Gouvernement 48 ( * ) ;

- aux agents occupant les emplois de direction de l'État 49 ( * ) , dont la liste est fixée par un décret en Conseil d'État 50 ( * ) ;

- aux dirigeants des établissements publics de l'État exerçant la plus haute fonction exécutive mentionnée par les statuts de l'établissement, quel que soit leur titre et aux agents occupant dans ces établissements des fonctions exécutives de haut de niveau 51 ( * ) ;

- aux agents qui exercent des fonctions supérieures de direction, d'encadrement, d'expertise ou de contrôle leur donnant vocation à occuper les emplois de direction mentionnés ci-dessus ;

- aux agents dont la nature des missions et le niveau de responsabilité, de recrutement, d'expertise ou d'autonomie leur permettent de prétendre aux emplois mentionnés au deuxième et au quatrième alinéa du présent article 52 ( * ) .

Par conséquent, la notion d' « encadrement supérieur de l'État », ne relève pas d'une approche statutaire, mais regroupe à la fois des emplois, des corps, des grades et des fonctions.

À noter que la liste des emplois, corps, grades et fonctions concernées, ainsi que les critères de détermination des agents mentionnés aux deux derniers points devront être précisés par un décret en Conseil d'État .

b) Une gestion interministérielle des ressources humaines de l'État reposant sur les principes d'évaluation et de mobilité

L'article 2 de l'ordonnance vise à instaurer une gestion des ressources humaines de l'État à un niveau interministériel et reposant sur les principes d'évaluation, de mobilité et d'ouverture.

Il crée ainsi une stratégie pluriannuelle de l'État relative au pilotage des ressources humaines de l'encadrement supérieur, définie à partir des lignes directrices de gestion interministérielles 53 ( * ) édictées par le Premier ministre après consultation du Conseil supérieur de la fonction publique de l'État. Définissant notamment les modalités selon lesquelles l'accomplissement d'une mobilité peut conditionner la promotion de grade, les lignes directrices de gestion sont communiquées aux agents et rendues publiques .

En outre, afin de tenir compte des spécificités de l'encadrement supérieur , l'article 3 introduit de nouvelles modalités d'évaluation 54 ( * ) . Destinées à apprécier la qualité des pratiques professionnelles et l'aptitude des agents concernés à occuper des responsabilités de niveau supérieur, ces évaluations sont réalisées par des instances collégiales ministérielles ou interministérielles, qui peuvent recommander des mobilités . Le cadre d'accompagnement des agents pour lesquels une transition professionnelle serait recommandée à l'issue des évaluations est prévu par l'article 4 de l'ordonnance ; le recours à une rupture conventionnelle 55 ( * ) pourra notamment être proposé.

c) La création de l'Institut national du service public

L'article 5 de l'ordonnance crée l'Institut national du service public (INSP), établissement public de l'État à caractère administratif, placé sous la tutelle du Premier ministre et du ministre chargé de la fonction publique, et chargé d'assurer la formation initiale et continue du futur corps des administrateurs de l'État et d'autres corps de fonctionnaires ou de magistrats susceptibles d'exercer des fonctions d'encadrement supérieur dans la fonction publique de l'État.

L'INSP devra également organiser le tronc commun aux grandes écoles de service public , et pourra conduire des travaux de recherche en lien avec l'action publique.

Un décret en Conseil d'État précisera les règles relatives à l'organisation et au fonctionnement de l'INSP ; le décret fixant la liste des corps de fonctionnaires ou de magistrats comparables avec le corps des administrateurs de l'État a été publié au Journal officiel du 23 septembre 2021 56 ( * ) .

d) La fonctionnalisation des inspections générales

L'article 6 de l'ordonnance ouvre la voie à la fonctionnalisation des emplois au sein des services d'inspection générale (Inspection générale de l'administration, Inspection générale des affaires sociales et Inspection générale des finances), qui seront occupés par des « agents exerçant des fonctions d'inspection générale au sein de services d'inspection générale, recrutés, nommés et affectés pour une durée renouvelable ».

Les corps des inspections générales devenant ainsi des services , leurs chefs et leurs agents se verront appliquer des garanties d'indépendance et d'impartialité inscrites au niveau législatif 57 ( * ) ; les cas où il pourra être mis fin aux fonctions des chefs de services et aux agents exerçant des missions d'inspection générale sont au nombre de trois : s'ils en font la demande ; en cas d'empêchement ; et en cas de manquement à leurs obligations déontologiques 58 ( * ) .

À noter que le statut des agents qui sont aujourd'hui membres des corps d'inspection est inchangé, l'ordonnance modifiant seulement les règles s'appliquant aux recrutements, nominations et affectations à partir du 1 er janvier 2022.

2.2. Les dispositions relatives au recrutement et à la mobilité des membres des juridictions administratives et financières (chapitre II)

Le chapitre II de l'ordonnance, comprenant les articles 7 à 9, contient des dispositions relatives au recrutement et à la mobilité des membres du Conseil d'État, des magistrats de tribunal administratif et de cour administrative d'appel (TA-CAA), des magistrats de la Cour des comptes et des magistrats des chambres régionales et territoriales des comptes (CRC). Ces mesures visent principalement à différer l'accès aux fonctions juridictionnelles ; renforcer les mobilités ; et ouvrir le recrutement.

a) Différer l'accès aux fonctions juridictionnelles

L'ordonnance réforme l'accès aux fonctions juridictionnelles, en réservant un traitement distinct au Conseil d'État et à la Cour des comptes, d'une part, et aux tribunaux administratifs et cours administratives d'appel et aux chambres régionales des comptes, d'autre part.

• Le statut d'emploi d'auditeur au Conseil d'État et à la Cour des comptes

Les articles 7 et 8 de l'ordonnance mettent fin à la nomination, à l'issue de la scolarité à l'École nationale d'administration (ENA), des auditeurs au Conseil d'État 59 ( * ) et à la Cour des comptes 60 ( * ) , et remplacent ces grades d'auditeurs par des statuts d'emploi d'auditeur d'une durée maximale de trois ans, accessibles aux administrateurs de l'État et aux membres des corps et cadres d'emplois de niveau comparable 61 ( * ) et justifiant au moins deux ans d'expérience préalable 62 ( * ) .

Un comité consultatif sera chargé d'émettre un avis sur l'aptitude des candidats à exercer les fonctions d'auditeur, compte tenu notamment de leur capacité à acquérir les compétences requises « pour l'exercice des fonctions consultatives et contentieuses au sein du Conseil d'État 63 ( * ) » ou celui « des fonctions de magistrats au sein des juridictions financières 64 ( * ) » , et « à participer à délibérations collégiales ». Pour cela, il auditionnera les candidats qu'il aura sélectionnés après examen de leur dossier.

Ce comité consultatif comprendra deux membres du Conseil d'État en exercice , nommés par le vice-président du Conseil d'État - ou deux magistrats de la Cour des compte nommés par le Premier président -, et deux personnes « particulièrement qualifiées en raison de leurs compétences respectives dans les domaines du droit et des ressources humaines 65 ( * ) » - ou dans ceux « des finances publiques et de l'évaluation des politiques publiques, et des ressources humaines », nommées respectivement par le Premier ministre 66 ( * ) et par le vice-président du Conseil d'État 67 ( * ) - ou par le premier président de la Cour des comptes.

Des garanties d'indépendance seront octroyées aux auditeurs au Conseil d'État et à la Cour des compte ; il ne pourra ainsi être mis fin à leurs fonctions que pour motif disciplinaire et sur proposition respective de la commission supérieure du Conseil d'État 68 ( * ) et du Conseil supérieur de la Cour des comptes 69 ( * )

• Le recrutement des conseillers de TA-CAA et de CRC

Les articles 7 et 8 modifient également les modalités de recrutement des conseillers de TA-CAA et de CRC.

Dans leur rédaction actuelle, les articles L. 233-2 du code de justice administrative et L. 221-3 du code des juridictions financières mentionnent l'ENA comme le seul mode de recrutement de principe des magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, d'une part, et des conseillers de chambre régionale des comptes, d'autre part ; l'ordonnance modifie ces articles afin de mentionner également la voie du concours (interne et externe), et y adjoint respectivement les dispositions figurant actuellement aux articles L. 233-6 du code de justice administrative et L. 221-11 du code des juridictions financières.

En outre, l'ordonnance diffère l'affectation des élèves de l'Institut national du service public (INSP) ayant fait le choix de rejoindre le corps des magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ou celui des conseillers de chambre régionale des comptes : ils ne rejoindront désormais plus ceux-ci directement à l'issue de leur scolarité, mais seront d'abord affectés dans le corps des administrateurs de l'État, où ils devront exercer pendant au moins deux ans ; ils pourront ensuite être affectés dans le corps des magistrats de TA-CAA ou de CRC au grade de conseiller.

Une dérogation est toutefois prévue pour les élèves de l'INSP qui justifient d'une expérience professionnelle (dans le secteur public comme privé) d'une durée d'au moins quatre ans : ceux-ci pourront rejoindre directement le corps des magistrats de TA-CAA ou celui des magistrats de CRC.

b) De nouvelles modalités d'intégration au Conseil d'État et à la Cour des comptes

• Les nouvelles modalités d'intégration aux grades de maître des requêtes au Conseil d'État et de conseiller référendaire à la Cour des comptes

Les grades d'auditeur étant supprimés et transformés en statuts d'emploi, l'entrée dans le corps du Conseil d'État, d'une part, et dans celui de la Cour des comptes, d'autre part, se fera aux grades respectifs de maître des requêtes au Conseil d'État et de conseiller référendaire à la Cour des comptes , selon des modalités précisées par l'ordonnance.

À cette fin, un rôle déterminant est confié à la commission d'intégration créée aux articles L. 133-12-3 du code de justice administrative et L. 122-9 du code des juridictions financières, et qui comprend :

- le vice-président du Conseil d'État (ou le premier président de la Cour des comptes) ;

- un membre du Conseil d'État en exercice ayant au moins le grade de conseiller d'État et un membre du Conseil d'État en exercice ayant le grade de maître des requêtes, nommés par le vice-président du Conseil d'État (ou un magistrat de la Cour des comptes en exercice ayant au moins le grade de conseiller maître et un magistrat de la Cour des comptes en exercice ayant le grade de conseiller référendaire, nommés par le premier président de la Cour des comptes) ;

- une personne particulièrement qualifiée en raison de ses compétences dans le domaine des ressources humaines, nommée par le Président de la République ;

- une personne particulièrement qualifiée en raison de ses compétences dans le domaine de l'action publique, nommée par le président de l'Assemblée nationale et une personne particulièrement qualifiée en raison de ses compétences dans le domaine du droit, nommée par le président du Sénat (ou deux personnes particulièrement qualifiées en raison de leurs compétences dans le domaine des finances publiques et de l'évaluation des politiques publiques, nommées par le président de l'Assemblée nationale et celui du Sénat).

La commission d'intégration propose la nomination au grade de maître des requêtes (ou de conseiller référendaire) des auditeurs et des maîtres des requêtes (ou des conseillers référendaires) en service extraordinaire , après audition des candidats. À l'issue des auditions, la commission arrête la liste des candidats par ordre de mérite dans la limite du nombre fixé par le vice-président du Conseil d'État (ou par le premier président de la Cour des comptes).

Par ailleurs, l'ordonnance encadre ces nominations en prévoyant que :

- la moitié au moins des nominations dans les grades de maître des requêtes au Conseil d'État et de conseiller référendaire à la Cour des comptes sont réservées aux auditeurs exerçant cette fonction depuis trois ans 70 ( * ) ;

- au moins une nomination au grade de maître des requêtes au Conseil d'État, et de conseiller référendaire à la Cour des comptes, sont réservées respectivement à un maître des requêtes en service extraordinaire et à un conseiller référendaire recrutés en application de la procédure introduite à l'article 9 de l'ordonnance (voir plus bas) ;

- au moins deux membres du corps des magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ayant atteint le grade de premier conseiller sont nommés au grade de maître des requêtes au Conseil d'État par an 71 ( * ) ;

- au moins un magistrat de chambre régionale des compte ayant le grade de premier conseiller est nommé conseiller référendaire à la Cour des comptes par an 72 ( * ) .

En outre, le tour extérieur du Gouvernement pour les accès respectifs aux grades de maîtres des requêtes au Conseil d'État 73 ( * ) et de conseiller référendaire à la Cour des comptes 74 ( * ) est supprimé .

• Les nouvelles modalités d'accès aux grades de conseiller d'État et de conseiller maître à la Cour des comptes

L'ordonnance modifie également l'accès aux grades supérieurs des corps du Conseil d'État et de la Cour des comptes , en prévoyant la nomination chaque année :

- comme conseiller d'État, d'au moins une personne « dont les compétences et les activités dans le domaine du droit ou de l'action publique la qualifient particulièrement pour l'exercice de ces fonctions, qui remplit les conditions prévues à l'article 5 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et justifie d'au moins vingt ans d'activité professionnelle 75 ( * ) » ;

- comme conseiller maître, d'au moins une personne « dont les compétences et les activités dans le domaine des finances publiques ou de l'évaluation des politiques publiques la qualifient particulièrement pour l'exercice de ces fonctions, qui remplit les conditions prévues à l'article 5 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et justifie d'au moins vingt ans d'activité professionnelle 76 ( * ) ».

Cette nomination intervient sur proposition du vice-président du Conseil d'État ou du premier président de la Cour des comptes, après avis de la commission d'intégration .

• La création d'une voie d'accès au Conseil d'État et à la Cour des comptes à un stade ultérieur de la carrière

L'article 9 permet aux personnes justifiant d'une durée minimale, fixée par décret et au moins égale à six ans de services publics effectifs en qualité d'administrateur de l'État , de rejoindre le Conseil d'État et la Cour des comptes en tant que maîtres des requêtes en service extraordinaire au Conseil d'État ou de conseillers référendaires en service extraordinaire à la Cour des comptes, selon une procédure de sélection confiée à l'INSP .

L'article prévoit que les candidats sélectionnés exercent leur choix entre les postes offerts par ordre de mérite, et que le nombre des recrutements effectués par la voie de cette procédure est fixé annuellement par arrêté du Premier ministre, sur proposition du vice-président du Conseil d'État ou du premier président de la Cour des comptes.

Enfin, l'article encadre les modalités d'intégration aux corps respectifs du Conseil d'État et de la Cour des comptes des maîtres des requêtes en service extraordinaire et des conseillers référendaires en service extraordinaire recrutés au titre de cette procédure.

c) De nouvelles obligations de mobilités pour les membres des juridictions administratives et financières

Par ailleurs, l'ordonnance introduit de nouvelles obligations de mobilité pour les magistrats administratifs et financiers.

Ainsi, une mobilité statutaire obligatoire est instaurée aux grades de maître des requêtes au Conseil d'État 77 ( * ) , de conseiller de tribunal administratif et de cours administrative d'appel (TA-CAA) 78 ( * ) , de conseiller référendaire à la Cour des comptes 79 ( * ) et de conseiller de chambre régionale et territoriale des comptes (CRC), afin d'accéder aux grades respectifs de conseiller d'État, de premier conseiller de TA-CAA, de conseiller maître à la Cour des comptes et de premier conseiller de CRC.

De nouveaux parcours au sein des corps juridictionnels

En outre, les conditions de mobilité statutaire obligatoire aux grades de premier conseiller de TA-CAA et de premier conseiller de CRC , conditionnant l'accès aux grades respectifs de président de chambre et de président de section, sont rendues plus strictes . L'ordonnance prévoit en effet que cette mobilité ne puisse désormais plus être effectuée , pour les premiers conseillers de TA-CAA, dans une cour administrative d'appel 80 ( * ) , ou, pour les premiers conseillers de CRC, dans une chambre régionale ou territoriale des comptes 81 ( * ) .

De ces mesures renforçant les obligations de mobilité, découle l'assouplissement du régime des incompatibilités pour les magistrats administratifs . Le 14° de l'article 7 de l'ordonnance modifie ainsi l'article L. 231-5 du code de justice administrative afin que l'exercice des fonctions de représentant de l'État dans un département, ou de délégué de celui-ci dans un arrondissement, ou de directeur régional ou départemental d'une administration publique de l'État ne fasse plus obstacle à la nomination d'un membre d'un tribunal administratif ou d'une cour administrative d'appel. De la même façon, l'exercice de la fonction de direction dans l'administration d'une collectivité territoriale ne sera plus un motif d'incompatibilité ; seul le sera l'exercice de la fonction de directeur général des services dans l'administration d'une collectivité territoriale de plus de 100 000 habitants.

En conséquence de l'assouplissement du régime des incompatibilités, un nouvel article L. 231-5-1 du code de justice administrative formalise l'obligation de déport , pendant une période de trois ans, des magistrats ayant exercé les fonctions de délégué du préfet dans un arrondissement, une fonction de directeur départemental ou régional d'une administration de l'État ou une fonction de direction dans l'administration d'une collectivité territoriale, pour le jugement des affaires concernant les décisions prises par les services au sein desquels ils exerçaient leurs fonctions ou sur lesquels ils avaient autorité. Le même article prévoit également que le collège de déontologie de la juridiction administrative rende un avis sur l'affectation d'un magistrat en cas de risques de conflits d'intérêts.

d) L'élargissement des viviers de recrutement et l'ouverture de l'exercice des fonctions juridictionnelles

Les catégories de personnes pouvant, en l'état actuel du droit, être nommées maîtres des requêtes en service extraordinaire au Conseil d'État, conseillers d'État en service extraordinaire, conseillers référendaires en service extraordinaire à la Cour des comptes, ou encore conseillers maîtres en service extraordinaire à la Cour des comptes, sont détaillées dans le tableau qui suit.

Conseil d'État

Maître des requêtes
en service extraordinaire

Conseiller d'État
en service extraordinaire

« Des fonctionnaires appartenant à un corps recruté par la voie de l'École nationale d'administration, des magistrats de l'ordre judiciaire, des professeurs et maîtres de conférences titulaires des universités, des administrateurs des assemblées parlementaires, des administrateurs des postes et télécommunications, des fonctionnaires civils ou militaires de l'État, de la fonction publique territoriale ou de la fonction publique hospitalière appartenant à des corps ou à des cadres d'emplois de niveau comparable ainsi que des fonctionnaires de l'Union européenne de niveau comparable peuvent être nommés par le vice-président du Conseil d'État pour exercer, en qualité de maître des requêtes en service extraordinaire, les fonctions dévolues aux maîtres des requêtes pour une durée qui ne peut excéder quatre ans 82 ( * ) ».

« ... II. - Les conseillers d'État en service extraordinaire nommés pour exercer des fonctions consultatives sont choisis parmi les personnalités qualifiées dans les différents domaines de l'activité nationale. Ils sont nommés après avis du vice-président du Conseil d'État.

III. - Les conseillers d'État en service extraordinaire nommés pour exercer des fonctions juridictionnelles sont choisis parmi les personnes que leur compétence et leur activité dans le domaine du droit qualifient particulièrement pour l'exercice de ces fonctions. Ils doivent remplir les conditions prévues à l' article 5 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et justifier de vingt-cinq années au moins d'activité professionnelle. Ils sont nommés sur proposition d'un comité présidé par le vice-président du Conseil d'État et composé, en outre, d'un nombre égal de personnalités qualifiées et de membres du Conseil d'État, désignés par le vice-président du Conseil d'État 83 ( * ) [...] »

Cour des comptes

Conseiller référendaire
en service extraordinaire

Conseiller maître
en service extraordinaire

« Des personnes dont l'expérience et l'expertise particulières sont nécessaires aux activités et missions de la Cour des comptes peuvent être nommées conseillers maîtres en service extraordinaire, dans la limite de six 84 ( * ) ».

Elles « sont nommé[e]s par décret, sur proposition du premier président de la Cour des comptes, pour une période de trois ans renouvelable une fois 85 ( * ) ».

« Des fonctionnaires appartenant au corps de contrôle des ministères ou des personnes ayant exercé des fonctions d'encadrement supérieur au sein de l'État ou d'organismes soumis au contrôle des juridictions financières peuvent être nommés conseillers maîtres en service extraordinaire en vue d'assister la Cour des comptes dans l'exercice de ses compétences. Leur nombre ne peut être supérieur à douze 86 ( * ) ».

« Des personnes dont l'expérience et l'expertise particulières sont nécessaires aux activités et missions de la Cour des comptes peuvent être nommées conseillers référendaires en service extraordinaire, dans la limite de six 87 ( * ) ».

Elles « sont nommé[e]s par décret pris en conseil des ministres, sur proposition du premier président de la Cour des comptes, pour une période de cinq ans non renouvelable 88 ( * ) ».

L'ordonnance élargit ces viviers de recrutement, en prévoyant que :

- des « personnes dont la qualification et l'expertise particulières sont utiles aux activités et aux missions du Conseil d'État 89 ( * ) » pourront être nommées maîtres des requêtes en service extraordinaire au Conseil d'État ;

- des « agents de direction et des agents comptables des organismes de sécurité sociale, ainsi [que des] personnes dont la qualification et l'expertise particulières sont nécessaires aux activités et aux missions de la Cour des comptes 90 ( * ) » pourront être nommés conseillers référendaires en service extraordinaire à la Cour des comptes 91 ( * ) .

En outre, l'article 8 prévoit que les conseillers maîtres en service extraordinaire et que les conseillers référendaires en service extraordinaire de la Cour des comptes puissent désormais exercer des fonctions juridictionnelles 92 ( * ) .

Enfin, l'ordonnance dispose que les fonctions de magistrat des chambres régionales des comptes peuvent être exercées par des agents contractuels justifiant d'une expérience professionnelle d'au moins six ans « nécessaire aux activités et [aux] missions des chambres régionales et territoriales des comptes 93 ( * ) ».

2.3. Les dispositions diverses, transitoires et finales (chapitre III)

Le chapitre III de l'ordonnance, comprenant les articles 10 à 16, contient à la fois des dispositions relatives à la généralisation des statuts d'emplois dans l'encadrement supérieur dans la fonction publique de l'État, et des dispositions transitoires et finales.

a) La généralisation des statuts d'emplois

L'article 10 de l'ordonnance prévoit d'insérer un article 10 bis à la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État afin de permettre à certains statuts d'emplois de déroger à certaines dispositions du statut général qui ne correspondraient pas aux besoins des missions que les agents exerçant ces emplois, fonctionnaires ou contractuels, sont destinés à assurer.

Comme le souligne Marcel Pochard, « l'existence de statuts d'emplois n'est pas expressément prévue par la loi, et c'est sur la base des seules dispositions du statut général permettant, pour certains corps, en raison de leurs besoins propres, de déroger à certaines dispositions de la loi [...] que de tels statuts ont vu le jour, et que le Conseil d'État en a admis la légalité 94 ( * ) » 95 ( * ) .

Qualifié de mesure d'organisation du service 96 ( * ) , le statut d'emploi doit ainsi être distingué du statut de corps. Il permet ainsi d'assurer une adéquation plus fine entre les compétences détenues par certains agents et l'exercice de missions très spécifiques.

Limitée aux « dispositions du statut général qui ne correspondraient pas aux besoins des missions que les titulaires de ces emplois sont destinés à assurer », la dérogation permise par l'article 10 est encadrée.

b) Les dispositions transitoires

L'article 11 de l'ordonnance fixe la date d'entrée en vigueur de l'ordonnance au 1 er janvier 2022 , à l'exception :

- des dispositions de l'article 5, qui entrent en vigueur selon les modalités définies par le décret en Conseil d'État prévu à cet article et au plus tard le 1 er janvier 2022 ;

- et des dispositions de l'article 9, qui entrent en vigueur au 1 er janvier 2023.

L'article 12 prévoit les modalités juridiques de substitution de l'INSP à l'ENA suivantes :

- les biens, droits, et obligations de l'École nationale d'administration sont transférés à l'Institut national du service public selon les modalités et le calendrier du décret en Conseil d'État mentionné à l'article 5 ;

- à compter de la date d'entrée en vigueur du décret en Conseil d'État mentionné à l'article 5 et au plus tard le 1 er janvier 2022, la référence à l'École nationale d'administration est remplacée par la référence à l'Institut national du service public dans tous les textes législatifs et réglementaires en vigueur.

L'article 13 fixe les dispositions transitoires propres aux juridictions administratives.

• La procédure de recrutement applicable aux auditeurs au Conseil d'État

L'article 13 prévoit que les auditeurs nommés au Conseil d'État jusqu'au 1 er janvier 2023 restent régis par les dispositions des articles L. 121-2, L. 133-5 et L. 133-6 du code de justice administrative dans leur rédaction antérieure.

Des auditeurs recrutés selon les modalités prévues à l'article L. 133-5 du code de justice administrative, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance, pourront être nommés à compter du 1 er janvier 2022.

• L'intégration au grade de maître des requêtes

Les auditeurs nommés au Conseil d'État jusqu'au 1er janvier 2023 ne sont pas concernés par les nouvelles modalités d'intégration au grade de maître de requêtes prévues par l'article L. 133-12-4 ; ils sont ainsi nommés à ce grade après avoir accompli trois ans dans le grade d'auditeur.

Par ailleurs, la disposition de l'article L. 133-4 du code de justice administrative, selon laquelle la moitié au moins des nominations dans le grade de maître des requêtes est réservée aux auditeurs exerçant cette fonction depuis trois ans, entrera en vigueur le 1 er janvier 2025 seulement.

Les maîtres des requêtes en service extraordinaire nommés avant le 1 er janvier 2022 restent soumis, pour l'intégration au grade de maître des requêtes, aux conditions prévues au dernier alinéa de l'article L. 133-4 du code de justice administrative, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance.

• L'accès au grade de conseiller d'État

Les maîtres des requêtes qui, sous l'empire des dispositions antérieures à l'entrée en vigueur de l'ordonnance, remplissent les conditions pour être nommés au grade de conseiller d'État au 1 er janvier 2027, demeurent régis par ces dispositions.

Les dispositions des articles L. 133-3, L. 133-3-1, L. 133-3-2 et L. 133-7 du code de justice administrative, dans leur rédaction issue de l'ordonnance, s'appliquent aux nominations dans le grade de conseiller d'État prononcées à compter du 1 er janvier 2023 ; jusqu'à cette date, les dispositions des articles L. 133-3 et L. 133-7, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance, demeurent applicables.

Les périodes accomplies au titre de la mobilité en qualité d'auditeur ou de maître des requêtes ainsi que les périodes accomplies par des maîtres des requêtes en position de détachement ou de mise à disposition dans des fonctions à l'extérieur du Conseil d'État antérieurement à l'entrée en vigueur de la présente ordonnance sont réputées accomplies au titre de la mobilité statutaire pour l'application de l'article L. 133-3 du code de justice administrative dans sa rédaction résultant de l'ordonnance.

• L'accès au grade de premier conseiller de TA-CAA

Les dispositions de l'article L. 234-2-1 du code de justice administrative, dans leur rédaction issue de l'ordonnance, sont applicables aux conseillers des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel recrutés après le 1 er janvier 2023.

Les périodes accomplies au titre de la mobilité, en qualité de conseiller, par les conseillers recrutés jusqu'au 1 er janvier 2023, sont réputées accomplies au titre de l'obligation de mobilité statutaire, prévue à l'article L. 234-2-2 du code de justice administrative.

• L'accès au grade de président de chambre de TA-CAA

Les premiers conseillers de tribunal administratif et de cour administrative d'appel qui, sous l'empire des dispositions antérieures à l'entrée en vigueur de l'ordonnance, remplissent les conditions pour être nommés au grade de président au 1 er janvier 2027, demeurent régis par ces dispositions.

Les périodes accomplies au titre en qualité de premier conseiller, par les premiers conseillers recrutés jusqu'au 1 er janvier 2023, sont réputées accomplies au titre de l'obligation de mobilité statutaire, prévue à l'article L. 234-2-2 du code de justice administrative.

L'article 14 fixe les dispositions transitoires propres aux juridictions financières.

• La procédure de recrutement applicable aux auditeurs à la Cour des comptes

Les auditeurs nommés à la Cour des comptes jusqu'au 1 er janvier 2023 restent régis par les dispositions de l'article L. 112-1 du code des juridictions financières.

Des auditeurs recrutés selon les modalités prévues à l'article L. 112-3-1 du code des juridictions financières, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance, pourront être nommés à compter du 1 er janvier 2022.

• L'intégration au grade de conseiller référendaire

Les auditeurs nommés à la Cour des comptes jusqu'au 1 er janvier 2023 ne sont pas concernés par les nouvelles modalités d'intégration au grade de conseiller référendaire prévues par l'article L. 122-10.

La disposition de l'article 122-5 du code des juridictions financières, selon laquelle la moitié au moins des nominations dans le grade de conseiller référendaire est réservée aux auditeurs exerçant cette fonction depuis trois ans, entrera en vigueur le 1 er janvier 2025 seulement.

• L'accès au grade de conseiller maître

Les périodes accomplies au titre de la mobilité en qualité d'auditeur ou de conseiller référendaire ainsi que les périodes accomplies par des conseillers référendaires en position de détachement ou de mise à disposition dans des fonctions à l'extérieur de la Cour des comptes antérieurement à l'entrée en vigueur de l'ordonnance sont réputées accomplies au titre de la mobilité statutaire pour l'application de l'article L. 122-3 du code des juridictions financières dans sa rédaction résultant de l'ordonnance.

Les conseillers référendaires qui, sous l'empire des dispositions antérieures à l'entrée en vigueur de la présente ordonnance, remplissent les conditions pour être nommés au grade de conseiller maître au 1 er janvier 2027, demeurent régis par ces dispositions.

• L'accès au grade de premier conseiller de CRC

Les dispositions du II de l'article L. 221-2-1 du code des juridictions financières sont applicables aux conseillers de chambre régionale des comptes recrutés après le 1 er janvier 2023.

• L'accès au grade de président de section de CRC

Les premiers conseillers de chambre régionale des comptes qui, sous l'empire des dispositions antérieures à l'entrée en vigueur de l'ordonnance, remplissent les conditions pour être nommés au grade de président de section au 1 er janvier 2027, demeurent régis par ces dispositions.

c) Les dispositions finales

L'article 15 prévoit l'abrogation, à compter de la date d'entrée en vigueur de l'INSP et au plus tard le 1 er janvier 2022, de l'ordonnance n° 45-2283 du 9 octobre 1945 relative à la formation, au recrutement et au statut de certaines catégories de fonctionnaires et instituant une direction de la fonction publique et un conseil permanent de l'administration civile.

L'article 15 tend également à modifier l'article 8 de la loi n°84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public, afin de :

- maintenir la possibilité de pourvoir, pour certains corps, aux vacances d'emploi dans le grade d'inspecteur général ou de contrôleur général sans condition autre que d'âge ;

- et supprimer, à compter du 1 er janvier 2023, la mention des « membres du corps concerné élus par leurs pairs » au sein de la composition de la commission chargée d'apprécier l'aptitude des candidats à l'exercice de ces fonctions.

Enfin, l'article 15 abroge, à compter du 1 er janvier 2023, l'article 2 de la loi n° 94-530 du 28 juin 1994 relative à certaines modalités de nomination dans la fonction publique de l'État et aux modalités d'accès de certains fonctionnaires ou anciens fonctionnaires à des fonctions privées, qui prévoit des modalités de recrutement dans certains corps dont les modalités ont vocation à évoluer dans le cadre de l'ordonnance ou par voie réglementaire 97 ( * ) .

3. Au regard des incertitudes d'ordre réglementaire et jurisprudentiel pesant sur l'appréciation du texte, la commission n'a pas adopté la proposition de loi

La commission a jugé que la double incertitude affectant l'ordonnance du 2 juin 2021 portant réforme de l'encadrement supérieur de l'État ne lui permettait pas de se prononcer, à ce stade, sur la ratification.

En effet, l'ordonnance a fait l'objet de plusieurs questions prioritaires de constitutionnalité (QPC), déposées pendant l'été par l'Association des anciens élèves de l'ENA, l'Union syndicale des magistrats administratifs, le Syndicat de la juridiction administrative ainsi que l'Association des magistrats de la Cour des comptes. Lors de l'audience de jugement du 20 septembre 2021, le rapporteur public a proposé le renvoi au Conseil constitutionnel des QPC concernant les quatre ensembles de dispositions suivants :

- l'article 6 de l'ordonnance sur l'indépendance des services d'inspection générale ;

- les dispositions relatives à la composition de la commission d'intégration, chargée notamment de se prononcer sur l'intégration des nouveaux auditeurs au Conseil d'État et à la Cour des comptes ;

- les dispositions définissant le statut des futurs auditeurs ;

- les dispositions élargissant le vivier de recrutement des maîtres des requêtes en service extraordinaire au Conseil d'État.

Par ailleurs, à l'heure où la quasi-totalité des décrets d'application reste encore à paraître, il est apparu difficile à la commission de se prononcer sur des dispositions législatives qui prendront leur sens entier une fois l'important chantier réglementaire abouti.

Au surplus, le Gouvernement n'a pas à ce stade suffisamment clarifié sa position s'agissant des statuts de corps qu'il entendait supprimer , ni des statuts d'emploi qu'il entendait créer . Sur ce point, l'ordonnance ouvre en effet un champ des possibles particulièrement vaste et la commission s'est refusée à donner au Gouvernement un blanc-seing en la matière.

Ainsi, la commission a estimé qu'elle manquait de visibilité et qu'elle ne pouvait, en l'état, mener la réflexion de fond qu'impose une réforme d'une telle ampleur ; c'est pourquoi elle a décidé de ne pas adopter la proposition de loi . Le débat en séance publique, permis par le dépôt de cette proposition de loi, n'en constituera pas moins l'occasion précieuse, pour tous les membres de la Haute assemblée, de contraindre le Gouvernement à apporter toutes les précisions utiles sur sa réforme et de s'exprimer sur le sujet.

La commission n'a pas adopté l'article unique de la proposition de loi.

*

* *

La commission des lois n'a pas adopté la proposition de loi n° 807 (2020-2021) tendant à permettre l'examen par le Parlement de la ratification de l'ordonnance n° 2021-702 du 2 juin 2021 portant réforme de l'encadrement supérieur de la fonction publique de l'État.

En conséquence, en application du p remier alinéa de l'article 42 de la Constitution , la discussion portera en séance sur le texte initial de la proposition de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

__________

MERCREDI 29 SEPTEMBRE 2021

M. François-Noël Buffet , président . - Nous examinons le rapport de Catherine Di Folco sur la proposition de loi tendant à permettre l'examen par le Parlement de la ratification de l'ordonnance n° 2021-702 du 2 juin 2021 portant réforme de l'encadrement supérieur de la fonction publique de l'État, présentée par Bruno Retailleau, Patrick Kanner, Hervé Marseille, Guillaume Gontard, Jean-Pierre Sueur et moi-même.

Mme Catherine Di Folco , rapporteur . - Cette proposition de loi ne comporte qu'un seul article, qui porte sur la ratification de l'ordonnance. Mon exposé sera structuré en trois points : la genèse de l'ordonnance, son contenu et mes conclusions.

Premièrement, cette ordonnance constitue le volet législatif d'une réforme annoncée depuis 2019. En effet, dans le discours qu'il a prononcé le 25 avril 2019, en clôture du Grand débat national, le Président de la République a annoncé son intention de « supprimer entre autres l'ENA », pour « bâtir quelque chose qui fonctionne mieux ». Il a posé, à cette occasion, les jalons d'une réforme profonde de la haute fonction publique, en identifiant trois axes : la diversification du mode de recrutement, l'ouverture de la haute fonction publique et la dynamisation de la gestion des carrières.

De plus, une mission sur la réforme de la haute fonction publique a été confiée en mai 2019 à Frédéric Thiriez, qui a remis son rapport au Premier ministre en février 2020.

Enfin, dans son discours du 8 avril 2021, prononcé à l'occasion de la Convention managériale de l'État, le Président de la République a confirmé, sur le fondement des conclusions de la mission Thiriez, la suppression de l'ENA et la création d'un Institut national du service public (INSP), destiné à former les élèves administrateurs de l'État.

L'ordonnance du 2 juin 2021 s'inspire ainsi, mais en partie seulement, du rapport de cette mission ; elle n'en comporte pas moins des dispositions induisant une nette rupture avec le système hérité de l'ordonnance du 9 octobre 1945.

Elle découle de l'article 59 de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique, qui a habilité le Gouvernement à prendre par ordonnances toute mesure relevant du domaine de la loi, notamment pour « réformer les modalités de recrutement des corps et cadres d'emplois de catégorie A », « diversifier leurs profils », « harmoniser leur formation », « créer un tronc commun d'enseignements », « développer leur formation continue », « accroître leur culture commune de l'action publique », « aménager leur parcours de carrière en adaptant les modes de sélection et en favorisant les mobilités au sein de la fonction publique et vers le secteur privé ».

Je dois toutefois préciser que, si cet article 59 a ouvert un large champ d'habilitation, les garde-fous qu'il comporte - le respect du principal égal accès aux emplois publics, fondé « sur les capacités et le mérite », ainsi que la prise en compte « des spécificités des fonctions juridictionnelles » - sont largement issus de la rédaction adoptée par le Sénat à la suite du travail réalisé par la commission des lois.

Le délai d'habilitation initial était de dix-huit mois, expirant le 7 février 2021. Il a été allongé de quatre mois, soit jusqu'au 7 juin 2021, par la loi du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19. Publiée le 2 juin 2021, l'ordonnance a donc respecté - de peu - le délai d'habilitation.

Vous le savez, l'article 38 de la Constitution impose, à peine de caducité, le dépôt d'un projet de loi de ratification de l'ordonnance avant la date fixée par la loi d'habilitation. L'article 59 prévoyait un délai de trois mois à compter de la publication de l'ordonnance ; le projet de loi de ratification déposé à l'Assemblée nationale le 29 juillet dernier a donc bien respecté ce délai.

De plus, l'article 38 exige que les ordonnances soient ratifiées de manière expresse. Cependant, les décisions QPC du Conseil constitutionnel du 28 mai 2020 et du 3 juillet 2020 ont remis en cause cette obligation.

À ce sujet, j'ouvre une parenthèse pour évoquer la proposition de loi constitutionnelle déposée au Sénat le 22 juillet 2021 par notre collègue Jean-Pierre Sueur, garantissant le respect des principes de la démocratie représentative et de l'État de droit en cas de législation par ordonnance, qui vise à ajouter à l'article 38 de la Constitution la précision selon laquelle les dispositions des ordonnances relevant du domaine législatif n'acquièrent force de loi « qu'à compter de leur ratification expresse ».

Notre commission a auditionné, le 26 mai dernier, Amélie de Montchalin, ministre de la transformation et de la fonction publiques, qui n'a pas souhaité formuler d'engagement du Gouvernement à demander au Parlement une ratification expresse. Nous l'avions pourtant bien interrogée à ce sujet, comme nous l'avions fait lors des questions d'actualité au Gouvernement.

Ainsi, la présente proposition de loi, déposée par quatre présidents de groupes politiques - le groupe Les Républicains, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, le groupe Union Centriste et le groupe Écologiste - Solidarité et Territoires -, le président de la commission des lois, François-Noël Buffet, et Jean-Pierre Sueur, entend donner l'occasion au Sénat de débattre des choix faits par l'ordonnance, dans le cadre de la procédure de ratification. En se saisissant lui-même de la question, le Sénat est ainsi à l'origine de la première discussion au Parlement d'une proposition de loi de ratification d'une ordonnance.

J'en viens au contenu de l'ordonnance. Au-delà d'une réforme de la formation et des parcours, l'ordonnance procède à un changement de paradigme de la haute fonction publique de l'État. Elle vise trois objectifs.

Le premier est de dynamiser les parcours de carrière de l'encadrement supérieur.

Dans la lignée des conclusions du rapport Thiriez, l'ordonnance vise à instaurer une gestion des ressources humaines de l'État à un niveau interministériel et reposant sur les principes d'évaluation, de mobilité et d'ouverture. L'article 2 crée ainsi une stratégie pluriannuelle de l'État relative au pilotage des ressources humaines de l'encadrement supérieur, définie à partir des lignes directrices de gestion interministérielles édictées par le Premier ministre après consultation du Conseil supérieur de la fonction publique de l'État.

Afin de tenir compte des spécificités de l'encadrement supérieur, l'article 3 introduit de nouvelles modalités d'évaluation, qui seraient réalisées par des instances collégiales ministérielles ou interministérielles. Le cadre d'accompagnement des agents pour lesquels une transition professionnelle serait recommandée à l'issue des évaluations est prévu par l'article 4 de l'ordonnance ; le recours à une rupture conventionnelle pourra notamment être proposé.

Le deuxième objectif de l'ordonnance est de rénover la formation initiale et continue pour accroître la culture commune de l'action publique.

Mettant en avant l'objectif d'adapter la formation des cadres supérieurs de l'État aux enjeux actuels et à venir et de renforcer la culture commune de l'action publique, l'article 5 crée l'Institut national du service public, établissement public de l'État chargé d'assurer la formation initiale et continue du futur corps des administrateurs de l'État et d'autres corps de fonctionnaires ou de magistrats susceptibles d'exercer des fonctions d'encadrement supérieur dans la fonction publique de l'État. Un décret en Conseil d'État précisera les missions de l'INSP ainsi que les contours du « tronc commun » qui s'intègrera à la scolarité des élèves de quatorze écoles de service public.

Le troisième objectif de l'ordonnance est de décloisonner la haute fonction publique de l'État. L'ordonnance entend poursuivre une logique d'organisation des carrières fondée sur les métiers et les compétences, et non en fonction de l'appartenance à un corps. Reprenant l'esprit du rapport Thiriez, l'ordonnance réaménage en profondeur le système dit « des grands corps », en réservant un traitement différencié aux corps juridictionnels.

Ainsi, l'article 6 procède à la fonctionnalisation des emplois au sein des services d'inspection générale - Inspection générale de l'administration (IGA), Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et Inspection générale des finances (IGF) -, qui seront occupés par des « agents exerçant des fonctions d'inspection générale au sein de services d'inspection générale, recrutés, nommés et affectés pour une durée renouvelable ».

Actuellement, l'appartenance au corps constitue, à elle seule, la garantie de l'indépendance et de la neutralité des inspecteurs. Les corps des inspections générales devenant des services, leurs chefs et leurs agents se verront appliquer des garanties d'indépendance et d'impartialité inscrites au niveau législatif. Les cas où il pourra être mis fin aux fonctions des chefs de service et des agents exerçant des missions d'inspection générale sont au nombre de trois : s'ils en font la demande, en cas d'empêchement et en cas de manquement à leurs obligations déontologiques.

Par ailleurs, si l'ordonnance ne traite pas des statuts des corps de fonctionnaires autres que juridictionnels, ces statuts relevant de la seule compétence du pouvoir réglementaire, l'article 10 ouvre néanmoins la voie à une généralisation des statuts d'emplois. Présentés par le Gouvernement comme un facteur de souplesse et de mobilité, ces derniers pourront déroger à certaines dispositions du statut général de la fonction publique ne correspondant pas aux besoins des missions en question. Ainsi, le corps préfectoral ou encore le corps diplomatique seraient supprimés et remplacés respectivement par des statuts d'emplois propres aux fonctions préfectorales et diplomatiques.

L'ordonnance prévoit également de nouvelles modalités d'accès aux fonctions juridictionnelles et de déroulement de carrière pour les membres des juridictions administratives et financières. Les articles 7 à 9 visent à différer l'accès aux fonctions juridictionnelles, en transformant le Conseil d'État et la Cour des comptes, qui figurent actuellement parmi les corps de sortie à l'issue de l'ENA, en « corps de débouché », accessibles seulement après une première expérience dans l'administration.

Ainsi, les grades d'auditeurs au Conseil d'État et à la Cour des comptes seront supprimés et remplacés par des statuts d'emplois d'auditeur, d'une durée maximale de trois ans, accessibles aux administrateurs de l'État et aux membres des corps et cadres d'emplois de niveau comparable justifiant d'au moins deux ans d'expérience préalable. Les auditeurs seront nommés par arrêté du vice-président du Conseil d'État ou du premier président de la Cour des comptes, après un passage devant un comité consultatif, composé de façon paritaire de membres du Conseil d'État ou de la Cour des comptes, et de personnalités qualifiées. Des garanties d'indépendance équivalentes à celles des membres du Conseil d'État leur seront par ailleurs octroyées.

De plus, afin de dynamiser les parcours de carrière, l'ordonnance conditionne l'accès aux grades intermédiaires et supérieurs des fonctions juridictionnelles à l'accomplissement de mobilités.

Par ailleurs, elle ouvre l'accès au Conseil d'État et à la Cour des comptes au-delà des personnes issues de l'auditorat, en conférant un pouvoir de consultation à une commission dite « d'intégration », composée du vice-président du Conseil d'État ou du premier président de la Cour des comptes, d'un membre du Conseil d'État ou de la Cour des comptes et de trois personnes qualifiées nommées respectivement par le Président de la République, le président du Sénat et le président de l'Assemblée nationale. En outre, le vivier de recrutement des maîtres des requêtes en service extraordinaire au Conseil d'État et des conseillers référendaires en service extraordinaire à la Cour des comptes serait élargi.

Enfin, l'ordonnance ouvre de nombreuses fonctions au sein de l'encadrement supérieur de l'État à certains agents contractuels.

L'article 11 fixe la date d'entrée en vigueur de l'ordonnance au 1 er janvier 2022, à l'exception des dispositions de l'article 5, qui entrent en vigueur selon les modalités définies par un décret en Conseil d'État et au plus tard le 1 er janvier 2022, et des dispositions de l'article 9, qui entrent en vigueur au 1 er janvier 2023.

L'article 12 prévoit les modalités juridiques de substitution de l'INSP à l'ENA.

Les articles 13 et 14 fixent les dispositions transitoires propres aux juridictions administratives et aux juridictions financières.

L'article 15 prévoit l'abrogation, à compter de la date d'entrée en vigueur de l'INSP et au plus tard le 1 er janvier 2022, de l'ordonnance du 9 octobre 1945 relative à la formation, au recrutement et au statut de certaines catégories de fonctionnaires et instituant une direction de la fonction publique et un conseil permanent de l'administration civile. Il procède également à plusieurs coordinations.

Enfin l'ordonnance comporte 19 décrets d'application, dont un seul a été publié au Journal officiel , le 23 septembre 2021.

Le calendrier des mesures réglementaires a été précisé par le cabinet de la ministre de la transformation et de la fonction publiques lors de son audition : les décrets concernant le statut du corps des administrateurs de l'État, la création de l'INSP et la création de la direction interministérielle à l'encadrement supérieur de l'État (DIESE) devraient être pris d'ici à la fin de l'année 2021 ; les textes relatifs à la création de statuts d'emplois font actuellement l'objet d'une concertation avec les ministères intéressés et devraient paraître d'ici à la fin de l'année 2021 ou le début de l'année 2022 ; les autres textes relatifs au périmètre de l'encadrement supérieur de l'État, aux lignes directrices de gestion interministérielles, au dialogue social, à l'évaluation et aux transitions professionnelles sont en cours d'élaboration et seront adoptés au premier trimestre 2022.

En conclusion, je vous informe que l'ordonnance a fait l'objet de plusieurs QPC, dont celle qui a été déposée le 19 juillet 2021 auprès du Conseil d'État par l'Union syndicale des magistrats administratifs. Lors de l'audience de jugement du 20 septembre 2021, le rapporteur public a proposé le renvoi d'une partie de ces QPC au Conseil constitutionnel.

Par ailleurs, à l'heure où la quasi-totalité des décrets d'application reste encore à paraître, il me paraît difficile que nous nous prononcions sur des dispositions législatives qui prendront leur sens entier une fois l'important chantier réglementaire abouti.

Au surplus, le Gouvernement n'a pas à ce stade suffisamment clarifié sa position sur les statuts de corps qu'il entend supprimer ni sur les statuts d'emplois qu'il entend créer. Sur ce point, l'ordonnance ouvre, en effet, un champ des possibles particulièrement vaste. Dans ce cas, pouvons-nous donner au Gouvernement un blanc-seing en la matière ? Je ne le pense pas.

Aussi, devant les incertitudes qui planent sur le contour de l'ordonnance et des mesures réglementaires et face à l'impossibilité de mener une réflexion de fond qu'imposerait une réforme de telle ampleur, il me semble difficile, à ce stade, de se prononcer sur la ratification. Par conséquent, je vous propose de ne pas adopter la proposition de loi.

En revanche, je remercie ses auteurs de permettre un véritable débat en séance publique, qui sera pour tous les membres de la Haute Assemblée l'occasion de contraindre le Gouvernement à apporter toutes les précisions utiles sur sa réforme et de s'exprimer sur le sujet.

M. Jean-Pierre Sueur . - Je veux remercier la rapporteure de son rapport très complet, ainsi que les quatre présidents de groupe qui, comme le président Buffet, ont accepté de signer cette proposition de loi.

Chacun aura compris que celle-ci a quelque chose de paradoxal, puisque nous avons utilisé la procédure existante pour que le Sénat puisse débattre de ce sujet important. En effet, il aurait été étonnant que le Parlement ne s'exprime jamais sur des matières concernant l'organisation de l'État à son plus haut niveau.

Nous aurons beaucoup de choses à dire sur le fond, et il y aura sans doute des divergences de vues entre les signataires du texte. Cependant, le message principal consiste à dire que le Parlement ne peut pas ne pas être saisi du dossier.

Nous sommes très nombreux ici à être d'ardents partisans de la décentralisation, mais nous pouvons aussi considérer que celle-ci suppose un État fort. À cet égard, le rôle des préfets est majeur dans l'équilibre des pouvoirs de notre pays, comme nous l'avons vu lors de la crise sanitaire. Très franchement, je ne vois pas ce que recouvriraient des préfets fonctionnalisés, sinon une sorte d'aléa permanent.

Pour ce qui est de la procédure de sortie des élèves de l'ENA, je me rappelle l'intense réflexion menée lorsque Georges Tron était secrétaire d'État chargé de la fonction publique. Jean-Pierre Jouyet avait à l'époque imaginé un système extrêmement complexe, reposant sur les fiches de voeux des élèves et les fiches de besoins des administrations ; tout se serait ajusté par un système itératif qui n'aurait pas du tout été anonyme... Je m'étais rendu à ces réunions avec Catherine Tasca. Nous avions déclaré que ce système était pire que tout autre, puisqu'il engendrait de l'incertitude.

On ne peut pas ignorer le travail accompli, en particulier par le directeur de l'ENA, Patrick Gérard, qui est venu nous exposer à plusieurs reprises ce qui a été fait, avec les enseignants et les élèves, pour que l'enseignement corresponde aux attentes.

Pour ce qui est des corps d'inspection, je suppose qu'un membre de l'IGF, de l'IGA ou de l'IGAS a pour éthique de dire au ministre, en toute indépendance, ce qu'il a à lui dire... J'apprends que l'inspection générale de l'éducation serait aussi sur le gril : ce n'est pas du tout anodin.

Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain a bien voulu inscrire à l'ordre du jour du mois de novembre prochain la proposition de loi, que j'ai déposée avec Patrick Kanner, visant à rendre à nouveau expresse la ratification des ordonnances, conformément à la Constitution de 2008, et je l'en remercie. Il est très important que le Sénat puisse exprimer, de manière pluraliste, son refus de ratifier l'ordonnance. La balle sera alors dans le camp du Gouvernement. Si celui-ci ignorait cet acte politique essentiel, il prendrait une lourde responsabilité.

M. Patrick Kanner . - Je remercie Jean-Pierre Sueur d'avoir pris l'initiative de cette proposition de loi. Nous pouvons collectivement être très heureux de voir que le Sénat montre son autorité habituelle et ne souhaite pas être le supplétif permanent du pouvoir exécutif.

Dans ce cadre, le rapport de Catherine Di Folco montre bien l'imperfection de l'ordonnance et sa mise en oeuvre chaotique. Celle-ci a un sens politique : réaliser l'engagement d'Emmanuel Macron lorsqu'il était candidat à la présidence de la République. Je me permets de rappeler que ce dernier louait alors le spoil system américain, en vertu duquel toute l'administration est chassée quand un nouveau président arrive au pouvoir. Ce système peut être considéré comme efficace, mais ne correspond en aucune manière à la tradition française de la méritocratie républicaine. Il est toujours très important pour un ministre de pouvoir s'appuyer sur des corps indépendants qui puissent le conseiller et, parfois, lui rappeler les limites à ne pas dépasser. Cet équilibre serait menacé au travers de cette ordonnance.

La forme que nous employons est inédite : c'est la première fois qu'une proposition de loi de ratification d'une ordonnance est déposée
- avec l'espoir qu'elle ne soit pas ratifiée. C'est aussi le moyen de montrer que le recours aux ordonnances, devenant structurel, est une pratique d'affaiblissement permanent du Parlement et de renforcement du pouvoir exécutif, qui se retrouve seul face à la société. Je ne suis pas certain que ce soit le modèle républicain que nous souhaitions ici.

M. Alain Richard . - Il est heureux que nous ayons ce débat.

Puisque le principe est que les ordonnances sont ratifiées, il est loisible aux parlementaires de provoquer le débat de ratification si le Gouvernement joue de l'écoulement du temps pour ne pas l'organiser. Néanmoins, si l'on débattait sur le fond de toutes les ordonnances à ratifier, cela modifierait assez sérieusement notre calendrier... Comme c'est un débat que nous devons poursuivre, je salue la décision prise par la Conférence des présidents de prévoir malgré tout un rendez-vous de ratification, de manière que l'on sorte de la situation actuelle, qui est insatisfaisante.

Je suis curieux de savoir ce que vont dire les orateurs des différents groupes, lors de l'examen en séance de la proposition de loi, sur le contenu de cette ordonnance. L'idée d'interministérialiser de façon plus efficace la gestion des carrières des fonctionnaires d'autorité me semble assez largement partagée - c'était déjà l'objectif de la création de l'ENA, en 1945... Je me demande comment nos collègues qui s'y opposeraient le justifieront.

Il me semble qu'il faut relativiser ce que l'on appelle « l'indépendance » des corps d'inspection : un corps d'inspection réalise des études et des analyses destinées à sa hiérarchie, laquelle est dirigée par un homme ou une femme politique. Au reste, la plupart des membres des inspections ont des carrières mixtes, avec des sorties dans des postes de direction administrative, ce qui suppose l'agrément d'une autorité politique.

Le sujet est différent en ce qui concerne les corps juridictionnels que sont la Cour des comptes, le Conseil d'État, les chambres régionales des comptes et les tribunaux administratifs. La situation n'est pas entièrement satisfaisante, puisque près de la moitié des membres du Conseil d'État et de la Cour des comptes ont été nommés de façon discrétionnaire, à travers les nominations au tour extérieur du Gouvernement aux grades intermédiaires et supérieurs. Ceux qui sont entrés dans ces corps à la sortie de l'ENA forment la majorité de ceux qui jugent dans la suite de la carrière. La nouveauté introduite par l'ordonnance est que même ceux-là seront d'une certaine façon choisis en fonction de la personne, et non plus indépendants !

Cela dit, le fonctionnement de l'énarchie traditionnelle, qui conduit à ce que l'ensemble des administrations d'État se voient imposer l'arrivée de leurs propres cadres supérieurs sans pouvoir exercer aucun choix, est une étrangeté. D'ailleurs, il n'est pas déraisonnable de dire que le ministère des finances et celui des affaires étrangères ne choisissent aucun des cadres supérieurs qui vont y faire carrière...

Sur ce point aussi, il me semble que les options figurant dans l'ordonnance donnent matière à discussion. Les positions alternatives seront aussi intéressantes à entendre.

M. Alain Marc . - Je rejoins la position de Jean-Pierre Sueur. Je crois que le Parlement doit débattre du sujet.

Le Sénat est, constitutionnellement, le représentant des collectivités locales. Ses membres peuvent légitimement souhaiter que ceux qui exercent les plus hautes fonctions de l'État aient une certaine connaissance de ce qui se passe sur le terrain.

Lorsque la préfecture accueille des stagiaires de l'ENA, ces derniers ont tendance à ne pas en sortir, ce qui m'étonne toujours un peu... Je propose toujours qu'ils viennent voir ce qui se passe dans les petites collectivités. Il faudra veiller à ce que, dans les parcours de formation qui seront proposés, on permette aux élèves de se rendre dans nos petites communes et dans les intercommunalités.

M. Philippe Bas . - En réalité, nous menons de front deux débats : l'un sur les ordonnances et l'autre sur la réforme de la haute fonction publique.

L'article 38 de la Constitution a été dénaturé au fil des années par les gouvernements successifs, et spécialement depuis 2012. Cela coïncide avec une forme de thrombose du processus législatif. Les lois sont de plus en plus détaillées et ressemblent de plus en plus à une accumulation d'articles d'arrêtés préfectoraux. Parallèlement, nous avons deux catégories d'ordonnances : celles d'une très grande technicité et que le Gouvernement justifie par la complexité de la matière, trop importante pour faire l'objet d'un débat parlementaire, et les « vraies » ordonnances, telles que les prévoit l'article 38 de la Constitution, lequel dispose que c'est pour l'exécution de son « programme » que le Gouvernement peut éventuellement être autorisé à légiférer par ordonnances.

On peut rattacher une ordonnance relative à la haute fonction publique au « programme » du Gouvernement, parce que c'est un sujet central. Mais, précisément parce que c'est un sujet central, on ne peut laisser le Parlement à l'écart ! Le principe de la ratification qui figure à l'article 38 de la Constitution doit particulièrement s'appliquer à des textes qui visent l'exécution du « programme » gouvernemental.

Les questions de l'efficacité de l'État, de la prise en compte des réalités par celui-ci, de la connaissance des territoires par les hauts fonctionnaires, de l'interministérialité sont essentielles. Nous avons longtemps considéré que notre l'administration était la plus performante du monde. Je crois que nous avons une bonne administration dans l'ensemble, mais elle se détache de plus en plus des réalités vécues par les Français. Je comprends donc que le Gouvernement veuille la réformer. Sur le principe, je ne suis pas en désaccord avec l'idée qu'il faut renouer le lien de confiance, qui s'est distendu, entre l'État et les Français.

Je remercie notre rapporteur de la solution qu'elle propose, laquelle revient à affirmer que nous sommes opposés à cette réforme. De fait, il y a beaucoup de faux-semblants dans cette réforme. L'ENA est une cible trop commode ! La méritocratie et la distinction des talents par le concours reculent au profit du libre choix, par les dirigeants des administrations, des hauts fonctionnaires auxquels on va confier des responsabilités. C'est une régression.

On nous dit que l'on veut privilégier les métiers, mais l'excès d'interministérialité remet en cause la reconnaissance de la spécificité d'un certain nombre d'institutions. Je crois que vouloir mêler exagérément les origines professionnelles de ceux qui vont exercer une fonction préfectorale constitue une véritable dérive. La spécificité du métier de préfet est l'articulation entre les politiques nationales et les réalités locales.

La méconnaissance de l'administration est grande et les préjugés sur la nécessité de transposer les méthodes de gestion des cadres dirigeants du secteur privé à la fonction publique de l'État sont tenaces. Tout cela ne va pas dans la bonne direction.

Comme Alain Richard l'a rappelé, l'interministérialité était déjà au coeur de l'ordonnance de 1945, mais elle doit avoir ses limites. Ce n'est pas sans raison que nos anciens ont distingué entre le corps des administrateurs civils, qui est interministériel, et d'autres fonctions publiques, dont la spécificité doit être préservée.

Je remercie notre rapporteur de nous donner l'occasion de dénoncer cette réforme.

Mme Catherine Di Folco , rapporteur . - Le débat en séance sera très intéressant. Chacun pourra s'exprimer sur le fond de l'ordonnance. Je vous remercie d'avoir amorcé les réflexions sur le sujet.

M. François-Noël Buffet , président . - Jean Louis Masson a déposé une série d'amendements visant pour l'essentiel à supprimer les articles de l'ordonnance.

Mme Catherine Di Folco , rapporteur . - J'émets un avis défavorable à l'ensemble de ces amendements, puisque je vous propose de ne pas adopter ce texte de ratification de l'ordonnance.

EXAMEN DES ARTICLES

Articles additionnels avant l'article unique

Les amendements COM-3 , COM-4 , COM-5 , COM-6 , COM-7 , COM-8 , COM-9 , COM-10 , COM-11 , COM-12 , COM-13 , COM-14 , COM-15 , COM-16 , COM-17 et COM-18 ne sont pas adoptés.

Article unique

Les amendements COM-1 et COM-2 ne sont pas adoptés.

L'article unique constituant l'ensemble de la proposition de loi n'est pas adopté.

Conformément au premier alinéa de l'article 42 de la Constitution, la discussion en séance portera en conséquence sur le texte initial de la proposition de loi déposée sur le Bureau du Sénat.

M. François-Noël Buffet , président . - En application du vade-mecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des présidents, il nous revient désormais d'arrêter le périmètre indicatif de la proposition de loi.

Mme Catherine Di Folco , rapporteur . - Je vous propose de considérer que ce périmètre inclut les questions évoquées par les articles de l'ordonnance, c'est-à-dire les dispositions relatives : à la formation initiale et continue des agents de l'encadrement supérieur de la fonction publique de l'État ; à l'évaluation, à la mobilité et à la transition professionnelle des agents de l'encadrement supérieur de la fonction publique de l'État ; aux emplois et fonctions au sein des services d'inspection générale ; au recrutement et à la mobilité des membres des juridictions administratives ; au régime des incompatibilités pour les membres des juridictions administratives ; au recrutement et à la mobilité des membres des juridictions financières ; à l'exercice des fonctions juridictionnelles au sein des juridictions administratives et financières ; aux statuts d'emplois dans l'encadrement supérieur de la fonction publique de l'État.

M. Alain Richard . - Sur la méthode, les amendements n'ont aucun sens si notre assemblée rejette la ratification de l'ordonnance ! Ils n'ont de sens que si l'on accepte de la ratifier.

M. François-Noël Buffet , président . - Absolument !

Mme Catherine Di Folco , rapporteur . - On peut espérer que, à la lecture de notre rapport, nos collègues comprendront notre démarche...

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Articles additionnels avant l'article unique

M. MASSON

3

Suppression de l'artcle 1 er de l'ordonnance

Satisfait
ou sans objet

M. MASSON

4

Suppression de l'artcle 2 de l'ordonnance

Satisfait
ou sans objet

M. MASSON

5

Suppression de l'artcle 3 de l'ordonnance

Satisfait
ou sans objet

M. MASSON

6

Suppression de l'artcle 4 de l'ordonnance

Satisfait
ou sans objet

M. MASSON

7

Suppression de l'artcle 5 de l'ordonnance

Satisfait
ou sans objet

M. MASSON

8

Suppression de l'artcle 6 de l'ordonnance

Satisfait
ou sans objet

M. MASSON

9

Suppression de l'artcle 7 de l'ordonnance

Satisfait
ou sans objet

M. MASSON

10

Suppression de l'artcle 8 de l'ordonnance

Satisfait
ou sans objet

M. MASSON

11

Suppression de l'artcle 9 de l'ordonnance

Satisfait
ou sans objet

M. MASSON

12

Suppression de l'artcle 10 de l'ordonnance

Satisfait
ou sans objet

M. MASSON

13

Suppression de l'artcle 11 de l'ordonnance

Satisfait
ou sans objet

M. MASSON

14

Suppression de l'artcle 12 de l'ordonnance

Satisfait
ou sans objet

M. MASSON

15

Suppression de l'artcle 13 de l'ordonnance

Satisfait
ou sans objet

M. MASSON

16

Suppression de l'artcle 14 de l'ordonnance

Satisfait ou sans objet

M. MASSON

17

Suppression de l'artcle 15 de l'ordonnance

Satisfait
ou sans objet

M. MASSON

18

Suppression de l'artcle 16 de l'ordonnance

Satisfait
ou sans objet

Article unique

M. MASSON

1

Abrogation de l'ordonnance

Satisfait
ou sans objet

M. MASSON

2

Abrogation de la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 et de l'ordonnance n° 2021-702 du 2 juin 2021

Satisfait
ou sans objet

RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45
DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS
DU RÈGLEMENT DU SÉNAT (« CAVALIERS »)

Si le premier alinéa de l'article 45 de la Constitution, depuis la révision du 23 juillet 2008, dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis », le Conseil constitutionnel estime que cette mention a eu pour effet de consolider, dans la Constitution, sa jurisprudence antérieure, reposant en particulier sur « la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie » 98 ( * ) .

De jurisprudence constante et en dépit de la mention du texte « transmis » dans la Constitution, le Conseil constitutionnel apprécie ainsi l'existence du lien par rapport au contenu précis des dispositions du texte initial, déposé sur le bureau de la première assemblée saisie 99 ( * ) . Pour les lois ordinaires, le seul critère d'analyse est le lien matériel entre le texte initial et l'amendement, la modification de l'intitulé au cours de la navette restant sans effet sur la présence de « cavaliers » dans le texte 100 ( * ) . Pour les lois organiques, le Conseil constitutionnel ajoute un second critère : il considère comme un « cavalier » toute disposition organique prise sur un fondement constitutionnel différent de celui sur lequel a été pris le texte initial 101 ( * ) .

En application des articles 17 bis et 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation.

En application du vademecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des Présidents, la commission des lois a arrêté, lors de sa réunion du mercredi 29 septembre 2021, le périmètre indicatif de la proposition de loi tendant à permettre l'examen par le Parlement de la ratification de l'ordonnance n° 2021-702 du 2 juin 2021 portant réforme de l'encadrement supérieur de la fonction publique de l'État.

Elle a considéré que ce périmètre incluait les questions évoquées dans l'ordonnance soumise à ratification, à savoir les dispositions relatives :

- à la formation initiale et continue des agents de l'encadrement supérieur de la fonction publique de l'État ;

- à l'évaluation, à la mobilité et à la transition professionnelle des agents de l'encadrement supérieur de la fonction publique de l'État ;

- aux emplois et fonctions au sein des services d'inspection générale ;

- au recrutement et à la mobilité des membres des juridictions administratives ;

- au régime des incompatibilités pour les membres des juridictions administratives ;

- au recrutement et à la mobilité des membres des juridictions financières ;

- à l'exercice des fonctions juridictionnelles au sein des juridictions administratives et financières ;

- aux statuts d'emplois dans l'encadrement supérieur de la fonction publique de l'État.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Ministère de la transformation et de la fonction publiques

Cabinet

M. Boris Melmoux-Eude , directeur de cabinet

Mme Sandrine Staffolani , conseillère fonction publique de l'État et diversité

Mme Marie Perdoux , conseillère en charge des relations avec le Parlement

Direction générale de l'administration et de la fonction publique

Mme Nathalie Colin , directrice générale

Ministère de l'économie, des finances et de la relance, Inspection générale des finances

Mme Marie-Christine Lepetit , cheffe du service

M. Thomas Espeillac , chargé de mission

Ministère de l'intérieur, Inspection générale de l'administration

M. Michel Rouzeau , chef du service

Ministère des solidarités et de la santé, Inspection générale des affaires sociales

Mme Nathalie Destais , cheffe du service

Mme Laurence Eslous , adjointe

Conseil d'État

M. Therry-Xavier Girardot , secrétaire général

Cour des comptes

M. Jean-Michel Thornary , secrétaire général

Mme Marie-Laure Berbach , secrétaire générale adjointe

Association des magistrats de la Cour des comptes

Mme Anne Mondolini , présidente

M. Michel Anrijs et Mme Karine Turpin , membres du bureau

Syndicat de la juridiction administrative

Mme Anne-Laure Delamarre , vice-présidente

Mme Gabrielle Maubon , secrétaire générale

Syndicat des juridictions financières

M. Yves Roquelet , président

M. Laurent Catinaud , secrétaire général

Mme Marianne Charle , représentante élue des conseillers de CRTC au conseil supérieur

Union syndicale des magistrats administratifs

M. Emmanuel Laforêt , président

M. Sophie Edert , secrétaire générale

Mme Anne Triolet , secrétaire générale adjointe

Association pour l'égal accès aux emplois publics et la défense de la méritocratie républicaine

M. Tristan Claret-Trentelivres , président

Association du Corps préfectoral et des hauts fonctionnaires du ministère de l'intérieur

M. Christophe Mirmand , président

École nationale d'administration

M. Patrick Gérard , ancien directeur

Association des anciens élèves de l'École nationale d'administration

M. Daniel Keller , président

M. Arnaud Teyssier , ancien président

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl20-807.html


* 1 Voir le dossier législatif du projet de loi : https://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjl18-532.html .

* 2 Aux termes duquel : « Les délais dans lesquels le Gouvernement a été autorisé à prendre par ordonnances, sur le fondement de l'article 38 de la Constitution, des mesures relevant du domaine de la loi sont prolongés de quatre mois, lorsqu'ils n'ont pas expiré à la date de publication de la présente loi.

Les délais fixés pour le dépôt de projets de loi de ratification d'ordonnances publiées avant la date de publication de la présente loi sont prolongés de quatre mois, lorsqu'ils n'ont pas expiré à cette date.»

* 3 Projet de loi n° 44119 enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 29 juillet 2021.

* 4 Le compte rendu de cette audition est disponible à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20210524/lois.html#toc8

* 5 Le compte rendu est disponible à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/seances/s202106/s20210602/s20210602003.html#orat25

* 6 Projet de loi n° 4419 ratifiant l'ordonnance n° 2021-702 du 2 juin 2021 portant réforme de l'encadrement supérieur de la fonction publique de l'État, enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 29 juillet 2021.

* 7 Instaurées dans les trois versants de la fonction publique par l'article 30 de la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique, les lignes directrices « fixent [...] dans chaque administration les orientations générales en matière de mobilité » ainsi que, « dans chaque administration et établissement public, les orientations générales en matière de promotion et de valorisation des parcours ».

* 8 S'ajoutant à l'évaluation professionnelle qui donne lieu à un compte rendu, conformément à l'article 17 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et à l'article 55 de la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État.

* 9 Dans les conditions prévues à l'article 72 de la loi du 6 août 2019 de transformation de l'action publique.

* 10 Le décret n° 2021-1216 fixant la liste des corps et cadres d'emplois dont les membres peuvent être nommés auditeurs au Conseil d'État et à la Cour des comptes a été publié au Journal officiel du 23 septembre 2021 ( https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000044087792 ).

* 11 Seront ainsi concernées les écoles de service public suivantes : l'INSP, l'INET, l'ENM, l'EHESP, l'EN3S, l'ENSP, l'ENAP, l'EOGN, l'ENSV, ainsi que cinq écoles d'application de Polytechnique : AgroParisTech, l'ENPC, l'École des Mines, l'ENSAE, et l'ENSTA - soit au total plus de 1 000 élèves. Les cinq axes thématiques suivants ont pour l'heure été mis en avant : valeurs de la République et principes du service publique ; transition écologique ; transition numérique ; inégalités et pauvreté ; rapport à la science (d'après les informations données par le cabinet de la ministre de la transformation et de la fonction publiques).

* 12 Article L. 133-5 du code de justice administrative et article L. 112-3-1 du code des juridictions financières, respectivement modifié et ajouté par les articles 7 et 8 de l'ordonnance.

* 13 Article L. 133-3 du code de justice administrative, modifié par l'article 7 de l'ordonnance.

* 14 Article L. 234-2-1 du code justice administrative, modifié par l'article 7 de l'ordonnance.

* 15 Article L. 221-2-1 du code des juridictions financières, modifié par le 22° de l'article 8.

* 16 Article L. 133-12-3 du code de justice administrative, créé par l'article 7 de l'ordonnance, et article L. 122-9 du code des juridictions financières, créé par l'article 8 de l'ordonnance.

* 17 Article L. 133-9 du code de justice administrative.

* 18 Article L. 112-7 du code des juridictions financières.

* 19 Article L. 221-10 du code des juridictions financières.

* 20 À l'exception notamment de l'article 9, qui entre en vigueur le 1 er janvier 2023.

* 21 Auditionné au Sénat le 22 septembre 2021.

* 22 La création de cette délégation interministérielle, qui sera placée sous l'autorité du Premier ministre et de la ministre de la transformation et de l'action publiques, ne relève pas du domaine de la loi et ne figure par conséquent pas dans l'ordonnance.

* 23 La mission, confiée à Jean Bassères, directeur général de Pôle emploi, visant à préparer la création de l'INSP et de la DIESE, doit rendre son rapport le 1 er novembre 2021 au plus tard.

* 24 Lancé le 15 janvier 2019.

* 25 Voir la lettre de mission du Premier ministre du 14 mai 2019.

* 26 Correspondant aux 15 premières places dans le classement de sortie.

* 27 Proposition n°10 du rapport.

* 28 Le rapport suggère les durées suivantes : au moins 4 ans d'ancienneté pour l'emploi d'inspecteur et pour une durée de 7 ans maximum ; au moins 20 ans d'ancienneté pour l'emploi d'inspecteur général, pour une durée de 10 ans maximum.

* 29 Proposition n°11 du rapport.

* 30 Article 64 de la Constitution du 4 octobre 1958.

* 31 Décision n° 80-119 DC du 22 juillet 1980, Loi portant validation d'actes administratifs .

* 32 Décision n° 2010-110 QPC du 25 mars 2011, M. Jean-Pierre B . et décision n° 2017-749 DC du 31 juillet 2017, Accord économique et commercial global entre le Canada, d'une part, et l'Union européenne et ses États membres, d'autre part .

* 33 7 juin 2001, Kress c. France ; 9 novembre 2006, Sacilor-Lormines c. France .

* 34 Proposition n° 26 du rapport.

* 35 Le décret n° 2016-1804 du 22 décembre 2016 relatif à la DGAFP et à la politique de ressources humaines dans la fonction publique a consacré le rôle de direction des ressources humaines de l'État revenant à la DGAFP en renforçant sa mission de pilotage et de coordination de la politique des ressources humaines commune à l'ensemble de la fonction publique.

* 36 Proposition n°34 du rapport.

* 37 Rapport Thiriez, p. 56.

* 38 Propositions n°36 et 37 du rapport.

* 39 Inspiré de l'Ecole de Guerre et du Centre des hautes études militaires, l'IHESP dispenserait, en milieu de carrière, une formation commune à temps partiel d'une année à des hauts fonctionnaires des trois fonctions publiques, tous corps confondus, ainsi qu'aux magistrats qui le souhaitent, aux officiers de la gendarmerie ou des armées et aux administrateurs des assemblées (proposition n°35 du rapport).

* 40 Accessible à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl20-795.html

* 41 Alinéa 4 de l'article 1 er de la proposition de loi précitée.

* 42 Paragraphe 11 de la décision précitée.

* 43 Aux termes de laquelle les dispositions issues d'une ordonnance non ratifiée « ne revêtent pas le caractère de dispositions législatives au sens de l'article 61-1 de la Constitution ».

* 44 Le Conseil a rappelé que les dispositions d'une ordonnance « doivent être regardées, dès l'expiration du délai de l'habilitation et dans les matières qui sont du domaine législatif, comme des dispositions législatives au sens de l'article 61-1 de la Constitution » (décision précitée).

* 45 Le compte rendu de cette audition est disponible à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20210524/lois.html#toc8

* 46 Le compte rendu est disponible à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/seances/s202106/s20210602/s20210602003.html#orat25

* 47 Projet de loi n° 4419 ratifiant l'ordonnance n° 2021-702 du 2 juin 2021 portant réforme de l'encadrement supérieur de la fonction publique de l'État, enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 29 juillet 2021.

* 48 Article 3 de la loi du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État.

* 49 Article 3 de la loi du 11 janvier 1984 modifié par la loi n°2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique.

* 50 Décret n°2019-1594 du 31 décembre 2019 relatif aux emplois de direction de l'État.

* 51 Un décret en Conseil d'État doit fixer la liste des emplois, corps, grades et fonctions concernés.

* 52 Les critères de détermination de ces deux dernières catégories d'agents doivent être précisés par un décret en Conseil d'État.

* 53 Instaurées dans les trois versants de la fonction publique par l'article 30 de la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique, les lignes directrices « fixent [...] dans chaque administration les orientations générales en matière de mobilité » ainsi que « dans chaque administration et établissement public, les orientations générales en matière de promotion et de valorisation des parcours ».

* 54 S'ajoutant à l'évaluation professionnelle qui donne lieu à un compte rendu, conformément à l'article 17 de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et à l'article 55 de la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État.

* 55 Dans les conditions prévues à l'article 72 de la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique.

* 56 Décret n° 2021-1216 du 22 septembre 2021 fixant la liste des corps et cadres d'emplois dont les membres peuvent être nommés auditeurs au Conseil d'Etat et à la Cour des comptes.

* 57 L'ordonnance prévoit ainsi que « les agents exerçant des fonctions d'inspection générale au sein des mêmes services sont recrutés, nommés et affectés dans des conditions garantissant leur capacité à exercer leurs missions avec indépendance et impartialité ».

* 58 Il ne peut être mis fin aux fonctions des chefs des services qu'après avis d'une commission dont la composition est fixée par décret en Conseil d'État.

* 59 L'article L. 133-6 du code de justice administrative est abrogé par le 8° de l'article 7.

* 60 L'article L. 112-1 du code des juridictions financières est modifié par le 1° de l'article 8.

* 61 Dont la liste est fixée par le décret n° 2021-1216 du 22 septembre 2021 précité.

* 62 Article L. 133-5 du code de justice administrative dans sa rédaction résultant du 7° de l'article 7 et nouvel article L. 112-3-1 du code des juridictions financières créé par le 2° de l'article 8.

* 63 Nouvel article L. 133-12-2 du code de justice administrative créé par le 13° de l'article 7.

* 64 Nouvel article L. 122-8 du code des juridictions financières créé par le 16° de l'article 8.

* 65 Nouvel article L. 133-12-2 du code de justice administrative créé par le 13° de l'article 7.

* 66 Sur proposition du ministre chargé de la fonction publique.

* 67 À partir d'une liste établie par le ministre chargé de la fonction publique.

* 68 Article L. 133-5 du code de justice administrative modifié par le 7° de l'article 7.

* 69 Article L. 112-3-1 du code des juridictions financières créé par le 2° de l'article 8.

* 70 Article L. 133-4 du code de justice administrative, modifié par le 6° de l'article 7 et article L 122-5 du code des juridictions financières, modifié par le 12° de l'article 8.

* 71 Sous réserve qu'ils soient âgés de trente-cinq ans et justifient de dix ans de services publics effectifs (article L. 133-8 du code de justice administrative, modifié par le 10° de l'article 7.

* 72 Article L 122-5 du code des juridictions financières, modifié par le 14° de l'article 8.

* 73 Article L. 133-7 du code de justice administrative, modifié par le 9° de l'article 7.

* 74 Article L, 122-6 du code des juridictions financières, modifié par le 15° de l'article 8.

* 75 Article L. 133-3-1 du code de justice administrative, modifié par le 5° de l'article 7.

* 76 Article L. 122-3 du code des juridictions financières, modifié par le 12° de l'article 8.

* 77 Article L. 133-3 du code de justice administrative, modifié par l'article 7 de l'ordonnance.

* 78 Article L. 234-2-1 du code de justice administrative, modifié par l'article 7 de l'ordonnance.

* 79 Article L. 122-3 du code des juridictions financières, modifié par le 13° de l'article 8.

* 80 Article L. 234-2-2 du code de justice administrative, modifié par le 24° de l'article 7.

* 81 Article L. 221-2-1 du code des juridictions financières, modifié par le 22° de l'article 8.

* 82 Article 133-9 du code de justice administrative.

* 83 Article L. 121-4 du code de justice administrative.

* 84 Article L. 112-5 du code des juridictions financières.

* 85 Article L. 112-6 du code des juridictions financières.

* 86 Article L. 112-4 du code des juridictions financières.

* 87 Article L. 112-5 du code des juridictions financières.

* 88 Article L. 112-6 du code des juridictions financières.

* 89 Article L. 133-9 du code de justice administrative, modifié par le 11° de l'article 7.

* 90 Article L. 112-7 du code des juridictions financières, modifié par le 7° de l'article 8.

* 91 À noter que ces personnes peuvent, en l'état actuel du droit, exercer les fonctions de rapporteur auprès de la Cour des comptes dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État.

* 92 Articles L. 112-4 et L. 112-7 du code des juridictions financières.

* 93 Article L. 221-10 du code des juridictions financières.

* 94 Voir CE, 13 févr. 1976, n° 94707, Casanova , Lebon 99, concl. du président Denoix de Saint Marc.

* 95 Marcel Pochard, Les 100 mots de la fonction publique , PUF, Que sais-je, n° 3919, p. 23.

* 96 Voir CE 16 juin 1995, Comité de défense des inspecteurs d'académie , req. n° 120200 et CE 11 janv. 2002, n° 225597, Union nationale des affaires sociales CGT .

* 97 S'agissant des inspections générales.

* 98 Voir le commentaire de la décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 - Loi portant réforme des retraites.

* 99 Voir par exemple les décisions n° 2015-719 DC du 13 août 2015 - Loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne et n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016 - Loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.

* 100 Décision n° 2007-546 DC du 25 janvier 2007 - Loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.

* 101 Décision n° 2020-802 DC du 30 juillet 2020 - Loi organique portant report de l'élection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France.

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