TITRE II
AMÉLIORER L'ATTRACTIVITÉ DES MÉTIERS SCIENTIFIQUES

Article 3
Création d'un dispositif de « chaire de professeur junior »

Mme Danièle Hérin, députée, rapporteure pour l'Assemblée nationale . - L'article 3 crée les chaires juniors de directeur de recherche et de professeur. Nous sommes parvenus à un compromis avec le Sénat, qui souhaitait limiter la proportion de postes accordés par ce biais au sein d'un corps : nous proposons à la commission mixte paritaire de retenir un plafond de 20 % des recrutements dans le corps pour les directeurs de recherche, conformément au texte de l'Assemblée, et de 15 % pour les recrutements de professeurs, comme dans le texte du Sénat. Nous proposons aussi de supprimer la disposition, introduite par le Sénat, selon laquelle la commission de titularisation devrait être composée d'un quart de membres du CNU.

Mme Laure Darcos , sénatrice, rapporteur pour le Sénat . - Le compromis trouvé est satisfaisant dans la mesure où les chaires de professeur junior semblent susciter moins de réticences dans les établissements publics à caractère scientifique et technologique (EPST) que dans les universités. Afin d'améliorer l'acceptabilité de cette nouvelle voie de recrutement, le Sénat avait souhaité qu'un quart des membres des commissions de titularisation pour l'accès au corps des professeurs des universités soit issu du CNU. Cependant, à la suite de l'adoption de l'article 3 bis , qui prévoit que la qualification par le CNU n'est plus requise pour l'accès aux postes de professeur des universités, cette disposition perd de sa cohérence. Surtout, elle pourrait s'avérer bloquante pour la composition de commissions chargées du recrutement de profils inter- ou transdisciplinaires, ce qui est l'objectif premier des chaires puisque les membres du CNU sont rattachés à une discipline particulière.

L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 3 bis
Mise en place d'une expérimentation sur le CNU

Mme Sylvie Robert , sénatrice . - Supprimer, par voie d'amendement, une procédure aussi importante que la qualification par le CNU, sans étude d'impact ni avis du Conseil d'État ou du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (CNESER), est inacceptable. C'est pourquoi, avec la proposition de rédaction n o 5, nous proposons de supprimer cet article.

M. Patrick Hetzel, député . - La proposition de rédaction n o 2 est identique. Certains défendent cet article au motif qu'il faudrait aller plus loin dans l'autonomie afin que les universités puissent procéder de manière autonome à leur recrutement. Mais elles le peuvent déjà. Simplement, depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, les candidats qui postulent à des postes de maître de conférences ou de professeur des universités doivent avoir obtenu la qualification du CNU, qui constitue le gage de leur niveau. Si les grandes universités internationales peuvent avoir des comités de recrutement capables de limiter les risques de dérive, ce risque est réel dans les autres universités. J'ai siégé au CNU dans ma discipline par le passé : notre objectif est de fournir des garanties quant au niveau des candidats et les universités sont libres ensuite de leur recrutement.

Sur la forme, la ministre a obtenu l'accord des organisations syndicales sur un protocole d'évolution des carrières. Pensez-vous qu'elle aurait obtenu leur accord si une disposition, aussi explosive pour le milieu académique, avait été inscrite dans ce protocole ? Ancien directeur général de l'enseignement supérieur, j'ai défendu l'indépendance des universités. Mais vous n'imaginez pas ce qu'une telle mesure va provoquer. On ne peut prendre une telle décision sans consulter les intéressés au préalable. Il n'en a rien été, pas plus que nous n'en avons débattu en séance dans les deux chambres. La qualification est fondamentale, notamment en sciences humaines et sociales. Évitons d'agiter un chiffon rouge à l'heure où l'enseignement supérieur a besoin de sérénité.

M. Régis Juanico, député . - Nous voterons ces propositions de rédaction. C'est bien l'existence du statut national d'enseignant-chercheur qui est en jeu. Ce statut est la garantie d'un service public d'enseignement supérieur d'égale qualité sur l'ensemble du territoire. Le processus fonctionne de manière satisfaisante. Après la qualification nationale, les candidats sont classés par les comités de sélection spécifiques à chaque université pour chaque poste ouvert et dont la composition est fixée par les établissements. On combine régulation nationale et liberté des universités. C'est aussi un gain de temps et une source d'économies, car les dossiers de qualification, une fois examinés par le CNU, n'ont plus à être examinés à nouveau par chaque université.

M. Pierre Ouzoulias , sénateur . - J'irai dans le sens de M. Hetzel, preuve que la question n'est pas d'ordre politique. Le CNU joue un moindre rôle dans les sciences exactes, car il qualifie la quasi-totalité des candidats. En revanche, en droit et en sciences humaines, le taux de qualification tombe à 30 %. Le CNU est donc l'organe de régulation national dans certaines disciplines. Le problème est que cette loi a été faite pour certaines disciplines, sans se soucier des intérêts du reste de la communauté universitaire. La déstabilisation de l'enseignement supérieur et de la recherche aura des répercussions très fortes dans de nombreux domaines, y compris en matière d'évaluation ou pour le HCERES. Le jugement par les pairs et la collégialité sont des dimensions fondamentales. Si vous humiliez les professeurs, vous aurez beaucoup de mal à mettre en oeuvre d'autres mesures de ce texte. Le monde de la recherche a besoin de sérénité, non de chaos, en ce moment.

M. Frédéric Reiss, député . - Je voterai ces propositions. En affaiblissant le CNU, on porterait un mauvais coup à une instance représentative et garante d'une régulation nationale du niveau exigé des candidats aux postes universitaires.

M. Stéphane Piednoir , sénateur . - Je comprends l'émoi que cela peut provoquer dans la communauté universitaire. Nous sommes inondés de courriels depuis quelques jours, même si certains professeurs ou maîtres de conférences y voient un assouplissement intéressant. Nous avons prévu des garde-fous pour ne pas donner le sentiment d'agiter des chiffons rouges. L'article crée une possibilité, par dérogation, à titre expérimental, pour une période maximale de cinq ans. Les établissements doivent aussi obtenir l'accord de leur conseil d'administration pour déroger. Si ses membres y sont opposés, il n'y aura pas de dérogation. A contrario , si les universitaires y voient un facteur d'assouplissement, ils saisiront cette possibilité et nous en dresserons le bilan en 2024.

M. Jean Hingray , sénateur . - Je rebondirai sur le chiffre donné par notre collègue Hetzel, en préambule, à savoir près de 30 000 signataires de la pétition. Je viens de le vérifier, ils ne sont que 10 000, alors même qu'en 2013, quand le Sénat avait proposé un amendement similaire, 20 000 personnes avaient signé une pétition contre un amendement de ce type. Nous notons donc un essoufflement.

Par ailleurs, si ces derniers jours j'ai reçu quelques e-mails désagréables, j'en ai aussi reçu d'enseignants qui m'ont fait part de leur soutien. Nous verrons dans quelques années ce que ce type de recrutement donnera, mais il me semble bon d'insuffler un souffle nouveau au recrutement.

M. Patrick Hetzel, député . - Le recrutement sera soumis à un conseil d'administration, et si l'avis est défavorable, il ne se fera pas. Dois-je vous rappeler qui fait partie du conseil d'administration ? Participeront au vote des personnalités extérieures, qui ne sont pas des enseignants-chercheurs. Je me demande d'ailleurs s'il n'existe pas un problème de constitutionnalité, même si un certain nombre de décisions autorisant des non-enseignants à se prononcer sur certains sujets ont été prises.

Outre cette proposition de suppression, je voudrais donc vous alerter sur un problème de constitutionnalité lié au statut particulier des enseignants-chercheurs. Il y a là un réel problème dans la rédaction, y compris dans son caractère opérationnel.

Mme Laure Darcos , sénatrice, rapporteur pour le Sénat . - Sur l'article 3 bis adopté par le Sénat, quelques explications sont nécessaires au regard des très nombreuses réactions suscitées par cette disposition.

Concernant tout d'abord l'accès aux emplois de professeur des universités, les candidats n'auront plus l'obligation d'être qualifiés par le CNU, dès lors qu'ils sont déjà maîtres de conférences titulaires. On peut en effet légitimement considérer que ces derniers sont déjà passés par plusieurs étapes de sélection - obtention du doctorat, qualification pour devenir maître de conférences, stage et titularisation après un concours de recrutement - et fait leurs preuves après plusieurs années d'exercice en tant que maîtres de conférences titulaires, sans qu'il soit besoin de recourir à une énième étape de qualification.

Concernant ensuite l'accès aux emplois de maître de conférences, la mesure introduite consiste en une expérimentation, jusqu'en septembre 2024, de la possibilité de déroger à l'obligation de qualification nationale. Celle-ci n'est donc pas supprimée, comme nous l'entendons ou le lisons dans de nombreux commentaires.

À l'issue de cette expérimentation, le HCERES remettra un rapport d'évaluation, transmis au Parlement qui, seul, pourra décider ou non de la pérennisation de cette mesure. Ne sont pas concernées par ce dispositif expérimental les disciplines disposant d'une agrégation de l'enseignement supérieur ; c'est le cas notamment du droit, de l'économie, de la gestion, des sciences politiques et des disciplines médicales.

La nouvelle rédaction que nous vous proposons apporte des précisions et des garanties sur ce dispositif expérimental, que nous avons demandées expressément au cabinet de la ministre. À titre personnel, je me suis abstenue sur ces deux amendements en séance publique, ce qui me met dans une situation ambiguë. Mais en tant que rapporteur du Sénat, je me dois donc d'appuyer ces propositions.

Je suis cependant heureuse que ces précisions aient pu être apportées, sachant que nous inscrivons dans la loi une obligation de concertation préalable avec les parties prenantes, à savoir les syndicats, les conférences d'établissement et le CNU. Le but sera de fixer collectivement les règles du jeu, les critères d'évaluation et le format des comités de sélection, notamment pour limiter le risque de localisme.

Sur ce dernier point justement, la nouvelle rédaction mentionne explicitement l'objectif de limitation des recrutements locaux des maîtres de conférences ; les établissements participant à l'expérimentation devront prendre des engagements précis en la matière.

Enfin, la nouvelle rédaction précise bien que toutes les disciplines de santé, y compris les sections de maïeutique et de soins infirmiers, sont exclues du champ de l'expérimentation.

J'ajoute que, d'une section à l'autre, les fonctionnements sont très différents. Depuis quelques années, le CNU s'est reposé sur ses lauriers, notamment sur le suivi individuel qui n'est plus assuré, ce qui a été souvent rapporté. L'objectivité voudrait que nous puissions rappeler au CNU ses devoirs et ses missions. J'espère sincèrement que cette concertation pourra remettre à plat ses missions.

Compte tenu de ces garanties, nous sommes défavorables à la suppression de cet article, telle que proposée par les propositions de rédaction déposées par Patrick Hetzel, ainsi que Sylvie Robert et Marie-Pierre Monier.

Mme Danièle Hérin, députée, rapporteure pour l'Assemblée nationale . - L'essentiel a été dit par ma collègue. J'insiste sur le fait qu'il s'agit d'une expérimentation.

L'expérimentation pour l'accès au corps des maîtres de conférences ne supprime pas la qualification du CNU. Elle a pour objet de mesurer dans quelles conditions un établissement peut admettre à concourir des candidats qui ne sont pas inscrits sur la liste de qualification. Autrement dit, s'agissant des postes proposés au concours d'établissement, l'université qui participera à l'expérimentation pourra établir une liste de candidats, qualifiés ou non. En termes de procédure, le processus est particulièrement verrouillé : l'établissement doit exprimer sa volonté de participer à l'expérimentation en conseil d'administration, il doit ensuite mettre son processus de recrutement en ordre pour obtenir l'autorisation du ministère, par décret - donc avec le visa du Premier ministre - et il sera ensuite soumis à une évaluation spécifique du HCERES au terme de l'expérimentation. Autrement dit, si les établissements ne s'emparent pas de l'expérimentation ou s'ils ne jouent pas le jeu, dans cinq ans, la question de la suppression de la qualification des maîtres de conférences sera définitivement tranchée.

Le décret d'application du dispositif fixera le cahier des charges de l'expérimentation, ainsi que les règles spécifiques au processus de recrutement des professeurs. Sur le fond, sont exclues les disciplines à agrégation - droit, économie, gestion, sciences politiques - et les disciplines de santé, comme ma collègue l'a indiqué. Ces deux blocs sont engagés dans des processus différents.

Je soulignerai, par ailleurs, le fait que les étrangers nous demandent souvent pourquoi notre doctorat ne permet pas automatiquement de posséder le statut de maître de conférences. Dans l'université, on considère que le seul doctorat ne permet pas d'être maître de conférences, ce qui est gênant. Il est vrai que les deux assemblées ont fortement hésité à discuter de ce sujet. Néanmoins, procéder à une expérimentation est une bonne chose - il y a trop longtemps que nous nous interrogeons sur cette question. Si les établissements ne s'emparent pas de cette possibilité, cela voudra dire qu'il ne faut toucher à rien.

M. Laurent Lafon , sénateur, président . - Le débat a eu lieu au sein de la commission mixte paritaire.

Les propositions de rédaction identiques n os 2 et 5 ne sont pas adoptées.

L'article 3 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 4
Création d'un contrat doctoral de droit privé

Mme Danièle Hérin, députée, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - L'article 4 crée le contrat doctoral de droit privé. Nous proposons à la CMP de retenir ce qui a été adopté par les deux chambres dans des termes très proches, tout en faisant les modifications suivantes.

Les modalités selon lesquelles le contrat de travail peut être prolongé en cas de congé maladie ou maternité sont alignées sur ce qui se fait habituellement en droit du travail. Nous supprimons la mention selon laquelle c'est seulement lorsque la non-réinscription à l'université est le fait du doctorant que l'indemnité de fin de contrat n'est pas due. En effet, l'université peut légitimement considérer que le travail du doctorant n'avance pas suffisamment.

Mme Laure Darcos , sénatrice, rapporteur pour le Sénat . - Sur l'article 4, le Sénat approuve la reformulation de la possibilité, qu'il a introduite, de prolongation du contrat en cas de congé de maternité, de paternité ou de maladie. La rédaction proposée est alignée sur celle qui est en vigueur dans le droit du travail.

L'article 4 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 4 bis (supprimé)
Rapport annuel du président d'université
sur le suivi professionnel des jeunes docteurs

Mme Laure Darcos , sénatrice, rapporteur pour le Sénat . - L'article 4 bis a été supprimé par le Sénat pour éviter une redondance : les dispositions portant sur le devenir professionnel des jeunes docteurs diplômés sont inscrites à l'article 17.

L'article 4 bis est supprimé.

Article 5
Définition d'un cadre juridique pour les contrats post-doctoraux

Mme Laure Darcos , sénatrice, rapporteur pour le Sénat . - À l'article 5 relatif aux contrats postdoctoraux, les modifications que nous vous proposons sont essentiellement d'ordre technique ou rédactionnel : suppression du critère de l'agrément au titre du crédit d'impôt recherche (CIR) pour les entreprises auxquelles le Sénat a étendu le dispositif du contrat postdoctoral de droit privé - ce critère n'est pas opérant pour délimiter le périmètre des entreprises concernées -, renvoi des modalités des mesures d'accompagnement au décret en Conseil d'État, reformulation de la possibilité de prolongation des contrats en cas de congé maternité ou de maladie par cohérence avec le droit du travail.

L'article 5 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 5 bis
Conditions pour présider un établissement de recherche

Mme Danièle Hérin, députée, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - L'article 5 bis , qui a été introduit par le Sénat, précise que, pour présider un établissement public de recherche, il faut être titulaire d'un doctorat. Nous proposons une rédaction plus large qui permet de prendre en compte des qualifications équivalentes.

Mme Laure Darcos , sénatrice, rapporteur pour le Sénat . - Je n'ai rien à ajouter.

L'article 5 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 6
Création d'un contrat de droit public dit « de mission scientifique »

Mme Laure Darcos , sénatrice, rapporteur pour le Sénat . - À l'article 6, qui crée un contrat de mission scientifique, il est proposé de retenir la rédaction du Sénat, qui a notamment introduit une durée minimale d'un an.

L'article 6 est adopté dans la rédaction du Sénat.

Article 6 bis A
Facilitation du recours au contrat dit « de chantier »

Mme Laure Darcos , sénatrice, rapporteur pour le Sénat . - L'article 6 bis A, introduit par le Sénat, facilite les conditions de recours au contrat de chantier pour les EPIC et les fondations de recherche.

L'article 6 bis A est adopté dans la rédaction du Sénat.

Article 6 bis
Mensualisation de la rémunération des chargés d'enseignement vacataires

Mme Laure Darcos , sénatrice, rapporteur pour le Sénat . - Sur l'article 6 bis , nous constatons avec satisfaction que l'inquiétude exprimée par l'Assemblée nationale, puis par le Sénat, sur l'urgence de la situation des vacataires a conduit le ministère à reconnaître la nécessité d'avancer le calendrier de mise en oeuvre de la mensualisation de leur rémunération. Le texte de la CMP prévoit qu'une solution technique devra être trouvée « au plus tard » au 1 er septembre 2022, reprenant ainsi la proposition de rédaction de notre collègue Sylvie Robert.

L'article 6 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 7
Accueil de doctorants et de chercheurs étrangers
dans le cadre d'un « séjour de recherche »

Mme Laure Darcos , sénatrice, rapporteur pour le Sénat . - À l'article 7, il est proposé de retenir la rédaction du Sénat, qui n'a procédé qu'à des modifications rédactionnelles.

L'article 7 est adopté dans la rédaction du Sénat.

Article 8
Promotions en position de détachement ou de mise à disposition

Mme Laure Darcos , sénatrice, rapporteur pour le Sénat . - À l'article 8, il est proposé de retenir la rédaction du Sénat, qui n'a là encore procédé qu'à des modifications rédactionnelles.

L'article 8 est adopté dans la rédaction du Sénat.

Article 9
Maintien en fonction, au-delà de la limite d'âge, des enseignants-chercheurs et chercheurs lauréats de grands appels à projets

M. Patrick Hetzel, député . - Ce sujet concerne relativement peu de personnes, néanmoins, il est de nature symbolique. Le Sénat propose de modifier l'âge limite pour exercer comme professeur au Collège de France.

Aujourd'hui, dans les établissements d'enseignement supérieur et de recherche, l'âge limite, sous certaines conditions, est de 68 ans. Le Collège de France a toujours bénéficié d'un dispositif spécifique, avec une limite d'âge à 70 ans. Cet article propose de la repousser à 73 ans. Même s'il ne s'agit que de trois ans, je souhaiterais souligner que le nombre de chaires au Collège de France est limité. Or, il est dit, par ailleurs, qu'il convient de soutenir les jeunes chercheurs et de s'assurer qu'ils restent en France. Les associations disciplinaires, notamment l'association des jeunes docteurs, avec lesquelles j'ai discuté ont été quelque peu surprises par cette proposition : cela signifie que le renouvellement générationnel ne s'opérera pas.

N'oublions pas que les professeurs du Collège de France bénéficient des mêmes prérogatives, en termes d'éméritat, d'honorariat, etc., et peuvent parfaitement participer au jury de thèse. Passer de 70 à 73 ans n'est pas de nature à envoyer un signal cohérent avec les objectifs poursuivis par ce projet de loi.

Mme Marie-Pierre Monier , sénatrice . - Monsieur Hetzel, nous vous soutiendrons, puisque nous souhaitions supprimer cette disposition.

Mme Laure Darcos , sénatrice, rapporteur pour le Sénat . - Je comprends votre position, cher Patrick Hetzel, mais nous parlons d'un faible nombre de chaires. Il est important que ces professeurs émérites puissent continuer d'exercer jusqu'à la fin de leur mission.

Le texte proposé par la CMP comprend simplement quelques modifications rédactionnelles par rapport à la version adoptée par le Sénat.

La proposition de rédaction n° 3 n'est pas adoptée.

L'article 9 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 9 bis
Libertés académiques

Mme Laure Darcos , sénatrice, rapporteur pour le Sénat . - À l'article 9 bis - adopté en séance publique par le Sénat en tant qu'article 1 er A et déplacé au titre II, conformément au souhait de nos collègues députés -, il est proposé une nouvelle rédaction afin de tenir compte de l'émoi suscité par cette disposition au sein de la communauté universitaire et de ne pas laisser penser que l'objectif était de fixer une limite aux principes de caractère constitutionnel que constituent la liberté et l'indépendance des enseignants-chercheurs.

Cette nouvelle rédaction est très proche de celle qui est proposée par Patrick Hetzel, tout en étant plus resserrée. La dernière phrase que vous proposez, cher collègue, pourrait jeter le trouble, puisqu'elle fait appel à d'autres principes constitutionnels, la liberté d'opinion et la liberté de communication. Nous préférons une rédaction claire.

M. Patrick Hetzel, député . - Je suis sensible à l'argument consistant à ne pas vouloir mélanger les différents registres. Effectivement, nous pouvons ne pas faire référence à la liberté d'expression en tant que telle, afin qu'il n'y ait pas d'ambiguïté.

Je suggère, par rapport à ce qui nous est proposé par les rapporteurs, que nous rajoutions le terme « constitutionnel », ce qui permettrait de le sanctuariser, compte tenu des débats que nous avons eus sur le sujet. Nous enverrions ainsi un signal à la communauté.

Mme Laure Darcos , sénatrice, rapporteur pour le Sénat . - Je n'ai pas consulté l'autre rapporteure, mais il serait important que vous apportiez votre pierre à cet article, puisque vous avez été le premier à faire cette proposition à l'Assemblée nationale. Je sais que cette définition vous tient à coeur, je suis d'accord avec votre proposition d'ajout.

Mme Danièle Hérin, députée, rapporteure pour l'Assemblée nationale. -. Je suis également totalement d'accord.

M. Max Brisson , sénateur . - Je suis heureux de constater que Patrick Hetzel ne sera pas uniquement soutenu, cet après-midi, par Sylvie Robert...

Je voudrais également que nous sortions par le haut de ce débat, qui est noble. Des rédactions multiples ont créé des émotions, qui sont tout à fait légitimes. La rédaction proposée par nos rapporteurs, modifiée par Patrick Hetzel, exprime, me semble-t-il, exactement ce que nous voulions tous.

M. Frédéric Reiss, député. - Il s'agit effectivement d'une bonne proposition de rédaction, qui a sa place dans la loi. Dans le cadre d'un débat au Conseil de l'Europe, relatif aux menaces sur les libertés académiques et l'autonomie des universités, nous avons évoqué ce sujet.

M. Bruno Studer, député, vice-président. - Je soutiens également la proposition de M. Hetzel.

M. Francis Chouat, député. - Ne pouvant pas exercer un droit de vote, je souhaiterais néanmoins dire explicitement mon accord avec la modification apportée par M. Hetzel.

Mme Sylvie Robert , sénatrice . - Je suis en parfait accord avec cette nouvelle rédaction, et ravie qu'elle rassemble les familles politiques.

Mme Laure Darcos , sénatrice, rapporteur pour le Sénat . - Au regard de ce qui relève du bloc de constitutionnalité en tant que tel et de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, permettez-moi de suggérer la rédaction suivante : « à caractère constitutionnel. »

M. Laurent Lafon , sénateur, président . - L'article 9 bis nouveau, sur proposition de Patrick Hetzel, est ainsi rédigé : « Elles s'exercent conformément au principe à caractère constitutionnel d'indépendance des enseignants-chercheurs... ».

La proposition de rédaction n° 1, modifiée, est adoptée .

L'article 9 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

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