LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté, sans modification, les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements ».
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mercredi 24 octobre 2018, sous la présidence de M. Vincent Éblé , président, la commission a examiné le rapport de M. Pascal Savoldelli, rapporteur spécial, sur la mission « Remboursements et dégrèvements ».
M. Pascal Savoldelli , rapporteur spécial . - La mission « Remboursements et dégrèvements » retrace les dépenses budgétaires résultant mécaniquement de l'application des dispositions fiscales prévoyant des dégrèvements d'impôts, des remboursements ou des restitutions de crédits d'impôt. Le caractère mécanique de ces dépenses implique que les crédits de la présente mission soient évaluatifs. En d'autres termes, ils ne constituent pas un plafond, contrairement à ceux des autres missions budgétaires.
La mission est composée de deux programmes, l'un consacré aux remboursements et dégrèvements d'impôts d'État, l'autre aux mêmes opérations pour les impôts directs locaux, que je vous présenterai successivement, après avoir dit quelques mots sur l'ensemble de la mission.
Pour 2019, 135,7 milliards d'euros de crédits sont demandés au titre de la présente mission, soit une augmentation de 15 milliards d'euros environ par rapport à la loi de finances pour 2018, ce qui constitue un nouveau record pour cette mission. Cette augmentation très importante des crédits s'explique notamment, s'agissant des impôts d'État, par la mise en oeuvre du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu et, pour les impôts locaux, par la seconde tranche du dégrèvement de taxe d'habitation pour 80 % des Français.
Au total, les remboursements et dégrèvements devraient représenter un tiers environ des recettes fiscales brutes. Cette proportion, qui ne cesse d'augmenter après la parenthèse consécutive à la réforme de la taxe professionnelle en 2010, traduit une politique fiscale qui repose de façon importante et croissante sur des mécanismes de réduction fiscale, qui grèvent en contrepartie les dépenses budgétaires et entrave les possibilités d'action de l'État. Le montant très important que représentent les remboursements et dégrèvements rendrait nécessaire une revue régulière et détaillée de leur pertinence.
Les remboursements et dégrèvements d'impôts d'État sont évalués à 115,8 milliards d'euros en 2019. Ce montant est en augmentation de 7 milliards d'euros par rapport à l'année dernière, dans le prolongement de la hausse quasi ininterrompue de ces remboursements et dégrèvements depuis 2010.
Un paramètre permet d'expliquer cette augmentation pour 2019 : il s'agit de l'entrée en vigueur du prélèvement à la source à compter du 1 er janvier 2019. Le projet de loi de finances évalue les conséquences du prélèvement à la source à 11 milliards d'euros supplémentaires de remboursements et dégrèvements. Deux mécanismes conduisent à cette augmentation. D'une part, un acompte de 60 % du montant des crédits et réductions d'impôt de l'année précédente sera versé en janvier 2019 aux contribuables. Le projet de loi de finances prévoit 5,5 milliards de remboursements et dégrèvements au titre de cet acompte. D'autre part, la mission va retracer les restitutions d'excédents de crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement (CIMR) : 6,9 milliards d'euros sont ainsi inscrits.
Sans surprise, le CICE continue également de peser sur les remboursements et dégrèvements. Le coût prévu du CICE pour 2019 est proche de celui de l'année dernière. L'ensemble de l'effet budgétaire atteint quasiment 20 milliards d'euros en 2019. À partir de 2020, on pourra constater une diminution des remboursements et dégrèvements liés au CICE, puisque le dispositif sera transformé en réduction de cotisations sociales employeurs l'année prochaine.
J'avais souligné l'année dernière la difficulté d'accéder à des informations qui me semblent indispensables pour évaluer une mesure telle que le CICE. J'ai donc demandé cette année la transmission des données qui concernent la répartition des bénéficiaires du CICE. Nous avons obtenu une répartition des créances de CICE consommées de 2013 à 2016 selon trois critères : par département, en fonction de la taille des entreprises et enfin par secteur d'activité. Je tiens bien sûr le détail de ces données à votre disposition et vous trouverez dans le rapport quelques éléments significatifs.
On constate notamment que ce sont les petites et moyennes entreprises qui ont bénéficié le plus de ce dispositif, non seulement en volume, mais également si l'on rapporte les montants au nombre d'emplois salariés que représentent ces PME. Pour les secteurs d'activité, ce sont les industries manufacturières, le commerce et la construction qui bénéficient le plus du CICE. Au regard de l'objectif de compétitivité poursuivi par le CICE, l'industrie n'aura bénéficié que de 25 % des crédits d'impôts en Haute-Garonne, en Isère, dans l'Oise ou le Pas-de-Calais, et seulement de 15 % dans le Nord. À mon sens, cela remet en cause la pertinence même du CICE. Une remarque enfin sur la répartition territoriale : il importe de noter que l'impôt sur les sociétés est payé au siège social des entreprises, notamment quand elles ont plusieurs établissements. Le montant de CICE de Paris ou des Hauts-de-Seine où se situent de nombreux sièges sociaux est donc probablement surévalué et, inversement, celui de certains départements industriels est minoré. Malgré cette nuance, la carte des bénéficiaires correspond dans l'ensemble à la carte des principaux bassins d'emplois français. Néanmoins, l'intensité du CICE dans certains territoires comme dans la région Pays-de-Loire reproduit la France des bas salaires et réduit le CICE à une sorte d'exonération de cotisations sociales. Dans mon département, les entreprises bénéficient en moyenne de 9 500 euros de crédit d'impôt : ce surplus de trésorerie ne permet pas de créer des emplois.
J'en viens à la partie relative aux impôts locaux. Le montant des remboursements et dégrèvements d'impôts locaux atteint le niveau record de 20 milliards d'euros, notamment du fait de la deuxième tranche du dégrèvement de taxe d'habitation pour 80 % des Français, et continuera à croître en 2020, lorsque sera mise en oeuvre la troisième tranche du dégrèvement.
Dix ans à peine après la réforme de la taxe professionnelle, l'État redevient le « premier contribuable local », dans la mesure où, en 2020, il prendrait en charge 22 % de la fiscalité économique et 37 % de la fiscalité ménage, en attendant la future réforme de la fiscalité locale.
S'agissant des remboursements et dégrèvements d'impôts locaux économiques, nous avions longuement parlé l'an dernier des conséquences de la censure par le Conseil constitutionnel des modalités de calcul du dégrèvement barémique de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Cette décision impliquait un coût important pour l'État au titre des contentieux, un renchérissement du coût du dégrèvement barémique, mais également un risque accru d'optimisation fiscale de la part des groupes de sociétés.
Un an plus tard, le coût des contentieux pour l'État s'élève à 610 millions d'euros, dont 310 millions d'euros ont déjà été exécutés en 2017. Par ailleurs, la hausse du coût du dégrèvement barémique, pour la seule année 2018, a représenté pour l'État 300 millions d'euros. À l'inverse, la décision d'étendre la consolidation du chiffre d'affaires à tous les groupes de société, qu'ils aient ou non activé l'option fiscale, représente, à compter de 2019, des recettes supplémentaires pour l'État de 340 millions d'euros par an. Ainsi, le solde des conséquences de cette décision sera positif au bout de quelques années.
Concernant les dégrèvements de taxe d'habitation, je souhaite profiter de cette mission pour évoquer l'avenir de cette imposition. En décembre dernier, le président de la République a annoncé son souhait de supprimer totalement la taxe d'habitation ; le Premier ministre a précisé que cette suppression serait effective d'ici 2021 et le ministre de l'action et des comptes publics a récemment annoncé le dépôt d'un projet de loi de finances rectificative en janvier 2019. Nous connaissons bien les limites de cette imposition, qui pèse parfois de façon plus importante sur des ménages modestes que sur des ménages aisés, sans qu'il soit possible de justifier de façon satisfaisante les écarts au sein d'une même commune. C'est tout le débat que nous avions eu en commission sur la révision des valeurs locatives. Je regrette que le Gouvernement choisisse de supprimer cette imposition, plutôt que de la réformer pour qu'elle fonctionne de façon satisfaisante.
La taxe d'habitation représente un tiers des recettes fiscales du bloc local et plus de 20 % de ses recettes totales. Sa suppression déstabilisera ces collectivités territoriales et leur retirera un levier essentiel de leur action. Elle pourra également créer des inégalités importantes entre collectivités, selon le poids relatif de cette imposition dans leurs recettes actuelles et selon, par exemple, la densité de résidences secondaires, s'il se confirme que ces logements demeureraient taxés. Dans ce cas, les conséquences pourraient être importantes et les inégalités pourraient se creuser encore davantage. Pour ma part, je souhaite le maintien de la taxe d'habitation, associée à une révision rapide des valeurs locatives des locaux d'habitation. Le revenu pourrait être davantage pris en compte pour calculer le plafonnement de cette taxe. La taxe professionnelle a fait l'objet un temps d'un plafonnement à la valeur ajoutée, qui en a allégé le montant pour la plupart des PME et des ETI.
Compte tenu de ces observations, du poids du CICE et des incertitudes quant à son utilité, des doutes demeurant sur la compensation de l'allégement de la taxe d'habitation, je vous invite à ne pas adopter les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements ».
M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Une fois n'est pas coutume, je partage en grande partie les propos de notre rapporteur spécial, même si je n'en tire pas forcément les mêmes conclusions.
Plutôt que d'instaurer le CICE, il aurait été préférable de baisser immédiatement les charges afin de réduire le coût du travail en France, coût qui désavantage notre pays par rapport à nos concurrents. À l'époque, le crédit d'impôt a été privilégié à la réduction de charges, pour des raisons de trésorerie vu qu'il permet de décaler le coût.
Il reste beaucoup d'incertitudes sur la suppression de la taxe d'habitation : alors que nous examinons le projet de loi de finances pour 2019, rien n'est dit sur les mesures de remplacement. Cela démontre bien que le Gouvernement ne dispose toujours pas de solution définitive.
Le montant total des dégrèvements est considérable, certains d'entre eux n'étant que provisoires. Cette mission n'a néanmoins pour objectif que de constater le montant des dégrèvements et non pas de se prononcer sur l'opportunité de telle ou telle mesure. Les chiffres qui nous sont présentés me semblent réalistes, je ne vois donc pas de raison de m'opposer à l'adoption des crédits de cette mission, même si l'on peut être en désaccord sur certaines des décisions que reflète cette mission. Un rejet signifierait que nous ne sommes pas d'accord avec les chiffres présentés, ce qui n'est pas le cas.
M. Vincent Delahaye . - Quel est le coût budgétaire du prélèvement à la source ? Il est dit que 11 milliards d'euros supplémentaires sont prévus pour des remboursements et des dégrèvements, dont 6,9 milliards d'euros pour les restitutions d'excédents du crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement (CIMR). J'aimerais des explications plus détaillées.
M. Philippe Dallier . - J'aurais, moi aussi, préféré une réforme des valeurs locatives même étalée sur dix ans. Malheureusement, cette hypothèse n'a plus lieu d'être.
Je m'interroge sur le calendrier : la deuxième tranche de suppression de la taxe d'habitation interviendra en 2019 et la troisième tranche en 2020 pour 80 % de la population. Comme le Conseil constitutionnel a dit en décembre dernier que la suppression devait être complète, j'imaginais qu'elle interviendrait lors de la troisième tranche, mais il semble que ce sera pour 2021. Est-ce le cas ? Budgétairement, la décision n'est pas neutre.
M. Bernard Delcros . - Alors que l'année dernière nous nous interrogions sur l'impact du CICE sur les territoires et les entreprises, notre rapporteur nous apporte des informations précises et bienvenues. On mesure bien ainsi les limites du CICE ; la réduction des charges pesant sur les employeurs sera bien plus saine et lisible.
Je souhaite aussi comprendre le chiffre de 11 milliards d'euros attaché au prélèvement à la source. S'agit-il de charges supplémentaires ou d'un montant que l'État aurait dû engager à un autre moment ?
Enfin, j'attends avec impatience le projet de loi annoncé sur la compensation de la taxe d'habitation : aujourd'hui, nous sommes dans le flou.
M. Philippe Adnot . - Je ne voterai pas ces crédits car je suis opposé à la suppression de la taxe d'habitation qui va favoriser les plus riches. En effet, plus les revenus sont importants, plus la taxe d'habitation augmente, même si cette évolution parallèle ne se vérifie pas toujours.
En outre, la suppression de la taxe d'habitation est d'une injustice totale pour les collectivités qui se sont attachées à maintenir un faible taux d'imposition : cette réforme va bénéficier aux collectivités qui avaient voté les taux les plus élevés. Mon département a été le seul à ne pas instaurer la taxe locale d'équipement pour ne pas pénaliser les jeunes ménages. Mon successeur l'a instaurée pour éviter d'être sanctionné si cette taxe venait à être supprimée. La taxe d'habitation compense les services rendus aux habitants. Dans les communes rurales, la taxe est peu élevée car les services se trouvent ailleurs. La suppression de la taxe d'habitation va accroître les différences entre milieux ruraux et urbains : puisqu'il n'y aura plus d'impôts, mieux vaudra habiter là où se trouvent les services.
M. Marc Laménie . - Près de 136 milliards d'euros de dégrèvements : c'est un montant considérable et, pourtant, nous ne savons pas quels moyens humains sont affectés à cette mission. Pourriez-vous nous en dire plus ?
La réforme des valeurs locatives aurait nécessité un travail considérable.
Mme Christine Lavarde . - Ce rapport est intéressant, mais n'aurait-il pas dû aborder la question des compensations qui, au fil du temps, s'amenuisent ? Ainsi en est-il de l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés non bâties pour les terrains situés en zone Natura 2000. Cette exonération était compensée à 100 % par l'État mais ce remboursement a progressivement diminué. Aujourd'hui, les communes concernées n'ont plus les moyens de préserver ces terrains.
M. Claude Raynal . - Ce rapport est très intéressant, notamment la partie sur le CICE qui semble, en définitive, ne pas être une si mauvaise mesure que cela. Le CICE devait faire en sorte que les grandes entreprises soient compétitives sur le plan international. D'après vos chiffres, 25 % de ces entreprises ont bénéficié de ce crédit d'impôt. En outre, le but était de restaurer la rentabilité des entreprises et les résultats ont été probants puisque les investissements sont repartis à la hausse, entraînant à leur suite croissance et créations d'emplois. Certes, il y a eu des effets de bord et certaines entreprises ont bénéficié du CICE alors qu'elles n'en avaient pas besoin. Je préfère franchement le CICE qui aide les entreprises au prélèvement forfaitaire unique qui ne profite qu'aux actionnaires.
À l'avenir, on parlera du CICE comme d'une excellente mesure à mettre au crédit du précédent quinquennat.
Juste après l'annonce de la suppression de la taxe d'habitation, nous avions dit que le Conseil constitutionnel n'accepterait pas que cette mesure ne bénéficie pas à tout le monde. Rappelons-nous aussi que nous avons connu une aventure folle lors de la suppression de la taxe professionnelle : il nous a fallu cinq ans pour rectifier toutes les erreurs et oublis.
Comme Philippe Dallier, je m'interroge sur la date retenue pour parachever cette réforme : le Conseil constitutionnel acceptera-t-il que cette suppression soit étalée jusqu'en 2021 ? Cela dit, il s'agit de la seule mesure en faveur du pouvoir d'achat de nos concitoyens et ils y sont très sensibles. En revanche, je comprends les inquiétudes sur les répercussions de cette mesure sur les finances locales. Nous en reparlerons en 2019.
Cela dit, nous voterons ces crédits.
M. Jean Pierre Vogel . - Le dégrèvement de la taxe d'habitation prend-il en compte la convergence des taux lors de la création de communes nouvelles ou de fusion de communautés de communes ? Ce dégrèvement est en effet calculé sur la base des taux votés par les collectivités en 2017 mais ces dernières ont pu faire converger leurs taux en cas de fusion.
A-t-on une idée du mode de financement de ce dégrèvement ? Sera-t-il financé par des mesures d'économies sur le budget de l'État ou par le déficit, et donc par l'emprunt ? Je dénonce la campagne ignominieuse avec le « #BalanceTonMaire ». Je ne suis pas sûr que la mesure en faveur du pouvoir d'achat vantée par notre collègue Claude Raynal soit aussi positive qu'il le prétend : les maires sont en effet obligés d'augmenter les impôts locaux pour financer les charges nouvelles transférées par l'État.
M. Jacques Genest . - La baisse de la taxe d'habitation n'a pas permis d'augmenter le pouvoir d'achat de beaucoup de nos concitoyens. Dans les territoires ruraux, une grande partie de la population ne payait pas cette taxe et ceux qui doivent prendre leur voiture tous les jours dépensent 1 000 euros de plus par an. En outre, comme l'État compense la taxe foncière des logements sociaux, toute une partie de la population n'aura plus aucun lien avec sa commune. C'est grave.
Puisque notre Premier ministre assume la hausse des taxes sur les carburants, qu'il en reverse une partie aux territoires ruraux afin que ces derniers puissent vivre. Sinon, les prochaines élections risquent de rappeler cruellement certaines réalités.
M. Philippe Dominati . - Comme l'a dit Claude Raynal, la taxe d'habitation est un impôt injuste et désuet. Rendons hommage à un Gouvernement qui, pour une fois, supprime un impôt. Malheureusement, le montant des prélèvements obligatoires sera toujours aussi important à la fin du quinquennat.
Une réforme des ressources des collectivités territoriales est indispensable, mais leur défense ne doit pas se faire au détriment du contribuable.
M. Victorin Lurel . - J'ai du mal à comprendre comment certaines réductions d'impôt vont être prises en compte avec le prélèvement à la source. Je m'interroge ainsi sur les abattements fiscaux outre-mer de 30 ou 40 %. Les réductions d'impôt en faveur de l'investissement locatif se retrouvent en partie sur le crédit d'impôt modernisation du recouvrement (CIMR) mais qu'en sera-t-il du Girardin industriel ?
Dispose-t-on d'une répartition territoriale des crédits d'impôts pour les sous-actions 12-02 et 12-08 ? Enfin, disposez-vous de données précises pour le CICE en outre-mer ?
M. Vincent Éblé , président . - J'ai interrogé le ministre Gérald Darmanin sur les dispositifs fiscaux outre-mer mais nous n'avons pas encore reçu les éléments de réponse souhaités.
M. Michel Canévet . - Lorsque la suppression de la taxe d'habitation a été annoncée pour 80 % de la population, le coût de la mesure était estimé à 10 milliards d'euros. Cette estimation est-elle toujours d'actualité ?
M. Vincent Éblé , président . - Beaucoup de questions s'adressent davantage à Bercy qu'à notre rapporteur.
M. Pascal Savoldelli , rapporteur spécial . - Certaines questions dépassent en effet le cadre de ce rapport.
Le comité de suivi du CICE, piloté par France Stratégie, conclut à des effets difficilement identifiables du CICE sur l'investissement. En outre, la préservation ou la création de chaque emploi aura coûté 245 000 euros : ce n'est pas rien ! Enfin, aucun contrôle de l'utilisation de ces fonds n'a été réalisé par les services fiscaux, ce qui est inconcevable pour les parlementaires que nous sommes.
Le solde du prélèvement à la source se montera à 11 milliards d'euros, avec 5,5 milliards d'euros d'acomptes et 6,9 milliards d'euros de restitutions d'excédents de CIMR, montant duquel il faut déduire 1,2 milliard d'euros de moindres restitutions. En revanche, il n'y a pas de répartition territoriale de la restitution des crédits d'impôts liés au prélèvement à la source.
La suppression de la taxe d'habitation interviendra « au plus tard en 2021 », d'après les propos du Premier ministre. Le texte devrait être déposé en janvier 2019. On reste dans des conditionnalités. Le dégrèvement pour 80 % des Français coûtera 10 milliards d'euros environ. Ce coût a été intégré à la trajectoire de la loi de programmation des finances publiques que le Parlement a adoptée l'an dernier ; la suppression totale coûtera 10 milliards d'euros supplémentaires, qui à ce jour ne sont pas financés.
La compensation des dégrèvements n'est pas minorée, mais le taux est gelé. Ainsi, la compensation de la taxe d'habitation est calculée sur le taux de 1991.
Comme Philippe Adnot, je pense qu'il faudrait davantage tenir compte des revenus pour calculer la taxe d'habitation. Certes, en moyenne, la taxe d'habitation augmente avec le revenu, mais au sein de cette moyenne, les écarts sont colossaux. Et la taxe d'habitation est dégressive : plus le revenu augmente, moins la taxe d'habitation représente une part importante du revenu.
Il me semblerait opportun de fixer des critères pour exonérer de charges les employeurs. Or, tel n'est pas le cas aujourd'hui : l'exonération sera aveugle et générale ; elle ne fixera pas d'ambitions pour le développement économique de notre pays.
M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Pour répondre à Vincent Delahaye, notre rapporteur spécial n'a évoqué que le seul CIMR : en 2018, les revenus normaux seront effectivement neutralisés par le crédit d'impôt mais tous les revenus exceptionnels seront taxés. Le délai de reprise a d'ailleurs été étendu d'un an. Le versement d'acomptes aura un effet de trésorerie, mais l'État percevra des recettes supplémentaires dues à la taxation de tous les revenus exceptionnels au titre de 2018. En revanche, je ne pense pas ces rentrées fiscales ont été prises en compte sur cette mission.
M. Vincent Delahaye . - Et que se passera-t-il pour les revenus exceptionnels perçus en 2019 ?
M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Ils seront taxés au fil de l'eau. Les primes exceptionnelles non prévues dans le contrat de travail et versées en 2018 seront taxées.
À l'issue de ce débat, la commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements ».
*
* *
Réunie à nouveau le jeudi 22 novembre 2018, sous la présidence de M. Vincent Éblé , président, la commission des finances, a confirmé sa décision de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements ».