Rapport n° 535 (2017-2018) de M. Dany WATTEBLED , fait au nom de la commission des lois, déposé le 5 juin 2018
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LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS
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EXPOSÉ GÉNÉRAL
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I. LES CAMÉRAS MOBILES : DES DISPOSITIFS
RÉCENTS POUR PRÉVENIR LES ATTEINTES À LA
SÉCURITÉ PUBLIQUE ET RENFORCER LA PROTECTION DES AGENTS
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II. UNE PROPOSITION DE LOI QUI VISE À
ÉTENDRE L'USAGE DES CAMÉRAS MOBILES AUX SAPEURS-POMPIERS ET AUX
SURVEILLANTS DE L'ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE
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III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION : ADOPTER
LA PROPOSITION DE LOI SOUS RÉSERVE DE QUELQUES AJUSTEMENTS POUR GARANTIR
LE DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVÉE
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I. LES CAMÉRAS MOBILES : DES DISPOSITIFS
RÉCENTS POUR PRÉVENIR LES ATTEINTES À LA
SÉCURITÉ PUBLIQUE ET RENFORCER LA PROTECTION DES AGENTS
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EXAMEN DES ARTICLES
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Article 1er - Expérimentation de l'usage
des caméras individuelles par les sapeurs-pompiers
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Article 2 - Équipement des personnels de
l'administration pénitentiaire de caméras mobiles
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Article 2 bis (nouveau) - Pérennisation de
la possibilité pour les agents de police municipale d'utiliser des
caméras mobiles
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Article 3 (supprimé) - Gage de
recevabilité financière
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Article 1er - Expérimentation de l'usage
des caméras individuelles par les sapeurs-pompiers
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EXAMEN EN COMMISSION
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LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
ET CONTRIBUTION ÉCRITE
N° 535
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2017-2018
Enregistré à la Présidence du Sénat le 5 juin 2018 |
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de loi relative à l' harmonisation de l' utilisation des caméras mobiles par les autorités de sécurité publique ,
Par M. Dany WATTEBLED,
Sénateur
(1) Cette commission est composée de : M. Philippe Bas , président ; MM. François Pillet, Jean-Pierre Sueur, François-Noël Buffet, Jacques Bigot, Mmes Catherine Di Folco, Sophie Joissains, M. Arnaud de Belenet, Mme Nathalie Delattre, MM. Pierre-Yves Collombat, Alain Marc , vice-présidents ; M. Christophe-André Frassa, Mme Laurence Harribey, MM. Loïc Hervé, André Reichardt , secrétaires ; Mme Esther Benbassa, MM. François Bonhomme, Philippe Bonnecarrère, Mmes Agnès Canayer, Maryse Carrère, Josiane Costes, MM. Mathieu Darnaud, Marc-Philippe Daubresse, Mme Jacky Deromedi, MM. Yves Détraigne, Jérôme Durain, Mme Jacqueline Eustache-Brinio, MM. Jean-Luc Fichet, Pierre Frogier, Mmes Françoise Gatel, Marie-Pierre de la Gontrie, M. François Grosdidier, Mme Muriel Jourda, MM. Patrick Kanner, Éric Kerrouche, Jean-Yves Leconte, Henri Leroy, Mme Brigitte Lherbier, MM. Didier Marie, Hervé Marseille, Jean Louis Masson, Mme Marie Mercier, MM. Thani Mohamed Soilihi, Alain Richard, Simon Sutour, Mmes Lana Tetuanui, Catherine Troendlé, M. Dany Wattebled . |
Voir les numéros :
Sénat : |
337 et 536 (2017-2018) |
LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOISRéunie le mardi 5 juin 2018, sous la présidence de M. Philippe Bas, président , la commission des lois a examiné le rapport de M. Dany Wattebled, rapporteur , et établi son texte sur la proposition de loi n° 337 (2017-2018) relative à l'harmonisation de l'utilisation des caméras mobiles par les autorités de sécurité publique , présentée par M. Jean-Pierre Decool et plusieurs de ses collègues. Cette proposition de loi vise à étendre l'utilisation des caméras mobiles , déjà déployées au bénéfice des agents de la police nationale et de la gendarmerie nationale, des agents de police municipale et des agents des services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP, à deux nouvelles catégories d'agents publics, les sapeurs-pompiers et les surveillants de l'administration pénitentiaire , qui sont confrontés, dans le cadre de leurs missions, à une agressivité croissante. Après avoir rappelé, à titre liminaire, le cadre légal d'utilisation des caméras mobiles ainsi que le bilan positif qui en a été tiré le rapporteur a rappelé que si l'extension proposée apparaissait souhaitable au regard des conditions d'intervention toujours plus difficiles de ces agents, il revenait néanmoins au législateur, en raison des atteintes portées au droit au respect de la vie privée, de s'assurer de la proportionnalité des dispositifs proposés . À son initiative, la commission a adopté cinq amendements . Elle a, en premier lieu, réécrit l'article 1 er de la proposition de loi afin de mieux encadrer l'usage des caméras mobiles par les sapeurs-pompiers . Le champ d'utilisation de ces caméras a ainsi été limité aux situations présentant un risque d'atteinte grave à l'intégrité physique des agents et la possibilité de procéder à des enregistrements en cas de risque d'atteinte au secret médical a été exclue . La commission a par ailleurs prolongé d'une année la durée de l'expérimentation, prévu qu'un rapport d'évaluation soit remis au Parlement et précisé que le décret d'application devra être pris non seulement en Conseil d'État, mais également après avis motivé et publié de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL). En deuxième lieu, la commission a rendu expérimental, pour une durée de trois ans, l'article 2 de la proposition de loi relatif à l'utilisation des caméras mobiles par les surveillants de l'administration pénitentiaire, tout en étendant son champ d'application aux missions présentant un risque particulier d'incident ou d'évasion, soit en raison de la nature même des missions exercées par les surveillants, soit compte tenu du niveau de dangerosité des détenus concernés. De manière à assurer la proportionnalité du dispositif, la commission a prévu que les caméras ne pourraient être utilisées que par des personnels individuellement désignés et qu'elles ne sauraient être activées à l'occasion d'une fouille. La commission a par ailleurs adopté deux amendements identiques de son rapporteur et de M. Jean-Pierre Grand afin de pérenniser l'utilisation des caméras mobiles par les agents de police municipale , dont l'expérimentation est arrivée à son terme le 3 juin 2018 et dont le bilan transmis par le Gouvernement se révèle très positif. Enfin, elle a supprimé l'article 3 de la proposition de loi qui visait à compenser les éventuelles pertes de recettes qui résulteraient pour l'État des dispositions de la proposition de loi, dans la mesure où cette dernière n'induit aucune perte de recettes. La commission des lois a adopté la proposition de loi ainsi modifiée. |
EXPOSÉ GÉNÉRAL
Mesdames, Messieurs,
Moins de deux ans après sa généralisation par le législateur, le déploiement de caméras mobiles au bénéfice des agents de la police nationale, de la gendarmerie nationale et des polices municipales a démontré toute son utilité.
Mises en oeuvre afin de sécuriser les interventions des forces de l'ordre, au bénéfice des agents et de la population, les caméras mobiles, petits dispositifs portés par les agents et susceptibles d'être déclenchés manuellement au cours d'une intervention, constituent en effet un vecteur efficace d'apaisement des tensions et de prévention des incidents.
Les difficultés croissantes rencontrées par d'autres agents publics conduisent aujourd'hui à s'interroger sur les possibilités d'extension de l'utilisation des caméras mobiles.
La proposition de loi n° 337 (2017-2018) relative à l'harmonisation de l'utilisation des caméras mobiles par les autorités de sécurité publique, déposée sur le bureau du Sénat par Jean-Pierre Decool et plusieurs de nos collègues, vise ainsi à étendre l'usage des caméras mobiles à deux catégories d'agents publics, les sapeurs-pompiers et les surveillants de l'administration pénitentiaire, confrontés à une agressivité croissante dans l'exercice de leurs missions.
En effet, en 2016, 2 280 sapeurs-pompiers ont déclaré avoir été victime d'une agression au cours d'une intervention, soit une augmentation de près de 20 % par rapport à l'année précédente. Ce chiffre, inquiétant, conduit les sapeurs-pompiers à revendiquer, de manière légitime, un renforcement de leur protection.
Quant aux surveillants pénitentiaires, confrontés à une population carcérale de plus en plus nombreuse et de plus en plus violente et victimes d'agressions trop régulières, ils sont, de la même manière, en quête d'une meilleure sécurisation de leurs interventions, comme en ont encore récemment témoigné les manifestations du mois de janvier dernier.
Bien qu'il doive faire l'objet d'une attention particulière du législateur au regard de ses conséquences en termes de respect de la vie privée, le recours aux caméras mobiles, s'il ne résoudra pas à lui seul l'ensemble des difficultés soulevées, paraît, à tout le moins, constituer un outil intéressant de sécurisation de l'intervention des agents publics.
I. LES CAMÉRAS MOBILES : DES DISPOSITIFS RÉCENTS POUR PRÉVENIR LES ATTEINTES À LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET RENFORCER LA PROTECTION DES AGENTS
A. UNE EXTENSION PROGRESSIVE DE L'USAGE DES CAMÉRAS INDIVIDUELLES EN PARALLÈLE DE LA VIDÉOPROTECTION
Déployé à compter de 2013 à titre expérimental, au bénéfice des agents de police intervenant dans les zones de sécurité prioritaire, le dispositif des caméras individuelles, également appelées « caméra-piétons », répond à un besoin nouveau de « sécurisation » des interventions des forces de l'ordre , tant pour les agents eux-mêmes que pour la population, auquel les dispositifs classiques de vidéo-protection sur la voie publique ne permettaient pas de répondre.
La mise en cause de plus en plus régulière, au cours des dernières années, des agents des forces de l'ordre par le biais d'enregistrements vidéo a renforcé la nécessité pour les forces de l'ordre de se prémunir contre des accusations parfois excessives . En cas de contentieux ou de contestation des conditions dans lesquelles s'est déroulée une intervention, les enregistrements vidéo permettent de constituer des éléments de preuve objectifs, susceptibles d'être utilisés dans le cadre d'une procédure judiciaire.
En parallèle, face à la dégradation des relations entre les forces de l'ordre et une partie de la population, l'usage de l'enregistrement audiovisuel est également apparu comme un moyen d'apaiser les tensions à l'occasion des interventions, en incitant les citoyens et les agents à une plus grande modération.
L'usage des caméras individuelles a été pérennisé et étendu à l'ensemble des agents de la police nationale et de la gendarmerie nationale par la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l'efficacité et les garanties de la procédure pénale. Comme le relevait notre ancien collègue Michel Mercier, dans son rapport sur le projet de loi, « un bilan positif a en effet été tiré de cette expérimentation : le comité [interministériel à l'égalité et à la citoyenneté] a ainsi observé que ce dispositif permet de collecter des éléments de preuve objectifs, qu'il a également un effet préventif et qu'il facilite en général les interventions des agents » 1 ( * ) .
A l'occasion de cette même loi a par ailleurs été autorisé, à titre expérimental et pour une durée de deux ans, soit jusqu'au 3 juin 2018 , l'usage de dispositifs d'enregistrement vidéo mobile par les agents de police municipale , à deux conditions : d'une part, la conclusion d'une convention de coordination entre la commune et l'État quant à l'articulation des interventions de la police municipale et des forces de sécurité de l'État, d'autre part, l'autorisation du préfet, sur demande préalable du maire.
Enfin, la loi n° 2016-339 du 22 mars 2016 relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs, répondant aux mêmes objectifs de sécurisation des interventions, a autorisé la conduite d' une expérimentation d'une durée de trois ans en vue d'autoriser les agents des services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP , dans le cadre de leurs missions de prévention des atteintes à l'ordre public et de protection de la sécurité des personnes et des biens, à procéder à un enregistrement audiovisuel de leurs interventions à l'aide de caméras individuelles. Cette expérimentation prendra fin au 1 er janvier 2020.
B. LA DÉFINITION D'UN CADRE JURIDIQUE SPÉCIFIQUE ET HARMONISÉ
Eu égard à ses enjeux en matière de respect du droit à la vie privée, le législateur a estimé nécessaire d'encadrer strictement l'usage des caméras mobiles.
Il a défini, à cet effet, un cadre juridique ad hoc , distinct de celui applicable à la vidéoprotection , estimant que celui-ci ne permettait pas de couvrir de manière adéquate l'emploi des caméras mobiles. Ces dernières ont en effet des finalités plus larges que la vidéoprotection « traditionnelle », dans la mesure où elles visent non seulement à prévenir les atteintes à la sécurité publique, mais également à garantir une sécurisation des interventions des forces de l'ordre. Par ailleurs, elles ont vocation à être utilisées en tout lieu, y compris dans des habitations privées. Enfin, contrairement aux caméras de vidéoprotection, qui enregistrent des images en continu, l'enregistrement par les caméras mobiles n'est permis que ponctuellement.
La nécessité d'un encadrement législatif avait d'ailleurs été soulevée par la Commission nationale de l'informatique et des libertés, dans son rapport d'activité de 2015, eu égard aux risques élevés de surveillance des personnes et d'atteinte à la vie privée qui pourraient résulter de l'usage des caméras individuelles.
Bien que ne faisant pas l'objet de dispositions législatives communes 2 ( * ) , les régimes applicables aux différentes catégories d'agents autorisés à employer des caméras mobiles ont été harmonisés par le législateur et répondent ainsi à des principes communs.
1. Des finalités et un périmètre d'emploi strictement définis par la loi
Le législateur a tout d'abord défini, pour chacun des trois régimes d'usage des caméras mobiles, qu'ils soient pérennes ou expérimentaux, les finalités ainsi que le périmètre d'emploi des caméras mobiles.
L'enregistrement audiovisuel ne peut, en aucun cas, être permanent, les agents concernés n'étant autorisés à déclencher les caméras individuelles dont ils sont équipés, au cours d'une intervention, que « lorsque se produit un incident ou lorsqu'est susceptible de se produire un incident, eu égard aux circonstances de l'intervention ou au comportement des personnes concernées ».
Les enregistrements réalisés par les agents poursuivent, dans chaque cas, trois finalités identiques :
- la prévention des incidents au cours des interventions ;
- le constat des infractions qui auraient été commises au cours d'une intervention et la poursuite de leurs auteurs ;
- la formation et la pédagogie des agents : les enregistrements audiovisuels sont en effet destinés à être utilisés comme des supports pédagogiques pour des sessions de formation ou à l'occasion de séances de débriefing opérationnel.
2. Un encadrement des modalités de recours à l'enregistrement vidéo et des conditions de conservation des images
Eu égard aux atteintes potentielles à la vie privée, le législateur a entouré le dispositif de plusieurs garanties destinées à en assurer la proportionnalité.
Ces dernières tiennent tout d'abord à l'information des personnes susceptibles de faire l'objet d'un enregistrement . L'enregistrement ne saurait ainsi être réalisé à l'insu de la personne filmée : les caméras doivent, quels que soient les agents concernés, être portées de façon visible ; en outre, les agents sont tenus d'informer les personnes concernées en cas de déclenchement de l'enregistrement, sauf s'ils en sont empêchés eu égard aux circonstances. Enfin, il est prévu qu'une information générale du public sur l'usage de ces caméras individuelles soit réalisée par les autorités gestionnaires compétentes.
Par ailleurs, les conditions d'accès et de conservation des images enregistrées sont également fixées dans la loi. D'une part, il est prévu que les agents ne disposent pas d'un accès direct aux enregistrements. Les décrets en Conseil d'État pris pour l'application des dispositions législatives précitées précisent que les enregistrements font l'objet, à l'issue de chaque intervention, d'un déversement dans un système informatique, auquel n'a accès qu'un nombre limité de personnes. D'autre part, la durée maximale de conservation des images est fixée à six mois, sauf pour les besoins d'une procédure disciplinaire, administrative ou judiciaire.
Saisie pour avis des décrets en Conseil d'État pris pour l'application de ces régimes législatifs, la Commission nationale de l'informatique et des libertés a « reconnu la pertinence de recourir à de tels dispositifs en l'espèce, compte tenu des finalités poursuivies » et considéré « que les données collectées sont adéquates, pertinentes et non excessives au regard des finalités pour lesquelles elles sont collectées ». Elle a par ailleurs constaté que le législateur avait apporté des garanties essentielles, nécessaires à assurer la proportionnalité du dispositif. Elle a ainsi précisé que la durée de conservation des enregistrements de six mois n'excédait pas la durée nécessaire aux finalités pour lesquelles les enregistrements sont réalisés. Elle a par ailleurs reconnu que l'interdiction pour les agents procédant à l'enregistrement d'accéder directement aux enregistrements constituait une garantie essentielle. Enfin, elle a pris acte que les dispositions législatives prévoyaient une information des personnes dont les données personnelles sont susceptibles d'être collectées et conservées.
C. DES DISPOSITIFS À L'EFFICACITÉ DÉMONTRÉE
Préalablement à la pérennisation du dispositif des caméras mobiles pour les agents de la police et de la gendarmerie nationales, le Gouvernement avait dressé un bilan de l'expérimentation conduite de 2013 à 2016. Si votre rapporteur n'a pas été destinataire du rapport de cette expérimentation, l'étude d'impact de la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l'efficacité et les garanties de la procédure pénale concluait à l'efficacité de l'expérimentation conduite . Elle reconnaissait ainsi « l'effet modérateur du dispositif » et son utilité pour « apaiser une situation tendue ou tendant à se dégrader ». Par ailleurs y était souligné que « les caméras piétons représentent un outil utile pour l'identification de mis en cause et permet d'accréditer les propos des policiers lors des interpellations, notamment pour les faits d'outrage et de rébellion ».
L'expérimentation lancée pour les policiers municipaux s'est achevée le 3 juin dernier, sans que le Parlement ait été destinataire, avant cette date, du rapport de bilan prévu par la loi. Votre rapporteur a toutefois eu communication, dans le cadre des travaux qu'il a conduits sur la présente proposition de loi, de quelques éléments de bilan, qui concluent à l'efficacité du dispositif.
En revanche, l'expérimentation de l'usage des caméras mobiles par les agents des services de sécurité intérieure de la SNCF et de la RATP ne s'achevant, quant à elle, qu'à la fin de l'année 2019, un bilan de sa mise en oeuvre ne sera transmis au Parlement que dans le courant de l'année prochaine.
II. UNE PROPOSITION DE LOI QUI VISE À ÉTENDRE L'USAGE DES CAMÉRAS MOBILES AUX SAPEURS-POMPIERS ET AUX SURVEILLANTS DE L'ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE
La proposition de loi tend à étendre l'usage des caméras mobiles à deux nouvelles catégories d'agents publics : les sapeurs-pompiers, d'une part, les personnels de l'administration pénitentiaire, d'autre part.
A. LE LANCEMENT D'UNE EXPÉRIMENTATION POUR LES SAPEURS-POMPIERS
L' article 1 er de la proposition de loi vise à lancer une expérimentation, d'une durée de deux ans, afin d'autoriser les sapeurs-pompiers, professionnels comme volontaires, à utiliser des caméras individuelles dans le cadre de leurs interventions.
Selon l'exposé des motifs de la proposition de loi, l'extension du dispositif, jusqu'à présent limité à l'usage des forces de sécurité intérieure, répond à la multiplication, dans certaines zones, de phénomènes de violence à l'égard de ces agents publics qui, malgré leurs missions de secours aux personnes, sont l'objet d'attaques en tant que représentants de l'autorité publique.
B. UNE EXTENSION PÉRENNE DE L'USAGE DES CAMÉRAS MOBILES POUR LES SURVEILLANTS DE L'ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE
L' article 2 de la proposition de loi vise à créer un nouveau régime juridique, pérenne, d'utilisation de caméras mobiles par les personnels de l'administration pénitentiaire, dans le cadre des opérations d'extraction judiciaire ou de transfèrement administratif.
Outre l'objectif de faciliter, comme pour les forces de sécurité intérieure, le constat des infractions et la poursuite de leurs auteurs, ce dispositif aurait principalement pour but de prévenir les évasions à l'occasion de ces opérations.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION : ADOPTER LA PROPOSITION DE LOI SOUS RÉSERVE DE QUELQUES AJUSTEMENTS POUR GARANTIR LE DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVÉE
Soucieuse d'assurer la sécurisation de l'intervention des agents publics, votre commission a approuvé les dispositions de la proposition de loi, sous réserve de quelques ajustements destinés à assurer la proportionnalité des dispositifs prévus.
Elle a, par ailleurs, pérennisé l'expérimentation de l'usage des caméras individuelles par les policiers municipaux.
A. RENFORCER LES GARANTIES DE L'EXPÉRIMENTATION DE L'USAGE DES CAMÉRAS MOBILES PAR LES SAPEURS-POMPIERS
Sans remettre en cause le principe d'une extension aux sapeurs-pompiers de l'usage des caméras mobiles, votre commission a estimé nécessaire, eu égard au risque d'inconstitutionnalité du dispositif proposé, de l' encadrer des garanties nécessaires pour en assurer la proportionnalité (article 1 er ) .
Compte tenu des missions particulières des sapeurs-pompiers, notamment par rapport aux forces de sécurité intérieure, elle a précisé le régime juridique de l'utilisation des caméras mobiles plutôt que de renvoyer simplement aux conditions prévues pour la police et la gendarmerie nationales. Elle s'est, à cet égard, attachée à limiter le champ d'utilisation des caméras mobiles aux situations présentant un risque d'atteinte grave à l'intégrité physique ainsi qu'à assurer la protection du secret médical , en précisant que le déclenchement de l'enregistrement ne saurait intervenir à l'occasion d'une intervention à caractère médical.
En raison des délais nécessaires au lancement de l'expérimentation, elle a par ailleurs allongé sa durée de deux à trois ans.
Elle a également prévu, eu égard à la sensibilité des données susceptibles d'être collectées, que les conditions d'application de l'article soient précisées par un décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés .
Enfin, de manière à apporter au Parlement un éclairage sur les conditions de mise en oeuvre de l'expérimentation avant une éventuelle pérennisation, elle a précisé qu'un rapport en dressant un bilan devrait lui être communiqué six mois au plus tard avant son terme.
B. ÉTENDRE LE CHAMP D'USAGE DES CAMÉRAS MOBILES PAR LES PERSONNELS DE L'ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE
De la même manière, votre commission a approuvé le dispositif prévu pour les personnels de l'administration pénitentiaire, estimant qu'il venait compléter les dispositifs de vidéosurveillance actuellement utilisés par l'administration pénitentiaire pour assurer la sécurité des agents et des détenus et éviter tout risque d'incident ou d'évasion ( article 2 ).
Considérant que le recours à l'enregistrement audiovisuel pouvait également se révéler utile au-delà des missions d'extraction judiciaire et de transfèrement administratif, elle a étendu le champ d'utilisation des caméras mobiles aux missions présentant un risque élevé d'incident ou d'évasion , tout en limitant leur usage aux seuls personnels individuellement désignés à cet effet.
En revanche, elle a estimé préférable de n'autoriser, dans un premier temps, l'usage des caméras mobiles qu'à titre expérimental, comme cela a systématiquement été le cas, jusqu'à présent, pour les autres catégories d'agents publics équipés.
C. PÉRENNISER L'USAGE DES CAMÉRAS INDIVIDUELLES PAR LES AGENTS DE POLICE MUNICIPALE
Eu égard aux résultats de l'expérimentation qui lui ont été communiqués, votre commission a adopté un article additionnel qui vise à pérenniser l'expérimentation mise en place pour les agents de police municipale, récemment arrivée à son terme ( article 3 ).
*
* *
Au bénéfice de ces observations, votre commission a adopté la proposition de loi ainsi modifiée.
EXAMEN DES ARTICLES
Article 1er - Expérimentation de l'usage des caméras individuelles par les sapeurs-pompiers
L'article 1 er de la proposition de loi vise à lancer une expérimentation pour autoriser les sapeurs-pompiers professionnels ou volontaires à procéder, au moyen de caméras individuelles, à un enregistrement audiovisuel de leurs interventions.
• Le dispositif de la proposition de loi
Selon les auteurs de la proposition de loi, l'extension aux sapeurs-pompiers de l'usage des caméras piétons répond à la nécessité de prévenir et de mieux réprimer les outrages et les violences dont sont victimes, au même titre que les forces de sécurité intérieure, les sapeurs-pompiers.
Dans ce contexte, l'enregistrement des interventions viserait, d'une part, à apaiser les relations avec la population et, d'autre part, à disposer de preuves lorsque les sapeurs-pompiers sont victimes d'attaques.
D'une durée de deux ans , l'expérimentation concernerait aussi bien les sapeurs-pompiers professionnels que les sapeurs-pompiers volontaires.
Sa mise en oeuvre s'exécuterait dans les conditions prévues à l'article L. 241-1 du code de la sécurité intérieure, applicable aux agents de la police nationale et de la gendarmerie nationale, et serait donc soumise à des garanties identiques.
Ainsi les sapeurs-pompiers ne sauraient procéder à un enregistrement systématique de leurs interventions : ils ne seraient en effet autorisés à activer leurs caméras que lorsque se produit ou est susceptible de se produire un incident. Par ailleurs, les caméras devraient être portées de manière visible et leur déclenchement devrait faire l'objet d'une information aux personnes filmées. Enfin, les conditions de conservation des enregistrements seraient encadrées : d'une part, les agents qui utiliseraient les caméras individuelles ne pourraient en tout état de cause avoir accès aux enregistrements ; d'autre part, les enregistrements ne pourraient être conservés que pour une durée de six mois.
Compte tenu de l'organisation décentralisée des services d'incendie et de secours, la mise en oeuvre de l'expérimentation serait décidée au niveau de chaque département. Ainsi, l'autorisation de recourir aux caméras individuelles serait délivrée par le Gouvernement, sur la demande préalable du service départemental d'incendie et de secours . Cette différenciation territoriale apparaît d'autant plus justifiée que la nécessité pour les sapeurs-pompiers d'utiliser des caméras individuelles pourrait varier en fonction des zones.
Les services départementaux d'incendie et de secours La loi n° 96-369 du 3 mai 1996 relative aux services d'incendie et de secours a transféré la compétence en matière de lutte contre les incendies et de secours, autrefois exercée par les communes et par les établissements publics de coopération intercommunale, aux services départementaux d'incendie et de secours (SDIS). Prévus par les articles L. 1424-1 et suivants du code général des collectivités territoriales, les SDIS sont des établissements publics locaux, chargés : - de la prévention, de la protection et de la lutte contre les incendies ; - de la protection et de la lutte contre les autres accidents, sinistres et catastrophes, technologiques comme naturels ; - des secours d'urgence aux personnes. Composés du corps départemental de sapeurs-pompiers, qui comprend les sapeurs-pompiers professionnels et volontaires, ainsi que les sapeurs-pompiers auxiliaires du service de sécurité civile, les SDIS sont placés, pour l'emploi opérationnel, sous l'autorité du maire ou du préfet. Déterminé par l'article L. 1424-35 du code général des collectivités territoriales, leur financement est pris en charge par les communes, les établissements publics de coopération intercommunale et les départements, ces derniers demeurant le financeur principal des SDIS (58 % du financement total en moyenne). |
De même que s'agissant de l'expérimentation des caméras individuelles pour les policiers municipaux, cette expérimentation serait éligible au fonds interministériel pour la prévention de la délinquance . Prévu par l'article 5 de la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance, ce fonds finance la « réalisation d'actions en faveur de la prévention de la délinquance élaborées par les collectivités territoriales ou leurs établissements publics ».
Les conditions de mise en oeuvre de l'expérimentation seraient précisées par un décret en Conseil d'État.
• Un encadrement nécessaire de l'usage des caméras mobiles afin de garantir le droit au respect de la vie privée
S'il approuve l'objectif poursuivi, à savoir renforcer la protection des sapeurs-pompiers dans le cadre des missions de service public qu'ils assurent, votre rapporteur a toutefois estimé que les dispositions de l'article 1 er de la proposition de loi soulevaient des difficultés de nature constitutionnelle.
Dans le cadre de son avis rendu sur le dispositif de caméras mobiles utilisées par les policiers et gendarmes 3 ( * ) , le Conseil d'État avait estimé que le recours aux caméras mobiles envisagé par le législateur ne portait pas d'atteinte disproportionnée aux droits et libertés constitutionnellement garantis, notamment au droit au respect de la vie privée, dès lors qu'il était, d'une part, justifié par un motif d'intérêt général , à savoir la prévention des atteintes à l'ordre public et leur éventuelle répression, d'autre part, entouré de garanties suffisantes.
En l'espèce, eu égard aux missions confiées aux sapeurs-pompiers, qui, contrairement aux policiers et gendarmes, n'ont pas pour objet la sécurité publique ni ne contribuent à la prévention des atteintes à l'ordre public, votre rapporteur a considéré que les dispositions de l'article 1 er , qui ne prévoient aucune garantie complémentaire par rapport aux régimes d'usage des caméras mobiles existants, étaient susceptibles de porter une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée , et, par conséquent, d'être jugées contraires à la Constitution.
Au demeurant, l'article 1 er ne pose aucune limite quant aux types d'interventions au cours desquelles le recours à l'enregistrement audiovisuel pourrait être autorisé, alors même que les sapeurs-pompiers remplissent une mission de secours à personne, et recèle, dès lors, des risques importants d'atteinte au secret médical .
Considérant toutefois que la nécessité de garantir la protection des sapeurs-pompiers dans le cadre de leur mission de service public pouvait être rattaché à un motif d'intérêt général, votre rapporteur a, avec l'accord de l'auteur de la proposition de loi, considéré qu'il était possible de maintenir le dispositif en l'encadrant de garanties complémentaires de nature à en assurer la proportionnalité au regard des objectifs poursuivis.
À cet effet, votre commission a, à son initiative, adopté un amendement COM-7 réécrivant l'article 1 er de la proposition de loi.
De manière à garantir la constitutionnalité de l'expérimentation proposée, celui-ci restreint l'usage des caméras individuelles aux seuls cas où « se produit ou est susceptible de se produire un incident de nature à mettre en péril leur intégrité physique » et exclut la possibilité pour les sapeurs-pompiers de recourir aux caméras individuelles à l'occasion d'intervention à caractère médical, de manière à assurer le respect du secret médical .
La rédaction adoptée de l'article 1 er inclut les pompiers de Paris et de Marseille, qui bénéficient d'un statut militaire et n'étaient, dès lors, pas intégrés dans le périmètre de la proposition de loi.
Compte tenu des délais nécessaires au lancement d'une telle expérimentation, liés d'une part aux délais de publication du décret d'application et d'autre part aux délais des commandes publiques pour l'acquisition des équipements, votre commission a estimé préférable d' allonger le délai de l'expérimentation de deux à trois ans afin de permettre au législateur de disposer d'éléments de bilan suffisamment probants pour se prononcer, à terme, sur la pérennisation ou non du dispositif.
Par le même amendement, votre commission a également prévu qu'un rapport soit remis par le Gouvernement au Parlement au plus tard six mois avant le terme de l'expérimentation.
Enfin, eu égard à la sensibilité des données susceptibles d'être collectées dans le cadre de ces enregistrements, elle a précisé que le décret en Conseil d'État prévu pour la définition des conditions d'application de l'article serait pris après avis motivé et publié de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, de même que pour les décrets relatifs aux autres dispositifs de caméras mobiles.
Votre commission a adopté l'article 1 er ainsi modifié .
Article 2 - Équipement des personnels de l'administration pénitentiaire de caméras mobiles
L'article 2 de la proposition de loi tend à permettre l'usage de caméras individuelles par les personnels de l'administration pénitentiaire affectés aux missions d'extractions judiciaires ou de transfèrements administratifs.
• La vidéosurveillance en milieu pénitentiaire
La loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire autorise la direction de l'administration pénitentiaire du ministère de la justice à installer et exploiter des dispositifs de vidéosurveillance dans les établissements pénitentiaires, dans deux cas spécifiques.
Son article 58 autorise, en premier lieu, tout établissement pénitentiaire à installer des caméras de surveillance « dans les espaces collectifs présentant un risque d'atteinte à l'intégrité physique des personnes ». Cette installation est obligatoire pour les établissements qui ont ouvert après le 24 novembre 2009, date d'entrée en vigueur de la loi.
En second lieu, en vertu de l'article 58-1 de la loi pénitentiaire 4 ( * ) , des systèmes de vidéosurveillance peuvent également être mis en place par l'administration pénitentiaire au sein de cellules de détention « dans lesquelles sont affectées les personnes placées sous main de justice, faisant l'objet d'une mesure d'isolement, dont l'évasion ou le suicide pourraient avoir un impact important sur l'ordre public eu égard aux circonstances particulières à l'origine de leur incarcération et à l'impact de celles-ci sur l'opinion publique ». Seules peuvent être placées sous vidéosurveillance des personnes en détention provisoire et faisant l'objet d'un mandat de dépôt criminel.
Compte tenu de l'atteinte à la vie privée qui en résulte, le dispositif prévu par l'article 58-1 de la loi pénitentiaire ne peut être mis en oeuvre que de manière exceptionnelle, à l'issue d'une procédure contradictoire. Le placement sous vidéosurveillance est prononcé par une décision motivée du garde des sceaux, pour une durée de trois mois renouvelables. Les conditions de conservation des enregistrements ainsi que de visionnage de ces enregistrements sont strictement encadrés.
• Une extension de la vidéosurveillance aux missions d'extraction judiciaire et de transfèrement de détenus
L'article 2 de la proposition de loi vise à autoriser les personnels de l'administration pénitentiaire à procéder, à l'aide de caméras individuelles, à des enregistrements audiovisuels. Il crée, à cet effet, un nouvel article 58-2 dans la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire.
Contrairement au dispositif prévu par l'article 1 er de la proposition de loi, il ne s'agirait pas d'une expérimentation, mais d'un dispositif pérenne.
L' usage des caméras individuelles par les agents de l'administration pénitentiaire serait strictement défini. Il serait tout d'abord limité aux opérations d'extractions judiciaires ou de transfèrements administratifs , c'est-à-dire à des opérations qui se déroulent en dehors des établissements pénitentiaires et ne peuvent donc, en l'état du droit, faire l'objet d'aucune vidéosurveillance.
De même que pour les policiers et gendarmes, l'enregistrement pourrait être déclenché par les personnels « lorsque se produit ou est susceptible de se produire un incident, eu égard aux circonstances de l'intervention ou en cas de risque d'atteinte à l'ordre public ». Il aurait ainsi pour finalité de prévenir les incidents et les évasions, ainsi que de faciliter le constat des infractions et la poursuite de leurs auteurs, en fournissant des preuves. Il serait également susceptible d'être exploité à des fins de formation et de pédagogie à l'égard des agents.
L'article 2 de la proposition de loi encadre par ailleurs le recours aux caméras individuelles de plusieurs garanties , de manière à assurer une conciliation équilibrée entre la prévention des atteintes à l'ordre public et la protection des droits et libertés constitutionnellement garantis.
Les conditions de déclenchement des caméras individuelles seraient ainsi identiques à celles prévues pour les agents de la police nationale et pour les militaires de la gendarmerie nationale : port apparent de la caméra, information préalable des personnes concernées, information générale du public par le garde des sceaux.
Il en serait de même s'agissant des modalités de conservation et de consultation des enregistrements audiovisuels . Ainsi, ces derniers, qui seraient conservés pendant une durée maximale de six mois, ne seraient pas visionnables directement par les personnels auxquels les caméras seraient confiées, mais uniquement par des personnes désignées par décret, dans le cadre d'une procédure judiciaire, administrative ou disciplinaire.
Les modalités d'application de l'article 2 seraient renvoyées à un décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés.
• Une extension souhaitable du dispositif proposé
Tout en approuvant le principe de l'extension de l'usage des caméras mobiles aux agents de l'administration pénitentiaire, votre rapporteur a constaté que le champ prévu par la proposition de loi ne permettait pas de couvrir l'ensemble des besoins de l'administration pénitentiaire.
Selon les informations qui lui ont été communiquées au cours de ses auditions, l'enregistrement audiovisuel des interventions, s'il peut avoir un intérêt au cours d'une extraction judiciaire ou d'un transfèrement administratif, se révèlerait également utile au sein des établissements pénitentiaires , dans le cadre de situations de crise d'une particulière acuité , au cours desquelles les risques d'incidents et d'atteinte à la sécurité sont particulièrement élevés (émeutes, prises d'otage, rébellion, etc .). Bien que les établissements pénitentiaires soient d'ores et déjà équipés de dispositifs de vidéosurveillance, ces derniers ne permettent en effet que rarement, en cas de commission d'une infraction, d'en identifier les auteurs, soit parce que les caméras installées présentent des angles morts, soit parce qu'elles sont trop éloignées pour permettre l'identification précise d'une personne, par exemple dans le cadre d'une émeute ou d'un rassemblement.
Selon les informations communiquées à votre rapporteur, plusieurs expérimentations d'utilisation de caméras mobiles auraient déjà été conduites au sein de l'administration pénitentiaire, notamment au bénéfice des équipes régionales d'intervention et de sécurité.
À l'initiative de son rapporteur, votre commission a donc adopté un amendement COM-8 étendant le champ d'usage des caméras mobiles par les personnels de l'administration pénitentiaire au-delà des missions d'extraction judiciaire et de transfèrement administratif, y compris à l'intérieur d'un établissement pénitentiaire.
De manière à préserver le droit au respect de la vie privée, l'amendement circonscrit cette extension à des situations présentant un risque caractérisé d'incident ou d'évasion : ainsi, les caméras mobiles ne pourraient être utilisées que dans le cadre de missions présentant, eu égard à leur nature ou à la dangerosité des détenus concernés, un risque particulier d'incident ou d'évasion. Par ailleurs, l'enregistrement ne saurait, y compris dans le cadre de ces missions, être permanent, ne pouvant être déclenché que lorsque se produit ou est susceptible de se produire un incident, eu égard aux circonstances ou au comportement des personnes concernées. Cette rédaction devrait permettre de couvrir les interventions des équipes régionales d'intervention et de sécurité (ERIS) ainsi que des équipes de sécurité pénitentiaire, de même que les missions exercées à l'égard de détenus violents ou radicalisés.
Dans la même logique de proportionnalité, l'amendement précise que seuls les agents individuellement désignés seraient susceptibles d'utiliser ces caméras mobiles. Dans un souci de préservation du droit au respect de la vie privée et du droit au respect de la dignité humaine, il exclut par ailleurs la possibilité de procéder à un enregistrement visuel à l'occasion d'une fouille .
Compte tenu de l'extension proposée du champ d'application de l'article 2 de la proposition de loi, votre commission a estimé préférable de conférer à ce dispositif un caractère expérimental , pour une durée de trois ans, afin de permettre d'une part d'évaluer son efficacité, d'autre part de procéder, le cas échéant, à des ajustements avant sa pérennisation. Dans cette même optique, l'amendement adopté par votre commission prévoit qu'un rapport dressant un bilan de l'expérimentation serait adressé au Parlement au plus tard six mois avant le terme de l'expérimentation.
Votre commission a adopté l'article 2 ainsi modifié.
Article 2 bis (nouveau) - Pérennisation de la possibilité pour les agents de police municipale d'utiliser des caméras mobiles
Introduit par votre commission à l'initiative de son rapporteur et de M. Jean-Pierre Grand, l'article 2 bis tend à pérenniser l'expérimentation des caméras mobiles par les agents de police municipale, prévue par l'article 114 de la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l'efficacité et les garanties de la procédure pénale.
Conditions de mise en oeuvre de
l'expérimentation
En vertu du décret n° 2016-1861 du 23 décembre 2016 relatif aux conditions de l'expérimentation de l'usage de caméras individuelles par les agents de police municipale dans le cadre de leurs interventions, l'équipement des polices municipales de caméras individuelles est subordonné à l' autorisation préalable du préfet , délivrée sur la demande préalable du maire de la commune concernée. Lorsque les agents de police municipale sont employés par un établissement public de coopération intercommunale et mis à disposition de plusieurs communes, la demande doit être formulée par l'ensemble des maires desdites communes. L'utilisation des caméras individuelles par les agents de police municipale est soumise à des finalités et des conditions de mise en oeuvre identiques à celles prévues par l'article L. 241-1 du code de la sécurité intérieure pour les agents de la police nationale et les militaires de la gendarmerie nationale. Conformément à l'article 114 de loi n° 2016-731 du 3 juin 2016, l'expérimentation est éligible au fonds interministériel pour la prévention de la délinquance. |
D'une durée de deux ans, l'expérimentation a pris fin le 3 juin 2018 sans avoir été pérennisée, plaçant les communes ayant équipé leurs polices municipales de caméras mobiles dans une situation de vide juridique.
Bien qu'il n'ait pas respecté le délai fixé par le législateur, le Gouvernement a remis à votre rapporteur un rapport partiel d'évaluation des dispositifs mis en oeuvre 5 ( * ) .
À ce jour, 344 communes ont reçu une autorisation pour déployer, au bénéfice de leurs agents de police municipale, des caméras mobiles. Au total, 2 106 caméras mobiles ont été distribuées.
Les éléments d'évaluation transmis concluent à l'efficacité des dispositifs. Bien qu'à ce jour peu d'enregistrements aient été effectivement réalisés, le seul port des caméras individuelles par les agents de police municipale aurait ainsi eu un effet bénéfique sur les relations avec la population, en réduisant le niveau d'agressivité des particuliers envers les agents. Comme le relève le rapport, « le constat d'une responsabilisation des personnes filmées et d'un plus grand respect envers les agents de police municipale est unanimement constaté ». L'usage des caméras mobiles se serait en outre révélé particulièrement utile pour les communes disposant d'une police municipale aux effectifs restreints, avec un effet rassurant pour les agents intervenant de manière isolée. Enfin, les enregistrements réalisés ont, dans certains cas, permis de recueillir des éléments de preuve, qui ont été utilisés dans le cadre de procédures judiciaires.
Si elle déplore le retard pris par le Gouvernement dans l'évaluation de l'expérimentation et la situation d'urgence dans laquelle il place le Parlement pour se prononcer, votre commission a, au regard de ce bilan positif, adopté l' amendement COM-10 de son rapporteur et l'amendement identique COM-1 rectifié bis de M. Jean-Pierre Grand, afin de pérenniser l'usage des caméras mobiles par les agents de police municipale.
Les deux amendements introduisent, à cet effet, un nouvel article L. 241-2 au sein du chapitre unique du titre IV du livre II du code de la sécurité intérieure, relatif aux caméras mobiles, afin de définir un régime spécifique pour les polices municipales , qui reprend l'ensemble des garanties prévues par le législateur pour la police et la gendarmerie nationales. Ils précisent également les conditions dans lesquelles les polices municipales peuvent être autorisées à recourir à des caméras mobiles.
Votre commission a adopté l'article 2 bis ainsi rédigé .
Article 3 (supprimé) - Gage de recevabilité financière
L'article 3 de la proposition de loi a pour objet de compenser les éventuelles pertes de recettes pour l'État qui pourraient résulter de la mise en oeuvre des dispositions de la présente proposition de loi. Il prévoit, à cette fin, la création d'une taxe additionnelle aux droits sur les tabacs, prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Les dispositions de la présente proposition de loi n'entraînant toutefois aucune perte de recettes, votre commission a adopté, sur la proposition de son rapporteur, l' amendement COM-9 de suppression.
Elle a, en conséquence, supprimé l'article 3.
*
* *
Au bénéfice de ces observations, votre commission a adopté la proposition de loi ainsi modifiée.
EXAMEN EN COMMISSION
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M. Philippe Bas , président . - Conformément à l'article 18 de notre règlement, nous accueillons notre collègue Jean-Pierre Decool, auteur de la proposition de loi relative à l'harmonisation de l'utilisation des caméras mobiles par les autorités de sécurité publique. La parole est à Dany Wattebled, rapporteur du texte.
M. Dany Wattebled , rapporteur . - L'objet de cette proposition de loi est simple : il s'agit d'étendre l'usage des caméras mobiles à deux catégories d'agents publics, les sapeurs-pompiers et les surveillants pénitentiaires.
Avant d'aborder plus précisément le contenu de la proposition de loi, je souhaiterais au préalable vous faire un bref rappel sur la mise oeuvre de ces caméras mobiles, plus communément appelées « caméras-piétons ».
Les caméras mobiles ont été initialement mises en oeuvre, à compter de 2013 et uniquement à titre expérimental, au bénéfice des agents de la police nationale, afin de répondre à un besoin de sécurisation de leurs interventions, tant pour les agents eux-mêmes que pour la population.
L'objectif était double. D'une part, en autorisant les forces de l'ordre à enregistrer leurs interventions, il s'agissait de mieux les protéger contre les accusations parfois excessives dont elles font l'objet. L'idée était qu'en cas de contentieux ou de contestation des conditions dans lesquelles s'est déroulée une intervention, les enregistrements vidéo puissent constituer des éléments de preuve objectifs, susceptibles d'être utilisés dans le cadre d'une procédure judiciaire. D'autre part, face à la dégradation des relations entre les forces de l'ordre et une partie de la population, l'usage de l'enregistrement audiovisuel est apparu comme un moyen d'apaiser les tensions, en incitant les agents et les citoyens à une plus grande modération.
Dans les faits, le recours aux caméras mobiles a démontré toute son utilité. L'effet modérateur sur le terrain a effectivement été ressenti. Le simple port d'une caméra par les agents a bien eu un effet dissuasif et permis d'apaiser certaines situations tendues ou tendant à se dégrader.
Face à ce bilan positif, le législateur a décidé, en 2016, de pérenniser l'usage des caméras mobiles pour la police nationale et la gendarmerie nationale et a créé, la même année, deux expérimentations pour étendre leur utilisation à d'autres catégories d'agents : les agents de la police municipale et les agents des services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP.
Dans la mesure où les caméras-piétons étaient certes efficaces, mais également potentiellement attentatoires au droit au respect de la vie privée, le législateur s'est attaché à encadrer les conditions de leur mise en oeuvre.
Plusieurs garanties ont donc été inscrites dans la loi. En premier lieu, le périmètre du recours aux caméras est strictement défini : l'enregistrement n'est jamais permanent et ne peut être déclenché par l'agent que lorsqu'un incident se produit ou est susceptible de se produire, en raison des circonstances ou du comportement de la personne concernée. Tout déclenchement de la caméra doit par ailleurs faire l'objet d'une information préalable de la personne filmée.
En second lieu, les conditions d'accès aux enregistrements et les modalités de conservation de ces enregistrements sont strictes. Les enregistrements ne sont jamais accessibles aux agents eux-mêmes : ils ne peuvent donc ni les visionner, ni les modifier, ni les effacer. Seul un nombre limité de personnes, généralement les responsables hiérarchiques, peuvent y accéder. En outre, la durée maximale de conservation des images est fixée à six mois.
La proposition de loi étend l'usage des caméras mobiles à d'autres catégories d'agents de sécurité, dont les conditions d'intervention se dégradent chaque jour.
Son article 1 er étend, à titre expérimental, l'usage des caméras mobiles aux sapeurs-pompiers qui sont, il est vrai, confrontés à une agressivité croissante dans l'exercice de leurs missions. Les chiffres le démontrent : en 2016, 2 280 sapeurs-pompiers ont déclaré avoir été victimes d'une agression au cours d'une intervention, soit une progression de près de 20 % par rapport à l'année précédente. Ce chiffre particulièrement inquiétant conduit les sapeurs-pompiers à revendiquer, de manière tout à fait légitime, un renforcement de leur protection. Sur le plan juridique, les conditions de mise en oeuvre de cette expérimentation seraient identiques à celles des policiers et gendarmes.
L'article 2 de la proposition de loi vise, quant à lui, à étendre l'usage des caméras mobiles aux surveillants de l'administration pénitentiaire. Confrontés à une population carcérale de plus en plus nombreuse et de plus en plus violente, les surveillants de l'administration pénitentiaire, victimes d'agressions trop régulières, sont eux-aussi en quête d'une meilleure sécurisation de leurs interventions.
Dans ce cas, le champ d'utilisation des caméras serait toutefois limité : le recours aux caméras ne serait réservé qu'aux opérations d'extraction judiciaire et de transfèrement administratif, qui sont les seules missions au cours desquelles les agents de l'administration pénitentiaire ne disposent pas de vidéosurveillance.
Contrairement à ce qui est envisagé pour les sapeurs-pompiers, les auteurs de la proposition de loi proposent de rendre le dispositif immédiatement pérenne. Les conditions de mise en oeuvre et les garanties prévues sont alignées sur celles qui sont prévues pour les autres catégories d'agents publics.
Sur le principe, les objectifs poursuivis par les auteurs de la proposition de loi me paraissent légitimes. Nos agents publics ne sauraient continuer à faire l'objet d'agressions répétées, simplement parce qu'ils incarnent l'autorité publique. C'est pourquoi je vous proposerai de valider l'extension de l'usage des caméras mobiles qui est proposée.
Plusieurs modifications me paraissent toutefois nécessaires, d'une part, pour assurer la proportionnalité des dispositifs proposés, d'autre part, pour les adapter aux besoins du terrain.
S'agissant des sapeurs-pompiers, l'extension de l'usage des caméras mobiles n'est pas neutre : pour la première fois, nous l'étendrions à des agents qui ne remplissent pas une mission de sécurité publique. Il m'est donc apparu nécessaire de prévoir des garanties supplémentaires pour assurer la proportionnalité du dispositif, garanties que je vous présenterai plus en détail lors de l'examen de mes amendements.
En ce qui concerne les surveillants pénitentiaires, je souhaite vous proposer d'étendre l'usage des caméras mobiles au-delà de ce que prévoit la proposition de loi. Bien entendu, il ne s'agirait pas d'étendre leur usage à tous les surveillants ni à toutes les missions qu'ils remplissent. Il semble néanmoins que l'usage des caméras mobiles puisse se révéler utile dans le cadre de missions qui présentent un risque particulier d'incident ou d'évasion, soit en raison de leur nature - je pense aux missions des équipes régionales d'intervention et de sécurité qui interviennent en cas de crise -, soit en raison du niveau de dangerosité des détenus concernés - je pense notamment aux détenus violents ou radicalisés.
Il m'a été rapporté que l'administration pénitentiaire avait déjà recours à des caméras mobiles, mais sans aucun cadre légal. L'extension que je vous propose aurait donc, à tout le moins, le mérite de donner un cadre à ces pratiques. En contrepartie de cette extension du champ de l'article 2, je vous proposerai de rendre le dispositif expérimental pour une durée de trois ans.
Enfin, il m'est apparu nécessaire de profiter de l'occasion qui nous est donnée d'examiner cette proposition de loi pour pérenniser l'usage des caméras mobiles pour les polices municipales. L'expérimentation qui avait été prévue par le législateur a pris fin le 3 juin 2018. Nous nous trouvons donc aujourd'hui dans une situation de vide juridique, qui fragilise l'usage de ces caméras par les communes.
Le Gouvernement, avec un retard que l'on ne peut que déplorer, nous a transmis un rapport d'évaluation, qui dresse un bilan positif de l'expérimentation. Au total, 344 communes ont demandé à pouvoir se doter de ces caméras, et 2 106 caméras ont été déployées. Le caractère dissuasif du port des caméras a, comme pour les autres forces de l'ordre, été salué par la plupart des communes concernées.
Compte tenu de ce bilan, je vous soumettrai un amendement qui pérennise le dispositif. Plusieurs d'entre vous ont d'ailleurs déposé des amendements en ce sens et devraient donc obtenir satisfaction.
M. Philippe Bas , président . - Je vous remercie, monsieur le rapporteur. Il s'agit du premier rapport que vous présentez devant notre commission. Sachez que vous avez été écouté avec une grande attention par tous nos collègues, qui vous remercient pour cet exposé concis et précis !
M. Jean-Pierre Decool , auteur de la proposition de loi . - Monsieur le président, je vous remercie de m'accueillir au sein de votre commission, afin de débattre de cette proposition de loi. J'ai quelques années de vie publique derrière moi et, tout comme vous, j'observe à quel point les mentalités et l'état d'esprit ont évolué.
Dans les années 1980, je me souviens que lorsque nous évoquions les problèmes des quartiers difficiles, de l'économie souterraine, des zones de non-droit, nous étions traités de « sécuritaires » ! Que d'inepties entendues alors !
Pourtant, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, en son article 2, reconnaît le droit à la sûreté. L'article 12 de cette même Déclaration proclame même que « la garantie des droits de l'Homme et du Citoyen nécessite une force publique ». La sécurité n'est donc pas une nouveauté du XXI e siècle !
Toutefois, la nature de l'insécurité change. Ce ne sont plus simplement les citoyens qui sont victimes, mais les forces de sécurité, cette force publique qui peut être non seulement agressée physiquement, mais également accusée sur le plan juridique d'insulter, de porter des coups, voire de commettre des viols lors de contrôles de police ordinaires. Les plaintes contre les autorités se multiplient aujourd'hui. La police, protectrice, doit se protéger.
À cet effet, des dispositifs de vidéosurveillance - on parle de vidéoprotection aujourd'hui - ont été installés dans de nombreuses villes, avec les résultats que l'on connaît. Des caméras mobiles équipent les uniformes des autorités de sécurité, afin de témoigner des conditions d'une interpellation, d'une arrestation au cours d'un contrôle opéré par les forces de l'ordre.
Nous pouvons regretter, une fois de plus, que la technologie doive se substituer à la parole, à la confiance et au bon sens des hommes et des femmes. Toutefois, le progrès technologique a aussi cet avantage d'apporter des indices et des éléments de preuve pour condamner ou non un comportement répréhensible de part et d'autre. Ce progrès est irréversible, mais a deux faces : il est à la fois le bien et le mal, tel Janus ! Pour autant, nous tenons compte des impératifs fixés par la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL).
Quel est donc l'intérêt de recourir à ce dispositif de caméras mobiles ? Depuis 2012, ces caméras sont utilisées par les agents de la police nationale et les militaires de la gendarmerie nationale dans certaines zones de sécurité publique, afin de garantir les conditions légales de leurs interventions.
La loi du 22 mars 2016 relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs, modifiée par la loi du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, a également créé un régime spécifique pour l'enregistrement audiovisuel des interventions des services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP.
Enfin, la loi du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l'efficacité et les garanties de la procédure pénale, complétée par un décret d'application du 23 décembre 2016, a prévu un dispositif d'expérimentation pour les agents de police municipale dans le cadre de leurs interventions. L'expérimentation, d'une durée de deux ans, s'est déroulée du 3 juin 2016 au 3 juin 2018.
Je suis heureux de constater que cette proposition de loi permettra, par la voie d'un amendement, de pérenniser l'utilisation des caméras mobiles par les polices municipales. Je profite d'ailleurs de l'occasion pour saluer tous les collègues, dont le rapporteur, qui vont nourrir les discussions et soutenir ce texte.
Nous avons observé que le dispositif des caméras-piétons, qui a des avantages et, sans doute, quelques défauts, ne profitait pas à certaines autorités de sécurité, telles que les sapeurs-pompiers, qui ne sont pas toujours considérés comme une autorité de sécurité publique, et les personnels pénitentiaires.
La genèse de cette proposition de loi est simple. Plusieurs maires du département du Nord souhaitaient équiper les pompiers de caméras mobiles. Le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) a même interpellé l'ensemble des parlementaires du Nord pour appeler leur attention sur le problème. Ces maires ne se sont pas vraiment heurtés à un vide juridique, mais plutôt à un flou juridique, qui les a dissuadés de se lancer dans l'expérience.
Cette proposition de loi vise à lever les doutes, à clarifier cette zone d'ombre, en étendant l'utilisation de ces caméras à de nouvelles catégories. Il ne s'agit pas seulement de répondre à un certain retentissement médiatique, notamment celui qui a suivi la violente agression de pompiers en décembre 2017 à Wattrelos ; il s'agit avant tout d'autoriser ces sapeurs-pompiers à bénéficier d'un dispositif dont les policiers municipaux profitent déjà.
C'est la raison pour laquelle l'amendement déposé par la commission à l'article 1 er semble opportun. Il tend à préciser la nature des interventions des sapeurs-pompiers au cours desquelles ceux-ci pourraient recourir aux caméras. Il vise donc à préciser que l'on peut recourir au dispositif lorsque se produit ou est susceptible de se produire un incident de nature à mettre en péril l'intégrité physique de pompiers. Serait également exclue l'utilisation des caméras-piétons pour des interventions de nature médicale.
Il en est de même pour les personnels pénitentiaires, qui pourraient disposer d'un régime spécifique d'utilisation de ces caméras. L'amendement de la commission à l'article 2 contribue également à préciser ce régime.
Déjà, les expérimentations conduites ont fait l'objet de premières observations, notamment dans les communes de Lille et de Quiévrechain dans le Valenciennois. A priori , le système est dissuasif dans la plupart des circonstances, même s'il est préférable de laisser ces expériences s'achever, avant de prendre connaissance de leur bilan et, éventuellement, de réajuster le cadre juridique.
Le dispositif des caméras mobiles n'est certes pas la solution miracle - nous en avons tous conscience -, mais il permet de protéger à la fois les représentants des forces de l'ordre et les personnes qui auraient pu être abusées. Il faut se réjouir de l'équilibre entre liberté et sécurité que ce texte contribue à préserver.
M. François Bonhomme . - Que de chemin parcouru depuis l'installation des premières caméras dans les villes ! À l'époque, cette nouveauté avait inévitablement entraîné son cortège de polémiques et de tensions, alors que les caméras n'avaient été installées que pour répondre à des problématiques réelles en matière de sécurité publique.
Aujourd'hui, nous vivons dans un monde numérique : tout le monde peut visionner sur son téléphone des vidéos d'altercations qui visent à mettre en cause les forces de police dans leur travail. Finalement, l'utilisation de caméras mobiles et l'extension du dispositif qui est proposée contribuent à rééquilibrer la balance. Souvent, ces caméras-piétons apportent en outre une sérénité et un apaisement bienvenus.
J'ai été le rapporteur du projet de loi relatif à la prévention et à la lutte contre les incivilités dans les transports collectifs de voyageurs. L'expérimentation prévue par ce texte a permis aux agents des services internes de sécurité des transports collectifs et au GPSR, le Groupe de protection et de sécurisation des réseaux, de la RATP, de bénéficier de nombreux avantages.
L'extension progressive de l'utilisation des caméras mobiles aux personnels pénitentiaires et aux sapeurs-pompiers, en fonction de la difficulté et de la nature de leurs missions, va dans le même sens et me semble tout à fait opportune. Simplement, j'ai une interrogation concernant les sapeurs-pompiers. Le dispositif proposé ne s'applique-t-il qu'aux sapeurs-pompiers professionnels et, dans ce cas, est-il prévu de l'étendre aux sapeurs-pompiers volontaires dans certaines conditions ? Ce dispositif est-il par ailleurs limité à certaines interventions ?
M. Patrick Kanner . - M. Decool a fait un point sur les différents textes législatifs prévoyant la mise en oeuvre de caméras-piétons. Il a néanmoins oublié la loi relative à l'égalité et à la citoyenneté, texte dans lequel la question de la mise en oeuvre des récépissés avait été soulevée. À l'époque, Bernard Cazeneuve, alors ministre de l'intérieur, avait opposé une réponse ferme à la mise en place de ces récépissés. Moi-même, en tant que ministre de la ville, j'avais défendu cette position devant le Sénat.
En effet, je n'ai jamais cru à une telle solution, alors que j'ai toujours considéré la caméra-piéton comme l'un des principaux facteurs de pacification des relations entre citoyens et forces de police. D'ailleurs, la loi relative à l'égalité et à la citoyenneté a prévu, à titre expérimental, le recours systématique à ces caméras-piétons lors des contrôles d'identité.
Avec la proposition de loi de M. Decool, nous allons donc dans le même sens. Ce texte, soutenu par le rapporteur, va même plus loin. Le groupe socialiste et républicain s'en félicite et soutiendra cette évolution, dès lors qu'elle est encadrée par les dispositifs prévus dans les amendements que nous allons examiner. Ces amendements fixent un cadre aux expérimentations et permettent d'éviter toute forme de débordement.
J'aimerais également vous mettre en garde, mes chers collègues, contre la tentation de « mécaniser » systématiquement tous les rapports sociaux dans notre pays. Il est question ici des gendarmes, des policiers nationaux et municipaux, des sapeurs-pompiers et des surveillants pénitentiaires, ces derniers ayant déjà recours aux caméras dans l'exercice de certaines de leurs missions. Mais d'autres professions font également l'objet de menaces aujourd'hui : les enseignants, les travailleurs sociaux et même les élus d'une certaine façon !
M. François Bonhomme . - C'est vrai !
M. Patrick Kanner . - Nous sommes donc favorables à l'extension de l'utilisation des caméras-piétons, mais il faut garder en tête qu'il ne faut pas « orwelliser » notre société. Une solution mécanique ne remplacera jamais la qualité des rapports sociaux. Il faut toujours privilégier la prévention.
Notre groupe soutiendra l'auteur de la proposition de loi, ainsi que son rapporteur. Il votera donc les amendements que celui-ci a déposés, tout en appelant à cette prudence qui doit permettre de contextualiser l'évolution de notre société.
M. François Grosdidier . - Ayant longtemps été maire, ce sujet m'intéresse depuis de nombreuses années. Les mises en cause répétées et injustifiées de policiers municipaux dans ma commune m'ont particulièrement sensibilisé à cette question.
À l'époque, j'ai décidé d'équiper les policiers municipaux de caméras mobiles. En fait, j'ai d'abord eu à vaincre les réticences des agents eux-mêmes, qui craignaient d'être « fliqués ». J'ai dû les convaincre que ces caméras visaient certes à protéger les citoyens contre leurs éventuels débordements mais, surtout, à les protéger contre des mises en causes infondées.
Dans un contexte où les interventions de policiers sont de toute façon de plus en plus régulièrement filmées et diffusées sur les réseaux sociaux, ces caméras garantissent à nos forces de l'ordre de disposer de l'intégralité des vidéos et les prémunissent contre des accusations fondées sur des images ou des passages volontairement tronqués, qui laissent penser à des comportements violents et arbitraires de leur part. Souvent, les policiers n'emploient la force que pour répondre à des coups !
Le choix de recourir à des caméras mobiles a tout de suite été concluant. Je ne sais même pas pourquoi on parle encore d'expérimentations aujourd'hui ! Chacun mesure en effet le bénéfice de l'utilisation de ces caméras : les citoyens, bien sûr, mais aussi les contrevenants, les policiers et leur hiérarchie, ainsi que les juges.
Les magistrats n'ont d'ailleurs jamais réclamé de cadre juridique particulier : ils estimaient que toutes les images étaient bienvenues et constituaient d'éventuels éléments tangibles et objectifs qui pouvaient les aider à trancher des affaires d'outrage ou de rébellion à une personne dépositaire de l'autorité publique. Malgré tout, les gouvernements qui se sont succédé ces dernières années ont fait voter des lois instaurant un cadre juridique spécifique.
Malheureusement, on complique toujours les choses en France : on a imposé un modèle de caméra très sophistiqué, qui coûte cinq à six fois plus cher que les caméras que l'on trouve dans le commerce, et moins fiable. En tant que rapporteur de la commission d'enquête sur l'état des forces de sécurité intérieure, je peux témoigner de la lourdeur du système, de la complexité des appels d'offres, et de la lenteur de l'équipement de nos forces de l'ordre, en particulier de la gendarmerie nationale, et ce alors même qu'il n'existe pas de meilleur moyen de pacifier les relations que le recours à ces caméras, y compris lors de simples contrôles routiers.
Dans le cadre de l'expérimentation prévue en 2016, on a également imposé aux polices municipales de remplacer leurs caméras par des caméras beaucoup plus chères. Or on ne s'est pas du tout soucié de la prolongation de cette expérimentation, si bien que les polices municipales ne peuvent plus utiliser ces caméras depuis le 3 juin !
Selon moi, il n'y a aucune raison de continuer à expérimenter le dispositif des caméras-piétons pour les policiers municipaux comme pour les sapeurs-pompiers, dès lors que l'on sait déjà que l'expérience est positive ! Il faut le mettre en oeuvre dès maintenant !
Il est aujourd'hui indispensable d'équiper les sapeurs-pompiers, car ils sont, hélas, tout autant exposés que les policiers à ceux qui contestent l'autorité de l'État. Les images enregistrées ne font, de toute façon, de mal à personne. Elles permettent simplement d'établir la vérité.
Il est également indispensable de prévoir des caméras dans les prisons, parce que les systèmes actuels de vidéosurveillance y sont « muets », alors que le juge ou l'autorité disciplinaire ont évidemment besoin du son pour prendre leur décision.
Mme Esther Benbassa . - Les syndicats des sapeurs-pompiers et des surveillants pénitentiaires sont-ils favorables à l'équipement des personnels ?
M. Dany Wattebled , rapporteur . - Pour répondre à notre collègue François Bonhomme, je précise que le texte ne distingue pas entre sapeurs-pompiers professionnels et volontaires. Toutefois, il faut bien comprendre que tous les personnels ne seront pas destinés à être équipés de caméras et que leur utilisation sera très encadrée. Les interventions de nature médicale, par exemple, ne feront l'objet d'aucun enregistrement.
Notre collègue Patrick Kanner a raison : beaucoup de professions sont confrontées à des menaces aujourd'hui. On pourrait citer les huissiers, les agents des caisses de sécurité sociale ou des SAMU. Cela étant, à un moment donné, il faut bien circonscrire le champ du dispositif : on a donc choisi de limiter l'utilisation des caméras-piétons aux professions qui assurent un service lié à la sécurité des biens et des personnes, même si je dois reconnaître que les sapeurs-pompiers sont un peu à la marge de cette définition.
Je vais donner satisfaction à notre collègue François Grosdidier, puisque l'un de mes amendements tend à pérenniser l'usage des caméras individuelles par les agents de police municipale. L'expérimentation prévue pour deux ans a pris fin le 3 juin dernier. On s'est aperçu que cette durée de deux ans était trop courte, compte tenu du délai nécessaire pour mener à bien les appels d'offres et du temps qu'il est indispensable de prendre pour tirer les enseignements du rapport d'étape. C'est pourquoi nous proposons des expérimentations d'une durée de trois ans pour les sapeurs-pompiers et les personnels de surveillance de l'administration pénitentiaire.
Enfin, pour répondre à Mme Benbassa, je précise que les syndicats des sapeurs-pompiers et des personnels pénitentiaires n'avaient qu'une seule crainte : que les enregistrements puissent se retourner contre eux et être utilisés par leur hiérarchie. Nous les avons rassurés à ce sujet, en insistant sur le fait que les caméras serviraient avant tout à les défendre. Ils sont désormais favorables au principe d'une expérimentation.
EXAMEN DES ARTICLES
- Présidence de M. François Pillet, vice-président -
M. Dany Wattebled , rapporteur . - L'amendement COM-7 propose une nouvelle rédaction de l'article 1 er de la proposition de loi afin de mieux encadrer le recours aux caméras mobiles pour les sapeurs-pompiers et d'en assurer la proportionnalité. Il restreint l'usage des caméras individuelles aux seuls cas où « se produit ou est susceptible de se produire un incident de nature à mettre en péril leur intégrité physique » ; il exclut par ailleurs la possibilité de procéder à des enregistrements en cas de risque d'atteinte au secret médical. Compte tenu des délais nécessaires, notamment liés à la passation de marchés publics pour l'acquisition des équipements, l'amendement allonge le délai de l'expérimentation de deux à trois ans. Il prévoit qu'un rapport soit remis par le Gouvernement au Parlement au plus tard six mois avant le terme de l'expérimentation, et que le décret d'application de l'article soit non seulement pris en Conseil d'État, mais aussi après avis motivé et publié de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL). L'amendement précise le périmètre de l'article, afin d'inclure expressément les pompiers de Paris et de Marseille, qui bénéficient d'un statut militaire.
L'amendement COM-7 est adopté.
M. Dany Wattebled , rapporteur . - L'amendement COM-8 apporte deux modifications principales à l'article 2, qui prévoit la possibilité pour les surveillants pénitentiaires d'utiliser des caméras mobiles. En premier lieu, il étend le champ d'utilisation des caméras mobiles à d'autres missions que les extractions judiciaires et les transfèrements administratifs, afin de couvrir les besoins de sécurisation des surveillants pénitentiaires lorsqu'ils exercent des missions qui présentent un risque caractérisé d'incident ou d'évasion, dans deux cas : d'une part, lorsque la nature même des missions engendre des risques élevés pour les agents, comme par exemple les interventions des équipes régionales d'intervention et de sécurité (ERIS), qui interviennent pour gérer des situations de crise dans les établissements pénitentiaires ; d'autre part, lorsqu'il existe un risque élevé d'incident ou d'évasion en raison du niveau de dangerosité des détenus concernés, comme par exemple les surveillants travaillant dans les quartiers pour détenus violents ou pour détenus radicalisés.
Pour assurer la proportionnalité du dispositif, seuls les agents individuellement désignés seraient susceptibles d'utiliser ces caméras mobiles. Afin de garantir le respect de la vie privée, les agents ne seraient pas autorisés à procéder à un enregistrement à l'occasion d'une fouille.
En second lieu, l'amendement donne un caractère expérimental aux dispositions de l'article 2, pour une durée de trois ans, et prévoit qu'un rapport d'expérimentation soit remis au Parlement.
L'amendement COM-8 est adopté.
Articles additionnels après l'article 2
M. François Pillet , président . - Les amendements COM-10 , COM-1 rectifié, COM-3 rectifié, COM-6 , COM-2 rectifié, COM-4 et COM-5 sont en discussion commune. Si l'amendement COM-10 du rapporteur est adopté, les autres seront satisfaits ou sans objet.
M. Dany Wattebled , rapporteur . - L'expérimentation des caméras mobiles par les agents de police municipale s'est achevée le 3 juin 2018, sans que le dispositif soit pérennisé. Il convient de combler de toute urgence ce vide juridique. Mon amendement COM-10 pérennise le dispositif dans des conditions identiques à celles de l'expérimentation, qui a démontré son efficacité.
- Présidence de M. Philippe Bas, président -
M. François Grosdidier . - L'expérimentation qui vient de se dérouler était-elle vraiment nécessaire, puisqu'une précédente avait déjà été menée et était concluante ? Toutes les remontées auprès de la Commission consultative des polices municipales (CCPM) étaient positives. Aucune observation négative n'a été formulée sur les caméras piétons, que ce soit de la part des citoyens, des policiers ou des magistrats. Votre amendement prolonge-t-il le dispositif, en arrêtant l'expérimentation ?
M. Dany Wattebled , rapporteur . - Tout à fait.
M. François Grosdidier . - Je voterai bien volontiers votre amendement.
M. Alain Marc . - L'autorisation du préfet est-elle permanente ou sur une période déterminée, lorsque vous évoquez des « faits susceptibles de se produire » ? Faudrait-il demander une autorisation à chaque fois ?
M. Patrick Kanner . - Le ministre de l'intérieur a mis fin le 3 juin dernier, comme prévu par les textes, à l'expérimentation. Aurons-nous accès à ce fameux rapport avant l'examen de la proposition de loi le 13 juin ? J'aimerais le consulter...
M. Philippe Bas , président . - Bien évidemment, nous le transmettrons à tous les membres de la commission.
M. Dany Wattebled , rapporteur . - L'autorisation sera pérenne.
M. Philippe Bas , président . - La commune devra simplement la demander.
M. Dany Wattebled , rapporteur . - Nous avons reçu hier le rapport et vous le communiquerons.
Les amendements identiques COM-10 et COM-1 rectifié bis sont adoptés. Les amendements COM-3 rectifié et COM-6 sont satisfaits. Les amendements COM-2 rectifié, COM-4 , COM-5 deviennent sans objet.
M. Dany Wattebled , rapporteur . - L'article 3 de la proposition de loi compense les éventuelles pertes de recettes pour l'État qui pourraient résulter de la mise en oeuvre des dispositions de la présente proposition de loi. Dès lors que celle-ci n'entraîne aucune perte de recettes, l'amendement COM-9 supprime l'article 3.
L'amendement de suppression COM-9 est adopté.
La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission .
M. Alain Richard . - Monsieur le président, comme ce texte pérennise l'usage des caméras par les polices municipales, pouvez-vous demander à votre homologue de l'Assemblée nationale qu'il soit examiné rapidement, malgré l'encombrement de l'agenda législatif ?
M. Philippe Bas , président . - Je la solliciterai, ainsi que le Gouvernement, pour assurer la continuité du dispositif.
M. François Bonhomme . - Un amendement exclut la possibilité d'utiliser ces caméras pour des interventions à caractère médical, afin de respecter la vie privée, mais des incidents surviennent souvent lors de soins, situations pouvant générer des tensions. Exclure a priori tout enregistrement dans ces situations ne risque-t-il pas de faire manquer l'essentiel ? Les interventions sur les personnes sont les plus sensibles.
M. Dany Wattebled , rapporteur . - Le secret médical nécessite de ne pas aller trop loin et d'encadrer le dispositif. Cela pourrait être également compliqué pour l'agent en cas de manquement, il pourrait être mis en cause par des témoins ou la famille. Nous avons préféré ne pas trop étendre le champ.
M. Alain Richard . - Par malheur, nous sommes trop habitués à ces incidents. Mais en cas de violences urbaines, lors desquelles des pompiers sont agressés, des policiers - qui ont des caméras - sont toujours à proximité. Les pompiers n'interviennent pas seuls.
M. Philippe Bas , président . - Merci pour la qualité de ce rapport qui a convaincu notre commission.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
Article 1
er
|
|||
M. WATTEBLED, rapporteur |
7 |
Encadrement de l'usage des caméras mobiles par les sapeurs-pompiers |
Adopté |
Article 2
|
|||
M. WATTEBLED, rapporteur |
8 |
Extension de l'usage des caméras mobiles par les personnels de l'administration pénitentiaire et lancement d'une expérimentation |
Adopté |
Articles additionnels après l'article 2 |
|||
M. WATTEBLED, rapporteur |
10 |
Pérennisation de l'usage des caméras mobiles par les agents de police municipale |
Adopté |
M. GRAND |
1 rect. bis |
Pérennisation de l'usage des caméras mobiles par les agents de police municipale |
Adopté |
M. DÉTRAIGNE |
3 |
Pérennisation de l'usage des caméras mobiles par les agents de police municipale |
Satisfait
|
M. Henri LEROY |
6 |
Pérennisation de l'usage des caméras mobiles par les agents de police municipale |
Satisfait
|
M. GRAND |
2 |
Prolongation de l'expérimentation de l'utilisation de caméras mobiles par les agents de police municipale |
Satisfait
|
M. Henri LEROY |
4 |
Prolongation de l'utilisation des caméras mobiles acquises par les polices municipales |
Satisfait
|
M. Henri LEROY |
5 |
Remise d'un rapport d'évaluation de l'expérimentation de l'usage des caméras mobiles par les polices municipales |
Satisfait
|
Article 3
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M. WATTEBLED, rapporteur |
9 |
Suppression du gage |
Adopté |
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES ET CONTRIBUTION ÉCRITE
M. Jean-Pierre Decool , sénateur du Nord, auteur de la proposition de loi
Ministère de l'intérieur
Direction des libertés publiques et des affaires juridiques
M. Thomas Campeaux , directeur
M. Éric Tison , sous-directeur des libertés publiques
Mme Anne-Sophie Mach , chef du bureau de la liberté individuelle
Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises
Mme Mireille Larrede , sous-directrice de la doctrine et des ressources humaines
M. Bruno Cesca , adjoint de la sous-directrice de la doctrine et des ressources humaines
Ministère de la justice - Direction de l'administration pénitentiaire
M. Stéphane Bredin , directeur
M. Patrick Gomez , chef du bureau des équipements, des technologies et de l'innovation
Mme Claire Israël , adjointe au chef du bureau de l'action juridique et du droit pénitentiaire
Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France
Colonel Grégory Allione , vice-président chargé du renforcement de la place des sapeurs-pompiers dans la sécurité civile et la gestion des crises
Commission nationale de l'informatique et des libertés
Mme Florence Fourets , directrice chargée de projets régaliens au secrétariat général
Mme Emilie Seruga-Cau , chef du service des affaires régaliennes et des collectivités territoriales
Mme Tiphaine Havel , conseillère pour les questions institutionnelles et parlementaires
Syndicats de surveillants pénitentiaires
UFAP UNSa Justice
M. David Calogine , secrétaire général adjoint
M. Loïc Weerbrouck , représentant ERIS
Syndicat Pénitentiaire des Surveillants (S.P.S)
M. Philippe Kuhn , délégué régional S.P.S, Direction Interrégionale de Paris, Membre du bureau exécutif national
M. Christy Nicolas , secrétaire général adjoint
M. Frédéric Bescon , secrétaire général adjoint
Contribution écrite
CGT Pénitentiaire
* 1 Rapport n° 491 (2015-2016) de M. Michel Mercier, fait au nom de la commission des lois, déposé le 23 mars 2016. Le rapport est consultable à l'adresse suivante : https://www.senat.fr/rap/l15-491-1/l15-491-1.html .
* 2 Le régime pérenne prévu pour les agents de la police nationale et pour les militaires de la gendarmerie nationale est défini par l'article L. 241-1 du code de la sécurité intérieure. Celui, expérimental, applicable aux agents des services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP relève de l'article L. 2251-4-1 du code des transports. Enfin, l'usage des caméras individuelles par les agents de police municipale, lui aussi à titre expérimental, est prévu par l'article 114 de la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l'efficacité et les garanties de la procédure pénale, qui renvoie, pour les conditions de mise en oeuvre du dispositif, à l'article L. 241-1 du code de la sécurité intérieure.
* 3 Avis n° 391004 sur le projet de loi renforçant la lutte contre le crime organisé et son financement, l'efficacité et les garanties de la procédure pénale, rendu le 28 janvier 2016.
* 4 Cet article a été introduit par la loi n° 2016-987 du 21 juillet 2016 prorogeant l'application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence et portant mesures de renforcement de la lutte antiterroriste.
* 5 Le rapport transmis se fonde sur les retours transmis par 181 communes, les autres n'ayant pas, à ce jour, fourni d'éléments de bilan au ministère de l'intérieur.