Rapport n° 114 (2016-2017) de M. Jean-Marie VANLERENBERGHE , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 9 novembre 2016

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N° 114

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2016-2017

Enregistré à la Présidence du Sénat le 9 novembre 2016

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires sociales (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, de financement de la sécurité sociale pour 2017 ,

Par M. Jean-Marie VANLERENBERGHE,

Sénateur,

Rapporteur général.

Tome I :

Équilibres financiers généraux

(1) Cette commission est composée de : M. Alain Milon , président ; M. Jean-Marie Vanlerenberghe , rapporteur général ; M. Gérard Dériot, Mmes Colette Giudicelli, Caroline Cayeux, M. Yves Daudigny, Mme Catherine Génisson, MM. Jean-Pierre Godefroy, Gérard Roche, Mme Laurence Cohen, M. Gilbert Barbier, Mme Aline Archimbaud , vice-présidents ; Mme Agnès Canayer, M. René-Paul Savary, Mme Michelle Meunier, M. Jean-Louis Tourenne, Mme Élisabeth Doineau , secrétaires ; M. Michel Amiel, Mme Nicole Bricq, MM. Olivier Cadic, Jean-Pierre Caffet, Mme Claire-Lise Campion, MM. Jean-Noël Cardoux, Daniel Chasseing, Olivier Cigolotti, Mmes Karine Claireaux, Annie David, Isabelle Debré, Catherine Deroche, M. Jean Desessard, Mme Chantal Deseyne, M. Jérôme Durain, Mmes Anne Émery-Dumas, Corinne Féret, MM. Michel Forissier, François Fortassin, Jean-Marc Gabouty, Mme Françoise Gatel, M. Bruno Gilles, Mmes Pascale Gruny, Corinne Imbert, MM. Éric Jeansannetas, Georges Labazée, Jean-Baptiste Lemoyne, Mmes Hermeline Malherbe, Brigitte Micouleau, Patricia Morhet-Richaud, MM. Jean-Marie Morisset, Philippe Mouiller, Louis Pinton, Mmes Catherine Procaccia, Stéphanie Riocreux, M. Didier Robert, Mme Patricia Schillinger, MM. Michel Vergoz, Dominique Watrin, Mme Évelyne Yonnet .

Voir le(s) numéro(s) :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) :

4072 , 4150 , 4151 et T.A. 829

Sénat :

106 , 108 , 114 tomes I à VIII (2016-2017)

Les observations du rapporteur général sur les équilibres financiers généraux

Réunie le mercredi 9 novembre 2016 sous la présidence de M. Alain Milon, président, la commission des affaires sociales a procédé, sur le rapport de Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général, à l'examen du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, n° 106 (2016-2017) de financement de la sécurité sociale pour 2017.

Soulignant l'écho médiatique rencontré par l'annonce du retour à l'équilibre des comptes de la sécurité sociale, le rapporteur général a souligné la part prise par l'augmentation des recettes dans le redressement des comptes sociaux.

Il a néanmoins relevé la persistance d'un déficit important, de 4,1 milliards d'euros, imputable au Fonds de solidarité vieillesse et à l'assurance maladie.

Il a indiqué qu'en dépit des mesures structurelles, censées avoir redressé la branche-maladie, cette branche présentait un déficit tendanciel de 8,3 milliards d'euros en 2017.

Il a détaillé les mesures prises par le projet de loi pour corriger ce solde et qui tiennent au moins autant à des mesures en recettes (transfert des réserves du FSV, transferts de recettes, fiscalité du tabac, augmentation des cotisations) qu'à des économies en dépenses dont il a contesté, pour certaines, la nature d'économies et qu'il a plutôt qualifiées de transferts de charges ou de mesures artificielles. Au total, corrigé des mesures de périmètre, l'Ondam progresserait de plus de 2,5 %.

Sur proposition du rapporteur général, la commission a notamment:

- adopté des amendements de suppression des tableaux d'équilibre pour 2016 et 2017 et des objectifs de dépenses des différentes branches ;

- supprimé le transfert à l'assurance maladie des réserves de la section III du FSV pour les affecter au financement de la part résiduelle du minimum contributif qui se trouvait privé de ses recettes et améliorer ainsi le solde du Fonds;

- unifié les seuils de revenus tirés des activités de location de courte durée et de biens meubles et renforcé l'effectivité du prélèvement de la CSG sur les revenus du patrimoine réalisés via des plateformes collaboratives ;

- supprimé la contribution à la charge des fournisseurs de tabac, considérant qu'une augmentation des droits de consommation sur les cigarettes aurait pu permettre de parvenir au même objectif.

La commission des affaires sociales a décidé de proposer au Sénat la suppression des objectifs de recettes et de dépenses fixés par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 et d'adopter le projet de loi ainsi amendé.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Ce dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale du quinquennat a été particulièrement médiatisé : enfin à l'équilibre, la sécurité sociale était sauvée, l'assurance-maladie redressait son solde de façon spectaculaire, les régimes de retraite étaient en excédent pour plusieurs décennies. Enfin, le retour à l'équilibre des comptes sociaux n'était plus une utopie.

Les voix qui pourraient s'élever pour discuter ce bilan sont disqualifiées tant elles seraient mues, non par une volonté de transparence mais par des visées punitives à l'égard de nos concitoyens quand ce ne serait pas par un agenda caché consistant à organiser le transfert de la sécurité sociale à l'assurance privée.

A y regarder de plus près, pourtant, la sécurité sociale n'est pas à l'équilibre, sauf à passer sous silence le déficit du Fonds de solidarité vieillesse, qui s'établit en 2017, comme en 2016, à - 3,8 milliards d'euros, pour un déficit global de 4,1 milliards d'euros.

L'assurance-maladie redresse certes ses comptes mais elle transfère aussi, devant la difficulté à maîtriser les dépenses, une partie de ses charges, et partant, de son déficit, sur les autres branches. L'objectif national de dépenses de dépenses d'assurance maladie n'est tenu qu'à ce prix.

Malgré les hausses de cotisations et les fruits de la réforme de 2010, les régimes de retraites restent fragiles et leur consolidation effective dépend plus d'hypothèses macro-économiques favorables que d'équilibres économiques et démographiques de long terme.

Votre commission ne conteste pas le redressement des comptes sociaux, leur dégradation serait particulièrement regrettable au vu de l'effort consenti en prélèvements obligatoires ; elle conteste le fait que ce processus soit parvenu à son terme.

Quelques jours après la présentation du projet de loi de financement de la sécurité sociale, une note publiée par l'OCDE plaçait la France en tête des pays de l'organisation pour la part des dépenses sociales publiques, entendues au sens large, dans sa richesse nationale, avec 31 %.

Les dépenses de retraite et de santé sont les premiers postes dans tous les pays qui consacrent en moyenne 21 % de leur PIB aux dépenses sociales.

La France, comme un certain nombre d'autres pays, est confrontée à la question de l'efficacité de la dépense et de son adaptation aux besoins.

En témoigne le débat nourri sur une des mesures du projet de loi : l'article 10 tendant à une meilleure effectivité des prélèvements sur les revenus tirés des plateformes collaboratives. Il ne fait pas de doute que ces prélèvements sont dus, comme sur tous les revenus, quels qu'ils soient. Pour autant, appliquer ces prélèvements à des personnes qui jusqu'à présent, pour des raisons techniques, avaient pu s'y soustraire, semble insupportable sur divers bancs, alors même qu'ils sont bien inférieurs à ceux subis par l'emploi salarié.

Surgissent subitement divers aspects de notre système de protection sociale : elle est coûteuse, elle est complexe, elle est parfois inéquitable, certains de nos concitoyens cherchent à y échapper.

Pour qu'elle reste un patrimoine commun, l'expression d'une solidarité qui fait partie intégrante de notre identité, notre protection sociale doit évoluer.

Pour reprendre les termes de l'annexe consacrée au financement, il s'agit de garantir un « principe d'équité entre les différents groupes de cotisants afin de préserver l'acceptabilité et l'efficacité du prélèvement ».

EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. LA TRAJECTOIRE DES FINANCES SOCIALES, UN REDRESSEMENT DES COMPTES QUI N'A PAS TOTALEMENT EFFACÉ LES EFFETS DE LA CRISE

1. Des prélèvements obligatoires stabilisés au niveau de 2013 : 24 % du PIB

En 2016, les recettes des administrations de sécurité sociale s'établiraient à 583,4 milliards d'euros. Elles seraient de 601,2 milliards d'euros en 2017.

En 2015, la mise en oeuvre du pacte de responsabilité s'est traduite par une diminution de 0,2 point de leur poids dans le PIB par rapport au pic atteint en 2014.

En 2016, le taux de prélèvements obligatoires des administrations de sécurité sociale diminuerait une nouvelle fois de 0,2 point, à 24 % du PIB, soit 53,9 % des prélèvements obligatoires.

Les recettes augmenteraient de 1,7 %, une faible progression qui résulte, notamment, du deuxième volet du pacte de responsabilité qui se traduit par une baisse de 2,9 milliards d'euros des cotisations sociales.

Évolution des prélèvements obligatoires entre 2008 et 2017

(en % du PIB)

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Ensemble

41,9

41,0

41,3

42,6

43,8

44,8

44,8

44,7

44,5

44,5

État

13,6

11,6

13,6

12,9

13,6

14,1

13,6

13,5

13,8

13,8

Organismes divers d'administration centrale

0,4

0,5

0,6

0,6

0,6

0,7

0,7

0,8

0,4

0,5

Administrations
publiques locales

5,7

6,0

4,5

5,8

5,9

5,9

6,0

6,1

6,1

6,2

Administrations
de sécurité sociale

22,1

22,8

22,5

23,2

23,6

24,0

24,4

24,2

24,0

24,0

Source : Insee et RESF

Le taux de prélèvements obligatoires resterait stable en 2017 à 24 % du PIB, soit près de 2 points de plus qu'en 2008.

En l'absence de troisième étape du pacte de responsabilité sur le champ des administrations de sécurité sociale, le solde des mesures nouvelles en prélèvements obligatoires redevient positif à 500 millions d'euros. Il résulte des mesures liées à la réforme des retraites (0,6 milliard d'euros de hausses de cotisations et 0,2 milliard d'euros pour la cotisation finançant le compte pénibilité) et à la convergence des cotisations salariales des fonctionnaires avec celles des salariés (0,1 milliard d'euros pour le régime de base et pour l'Ircantec) mais aussi de mesures nouvelles prévues par le PLFSS sur la fiscalité du tabac ou la taxe sur les véhicules de société.

2. Des dépenses supérieures de plus 100 milliards d'euros par rapport à 2008

La contribution des ASSO à la croissance des dépenses publiques serait de 0,8 point sur 1,2 point en 2016; elle serait de 0,6 point sur 1,6 point de croissance de la dépense publique en 2017.

En 2016, leurs dépenses s'établiraient à 583,4 milliards d'euros. En 2017, les dépenses augmenteraient de 0,8 % (1,6 % hors transfert à l'État) et les prestations de 1,8 % à périmètre constant, pour s'établir à 601,2 milliards d'euros.

A la suite du programme de stabilité 2014, la loi de programmation des finances publiques 2014-2019 avait prévu un plan d'économies de 50 milliards d'euros sur la période 2015-2017, pendant en dépenses du pacte de responsabilité et de solidarité. Sur ce total, la contribution des ASSO était de 21 milliards d'euros, en proportion de leur part dans les dépenses publiques. Cet objectif a été revu à la baisse, en raison notamment de la faible inflation qui a réduit le rendement des mesures de moindre revalorisation des prestations. A l'occasion du programme de stabilité 2015, l'objectif a été à la fois complété et recalibré à 20,3 milliards d'euros dont 6,4 milliards en 2015, 7,4 en 2016 et 6,5 en 2017.

Les évolutions du plan d'économies

2015

2016

2017

Total

2014

9,6

11,4

21

2015

6,4

7,4

6,5

20,3

2017

6,2

6,2

7,7

18,3

Source : programmes de stabilité

En 2016, la contribution des ASSO est de nouveau révisée, avec un objectif global de 18,3 milliards d'euros, dont 6,2 milliards d'euros en 2015.

Le plan d'économies 2015-2017

(en milliards d'euros)

2015

2016

2017

cumul

État et opérateurs

8,4

5,4

-0,5

12,6

Collectivités locales

3,5

3,3

2,8

9,6

ASSO

6,2

4,5

7,7

18,3

Total (hors charge de la dette)

18,1

12,4

10

40,5

Source : RESF 2017

En 2017, le Gouvernement acte un objectif global revu à 40 milliards d'économies auquel les ASSO devraient contribuer à hauteur de 7,7 milliards d'euros, soit un montant comparable à la moyenne annuelle du premier plan de 21 milliards d'euros alors que les précédents objectifs n'ont pas pu être atteints.

En réponse au questionnaire de votre rapporteur général, le Gouvernement a détaillé ces économies, poste par poste, par ASSO et par branche, de la façon suivante : « Les principales économies sont liées à la maîtrise de l'Ondam et proviennent des orientations présentées dans le PLFSS 2017. D'autres économies proviennent de réformes votées antérieurement qui continuent à produire leurs effets (nouvelle allocation versée au titre du congé parental, pour laquelle les dépenses se sont avérées jusqu'à présent inférieures aux prévisions initiales, réforme du capital décès, qui s'achèvera en 2017 ; harmonisation des modalités de revalorisation des prestations (en fonction de l'inflation observée et non plus prévisionnelle). Enfin, des mesures déjà décidées par les partenaires sociaux (sous-indexation des pensions des régimes complémentaires de retraite) ou en cours de négociation (convention d'indemnisation du chômage) freineront également la dépense des administrations de sécurité sociale. »

Votre rapporteur général souligne deux éléments sur le plan d'économies : les objectifs, même révisés à la baisse, n'ont pas été atteints et l'étape 2017, devenue la plus exigeante avec un objectif de 7,7 milliards d'euros, dépend très largement des économies à réaliser dans le champ de l'Ondam (4,1 milliards d'euros) et de la convention d'assurance chômage pour laquelle les négociations n'ont, à ce jour, pas repris.

3. Une réduction des déficits mais un solde encore loin du niveau d'avant crise

En 2016, pour la première fois depuis 2008, le solde des administrations de sécurité sociale serait positif, de 400 millions d'euros.

Solde des administrations de sécurité sociale depuis 2008

Source : Insee et RESF pour les années 2016 et 2017

Malgré un solde 2015 meilleur qu'anticipé et revu à la hausse d'un milliard d'euros par l'Insee en septembre 2016 (- 4,8 milliards d'euros contre - 6,2 milliards d'euros prévus en loi de financement pour 2016), le solde 2016, tout en restant positif, est revu à la baisse : il s'établirait à 400 millions contre 1,3 milliard d'euros prévu en lors de l'examen de la LFSS 2016.

Le volume des recettes est globalement conforme à la prévision mais les dépenses sont supérieures de 800 millions d'euros, le solde de l'assurance-chômage étant dégradé de 1,6 milliard d'euros par rapport à la prévision. L'amélioration du solde est inférieure à la prévision de 7,7 milliards d'euros ; elle reste significative avec 5,2 milliards d'amélioration.

Recettes, dépenses et solde des administrations de sécurité sociale

(en milliards d'euros)

2016

2017

Évolution

Recettes

583,8

601,2

3 %

Dépenses

583,4

592,7

1,6 %

Solde

0,4

8,5

Source : RESF

Ce résultat est dû à la contribution de la Cades (14,2 milliards d'euros) que le solde négatif des autres ASSO, dont le déficit se réduit, ne compense plus entièrement.

Recettes, dépenses et solde de l'Unédic, de la Cades
et des régimes complémentaires de retraite

(en milliards d'euros)

2016

2017

Unédic

Recettes

35,8

36,8

Dépenses

39,7

38,4

Solde

- 3,8

- 1,6

Régimes de retraite complémentaires

Recettes

83,2

85,5

Dépenses

84,6

86

Solde

- 1,4

- 0,5

Cades

Recettes

17,5

17,8

Dépenses

3,3

3,3

Solde

14,2

14,5

Source : RESF

Ces résultats sont meilleurs que la trajectoire définie par la loi de programmation des finances publiques 2014-2019 pour les finances sociales.

En 2017, les comptes des administrations de sécurité sociale enregistreraient un excédent de 8,5 milliards d'euros, prévision qui suppose cependant que plusieurs exigences soient remplies :

- la réalisation de plus de 4 milliards d'euros d'économies dans les dépenses comprises dans le champ de l'Ondam ;

- le recul de près de 4 % des dépenses d'indemnisation du chômage après une augmentation de 2,5 % en 2016 grâce à l'amélioration du marché de l'emploi et aux effets attendus de mesures mises en oeuvre dans le cadre de la prochaine convention d'assurance chômage.

4. La persistance d'une dette très élevée

La dette des administrations de sécurité sociale se réduirait de 1 milliard d'euros en 2016, passant de 220,3 milliards d'euros à 219,3 milliards d'euros.

La dette poursuivrait sa baisse et s'établirait à 209,6 milliards d'euros en 2017.

5. Des hypothèses à vérifier pour 2017 : les économies dans le champ de l'Ondam et sur les dépenses d'assurance chômage

Dans son avis relatif aux projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour l'année 2017, adopté le 23 septembre 2016, le Haut Conseil des finances publiques a porté l'appréciation suivante : « En matière d'emploi et de masse salariale, les prévisions pour 2016 sont crédibles. Pour 2017, elles sont élevées en lien avec les hypothèses retenues pour la croissance du PIB ». Le Haut Conseil estime que les risques pesant sur les dépenses sont plus importants en 2017 que pour les années précédentes : « caractère irréaliste des économies prévues sur l'Unédic, fortes incertitudes sur la réalisation des économies de grande ampleur prévues sur l'Ondam ».

Ces deux éléments nourrissent effectivement les deux interrogations principales qui pèsent sur la réalisation des objectifs fixés pour 2017. Votre rapporteur général reviendra sur l'Ondam dans la troisième partie de son propos.

A la fin de l'année 2015, le solde déficitaire du régime d'assurance-chômage était de 4,403 milliards d'euros et sa dette s'élevait à 25,73 milliards d'euros. Grâce à un dynamisme des recettes supérieur à celui prévu un an plus tôt, les résultats du régime sont moins dégradés qu'anticipé, le taux de chômage étant globalement conforme à la prévision, soit 9,9 %en fin d'année.

L'article 29 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 prévoit que « l'Unédic transmet au Parlement et Gouvernement, au plus tard le 30 juin, ses perspectives financières triennales ». Le même article prévoit que le Gouvernement transmet ses observations avant la fin de l'année.

Pour le deuxième exercice, ce rapport a été examiné le 20 septembre 2016 par le bureau de l'Unédic. Ces travaux rappellent l'effet déterminant de la conjoncture sur l'assurance chômage, quatre fois plus fort que sur les organismes de sécurité sociale (un point en recettes : lorsque l'emploi diminue de 1 % les recettes diminuent d'autant, et trois points en dépenses : 160 000 emplois de moins représentent 80 000 chômeurs indemnisés de plus, soit 3 % de dépenses supplémentaires). Comme en 2015 et conformément à la loi, le rapport distingue la part structurelle du déficit du régime de l'assurance chômage, c'est-à-dire la part non-imputable à la conjoncture, dont l'ampleur, bien que difficile à évaluer, est estimée à 1,4 milliard d'euros en moyenne annuelle depuis 2010.

Pour ses prévisions, le régime d'assurance chômage se fonde sur le Consensus des économistes. Les hypothèses de croissance retenues sont de 1,4 % en 2016 et, en raison des incertitudes liées au Brexit, de 1,2 % en 2017, soit une révision de - 0,3 point.

L'Unédic prévoit que le taux de chômage devrait être de 9,4 % en fin d'année 2016. Les dépenses du régime augmenteraient toutefois de 1,8 % par rapport à 2015 alors qu'un premier reflux avait été annoncé en 2016 mais le volume des contributions bénéficierait d'une évolution dynamique de la masse salariale de 2,6 % en moyenne annuelle. Le solde de l'assurance chômage ne s'améliorerait que faiblement pour atteindre - 4,3 milliards d'euros et la dette dépasserait le seuil des 30  milliards d'euros.

En fin d'année 2017, le taux de chômage atteindrait 9,5 %, l'emploi et la masse salariale subissant un ralentissement.

A la fin de l'année 2017, sous l'effet de la progression des contributions et du ralentissement des dépenses, la variation de trésorerie, s'établissant à - 3,8 milliards d'euros, se réduirait par rapport à 2016 mais porterait néanmoins la dette de l'assurance chômage à 33,8 milliards d'euros.

Rappelons que dans la construction des équilibres 2017 par le Gouvernement 1 ( * ) , le solde de l'Unédic serait de - 3,8 milliards d'euros en 2016 et de - 1,6 milliard d'euros en 2017.

Situation financière de l'Assurance chômage

(en millions d'euros au 31 décembre)

2014

2015 (estimation)

2016 (prévision)

2017 (prévision)

2018 (projection)

2019 (projection)

Contributions
et autres recettes

33 774
(+ 1,7 %)

34 457
(+ 2 %)

35 058
(+ 1,7 %)

35 802
(+ 2,1 %)

36 575
(+ 2,2 %)

37 388 (+ 2,2%)

Total des recettes

33 936

34 520

35 123

35 802

36 575

37 388

Dépenses allocataires

34 086
(+ 1,2 %)

34 803 (+ 2,1%)

35 510
(+ 2 %)

35 659
(+ 0,4 %)

36 590
(+ 2,6 %)

36 848 (+ 0,7 %)

Total des dépenses

37 746

38 769

39 485

39 592

40 601

40 961

Solde

- 3 810

- 4 249

- 4 362

- 3 790

- 4 026

- 3 573

Éléments exceptionnels

71

- 154

63

0

0

0

Variation de trésorerie

- 3 739

- 4 403

- 4 299

- 3 790

- 4 026

- 3 573

Endettement net bancaire

- 21 327

- 25 730

- 30 029

- 33 820

- 37 846

- 41 419

Source : Unédic, situation financière de l'assurance chômage (20 octobre 2015), pour les années 2015 à 2019 : perspectives financières de l'assurance-chômage (septembre 2016)

Les projections réalisées font apparaître une dette de 41,4 milliards d'euros à l'horizon 2019, soit un montant supérieur à une année de contributions, avec des conséquences en termes de charges financières. Si les charges financières du régime se sont stabilisées en 2015 à 301 millions d'euros contre 295 millions d'euros en 2014, l'évolution des taux d'intérêt anticipée par le programme de stabilité devrait faire progresser le coût de la dette à partir de 2019, pour la part qui n'aura pu être sécurisée à cette date, en particulier le déficit de l'année.

La convention d'assurance chômage du 14 mai 2014 est arrivée à échéance le 30 juin 2016 et a été prorogée par décret, les partenaires sociaux n'ayant pu s'accorder sur les termes d'une nouvelle convention.

Les négociations n'ayant à ce jour pas repris, il est peu probable qu'une nouvelle convention puisse permettre d'atteindre le solde prévu par le Gouvernement en 2017.

Dans ce contexte, le rapport que le Gouvernement doit transmettre au Parlement avant la fin de l'année sur la situation de l'assurance chômage devra indiquer la façon dont le Gouvernement entend parvenir au volume d'économies annoncé.

II. DES COMPTES SOCIAUX AMÉLIORÉS EN 2016 GRÂCE À LA BONNE TENUE DE LA MASSE SALARIALE

1. Une exécution meilleure que prévu

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 a prévu un solde des régimes de base et du FSV de - 9,2 milliards d'euros , soit une amélioration de 3,2 milliards d'euros par rapport au solde attendu pour 2015. Le présent projet de loi révise à - 6,9 milliards d'euros le solde des régimes obligatoires de base et du FSV pour 2016 , soit une amélioration de 3,3 milliards d'euros par rapport au solde définitif de 2015.

L'intégralité de l'amélioration du solde est portée par le régime général, l'excédent des autres régimes de base constaté en 2015 se réduisant de 400 millions d'euros en 2016.

Avec la mise en oeuvre de la protection universelle maladie, l'écart avec l'ensemble « régime général et FSV » correspond, pour l'essentiel, aux autres régimes vieillesse de base qui ont enregistré des évolutions différenciées de leurs charges et de leurs produits par rapport au régime général, la progression des charges ayant été plus dynamique (+ 0,6 % contre + 0,5 %) que celles du régime général tandis que celle de leurs produits était inférieure (+ 1,3 % contre + 1,5 %).

Régimes obligatoires de base

(en milliards d'euros)

Régimes obligatoires de base

Prévisions LFSS 2016

Rectification PLFSS 2017

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

194,9

201,1

- 6,2

197

201,1

- 4

Vieillesse

228,7

227,8

0,9

228,3

227,1

1,2

Famille

48,8

49,6

- 0,8

48,7

49,7

- 1

AT-MP

14

13,4

0,6

14,1

13,4

0,7

Toutes branches hors transferts

472,8

478,3

- 5,6

474,4

477,6

- 3,1

Toutes branches y compris FSV

469,5

478,7

- 9,2

471,1

478

- 6,9

Source : PLFSS 2017

Le régime général enregistre les mêmes évolutions avec une progression des charges (+0,5%) inférieure à celle des produits (+ 1,3 %). Le déficit du régime général et du FSV devrait diminuer de 3,6 milliards d'euros en 2016 par rapport à 2015 et s'améliorer de 2,5 milliards d'euros par rapport à la prévision de la loi de financement initiale. Il s'établirait à - 7,1 milliards d'euros.

Régime général

(en milliards d'euros)

Prévisions LFSS 2016

Rectification PLFSS 2017

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

171,7

177,9

- 6,2

195,8

199,8

- 4,1

Vieillesse

123,6

123,1

0,5

124

122,9

1,1

Famille

48,8

49,6

- 0,8

48,7

49,7

- 1

AT-MP

12,5

12

0,5

12,7

12

0,7

Toutes branches hors transferts

344

350

- 6

368,2

371,6

- 3,4

Toutes branches avec FSV

342,2

351,8

- 9,7

366,3

373,5

- 7,1

Source : PLFSS 2017

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 a prévu un déficit de l'ensemble régime général et Fonds de solidarité vieillesse de 9,7 milliards d'euros.

La commission des comptes de la sécurité sociale de juin 2016 a revu cette prévision à 9,1 milliards d'euros en anticipant une amélioration de - 6 à - 5,2 milliards d'euros du solde du régime général et une dégradation de - 3,7 à - 3,9 milliards d'euros du solde du FSV.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 révise nettement cette prévision de solde pour 2016 en prévoyant un solde global déficitaire de - 7,1 milliards d'euros , dont - 3,4 milliards d'euros pour le régime général et - 3,8 milliards d'euros pour le FSV.

Par rapport à la loi de financement initiale, les écarts portent principalement sur les soldes de la branche maladie et de la branche vieillesse, dont l'amélioration, sensible, est supérieure à la dégradation du solde de la branche famille et du FSV.

2. Une bonne tenue des recettes déterminante pour l'amélioration des soldes

L'écart à la prévision s'explique principalement par un surcroît de recettes, qui n'avait été que très partiellement anticipé lors de la commission des comptes de la sécurité sociale de juin ; celle-ci avait revu la prévision de solde du régime général et du FSV à 9,1 milliards d'euros, soit 600 millions d'euros de moins que la prévision initiale. Un surcroît de recettes de 1,9 milliard d'euros conduit à très fortement réviser la prévision de solde à - 7,1 milliards d'euros.

Écarts à la LFSS 2016 en milliards d'euros

Prestations sociales nettes

0,6

Gestion administrative

0,1

Transferts nets

- 0,4

Recettes sur revenus d'activité (cotisations et CSG)

1

Recettes assises sur les revenus de remplacement

0,4

Recettes assises sur les revenus du capital

0,2

Contributions sociales et recettes fiscales hors CSG

0,3

Autres

0,3

Total

2,5

Source : Annexe 4

Ce surcroît de recettes comprend un produit exceptionnel de CSG de 700 millions d'euros découlant de la mise en place de la protection universelle maladie, dont la comptabilisation en produit est contestée par la Cour de comptes

Le dynamisme des produits assis sur les revenus de remplacement, constaté en 2015, est de nouveau observé en 2016.

Le solde des transferts est revu en raison de moindres produits de cotisations de salariés agricoles et de l'augmentation des transferts de la Cnav vers les régimes spéciaux.

Surtout, la masse salariale du secteur privé, principal déterminant des recettes de la sécurité sociale, dont la prévision a été révisée à la baisse lors du programme de stabilité, a enregistré une dynamique plus forte que prévue.

Les comptes de la branche maladie sont fortement affectés par la mise en oeuvre de la protection universelle maladie qui se traduit par l'inscription, dans les comptes de la Cnam, des dépenses de prestations en nature de tous les régimes et des recettes correspondant au financement de ces dépenses. L'impact en recettes est de 22,72 milliards d'euros et de 22,66 milliards d'euros en dépenses. Un décret du 9 septembre 2016 a permis d'établir les comptes de la branche maladie du régime général avec les dépenses et recettes des régimes intégrés financièrement.

Le solde « maladie » s'améliorerait de 2,1 milliards d'euros, grâce aux recettes supplémentaires et au produit exceptionnel de CSG.

Le solde vieillesse s'améliorerait de 600 millions d'euros.

La branche AT-MP consolide son excédent supérieur à la prévision de 200 millions d'euros.

La branche famille enregistre en revanche une dégradation de son solde de 200 millions d'euros.

Le solde du FSV se dégrade de 100 millions d'euros par rapport à la prévision, la structure de ses recettes ne lui permettant pas de bénéficier du dynamisme de la masse salariale alors que la situation de l'emploi, qui influe sur ses charges, reste très dégradée.

Par rapport à 2015, la réduction du déficit atteindrait - 3,7 milliards d'euros contre 1,1 milliard anticipé en loi de financement initiale, soit la réduction la plus importante depuis 2011, où elle s'était établie à 7,1 milliards d'euros et un niveau proche de 2012 où elle était de 3,4 milliards d'euros.

Cette amélioration du solde concerne toutes les branches et le FSV. Elle est particulièrement notable pour la branche maladie, dont le déficit s'est maintenu à un niveau très élevé au cours des cinq dernières et pour lequel la loi de financement initiale avait prévu une nouvelle dégradation.

Évolution du solde du régime général

2015

2016
(LFSS 2017)

évolution

Maladie

- 5,8

- 4,1

1,8

AT-MP

0,7

0,7

0

Vieillesse

- 0,3

1,1

1,4

Famille

- 1,5

- 1

0,5

Régime général

- 6,8

- 3,4

3,4

FSV

- 3,9

- 3,8

0,1

RG+FSV

- 10,8

- 7,1

3,7

III. MALGRÉ LA PROCLAMATION D'UN RETOUR À L'ÉQUILIBRE, UN DÉFICIT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE DE 4,1 MILLIARDS D'EUROS EN 2017

Lors de la présentation du présent projet de loi, le Gouvernement a affirmé que le retour à l'équilibre de la sécurité sociale était en vue pour 2017, admettant certes un déficit de 400 millions d'euros mais mettant en exergue le fait qu'il est sans commune mesure avec le niveau des dépenses concernées.

Le déficit prévu par le projet de loi de financement de la sécurité sociale est de  4,1 milliards d'euros ; il est largement imputable à celui du Fonds de solidarité vieillesse qui s'élève, comme en 2016, à 3,8 milliards d'euros.

Comme en témoignent les tableaux d'équilibre, le FSV fait partie intégrante de la sécurité sociale dont il finance les dépenses de solidarité en matière de retraite. Avec un déficit de 4,1 milliards d'euros, il n'est donc pas exact d'affirmer que la sécurité sociale est à l'équilibre, pas plus qu'il n'est exact d'affirmer que les retraites sont à l'équilibre puisqu'elles présenteront encore, en 2017, sur le périmètre de la branche et du FSV, un déficit de 2,2 milliards d'euros.

Votre rapporteur général avait souligné la difficulté de l'exercice consistant dans le même temps à réduire les déficits, à diminuer les recettes et à maîtriser les dépenses. De fait, la troisième phase annoncée du pacte de responsabilité n'aura pas lieu dans le champ social et fait place en 2017 à une autre priorité, afficher un retour à l'équilibre de l'assurance maladie, « homme malade de la sécurité sociale», selon les termes du Premier Président de la Cour des comptes.

A. L'ÉCLIPSE DE LA TROISIÈME PHASE DU PACTE DE RESPONSABILITÉ

1. De la suppression d'un impôt à la hausse d'un crédit d'impôt, un effet report sur 2018

La troisième phase du pacte de responsabilité consistait initialement, dans le champ social, dans la suppression de la C3S résiduelle, qui représentait 3,5 milliards d'euros. Le programme de stabilité 2016 présentait la mesure en ces termes : « la suppression définitive de la C3S à compter de 2017, en évitant la taxation des consommations intermédiaires, devrait également s'accompagner d'une amélioration de l'efficacité dans l'organisation productive ».

Avec l'aménagement du calendrier du pacte intervenu en 2016, cette troisième phase comportait également l'extension en année pleine de la mesure relative à la baisse de la cotisation famille pour un montant total de 3,9 milliards d'euros, soit un milliard d'euros supplémentaires par rapport à 2015.

Lors de son audition devant la Mecss du Sénat au printemps 2016, le ministre avait indiqué que des modifications pourraient intervenir pour la troisième phase, notamment en fonction des contreparties attendues de la part des entreprises.

De fait, le Président de la République a annoncé fin juin que cette troisième phase serait réorientée vers l'augmentation du taux du CICE de 6 à 7 % pour un coût de 4 milliards d'euros, la baisse de charges de 150 millions d'euros pour les travailleurs indépendants et la baisse de l'IS pour les PME. Un crédit d'impôt pour l'emploi à domicile en faveur des retraités non-imposables est prévu, pour un coût d'un milliard d'euros.

Ainsi que le souligne le Haut Conseil des finances publiques « le remplacement des baisses d'impôts par des crédits d'impôts afin de financer une partie des dépenses financées pour 2017, conduit à reporter sur le solde 2018 l'impact de ces baisses de recettes. Les dépenses supplémentaires étant pérennes, ce choix fragilise la trajectoire de finances publiques à compter de 2018 ».

Pour 2017, les mesures du pacte se limitent donc à l'extension en année pleine de la baisse de la cotisation famille dont l'entrée en vigueur a été décalée au 1 er avril 2016 et à la compensation d'une mesure de trésorerie non pérenne de prélèvements de cotisations sur les caisses de congés payés.

S'y ajoutent 630 millions d'euros de mesures nouvelles et 1,6 milliard d'euros de transferts de charges, dont le principal, les ESAT, était prévu par la loi de financement pour 2016.

Au total, 3,8 milliards d'euros sont à compenser à la sécurité sociale.

(en millions d'euros)

Mesures du pacte de responsabilité

1 574

Extension en année pleine de la baisse de la cotisation famille

1 074

Fin de la mesure de trésorerie sur les caisses de congés payés

500

Mesures nouvelles

630

Cotisations maladie des exploitants agricoles

480

Cotisations des travailleurs indépendants

150

Transferts de charges

1 644

ESAT

1 470

FIR

116

MDPH

58

Total à compenser

3 848

Source : PLF 2017, évaluation préalable de l'article 26

2. La compensation des exonérations : des mesures vertueuses, des mesures discutables

En 2017, la compensation du pacte de responsabilité prend plusieurs formes, définies par l'article 26 du projet de loi de finances pour 2017 :

- la compensation par l'État de mesures d'allègements ou d'exonérations de cotisations sociales qui n'étaient pas compensées à la sécurité sociale, soit parce qu'elles étaient antérieures à l'entrée en vigueur, en 1994, de l'article L. 137-1 du code de la sécurité sociale qui fixe le principe de cette compensation, soit parce que des dispositions expresses prévoyaient l'absence de compensation par l'État ;

- le décroisement de financements conjoints État/sécurité sociale pour certains dispositifs ;

- le transfert de certaines charges à l'État ;

- l'affectation de recettes.

a) La compensation d'exonérations non-compensées

Les exonérations relatives aux aides à domicile, employées directement ou par l'intermédiaire d'une association ou d'une entreprise pour les particuliers fragiles, antérieures à la loi de 1994 seront intégralement compensées.

Sont supprimées les mentions relatives à l'absence de compensation pour les exonérations relatives :

- aux personnes employées par des associations intermédiaires ou des ateliers chantiers d'insertion ;

- à l'aide aux créateurs et repreneurs d'entreprise ;

- aux juges et arbitres sportifs ;

- aux exploitants agricoles (décret 2016-392 du 31 mars 2016).

Cette compensation se traduit par l'augmentation des crédits des missions « travail et emploi », « sport, jeunesse et vie associative » et « agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ».

Votre rapporteur général souligne l'intérêt de ce mode de compensation qui conduira les responsables de programme à assumer le coût de ces outils au service des politiques publiques dont ils ont la responsabilité et à arbitrer, le cas échéant, en fonction de leur efficacité par rapport aux autres leviers dont ils disposent.

b) Le décroisement et le transfert du financement de certains dispositifs

Le financement de certains dispositifs, qui faisaient l'objet de financements conjoints de l'État et de la sécurité sociale est simplifié, avec un solde positif pour la sécurité sociale.

Les allocations de logement temporaire (ALT), pour les personnes défavorisées en situation d'urgence seront entièrement financées par l'État (mission « égalité des territoires et logement »)

Le financement, précédemment partagé avec l'assurance maladie, de l'Agence nationale de santé publique (ANSP) sera assuré par la mission « santé ».

La suppression de l'obligation pour certains bénéficiaires de l'allocation adultes handicapés (AAH) de liquider leur droit à l'allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA), prévue par le projet de loi de finances pour 2017, représentera également une moindre charge pour la sécurité sociale.

Le transfert aux caisses d'allocations familiales, au 1 er janvier 2017, de la gestion des prestations familiales des fonctionnaires dans les départements d'outre-mer, devrait se traduire par un coût supplémentaire pour l'État, correspondant au différentiel entre les allocations actuellement prises en charge et le paiement à venir de cotisations.

A l'inverse, il est mis fin à la participation de l'État au financement du Fonds d'intervention régional (FIR), qui est compris dans le champ de l'Ondam et sera entièrement financé par l'assurance maladie.

La contribution de l'État au financement du fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) est également supprimée, au profit d'un financement par la CNSA.

c) L'affectation de recettes

La taxe sur les véhicules de sociétés, dont une part du produit était affectée à l'État, devient une recette exclusive de la sécurité sociale, ce qui représente une affectation de recette supplémentaires de 150 millions d'euros.

En conséquence des diverses mesures relatives aux relations financières entre l'État et la sécurité sociale, la part de TVA nette affectée à la Cnam, qui sert de variable d'ajustement, passe de 7,19 % à 7,11 %.

d) «  L'autocompensation »

Les mesures de compensation sont récapitulées dans le tableau suivant :

Mesures de compensation entre l'État et la sécurité sociale

Décroisement de financement et transferts de charges

175

Agence nationale de santé publique

65

Allocation de logement temporaire

40

ASPA/AAH

20

Prestations familiales des fonctionnaires dans les DOM

50

Compensations d'exonérations

2 778

Associations intermédiaires

83

Ateliers chantiers d'insertion

120

Arbitres sportifs

39

ACCRE

262

Aide à domicile particulier fragile

877

Entreprises/associations aide à domicile particuliers fragiles

917

Cotisations maladie des exploitants agricoles

480

Transferts de recettes

16

Taxe sur les véhicules de sociétés

150

Ajustement fraction de TVA

- 134

Total compensé

2 969

« Autres mesures ayant un impact favorable sur la sécurité sociale »

879

Source : PLF 2017, évaluation préalable de l'article 26

Les « autres mesures ayant un impact favorable sur la sécurité sociale » qui viennent en diminution de la compensation à opérer se détaillent de la façon suivante :

- 160 millions d'euros liés à une mesure exceptionnelle prévue par l'article 11 du PLFSS, qui se traduit par la collecte au titre de 2017 du produit de 5 trimestres de la taxe sur les véhicules de sociétés pour la période courant du 1 er octobre 2016 au 31 décembre 2017.

- 719 millions d'euros de prélèvement sur les réserves du FSV.

Cette dernière mesure s'apparente à la mesure comptable, contestée par la Cour des comptes, d'inscription en produits pour 2016 de l'assurance-maladie de la recette exceptionnelle de 700 millions d'euros de CSG qui aurait dû être inscrite au bilan 2015. Il s'agit du « débouclage » des réserves de la section III du FSV, qui sont inscrites à son bilan et seraient inscrites en produits de la Cnam pour 2017. Par cette dernière mesure, la sécurité sociale se compense donc à elle-même ses pertes de recettes.

Pour ce qui concerne la TVS, la mesure n'est pas pérenne, puisqu'elle consiste en un produit exceptionnel sur le dernier trimestre de l'année 2017.

Le mode de compensation à venir de la baisse de la cotisation maladie des exploitants agricoles reste également à préciser, un transfert budgétaire étant prévu pour la seule année 2017.

B. LE MOT D'ORDRE DU GOUVERNEMENT : TOUT FAIRE POUR SAUVER L'ASSURANCE MALADIE

En 2017, le déficit du régime général se réduirait de 2,9 milliards d'euros par rapport à 2016 et de 6,6 milliards par rapport à 2015.

La branche maladie connaîtrait une amélioration sensible de son solde, de 1,5 milliard d'euros, de même que la branche famille, de 1 milliard d'euros, tandis que le solde de la branche vieillesse s'améliore de 500 millions d'euros. Pour la quatrième année consécutive, le solde de la branche AT-MP serait stable, à 700 millions d'euros.

Évolution des soldes du régime général et du FSV

En milliards d'euros

2015

2016 (p)

2017 (p)

Évolution 2016/2017

Maladie

- 5,8

- 4

- 2,6

1,4

AT-MP

0,7

0,7

0,7

0

Vieillesse

- 0,3

1,2

1,6

0,4

Famille

- 1,5

- 1

0

1

Régime général

- 6,8

- 3,1

- 0,4

2,7

FSV

- 3,9

- 3,8

- 3,8

0

RG+FSV

- 10,8

- 6,9

- 4,2

2,7

Source : PLFSS 2017

Ces résultats supposent un effort substantiel par rapport au tendanciel, de 5,9 milliard d'euros, concentré sur la branche maladie dont le solde tendanciel est de - 8,3 milliards d'euros.

Comparaison des soldes, par branche, du régime général par rapport au tendanciel

(en milliards d'euros)

Prévisions 2016

Tendanciel 2017

Prévisions 2017

Écart 2017
au tendanciel

Maladie

- 4,1

- 8,3

- 2,6

5,7

Vieillesse

1,1

2,7

1,6

- 1,1

Famille

- 1

- 1,3

0

1,3

AT-MP

0,7

0,6

0,7

0,1

Total

- 3,4

- 6,3

- 0,4

5,9

FSV

- 3,8

- 4

- 3,8

0,2

Tous régimes +FSV

- 7,1

- 10,3

- 4,2

6,1

Source : Rapport de la commission des comptes de septembre et PLFSS 2017

La lecture de l'annexe 9, relative aux effets du projet de loi sur les comptes fait ressortir une priorité : un redressement des comptes de l'assurance-maladie, au prix, le cas échéant, d'un déport de son déficit vers d'autres branches.

1. Une maitrise optique des dépenses d'assurance maladie

Le solde de la branche maladie connaîtrait une nouvelle amélioration, de 1,4 milliard d'euros par rapport à 2016, pour s'établir à - 2,6 milliards d'euros, soit le meilleur résultat obtenu depuis 2001, où le solde de l'assurance maladie s'établissait à - 2,1 milliards d'euros.

Cette prévision de solde suppose de combler un écart de 5,7 milliards d'euros par rapport au solde tendanciel qui s'établirait, en dépit des réformes structurelles annoncées, à - 8,3 milliards d'euros.

Prévisions 2016

Tendanciel 2017

Prévisions 2017

Écart 2017
au tendanciel

Maladie

- 4,1

- 8,3

- 2,6

5,7

a) Un choc de dépenses

La construction de l'Ondam 2017 prend en compte trois chocs pesant sur la dépense tendancielle :

- l'entrée en vigueur de la nouvelle convention médicale (+ 400 millions d'euros en 2017) ;

- la hausse en deux temps de la valeur du point de la fonction publique ainsi que les mesures concernant la transposition du parcours professionnel carrières et rémunérations des fonctionnaires (PPCR) (+ 800 millions d'euros en 2017) ;

- l'arrivée sur le marché de médicaments anti-cancéreux de nouvelle génération.

Ce triple choc conduit à estimer la croissance tendancielle de l'Ondam 2017 à 4,3 %. Les dépenses de soins de ville augmenteraient de 4,7 % et les dépenses des établissements de santé de 4 %.

Ainsi que l'avait indiqué votre rapporteur général, un taux de progression de l'Ondam de 1,75 %, tel que présenté dans le programme de stabilité n'était pas tenable.

Ces augmentations ont conduit le Gouvernement à réviser à la hausse le taux de progression de l'Ondam de 1,75 %, prévu dans le programme de stabilité, à 2,1 % dans le PLFSS et à afficher une norme d'économies particulièrement exigeante de 4,1 milliards d'euros.

b) Des économies à relativiser

Ces économies sont détaillées comme suit, selon les quatre postes du plan Ondam 2015-2017.

Déclinaison des économies de l'Ondam selon quatre axes

Efficacité de la dépense hospitalière

845

Optimisation des dépenses des établissements

80

Optimisation des achats

505

Liste en sus

260

Virage ambulatoire et adéquation de la prise en charge en établissement

640

Développement de la chirurgie ambulatoire

160

Réduction des inadéquations hospitalières

250

Rééquilibrage de la contribution de l'Ondam à l'objectif global de dépenses

230

Produits de santé et promotion des génériques

1 430

Baisse de prix des médicaments

500

Promotion et développement des génériques

340

Tarifs des dispositifs médicaux

90

Biosimilaires

30

Contribution du fonds de financement de l'innovation pharmaceutique

220

Remises

250

Pertinence et bon usage des soins

1 135

Baisse des tarifs des professionnels libéraux

165

Actions de maîtrise des volumes et de la structure de prescription
des médicaments et dispositifs médicaux

380

Maitrise médicalisée hors médicaments

220

Réforme des cotisations des professionnels de santé

270

Total

4 050

Source : RESF 2017

Par sous-objectifs de l'Ondam, les économies représentent :

- 2 190 millions d'euros pour les soins de ville ;

- 1 630 millions d'euros, dont 565 millions d'euros de régulation sur les dépenses de médicaments ;

- 230 millions d'euros pour les établissements médicaux-sociaux.

Cette cible d'économies paraît effectivement ambitieuse. Elle suppose 650 millions d'euros d'économies supplémentaires par rapport à 2016 (3,6 milliards d'euros) et 850 millions d'euros de plus qu'en 2015 (3,2 milliards d'euros).

Comme le relève cependant le comité d'alerte de l'Ondam, dans son avis du 12 octobre 2016, « une partie significative des économies annoncées n'a pas pour objet de ralentir le rythme des dépenses mais de mobiliser d'autres sources de financement qui ne sont pas décomptées dans l'Ondam ».

Cette sortie du périmètre de l'Ondam prend la forme de trois mesures principales, pour un montant de 670 millions d'euros :

- un transfert complémentaire de 150 millions d'euros depuis les réserves de l'ANFH au profit du FMESPP et de 70 millions d'euros depuis les réserves du FEH, opéré par l'article 53, dont l'exposé des motifs indique qu'il « permettra de minorer d'autant, de façon temporaire, la participation de l'assurance-maladie » et dont on pourrait s'étonner, par conséquent, qu'il ne figure pas dans la liste des économies ;

- la prise en charge par le fonds de financement de l'innovation thérapeutique, créé à l'article 49, de 220 millions d'euros de dépenses de médicaments qui sont sorties du périmètre de l'Ondam mais n'en seront pas moins financées par l'assurance maladie ;

- la mobilisation des réserves de la CNSA à hauteur de 230 millions d'euros pour réduire la participation de l'Ondam au financement des établissements médicaux sociaux.

Sont également contestables l'inscription dans cette liste d'économies de deux mesures qui n'ont pas pour effet de réduire les dépenses, ni même de les déplacer vers une autre prise en charge :

- la comptabilisation, pour 250 millions d'euros, des remises versées par les entreprises pharmaceutiques ne constitue ni une mesure nouvelle, ces remises étant versées chaque année, ni une recette supplémentaire, les remises étant précédemment constatées ex post et venant atténuer les dépenses de médicaments ;

- la comptabilisation, comme en 2016, d'une économie de 270 millions d'euros au titre de la modification du taux de cotisation maladie des personnels de santé exerçant en ville qui réduit certes les dépenses comptabilisées dans l'Ondam mais également les recettes de cotisations enregistrées par la Cnam.

Ces éléments conduisent le comité d'alerte à émettre « une réserve de méthode sur les éléments ayant permis l'élaboration de l'objectif de dépenses en 2017 : en effet, l'évolution de l'Ondam est minorée, plus qu'à l'accoutumée, par des dispositions qui permettent de financer hors Ondam certaines dépenses d'assurance maladie ».

Sur les 4 milliards d'économies présentés, près d'un quart, 970 millions d'euros 2 ( * ) sont contestables : 450 millions d'euros résultent d'une débudgétisation ou plutôt d'une « désondamisation », 250 millions d'un seul aménagement comptable et 270 millions d'euros d'une absence d'économie, auxquels il faut ajouter 220 millions d'euros d'apports extérieurs intégrés en construction de l'Ondam.

Au total, l'effort d'économies est inférieur aux objectifs des années précédentes, puisqu'il se réduit à environ 3 milliards d'euros. L'annexe 9 du PLFSS, consacrée à l'impact du projet de loi sur les comptes, ne retient au demeurant que 3,5 milliards d'économies Ondam sur le champ de l'assurance maladie et, en comptabilisant l'impact sur la CNSA de la construction de l'Ondam, ne retient sur la sphère des ASSO que 3,4 milliards d'euros d'économies, soit un montant intermédiaire entre l'objectif d'économies pour 2015 et celui pour 2016.

Corrigé de ces effets de périmètre, l'Ondam 2017 ne s'établirait plus à 190,7 milliards d'euros mais à 191,4 milliards d'euros, soit un taux de progression, à périmètre constant hors intégration des ESAT, de plus de 2,5 % contre 2,1 % affiché.

c) Une augmentation de recettes

Les recettes de l'assurance-maladie progressent sous l'effet de 0,3 milliard de recettes nouvelles liées à l'augmentation de la fiscalité sur le tabac et, plus marginalement du plafonnement de certaines niches sociales et de l'application du droit social à l'économie numérique.

L'assurance-maladie reçoit 1,5 milliard de recettes liées aux mesures de réaffectations entre branches, ce qui est largement supérieur aux moindres recettes ou aux charges nouvelles qui pèsent sur la branche.

Le transfert depuis le FSV pour la constitution du fonds pour l'innovation thérapeutique est enregistré en produits pour 0,9 milliards d'euros.

d) Une augmentation de cotisations

Votre rapporteur général avait contesté l'an dernier, sur le fond et sur la forme, la mesure, exposée au détour d'un paragraphe de l'annexe B, de transfert de 0,05 point de cotisations entre la branche AT-MP à la branche maladie, qui permettait d'améliorer le solde de cette dernière de 250 millions d'euros.

Sur le fond la mesure était justifiée par « l'approche solidaire entre branches » et, de façon plus surprenante, par « les effets indirects dont bénéficie la branche AT-MP du fait de l'amélioration de l'efficience du système de soins, essentiellement financé par la branche maladie. En effet, le remboursement des soins et l'évolution des tarifs assurent une intégration continue du progrès technique dans le secteur médical, qui entraîne in fine une diminution du coût moyen de traitement des pathologies, d'où un impact positif sur les comptes de la branche AT-MP ».

Si, sur 13,4 milliards d'euros de dépenses, la branche AT-MP était capable de dégager 250 millions d'euros de gains d'efficience, quid de la branche maladie et de ses 201,1 milliards d'euros de dépenses ?

Cette mesure était en outre contraire au principe assurantiel qui régit la branche AT-MP, entièrement financée par des cotisations patronales qui doivent couvrir les dépenses exposées.

Elle est reconduite en 2017 pour le même montant et permettra de rendre indolore ce qui est, de fait, une augmentation du taux de cotisations de la branche maladie de 12,8 à 12,88 % entre 2015 et 2016 et de 12,88 à 12,93 % entre 2016 et 2017.

Elle aura permis un déport temporaire d'une partie de l'excédent de la branche maladie vers la branche AT-MP et d'afficher ainsi un solde plus favorable.

Au total, l'amélioration du solde de l'assurance maladie est au moins autant imputable à un apport de recettes supplémentaires, qu'elles soient nouvelles ou en provenance d'autres branches, notamment en provenance du FSV pour un montant de 0,9 milliard d'euros, qu'à un effort d'économies.

Les mesures affectant le solde de l'assurance maladie en 2017

(en milliards d'euros)

Solde tendanciel

- 8,3

Extinction de la mesure « congés payés »

- 0,2

Exonérations nouvellement compensées

1

Baisse de la cotisation maladie
des exploitants agricoles

- 0,5

Compensation de la baisse de cotisation maladie des exploitants agricoles

0,5

Transfert des ESAT

- 1,5

Transfert ANSP

0,5

Transfert de la part État du FIR

- 0,1

Économies Ondam

3,5

Baisse de cotisations
des travailleurs indépendants

- 0,2

Autres mesures d'économies
(fraude, gestion des caisses...)

0,3

Ajustement de la fraction TVA

- 0,1

Droits tabacs et autres mesures
nouvelles en recettes

0,3

Transferts internes de recettes
entre branches ou entre régimes

1,5

Affectation réserves FSV

0,9

Solde prévisionnel 2017

- 2,6

Source : Commission des affaires sociales d'après l'annexe 9 (exprimée en milliards d'euros)

2. Le Fonds de solidarité vieillesse, grand perdant des réaffectations de recettes

Le solde du Fonds de solidarité vieillesse s'établirait à - 3,8 milliards d'euros en 2017, comme en 2016.

En milliards d'euros

Prévisions 2016

Tendanciel 2017

Prévisions 2017

Écart 2017
au tendanciel

FSV

- 3,8

- 4

- 3,8

0,2

Pour apporter un début de réponse à un déséquilibre persistant, le projet de loi prévoit le transfert progressif entre 2017 et 2020 aux régimes de base de la moitié du financement du minimum contributif, actuellement supportée par le FSV à hauteur de 3,5 milliards d'euros. Une charge d'un milliard d'euros serait transférée en 2017, et portée à 1,8 milliard en 2018, à 2,6 milliards d'euros en 2019 et à 3,6 milliards d'euros en 2020.

Le solde prévisionnel du FSV serait en conséquence de - 2,6 milliards d'euros en 2018, - 1,3 milliard d'euros en 2019 et de 300 millions d'euros en 2020, ce qui signifie qu'en dehors du transfert de la part de minimum contributif actuellement financée par le FSV, aucune mesure n'est prévue pour corriger le déséquilibre persistant de ses recettes et de ses dépenses.

Le panier de recettes affecté au financement du minimum contributif (0,6 milliard d'euros) est cependant transféré à la Cnav dès 2017, tandis qu'une part du prélèvement social affecté à la première section du FSV va compenser à la CNSA la part des droits sur les tabacs qui lui était affectée et qui est transférée à l'assurance maladie.

Ainsi le montant des réserves constituées depuis 2011 pour le financement du maintien à 65 ans de l'âge de départ à la retraite au taux plein pour les parents de trois enfants ou d'enfants handicapés, de l'ordre de 800 millions d'euros à fin 2016, est ponctionné au profit du régime général, la charge du financement de cette mesure, réévaluée à un montant total de 200 millions d'euros, étant transférée aux régimes de base.

Bien qu'affecté de multiples changements, le FSV ne voit son solde s'améliorer qu'à la marge par rapport au tendanciel.

3. La branche vieillesse, un équilibre fragile

Avec 1,6 milliard d'euros en 2017, le solde de la branche vieillesse est dégradé de 1,1 million d'euros par rapport au tendanciel mais s'améliore de 500 millions d'euros par rapport à 2016.

en milliards d'euros

Prévisions 2016

Tendanciel 2017

Prévisions 2017

Écart 2017
au tendanciel

Vieillesse

1,1

2,7

1,6

- 1,1

Le transfert de charges de 1 milliard d'euros du minimum contributif depuis le FSV alourdit les charges de la branche tandis que le réaménagement de ses produits lui est globalement défavorable : l'affectation des recettes précédemment dévolues au FSV pour le financement du minimum contributif transfère de fait à la branche un déficit de 400 millions d'euros tandis que la perte des droits tabacs et de la taxe sur les salaires est imparfaitement compensée par l'affectation de la totalité du produit de la C3S.

Votre rapporteur souligne qu'un transfert de la totalité des charges du minimum contributif en 2017 à la branche vieillesse se serait traduit par un déficit de la branche de 900 millions d'euros, et par un déficit du FSV de près de 300 millions d'euros.

En dépit des importantes hausses de cotisations, la branche vieillesse, prise dans sa globalité, présente un déficit qui reste à combler.

4. L'équilibre de la branche famille, un bouclage assuré par 5 trimestres de TVS en 2017

en milliards d'euros

Prévisions 2016

Tendanciel 2017

Prévisions 2017

Écart 2017
au tendanciel

Famille

- 1

- 1,3

0

1,3

Avec la dernière étape du pacte de responsabilité, la branche famille enregistre une perte de recettes de plus d'un milliard d'euros et présente un solde tendanciel de - 1,3 milliard d'euros.

L'équilibre de la branche est assuré en 2017 par les exonérations nouvellement compensées, les réaffectations de recettes entre branches, en particulier celle de la taxe sur les salaires et l'affectation de la totalité de la taxe sur les véhicules de société (TVS). Le bénéfice d'un trimestre supplémentaire de taxe pour un produit exceptionnel de 160 millions d'euros assure le bouclage des comptes de la branche. Ce financement non pérenne devra trouver un substitut en 2018.

5. La branche AT-MP, une consolidation atténuée par les transferts

en milliards d'euros

Prévisions 2016

Tendanciel 2017

Prévisions 2017

Écart 2017
au tendanciel

AT-MP

0,7

0,6

0,7

0,1

La branche AT-M améliore son solde par rapport au tendanciel en raison de mesures d'économies. Le solde 2017 serait donc de 0,7 milliard d'euros.

La dette de la branche étant apurée, l'excédent va contribuer à améliorer la trésorerie portée à l'Acoss au titre des autres branches.

La branche contribue par ailleurs, en raison du transfert de taux précédemment exposé à l'amélioration du solde de la branche maladie à hauteur de 500 millions d'euros. À défaut, la consolidation de l'excédent de la branche serait supérieure à un milliard d'euros.

C. UN VÉRITABLE REDRESSEMENT... EN 2020

Le Gouvernement anticipe une consolidation de la reprise économique qui permettrait d'atteindre l'équilibre des comptes sociaux en 2018 avec un excédent de 1,9 milliard d'euros pour les régimes obligatoires de base et le FSV en 2019, et de 2,1 milliards d'euros pour le régime général et le FSV.

Le scénario retenu est celui d'une reprise progressive de la croissance selon un rythme plus modéré que celui anticipé l'an dernier.

Les hypothèses macro-économiques

2015

2016

2017

2018

2019

2020

PIB en volume

1,3 %

1,5 %

1,5 %

1,8 %

1,9 %

1,9 %

Inflation

0,0 %

0,1

0,8 %

1,4 %

1,8 %

1,8 %

Masse salariale du secteur privé

1,7 %

2,6 %

2,7 %

3,6 %

3,8 %

4,1 %

Ondam

2 %

1,8 %

2,1 %

2 %

2 %

2 %

Source : Annexe B

La croissance du PIB en volume s'établirait à 1,5 % en 2017, comme en 2016, avant d'atteindre 1,8 % en 2018 et 1,9 % en 2019 et 2020. Le ministre de l'économie, Michel Sapin a estimé, le 3 novembre, que la prévision de croissance pourrait être moins forte en 2016, de l'ordre de 1,3 %, sans toutefois réviser la prévision du Gouvernement pour 2017.

Quasi nulle en 2016 (0,1 %), l'inflation hors tabac s'élèverait à 0,8 % en 2017, 1,4 % en 2018 puis 1,8 % en 2019 et 2020.

Principal déterminant des recettes de la sécurité sociale, la masse salariale du secteur privé connaîtrait une accélération plus nette à partir de 2018, où elle s'établirait à 3,6 %, avant d'atteindre 3,8 % en 2019 et 4,1 % en 2020.

Fixé à 2,1 % en 2017, le taux de progression de l'Ondam s'établirait à 2 % par an pour les années 2018 à 2020, soit une progression très maîtrisée des dépenses.

Recettes, dépenses et solde du régime général et du FSV
pour les années 2016 à 2020

(en milliards d'euros)

Régime général

2016

2017

2018

2019

2020

Maladie

Recettes

195,8

203,2

209,1

215,4

221,9

Dépenses

199,8

205,9

209,9

214,1

218,2

Solde

- 4,1

- 2,6

- 0,9

1,3

3,7

AT/MP

Recettes

12,7

12,8

13,8

14,1

14

Dépenses

12

12,1

12,2

12,3

12,5

Solde

0,7

0,7

1,6

1,8

1,6

Famille

Recettes

48,7

49,9

51,4

52,6

53,9

Dépenses

49,7

49,9

50,7

51,7

53

Solde

- 1

0

0,7

0,8

1

Vieillesse

Recettes

124

126,5

129,1

133,4

138,7

Dépenses

122,9

125

128,5

132,7

137,6

Solde

1,1

1,6

0,6

0,7

1,1

Toutes branches du régime général

Recettes

368,2

379,5

390,3

402,1

415

Dépenses

371,6

379,9

388,2

397,5

407,6

Solde

- 3,4

- 0,4

2,1

4,6

7,4

FSV

Recettes

16,5

15,7

16,2

16,7

17,3

Dépenses

20,3

19,6

18,8

18

17

Solde

- 3,8

- 3,8

- 2,6

- 1,3

0,3

Solde ensemble RG+FSV

- 7,2

- 4,2

- 0,5

3,3

7,7

Source : Annexe B PJLFSS 2017

Pour ce qui concerne le régime général, la branche maladie atteindrait un résultat positif, à partir de 2019, grâce à la progression modérée de ses dépenses, de l'ordre de 4 milliards d'euros par an à partir de 2018, après une hausse de plus de 6 milliards d'euros en 2017 et une croissance des recettes, supérieure à celle des dépenses dès 2017. Ces évolutions permettraient une amélioration du solde de 2,2 milliards d'euros en 2019 et de 2,4 milliards d'euros en 2020.

La branche AT-MP consoliderait son excédent grâce à une croissance modérée de ses dépenses et un ressaut d'un milliard d'euros de ses recettes à partir de 2018.

La branche famille retrouverait l'équilibre en 2017 puis consoliderait un excédent à partir de 2018 pour atteindre un milliard d'euros en positif en 2020.

A l'équilibre en 2015, la branche vieillesse serait excédentaire en 2016 et 2017, cet excédent se réduisant en 2018 pour progresser à nouveau et s'établir à 1,1 milliard d'euros en 2020.

Recettes, dépenses et solde de l'ensemble
des régimes obligatoires de base pour les années 2016 à 2020

Régimes obligatoires de base

2016

2017

2018

2019

2020

Maladie

Recettes

197

204,5

210,3

216,6

223,2

Dépenses

201,1

207,1

211,2

215,3

219,5

Solde

- 4

- 2,6

- 0,9

1,3

3,7

AT/MP

Recettes

14,1

14,2

15,3

15,5

15,5

Dépenses

13,4

13,5

13,6

13,7

13,9

Solde

0,7

0,7

1,7

1,8

1,6

Famille

Recettes

48,7

49,9

51,4

52,6

53,9

Dépenses

49,7

49,9

50,7

51,7

53

Solde

- 1

0

0,7

0,8

1

Vieillesse

Recettes

228,3

232,2

236,8

243,5

251,4

Dépenses

227,1

230,6

236,4

243,3

251,3

Solde

1,2

1,6

0,4

0,1

0,1

Toutes branches des régimes obligatoires de base

Recettes

474,4

487,1

499,9

514,1

529,7

Dépenses

477,6

487,4

498

510,1

523,3

Solde

- 3,1

- 0,3

1,9

4

6,4

FSV

Recettes

16,5

15,7

16,2

16,7

17,3

Dépenses

20,3

19,6

18,8

18

17

Solde

- 3,8

- 3,8

- 2,6

- 1,3

0,3

Solde ensemble RG + FSV

- 6,9

- 4,1

- 0,7

2,7

6,7

Source : Annexe B PJLFSS 2016

Le scénario est comparable, pour les régimes obligatoires de base, avec une différence pour la branche vieillesse dont l'excédent de 1,6 milliard d'euros en 2017 se réduirait notablement à partir de 2018 pour atteindre 100 millions d'euros en 2019 et 2020 en raison d'une croissance des dépenses, supérieure à celle des recettes à partir de 2018.

L'annexe B programme une trajectoire de retour à l'équilibre du Fonds de solidarité vieillesse en 2020. À la suite de la réorganisation du Fonds en différentes sections, le déficit se concentre particulièrement sur la section II, consacrée pour l'essentiel au financement, d'une part, du minimum contributif qui représente une charge annuelle de 3,5 milliards d'euros pour des produits résiduels de l'ordre de 600  millions d'euros, soit un besoin de financement structurel, pour cette section, de l'ordre de 2,9 milliards d'euros. Le déficit de la section de solidarité est de 816 millions d'euros en 2016 pour des charges de 17,1 milliards d'euros.

L'article 20 du présent projet de loi prévoit le transfert progressif aux différents régimes de la charge de la part du minimum contributif, actuellement financée par le FSV, à hauteur d'un milliard d'euros en 2017. Comme les produits affectés à cette charge sont également transférés, le déficit y afférent ne se réduit que de 400 millions d'euros. Le même article 20 retire également au FSV 300 millions d'euros de produits du prélèvement social sur les revenus du capital, affectés à la section de solidarité, ce qui a pour effet de creuser son déficit à 1,3 milliard d'euros. Au total, le solde du FSV ne s'améliore que de 100 millions d'euros en 2017 par rapport à son tendanciel pour s'établir, comme en 2016, à - 3,7 milliards d'euros. Il serait de - 2,6 milliards d'euros en 2018 pour un retour à l'équilibre prévu en 2020. Ce retour à l'équilibre est entièrement imputable à l'augmentation de 500 millions d'euros prévue, entre 2019 et 2020, du produit de la CSG sur les revenus du patrimoine et des produits de placement.

D. UNE CRDS À 1,2 %, LE VÉRITABLE COÛT DE LA DETTE SOCIALE

Au 31 décembre 2015, 236,9 milliards d'euros avaient été transférés à la Cades, dont 110,2 milliards d'euros avaient été amortis et 126,6 milliards d'euros restaient à rembourser.

En 2015, la Cades a pu jouer son rôle d'amortissement de la dette sociale, le stock de la dette restant à amortir ayant diminué de 2,1 milliards d'euros.

En application de la loi de financement pour 2016, la Cades a repris 23,6 milliards d'euros de dette, atteignant ainsi dès 2015 le plafond de 62 milliards d'euros fixé par la loi de financement pour 2011 pour les années 2011 à 2018.

Ont ainsi été transférés à la Cades :

- les déficits 2015 de la Cnav et du FSV (4,2 milliards d'euros minorés d'une régularisation de 700 millions d'euros) ;

- le reliquat du déficit 2013 de la Cnam (6,5 milliards d'euros) ;

- le déficit 2013 de la Cnaf (3,2 milliards d'euros) ;

- le déficit 2014 de la Cnam (6,5 milliards d'euros) ;

- le déficit 2014 de la Cnaf (2,7 milliards d'euros) ;

- une partie du déficit 2015 de la Cnam, portée à 1,2 milliard d'euros.

Au 31 décembre 2016, la Cades aura repris 260,5 milliards d'euros. Elle devrait avoir amorti 124,7 milliards d'euros, dont 14,4 milliards d'euros en 2016, et 135,8 milliards d'euros resteraient à rembourser.

Le taux de refinancement de la Cades se maintient à un niveau historiquement bas, de 1,62 % au 31 août 2016.

La loi de financement pour 2016 a simplifié les ressources de la Cades en portant de 0,48 à 0,60 point la part de CSG qui lui est attribuée et en transférant au FSV 1,3 point de prélèvement social sur les revenus de capital. La CSG (7,7 milliards d'euros) devient ainsi la première recette de la Cades devant la Crds (7 milliards d'euros) et le transfert du Fonds de réserve des retraites. Les ressources de la Cades seraient de 16,9 milliards d'euros en 2016 et de 17,3 milliards d'euros en 2017.

Pour 2017, le projet de loi fixe un objectif d'amortissement de 14,9 milliards d'euros et l'échéance d'extinction de la dette actuellement transférée à la Cades reste fixée à 2024, comme prévu par la LFSS pour 2013.

Cet horizon d'extinction ne porte que sur la dette transférée.

À fin 2016, l'Acoss devrait porter en trésorerie la totalité des déficits 2016, soit 8,9 milliards d'euros dont - 4,1 milliards d'euros pour la branche maladie, - 1 milliard d'euros pour la branche famille et - 3,8 milliards d'euros pour le FSV. S'ajoutent à ce montant les déficits 2015 de la Cnam et de la Cnaf qui n'ont pu être repris, soit 6,1 milliards d'euros (- 4 ,6 pour le solde de la Cnam et - 1,5 pour la Cnaf).

Au total, 15 milliards d'euros de dette resteraient dans les comptes de l'Acoss à la fin de l'année 2016, soit un montant supérieur à une année d'amortissement par la Cades. L'Acoss porte également, sans perspective de transfert, les dettes accumulées par les branches vieillesse des régimes des exploitants agricoles et des mines, pour un montant de 3,7 milliards d'euros.

Pour les années à venir, sur la période couverte par l'annexe B, la branche maladie et le FSV, en dépit d'un scénario de retour à l'équilibre en fin de période, présenteraient, sous réserve de la réalisation de ce scénario, près de 20 milliards d'euros de déficits cumulés. Toutes branches confondues, le besoin de financement cumulé s'établirait à - 6,1 milliards d'euros à fin 2020. Ces estimations sont très dépendantes des hypothèses formulées par le Gouvernement : lors de la présentation du programme de stabilité, en avril 2016, l'estimation était plutôt supérieure à 30 milliards d'euros.

Soldes des différentes branches et du FSV portés par l'Acoss
pour les années 2015 à 2020

2015

2016

2017

2018

2019

2020

solde cumulé

Maladie

- 4,6

- 4,1

- 2,6

- 0,9

1,3

3,7

- 7,2

Famille

- 1,5

- 1

0

0,7

0,8

1

0

AT-MP

0,8

0,7

0,7

1,6

1,8

1,6

7,2

Vieillesse

-

1,1

1,6

0,6

0,7

1,1

5,1

FSV

-

- 3,8

- 3,8

- 2,6

- 1,3

0,3

- 11,2

Source : Annexe B

Outre que l'Acoss a vocation à assurer la trésorerie des branches mais non à porter leur dette, l'absence de transfert des déficits cumulés, qui bénéficient actuellement d'un financement de court terme à des taux exceptionnellement bas, expose à un risque de forte augmentation des frais financiers si les taux d'intérêt remontent.

Sauf à prolonger la durée de vie de la Caisse, plus le transfert est tardif, plus le coût de ce transfert est élevé.

Ressources additionnelles nécessaires au transfert
à la Cades de 10 milliards d'euros

Année
de reprise

En milliards d'euros

En points de Crds

Taux de CRDS

2017

1,25

0,092

0,592

2018

1,43

0,105

0,605

2019

1,67

0,122

0,622

2020

2

0,147

0,647

2021

2,5

0,184

0,684

2022

3,33

0,245

0,745

2023

5

0,367

0,867

2024

10

0,734

1,234

Pour transférer les 15 milliards d'euros portés par l'Acoss, 2,5 milliards d'euros supplémentaires par an devraient donc être apportés à la Cades, soit 0,135 point de CRDS.

Faire de la Crds la recette exclusive de la Cades supposerait d'en porter le taux à 1,2 % ou à 1,06 % en maintenant le prélèvement sur le Fonds de réserve des retraites. Le vrai coût de la dette sociale est celui-ci.

Devant ce constat, le choix fait par le Gouvernement est donc un pari sur le maintien d'une situation de taux à court terme très bas pour au moins une année supplémentaire.

Les interlocuteurs de votre rapporteur général se sont montrés confiants quant à l'absence de remontée des taux d'intérêt à court terme dans les mois qui viennent.

Votre rapporteur général est donc prêt à accepter ce pari qui, à défaut d'être juridiquement conforme aux règles, pourrait se révéler économiquement rationnel.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

___________

AUDITION DES MINISTRES

Audition de M. Christian ECKERT, secrétaire d'État chargé du budget

Réunie le mercredi 12 octobre 2016 sous la présidence de M. Alain Milon, président, et de M. Gérard Dériot, vice-président, la commission procède à l'audition de M. Christian Eckert, secrétaire d'État chargé du budget, sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017.

M. Alain Milon , président . - Nous sommes heureux d'accueillir M. Christian Eckert, secrétaire d'État chargé du budget, pour la présentation du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2017. Nous examinons plus particulièrement les recettes et les équilibres généraux et nous recevrons, la semaine prochaine, la ministre des affaires sociales, Mme Marisol Touraine, pour la partie « dépenses ».

Ce PLFSS 2017 est le dernier de la législature. Il marque la dernière étape du pacte de solidarité et de responsabilité et du plan d'économies, lancé par le Gouvernement. Le Gouvernement a annoncé, peut-être un peu vite, le retour à l'équilibre des comptes sociaux alors que le déficit de l'ensemble « régime général et Fonds de solidarité vieillesse (FSV) » s'élève à 4,2 milliards d'euros en 2017. Les déficits se concentrent sur la branche maladie à hauteur de 2,6 milliards et sur le FSV pour 3,7 milliards.

Examinant les hypothèses de construction de ce projet de loi, le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) a adopté, le 24 septembre dernier, un avis particulièrement sévère, soulignant les risques pesant sur les dépenses : « caractère irréaliste des économies prévues sur l'Unedic », « fortes incertitudes sur la réalisation des économies de grande ampleur prévues sur l'Objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam) » et, au total, « fragilité de la trajectoire de retour à l'équilibre » des comptes publics. Le Gouvernement a-t-il sauvé la sécurité sociale ou restera-t-il du travail sur ce sujet pour le prochain Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État . - Ce dernier PLFSS fait mesurer à chacun l'ampleur du chemin parcouru depuis notre arrivée au Gouvernement : au départ, un déficit de 21 milliards d'euros pour le régime général, à l'arrivée un quasi équilibre, 400 millions d'euros de déficit en 2017.

Ce PLFSS comporte également des mesures fortes pour l'avenir. L'équilibre financier de la sécurité sociale doit être au service d'une politique responsable pour continuer à faire progresser les droits. Mme Touraine centrera son propos sur ces mesures, concernant tout particulièrement l'assurance maladie, j'évoquerai l'équilibre budgétaire et les recettes.

Au printemps dernier, je vous ai présenté les résultats du régime général pour 2015 d'après les chiffres des différentes caisses, bien meilleurs que prévu - certains d'entre vous s'en étonnaient - avec une amélioration de 2 milliards d'euros, comme en 2014. Et pourtant, nous avions eu les mêmes alertes de la Cour des comptes, « incertitudes », « aléas possibles », « fragilités »... En 2015, comme les deux années précédentes, la Cour a certifié le résultat financier de chaque branche du régime général, alors que chaque année jusqu'en 2012, elle refusait la certification pour au moins une des branches. Désormais, malgré certains désaccords, elle estime donc que les comptes de chaque branche donnent une image fidèle de son résultat réel. Il faut donc arrêter de crier à l'insincérité ! La Cour des comptes est un juge de paix...

Nous avions prévu un déficit de 9,8 milliards d'euros pour le régime général et le FSV en 2017 ; il a été revu récemment à 7,2 milliards d'euros, tout de même 2 milliards d'euros de moins ! Le déficit du régime général a été divisé par deux en un an, pour s'établir à 3,4 milliards d'euros en 2016. En 2017, le déficit du régime général sera réduit à 400 millions d'euros, pour 400 milliards d'euros de masse financière, soit un quasi équilibre : les dépenses sont couvertes à 99,9 % par les recettes. Depuis quinze ans, aucun Gouvernement ne s'est approché de si près de l'objectif.

Certes, il faut encore assurer l'équilibre du FSV, dont le déficit est très affecté par la situation du marché de l'emploi - ce qui préoccupe à juste titre votre commission. Le déficit se réduira toutefois en 2016, pour un retour à l'excédent en 2020. En 2016, le déficit du FSV devrait s'élever à 3,6 milliards d'euros. En 2010 et 2011, il s'élevait à 4,1 milliards. Ce qui est inadmissible aujourd'hui était convenable à l'époque ?

Ayons le courage de regarder les chiffres en face. La réduction du déficit -même si elle est insuffisante, trop lente, etc.- a permis, dès 2015, de réduire l'endettement de la sécurité sociale. La Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) a remboursé plus de 13 milliards d'euros de dette en 2015. La réduction de la dette est supérieure au déficit de 10,8 milliards, conservé à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss).

Monsieur Delattre, si vous additionnez la dette de l'Acoss et celle de la Cades, vous constatez une réduction de la dette totale. Le transfert d'une partie de la dette de l'Acoss vers la Cades n'y change rien. Ce désendettement se poursuivra à hauteur de plus de 7 milliards en 2016 et 10 en 2017. Même si l'on tient compte de la dette de l'Acoss, qui se stabilisera en 2018, le désendettement est réel. Il reste 136 milliards d'euros de dette, moins que l'an passé, et nettement moins qu'en 2010, 2011 ou 2012. La dette totale s'est réduite durant la législature. La dette de la Cades devrait être éteinte en 2024, plus tôt que prévu : c'est le fruit des actions du Gouvernement et des efforts de tous les acteurs concernés.

Quelles sont les mesures nécessaires pour atteindre l'équilibre ? Comme les années précédentes, l'amélioration des comptes ne tombe pas du ciel, elle découle de nos décisions, de vos décisions, grâce à des économies supplémentaires et au plan d'économies global, mené depuis 2014. L'Ondam a été respecté ces six dernières années et devrait l'être en 2016 malgré une cible historiquement ambitieuse, 1,8 %. Ce sont 4,1 milliards d'euros d'économies qui sont attendues par rapport à l'évolution tendancielle des dépenses de l'assurance maladie. Nous avons mené des réformes -efficience des dépenses hospitalières, virage ambulatoire, maîtrise des dépenses de produits de santé, amélioration de la pertinence des soins- qui monteront en charge en 2017. Nous ferons face aux coûts de l'innovation thérapeutique -chacun connaît le coût des nouveaux traitements contre l'hépatite C ou des médicaments anticancéreux- en lissant l'arrivée sur le marché des nouveaux traitements.

Nous avons des dépenses nouvelles, oui ; elles sont liées aux nouvelles conventions médicales, à l'augmentation de la consultation de 23 à 25 euros, sur laquelle j'aimerais connaître la position de chacun, aux mesures salariales avec l'augmentation du point d'indice des agents de la fonction publique. Les mêmes qui critiquaient un gel du point d'indice, insupportable pour les agents hospitaliers, protestent que nous laissons ainsi filer le déficit...

Le taux de progression de l'Ondam a été fixé, pour 2017, à 2,1 % -un des taux les plus bas jamais retenu. Nous devrons donc prendre des mesures complémentaires, pour 1,5 milliard d'euros comme annoncé en avril dernier dans le pacte de stabilité. Nous alignerons la fiscalité du tabac à rouler sur celle des cigarettes. Une taxe sur les distributeurs de tabac fournira 130 millions d'euros supplémentaires (les ventes des fabricants aux distributeurs des produits avant l'entrée en France constitue une optimisation à combattre). Nous réduirons les niches sociales. Nous attendons 500 millions d'euros de recettes grâce à la lutte contre la fraude sur les prestations et les cotisations sociales. Nous avons déjà beaucoup progressé en ce domaine.

De nouvelles économies de gestion seront réalisées par les organismes de sécurité sociale -déjà sollicités les années passées- pour un montant fixé à 270 millions d'euros. Certaines dépenses se réduiront à la suite de la montée en charge des réformes -comme sur le capital décès- à hauteur de 350 millions d'euros. Le retour à l'équilibre est également dû au fait que l'État compense systématiquement les allègements de cotisations, comme il s'y est engagé dans le pacte de responsabilité et de solidarité : plus de 13 milliards d'euros en trois ans. Certains regrettent que le déficit budgétaire de l'État ne se réduise pas plus vite, mais l'État reprend certaines dépenses -comme les allocations logement- ou réalloue des recettes. En 2017, l'extinction des recettes des caisses de congés payés -un fusil à un coup- sera intégrée dans la compensation. L'État compensera certaines exonérations de cotisations sociales, jusqu'à présent non compensées.

Nous engageons des mesures importantes concernant les prélèvements sociaux -qui ne sont pas augmentés-. Les prélèvements sociaux doivent être davantage adaptés, ainsi pour les travailleurs indépendants : nous prévoyons de réorganiser les relations entre les Urssaf et le Régime social des indépendants (RSI), en intégrant les propositions qui figurent dans les rapports récents des députés Sylviane Bulteau et Fabrice Verdier et de vos collègues Jean-Noël Cardoux et Jean-Pierre Godefroy. Plusieurs mesures ont été prises et doivent être poursuivies.

L'interlocuteur social unique n'a pas fait ses preuves... Nous avons en revanche testé des solutions pragmatiques pour que les équipes des deux organismes travaillent ensemble sur le terrain. Cela commence à porter ses fruits. Et nous identifions plus clairement, dans la loi, la chaîne de responsabilités.

Nous prévoyons une nouvelle exonération de cotisations sociales pour les travailleurs indépendants modestes, qui pourra aller jusqu'à trois points de cotisations d'assurance maladie, soit 250 euros. Nous avons déjà supprimé la cotisation minimum d'assurance maladie. L'assurance vieillesse et les indemnités journalières sont également concernées. Le poids des prélèvements diminue donc pour les deux-tiers des travailleurs indépendants, tandis que leur protection sociale s'améliore.

L'économie se transforme. Il faut l'accompagner et adapter notre système. La clarification des règles applicables aux activités économiques accessoires a commencé en 2015, en loi de finances. Le sujet de l'économie collaborative a beaucoup intéressé les sénateurs l'année dernière. Ils avaient raison, car ces activités montent en puissance et personne n'y pourra rien. Vous aviez abouti à un consensus sur la nécessité de modifier le droit, de clarifier le partage de frais. Nous l'avons fait dans une instruction fiscale en septembre dernier. BlablaCar est un système de partage de frais, non imposable et ne donnant pas lieu à cotisations sociales. On a laissé s'installer des zones grises, voire de non-droit. Si on veut rétablir une concurrence loyale entre l'économie traditionnelle et l'économie dite virtuelle, il faut avancer. Ainsi, la situation est peu claire pour la location de biens entre particuliers. Fixons un seuil cohérent pour l'activité professionnelle réelle. La presse n'est pas très bien renseignée sur le sujet, soit dit en passant.

Mme Nicole Bricq . - Vous allez nous éclairer !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État . - Ce seuil est prévu à 23 000 euros et non à 4 000 euros, par cohérence avec les seuils fiscaux. Le projet de loi simplifie les démarches pour ceux qui se déclarent comme auto-entrepreneurs. Vous connaissez le succès du Chèque emploi service universel (Cesu) et de Pajemploi permettant à des particuliers employeurs de bénéficier d'une réduction de cotisations sociales forfaitaire, portée à 2 euros par heure de travail en 2015. À compter de 2017, la réduction d'impôt sera transformée en crédit d'impôt, soit un gain net dans de nombreux cas. Poursuivons la simplification des démarches en facilitant l'octroi des aides en même temps que le paiement du salaire, pour réduire les besoins de trésorerie des particuliers.

À compter de 2018, les particuliers pourront confier aux centres Cesu et Pajemploi la charge de réaliser, pour leur compte, la totalité des opérations sociales, ainsi que le prélèvement à la source. La retenue à la source aboutira donc à une nouvelle simplification pour ce secteur.

Dans cette période marquée par le doute, nous devons montrer que les résultats sont atteints. Depuis 2012, nous avons tenu un langage de vérité et de responsabilité. Le déficit était alors de 21 milliards d'euros. Nous avons fait les efforts d'économie nécessaires, même s'ils ont pu être impopulaires. Entre 2010 et 2017, le déficit du régime général et du FSV aura été divisé par six.

La dette sociale poursuit sa baisse en valeur, ce qui contribue à la stabilisation du ratio global de dette publique. Le retour à l'équilibre était donc possible, sans avoir à sacrifier les droits sociaux des assurés ou dé-rembourser des soins. Au contraire, le redressement financier s'est accompagné d'avancées sociales, ce qui contraste avec certaines des propositions qui sont avancées ces jours-ci. Ce Gouvernement croit à l'avenir de la protection sociale. Il s'est employé à rétablir son équilibre et à l'adapter à l'évolution des besoins. Elle est désormais plus généreuse, plus juste, plus solide et plus efficace.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe , rapporteur général . - Merci de ces explications complètes. L'équilibre des comptes de la sécurité sociale n'était donc pas une utopie ! Je n'ai cessé de le réclamer depuis des années, sans jamais parler de déremboursement. Je me réjouis que le Gouvernement ait repris cette exigence à son compte. Certes, le déficit est moindre que dans les années antérieures.

Mme Nicole Bricq . - C'est un fait.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe , rapporteur général . - Pour autant faut-il claironner, comme vous le faites ainsi que Mme Touraine, que le retour à l'équilibre est acquis ? Le FSV est toujours en déficit et il est inclus dans le périmètre du PLFSS. Avouons donc plutôt qu'il reste des efforts à accomplir. Nous souhaitons vous accompagner dans cette direction, à condition que tous les acteurs de l'équilibre soient concernés.

Avec l'article 20, vous transférez 836 millions d'euros du FSV vers la Cnam. Or le FSV est en déficit et son déficit ne sera pas transféré à la Cades. Sa dette cumulée atteindra 11 milliards d'euros en 2020, en tenant compte des mesures structurelles que vous avez déjà proposées. La dette augmente, et peu importe qu'elle soit logée à la Cades ou à l'Acoss. L'article 49 transfère 876 millions d'euros à un fonds d'innovation thérapeutique, qui place hors du périmètre de l'Ondam une partie des dépenses de médicaments. L'article 26 du projet de loi de finances, lui, compense à la sécurité sociale les exonérations de cotisations à hauteur de 719 millions d'euros, toujours avec cette même dotation en provenance du FSV. Il ne s'agit donc pas seulement d'innovation thérapeutique, mais aussi d'innovation budgétaire ! La sécurité sociale se compense à elle-même son manque à gagner. Pouvez-vous nous dire ce qui vous a conduits à ce montage ?

Pouvez-vous nous détailler la tranche 2017 du plan d'économies sur le périmètre des administrations de sécurité sociale ? Quelle y sera la part de l'assurance chômage ? Les négociations sur la nouvelle convention ont du mal à redémarrer.

Dans son avis rendu aujourd'hui, le comité d'alerte sur l'évolution des dépenses d'assurance maladie estime que la prévision pour 2016 reste sujette à des aléas significatifs. Comme en 2015 et en 2014, l'Ondam ne serait tenu que grâce à des mesures de régulation sur les crédits hospitaliers. Le comité émet une réserve de méthode sur les éléments ayant permis l'élaboration de l'Ondam pour 2017, notamment en raison de l'exclusion des médicaments innovants. Qu'en dites-vous ?

M. Jean-Noël Cardoux , président de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) . - Sur quelle prévision de croissance avez-vous établi votre budget ? Le Gouvernement prévoit 1,5 % pour 2017, mais l'Insee et le FMI ont réduit leurs espoirs à 1,2 % ou 1,3 %. Le président de la sixième chambre de la Cour des comptes a attiré notre attention sur le fait que 700 millions d'euros de produit de la CSG ont été comptabilisés dans les résultats 2016 de la branche maladie, alors qu'ils devaient être inscrits directement au bilan. Par conséquent, il n'a pu nous dire si la Cour des comptes pourrait certifier les comptes de la sécurité sociale. Il « réfléchit ». Qu'en pensez-vous ?

Certes, qu'ils soient transmis ou non à la Cades, les déficits restent les mêmes. Mais le risque n'est pas identique. Fin 2016, la dette logée à l'Acoss atteindra plus de 15 milliards d'euros. Il faut y ajouter la dette MSA et celle du régime des mines... Pour l'heure, il n'y a plus d'autorisation de transfert de l'Acoss vers la Cades. Ces sommes sont exposées au risque de hausse des taux. M. Durrleman nous a d'ailleurs indiqué qu'environ 30 % de la dette de la Cades avait été contractée à taux variable. C'est un risque considérable ! Ne faudrait-il pas allonger la durée de vie de la Cades ou augmenter de 0,2 ou de 0,3 point la CRDS ? Puisque le budget de la Sécurité sociale est enfin à l'équilibre, c'est l'occasion ou jamais de faire table rase du passé, au prix d'une faible augmentation d'impôt.

S'agissant du RSI, le PLFSS prévoit la nomination d'un directeur unique chargé du recouvrement. J'ai participé à la structure créée par Mme Touraine et présidée par M. Verdier. Le dysfonctionnement du RSI venait d'un manque de dialogue pendant des années. À cet égard, nommer un responsable unique chargé du recouvrement est une bonne idée. Cela dit, les hommes ne peuvent pas tout faire, et le logiciel de l'Acoss pose problème. Celui dédié au RSI est obsolète. Or il semble que les moyens pour restructurer ces outils fassent défaut. La question était « à l'étude » l'an dernier. Où en sommes-nous à présent ? Il y va de l'efficacité du recouvrement.

M. Francis Delattre , rapporteur pour avis de la commission des finances . - Merci de votre invitation. C'est toujours un plaisir d'entendre notre secrétaire d'État au budget, dont l'optimisme serait presque contagieux ! La commission des finances ne s'intéresse pas, comme la vôtre, au fond des mesures du PLFSS, mais cherche à comprendre si les dépenses prévues sont soutenables. Bien sûr, leur présentation peut varier. Et en effet, cela va mieux qu'en 2012. Mais la Cour des comptes, dont le Premier président est ancien parlementaire et ancien rapporteur général du budget, indique que la sécurité sociale n'a pas retrouvé en 2015 le niveau de déficit qui était le sien avant la crise - et qui était déjà élevé.

Nous ne nions pas que des efforts sont faits. L'Ondam est à peu près tenu, même si les mesures salariales font planer un doute. L'ensemble de la dépense sociale représente plus de 600 milliards d'euros, soit la moitié des dépenses publiques, qui atteignent 57 % du PIB. Il s'agit donc d'une affaire sérieuse. Le directeur de l'assurance maladie fait des réformes appréciables : le travail est sérieux, mais le défi aussi !

Le ministre ne signale pas que l'excédent du régime de retraite résulte de la réforme effectuée en 2010. Même si le FSV pose problème, la branche vieillesse se porte bien. Or ce dont souffre le plus le budget de la sécurité sociale, c'est du manque de réformes de structures. Lesquelles avez-vous faites ? Je l'ignore.

Mme Nicole Bricq . - Vous nous direz, vous, lesquelles vous choisissez. Ce sera intéressant.

M. Francis Delattre , rapporteur pour avis . - Vous vous êtes contentés de mesures ponctuelles, one shot, et avez déployé une grande habileté à faire communiquer les tuyaux pour obtenir un résultat présentable. Les efforts que vous annoncez ne sont pas à la hauteur de la situation, même s'ils vont dans le bon sens. Nous sommes tous attachés à la sécurité sociale. Il faut donc la réformer pour la préserver.

La Cades n'a pas été créée par une loi ordinaire. Son plafond d'emprunt annuel a été fixé à 10 milliards d'euros. L'an dernier, nous avons atteint 23 milliards d'euros. La Cour des comptes indique qu'il faudrait envisager entre 15 et 20 milliards d'euros de transferts supplémentaires de l'Acoss à la Cades. Heureusement, le talentueux gestionnaire de la Cades a renégocié une partie des emprunts, et a fait baisser leurs taux, dont certains sont négatifs.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État . - La Cades n'emprunte pas à court terme.

M. Francis Delattre , rapporteur pour avis . - Elle emprunte à moyen terme, 2024 au plus. Je suis membre de son conseil de surveillance... Quoi qu'il en soit, pour reprendre les 15 à 20 milliards d'euros de l'Acoss, vous seriez obligé d'augmenter la CRDS, je pense par conséquent que vous ne le proposerez pas.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État . - Le transfert que vous avez évoqué entre le FSV et la Cnam ne change rien au solde. La section 3 du FSV est à part : elle a été créée en 2011 pour financer le maintien de l'âge de départ à la retraite à taux plein à 65 ans pour les parents de trois enfants ou les parents d'enfants handicapés. Cette mesure coûte quelques dizaines de millions d'euros cette année et n'est pas comptabilisée parmi les résultats du FSV. Seules les sections 1 et 2 le sont : ce transfert ne dégrade donc pas les comptes. La situation est baroque, puisque cette section 3 est dotée de plus de 800 millions d'euros de réserves, pour des dépenses de l'ordre de 240 millions d'euros.

L'objectif du fonds d'innovation thérapeutique, alimenté par un prélèvement sur la section 3 du FSV, est d'absorber et de lisser l'arrivée de nouveaux médicaments plus coûteux, comme par exemple celui qui traite à présent l'hépatite C. Ces dépenses sont retracées dans les dépenses de l'assurance maladie. Ce ne sont pas des dépenses qui disparaissent.

Le comité d'alerte a en effet rendu un avis aujourd'hui. Comme d'habitude, il dit que la situation est tendue : nous ne prétendons pas le contraire ! C'est qu'il n'est pas aisé de réduire les dépenses. Nous devons parfois avoir recours à des réserves constituées en début d'exercice. Ce fut le cas l'an dernier, où nous avons dû procéder au dégel de 100 à 150 millions d'euros pour couvrir les besoins du secteur hospitalier. Quant aux aléas, par définition, c'est toute la difficulté de la prévision budgétaire...

Si nous ne faisions rien, la croissance démographique, l'allongement de la durée de la vie et l'augmentation du coût des soins -qui est en elle-même une bonne nouvelle- suffiraient à faire croître les dépenses d'assurance-maladie de 3,5 % à 4 % par an. Pour limiter cette croissance à 2,1 %, nous rationalisons les dépenses, favorisons le recours au médicament générique, développons la chirurgie ambulatoire, les soins à domicile.... Si je n'avais pris que des mesures one shot, monsieur Delattre, cela se verrait ! Le déficit n'aurait pas diminué année après année.

Et lorsque des mesures ponctuelles sont prises, la disparition de la recette occasionnée est dûment intégrée et compensée le moment venu. Cela a été le cas pour la caisse des congés payés.

La dette cumulée de la Cades et de l'Acoss est passée de 148,2 milliards d'euros en 2011 à 140,4 milliards d'euros, selon les prévisions, en 2017, après un pic à 158,4 milliards en 2014. Je ne crois pas qu'il faille attribuer cette baisse à un alignement des planètes... Les besoins de financement annuels sont désormais inférieurs au capital remboursé -rappelons que, contrairement à l'État, la sécurité sociale rembourse la dette en capital : c'est la raison d'être de la Cades. Faut-il opérer des transferts de l'Acoss vers la Cades ? Monsieur Delattre, vous m'avez reproché de le faire l'an dernier...

M. Francis Delattre , rapporteur pour avis . - De le faire en catimini !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État . - Le transfert était inscrit en PLFSS. Ce n'est pas ce que je qualifierais de manoeuvre en catimini... Les deux organismes n'ont pas la même vocation. L'Acoss pratique une gestion à court terme ; sa dette est en voie de stabilisation et devrait bientôt reprendre sa baisse pour disparaître à terme. On emprunte actuellement à un taux négatif : l'an dernier, la gestion du produit de la dette a rapporté 80 millions d'euros. Ce n'est pas le cas pour la Cades. Certes, il y a des emprunts à taux variable ; mais personne ne se plaint de cette pratique, que je ne trouve pas scandaleuse. Une grande partie de ces emprunts sont indexés sur l'inflation, indicateur plus pertinent que les taux d'intérêt sur le marché secondaire. L'inflation modérée, davantage que les taux bas, produit des économies sur la charge de la dette. La Cades emprunte sur des durées plus longues. Les deux organismes relèvent de deux secteurs différents, et il ne me paraît pas opportun d'alourdir les charges de la Cades.

Augmenter la CRDS pour amortir la dette, comme vous le proposez, monsieur Cardoux, est plutôt un engagement de début de législature... Vous auriez tôt fait de nous reprocher cette nouvelle augmentation d'impôts !

Vous mettez aussi en doute la fiabilité des hypothèses de croissance ; mais contrairement au budget de l'État, les recettes de la sécurité sociale sont avant tout affectées par la masse salariale, et non la croissance économique. Quand, au début de l'année, nous avons annoncé une prévision de croissance de la masse salariale de 2,3 %, on a parlé de surréalisme, voire de truquage. Aujourd'hui, la croissance constatée s'élève à 2,6 %... Pour l'année prochaine, nous prévoyons 2,7 %. La croissance de la masse salariale se répartit à parts égales en deux facteurs : l'augmentation des salaires et l'augmentation du nombre de travailleurs, qui est comprise entre 120 000 et 150 000 malgré la hausse du chômage. Nous sommes loin de l'optimisme béat que vous me reprochez.

M. Francis Delattre , rapporteur pour avis . - J'ai évoqué un optimisme contagieux !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État . - L'expérience des deux dernières années peut vous inciter, je le crois, à considérer sereinement nos prévisions. Autre exemple : en juin 2015, Gilles Carrez, président de la commission des finances de l'Assemblée nationale, annonçait qu'il manquerait 10 milliards de recettes par rapport à la prévision de la loi de finances initiale. Nous avons, en fin d'exercice, constaté un excédent de plus d'1 milliard...

M. Francis Delattre , rapporteur pour avis . - Sur les recettes fiscales ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État . - Oui. Donc il ne faut pas voir seulement les aléas négatifs. Oui, l'Acoss, qui emprunte à court terme, est exposée à une remontée des taux, mais la politique de la BCE ne la laisse pas entrevoir. Ils étaient, ce matin, à 0,3 % sur le marché secondaire, en hausse limitée depuis deux semaines.

Que n'a-t-on pas dit sur ces 700 millions d'euros de retours de produits de la CSG ! Ils ont bien été encaissés, personne ne le conteste, mais ils n'ont jamais été affectés. Nous proposons de les imputer à l'exercice 2016 mais la Cour des comptes, considérant qu'il ne s'agit pas d'un acte de gestion de l'année, préfère une affectation au bilan. Point de cachotteries là-dedans. Que ce soit cette année ou l'année prochaine, nous retrouverons bien ces 700 millions. En matière de certification, la Cour des comptes est le juge de paix. Nous poursuivons les échanges.

Enfin, le regroupement des Urssaf et du RSI dans un groupement d'intérêt public (GIP) unique a été abandonné, au profit de la désignation d'un responsable unique du recouvrement ; reste le problème du logiciel : doit-il rester dans le périmètre du RSI ou être intégré dans le logiciel général de l'Acoss ? Les deux organismes poursuivent ce débat, parfois difficile. Ce n'est pas une question de moyens. La question devrait être réglée par la nouvelle organisation qui sera présentée dans le PLFSS.

M. Michel Amiel . - Le fonds pour l'innovation thérapeutique est un dispositif, certes ingénieux, de débudgétisation.

L'arrivée de nouvelles molécules, analogues en prix aux antirétroviraux directs utilisés dans le traitement de l'hépatite C, aura un fort impact sur le budget. Comment sont et seront financées les molécules innovantes ?

Une gestion pluriannuelle des dépenses de la sécurité sociale nous donnerait le recul nécessaire pour établir un budget plus proche des réalités.

Mme Anne Emery-Dumas . - Vous annoncez un objectif de recettes de 500 millions d'euros sur la fraude sociale. La Mecss a confié à Agnès Canayer et moi-même un rapport dont un volet concerne la fraude liée au travail dissimulé. Nous avons constaté un effort important des organismes de contrôle, grâce auquel les redressements notifiés sont passés de 260 millions d'euros en 2008 à 462 millions en 2015. Pourtant, le taux de recouvrement ne dépasse pas 10 à 15 % ; allez-vous donner à ces organismes des moyens plus proches de ceux de la DGFiP, dont l'action de recouvrement est bien plus efficace ?

M. René-Paul Savary . - Vous êtes particulièrement en forme, monsieur le ministre ! C'est le médecin qui parle. Les Français sont ingrats : avec des chiffres pareils, la cote de popularité du Président aurait dû remonter en flèche...

Le trou de la sécurité sociale, annonce-t-on dans les journaux, va être comblé : attention, car le déficit de l'assurance maladie est loin de se résorber. Or c'est cela que les Français associent au « trou de la sécu ». De plus, c'est un équilibre fragile et à crédit : on a fait de la dette sociale, en empruntant pour financer une partie de nos prestations.

Vous avez été provocateur en nous interpellant sur le passage à 25 euros du tarif de la consultation médicale. Mais ce tarif est déjà une réalité dans les zones à faible densité médicale et les zones rurales ; il faudra par conséquent proposer un nouveau bonus incitatif pour les médecins qui exercent dans les campagnes, par exemple à travers la rémunération sur objectifs de santé publique (Rosp). Avez-vous étudié les possibilités ?

Les départements contribuent largement au financement du secteur médico-social. Le fonds de secours proposé pour les départements en difficulté reste, à 200 millions d'euros, très inférieur au manque à gagner induit par l'article 14 du projet de loi de finances : à travers la modification du périmètre de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle, les finances des départements sont grevées de 400 millions d'euros.

L'Assemblée des départements de France a interpellé Jean-Michel Baylet sur ce sujet à l'occasion de son congrès, la semaine dernière. Avez-vous des informations sur ce point ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État . - Ce sujet est en cours d'examen par la commission des finances de l'Assemblée nationale.

Mme Nicole Bricq . - Au contraire du secteur hospitalier commercial, le secteur hospitalier et social non lucratif n'a pas accès au crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE). La transformation du CICE en baisse de charges aurait pu corriger cette différence de traitement, alors qu'en en augmentant le taux et l'assiette, on aggrave encore l'iniquité. Déplorant cette situation lors des débats sur le PLFSS en novembre 2015, vous aviez souligné que vous n'aviez pas les moyens d'y remédier. Avez-vous réfléchi à ces effets de bord ?

J'ai cru comprendre que l'instruction fiscale du 31 août sur l'économie collaborative distinguait les revenus du patrimoine des revenus d'activité. Il est normal de subvenir aux frais qu'occasionne la possession d'une voiture en la louant occasionnellement. Ainsi, en raison de la stagnation du pouvoir d'achat, de plus en plus de gens participent à l'économie collaborative, certes via des plateformes. On n'endiguera pas ce mouvement de société avec des lignes Maginot. Il n'est pas opportun de taxer à 25 % au premier euro : dans la plupart des cas, ces plateformes n'ont rien à voir avec les géants américains que nous connaissons. Pouvez-vous nous éclairer sur le projet de décret introduisant semble-t-il un seuil de 3 800 euros ?

M. Olivier Cadic . - Depuis cette année, les prélèvements sociaux payés par les non-résidents sur leurs revenus immobiliers sont fléchés vers le FSV. Ce dispositif succède au mécanisme contesté par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) puis par le Conseil d'État en 2015. Plusieurs dizaines de milliers de réclamations ont été déposées en vue d'obtenir le remboursement des prélèvements sociaux indûment versés pour la période 2012-2015. Or vous avez provisionné 291 millions d'euros, soit l'équivalent du prélèvement d'une année. Quel est le montant remboursé, et combien reste en contentieux ? Avez-vous enregistré des contestations sur les nouvelles dispositions ? Enfin, l'affectation de ces mesures au FSV n'est-il pas un contournement de l'arrêt de Ruyter de la Cour de justice de l'Union européenne ?

M. Jean-Marie Morisset . - Les prévisions de recettes sont bonnes ; mais certaines économies que vous annoncez sont irréalistes, s'il faut en croire le Haut Conseil des finances publiques et la Cour des comptes. Ainsi, comment pouvez-vous afficher un montant de 1,6 milliard d'euros d'économies au titre de l'Unedic alors les négociations avec les partenaires sociaux n'ont pas commencé ?

Deuxième exemple, l'Ondam : son respect se fait au prix d'un déficit de fonctionnement des hôpitaux. Dans les départements, le budget soins repose sur l'assurance maladie. Lorsque les collectivités, qui gèrent les établissements médico-sociaux, devront supporter le point d'indice de la fonction publique hospitalière -70 % du budget- elles n'y arriveront plus.

Dans un communiqué, six associations nationales qui oeuvrent dans les établissements auprès des malades et des personnes âgées ont salué l'annonce d'un crédit d'impôt pour les associations, mais je souhaiterais des précisions sur la méthode : le Premier ministre a évoqué un amendement parlementaire au PLF.

M. Yves Daudigny . - Je désire d'abord exprimer ma satisfaction lucide sur les résultats obtenus.

La clause de sauvegarde de l'Ondam autorise pour 2016 une évolution de - 1 % pour les dépenses de médicaments ; pour 2017, ce taux se subdivise en 0 % pour la médecine de ville et 2 % pour l'hôpital. Or l'industrie pharmaceutique a le sentiment d'être le secteur qui contribue le plus à la réduction des dépenses de santé, alors même qu'elle n'y a pas la part la plus élevée. Quel message souhaitez-vous délivrer à ce secteur ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État . - Les dépenses et les mesures envisagées dans le secteur médical sont du ressort de la ministre de la santé, qui vous répondra mieux que moi. Le fonds pour le financement de l'innovation pharmaceutique évoqué par M. Amiel est néanmoins une réponse à M. Daudigny. Je n'y vois pas, pour ma part, une débudgétisation : ces montants, qui certes sortent de l'Ondam, sont parfaitement tracés. Je relève incidemment des discours contradictoires, dans votre assemblée, sur la direction à donner à l'Ondam, à la hausse ou à la baisse...

Comme le Premier ministre l'a annoncé vendredi dernier, le Gouvernement soutiendra tout amendement parlementaire prévoyant un crédit d'impôt de taxe sur les salaires (CITS) - je crois savoir que des propositions en ce sens ont déjà été déposées. Ce sera un pendant du CICE, qui s'applique aux seules entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés ; nous remédierons ainsi à l'iniquité dont a été victime le secteur de l'économie sociale et solidaire (ESS), qui est en revanche soumis à la taxe sur les salaires. En 2013, peu après la création du CICE, nous avions mise en place un tarif différencié entre les établissements médicaux non soumis à l'impôt sur les sociétés et les cliniques privées ; mais cela ne suffisait pas à compenser la différence initiale.

Le CITS représenterait une réduction de 4 % de la taxe sur les salaires sous la forme de crédit d'impôt. La dépense est estimée à 600 millions d'euros, ce qui correspond au différentiel estimé par les professionnels entre les deux secteurs. Quant aux départements, citons les 700 millions d'euros offerts pour la recentralisation du RSA, hélas refusée par leur noble association.

Avec l'émergence de l'économie collaborative, nous laissons s'installer des zones de non-droit. Le Sénat a formulé des propositions dans ce domaine. Il y a en réalité deux sujets distincts : l'assujettissement à l'impôt, et l'affiliation à un régime de sécurité sociale impliquant le versement de cotisations. Le premier est le plus simple. Vous aviez proposé un seuil de 5 000 euros de revenus au-delà duquel l'impôt devrait être versé ; je m'y suis opposé, car la différence de traitement avec, par exemple, les personnes qui louent leur appartement sur le marché et sont taxées au premier euro, pourrait entraîner une censure du Conseil constitutionnel. Cela reviendrait à une franchise.

Nous avons clarifié la distinction entre ce qui relevait de la participation aux frais et ce qui relevait des revenus, notamment dans le cas de BlaBlaCar. Nous avons aussi mis en place un droit de communication à l'administration - fisc et Urssaf - des revenus des plateformes. Nous avons exigé un relevé annuel des versements effectués par les utilisateurs, notamment auprès d'Uber. Notre connaissance du secteur progresse, avec certaines difficultés : ainsi, faut-il intégrer l'amortissement du bien dans les frais ?

Le deuxième sujet, social, est plus complexe. On complétait naguère encore ses revenus en vendant ses confitures maison sur les marchés, les brocantes, les foires de village. Aujourd'hui, on peut le faire via des plateformes en expédiant les pots dans toute la France. Où se situe le basculement vers une activité professionnelle ? Nous proposons, dans un article du PLFSS, d'introduire une obligation d'affiliation au-delà de certains seuils.

Ce n'est pas, comme on a pu le dire, un simple problème de recouvrement de sommes échappant à l'impôt. Le phénomène pourrait, à l'avenir, poser des questions épineuses relatives non seulement à la fiscalité, mais aussi aux droits à la retraite, au droit de grève, à la formation, à la dépendance à l'égard des plateformes.

Le terrain est difficile, je le sais. Allez demander à quelqu'un qui vend pour 2 000 euros de confitures par an qu'il doit s'affilier et payer des cotisations au titre de cette activité, voire payer la cotisation foncière des entreprises... Néanmoins, nous progressons. Il est indispensable d'affronter la question, sous peine de voir s'établir des états de fait. De nombreux interlocuteurs que mon administration, et parfois moi-même, avons rencontrés nous ont dit que de telles dispositions apporteraient une clarification bienvenue. Airbnb recouvre la taxe de séjour pour un nombre croissant de collectivités territoriales.

C'est une question d'équité et d'équilibre. L'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie, dont vous avez sans doute reçu les représentants, se plaint de la perte de clientèle que cette concurrence cause aux professionnels. Il importe que tous soient soumis aux mêmes obligations vis-à-vis de l'impôt. On va encore accuser Bercy de partir à la chasse à l'assiette imposable ; je puis vous assurer que je ne suis pas dans cet esprit. Il convient de construire et de clarifier le débat.

Le seuil de l'assujettissement à l'impôt, qui est de 23 000 euros par an pour le logement, doit être fixé par décret pour les autres activités : 3 800 euros est l'un des montants qui a été envisagé.

Il est vrai, monsieur Amiel, que nous n'avons pas de gestion pluriannuelle, pas de loi de programmation en matière de dépenses sociales comme en matière de finances publiques. Le programme de stabilité fixe néanmoins certains paramètres.

Le PLFSS contient certaines dispositions en vue de l'amélioration du recouvrement de la fraude sociale. Par définition, les mauvais déclarants sont de mauvais payeurs. Les moyens alloués à l'administration seront analogues à ceux dont bénéficie la direction des finances publiques. Les recouvrements ont connu une croissance à deux chiffres ces dernières années. Cela témoigne-t-il d'une recrudescence de la fraude ou d'une meilleure détection ? C'est toujours le même débat. Je l'ai dit, nous sommes parvenus à 460 millions d'euros en 2015. L'objectif de 500 millions est peut-être optimiste ; il est à tout le moins volontariste.

Il est bon de rappeler que le déficit a été quasiment annulé, que la dette a été largement remboursée. La dette se résorbe lentement, mais à un rythme croissant. En 2024, la dette de la Cades sera apurée.

S'agissant des zones rurales, une convention médicale a été négociée. Vous interrogerez Mme Touraine. Les Rosp constituent une part de plus en plus importante des revenus des médecins généralistes.

Monsieur Cadic, votre question sur l'arrêt de Ruyter devient presque une tradition, vous la posez régulièrement... Nous avons reçu 50 000 réclamations, en avons traité la moitié et remboursé 130 millions d'euros, tout en respectant un délai de traitement de six mois au maximum pour chaque demande. C'est un citoyen hollandais, M. de Ruyter, qui a attaqué l'État dans les années 2000 -il est décédé depuis. Cet arrêt ne concernait pas la décision du Gouvernement de 2012 étendant la contribution aux revenus fonciers des non-résidents, mais portait sur l'application d'une CSG pour ceux qui étaient affiliés à un autre régime de sécurité sociale. Oui, des recours sont possibles sur le nouveau dispositif gouvernemental. Ce n'est une surprise ni pour vous, ni pour nous. Nous poursuivons nos échanges avec la Commission européenne sur la fraction non remboursée. Nous avons obtenu une première victoire, puisque le Conseil d'État nous a donné raison sur la part que nous ne remboursons pas.

L'Unedic n'est pas concernée par le PLFSS. Si l'on incluait l'Unedic et tous les régimes complémentaires, Agirc, Arrco, le solde serait excédentaire.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe , rapporteur général . - Pas grâce à l'Unedic !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État . - Les négociations ont commencé depuis six mois. Certes, elles n'ont pas abouti et sont actuellement interrompues. Selon une dépêche parue durant nos débats, Laurent Berger appelle le Premier ministre à inciter le Medef à rejoindre la table des négociations. Oui, nous avons un doute sur la possibilité d'obtenir 1,6 milliard d'euros d'économie en 2017 -sans renoncer à toute économie en 2017. Le Gouvernement a toujours affirmé qu'en cas de désaccord entre les partenaires sociaux- même si cela relève du Premier ministre plus que de moi-même -l'Etat prendra ses responsabilités, soit en prolongeant l'accord actuel, soit en reprenant la gestion de l'Unedic.

En 2015, le déficit global des hôpitaux atteint 410 millions d'euros, un peu plus que l'année précédente : 52 % d'entre eux accusent un déficit de 768 millions, 48 % dégagent un excédent de 358 millions. Les chiffres de 2016 ne sont pas encore connus, mais nous restons vigilants. Monsieur Morisset, étiez-vous contre l'augmentation du point d'indice dans la fonction publique ?

M. Jean-Marie Morisset . - Non.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État . - Ce Gouvernement serait-il inconséquent au point d'augmenter le point d'indice sans connaître l'incidence financière sur les budgets de l'État, des hôpitaux, des collectivités territoriales ?

Mme Patricia Schillinger . - Les polypensionnés frontaliers suisses ont dû payer un rappel de CSG et de CRDS qui leur a été demandé au bout de trois ans. L'erreur provient du centre des impôts du Haut-Rhin, or il inflige à ces ménages des pénalités de retard ! Les agents auraient dû remarquer tout de suite, non après trois ans, qu'un certain nombre de contribuables n'avaient pas coché la case comme il convenait. Leur demander aujourd'hui de rembourser, peut-être, car il s'agit tout de même de 9 millions d'euros, mais les pénalités me scandalisent !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État . - Je regarderai cette affaire de plus près pour vous répondre plus précisément. Vous m'en aviez déjà parlé...

Mme Patricia Schillinger . - Dans les autres départements, les services fiscaux ont réagi plus rapidement.

M. Gérard Dériot , président . - Merci, monsieur le ministre, du temps que vous nous avez consacré.

Audition de Mme Marisol TOURAINE, ministre des affaires sociales et de la santé

Réunie le mercredi 19 octobre 2016 sous la présidence de M. Alain Milon, président, la commission procède à l'audition de Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017.

M. Alain Milon , président . - Nous recevons Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, venue présenter le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017. La semaine dernière, M. Christian Eckert, secrétaire d'État chargé du budget, a plus spécifiquement abordé le financement. Nous souhaitons évoquer avec vous, madame la ministre, l'évolution des dépenses des différentes branches et les mesures prévues dans ce domaine.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé . - Je me réjouis d'être avec vous pour la cinquième année consécutive, pour présenter le dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) de ce quinquennat. Vous avez abordé les recettes avec M. Christian Eckert. Je ne m'attarderai pas sur les équilibres financiers, même si j'en suis responsable - c'est l'un des points essentiels de la répartition des compétences au sein du Gouvernement : il n'y a pas d'un côté le responsable des recettes et de l'équilibre, et de l'autre la ministre chargée des dépenses, très vite considérée comme la ministre dépensière. Être responsable de l'engagement des dépenses et de la bonne tenue des comptes est de nature à apporter des garanties à nos concitoyens. Même s'ils ne sont pas au fait des données comptables, ils sont attentifs à l'équilibre des comptes de la sécurité sociale parce que celui-ci renferme une vision de l'avenir. En le rétablissant, nous envoyons un message aux plus jeunes générations : nos petits-enfants ne financeront pas nos retraites ni notre santé.

En 2011, le régime général était en déficit de 17 milliards d'euros. Le déficit sera de 3,7 milliards d'euros cette année et de 400 millions d'euros en 2017, sur près de 500 milliards d'euros de dépenses. Cela peut être analysé comme un retour à l'équilibre. Le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) est stabilisé ; en raison du chômage, il reste en déficit, mais celui-ci n'augmente pas. La dette de la Caisse d'amortissement de la sécurité sociale (Cades) et de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) se situera en deçà de son niveau de 2011. Depuis 2014, nous réduisons la dette accumulée depuis des années. Plusieurs rapports, dont celui du Conseil d'orientation des retraites, montrent que le rétablissement des comptes s'inscrit dans la durée. C'est le cas pour l'ensemble des branches. Le déficit de la branche maladie, qui persiste, sera considérablement réduit. Quant à la branche vieillesse, elle dégage plus d'1,5 milliard d'excédent.

Nous avons poursuivi ce travail d'exigence avec la conviction que l'équilibre de la sécurité sociale n'est pas l'ennemi des droits sociaux. C'est pourquoi j'ai défendu l'inscription de droits nouveaux en matière de santé, de famille ou de retraite. En 2017, nous nous inscrirons dans le prolongement de l'action menée en matière de retraites, avec une mesure significative : faciliter la transition entre emploi et retraite en élargissant le droit à la retraite progressive aux salariés qui ont plusieurs employeurs.

L'équilibre de la branche famille sera rétabli l'an prochain. Dans ce domaine, nous poursuivons le soutien aux familles en difficulté, en particulier celles qui sont confrontées à des séparations. Depuis le 1 er avril, nous avons généralisé la garantie contre les impayés de pensions alimentaires, de 100 euros par enfant. Lorsqu'une femme -c'est majoritairement le cas- est confrontée à un ex-conjoint défaillant dans le paiement de la pension alimentaire, elle peut demander à la Caisse d'allocations familiales (CAF) d'agir à sa place. La CAF se retourne vers le père avec des moyens infiniment supérieurs à ceux d'une femme seule, fragile et sans connaissances juridiques. Nous élargissons ce dispositif avec la création d'une agence nationale de recouvrement des impayés de pensions alimentaires.

En matière de protection sociale des indépendants, nous optimisons le recouvrement des cotisations par les Unions de recouvrement pour la sécurité sociale et les allocations familiales (Urssaf) et le Régime social des indépendants (RSI) et améliorons la couverture retraite d'une partie des professions libérales non réglementées, qui pourront aussi bénéficier d'indemnités journalières.

Nous poursuivons également notre action de transformation engagée par la loi de modernisation de notre système de santé.

Nous donnons la priorité à la prévention en renforçant la politique de réduction des risques, notamment pour les usagers de substances psychoactives. Les missions des centres d'accueil et d'accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogue (Caarud) seront élargies pour qu'ils puissent dispenser des médicaments en lien avec leur action.

Nous poursuivons la lutte contre le tabagisme en alignant la fiscalité applicable au tabac à rouler, porte d'entrée des jeunes dans le tabac en raison de son prix inférieur aux cigarettes, sur celle applicable à ces dernières. Nous mettons en place une contribution sur le chiffre d'affaires des fournisseurs agréés par les fabricants de tabac, qui alimentera le fonds de lutte contre le tabagisme. Le PLFSS contient également des dispositions de prévention en matière de santé mentale des plus jeunes.

Ce projet de loi consacre une nouvelle étape de notre soutien à l'innovation. L'accélération de l'innovation thérapeutique est un défi lancé à l'ensemble des systèmes de santé dans le monde - nous l'avons évoqué lors du G7 Santé, au Japon. Nous inventons de nouvelles manières de prendre en charge l'innovation.

Nous mettons en place, dans ce PLFSS, des mécanismes de régulation et un financement approprié pour amortir les dépenses d'innovation. Nous renforçons la capacité pour l'assurance maladie de négocier les prix en sortie d'autorisation temporaire d'utilisation (ATU) pour mettre fin au déséquilibre entre les laboratoires et les pouvoirs publics. Nous créons et dotons un fonds de financement des innovations qui lissera dans le temps l'impact des variations de la dynamique des nouveautés thérapeutiques. Il ne s'agit pas seulement du médicament. Ainsi, 670 millions d'euros seront investis dans douze plateformes haut débit de séquençage du génome dans notre pays. L'enjeu, c'est la médecine personnalisée, adaptée au capital humain de chacun - une perspective passionnante.

Le PLFSS continue de soutenir l'accès aux droits pour tous. La Protection universelle maladie (PUMa), mise en place cette année, sera renforcée pour protéger des ruptures de droits ceux qui changent souvent de situation professionnelle, notamment les travailleurs saisonniers.

J'en viens à l'accès aux soins. La part des dépenses de santé supportées par les ménages a baissé pour la quatrième année consécutive. Alors qu'en 2011, 9,3 % des dépenses de santé restaient à leur charge, cette part s'établit, en 2015, à 8,4 %, niveau historiquement bas, record des pays de l'OCDE. Et ce, grâce à l'augmentation de la prise en charge par l'assurance maladie et non par les complémentaires, ce qui aurait été à l'opposé de mes convictions. Le tiers payant s'installe dans notre paysage, mois après mois, à bas bruit, comme les statistiques en témoignent.

En 2017, je souhaite aller plus loin en assurant une meilleure prise en charge des soins dentaires, qui restent trop coûteux pour une partie de nos concitoyens. Nous n'avons pas pu nous y engager auparavant, en raison du déficit de l'assurance maladie. Notre but est de réduire le coût pour les patients en plafonnant le prix des prothèses, en échange d'une revalorisation de certains soins conservateurs. Ce plan passe par un réinvestissement important, pluriannuel, de l'assurance maladie obligatoire. D'un côté, les prix baisseront, de l'autre, la prise en charge augmentera. Des négociations conventionnelles ont été ouvertes. J'espère qu'elles se poursuivront fructueusement, faute de quoi le Gouvernement prendra ses responsabilités.

Des moyens supplémentaires pour notre système de santé sont inscrits dans ce PLFSS en reconnaissance de l'engagement des professionnels, qui, par leur exemplarité, nous ont aidés à atteindre la situation financière actuelle. Grâce à leurs efforts, l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam) a été respecté, année après année, alors même qu'il était parfois renforcé en cours d'exécution. En 2017, l'Ondam progressera de 2,1 %. Pour que cet objectif exigeant soit tenu, le niveau d'économies doit être très élevé : plus de 4 milliards d'euros en 2017. L'Ondam financera des mesures actées dans la convention médicale entre l'assurance maladie et les professionnels libéraux. Concrètement, l'Ondam de la médecine de ville est supérieur à l'Ondam hospitalier, à 2,1 % contre 2 %. Ce dernier accompagne les réformes engagées dans le cadre des groupements hospitaliers de territoire (GHT) telles que la revalorisation du point d'indice et l'augmentation salariale des infirmiers et des soignants de catégorie C, de 250 à 500 euros par an selon le grade et la catégorie. Il favorise l'investissement hospitalier, de 250 millions d'euros en 2017.

Nous pourrons aborder les engagements médico-sociaux, objets d'un effort financier de 590 millions d'euros supplémentaires en 2017 pour la création de places destinées aux personnes en situation de handicap ou aux personnes vieillissantes exposées à la dépendance. Nous pourrons également évoquer la branche accidents du travail - maladies professionnelles.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe , rapporteur général . - Madame la ministre, je me réjouis de vous entendre affirmer que l'équilibre des comptes de la sécurité sociale est, sinon acquis, du moins en perspective, puisque l'assurance maladie reste déficitaire. Au Sénat, nous avons toujours considéré que l'équilibre n'était pas seulement un objectif mais une exigence et avons constamment proposé des mesures d'économies pour l'atteindre. Quels sont vos moyens pour y parvenir ?

Je vous répète ce que j'ai dit à M. le secrétaire d'État au budget : le déficit de 3,8 milliards d'euros du FSV entre dans les comptes de la sécurité sociale. Je ne voudrais pas que le FSV apparaisse comme un compte de défaisance ou que ses recettes soient transférées vers d'autres branches. En toute honnêteté, sans trompe-l'oeil : l'équilibre est peut-être pour demain, mais pas pour aujourd'hui.

Le Comité d'alerte sur l'évolution des dépenses d'assurance maladie nous a transmis sa réserve de méthode quant à la création du fonds de financement de l'innovation pharmaceutique, qui exclut du champ de l'Ondam des sommes très importantes : 876 millions d'euros, dont 220 millions d'euros en 2017. Comment garantir la sincérité de l'Ondam dans ces conditions ? Cet avis rejoint celui du Haut conseil des finances publiques qui a exprimé le 24 septembre ses fortes incertitudes quant à la réalisation des économies de grande ampleur prévues par l'Ondam.

Le même Comité d'alerte a relevé l'insuffisance des mesures d'économies figurant dans le PLFSS pour 2017, en soulignant que les dépenses d'assurance maladie devraient être plus dynamiques qu'en 2016 en raison de la progression des volumes d'activité en ville comme à l'hôpital et de la forte croissance des dépenses de médicaments résultant de la diffusion des thérapies ciblées et de l'immunothérapie. Ainsi, en dépit de son augmentation par rapport à 2016, l'Ondam ne suffira probablement pas à couvrir les besoins de financement de l'assurance maladie. Quel regard portez-vous sur cette évaluation ?

Un rapport conjoint de l'Inspection générale des finances (IGF) et de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) d'octobre 2012 mettait en évidence le caractère foisonnant et complexe de la taxation des produits de santé - dénombrant douze taxes spécifiques. Depuis, le taux W a été créé. Cette année, on nous propose de dupliquer le taux L avec des applications différenciées à l'hôpital et à la ville. Comment, dans ces conditions, assurer la lisibilité de la taxation du médicament ?

Je me réjouis de votre proposition sur le tabac à rouler, que nous avions formulée. Elle pose néanmoins une série de questions, notamment aux buralistes. Il n'existe pas d'étude d'impact précise évaluant les conséquences de cette mesure sur la consommation de tabac. Vous proposez une contribution sur le chiffre d'affaires des fournisseurs agréés de produits du tabac. Vous l'aviez refusé lors de l'examen de la loi santé. Pour quelle raison avez-vous modifié votre jugement ?

J'ai lu dans la presse que la rapporteure générale de la commission des finances de l'Assemblée nationale, Mme Valérie Rabault, proposait un amendement sur la CSG sur les revenus de remplacement. Nous avons déjà opéré une réforme sur la CSG pour les petites retraites. Comment le Gouvernement entend-il compenser cette mesure ?

M. Gérard Roche , rapporteur pour la branche vieillesse . - Je constate que la trajectoire des comptes des régimes de base de retraite du secteur privé s'améliore. L'excédent enregistré en 2016 d'1,2 milliard d'euros devrait s'accentuer en 2017 puisque le PLFSS en fixe le montant à 1,6 milliard d'euros. Pour autant, le système de retraites est-il sauvé ? Nous pensons que ce n'est pas tout à fait le cas. Le déficit du FSV se maintient au niveau très élevé de 3,8 milliards d'euros en 2016 et en 2017. Il accumulera ainsi plus de 11 milliards d'euros de déficit d'ici 2020. Les excédents du régime de base à partir de 2020 seront-ils suffisants pour le compenser ? Faudra-t-il prévoir une nouvelle reprise par la Cades, au risque d'augmenter sa durée ? Les conditions d'emprunt de l'Acoss seront-elles aussi avantageuses qu'actuellement ?

Le taux de cotisation des retraites, porté à 17,75 % en 2017, constitue un facteur de fragilité. Alors que la protection sociale est confrontée à des défis considérables, dont celui de la dépendance, les capacités de financement par les cotisations sont maintenant saturées.

Dernier élément pessimiste pour l'avenir de nos retraites : le secteur public. En instaurant une décote sur les retraites complémentaires, l'accord Agirc-Arrco d'octobre dernier a créé une nouvelle inégalité entre les salariés du privé et les agents du public. Quand brisera-t-on le tabou du déséquilibre structurel des régimes de retraite du secteur public ? Les projections du Conseil d'orientation des retraites (COR) partent du principe qu'ils sont équilibrés, mais à quel prix ? Un taux de cotisation employeur pouvant atteindre 74 % pour la fonction publique d'État, des subventions d'équilibre représentant une dépense de 6 milliards d'euros par an pour les régimes spéciaux... Si l'on appliquait aux employeurs publics le même taux de cotisation qu'à ceux du secteur privé, notre système de retraite afficherait un besoin de financement d'environ 20 milliards d'euros. À quand une véritable convergence entre les régimes du privé et du public ?

Madame la ministre, c'est la dernière fois que j'examine un PLFSS ; je n'ai aucune arrière-pensée, ayant toujours apprécié la qualité de votre écoute. Je pense simplement qu'un effort supplémentaire sur l'âge de départ et la durée de cotisation et qu'une convergence entre le public et le privé sont ardemment nécessaires.

A l'article 33 du PLFSS, vous souhaitez améliorer la couverture vieillesse des professions libérales non réglementées. Comment les discussions concernant le décret répartissant les compétences entre le RSI et la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse des professions libérales (Cipav) pour la gestion de l'assurance vieillesse des personnes concernées s'annoncent-elles ?

L'article 57 retire à la Caisse des dépôts et consignations le service de l'allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa) - le minimum vieillesse - pour le confier à la Mutualité sociale agricole (MSA), qui a demandé des moyens supplémentaires à cette fin. Pensez-vous que cet article, qui ne fait pas consensus, permettra des économies ?

M. René-Paul Savary , rapporteur pour le secteur médico-social . - Merci, madame la ministre, de ne pas avoir dit que le trou de la sécurité sociale était bouché, ce qui n'encourage pas nos concitoyens à la vigilance vis-à-vis de leur recours aux prestations de santé.

L'équilibre évoqué est relativement artificiel. Il n'existerait pas si les prestations assurées par les départements dans le secteur médico-social étaient compensées par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA). Ses réserves, de 750 millions d'euros, participent à l'équilibre sans constituer une ressource pérenne. Comment les comptes du médico-social seront-ils équilibrés dans les prochaines années ?

Les contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (CPOM) se généralisent pour les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). La réforme tarifaire et l'état prévisionnel des recettes et des dépenses (EPRD) devront être appliqués dans quelques semaines, alors que les décrets ne sont pas encore parus. La formation des acteurs est défaillante, tant au sein des agences régionales de santé (ARS) que des tarificateurs des départements ou des établissements concernés. Quel est votre avis sur l'application de cette réforme dès le 1 er janvier ?

Mme Caroline Cayeux , rapporteure pour la branche famille . - On ne peut que se réjouir de l'amélioration des comptes de la branche famille, même si elle résulte en partie d'un transfert de dépenses vers l'État. La loi de financement de la sécurité sociale adoptée l'an dernier prévoyait un déficit de 800 millions d'euros en 2016 et de 300 millions d'euros en 2017 avant un retour à l'équilibre en 2018. Alors que la Commission des comptes de la sécurité sociale a révisé à la hausse la prévision de déficit pour 2016, comment pouvez-vous revoir à la baisse les prévisions pour l'an prochain sans que le projet de loi qui nous est soumis ne comporte de mesure significative, ni en recettes, ni en dépenses ? Il est difficile, à mon sens, de partager votre optimisme. Comment ne pas croire que le retour à l'équilibre de la branche famille résulte davantage d'un savant exercice de réaffectation de recettes et de dépenses que d'une situation réellement assainie ? Le président de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) s'est montré peu optimiste sur un retour à l'équilibre en 2017, estimant l'échéance de 2018 plus raisonnable.

La convention d'objectifs et de gestion (COG) 2013-2017 avait fixé l'objectif ambitieux de créer 275 000 nouvelles places pour les enfants en bas âge, tous modes d'accueil confondus, or le taux de réalisation des objectifs sur les trois premières années ne dépasse pas 70 %. La situation de l'accueil par des assistants maternels est encore plus préoccupante, puisque le nombre d'enfants accueillis baisse au lieu d'augmenter. Je reviendrai sur la corrélation avec la baisse des naissances, flagrante cette année. Comment comblerez-vous le retard accumulé ?

Mme Marisol Touraine, ministre . - Le régime général sera à l'équilibre, comme en 2001. Quand on dit « sécu », les Français pensent « trou ». Je ne comprends pas l'obstination de certains d'entre vous à nier l'amélioration considérable que nous avons réalisée, grâce aux efforts de nos concitoyens. L'équilibre a été atteint grâce aux réformes de structure : allongement de la durée de cotisation, modulation des allocations familiales, regroupements hospitaliers, mutualisation des achats, contrôle sur la pertinence des prescriptions médicales, déshospitalisation grâce à la chirurgie et à la médecine ambulatoires, maîtrise et régulation du coût des médicaments...

Le régime général représentant l'essentiel de la sécurité sociale pour les Français, je n'ai aucun état d'âme à dire que l'équilibre est atteint. Si l'on préfère dire que la seule solution est de supprimer des droits, de dérembourser...

M. Jean-Marie Vanlerenberghe , rapporteur général . - Je n'ai jamais dit cela.

Mme Marisol Touraine, ministre . - Certains prétendants à la magistrature suprême expliquent qu'il faudra durcir les conditions de remboursement, durcir les règles de retraite... Mais les chiffres sont là.

Je considère comme vous, monsieur Vanlerenberghe, que l'équilibre des comptes de la sécurité sociale est une exigence. J'ai toujours assumé que certaines dépenses, ou certaines pertes de recettes, ne pouvaient pas être acceptées, comme les franchises médicales que j'aurais souhaité supprimer pour tous mais qui ne l'ont été que pour les plus modestes.

La mission du Comité d'alerte est d'examiner si l'Ondam peut être respecté. Il indique qu'il le sera en 2016, comme en 2017, à condition d'être prudent dans la gestion des crédits en réserve, d'assurer un pilotage infra-annuel extrêmement précis et d'être très vigilant quant à l'évolution du prix du médicament et de certaines prescriptions. Il nous avait dit de même l'an dernier. Oui, le pilotage infra-annuel est extrêmement précis, l'équilibre de l'assurance maladie étant aussi tributaire d'une grippe qui arriverait plus tôt que prévu. Oui, des crédits sont mis en réserve. Au cours des mois de 2017 où j'en serai encore responsable, j'assurerai un pilotage renforcé.

Le Comité d'alerte met également l'accent sur des mesures qui auraient un impact sur le périmètre de l'Ondam, des mesures de bonne gestion dont je défie quiconque de nier la pertinence.

La création du fonds pour l'innovation thérapeutique est une mesure structurelle. Le fonds ne remplace pas les dépenses courantes de l'Ondam. Il favorise le lissage des pics de dépenses, les années fastes en innovation, et la reconstitution des marges les années moins fastes. En 2014, l'arrivée inattendue, forte et rapide du Sovaldi, médicament contre l'hépatite C, a eu un impact considérable sur les finances. Il n'est jamais possible de garantir quelques mois à l'avance l'absorption d'une innovation. C'est le cas, aujourd'hui, des médicaments anti-cancéreux.

La taxation est assez complexe - je ne le conteste pas. En 2014, j'ai annoncé aux industriels un plan triennal, une ligne structurelle autour de laquelle des variations sont possibles. Les industriels ont débattu du cadre, c'est-à-dire la stabilité des dépenses de médicament, au sein duquel nous régulons l'innovation. Nous avons besoin d'une maîtrise accrue, y compris sur ce qui était innovant il y a deux ans. Ainsi, je souhaite rouvrir des négociations sur le Sovaldi.

Je n'ai pas changé d'avis sur le principe d'une taxe sur les fabricants de tabac. Nous avons cherché la meilleure façon de la mettre en place dans le respect de la Constitution, les bénéfices des cigarettiers n'étant pas réalisés en France mais à l'étranger.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe , rapporteur général . - Vous demandez au fournisseur agréé, qui est en France, de se retourner vers les fabricants.

Mme Marisol Touraine, ministre . - C'est au fournisseur de décider.

L'amendement de Mme Rabault accroît le pouvoir d'achat des bénéficiaires de petites retraites. Puisqu'il n'est pas possible, en droit, de moduler la revalorisation en fonction du niveau des retraites, elle a eu l'idée d'une exonération de la CSG, qui représente un gain moyen de 45 euros par mois pour 480 000 personnes. Le Gouvernement est sensible à cette disposition dès lors qu'elle est gagée et intégralement remboursée à la sécurité sociale.

Mme Nicole Bricq . - Sur quoi sera-t-elle gagée ?

Mme Marisol Touraine, ministre . - Le gage sera défini dans le projet de loi de finances. Un débat est en cours, que je laisse aux soins de mon collègue ministre des finances.

Monsieur Roche, vous avez été très nuancé. Le régime des retraites est excédentaire. La Cour des comptes, le Conseil d'orientation des retraites, le Centre d'analyse stratégique assurent qu'il le sera pour plusieurs décennies. Est-ce que cela interdit des réformes dont l'objectif n'est pas fondé sur l'équilibre financier ? Non. Néanmoins, il faut être clair. Depuis 1993, les réformes des retraites sont justifiées par les déséquilibres financiers dus au choc démographique. Celui-ci est désormais maîtrisé. Chacun a le droit de porter des projets d'organisation du temps de la vie ou des conceptions du travail et du rapport des Français à la retraite. Je considère, personnellement, que la revendication d'un approfondissement de la réforme du régime général est liée à une vision punitive du rapport au travail.

La convergence entre les secteurs public et privé est en grande partie réalisée, pas toujours comme on l'imagine. En effet, un certain nombre de fonctionnaires gagneraient significativement à être alignés sur le privé, ce qui explique pourquoi une harmonisation plus forte n'a pas été réalisée, y compris sous le quinquennat précédent. L'intégration de l'ensemble des primes des fonctionnaires aurait nécessairement un coût. Les multiples rapports du Conseil d'orientation des retraites ou de la Cour des comptes indiquent que la mise en place d'un mécanisme de convergence coûterait plus cher pendant une période significative. Si je pense que des avancées doivent être réalisées, je suis certaine que le prochain gouvernement, quel qu'il soit, maniera ce sujet avec précaution, pour des raisons financières.

Des économies sont attendues du transfert du service de l'Aspa à la MSA, à laquelle il n'est pas prévu d'attribuer d'effectifs supplémentaires.

Concernant l'article 33, une concertation est prévue avec les conseils des caisses concernées et les représentants des professionnels pour déterminer les affiliations, au RSI ou au Cipav.

Monsieur Savary, on ne peut pas demander la décentralisation puis réclamer des paiements à l'État. Sinon, ce n'est qu'une décentralisation de façade. C'est l'une des raisons pour lesquelles je m'interroge sur le souhait des départements d'une recentralisation du RSA : quel aurait été leur avenir sans le coeur de leur responsabilité ? Ce souhait a été abandonné malgré l'avis favorable du Gouvernement.

Le décret concernant la mise en oeuvre des CPOM au 1 er janvier 2017 doit être publié prochainement. Sans attendre, des concertations ont été engagées avec les fédérations d'établissements pour les préparer.

Madame Cayeux, l'équilibre de la branche famille vient notamment de la modulation des allocations familiales, que vous avez contestée mais que j'assume. Une partie significative des recettes ainsi obtenues a financé la revalorisation des prestations pour les familles pauvres, monoparentales ou nombreuses.

La réaffectation des recettes est neutre entre les branches.

Nous n'atteindrons pas l'objectif que nous nous étions fixé en matière d'accueil du jeune enfant, notamment à cause de freins des collectivités territoriales.

Mme Caroline Cayeux , rapporteure . - Et à cause des dotations.

Mme Marisol Touraine, ministre . - Nous les avons augmentées significativement. Le nombre de projets soumis aux CAF a été moins important qu'escompté.

M. Yves Daudigny . - Je partage votre satisfaction face au redressement des comptes. Votre détermination, la cohérence de votre action et les réformes engagées ont donné ces résultats : non seulement des chiffres, mais aussi une confiance renouvelée en notre protection sociale et notre système de santé.

Toutes les semaines, la presse se fait l'écho de nouvelles innovations contre le cancer, les virus, les maladies rares, comme, en octobre, celles présentées au congrès de la Société européenne d'oncologie médicale (Esmo) à Copenhague.

Le débat porte sur le juste prix des médicaments et le rôle des laboratoires. Ceux-ci sont-ils tous construits sur le même modèle ? Il y a les big pharma, gros laboratoires dont la marge bénéficiaire avoisine les 20 %, mais aussi des start-ups. J'ai rencontré récemment la représentante en France du laboratoire américain Vertex, qui a mené des recherches pendant dix-huit ans, sans commercialisation, sur le traitement de la mucoviscidose.

D'un côté, le PLFSS promeut la création du fonds d'innovation, maintient le niveau des taux, comporte des dispositions sur l'ATU, et de l'autre, prévoit des économies d'1,4 milliard d'euros sur le secteur du médicament. Quel message adresser aux laboratoires implantés en France ?

Le Gouvernement entend améliorer la prise en charge des soins dentaires. Comment évoluera la répartition entre l'assurance maladie et les complémentaires ? Enfin, le texte encourage le développement de la télémédecine pour renforcer la présence médicale sur le territoire. Pourriez-vous faire le point sur les GHT ? Les parcours de soins seront un succès si les hôpitaux et la médecine de ville travaillent en commun.

Mme Laurence Cohen . - Vous mettez l'accent sur la réduction des déficits et l'exigence de bonne gestion des fonds publics. Mais à quel prix ? Beaucoup d'hôpitaux sont au bord de l'asphyxie, les personnels sont sous pression. Vous avez indiqué qu'aucun poste n'avait été supprimé à l'hôpital. Toutefois les départs à la retraite ne sont pas remplacés et le personnel n'en peut plus. Les GHT sont présentés comme une manière de réaliser des économies. J'espère que leur mise en place ne se fera pas au détriment de l'offre de soins et des conditions de travail des personnels.

Pour atteindre un Ondam de 2,1 %, vous prévoyez des économies, sans annoncer de nouvelles recettes. Pourquoi ne pas lutter davantage contre la fraude aux cotisations patronales qui s'élève à 20 milliards d'euros ? Enfin, je crains que le prélèvement de 300 millions d'euros sur la trésorerie de l'Association nationale pour la formation permanente du personnel hospitalier (ANFH) ne porte atteinte à l'offre de formation continue.

M. Georges Labazée . - La Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) a une interprétation restrictive du plan d'aide à l'investissement (PAI), réservant les crédits à des opérations de restructuration ou de mise aux normes des établissements médico-sociaux. Avec Gérard Roche, nous avons interrogé la secrétaire d'Etat chargée des personnes âgées et de l'autonomie à ce sujet. Lorsque nous avions inscrit dans la loi relative à l'adaptation de la société au vieillissement l'affectation d'une enveloppe de 100 millions d'euros à ce programme d'investissement, nous entendions aussi favoriser la création de nouvelles maisons de retraites ou d'Ehpad. Pourriez-vous donner des instructions en ce sens ?

Les articles 16 et 17 créent une contribution assise sur le chiffre d'affaires des fournisseurs de produits du tabac à hauteur de 130 millions d'euros. Celle-ci frappera non seulement les grands groupes internationaux qui contrôlent le marché du tabac et acquittent leurs impôts à l'étranger, mais elle visera aussi la dernière structure qui existe en France, sous forme de coopérative, Traditab, et qui est déjà soumise à l'impôt sur les sociétés à hauteur de 33 %. Pour elle, ce sera la double peine. Ne faudrait-il pas adopter une fiscalité différentielle pour ne pas les pénaliser ?

Mme Catherine Procaccia . - Je salue la volonté de revaloriser les soins dentaires conservateurs. Cette revalorisation est réclamée depuis longtemps par les dentistes. Vous avez dit que si les négociations n'aboutissaient pas, le Gouvernement prendrait ses responsabilités. Que voulez-vous dire ?

Des puéricultrices m'ont alerté sur une pénurie de vaccins contre la tuberculose dans les maternités du Val-de-Marne. Qu'en est-il ?

Enfin, les hommes prennent peu le congé parental auquel ils ont droit. Cela se traduit-il déjà positivement dans les comptes de la branche famille ?

Mme Marisol Touraine, ministre . - Je remercie M. Daudigny pour son soutien. La question du juste prix des médicaments est effectivement cruciale. Il est normal que les points de vue des industriels et du Gouvernement divergent. Nous discutons. Le Gouvernement est déterminé à soutenir sans faille l'innovation : les avancées d'aujourd'hui sont le gage de meilleures chances de guérison demain pour de nombreuses pathologies, d'une espérance de vie accrue. Songez à l'hépatite C, que l'on parvient à désormais traiter. Mais le soutien à l'innovation implique aussi, en amont, une régulation renforcée des médicaments peu innovants. Des arbitrages sont sans cesse nécessaires. Le développement des génériques est essentiel. En dépit de progrès, la France reste en retard. C'est pourquoi nous avons lancé une campagne pour informer le public et les médecins, et rassurer les laboratoires qui, à tort, voient trop souvent dans le développement des génériques une atteinte à leurs intérêts. L'innovation doit aussi être accessible à un prix raisonnable. Un fonds de financement de soutien aux start-up innovantes en matière de santé a été mis en place, une délégation à l'innovation en santé a été créée au sein de mon ministère. La journée nationale de l'innovation en santé a été un tel succès l'an dernier que l'opération sera renouvelée en janvier. L'innovation nous permet de proposer de nouveaux traitements, de nouvelles applications technologiques, de nouvelles manières d'organiser les soins ou de les pratiquer, comme la télémédecine.

Madame Cohen, le Gouvernement ne se préoccupe pas uniquement de baisser les déficits ! Nous avons généralisé le tiers-payant, supprimé les franchises pour les plus modestes, décidé de rembourser à 100 % les interruptions volontaires de grossesse et la contraception des mineures, développé le dépistage de certains cancers, etc. Nous avons créé 31 000 postes de soignants à l'hôpital. Au total, le PLFSS prévoit 1,3 milliard d'euros de plus pour l'hôpital. Il est vrai que les efforts demandés sont parfois importants. Mais certains hôpitaux étaient dans des situations catastrophiques. La médecine connaît de grandes transformations. On ne se soigne plus comme avant. Les relations entre les médecins et les patients changent. Il importe d'accompagner ces évolutions. Une part importante des souffrances au travail est due à un mauvais accompagnement des personnels. Les choses se passent d'ailleurs plus ou moins bien selon les établissements, selon les services. Je n'ai jamais présenté les GHT comme une source d'économies ! Il s'agit d'abord de la mise en place de filières de soins. Sans cette réorganisation territoriale, beaucoup de petits hôpitaux de proximité seraient condamnés. Les praticiens auront des perspectives de carrières accrues sur un territoire élargi et ils seront davantage incités à aller exercer dans ces structures.

Un rapport de l'Igas a montré que l'Association nationale pour la formation permanente du personnel hospitalier (ANFH) était structurellement excédentaire depuis 1998. Son excédent atteint 364 millions d'euros ; ses recettes dépassent largement les besoins pour financer les formations. Le prélèvement de 300 millions d'euros sur sa trésorerie, étalé sur deux ans, ne mettra donc pas en péril l'offre de formation. De plus, l'argent collecté sera réalloué au monde hospitalier.

Monsieur Labazée, je partage votre interprétation concernant l'emploi des fonds du programme d'investissements (PAI). S'il le faut, je donnerai les instructions nécessaires. La nouvelle taxe sur le tabac frappera le distributeur, qui choisira, ou non, de la répercuter.

Les revalorisations de soins dentaires conservateurs intervenues jusqu'ici ne se sont jamais accompagnées d'une baisse du prix des prothèses. Les prix sont libres et varient en fonction des praticiens. Or il est difficile pour un patient de faire établir des devis, comme on en demande à un plombier... Nous soumettons la revalorisation à un plafonnement des prix des prothèses. Si les négociations entre les chirurgiens-dentistes et l'assurance maladie échouent, le Gouvernement se substituera à eux et prendra un décret pour plafonner les prix. Je souhaite aussi augmenter la part remboursée par la sécurité sociale. Actuellement, les soins dentaires sont pris en charge à hauteur de 37 % par l'assurance maladie (contre 77 % en moyenne pour les autres soins), à 40 % par les assurances complémentaires et le reste à charge s'élève à 23 %, contre 8 % en moyenne pour les autres soins. Je souhaite faire monter progressivement la part de l'assurance maladie à plus de 50 %. Je suis attachée à ce que notre système reste principalement structuré autour de l'assurance maladie car elle repose sur une logique de solidarité : à la différence des assurances santé complémentaires, on ne cotise pas en fonction de son âge, de son état de santé ou de ses antécédents. La priorité est de parvenir à un rééquilibrage dans les secteurs où la part de l'assurance maladie n'est pas satisfaisante : c'est le cas des soins dentaires ou des lunettes, pour lesquelles, depuis l'année dernière, le reste à charge diminue.

L'entreprise qui nous fournit en vaccins contre la tuberculose connaît des difficultés et nous sommes en rupture de stock depuis plusieurs mois. Pour y faire face, nous avons décidé d'importer des vaccins. Le vaccin n'est disponible désormais que dans les structures de la protection maternelle et infantile. Cette vaccination n'est d'ailleurs pas obligatoire. Je suis avec attention ce dossier et j'ai présidé deux réunions avec les laboratoires. La loi de modernisation de notre système de santé contient des mesures pour faciliter la constitution de stocks et leur gestion.

Enfin, la sous-utilisation du congé parental par les hommes ne se traduit pas dans les comptes de la branche famille à ce stade.

M. Alain Milon , président . - Je vous remercie. Nous examinerons le PLFSS en commission le mercredi 9 novembre, puis en séance publique la semaine suivante.

AUDITION DE LA COUR DES COMPTES

Audition de M. Antoine DURRLEMAN, président de la sixième chambre de la Cour des comptes

Réunie le 28 septembre 2016 sous la présidence de M. Alain Milon, président, la commission procède à l'audition de M. Antoine Durrleman,
président de la sixième chambre de la Cour des comptes.

M. Alain Milon , président. - Je voudrais tout d'abord vous prier d'excuser M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes, qui ne pourra pas être ce matin devant nous, compte tenu d'un télescopage avec ses obligations de président du Haut conseil des finances publiques qui n'était pas prévu lorsque nous avons fixé la date de cette audition.

C'est donc M. Antoine Durrleman, président de la 6 ème chambre, qui nous présentera le rapport annuel sur les lois de financement de la sécurité sociale (« RALFSS »).

Ce rapport a été rendu public la semaine dernière, tout comme celui de la commission des comptes de la sécurité sociale, quelques jours avant le dépôt du dernier PLFSS de la législature, attendu mercredi 5 octobre prochain.

Le « RALFSS » 2016 compte 600 pages et comme à l'accoutumée, il dresse un état des lieux de la situation générale des comptes sociaux, tout en apportant des éclairages plus spécifiques sur les différentes branches et en formulant des propositions précises.

En 2016, le déficit global des régimes de sécurité sociale devrait atteindre un peu plus de 7 milliards. C'est mieux que ce qui était attendu, grâce à des encaissements de recettes plus dynamiques que prévu.

On peut évidemment s'interroger sur la signification de ce résultat. Va-t-on vers un apurement des comptes de la sécurité sociale, voire vers une situation excédentaire d'ici 2 à 3 ans ? Constate-t-on, au contraire, particulièrement en matière de retraites et d'assurance maladie, des facteurs de déséquilibre persistants qui devraient appeler des mesures correctrices ?

Cette question a déjà donné lieu à controverses, dans le contexte pré-électoral que nous connaissons. Nous ne voulons pas, monsieur le président, vous entraîner sur ce terrain. Mais je suis persuadé que grâce au travail très approfondi qui a une nouvelle fois été réalisé par la Cour, et plus spécialement par sa 6 ème chambre, vous nous apporterez un certain nombre d'éléments objectifs et indispensables à notre réflexion.

M. Antoine Durrleman, président de la Sixième chambre de la Cour des comptes. - Je vous présente les vifs regrets du Premier président Didier Migaud de ne pouvoir être devant vous ce matin, étant retenu par ses fonctions de Président du Haut Conseil des finances publiques.

Le rapport de la Cour sur la sécurité sociale est établi, comme chaque année, dans le cadre de la mission d'assistance de la Cour au Parlement et au Gouvernement. Il est destiné à accompagner le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017, qui sera déposé la semaine prochaine sur le bureau des assemblées.

J'ai auprès de moi, pour vous le présenter, Jean-Pierre Viola, conseiller maître, rapporteur général de ce rapport et Delphine Rouilleault, auditrice, rapporteure générale adjointe.

Plus de soixante-dix ans après sa création, la sécurité sociale est, plus que jamais, un élément essentiel de la solidarité et de la cohésion nationales. Année après année, la Cour souligne à quel point les déficits récurrents qu'elle connaît mettent à mal le dispositif dans son ensemble et se reportent sur les générations futures au travers de la dette sociale qui singularise notre pays par rapport à ses voisins.

Dans ce rapport, la Cour ne cherche pas seulement à apprécier la trajectoire des finances sociales. Elle veille aussi à proposer des analyses et des pistes de réformes en vue d'un retour rapide à l'équilibre financier, condition nécessaire pour la pérennité et l'efficacité de la sécurité sociale au service de l'ensemble de nos concitoyens.

La Cour porte cette année trois constats principaux. D'abord, la réduction des déficits se poursuit, permettant une première amorce de diminution de la dette sociale. Toutefois, les déficits restent élevés et le retour à l'équilibre doit donc demeurer une priorité. Ensuite, l'assurance maladie doit être réformée en profondeur, à l'image d'autres composantes majeures de la protection sociale. À cet égard, les réformes des retraites des salariés du secteur privé montrent qu'il est possible d'obtenir des résultats importants. Enfin, tous les leviers doivent être mobilisés avec opiniâtreté, en particulier en matière de gestion. Des gains d'efficience accrus peuvent et doivent ainsi être mobilisés sans retard à l'hôpital et dans les organismes de sécurité sociale.

Premier constat, la réduction des déficits se poursuit, permettant une première diminution de la dette sociale. Toutefois, les déficits restent élevés et le retour à l'équilibre doit donc demeurer une priorité.

Si les déficits se réduisent encore cette année, leur persistance pour la quatorzième année consécutive constitue une anomalie par rapport à la situation chez nos voisins. Ce sont les déficits très élevés de l'assurance maladie et du fonds de solidarité vieillesse (le FSV) qui retardent le retour à l'équilibre de la sécurité sociale. C'est le principal message que la Cour souhaite adresser : l'amélioration de la situation financière de la sécurité sociale est fragile et ne doit pas conduire à relâcher les efforts de maîtrise des dépenses, tout particulièrement pour l'assurance maladie qui appelle des réformes en profondeur.

Ce constat résulte de quatre faits principaux.

Le déficit de la sécurité sociale continue à s'inscrire à un niveau très élevé en raison des déficits de l'assurance maladie et du FSV.

En 2015, le déficit agrégé des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) s'est établi à 10,2 milliards d'euros contre 12,8 milliards en 2014. En son sein, le déficit du régime général et du FSV a reculé à 10,8 milliards contre 13,2 milliards en 2014.

Trois évolutions positives doivent être soulignées : d'abord, le déficit a continué à se réduire au même rythme modéré qu'en 2014, alors que les prévisions tablaient sur une simple stabilisation. Pour la deuxième année consécutive, la Cour relève un écart important entre prévisions et réalisations. Il en ira de nouveau de même en 2016. Cela témoigne davantage du manque de fiabilité que de la prudence des prévisions. Ensuite, la baisse du déficit a en 2015 davantage reposé sur un ralentissement de la hausse des dépenses, qui ont progressé moins vite que le PIB en valeur. Les mesures d'augmentation des recettes, comme la hausse des cotisations d'assurance vieillesse, ont néanmoins apporté une contribution importante à la diminution du déficit. Enfin, compte tenu des excédents de la caisse d'amortissement de la dette sociale (la Cades), la réduction du déficit a fait refluer la dette sociale, pour la première fois depuis 2001, à hauteur de 2,1 milliards d'euros.

Des éléments moins favorables viennent toutefois tempérer ces constats : la sécurité sociale n'a pas encore retrouvé en 2015 le niveau de déficit d'avant la crise, qui était lui-même très élevé ; ensuite, environ 40 % du déficit, soit près de 4 milliards, résultent de causes structurelles, indépendantes de la conjoncture. Enfin, le déficit se concentre de plus en plus sur la branche maladie et le fonds de solidarité vieillesse.

Le déficit de la branche maladie se réduit, grâce en particulier à une mesure de recette exceptionnelle d'anticipation des versements des contributions et cotisations sociales des caisses de congés payés du BTP, soit 1,1 milliard d'euros. Il représente près de 85 % de celui du régime général hors FSV. Cela confirme l'urgence de réformes visant à maîtriser plus efficacement les dépenses de santé prises en charge par l'assurance maladie.

Le déficit du FSV a, quant à lui, constamment augmenté depuis 2013, pour atteindre 3,9 milliards d'euros en 2015. Certes, la conjoncture joue négativement puisque ce fonds compense l'absence de cotisations des chômeurs à la branche vieillesse. Cependant, sa structure de financement est fragile, plus encore depuis cette année. En effet, ses ressources sont désormais presque entièrement assises sur les revenus du capital, très sensibles à la conjoncture.

Le déficit devrait continuer à se réduire en 2016 et les années suivantes, mais la sécurité sociale ne reviendrait à l'équilibre qu'en 2019. La commission des comptes de la sécurité sociale qui s'est réunie vendredi dernier a prévu que le déficit du régime général et du FSV serait ramené à 7,1 milliard d'euros en 2016, contre 10,8 milliards en 2015.

En raison de recettes plus élevées que prévu, le déficit se réduirait ainsi dans une mesure plus importante que celle anticipée dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 ou dans le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale de juin dernier.

Mais, comme celle de juin, la prévision de la commission des comptes de la sécurité sociale de septembre intègre un « produit exceptionnel de CSG », de 700 millions d'euros. Cela apparaît très discutable à la Cour. En effet, il s'agit d'une simple écriture comptable qui ne correspond à aucune recette supplémentaire pour la sécurité sociale et qui fausse l'appréciation de l'évolution du déficit de la branche maladie. Quand on neutralise ce « produit exceptionnel de CSG », le déficit prévisionnel de la branche maladie diminue uniquement de 1 milliard d'euros par rapport à 2015, et non de 1,7 milliard.

Le déficit de la branche maladie resterait en tout état de cause massif en 2016, soit 4,1 milliards d'euros selon la commission des comptes et 4,8 milliards en neutralisant le « produit exceptionnel de CSG ».

Après onze années consécutives de déficit, la branche vieillesse reviendrait à l'équilibre en 2016, dégageant même un excédent de 1,1 milliard d'euros. La Cour souhaite cependant insister sur un point essentiel : pour apprécier correctement la situation financière de la branche vieillesse, il est indispensable de prendre en compte le FSV, dont la quasi-totalité des concours financiers lui sont affectés. Tant que le FSV dégage plus de déficits que la branche vieillesse d'excédents - ce sera encore le cas en 2016 et en 2017 -, le retour à l'équilibre de la branche vieillesse est en faux-semblant.

Malgré la poursuite de la réduction des déficits, la sécurité sociale ne va pas revenir à l'équilibre en 2017, ni même en 2018. En raison du redémarrage des dépenses d'assurance maladie, cet objectif ne serait atteint qu'en 2019.

La maîtrise des dépenses d'assurance maladie demeure encore imparfaitement assurée, ce qui retarderait à 2019 le retour à l'équilibre de la sécurité sociale.

En 2015, l'objectif prévisionnel des dépenses d'assurance maladie (Ondam) a été respecté pour la sixième année consécutive, non sans tensions. La progression des dépenses s'est ralentie par rapport à 2014 (+2 % contre +2,4 %). Mais il a fallu compléter les mesures, prises en cours d'année, de réduction des dotations aux établissements sanitaires et médico-sociaux par un ajustement inédit et contestable des dépenses provisionnées pour rester dans la prévision.

Ces difficultés sont notamment la conséquence de l'évolution très insuffisamment maîtrisée des dépenses de soins de ville. Les honoraires médicaux et paramédicaux, les indemnités journalières et les dépenses relatives aux dispositifs médicaux augmentent rapidement, souvent au-delà de prévisions manquant elles-mêmes de sincérité.

Les taux d'augmentation de l'Ondam de 1,75 %, fixés dans la cadre du Programme de stabilité pour 2016 et 2017, étaient moins élevés en apparence que celui de 2015 (+2 %), mais ne correspondaient pas pour autant à un objectif de maîtrise accrue des dépenses. En neutralisant les effets d'une modification de présentation comptable, ces taux correspondaient en réalité à une progression de l'Ondam de 1,9 % en 2016 et de 2  % en 2017, sans effort supplémentaire donc par rapport à 2015.

Ainsi défini, l'Ondam 2016 devrait être tenu, mais au prix de mesures de réduction des dotations aux établissements de santé et médico-sociaux plus fortes que prévu. En effet, les enveloppes prévisionnelles de soins de ville, mais aussi de soins hospitaliers, ce qui n'avait pas été le cas les années précédentes, seront dépassées.

Pour sa part, l'objectif 2017 a été desserré par les pouvoirs publics à 2,1 % afin notamment de prendre en compte les augmentations de salaires accordées dans la fonction publique hospitalière - 700 millions d'euros en 2017 - et les revalorisations tarifaires portées par la nouvelle convention médicale signée en août, soit 400 millions d'euros 2017 pour un coût en année pleine proche de 1 milliard d'euros.

Compte tenu de la modification de présentation comptable que j'évoquais à l'instant, une hausse de l'Ondam de 2,1 % en 2017 signifiera en réalité une hausse de 2,35 %, plus forte que celles de 2015 et 2016 dans le contexte d'une inflation toujours très faible, sans préjudice de la création d'un nouveau fonds d'innovation pharmaceutique, destiné à prendre en charge les médicaments innovants, qui se traduira en 2017 par leur financement en dehors du périmètre de l'Ondam.

Cette accélération de la progression de l'Ondam a deux inconvénients majeurs. D'une part, elle pourrait être comprise comme le signal d'un relâchement plus durable de l'évolution des dépenses d'assurance maladie. D'autre part, en ajoutant 1 milliard d'euros de dépenses supplémentaires par an à compter de 2017, elle conduit à décaler à 2019 - au lieu de 2018 - le retour à l'équilibre financier de la sécurité sociale.

Si un mouvement de réduction de la dette sociale est désormais engagé, son remboursement intégral reste à réaliser.

En 2015, la dette sociale accumulée depuis les années 1990 a commencé à baisser pour la première fois depuis 2001. Sa réduction devrait, selon la commission des comptes de la sécurité sociale, s'amplifier en 2016 et en 2017. Mais le problème de la dette sociale est encore loin d'appartenir au passé.

D'abord, la dette sociale reste considérable. Fin 2015, elle atteignait encore 156,4 milliards d'euros. Des ressources massives - 16,6 milliards d'euros en 2015 - doivent être consacrées au paiement de ses intérêts et au remboursement de son principal. Éteindre totalement cette dette d'ici à 2024, qui est le terme aujourd'hui prévu pour la mission de la Cades, est donc essentiel.

Ensuite, seul l'amortissement de la dette sociale transférée à la Cades est aujourd'hui organisé. La part de la dette financée par la voie d'emprunts de court terme émis par l'Acoss est soumise au risque d'une remontée des taux d'intérêt. Cette dette à court terme augmentera en fonction des déficits des exercices 2016 et suivants qui resteront eux-mêmes importants. Dans le même temps, la Cades ne peut plus recevoir de nouveaux déficits sans que lui soient affectées des ressources supplémentaires. En fonction du niveau des déficits futurs, la part de la dette dont le remboursement n'est pas organisé pourrait dépasser 20 milliards d'euros à fin 2018.

La Cour souligne dès lors deux priorités : d'abord, limiter l'augmentation de la dette sociale qui n'a pas encore été transférée à la Cades, en garantissant un retour à l'équilibre de la sécurité sociale en 2018 par des mesures d'économie fortes sur les dépenses d'assurance maladie ; ensuite, organiser le transfert à la Cades de la dette sociale financée par l'Acoss, sans attendre son éventuelle résorption ultérieure à partir d'excédents qui en l'état restent hypothétiques, en affectant à la Cades les ressources nécessaires à l'amortissement de cette dette d'ici à 2024. Les excédents disponibles du Fonds de réserve des retraites devraient être en particulier mobilisés par priorité à cette fin.

L'assurance maladie doit être réformée en profondeur, à l'image d'autres composantes majeures de la protection sociale.

J'en viens au deuxième message de la Cour : l'assurance maladie doit être réformée en profondeur, à l'image d'une autre composante majeure de la protection sociale dont les réformes successives ont produit des résultats importants, les retraites.

L'assurance maladie doit être réformée en profondeur, pour retrouver l'équilibre et mieux remplir sa mission d'accès aux soins, affaiblie sur le long terme pour une partie des assurés.

La situation actuelle présente en effet un paradoxe. D'un côté, la part globale de financement des dépenses de santé par l'assurance maladie est en passe de retrouver son niveau d'il y a quinze ans, en progressant sensiblement au cours de la période récente. De l'autre, la Cour observe une érosion tendancielle des niveaux individuels de prise en charge en fonction des pathologies, des actes et biens de santé, et des professionnels de santé qui en sont à l'origine.

Deux phénomènes expliquent ce paradoxe. D'une part, les dépenses liées aux affections de longue durée, couvertes à 100 %, ticket modérateur compris, tendent à évincer les autres dépenses. Alors que le coût des traitements augmente, le nombre de patients en ALD a pratiquement doublé en 20 ans, sous l'effet de l'allongement de l'espérance de vie et de la diffusion croissante de certaines pathologies. D'autre part, l'accès aux soins des assurés sociaux aux faibles revenus est affecté par les pratiques de dépassements d'honoraires ou des tarifs pris en charge par l'assurance maladie. Cette situation concerne notamment les consultations médicales, l'optique et les soins bucco-dentaires. Ces derniers concentrent la moitié des renoncements aux soins pour des motifs financiers. Certes, les assurances privées complémentaires permettent de réduire le risque de restes à charge élevés et le non-recours aux soins. Elles occupent une place très importante en France, contrairement à la plupart de nos voisins. Elles présentent cependant plusieurs limites : elles ne font pas disparaître les risques de restes à charge élevés; elles présentent un coût important pour les assurés et les employeurs (notamment du fait de frais de gestion élevés dupliquant ceux de l'assurance maladie) et pour la collectivité (à travers les aides fiscales et sociales accordées aux complémentaires d'entreprise) ; elles sont inégalitaires, défavorisant les assurés individuels, notamment les personnes âgées et les chômeurs.

La Cour avance plusieurs pistes pour renforcer la solidarité entre les assurés, améliorer l'accès aux soins sur l'ensemble du territoire et mieux maîtriser les dépenses, impératif que renforce le constat de disparités inexpliquées dans les coûts de prise en charge des différentes affections de longue durée comme en particulier le diabète.

Mais des réformes opérées à rôles inchangés de l'assurance maladie et des assurances complémentaires pourraient ne pas suffire à assurer l'accès de tous aux soins dans des conditions financièrement soutenables. C'est pourquoi nous avons examiné trois scénarios de réforme portant sur l'articulation même des missions de l'assurance maladie et des assurances complémentaires.

Un premier scénario consisterait à mener à terme la généralisation des couvertures complémentaires santé, mais en resserrant fortement l'éventail des tarifs et des garanties de façon à réduire les inégalités financières dans l'accès aux soins.

Dans un deuxième scénario de moyen terme, les financements et les responsabilités de l'assurance maladie et des assurances complémentaires pourraient être « décroisés ». Les assurances complémentaires couvriraient dès le premier euro certaines dépenses que l'assurance maladie prend aujourd'hui en charge avec de faibles niveaux de remboursement.

Cela permettrait de renforcer le rôle de régulation propre à chaque financeur vis-à-vis des professionnels de santé concernés et, à l'assurance maladie, de mieux couvrir certains domaines essentiels : ainsi, le ticket modérateur pourrait être supprimé pour les actes hospitaliers et les soins dentaires conservateurs qui préviennent le recours ultérieur à des prothèses. Si des mesures fortes et contraignantes de régulation des actes et des tarifs n'étaient pas adoptées dans la prochaine convention avec les chirurgiens-dentistes, dont la négociation vient de s'engager, un tel scénario pourrait être envisagé afin d'enrayer la dérive du coût des soins prothétiques.

Dans un troisième scénario de long terme, ce sont les modalités mêmes de prise en charge des dépenses de santé par l'assurance maladie qui pourraient être réformées. Un plafonnement des restes à charge pourrait être introduit, comme dans de nombreux pays européens, selon plusieurs critères possibles, par exemple en fonction de la présence ou non d'une pathologie chronique ou en fonction du revenu, comme en Allemagne.

L'assurance maladie appelle ainsi des réformes structurelles, au-delà des mesures ponctuelles qui année après année se succèdent pour permettre de tenir l'Ondam. La priorité a été, de fait, donnée aux réformes successives des retraites, l'assurance maladie constituant en quelque sorte une préoccupation de second rang. Au moment où les réformes des retraites produisent des résultats désormais visibles, le moment peut apparaître propice pour redoubler d'efforts sur ce champ.

Même si de nouveaux ajustements pourraient être nécessaires à l'avenir, les réformes des retraites montrent qu'il est possible de réformer une composante majeure de la protection sociale avec des résultats très significatifs.

Les retraites de base et complémentaires des salariés du secteur privé constituent la principale composante du système de retraites. Elles ont été réformées plusieurs fois depuis la fin des années 1980. Tous les leviers d'action ont été mis à contribution.

Ces réformes ont considérablement amélioré les perspectives financières des retraites par répartition. À chaque réforme, leur pérennité est de mieux en mieux assurée. C'est d'autant plus le cas que leurs effets ne sont pas épuisés, mais s'amplifient au fur et à mesure des nouvelles générations de retraités.

Bien sûr, les réformes ont conduit les actuels et futurs retraités, ainsi que leurs employeurs, à consentir des efforts importants. Toutefois, elles n'ont pas interrompu le progrès social permis par la hausse des rémunérations et l'allongement de la durée de vie. Ainsi, le montant moyen des pensions continue à augmenter, même s'il le fait moins rapidement qu'avant. L'âge de départ est appelé à augmenter de près de trois années entre les retraités actuels, nés en 1950, et futurs, nés en 1980. Mais, compte tenu de l'augmentation de l'espérance de vie, le rapport entre la durée de vie à la retraite et la durée totale de la vie sera, pour les futurs retraités, au moins égal à celui des retraités nés en 1935.

Pour autant, les problèmes financiers des retraites des salariés du secteur privé ne peuvent être considérés comme définitivement réglés.

En retenant, comme le fait le Conseil d'orientation des retraites, une hypothèse centrale de croissance annuelle de 1,5 % des gains de productivité du travail, l'équilibre financier des retraites serait certes durablement assuré. Mais cette projection apparaît optimiste. Avec une hypothèse plus prudente de 1,3 %, les retraites complémentaires seraient encore à l'équilibre, mais plus les retraites de base. Dans un scénario, également plausible, de hausse des gains de productivité limitée à 1 %, les retraites complémentaires comme les retraites de base seraient en déficit. Dans tous les cas, les déficits s'emballeraient rapidement à partir de la seconde moitié des années 2020.

La perspective de nouveaux ajustements ne peut ainsi être écartée a priori. Ils doivent être anticipés en tirant les leçons des trente années de réformes qui viennent de s'écouler.

La prise de décision doit être mieux éclairée, à partir d'un nombre plus réduit de scénarios à moyen terme et d'une analyse plus précise de l'effet des mesures envisagées. Alors que les retraites de base et complémentaires ont été réformées de manière cloisonnée, une instance de coordination entre l'État, les partenaires sociaux et les gestionnaires des régimes est indispensable pour appréhender globalement leur situation.

Enfin et surtout, un processus d'ajustement progressif et continu des retraites est de loin préférable à des réformes par à-coup, présentées tous les cinq ou dix ans comme les dernières. Cela permettrait d'éviter des réactions tardives, un report excessif des efforts sur les générations les plus jeunes ou une remontée de la dette sociale. Sans priver les pouvoirs publics et les partenaires sociaux de leurs prérogatives, l'instance de coordination que je viens d'évoquer pourrait avoir pour mission de définir, par anticipation et en fonction de scénarios crédibles, les mesures à appliquer en vue d'assurer l'équilibre financier des retraites de base et complémentaires. La Cour identifie les leviers possibles à cet effet.

Le troisième et dernier constat de la Cour porte sur les gains d'efficience accrus, possibles et nécessaires, à l'hôpital et dans les organismes de sécurité sociale. La démarche de maîtrise des coûts et de retour à l'équilibre des comptes n'est là que pour servir l'objectif essentiel de tout service public : sa qualité, à toujours accroître.

La Cour souligne l'existence de marges d'efficience accrue à l'hôpital, s'agissant des prescriptions d'actes, de prestations et de biens de santé par des médecins hospitaliers.

Les dépenses réalisées à l'hôpital et en ville au titre des prescriptions hospitalières (24,7 milliards d'euros en 2014) sont particulièrement dynamiques (+ 32 % en euros constants entre 2007 et 2014) et prennent une place croissante dans l'Ondam. Pour autant, elles sont très imparfaitement mesurées, analysées et régulées.

Un nouveau contrat d'amélioration de la qualité et de l'efficience des soins entre les établissements, les agences régionales de santé et l'assurance maladie doit remplacer cinq dispositifs contractuels qui s'étaient empilés sans avoir d'effet notable sur le volume des prescriptions. Cependant, pour maîtriser plus efficacement ces dernières, il convient de responsabiliser plus directement le corps médical lui-même, collectivement et plus encore individuellement, qu'il s'agisse des prescriptions réalisées à l'hôpital ou de celles exécutées en ville.

L'informatisation des processus de soins et de gestion a beaucoup progressé. Le caractère stratégique des outils numériques a été bien assimilé par les communautés médicales. Le programme « Hôpital numérique » a mis fin à l'attribution au coup par coup de financements, en affirmant des objectifs de mise à niveau de la sécurité et des services rendus par les systèmes d'information de l'ensemble des hôpitaux.

Néanmoins, des progrès importants sont encore à réaliser, qu'il s'agisse du pilotage national des systèmes d'information hospitaliers ou de la capacité des applications à communiquer entre elles. Une mutualisation des fonctions informatiques de différents établissements est aussi attendue des nouveaux groupements hospitaliers de territoire. Au-delà, les systèmes d'information hospitaliers doivent s'ouvrir en direction des autres acteurs du système de soins, notamment les médecins de ville et les professions paramédicales.

La recherche de gains d'efficience accrus concerne aussi les organismes de sécurité sociale.

La certification obligatoire des comptes de la sécurité sociale par la Cour pour le régime général depuis dix ans et, pour les autres régimes, par des commissaires aux comptes depuis huit ans, a contribué à deux progrès majeurs : une transparence et une sincérité accrues des comptes ; la modernisation de l'organisation, des processus et des outils de gestion des organismes de sécurité sociale.

Les comptes sont aujourd'hui tous certifiés, mais souvent avec des réserves. En particulier, des erreurs trop nombreuses continuent à affecter le versement des prestations sociales au regard des règles de droit applicables, au détriment des organismes, mais aussi souvent des assurés. Ce constat invite à sécuriser encore les processus de gestion.

Par ailleurs, l'intégration croissante des régimes de sécurité sociale devrait conduire à instaurer un compte combiné par risque (maladie, vieillesse...), puis un compte combiné global de tous les régimes de sécurité sociale. Ces nouveaux comptes, eux aussi soumis à certification, permettraient de fournir une représentation financière plus complète de la sécurité sociale.

Cour appelle également à une réflexion approfondie sur la gestion des ressources humaines de la sécurité sociale.

Des efforts importants ont été accomplis. Ainsi, les effectifs du régime général ont été réduits de 17 700 emplois, soit 10,8 %, entre 2005 et 2015. Cette réduction a permis de stabiliser la masse salariale depuis 2009 en compensant l'incidence d'augmentations salariales parfois insuffisamment rigoureuses.

Cependant, la productivité des organismes de sécurité sociale est affectée par une durée annuelle du travail inférieure à la durée légale (1 540 heures en moyenne en 2014 contre 1 607 heures) et un absentéisme élevé (8,9 % en moyenne), qui représentent au total l'équivalent de 10 000 emplois.

Les importantes disparités territoriales constatées en matière d'absentéisme soulèvent la question de leur prévention et de leur contrôle.

Les caisses de sécurité sociale vont connaître des départs massifs à la retraite (de l'ordre de 55 000 pour le seul régime général dans les dix ans). Toutefois, les gestionnaires apparaissent très largement impréparés à ce défi, qui constitue une opportunité pour dégager des gains de productivité, adapter les compétences aux besoins et continuer à rationaliser les réseaux des caisses, comme la Cour l'a préconisé dans son rapport de l'année dernière.

Définir une stratégie de modernisation des ressources humaines de la sécurité sociale est urgent.

Illustration de ces nécessités de rationalisation et d'évolution, la fonction informatique de la sécurité sociale, malgré son caractère stratégique, est fragmentée sur un triple plan institutionnel, géographique et fonctionnel. Cela affecte l'emploi efficient des ressources importantes qui lui sont consacrées et ralentit la modernisation de systèmes d'information souvent anciens.

Faire gagner en efficience la fonction informatique suppose de rassembler sous une même autorité les agents qui y concourent, de regrouper les activités sur un nombre plus réduit de sites, de consolider les compétences internes afin de réduire le recours à des prestataires externes et de renforcer les mutualisations.

En dernier lieu, moderniser la sécurité sociale nécessite de mener à terme des réformes aujourd'hui au milieu du gué.

Depuis les années 1960, le régime minier de sécurité sociale connaît un déclin démographique irréversible. Comme la Cour l'avait recommandé, il a été fermé à de nouvelles affiliations et la gestion des prestations est depuis l'année dernière confiée en totalité à d'autres opérateurs. Reste aujourd'hui une caisse dont la raison d'être a disparu et qui se contente de piloter un réseau de plus de 260 structures de soins, dont l'important déficit est pour partie sous-évalué.

Sans remettre en cause les droits des assurés du régime, garantis par la loi, la Cour préconise de fermer la caisse à un terme rapproché. À la suite de réorganisations plus profondes que celles aujourd'hui engagées, les structures de soins, ainsi rendues viables, seraient alors confiées à des opérateurs publics ou privés à but non lucratif. C'est la condition de leur pérennité.

Je conclurai en revenant sur le déficit de la sécurité sociale. Il n'est ni légitime - il crée des dettes dont la charge se reporte sur les générations futures -, ni fatal. Il peut être résorbé à un terme rapproché sans nouvelles hausses de recettes, en mettant en oeuvre des réformes structurelles qui conjuguent efficience accrue des dépenses, gestion plus efficace et amélioration du service rendu.

Les déficits et la dette sociale vont continuer à reculer en 2016 et en 2017. De telles embellies ont déjà été constatées dans le passé sans être durables car l'effort s'est trop vite relâché. Même s'il est encore inachevé, le redressement financier des retraites des salariés du secteur privé montre que des réformes structurelles, conduites dans la durée, valent la peine pour préserver notre protection sociale.

Faire des choix clairs, s'attaquer méthodiquement et avec ténacité aux sources d'inefficacité et d'inefficience, en exploitant l'ensemble des apports du numérique, poursuivre ces actions avec détermination dans la durée et éteindre totalement la dette sociale d'ici à 2024, sont autant de leviers pour préserver la sécurité sociale, au service d'abord des plus fragiles qu'elle a pour mission de protéger en priorité.

C'est dans cette perspective que s'inscrivent les analyses et recommandations de la Cour.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe , rapporteur général . - Merci pour cette analyse en profondeur et sensiblement critique du fonctionnement de la Sécurité sociale, ainsi que pour vos propositions dont certaines sont renouvelées et que nous avons déjà fait nôtres. Face à ces constats, quel vous paraît le meilleur chemin pour parvenir à mettre en oeuvre vos propositions ? Le retour annoncé à l'équilibre pour 2019 vous paraît-il crédible ? Le Haut Conseil des finances publiques doute manifestement des économies de 4 milliards dans le périmètre de l'Ondam : qu'en pensez-vous ?

Sur l'assurance maladie, vous mettez en avant la nécessité d'un bon niveau de soins de ville ; mais, compte tenu de leur situation, que préconisez-vous pour y parvenir ?

La Cour suggère depuis plusieurs années un « décroisement » avec les assurances complémentaires, alors même qu'on assiste à des désengagements de l'assurance maladie - par exemple sur le bucco-dentaire ou sur l'optique. Ce « décroisement » serait-il suffisant, ou bien faudrait-il, comme en Allemagne par exemple, instituer un système d'enveloppes fermées pour réguler l'ensemble ? Faut-il, et comment, encourager la participation directe des complémentaires à la négociation de la convention d'assurance maladie ? Quelle réforme, ensuite, du remboursement des affections de longue durée (ALD) ?

Enfin, un constat que nous partageons tout à fait avec vous : nous manquons cruellement d'informations sur l'effet de la régulation des dépenses hospitalières sur l'Ondam hospitalier - les prestations hospitalières sont trop méconnues, il faut les analyser davantage.

M. Jean-Noël Cardoux , président de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) . - Je partage votre analyse qui peut se résumer dans la formule : « il y a du mieux, mais peut mieux faire, avec des réformes structurelles ». En revanche, je suis surpris et je m'interroge sur le jeu d'écriture qui ôte du résultat de l'exercice 2016 quelque 700 millions, soit 8 % du déficit annoncé ; en droit privé, cela pourrait être qualifié de faux bilan : une telle pratique aura-t-elle une incidence sur la certification des comptes 2016 par la Cour ?

Ensuite, vous dites avec raison que la Cades ne peut continuer à absorber le déficit de l'Acoss, et vous suggérez d'apurer le stock de dette, soit quelque 200 milliards d'euros : avez-vous une estimation de ce que cela représenterait, en point de CRDS ?

M. Antoine Durrleman. - Les prévisions actuelles esquissent une stabilisation du déficit autour de 3,9 milliards, plutôt qu'un recul, et le Haut Conseil des finances publiques estime que les hypothèses de croissance retenues par le PLF et le PLFSS paraissent optimistes, avec des conséquences directes sur l'équilibre de la sécurité sociale - à quoi s'ajoute la réalité de « l'assouplissement » de l'Ondam pour l'an prochain, dont l'accroissement autorisé serait plus proche, je l'ai dit, de 2,35 % que de 2 %.

Les effets des réformes, ensuite, sont plus faciles à documenter quand elles sont d'ordre réglementaire ou tarifaire, que quand elles visent à modifier le comportement des professionnels. Je pense, par exemple, aux apports de la chirurgie ambulatoire, qui se développe et dont les effets sont certains, mais mal connus, ce qui est vrai pour les actions de maîtrise médicalisée dans leur ensemble. C'est pourquoi nous recommandons cette année encore qu'un compte rendu précis des économies soit annexé au PLFSS, en préalable au débat sur l'Ondam. Certaines mesures présentées comme des économies n'en sont pas - par exemple les 220 millions d'euros des médicaments innovants et coûteux qui seront pris en charge par le fonds d'innovation thérapeutique : les dépenses demeurent, mais elles sont sinon débudgétisées, du moins sorties du champ de l'Ondam en 2017.

Dans l'articulation entre les soins de ville et hospitaliers, il y a effectivement un virage ambulatoire, mais nous en connaissons insuffisamment l'ampleur - nous y consacrerons prochainement une étude et nous préconisons d'ores et déjà une mise en réserve prudentielle des augmentations tarifaires.

Le « décroisement » suggéré par la Cour entre le régime de base et les complémentaires supposerait certainement une réorganisation des responsabilités, pour que les régimes complémentaires négocient les conventions directement avec les professionnels. Actuellement, l'Union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire (Unocam) est nécessairement divisée entre les intérêts des mutuelles, de la prévoyance et des assurances, le système évoluerait avec le « décroisement ».

Sur les ALD, la Cour met l'accent, au-delà de la réforme structurelle qui passerait par un reste à charge plafonné, sur les différences territoriales dans le coût des affections. Nous avons obtenu de très haute lutte les chiffres territorialisés auprès de la Cnam : ils établissent des différences territoriales importantes et tout à fait méconnues car non documentées ; en examinant il y a quelque temps les coûts de l'insuffisance chronique rénale en phase terminale, nous avions trouvé des possibilités d'économies de l'ordre de 900 millions d'euros, c'est dire les marges d'action. Et nous constatons une « sur-dépense » de quelque 1,7 milliard dans les vingt départements où le coût des ALD dépasse la moyenne nationale : il faut, à tout le moins, mieux analyser ces écarts.

Le déficit hospitalier, de son côté, s'est accru de 200 millions entre 2014 et 2015, mais il se concentre sur 26 établissements publics de santé : pour les autres, la gestion paraît maîtrisée.

La Cour conteste, dans le jeu d'écriture de quelque 700 millions sur la CSG, le fait que cette somme soit inscrite au compte de résultat de l'assurance maladie, alors qu'elle devrait être au bilan ; nous verrons, le moment venu, quelles seront les conséquences sur la certification des comptes - nous avons d'ores et déjà présenté nos arguments cartes sur table.

La Cades est elle aussi exposée au risque d'un accroissement des taux d'intérêt, puisqu'environ un tiers de sa dette est libellée à taux variable ; si les hypothèses d'augmentation des taux se réalisent, il en résulterait une augmentation de charges de 400 à 500 millions annuels. Des moyens peuvent être mobilisés pour y faire face, la Cour mentionne en particulier le Fonds de réserve pour les retraites, qui dispose de fonds libres d'emploi.

Enfin, s'agissant de la CRDS, le rapport de la Cour indique qu'un demi-point de contribution représente environ 7 milliards d'euros.

M. Gérard Roche . - Les tableaux d'équilibre figurant à l'article 1 er du PLFSS pour 2017 intégreront une rubrique relative au FSV : cette première, que nous attendions depuis longtemps - et que nous avions formulée dans notre rapport sur le FSV avec Catherine Génisson -, permettra enfin au Parlement de se prononcer sur un équilibre consolidé des régimes obligatoires et du régime général, l'approche « hors FSV » étant nécessairement partielle.

Je note au passage que le satisfecit de la ministre Marisol Touraine sur le sauvetage des retraites fait toujours fi de la persistance d'un déficit du FSV qui s'établira cette année à 3,9 milliards, soit davantage que l'an passé et approchant désormais le triste record de 4,1 milliards atteint en 2010 et 2012.

Je souhaite, ensuite, vous interroger sur le transfert du financement du minimum contributif à l'assurance vieillesse, que notre rapport d'information préconisait et qui est mis en place, progressivement, par le PLFSS pour 2017. Y voyez-vous, comme nous, une règle de gestion saine de la branche vieillesse ? Par ailleurs, que pensez-vous de l'utilisation des réserves de la section III du compte du FSV pour la création du fonds de financement de l'innovation pharmaceutique ?

Alors que la réforme des retraites est déjà devenue un thème important du débat pour l'élection présidentielle, votre rapport présente une synthèse très éclairante sur le bilan des réformes menées depuis 1993 pour les retraites des salariés du privé. Je souscris pleinement à votre analyse sur l'interdépendance des réformes menées dans le régime de base et le régime complémentaire. C'est pourquoi j'avais proposé l'année dernière de porter l'âge légal de départ à la retraite à 63 ans pour suivre le courageux accord Agirc-Arrco d'octobre 2015.

Je m'interroge sur votre proposition consistant en l'adoption d'un nouveau cadre de cohérence du pilotage des régimes de retraite des salariés. Pensez-vous qu'il faille revoir la répartition des rôles entre le Conseil d'orientation des retraites et le Comité de suivi des retraites ? De plus, à quel niveau doit-on intégrer à la réflexion le régime de retraite des fonctionnaires ainsi que les autres régimes spéciaux ?

Mme Laurence Cohen . - Dans votre rapport, vous proposez de réorienter les soutiens publics à la souscription d'une couverture complémentaire vers les assurés aux risques les plus élevés. Vous souhaitez que l'assurance maladie prenne exclusivement mais intégralement en charge les dépenses liées à un parcours obligatoire de prévention et de soins conservateurs. Les assurances complémentaires santé financeraient au premier euro les soins prothésistes et orthodontistes dans la limite d'un plafond tarifaire. Votre parti-pris est donc de basculer sur les assurances complémentaires de santé.

Pourquoi n'avez-vous pas envisagé une prise en charge à 100 % des soins par la sécurité sociale ? Ne pensez-vous pas que le montant des exonérations patronales non compensées pourrait être une source intéressante de financement ? Pourquoi ne pas fixer les prélèvements sociaux des revenus financiers au niveau de ceux sur les salaires, ce qui dégagerait une vingtaine de milliards supplémentaires ? Il serait bon que vous exploriez ces pistes de financement.

Vous prônez la maîtrise des prescriptions à l'hôpital : vous dites vouloir poursuivre un objectif de réduction de 10 à 15 % des volumes d'actes de biologie médicale. Or, lorsqu'on parle de restrictions budgétaires, les conséquences sur les personnels et les soins sont considérables. Vous ne prenez pas en compte le facteur humain.

Enfin, vous souhaitez mobiliser des gains de productivité et lever les obstacles aux mobilités géographiques en matière de gestion des personnels des organismes de sécurité sociale. Toutes sensibilités politiques confondues, de nombreux élus locaux de zones urbaines et rurales se sont opposés à la fermeture de centres de sécurité sociale de proximité. Vos préconisations auraient des conséquences désastreuses pour le service et pour l'emploi.

M. Yves Daudigny . - Votre présentation a été mesurée dans la forme mais sans indulgence sur le fond.

Les efforts de redressement des comptes de la sécurité sociale réalisés depuis cinq ans ont donné de bons résultats, les meilleurs depuis 2001. En 2017, le régime général sera quasiment à l'équilibre et trois branches seront excédentaires. Dans le même temps, la sécurité sociale commence à se désendetter. Au-delà de l'aspect comptable, nous nous félicitons de la confiance retrouvée dans notre système de sécurité sociale : nous en reparlerons à l'occasion de notre débat en séance publique.

Certes, des dépenses nouvelles sont envisagées : c'est un juste retour pour les porteurs de réformes, qu'il s'agisse de la médecine de ville ou de l'hôpital. L'Ondam progressera donc de 2,1 %.

Deux sujets de vigilance : d'abord, la régulation des dépenses de médecine de ville. Le système allemand ne pourra sans doute pas s'appliquer dans notre pays, même si le sujet reste ouvert.

Ensuite, le Gouvernement a conscience des difficultés du FSV puisqu'il envisage son retour à l'équilibre avec un transfert du minimum contributif vers la branche vieillesse.

Que pensez-vous de l'économie de 1,4 milliard d'euros demandée en 2017 au secteur du médicament et aux dispositifs médicaux ?

M. Michel Amiel . - Le fonds de financement de l'innovation pharmaceutique, qui prendra en charge une dépense annuelle de l'ordre de 200 millions, sera en quelque sorte débudgétisé en 2017. L'évolution de la médecine, avec le développement de la génomique et des immunothérapies, a entraîné l'apparition de médicaments révolutionnaires, comme les antiviraux directs pour l'hépatite C et les antiangiogenèses pour lutter contre les cancers. Est-il justifié de sortir ce fonds du champ de l'Ondam et pensez-vous qu'il soit suffisamment doté ?

M. Daniel Chasseing . - La sécurité sociale reste un colosse aux pieds d'argile, avec une dette considérable que les générations futures devront rembourser. La Cour des comptes estime à juste titre qu'il ne faut pas relâcher les efforts pour apurer la dette d'ici 2024.

Cet été, le Gouvernement a décidé de réduire de 200 millions les remboursements affectés à l'oxygène et aux pansements. Si l'ambulatoire et le maintien à domicile sont privilégiés, n'oublions pas de financer le développement de la médecine de ville, en dépit des économies possibles en matière de transmissions d'imagerie et de biologie.

M. Antoine Durrleman . - Comme nous, M. Roche se félicite de la consolidation du tableau d'équilibre qui permet d'avoir une vision de la réalité des déficits : lorsque le Sénat relaie les observations de la Cour des comptes, celles-ci sont plus rapidement mises en oeuvre.

Nous ne sommes pas opposés au transfert entre 2017 et 2020 du minimum contributif sur les régimes de base d'assurance vieillesse, soit 3,6 milliards d'euros. À une époque, le Gouvernement avait voulu soulager le régime vieillesse d'un certain nombre de charges pour réduire son déficit. Aujourd'hui que le retour à l'équilibre se confirme, on observe un mouvement inverse. C'est un jeu d'écriture. Certes, le minimum contributif est réservé aux personnes qui ont cotisé à des régimes de retraite, mais il s'agit aussi d'un complément non cotisé pour monter la pension au montant qui a été défini par décret. C'est donc également un élément de solidarité nationale.

En revanche, l'affectation des réserves de la section III, soit 800 millions d'euros, au fonds de financement de l'innovation pharmaceutique pourrait surprendre. En transférant des fonds consacrés à la retraite à l'assurance maladie, on franchit la barrière des espèces. Ces fonds pourraient en effet utilement contribuer à la résorption du déficit du FSV. Le dispositif est ingénieux mais pose question.

Le développement de l'ambulatoire suppose un accompagnement au domicile par des structures appropriées, qu'il s'agisse des professions libérales de santé, de soins infirmiers ou de l'hospitalisation à domicile qui, jusqu'à présent, ne se sont pas beaucoup développés dans notre pays. Nous appelons donc l'hôpital à faire des efforts d'efficience, afin de basculer les économies qu'il pourrait dégager sur l'amélioration du service rendu aux assurés sociaux et aux patients.

Mme Cohen s'interroge sur la façon dont nous envisageons le recyclage de l'effort public sur les contrats exposés aux risques les plus élevés. Aujourd'hui, le système de souscription de contrats complémentaires aide les « bons risques », c'est-à-dire la population plutôt jeune et active, celle que les assureurs estiment peu coûteuse en matière de remboursements. En revanche, la population de « mauvais risques », en particulier les personnes âgées, se retrouve dans une logique de démutualisation. Les coûts d'accès sont en effet très élevés. Il y a cinq ans, nous avions déjà évoqué cette question dans notre rapport sur la sécurité sociale.

En 2010, nous avons analysé le secteur des soins bucco-dentaires : notre constat avait été très sévère. En 2016, la situation s'est aggravée, avec un désengagement accru de la sécurité sociale et une augmentation des dépassements d'honoraire.

Pour la première fois, nous avons exploité le système d'information de l'assurance maladie et nous avons constaté qu'en région parisienne, même sur les soins conservateurs comme le détartrage et les caries, les dépassements sont systématiques alors qu'ils sont interdits par la convention. C'est pourquoi nous estimons que la future convention actuellement en négociation doit être un succès. Si tel n'était pas le cas, il conviendrait de prendre autrement en charge les dépenses, sans réduire la solidarité mais en renforçant la prévention.

La convention de 2011 avait mis en place le programme de prévention chez les jeunes : « Aime tes dents ». Ce fut un succès. En revanche, dès la sortie du système scolaire, les jeunes adultes ne vont plus chez le dentiste. Ils ne reviennent que lorsque leurs dents sont très abimées et qu'ils doivent avoir recours à une prothèse. Un vrai parcours de soins permettrait aux jeunes adultes d'être régulièrement suivis. Un décroisement permettrait sans doute d'aller en ce sens.

Une prise en charge à 100 % ? Nous ne sommes pas sortis du cadre fixé par les pères fondateurs de la sécurité sociale de 1945, qui souhaitaient une participation même minime des assurés à leurs dépenses de soins. Nous nous devons néanmoins d'intégrer à nos réflexions le progrès médical qui, aujourd'hui, est assez extraordinaire, mais aussi coûteux. La pertinence des actes est donc une question centrale. Il y a deux ou trois ans, vous nous aviez demandé d'étudier la biologie médicale : nous avions alors noté combien le dosage de la vitamine D chez les personnes âgées, qui coûtait 100 millions d'euros par an, n'était pas justifié. L'assurance maladie a agi pour réduire cette dépense. Il existe encore des marges d'économies pour financer les progrès médicaux comme l'imagerie, la biologie, les médicaments innovants.

En ce qui concerne les personnels, une modernisation est possible. Il ne s'agit pas d'abandonner le contact entre les organismes de sécurité sociale et les assurés, mais il n'est pas nécessairement celui du point de traitement des dossiers qui peuvent être examinés à distance.

Le dispositif du fonds de financement de l'innovation est complexe car il se régulera sur cinq ans : un déficit sera possible dans la limite de 25 % du fonds de réserve, mais il pourra aussi accumuler des excédents. En 2017, ce fonds sera financé par un transfert venant du FSV, ce qui réduit d'autant le caractère contraignant de l'Ondam. Nous verrons si les 220 millions prévus correspondent aux besoins.

Dans le domaine des médicaments, 1,4 milliard d'euros d'économies sont attendues. En revanche, nous ne disposons pas de toise pour les mesurer précisément. Mais nous savons qu'il reste des marges d'économies. Certes, les génériques se sont généralisés, mais moins que chez nos voisins et ils restent plus chers en France qu'à l'étranger. Nous y reviendrons l'an prochain.

Vous m'avez demandé si la Cour des comptes intégrait dans sa réflexion sur les retraites les questions des régimes spéciaux et de la fonction publique. Un rapport sur les régimes de retraites des trois fonctions publiques va prochainement être publié. En 2012, nous avons analysé les effets des réformes sur le régime de la RATP et de la SNCF. Le COR a beaucoup travaillé sur cette question.

Le cadre de concertation ne vide pas de sa substance le COR et le Comité de suivi. Le COR s'est montré très pédagogique même s'il nous semble parfois un peu optimiste. Le Comité de suivi est, quant à lui, un outil précieux.

En 2013, les régimes complémentaires Agirc-Arrco ont mené une réforme a minima, supposant que la loi annoncée pour 2014 réformerait le régime de base. Ce ne fut pas le cas si bien que cette réforme n'a pas permis le retour à l'équilibre des régimes complémentaires. En octobre 2015, ceux-ci ont donné rendez-vous au régime général en 2019, considérant que si rien n'était fait à cette date, ils décaleraient de leur propre chef l'âge d'ouverture des droits. Les régimes Agirc-Arrco prennent donc en otage le régime de base dans l'optique d'une réforme dont personne ne sait si elle interviendra. On aurait pu agir de façon plus cohérente.

Mme Patricia Schillinger . - Quelle est votre analyse sur le déremboursement des bons de transports ? De nombreux malades ruraux sont pénalisés.

M. François Fortassin . - Les patients de ce pays peuvent-ils encore être soignés ? Les médecins passent moins de temps auprès de leurs malades aujourd'hui qu'il y a vingt ans : est-ce un progrès ? Peut-on encore avoir une médecine libérale alors que les remboursements sont effectués par les deniers publics ? Les tarifs de la région parisienne ont largement dépassé les 25 euros.

M. Antoine Durrleman . - En 2012, notre rapport sur la sécurité sociale comportait un chapitre sur les transports sanitaires. Certes, ils sont nécessaires, notamment pour les maladies chroniques qui sont caractérisées par des retours entre le domicile et l'hôpital. Mais certains comportements sont aberrants, des fraudes établies et donc des économies possibles, économies que nous avions chiffrées à 500 millions sur une dépense de 3,5 milliards d'euros. Le bien-fondé des prises en charge est d'autant plus important que le dispositif est régulé. Or, la concurrence entre les taxis et les ambulances est un facteur d'emballement des dépenses. Dans certaines zones, c'est l'offre de transport qui crée la demande, ce n'est pas acceptable.

Certes, certains patients ont du mal à accéder aux soins, mais les progrès ont été considérables ces dernières années avec la CMU et la CMU complémentaire (CMUC). Le contrat offert par la CMUC est de qualité. En revanche, beaucoup de gens ignorent qu'ils peuvent en bénéficier.

Je ne saurais me prononcer sur la question de l'avenir de la médecine libérale.

M. Alain Milon , président . - Merci. Nous reverrons toutes ces problématiques lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale d'ici quelques semaines.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

__________

• Direction de la sécurité sociale (DSS)

Thomas Fatome , directeur

Benjamin Voisin , sous-directeur de l'accès aux soins, des prestations familiales et des accidents du travail

Clément Lacoin , chef du bureau de la synthèse financière

• Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades)

Patrice Ract-Madoux , président du conseil d'administration

Geneviève Gauthey , inspecteur des finances publiques

• Fonds de solidarité vieillesse (FSV)

Bernard Billon , directeur

Frédéric Favié , directeur adjoint

• Fonds de réserve des retraites (FRR)

Alain Vasselle , président

Yves Chevalier , membre du directoire

• Association générale des institutions de retraite des cadres - Association pour le régime de retraite complémentaire des salariés (Agirc-Arrco)

François-Xavier Selleret , directeur général

Pierre Chaperon , directeur de cabinet

• Régime social des indépendants (RSI)

Stéphane Seiller , directeur général de la caisse nationale

Stéphanie Deschaume , directrice de cabinet

Olivier Maillebuau , en charge des relations parlementaires

• Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss)

Jean-Louis Rey , directeur

Alain Gubian , directeur financier

• Union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (Unédic)

Vincent Destival , directeur général

• Direction générale des douanes

Corinne Cleostrate , sous directrice des droits indirects

• Fédération nationale des particuliers employeurs (Fepem)

Marie Béatrice Levaux , présidente

Adrien Dufour , responsable des relations institutionnelles

• Union des caisses de France (UCF)

Norbert Monti , président

Frédérique Kanno , directeur général

Bruno Dumas , pour la Fédération française du bâtiment (FFB)

Laetitia Assali , directrice des affaires sociales

Jean Cerutti, pour la Fédération nationale des travaux publics (FNTP)

Laurence d'Orglandes , chef de service des affaires sociales à Direction des affaires sociales de la FNTP

Emilie Auger-Martin, directrice adjointe des affaires sociales de la fédération des SCOP du BTP


* 1 Pages 98 et 99 du rapport économique, social et financier annexé au PLF 2017.

* 2 En grisé dans le tableau.

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