Rapport n° 434 (2015-2016) de M. François GROSDIDIER , fait au nom de la commission des lois, déposé le 2 mars 2016

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N° 434

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2015-2016

Enregistré à la Présidence du Sénat le 2 mars 2016

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de loi de M. Jean-Noël CARDOUX et plusieurs de ses collègues visant à augmenter de deux candidats remplaçants la liste des candidats au conseil municipal ,

Par M. François GROSDIDIER,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Philippe Bas , président ; Mme Catherine Troendlé, MM. Jean-Pierre Sueur, François Pillet, Alain Richard, François-Noël Buffet, Alain Anziani, Yves Détraigne, Mme Éliane Assassi, M. Pierre-Yves Collombat, Mme Esther Benbassa , vice-présidents ; MM. André Reichardt, Michel Delebarre, Christophe-André Frassa, Thani Mohamed Soilihi , secrétaires ; MM. Christophe Béchu, Jacques Bigot, François Bonhomme, Luc Carvounas, Gérard Collomb, Mme Cécile Cukierman, M. Mathieu Darnaud, Mme Jacky Deromedi, M. Félix Desplan, Mme Catherine Di Folco, MM. Christian Favier, Pierre Frogier, Mme Jacqueline Gourault, M. François Grosdidier, Mme Sophie Joissains, MM. Philippe Kaltenbach, Jean-Yves Leconte, Roger Madec, Alain Marc, Didier Marie, Patrick Masclet, Jean Louis Masson, Mme Marie Mercier, MM. Michel Mercier, Jacques Mézard, Hugues Portelli, Bernard Saugey, Simon Sutour, Mmes Catherine Tasca, Lana Tetuanui, MM. René Vandierendonck, Alain Vasselle, Jean-Pierre Vial, François Zocchetto .

Voir les numéros :

Sénat :

591 (2014-2015) et 435 (2015-2016)

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS

Réunie le mercredi 2 mars 2016, sous la présidence de M. Philippe Bas, président , la commission des lois a examiné le rapport de M. François Grosdidier , rapporteur , et établi son texte sur la proposition de loi n° 591 (2014-2015) visant à augmenter de deux candidats remplaçants la liste des candidats au conseil municipal.

L'abaissement du seuil d'application du scrutin de liste à la représentation proportionnelle aux communes de 3 500 à 1 000 habitants pour les élections municipales a conduit à la présentation d'une seule liste dans beaucoup de communes auparavant soumises au scrutin majoritaire. Or le rapporteur a rappelé, en cas de décès du maire, l'obligation de disposer d'un conseil municipal complet pour procéder à l'élection de son successeur. Ainsi, dans ces communes où la liste siège entièrement au conseil municipal, le décès du maire impose l'organisation d'une élection intégrale.

Partageant l'objectif de la proposition de loi visant à ce que chaque liste de candidats au conseil municipal comporte deux candidats supplémentaires au nombre de sièges à pourvoir, la commission n'a pas souhaité limiter le recours aux deux conseillers municipaux suppléants aux seuls cas de décès du maire ou d'une incompatibilité liée à l'exercice concomitant de plusieurs mandats électifs. Sur proposition de son rapporteur, elle a étendu le recours aux deux conseillers municipaux supplémentaires à l'ensemble des vacances d'un siège au conseil municipal, quelle qu'en soit l'origine, sur le modèle applicable aux conseils régionaux et aux conseils communautaires.

La commission des lois a adopté la proposition de loi ainsi modifiée.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Les communes représentent la cellule de base de notre République et le premier lieu d'expression de la démocratie. L'organisation, tous les six ans, des élections municipales le confirment, avec un taux de participation supérieur à celui des autres élections locales ou nationales.

Les électeurs semblent également marquer une préférence, en particulier dans les communes rurales, à une certaine stabilité des équipes municipales. Or, en abaissant le seuil d'application du scrutin de liste à la représentation proportionnelle, jusqu'alors réservé aux communes de 3 500 habitants et plus, à celles d'au moins 1 000 habitants, la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral a bouleversé des habitudes électorales anciennes, en particulier dans les communes auparavant soumises au scrutin majoritaire. Dès lors, dans ces communes dont la population est comprise entre 1 000 et 3 500 habitants, il n'est pas rare qu'une seule liste soit présente lors des élections municipales, si bien que l'ensemble des candidats est élu au conseil municipal.

Toutefois, en cas de décès du maire au sein d'un conseil municipal incomplet et dans le cas où il ne peut être fait recours au suivant de liste, doivent être organisées de nouvelles élections municipales afin de pouvoir procéder à l'élection du nouveau maire par un conseil municipal complet. Cette situation suscite souvent l'incompréhension des électeurs qui sont de nouveau appelés à voter pour une liste de candidats quasiment identique à celle présentée lors des élections municipales précédentes.

C'est pour remédier à ces situations que notre collègue, M. Jean-Noël Cardoux, a déposé la présente proposition de loi.

I. LE DOUBLE RÉGIME ÉLECTORAL DES CONSEILS MUNICIPAUX : LA PRISE EN COMPTE DE LA DIVERSITÉ DÉMOGRAPHIQUE DES COMMUNES

Depuis 1945, les élections municipales obéissent à un double régime électoral en fonction de la population des communes : le mode de scrutin principalement utilisé depuis est le scrutin plurinominal majoritaire à deux tours avec possibilité de panachage, applicable à la majorité des communes tandis que les communes plus peuplées sont soumises à un scrutin de liste à la représentation proportionnelle.

La loi n° 82-974 du 19 novembre 1982 modifiant le code électoral et le code des communes, relative à l'élection des conseillers municipaux et aux conditions d'inscription des Français établis hors de France sur les listes électorales a défini les modalités de mise en oeuvre de ces deux modes de scrutin, encore en vigueur. Le législateur avait alors fixé à 3 500 habitants le seuil qui séparait l'application de ces deux régimes électoraux.

L'article 24 de la loi précitée du 17 mai 2013 a abaissé le seuil d'application du scrutin de liste à la représentation proportionnelle de 3 500 à 1 000 habitants. En deçà de ce seuil, continue de s'appliquer le scrutin majoritaire, avec possibilité de panachage et de listes incomplètes.

L'abaissement du seuil d'application du scrutin de liste à la représentation proportionnelle se justifiait par deux objectifs :

- d'une part, l'application la plus large possible de l'élection au suffrage universel direct des conseillers communautaires ;

- d'autre part, l'amélioration de la représentation des femmes au sein des conseils municipaux.

Ainsi, 6 784 communes, dont la population est comprise entre 1 000 et 3 499 habitants, sont désormais soumises, depuis le dernier renouvellement général des conseils municipaux de mars 2014, au scrutin de liste à la représentation proportionnelle, soit 16 000 conseillers municipaux supplémentaires.

A. LE SCRUTIN DE LISTE À LA REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE DANS LES COMMUNES URBAINES : LA CONCILIATION ENTRE STABILITÉ DU CONSEIL MUNICIPAL ET REPRÉSENTATION DES MINORITÉS POLITIQUES

En application de l'article L. 260 du code électoral, dans les communes d'au moins 1 000 habitants, les conseillers municipaux sont élus au scrutin de liste à la représentation proportionnelle, à deux tours avec prime majoritaire accordée à la liste arrivée en tête. Les listes déposées doivent être complètes et comporter autant de candidats que de sièges à pourvoir , sans adjonction ni suppression de noms et sans modification de l'ordre de présentation.

Au premier tour de scrutin, la liste ayant recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés se voit attribuer la moitié des sièges du conseil municipal à pourvoir. La seconde moitié est répartie entre toutes les listes en concurrence ayant recueilli au moins 5 % des suffrages exprimés, y compris celle arrivée en tête du scrutin, selon la règle de la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne.

En cas de second tour, seules les listes ayant obtenu au premier tour au moins 10 % des suffrages exprimés sont autorisées à se maintenir. Elles peuvent fusionner avec des listes ayant recueilli au moins 5 % des suffrages exprimés. La répartition des sièges entre les différentes listes se fait selon les mêmes modalités que celles applicables au premier tour, la prime majoritaire revenant à la liste arrivée en tête sans condition de majorité.

Ce mode de scrutin permet à la fois de disposer d'une majorité municipale stable, par le mécanisme de la prime majoritaire, et de conforter une représentation des minorités politiques au sein de l'assemblée délibérante.

Par ailleurs, la loi n° 2000-493 du 6 juin 2000 tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives prévoit que, sur chaque liste, l'écart entre le nombre des candidats des deux sexes ne peut être supérieur à un et chaque groupe entier de six candidats dans l'ordre de présentation de la liste doit être paritaire. La loi n° 2007-128 du 31 janvier 2007 tendant à promouvoir l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives a simplifié ce dispositif et renforcé l'exigence de parité en prévoyant la composition des listes de candidats par alternance d'un homme et d'une femme pour chaque tour de scrutin. Ainsi, l'article L. 264 du code électoral impose aux listes d'être composées alternativement d'un candidat de chaque sexe.

Cette réforme a permis une progression du nombre de femmes au sein des conseils municipaux dans les communes d'au moins 1 000 habitants. Elles représentaient, en 2013, 34,8 % des effectifs des conseils municipaux et, en 2014, à la suite du dernier renouvellement général des conseils municipaux, 40,3 %, soit une progression de 5,5 points.

B. LE SCRUTIN MAJORITAIRE DANS LES COMMUNES PLUS RURALES : UNE PERSONNALISATION PLUS FORTE DU CHOIX DES CONSEILLERS MUNICIPAUX

Le scrutin majoritaire est quant à lui réservé aux communes plus rurales, dont la population est inférieure à 1 000 habitants, justifié par le comportement des électeurs soucieux d'une plus grande personnalisation du scrutin. Ainsi, les électeurs de ces communes bénéficient d'une plus grande latitude pour exprimer leur choix.

En application de l'article L. 252 du code électoral, les conseillers municipaux sont élus, dans ces communes, au scrutin majoritaire de liste :

- à la majorité des suffrages exprimés au premier tour, égale au moins au quart des électeurs inscrits ;

- à la majorité relative, au second tour, quel que soit le nombre de votants.

En cas d'égalité de suffrages, l'élection est acquise au plus âgé.

Avant l'adoption de la loi précitée du 17 mai 2013, parmi les communes soumises au scrutin majoritaire, des dispositions spécifiques étaient prévues pour celles de moins de 2 500 habitants afin de tenir compte des difficultés que celles-ci pouvaient rencontrer pour présenter des candidatures aux élections municipales. Ainsi, alors que dans les communes dont la population était comprise entre 2 500 et 3 500 habitants, les bulletins distribués aux électeurs devaient comporter autant de noms qu'il y avait de sièges à pourvoir, ces obligations ne s'appliquaient pas à celles de moins de 2 500 habitants. En revanche, le panachage était permis, les candidatures isolées et la présentation de listes incomplètes autorisées. Les bulletins étaient valables même s'ils comprenaient plus ou moins de noms qu'il y avait de conseillers à élire ; si les bulletins glissés dans l'urne comportaient plus de noms que de sièges à pourvoir, les surnuméraires n'étaient pas comptés.

L'abaissement du seuil d'application du scrutin majoritaire a permis de simplifier le régime électoral des petites communes, en unifiant les modalités des opérations de vote dans les communes de moins de 1 000 habitants sur celles auparavant applicables aux communes de moins de 2 500 habitants (candidatures isolées, présentation de listes incomplètes et panachage) afin de faciliter l'élection des conseillers municipaux.

II. LA PROPOSITION DE LOI : AUGMENTER DE DEUX NOMS LES LISTES DE CANDIDATS AU CONSEIL MUNICIPAL

A. UNE PROBABILITÉ PLUS ÉLEVÉE D'ORGANISATION D'ÉLECTIONS PARTIELLES EN CAS DE DÉCÈS DU MAIRE

L'abaissement du seuil d'application du scrutin de liste à la représentation proportionnelle aux communes d'au moins 1 000 habitants a constitué un changement d'habitude pour les électeurs des communes dont la population est comprise entre 1 000 et 3 499 habitants, auparavant soumises au scrutin majoritaire. Alors que dans le cadre de l'ancien régime électoral, les électeurs avaient la possibilité de panacher les listes présentées, qui pouvaient être incomplètes, ils doivent désormais voter pour des listes entières, sans possibilité de suppression ou d'adjonction de nom, sous peine de nullité du bulletin.

Cette nouvelle obligation a conduit à la présentation d'une seule liste dans une grande partie de ces communes lors du dernier scrutin municipal de mars 2014. Selon les éléments fournis par le ministère de l'intérieur, parmi les 6 784 communes appartenant à la strate démographique comprise entre 1 000 et 3 500 habitants - c'est-à-dire les communes désormais soumises au scrutin de liste à la représentation proportionnelle - ont été recensées 2 794 communes (soit 41,19 % de l'ensemble des communes de cette strate démographique) dans lesquelles une seule liste était présente lors des élections municipales de 2014. En comparaison, dans les communes de plus de 3 500 habitants, dans lesquelles s'applique le scrutin de liste à la représentation proportionnelle depuis plus de trente ans, seules 7,75 % des communes ont eu une liste unique de candidats lors du dernier scrutin municipal.

Cette évolution s'accompagne de contraintes pour les communes de moins de 3 500 habitants. En effet, la liste élue siège entièrement au conseil municipal. Dans ce cas, plusieurs dispositions du code électoral ou du code général des collectivités territoriales peuvent difficilement s'appliquer ou conduire à des contraintes supplémentaires aussi bien pour les communes concernées que pour les électeurs.

En effet, dans les communes soumises au scrutin de liste à la représentation proportionnelle, l'article L. 270 du code électoral prévoit que le candidat venant sur une liste immédiatement après le dernier élu est appelé à remplacer le conseiller municipal élu sur la même liste dont le siège devient vacant pour quelle que cause que ce soit. Il ressort de cette disposition que l'annulation définitive de l'élection, le décès ou la réception de la démission d'un conseiller municipal par le maire ont pour effet immédiat de conférer la qualité de conseiller municipal au suivant de la même liste. Le mandat du conseiller municipal suivant de liste débute donc dès la vacance du siège et le maire doit le convoquer à toutes les séances ultérieures, sauf en cas de renoncement de l'intéressé.

Dans les communes où une seule liste était en lice lors des élections municipales, la vacance d'un siège de conseiller municipal ne peut permettre l'application de cette disposition, ce qui peut conduire dans certains cas à l'organisation d'une élection partielle intégrale, en particulier en cas de décès du maire. En effet, en application de l'article L. 2122-8 du code général des collectivités territoriales, l'élection du maire impose un conseil municipal complet. Selon les données recueillies auprès du ministère de l'intérieur, dans les communes de 1 000 habitants et plus, ont été organisées en 2014 et 2015 respectivement 25 et 82 élections partielles. Parmi celles-ci, 3 en 2014 ont été organisées en raison du décès du maire et 8 en 2015.

L'organisation d'élections partielles peut être difficilement comprise par la population qui est appelée à renouveler sa confiance à une liste quasi-identique à celle présentée lors des dernières élections municipales générales.

Les élections partielles

Les élections partielles sont celles organisées entre deux renouvellements généraux des conseils municipaux. Elles sont de deux ordres : soit elles sont complémentaires, soit elles sont intégrales. Les élections partielles complémentaires ne peuvent être organisées que dans les communes de moins de 1 000 habitants. Elles visent à élire une partie des conseillers municipaux.

Un conseil municipal incomplet ne nécessite l'organisation d'élections partielles ou complémentaires que dans des cas très précis.

Pour les communes de 1 000 habitants et plus, les élections partielles sont nécessairement intégrales et s'imposent dans trois cas :

1. lorsque le système de suivant de liste ne peut plus être appliqué et que le conseil municipal compte au moins un tiers de sièges vacants 1 ( * ) ;

2. lorsqu'il y a lieu de procéder à l'élection du maire ou des adjoints et que le conseil municipal est incomplet (impossibilité de faire appel au système du suivant de liste). Dans ce cas, l'ensemble du conseil municipal doit être renouvelé 2 ( * ) ;

3. en cas d'annulation de tout ou partie de l'élection, sauf si celle-ci intervient dans les trois mois précédant le renouvellement général des conseils municipaux 3 ( * ) .

B. LA PRÉSENTATION D'UNE LISTE COMPORTANT DEUX CANDIDATS SUPPLÉMENTAIRES AU NOMBRE DE SIÈGES À POURVOIR

Face à ce risque plus élevé d'organisation d'élections partielles en cas de décès du maire dans les communes soumises au scrutin de liste à la représentation proportionnelle, la proposition de loi de notre collègue Jean-Noël Cardoux propose de modifier, au sein d'un article unique, l'article L. 260 du code électoral pour prévoir que chaque liste de candidats au conseil municipal comporte deux candidats supplémentaires au nombre de sièges à pourvoir. Ainsi, en cas de liste unique, une réserve de deux candidats municipaux potentiels permettrait de compléter le conseil municipal en cas de décès du maire, évitant ainsi l'organisation d'une élection partielle intégrale.

Notre collègue précise toutefois que les deux candidats supplémentaires ne pourraient siéger au conseil municipal qu'en cas de décès du maire, mais non en raison de la démission d'un conseiller municipal ou du maire qui « correspond à un acte volontaire ».

Cette proposition s'inspire des dispositions aujourd'hui applicables aux élections régionales et à la représentation des communes au sein du conseil communautaire.

Pour les élections régionales, ainsi que l'avait relevé notre collègue, M. Alain Richard 4 ( * ) , le tableau n° 7 du code électoral 5 ( * ) fixe l'effectif global de chaque conseil régional ainsi que le nombre de candidats par section départementale que doit comporter toute liste aux élections régionales, et non le nombre de conseillers régionaux élus pour chaque département. Ainsi, la somme du nombre total de candidats par département est supérieure à l'effectif de chaque conseil régional, à raison de deux postes supplémentaires par département, cette différence visant à pourvoir les vacances de sièges susceptibles de se produire en cours de mandat.

Quant aux listes de conseillers communautaires, l'article L. 273-9 du code électoral dispose que chaque liste de candidats aux sièges de conseillers communautaires comporte un nombre de candidats égal au nombre de sièges à pourvoir, augmenté d'un candidat supplémentaire si ce nombre est inférieur à cinq et de deux dans le cas inverse. Et l'article L. 273-10 du même code de préciser que lorsque le siège d'un conseiller communautaire devient vacant, pour quelle que cause que ce soit, il est pourvu par le candidat de même sexe élu conseiller municipal ou conseiller d'arrondissement suivant sur la même liste des candidats aux sièges de conseiller communautaire sur laquelle le conseiller à remplacer a été élu.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION : ÉLARGIR LE RECOURS AUX CANDIDATS SUPPLÉMENTAIRES QUELLE QUE SOIT L'ORIGINE DE LA VACANCE D'UN SIÈGE DU CONSEIL MUNICIPAL

Votre commission approuve l'objectif de la présente proposition de loi en ce qu'elle permettrait de diminuer le risque d'élections partielles intégrales dans les communes soumises au scrutin de liste à la représentation proportionnelle, en particulier pour celles comprises dans la strate démographique de 1 000 à 3 500 habitants.

Toutefois, à l'initiative de son rapporteur, votre commission s'est interrogée sur la pertinence de limiter les cas de recours aux deux candidats supplémentaires, à qui il ne pourrait être fait appel qu'en cas de décès du maire.

Or, il convient de disposer d'un conseil municipal complet, quelle que soit l'origine de la vacance d'un siège. Ainsi, à la suite de la démission volontaire d'un conseiller municipal ou de la démission d'office, notamment en cas d'incompatibilités liées à l'exercice concomitant de plusieurs mandats, en application de la loi organique n° 2014-125 du 14 février 2014 interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur, il devrait être fait application de l'article L. 270 du code électoral, sur le remplacement des conseillers municipaux, dans les communes dans lesquelles une seule liste était présente lors des élections. Le remplacement des conseillers municipaux dans les communes dans lesquelles plusieurs listes étaient présentes lors des élections municipales ne fait pas l'objet de dispositions spécifiques en la matière : il est fait appel au suivant de liste quelle que soit la cause de la vacance d'un siège au conseil municipal.

C'est pourquoi votre commission a adopté l' amendement COM-1 de son rapporteur qui propose une réécriture globale de l'article unique de la proposition de loi afin, d'une part, d'étendre le recours aux deux conseillers municipaux supplémentaires à l'ensemble des vacances d'un siège au conseil municipal, sur le modèle applicable aux conseils régionaux et aux conseils communautaires pour lesquels il n'est pas prévu des dispositions spécifiques autorisant le recours à un élu suppléant et, d'autre part, de préciser la rédaction de l'article L. 260 du code électoral, en s'inspirant des dispositions des articles L. 337 et L. 273-10 du code électoral régissant les vacances de sièges des conseils régionaux et communautaires.

*

* *

Votre commission a adopté la proposition de loi ainsi modifiée.

EXAMEN EN COMMISSION

Mercredi 2 mars 2016

__________

M. François Grosdidier , rapporteur . - Nous avons fait passer le seuil des élections municipales au scrutin de liste à la représentation proportionnelle de 3 500 à 1 000 habitants. Aux dernières élections de mars 2014, une seule liste de candidats a été recensée dans 7,75 % des communes de plus de 3 500 habitants et dans 41 % des communes appartenant à la strate démographique comprise entre 1 000 et 3 500 habitants, c'est-à-dire les communes auparavant soumises au scrutin majoritaire. Dans ces dernières communes, tous les membres de la liste unique sont élus, ce qui prive de réserves de conseillers pour remplacer un membre démissionnaire ou décédé. Or pour fonctionner, un conseil municipal doit compter les deux tiers de ses effectifs ; pour élire son maire, il doit être au complet. S'il manque un conseiller municipal dans une commune de plus de 1 000 habitants pour procéder à l'élection du maire, il faut organiser une nouvelle élection générale. Personne ne comprend cette dépense supplémentaire, puisque c'est la même liste qui se présente à la différence d'un nom ou deux, alors que pour d'autres élections au scrutin de liste à la représentation proportionnelle - élections régionales ou désignation de conseillers communautaires, etc - le législateur a prévu des suppléants. C'est pourquoi cette proposition de loi de M. Cardoux propose d'augmenter de deux noms les listes de candidats du conseil municipal, qui ne siègeraient qu'en cas de décès du maire. M. Cardoux a déposé un amendement pour élargir le recours aux deux conseillers municipaux suppléants en cas de décès d'un conseiller municipal ou après démission liée à une incompatibilité sur la base du cumul des mandats. Je préfèrerais que cette faculté soit élargie à l'ensemble des vacances d'un siège au conseil municipal : les causes peuvent en être nombreuses. Pour autant, inutile de prévoir davantage de suppléants, car cela accroitra la difficulté à monter les listes.

M. Philippe Bas , président . - Votre amendement COM-1 prévoit que la liste comporte un nombre de noms égal au nombre de sièges à pourvoir, augmenté de deux. L'amendement COM-2 de M. Cardoux prévoit que le conseil municipal n'est pas entièrement réélu à la suite d'un décès ou d'une démission d'un conseiller municipal résultant de l'application de la loi organique du 14 février 2014. Je comprends que votre avis sur ce dernier amendement est défavorable.

Les démissions peuvent avoir des causes diverses : déménagement, mutation professionnelle, mésentente.... Qu'elles obligent à réélire tout le conseil municipal est très lourd. Dans de nombreuses communes, tous les membres de la liste étant élus, il n'y a pas de réserve disponible pour nommer des suppléants.

M. Alain Richard . - Cette proposition de loi est justifiée. L'unicité de la liste peut aussi résulter d'un accident de dépôt de liste. Mais pourquoi limiter les recours aux suppléants ? La loi organique ne limite les cas de remplacement que pour les suppléants des députés ou sénateurs élus au scrutin majoritaire, en excluant la démission. Pour une élection au scrutin de liste, il n'y a pas de sélection des cas de succession, quel que soit le motif de la vacance - ce qui laisse aussi place à des manoeuvres.

M. François Pillet . - Cette proposition de loi a un objectif bien particulier : régler les problèmes posés par les décès. Or l'amendement COM-2 limite à deux cas, qui ne dépendent pas d'une arrière-pensée, la possibilité de faire monter un suppléant : le décès et l'application de la loi organique de 2014. Il me parait plus conforme à l'esprit de la proposition de loi. Aller plus loin interdirait d'organiser une élection générale dans les cas où la démission résulte d'une crise démocratique, par exemple si le maire est mis en minorité.

M. Alain Marc . - Je suis d'accord avec le rapporteur, pour avoir vécu la situation dans mon département. Les élections où une seule liste se présente posent un problème d'expression démocratique. Notre commission des lois s'honorerait à proposer que l'on autorise le dépôt de listes incomplètes. Avoir abaissé le seuil du scrutin de liste à la représentation proportionnelle à 1 000 habitants a augmenté le nombre de communes où une seule liste est présente aux élections municipales.

M. Philippe Bas , président . - Je n'ai pas voté ce changement de seuil, car dans les communes rurales, la démocratie consiste à pouvoir choisir des noms : c'est le système du panachage.

M. Pierre-Yves Collombat . - Du tir aux pigeons !

M. Philippe Bas , président . - La démocratie n'y est pas épuisée par le dialogue entre gauche et droite. L'abaissement du seuil a représenté une régression démocratique. Il vous appartient d'élaborer une telle proposition de loi, monsieur Marc : nul doute qu'elle rencontrerait un large écho.

Mme Jacqueline Gourault . - Le problème se pose en cas de décès du maire. Il y a d'autres cas : dans mon département, des conseillers municipaux ont démissionné massivement pour manifester leur désaccord avec le maire. Je soutiens l'amendement COM-2.

M. André Reichardt . - J'ai cosigné cet amendement ainsi que la proposition de loi, mais après avoir entendu les arguments juridiques de M. Richard, je me rallie à l'amendement COM-1, par souci de cohérence.

M. Philippe Bas , président . - Nous avons donc trois solutions : faire appel aux suppléants uniquement en cas de décès du maire, c'est l'objet de la proposition de loi initiale ; pour combler toute vacance de siège, comme le propose le rapporteur ou, comme le propose l'amendement COM-2, uniquement en cas de décès ou de démission résultant de l'application de la loi organique de 2014.

M. François Grosdidier , rapporteur . - Mon amendement est antérieur à l'amendement COM-2. Un conseil municipal doit compter les deux tiers de ses membres pour fonctionner. En cas de crise, si le maire est devenu minoritaire, deux suppléants ne suffiraient pas à renverser la tendance. D'autant qu'il est plus difficile pour les opposants internes à la majorité d'obtenir la défection d'un tiers du conseil lorsque l'opposition siège.

M. Alain Vasselle . - On voit la gymnastique législative où conduit l'abaissement du seuil du scrutin de liste à la représentation proportionnelle ! Pour réélire un maire, le conseil municipal doit être au complet. Si un élu décède, pourquoi ne pas organiser une élection partielle ? Prévoir des suppléants à tout hasard, c'est une usine à gaz !

M. Philippe Bas , président . - Il est vrai que dans une petite commune, il n'est pas toujours facile de trouver deux personnes supplémentaires.

M. Jean-Pierre Sueur . - Ce texte résulte du décès de Mme Nicole Pinsard, maire de Boulay-les-Barres : il a fallu organiser une élection générale, qui a abouti à la reconduction de tous les conseillers municipaux, ce qui a paru étrange aux électeurs. De même, à Bazoches-sur-le-Betz, le maire a contre lui l'ensemble des conseillers municipaux, mais refuse de démissionner. La situation peut durer longtemps...

M. Pierre-Yves Collombat . - Un classique !

M. Jean-Pierre Sueur . - Cette proposition de loi est assez simple. Adoptons les propositions de notre rapporteur.

EXAMEN DES AMENDEMENTS

Article unique

L'amendement COM-1 est adopté. L'amendement COM-2 devient sans objet.

La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Auteur

Objet

Sort
de l'amendement

Article unique

M. GROSDIDIER, rapporteur

1

Élargissement du recours aux conseillers municipaux suppléants à l'ensemble des vacances d'un siège au conseil municipal

Adopté

M. CARDOUX

2

Limitation du recours aux conseillers municipaux suppléants en cas de décès d'un conseiller municipal et de cumul des mandats

Rejeté

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

M. Jean-Noël Cardoux , sénateur, auteur de la proposition de loi

Ministère de l'intérieur

Mme Sylvie Calvès , chef du bureau des élections et des études politiques

M. Charles Barbier , adjoint au chef du bureau

AMENDEMENT NON ADOPTÉ PAR LA COMMISSION

ARTICLE UNIQUE

Amendement n° COM-2 présenté par

MM.  CARDOUX, REICHARDT, PELLEVAT et VASSELLE, Mmes  DUCHÊNE et CAYEUX, MM.  BIZET, LAUFOAULU, MORISSET, BOUCHET, LEFÈVRE, SAVARY et CALVET, Mmes  MORHET-RICHAUD et DEBRÉ, MM.  GENEST, RAPIN, DUFAUT, DELATTRE et D. LAURENT, Mme LAMURE, MM.  CHAIZE, CHARON, CHASSEING et MASCLET, Mme DEROCHE, MM.  DOLIGÉ, B. FOURNIER, P. LEROY, PANUNZI, G. BAILLY, SAVIN et de RAINCOURT, Mme LOPEZ et M. BUFFET

Remplacer les mots :

au décès du maire

par les mots :

à des décès ou des démissions résultant de l'application de la loi organique n° 2014-125 du 14 février 2014 interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur

OBJET

La proposition de loi telle que rédigée est restrictive puisqu'elle ne vise que le décès du maire.

Or, il semble important d'en élargir la portée afin de permettre le remplacement de conseillers municipaux en cas de décès ou de démission rendue obligatoire par la loi. En effet, le conseiller municipal est tout autant concerné par cette loi puisque son décès impliquerait lui aussi le renouvellement complet du conseil municipal.

De plus, il existe des cas où la démission n'est pas volontaire et résulte d'une disposition légale sur le non cumul des mandats.


* 1 Article L. 270 du code électoral.

* 2

Toutefois, le conseil municipal est réputé complet si les seules vacances constatées sont la conséquence (article L. 2122-9 du code général des collectivités territoriales) soit de démissions données après que le maire a cessé ses fonctions et avant l'élection de son successeur, soit d'une décision de la juridiction administrative devenue définitive annulant l'élection de conseillers municipaux sans proclamation concomitante d'autres élus. En d'autres termes, seules les vacances antérieures à la démission d'un maire et l'impossibilité de faire appel au système de suivant de liste en cas de liste épuisée nécessitent de renouveler intégralement le conseil avant d'élire le maire.

* 3 Article L. 251 du code électoral.

* 4 Rapport n° 544 (2012-2013) de M. Alain Richard, fait au nom de la commission des lois, déposé le 24 avril 2013 sur la proposition de loi tendant à assurer une représentation juste et équilibrée des territoires au sein des conseils régionaux.

* 5 Article L. 337 du code électoral.

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