Rapport général n° 164 (2015-2016) de Mme Marie-France BEAUFILS , fait au nom de la commission des finances, déposé le 19 novembre 2015

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N° 164

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2015-2016

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 novembre 2015

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances pour 2016 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Albéric de MONTGOLFIER,

Sénateur,

Rapporteur général.

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES

ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES

( Seconde partie de la loi de finances )

ANNEXE N° 27

REMBOURSEMENT ET DÉGRÈVEMENTS

Rapporteure spéciale : Mme Marie-France BEAUFILS

(1) Cette commission est composée de : Mme Michèle André, présidente ; M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général ; Mme Marie-France Beaufils, MM. Yvon Collin, Vincent Delahaye, Mmes Fabienne Keller, Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. André Gattolin, Charles Guené, Francis Delattre, Georges Patient, Richard Yung, vice-présidents ; MM. Michel Berson, Philippe Dallier, Dominique de Legge, François Marc, secrétaires ; MM. Philippe Adnot, François Baroin, Éric Bocquet, Yannick Botrel, Jean-Claude Boulard, Michel Bouvard, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Carcenac, Jacques Chiron, Serge Dassault, Bernard Delcros, Éric Doligé, Philippe Dominati, Vincent Eblé, Thierry Foucaud, Jacques Genest, Didier Guillaume, Alain Houpert, Jean-François Husson, Roger Karoutchi, Bernard Lalande, Marc Laménie, Nuihau Laurey, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Hervé Marseille, François Patriat, Daniel Raoul, Claude Raynal, Jean-Claude Requier, Maurice Vincent, Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 3096, 3110 à 3117 et T.A. 602

Sénat : 163 et 165 à 170 (2015-2016)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEURE SPÉCIALE

1. Votre rapporteure spéciale s'inquiète des conséquences de la mise en place du crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) pour les services fiscaux ; elle se traduit par une hausse significative des demandes de restitution d'impôts sur les sociétés, dans un contexte de diminution des effectifs.

2. En 2016, 100,2 milliards d'euros de crédits sont demandés au titre de la mission « Remboursements et dégrèvements ». Ce montant est quasiment stable (hausse de 0,69 %) par rapport au montant inscrit dans la loi de finances initiale pour 2015.

3. Votre rapporteure spéciale réitère sa préoccupation de voir la révision des valeurs locatives des locaux d'habitation véritablement lancée . Au-delà des effets qu'elle aura en matière de justice fiscale et de justice entre collectivités, en permettant de disposer de potentiels fiscaux plus fiables, cette révision pourrait avoir des effets très importants sur les dégrèvements d'impôts locaux, s'il elle devait se traduire par une baisse relative de la valeur locative des logements des ménages de condition modeste.

4. Le CICE constitue une dépense fiscale extrêmement coûteuse alors même qu'un large consensus s'était formé ces dernières années pour réduire le coût de ces « niches ». Son évolution paraît difficile à anticiper . Votre rapporteure spéciale s'inquiète de l'augmentation de la créance constituée sur l'État, qui devrait atteindre plus de 20 milliards d'euros en 2017 .

5. La présentation du dispositif, et son intitulé, ne paraissent pas correspondre à la réalité de son fonctionnement . En effet, le CICE n'est pas concentré sur les entreprises qui sont effectivement soumises à la concurrence internationale, c'est-à-dire celles qui exportent. Votre rapporteure spéciale s'interroge sur l'intérêt de maintenir un tel dispositif d'autant que les allègements de cotisations sociales déjà en oeuvre depuis 1993 ont été confirmés, ainsi que le crédit d'impôt recherche (CIR), sans que l'impact sur l'emploi et l'investissement dans les entreprises ne soit significatif.

6. L'efficacité du CICE sur l'investissement et les emplois reste à démontrer , d'autant plus qu'il bénéficie principalement à des entreprises qui ne sont quasiment pas soumises à la concurrence internationale. Dans les grandes entreprises, il est demandé et géré par la direction des affaires financières , sans que la direction des ressources humaines ne semble fortement associée aux « gains » qui découlent de cette niche fiscale. Dans les petites entreprises, le montant de CICE accordé est faible (en corrélation avec la masse salariale de l'entreprise) et n'est pas toujours perçu de façon très claire par le chef d'entreprise.

7. L'importance du préfinancement du CICE laisse penser que les questions de trésorerie sont fondamentales , en particulier au sein des petites entreprises, notamment en raison de la frilosité de bon nombre d'établissements bancaires. Mais le CICE n'a pas été conçu pour répondre à ce problème, et votre rapporteure spéciale considère qu'il semblerait plus judicieux de créer un dispositif ad hoc , en relation avec le secteur bancaire .

A la date du 10 octobre, date limite prévue par la LOLF pour l'envoi des réponses au questionnaire budgétaire, votre rapporteure spéciale avait reçu 87 % des réponses .

PREMIÈRE PARTIE LES CRÉDITS DE LA MISSION « REMBOURSEMENTS ET DÉGRÈVEMENTS »

I. LES REMBOURSEMENTS ET DÉGRÈVEMENTS EN 2016

A. UNE MESURE DE LA PERFORMANCE PEU PERTINENTE

L'unique objectif de la mission est de « permettre aux usagers de bénéficier de leurs droits le plus rapidement possible ». Il est mesuré à travers plusieurs indicateurs retraçant la réactivité de l'administration fiscale en matière de remboursement d'impôts et de traitement du contentieux .

Évolution de la performance entre 2011 et 2014

Programme 200 - Indicateur 1.1

(en pourcentage)

Programme 200 - Indicateur 1.2

(en nombre de jours)

Programme 200 - Indicateur 1.3

(en pourcentage)

Programme 201 - Indicateur 1.1

(en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

Comme le montrent les graphiques ci-dessus, les objectifs des quatre indicateurs sont plus que respectés, pratiquement chaque année, ce qui illustre avant tout le manque d'ambition de ces indicateurs , comme l'a à plusieurs reprises souligné votre rapporteure spéciale. Certes, les deux derniers indicateurs voient leur cible augmenter, mais il s'agit uniquement d'une hausse de 0,3 point de pourcentage.

De plus, les indicateurs liés au contentieux sont fragiles , dans la mesure où ils excluent les recours gracieux et portent donc le risque de conduire à une priorisation des premiers sur les seconds.

Enfin, votre rapporteure spéciale s'inquiète des conséquences de la mise en place du crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) pour les services fiscaux : 560 000 nouvelles déclarations ont été déposées auprès de la direction générale des finances publiques (DGFiP), dans un contexte de diminution des effectifs. Dès lors, le taux de demandes de restitutions d'impôts sur les sociétés remboursées dans un délai inférieur ou égal à trente jours est passé de 95,53 % en 2013 à 85,04 % en 2014 sans que cela ne puisse être imputé aux personnels.

B. APERÇU GÉNÉRAL DES CRÉDITS DE LA MISSION

Pour 2016, 100,2 milliards d'euros de crédits sont demandés au titre de la mission « Remboursements et dégrèvements » . Ce montant est quasiment stable (hausse de 0,69 %) par rapport au montant inscrit dans la loi de finances initiale pour 2015.

Évolution des crédits de la mission

(en millions d'euros)

Exécution 2014

LFI 2015

PLF 2016

Écart PLF 2016 à LFI 2015

200 - Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État

84 625

87 830

88 194

364

0,41%

11 - Remboursement et restitutions liés à la mécanique de l'impôt

62 394

63 478

64 217

739

1,16%

12 - Remboursements et dégrèvements liés à des politiques publiques

11 596

12 615

11 849

- 766

- 6,08%

13 - Remboursements et dégrèvements liés à la gestion des produits de l'État

10 635

11 737

12 129

392

3,34%

201 - Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux

11 502

11 645

11 970

325

2,79%

01 - Taxe professionnelle et contribution économique territoriale

6 480

6 361

6 450

89

1,40%

02 - Taxes foncières

985

930

1 070

140

15,05%

03 - Taxe d'habitation

3 556

3 909

3 969

60

1,53%

04 - Admission en non-valeur d'impôts locaux

481

445

481

36

8,09%

Total mission

96 127

99 475

100 164

689

0,69%

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

On rappellera qu'en application de l'article 10 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) 1 ( * ) , « les crédits relatifs aux charges de la dette de l'État, aux remboursements, restitutions et dégrèvements et à la mise en jeu des garanties accordées par l'État ont un caractère évaluatif ».

Les remboursements et dégrèvements devraient représenter, en 2016, 26 % des recettes fiscales brutes .

Évolution des remboursements et dégrèvements depuis 2001,
en valeur absolue et en proportion des recettes fiscales brutes

(échelle de gauche : en millions d'euros ; échelle de droite : en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat à partir des réponses au questionnaire budgétaire

N.B. : les montants indiqués correspondent aux dépenses effectivement effectuées pour les années 2001 à 2014 ; les crédits sont évaluatifs pour les années 2015 et 2016.

On observe une relative stabilité des dégrèvements d'impôts locaux depuis 2011.

Les remboursements et dégrèvements d'impôts d'État devraient diminuer de 3,2 % (- 2,9 milliards d'euros) après plusieurs années de hausse de 22 % entre 2013 et 2015 (+ 16,5 milliards d'euros).

II. LE PROGRAMME 200 « REMBOURSEMENTS ET DÉGRÈVEMENTS D'IMPÔTS D'ÉTAT »

A. UNE BAISSE PRÉVISIONNELLE DE 2,9 MILLIARDS D'EUROS EN 2016, PRINCIPALEMENT LIÉE À LA HAUSSE ATTENDUE DU BÉNÉFICE FISCAL ET À LA SUPPRESSION DE LA PRIME POUR L'EMPLOI (PPE)

Le programme 200 « Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État » devrait s'élever à 88,2 milliards d'euros en 2016 , en baisse par rapport à la prévision révisée pour 2015 de 91,1 milliards d'euros.

Cette baisse prévisionnelle de 2,9 milliards d'euros (- 3,2 %) fait suite à deux années consécutives ayant vu une importante augmentation des crédits alloués au programme.

À cet égard, il faut noter que la hausse entre 2014 et 2015 devrait être encore supérieure à celle d'abord anticipée puisque la prévision révisée pour 2015 est supérieure d'environ 3,3 milliards d'euros (+ 3,7 %) à l'estimation de la loi de finances initiale pour 2015.

Évolution des crédits du programme 200 de 2012 à 2016

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

La nomenclature du programme 200
« Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État »

Le programme 200 est composé de trois actions .

L'action 11 , de loin la plus lourde en termes budgétaires (73 % des crédits du programme), récapitule les remboursements et restitutions liés à la mécanique de l'impôt, soit, pour l'essentiel, les remboursements de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et les restitutions d'excédents de versement d'acomptes d'impôt sur les sociétés (IS).

Les actions 12 et 13 , de taille comparable (respectivement 13 % et 14 % des crédits du programme), concernent pour l'une les remboursements et dégrèvements liés à des politiques publiques (crédits d'impôt) et pour l'autre les remboursements et dégrèvements liés à la gestion des produits de l'État . Cette dernière catégorie est très hétérogène : elle agrège dégrèvements et annulations prononcés après le calcul de l'impôt sur le revenu, droits dégrevés dans le cadre des contentieux dits « Précompte » et « OPCVM « , les rectifications suite à erreur d'imputation des opérations d'enregistrement...

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Part relative des actions 11, 12 et 13 au sein du programme 200
« Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État »

(en %)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

La baisse attendue en 2016 est principalement portée par deux sous-actions : la sous-action 01 de l'action 11, qui retrace les restitutions d'excédents de versement d'acomptes d'impôt sur les sociétés (IS) et la sous-action 01 de l'action 12, qui concerne la restitution de la prime pour l'emploi .

Décomposition de l'évolution des crédits du programme 200
entre les différentes actions de 2015 (estimation révisée) à 2016

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Évolution des crédits du programme 200 de 2012 à 2016, par action et sous-action

(en millions d'euros et en %)

2012

2013

2014

2015 (prévu)

2015 (révisé)

2016 (prévu)

Évolution 2015 LFI/révisé

Évolution 2016/2015

Action 11 : mécanique de l'impôt

61800

57868

62395

63478

66054

64217

2576

4,1%

-1837

-2,8%

IS

12097

10554

14523

14734

16831

14944

2097

14,2%

-1887

-11,2%

TVA

49260

47008

47607

48509

49032

49108

523

1,1%

76

0,2%

"Bouclier fiscal"

443

177

19

0

8

0

8

s.o.

-8

-100,0%

Autres

0

129

246

235

183

165

-52

-22,1%

-18

-9,8%

Action 12 : politiques publiques

7592

6515

11597

12615

13296

11849

681

5,4%

-1447

-10,9%

PPE

2222

1882

1951

1838

1934

55

96

5,2%

-1879

-97,2%

IR

1794

1459

2108

2158

2312

2123

154

7,1%

-189

-8,2%

IS

2244

1894

6267

7500

7816

8399

316

4,2%

583

7,5%

TIPP

825

787

760

599

714

755

115

19,2%

41

5,7%

TICGN

4

3

3

3

3

3

0

0,0%

0

0,0%

CAP

503

490

508

517

517

514

0

0,0%

-3

-0,6%

Action 13 : gestion des produits de l'Etat

9703

12827

10638

11737

11752

12129

15

0,1%

377

3,2%

IR

2015

2320

2106

2360

2190

2207

-170

-7,2%

17

0,8%

IS

1071

1145

1187

950

1184

1324

234

24,6%

140

11,8%

Autres impôts directs

654

2967

1527

2354

2335

2515

-19

-0,8%

180

7,7%

TVA

2002

2300

1972

2150

2082

2082

-68

-3,2%

0

0,0%

Enregistrement, timbre, autres taxes indirectes

656

675

403

456

403

403

-53

-11,6%

0

0,0%

Autres

938

578

702

620

702

702

82

13,2%

0

0,0%

Admissions en non-valeur et créances liées aux impôts

2146

1970

2296

2107

2259

2259

152

7,2%

0

0,0%

Dations en paiement, intérêts moratoires, remises de débets

221

872

445

740

597

637

-143

-19,3%

40

6,7%

Total général

79095

77210

84630

87830

91102

88195

3272

3,7%

-2907

-3,2%

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

En effet, l'augmentation anticipée du bénéfice fiscal des entreprises entre 2014 et 2015 s'élève à près de 10 % en raison de la reprise de la croissance 2 ( * ) : aussi, les quatre premiers acomptes versés par les entreprises en 2016 (au titre des revenus 2015) devraient dans l'ensemble être inférieurs au total de l'impôt dû et donner lieu à moins de restitutions .

La baisse drastique des remboursements liés à la prime pour l'emploi (PPE) , qui devrait diminuer de 97,2 % entre 2015 et 2016, est simplement le résultat de la suppression du dispositif , à compter de 2016, par la seconde loi de finances rectificative pour 2014 3 ( * ) . Des remboursements résiduels sont prévus à hauteur de 55 millions d'euros en 2016 .

Votre rapporteure spéciale souligne à ce titre que l'imposition du revenu des ménages a connu, depuis le début du quinquennat, de nombreuses évolutions dont la multiplicité ne contribue pas à la lisibilité . Ainsi, le barème de l'impôt sur le revenu a d'abord été « gelé » , sans tenir compte de l'inflation plusieurs années.

L'absence de revalorisation du barème de l'IR contribue à alourdir l'imposition des ménages à travers deux canaux qui peuvent voir leurs effets se cumuler : d'une part, les contribuables dont le revenu nominal n'a pas crû plus vite que l'inflation connaissent une augmentation de l'impôt , alors même que leur revenu réel demeure inchangé. Le cas échéant, certains contribuables peuvent se retrouver assujettis à l'IR alors qu'ils ne l'étaient pas l'année précédente. Le gel du barème a mécaniquement conduit à rendre imposables des foyers qui ne l'étaient pas et n'auraient pas dû le devenir si l'évolution de l'indice des prix avait été pris en compte. Le ministère du budget indique d'ailleurs qu'un million de ménages sont entrés dans l'impôt sur le revenu en 2013 .

Nombre de ménages entrant et sortant de l'imposition sur le revenu
de 2013 à 2015

(en millions et en %)

2013

2014

2015

Foyers entrants dans l'IR

2,62

1,68

1,53

7,20%

4,60%

4,10%

Foyers sortants de l'IR

1,58

2,9

2,1

4,30%

7,90%

5,70%

Solde net

1,04

-1,22

-0,57

% des foyers fiscaux

2,90%

-3,30%

-1,60%

Source : commission des finances, d'après les réponses du ministère du budget au questionnaire budgétaire

D'autre part, de nombreux régimes dérogatoires en matière d'impôt sur le revenu, de fiscalité locale ou de contributions sociales, sont indexés sur la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu : si cette limite s'abaisse en termes réels, à revenu égal, moins de ménages ont accès à ces dispositifs favorables.

Le Gouvernement a ensuite procédé à une réduction exceptionnelle de l'impôt sur le revenu d'un milliard d'euros en 2014 et annoncé la sortie de 1,8 million de ménages de l'impôt sur le revenu 4 ( * ) . Force est de constater qu'en réalité, à peine 1,2 million de ménages sont sortis de l'IR en 2014 (solde des entrées et des sorties). Le nombre de foyers fiscaux redevables de l'IR a augmenté de façon significative ces dernières années , passant de 17,2 millions en 2011 à 19,1 millions en 2013, soit 52 % des contribuables .

En loi de finances pour 2015 , le Gouvernement a supprimé la première « tranche » taxé à 5,5 % de l'impôt sur le revenu et a aménagé la décote tout en abaissant le seuil d'entrée dans la nouvelle « première tranche » à 14 %. Enfin, la prime pour l'emploi a été supprimée en deuxième loi de finances rectificative pour 2014 .

Si votre rapporteure spéciale se félicite de l'attention portée aux ménages dont les revenus sont modestes , qui avaient particulièrement souffert du « gel » du barème mis en place sous la précédente majorité gouvernementale et maintenu au début du quinquennat de François Hollande, elle ne peut que constater que ces réformes successives, dont les objectifs semblent parfois contradictoires et dont les effets ne sont pas encore bien mesurés, ne contribuent pas à la clarté de la loi fiscale .

B. UN DYNAMISME IMPRÉVU DU CICE EN 2015 QUI EXPLIQUE LARGEMENT LA RÉVISION À LA HAUSSE INTERVENUE ENTRE LA LOI DE FINANCES INITIALE 2015 ET LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2016

Comme signalé précédemment, le programme 200 a été réévalué à la hausse entre la loi de finances initiale pour 2015 et le projet de loi de finances pour 2016 , à hauteur de 3,3 milliards d'euros .

Évolution des crédits 2015 du programme 200 entre la prévision associée
à la loi de finances initiale pour 2015 et la prévision révisée

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Cette hausse provient principalement de l'action 11 et plus précisément de la sous-action 11-01 qui retrace, pour l'IS, les restitutions d'excédents d'acomptes liés à la mécanique de l'impôt. D'après les documents budgétaires, l'augmentation « sensible » entre 2014 et 2015 (+ 2,3 milliards d'euros) s'explique principalement par le dynamisme des imputations de créances de crédit d'impôt en faveur de la compétitivité et de l'emploi (CICE).

Évolution des sous-actions de l'action 11

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

L'ampleur de ce crédit d'impôt et les difficultés rencontrées par le Gouvernement pour prévoir son évolution, déjà soulignées par votre rapporteure spéciale, l'ont conduite à mener en 2015 un contrôle sur ses bénéficiaires. Bien que ce contrôle ait vocation à être poursuivi en 2016, votre rapporteure spéciale a pensé utile de présenter ses premières observations (cf. seconde partie du présent rapport).

III. LE PROGRAMME 201 « REMBOURSEMENTS ET DÉGRÈVEMENTS D'IMPÔTS LOCAUX »

En 2016, les crédits demandés au titre des remboursements et dégrèvements d'impôts locaux s'élèvent à 11,97 milliards d'euros, en hausse de 2,8 %, soit + 325 millions d'euros, par rapport à la loi de finances initiale pour 2015 .

Si l'on compare avec la prévision révisée, les crédits augmentent d'un montant comparable (+ 2,5 % correspondant à une hausse de 289 millions d'euros).

Contrairement aux années précédentes, cette hausse ne s'explique pas par l'évolution des dégrèvements d'impôts économiques, mais essentiellement par l'augmentation des dégrèvements de taxe d'habitation (TH) et de taxes foncières.

L'actualisation des prévisions pour 2015 se limite à une augmentation de 36 millions d'euros, inférieure à celle de l'année passée (142 millions d'euros) et qui tranche avec les chiffres observés certaines années (1,1 milliard d'euros en 2012).

Évolution des crédits du programme 201
« Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux »

(en millions d'euros)

Exécution 2014

LFI 2015

2015 (prévision actualisée)

PLF 2016

Variation PLF 2016 à LFI 2015

Variation PLF 2016 par rapport à la prévision 2015

01 - Taxe professionnelle et contribution économique territoriale

6 480

6 361

6 386

6 450

+ 89

+ 1,4%

+ 64

+ 1,0%

02 - Taxes foncières

985

930

1 020

1 070

+ 140

+ 15,1%

+ 50

+ 4,9%

03 - Taxe d'habitation

3 556

3 909

3 794

3 969

+ 60

+ 1,5%

+ 175

+ 4,6%

04 - Admission en non-valeur d'impôts locaux

481

445

481

481

+ 36

+ 8,1%

-

-

TOTAL

11 502

11 645

11 681

11 970

+ 325

+ 2,8%

+ 289

+ 2,5%

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

A. LES ALLÈGEMENTS DE « TAXES MÉNAGES » : AIDER LES MÉNAGES LES PLUS FRAGILES TOUT EN GARANTISSANT LES RESSOURCES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

1. Des dispositifs d'allègement de taxe d'habitation et de taxes foncières, notamment pour les ménages modestes
a) Les dégrèvements de taxe d'habitation

Les deux principaux dispositifs d'allègements de taxe d'habitation en fonction du revenu sont le plafonnement du montant de taxe d'habitation à 3,44 % du revenu fiscal de référence 5 ( * ) , dont ont bénéficié 9 millions de contribuables en 2014, et l'exonération de taxe d'habitation pour les ménages de condition modeste 6 ( * ) , dont ont bénéficié 3,7 millions de contribuables.

Le plafonnement de taxe d'habitation à 3,44 % du revenu est un dégrèvement et son coût est pris en charge par l'État , à ce titre, dans les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements », à hauteur de 3,36 milliards d'euros cette année . L'exonération est quant à elle compensée aux collectivités territoriales à travers un prélèvement sur les recettes de l'État, l'allocation compensatrice de l'exonération de taxe d'habitation pour les personnes de condition modeste, qui atteint cette année 1,16 milliard d'euros.

L'allocation compensatrice de l'exonération de taxe d'habitation pour les personnes de condition modeste

S'agissant de l'exonération de taxe d'habitation des personnes de condition modeste, l'allocation compensatrice versée aux collectivités territoriales est calculée sur la base de taux de référence figés, celui de l'année 1991 en l'occurrence. Par conséquent, chaque année, les collectivités territoriales ayant augmenté le taux de taxe d'habitation par rapport à 1991, ne sont pas intégralement compensées par l'État de la perte de recettes due à cette exonération.

Cette allocation compensatrice ne fait pas partie des variables d'ajustement permettant de financer la hausse de la péréquation verticale.

Le plafonnement de la TH en fonction du revenu représente à lui seul 85 % des crédits de l'action 03 « Taxe d'habitation » et 28 % du programme 201 « Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux » .

Évolution des crédits de l'action 03 « Taxe d'habitation »

(en millions d'euros)

2012 (exécution)

2013
(exécution)

2014
(exécution)

2015
(prévision)

2016 (prévision)

Gestionnaires de foyers
(article 1414 II du CGI)

34

40

41

49

51

RMI (article 1414 III du CGI)

0

S.O.

S.O.

S.O.

S.O

Plafonnement en fonction du revenu (article 1414 A du CGI)

2 844

2 941

2 906

3 228

3 359

Cotisation inférieure à 12 euros

2

2

2

2

2

Logements vacants

7

19

19

20

20

Dégrèvement personnes de condition modeste relogées (programme Agence pour la rénovation urbaine)

29

32

33

36

38

Autres dégrèvements

448

454

555

459

499

Total action

3 364

3 488

3 556

3 794

3 969

Source : commission des finances du Sénat à partir des réponses du ministère du budget au questionnaire budgétaire

Les crédits de l'action 03 « Taxe d'habitation » sont évalués à 3,97 milliards d'euros en 2016, contre 3,91 milliards d'euros inscrits en loi de finances pour 2015, soit une légère progression de 1,5 % .

La variation par rapport à l'estimation 2015 révisée (3,79 milliards d'euros) est en revanche de 4,6 % (+ 175 millions d'euros), mais demeure inférieure à celle de l'an passé (+ 5,9 %). Cette augmentation s'explique principalement par l'augmentation (+ 131 millions d'euros) du plafonnement en fonction des revenus. Parallèlement, on observe, hors du périmètre de la mission « Remboursements et dégrèvements », une diminution (- 293 millions d'euros) des exonérations de TH. On peut en déduire un basculement de certains contribuables de l'exonération vers le plafonnement, soit le mouvement inverse à celui observé en 2014, qui explique l'augmentation des crédits .

b) Les dégrèvements de taxes foncières

Les dégrèvements de taxe foncière augmentent de 15,1 % par rapport à la loi de finances pour 2015 (+ 140 millions d'euros) ; toutefois, cette augmentation n'est que de 4,9 % (+ 50 millions d'euros) par rapport à la prévision 2015 actualisée, soit une hausse comparable à celle de l'an dernier (+ 4,5 %).

Évolution de l'action 02 « Taxes foncières »

(en millions d'euros)

2012 (exécution)

2013 (exécution)

2014 (exécution)

2015 (prévision)

2016 (prévision

Personnes de 65-75 ans de condition modeste

70

70

70

70

70

Pertes de récoltes

13

18

14

14

15

Jeunes agriculteurs

11

10

9

9

9

Travaux dans le cadre de la prévention des risques technologiques (TFPB)

3

1

1

1

N.C.

Travaux d'économie d'énergie, pour les organismes HLM et les SEM (TFPB)

77

70

70

100

150

Personnes de condition modeste, en fonction de leur revenu

1

3

3

3

3

Accessibilité pour personnes handicapées (TFPB)

N.C.

N.C.

29

N.C.

N.C.

Association foncière pastorale (TFPNB)

N.C.

å

å

å

å

Cotisation inférieure à 12 euros

12

12

12

12

12

Autres dégrèvements

652

660

777

811

809

TOTAL

839

844

985

1 020

1 068

N.C. : non chiffré

Source : commission des finances du Sénat à partir des réponses du ministère du budget au questionnaire budgétaire

Comme en 2014 et en 2015, cette augmentation résulte uniquement du dégrèvement égal au quart des dépenses de travaux d'économie d'énergie, sur la cotisation de taxe foncière sur les propriétés bâties pour les organismes HLM et les sociétés d'économie mixte (SEM). Estimé à 100 millions d'euros en 2014 et 2015, ce dégrèvement aurait un coût de 150 millions d'euros en 2016.

c) Une hausse du contentieux sur les « taxes ménages »

Le projet annuel de performances de la mission pour l'année 2016 indique une hausse du contentieux tant sur la taxe d'habitation (+ 3,2%) que sur les taxes foncières (+ 4,6 %), sans qu'elle soit compensée par une baisse des demandes gracieuses.

Peut-être faut-il y voir une plus grande vigilance des collectivités territoriales sur l'évolution de leurs bases fiscales , dans le contexte de la forte diminution des concours de l'État (- 11 milliards d'euros entre 2015 et 2017).

2. L'indispensable révision des valeurs locatives des locaux d'habitation

La révision des valeurs locatives des locaux d'habitation a été amorcée par l'article 74 de la loi n° 2013-1279 du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour 2013, qui reprend la méthodologie utilisée pour la révision des valeurs locatives des locaux professionnels et prévoit notamment une expérimentation.

Celle-ci a été menée de février à juin derniers, dans les départements de la Charente-Maritime, du Nord, de l'Orne, de Paris et du Val-de-Marne.

Cette expérimentation doit faire l'objet d'un rapport au Parlement, qui aurait dû être remis au 30 septembre dernier.

Votre rapporteure spéciale réitère sa préoccupation de voir cette réforme véritablement lancée . Au-delà des effets qu'elle aura en matière de justice fiscale et de justice entre collectivités, en permettant de disposer de potentiels fiscaux plus fiables, la révision des valeurs locatives des locaux d'habitation pourrait avoir des effets très importants sur les dégrèvements d'impôts locaux , si elle devait se traduire par une baisse relative de la valeur locative des logements des ménages de condition modeste.

B. UNE HAUSSE MODÉRÉE DES DÉGRÈVEMENTS D'IMPÔTS ÉCONOMIQUES

1. L'impact résiduel des dégrèvements liés à la réforme de la taxe professionnelle

La réforme de la taxe professionnelle a permis de diminuer la part des impôts locaux dits « économiques » prise en charge par l'État plutôt que par les entreprises, comme le rappelle le graphique ci-dessous.

Évolution depuis 2007 des montants de dégrèvements
des différents impôts locaux

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des réponses du ministère du budget au questionnaire budgétaire

Par ailleurs, l'action 01 « Taxe professionnelle et contribution économique territoriale et autres impôts économiques créés ou modifiés dans le cadre de la réforme de la taxe professionnelle » continue à porter une sous-action concernant la réforme de la taxe professionnelle : le dégrèvement transitoire. Celui-ci concernait les entreprises subissant une hausse significative de leurs cotisations liée à la réforme de la taxe professionnelle. En revanche, le plafonnement de la taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée ne produit plus d'effet depuis 2015.

Ainsi, les dégrèvements liés à la taxe professionnelle ne représentent plus que 0,16 % de l'action en 2016, contre encore 9,1 % en 2012 .

2. Une légère hausse des dégrèvements de CVAE en 2015

Les remboursements et dégrèvements d'impôts « économiques » sont estimés à 6,45 milliards d'euros en 2016, soit une légère hausse (+ 1,0 %) par rapport la prévision révisée pour 2015.

Évolution des dégrèvements d'impôts économiques

(en millions d'euros)

2012 (exécution)

2013 (exécution)

2014 (exécution)

2015 (prévision)

2016 (prévision)

Plafonnement TP/VA

272

143

12

0

0

Plafonnement CET/VA

937

868

1 068

1 037

1 033

Crédit impôt zones de restructuration défense

1

1

0

0

0

Dégrèvement barémique CVAE

3 696

3 687

3 962

3 978

4 080

Restitution CVAE

759

1 190

807

750

725

Dégrèvement transitoire

350

182

92

46

10

Autres motifs

814

797

539

575

602

TOTAL

6 829

6 868

6 480

6 386

6 450

Source : commission des finances du Sénat à partir des réponses au questionnaire budgétaire

L'augmentation des crédits est due à la prévision d'une hausse du dégrèvement barémique .

On notera que cette hausse du dégrèvement barémique n'implique pas forcément une hausse du produit mis en répartition, comme le montre le tableau ci-dessous. Ainsi, en 2014, le produit de CVAE a diminué de 2,5 %, ce qui n'a pas empêché le dégrèvement barémique d'augmenter de 2 %.

Évolution du produit de CVAE et du dégrèvement barémique

(en millions d'euros)

2011

2012

2013

2014

2015

CVAE répartie en année N

14 694

15 182

16 322

15 916

16 625

dont dégrèvement barémique

3 588

3 437

3 750

3 825

3 903

Source : commission des finances du Sénat à partir des réponses au questionnaire budgétaire

La question de la comptabilisation des restitutions de CVAE

Les restitutions de CVAE ne constituent pas un dégrèvement : si la liquidation définitive de la CVAE fait apparaître des acomptes versés supérieurs à la cotisation effectivement due, l'excédent est restitué. Si la restitution est comptabilisée au titre des remboursements et dégrèvements d'impôts locaux, il s'agit en fait d'un versement à destination des entreprises.

SECONDE PARTIE - LE CRÉDIT D'IMPÔT COMPÉTITIVITÉ EMPLOI (CICE)

I. LE CICE : UN DISPOSITIF COÛTEUX ET DIFFICILE À PILOTER

A. UN CRÉDIT D'IMPÔT DESTINÉ AUX ENTREPRISES, ASSIS SUR LA MASSE SALARIALE INFÉRIEURE À 2,5 FOIS LE SMIC

Par amendement gouvernemental, la troisième loi de finances rectificative pour 2012 7 ( * ) a prévu la création du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE). En vigueur depuis le 1 er janvier 2013, le CICE prend la forme d'une réduction de l'impôt à acquitter en année n au titre de l'exercice n-1. Codifié à l'article 244 quater C du code général des impôts, le CICE est un avantage fiscal qui concerne les entreprises employant des salariés, soumises à un régime réel d'imposition (ce qui exclut les micro-entreprises et les auto-entrepreneurs), quels que soient leur forme et le régime d'imposition de leur résultat, qu'il s'agisse de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés.

L'assiette de ce crédit d'impôt est constituée par les rémunérations brutes soumises aux cotisations sociales (masse salariale), versées par les entreprises dans la limite de 2,5 fois le salaire minimum en vigueur (smic). Son taux, qui était de 4 % des rémunérations versées au titre de l'année 2013 qui a vu le lancement du CICE, est passé à 6 % à partir du 1 er janvier 2014.

Selon les dispositions des articles 199 ter C et 220 C du code général des impôts, le CICE est imputé sur l'impôt sur le revenu ou l'impôt sur les sociétés dû par le contribuable au titre de l'année au cours de laquelle les rémunérations prises en compte pour le calcul du crédit d'impôt ont été versées. La partie n'ayant pas trouvé à s'imputer est utilisée pour le paiement de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés dû au titre des trois années suivant celle au titre de laquelle elle est constatée, puis, s'il y a lieu, la fraction non utilisée est remboursée à l'expiration de cette période.

La créance de CICE est néanmoins remboursable l'année même de sa constitution dans certains cas : les PME au sens de la réglementation communautaire, les entreprises nouvelles 8 ( * ) répondant à certaines conditions, les jeunes entreprises innovantes (JEI) et les entreprises faisant l'objet d'une procédure de conciliation ou de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire 9 ( * ) .

La liquidation de l'impôt sur les sociétés

L'impôt sur les sociétés (IS) est liquidé de la manière suivante :

- étape 1 : l'IS brut au titre de l'exercice est calculé (il faut totaliser les montants de l'IS au taux normal, de l'IS à taux réduit, de l'impôt sur les plus-values nettes et de l'IS à un taux particulier) ;

- étape 2 : les créances fiscales de l'exercice qui sont imputables et non restituables au titre de l'exercice sont imputées sur l'IS brut déterminé à l'étape 1 ;

- étape 3 : les créances fiscales de l'exercice qui sont reportables au titre de l'exercice sont imputées sur l'IS brut dû après imputation des créances non restituables déterminé à l'étape 2, le CICE faisant partie des créances fiscales qui sont reportables au titre de l'exercice ;

- étape 4 : les créances fiscales de l'exercice qui sont restituables sont imputées sur l'IS brut dû après imputation des créances reportables déterminé à l'étape 3 ;

- étape 5 : l'IS dû après imputation des créances restituables déterminées à l'étape 4 est comparé aux acomptes versés. Si l'IS dû excède les acomptes versés, la différence constitue le solde à payer. Dans le cas contraire, on constate un excèdent d'IS qui, en principe, donne lieu à une restitution.

Source : réponse du ministère du budget au questionnaire budgétaire

B. UNE DÉPENSE FISCALE TRÈS CONSÉQUENTE ET DONT L'ÉVOLUTION EST DIFFICILE À PRÉVOIR

1. Plus de 20 milliards d'euros de créance sur l'État en 2017

En 2017, la créance des entreprises sur l'État au titre du CICE devrait s'élever à plus de 20 milliards d'euros .

Évolution prévisionnelle de la créance de CICE constituée et consommée
de 2013 à 2017

(en milliards d'euros)

2013

2014

2015

2016

2017

Créances des entreprises vis-à-vis de l'État (au titre de l'année N)

10,6

16,3

17,7

19,5

20,3

Consommation de la créance 2013

6,5

0,8

0,0

3,1

Consommation de la créance 2014

9,2

1,2

0,0

Consommation de la créance 2015

10,0

1,3

Consommation de la créance 2016

11,0

Consommation de la créance 2017

Source : réponse du ministère du budget au questionnaire de la rapporteure spéciale

Le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi constitue donc manifestement une nouvelle dépense fiscale, exceptionnellement coûteuse, alors qu'un large consensus s'était formé ces dernières années pour réduire le coût des « niches ».

L'enjeu budgétaire exige que le CICE soit évalué sous l'angle de son efficacité . S'il s'agit des premières années de mise en place du dispositif, et qu'il est donc difficile, à ce stade, de faire un bilan détaillé, plusieurs points d'interrogation peuvent en revanche être soulevés quant à la logique même de cette dépense fiscale.

2. Une évolution difficile à prévoir

Le montant de la créance fiscale au titre de l'année n constitue une extrapolation pour l'année n+1 de la créance constatée début septembre dans les données fiscales . Les prévisions de créance pour les années suivantes s'appuient sur cette extrapolation, sur la créance potentielle recalculée par l'ACOSS et sur des hypothèses d'évolution de la masse salariale. Ces hypothèses sont soumises à de fortes incertitudes, lesquelles augmentent avec l'horizon de prévision.

Ainsi, la créance a été sous-consommée en 2014, sans que l'administration ne puisse en établir clairement la raison. A l'inverse, le CICE a été plus fortement mobilisé que prévu par les entreprises en 2015 et son montant a dû être révisé à la hausse. Ces difficultés de prévision paraissent inhérentes au choix d'une dépense fiscale complexe, qui dépend des décisions d'optimisation des entreprises, et dont les bénéficiaires ne sont pas ciblés.

II. DES BÉNÉFICIAIRES EFFECTIFS QUI NE CORRESPONDENT PAS AUX OBJECTIFS AFFICHÉS DU DISPOSITIF, UN EFFET AU MIEUX INCERTAIN SUR LA COMPÉTITIVITÉ ET L'EMPLOI

A. LE CICE BÉNÉFICIE MAJORITAIREMENT À DES ENTREPRISES QUI NE SONT PAS SOUMISES À LA CONCURRENCE INTERNATIONALE

D'après l'exposé des motifs accompagnant l'amendement gouvernemental prévoyant la création du CICE, « le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) (...) répond pleinement à la problématique de la compétitivité coût qui participe de la perte de compétitivité de notre pays . Il donnera aussi aux entreprises un ballon d'oxygène pour investir et innover, au service de leur compétitivité hors coût ».

Du point de vue de la compétitivité des entreprises, il faut tout d'abord noter que le CICE n'est pas, contrairement à ce que pourrait laisser supposer son intitulé, concentré sur les entreprises qui sont effectivement soumises à la concurrence internationale , c'est-à-dire celles qui exportent. Les bénéficiaires du CICE reflètent donc la diversité du tissu économique français, à la nuance près que les montants de CICE les plus élevés sont attribués aux entreprises pour lesquelles une part importante de la main-d'oeuvre est en-dessous du plafond de 2,5 SMIC . Or les entreprises exportatrices ont en moyenne des personnels plus qualifiés que les autres sociétés. En d'autres termes, l'absence totale de ciblage de la dépense fiscale conduit à ce qu'elle bénéficie majoritairement à des entreprises qui ne sont pas soumises à la concurrence internationale .

Répartition des gains du CICE entre entreprises en fonction de leur CA
réalisé à l'export, estimations 2013

Source: Comité de suivi des aides publiques aux entreprises, d'après INSEE, DADS 2011, ESANE 2010

Plusieurs interlocuteurs ont fait valoir l'importance de la compétitivité indirecte en matière d'exportations , c'est-à-dire la nécessité, pour les entreprises exportatrices, de bénéficier d'un tissu de sous-traitants industriels et de service bon marché. Sans nier cet effet, il s'agit de reconnaître que ce crédit d'impôt bénéficie largement à des secteurs qui n'ont pas, ou presque, de lien avec l'industrie . 65 % des entreprises industrielles françaises sont artisanales, et constituent souvent des sous-traitants pour les entreprises plus développées . L'argument de la compétitivité indirecte ne plaide donc pas pour le CICE, qui reste très modeste pour ces activités.

Répartition du CICE par secteur

(en %)

Source : réponse du ministère du budget au questionnaire de la rapporteure spéciale

Par ailleurs, il ressort de l'analyse du profil des bénéficiaires du CICE non par secteur, mais par localisation géographique que les régions les plus bénéficiaires sont également les régions les plus riches et cela se comprend aisément dans la mesure où ce sont elles qui ont le plus grand nombre d'entreprises et les plus faibles taux de chômage. Le CICE, outre qu'il ne paraît pas améliorer la compétitivité de l'économie, contribue également à accroître les inégalités sur les territoires en donnant plus à ceux qui ont déjà beaucoup .

La grande diversité des profils des bénéficiaires, ainsi que l'importance budgétaire du dispositif , ont conduit à faire peser une charge de gestion - mais aussi de promotion - importante sur l'administration fiscale. Comme votre rapporteure spéciale a eu l'occasion de le constater lors d'une visite sur place à la direction régionale des finances publiques d'Île-de-France, le travail préalable de vérification d'un dossier de demande de CICE est lourd et fait intervenir un grand nombre de logiciels, dont certains apparaissent d'ailleurs vétustes. Ses interlocuteurs ont expliqué les conditions tendues dans lesquelles le CICE a été mis en place : représentant une priorité politique absolue, il a pris le pas sur d'autres dispositifs ou d'autres missions, au détriment du bon fonctionnement des services . Si les années à venir devraient être plus apaisées, en raison de l'adaptation des services à cette nouvelle charge, les représentants syndicaux rencontrés ont cependant fait part de leur inquiétude relative aux conditions dans lesquelles les missions de recouvrement et de contrôle , missions privilégiées des administrations fiscales, sont effectuées et le seront à l'avenir. Les agents des finances publiques ont été formés à recouvrer des recettes, et non - ou pas principalement - à reverser des fonds aux entreprises.

En somme, la présentation du dispositif, et son intitulé, ne paraissent pas correspondre à la réalité de son fonctionnement . Il semble à votre rapporteure spéciale que l'impôt sur les sociétés est par nature un prélèvement sur les bénéfices, et non un instrument pour de réduction du coût de la masse salariale. Votre rapporteure spéciale s'interroge donc sur les raisons qui ont conduit à ce choix d'un crédit d'impôt. Un débat éclairé par les effets plus que mitigés, tant sur l'emploi que sur l'investissement, des baisses de charge intervenues dans le passé devrait permettre de revoir cette politique . En outre, la mécanique du crédit d'impôt est complexe et souvent peu lisible pour les petites entreprises , qui bénéficient parfois du CICE sans même le savoir - c'est alors le comptable qui s'est occupé d'en faire la demande. Il semble aussi intéressant de noter que le CICE peut se cumuler avec d'autres avantages sociaux et fiscaux (allégements de charges, crédit d'impôt recherche...) . L'absence de suivi d'un tel chevauchement, dont on peut imaginer qu'il concerne principalement de grandes entreprises, pose question.

B. L'EFFET DU CICE SUR LA COMPÉTITIVITÉ DES ENTREPRISES ET SUR L'EMPLOI RESTE À DÉMONTRER

Dans ce cadre, il paraît douteux que le CICE produise des effets tangibles sur la compétitivité, encore moins sur l'emploi : dans les grandes entreprises, il est demandé et géré par la direction des affaires financières, sans que la direction des ressources humaines ne semble fortement associée aux « gains » qui découlent de cette niche fiscale. Une procédure de consultation des représentants du personnel est prévue, mais le comité de suivi des aides publiques aux entreprises note qu'il s'agit d'un exercice « fréquemment formel et décevant » .

Dans les petites entreprises, le montant de CICE accordé est faible (en corrélation avec la masse salariale de l'entreprise) et pas toujours perçu de façon très claire par le chef d'entreprise. De façon générale, la situation financière tendue de nombre d'entreprises les conduit à considérer le CICE comme un ballon d'oxygène pour leur trésorerie plutôt que pour leurs employés, ce qui montre de nouveau, si besoin en était, qu'une politique mollement incitative, sans objectifs clairement définis, discutés avec les acteurs sociaux et le monde de l'entreprise, n'a aucune chance d'aboutir à une amélioration de l'emploi. Comme ses interlocuteurs venant du monde de l'entreprise l'ont souligné, le véritable frein à l'embauche ne relève pas des charges patronales mais d'une question de prospective de moyen voire long terme . Par conséquent, ce n'est pas une amélioration, mais bien au contraire une poursuite de la dégradation des chiffres du chômage qui a été constatée depuis la mise en place du CICE.

Évolution du taux de chômage au sens du BIT sur la période 2007-2015

(en %)

Source : INSEE

C. LA QUESTION DU PRÉFINANCEMENT

Si le CICE n'améliore pas, ou que de façon marginale, la situation de l'économie française, il connaît en revanche des usages qui témoignent des difficultés rencontrées par les entreprises, auxquelles il conviendrait d'apporter des réponses plus directes . Ainsi, l'importance du préfinancement du CICE laisse penser que les questions de trésorerie sont fondamentales, en particulier au sein des petites entreprises, notamment en raison de la frilosité de bon nombre d'établissements bancaires .

Mais le CICE n'a pas été conçu d'abord pour répondre à ce problème, et il semblerait plus judicieux de créer un dispositif ad hoc , que l'expertise et l'expérience de la BPI pourraient certainement aider à mettre en oeuvre, que de passer par cette procédure qui reste complexe et qui entraîne une charge tant pour les services fiscaux que pour les entreprises bénéficiant du préfinancement, qui doivent s'acquitter de frais de dossier .

*

* *

Les crédits de la mission ont été adoptés sans modification par l'Assemblée nationale .

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours d'une réunion tenue le mercredi 14 octobre 2015, sous la présidence de Mme Michèle André, présidente, la commission a procédé à l'examen du rapport de Mme Marie-France Beaufils, rapporteure spéciale, sur la mission « Remboursements et dégrèvements ».

Mme Marie-France Beaufils , rapporteure spéciale . - La mission « Remboursements et dégrèvements » présente deux spécificités.

D'une part, elle fait partie, avec la mission « Engagements financiers de l'État », des deux missions du budget de l'État dont les crédits sont évaluatifs et non limitatifs : en d'autres termes, les montants inscrits dans le projet annuel de performances correspondent davantage à une prévision qu'à un plafond. D'autre part, c'est la mission la plus lourde du budget de l'État : en 2016, 100,2 milliards d'euros de crédits sont demandés, montant quasiment stable par rapport aux crédits inscrits dans la loi de finances initiale pour 2015.

Ces deux caractéristiques doivent être prises en compte : le poids budgétaire de la mission s'explique par le fait qu'elle récapitule tous les grands enjeux de la première partie du projet de loi de finances et le caractère évaluatif des crédits conduit à prêter davantage attention à la logique des dispositifs fiscaux qui sont à l'origine des restitutions, au-delà du commentaire des évolutions prévisionnelles dont le caractère est incertain. En d'autres termes, il s'agit de s'attacher aux causes des prévisions plutôt qu'aux montants inscrits.

Je vous présenterai successivement les remboursements et dégrèvements d'impôts d'État puis d'impôts locaux, avant de dire quelques mots du contrôle budgétaire que j'ai commencé au sujet des bénéficiaires du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE).

Le programme 200 « Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État » devrait s'élever à 88,2 milliards d'euros en 2016, en baisse d'environ 3 milliards d'euros par rapport à la prévision révisée pour 2015. Cette baisse prévisionnelle de 3,2 %, soit 2,9 milliards d'euros, fait suite à deux années consécutives de forte augmentation des crédits alloués au programme. À cet égard, la hausse entre 2014 et 2015 devrait être encore supérieure à celle d'abord anticipée puisque la prévision révisée pour 2015 est supérieure d'environ 3,3 milliards d'euros à l'estimation de la loi de finances initiale pour 2015.

La baisse attendue en 2016 est principalement portée par deux grands ensembles : les restitutions d'excédents de versement d'acomptes d'impôt sur les sociétés d'une part et la restitution de la prime pour l'emploi d'autre part. En effet, l'augmentation anticipée du bénéfice fiscal des entreprises entre 2014 et 2015 s'élève à près de 10 % en raison de la reprise estimée de la croissance.

M. Serge Dassault . - Estimée !

Mme Marie-France Beaufils , rapporteure spéciale . - Oui, s'agissant du projet de loi de finances pour 2016, il s'agit forcément d'une estimation.

Du fait de cette augmentation du bénéfice fiscal, les premiers acomptes versés par les entreprises en 2016 - au titre des revenus 2015 - devraient dans l'ensemble être inférieurs au total de l'impôt dû et donner lieu à moins de restitutions.

La baisse drastique des remboursements liés à la prime pour l'emploi (PPE) est simplement le résultat de la suppression du dispositif, à compter de 2016, par la seconde loi de finances rectificative pour 2014. Des remboursements résiduels sont prévus à hauteur de 55 millions d'euros en 2016.

S'agissant des impôts locaux, les crédits demandés en 2016 au titre des remboursements et dégrèvements s'élèvent à 11,97 milliards d'euros, en hausse de 2,8 %, soit 325 millions d'euros, par rapport à la loi de finances initiale pour 2015. L'actualisation des prévisions pour 2015 se limite à une augmentation de 36  millions d'euros, inférieure à celle de l'année passée qui était de 142 millions d'euros et qui tranche avec les chiffres observés certaines années. Je pense notamment à l'année 2012 où l'ajustement avait atteint 1,1 milliard d'euros. Contrairement aux années précédentes, cette hausse ne s'explique pas par l'évolution des dégrèvements d'impôts économiques, mais essentiellement par l'augmentation des dégrèvements de taxe d'habitation et de taxes foncières.

M. Philippe Dominati . - C'est-à-dire que la situation des ménages se dégrade...

Mme Marie-France Beaufils , rapporteure spéciale . - Je note d'ailleurs qu'il est constaté une hausse du contentieux de 3,2 % sur la taxe d'habitation et de 4,6 % sur les taxes foncières, sans qu'elle soit compensée par une baisse des demandes gracieuses. Peut-être faut-il y voir, mais ce n'est qu'une hypothèse, une plus grande vigilance des collectivités territoriales sur l'évolution de leurs bases fiscales, dans le contexte de la forte diminution des concours de l'État.

Je souhaite également insister à nouveau sur l'importance de la révision des valeurs locatives des locaux d'habitation, dont l'expérimentation s'est récemment achevée. Au-delà des effets qu'elle aura en matière de justice fiscale et de justice entre collectivités, en permettant de disposer de potentiels fiscaux plus fiables, cette révision pourrait avoir des effets très importants sur les dégrèvements d'impôts locaux, si elle devait se traduire par une baisse relative de la valeur locative des logements des ménages de condition modeste.

Enfin, je profite de la présentation de ce rapport pour vous faire part des premières conclusions du contrôle budgétaire que j'ai commencé au cours de l'année 2015, qui a porté sur le profil des bénéficiaires du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE).

Le CICE constitue une dépense fiscale extrêmement coûteuse alors même qu'un large consensus s'était formé ces dernières années pour réduire le coût de ces « niches » : le coût budgétaire du CICE, c'est-à-dire le montant de CICE consommé en 2015, devrait s'élever à 12,5 milliards d'euros. Quant à la créance fiscale, qui est supérieure à son coût budgétaire puisqu'elle intègre des créances constituées sur l'État mais non consommées, elle devrait atteindre près de 18 milliards d'euros en 2015 pour atteindre plus de 20 milliards d'euros en 2017.

Tout d'abord, je souhaite rappeler les conséquences de la mise en place du CICE sur les services fiscaux : elle se traduit par une hausse significative des demandes de restitution d'impôts sur les sociétés, dans un contexte de diminution des effectifs. Le dispositif fait peser une charge de gestion - mais aussi de promotion - importante sur l'administration fiscale. Comme j'ai pu le constater lors d'une visite sur place à la direction régionale des finances publiques d'Île-de-France, le travail préalable de vérification d'un dossier de demande de CICE est très lourd et fait intervenir un grand nombre de logiciels, dont certains apparaissent d'ailleurs vétustes.

Les interlocuteurs que j'ai rencontrés m'ont expliqué les conditions tendues dans lesquelles le CICE a été mis en place : il représentait une priorité politique absolue et a pris le pas sur d'autres dispositifs ou d'autres missions, au détriment du bon fonctionnement des services. Si les années à venir devraient être plus apaisées, en raison de l'adaptation des services à cette nouvelle charge, les représentants syndicaux que j'ai rencontrés ont fait part de leur inquiétude quant aux conditions dans lesquelles les missions de recouvrement et de contrôle sont effectuées et le seront à l'avenir. Or ces missions restent fondamentales : l'administration fiscale a pour principal rôle de recouvrer des recettes, et non de verser des fonds aux entreprises.

En outre, l'analyse du profil des bénéficiaires du CICE fait ressortir que la présentation du dispositif, et son intitulé, ne paraissent pas correspondre à la réalité de son fonctionnement. En effet, le CICE n'est pas concentré sur les entreprises qui sont effectivement soumises à la concurrence internationale, c'est-à-dire celles qui exportent. Je m'interroge donc sur l'intérêt de mettre en place un tel dispositif, d'autant que les allègements de cotisations sociales déjà en oeuvre depuis 1993, ainsi que le crédit d'impôt recherche (CIR), sont maintenus sans que l'impact sur l'emploi et l'investissement dans les entreprises ne paraisse significatif.

Je poursuivrai ce contrôle en 2016 et pourrai donc compléter ces premières observations.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général. - Je me demande où nous en sommes par rapport aux ambitions du Gouvernement concernant l'expérimentation de la révision des valeurs locatives, qui devait se tenir dans cinq départements. Avez-vous reçu des éléments d'information relatifs aux résultats de l'expérimentation dans ces départements ?

Par ailleurs, concernant le fonctionnement du CICE, je souhaite rappeler que la majorité sénatoriale était en faveur d'un dispositif automatique de dégrèvement, la TVA dite sociale, qui n'aurait pas nécessité de travail particulier de la part de l'administration. Le choix d'un crédit d'impôt ne me paraît pas simple : l'entreprise doit formuler une demande, ce qui lui fait du travail, ces demandes doivent ensuite être traitées par les services fiscaux, ce qui leur fait aussi du travail... cela n'est pas compatible la réduction des moyens alloués à l'administration fiscale. C'est un sujet de fond qui dépasse le CICE. Il faut y penser lorsque l'on met en place des crédits d'impôt : des dispositifs automatiques sont préférables.

M. Maurice Vincent . - Je voudrais rappeler que la mise en place du CICE comme celle du crédit d'impôt recherche fait suite au rapport de Louis Gallois sur la compétitivité de l'économie française. Ce rapport dressait le constat d'un affaiblissement de notre compétitivité depuis dix ans, problème auquel le CICE vise à répondre. Il s'agit donc d'une politique structurelle de long terme poursuivant l'objectif d'une redynamisation de l'économie. En ce qui concerne le CIR, le rapport non publié de la commission d'enquête sénatoriale présidée par Francis Delattre, qui faisait suite à une initiative du groupe communiste, républicain, citoyen (CRC), concluait dans un sens favorable à ce dispositif. Même s'il recommandait certains ajustements, il montrait que le CIR permet de soutenir la recherche et développement et de relocaliser des activités économiques en France. Je ne partage donc pas les conclusions de notre collègue rapporteure spéciale.

Par ailleurs, de manière plus générale, je relève, suite au rapport qui nous a été présenté, que de nombreux citoyens vont échapper à l'impôt sur le revenu en 2016 mais que nous retrouvons tout de même une part de ménages assujettis proche de celle qui a précédé le déclenchement de la crise.

M. Vincent Delahaye . - Je m'interroge sur l'écart entre les prévisions et l'exécution 2015 du programme 200 « Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État » - respectivement 87,8 et 91 milliards d'euros - : ne risque-t-on pas de voir se reproduire le même écart en 2016 ?

M. Vincent Capo-Canellas . - À mon sens, la rapporteure spéciale est un peu sévère sur le CICE et le CIR. Je souligne que nous souffrons toujours d'un manque de recul sur ce dernier. C'est un dispositif récent qu'il s'agit de rendre stable et plus lisible, et non de bouleverser quelques temps à peine après sa mise en oeuvre. J'estime, pour ma part, qu'il est loin d'être inutile puisqu'il réduit les charges des entreprises. Nous devons prendre le temps pour évaluer cette mesure, qui a certainement été une bouffée d'oxygène pour l'économie française. Par ailleurs, s'agissant de la révision des valeurs locatives, nous sommes tous d'accord pour dire que le système actuel est injuste, mais je souligne le risque d'aboutir à un désordre majeur à force de vouloir tout réformer en même temps. C'est une contradiction dont il faudra un jour sortir, mais comment ?

M. Francis Delattre . - Je vais me concentrer sur le CIR puisque j'ai présidé la commission d'enquête sur le sujet. Nous n'avons pas constaté de détournements et n'avons proposé que quelques ajustements. Quand j'entends dire que le CIR n'a pas eu de résultats, je trouve cela absolument scandaleux. C'est totalement inexact. Il a permis d'impulser des projets de recherche dans des petites entreprises comme dans des entreprises de taille intermédiaire (ETI). Je pense, par exemple, au cas des équipementiers du constructeur automobile Toyota : ces ETI que j'ai eu la chance de rencontrer assurent parfois la fourniture de plus de 10 % du coût total de la voiture. C'est grâce à la recherche et développement encouragée par le CIR que ces entreprises ont pu être au niveau en matière technologique et s'épanouir dans un contexte de crise.

De nombreux exemples du même type existent : je me suis rendu au salon des start-up à Los Angeles, l' electronic entertainment expo (E3). Nos entreprises sont, en gros, en deuxième position après les entreprises américaines. Le problème est qu'elles se font racheter dès qu'elles ont de bons produits, souvent parce que se pose la question du financement de l'innovation. Il s'agit d'un enjeu majeur. Le fait que le CIR permette parfois de financer un peu d'innovation n'a rien de scandaleux.

Nous disposons d'un autre atout : ce sont nos doctorants. Grâce au CIR, les partenariats entre des entreprises et des universités ou des centres de recherche se sont multipliés. Le CNRS, que nous avons auditionné, est très favorable à cette dynamique de coopération. Il s'agirait de 500 millions d'euros sur le total de 6 milliards d'euros au profit de nos laboratoires de recherche publique. Il ne faut pas opposer le CIR à la recherche publique.

On peut, certes, considérer que le CIR est un « cadeau » aux entreprises - mais je souhaite rappeler qu'il a été mis en place sous le Gouvernement de Pierre Mauroy dont des communistes faisaient alors partie.

Je conclurai donc que nous pouvons améliorer ce dispositif mais qu'il ne me semble pas opportun de le faire disparaître.

M. Serge Dassault . - Je me demande comment financer les dépenses supplémentaires liées au CICE, soit 12,5 milliards d'euros. D'où viendront ces crédits ? Qui va payer ? J'imagine qu'on va encore recourir à l'emprunt. J'avais interrogé à ce sujet le secrétaire d'État au budget Christian Eckert, qui ne m'avait pas répondu. Je rappelle, de plus, que ce dispositif concerne essentiellement des entreprises de services, donc des entreprises qui reposent sur des personnels à bas salaires. Les entreprises de production, celles qui contribuent le plus fortement à la croissance, ne sont pas concernées. Je m'interroge, en outre, sur la réforme de l'impôt sur le revenu. Là aussi, la question du financement se pose. Recourra-t-on à l'emprunt une fois de plus ? Tout cela n'est pas de la bonne gestion.

M. Jean-Claude Boulard . - Le montant total des dégrèvements pour les taxes foncières et la taxe d'habitation représente 5 milliards d'euros. J'espère que ce ne sera jamais une variable d'ajustement mais nous devons rester vigilants, notamment lors de la révision des bases locatives que nous attendons avec une infinie patience. Il n'y a pas de raison technique au report de la réforme. La seule raison est politique et réside dans le fait que la contraction des recettes des uns se fera en contrepartie de plus grandes ressources pour d'autres. C'est une réforme de vases communicants et il faudra un jour que soit organisé un débat sur les causes ayant conduit à ce que cette réforme soit différée, à juste titre, depuis plus de vingt ans.

Par ailleurs, je souhaiterais savoir si l'exonération de taxe sur le foncier bâti pour le logement social est remboursée ou dégrevée.

S'agissant du CICE, j'indique que les collectivités territoriales peuvent aussi en bénéficier. J'ai connu le cas, au Mans, d'une société d'économie mixte (SEM) de transport, donc peu exposée à la concurrence internationale, qui va bénéficier du CICE et le remboursera à la collectivité. C'est intéressant et j'invite mes collègues à se renseigner sur le sujet, d'autant plus que les collectivités territoriales participent au financement du CICE : le repli des dotations aux collectivités territoriales s'explique par la mise en place du CICE depuis 2014 et du pacte de responsabilité depuis cette année.

M. Marc Laménie . - Le montant de la prévision 2016 du programme 200 « Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État » s'élève à 88 milliards d'euros. C'est une somme importante. Puisque plus de 49 milliards d'euros correspondent à la TVA, quel est le montant lié aux collectivités territoriales au titre du fonds de compensation pour la TVA (FCTVA) ?

M. Richard Yung . - Nous ne pouvons pas suivre les conclusions de la rapporteure spéciale sur le CIR et le CICE. Il s'agit de deux dispositifs essentiels de l'action du Gouvernement. Sur le CIR, Francis Delattre a dit l'essentiel. Il fait la force, l'image et la compétitivité de notre économie. Le remettre en cause serait se tirer une balle dans le pied. Pour ce qui concerne le CICE, c'est la pièce maîtresse du Gouvernement à la fois pour restaurer un meilleur niveau de compétitivité et pour créer des emplois. Je note qu'il atteint désormais son rythme de croisière : ce n'est vraiment pas le moment de le contester.

M. Bernard Lalande . - Les positions anti-CIR et anti-CICE m'ont toujours surpris. Francis Delattre et Richard Yung ont montré que le CIR permet de financer l'avenir. C'est notre responsabilité d'assurer le financement de la recherche et de l'innovation des entreprises françaises. Nous étions quelques-uns qui, faisant partie de la commission d'enquête sur le CIR, avions suivi les conclusions de son président Francis Delattre car nous estimions que ce dispositif a toute sa raison d'être.

Je tiens à apporter des précisions sur la nature du CICE : il ne faut pas être dogmatique, il ne s'agit pas d'une réduction de charges. 65 à 70 % des entreprises bénéficiaires sont des entreprises françaises qui n'exportent pas. Baisser les charges des entreprises diminue leur prix de revient ; immédiatement le marché vient chercher ce gain pour faire de la compétition. Le CICE est un crédit d'impôt et ne modifie donc pas le prix de revient de la prestation ou du bien. Si nous nous contentions de baisser les charges, ce serait le tonneau des Danaïdes : le marché viendrait s'ajuster aux nouveaux coûts. Le CICE n'est pas dans cette logique ; au contraire, il favorise le développement des entreprises et leur permet de renforcer leurs fonds propres. Si l'on peut constater de meilleurs résultats en 2015 en matière de défaillances d'entreprises, c'est pour une part grâce au CICE.

Mme Fabienne Keller . - Les remboursements et dégrèvements de taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) sont assez stables alors qu'on devait voir ce montant baisser en raison du plafonnement des dégrèvements au profit des taxis. Cette dépense fiscale s'apparente, en effet, à une subvention aux énergies fossiles. Peut-on en savoir plus sur cet écart par rapport aux prévisions ?

En ce qui concerne le CICE, j'estime pour ma part qu'il constitue un effet d'aubaine. Un chef d'entreprise qui veut recruter calcule ce que lui coûte un salarié et si la réduction de charges n'est pas certaine l'année du recrutement mais se fait en décalé, comme dans le cas du CICE, le dispositif n'a pas d'effet sur l'emploi. Il sera très difficile de revenir à un système de réduction de charges, puisque l'on rencontrera un problème de double exonération l'année de bascule. À travers le CICE, nous sommes face à un système d'économie administrée : les pouvoirs publics prennent d'abord pour restituer ensuite. Il ne conduit pas à responsabiliser et libérer les énergies, ce que permettrait à l'inverse une baisse du coût du travail grâce à la réduction des charges des entreprises.

M. André Gattolin . - Je soutiens la rapporteure. Le CIR a conduit notre pays à être perçu à l'étranger comme un paradis fiscal en matière de recherche...

M. Michel Bouvard . - Pour une fois !

M. André Gattolin . - Certains États voient en effet leurs chercheurs partir pour venir travailler en France. Mais le problème n'est pas seulement celui d'une réduction générale des charges des entreprises. À ce sujet, je conseille à Francis Delattre de lire le rapport que j'ai co-écrit avec Bruno Retailleau sur l'industrie des jeux vidéo : nos travaux nous ont conduit à constater que la difficulté provient en grande partie de l'impossibilité d'un soutien sectoriel, contrairement à ce qui se passe en Amérique du Nord et en Asie. A filière équivalente, le salaire dans le domaine de la création informatique n'est pas plus élevé en France, charges comprises, qu'aux États-Unis. Mais hors secteur culturel, il devient impossible d'avoir des dispositifs de soutien sectoriel et de ce fait, les personnes que nous formons ou les filières que nous développons partent ensuite à l'étranger.

D'ailleurs, la conformité du CIR au droit européen pose question : la commissaire européenne à la concurrence, Margrethe Vestager, ouvre une enquête à ce sujet. La réglementation européenne ne nous permet de développer une stratégie sectorielle.

M. Éric Bocquet . - On est en droit de s'interroger sur ces dispositifs et je suis dubitatif sur les effets du CICE. Je voudrais vous présenter une note de Patrick Artus, qui n'est pas un dangereux révolutionnaire, relative au CICE. Nous constatons que les marges des entreprises progressent - c'était l'objectif - grâce à la diminution du prix du pétrole, à la dépréciation de l'euro et, en partie, du fait du CICE. Cette amélioration de la marge, comme le montre Patrick Artus, peut être utilisée de différentes façons : augmenter les réserves de liquidité, se désendetter, baisser ses prix de vente, augmenter les dividendes, augmenter les salaires, accroître les investissements, augmenter les stocks et embaucher. Sur beaucoup de ces points, les progrès sont très timides voire un peu suspects. La croissance de l'emploi reste très faible, les stocks se réduisent, les salaires ralentissent, les entreprises continuent à accumuler des réserves liquides et monétaires... Permettez donc que nous nous interrogions !

M. Didier Guillaume . - On peut certes s'interroger sur le CICE, sa mise en place, son évolution, son efficacité... Il ne faut pas oublier qu'il s'agissait d'un choix de stratégie politique, comme le rappelaient tout à l'heure Maurice Vincent et Richard Yung. Nous avons fait le choix de ne pas confirmer la TVA sociale de nos prédécesseurs et, comme l'a précisé Bernard Lalande, d'aider toutes les entreprises et pas uniquement celles qui exportent. La situation des entreprises en 2012 et 2013 était catastrophique : face aux difficultés économiques, les marges des entreprises ont beaucoup baissé et le coût du travail était très important. Les entreprises n'avaient aucune marge et licenciaient. L'objectif du CICE était de leur redonner des marges de manoeuvre, peut-être pas assez diront certains. Mais ce n'est pas de l'économie administrée.

Il n'y a pas toujours de décalage annuel, car certaines entreprises ont bénéficié d'un préfinancement. Les patrons de PME et de TPE que je rencontre sont très contents du travail de Bpifrance. À partir de cette année, il n'y aura plus besoin de préfinancement, car les entreprises toucheront automatiquement le CICE au titre des années passées. C'est une baisse des charges très importante, qui redonne aux entreprises des marges de manoeuvre. Il permet à certaines, qui auraient mis la clé sous la porte autrement, de bénéficier de 5 000 ou 10 000 euros pour acheter une machine ou simplement constituer la trésorerie qui leur a permis de ne pas fermer et, demain, d'être plus compétitives.

On peut certes s'interroger sur l'efficacité du CICE après deux années pleines d'application, mais c'est sur la durée qu'il faudra voir si les objectifs sont atteints. Si ce n'est pas le cas, nous serons les premiers à dire : nous avons tenté quelque chose qui n'a pas forcément fonctionné. Les résultats des entreprises permettent de dire que ça a quand même l'air de fonctionner. On peut s'interroger sur le fait que toutes les entreprises soient concernées, même la Poste, mais toutes les entreprises ont besoin d'être compétitives ! Et je préfère que la Poste bénéficie du CICE, continue à distribuer le courrier six jours sur sept à J+1 et soit compétitive, plutôt qu'elle soit rachetée par une entreprise extérieure.

Mme Marie-France Beaufils , rapporteure spéciale . - Je me réjouis de l'affluence à notre réunion de ce matin, qui sera désormais la règle et grâce à laquelle nous avons un vrai débat sur cette mission, contrairement aux années précédentes.

S'agissant de mon travail sur le CICE, le but est de savoir si les objectifs annoncés ont été atteints. Je n'en suis encore qu'au commencement et je le poursuivrai l'an prochain, mais les éléments à notre disposition ne vont pas dans ce sens. Je vous invite à lire le troisième rapport d'évaluation du comité de suivi du CICE, présidé par Jean Pisani-Ferry, qui dit notamment - et je l'ai constaté lors de mon déplacement - que dans les grandes entreprises, le CICE est demandé et géré par la direction des affaires financières, sans que la direction des ressources humaines ne semble fortement associée aux « gains » qui découlent de cette niche fiscale. Je rappelle que les comités d'entreprise devraient également être associés, mais nous n'avons pas encore d'éléments nous permettant de dire qu'ils l'ont été. S'agissant des investissements, le même rapport indique que le CICE n'a pas toujours permis leur augmentation.

Je n'ai pas écrit qu'il fallait supprimer le CICE - même si je le pense -, j'ai simplement expliqué que les éléments à notre disposition montrent que les effets sur l'emploi et l'investissement ne paraissent pas significatifs. Lors de la création de ce dispositif, le Gouvernement insistait sur deux points : la compétitivité et l'emploi. Mais si le vrai objectif est d'aider les PME et les TPE en matière de trésorerie, il est possible de trouver un outil plus adapté que le CICE.

S'agissant du CIR, si le président de la commission d'enquête que Francis Delattre était avait autorisé la publication du rapport, nous n'aurions pas ce débat. D'après les éléments à ma disposition, le rapport allait plutôt dans le sens d'une modification du dispositif que vers sa suppression.

J'en viens aux questions plus précises qui m'ont été posées. Qui finance le CICE ? Il n'y a pas de financement particulier, il s'agit d'une moindre recette au budget de l'État.

Par ailleurs, je précise à Didier Guillaume qu'il y aura encore du préfinancement assuré par la banque publique d'investissement, même si les conditions d'accès ont été renforcées. D'ailleurs, le CICE n'est pas forcément la formule la plus pertinente pour répondre aux problèmes de trésorerie des petites entreprises : peut-être faudrait-il plutôt réfléchir à un outil ad hoc .

Pour répondre à Vincent Delahaye sur l'évolution des crédits de la mission, l'essentiel de la variation des crédits du programme 200 provient de l'impôt sur les sociétés et plus particulièrement d'un dynamisme plus important que prévu du CICE. Il est difficile de prévoir à quel moment une entreprise va mobiliser la créance qu'elle détient sur l'État. En 2017, la créance fiscale liée au CICE devrait atteindre 20 milliards d'euros.

On m'a interrogée sur le fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée, mais il n'est pas retracé dans la mission « Remboursements et dégrèvements ».

S'agissant de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, que les taxis acquittent mais pour laquelle ils bénéficient d'un taux réduit, aucune évolution significative n'est constatée.

S'agissant des dégrèvements d'impôts locaux portés par la mission, ils ne font pas partie des « variables d'ajustement » au sein des concours financiers de l'État, qui comprennent des compensations d'exonération et sont des prélèvements sur recettes. Il faut être attentif à ce que cela ne change pas. Concernant la révision des valeurs locatives des locaux d'habitation, un rapport aurait dû être remis au Parlement le 30 septembre dernier sur les résultats de l'expérimentation. Pour ma part, j'insiste sur le fait que la révision des bases fiscales doit conduire à diminuer la fiscalité des foyers modestes.

J'en viens enfin aux crédits de la mission : à titre personnel, compte tenu des observations que je vous ai présentées, je voterai contre l'adoption des crédits. Mais je ne propose pas à la commission de les rejeter.

À l'issue de ce débat, la commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements ».

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 19 novembre 2015, sous la présidence de Mme Michèle André, présidente, la commission a confirmé sa décision de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Comité de suivi des aides publiques aux entreprises et des engagements

- M. Jean Pisani-Ferry, président

- Mme Claire Bernard, économiste

Assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat (APCMA)

- M. François Moutot, directeur général

- Mme Véronique Matteoli, directrice adjointe aux relations institutionnelles

Service des impôts des entreprises (SIE) du 8 ème arrondissement (déplacement)

- M. Frédéric Bentejac, adjoint au chef du pôle fiscal Nord-Est

- M. Serge Lepage, chef du SIE du 8 ème arrondissement

Représentants syndicaux du service des impôts des entreprises (SIE) du 8 ème arrondissement (déplacement)

- M. Christophe Crépain, Solidaires finances publiques

- M. Yannick Desneux, Solidaires finances publiques

- Mme Sandra Demarcq, Solidaires finances publiques

- Mme Sandrine Rosset, Solidaires finances publiques

- M. Sébastien Groisne, CGT

- M. Sébastien Parisse, CGT

- Mme Catherine Martine, CGT


* 1 Loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances.

* 2 La prévision associée au projet de loi de finances est de 1,0 % en 2015 contre 0,3 % en moyenne ces trois dernières années. Le consensus des économistes de septembre de 2015 est légèrement supérieur à cette estimation et prévoit une croissance de 1,2 % en 2015.

* 3 Article 28 de la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014.

* 4 Déclaration de Manuel Valls le 16 mai 2014 sur la station de radio « Europe 1 ».

* 5 Prévu par l'article 1414 A du code général des impôts.

* 6 Prévu par les articles 1414 I et 1414 B du code général des impôts.

* 7 Loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012.

* 8 Celles-ci peuvent demander le remboursement immédiat des créances de crédit d'impôt constatées au titre de l'année de création et des quatre années suivantes.

* 9 Ces entreprises peuvent demander le remboursement de leur créance non utilisée à compter de la date de la décision ou du jugement qui a ouvert ces procédures.

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