C. UNE MISSION TOUJOURS PLUS SOUMISE AUX VARIATIONS DE SES DÉPENSES D'INTERVENTION « DE GUICHET »

La mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » est très majoritairement composée de crédits d'intervention en faveur des ménages . En 2015, le transfert des crédits de titre 2 du programme 167 à la mission « Défense » a encore renforcé cette prédominance : les crédits d'intervention (titre 6) représentent près de 96 % des crédits de paiement (CP) demandés en projet de loi de finances pour 2015.

Composition des crédits de la mission (en CP)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances sur la base du rapport annuel de performance pour 2013 et du projet annuel de performance pour 2015

Ces dépenses présentent un fort caractère de rigidité , s'agissant pour l'essentiel de dépenses d'intervention de « guichet » (pensions retraites ou rentes versées à vie au titre de dispositifs législatifs et indexées ). Elles dépendent exclusivement de l'évolution démographique des populations bénéficiaires et des éventuelles modifications législatives apportées aux dispositifs de réparation et de reconnaissance (par exemple, extension des critères d'attribution de la carte du combattant).

La bonne évaluation de ces dépenses d'intervention est un enjeu essentiel de budgétisation puisqu'elles constituent presque l'intégralité des crédits de la mission.

Ces crédits connaissent depuis de nombreuses années une baisse régulière en raison de l'évolution démographique des populations concernées (anciens combattants, victimes de guerre, invalides de guerre et leurs ayants droit). Cette tendance n'a pas été infléchie par les mesures nouvelles mises en place en faveur du monde combattant.

Évolution des dépenses d'intervention et des effectifs
des principaux bénéficiaires de 2005 à 2015

Source : commission des finances, sur la base des rapports annuels de performance des années 2006 à 2013 et du projet annuel de performance annexé au projet de loi de finances pour 2015

Ainsi, en 2005, les crédits d'intervention ont été exécutés à hauteur de 3 583,1 millions d'euros en crédits de paiement. Dix ans plus tard, les crédits d'intervention demandés en projet de loi de finances pour 2015 représentent 2 634,5 millions d'euros , soit une baisse de 26 % par rapport à l'exécution en 2005 (- 948,6 millions d'euros). Cette diminution de plus d'un quart des crédits d'intervention en l'espace de dix ans est due à la baisse des effectifs des bénéficiaires de pension militaire d'invalidité (PMI) dont la population est passée de 393 770 personnes à 240 851, selon les chiffres et prévisions présentés dans le projet annuel de performance annexé au projet de loi de finances pour 2015, soit une baisse de 39 % en dix ans .

Sur la même période, les bénéficiaires de la retraite du combattant (RC) ont également diminué, passant de 1 469 754 retraités à 1 118 885, soit une baisse de 24 %. Par contre, les crédits consacrés à la retraite du combattant n'ont pas suivi la même tendance. Ils ont connu une hausse jusqu'en 2013, en raison des mesures de décristallisation intervenues en 2004 et 2007 et de l'attribution régulière de points supplémentaires entre 2005 et 2012 12 ( * ) . Les crédits qui lui sont consacrés ont ainsi augmenté, passant de 621,1 millions d'euros pour l'année 2005 à 851,7 millions d'euros en 2013 (exécution en CP) 13 ( * ) .

Ils seraient de nouveau en baisse à partir 2014 14 ( * ) selon les prévisions du ministère de la défense. Toutefois, ces prévisions manquent de fiabilité car ces crédits ont été notablement sous-évalués en 2013, exercice pendant lequel les versements en excédent sur le CAS « Pensions » ont dû être intégralement absorbés en exécution pour financer la retraite du combattant (soit 28,2 millions d'euros) 15 ( * ) . Le ministère de la défense reconnaît qu'il existe un risque de sous-évaluation en raison des difficultés à quantifier les flux de sorties du dispositif :

« Les hypothèses de sorties sont déterminées de manière statistique, à l'aide d'une table de mortalité de l'INSEE applicable à l'ensemble de la population française. Toutefois, cet outil n'est pas réellement représentatif des anciens combattants et tend à surestimer le nombre de sorties au sein de cette population, dont la longévité se révèle plus importante que la moyenne nationale . De facto, l'écart sur ce déterminant entraîne donc une sous-évaluation de la dépense en construction budgétaire . » 16 ( * )

La Cour des comptes a mené un contrôle sur la retraite du combattant et exprimé des préconisations dans un relevé d'observations définitives transmis au ministère de la défense le 30 juin 2014 afin d'améliorer la prévision budgétaire. Votre rapporteur spécial n'en a pas encore eu connaissance, mais le ministère de la défense l'a informé que « conformément aux préconisations de la Cour des comptes, une étude est actuellement menée [...] sur l'adaptation des tables INSEE aux caractéristiques de la population des anciens combattants » 17 ( * ) 18 ( * ) .


* 12 Le nombre de points est passé de 35 à 48 points entre 2005 et 2012.

* 13 Chiffres extraits du rapport annuel de performance annexé au projet de loi de règlement pour 2013.

* 14 807,9 millions d'euros en LFI 2014 et 784,7 millions d'euros en PLF 2015.

* 15 V. Contribution de M. Philippe Marini dans le rapport n° 716 (2013-2014) sur le projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2013.

* 16 Réponse au questionnaire budgétaire en vue du projet de loi de finances pour 2015 (question n° 71).

* 17 Idem.

* 18 Cette nécessité d'actualiser les données démographiques des bénéficiaires avait déjà été mise en exergue dans le rapport d'information n° 132 (2013-2014) de M. Philippe Marini sur l'ONAC-VG (voir sa recommandation n° 10).

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