Rapport n° 7 (2014-2015) de M. Richard YUNG , fait au nom de la commission des finances, déposé le 9 octobre 2014

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N° 7

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2014-2015

Enregistré à la Présidence du Sénat le 9 octobre 2014

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE , portant diverses dispositions d' adaptation de la législation au droit de l' Union européenne en matière économique et financière ,

Par M. Richard YUNG,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : Mme Michèle André , présidente ; M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général ; Mme Marie-France Beaufils, MM. Yvon Collin, Vincent Delahaye, Mmes Fabienne Keller, Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. André Gattolin, Jean Germain, Charles Guené, Francis Delattre, Georges Patient , vice-présidents ; MM. Michel Berson, Philippe Dallier, Dominique de Legge, François Marc , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, François Baroin, Éric Bocquet, Yannick Botrel, Jean-Claude Boulard, Michel Bouvard, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Carcenac, Jacques Chiron, Serge Dassault, Éric Doligé, Philippe Dominati, Vincent Eblé, Thierry Foucaud, Jacques Genest, Alain Houpert, Jean-François Husson, Mme Teura Iriti, MM. Pierre Jarlier, Roger Karoutchi, Bernard Lalande, Marc Laménie, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Hervé Marseille, François Patriat, Daniel Raoul, Claude Raynal, Jean-Claude Requier, Maurice Vincent, Jean Pierre Vogel, Richard Yung .

Voir le(s) numéro(s) :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) :

2148 , 2192 et T.A. 407

Sénat :

808 rect. (2013-2014) et 8 (2014-2015)

CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES FINANCES

Réunie le jeudi 9 octobre, sous la présidence de Mme Michèle André, présidente, la commission des finances a procédé à l'examen du rapport de M. Richard Yung, rapporteur, sur le projet de loi n° 808 (2013-2014) portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière.

La commission des finances a adopté le projet de loi, qui comprend essentiellement des habilitations du Gouvernement à transposer par ordonnances plusieurs textes européens en matière économique et financière .

Elle a tout d'abord conditionné la publication de l'ordonnance prévue par l'article 2 bis , relative au Mécanisme de résolution unique (MRU), à la ratification de l'accord intergouvernemental portant sur le Fonds de résolution unique (FRU), afin de signaler le refus du Parlement d'intégrer le MRU si la clé de calcul des contributions au FRU, en cours de négociation, se révèle trop défavorable au secteur bancaire français.

Elle a supprimé l'article 23 ter qui autorisait le Gouvernement à transposer par ordonnance le paquet « MAD-MAR » relatif aux abus de marché . Par coordination, elle a restreint le champ des habilitations des articles 6, 23 bis , 23 quater et 23 quinquies .

La commission des finances a en effet considéré que le Parlement ne devait pas se dessaisir de sa compétence sur les sujets ayant trait aux sanctions, administratives ou pénales, en matière bancaire et financière. En tout état de cause, elle a souhaité attendre les conclusions de sa mission d'information en cours sur les pouvoirs de sanction des régulateurs financiers.

Elle a enfin réduit à quinze mois les délais d'habilitation applicables aux articles 23 quater , 23 quinquies et 23 sexies , au lieu de, respectivement, vingt-quatre mois pour le premier et dix-huit mois pour les deux autres.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière économie et financière, dit DDADUE, a été déposé sur le Bureau de l'Assemblée nationale le 16 juillet 2014 et adopté par elle, en première lecture, le 18 septembre 2014.

Il vise principalement à transposer en droit français ou bien à assurer la mise en conformité de notre droit national avec plusieurs textes européens pris en matière économique et financière .

En effet, suite à la crise financière, la Commission européenne a proposé des évolutions législatives afin de mieux réguler les activités bancaires, financières ou assurantielles mais aussi de renforcer les obligations vis-à-vis des entreprises, surtout les plus grandes d'entre elles, par exemple en matière comptable. Ainsi, au cours de la législature 2009-2014, le Parlement européen et le Conseil ont adopté une quarantaine de directives ou de règlements , dont une quinzaine au cours du printemps 2014.

Il convient désormais « d'absorber » cette masse considérable de dispositions qui sont, pour beaucoup d'entre elles, d'une grande technicité. Les directives doivent être transposées en droit interne. Quant aux règlements, bien que d'application directe, il est parfois nécessaire de mettre en cohérence le droit national avec leurs dispositions. L'objet du projet de loi DDADUE est de procéder à ce travail pour celles de ces dispositions qui trouvent leur transcription au niveau législatif en droit interne.

Compte tenu à la fois des délais de transposition contraints, du caractère technique de certains textes mais aussi de la « quantité » du travail à réaliser, le Gouvernement sollicite du Parlement plusieurs habilitations à prendre des mesures par voie d'ordonnances. Cette procédure, prévue par l'article 38 de la Constitution, permet au Parlement de se dessaisir de sa compétence sur un objet précis et pour une période de temps limitée.

À cet égard, le champ et le délai de l'habilitation doivent être clairement encadrés par la loi ; votre rapporteur s'est attaché à vérifier ces points pour chacune des demandes du Gouvernement contenues dans le présent projet de loi.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. L'ABOUTISSEMENT D'UN CHANTIER LÉGISLATIF HORS NORMES

Le présent projet de loi vise à adapter le droit français à treize textes européens récemment publiés 1 ( * ) . Il ne s'agit en réalité que d'une partie, déjà substantielle, des textes adoptés par le Parlement européen et le Conseil lors de la législature 2009-2014.

En effet, à l'initiative du Commissaire Michel Barnier, l'Union européenne a fait évoluer en profondeur l'ensemble des règles applicables aux banques, aux assurances, marchés financiers, à la gestion d'actifs et aux services financiers en général (comme par exemple les agences de notation) .

Le tableau ci-dessus retrace la quarantaine de propositions faites en ces domaines par la Commission européenne.

Propositions de la Commission européenne en matière de services financiers

En italique, les textes proposés mais non encore adoptés

Élaborer de nouvelles règles pour le système financier mondial

- Fonds alternatifs et capital-investissement (Directive « AIFM ») ;

- Rémunérations et exigences prudentielles applicables aux banques (Directive « CRD III ») ;

- Produits dérivés (règlement « EMIR ») ;

- Mécanismes de garantie des dépôts (« DGS ») ;

- Agences de notation de crédit (« CRA ») ;

- « Règlement uniforme » (Single Rulebook) comprenant les exigences prudentielles applicables aux banques : fonds propres, liquidité et effet de levier + règles plus strictes en matière de rémunérations et amélioration de la transparence fiscale (Directive « CRD IV »/règlement « CRR ») ;

- Encadrement renforcé pour les valeurs mobilières (Directive « MiFID » / règlement « MiFIR ») ;

- Encadrement renforcé pour prévenir les abus de marché (Directive « MAD »/règlement « MAR ») ;

- Prévention, gestion et résolution des crises bancaires (Directive « BRR ») ;

- Système bancaire parallèle, y compris fonds monétaires ;

- Réforme structurelle des banques ;

- Système bancaire parallèle : Proposition sur la transparence des opérations de financement sur titres.

Établir en Europe un secteur financier sûr, responsable et vecteur de croissance

- Règles prudentielles et de solvabilité pour les assureurs fondées sur l'analyse des risques (« Solvabilité II ») ;

- Mise en place des règlements relatifs à la création des autorités européennes de surveillance (pour la banque, les marchés de capitaux, l'assurance et les pensions) et du comité européen du risque systémique ;

- Systèmes d'indemnisation des investisseurs ;

- Surveillance renforcée des conglomérats financiers ;

- Vente à découvert et contrats d'échange sur risque de crédit ;

- Création de l'espace unique de paiement en euro (SEPA) ;

- Nouveau cadre européen de surveillance pour les assureurs (« Omnibus II ») ;

- Interconnexion des registres du commerce ;

- Responsabilisation des prêteurs (crédit hypothécaire) ;

- Simplification des règles comptables ;

- Règles de transparence renforcées ;

- Encadrement renforcé du secteur de l'audit ;

- Création de fonds européens de capital-risque ;

- Création de fonds européens d'entrepreneuriat social ;

- Dépositaires centraux de titres ;

- Meilleure information des investisseurs sur les produits financiers complexes (produits d'investissement de détail « PRIP ») ;

- Renforcement des règles sur la vente de produits d'assurance (Directive « IMD ») ;

- Règles plus sûres pour les fonds d'investissement de détail (« OPCVM ») ;

- Renforcement du régime de lutte contre le blanchiment de capitaux ;

- Publication d'informations non financières par les entreprises ;

- Accès à un compte bancaire de base / transparence des tarifs / changement de compte bancaire ;

- Création de fonds européens d'investissement à long terme ;

- Révision des règles en matière de services de paiement innovants (paiement par carte, par Internet et mobiles) ;

- Réglementation des indices de référence (tels que le LIBOR & l'EURIBOR) ;

- Financement à long terme de l'économie européenne / Révision des règles pour les fonds de pension professionnels (institutions de retraite professionnelle, « IRP »).

Finaliser l'union bancaire pour renforcer l'euro

- Mécanisme de surveillance unique ;

- Mécanisme de résolution unique.

Source : Commission européenne

L'évolution du corpus législatif a donc été particulièrement profonde et n'a laissé aucune structure, aucun acteur, aucun produit en dehors du champ de la régulation .

La profonde crise financière qu'ont connue le monde et plus particulièrement l'Europe, avec la « crise des dettes souveraines », appelait une réponse de cette ampleur. L'exhaustivité de la démarche européenne montre cependant la complexité du secteur financier dont il faut réussir à cerner tous les contours pour le réguler efficacement.

La Commission européenne, soutenue par le Parlement européen, a constamment plaidé pour une harmonisation toujours plus grande des règles applicables au sein de l'Union européenne afin qu'aucun Etat ne soit tenté par le moins disant réglementaire . La mise en place d'autorités européennes de surveillance, dès 2010, puis de l'union bancaire, constitue d'ailleurs un progrès fondamental au cours de ces dernières années.

À cet égard, d'un point de vue législatif, de plus en plus d'actes prennent la forme de règlements, directement applicables en droit interne, ou de directives d'harmonisation maximale, et non plus d'harmonisation minimale comme précédemment.

À terme, ainsi que l'a annoncé le nouveau président de la Commission européenne, il s'agit donc d'aller vers une Union des marchés de capitaux et de mettre fin à toute forme de fragmentation financière au sein de l'Union européenne.

En termes de régulation, s'il reste encore à examiner des textes importants, comme, par exemple, sur le shadow banking (ou système bancaire parallèle), le défi principal consiste désormais à mettre en oeuvre l'ensemble des dispositions adoptées.

Le travail d'assimilation, pour l'ensemble des acteurs concernés (Etats, professionnels, régulateurs), est considérable. Les superviseurs devront ensuite porter un regard vigilant sur l'évolution du secteur financier. À cet égard, les récentes polémiques sur de possibles contournements des règles limitant les bonus au sein de certaines banques d'investissement montrent que l'ouvrage doit parfois être remis sur le métier.

Enfin, comme le soulignait le Michel Barnier, commissaire européen chargé du marché intérieur et des services, lors de son audition du 10 juin 2014, « il faudra observer l'impact de cette législation sur l'économie ; nous avons pour l'instant vu celui, dramatique, de l'absence de régulation. J'ai veillé très précisément au triple calibrage de chacun de ces textes, pour qu'ils soient efficaces et justes, cohérents entre eux et propices à la coordination transatlantique - c'est pour cela que je vais demain pour la huitième fois aux États-Unis : il s'agit de veiller à ce que ceux qui ont pris les mêmes engagements pour réguler la finance internationale mènent bien, dans le même temps, des actions parallèles ».

II. LA MISE EN PLACE DE L'UNION BANCAIRE

Lancé en juin 2012 par le sommet de la zone euro, le projet d'union bancaire repose sur l'idée d' unification de la régulation du système bancaire de la zone euro afin de briser le lien entre banques et dettes souveraines 2 ( * ) . Il consiste en trois piliers : un mécanisme de surveillance unique, un mécanisme de résolution unique et un système unique de garantie des dépôts.

A. UN MÉCANISME DE SURVEILLANCE UNIQUE DÉJÀ EN PLACE

S'agissant du premier pilier, le mécanisme de surveillance unique (MSU) a été adopté en 2013 sous la forme de deux règlements européens publiés au Journal officiel de l'Union européenne le 29 octobre 2013 3 ( * ) . Son entrée en vigueur est prévue le 4 novembre 2014.

Le MSU place l'ensemble des établissements de crédit de la zone euro sous la responsabilité de la supervision par la Banque centrale européenne (BCE). Dans le détail, les cent-vingt plus grandes banques de la zone euro, dont les dix banques françaises les plus importantes 4 ( * ) , seront désormais directement supervisées par la BCE. Les autres établissements de crédit continuent d'être supervisés par les autorités nationales, mais sous le contrôle de la BCE et avec un pouvoir d'évocation de cette dernière.

Par ailleurs, l'entrée en vigueur de la supervision unique est précédée d'une revue générale de la qualité des actifs bancaires ( Assets quality review - AQR) par la BCE, accompagnée de tests de résistance menés par l'Autorité bancaire européenne (ABE), dont les résultats sont attendus pour fin octobre. Cette « mise à nu » du secteur bancaire de la zone euro est essentielle pour à la fois rassurer les marchés sur la santé de ce dernier, identifier les zones d'ombre et les risques, et asseoir la crédibilité du nouveau mécanisme.

B. LA MISE EN PLACE DU MÉCANISME DE RÉSOLUTION UNIQUE

Le deuxième pilier de l'union bancaire est le mécanisme de résolution unique (MRU), c'est-à-dire à la définition d'une procédure unique de gestion et d'un financement commun des crises bancaires . L'objectif est, en organisant mieux le démantèlement et, surtout, en prévoyant à l'avance les modalités de financement, d'éviter que ce ne soit le contribuable qui vienne au secours des établissements en difficultés, comme ce fut le cas au cours de la crise financière.

S'agissant de la résolution, l'Union européenne a d'abord légiféré en adoptant en mai 2014 la directive établissant un cadre commun pour le redressement et la résolution des banques ( Bank Recovery and Resolution Directive - BRRD) 5 ( * ) . Cette directive oblige les Etats membres à se doter d'une procédure nationale de gestion des crises bancaires comportant un certain nombre d'éléments harmonisés (autorité de résolution ; fonds national de résolution ; renflouement interne, y compris pour les créanciers ordinaires dit « seniors », etc.).

Cependant, pour la zone euro, le mécanisme de résolution unique vise à aller plus loin : il s'agit de créer un système de résolution des banques qui soit commun à l'ensemble du secteur bancaire de la zone euro , en y transposant les principes définis dans la directive BRRD au niveau de la zone euro.

Juridiquement, le MRU repose sur deux jambes : un règlement européen , publié le 15 juillet 2014, qui pose l'architecture générale du système 6 ( * ) ; et un accord intergouvernemental (AIG) , signé le 21 mai 2014 entre les Etats participants et qui prévoit les modalités d'alimentation du Fonds de résolution unique, c'est-à-dire le transfert et la mutualisation progressive (sur huit ans) des contributions des banques perçues par chacun des Etats membres.

L'architecture mise en place par le règlement européen vise à concilier le souci d'efficacité, celui de confier le pouvoir de décision à une institution de l'Union européenne en application de la jurisprudence Meroni 7 ( * ) et celui de laisser aux Etats membres, à travers le Conseil, un pouvoir d'objection pour faire valoir, dans certaines limites, les intérêts nationaux. Globalement, l'entrée d'un établissement en résolution est décidée, suite à une alerte de la Banque centrale européenne, par un Conseil de résolution unique (CRU), avec validation de la Commission européenne et pouvoir d'objection du Conseil. L'ensemble de ces procédures de décision et de consultations est complexe, mais doit avoir lieu en 32 heures maximum, pour en assurer l'efficacité, les crises bancaires étant souvent révélées et le programme de résolution décidé en l'espace d'un week-end.

Les outils à la disposition du Conseil de résolution unique sont ceux prévus pour toute autorité de résolution nationale dans la directive BRRD et quasiment identiques, par exemple, à ceux que la loi du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation bancaire a conférés, en France, à l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution : cession d'actifs, séparation et arrêt de certaines activités, création d'un établissement relais pour les activités jugées stratégiques, imputation des pertes sur les actionnaires puis les créanciers, y compris les créanciers ordinaires (ou « senior »). Ces instruments de résolution seront désormais décidés par le conseil de résolution unique au niveau européen, puis mis en oeuvre par les autorités nationales de résolution.

Le MRU s'applique à toutes les banques de la zone euro , soit environ 6 000 établissements ; il sera directement responsable des entités supervisées directement par le MSU , tandis que les autorités nationales restent responsables de la résolution des autres établissements, sauf si leur plan de résolution prévoit l'utilisation du Fonds de résolution unique. Par ailleurs, comme le MSU, le MRU dispose d'un pouvoir d'évocation pour les banques qui ne sont pas sous sa responsabilité directe.

Le MRU entrera en vigueur à compter du 1 er janvier 2016 . Ainsi, à compter de cette date, les éventuelles crises de la quasi-totalité du secteur bancaire ne seront plus gérées au niveau national, mais au niveau européen.

La question du financement de la résolution est en partie laissée ouverte par le règlement, qui fixe seulement les règles du renflouement interne par les actionnaires et les créanciers, et pose le principe d'un Fonds de résolution unique alimenté par les banques et doté, à terme, de l'équivalent de 1 % du total des dépôts garantis, soit environ 55 milliards d'euros. En revanche, l'alimentation concrète du Fonds, c'est-à-dire le transfert des contributions nationales des banques et leur mutualisation progressive, sont réglés par l'AIG . C'est en effet ce dernier qui :

- pose le principe selon lequel les Etats s'engagent à verser les contributions nationales des banques au fonds de résolution unique européen ;

- prévoit que les contributions perçues en 2015 (avant l'entrée en vigueur du MRU) devront également être reversées au Fonds de résolution unique en 2016 ;

- précise que ces contributions nationales sont d'abord affectées à des compartiments nationaux, dont l'utilisation est progressivement mutualisée sur la période transitoire de huit ans.

Le calcul des contributions des différents établissements et, partant, la répartition des contributions des différents secteurs nationaux, font l'objet d' actes délégués de la Commission européenne et, secondairement, d'actes d'exécution du Conseil, prévus respectivement par la directive BRRD et par le règlement MRU.

L'enjeu politique réside précisément, actuellement, dans la clé de calcul qui sera ainsi définie et, partant, dans la quote-part dont chaque secteur bancaire national s'acquittera dans le total du Fonds de résolution unique . Il ne serait pas acceptable que les banques françaises, dont la taille de bilan est certes importante du fait de la concentration du secteur, mais qui ne sont pas les plus risquées de la zone euro, au regard de la crise passée, soit les premières contributrices au Fonds . Au regard de la fragmentation du marché bancaire européen, les contributions de chaque banque auront en effet un impact sur sa capacité à financer l'économie du pays dont elle ressort ; il en va ainsi du financement de nos entreprises et de nos collectivités territoriales .

EXAMEN DES ARTICLES

ARTICLE 1er - Transposition de la directive 2014/59/UE établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d'investissement

Commentaire : le présent article habilite le Gouvernement à transposer par ordonnance la directive 2014/59/UE établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d'investissement, ainsi qu'à étendre la procédure de résolution aux sociétés de financement.

I. LE DROIT EXISTANT

A. UNE PROCÉDURE DE RÉSOLUTION POUR ÉVITER LE RECOURS AU CONTRIBUABLE EN CAS DE DÉFAILLANCE DES BANQUES

La crise financière, à partir de 2007-2008, a été marquée par les difficultés voire les faillites de nombreux établissements financiers, aux Etats-Unis, en particulier Lehman Brothers, mais aussi en Europe (Northern Rock, Hypo Real Estate, Royal Bank of Scotland, Bankia, Dexia, etc.). Or, le contribuable national a été contraint, pour garantir la stabilité financière, de venir en aide à ces établissements , soit par des garanties ou des apports massifs de liquidités, soit directement en épongeant leurs pertes par des recapitalisations directes. Par exemple, le démantèlement progressif de Dexia a coûté à la France, à la fin de l'année 2012, un total de 6,6 milliards d'euros, à fonds perdus, d'après le rapport de la Cour des comptes de 2013 8 ( * ) .

Dans ce contexte, l'Union européenne a emprunté deux principales voies d'action . D'une part, elle a élaboré, sous l'impulsion des normes internationales de Bâle III notamment, des réglementations plus contraignantes afin d'encadrer les pratiques des banques et de renforcer leur solidité face aux crises. D'autre part, elle a cherché à développer un cadre pour organiser la gestion des crises bancaires de manière à éviter que le contribuable ne soit mis à contribution : c'est la « résolution » ordonnée d'une banque.

Ainsi, en juin 2012, la Commission a présenté un projet de directive visant à établir à un cadre commun pour le redressement et la résolution des banques . Sa négociation au sein du Conseil et du Parlement européen fut d'autant plus longue que l'agenda législatif européen a été, dans la même période, occupé par la mise en place de l'Union bancaire, dans son volet de supervision (mécanisme de surveillance unique) et dans celui de résolution (mécanisme de résolution unique), qui crée au niveau de la zone euro les procédures de résolution que la directive vise à imposer au niveau national. Ainsi, la directive, dite BRRD ( Bank Recovery and Resolution Directive ) a été définitivement adoptée par le Parlement européen le 15 avril 2014 et publiée au Journal officiel le 12 juin 2014 9 ( * ) .

B LES PRINCIPAUX ÉLÉMENTS DE LA DIRECTIVE ÉTABLISSANT UN CADRE POUR LE REDRESSEMENT ET LA RÉSOLUTION DES ÉTABLISSEMENTS DE CRÉDIT

La directive s'organise autour de quatre principaux axes :

• La phase de préparation et de prévention . Ainsi, les établissements de crédit devront, aux termes de la directive, remettre aux autorités nationales de résolution des « plans » de redressement et de résolution qui définissent les conditions dans lesquelles ces établissements pourront respectivement se rétablir ou être démantelés de façon ordonnée (cession des actifs non stratégiques, transfert de certaines activités vers un établissement-relais, etc.). La directive impose à cet égard aux Etats membres de donner à leurs autorités nationales de résolution le pouvoir de modifier la structure d'un établissement s'il apparaît qu'il ne peut pas faire l'objet facilement d'une résolution.

• La phase d'intervention précoce . Les autorités de supervision devront être dotées de la compétence d'intervenir lorsque la situation d'une banque est dégradée, sans être encore critique : révocation des dirigeants, nomination d'un administrateur provisoire, convocation d'urgence des actionnaires, mise en place d'un plan de restructuration de la dette, etc. ;

• La phase de résolution proprement dite . Pour limiter au maximum le risque de voir le contribuable venir au secours des banques, la directive impose aux Etats membres de donner à leurs autorités de résolution des outils puissants pour organiser la résolution ordonnée des établissements : cession ou transfert d'activités, mise en place d'un établissement-relais, séparation des actifs, et surtout la possibilité de convertir les actions, mais aussi certains types de créances, afin d'éponger les pertes de l'établissement et, enfin, la possibilité de faire intervenir un fonds national de résolution (alimenté par les banques).

• La coopération et la coordination entre les autorités nationales - en particulier lorsque l'établissement en question est transfrontalier.

Au cours du processus législatif européen, deux principaux points ont fait l'objet des discussions les plus difficiles .

Le premier est relatif au fonds de résolution dont les Etats membres doivent se doter, s'agissant de sa taille minimale exigée par la directive et de son articulation avec le fonds de garantie des dépôts. En définitive, le fond national devra atteindre environ 1 % du total des dépôts du pays concernés à l'horizon de dix ans ; surtout, et conformément au souhait de la France, le fond de résolution peut être la même structure administrative que le fonds de garantie des dépôts . Ainsi, l'architecture choisie dans le cadre de la loi de séparation et de régulation des activités bancaires du 26 juillet 2013 10 ( * ) - une extension à la résolution des compétences du Fonds de garantie des dépôts - n'est pas remise en cause.

Le second point important de négociation a trait à la possibilité pour les autorités de résolution d'effacer certaines créances de l'établissement pour éponger les pertes ( renflouement interne ou bail-in ). En définitive, la directive prévoit un champ relativement large d'application de cet outil, puisque non seulement la dette subordonnée (dite « junior »), mais également la dette dite « senior » (créances qui ne sont ni subordonnées, ni sécurisées) est potentiellement concernée. Elle prévoit à cet égard que les établissements devront disposer d'un montant minimal de créances éligibles, dont le niveau exact sera défini par des normes techniques d'exécution de l'Autorité bancaire européenne.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article vise à habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures législatives nécessaires à la transposition de la directive du 15 mai 2014 établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d'investissement .

Par ailleurs, il habilite également le Gouvernement à rendre applicable la procédure de résolution ainsi définie aux sociétés de financement , créées en 2013 et qui concernent les sociétés financières qui ne reçoivent pas de fonds du public.

Enfin, le 3° du présent article vise à habiliter le Gouvernement à étendre, avec les adaptations nécessaires, les mesures législatives de résolution en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis-et-Futuna, ainsi qu'à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon.

*

Cet article a été adopté par l'Assemblée nationale sans modification.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. UNE TRANSPOSITION PAR ANTICIPATION DANS LE CADRE DE LA LOI DE SÉPARATION ET DE RÉGULATION DES ACTIVITÉS BANCAIRES DE 2013

La France a déjà transposé par anticipation les principaux éléments de la directive par l'adoption de la loi du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires précitée. Le titre IV de cette loi, consacré à la mise en place du régime de résolution bancaire, a déjà inséré en droit français les dispositions majeures de la directive aux articles L. 613-31-11 et suivants :

• l'identification d'une autorité de résolution (l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution - ACPR) ;

• l'obligation pour les établissements de crédit de soumettre des plans de redressement et des plans de résolution à l'ACPR ;

• la définition des critères de l'entrée en procédure de résolution en cas de défaillance d'un établissement et le déroulement de la procédure de résolution ;

• la mise en place d'un fonds de résolution (qui, dans le cas français, est le Fonds de garantie des dépôts et de résolution [FGDR]). À cet égard, d'après les informations recueillies par votre rapporteur, dans l'attente de la mise en place du mécanisme de résolution unique, la partie dédiée à la résolution du FGDR n'a pas encore été dotée ;

• la définition des outils de résolution à la disposition du collège de résolution de l'ACPR : révocation des dirigeants, transfert ou cession d'actifs, création d'un établissement relais, mobilisation du fonds de garantie des dépôts et de résolution, imputation des pertes sur les actions et instruments de fonds propres.

Toutefois, outre des adaptations techniques et des coordinations nécessaires pour assurer l'adéquation de la loi française aux formulations de la directive, un élément de fond doit encore être transposé : le bail-in . En effet, la directive donne aux autorités nationales le pouvoir d'imputer les pertes sur les créanciers seniors des banques (renflouement interne ou bail-in ) . La question du champ d'application du bail-in avait été largement discutée au Parlement lors de l'examen de la loi de séparation bancaire précitée. En définitive, cette dernière avait prévu que seuls les actionnaires et les créanciers subordonnés peuvent être appelés pour éponger les pertes d'un établissement défaillant. La directive va plus loin , en prévoyant que sont appelés, dans l'ordre :

- les actions et autres instruments de fonds propres ;

- la dette subordonnée ;

- les créanciers seniors ;

- les dépôts des PME et des personnes privées au-delà de 100 000 euros .

Resteront exclus du renflouement interne les dépôts couverts par le mécanisme de garantie des dépôts (inférieurs à 100 000 euros), ainsi que les créances assorties d'une sûreté.

Cependant, d'après les informations recueillies par votre rapporteur, la validité juridique d'un renflouement interne appliqué aux créanciers « senior », notamment certains investisseurs américains, n'étant pas certaine 11 ( * ) , le Conseil de stabilité financière cherche actuellement à augmenter les exigences en matière de dette subordonnée. Ainsi, des négociations ont actuellement lieu au sein du FSB pour déterminer le niveau du coussin supplémentaire appelé TLAC (« total loss absorption capacity »), applicable aux établissements systémiques , et composé d'instruments de dette dont le contrat prévoit expressément qu'ils sont susceptibles d'être convertis en fonds propres en cas de défaut de l'établissement. Si le niveau devrait être précisé au cours du sommet du G20 à Brisbane en Australie (les 15 et 16 novembre 2014), il semble qu'un compromis se dessine autour d'un coussin d'environ 16 % des actifs pondérés par les risques, correspondant à au moins le double du ratio de levier exigé par Bâle (soit 6 % des actifs non pondérés par le risque).

B. COMPLÉTER LE DISPOSITIF NATIONAL DANS LE CONTEXTE D'ENTRÉE EN VIGUEUR DU MÉCANISME DE RÉSOLUTION UNIQUE

L'essentiel de notre secteur bancaire sera, dès le 1 er janvier 2016, soumis au mécanisme de résolution unique (MRU) dans le cadre de l'union bancaire. Ainsi, les compétences de résolution seront exercées, pour l'essentiel, par le conseil de résolution unique au niveau européen, faisant passer au second plan, sinon absorbant, la procédure française que la présente habilitation vise à compléter.

Cependant, la transposition de la directive BRRD est une étape essentielle pour la mise en place du MRU . En effet, il s'agit de mettre en place ou, dans le cas de la France, d'adapter des institutions (autorité de résolution, fonds de résolution, etc.) et des procédures ou des outils qui seront utilisés, demain, à l'échelle européenne. Par exemple, il est nécessaire que les dispositions nationales permettent d'appliquer le renflouement interne aux créanciers seniors pour qu'un tel renflouement puisse être décidé par le futur conseil unique de résolution.

En outre, le MRU ne s'appliquera pas directement à la totalité des établissements financiers . Ainsi, les entreprises d'investissement sont dans le champ de la résolution française mais ne sont pas concernés par le MRU. De même, certains petits établissements de crédit resteraient normalement, en cas de difficultés, soumis à la procédure française de résolution.

C. UNE EXTENSION JUSTIFIÉE AUX SOCIÉTÉS DE FINANCEMENT

Le Gouvernement sollicite également une habilitation pour étendre par ordonnance les dispositions relatives à la résolution aux sociétés de financement . Ces dernières, créées en 2013 12 ( * ) , correspondent aux établissements qui ne reçoivent pas de dépôts du public et sont spécialisés dans les activités de financement telles que le cautionnement, l'affacturage, le crédit à la consommation, le leasing, etc . La procédure de résolution, telle que prévue par les articles L. 613-31-11 et suivants issus de la loi de séparation et de régulation des activités bancaires du 26 juillet 2013, ne s'applique qu'aux établissements de crédit et entreprises d'investissement, et ne concerne donc pas les sociétés de financement, qui continuent donc d'être soumises à la procédure de faillite ordinaire.

Certes, l'absence de dépôts du public réduit l'enjeu, en termes de protection des consommateurs, d'une résolution ordonnée de ces établissements. Toutefois, certains acteurs ont une taille de bilan très significative , qui en fait un véritable acteur de la place, à l'image de la société Crédit Logement 13 ( * ) . Dès lors, il serait préférable de donner à l'ACPR, pour ces sociétés et à partir d'un certain seuil de bilan, la compétence pour organiser, dans le cadre de la procédure de résolution, la gestion de leurs difficultés, voire de leur démantèlement .

*

À l'initiative de votre rapporteur, la commission des finances a adopté un amendement rédactionnel .

Décision de la commission : votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLE 2 - Transposition de la directive 2014/49/UE relative aux systèmes de garantie des dépôts

Commentaire : le présent article habilite le Gouvernement à transposer par ordonnance la directive 2014/49/UE relative aux systèmes de garantie des dépôts. Il habilite également le Gouvernement à prendre des ordonnances afin d'améliorer « la gouvernance du fonds de garantie des dépôts et de résolution ».

I. LE DROIT EXISTANT

A. LA GARANTIE DES DÉPÔTS, UN DISPOSITIF VISANT À ÉVITER LES PANIQUES BANCAIRES

L'activité bancaire traditionnelle consiste à transformer les dépôts (passifs) en prêts (actifs). Or les dépôts peuvent être retirés à tout moment, tandis que les prêts sont remboursés selon un échéancier déterminé avec l'emprunteur.

Cette différence de maturité entre les actifs et les passifs fait peser un risque sur la banque. En effet, si un grand nombre de déposants demandent, au même moment, le retrait de leurs dépôts, la banque n'est pas en mesure d'en assurer le remboursement. Elle doit alors constater son insolvabilité et se déclarer en faillite.

Le paradoxe de la panique bancaire tient à son caractère auto-réalisateur. La crainte que l'établissement ne fasse faillite conduit un nombre massif de clients à demander le remboursement de leurs dépôts et provoque effectivement la faillite de la banque et donc la perte des dépôts.

En outre, la panique bancaire alimente la suspicion sur les autres établissements et peut entraîner des réactions en chaîne qui portent atteinte à la stabilité du système financier . Aux États-Unis, durant la Grande dépression des années 30, plusieurs milliers de faillites ont ainsi été recensées.

C'est pourquoi, dès 1933, l'Etat fédéral a mis en place la Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC). Cet acteur public a pour mission de garantir le remboursement des dépôts des particuliers en cas de défaillance d'un établissement bancaire . L'existence de ce tiers de confiance permet d'éviter la panique et donc de préserver la stabilité du système tout entier.

Un fonds de garantie des dépôts repose sur un modèle assurantiel puisqu'il est alimenté par les cotisations de ses membres (les établissements de crédit), de sorte que le budget de l'Etat ne soit pas appelé pour garantir les dépôts.

Les dépôts sont également protégés en cas de faillite pour une raison autre que la panique bancaire. La garantie des dépôts est un garde-fou de la stabilité financière, en complément des règles prudentielles relatives à la solvabilité et à la liquidité des établissements de crédit et des autres mesures de supervision.

B. UN ENCADREMENT EUROPÉEN DEPUIS 1994

En Europe, jusqu'à récemment, les systèmes de garanties des dépôts n'étaient pas aussi structurés que la FDIC. En 1994, une première directive européenne 14 ( * ) relevait ainsi dans ses considérants que « plusieurs États membres disposent de systèmes de protection des dépôts relevant de la responsabilité d'organisations professionnelles ; que d'autres États membres disposent de systèmes institués et réglementés sur une base législative et que certains systèmes, quoique institués de façon conventionnelle, sont partiellement réglementés par la loi ; que cette diversité de statut ne pose un problème qu'en matière d'adhésion obligatoire au système et d'exclusion de celui-ci ».

Ainsi, en France, « avant la création du [Fonds de garantie des dépôts] , existait un fonds conventionnel d'indemnisation au sein de l'Association française des banques (AFB). Ce fonds couvrait uniquement les banques membres de l'AFB, disposait de moyens limités et n'avait ni personnalité juridique ni autonomie » 15 ( * ) .

La directive précitée de 1994 procède à l'harmonisation des législations en vigueur et oblige « tous les établissements de crédit [à adhérer] à un système de garantie des dépôts ». Cette directive impose que, a minima , les dépôts soient garantis à hauteur de 20 000 euros par déposant et soient remboursés dans un délai de trois mois à compter du constat de leur indisponibilité.

Cette directive a été transposée en droit français par l'article 65 de la loi du 25 juin 1999 relative à l'épargne et à la sécurité financière 16 ( * ) qui a créé le Fonds de garantie des dépôts (FGD) , aujourd'hui régi par les articles L. 312-4 à L. 312-18 du code monétaire et financier (CMF). L'essentiel de la transposition a toutefois été opéré par voie réglementaire 17 ( * ) . Les textes d'application définissent en particulier les dépôts garantis, les modalités ou encore les délais d'indemnisation. Il faut noter que la garantie des dépôts ne couvre pas seulement les particuliers mais aussi les entreprises.

Le Fonds de garantie des dépôts (et de résolution) en France

Le Fonds de garantie des dépôts et de résolution (FGDR) est une personne morale de droit privé (article L. 312-9 du code monétaire et financier) établi et régi par la loi . Les établissements de crédit et les entreprises d'investissement agréés en France ont l'obligation d'adhérer et de cotiser au Fonds , soit au 31 décembre 2013, 580 adhérents au titre de la garantie des dépôts.

Il est mis en oeuvre sur demande de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.

Il est « géré par un directoire agissant sous le contrôle d'un conseil de surveillance » (article L. 312-9 du code monétaire et financier). Les membres du conseil de surveillance sont les représentants des adhérents au Fonds. Le président du directoire doit être agréé par le ministre chargé de l'économie.

Depuis la loi du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires, le Fonds peut également intervenir dans le cadre de plan de résolution des banques, toujours à la demande de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution. Sa dénomination a évolué : il est devenu le Fonds de garantie des dépôts et de résolution . Le Fonds pourra ainsi intervenir de manière préventive lui permettant de ne pas être sollicité au titre de la garantie des dépôts.

Son financement est assuré par les adhérents. En pratique, une contribution annuelle globale est fixée par arrêté du ministre de l'économie. En 2013, cette contribution était de 500 millions d'euros. La répartition entre les adhérents est déterminée en fonction de différents critères établis par voie réglementaire 18 ( * ) . Pour des raisons de confidentialité, la part de chaque adhérent n'est pas rendue publique.

Au 31 décembre 2013, les fonds propres du FGDR, au titre de sa mission de garantie des dépôts, s'élevaient à 2 535 millions d'euros.

C. DES OBLIGATIONS DE GARANTIE DES DÉPÔTS RENFORCÉES AU VU DE LA RÉCENTE CRISE FINANCIÈRE

1. Une première modification sur des éléments essentiels en 2009

En septembre 2007, suite à des difficultés financières liées aux subprimes , la banque britannique Northern Rock a fait face à une brève panique bancaire, rapidement éteinte par les annonces de la banque d'Angleterre et par la nationalisation de l'établissement.

Au vu de ces événements, la Commission européenne a estimé que les déposants européens n'avaient pas une confiance suffisante dans le système mis en place en 1994 et a donc fait une première proposition de modification législative.

Ainsi, la directive 2009/14/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2009 vient modifier la directive de 1994 sur deux points essentiels.

Le seuil d'indemnisation est relevé de 20 000 à 100 000 euros , tandis que le délai de restitution des fonds est abaissé de trois mois à 20 jours à compter de la date de constatation de l'indisponibilité des dépôts.

2. La refonte de la directive relative aux systèmes de garantie des dépôts en 2014

Après l'adoption et l'entrée en vigueur de la directive de 2009, la Commission européenne a proposé de revoir l'ensemble des règles relatives à la garantie des dépôts et de refondre la directive de 1994.

Les principaux éléments de la directive 2014/49/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relative à la garantie des dépôts sont les suivants :

- un nouvel abaissement du délai de restitution des dépôts de vingt à sept jours au plus tard le 1 er janvier 2024 ;

- un allègement des formalités administratives transfrontalières , de sorte que les clients d'une succursale située dans un Etat membre puissent être remboursés par le fonds de garantie de cet Etat et non par celui de l'Etat membre d'origine de la banque ;

- l'ensemble des devises , et pas seulement les devises européennes, sont couvertes par la garantie des dépôts ;

- les informations des déposants et les modalités de communication sont améliorées ;

- une harmonisation des modes de financement des systèmes de garantie des dépôts, ainsi résumée dans le document de présentation de sa proposition par la Commission européenne : « les mesures proposées garantiront dorénavant un financement plus solide de ces systèmes, selon une démarche en quatre étapes : premièrement, un financement substantiel ex ante sera assuré pour disposer de réserves conséquentes . Deuxièmement, ce financement pourra, si nécessaire, être complété par des contributions ex post . Troisièmement, si cela ne suffit toujours pas, les systèmes de garantie pourront emprunter un montant limité auprès d'autres systèmes (?emprunt mutuel?). Enfin, en dernier ressort, d'autres mesures de financement devront être prises en cas de besoin ». Concrètement, au plus tard le 3 juillet 2024 , chaque fonds devra disposer de ressources équivalentes à 0,8 % des dépôts couverts . Il faut également noter que les Etats membres doivent autoriser les prêts entre systèmes et que ceux-ci se font sur une base volontaire ;

- les cotisations acquittées par les banques devront être proportionnelles au risque relatif de chaque banque .

L'essentiel des dispositions de la directive doivent être transposées au 1 er juillet 2015 .

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le 1° du présent article habilite le Gouvernement à transposer par ordonnance la directive 2014/49/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014, relative aux systèmes de garantie des dépôts.

Le 2° du présent article habilite le Gouvernement à procéder par ordonnance à l'amélioration de « la gouvernance du fonds de garantie des dépôts et de résolution [et à l'adaptation des] modalités de contribution de ses membres à son fonctionnement ».

Le 3° du présent article habilite le Gouvernement à procéder par ordonnance aux adaptations nécessaires en application du 1° dans les territoires d'outre-mer.

Aux termes de l'article 24 du présent projet de loi, les ordonnances prises en application du présent article devront être publiées dans un délai de huit mois à compter de la promulgation de la loi.

*

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. UN TEXTE ESSENTIEL POUR LA PROTECTION DES ÉPARGNANTS ET LA STABILITÉ FINANCIÈRE

La crise financière a montré le besoin de systèmes de garantie des dépôts fiables et robustes. Ainsi, en juin 2014, la banque nationale de Bulgarie a décidé de fermer deux banques ( Corporate Commercial Bank AD et Commercial Bank Victoria EAD ) suite à une panique bancaire. Or, depuis cette date, les déposants sont confrontés à l'indisponibilité de leurs dépôts. En effet, la législation bulgare est plus contraignante que le droit européen en ce qu'elle exige que les établissements aient perdu leur licence bancaire pour que le fonds de garantie national puisse intervenir 19 ( * ) .

Lors de la crise chypriote, en mars 2013, une ruée vers les dépôts avait également conduit les autorités à procéder au « gel » des retraits. Au surplus, un premier plan de sauvetage élaboré par les autorités européennes prévoyait une « taxation » des dépôts de 6,75 % en-deçà de 100 000 euros. Finalement, ce projet ayant été jugé contraire aux règles relatives à la garantie des dépôts, seules les sommes au-delà de 100 000 euros se sont vues appliquer une taxation.

Au total, ces récents événements soulignent la nécessité d'affirmer la protection publique des dépôts, qui reste un gage de confiance important pour les épargnants et, partant, de stabilité du système financier.

B. DES ENJEUX IMPORTANTS DE TRANSPOSITION ET DE MISE EN oeUVRE

L'essentiel de la transposition devrait intervenir par voie réglementaire . Néanmoins, quelques points importants devront être inscrits dans la loi.

En particulier, l'article 12 de la directive prévoit que « les Etats membres peuvent autoriser les systèmes de garantie des dépôts (SGD) à consentir des prêts à d'autres SGD ». Or si le prêt à un autre système conduit à rendre indisponible une partie des ressources du fonds, le Gouvernement a indiqué à votre rapporteur qu'il néanmoins est favorable à l'inscription de cette option dans la loi française, arguant, d'une part, qu'elle ne crée aucune obligation pour le FGDR et, d'autre part, qu'elle constitue un embryon de fonds unique européen, qui est le troisième pilier de l'union bancaire.

S'agissant de la mise en oeuvre de la directive, le premier défi consiste à réussir le passage à délai de restitution de sept jours, alors même que les systèmes de garantie travaillent encore à la mise en oeuvre du délai de vingt jours. Entendu par votre rapporteur, Thierry Dissaux, président du directoire du FGDR, a considéré qu'une procédure standardisée et informatisée devrait permettre de tenir ce délai. Elle nécessite, en revanche, de connaître suffisamment bien les différents types de dépôts de chaque client dans chaque établissement (principe de la « vue unique du client ») 20 ( * ) .

Enfin, le FGDR devra être doté, ex ante , à hauteur de 0,8 % des dépôts couverts. Le Gouvernement et le FGDR devront d'abord définir, juridiquement et pratiquement, ce qu'il faut entendre par dépôt couvert. Cette question est cruciale car elle détermine le montant global des contributions des adhérents. Or, en droit français, il existe encore des incertitudes sur le champ des dépôts couverts, comme par exemple pour les livrets A et LDD qui sont également garantis par l'Etat.

En outre, il convient de noter que, désormais, l'essentiel des contributions devra être versée sous forme de subventions au Fonds, c'est-à-dire en « cash », tandis que seulement 30 % de la contribution d'un établissement pourra revêtir la forme « d'un engagement de paiement ». Le coût pour les adhérents sera donc plus élevé qu'aujourd'hui.

Selon une première estimation du Gouvernement, le montant des dépôts couverts pourrait atteindre 1 100 milliards d'euros. Le FGDR devrait alors être doté de 8,8 milliards d'euros, contre 2,7 milliards actuellement. Il convient cependant de noter que la directive permet de doter le fonds, sous certaines conditions, qu'à hauteur de 0,5 % des dépôts couverts (soit 5,5 milliards d'euros). D'après les informations recueillies par votre rapporteur, la France devrait demander à la Commission européenne de pouvoir faire jouer cette option. Dans ce dernier cas, la contribution globale des adhérents au FGDR pourrait alors s'élever à 300 millions d'euros pendant dix ans.

C. UNE RÉVISION DE LA GOUVERNANCE DU FGDR

Le 2° du présent article habilite le Gouvernement à améliorer la gouvernance du fonds et à adapter les modalités de contribution de ses membres. Il s'agit de modifications qui ne rentrent pas dans le champ de la transposition de la directive de 2014 . Le Gouvernement entend notamment revoir la composition du conseil de surveillance sur plusieurs points.

Tout d'abord, suite à la création des sociétés de financement 21 ( * ) , certaines sociétés financières ont perdu l'agrément d'établissement de crédit. Conformément à l'article L. 312-4 du code monétaire et financier, elles ne sont donc plus membres du FGDR. Les sociétés de caution, en particulier, ne sont plus représentées au conseil de surveillance du FGDR alors même que le Fonds dispose d'un mécanisme de garantie des cautions (distinct de celui de la garantie des dépôts). L'ordonnance devrait donc leur permettre d'adhérer à nouveau au Fonds.

Ensuite, le Gouvernement veut revoir le poids de chaque adhérent au sein du conseil de surveillance . Actuellement, le nombre de voix de chaque membre est proportionnel au montant de sa contribution. Or, celui-ci est déterminé en fonction d'un facteur risque. Ainsi, plus une banque présente un profil de risque élevé, plus elle acquittera une contribution importante et plus elle pèsera au conseil de surveillance du FGDR. Or la directive prévoit d'accentuer sensiblement la pondération du risque dans le mode de calcul des contributions. Afin d'éviter que les acteurs les plus risqués disposent de l'essentiel du pouvoir, il est donc prévu que le mode de gouvernance soit revu.

Décision de votre commission : votre commission a adopté cet article sans modification.

ARTICLE 2 bis - Adaptation du code monétaire et financier au règlement créant un mécanisme de résolution unique (MRU)

Commentaire : le présent article habilite le Gouvernement à procéder par ordonnance aux adaptations du code monétaire et financier rendues nécessaires par l'adoption du règlement n° 806/2014 relatif au mécanisme de résolution unique et au fonds de résolution bancaire unique.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LA MISE EN PLACE DE L'UNION BANCAIRE

Lancé en 2012 lors du sommet de la zone euro des 28 et 29 juin 2012 dans le but de briser le cercle vicieux entre les banques et les dettes souveraines des Etats membres, le projet d'union bancaire repose sur l'idée d' unification de la régulation des banques de la zone euro , à la fois du point de vue de la supervision (1 er pilier), du traitement des établissements en difficulté (2 e pilier), mais aussi de la garantie des dépôts (3 e pilier).

Le premier pilier ou mécanisme de surveillance unique (MSU) , qui consiste à transférer la compétence de la supervision bancaire des autorités nationales de supervision, comme l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) en ce qui concerne la France, vers la Banque centrale européenne (BCE), a été adopté en octobre 2013 sous la forme de deux règlements publiés au Journal officiel de l'Union européenne le 22 octobre 2013. Ces textes prévoient que quatre missions seront principalement effectuées par la BCE désormais :

- la délivrance et le retrait d'agrément d'établissement de crédit pour toutes les banques de la zone euro ;

- la conformité des banques avec les exigences prudentielles et les règles de gouvernance ;

- la mise en place de tests de résistance stress tests ») ;

- la supervision complémentaire consolidée des conglomérats financiers .

Pour l'ensemble de ces tâches, la BCE sera assistée par les autorités nationales - en France, l'ACPR - qui, sous le contrôle de la BCE, assureront notamment les opérations de supervision au jour le jour. Les autorités nationales conserveront également la pleine responsabilité pour les missions non confiées à la BCE, en particulier la protection des consommateurs et des épargnants, la supervision des services de paiement ainsi que la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme.

À compter du 4 novembre 2014 , la Banque centrale européenne sera ainsi directement responsable de la supervision des banques les plus importantes de la zone euro 22 ( * ) , soit 120 établissements . Cependant, à tout moment, la BCE pourra décider d'exercer la supervision directe sur tout établissement de crédit de la zone euro. Pour la France, dix établissements seront directement supervisés par la Banque centrale européenne 23 ( * ) .

B. LE RÈGLEMENT DU 15 JUILLET 2014 : L'UN DES DEUX PILIERS DE LA CRÉATION DU MÉCANISME DE RÉSOLUTION UNIQUE

Toutefois, pour atteindre l'objectif de rompre le lien entre dette bancaire et dette souveraine, c'est-à-dire d'éviter que les difficultés d'une banque ne rejaillissent sur l'Etat dont elle ressortit, il est nécessaire d' associer à la surveillance unique un mécanisme européen qui organise la gestion des crises bancaires et garantisse que les banques en difficulté soient traitées et réaorganisées, voire démantelées selon une même procédure, détachée des considérations politiques nationales et, surtout, avec un financement issu d'un fonds de résolution unique et non des budgets nationaux des Etats membres.

Ainsi, le Conseil européen du 14 décembre 2012 a affirmé la nécessité d'exercer au même niveau européen la supervision et la résolution des établissements de crédit, en soulignant que « dans un contexte où la surveillance bancaire est effectivement transférée à un mécanisme de surveillance unique, un mécanisme de résolution unique sera nécessaire , qui soit doté des compétences requises pour faire en sorte que toute banque des États membres participants puisse être soumise à une procédure de résolution, au moyen des instruments appropriés ».

Dans ce contexte, la Commission européenne a présenté le 10 juillet 2013 un projet de règlement visant à établir un mécanisme de résolution unique (MRU) . Au sortir de la négociation, le MRU est, en définitive, juridiquement composé de deux textes :

- un règlement européen 24 ( * ) , qui pose les règles de la procédure européenne de résolution . Ce règlement crée et détermine les missions des institutions compétentes (conseil de résolution unique, fond de résolution unique, autorités nationales de résolution), et définit la procédure suivie sur la base de la procédure prévue par la directive sur le redressement et la résolution des crises bancaires (BRRD) (mesures préventives, intervention précoce, détermination des critères de l'entrée en résolution, outils de résolution, etc. ; cf . commentaire de l'article 1 er du présent projet de loi) ;

- un accord intergouvernemental (AIG) , signé entre les Etats participants, qui définit les conditions financières de la résolution , en particulier la mise en place du fonds de résolution unique européen (avec mutualisation progressive des compartiments nationaux). En effet, le Conseil a fait valoir que pour asseoir la validité juridique des contributions des banques nationales et de leur transfert à un organisme européen, un accord intergouvernemental, signé sous la forme d'un traité international et ratifié comme tel par les États participants, était préférable à l'inscription de ces dispositions au sein du règlement européen.

C. L'ORGANISATION DE LA RÉSOLUTION

Le MRU s'applique à toutes les banques de la zone euro , soit environ 6 000 établissements ; il sera directement responsable des entités supervisées directement par le MSU , tandis que les autorités nationales restent responsables de la résolution des autres établissements, sauf si leur plan de résolution prévoit l'utilisation du Fonds de résolution unique. Par ailleurs, comme le MSU, le MRU dispose d'un pouvoir d'évocation pour les banques qui ne sont pas sous sa responsabilité directe.

Le MRU est structuré autour d'une institution nouvelle, le Conseil de résolution unique (CRU) doté d'un Fonds de résolution unique (FRU) alimenté par les contributions des banques.

Ce Conseil est composé, autour d'un président, d'un vice-président, de quatre membres permanents 25 ( * ) et de l'ensemble des représentants des autorités de résolution nationales. Il jouit des prérogatives de l'autorité de résolution telles que définies par la directive BRRD : contrôle des plans de redressement et de résolution, intervention précoce, décisions de résolution, etc.

La résolution d'un établissement de crédit proprement dite , sous le régime de résolution unique, fait entrer plusieurs institutions en jeu :

- la Banque centrale européenne , qui, en tant que superviseur, constate qu'est remplie la première condition de l'entrée en résolution, à savoir que l'établissement est en défaut de paiement ou susceptible de l'être à court terme ;

- le Conseil de résolution unique , qui fournit à la Banque centrale les éléments lui permettant de prendre cette décision et qui peut lui-même déclarer l'établissement en résolution si la Banque centrale ne réagit pas ; le Conseil de résolution est également responsable de la définition du programme de résolution de l'établissement ;

- la Commission européenne , qui doit approuver (le cas échéant de façon tacite) ou objecter (avec propositions de modifications) le projet d'entrée en résolution et qui peut, par ailleurs, proposer au Conseil d'objecter à l'entrée en résolution (ou, secondairement, au montant prévu d'utilisation du fonds) ;

- les autorités nationales de résolution , qui participent au sein du Conseil de résolution unique à l'élaboration des mesures de résolution et qui, surtout, sont chargées de leur mise en oeuvre.

L'ensemble des procédures de consultation et objection au projet de résolution doit avoir lieu en 32 heures , de manière à permettre que l'entrée en résolution puisse être engagée définitivement au cours d'un week-end.

Le Conseil de résolution unique se réunit dans deux formats distincts :

- la session exécutive rassemble le président, le vice-président, les membres permanents et les autorités nationales concernées par l'établissement en difficulté. Il adopte les mesures de résolution, y compris celles qui impliquent l'intervention du fonds de résolution européen dans la limite de 5 milliards d'euros ;

- la session plénière rassemble l'ensemble des membres du conseil de résolution unique et est compétente pour les situations individuelles où l'intervention du fonds est requise pour plus de 5 milliards d'euros. En session plénière, des règles de majorité spécifiques s'appliquent pour mieux représenter les Etats membres représentant un montant important des contributions 26 ( * ) .

D. DES MODALITÉS DE FINANCEMENT PRÉCISÉES, À L'EXCEPTION DU FONDS DE RÉSOLUTION UNIQUE RENVOYÉ À L'ACCORD INTERGOUVERNEMENTAL

Le règlement précise les modalités de financement de la résolution de l'établissement en difficulté :

- le coût de la résolution de la banque en difficulté est d'abord supporté, dans l'ordre par les actions et autres instruments de fonds propres ;

- intervient ensuite le renflouement interne ( bail-in ) , c'est-à-dire l'appel aux créanciers : la dette subordonnée puis la dette ordinaire ou « senior », enfin les dépôts au-dessus des 100 000 euros garantis ;

- si ce renflouement interne est insuffisant, alors le Conseil de résolution peut décider l'intervention du Fonds de résolution unique .

Le règlement européen ne prévoit pas les modalités de constitution du Fonds de résolution unique ni la manière dont les différents compartiments nationaux qui le composent sont progressivement mutualisés. Ces précisions sont renvoyées à l'accord intergouvernemental (AIG) 27 ( * ) .

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article, adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, après avis favorable de notre collègue député Christophe Caresche, rapporteur, vise à habiliter le Gouvernement à adapter par ordonnance le code monétaire et financier au règlement (UE) n° 806/2014 du 15 juillet 2014 établissant le mécanisme de résolution unique 28 ( * ) .

Il précise que cette ordonnance devra être prise dans un délai de huit mois à compter de la promulgation de la loi .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. LA NÉCESSITÉ D'UNE RÉSOLUTION À L'ÉCHELLE EUROPÉENNE

Le mécanisme de résolution unique, deuxième pilier de l'union bancaire, est une étape essentielle de la construction d'un cadre commun de gestion du système bancaire de la zone euro , qui a été au coeur, sinon à l'origine, de la crise de la dette souveraine de nombreux Etats membres. Il s'agit en effet, après l'étape préalable incontournable de la supervision commune, de s'assurer que les défaillances bancaires soient non seulement gérées, mais également politiquement et financièrement assumées à une échelle européenne , et non plus à l'échelle nationale.

À cet égard, les dernières défaillances bancaires au sein de la zone euro ont illustré l'insuffisance institutionnelle de la gestion de ces crises . Comme le souligne la Commission européenne, « la crise financière à Chypre a mis en lumière le besoin d'actions rapides et décisives, soutenues par des dispositions de financement au niveau de l'Union européenne , afin d'éviter une situation dans laquelle la résolution d'une banque conduite à un niveau national aurait un impact disproportionné sur l'économie réelle » 29 ( * ) .

C'est pourquoi il était nécessaire, pour les pays de la zone euro, d'aller au-delà de la seule harmonisation des procédures de résolution telle que prévue par la directive BRRD (cf. article 1 er du présent projet de loi). Une architecture commune, adossée à la supervision commune sous l'égide de la BCE et, surtout, appuyée par des mécanismes de financement progressivement mutualisés, devait voir le jour.

B. UN FINANCEMENT ENCORE EN SUSPENS

1. Les résultats de la revue de la qualité des actifs bancaires

Avant l'entrée en vigueur le 4 novembre 2014 du mécanisme de surveillance unique, c'est-à-dire de la supervision directe par la BCE des plus grandes banques de la zone euro, la BCE a mis en place, au cours de l'année 2014, un programme de revue de la qualité des actifs bancaires ( Asset Quality Review - AQR), dont les conclusions sont attendus pour la fin du mois d'octobre. Cette AQR est prolongée par des tests de résistance menés par l'Autorité bancaire européenne dans toute l'Union européenne et fondés sur des critères harmonisés avec la BCE.

Cette échéance, très attendue par les marchés, a permis à la BCE de s'immiscer dès le courant de l'année 2014 dans la supervision quotidienne des établissements concernés, en demandant des données, pour certaines nouvelles, en s'invitant aux réunions avec les superviseurs nationaux, etc. Ainsi, d'après les informations recueillies par votre rapporteur, les équipes (plurinationales) de supervision de la BCE, dédiées à chaque grande banque française, sont d'ores et déjà constituées et impliquées dans la supervision de notre secteur bancaire.

Danièle Nouy, présidente du conseil de supervision de la BCE, a déjà laissé entendre que tous les établissements de crédit de la zone euro ne satisferont pas aux exigences posées par les tests de résistance qui complètent l'AQR . Elles devront donc procéder à des augmentations de capital ; si elles n'y parvenaient pas, une résolution devrait s'engager, mais dans un cadre national, le MRU n'étant pas encore en vigueur. Ainsi, ce sont les procédures nationales qui s'appliqueront, y compris du point de vue financier : si le renflouement interne est insuffisant, c'est donc l'Etat concerné qui jouera le rôle de filet de sécurité .

À cet égard, les ministres des finances de la zone euro ont conclu un accord, au sein de l'Eurogroupe, le 13 juin 2014, afin de permettre au Mécanisme européen de stabilité, sur un compartiment de 60 milliards d'euros, de recapitaliser les banques en difficultés . De nombreuses conditions sont cependant posées (renflouement interne préalable ; mise sous programme d'assistance de l'Etat concerné ; participation, à hauteur de 20 % puis de 10 % de l'Etat concerné au plan d'aide). En outre, il s'agit d'un accord politique, une signature sous forme d'accord intergouvernemental puis une ratification par chaque Etat membre étant encore nécessaire. Votre rapporteur appelle de ses voeux une accélération de la mise en oeuvre de cet outil , dont le principe a été formulé, en lien avec l'union bancaire, dès juin 2012.

2. Le fonds de résolution unique et la répartition, entre les secteurs bancaires des Etats membres, de son alimentation

Architecture subtile pour préserver l'avis des différentes institutions parties prenantes tout en assurant son efficacité décisionnelle, le MRU reste cependant un moteur sans essence tant que le Fonds de résolution unique n'est pas à même de financer la résolution des établissements en difficulté , d'autant plus que le montant de la dette susceptible de faire l'objet d'un renflouement interne reste encore inconnu ( cf . commentaire de l'article 1 er ).

Le financement du fonds de résolution unique repose sur les banques elles-mêmes à travers des contributions ex ante qui, sur une période transitoire de huit ans, doivent permettre d'atteindre un niveau de 1 % du total des dépôts garantis, soit environ 55 milliards d'euros . Le calcul des contributions des différents établissements et, partant, la répartition des contributions des différents secteurs nationaux, font l'objet d'actes délégués et d'actes d'exécution prévus par la directive BRRD et par le règlement MRU.

Ainsi, l'article 103 de la directive BRRD habilite la Commission européenne à adopter des actes délégués pour « préciser la notion d'adaptation des contributions en fonction du profil de risque des établissements ». Les actes délégués pris par la Commission européenne fourniront ainsi une forme de « clé de calcul » qui devrait concerner tous les Etats membres de l'Union européenne. Cependant, cette clé aura, s'agissant des Etats membres soumis au MRU, un impact considérable sur la répartition de la charge entre les différents secteurs bancaires des Etats participants .

Par ailleurs, l'article 70 du règlement MRU précise que le Conseil, sur proposition de la Commission européenne et dans le cadre des actes délégués adoptés par celle-ci, adopte des actes d'exécution qui précisent les conditions de mise en oeuvre de la méthode de calcul des contributions .

Dans la mesure où la méthode de calcul définie par la Commission européenne au sein de l'acte délégué sera déterminante, et où les Etats membres et le Parlement européen auront trois mois, à compter de la publication des actes délégués, pour y faire objection, c'est en pratique la clé de calcul de l'acte délégué qui est actuellement au coeur des négociations entre les Etats membres et la Commission européenne . Cet acte délégué devrait être publié à la fin du mois d'octobre , après avoir été reporté d'un mois faute d'accord.

En pratique, la négociation oppose les pays qui privilégient, dans la méthode de calcul des contributions, le total de bilan en valeur absolue, et ceux qui privilégient la pondération par les risques . Dans le premier cas, les secteurs bancaires nationaux très concentrés, fondés sur de larges banques universelles, sont pénalisés. Dans le second, les secteurs bancaires plus éclatés, avec des établissements de petite taille éventuellement plus risqués, seraient davantage contributeurs.

Ainsi, parmi les quatre grands pays de la zone euro, l'Allemagne et l'Espagne sont favorables à la première orientation, qui épargne davantage leur secteur bancaire, tandis que la France et, dans une moindre mesure, l'Italie, sont partisans de la seconde, qui réduirait l'importance des contributions de leurs secteurs bancaires.

En l'état actuel des négociations, d'après les informations recueillies par votre rapporteur, c'est la position défendue par l'Allemagne et l'Espagne qui serait privilégiée par la Commission européenne . Ainsi, d'après certaines estimations, les banques françaises seraient les premières contributrices, à hauteur de 30 % du total du fonds de résolution, soit environ 17 milliards sur 55 milliards d'euros , devant les banques allemandes, à hauteur d'environ 25 %. L'Allemagne aurait d'ores et déjà obtenu une exception pour ses caisses d'épargne qui, disposant de leur propre système de sauvetage, ne seront normalement pas soumis au MRU et ne contribueront donc pas au fonds de résolution européen.

Votre rapporteur estime qu' il n'est pas acceptable que le secteur bancaire français paye une part supérieure non seulement à ce qu'il représente dans le paysage bancaire européen mais également à celle payée par l'Allemagne, première puissance économique et financière de la zone euro . Cela est d'autant plus vrai que son profil est moins risqué, ce dont a témoigné sa solidité pendant la crise financière.

Les contributions au fonds de résolution, qui s'ajoutent aux contributions au fonds national de garantie des dépôts et aux mises en réserve rendues nécessaires par l'accroissement des règlementations prudentielles, réduisent non seulement la capacité du système bancaire à financer nos entreprises, mais également nos recettes budgétaires. En effet, les contributions au fonds diminuant d'autant l'assiette imposable des bénéfices au titre de l'impôt sur les sociétés.

Certes, l'adoption du MRU, pas plus que l'adaptation de notre droit à ce dernier, n'est suffisante pour organiser le transfert des contributions nationales vers le fonds de résolution européen et leur mutualisation progressive sur huit ans. En effet, le règlement MRU a renvoyé ces dispositions financières à l'AIG, dont le projet de loi de ratification a été déposé sur le bureau du Sénat et qui ne devrait pas être examiné avant que les actes délégués et les actes d'exécution soient connus.

Toutefois, le règlement MRU et l'AIG constituent les deux pieds d'une même construction ; l'adoption de l'un sans l'autre priverait l'architecture de toute crédibilité financière. Aussi votre rapporteur considère-t-il qu'il est nécessaire de renvoyer l'entrée en vigueur de l'habilitation du présent article à la ratification de l'AIG . Il s'agit ainsi de mettre l'accent sur la nécessité d'une prise en compte globale des deux textes pour juger du MRU, mais aussi de signifier l'opposition du Parlement français à une architecture européenne de résolution bancaire qui, d'un point de vue financier, conduirait le secteur bancaire français, qui s'est avéré l'un des plus solides de la zone euro durant la crise, à contribuer près de deux fois le montant de sa contribution qu'il devrait dans un système de résolution purement national et à être de loin le premier contributeur au fonds européen .

En conséquence, votre commission des finances a adopté, à l'initiative de votre rapporteur, un amendement visant à prévoir que l'habilitation conférée par le présent article n'entre en vigueur qu'à compter de la ratification de l'accord intergouvernemental par le Parlement . Ainsi, le MRU dans son ensemble ne peut être intégré en droit français qu'une fois connues précisément ses conditions de financement, en particulier pour le secteur bancaire français.

Par ailleurs, votre commission a adopté un amendement rédactionnel .

Décision de la commission : votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLE 3 - Transposition de la directive « Solvabilité II »

Commentaire : le présent article vise à habiliter le Gouvernement à transposer par ordonnance la directive 2009/138/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 sur l'accès aux activités de l'assurance et de la réassurance et leur exercice, dite « Solvabilité II », modifiée par la directive 2014/51/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014, dite « Omnibus II ».

I. LE DROIT EXISTANT

A. LE DIRECTIVE SOLVABILITÉ II : UNE PROFONDE RÉFORME DU CADRE PRUDENTIEL DES ACTIVITÉS D'ASSURANCE ET DE RÉASSURANCE

La directive Solvabilité II a été adoptée par le Conseil de l'Union européenne et par le Parlement européen en novembre 2009 et doit commencer à s'appliquer à partir du 1 er janvier 2016, même si elle prévoit une période transitoire pour certaines de ses dispositions.

Elle a pour objet la révision du cadre prudentiel 30 ( * ) des activités d'assurance et de réassurance dans l'Union européenne , afin de mieux garantir, par un ensemble règles harmonisées et modernisée, la solvabilité des assureurs , c'est-à-dire leur capacité financière à faire face à leurs engagements compte tenu des risques auxquels ils sont exposés.

La solvabilité d'un organisme d'assurance ou de réassurance repose sur l'adéquation entre ses fonds propres et les pertes qu'il est susceptible de subir du fait de la réalisation d'un risque . Lorsque les pertes subies excèdent les fonds propres, constitués d'éléments financiers présentant des caractéristiques de disponibilité 31 ( * ) et de subordination 32 ( * ) , l'assureur n'est plus en mesure de faire face à ses engagements, notamment à l'égard des assurés.

Les règles prudentielles visent à assurer le maintien par l'assureur d'un niveau de fonds propre le mettant, avec une certitude raisonnable, à l'abri d'un tel défaut.

La modernisation et l'harmonisation de ces règles doivent ainsi contribuer à une meilleure protection des consommateurs , au renforcement du marché unique de l'assurance et à la solidité du système financier européen .

Pour ce faire, la directive Solvabilité II est organisée en trois piliers , à l'instar de la réglementation prudentielle applicable aux banques, dite « Bâle III ».

1. Le premier pilier : les exigences quantitatives

Le premier pilier instaure des exigences quantitatives de fonds propres .

Pour chaque organisme d'assurance sera déterminé des niveaux de fonds propres à respecter :

- le capital minimum requis (MCR - Minimum Capital Requirement ), qui se définit comme le niveau minimum de fonds propres en dessous duquel l'intervention de l'autorité de contrôle sera automatique ;

- le capital de solvabilité requis (SCR - Solvency Capital Requirement ), qui représente le capital cible nécessaire pour absorber le choc provoqué par un risque majeur. Il doit permettre à l'assureur d'assurer ses engagements pendant un an avec une probabilité d'au moins 99,5%.

Le SCR peut être déterminé par une formule standard ou par un modèle interne dont l'emploi aura été autorisé par l'Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles (AEAPP 33 ( * ) ).

Le calcul du MCR et du SCR implique pour chaque assureur :

- la valorisation de ses actifs et de son passif (ses engagements) en « juste valeur » , concept dérivé des normes comptables internationales IFRS, alors que, sous l'ancien régime prudentiel, (Solvabilité 1) seuls les actifs étaient appréciés selon cette méthode. La « juste valeur » est assimilée en priorité à la valeur de marché ( mark-to-market ), mais doit, en l'absence de marché, être déterminée selon des modèles théoriques internes complexes ( mark-to-model ). C'est en particulier le cas des engagements portés au passif des assureurs ;

- la mesure de ses risques , selon une approche beaucoup plus large que précédemment. Sont ainsi pris en compte le risque de marché (baisse de la valeur des actifs), le risque de défaut d'une contrepartie, le risque opérationnel (défaillance des procédures internes) ou encore le risque de souscription (sinistralité).

Le SCR, selon la formule standard de l'AEAPP, est calculé par l'agrégation de plusieurs « modules » de risque, représentant chacun le montant de capital nécessaire pour couvrir un risque donné.

Le « SCR marché »

Le module « SCR marché », correspondant au montant de fonds propres nécessaires pour couvrir le risque de dépréciation des actifs, est lui-même décomposé en sous-modules suivant les différents facteurs du risque de marché (taux, actions, crédit, changes...).

Chaque sous-module correspond à l'impact, sur la valorisation d'un instrument ou d'un portefeuille, d'un « choc » instantané sur l'un des facteurs de risque. Le choc consiste en un scenario, comme par exemple, pour le sous-module « actions », une baisse de la valeur des actions, qui peut avoir un effet sur la valeur d'autres types d'actifs que les actions.

Du fait de leur plus grande volatilité, le choc « actions » est particulièrement important : il correspond à un scénario de baisse de valeur de 39 %.

La détention d'actions est ainsi plus couteuse en capital pour les assureurs que celle d'autres types d'actifs, par exemple les obligations ou l'immobilier, dont la sensibilité à la baisse de la valeur de marché des actions est limitée et pour lesquels les chocs spécifiques prévus par la directive sont inférieurs à celui applicable aux actions.

Il en résulte que plus un actif est considéré comme risqué, plus les fonds propres réglementaires requis du fait de sa présence au bilan de l'assureur seront élevés . C'est particulièrement le cas des actions.

2. Le deuxième pilier : les exigences de gouvernance

Le deuxième pilier met en place des exigences qualitatives en matière de gouvernance pour les organismes d'assurance.

Les assureurs doivent démontrer qu'ils ont une stratégie de gestion du risque, une structure organisationnelle et opérationnelle appropriée, un système de contrôle interne et une fonction d'audit interne efficaces 34 ( * ) .

Chaque organisme d'assurance et de réassurance doit ainsi procéder, au moins une fois par an, à une évaluation interne des risques et de la solvabilité ( Own Risk and Solvency Assessment - ORSA). Les conclusions de ces évaluations sont communiquées aux autorités de contrôles.

3. Le troisième pilier : les exigences de transparence

La directive prévoit la remise d'un rapport régulier à l'autorité de contrôle et de supervision nationale ( Regular Supervisory Report - RSR).

Les organismes d'assurance et de réassurance devront en outre publier annuellement un rapport sur leur solvabilité et leur situation financière ( Solvency and Financial Condition Report - SFCR). L'objectif est de permettre à des tiers (investisseurs, clients...) d'apprécier la pertinence des évaluations et analyses conduites par chaque assureur et donc l'adéquation de ses fonds propres.

Cette transparence doit permettre à la « discipline de marché » de s'exercer de manière plus efficace.

4. Le contrôle des groupes

La directive Solvabilité II vise à rationaliser la façon dont les groupes d'assurance sont surveillés en tenant compte de la réalité économique de leur fonctionnement, afin notamment de garantir que les risques pesant sur l'ensemble d'un groupe soient effectivement pris en compte.

La directive permet ainsi une coopération accrue entre les autorités de surveillance pour le contrôle des groupes transfrontaliers.

En contrepartie, les groupes pourront utiliser des modèles tirant profit de leur diversification.

B. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA DIRECTIVE OMNIBUS II AFIN DE LIMITER LES EFFETS PRO-CYCLIQUES ET DE FAVORISER L'INVESTISSEMENT DE LONG TERME

La directive Solvabilité II a suscité un certain nombre d'inquiétudes et de réserves , en particulier parmi les assureurs européens.

En pénalisant la détention d'actions et en répercutant les évolutions du marché sur les exigences de fonds propres, le nouveau cadre prudentiel était accusé de décourager l'investissement long, de nuire au financement des entreprises par les organismes d'assurance et d'avoir des effets pro-cycliques .

L'entrée en vigueur de la directive Solvabilité II a été plusieurs fois repoussée, jusqu'à ce que la version définitive de la directive Omnibus II la fixe au 1 er janvier 2016, le « trilogue » (négociation informelle entre le Parlement européen, la Commission européenne et le Conseil européen), ayant finalement trouvé sur un accord sur les mesures spécifiques (paquet « branches longues ») destinées à réduire les effets de la volatilité des marchés sur les fonds propres prudentiels des organismes d'assurance pratiquant des activités de long terme .

1. Le paquet « branches longues »

a) Les mesures contra-cycliques du paquet « branches longues »

Les correctifs contra-cycliques apportés par la directive Omnibus II doivent permettre de limiter les effets des fluctuations erratiques des marchés sur les fonds propres des assureurs offrant des garanties de long terme .

Les garanties de long-terme appartiennent à des produits tels que l'assurance-vie . Par exemple, les contrats devant donner lieu dans le futur au versement d'une rente fixe sur une période de temps donnée comportent une garantie de long-terme au profit de l'assuré et constitue un engagement de long-terme pour l'assureur. Le calcul de la provision technique 35 ( * ) correspondant à cette garantie repose sur l'actualisation des paiements futurs à partir de la courbe des taux sans risque arrêtée par l'AEAPP.

Le montant des provisions techniques correspondant à ces garanties, et donc les exigences en fonds propres, sont d'autant plus élevés que le taux d'actualisation employé est bas. À la suite de l'adoption de Solvabilité II et face à des marchés très volatils, les assureurs ont fait valoir qu'ils devraient être autorisés, pour leurs engagements de long terme , à utiliser un taux supérieur, c'est-à-dire à ajouter au taux sans risque une « prime » permettant de neutraliser une partie de la volatilité.

Les ajustements d'adossement et de volatilité

L es assureurs peuvent adosser leurs engagements de long terme à des actifs ayant une maturité longue . À la différence d'une entreprise qui détient des obligations dans une optique de trading et qui sera donc amenée à les céder avant leur remboursement complet, celle qui investit pour couvrir un engagement de long terme conserve ces obligations jusqu'à leur maturité , afin de sécuriser des revenus correspondant à ses prévisions de décaissement. La première est par nature exposée à un risque de marché, lié à la fluctuation de la valeur des obligations, alors que la seconde n'est soumise qu'à un risque de crédit, lié à l'éventuel défaut de l'émetteur 36 ( * ) .

Si l'écart (le spread ) entre le rendement et le taux sans risque augmente pour certaines catégories d'obligations détenues par un assureur, la valeur de ces actifs baisse alors que la valeur des provisions techniques ne diminue pas. Les fonds propres de l'assureur s'en trouvent réduits alors que la moins-value latente attachées aux actifs dépréciés ne sera pas réalisée dans la mesure où ceux-ci sont détenus jusqu'à leur remboursement complet.

L' ajustement d'adossement ( matching adjustment ) introduit par la directive Omnibus II permet d'ajouter au taux sans risque la part du spread ne correspondant pas au risque de défaut et ainsi d'annuler les conséquences, sur l'évaluation des fonds propres, de la réalisation d'un risque de marché auquel les assureurs ne sont en réalité pas exposés grâce à un bon adossement actif/passif.

De manière alternative, afin de limiter l'impact de la volatilité sur les fonds propres prudentiels des assureurs dans l'hypothèse de marchés « stressés », la directive Omnibus II permet aux assureurs d'ajouter à la courbe des taux sans risque utilisée pour valoriser leurs engagements une prime correspondant à 65% ( application ratio ) de la part hors risque de crédit du spread d'un portefeuille de référence défini par zone monétaire. Un mécanisme national peut s'ajouter à cet ajustement de la volatilité ( volatility adjusment ).

Enfin, la directive Omnibus II prévoit l'utilisation de taux d'actualisation extrapolés pour les engagements de très long terme (plus de vingt ans), plutôt que des taux du marché qui, lorsqu'ils existent, sont peu significatifs pour de tels horizons et sont souvent soumis à une forte volatilité.

b) Les mesures transitoires du paquet « branches longues»

Le paquet « branches longues » de la directive Omnibus II comporte deux mesures destinées à atténuer transitoirement l'impact de l'entrée en vigueur de la directive Solvabilité II sur le montant des provisions techniques des assureurs. L'une porte directement sur le montant des provisions techniques , l'autre touche les taux sans risque utilisés pour calculer la valeur de ces provisions. Elles ne peuvent être cumulées.

La mesure transitoire « provisions » correspond à un montant en valeur qui est déduit du montant des provisions techniques. Ce montant est égal à la différence entre le montant des provisions techniques calculées selon les règles du régime Solvabilité I et les provisions techniques résultant de l'application de la directive Solvabilité II. Cela permet de neutraliser l'éventuelle augmentation des provisions techniques liées au passage à Solvabilité II. Le montant à déduire décroît linéairement de 100% à 0% sur 16 ans.

La mesure transitoire « taux » est une prime, exprimée en points de base sur le taux d'actualisation qui permet de neutraliser les conséquences du passage du taux résultant de Solvabilité I à la courbe des taux sans risques prévue par la directive Solvabilité II. Cette prime décroitra progressivement jusqu'à s'annuler à fin de la période transitoire.

c) Les conséquences du recours par un assureur aux mesures du paquet « branches longues »

Lorsqu'il a recours à l'ajustement d'adossement, à l'ajustement de volatilité ou à l'une des mesures transitoires, l'assureur doit réaliser l'évaluation interne des risques et de la solvabilité (ORSA) , prévue par la directive Solvabilité II, avec et sans l'application de la mesure concernée .

Au vu des informations qui lui sont alors communiquées, l'autorité de supervision peut décider de renforcer les exigences en fonds propres applicables à l'assureur ( capital add-on ), si elle estime que le profil de risque de l'assureur dévie de manière significative des hypothèses fondant la mesure appliquée. L'assureur doit également indiquer dans le rapport qu'il publie annuellement sur sa solvabilité et sa situation financière (SFCR) le fait qu'il applique l'une des mesures du paquet « branches longues » et préciser l'impact qu'aurait la non-application de cette mesure.

Des obligations renforcées viennent s'ajouter lorsque l'assureur a recours à l'ajustement d'adossement ou à l'ajustement de volatilité.

2. Les mesures hors paquet « branches longues »

Si le paquet « branches longues » a concentré l'essentiel des débats depuis l'adoption de la directive Solvabilité II, la directive Omnibus II avait pour objet premier d'adapter cette dernière à l'architecture créée par le traité de Lisbonne et au nouveau système européen de surveillance financière , du fait notamment du remplacement du Comité européen des contrôleurs d'assurance et de pensions professionnelles ( Committee of European Insurance and Occupational Pension Supervisors - CEIOPS), créé en 2003, qui réunissait les superviseurs nationaux de l'Union européenne, par l'AEAPP 37 ( * ) .

La directive Omnibus II vient préciser le champ et les modalités du pouvoir réglementaire et de médiation contraignante dont est dotée cette autorité.

Le pouvoir réglementaire et le pouvoir de médiation contraignante de l'AEAPP

1. Le pouvoir réglementaire de l'AEAPP

Contrairement au CEIOPS, à laquelle la directive Solvabilité II faisait référence, l'AEAPP possède un pouvoir réglementaire. La directive Omnibus II précise les domaines dans lesquels ce pouvoir réglementaire s'exerce à travers des standards techniques ( Regulatory Implementing Acts - RTS et Implementing  Technical Standards - ITS ), par exemple les états de reporting sous Solvabilité II, et les domaines pour lesquels la Commission européenne reste compétente pour prendre des actes délégués, par exemple les paramètres de la formule standard permettant le calcul du SCR.

La directive Omnibus II comporte une mesure transitoire dans l'application de ces pouvoirs réglementaires ( sunrise clause ), qui autorise la Commission européenne à rédiger elle-même les standards techniques réglementaires (RTS), de niveau 2, entrant dans le champ de compétence de l'AEAPP pendant une période de deux ans après l'entrée en application de Solvabilité II. En revanche, l'intégralité des standards techniques d'exécution (ITS), de niveau 3, listés par Omnibus II, reste de la compétence de l'AEAPP.

L'AEAPP peut également édicter des orientations et recommandations ( guidelines ), qui sont des textes de niveau 3 ayant pour objet d'assurer une application uniforme des mesures de niveau 1 et 2 dans l'Union Européenne. Bien que les guidelines ne soient pas juridiquement contraignantes, l'AEAPP leur applique le principe du comply or explain : les autorités nationales de contrôle doivent indiquer à l'AEAPP si elles entendent se conformer à ses orientations et recommandations et, dans l'hypothèse où elles souhaiteraient y déroger, lui communiquer les raisons justifiant leur position. L'édiction de guidelines sont de la compétence de la seule AEAPP, sans endossement par la Commission européenne (contrairement aux RTS et aux ITS), ni droit d'objection par le Parlement européen et le Conseil (contrairement aux RTS).

2. Le pouvoir de médiation contraignante de l'AEAPP

L'AEAPP dispose d'un pouvoir de médiation contraignante visant à régler les désaccords survenant entre autorités de contrôle nationales au sein des collèges de contrôleurs.

Lorsque l'AEAPP a rendu une décision dans le cadre d'une médiation contraignante, les autorités nationales concernées doivent s'y conformer. Dans le cas contraire, l'AEAPP peut directement adopter une décision individuelle à l'égard de l'organisme d'assurance concerné. Une telle décision prévaut sur toute décision antérieure des autorités nationales portant sur le même objet.

La directive Omnibus II comporte également des mesures transitoires générales (hors paquet « branches longues ») et des mesures complémentaires pour le contrôle des groupes d'assurance et de réassurance.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. LE CHAMP DE L'HABILITATION À PRENDRE PAR VOIE D'ORDONNANCE LES MESURES RELEVANT DU DOMAINE DE LA LOI NÉCESSAIRE À LA TRANSPOSITION DE LA DIRECTIVE SOLVABILITÉ II

Le présent article prévoit d'habiliter le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires à la transposition de la directive Solvabilité II, telle que modifiée par la directive Omnibus II et à la mise en oeuvre des actes délégués et des actes d'exécution prévus par cette directive.

À cette occasion, pourront également être prises des mesures d'adaptation du régime juridique des organismes d'assurance en France, dans le sens d'une plus grande rationalisation. En France, les opérations d'assurance sont pratiquées par trois types d'organismes : les entreprises d'assurance, qui relèvent du code des assurances, les mutuelles et unions, régies par le livre II du code de la mutualité, et les institutions de prévoyance, relevant du code de la sécurité sociale. Sur certains points, le code de la mutualité et le code de la sécurité sociale renvoient au code des assurances et de nombreuses dispositions ont été harmonisées. Toutefois, il demeure des différences significatives entre les trois codes. L'exposé des motifs du présent projet de loi indique ainsi qu'il s'agira « d'intégrer au sein d'un seul code, celui des assurances, des règles prudentielles, et notamment des dispositions relatives à la valorisation des actifs, des passifs et des fonds propres des entités et de la situation financière des groupes » .

Cet effort de rationalisation conduira le Gouvernement à créer de « nouvelles formes juridiques de groupe exerçant une activité d'assurance ou de réassurance »,  afin de « permettre une application claire du futur régime prudentiel aux différentes formes de groupes possibles, et cohérente avec les différents niveaux d'intégration qu'elles constituent ».

L'habilitation permettra par ailleurs au Gouvernement de modifier et compléter « les dispositions du code monétaire et financier sur la coopération et l'échange d'informations entre l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution et les autorités compétentes des États non membres de l'Espace économique européen, afin d'harmoniser les dispositions applicables en matière d'assurance avec celles existant en matière bancaire ».

Enfin, le Gouvernement sera habilité à prendre des mesures d'adaptation du cadre législatif applicable aux activités d'assurance exercées dans les collectivités de Saint-Barthélemy et de Saint-Pierre-et-Miquelon, afin de rendre applicable la directive Solvabilité II. De même, le Gouvernement sera autorisé à prendre « les mesures nécessaires à la mise en conformité de la législation applicable, avec les adaptations nécessaires, dans les îles Wallis et Futuna ».

B. LA DURÉE D'HABILITATION

Le présent article prévoit un délai d'habilitation de 12 mois , qui excède donc la date limite de transposition de la directive Solvabilité II, fixée au 31 mars 2015.

L'étude d'impact jointe au présent projet de loi justifie ce délai en relevant que « les actes délégués pris par la Commission Européenne, qui seront des mesures d'exécution des principes directeurs de la directive et qui seront structurants pour la compréhension précise et la cohérence du nouveau cadre Solvabilité II, ne seront finalisés qu'au cours de l'été 2014 et seront publiés au plus tôt début 2015, selon le calendrier prévisionnel ».

Elle souligne que « l'ensemble de ces éléments de calendrier européen ainsi que la technicité et le volume des dispositions à transposer, la nécessité de procéder, dans les différents codes (code des assurances, code de la mutualité, code de la sécurité sociale et code monétaire et financier), à des adaptations pour rendre applicables les textes de Solvabilité II, incite à prévoir une durée d'habilitation suffisamment longue ».

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

La directive Solvabilité II permet d'améliorer la protection des assurés et contribue à renforcer la stabilité du secteur financier de l'Union européenne.

La nécessité de règles prudentielles robustes et sécurisantes est indiscutable. Il faut cependant veiller à ce qu'elles n'engendrent pas d'effets pervers pro-cycliques et ne découragent pas le financement de l'économie, qui passe par l'investissement de l'épargne dans des investissements de long terme et soumis à une certaine volatilité, comme les actions.

Les organismes d'assurance, à travers leur activité d'assurance vie, collectent et gèrent une part importante de l'épargne financière des ménages. Il faut donc à la fois sécuriser cette épargne et lui permettre de s'investir dans les entreprises européennes.

À cet égard, la version initiale de la directive Solvabilité II présentait des inconvénients certains , notamment une répercussion trop mécanique des variations de court terme des actifs détenus par les assureurs sur le niveau de fonds propres exigé et une pénalisation excessive de l'investissement en actions.

Notre collègue Philippe Marini, alors rapporteur général de la commission des finances, soulignait ainsi dès 2007, dans un rapport d'information 38 ( * ) « les incidences macro-économiques, et en particulier [...] l'impact potentiellement négatif des normes projetées pour les placements en actions, et donc pour l'épargne longue ».

Des mesures correctrices ont finalement été apportées par la directive Omnibus II. Elles résultent de la prise en compte des préoccupations exprimées par plusieurs États membres, dont la France , et d'un dialogue important mené entre les instances européennes et avec les acteurs du secteur de l'assurance.

La directive Solvabilité II modifiée, d'application progressive dans le temps, constitue un cadre prudentiel modernisé et plus protecteur mais offre en principe la souplesse nécessaire pour éviter les emballements pro-cycliques et ne pas excessivement pénaliser le financement de l'économie .

Il est souhaitable que le régulateur national - l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) - et l'AEAPP respectent cette orientation dans l'exercice leur pouvoir réglementaire ou de contrôle.

De même, il conviendrait que les autorités de contrôle prennent en compte les spécificités des différentes familles d'assureurs en France, notamment pour ce qui concerne la gouvernance des assureurs mutualistes et des institutions de prévoyance.

La méthode retenue pour préparer les textes de transposition, consistant en une large concertation et une étroite association des différentes parties prenantes, doit permettre d'aboutir à une solution aussi consensuelle que possible, dans le respect des objectifs et principes fixés par la directive Solvabilité II.

À l'initiative de votre rapporteur, la commission des finances a adopté un amendement de précision rédactionnelle.

Décision de la commission : votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLE 4 - Adaptation de la législation sur les assurances applicable à Mayotte et dans les îles Wallis et Futuna

Commentaire : le présent article vise à habiliter le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance les mesures permettant de rendre applicable, avec les adaptations nécessaires, l'ensemble du code des assurances à Mayotte et actualisant les dispositions du même code applicables dans les îles Wallis et Futuna.

Le code des assurances comporte des dispositions spécifiques à Mayotte. Or ces dispositions spéciales ne sont plus conformes au statut de département conféré à Mayotte par la loi organique n° 2010-1486 du 7 décembre 2010 relative au Département de Mayotte, complétée par la loi n° 2010-1487 du même jour.

De même, les dispositions du code des assurances relatives à Wallis et Futuna sont caduques.

Cette situation est une source potentielle de contentieux.

La refonte d'une part importante du code des assurances dans le cadre de la transposition de la directive « Solvabilité II » 39 ( * ) , prévue par l'article 3 du présent projet de loi, est l'occasion de mettre en conformité la législation sur les assurances applicable à Mayotte et dans les îles Wallis et Futuna.

Le présent article vise en conséquence à autoriser le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi :

- permettant de rendre applicable, avec les adaptations nécessaires, l'ensemble des dispositions du code des assurances à Mayotte ;

- actualisant les dispositions relatives aux contrats d'assurance, aux assurances obligatoires, aux organisations et régimes particuliers d'assurance et aux intermédiaires d'assurance dans les îles Wallis et Futuna.

À l'initiative de votre rapporteur, la commission des finances a adopté un amendement rédactionnel.

Décision de la commission : votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLE 4 bis Art. L. 229-5 du code de l'environnement) - Rectification d'une erreur de référence

L'article L. 229-5 du code de l'environnement porte sur les quotas d'émission de gaz à effet de serre. Il dispose notamment que, « au sens de la présente section [...] , les gaz à effet de serre sont les gaz énumérés à l'annexe I de la directive 2003/87/ CE du 13 octobre 2003 et les autres composants gazeux de l'atmosphère, tant naturels qu'anthropiques, qui absorbent et renvoient un rayonnement infrarouge ».

Or, c'est l'annexe II de cette directive qui énumère les gaz à effet de serre.

Le présent article , adopté par la commission des finances de l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue Christophe Caresche, procède à la correction de cette erreur de référence .

Décision de votre commission : votre commission a adopté cet article sans modification.

ARTICLE 5 (Art. L. 597-7 et L. 597-31 du code de l'environnement) - Suppression de l'agrément des garanties financières en matière de responsabilité civile nucléaire des exploitants

Commentaire : le présent article vise à remplacer l'obligation à la charge des exploitants nucléaires d'obtenir l'agrément préalable, par le ministre de l'économie, de l'assurance ou de la garantie financière couvrant le risque nucléaire par une simple obligation de communication des conditions générales et spéciales du contrat d'assurance ou des modalités des garanties financières.

I. LE DROIT EXISTANT

La responsabilité civile correspond à l'obligation de réparer les dommages causés à autrui. Son principe se fonde sur les articles 1382 et 1383 du Code civil.

Pour ce qui concerne le risque nucléaire, les exploitants nucléaires sont soumis à un régime de responsabilité civile spécifique qui résulte de plusieurs conventions internationales, notamment la convention de Paris du 29 juillet 1960. Les règles issues de ces conventions internationales ont été transposées en droit interne par la loi n° 68-943 du 30 octobre 1968 relative à la responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire, modifiée par la loi n° 90-488 du 16 juin 1990 et codifiée aux articles L. 597-1 et suivants du code de l'environnement par l'ordonnance n° 2012-6 du 5 janvier 2012 modifiant les livres I er et V du code de l'environnement.

Par rapport au droit commun, le régime de responsabilité nucléaire présente trois spécificités principales :

- la responsabilité de l'exploitant est engagée même en l'absence de faute ;

- la responsabilité de l'exploitant est limitée. Le plafond de responsabilité est actuellement fixé à 91 469 410,34 euros par l'article L. 597-28 du code de l'environnement. Le protocole du 12 février 2004, portant modification de la convention de Paris, prévoit de porter ce plafond à 700 millions d'euros ;

- l'exploitant nucléaire a l'obligation, aux termes de L. 597-31 du code l'environnement, « d'avoir et de maintenir une assurance ou une autre garantie financière à concurrence, par accident, du montant de sa responsabilité ».

Le même article prévoit que le contrat d'assurance ou la garantie financière souscrite par l'exploitant nucléaire doit être agréée par le « ministre chargé de l'économie et des finances ».

Or, comme le souligne l'étude d'impact annexée à la présente loi, « l'agrément des contrats n'est pas permis par le droit communautaire, conformément à la directive du Conseil du 18 juin 1992 92/49/CEE, qui a mis fin aux mesures d'approbation ou d'agrément préalable des conditions tarifaires d'assurance ».

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article supprime l'obligation d'agrément des conventions d'assurances ou des garanties financières souscrites par un exploitant nucléaire pour couvrir sa responsabilité civile nucléaire.

Il prévoit toutefois que l'exploitant nucléaire « communique au ministre chargé de l'économie les conditions générales et spéciales du contrat d'assurance qu'il a souscrit ou les modalités des garanties financières couvrant sa responsabilité civile nucléaire ».

Ces dispositions sont applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

La commission des finances a adopté, sur proposition de notre collègue député Christophe Caresche, rapporteur, un amendement tendant à rappeler que le ministre chargé de l'économie et des finances contrôle le respect par les exploitants nucléaires de l'obligation d'assurance.

Le même amendement transpose dans la partie du code de l'environnement (article L. 597-7) qui deviendra applicable lors de l'entrée en vigueur du protocole de 2004 portant modification de la convention de Paris les modifications introduites par le présent article.

En outre, l'Assemblée nationale a adopté, à l'initiative de notre collègue député Éric Alauzet et avec l'avis favorable de la commission et du Gouvernement, un amendement précisant que la communication des contrats d'assurance et des garanties financières souscrits par les exploitants d'installations nucléaires pour couvrir leur responsabilité civile doit intervenir chaque année.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le présent article permet de mettre les règles françaises en conformité avec le droit de l'Union européenne tout en maintenant un niveau de contrôle satisfaisant de la puissance publique sur la manière dont les exploitants nucléaire couvrent leur responsabilité civile.

La précision apportée par l'Assemblée nationale sur le caractère annuel de l'obligation de communication des contrats d'assurance et des garanties financières au ministre renforcent utilement le dispositif proposé par le Gouvernement.

Décision de la commission : votre commission a adopté cet article sans modification.

ARTICLE 6 (Art. L. 451-1-2, L. 451-1-4, L. 451-1-6, L. 451-2-1, L. 744-12, L. 754-12 et L. 764-12 du code monétaire et financier et L. 232-7 du code de commerce) - Transposition de la directive dite « Transparence »

Commentaire : le présent article transpose l'essentiel de la directive 2013/50/UE modifiant la directive Transparence de 2004. Il habilite également le Gouvernement à effectuer par ordonnance la transposition des dispositions de la directive de 2013 qu'il n'est pas possible, pour des raisons juridiques, de transposer dès à présent.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LA DIRECTIVE TRANSPARENCE DE 2004 : UNE PROTECTION IMPORTANTE DES INVESTISSEURS

La directive 2004/109/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 2004 sur l'harmonisation des obligations de transparence concernant l'information sur les émetteurs dont les valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé , dite directive « Transparence » , fixe les règles que doivent respecter les sociétés cotées sur un marché réglementé en matière d'information des investisseurs .

En effet, dans le cadre d'un marché financier ouvert, il importe que tous les investisseurs puissent disposer, en temps utile, des informations sur la société qui sont susceptibles d'affecter son cours de bourse.

Il s'agit en particulier d'éviter les délits d'initiés - qui consistent à utiliser une information non publique pour réaliser une opération boursière profitable au détriment des autres investisseurs -, mais aussi de permettre aux investisseurs de faire des choix en toute connaissance de cause. C'est donc un gage de confiance et, partant, d'attrait du marché financier tant pour les sociétés que pour les investisseurs.

En matière de transparence, on distingue l'information périodique de l'information continue. L'information périodique consiste en l'obligation de publier, au cours de l'exercice, plusieurs rapports financiers (rapports trimestriels, rapports semestriels, rapport annuel). Elle repose sur l'émetteur.

L'information continue vise la diffusion en temps réel de tout événement de nature à influer sur le marché. Elle concerne aussi bien des changements de stratégie (cession ou acquisition importante, par exemple) que la modification de l'actionnariat de la société (régime des « franchissement de seuils ») 40 ( * ) .

En droit français, le code monétaire et financier comprend une section « Les obligations d'information relatives aux comptes » qui retrace les obligations relatives à l'information financière périodique 41 ( * ) . Outre l'obligation de remise d'un rapport annuel et de rapports semestriels, les sociétés cotées sur un marché réglementé soumises à la législation française doivent également publier des rapports trimestriels (IV de l'article L. 451-1-2).

B. UNE DIRECTIVE RÉVISÉE À LA MARGE EN 2013

La directive 2013/50/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2013 est venue modifier la directive Transparence de 2004. Le législateur européen a recherché une simplification des règles existantes, notamment afin d'attirer les petites et moyennes entreprises (PME) et les entreprises de taille intermédiaire (ETI) vers les marchés financiers, tout en préservant une protection élevée des investisseurs.

Les principales modifications sont les suivantes :

- une clarification des règles relatives au principe de l'Etat membre d'origine (Etat membre choisi par l'émetteur, sous certaines conditions, qui est le cadre principal d'application de la directive). Comme l'explique l'étude d'impact annexée au présent projet de loi, « la directive supprime la possibilité pour les émetteurs non établis en France et dont les titres ne sont pas cotés en France de choisir la France comme Etat membre d'origine » ;

- la faculté (et non plus l'obligation) de publier des rapports financiers sur une base plus fréquente que le semestre (rapports trimestriels) ;

- l'obligation de mettre à disposition le rapport financier annuel pendant dix ans et non plus cinq ans ;

- la publication des rapports annuels sous un format électronique unique ;

- la mise à disposition des rapports semestriels dans les trois mois, et non plus les deux mois , suivant la fin du semestre (là encore dans un souci d'alléger les contraintes administratives, en particulier celles pesant sur les PME/ETI cotées) ;

- l'ajout, à la liste des organes exemptés des obligations de transparence, du Fonds européen de stabilité financière (FESF) et du Mécanisme européen de stabilité (MES) ainsi que « tout autre mécanisme établi en vue de préserver la stabilité de l'union monétaire européenne en prêtant une assistance financière temporaire à des Etats membres dont la monnaie est l'euro » ;

- un durcissement des règles relatives au franchissement de seuils , pour lesquelles les normes techniques de l'Autorité européenne des marchés financiers (AEMF) sont encore attendues. Il convient de noter que, suite à l'affaire LVMH/Hermès, la législation française a d'ores et déjà été renforcée sur ce point 42 ( * ) ;

- une harmonisation européenne en matière d'accès à l'information et d'archivage . Là encore, l'AEMF devra déterminer des normes techniques ;

- un renforcement des pouvoirs d'enquête et de sanctions des autorités nationales compétentes . Ces points ne nécessitent pas de transposition compte tenu des pouvoirs actuels de l'Autorité des marchés financiers (AMF).

Les modifications de la directive doivent être transposées avant le 27 novembre 2015 .

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. LA MISE EN COHÉRENCE DU DROIT FRANÇAIS AVEC LES MODIFICATIONS APPORTÉES À LA DIRECTIVE DE 2004

Les II à IV du présent article procède à l'essentiel de la transposition (au niveau législatif) de la directive modifiée.

Ainsi, le a) du 1° du II porte à dix ans, contre cinq ans, la durée de mise à disposition du rapport financier annuel.

Le b) du 1° du II modifie l'article L. 451-1-2 du code monétaire et financier pour le mettre en cohérence avec les nouvelles règles relatives à l'Etat membre d'origine.

Le c) du 1° du II porte de deux à trois mois après la fin du semestre le délai de publication des rapports financiers semestriels.

Le d) du 1° du II procède à la fois à la suppression de l'obligation de déposer des rapports financiers trimestriels et à la réécriture des informations devant être produites dans le rapport financier semestriel. En effet, comme le précise l'étude d'impact annexée au présent projet de loi, il convient de modifier « les dispositions relatives aux commissaires aux comptes afin de corriger une incohérence majeure. En l'état du droit, il est indiqué que les commissaires aux comptes vérifient la sincérité des comptes par rapport aux chiffres du rapport de gestion. Cela devrait être l'inverse ».

Le 2° du II ajoute le FESF et le MES à la liste des entités exemptées de produire une information périodique.

Le e) du 1°, le 3°, le 4° et le 5° du II ainsi que les III et IV du présent article procède à des corrections ou à des coordinations dans le code monétaire et financier.

Par ailleurs, plusieurs modifications de la directive seront transposées par voie réglementaire au sein du Règlement général de l'Autorité des marchés financiers.

B. UNE DEMANDE D'HABILITATION

Malgré les dispositions de transposition présentées ci-dessus, le I du présent article habilite le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi :

- nécessaires à la transposition de la directive 2013/50/UE ;

- permettant de rendre applicables ces dispositions en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna ainsi qu'à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon.

Cette demande d'habilitation porte sur la partie de la directive qui n'est pas transposable à ce jour soit que le Gouvernement attende les normes techniques de l'AEMF, par exemple s'agissant des nouvelles obligations de publication de l'information, soit qu'il veuille transposer de manière cohérente plusieurs textes proches, notamment en matière de sanctions.

L'article 24 du présent projet de loi prévoit que les ordonnances prises en application du présent article devront être publiées dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la loi.

*

L'Assemblée nationale a adopté, à l'initiative de notre collègue député Christophe Caresche, rapporteur, trois amendements rédactionnels (deux en commission et un en séance publique).

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

La révision de la directive Transparence opère des changements bienvenus sans pour autant diminuer la protection des investisseurs. Elle permet notamment de lever une partie de la contrainte qui pèse sur les plus petits émetteurs, par exemple en autorisant la publication du rapport semestriel dans un délai de trois mois et non plus de deux.

L'étude d'impact annexée au présent projet de loi relève en effet que « le délai de deux mois concernant la publication des rapports semestriels est généralement jugé trop court. Ce grief est vigoureusement exprimé par les PME, qui par définition, sont moins bien équipées ou disposent de moins de ressources pour la production de l'information financière. En outre, les analystes financiers estiment que le délai de deux mois engendre des inefficiences sur le marché. En effet, ce délai provoque un goulet d'étranglement à la fin du deuxième mois lorsque les analystes collectent l'information financière. Confrontés à un flux d'information lors de la parution des résultats semestriels, les analystes doivent sélectionner l'information qu'ils vont examiner et tendent donc à privilégier les entreprises les plus importantes et visibles (ces points ont été à de nombreuses reprises mis en avant par le Medef, MiddleNext, EnterNext, la SFAF voire dans différents rapports de Place). L'allongement du délai de publication, par la nouvelle « fenêtre de visibilité » qu'il procure aux petits émetteurs, peut donc exercer un effet bénéfique sur l'analyse financière et participer de l'amélioration de ?l'écosystème? des PME cotées ».

Votre rapporteur note également que la demande d'habilitation est légitime dès lors qu'une grande partie des textes d'application de l'AEMF ne sont pas encore connus.

En matière de sanctions, l'étude d'impact précitée note qu'il a été « choisi de ne pas proposer de mesures de transposition directe des chapitres VI A et B dans le présent projet de loi qui font l'objet d'une demande d'habilitation à transposer par voie d'ordonnance. Il pourra ainsi être tenu compte de la récente publication du règlement n° 596/2014 sur les abus de marché et la directive 2014/57/EU sur les sanctions pénales en cas d'abus de marché qui viennent d'être publiés au Journal officiel de l'Union européenne. Il en va de même de la directive et du règlement ?MIF II? (sur les infrastructures et intermédiaires de marché) également publiés le 12 juin au Journal officiel de l'Union européenne, ainsi que ?UCITS V? (en matière de gestion d'actifs), qui comportent également des dispositions relatives aux sanctions et mesures administratives liées au droit des marchés financiers. L'objectif est ainsi de ne pas modifier de manière répétée des dispositions sensibles du droit national, et au contraire de proposer une réforme cohérente, prenant en compte l'ensemble des dispositions européennes , tout en respectant le délai de transposition de la directive Transparence (27 novembre 2015) ».

Or votre commission des finances a décidé de supprimer l'article 23 ter qui habilitait le Gouvernement à transposer par ordonnance le paquet « abus de marché » ( cf. infra commentaire de l'article 23 ter ). Par cohérence avec la position exprimée sur cet article, le champ de l'habilitation du présent article a été réduit, à l'initiative de votre rapporteur, afin d'en exclure toute mesure en matière de sanctions .

À l'initiative de votre rapporteur, la commission des finances a adopté un amendement rédactionnel.

Décision de votre commission : votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLE 7 - Transposition des chapitres 1 à 9 de la « directive comptable unique »

Commentaire : le présent article habilite le Gouvernement à transposer par ordonnance les chapitres 1 à 9 de la « directive comptable unique ».

I. LE DROIT EXISTANT

La « directive comptable unique » (directive directive 2013/34/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, relative aux états financiers annuels, aux états financiers consolidés et aux rapports y afférents de certaines formes d'entreprises, modifiant la directive 2006/43/CE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant les directives 78/660/CEE et 83/349/CEE du Conseil) procède à la refonte d'une partie du droit européen en matière comptable et abroge deux anciennes directive comptable, l'une de 1978, l'autre de 1983.

Comme le souligne l'étude d'impact annexée au présent projet de loi, la directive « modifie assez peu les dispositions relatives aux normes comptables existantes en droit européen mais clarifie et modernise la structure et le contenu des états financiers annuels et des rapports de gestion ainsi que les modes d'évaluation utilisés : les catégories d'entreprises sont définies précisément et les seuils utilisés sont d'harmonisation maximale (contrairement à la situation précédente); le contenu de l'annexe comptable est désormais défini par étages successifs (du socle minimal aux exigences renforcées) et non plus en retranchant certains éléments de l'annexe de droit commun ».

L'annexe I de la directive détermine les sociétés auxquelles elle s'applique. En France, il s'agit des sociétés anonymes (SA), les sociétés en commandite par actions, la société à responsabilité limitée (SARL) et les sociétés par actions simplifiées (SAS).

La directive distingue, en fonction de seuils, les micro-entreprises, les petites entreprises, les moyennes et les grandes entreprises, ainsi que les petits, moyens et grands groupes afin d'adapter les obligations qui leur sont applicables à leur taille 43 ( * ) . Par exemple, l'article 16 de la directive définit le contenu de l'annexe comptable « pour toutes les entreprises », tandis que l'article 17 détaille « les informations complémentaires pour les moyennes et grandes entreprises ».

L'intention de la Commission européenne était de « réduire la charge administrative des petites entreprises . La simplification de la préparation des états financiers devrait aussi rendre ces derniers plus comparables, plus clairs et plus faciles à comprendre . Elle permettrait aussi aux utilisateurs des états financiers, tels que les actionnaires, les banques et les fournisseurs, de mieux comprendre les performances de l'entreprise et sa situation financière. L'économie potentielle pour les PME est estimée à 1,7 milliard d'euros par an » 44 ( * ) .

La directive comptable unique doit être transposée de telle sorte qu'elle puisse s'appliquer pour les exercices ouverts à partir du 1 er janvier 2016.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance « les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires à la transposition de la directive 2013/34/UE ».

En pratique, le chapitre 10 de la directive n'est pas couvert par cette habilitation car il est transposé par l'article 8 du présent projet de loi.

*

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

La transposition de la directive comptable unique présente un enjeu limité d'un point de vue législatif .

En effet, l'étude d'impact annexée au présent projet de loi indique que, « en France, l'ordonnance n° 2014-86 du 30 janvier 2014 a permis de créer au niveau législatif les catégories des micro-entreprises et petites entreprises au sens de la directive comptable unique [...] . Les micro-entreprises ne sont désormais plus obligées d'établir une annexe et les petites entreprises voient l'usage des états simplifiés généralisés. La transposition des seuils chiffrés délimitant les catégories d'entreprise est du niveau réglementaire et a été effectuée par le décret n° 2014-136 du 17 février 2014.

« Dans ce contexte, il reste à mettre en conformité le droit français avec les modifications techniques apportées par la directive dans les principes comptables. L'essentiel de ces modifications sont attendues au niveau réglementaire (qu'elles relèvent soit de la partie réglementaire du code de commerce, soit des règlements adoptés par l'Autorité des normes comptables, qui a compétence générale pour adopter les prescriptions comptables générales ou sectorielles en vertu de l'ordonnance n° 2009-79 du 22 janvier 2009 créant l'Autorité des normes comptables). L'essentiel de la mise en conformité devrait concerner le contenu de l'annexe comptable .

« Concernant la mise en conformité des textes législatifs, il sera nécessaire de mettre à jour certains des principes comptables du code de commerce. Pour les comptes sociaux, il s'agit de la section 2 du chapitre 3 du titre II du livre premier du code, pour les comptes consolidés de la section 3 du chapitre 3 du titre III du livre deuxième.

« Dans l'ensemble, ces principes ont très peu évolué dans la directive comptable unique. Il a été néanmoins jugé préférable d'attendre la fin des travaux techniques au niveau réglementaire avant de statuer sur le détail des ajustements requis des dispositions législatives existantes, dans l'hypothèse où une adaptation réglementaire jugée indispensable ne pourrait être envisagée sans adaptation de la règle de droit supérieure ».

Autrement dit, l'habilitation demandée au titre du présent article constitue une « sécurité » législative mais pourrait bien ne pas être utilisée .

Décision de votre commission : votre commission a adopté cet article sans modification.

ARTICLE 8 - Transposition du chapitre 10 de la directive 2013/34/UE du 26 juin 2013 relative aux états financiers annuels, aux états financiers consolidés et aux rapports y afférents de certaines formes d'entreprises (Art. L. 221-7-1, L. 223-26-1, L. 225-102-3 et L. 227-1 [nouveaux] du code du commerce)

Commentaire : le présent article transpose au sein du code de commerce le chapitre 10 de la directive comptable unique, relatif à l'obligation de transparence des paiements effectués par les industries extractives au profit des autorités publiques des Etats où elles opèrent ( reporting pays par pays).

I. LE DROIT EXISTANT

L'exploitation des ressources naturelles fait l'objet de contrats de concession et d'autres accords commerciaux entre les compagnies extractives et les gouvernements des pays concernés qui ont parfois pu alimenter les soupçons de corruption et de détournement de fonds . Aussi, depuis le début des années 2000, des initiatives sont prises par la société civile pour promouvoir la transparence et lutter contre la corruption dans les relations financières entre les industries extractives, en particulier gazières et pétrolières, et les Etats d'exploitation des ressources. Ainsi, en 2003, une conférence internationale s'est tenue à Londres, à l'invitation du gouvernement britannique, rassemblant des représentants d'une trentaine d'États, dont la France, et plusieurs grandes entreprises du secteur et organisations non gouvernementales : la conférence de Lancaster House 45 ( * ) . À l'issue de cette conférence, des principes directeurs ont été définis dans le cadre de l'initiative pour la transparence des industries extractives ( Extractive Industries Transparency Initiative - EITI).

Si cette initiative s'est bien structurée et considérablement développée après 2003, elle est toutefois limitée, comme le souligne l'étude d'impact annexée au présent projet de loi, par le fait que « reposant sur l'adhésion volontaire des Etats , elle ne couvre pas aujourd'hui un grand nombre de pays en développement qui figurent pourtant dans les principaux pays d'exploitation de ressources pétrolières et minières ». En conséquence, les Etats-Unis et l'Union européenne ont décidé de prendre directement des mesures législatives contraignantes , inspirées des principes d'EITI, pour imposer cette transparence à leurs entreprises extractives nationales.

Ainsi, les Etats-Unis ont, les premiers, adopté en juillet 2010, au sein du Dodd-Frank Act , une règle obligeant les entreprises extractives, américaines ou étrangères, qui sont cotées aux Etats-Unis et régulées à ce titre par la Securities and Exchange Commission (SEC) à publier les montants qu'elles versent aux autorités nationales des pays où elles exploitent 46 ( * ) .

L'idée d'une transparence des industries extractives a par ailleurs été officiellement reprise par le G 8 lors du sommet de Deauville des 26 et 27 mai 2011 , donc les conclusions indiquaient notamment que les signataires « [s'engagent ] à mettre en place des lois et des règlements sur la transparence, ou à promouvoir des normes à caractère volontaire, qui instaurent une obligation ou une incitation pour les entreprises pétrolières, gazières et minières de rendre compte des paiements effectués au profit de chaque Etat ».

Dans ce contexte, l'Union européenne s'est dotée d'un dispositif de transparence avec l'adoption, au sein de la directive 2013/34/UE du 26 juin 2013 relative aux états financier annuels, aux états financiers consolidés et aux rapports y afférents de certaines formes d'entreprises, d'un chapitre 10 spécifique intitulé « Rapport sur les paiements effectués au profit des Gouvernements » . Ce chapitre contient en particulier un article 42 qui demande aux Etats membres d'« imposer aux grandes entreprises et à toutes les entités d'intérêt public actives dans les industries extractives ou l'exploitation des forêts primaires d'établir et de rendre public un rapport sur les paiements effectués au profit de gouvernements sur une base annuelle ».

Sont concernés les paiements, individuels ou cumulés lorsqu'ils sont liés, dont le montant est supérieur ou égal à 100 000 euros au cours d'un exercice.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article vise à transposer directement le chapitre 10 précité de la directive du 26 juin 2013.

Ainsi, il crée notamment un nouvel article L. 225-102-3 au sein du code de commerce , qui définit le régime de cette obligation de publication, dont les principaux éléments sont les suivants :

- l'obligation s'appliquera aux sociétés qui dépassent certains seuils de bilan, chiffre d'affaires ou nombre de salariés, et qui opèrent dans le domaine de l'extraction des ressources naturelles au sens large (hydrocarbures, mines, sel, sable, forêts primaires) ;

- les paiements concernés sont ceux supérieurs ou égaux à 100 000 euros au cours de l'exercice précédent , que le paiement ait été effectué en une ou en plusieurs fois si ces versements sont liés entre eux, à toute autorité nationale, régionale ou locale d'un Etat ou territoire, ou toute entité contrôlée par une telle autorité, conformément aux prescriptions de la directive ;

- le rapport fait l'objet d'une délibération en conseil d'administration , est déposé au greffe du tribunal de commerce et est publié par la société sur son site Internet ;

- l'absence de dépôt est passible de sanction selon des modalités précisées par décret.

Le présent article crée par ailleurs deux nouveaux articles au sein du code de commerce : le L. 221-7-1 qui étend l'obligation de transparence aux sociétés en nom collectif dont les associés sont des sociétés à responsabilité limitée (SARL) ou des sociétés par actions ; et le L. 223-26-1 qui l'étend aux sociétés à responsabilité limitée .

De plus, le présent article effectue une coordination pour s'assurer que le dispositif puisse s'appliquer également aux sociétés par actions simplifiées mentionnées à l'article 227-1.

Enfin, le dernier alinéa du présent article précise qu'il est applicable dans les îles Wallis-et-Futuna , qui n'ont pas de compétence législative en matière de droit commercial.

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté, en commission des finances, quatre amendements rédactionnels à l'initiative de notre collègue député Christophe Caresche, rapporteur.

En séance publique, elle a procédé à des modifications substantielles, visant toutes à préciser le contenu et la portée de l'obligation de publication :

• Quatre amendements identiques, présentés respectivement par notre collègue député Pascal Cherki, par des membres du groupe socialiste, républicain et citoyen, des membres du groupe écologiste et des membres du groupe communiste, républicain et citoyen, adoptés après avis favorables de la commission et du Gouvernement après sous-amendement par le Gouvernement, visent à préciser que la publication du rapport sur les paiements sur le site Internet de la société est « gratuite, accessible au public et lisible » .

• Deux amendements identiques, présentés par notre collègue député Pascal Cherki et par notre collègue député Yann Galut et d'autres membres du groupe socialiste, républicain et citoyen, adoptés après avis favorable de la commission et avis de sagesse du Gouvernement, ont précisé le contenu du rapport sur les paiements , qui devra ainsi retracer tous les paiements effectués dans chacune des sept catégories suivantes : droits à la production ; impôts ou taxes perçus sur le revenu, la production ou les bénéfices ; redevances ; dividendes ; primes de signature, de découverte et de production ; droits de licence, frais de location, droits d'entrée ; et paiements pour des améliorations des infrastructures.

• Deux amendements identiques des mêmes auteurs, adoptés après avis favorables de la commission et du Gouvernement, ont prévu que le rapport est approuvé par le conseil d'administration de la société, et non pas seulement délibéré ;

• Un amendement présenté par notre collègue député Eric Alauzet et d'autres membres du groupe écologiste, adopté après avis favorables de la commission et du Gouvernement, précise que les entreprises qui publient des informations partielles ou erronées doivent également être sanctionnées ;

• Un amendement présenté par le Gouvernement, adopté avec avis favorable de la commission, a précisé la sanction infligée aux sociétés manquant à leur obligation de publicité, à savoir une amende de 3 750 euros - ce qui fait de ce manquement un délit - et, sur décision du juge, la peine complémentaire d'affichage et de publicité de la sanction (9° de l'article 131-39 du code pénal).

Elle a en outre, à l'initiative de son rapporteur, adopté un amendement rédactionnel.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

L'adoption de l'obligation de publication pour les industries extractives au sein de la directive et, désormais, dans notre droit national, marque une étape importante dans la lutte contre la corruption et l'amélioration de la transparence des grandes entreprises multinationales , au même titre que le reporting pays par pays introduit par la loi du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires.

Aux Etats-Unis, l'adoption de la règle n'a toutefois pas encore été suivie d'effets . En effet, son entrée en vigueur est - comme souvent pour ce type de règlementations - conditionnée par la publication de règles complémentaires par la SEC. Ces règles ont été publiées par la SEC en 2013 seulement, mais attaquées en justice et censurées par le juge, car elles ne prévoyaient pas d'exception et qu'elles ne permettaient pas aux sociétés de ne transmettre qu'à la SEC, sans publicité, les données en question. Depuis cette condamnation, la SEC n'a pas publié de nouvelles règles rendant effective l'obligation de publication prévue par la loi.

Au sein de l'Union européenne, l'obligation prévue par la directive devra être transposée par tous les Etats-membres, avant le 15 juillet 2015, pour une application au plus tard à compter de 2016.

La transposition proposée par le présent article va, de ce point de vue, plus loin que la directive de deux points de vue :

• D'une part, le présent article prévoit une double publication du rapport sur les paiements : à la fois son dépôt au greffe du tribunal de commerce, qui est rendu obligatoire par la directive, et sa publication par Internet. Cette double précaution n'est pas inutile au regard de l'expérience américaine, où les entreprises cherchent à réduire l'obligation de transparence à la transmission d'un rapport non public à la SEC ;

• D'autre part, l'article 23 du présent projet de loi prévoit que le présent article est applicable aux exercices ouverts à compter du 1 er janvier 2015 , soit un an avant la date limite prévue par la directive . Ainsi, la première publication aura lieu en 2016, correspondant aux paiements effectués au cours de l'exercice 2015. Ainsi, la France anticipe l'engagement européen tout en laissant aux entreprises le temps de mettre en place les systèmes d'informations et de recueil des données nécessaires à la constitution du rapport sur les paiements.

Par ailleurs, votre commission est favorable aux ajouts de l'Assemblée nationale qui, pour l'essentiel, précisent des éléments qui auraient figuré dans le décret d'application (gratuité et accessibilité du rapport sur Internet ; catégories de paiements concernés, etc.).

Au total, d'après l'étude d'impact annexée au présent article, les seuils d'entreprises qui seront fixés par le décret seront relativement bas , conformément aux seuils des grandes entreprises de la directive : 250 salariés et 20 millions euros de total de bilan ou 40 millions d'euros de chiffre d'affaires. Sur cette base, l'étude d'impact estime à environ « une trentaine » le nombre d'entreprises concernée s, avec d'importants groupes multinationaux entrant dans la composition du CAC 40, mais aussi des entreprises de taille intermédiaire.

Décision de la commission : votre commission a adopté cet article sans modification.

ARTICLE 9 (Art. L. 421-16 du code monétaire et financier) - Adaptation du code monétaire et financier pour l'application du règlement (UE) n° 236/2012 sur la vente à découvert

Commentaire : le présent article autorise le président de l'Autorité des marchés financiers, ou son représentant, à décider la mise en oeuvre de restrictions temporaires des ventes à découvert en cas de baisse significative du prix d'un titre.

I. LE DROIT EXISTANT

L'étude d'impact annexée au présent projet de loi rappelle qu'il y a « vente à découvert lorsque le vendeur cède un titre qu'il ne possède pas ». Il s'agit en réalité d'un pari à la baisse. Or, d'après la même étude d'impact, « au plus fort de la crise financière, en septembre 2008, les autorités compétentes de plusieurs États membres et les autorités de surveillance de pays tiers tels que les États-Unis et le Japon ont adopté des mesures d'urgence pour limiter ou interdire la vente à découvert de certaines valeurs mobilières ou de l'ensemble d'entre elles. Ces autorités craignaient que, dans un contexte de grande instabilité financière, la vente à découvert n'aggrave la spirale à la baisse du prix des actions, notamment dans les établissements financiers, au point de pouvoir menacer leur viabilité et d'engendrer des risques systémiques ».

Faute d'un cadre commun d'action entre les différents Etats membres, la Commission européenne a proposé l'adoption d'un règlement visant à encadrer les ventes à découvert.

Ainsi, le règlement (UE) n° 236/2012 du Parlement européen et du Conseil du 14 mars 2012 sur la vente à découvert et certains aspects des contrats d'échange sur risque de crédit prévoit la possibilité de suspendre temporairement les ventes à découvert sur un titre. Cette possibilité sera en particulier ouverte lors de « circonstances exceptionnelles » (article 20 du règlement) ou lorsque le prix du titre financier connaît une « baisse significative » en un court laps de temps (article 23 du règlement).

En droit français, le II de l'article L. 421-16 du code monétaire et financier autorise le président de l'Autorité des marchés financiers (AMF) à prendre les mesures d'urgence qui s'imposent en cas de « circonstances exceptionnelles ».

En revanche, s'agissant de la restriction prévue par l'article 23 du règlement, c'est le Collège de l'AMF qui est compétent pour prononcer la suspension des ventes à découvert. Cette situation n'est pas optimale puisque, comme l'indique l'étude d'impact précitée, « les délais de saisine du Collège, y compris en cas de consultation écrite - 2 jours ouvrés - sont incompatibles avec la nécessité de prendre rapidement une telle mesure dans des délais contraints , par ailleurs, par le règlement européen ».

En effet, la décision de suspension doit être décidée le jour même de la séance qui a vu la baisse significative du cours du titre. Elle doit alors être portée à la connaissance de l'Autorité européenne des marchés financiers (AEMF) dans les deux heures suivants la clôture du marché (soit 19h30 au plus tard). L'AEMF doit ensuite informer les autres régulateurs et organiser une consultation qui être terminée avant minuit.

La décision de suspension s'applique à la journée de bourse suivante et peut être prolongée, au maximum, pour deux journées de bourse supplémentaires.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article insère un III au sein de l'article L. 421-16 du code monétaire et financier qui dispose que « pour la mise en oeuvre des restrictions temporaires des ventes à découvert prévues à l'article 23 du règlement (UE) n° 236/2012 [...] , le président de l'Autorité des marchés financiers ou la personne qu'il désigne peut prendre une décision et la prolonger dans les conditions fixées par ce même règlement ».

*

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

L'article 23 du règlement européen sur les ventes à découvert vise un cas, fort heureusement, rare, à savoir la baisse significative du prix d'un titre. Néanmoins, si un tel cas devait se présenter, il importe de pouvoir agir au plus vite afin de préserver l'intégrité du marché.

À cet égard, il semble bienvenu de confier le pouvoir de suspension des ventes à découvert au président et non pas au collège de l'AMF.

Décision de votre commission : votre commission a adopté cet article sans modification.

ARTICLE 10 - Transposition de la directive 2014/17/UE du 4 février 2014 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage résidentiel

Commentaire : le présent article habilite le Gouvernement à transposer par ordonnance la directive 2014/17/UE du 4 février 2014 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage résidentiel, ainsi qu'à procéder aux adaptations nécessaires pour les rendre applicables dans les différentes collectivités d'outre-mer.

I. LE DROIT EXISTANT

En France, la distribution du crédit immobilier est principalement encadrée par les articles L. 312-1 et suivants du code de la consommation qui établissent un certain nombre de règles en matière de publicité, d'informations et de droits de l'emprunteur (rétractation, etc.), ainsi que de règles pour garantir la bonne exécution du contrat (notamment en termes d'évaluation de la solvabilité de l'emprunteur).

En revanche, dans certains de l'Union européenne, la prépondérance d'un système de crédit hypothécaire où le crédit est accordé en référence au prix du bien et non des capacités de remboursement de l'emprunteur limite l'importance qui y est accordée à l'évaluation de la solvabilité de l'emprunteur. C'est, notamment, le cas de l'Irlande , où ce système a contribué à la crise financière et économique du pays. Ainsi que le soulignait notre collègue Philippe Marini, alors rapporteur général, lors d'une communication sur la situation financière de l'Irlande en 2010, « l'Irlande était un pays très vertueux sur le plan budgétaire, mais elle a laissé se développer une bulle immobilière au coeur de son système financier. C'est le système du crédit à taux variable alloué à des débiteurs sans véritable appréciation des capacités réelles de remboursement , qui, avec l'effet de levier du crédit hypothécaire, a été dévastateur » 47 ( * ) . Dans le même sens, la Commission européenne indique qu' en 2006-2007, 45 % des crédits hypothécaires distribués au Royaume-Uni l'ont été sans vérification des revenus de l'emprunteur 48 ( * ) .

Dans ce contexte, le Parlement européen et le Conseil ont adopté, le 4 février 2014, la directive 2014/17/UE portant sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage résidentiel, dite directive sur les crédits hypothécaires 49 ( * ) . Elle vise, selon les termes de la Commission européenne, à « créer un marché unique efficient et compétitif pour les consommateurs, les prêteurs et les intermédiaires de crédit avec un haut niveau de protection des consommateurs, ainsi qu'à promouvoir la stabilité financière en garantissant que les marchés de crédit hypothécaire opèrent de façon responsable ».

A cette fin, la directive comporte six principaux éléments :

- un renforcement de la transparence , grâce à la généralisation de la fiche d'information standardisée européenne (FISE) au stade pré-contractuel ;

- des garanties avant la conclusion du crédit immobilier , en particulier l'obligation de conduire une évaluation de la solvabilité des emprunteurs ;

- le droit à un remboursement anticipé ;

- l'interdiction des pratiques d'offres liées (par exemple offres liées de crédit immobilier et d'assurance ou d'autres services financiers) ;

- des règles applicables aux prêteurs et aux intermédiaires de crédit , en particulier en matière de structure de rémunération, pour s'assurer qu'ils agissent dans l'intérêt du consommateur ;

- des standards de qualité , notamment en termes de formation et de connaissance des personnels de vente des crédits hypothécaires.

Cette directive doit être transposée par les États membres avant le 21 mars 2016 , soit plus de deux ans après son adoption au niveau européen.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article vise à habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures législatives nécessaires à la transposition de la directive du 4 février 2014 sur les crédits hypothécaires .

Il vise par ailleurs à permettre au Gouvernement, également par voie d'ordonnance, de rendre applicables, avec les adaptations nécessaires, les dispositions de cette directive en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, ainsi que de procéder aux adaptations nécessaires des dispositions législatives concernées pour les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon.

Conformément au IV de l'article 24, cette ordonnance devra être prise dans un délai de quinze mois à compter de la publication de la loi.

*

Le présent article a été adopté par l'Assemblée nationale sans modification.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Les dispositions de la directive ont un faible impact sur la distribution du crédit immobilier en France , dont l'encadrement est déjà proche, sinon supérieur, à ses prescriptions, en particulier s'agissant de l'information des emprunteurs et de la vérification de la solvabilité. De plus, le modèle français de distribution du crédit est moins directement concerné, dans la mesure où, comme l'indique l'étude d'impact annexée au présent projet de loi, « l'inspiration de la Commission était proche d'un modèle très désintermédié du crédit immobilier , dans lequel des courtiers proposent une série de crédits hypothécaires au consommateur (modèle anglo-saxon), contrairement au modèle français où la négociation est le plus souvent directe avec le banquier ».

En France, les adaptations auxquelles devra procéder l'ordonnance seront pour l'essentiel des modifications techniques pour garantir l'adéquation des procédures françaises avec les nouveaux standards européens. Par ailleurs, deux éléments de la directive, d'harmonisation maximale, devront être traduits en droit français :

- la mise en place d'une fiche standardisée d'information au stade précontractuel, sur le modèle de la fiche d'information pré-contractuelle européenne normalisée (FIPEN) s'agissant du crédit à la consommation ;

- la définition du taux annuel effectif global (TAEG) pour assurer la comparabilité des offres de crédit.

A l'inverse, on peut considérer que la directive consiste à généraliser à l'échelle européenne, y compris au modèle anglo-saxon, certains garde-fous de la protection du consommateur propres au modèle français . La transposition de la directive devrait contribuer, à cet égard, à renforcer l'encadrement de la distribution du crédit immobilier des autres Etats membres et, partant, la sécurité financière de l'ensemble de l'Union, en particulier au sein de la zone euro.

Décision de la commission : votre commission a adopté cet article sans modification.

ARTICLE 11 - Habilitation du Gouvernement à transposer la directive 2013/11/UE du 21 mai 2013 relative au règlement extrajudiciaire des litiges de consommation

Commentaire : le présent article vise à autoriser le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires à la transposition de la directive 2013/11/UE du 21 mai 2013 relative au règlement extrajudiciaire des litiges de consommation (RELC).

I. LE DROIT EXISTANT

La directive 2013/11/UE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2013 relative au règlement extrajudiciaire des litiges de consommation et modifiant le règlement (CE) n° 2006/2004 et la directive 2009/22/C, dite directive « RELC », vise à favoriser et généraliser la résolution extrajudiciaire des litiges, plus couramment appelée « médiation », concernant les obligations découlant de contrats de vente de marchandises ou de prestations de services, conclus entre un professionnel établi dans l'Union européenne et un consommateur résidant dans l'Union.

La directive poursuit quatre objectifs principaux :

- la généralisation des mécanismes de résolution extrajudiciaire des litiges à tous les secteurs professionnels, dans chaque pays de l'Union, afin de donner la possibilité à tout consommateur de faire valoir aisément ses droits quel que soit le professionnel concerné et quel que soit son lieu d'implantation ;

- la mise en place de dispositifs de résolution extrajudiciaire des litiges qui répondent à des exigences de qualité en termes d'accès aux procédures, de compétence, d'impartialité, de transparence, d'efficacité et d'équité. Le respect de ces critères impose des exigences particulières pour les « médiateurs d'entreprise » (nomination par un collège paritaire ; mandat de médiateur d'au moins trois ans, absence de lien hiérarchique et fonctionnel avec l'entreprise, budget autonome, délai de viduité 50 ( * ) ) ;

- le contrôle par des autorités compétentes des dispositifs de résolution extrajudiciaire des litiges afin de garantir leur conformité aux critères fixés par la directive précités, avec possibilité, en cas de manquement, d'interdire à l'entité de médiation non conforme de poursuivre son activité ;

- la délivrance effective aux consommateurs d'une information adéquate sur les mécanismes de médiation.

La directive RELC est complétée par règlement (UE) n° 524/2013 du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2013 relatif au règlement en ligne des litiges de consommation et modifiant le règlement (CE) n° 2006/2004 et la directive 2009/22/CE, dit règlement « RLLC », qui vise à élaborer une plateforme européenne du règlement extrajudiciaire des litiges nés des transactions en ligne.

Elle doit être transposée avant le 9 juillet 2015.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article vise à autoriser le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires à la transposition de la directive RELC.

Le Gouvernement serait également habilité à prendre les mesures destinées à rendre applicables ces nouvelles règles, avec les adaptations nécessaires, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna, ainsi que dans les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon.

Le délai de transposition serait fixé à huit mois à compter de la promulgation de la présente loi.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES

Votre rapporteur est favorable à la généralisation de la médiation et approuve l'essentiel des recommandations du groupe de travail présidé par Emmanuel Constans 51 ( * ) , médiateur des ministères économiques et financiers, notamment le principe de gratuité, d'absence de seuil et de réclamation préalable auprès du professionnel.

Notre collègue député Christophe Caresche estime, dans son rapport fait sur la présente loi au nom de la commission des finances de l'Assemblée, que « compte tenu de l'importance du sujet pour les entreprises et la vie quotidienne des consommateurs, il est important d'associer les parlementaires et les associations de consommateurs à la rédaction de l'ordonnance ».

Il indique ainsi que, lors des auditions auxquelles il a procédé, le Gouvernement s'est engagé à mettre en place un comité de pilotage chargé du suivi de la rédaction de l'ordonnance.

Ce comité « définira les modalités de désignation des médiateurs d'entreprise et le fonctionnement des structures qui les accueillent. Il déterminera également les modalités de mise en place de l'autorité publique d'évaluation de la médiation ».

Il pourrait être composé « des personnalités suivantes :

« - quatre parlementaires ayant un intérêt pour la matière consumériste (deux députés et deux sénateurs) ; le président pourrait être choisi parmi ces derniers ;

« - cinq représentants des associations de consommateurs ;

« - cinq représentants des professionnels (seraient tout particulièrement pressentis des représentants issus de secteurs ayant une expérience forte en matière de médiation, c'est-à-dire issus des secteurs financier, des transports, de l'énergie et des télécommunications) ;

« - les administrations concernées : DGCCRF, Chancellerie . »

Notre collègue député estime que les travaux du comité de pilotage devraient achevés avant la fin du mois de février 2015, afin de respecter le délai de transposition, fixé au 9 juillet 2015.

Décision de votre commission : votre commission a adopté cet article sans modification.

ARTICLE 12 (article L. 143-6 du code des assurances, art. L. 222-8 du code de la mutualité et art. L. 932-45 du code de la sécurité sociale) - Résorption d'écarts de transposition de la directive 2003/41/CE concernant les activités et la surveillance des institutions de retraite professionnelle

Commentaire : le présent article vise à résorber des écarts de transpositions de la directive 2003/41/CE du 3 juin 2003 concernant les activités et la surveillance des institutions de retraite professionnelle (directive IORP).

L'ordonnance n° 2006-344 du 23 mars 2006 relative aux retraites professionnelles supplémentaires a transposé en droit interne la directive 2003/41/CE du 3 juin 2003 concernant les activités et la surveillance des institutions de retraite professionnelle, dite « directive IORP ». Cette ordonnance a été ratifiée par l'article 64 de la loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006 pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié et portant diverses dispositions d'ordre économique et social.

La directive transposée vise à contribuer à l'institution d'un marché intérieur des régimes de retraite professionnelle et harmonise les règles prudentielles applicables aux institutions fournissant des prestations de retraite supplémentaire.

Elle prévoit notamment à son article 12 que « chaque État membre veille à ce que chaque institution établie sur son territoire élabore, et revoie au moins tous les trois ans, une déclaration écrite sur les principes de sa politique de placement ».

Son article 11.3 précise que cette déclaration « est communiquée à leur demande aux affiliés et aux bénéficiaires et/ou, le cas échéant, à leurs représentants ». L'article 6 définit les affiliés comme « les personnes auxquelles leur activité professionnelle donne ou donnera droit à des prestations de retraite conformément aux dispositions d'un régime de retraite » et les bénéficiaires comme « les personnes recevant des prestations de retraite ».

Cette obligation a été transposée aux articles L. 143-6 du code des assurances, L. 222-8 du code de la mutualité et L. 932-45 du code de la sécurité sociale, lesquels prévoient qu'un rapport sur la politique de placement « est remis, sur demande, au souscripteur ».

Or, s'agissant des contrats de retraite supplémentaire, le terme de « souscripteur » désigne, au sens des articles L. 143-1 du code des assurances, L. 222-3 du code de la mutualité et L. 932-40 du code de la sécurité sociale, l'employeur ou un groupe d'employeurs 52 ( * ) . Le droit interne est donc plus restrictif que la directive quant aux destinataires du rapport sur la politique de placement.

De fait, l'étude d'impact annexée au présent projet de loi indique qu'actuellement le rapport sur la politique de placement n'est pas remis aux affiliés ni aux bénéficiaires des contrats d'assurance retraite supplémentaire.

Cet écart de transposition a été mis au jour à l'occasion d'un contrôle mené par l'Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles (AEAPP ou EIOPA en anglais) sur la transposition de la directive IORP dans les États membres de l'Union européenne.

Le présent article a pour objet de remédier à cette situation.

Pour ce faire, il modifie les articles L. 143-6 du code des assurances, L. 222-8 du code de la mutualité et L. 932-45 du code de la sécurité sociale pour prévoir que le rapport sur la politique de placement est remis, sur demande, non seulement aux souscripteurs, mais également, selon la terminologie propre à chacun des trois codes concernés, aux adhérents ou aux membres participants ou encore aux participants, ainsi qu'aux bénéficiaires.

Décision de la commission : votre commission a adopté cet article sans modification.

ARTICLE 13 - Mise en cohérence des dispositions applicables aux collectivités d'outre-mer concernant les autorités de supervision financière et bancaire

Commentaire : le présent article vise à habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures nécessaires à l'extension et à l'adaptation des règles de fonctionnement et des pouvoirs de l'Autorité des marchés financiers (AMF) et de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) pour les collectivités d'outre-mer de Nouvelle-Calédonie, de Polynésie française et des îles Wallis et Futuna.

I. LE DROIT EXISTANT

Les missions, les compétences et les règles de fonctionnement des deux autorités nationales de supervision en matière financière et bancaire , l'Autorité des marchés financiers (AMF) et l'Autorité de contrôle prudentiel, devenue Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), ont été largement modifiées au cours des dernières années , à la faveur non seulement des transposition et adaptations des directives et des règlements européens, en particulier CRD 4 53 ( * ) ou encore EMIR 54 ( * ) , mais également des dispositions strictement nationales, notamment la loi du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires.

Cette évolution des compétences et de l'organisation des autorités de supervision n'a pas toujours été transposée, étendue et adaptée pour s'appliquer également en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna, ainsi qu'à Saint-Barthélemy et Saint-Pierre-et-Miquelon . Il convient donc, selon l'étude d'impact annexée au présent projet de loi :

- d' étendre systématiquement à ces collectivités les dispositions relatives à la composition et aux missions des autorités de supervision ;

- d' adapter à ces territoires les dispositions relatives au rôle des autorités de supervision dans les échanges d'informations prévus par les normes de l'Union européenne.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article vise à autoriser le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures législatives permettant :

- d'une part, de rendre applicables dans les pays et territoires d'outre-mer du Pacifique, avec les adaptations nécessaires, les dispositions du code monétaire et financier relatives aux missions et aux règles de fonctionnement des autorités de supervision financière et bancaire ;

- d'autre part, de procéder aux adaptations nécessaires de ces dispositions pour les collectivités de Saint-Barthélemy et de Saint-Pierre-et-Miquelon .

Conformément au I de l'article 24 du présent projet de loi, cette ordonnance devra être prise dans les huit mois à compter de la publication de la loi.

*

Le présent article a été adopté par l'Assemblée nationale sans modification.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Les trois dernières années ont été l'occasion d'une profonde actualisation des dispositions relatives aux règles de fonctionnement, aux missions et aux compétences des autorités de supervision financière et bancaire , dans un contexte de développement important des règlementations financières.

D'après l'étude d'impact annexée au présent projet de loi, le Conseil d'Etat aurait attiré l'attention du Gouvernement sur la nécessité de mettre en cohérence les dispositions d'extension outre-mer de ces différentes évolutions législatives . Il s'agira en pratique de deux principaux éléments :

- l'extension systématique , lorsque cela n'a pas été fait, des dernières réformes des autorités de supervision aux pays et territoires d'outre-mer ;

- l'insertion des dispositions nécessaires pour tirer les conséquences du principe d'absence de compétence des autorités européennes de supervision dans les territoires d'outre-mer soumis au principe d'identité législative , à savoir Saint-Barthélemy et Saint-Pierre-et-Miquelon.

Décision de la commission : votre commission a adopté cet article sans modification.

ARTICLE 14 - Mécanisme d'extension aux collectivités d'outre-mer des normes techniques adoptées par les autorités européennes de supervision financière et bancaire

Commentaire : le présent article vise à donner au ministre chargé de l'économie compétence pour étendre par arrêté aux collectivités d'outre-mer les normes techniques adoptées par les autorités européennes de supervision financière et bancaire.

I. LE DROIT EXISTANT

Les collectivités d'outre-mer, qu'elles soient soumis au principe d'identité législative (Saint-Barthélemy et Saint-Pierre-et-Miquelon) ou non (Nouvelle-Calédonie, Polynésie française et Wallis-et-Futuna), sont considérées par l'Union européenne comme des « pays et territoires d'outre-mer » (PTOM) dans lesquels les normes techniques et les règlements d'exécution produits par les autorités et agences européennes ne sont pas d'application directe .

C'est en particulier le cas des normes techniques d'exécution qui sont développées par les autorités européennes de régulation financière et bancaire, Autorité bancaire européenne (ABE) ou Autorité européenne des marchés financiers (AEMF), puis adoptées par la Commission européenne et publiées au Journal officiel de l'Union européenne.

Ces normes techniques sont pourtant un complément essentiel de l'ensemble de la législation européenne en matière économique et financière . Par exemple, si le principe d'une limitation de la rémunération variable des preneurs de risque ( traders ) des établissements de crédit a été posé par la directive sur les exigences de fonds propres dites CRD IV, ce sont des normes techniques de l'Autorité bancaire européenne, ensuite approuvée par la Commission européenne, qui définissent précisément quelles catégories de personnel doivent être considérées comme des preneurs de risque au sens de la directive.

L'ensemble de ces normes techniques d'exécution constituent le « recueil réglementaire unique » ( single rule book ) qui doit permettre d'assurer la cohérence de la réglementation financière sur l'ensemble du territoire de l'Union européenne.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article vise à insérer deux nouveaux articles au sein du code monétaire et financier, qui donnent l'un et l'autre compétence au ministre chargé de l'économie pour prendre, par arrêté, les mesures nécessaires à la mise en oeuvre des normes techniques adoptées par les autorités européennes de surveillance (Autorité bancaire européenne et Autorité européenne des marchés financiers) dans les territoires d'outre-mer :

- un article L. 711-23 s'agissant de Saint Barthélemy et de Saint-Pierre-et-Miquelon ;

- un article L. 712-9 s'agissant de la Nouvelle-Calédonie, de la Polynésie française et des îles Wallis-et-Futuna.

*

À l'initiative de notre collègue député Christophe Caresche, rapporteur, la commission des finances de l'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

L'extension aux collectivités d'outre-mer de la réglementation européenne en matière financière et bancaire, qui est souvent opérée par ordonnances, est partiellement privée d'effets si les standards techniques des autorités européennes de supervision, qui en sont l'indispensable complément, n'y sont pas également étendus .

Comme le souligne l'étude d'impact annexée au présent article, « sans intégration de ce nouveau pouvoir du ministre, les normes et standards techniques régissant les établissements bancaires et financiers ne pourront pas s'appliquer dans les PTOM, créant ainsi une distorsion entre les règles qui leur sont applicables et celles qui sont applicables en métropole », alors même que les établissements financiers de ces territoires sont « bien souvent, des filiales ou des succursales d'établissements métropolitains ».

*

Votre commission a adopté un amendement visant à corriger une erreur de référence .

Décision de la commission : votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLE 15 - Adaptation des règles applicables aux succursales d'établissement de crédit de pays tiers aux dispositions européennes sur les exigences de fonds propres

Commentaire : le présent article vise à habiliter le Gouvernement à effectuer par voie d'ordonnance les adaptations du régime des succursales d'établissements de crédit des pays tiers rendues notamment nécessaires par l'adoption en 2013 du paquet « CRD IV » sur les exigences de fonds propres au niveau européen.

I. LE RÉGIME DES SUCCURSALES D'ÉTABLISSEMENT DE CRÉDIT DES PAYS TIERS

L'article L. 511-21 du code monétaire et financier définit les succursales d'établissement de crédit comme des « [ sièges ] d'exploitation qui constitue une partie dépourvue de personnalité juridique d'un établissement de crédit ou d'un établissement financier et qui effectue directement, en tout ou en partie, les opérations inhérentes à l'activité d'un établissement de crédit ».

Lorsqu'il s'agit d'une succursale d'une banque d'un Etat membre de l'Union européenne, elle bénéficie du « passeport européen », c'est-à-dire la possibilité de faire valoir son agrément obtenu dans cet autre Etat membre pour bénéficier en France de la libre prestation d'établissement et de service.

En revanche, lorsqu'il s'agit d'une succursale d'une banque d'un pays tiers, c'est-à-dire hors Union européenne ou Espace économique européen, elle doit obtenir un agrément auprès de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) . D'après l'étude d'impact annexée au présent projet de loi, vingt et une entités sont agréées à ce titre ; elles représentent un total de bilan d'environ 24 milliards d'euros, pour environ 800 salariés. D'après les informations recueillies par votre rapporteur, il s'agit pour l'essentiel de succursales de banques des Etats-Unis, du Japon, de l'Inde, du Qatar ou encore des Emirats arabes unis.

Le régime de ces succursales est très lacunaire dans la partie législative du code monétaire et financier car, comme l'indique l'étude d'impact annexée au présent projet de loi, « les dispositions applicables à ces entités [sont] dispersées dans les livres V (articles L. 511-13, L. 511-17 et D. 511-9) et VI (articles L. 613-31-1 et suivants et R. 613-24) ».

Or, la directive 2013/36/UE sur les exigences de fonds propres, dite « CRD IV », prévoit, dans son article 47, que les Etats membres ne peuvent accorder aux succursales d'établissements de crédit de pays tiers un régime plus favorable qu'aux succursales d'établissements européens . Ainsi, l'ordonnance n° 2014-158 du 20 février 2014, qui a transposé en droit français le paquet « CRD IV », a seulement renvoyé à un arrêté du ministre chargé de l'économie la précision des « règles applicables aux succursales établies sur le territoire de la République française par des établissements de crédit ayant leur siège social dans un Etat qui n'est pas partie à l'accord sur l'Espace économique européen ». Cependant, comme l'indique l'étude d'impact précitée, « il n'existe pas d'arrêté ministériel traitant spécifiquement des succursales de pays tiers » et les arrêtés existants, dans lesquels les règles applicables à ces succursales sont en partie précisées, sont, pour la plupart, « obsolètes depuis l'entrée en vigueur au 1 er janvier 2014 du règlement (UE) n° 575/2013 ».

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article vise à habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi permettant de compléter et d'adapter les dispositions du code monétaire et financier aux succursales des établissements de crédit des pays tiers, afin d'assurer leur conformité avec le paquet « CRD IV » 55 ( * ) .

Il habilite également le Gouvernement à étendre ces dispositions, avec les adaptations nécessaires, dans les collectivités d'outre-mer .

Conformément au V de l'article 24 du présent projet de loi, cette ordonnance devra être prise dans un délai de cinq mois à compter de la promulgation de la loi.

*

Le présent article a été adopté par l'Assemblée nationale sans modification.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

L'objectif de l'ordonnance sollicitée par le Gouvernement est double :

- « compléter le corpus national lorsqu'il est lacunaire, notamment en ce qui concerne les règles de gouvernance », d'après l'étude d'impact précitée, c'est-à-dire de préciser dans la loi le statut des succursales visées ;

- prévoir, conformément à l'article 47 de la directive « CRD IV » précitée, que les conditions d'agrément et d'exercice des succursales de pays tiers ne sont pas plus favorables que celles d'établissements européens .

En précisant le cadre juridique applicable, l'ordonnance permettra également de maintenir l'égalité de traitement entre les établissements de banques étrangères sous formes de succursales et sous forme de filiales . L'article 47 de la directive « CRD IV » précise en effet que le statut de succursales ne doit pas être plus souple que celui de filiales. En pratique, les établissements de crédit choisissent l'un ou l'autre en fonction de leurs propres stratégies, la principale différence résidant dans le fait que les succursales, n'ayant pas la personnalité juridique, n'ont pas accès au refinancement de la banque centrale.

Décision de la commission : votre commission a adopté cet article sans modification.

ARTICLE 16 (Art. L. 518-15-2 du code monétaire et financier) - Extension à la Caisse des dépôts et consignations des normes de gestion applicables aux établissements de crédit et sociétés de financement

Commentaire : le présent article a pour objet d'adapter les règles prudentielles bancaires issues de la législation européenne (CDR IV) à la Caisse des dépôts et consignations qui dispose de son propre modèle prudentiel, distinct de celui habituellement applicable aux établissements de crédit.

I. LE DROIT EXISTANT

A. L'ADAPTATION DES RÈGLES PRUDENTIELLES AUX SPÉCIFICITÉS DE LA CAISSE DES DÉPÔTS ET CONSIGNATIONS

La loi de modernisation de l'économie du 4 août 2008 56 ( * ) (LME) a procédé à plusieurs ajustements du droit applicable à la Caisse des dépôts et consignations (CDC). En particulier, elle a introduit, au sein du code monétaire et financier, un article L. 518-15-2 qui étend à la CDC certaines obligations comptables et prudentielles applicables aux établissements de crédit.

Néanmoins, le législateur a pris en compte la spécificité de la CDC dont les investissements, majoritairement en actions et en obligations, revêtent un caractère de long terme. En outre, l'activité de prêts de la CDC occupe, dans son bilan, une place moindre que dans celui d'un établissement de crédit traditionnel. Il était donc nécessaire d'adapter les règles existantes.

C'est pourquoi, l'article L. 518-15-2 précité dispose qu'un « décret en Conseil d'Etat pris après avis de la commission de surveillance étend, sous réserve des adaptations nécessaires , à la [CDC] », les règles relatives à l'établissement et à la présentation des comptes (L. 511-36 et L. 511-37 du code monétaire et financier), au capital minimum (L. 511-40 du code monétaire et financier) ainsi qu'au respect des ratios de liquidité et de solvabilité et de contrôle interne (L. 511-41 du code monétaire et financier). Deux décrets en Conseil d'Etat ont été pris sur le fondement de cet article 57 ( * ) .

Dans le cadre de ce chantier réglementaire, la CDC a été amenée à se doter d'un modèle prudentiel. En effet, comme le relève la CDC, « l'utilité d'un ?modèle prudentiel? spécifique n'est apparue que postérieurement à la LME , dans les nombreuses réunions organisées pour la préparation de ses décrets d'application. Un consensus entre la CDC, le Trésor et l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) s'est dégagé sur la nécessité de ce modèle qui est devenu la ?cheville? du dispositif » 58 ( * ) .

Ainsi, le III de l'article R. 518-30-2 du code monétaire et financier, introduit par le décret du 27 avril 2010, dispose que la commission de surveillance de la CDC détermine un « modèle prudentiel » et fixe le niveau de fonds propres qu'elle estime approprié au regard de celui-ci. Le modèle prudentiel a été définitivement adopté le 12 janvier 2012.

B. LES NOUVELLES RÈGLES EUROPÉENNES DOIVENT ÊTRE ADAPTÉES À LA CDC

Suite à la crise financière, le Comité de Bâle a élaboré de nouvelles normes prudentielles bancaires, dites « Bâle III », afin de renforcer la solidité des établissements bancaires.

Ces normes ont fait l'objet d'une adaptation en droit européen par le paquet dit « CRD IV » qui comprend une directive (CRD) et un règlement (CRR).

En droit français, ces règles ont été transposées par l'ordonnance du 20 février 2014 59 ( * ) , prise sur le fondement de l'article 11 de la loi du 2 janvier 2014 60 ( * ) ( cf. infra commentaire de l'article 23 septies ), qui a notamment modifié l'article L. 518-15-2 précité. En effet, comme l'indique l'étude d'impact annexée au présent projet de loi, « du fait de l'ordonnance n° 2014-158 du 20 février 2014, le cadre législatif servant de référence pour l'extension à la CDC des règles en matière comptable, de normes de gestion prudentielles et de contrôle interne a été modifié, rendant caducs certains renvois figurant à l'article L. 518-15-2 du code monétaire et financier ».

Néanmoins, le Gouvernement estime que l'habilitation parlementaire (qui visait la transposition de CRD IV et de CRR) ne s'étendait pas à la Caisse des dépôts puisque celle-ci est explicitement exclue du champ d'application des règles européennes (alinéa 11 de l'article 2 de la directive CRD IV). En particulier, l'ensemble des règles relatives aux politiques et aux rémunérations des dirigeants ne pouvaient être appliquées à la CDC par le biais de l'ordonnance . Or l'étude d'impact précitée considère qu'il « paraît essentiel qu'un groupe financier public de l'importance de la CDC, au service de l'intérêt général et du développement économique du pays, puisse appliquer ces dispositions visant à éviter les risques de conflit d'intérêt, favoriser une gestion saine et effective des risques et n'incitant pas à une prise de risque excessive, et se montrer ainsi exemplaire en matière de politique de rémunération ».

En outre, l'ordonnance du 20 février 2014 a complété l'article L. 518-15-2 précité par une phrase qui dispose qu'un décret en Conseil d'Etat « précise celles des dispositions du règlement [CRR] qui lui sont applicables, sous réserve des adaptations nécessaires ». Or, comme le note l'étude d'impact précitée, « cette rédaction rendait immédiatement applicable le règlement européen, y compris ses standards techniques, ce qui pouvait susciter des difficultés s'agissant d'un groupe présentant des particularités importantes par rapport aux établissements de crédit ». Cet ajout au sein de l'article L. 518-15-2 n'apparaît donc pas opportun. Il est d'ailleurs contraire à la lettre des textes européens qui exclut la CDC de leur champ d'application.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article procède à la réécriture de l'article L. 518-15-2 précité.

Tout d'abord, il prévoit que lorsque la commission de surveillance est saisie pour avis du décret en Conseil d'Etat pris en application de l'article L. 518-15-2, elle doit prendre en considération le modèle prudentiel de la CDC pour rendre son avis .

Le présent article supprime la mention « excepté ses dispositions relatives aux politiques et aux pratiques de rémunération », ce qui permettra d'étendre les règles européennes en ces matières à la CDC .

Il supprime également la référence au règlement CRR introduite par l'ordonnance du 20 février 2014, était contraire aux textes européens.

Enfin, il prévoit l'extension à la CDC, sous réserve des adaptations nécessaires, des articles L. 571-4 (obligation pour les dirigeants de répondre aux demandes d'information de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution), L. 613-20-1 et L. 613-20-2 (surveillance sur une base consolidée par la même Autorité).

*

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le présent article tire les conséquences, pour la CDC, de la transposition en droit français du paquet européen CRD IV. Il s'inscrit dans la droite ligne des dispositions adoptées dans la LME de 2008, consistant à prendre en compte les spécificités de la CDC pour définir les règles qui lui sont applicables. Il permet également de corriger des erreurs résultant de l'ordonnance du 20 février 2014.

La commission des finances a adopté un amendement de précision.

Décision de votre commission : votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLES 17 à 19 (Art. L. 312-1-1, L. 500-1, L. 511-82, L. 517-2, L. 517-3, L. 546-4, L. 571-15, L. 612-9, L. 612-23-1, L. 612-27, L. 612-38, L. 613-32-1, L. 621-12, L. 621-15-1, L. 621-16-1 et L. 632-7 du code monétaire et financier, 705-1 du code de procédure pénale) - Ajustements techniques au sein du code monétaire et financier et du code de procédure pénale

Commentaire : les articles 17 à 19 procèdent à plusieurs ajustements ou corrections au sein du code monétaire et financier et du code de procédure pénale.

Les 2°, 3°, 7°, 8°, 11°, 12° et 14° de l'article 17 corrigent des erreurs matérielles ou effectuent des coordinations au sein du code monétaire et financier.

Le 1°, 4°, 5°, 6°, 10° du même article précisent ou actualisent la rédaction de différents articles du même code.

L'article L. 612-23-1 du code monétaire et financier prévoit que « le conseil de supervision de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution peut s'opposer à la poursuite du mandat d'une ou plusieurs personnes physiques membres du conseil d'administration ou du conseil de surveillance » d'une entité soumise au contrôle de l'Autorité. Le 9° de l'article 17 prévoit que ces personnes physiques peuvent également être « les représentants de personnes morales ».

Le 13° du même article effectue une coordination au sein du code monétaire et financier afin de prendre en compte de la création, par la loi du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires, du délit de manipulation d'indices financiers. Pour la même raison, l'article 18 effectue une coordination au sein du code de procédure pénale.

L'article 19 prévoit l'application en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna des articles du code monétaire et financier modifiés par l'article 17.

*

À l'initiative de notre collègue député Christophe Caresche, rapporteur, l'Assemblée nationale a adopté un amendement à l'article 17.

*

À l'initiative de votre rapporteur, la commission des finances a adopté un amendement modifiant l'article 17 afin d'effectuer une coordination entre le code monétaire et financier et le livre des procédures fiscales.

Décision de votre commission : votre commission a adopté l'article 17 ainsi modifié et les articles 18 et 19 sans modification.

ARTICLE 20 - Durée du mandat des gouverneurs et sous-gouverneurs de la Banque de France (Art. L. 142-8 du code monétaire et financier)

Commentaire : le présent article vise à prévoir que le gouverneur et les sous-gouverneurs de la Banque de France restent dans leurs fonctions jusqu'au terme de leur mandat en cours lorsqu'ils sont atteints, en cours de mandat, par la limite d'âge fixée à 65 ans par l'article L. 142-8 du code monétaire et financier.

I. LE DROIT EXISTANT

L'article L. 142-8 du code monétaire et financier prévoit que la direction de la Banque de France est assurée par un gouverneur, assisté de deux sous-gouverneurs . Il prévoit que le gouverneur et les deux sous-gouverneurs sont « nommés par décret en Conseil des ministres pour une durée de six ans renouvelable une fois », en précisant que « la limite d'âge applicable à l'exercice de ces fonctions est fixée à soixante-cinq ans ».

Par ailleurs, l'article 14.2 du protocole sur les statuts du Système européen de Banques centrales (SEBC), annexé au Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, prévoit que la durée du mandat du président d'une banque centrale ne peut être inférieure à cinq ans , dans un souci de garantie d'indépendance.

En pratique, la loi française et le traité européen peuvent être contradictoires. Ce serait par exemple le cas si un gouverneur atteignait l'âge de 65 ans avant d'avoir exercé son mandat pendant cinq ans.

Actuellement, la Banque de France est dirigée par Christian Noyer, qui a été nommé gouverneur en 2003 et dont le mandat a été renouvelé en 2009. Le premier sous-gouverneur est Anne Le Lorier et le second sous-gouverneur est Robert Ophèle, nommés l'un et l'autre en 2012 (premier mandat).

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article vise à modifier l'article L. 142-8 du code monétaire et financier afin de permettre aux gouverneur et sous-gouverneurs de rester en fonctions s'ils dépassent la limite d'âge, fixée à soixante-cinq ans, au cours de leur mandat .

*

Le présent article a été adopté par l'Assemblée nationale sans modification.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le gouverneur, Christian Noyer, né en 1950, sera atteint par la limite d'âge de soixante-cinq ans avant d'avoir effectué la durée minimum de mandat de cinq ans requise par les textes européens.

De plus, le premier sous-gouverneur, Anne Le Lorier, sera également atteinte par la limite d'âge de soixante-cinq ans vingt jours avant le terme de son mandat.

En conséquence, le présent article modifie utilement l'article L. 142-8, non pas pour supprimer ou modifier la limite d'âge, qui reste à soixante-cinq ans, mais pour empêcher la nomination ou le renouvellement comme gouverneur d'une personne âge de soixante-cinq ans ou plus .

Il permet également que la France puisse se conformer, en toutes circonstances, à ses engagements européens qui résultent de l'article 14.2 du Protocole précité.

Comme le souligne l'étude d'impact annexée au présent projet de loi, il est légitime d'« appliquer aux sous-gouverneurs les mêmes principes que ceux appliqués au gouverneur, dès lors qu'ils participent également aux missions liées au SEBC et qu'ils sont appelés à suppléer le gouverneur ».

Décision de la commission : votre commission a adopté cet article sans modification.

ARTICLE 21 - Habilitation du Gouvernement à transposer par ordonnance la directive 2013/37/UE du 26 juin 2013 concernant la réutilisation des informations du secteur public

Commentaire : le présent article prévoit d'habiliter le Gouvernement à transposer par ordonnance la directive 2013/37/UE concernant la réutilisation des informations du secteur public.

I. LE DROIT EXISTANT

La directive 2013/37/UE du 26 juin 2013 61 ( * ) modifie une directive de 2003 relative à la réutilisation des informations du secteur public. Cette dernière directive a été transposée en droit français par l'ordonnance n° 2005-650 du 6 juin 2005 relative à la liberté d'accès aux documents administratifs et à la réutilisation des informations publiques qui a créé un second chapitre, consacré à la réutilisation des informations publiques, dans le titre 1 er de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal .

Ainsi, l'article 10 de la loi de 1978 précitée pose le principe selon lequel « les informations figurant dans des documents produits ou reçus par les administrations mentionnées à l'article 1 er , quel que soit le support, peuvent être utilisées par toute personne qui le souhaite à d'autres fins que celles de la mission de service public pour les besoins de laquelle les documents ont été produits ou reçus ». Son article 15 dispose que « la réutilisation d'informations publiques peut donner lieu au versement de redevances », auquel cas, elle est alors soumise à la délivrance d'une licence qui fixe les conditions de la réutilisation des informations (article 16).

La principale modification apportée par la directive de 2013 porte sur les modalités de tarification. En effet, son article 6 dispose désormais que « les redevances sont limitées aux coûts marginaux de reproduction » alors que la directive initiale permettait un « retour sur investissement raisonnable ». Il faut noter que les établissements culturels (bibliothèques, musées, archives) sont désormais dans le champ d'application de la directive.

La date limite de transposition de la directive de 2013 en droit interne a été fixée au 18 juillet 2015.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

L'article 21 habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures nécessaires à la transposition de la directive 2013/37/UE.

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

À l'initiative de nos collègues députés Eric Alauzet et Christophe Caresche, rapporteur, la commission des finances de l'Assemblée nationale a supprimé le présent article ( cf. encadré ci-dessous).

Extraits des débats de la commission des finances de l'Assemblée nationale
séance du 10 septembre 2014

« M. Christophe Caresche, rapporteur. L'open data vise à permettre l'accès du public aux données administratives. Par l'article 21 du projet de loi, le Gouvernement nous demande l'autorisation de transposer par voie d'ordonnance la directive européenne du 26 juin 2013 relative à la réutilisation des données du secteur public. Après avoir entendu divers acteurs, j'estime qu'il ne s'agit pas de la meilleure solution. D'une part, sur une question qui touche au rapport entre les citoyens et l'administration, je ne suis pas sûr qu'il soit pertinent de confier à cette dernière la tâche de rédiger seule un texte relatif à la transparence du secteur public et de ses données - à vrai dire, ce serait même assez paradoxal. D'autre part, puisque le Gouvernement entend opérer aujourd'hui une transposition a minima avant de nous proposer, probablement l'année prochaine, un projet de loi relatif au numérique, je suggère que nous attendions ce véhicule législatif. J'ai en conséquence déposé un amendement visant à supprimer l'article 21 .

[...]

« La Commission examine les amendements identiques CF8 de M. Éric Alauzet et CF47 du rapporteur.

« M. Éric Alauzet . L'article 21 vise à transposer par ordonnance la directive relative à la réutilisation des informations du secteur public. Nous proposons sa suppression de sorte que ce sujet sensible fasse l'objet d'un débat de fond dans l'hémicycle.

« M. le rapporteur . Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, je propose moi aussi que la transposition de cette directive s'opère par voie législative dans le cadre du futur projet de loi sur le numérique.

« M. Luc Belot . Il me semble important de transposer au plus vite cette directive. C'est pourquoi je suis favorable au maintien de cet article qui prévoit un élargissement des institutions concernées par la réutilisation de données archivées, peu accessibles aujourd'hui. Il faut les rendre consultables le plus rapidement possible.

« Ayant entendu les arguments de notre rapporteur, je souhaite, si l'on opte pour la voie législative, que le projet de loi en question soit inscrit à l'ordre du jour le plus tôt possible et adopté très rapidement. Il convient en effet d'aller au-delà de la transposition de la directive en matière d'open data. Nos concitoyens ont des attentes fortes à cet égard.

« M. le rapporteur . Si l'on souhaite aller plus loin que ne le prévoit la directive, mieux vaut ne pas la transposer tout de suite par voie d'ordonnance : sinon, tout porte à craindre que l'on en restera là. Compte tenu du rapport d'information du Sénat et du rapport publié par le Conseil d'État sur le sujet, je souhaite qu'ait lieu un débat public parlementaire. Par ailleurs, la directive comporte différentes options possibles entre lesquelles il nous faudra trancher. Le Gouvernement a annoncé le dépôt d'un projet de loi sur le numérique en 2015. Or, le délai de transposition de la directive a été fixé au 18 juillet 2015. Dès lors qu'un processus législatif aura été engagé, la Commission européenne ne verra aucune objection à ce que la directive soit transposée au deuxième semestre de l'année 2015.

« La Commission adopte les amendements CF8 et CF47 de suppression de l'article 21 ».

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

La suppression votée par l'Assemblée nationale et implicitement acceptée par le Gouvernement, puisqu'il n'a pas déposé d'amendement tendant à rétablir l'article lors de l'examen en séance publique, apparaît bienvenue.

D'une part, cet article se situait à la marge de l'objet du projet de loi et trouvera toute sa place dans un projet de loi consacré au numérique. D'autre part, ce sujet pourrait utilement faire l'objet d'un débat approfondi devant la représentation nationale.

Décision de votre commission : votre commission a maintenu la suppression de cet article.

ARTICLE 22 - Prolongation du délai d'habilitation du Gouvernement pour mettre en conformité le droit interne avec le droit de l'UE s'agissant des retraites supplémentaires financées par les entreprises (Art. 50 de la loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites)

Commentaire : le présent article vise à prolonger de six à dix-huit mois, à compter de la promulgation de la loi du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites, le délai accordé au Gouvernement pour prendre par voie d'ordonnance les mesures nécessaires pour se mettre en conformité avec l'article 8 de la directive 2008/94/CE relative à la protection des droits des travailleurs salariés en cas d'insolvabilité de l'employeur.

I. LE DROIT EXISTANT

A. L'OBLIGATION DE PROTÉGER LES DROITS À RETRAITE DES SALARIÉS EN CAS D'INSOLVABILITÉ DE L'EMPLOYEUR

L' article 8 de la directive 2008/94/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2008 relative à la protection des travailleurs salariés en cas d'insolvabilité de l'employeur prévoit l'obligation pour les États membres de s'assurer « que les mesures nécessaires sont prises pour protéger les intérêts des travailleurs salariés et des personnes ayant déjà quitté l'entreprise ou l'établissement de l'employeur à la date de de la survenance de l'insolvabilité de celui-ci, en ce qui concerne leurs droits acquis, ou leurs droits en cours d'acquisition, à des prestations de vieillesse, y compris les prestations de survivants, au titre de régimes complémentaires de prévoyance professionnels ou interprofessionnels existant en dehors des régimes légaux nationaux de sécurité sociale ».

Les régimes de retraite visés par cet article correspondent aux régimes de retraite dits « supplémentaires » , qui viennent s'ajouter aux régimes de base et conventionnels obligatoires gérés par des administrations de sécurité sociale. Au sein des régimes de retraite supplémentaire, les régimes à prestations définies relevant de l'article L. 137-11 du code de la sécurité sociale - couramment appelés « retraites-chapeau » - posent des problèmes spécifiques. En effet, lorsqu'ils sont gérés directement en interne par l'entreprise , ces régimes n'offrent aucune protection aux anciens salariés en cas de liquidation de l'entreprise :

- les pensions échues, non encore versées par l'entreprise à la date de la liquidation, ne font l'objet d'aucune garantie particulière, contrairement à la protection offerte par les contrats d'assurance ;

- les pensions n'entrent pas dans le champ de l'assurance de garantie des salaires (AGS) ;

- aucune norme ne contraint aujourd'hui les entreprises à préfinancer leurs engagements au titre de la retraite.

Par conséquent, la Commission européenne considère que ces régimes, lorsqu'ils sont gérés en interne, ne satisfont pas aux exigences énoncées par l'article 8 de la directive précitée.

B. L'INSUFFISANCE DES MESURES EXISTANTES POUR SE CONFORMER AU DROIT COMMUNAUTAIRE

Ces dernières années, des dispositions ont été adoptées afin de limiter le nombre de régimes de retraite supplémentaire du type « retraites-chapeau » gérés en interne :

- la loi n° 2009-1646 du 24 décembre 2009 de financement de la sécurité sociale pour 2010 a interdit la création de régimes à prestations définies en gestion interne à compter du 1 er janvier 2010 ;

- les taux des contributions sociales spécifiques sur les versements employeurs et sur les rentes versées aux retraités dans le cadre de ces régimes ont fait l'objet de hausses successives en 2010, 2011 et 2012 afin de dissuader le maintien de ce régime et de compenser l'exonération de cotisations sociales, de CSG et de CRDS.

En dépit de ces mesures, quelques centaines de régimes de retraite à prestations définies gérés en interne demeurent en France 62 ( * ) . Il s'agit principalement de régimes de retraite « maison » créés par des petites et moyennes entreprises mais quelques grandes entreprises sont également concernées.

Afin de mettre en conformité le droit national avec les exigences européennes, le projet de loi garantissant l'avenir et la justice du système de retraites avait envisagé de contraindre les entreprises gérant encore leurs régimes de retraites en interne à les externaliser auprès d'un organisme assureur dans un délai de cinq ans. Toutefois, cet article avait été modifié en première lecture par l'Assemblée nationale - à l'initiative du Gouvernement - afin de renvoyer à une ordonnance le soin de prendre les mesures à même de protéger les intérêts des salariés sans conduire à la déstabilisation financière des entreprises concernées . Il est en effet apparu que le transfert des rentes en cours de service à un organisme assureur pouvait soulever des difficultés de liquidité pour certaines entreprises.

À la suite de la mise en demeure du 25 avril 2013 et en l'absence de mesure nouvelle intervenue depuis cette date, la Commission européenne a transmis à la France, le 28 mars 2014, un avis motivé pour manquement à l'obligation de protection des droits à retraite des travailleurs salariés visés à l'article 8 de la directive précitée.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article vise à proroger de six à dix-huit mois le délai d'habilitation initialement prévu par l'article 50 de la loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites. Selon l'étude d'impact annexée au présent projet de loi, une concertation a été menée au cours des derniers mois entre les entreprises concernées, les acteurs du marché de l'assurance et les services de la Commission européenne pour identifier des pistes alternatives à l'externalisation. La prolongation du délai d'habilitation serait désormais nécessaire afin de poursuivre les échanges avec la Commission européenne à propos de la conformité des dispositions envisagées avec l'objectif de protection des salariés assigné par la directive.

*

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le délai habilitant le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance les dispositions nécessaires pour mettre en conformité le droit national avec le droit de l'Union européenne étant échu depuis le 20 juillet 2014 , une prolongation ou une nouvelle habilitation apparaissent nécessaires.

La sollicitation, en amont, de l'avis de la Commission européenne sur les mesures envisagées semble judicieuse. Néanmoins, on peut regretter l'absence de présentation dans l'étude d'impact au présent projet de loi des différentes options de mise en conformité envisagées par le projet d'ordonnance.

En tout état de cause, compte tenu du caractère avancé de la procédure précontentieuse et de la possibilité d'une issue défavorable à la France si cette affaire était portée devant la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), l'adoption du projet d'ordonnance dans les meilleurs délais constitue une priorité .

Décision de votre commission : votre commission a adopté cet article sans modification.

ARTICLE 23 - Entrée en vigueur de l'obligation de publication des versements des compagnies pétrolières, minières et forestières à des autorités publiques

Commentaire : le présent article vise à préciser l'entrée en vigueur, en 2015 pour les grandes entreprises et en 2016 pour les autres, de l'article 8 du présent projet de loi, relatif à la transparence des paiements effectués par les industries extractives.

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

L'article 8 du présent projet de loi transpose au sein du code de commerce le chapitre 10 de la directive comptable unique, relatif à l'obligation de transparence des paiements effectués par les industries extractives au profit des autorités publiques des Etats où elles opèrent ( reporting pays par pays).

La directive prévoit une entrée en vigueur de cette obligation, comme pour l'ensemble de la directive, aux exercices ouverts à compter du 1 er janvier 2016 (soit une publication du rapport en 2017).

Le présent article prévoit que l'obligation prévue par l'article 8 s'applique aux exercices ouverts à compter du 1 er janvier 2015 (soit une publication du rapport en 2016).

II. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

À l'initiative de notre collègue député Christophe Caresche, rapporteur, l'Assemblée nationale a adopté en séance publique un amendement visant à limiter aux grandes entreprises l'anticipation de l'obligation de publication du rapport sur les paiements . Ainsi, cette obligation s'applique aux exercices ouverts à compter :

- du 1 er janvier 2015 (soit une publication en 2016) pour les entreprises dont le nombre moyen de salariés permanents, filiales comprises, est supérieur à 5 000 ;

- du 1 er janvier 2016 (soit une publication en 2017) pour les autres entreprises.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le présent article prévoit, pour les grandes entreprises, une entrée en vigueur anticipée de l'obligation de transparence par rapport aux prescriptions de la directive . Il permet ainsi de signaler l'engagement de la France dans ce dispositif, tout en laissant le temps aux entreprises, en particulier les plus petites d'entre elles grâce à l'amendement bienvenu adopté par l'Assemblée nationale, de mettre en place les systèmes d'information et de recueil des données nécessaires à la constitution du rapport sur les paiements.

Décision de la commission : votre commission a adopté cet article sans modification.

ARTICLE 23 bis (Art. L. 330-1, L. 743-9, L. 753-9 et L. 763-9 du code monétaire et financier) - Adaptation du droit national au règlement (UE) n° 909/2014 du Parlement européen et du Conseil, du 23 juillet 2014, concernant l'amélioration du règlement de titres dans l'Union européenne et les dépositaires centraux de titres

Commentaire : le présent article habilite le Gouvernement à procéder par ordonnance à la mise en conformité du droit national avec le règlement (UE) n° 909/2014 concernant l'amélioration du règlement de titres dans l'Union européenne et les dépositaires centraux de titres.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LES DÉPOSITAIRES CENTRAUX DE TITRES : UN ROUAGE ESSENTIEL DU MARCHÉ DES TITRES

Les dépositaires centraux de titres (DCT) sont, avec les chambres de compensation, des infrastructures de post-marché . Ils interviennent une fois qu'une transaction a été conclue sur le marché, c'est-à-dire lorsqu'un vendeur et un acheteur se sont mis d'accord sur un prix et sur une quantité.

Le DCT intervient dans le processus de règlement-livraison lors duquel l'acheteur règle son achat en contrepartie de quoi le vendeur livre ses titres . Les DCT ont également un rôle d'ordre notarial puisqu'ils enregistrent les titres lors de leur émission et suivent les mouvements relatifs à ces titres. À cet égard, ils vérifient que le nombre de titres en circulation est bien égal au nombre de titres émis, permettant ainsi de lutter contre la création frauduleuse de titres ou contre leur disparition fictive.

Compte tenu de leur rôle dans la chaîne d'échanges de titres, les DCT sont des infrastructures potentiellement systémiques . Enregistrer rapidement et sans erreur les transactions de titres représente un enjeu majeur pour la confiance dans les marchés.

B. DES INFRASTRUCTURES ENCORE LARGEMENT NATIONALES

Tout d'abord, il faut relever que, dans le cadre juridique européen actuel, les risques et les coûts engendrés par une opération sur titres sont très différents selon que l'opération est domestique (un investisseur français achète des actions françaises) ou transfrontalière (un investisseur français achète des actions émises à l'étranger).

En effet, si les opérations effectuées au niveau national se font à des coûts et des suspens 63 ( * ) assez faibles. En revanche les transactions entre les acteurs de différents Etats membres sont soumises à un certain nombre de difficultés :

- une opération sur titres transfrontalière engendre des frais de règlement jusqu'à quatre fois plus élevés que les opérations domestiques 64 ( * ) ;

- les délais de règlement étant très variés entre les différents Etats membres, les périodes de suspens peuvent être longues et le risque élevé pour les parties prenantes ;

- les sanctions pour défaut de paiement sont variables d'un marché à l'autre, ce qui ne participe pas à créer un environnement de confiance. Ainsi, certains pays comme la France, offrent des délais en cas de défaut de paiement, d'autres contraignent le livreur défaillant à un rachat des titres ou proposent un service d'emprunt ;

- le support des titres diffère également puisque certains pays, comme l'Irlande ou le Royaume-Uni, ont encore des titres sur papier en circulation, dont le règlement prend beaucoup plus de temps que pour des titres dématérialisés.

C. UN ENCADREMENT AU NIVEAU EUROPÉEN

Le règlement (UE) n° 909/2014 concernant l'amélioration du règlement de titres dans l'Union européenne et les dépositaires centraux de titres 65 ( * ) a pour objet d'harmoniser les règles applicables aux aux systèmes de règlement/livraison des dépositaires centraux de titres et d'ouvrir la concurrence entre ces infrastructures au niveau européen.

Le règlement prévoit notamment :

- l'inscription obligatoire dans un compte auprès d'un dépositaire central des titres des valeurs mobilières qui font l'objet de transactions sur les plates-formes de négociation ;

- l'obligation de dématérialisation des titres dès qu'ils sont négociés sur un marché à compter de 2025 ;

- un délai pour les transactions sur valeurs mobilières harmonisé : au plus tard deux jours ouvrables après la négociation (contre trois jours pour la France actuellement) ;

- l' harmonisation des sanctions pour défaut de paiement ou de livraison :


• pénalités calculées sur une base journalière ;


• obligation de rachat d'office des titres (« buy-in ») par la contrepartie qui n'a pas livré les titres à la date convenue quatre jours après la négociation pour les instruments liquides et sept jours après la négociation pour les instruments réputés non liquides (contre trente jours en France actuellement) ;

- la régulation plus stricte de l'activité des DCT (obligation d'agrément, obligation d'effectuer des opérations de réconciliation comptable quotidiennes, surveillance accrue par les autorités compétentes et possibilité d'infliger des sanctions administratives en cas de faute, nécessaire approbation par les participants pour toute utilisation de titres) ;

- la possibilité pour les dépositaires centraux de fournir des services dans d'autres Etats membres, y compris avec une succursale, avec l'instauration d'un « passeport européen ». Les émetteurs seront désormais autorisés à enregistrer leurs titres chez n'importe quel dépositaire central agréé sans obligation d'enregistrement des titres chez le dépositaire central national. Cette disposition met fin au monopole national des dépositaires centraux de titres ;

- la possibilité pour les dépositaires centraux de fournir des services bancaires sous conditions.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article a été adopté par l'Assemblée nationale, à l'initiative du Gouvernement, avec un avis favorable du rapporteur.

Son I habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance, dans un délai de douze mois à compter la publication de la loi, les mesures nécessaires à la mise en conformité du droit français avec le règlement (UE) n° 909/2014. Cette habilitation est également valable pour les collectivités d'outre-mer.

Son III modifie l'article L. 330-1 du code monétaire et financier. Le 1° étend la liste des participants possibles à un système de règlement et de livraison de titres aux chambres de compensation établies ou reconnues en vertu du règlement (UE) n° 648/2012 du Parlement européen et du Conseil du 4 juillet 2012 (dit EMIR).

Le 2° du III transpose en droit national une disposition insérée par le règlement EMIR dans la directive 98/26 CE du Parlement européen et du Conseil du 19 mai 1998 concernant le caractère définitif du règlement dans les systèmes de paiement et de règlement des opérations sur titres. Elle précise que « lorsqu'un gestionnaire d'un système [de règlements interbancaires ou de règlement et livraison d'instruments financiers] a fourni une garantie à un autre gestionnaire de système dans le cadre d'un accord [...], les droits de celui qui a constitué la garantie ne sont pas affectés par l'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires à l'encontre du gestionnaire [...] qui a reçu la garantie ».

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Les DCT sont des infrastructures peu connues mais essentielles au bon fonctionnement des marchés . Une harmonisation européenne des règles les concernant est cohérente avec la législation financière adoptée ces dernières années qui a réformé le cadre applicable aux plateformes de négociation ( cf. infra commentaire de l'article 23 quater sur le paquet « MIF II ») et aux chambres de compensation (règlement EMIR).

En particulier, les DCT étaient les dernières infrastructures à fonctionner dans un cadre véritablement national . Le règlement offre, à cet égard, un cadre favorable à la mise en place du projet Target 2 Securities (T2S) de plate-forme unique pour le règlement-livraison en Europe. Le projet T2S prévoit la mise en place d'une plate-forme commune pour tous les DCT européens veillant à la gestion des activités de règlement-livraison pour 2015. Cette plate-forme dite « intégrée » permettrait de résoudre un certain nombre de défaillances du système règlement-livraison évoqués plus haut puisqu'elle permettra que les opérations soient effectuées en temps réel 66 ( * ) .

Le règlement renforce donc l'efficacité et la sécurité des marchés et, partant, la confiance des émetteurs et des investisseurs .

À l'initiative de votre rapporteur, la commission des finances a décidé de supprimer l'article 23 ter qui habilitait le Gouvernement à transposer par ordonnance le paquet « abus de marché » ( cf. infra commentaire de l'article 23 ter ). Par cohérence avec la position exprimée sur cet article, le champ de l'habilitation du présent article a été réduit, à l'initiative de votre rapporteur, afin d'en exclure toute mesure en matière de sanctions .

La commission des finances a en outre adopté un amendement rédactionnel tendant à supprimer le délai d'habilitation pour le réintroduire au sein de l'article 24 du présent projet de loi.

Décision de votre commission : votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLE 23 ter - Transposition de la directive et du règlement relatifs aux abus de marché (MAD et MAR)

Commentaire : le présent article vise à habiliter le Gouvernement à transposer par voie d'ordonnance le paquet « MAD-MAR » du 16 avril 2014 relatif à la répression des abus de marché (transposition de la directive 2014/57/UE et adaptation du code monétaire et financier au règlement n° 596/2014).

I. LE PAQUET « MAD-MAR » RELATIF AUX ABUS DE MARCHÉ

Le rapport du 25 février 2009 du groupe de haut niveau sur la surveillance financière dans l'Union européenne, présidé par Jacques de Larosière, avait mis en évidence l'hétérogénéité des règlementations en matière d'abus de marché 67 ( * ) au sein des Etats membres, en particulier s'agissant des régimes de sanction, qui s'avéraient en général assez faibles et comportaient rarement un volet pénal. En outre, l'innovation financière et la multiplication des plateformes ont permis l'émergence de nouveaux comportements frauduleux sur les marchés. Enfin, plusieurs scandales à l'échelle européenne, notamment les manipulations d'indices de référence ( London interbank offered rate - LIBOR), ont souligné les lacunes de la législation européenne pour la répression de certaines infractions de marché.

En conséquence, la Commission européenne a proposé en 2011 puis, après révision de la proposition initiale, en juillet 2012, un projet de règlement et un projet de directive visant à harmoniser l'arsenal répressif des Etats membres en matière d'abus de marché , qu'il s'agisse de la définition des infractions ou du régime de sanctions administratives applicables. En définitive, le règlement n° 596/2014 sur les abus de marché 68 ( * ) (dit « MAR ») et la directive 2014/57/EU sur les sanctions pénales en cas d'abus de marché 69 ( * ) (dite « MAD ») ont été adoptés le 16 avril 2014 et publiés au Journal officiel de l'Union européenne le 12 juin 2014.

Tout d'abord, le règlement étend le champ d'application de la législation européenne en matière de surveillance des marchés : cette dernière s'appliquera désormais à tous types de transactions (y compris sur les systèmes multilatéraux de négociation ou instruments de gré à gré, notamment). Par ailleurs, il renforce le régime de sanctions administratives en cas d'abus de marché, en fixant des plafonds minimums de sanctions pécuniaires applicables à certains types d'infractions, étant entendu que les Etats membres restent libres de fixer des plafonds supérieurs :

- des amendes atteignant jusqu'à trois fois le gain réalisé grâce à l'abus de marché ;

- dans le cas de personnes physiques, des sanctions pécuniaires de 5 millions d'euros en cas de délit d'initié ou de divulgation illicite d'information, d'au moins 1 million d'euros en cas d'abus de marché ou de rétention d'informations privilégiées, et d'au moins 500 000 euros en cas de violation des articles 18, 19 et 20 relatifs aux obligations d'informations (liste d'initiés, etc.) ;

- dans le cas de personnes morales, des amendes d'au moins 15 millions d'euros ou 15 % du chiffre d'affaires de la société en cas de délit d'initié ou de divulgation illicite d'informations, d'au moins 2,5 millions d'euros ou 2 % du chiffre d'affaires en cas de d'abus de marché ou de rétention d'informations privilégiées, et d'au moins 1 million d'euros en cas de violation des articles 18, 19 et 20 relatifs aux obligations en matière de divulgation.

Ensuite, la directive prévoit une définition européenne des infractions pénales relatives aux abus de marché , un ensemble de sanctions pénales afférentes, l'extension de la responsabilité aux personnes morales et l'obligation pour les Etats membres de former les membres des autorités. S'agissant des sanctions pénales, elles obligent les Etats membres à prévoir :

- des peines d'emprisonnement allant jusqu'à deux ans pour les personnes physiques coupables de délit d'initié (divulgation illicite d'informations privilégiées) et des peines d'emprisonnement allant jusqu'à quatre ans pour les opérations d'initiés ou les manipulations de marché ;

- des amendes pénales ou non pénales et d'autres sanctions telle que l'exclusion du bénéfice d'un avantage ou d'une aide publics, l'interdiction temporaire ou définitive d'exercer une activité commerciale, un placement sous surveillance judiciaire, une mesure judiciaire de dissolution ou la fermeture temporaire ou définitive des établissements ayant servi à commettre l'infraction.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article, adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, après avis favorable de la commission des finances, vise à habiliter le Gouvernement à procéder par ordonnances à l'adaptation des dispositions du code monétaire et financier au règlement n° 596/2014 relatif aux abus de marché (MAR) .

Il habilite également le Gouvernement à transposer par ordonnance la directive 2014/57/UE relative aux sanctions pénales applicables aux abus de marché .

Enfin, il autorise le Gouvernement à étendre ces transpositions et adaptations, avec les adaptations nécessaires, aux collectivités d'outre-mer (Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna, Polynésie française, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon).

Le présent article prévoit que l'ordonnance devra être prise dans un délai de vingt-quatre mois à compter de la publication de la loi.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. DES MODIFICATIONS SUBSTANTIELLES À APPORTER AU VOLET RÉPRESSIF DU CODE MONÉTAIRE ET FINANCIER...

De façon générale, la réforme européenne correspond aux orientations déjà affirmées par le droit français (incrimination des infractions d'initiés, de manipulation de cours et de diffusion d'informations fausses ou trompeuses ; responsabilité pénale des personnes morales en cas d'abus de marché ; sanction des dirigeants coupables de telles infractions, y compris de peines d'emprisonnement, etc.).

Cependant, même si l'esprit général de MAD-MAR est proche de celui du droit français, le volet répressif du code monétaire et financier devra cependant être profondément modifié pour assurer la transposition du règlement et de la directive. En particulier, il sera nécessaire de :

• modifier les dispositions du titre IV du livre IV du code monétaire et financier (CMF) pour harmoniser la définition retenue par l'Union européenne et ajuster le régime de sanctions (notamment les articles L. 465-1 et suivants du code monétaire et financier). A cet égard, le changement le plus significatif pourrait intervenir pour le quantum des sanctions, qui pourrait être fixé en pourcentage du chiffre d'affaires et non plus seulement en valeur absolue ou par rapport au profit réalisé, comme c'est le cas aujourd'hui (100 millions d'euros pour les personnes morales et 15 millions d'euros pour les personnes physiques, ou le décuple du gain réalisé) ; par ailleurs, il conviendra de porter de deux ans aujourd'hui à quatre ans, conformément à la directive, la peine d'emprisonnement maximum pour délit d'initié ;

• adapter le champ de compétence du pouvoir de sanction de l'Autorité des marchés financiers (article L. 621-15 du CMF).

Par ailleurs, des modifications non législatives, en particulier au sein du règlement général de l'AMF, devront compléter ces évolutions.

B. ... DONT LE PARLEMENT NE DOIT PAS SE DESSAISIR

La directive MAD et le règlement MAR laissent aux Etats membres certaines options dans le cadre de la transposition. Ces derniers peuvent en particulier :

- déterminer les outils d'enquête à la disposition des autorités chargées des enquêtes ou des poursuites relatives aux abus de marché . A cet égard, la loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires a permis d'aligner les pouvoirs des contrôleurs sur ceux des enquêteurs en leur donnant notamment la possibilité de se voir communiquer tout document et d'entendre toute personne susceptible de leur fournir des informations. L'Autorité des marchés financiers dispose donc désormais de pouvoirs d'investigation étendus ;

- adopter des règles pénales et des sanctions administratives plus strictes pour les infractions définies par le cadre législatif européen ; en particulier, les sanctions déterminées par le règlement européen sont des plafonds minimums et les Etats membres sont libres de fixer des plafonds supérieurs ;

- choisir de sanctionner, ou non, à la fois administrativement et pénalement les mêmes infractions . En France, le principe de « non bis in idem » ne fait pas traditionnellement pas obstacle à ce que les infractions relatives au marché financier sont poursuivies et sanctionnées à la fois sur le plan administratif par l'AMF et sur le plan pénal. Cependant, un récent arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme 70 ( * ) pourrait obliger à une nouvelle organisation de cette double poursuite ( cf . infra) ;

- prévoir des incitations financières pour les personnes qui dénoncent des violations potentielles des règles relatives aux abus de marché, ce qui n'existe pas en droit français.

Ainsi, sur les quatre principales options laissées par le paquet MAD-MAR, trois pourraient être saisies par la France sans que l'intention du Gouvernement à leur égard ait été définie à ce stade . En particulier, la définition des plafonds de sanctions, à partir desquels la commission des sanctions de l'AMF déclinera l'ensemble de son échelle de sanctions, et qui n'a pas encore été arrêtée par le Gouvernement, devrait être traitée par le Parlement au regard de son importance pour la visibilité et le caractère dissuasif de notre système répressif.

Par ailleurs, les évolutions de notre arsenal répressif en matière financière, qui sont notamment rendues nécessaires par le paquet MAD-MAR mais également par d'autres textes européens, en particulier la directive « OPCVM V » (voir le commentaire de l'article 23 quinquies ), la directive dite « Transparence » (voir le commentaire de l'article 6) et la directive « MIFID » (voir le commentaire de l'article 23 quater ) constitue une véritable refonte d'ensemble, cohérente et structurante , dont il semble d'autant moins opportun que le Parlement se dessaisisse que la plupart des évolutions sont relativement peu techniques et peuvent être traitées directement par la loi (évolution des plafonds de sanction, définition des infractions, etc.).

En outre, le délai d'habilitation très long sollicité , de vingt-quatre mois, s'il se justifie par la nécessité d'attendre certaines normes techniques d'exécution qui devront être produites par l'Autorité européenne des marchés financiers, témoigne de l'absence d'urgence de la transposition et indique en creux que les réflexions sur l'évolution du régime de sanction, au sein desquelles le Parlement devrait prendre toute sa place, n'ont pas encore abouti.

De plus, le débat sur l'application du principe de « non bis in idem » , relancé par le récent arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme précité, remet en cause en partie l'organisation du système répressif français en matière financière. Des groupes de travail se sont constituées au sein des administrations compétentes ; le Parlement joue également son rôle dans ces travaux, à travers, notamment, la mission d'information lancée en 2014 au sein de votre commission des finances, conjointement avec la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois, sur les pouvoirs de sanction des régulateurs financiers .

Au total, votre rapporteur est favorable à ce que l'ensemble de cette refonte fasse l'objet d'un projet ou d'une proposition de loi qui permette tout à la fois de transposer la directive et le règlement MAD-MAR une fois les options retenues, de transposer les volets répressifs des autres directives visées par le présent projet de loi, ainsi que d'adapter notre système, s'il le faut, à la nouvelle interprétation du principe de « non bis in idem » consacrée par le juge européen. En conséquence, votre commission a adopté un amendement visant à supprimer la présente habilitation .

Décision de la commission : votre commission a supprimé cet article.

ARTICLE 23 quater - Transposition du paquet « MIF II »

Commentaire : le présent article prévoit d'habiliter le Gouvernement à transposer par ordonnance la directive 2014/65/UE du 15 mai 2014 concernant les marchés d'instruments financiers et de mettre en conformité le droit français avec les dispositions du règlement (UE) n° 600/2014 du 15 mai 2014 concernant les marchés d'instruments financiers.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LES LIMITES DE LA DIRECTIVE MIF I

La directive sur les « marchés d'instruments financiers » (MIF I) 71 ( * ) a été adoptée en 2004 et est entrée en vigueur en 2007. Elle avait pour but de « créer un marché unique pour les services et les activités d'investissement tout en assurant un haut degré de protection pour les investisseurs » 72 ( * ) .

En particulier, la directive MIF I a mis fin aux monopoles des Bourses pour l'échange des actions. Désormais, une même action peut être échangée sur plusieurs plateformes différentes en Europe. Les Bourses traditionnelles ont pris le statut de « marché réglementé » tandis que leurs concurrentes ont adopté celui de systèmes multilatéraux de négociation (SMN ou Multilateral Trading Facilities, MTF en anglais).

L'ouverture à la concurrence s'est accompagnée d'un renforcement de la transparence dite « pré-négociation » (informations relatives aux quantités et aux prix offerts) et « post-négociation » (informations relatives aux conditions réelles d'exécution de l'échange).

Néanmoins, il est vite apparu que la directive comportait des « trous noirs ». D'une part, elle ne s'applique pas aux produits dérivés et aux obligations, encore largement négociés en dehors des marchés organisés (le marché est dit « de gré à gré » ou over the counter - OTC ). Or le G 20 de Pittsburgh, en septembre 2009, a posé le principe que « tous les contrats de produits dérivés de gré à gré normalisés devront être échangés sur des plates-formes d'échanges ou via des plates-formes de négociation électronique selon le cas et compensés par des contreparties centrales ».

D'autre part, certains acteurs du marché ont profité des exemptions autorisées par la directive pour développer des modes d'échanges opaques ( dark pools ), en contradiction avec l'esprit de la directive. Plus généralement, comme le relevait, en 2010, un rapport demandé par le ministre de l'économie, « le sentiment, dominant chez les différents intervenants, [est celui] d'une dégradation de la qualité de la transparence sur les ordres » 73 ( * ) .

De même, la concurrence entre plateformes a conduit à l'émergence du « trading à haute fréquence », qui représente désormais une part majoritaire du volume des ordres en Europe. Or le trading par ordinateur, ultra-rapide, peut se révéler particulièrement déstabilisateur pour le marché 74 ( * ) .

Pour ces raisons, la Commission européenne a proposé en octobre 2011 de réviser en profondeur la directive MIF I.

B. LES PRINCIPALES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR « MIF II »

Le paquet « MIF II » comprend une directive 75 ( * ) et un règlement 76 ( * ) . D'après les informations transmises par le Gouvernement à votre rapporteur, 75 % des dispositions du paquet « MIF II » sont nouvelles ou très différentes de celles contenues dans MIF I. Les principales avancées sont résumées ci-dessous.

1. Un encadrement plus étroit des échanges d'instruments financiers

Le paquet « MIF II » vise à ce que l'essentiel des transactions d'instruments financiers se déroule sur des marchés ouverts, régulés et transparents. À ce titre, les actions et assimilées doivent être obligatoirement négociées sur une plateforme. Il en va de même pour les dérivés, définis par le règlement EMIR 77 ( * ) , qui sont suffisamment standardisés et liquides, conformément aux engagements pris par le G 20.

En outre, la directive crée un nouveau type de plateforme de négociation : les systèmes organisés de négociation (SON ou Organised Trading Facilities - OTF en anglais). Les SON pourront spécifiquement accueillir des transactions sur produits dérivés ou obligations.

Enfin, pour garantir l'effectivité des règles exposées ci-dessus, le texte européen prévoit un accès non discriminatoire aux plateformes de négociation et aux chambres de compensation.

2. Une transparence renforcée

Au regard des limites, présentées plus haut, relatives à la transparence sur les marchés actions, MIF II conditionne plus fortement les dérogations à la transparence aujourd'hui ouvertes par MIF I. Surtout, les nouvelles règles posent un principe de transparence pour les obligations et les dérivés. Là encore, des exemptions sont ouvertes, par exemple pour les ordres de grande taille, mais de manière limitée.

En outre, les textes européens visent à ce que les données de l'ensemble des plateformes de négociation puissent être agrégées et mises à disposition. Comme l'indique la Commission européenne, les plateformes auront « l'obligation [...] de donner accès à leurs données sur une base commerciale raisonnable et [...] un système consolidé de publication des données pour les données post-transaction [sera mis en place] » 78 ( * ) .

3. Un encadrement du trading à haute fréquence

C'était là un des points les plus attendus de la nouvelle législation. La proposition initiale de la Commission européenne était en effet très ambitieuse sur ce projet. Il s'agissait, sans aller jusqu'à interdire le trading à haute fréquence, de s'assurer qu'il ne perturbe pas les marchés et qu'il participe effectivement au financement de l'économie.

Dans le texte final, les « mesures d'encadrement incluent des exigences de régulation appropriée pour les acteurs de marché mettant en oeuvre des stratégies de trading algorithmique, et des exigences de fourniture de liquidité s'appliqueront aux teneurs de marché. En outre, les entreprises d'investissement proposant un accès électronique direct à une plateforme de négociation devront mettre en place des systèmes et des contrôles des risques pour prévenir des comportements de négociation pouvant perturber ou manipuler le marché » 79 ( * ) .

À l'initiative de votre rapporteur, ces dispositions ont d'ores et déjà fait l'objet d'une transposition par anticipation lors de l'examen de la loi du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires (articles 17 à 19).

4. La mise en place de limites de position pour le négoce des dérivés sur matières premières

Dans les conclusions de la réunion de Pittsburgh, en septembre 2009, les dirigeants du G 20 déclaraient : « nous sommes convenus d'améliorer la régulation, le fonctionnement et la transparence des marchés financiers et physiques de matière première afin de remédier à la volatilité excessive des prix des matières premières ».

S'agissant de l'Union européenne, cet engagement a été traduit dans le paquet MIF II. Ainsi, il sera désormais possible de fixer des limites de position des dérivés sur matières premières. La Commission européenne explique ainsi que « les autorités compétentes vont imposer des limites de position aux acteurs de marché en accord avec une méthodologie définie par l'Autorité européenne des marchés financiers (AEMF). Une obligation de reporting des positions par catégorie de négociateurs est aussi introduite. Cela va aider les régulateurs et les participants de marché à avoir une meilleure information sur le fonctionnement de ces marchés » 80 ( * ) .

À l'initiative du Sénat, ces dispositions ont d'ores et déjà fait l'objet d'une transposition par anticipation lors de l'examen de la loi du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires (articles 13 à 16).

5. Une protection accrue pour les investisseurs

Tout comme MIF I, le paquet « MIF II » vise à assurer la protection des investisseurs qui acquièrent des instruments financiers. En particulier, il vise à distinguer le conseil indépendant du conseil non-indépendant (dans lequel le conseiller a un intérêt à l'achat de tel ou tel produit). À cet égard, le versement, de la part de tiers, de commissions aux conseillers sera encadré. Les « tests d'adéquation », qui permettent de s'assurer que les produits proposés correspondent au profil du client, seront renforcés. Enfin, les autorités européennes (AEMF ou Autorité bancaire européenne, selon les produits, pourront interdire ou limiter la vente de certains produits).

6. Un nouveau corpus de sanctions

La directive prévoit également de renforcer le régime actuel de sanctions administratives, dans le sens d'une harmonisation européenne plus poussée, à l'instar de ce qui a été fait dans d'autres textes financiers 81 ( * ) .

*

La directive doit être transposée au plus tard au 3 juillet 2016 .

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article a été introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement avec un avis favorable de la commission.

Les 1° et 2° du I prévoient d'habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures relevant du domaine de loi afin de transposer la directive « MIF II » et de mettre en conformité le droit français avec les dispositions du règlement « MIF II ». En outre, le 3° du I permet également au Gouvernement de rendre applicables, par voie d'ordonnance, les dispositions prises en application des 1° et 2°.

Le II fixe le délai d'habilitation à vingt-quatre mois .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Avec le paquet « CRD IV » pour les banques et la directive « Solvabilité II » pour les assurances, le paquet « MIF II » applicables aux marchés financiers constitue un des chantiers législatifs les plus importants au cours de la législature 2009-2014 du Parlement européen.

Avec le règlement EMIR, adopté en 2012, il permet de traduire plusieurs engagements forts du G 20 et d'établir un nouveau cadre d'exécution pour les marchés financiers . L'obligation d'échanger des instruments financiers, en particulier pour les produits dérivés, sur des marchés transparents et ouverts, constitue à ce titre un progrès fondamental de la régulation en Europe.

Il prend également acte des limites de la directive MIF I , qui avait été élaborée dans le but exclusif ou, à tout le moins, excessif de déréguler l'activité des marchés financiers pour faciliter la concurrence en leur sein . Il est vite apparu, pour tous les acteurs, que cette démarche portait en elle les germes de nouveaux risques (le trading haute fréquence ou encore l'opacité croissante de certaines transactions). Au surplus, les gains attendus pour les utilisateurs n'ont pas été aussi élevés qu'attendus.

Dans les prochaines années, le renforcement des normes prudentielles applicables aux banques devrait conduire les entreprises à solliciter plus largement les marchés financiers pour trouver des financements (actions ou obligations). Dès lors, il devenait urgent que des règles adéquates soient appliquées aux marchés financiers.

S'agissant du volet sanctions, la commission des finances a décidé de supprimer l'article 23 ter qui habilitait le Gouvernement à transposer par ordonnance le paquet « abus de marché » ( cf. supra commentaire de l'article 23 ter ). Par cohérence avec la position exprimée sur cet article, le champ de l'habilitation du présent article a été réduit, à l'initiative de votre rapporteur, afin d'en exclure toute mesure en matière de sanctions .

À l'initiative de votre rapporteur, la commission des finances a adopté un amendement tendant à réduire à quinze mois le délai d'habilitation qui était initialement de vingt-quatre mois.

Décision de votre commission : votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLE 23 quinquies - Transposition de la directive « OPCVM V »

Commentaire : le présent article vise à habiliter le Gouvernement à transposer par voie d'ordonnance la directive 2014/91/UE du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 modifiant la directive 2009/65/CE portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant certains organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM), pour ce qui est des fonctions de dépositaire, des politiques de rémunération et des sanctions.

I. LA DIRECTIVE OPCVM V

La directive 2014/91/UE du 23 juillet 2014, dite « OPCVM V » a été adoptée le 23 juillet 2014. Elle modifie la directive 2009/65/CE, dite « OPCVM IV », portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant certains organismes de placement collectif en valeur mobilières (OPCVM), en matière de fonctions de dépositaire, de politiques de rémunération et de sanctions applicables aux infractions au cadre juridique régissant ces OPCVM.

La directive OPCVM V a notamment pour objet de remédier aux divergences d'interprétation, mises en lumière par la fraude Madoff, quant aux missions et à la responsabilité des dépositaires 82 ( * ) , notamment en cas de recours des sous-conservateurs.

A. LA CLARIFICATION DE L'ÉTENDUE DES OBLIGATIONS ET DE LA RESPONSABILITÉ DES DÉPOSITAIRES

Se fondant sur les dispositions applicables aux dépositaires définies dans le cadre de la directive 2011/61/UE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2011 sur les gestionnaires de fonds d'investissement alternatifs (directive AIFM 83 ( * ) ), la directive OPCVM V définit les tâches et des responsabilités qui incombent aux dépositaires agissant pour le compte d'un OPCVM.

La directive précise :

- la mission de garde qui diffère selon la nature des actifs ;

- les possibilités et les conditions de délégation des activités du dépositaire ;

- les règles relatives à la sous-délégation.

La directive apporte également des clarifications sur la responsabilité du dépositaire en cas de perte d'un instrument financier, notamment dans l'hypothèse de la faillite du dépositaire ou du sous-conservateur. Elle affirme l'obligation de restitution sans délai par le dépositaire d'un instrument financier équivalent ou de la somme correspondante en cas de perte, sauf si le dépositaire est en mesure de démontrer qu'il ne pouvait empêcher cette perte malgré les diligences menées. Contrairement à ce que permet la directive AIFM, la directive OPCVM V interdit toute décharge contractuelle de responsabilité.

Elle oblige, en outre, à ce que l'enregistrement, dans les livres du dépositaire, des instruments financiers conservés se fasse dans des comptes ségrégués au nom de l'OPCVM, afin qu'ils ne puissent être distribués ou réalisés au profit des créanciers du dépositaire.

Enfin, la directive OPCVM V établit la liste des entités autorisées à exercer la fonction de dépositaire : les banques centrales nationales, les établissements de crédit et les entités autorisées dans leur État membre d'origine à exercer cette activité de dépositaire et soumises à des règles prudentielles équivalentes.

B. L'ENCADREMENT DES RÉMUNÉRATIONS D'OPCVM POUR ÉVITER LA PRISE DE RISQUE EXCESSIVE

La directive OPCVM V oblige les sociétés de gestion à mettre en place une politique de rémunération transparente, n'encourageant pas une prise de risque excessive et permettant l'alignement des intérêts des gérants d'OPCVM avec ceux des investisseurs.

La directive prévoit notamment :

- qu'au moins la moitié de la rémunération variable doit être constituée en des parts ou actions de l'OPCVM géré ;

- le report d'au moins 40 % du paiement de la rémunération variable sur une période de trois ans ;

- l'obligation pour les sociétés de gestion considérées comme importantes en raison de leur taille ou de la taille des fonds gérés de mettre en place un comité des rémunérations.

Ces mesures s'inscrivent dans le prolongement des initiatives du G20 pour mieux encadrer la rémunération dans le secteur financier et reprennent, pour l'essentiel, les mesures prévues en matière de rémunération par la directive AIFM.

C. UN RÉGIME DE SANCTIONS SPÉCIFIQUE AUX GÉRANTS D'OPCVM ET AUX DÉPOSITAIRES

La directive prévoit, dans son volet « sanctions », une harmonisation des sanctions administratives au sein de l'Union européenne en cas de manquement aux obligations qu'elle instaure.

La directive OPCVM V énonce ainsi la liste des infractions possibles et les plafonds « minimum » des sanctions administratives. Le plafond des sanctions pécuniaires administratives doit ainsi s'élever au minimum à cinq millions d'euros ou, dans le cas d'une personne morale, 10 % du chiffre d'affaires annuel.

De manière alternative, peuvent s'appliquer des sanctions pécuniaires administratives dans un plafond correspondant au moins au double de l'avantage retiré de l'infraction, si celui-ci peut être déterminé.

Une gamme de sanctions professionnelles (retrait d'agrément, interdiction d'exercer...) est également prévue.

La directive OPCVM V fixe une liste de circonstances, atténuantes ou aggravantes, qui doivent être prises en compte pour le prononcé de la sanction administrative, afin d'en déterminer le type et le niveau (situation financière, niveau de coopération et degré de responsabilité de l'auteur du manquement, gravité de l'infraction...).

Les États membres peuvent décider de ne pas fixer de régime des sanctions administratives pour les infractions qui relèvent du droit pénal national. Ils communiquent alors à la Commission européenne les dispositions de droit pénal pertinentes.

Par ailleurs, les États membres sont tenus de mettre en place « des mécanismes efficaces et fiables pour encourager le signalement aux autorités compétentes des infractions potentielles ou réelles, [...] y compris des canaux de communication sûrs pour le signalement de ces infractions ».

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Adopté à l'initiative du Gouvernement, avec un avis favorable de la commission, cet article prévoit d'autoriser le Gouvernement, dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, à prendre par voie d'ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires à la transposition de la directive OPCVM V ainsi que les mesures d'adaptation et d'harmonisation liées à cette directive.

Le Gouvernement serait également autorisé à adapter le droit de l'outre-mer en matière de gestion d'actifs financiers, en prenant les mesures « permettant, d'une part, de rendre applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, avec les adaptations nécessaires, les dispositions du code monétaire et financier, du code de commerce et, le cas échéant, d'autres codes et lois relatives à la gestion des actifs financiers pour celles qui relèvent de la compétence de l'État et, d'autre part, de procéder aux adaptations nécessaires de ces dispositions en ce qui concerne les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon. »

Le délai d'habilitation est fixé à dix-huit mois à compter de la publication de la présente loi, la directive devant être transposée au plus tard le 18 mars 2016.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

La directive OPCVM V comporte des avancées importantes pour la protection des épargnants de l'Union européenne, en particulier le renforcement des exigences pesant sur les dépositaires et l'encadrement de la rémunération des gérants de fonds.

Le volet « sanctions » présente quant à lui l'intérêt de constituer un premier pas vers une harmonisation des sanctions administratives applicables aux acteurs de la gestion d'actifs. L'enjeu est à la fois d'assurer le respect effectif des règles et de contribuer à réduire les distorsions de concurrence entre États membres. Le progrès est cependant mesuré.

Une première limite tient à ce que les nouveaux plafonds de sanction prévus par la directive ne garantissent pas que les autorités de contrôle nationales exerceront leurs prérogatives avec toute la vigilance et la vigueur que l'on pourrait attendre, en particulier dans les États membres qui inscrivent le « pragmatisme » ou la mansuétude de leurs autorités de contrôle dans leur stratégie d'attractivité.

Une seconde résulte du caractère optionnel du dispositif de répression administrative prévu par la directive : les États membres peuvent ne maintenir que des sanctions pénales, dont la mise en oeuvre effective et donc la crédibilité est sujette à caution. La voie pénale présente en effet plusieurs inconvénients, en particulier la lenteur du système judiciaire, qui contraste avec la célérité des sanctions administratives. La perspective d'une éventuelle sanction pénale, prononcée au terme de longues années de procédure, a un effet dissuasif limité.

Il faut également relever que les plafonds prévus par la directive sont des plafonds « minimum », qui se situent pour certains d'entre eux à un niveau inférieur à ceux en vigueur en France.

Par exemple, le plafond des sanctions applicables à un particulier doit, selon la directive, s'élever au minimum à 5 millions d'euros, quand la Commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers (AMF) peut actuellement infliger à un particulier, pour les infractions visées par la directive, une sanction pécuniaire allant jusqu'à 15 millions d'euros. De même, la directive impose de prévoir, à titre d'alternative, un plafond de sanction correspondant au moins à deux fois l'avantage retiré de l'infraction, alors que l'AMF peut aller jusqu'au décuple.

Par ailleurs, la directive prévoit un plafond exprimé en fonction du chiffre d'affaires de la personne morale sanctionnée (plafond d'au moins 10 % du chiffre d'affaires), qui n'a pas son équivalent dans le droit français pour les infractions entrant dans le champ de la directive.

Il faut souligner que chaque État membre est libre d'aller au-delà de ces plafonds « minimum », en arbitrant entre la nécessité de faire respecter l'ordre public financier et la tentation du « moins-disant » répressif, destiné à attirer les établissements financiers.

Cela signifie également que si une habilitation est donnée au Gouvernement pour transposer ces dispositions, il lui reviendra de fixer ces plafonds d'une manière très libre, alors qu'il apparaît à votre rapporteur que le Parlement devrait être directement saisi de cette question qui n'est pas d'une technicité particulière.

Au surplus, il serait souhaitable que le Parlement se prononce, à travers un texte global et cohérent, sur l'ensemble des mesures adaptant le droit français en matière de répression des infractions financières aux nouvelles exigences européennes, plutôt que de se dessaisir de sa compétence par une diversité d'habilitations.

Il convient également de prendre en compte l'arrêt Grande Stevens c. Italie rendu par la Cour européenne des droits de l'Homme le 4 mars 2014, qui remet en cause le cumul des poursuites administratives et pénales, qui est possible en droit français et prévu par plusieurs des directives dont le présent projet de loi vise à autoriser la transposition par voie d'ordonnance.

S'il apparaît que cette décision impose à la France de refondre son système répressif, le Parlement doit être en mesure de se prononcer directement sur les choix structurants qui devront être faits.

Pour cela et par cohérence avec la position de votre rapporteur sur l'article 23 ter , il convient, pour l'instant, d'écarter du champ de l'habilitation accordée au Gouvernement pour la transposition de la directive OPCVM V le volet « sanctions » de cette dernière . La commission des finances a adopté un amendement en ce sens .

Il faut d'ailleurs signaler que votre commission des finances mène actuellement, conjointement avec la commission pour le contrôle de l'application des lois, une mission d'évaluation portant sur le pouvoir de sanction des régulateurs financiers, qui devrait déboucher sur des propositions législatives.

À l'initiative de votre rapporteur, la commission des finances a également réduit le délai de transposition de dix-huit mois à quinze mois .

Décision de la commission : votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLE 23 sexies - Transposition de la directive et du règlement relatifs au contrôle légal des comptes

Commentaire : le présent article vise à habiliter le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance les mesures de transposition et d'adaptation du droit interne rendues nécessaires par la directive et le règlement relatifs au contrôle légal des comptes.

I. LE DROIT EXISTANT

En 2001 puis 2002, les affaires Enron et WorldCom ont jeté un doute important sur la qualité de l'information financière et comptable, normalement garantie par les cabinets réalisant l'audit légal des grandes sociétés, aux États-Unis et, par répercussion, dans le reste du monde.

Les États-Unis ont réagi rapidement à la crise de confiance par le vote de la loi dite « Sarbanes-Oxley » (« Corporate Accountability Act »), promulguée le 30 juillet 2002.

La France a, quant à elle, adopté la loi n° 2003-706 du 1 er août 2003 de sécurité financière, qui a renforcé les garanties d'indépendance des commissaires aux comptes en précisant les incompatibilités les concernant et en prévoyant une rotation des commissaires aux comptes signataires au minimum tous les six ans.

À la suite de la crise financière de 2008, la Commission européenne, constatant que la fidélité et la sincérité de la présentation du bilan des établissements financiers était mise en doute, a jugé « approprié de soumettre le rôle de l'audit ainsi que sa portée à une analyse et à des débats plus approfondis dans le contexte général de la réforme de la régulation des marchés financiers ».

Elle a ainsi publié, le 13 octobre 2010, un Livre vert, intitulé « Politique en matière d'audit : les leçons de la crise », qui réaffirme que « l'audit, aux côtés de la surveillance et du gouvernement d'entreprise, devrait apporter une contribution essentielle à la stabilité financière en fournissant des garanties quant à la véracité de la santé financière des entreprises. Ces garanties devraient réduire les risques d'anomalies dans les comptes et donc les coûts subis par les parties prenantes à l'entreprise et par la société en général en cas de défaillance. La fiabilité de l'audit, qui contribue à la protection des investisseurs et réduit les coûts du capital pour les entreprises, est essentielle pour rétablir la confiance des marchés ».

Outre la perte de confiance induite par la crise, le Livre vert identifie ainsi trois lacunes principales du secteur de l'audit dans l'Union européenne :

- des insuffisances dans le contrôle exercé par les autorités compétentes des États membres ;

- une indépendance des auditeurs perfectible ;

- une trop forte concentration du marché de l'audit autour des quatre plus gros cabinets (les Big Four ou Fat Four ), entraînant un risque systémique. La disparition de l'une des sociétés « capables d'assurer l'audit de grandes entités complexes » pourrait « limiter la disponibilité d'informations financières auditées sur les grandes sociétés et, surtout, nuire à la confiance des investisseurs et à la stabilité du système financier dans son ensemble ».

Pour remédier à ces lacunes, ont été adoptés la directive 2014/56/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 modifiant la directive 2006/43/CE concernant les contrôles légaux des comptes annuels et des comptes consolidés et le règlement (UE) n° 537/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relatif aux exigences spécifiques applicables au contrôle légal des comptes des entités d'intérêt public et abrogeant la décision 2005/909/CE de la Commission .

La directive porte essentiellement sur les conditions d'agrément des auditeurs légaux et les règles déontologiques qui leur sont applicables (indépendance, objectivité et secret professionnel) et renforce le cadre de la supervision des auditeurs légaux par les autorités nationales et européennes.

Elle prévoit ainsi :

- le renforcement de l' indépendance des auditeurs , notamment grâce la mise en place de procédures internes appropriées ;

- un enrichissement du rapport d'audit (mention des incertitudes significatives sur la continuité d'exploitation de l'entité contrôlée) ;

- le renforcement des pouvoirs des autorités publiques de supervision des auditeurs légaux ;

- la généralisation de l'application des normes internationales d'audit ( International Standards on Auditing - ISA), élaborées par la Fédération internationale d'experts comptables ( International Federation of Accountants ) par l'intermédiaire de son Conseil international des normes d'audit et d'assurance ( International Auditing and Assurance Standards Board ) et adoptées par la Commission européenne ;

- la création du Comité des organes européens de supervision de l'audit ( Committee of European Auditing Oversight Bodies - CEAOB), en remplacement du Groupe européen des organes de supervision de l'audit ( European Group of Auditors' Oversight Bodies - EGAOB), chargé de coordonner les superviseurs nationaux et de favoriser une application harmonisée des règles européennes.

Le règlement relatif aux exigences spécifiques applicables au contrôle légal des comptes des entités d'intérêt public (EIP) vient compléter ce dispositif en prévoyant des exigences spécifiques et renforcées pour le contrôle légal des comptes des EIP, présentant des risques systémiques plus importants, notamment :

- l'instauration d'une procédure d'appel d'offres pour la sélection des auditeurs légaux ;

- la rotation obligatoire des auditeurs légaux au plus tard tous les dix ans 84 ( * ) ;

- l'établissement d'une liste de services sortant du champ de l'audit qui ne peuvent être fournis par l'auditeur légal à l'entité auditée (prestations de nature fiscale, services de paie, services liés au contrôle interne...) 85 ( * ) ;

- le renforcement du rôle et de l'information du comité d'audit .

Sont considérées comme des EIP les sociétés cotées, les établissements de crédit et les organismes d'assurances . Les États membres peuvent y ajouter d'autres catégories d'entités.

Les États membres sont tenus de transposer la directive et de mettre leur droit interne en conformité avec le règlement d'ici au 16 juin 2016 . L'entrée en vigueur du règlement a été différée de deux ans pour coïncider avec celle de la directive et laisser le temps aux États membres d'adapter leur droit national aux nouvelles dispositions.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article, adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, après avis favorable de notre collègue député Christophe Caresche, rapporteur, vise à habiliter le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires à la transposition de la directive 2014/56/UE et à la mise en conformité du droit interne avec le règlement (UE) n° 537/2014.

Le Gouvernement serait également autorisé à étendre, avec les adaptations nécessaires, ces mesures aux îles Wallis et Futuna et aux collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon.

Le présent article prévoit un délai d'habilitation de dix-huit mois à compter de la publication de la loi.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

La France possède déjà un cadre légal et réglementaire robuste pour l'activité d'audit légal des comptes, renforcé par la loi de sécurité financière du 1 er août 2003, qui a notamment institué le Haut Conseil du commissariat aux comptes (H3C), autorité administrative indépendante assurant le contrôle de la profession de commissaire au compte.

Elle se situe d'ailleurs à un niveau d'exigence supérieur sur certains points aux exigences minimales fixées par la directive et le règlement relatifs au contrôle légal des comptes, en particulier pour ce qui concerne le régime applicable aux entreprises non EIP et aux obligations d'indépendance et de rotation.

Pour autant, les nouvelles règles impliquent des évolutions importantes du droit français. Des concertations avec le H3C et la Compagnie nationale des commissaires aux comptes (CNCC), particulièrement en raison de l'impact des textes européens sur leur organisation, avec l'Autorité des marchés financiers (AMF) et l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), et avec les représentants des entreprises ont déjà eu lieu et se prolongeront tout au long des travaux de transposition.

S'agissant de l'effet structurel de la réforme sur le marché de l'audit légal, il faut observer que, grâce en partie à la pratique du co-commissariat déjà en vigueur dans notre pays, le marché français est moins concentré que la plupart des autres marchés européens. En 2010, les Big Four s'y octroyaient ainsi 58 % des parts de marché contre 83 % en moyenne dans l'Union européenne et 97 % au Royaume-Uni.

Aussi peut-on regretter que le co-commissariat n'ait été retenu que de manière optionnelle par les nouvelles règles européennes, qui lui attachent cependant quelques avantages, en particulier pour ce qui concerne le rythme de la rotation obligatoire.

L'obligation de rotation est d'ailleurs la principale mesure de la réforme destinée à assurer une déconcentration du marché de l'audit légal. La période de base a cependant été fixée à dix ans au maximum, contre six ans en France.

Imparfaites sur ce plan, les nouvelles règles européennes comportent toutefois des avancées importantes et améliorent le socle commun des garanties d'indépendance des auditeurs légaux et donc de fiabilité des comptes des entités auditées.

À l'initiative de votre rapporteur, la commission des finances a réduit le délai de transposition de dix-huit mois à quinze mois.

Décision de la commission : votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLE 23 septies - Ratification de l'ordonnance du 20 février 2014 de transposition du paquet « CRD IV »

Commentaire : le présent article vise à ratifier l'ordonnance n° 2014-158 du 20 février 2014 portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière financière (ordonnance de transposition de la directive et du règlement « CRD IV »).

I. L'ORDONNANCE N° 2014-158 DU 20 FÉVRIER 2014

En juillet 2013, l'Union européenne a adopté un paquet relatif aux exigences de fonds propres, dit « CRD 4 » , qui transpose les recommandations de Bâle III en droit européen, et qui comprend un règlement dit « CRR » 86 ( * ) , relatif aux ratios (de fonds propres, de liquidité, de levier) de base, et une directive dite « CRD » 87 ( * ) , qui traite des questions d'accès à l'activité d'établissement de crédit, de gouvernance et de certains coussins de capital supplémentaires. Ce paquet devait être transposé dans les différents droits nationaux avant le 31 décembre 2013.

Dans ce contexte, l'article 11 de la loi n° 2014-1 du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier la vie des entreprises a habilité le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures législatives nécessaires à la transposition de la directive et à l'adaptation de notre droit au règlement.

Dans ce cadre, l'ordonnance n° 2014-158 du 20 février 2014 a été publiée dans les délais impartis par la loi d'habilitation (huit mois) et il convient d'en assurer la ratification législative.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article, adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, après avis favorable de la commission des finances, vise à ratifier l'ordonnance n° 2014-158 du 20 février 2014 portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière financière .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le paquet « CRD 4 » représente sans doute le plus important chantier législatif européen du mandat de la Commission européenne sortante en matière bancaire . Il contient tout à la fois les nouvelles règles prudentielles (fonds propres, liquidité, levier) visant à assurer une meilleure solidité au secteur bancaire, et des règles de gouvernance et d'encadrement des rémunérations qui visent à modifier la culture même du secteur bancaire (contrôle du superviseur sur les dirigeants ; plafonnement des rémunérations variables, etc.). En outre, il procède à un certain nombre d'ajustements, y compris dans la définition des établissements de crédit, qui obligent les Etats membres à adapter leurs législations nationales.

La France a procédé à certaines de ces adaptations et transpositions par anticipation , en particulier dans le cadre de la loi du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires, s'agissant par exemple de l'obligation de « reporting pays par pays » ou de l'encadrement de la rémunération variable des salariés preneurs de risque ( traders ).

Cependant, non seulement ces évolutions ont dû être revues au regard de la version définitive des textes européens, mais d'autres, ainsi que des ajustements techniques, ont dû être encore effectuées. Ainsi, l'ordonnance du 20 février 2014 procède, sur plusieurs dizaines de pages, à une réécriture de très nombreux articles du code monétaire et financier .

Les choix établis au moment du vote de l'habilitation sur les trois principales options laissées par la directive 88 ( * ) ont été respectés par l'ordonnance :

• l'application à l'ensemble des filiales d'un groupe soumis à la surveillance sur base consolidée par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution du plafonnement des rémunérations (III de l'article L. 511-57 du code monétaire et financier) ;

• la mise en place, au 1 er janvier 2015 seulement, du ratio de liquidité (IV de l'article 10 de l'ordonnance, qui renvoie son entrée en vigueur à un arrêté du ministre chargé de l'économie) ;

• les rôles respectifs du Haut conseil de stabilité financière et de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution dans la fixation des coussins de capital supplémentaires (article L. 511-41-1 du code monétaire et financier).

En outre, les quelques erreurs ou lacunes de rédaction, de coordination ou de référence, qui, depuis le mois de février, ont pu être repérées dans le texte de l'ordonnance sont soit corrigées dans certains articles du présent projet de loi, notamment les articles 13, 14, 15 et 17), soit pourront l'être dans le cadre de certaines des ordonnances pour lesquelles le Gouvernement demande une habilitation par le présent projet de loi.

Décision de la commission : votre commission a adopté cet article sans modification.

ARTICLE 24 - Délais d'édiction des ordonnances

Commentaire : le présent article précise les délais dans lesquels devront être prises les ordonnances prévues par certains des articles du présent projet de loi .

Estimant que le Parlement ne devait pas se dessaisir de sa compétence sur une période trop longue et compte tenu de la possibilité pour le Gouvernement de revenir devant le Parlement pour solliciter la prolongation d'un délai d'habilitation, la commission des finances a réduit à quinze mois les délais excédant cette durée et applicables aux articles 23 quater , 23 quinquies et 23 sexies .

Habilitations du Gouvernement

Délai d'édiction des ordonnances
à compter de la promulgation de la loi

Texte adopté par l'Assemblée nationale

Texte adopté par la commission des finances du Sénat

Article 15 : adapter les règles applicables aux succursales d'établissements de crédit de pays tiers aux dispositions européennes sur les exigences de fonds propres

5 mois

5 mois

Article 7 : transposer les chapitres 1 à 9 de la directive comptable (états financiers annuels)

7 mois

7 mois

Article 1 er : transposer la directive établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d'investissement

Article 2 : transposer la directive relative aux systèmes de garantie de dépôt

Article 11 : transposer la directive relative au règlement extrajudiciaire des litiges de consommation


Article 13
: appliquer et adapter dans les collectivités d'outre-mer les dispositions relatives aux autorités européennes de supervision financière et bancaire

8 mois

8 mois

Article 3 : transposer la directive sur l'accès aux activités de l'assurance et de la réassurance et leur exercice

Article 4 : adapter la législation sur les assurances applicables à Mayotte et dans les îles Wallis et Futuna

Article 6 : transposer la directive « transparence »

Article 23 bis : adapter le droit national au règlement concernant l'amélioration du règlement de titres dans l'Union européenne et les dépositaires centraux de titres

12 mois (1)

12 mois

Article 10 : transposer la directive « crédit immobilier »

15 mois

15 mois

Article 23 quinquies : transposer la directive « OPCVM V »

Article 23 sexies : transposer la directive relative au contrôle légal des comptes et adapter le droit national au règlement relatif au contrôle légal des comptes

18 mois (1)

Article 23 quater : transposer la directive concernant les marchés d'instruments financiers et adapter le droit national au règlement concernant les marchés d'instruments financiers

24 mois (1)

Article 23 ter : transposer la directive sur les sanctions pénales en cas d'abus de marché et adapter le droit national au règlement sur les abus de marché

Article supprimé

(1) Pour les habilitations prévues aux articles 23 bis , 23 ter , 23 quater , 23 quinquies et 23 sexies , le texte adopté par l'Assemblée nationale prévoyait comme point de départ du délai la date de publication de la loi.

Décision de la commission : votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLE 25 - Délai de ratification des ordonnances

Commentaire : le présent article fixe le délai de ratification des ordonnances prévues par le présent projet de loi.

L'article 38 de la Constitution prévoit que les ordonnances deviennent caduques si le projet de loi de ratification n'est pas déposé devant le Parlement avant la date fixée par la loi d'habilitation.

Le présent article fixe cette date, pour chaque ordonnance prévue par le présent projet de loi, à l'expiration d'un délai de cinq mois à compter de la publication de l'ordonnance.

Ce délai est raisonnable au regard de la pratique habituelle.

Décision de la commission : votre commission a adopté cet article sans modification.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. AUDITION DE MICHEL BARNIER, COMMISSAIRE EUROPÉEN CHARGÉ DU MARCHÉ INTÉRIEUR ET DES SERVICES (10 JUIN 2014)

Réunie le mardi 10 juin 2014, sous la présidence de M. Philippe Marini, président, la commission a procédé à l'audition de M. Michel Barnier, commissaire européen chargé du marché intérieur et des services, conjointement avec la commission des affaires européennes.

M. Philippe Marini , président . - Nos commissions se sont assigné, dans leur programme d'activité, de rencontrer en cette fin de mandat plusieurs membres de la Commission européenne : ceux dont les portefeuilles touchent le plus directement nos activités. Michel Barnier, en charge du marché intérieur et des services, succède ainsi à Joaquín Almunia et Algirdas Semeta.

Ces rencontres sont destinées à faire le point sur les principaux dossiers que les commissaires ont fait avancer, sur les résultats qu'ils ont atteints et sur les chantiers qu'ils doivent transmettre à leurs successeurs. C'est pour les commissions du Parlement une excellente occasion d'aborder de plain-pied les problématiques européennes.

Michel Barnier a été, tout au long de son mandat, particulièrement accessible aux parlementaires français, notamment aux sénateurs, sans doute pour avoir conservé une bonne part de la culture du Sénat dont il a présidé la délégation pour les affaires européennes.

Nous vous avions rencontré lors de notre séminaire annuel qui s'est tenu à Bruxelles en mai 2011. Il s'agissait d'une initiative de Jean Arthuis qui s'apprête à nous quitter le 1 er juillet pour siéger au Parlement européen.

Plus de trente textes touchant les matières bancaires et financières ont été discutés sous votre égide : sur les agences de notation, le régime prudentiel des banques, les fonds de gestion alternatifs, les marchés financiers, les produits dérivés, etc...

J'aimerais pour ma part vous interroger sur un sujet d'actualité : la situation de certaines banques européennes, notamment la BNP, du fait des interprétations données par les autorités judiciaires américaines à certaines transactions en devises. Cela pourrait-il devenir un problème de régulation ?

M. Simon Sutour , président de la commission des affaires européennes . - Je voudrais saluer Michel Barnier, qui a bien voulu répondre à notre invitation conjointe. Je me souviens moi aussi qu'il a été président de ce que l'on appelait alors la délégation pour l'Union européenne et que lorsque j'étais jeune sénateur, il a été mon « maître de stage ». Le temps a bien passé depuis.

Nous vous accueillons dans un contexte particulier, puisque la Commission européenne terminera son mandat à la fin du mois d'octobre. Les élections du 25 mai ont largement renouvelé la composition du Parlement européen. Des discussions ont commencé pour la désignation du président de la Commission, qui devrait être élu le 15 juillet - tout au moins le Parlement devra-t-il donner son accord à la proposition du Conseil européen ; la nouvelle Commission sera désignée en octobre.

Depuis la grave crise financière qui a failli tout emporter et la crise des dettes souveraines dont nous subissons encore les effets ravageurs, l'Union européenne a dû beaucoup agir. Vous avez été, monsieur le Commissaire, à l'origine de nombreuses initiatives législatives visant à rétablir la confiance : c'est l'intérêt de votre audition d'évaluer ce qui a été fait et d'envisager les nombreux chantiers qui doivent encore être menés à bien.

Depuis deux ans, les bases d'une union bancaire ont été jetées. Le Sénat a beaucoup travaillé pour qu'elle réponde aux objectifs ambitieux qui lui sont assignés ; notre collègue Richard Yung a suivi ce dossier au sein de la commission des affaires européennes. Nous voulons mettre fin aux errements qui ont fait tant de mal : l'union bancaire doit être un outil de protection des épargnants et des contribuables européens. Nous voulons déconnecter durablement dettes bancaires et dettes souveraines. Le mécanisme de surveillance unique confié à la Banque centrale européenne (BCE), consistant à superviser les principales banques de la zone euro, est en vigueur depuis novembre 2013 et entrera en application en novembre 2014. Vous nous direz votre appréciation sur ce processus essentiel au retour de la confiance dans le système financier.

Ce premier mécanisme doit être complété par l'accord de finalisation sur le mécanisme de résolution unique, lui aussi essentiel pour que les contribuables ne subissent plus les conséquences des défaillances bancaires. Un conseil et un fonds de résolution uniques seront instaurés. Ce dispositif ne sera cependant opérationnel qu'une fois ratifié l'accord intergouvernemental signé le 21 mai. Nous entendrons votre évaluation de ce mécanisme.

Votre important portefeuille vous a aussi conduit à prendre des initiatives pour relancer la dynamique du marché unique : ainsi l'Acte pour le marché unique. Comme l'a démontré il y a quatre ans le rapport de Mario Monti, ce marché subit une crise de confiance. Nos concitoyens ont trop souvent le sentiment qu'il ne leur est pas profitable. La crise et le chômage de masse ont aggravé ce climat de défiance. La montée des populismes et des mouvements extrémistes l'a manifesté dans les urnes en France comme à l'étranger.

Nous devons bâtir un marché unique pour les citoyens ; l'assainissement budgétaire est important, mais il n'est pas moins essentiel de créer les conditions d'un retour à la croissance et à l'emploi. Nous avons aussi beaucoup travaillé sur la question des travailleurs détachés et le risque de dumping social : notre collègue Éric Bocquet suit ce dossier pour la commission des affaires européennes. Un accord a été trouvé sur la directive d'exécution - encore faudra-t-il s'entendre sur le problème crucial de la mise en oeuvre et de l'efficacité des contrôles.

M. Michel Barnier, commissaire européen chargé du marché intérieur et des services . - Je me souviens que vous m'aviez invité en mars 2012 ; je suis depuis resté disponible pour le Sénat comme pour l'Assemblée nationale. La tradition d'audition des commissaires européens que vous avez créée devrait être systématisée.

Je ne sais quelle leçon vous tirez de ce qui s'est passé le 25 mai ; mais faute qu'il ait eu lieu avant l'élection, le débat doit être engagé maintenant : rétablissons le lien entre ce que nous faisons à Bruxelles et à Strasbourg, dans ce jeu institutionnel européen un peu complexe, et les enjeux nationaux. Ce lien passe d'abord par les parlements nationaux : ils doivent utiliser leur capacité d'écoute et d'influence pour reconnecter ces deux débats, faute de quoi il ne faudra pas s'étonner que les choses s'aggravent encore.

Je suis très heureux de venir pour rendre des comptes, d'autant que je n'attache pas moins d'importance à l'effet de suivi qu'aux effets d'annonce. Quatre ans, c'est un temps suffisant pour tirer les leçons de la crise qui en 2008 a failli faire tout exploser ; mais c'est aussi l'occasion de dire quelle est la valeur ajoutée de l'action européenne face à une telle crise. Nous nous trouvions dans une situation d'instabilité et de volatilité générales sur les marchés ; beaucoup d'épargnants craignaient à juste titre pour leur patrimoine et la zone euro était au bord de l'implosion. Je me souviens des questions que l'on me posait ; je serai demain soir à Washington, pour la huitième fois depuis le début de mon mandat, et j'y ai souvent entendu demander : « Quand la zone euro va-t-elle exploser » ?

Les responsabilités sont partagées : il y a eu le choc externe, massif, venu des États-Unis et du comportement irresponsable de certaines banques, des bonus inexplicables sinon par la prise de risques que l'on fait payer finalement au contribuable, de l'absence de supervision, des produits toxiques, de la dérégulation générale - encouragée d'ailleurs par l'Europe pendant trente ans, gouvernements de gauche et de droite confondus -, une confiance excessive dans l'autorégulation, enfin l'absence d'une gouvernance mondiale, que sont venues pallier en 2008 et 2009 les réunions du G 20.

Au-delà de ce choc externe, la crise a révélé d'un coup toutes les faiblesses de l'Europe, notamment celle que Jacques Delors avait clairement identifiée au début de l'euro : on ne peut avoir l'union monétaire dans la désunion économique, budgétaire et fiscale. À ces faiblesses collectives touchant la gouvernance de la zone euro, aggravées par le défaut de supervision et de régulation financière, se sont ajoutées celles de chacun des États membres. La crise l'a bien montré : l'Europe est une zone où le problème de l'un devient très vite le problème de tous ; cela est vrai des banques et des États, et pas seulement de la Grèce.

Il est clairement apparu que, face à ce risque systémique, il n'y avait pas de bonne réponse nationale. Dans un monde globalisé comme l'est celui de la finance, nous devons élaborer une réponse européenne et collective. J'ai eu la preuve qu'aucun régulateur national ne peut à lui seul encadrer les produits dérivés, dont la masse se monte à 600 000 milliards de dollars, dont la plupart sont sous la table - over the counter, de gré à gré. Nous avons commencé à changer cela, en imposant des règles : la transparence, l'enregistrement et la compensation de ces produits dérivés. Mais un seul régulateur ne peut maîtriser de tels échanges ; pire, il y a lieu de craindre que si les superviseurs nationaux restent juxtaposés, leur action ne soit contre-productive : certains superviseurs ont ainsi demandé aux banques de leur pays de cantonner leurs actifs dans les frontières nationales, ce qui a limité les possibilités de financement transfrontalier et fragmenté le marché interbancaire au détriment des entreprises et des particuliers.

Face à une crise globale, la réponse doit être au moins européenne. Je m'y suis consacré depuis quatre ans et demi, avec mon cabinet et mes équipes : nous avons présenté et fait voter quarante et une lois de régulation financière...

M. Philippe Marini , président . - Je croyais une trentaine, j'étais bien en-deçà...

M. Michel Barnier . - Toutes n'ont pas la même importance, beaucoup étant des lois d'application. Mon objectif a été de créer un unique cadre réglementaire pour les vingt-huit pays : only one single rule book , y compris pour le Royaume-Uni et tous les pays qui ne sont pas dans la zone euro. Quant à l'union bancaire, elle consiste à mettre en oeuvre dans la zone euro, où nous avons un risque systémique et une solidarité obligée entre banques et États, les mêmes règles bancaires qui s'imposent aux autres, mais appliquées de manière intégrée et beaucoup plus efficace, en un mot fédérale.

Lors de mon arrivée en 2010, ma priorité a été de mettre en oeuvre le rapport de Jacques de Larosière sur la supervision. Les trois autorités de régulation qu'il prévoyait étaient plutôt des coordinations de superviseurs nationaux : l'Autorité bancaire européenne (ABE), l'Autorité européenne des marchés financiers (AEMF) et l'Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles (AEAPP). Vous avez la mémoire de cette période très grave, vous mesurerez donc à quel rythme les esprits évoluent : il était à l'époque inimaginable d'aller plus loin que la création de ces trois autorités. L'idée de Jacques de Larosière de créer un seul superviseur pour la zone euro semblait irréalisable ; pourtant cela a été possible deux ans plus tard en raison de la gravité de la crise. Nous avons créé ces trois autorités et le Comité européen du risque systémique.

La sous-capitalisation des banques a trouvé sa réponse dans la mise en oeuvre de Bâle III, les marchés dérivés ont fait l'objet du règlement EMIR ( European Market Infrastructure Regulation ) et l'union bancaire a imposé l'application rigoureuse et homogène de ces règles aux 6 200 banques de la zone euro, qu'il s'agisse de leur supervision cohérente par la BCE avec un même manuel ou de la résolution bancaire, c'est-à-dire de la mise en faillite ordonnée des banques, afin que les banques payent pour les banques quand elles sont en difficulté, pas les contribuables.

Vous avez suivi tout cela avec attention, et j'ai toujours été très heureux de lire et d'utiliser les rapports du Sénat - je pense notamment à celui de François Marc de février 2014 et à celui de Richard Yung sur le mécanisme de résolution unique ; vous êtes toujours les bienvenus à Bruxelles.

Par rapport à l'agenda que je m'étais fixé et que j'avais annoncé devant le Parlement européen en janvier 2010, nous avons réalisé 80 % de notre objectif. Restent trois points : faire adopter, tout d'abord, les 20 % des textes de régulation financière que j'ai présentés au nom de la Commission européenne et qui sont dans le pipe-line législatif du Parlement européen et du Conseil. Ainsi la réforme structurelle des banques, qui concerne les vingt-neuf plus grandes d'Europe : chacune a un bilan tellement lourd par rapport au PIB des pays où elle se trouve - parfois équivalent, sinon supérieur - qu'une difficulté pour l'une d'entre elles créerait un problème systémique auquel les législations nationales ne sauraient répondre. Les quelques critiques qu'a suscitées en France la création de ce cadre européen ne m'empêcheront pas d'avancer.

Deuxièmement, le système bancaire parallèle ou shadow banking, au sujet duquel j'ai présenté plusieurs textes qui doivent être adoptés. La tâche est très lourde, étant donnée l'amplification des transactions sur le marché parallèle. Je ne le condamne pas idéologiquement, car il rend à l'économie et aux territoires des services que le secteur traditionnel n'a pas rendus, mais il doit être régulé et astreint à des règles de transparence. Cela doit devenir la première tâche du G 20, maintenant que l'essentiel de ses recommandations ont été mises en oeuvre par chacun de ses partenaires.

Il faut prendre garde à un certain essoufflement de la régulation financière et à l'idée que, la crise étant finie, on serait revenu au business as usual . Loin s'en faut : les lois que nous avons fait adopter ne sont pas toutes opérationnelles et de grands secteurs appellent des règles nouvelles. Ne relâchons pas nos efforts et n'ayons pas la mémoire courte, dans un contexte général où les taux sont historiquement faibles et où les liquidités très abondantes peuvent inciter certains acteurs à prendre des risques non contrôlés.

Le troisième texte auquel je tiens beaucoup porte sur les indices, comme l'Euribor, qui donnent lieu à des manipulations scandaleuses. J'espère qu'il sera adopté avant la fin de l'année.

Ces réformes, parfois très techniques, doivent être mises en oeuvre ; peut-être faudra-t-il, au terme de leur nécessaire évaluation, revoir à la hausse certains de nos accords politiques. Mes textes contiennent pour cela beaucoup de clauses de revue et d'évaluation avec des périodes transitoires : ainsi celui sur les hedge funds , particulièrement pertinent dans le contexte actuel, celui sur l'audit, dont la réforme n'a pas été à la hauteur de ce que j'aurais souhaité ou encore ceux sur les agences de notation.

Il faudra enfin observer l'impact de cette législation sur l'économie ; nous avons pour l'instant vu celui, dramatique, de l'absence de régulation. J'ai veillé très précisément au triple calibrage de chacun de ces textes, pour qu'ils soient efficaces et justes, cohérents entre eux et propices à la coordination transatlantique - c'est pour cela que je vais demain pour la huitième fois aux États-Unis : il s'agit de veiller à ce que ceux qui ont pris les mêmes engagements pour réguler la finance internationale mènent bien, dans le même temps, des actions parallèles.

Le rétablissement de la stabilité et de la confiance des marchés financiers, dont nous sommes trop dépendants, est la condition préalable de toute initiative de croissance et de relance économique. Nous y sommes presque parvenus : le Conseil européen du 29 juin 2012 - le premier auquel ait participé le président Hollande - a réuni toutes les réponses à la crise, et y a ajouté l'union bancaire et le volet de croissance. Cette réponse très forte a rendu à l'Europe un peu de calme et de sérénité ; c'est pourquoi je me suis attaché immédiatement après à mener à bien l'union bancaire ; j'ai proposé en septembre suivant la première proposition sur la supervision, moins d'un an après celle sur la résolution et, moins de deux ans après, tout avait été voté, ce qui dans le temps démocratique européen est extrêmement rapide.

Il s'agit maintenant de relancer la croissance. Le marché unique - 500 millions de consommateurs, 22 millions d'entreprises - est dans une situation paradoxale : il serait la première victime de la crise si elle entraînait le retour du protectionnisme, mais il est aussi le premier atout pour sortir de la crise. Pourvu que son fonctionnement s'améliore, on peut y trouver deux à trois points de croissance supplémentaire, sans sortir de chez nous : nous n'avons pas d'excuse pour ne pas aller la chercher. C'est pourquoi j'ai établi un agenda de cinquante mesures très concrètes : le brevet unique que les entreprises attendent depuis des années, la simplification des marchés publics pour ne plus en détourner les PME, le e-commerce, la signature électronique, ou encore l'entreprenariat social - une entreprise sur quatre qui se créent en Europe appartient au secteur de l'économie sociale et solidaire, dont Bruxelles ne s'était jamais vraiment occupé. Cela est vrai aussi de toutes les formes nouvelles de financement, comme le crowdfunding - le financement participatif.

L'agenda prioritaire de la croissance et du financement de long terme contient de nouvelles idées que nous testons : une bonne titrisation, contrôlée, serait notamment un outil pour faciliter le financement des PME et permettre à l'économie de trouver des prêts bancaires. On peut en créer un marché actif et bien régulé.

M. François Marc , rapporteur général . - Je me réjouis moi aussi de la présence de Michel Barnier. Vous nous dites que l'Europe a beaucoup travaillé ces dernières années pour adapter la régulation bancaire et financière. Pourtant, nos concitoyens ont parfois l'impression que ce processus est très lent. Beaucoup ignorent totalement les progrès accomplis : un effort de communication est donc souhaitable.

Dans l'intervalle nécessaire à la mise en place de ces réglementations, comment éviter le retour au business as usual ? Je pense notamment à la limitation des bonus, car il semblerait que les banques soient déjà en train de contourner la nouvelle législation. La commission des finances, pour le cas de la France, devra s'investir dans une réponse à ce problème.

La directive MIF 2, récemment adoptée, prévoit un encadrement mais non une interdiction du trading à haute fréquence. Pourquoi n'a-t-on pas pu ou voulu interdire cette pratique, pourtant largement décriée ?

Le mécanisme de résolution unique, adopté par le précédent Parlement, constitue une architecture très progressive : pourra-t-il mettre fin au lien entre risque bancaire et risque souverain ? L'urgence n'est-elle pas plutôt de préparer des solutions pour les banques européennes, dont la revue par la BCE révèlera sans doute à l'automne que nombre d'entre elles sont sous-capitalisées ? On verra alors resurgir la question lancinante d'une recapitalisation par le mécanisme européen de stabilité (MES) : peut-elle être envisagée ?

J'en terminerai avec une question qui intéresse les Français : la taxe sur les transactions financières. Son introduction à l'échelle européenne ou du moins de la zone euro, est soutenue par la France depuis près de deux ans, sans avancée concrète. Où en est-on ? Où sont les blocages ? Quel en sera l'assiette : seules les actions seront-elles concernées, comme dans le dispositif français, ou taxera-t-on également les obligations et, surtout, les produits dérivés ? A-t-on quelques perspectives d'aboutissement ?

M. Philippe Marini , président . - Je donne la parole à Richard Yung, en sa double qualité de membre de la commission des finances, devant laquelle il a rapporté la loi sur la réforme bancaire, et de membre de la commission des affaires européennes, auteur de nombreuses propositions de résolution.

M. Richard Yung . - Les propositions de résolutions, on les met sur la rivière et elles flottent vers leur destin, parfois incertain...

Vous avez raison de dire, monsieur le Commissaire, que nous devrions rencontrer plus souvent vos collègues : nous n'en faisons sans doute pas assez, notamment à l'égard de la BCE.

Vous présentez un bilan impressionnant de textes et de régulations, qui me donnerait presque l'impression que ce n'est pas un libéral qui parle, mais quelqu'un de mon bord, et je m'en réjouis.

Vous avez évoqué la cohérence de l'action européenne avec celle des Américains. Quelle perception avez-vous de l'évolution de la législation très complexe de ce pays ? Se rapproche-t-elle de la nôtre ?

Quant au MES et au filet de sécurité européen, nous nous trouvons dans une période transitoire qui durera un ou deux ans. Que se passerait-il en cas de défaillance d'une banque dans cette période ? Il semble y avoir un blocage côté allemand ; voyez-vous des progrès dans ce domaine ?

Êtes-vous heureux de l'architecture construite pour la résolution ? Nous avions été plusieurs à souhaiter pour la Commission un rôle plus fort que celui qui lui a été attribué.

Quant à la séparation des activités bancaires, vous avez présenté des directives et des règlements que nous avons étudiés avec intérêt. La législation allemande diffère de la nôtre, puisqu'elle repose plutôt sur la notion de risque que sur celle de bilan. Nous avons été choqués par le baiser que vous avez donné aux Britanniques... Un baiser financier, bien sûr, pas le baiser de la mort.

M. Philippe Marini , président . - Nous voilà rassurés.

M. Richard Yung . - Vous sembliez leur dire : « Ce que vous avez fait est tellement bien que ma législation ne s'appliquera pas chez vous ». Cette exception nous a inspiré un peu d'amertume...

Mme Nicole Bricq . - La question du rapporteur général sur la taxe sur les transactions financières met le doigt sur un problème auquel nous faisons face depuis la crise financière : la relation entre la Commission, le Conseil et les États. Quelle est donc votre vision de la réforme de la Commission ? Ce débat a malheureusement été absent de la campagne européenne. Lorsque la Commission a présenté son avant-projet il y a quelques années nous nous étions rendus à Bruxelles et avions rencontré le commissaire à la fiscalité. La Commission avait beaucoup consulté, notamment les entreprises, et adapté son avant-projet. Or, très tôt, la France - sous l'ancien gouvernement, mais le nouveau est sur la même ligne - a fait son propre système, si bien que nous avons maintenant un blocage qui vient de ce qu'elle n'arrive pas à convaincre l'Italie et l'Allemagne. Le projet de directive, que je trouvais assez bon, est donc bloqué, et la Commission ne parvient pas à reprendre la main sur les États à cause de ce problème politique. Cela pose la question du rapport de la Commission avec les États, alors que le Parlement monte en puissance. Où se font les arbitrages ? Il faudrait s'inspirer de l'exemple de la BCE, que Mario Draghi est parvenu à rendre plus transparente. Comment pensez-vous que puissent évoluer ces rapports, qui engagent notre avenir collectif ?

Une question plus pratique et d'actualité sur laquelle j'aimerais votre avis à son sujet : il s'agit de l'affaire BNP-Paribas aux États-Unis. Je connais bien les dégâts que peut faire le principe d'extra-territorialité. C'est une arme puissante dont les Américains disposent et qui crée en leur faveur un rapport de force déséquilibré avec l'Europe. Notre seule grande banque internationale, qui finance des entreprises, risque de perdre sa licence aux États-Unis. De quelle arme pourrions-nous nous doter pour leur répondre ?

M. Philippe Marini , président . - Je remercie Nicole Bricq de nous faire bénéficier de son expérience et d'avoir repris la question que je posais sur les rapports entre les autorités américaines et certaines banques, dont BNP-Paribas. L'extra-territorialité de la puissance qui détient la devise la plus puissante du monde, au seul motif que des transactions sont théoriquement compensables sur le territoire américain, va assez loin. Certains mauvais esprits pourraient y voir une méthode comparable à celles de la big stick policy de Theodore Roosevelt à l'égard de la zone caraïbe avant 1914.

M. Aymeri de Montesquiou . - J'aimerais, en complément des interrogations de Nicole Bricq, demander à Michel Barnier si l'on peut envisager une solidarité européenne sur ce dossier. La guerre d'Irak a coûté 14 000 milliards de dollars et a provoqué un déséquilibre international extrêmement important ; les subprimes ont détruit le système financier international et Goldman Sachs a entériné les comptes falsifiés de la Grèce, ce qui a failli faire exploser l'euro. Tout cela passe-t-il en pertes et profits ? La politique du big stick peut-elle continuer ? Cette idée me semble insupportable. La responsabilité américaine dans les déséquilibres financiers internationaux est grande et nous plaiderions coupables ? Peut-on envisager une réaction collective européenne ?

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx . - Trois agences de notation occidentales toutes-puissantes se partagent le marché. La Chine et la Russie viennent de s'associer afin de créer une agence concurrente et de mettre en place un système de notation dual apportant une alternative aux trois grandes agences anglo-saxonnes. Vous avez rappelé qu'il y avait eu trois textes européens sur le sujet, en 2008, 2010 et 2011, mais ils n'ont pas permis de promouvoir une approche européenne, territoriale, des agences de notation. La création d'une agence de notation est certes un processus très long, mais les réactions de ces dernières semaines, y compris le « carton jaune » infligé par Moody's à la France pour sa réforme territoriale, m'incitent à me demander si nous n'aurions pas dû nous défendre davantage, en adoptant une législation beaucoup plus percutante.

M. Francis Delattre . - Les dispositifs de financement de l'économie varient d'un pays à l'autre. En France, plus de 80 % des investissements des entreprises se font par crédit bancaire. J'aimerais vous interroger sur Bâle III et sur la possibilité de renforcer les possibilités de prêts aux entreprises dans ce contexte, et sachant que les États-Unis semblent s'être déjà largement exclus de ces accords, qu'ils avaient pourtant négociés. Dès lors que l'on impose aux banques européennes des contraintes plus fortes, ne les met-on pas en difficulté dans la concurrence mondiale ?

À Wall Street, tout est reparti comme avant la crise. Les économistes se demandent simplement où et comment va apparaître la nouvelle bulle financière. Notre nouvelle régulation bancaire ne nous condamne-t-elle pas à payer alors l'essentiel de la casse ?

En matière bancaire et fiscale, les États-Unis légifèrent peu, ils cognent. Ils ont infligé à UBS une amende record et retiré son agrément. Résultat, la Suisse a abandonné ses pratiques opaques. Je ne connais pas le dossier BNP -peut-être y a-t-il eu abus - mais je sais que la régulation ne peut être que mondiale.

Au Sénat, nous avons particulièrement mal vécu l'affaire Dexia. Avec la nouvelle régulation, peut-on penser qu'aucune banque ne pourra plus se trouver dans une situation aussi périlleuse ?

M. André Gattolin . - Votre objectif est de restaurer la confiance, de créer les conditions du retour de la croissance, dites-vous. Je souhaiterais vous interroger sur l'architecture et l'organisation de la Commission européenne. La direction de la concurrence est très rigoureuse ; le financement des entreprises très difficile, notamment en France. Il n'y a pas de politique industrielle européenne. Les inégalités fiscales ou d'investissement au niveau mondial sont inquiétantes. Or la posture de l'Union européenne demeure idéologique. Autant les crédits d'impôt recherche sont facilités, autant les crédits d'impôt sectoriels, nécessaires pour développer les industries stratégiques à risques, notamment dans les nouvelles technologies, sont bannis, alors que l'Amérique du Nord et l'Asie utilisent les règles plus souples de l'OMC et font de la ré-industrialisation. Nos conditions de concurrence sont irréelles au regard de ce que pratiquent les autres continents. Comment rendre la politique économique européenne plus cohérente ?

M. Jean Bizet . - En donnant l'avis de la Commission européenne, le 2 juin dernier, sur l'état de nos finances, José Manuel Barroso a employé des termes mesurés mais clairs, soulignant les difficultés de la France à engager des réformes structurelles et à réduire les dépenses publiques. Nous sommes en situation de surveillance renforcée. Dans l'hypothèse où la croissance ne repartirait pas, comment la position de la Commission pourrait-elle évoluer, sans risquer d'inquiéter les marchés ?

Que pensez-vous de la décision de la BCE, dont Mario Draghi est un formidable président ? La baisse des taux directeurs sera-t-elle de nature à relancer la croissance ? Ne vient-elle pas un peu tard ?

Je me réjouis de l'accord du 9 décembre sur les travailleurs détachés, qui a permis l'adoption définitive de la directive d'exécution le 7 mai dernier, mais en tant que partisan d'un libéralisme encadré, je regrette la timidité de la Commission dans le contentieux autour de Ryanair et Air France : on peut craindre la disparition, à terme, du pavillon français. La création d'emplois ne dispense pas de respecter un certain nombre de règles.

Mme Fabienne Keller . - Je salue le travail considérable réalisé par Michel Barnier, en synergie avec ses collègues. Le règlement Emir amorce l'obligation de déclaration des produits dérivés, avec l'idée d'une convergence dans un système de compensation permettant de suivre les flux financiers. Quelles sont les perspectives ? Si c'est business as usual , avec un foisonnement de produits non maîtrisés, on risque une nouvelle crise.

M. Éric Bocquet . - Dans une interview au journal Les Echos , Paul Krugman, prix Nobel d'économie 2008, estime que la France souffre d'hypocondrie et que sa situation est loin d'être comparable à celle de l'Italie, par exemple. Il en veut pour preuve les taux d'emprunt historiquement bas dont la France bénéficie. Partagez-vous cette analyse ?

M. Philippe Marini , président . - Vous voyez quel intérêt soulève votre audition, monsieur le Commissaire !

M. Michel Barnier . - Monsieur le rapporteur général, le temps de la démocratie est forcément plus long que le temps des marchés. Le processus collégial n'est pas une formalité mais une garantie : l'alchimie entre services, cabinets, commissaires sert à construire l'intérêt général. Une fois que nous avons abouti à une proposition, vient le temps du processus démocratique, devant le Parlement et le Conseil en formation législative. Entre le moment où un texte est présenté et son adoption, il faut compter entre un et trois ans.

J'ai présenté le texte sur la réforme structurelle du secteur bancaire après que bien d'autres mesures ont été adoptées. Nous avons fait quarante-et-une lois, qui suffisaient pour la quasi-totalité des banques, mais pas pour les trente plus grandes. Il était plus sérieux de faire cette réforme après le reste. Je souhaite que le gouvernement et le Parlement français prennent leurs responsabilités sur un texte que je crois raisonnable et complémentaire des législations nationales existantes. « Un baiser aux Britanniques » ? Ce n'est pas comme ça que je travaille. J'ai proposé un texte qui va plus loin que la loi française et allemande en interdisant le proprietary trading , la spéculation pour compte propre, qui n'a aucun lien avec l'économie réelle. Je vais moins loin que le rapport Liikanen sur la filialisation : c'est un texte raisonnable pour traiter les vingt-neuf banques qui sont too big to fail , too complex to resolve , trop chères pour être financées par les fonds publics. Le rapport Vickers va théoriquement plus loin. La Commission contrôlera s'il y a bien équivalence entre les législations européenne et nationales ; si tel est le cas, il n'y aura pas lieu d'imposer la loi européenne.

Nous sommes le premier continent à avoir encadré les bonus, grâce au Parlement européen, que j'ai soutenu. La loi s'applique, cela n'a pas fait plaisir aux banques. L'ABE sera très vigilante sur les risques de contournement. Nous ne sommes pas une économie administrée, il n'est pas question d'encadrer les rémunérations mais les bonus porteurs de risques, risques qui sont payés in fine par le contribuable.

Nous n'avons pas interdit le trading haute fréquence, méthode utile pour la liquidité mais qui comporte des risques. Nous l'avons encadrée. Laissons ces mesures être mises en oeuvre, nous verrons s'il y a lieu d'aller plus loin. J'ai essayé de peser le pour et le contre. Le texte comporte en outre des dispositions intéressantes contre la spéculation excessive sur les matières premières, notamment agricoles, que je considère scandaleuse.

Sur la résolution, le dispositif est assez éloigné de ce que je proposais initialement, mais c'est le fruit d'un compromis. Le Conseil et le Parlement européen travaillent chacun de leur côté, puis il faut se mettre d'accord. Le dernier trilogue sur la résolution bancaire a duré dix-sept heures, sans interruption. Ce texte est sérieux, crédible, et a été reçu comme tel par les acteurs financiers. Même s'il y a une progressivité dans la mutualisation, le mouvement sera prouvé en marchant. L'important est d'avoir enfin un système de résolution, un mécanisme de décision rapide. Avec la directive Résolution, les actionnaires paieront plus que les contribuables. Les stress tests en cours démontreront sans doute certaines faiblesses des banques, qu'il faudra traiter par des mesures de restructuration bancaire, de capitalisation et d'appel au marché, mais nous ne sommes pas là dans le cadre d'une faillite bancaire.

J'ai soutenu depuis le premier jour la taxe sur les transactions financières, qui avait été demandée par Nicolas Sarkozy et Angela Merkel. Mon collègue Algirdas Semeta, qui ne manque pas de courage, a présenté un texte ambitieux, avec une taxe à taux faible et base large, y compris sur les produits dérivés. Faute d'unanimité, il a été restreint. Onze pays ont décidé de s'engager, c'est un progrès. Une telle taxe me paraît économiquement supportable, techniquement assez facile et moralement juste. Je préfèrerais qu'elle soit mondiale, pour que les marchés financiers contribuent à relever les défis mondiaux.

M. Philippe Marini , président . - Tant qu'elle ne s'applique pas à Londres...

M. Michel Barnier . - Les Britanniques ont la Stamp Duty Reserve Tax.

M. Philippe Marini , président . - Cela ne va pas très loin.

M. Michel Barnier . - La Commission propose, les gouvernements et le Parlement disposent. Bruxelles ne décide pas de tout. Ministre à quatre reprises, j'ai rarement connu des processus de consultation équivalents à celui de la Commission. Et nous tenons compte de toutes les réponses que nous recevons !

Il est très important que vous invitiez les commissaires et les responsables de la BCE, mais il y aurait aussi intérêt à confronter vos points de vue avec les députés européens.

M. Philippe Marini , président de la commission des finances . - La commission des finances du Sénat attache une importance particulière à la conférence interparlementaire prévue à l'article 13 du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance. Mais il est difficile de trouver une vision commune avec les Allemands, qui nous opposent immédiatement des arguments constitutionnels. Il est indispensable que les parlementaires nationaux échangent davantage avec le Parlement européen.

M. Simon Sutour , président de la commission des affaires européennes . - Nous rencontrons les parlementaires européens à l'occasion des Cosac et nous tenons une réunion trimestrielle avec les membres de la commission des affaires européennes de l'Assemblée nationale et les eurodéputés français. Ces derniers sont malheureusement peu assidus. Les instances existent, mais les députés européens considèrent que les affaires européennes leur appartiennent, quoi qu'en dise la Constitution !

M. Michel Barnier . - Continuez ! Peut-être en organisant des réunions spécifiques, par exemple sur les questions financières. Certains eurodéputés français sont très compétents sur ces sujets.

S'agissant du maintien de l'égalité des conditions de concurrence, notre législation est somme toute très proche de celle des États-Unis, qui sont nos principaux partenaires : nous avons avancé parallèlement avec eux. Je souhaite que l'accord transatlantique comporte notamment des mesures sur l'interopérabilité de nos systèmes de régulation. J'y travaille et nous avons beaucoup avancé.

L'affaire BNP-Paribas est instruite par la justice américaine.

Mme Nicole Bricq . - Je ne parlais pas du fond, mais du principe de réciprocité.

M. Michel Barnier . - Compte tenu de l'importance de cette banque, elle doit être traitée de manière équitable et objective. Les chiffres avancés justifient l'attention du gouvernement et des autorités européennes. Je suis très soucieux de la réciprocité et j'ai d'ailleurs présenté un projet sur la réciprocité dans les marchés publics.

Mme Nicole Bricq . - Le Parlement européen l'a voté.

M. Michel Barnier . - J'attends que le Conseil des ministres en fasse autant.

M. Philippe Marini , président . - L'Europe n'est pas une plus grande France.

M. Michel Barnier . - Grâce au trilogue, monsieur Yung, nous sommes parvenus à un dispositif opérationnel sur la résolution.

L'organisation de la Commission est un problème d'actualité. Avec le retour de la stabilité est venu le temps de l'initiative politique. Je vous recommande mon livre, dont le titre reprend une phrase de Périclès, citée par Thucydide dans La Guerre du Péloponnèse : « Se reposer ou être libre, il faut choisir ». J'y traite du sujet, prioritaire à mes yeux, de l'industrie. Je propose moins de réglementation et plus de politique, qu'il s'agisse d'industrie, de numérique, de défense, d'énergie. Sans stratégie, la direction de la concurrence est toute puissante, m'a toujours dit mon directeur de cabinet, qui a longtemps été chargé de la lutte anticartel. Pourquoi ne ferions-nous pas pour l'industrie ce que nous avons fait pour l'agriculture ? Un groupe d'experts européens, présidé par Jean Therme, a identifié les technologies clés, les key enabling technologies , qui sont en voie de disparition en Europe. Protection n'est pas protectionnisme : avec les règles actuelles de concurrence, plus on s'éloigne de la recherche fondamentale pour se rapprocher de la mise en marché, moins on peut aider. Résultat, les États-Unis, la Chine achètent la recherche que nous avons financée et industrialisent chez eux !

M. André Gattolin . - Absolument.

M. Michel Barnier . - Il faut faire évoluer les règles en matière d'aides d'État : c'est possible sans changer les traités.

La question des agences de notation m'a beaucoup occupé ; par leurs excès et leurs défauts, elles ont dans certains cas accentué la crise. Certains produits toxiques étaient bien notés, certaines banques sur le point de faire faillite aussi. Les textes que j'ai présentés ont mis fin à l'absence de transparence, aux conflits d'intérêts, à l'absence de supervision. Vingt-quatre agences sont désormais enregistrées et supervisées par l'AEMF. Vous avez évoqué l'initiative russo-chinoise. Nous n'avons pas les 300 millions d'euros nécessaires à la création d'une agence européenne, mais les petites agences pourraient se regrouper... Avec ces textes, il ne s'agit pas de casser le thermomètre mais de s'assurer qu'il fonctionne correctement.

Les banques financent 75 % de l'économie européenne, contre 25 % aux États-Unis. Cela explique le soin que j'ai apporté aux textes instituant les règles de Bâle III. Les premières estimations sur les règles de liquidité publiées par le comité de Bâle en 2011 auraient eu des conséquences dramatiques sur le financement de l'économie ; le comité les a revues. J'ai souhaité réduire les exigences prudentielles lorsque les banques financent les entreprises, notamment les PME, car l'effet de levier est très important ; Nicolas Dufourcq vous le dira.

Sommes-nous à l'abri d'une nouvelle crise ? Non, mais nous sommes mieux outillés, nous pouvons mieux anticiper, mieux réagir, limiter l'impact des crises pour le contribuable, faire payer les responsables : la directive Abus de marché criminalise certaines manipulations. Le plus important demeure la supervision, qui permet de réagir vite et d'interdire certaines pratiques.

J'ai participé activement aux délibérations du collège des commissaires européens sur les recommandations faites à la France : les commissaires sont coresponsables, je l'ai dit. La France a bien fait de ne pas demander un délai supplémentaire. Le gouvernement français peut atteindre 3 % en 2015 ; c'est dans l'intérêt national. Il est aberrant de consacrer 46 milliards d'euros au seul service de la dette ! La clé pour réussir, au-delà de la réduction des dépenses, réside dans la croissance. Nous pensons que les estimations de croissance du gouvernement sont crédibles.

Pour avoir été sénateur, député, président de conseil général, je sais que ce pays a une réserve d'innovation, d'initiative, d'énergie qu'il faut libérer. C'est ainsi que nous trouverons les quelques points de croissance nécessaires pour réduire le déficit. Le plan présenté par Manuel Valls va dans la bonne direction. Il faut aller plus loin et plus vite, accompagner la politique budgétaire d'une politique économique, de flexibilisation du marché du travail, de financement des retraites, de formation professionnelle, qui est la seule possible.

Je connais mal le dossier Ryanair évoqué par Jean Bizet ; je tâcherai de vous faire une réponse écrite.

J'ai soutenu Michel Sapin sur les travailleurs détachés. La directive est utile si elle est appliquée, elle ne doit pas être détournée. À titre personnel, j'ai proposé que l'on dresse une liste noire des entreprises qui fraudent et que l'on coordonne dans un corps européen les inspections du travail.

M. Philippe Marini , président . - Envoyons nos inspecteurs du travail dans d'autres pays !

M. Michel Barnier . - Madame Keller, le marché des dérivés était le plus important, mais le moins transparent. Nous y avons mis de la lumière par les obligations d'enregistrement, de standardisation, de compensation. La résolution des chambres de compensation est un sujet pour l'avenir. Avec l'entrée en vigueur du règlement EMIR, la part de produits enregistrés va passer de 15 % à 70 %.

M. Philippe Marini , président . - Vous nous avez répondu de manière approfondie, motivée et souvent passionnée ; merci de cette belle prestation.

II. EXAMEN EN COMMISSION (9 OCTOBRE 2014)

Réunie le vendredi 10 octobre 2014, sous la présidence de Mme Michèle André, présidente, la commission a procédé à l'examen du rapport et à l'élaboration du texte de la commission sur le projet de loi n° 808 (2013-2014) portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière.

M. Richard Yung , rapporteur . - Le premier texte soumis à notre nouvelle commission est le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière ou « DDADUE ». La rédaction en est absconse, le texte étant composé essentiellement de références à d'autres textes. Il vise à transposer en droit national plusieurs textes européens, règlements et directives, récemment adoptés. Après la crise financière de 2008, le G20 de 2009 a élaboré une feuille de route pour la réforme des activités bancaires et financières. A suivi une période d'inaction, qui a suscité des critiques. La Commission européenne - et singulièrement Michel Barnier - a ensuite pris ce chantier à bras le corps. Ainsi, entre 2009 et 2014, c'est-à-dire sur la période du mandat de la Commission européenne qui s'achève, une quarantaine de textes ont été pris dans le domaine des services financiers, concernant tous les compartiments de la régulation, toutes les structures et tous les produits : les agences de notation, les hedge funds , le régime prudentiel des banques et des assurances, les produits dérivés, etc.

Certains sujets ont été consensuels, d'autres beaucoup moins. Malgré les récriminations des Anglais, une régulation se construit en matière bancaire et financière. Les négociations ont parfois été rudes, mais le Parlement européen a adopté la quasi-totalité des textes.

Les directives doivent être transposées en droit national avant une date butoir. Les règlements sont d'application directe mais il est parfois nécessaire d'ajuster notre droit. L'Union européenne, du reste, devient de plus en plus... directive et laisse de moins en moins de marge d'interprétation au législateur national.

Le DDADUE adapte notre droit à plusieurs textes européens en matière économique et financière. Un premier bloc a trait à l'union bancaire. Après un débat long, mais fructueux, nous avons adopté à l'unanimité la loi bancaire l'an dernier. Lancé en juin 2012 par le sommet de la zone euro, le projet d'union bancaire tend à unifier la régulation du système bancaire de la zone euro afin de briser le lien entre banques et dettes souveraines. Il consiste en trois piliers : un mécanisme de surveillance unique, un mécanisme de résolution unique et un système unique de garantie des dépôts.

Le mécanisme de surveillance unique, MSU, adopté en 2013, entrera en vigueur le 4 novembre. Une structure spéciale a été constituée auprès de la Banque centrale européenne et elle est dirigée par Danièle Nouy, qui dirigeait l'Autorité de contrôle prudentiel et de régulation (ACPR). Désormais, les 120 plus grandes banques de la zone euro, dont les dix banques françaises les plus importantes, seront directement supervisées par la BCE. Aujourd'hui déjà, dans chaque grande banque française, une équipe de contrôleurs venus de la BCE est à l'oeuvre, passant en revue les risques, les actifs, le passif, les procédures de surveillance et de gestion de crise. Les équipes sont dirigées par des étrangers et c'est très bien.

Le deuxième pilier concerne la procédure unique de gestion et de financement commun des crises bancaires. Il s'agit de mettre en oeuvre dans la zone euro un système de résolution qui reprenne, tout en les adaptant, les mécanismes contenus dans la directive de 2013 qui harmonisait les procédures de résolution nationales. C'est ainsi qu'en France nous avons créé l'ACPR, défini une hiérarchie d'appel des fonds en cas de crise et créé un fonds de résolution, au sein du fonds de garantie des dépôts qui pré-existait.

Au niveau européen, le mécanisme de résolution unique (MRU) repose sur un règlement, qui précise l'architecture générale du système, placé sous l'égide d'un comité à Francfort, dont les décisions seront préparées en lien avec le comité dirigé par Danièle Nouy. L'ensemble paraît compliqué, mais consiste essentiellement en règles de bon sens. Surtout, les procédures de consultation et d'objection doivent se dérouler en 32 heures maximum, pour en assurer l'efficacité.

Le MRU repose également sur un accord intergouvernemental (AIG), à la demande des Allemands qui ne souhaitaient pas une décision communautaire. Sont précisées les modalités de financement du fonds de résolution unique et les clés de répartition entre les banques. L'article 2 bis du projet de loi DDADUE, introduit par l'Assemblée nationale, vise à adapter notre droit au règlement MRU. Pour qu'il soit effectif nous devrons aussi adopter un projet de loi de ratification de l'AIG.

Comme dans la loi bancaire française, il s'agit de déterminer à l'avance qui fait face si une banque se trouve en défaut partiel. Le texte fixe une hiérarchie dans l'ordre d'appel des fonds : d'abord les actionnaires, puis les créanciers qui ont une dette subordonnée, puis les créanciers seniors, puis, si cela ne suffit pas, le fonds de résolution, et, en dernier recours, le contribuable. Il fallait en finir avec une mécanique diabolique dans laquelle les banques réalisent des opérations discutables puis appellent à la rescousse leur gouvernement, mis devant le fait accompli.

Les outils de résolution et la hiérarchie d'appel des fonds sont les mêmes que ceux prévus par la loi bancaire en France. Le seul changement est la prise en compte des créanciers seniors, dont la dette est contractuelle, ce qui est juridiquement moins sûr.

La question centrale est celle du financement, en partie laissée ouverte par le règlement qui fixe seulement les règles du renflouement interne. L'utilisation en dernier ressort du fonds de résolution unique, alimenté par les banques et doté à terme de 55 milliards d'euros, est réglée par l'AIG. Les États s'engagent à verser les contributions nationales des banques au fonds de résolution unique européen. Celles-ci sont d'abord affectées à des compartiments nationaux, puis progressivement mutualisées pendant une période transitoire de 8 ans.

L'enjeu concerne la répartition des contributions nationales. La Commission européenne, par un acte délégué pris sur la base de la directive BRRD, fixera la clé de calcul. La négociation, à Bruxelles, semble mal engagée pour la France, dont le secteur bancaire serait le premier contributeur, à hauteur de 30 %, loin devant l'Allemagne, 20 à 25 %. Les Allemands ont fait pression pour exclure leurs « petites » banques, qui ne sont pourtant pas si petites. Cela n'est pas acceptable. Il faut soutenir nos négociateurs. Inspirons-nous des Allemands qui refusent de transmettre au Bundestag les textes européens tant qu'ils ne sont pas conformes à leur position. Je vous proposerai un amendement en ce sens.

Enfin, le dernier pilier de l'union bancaire est l'unification des systèmes nationaux de garantie des dépôts. Une garantie existe déjà en France à hauteur de 100 000 euros par déposant. Le système est élargi au niveau communautaire, la principale avancée concernant le délai de remboursement aux déposants, ramené de vingt à sept jours. Le fonds français, de 2,7 milliards d'euros, sera doté à terme d'au moins 5,5 milliards.

La directive Solvency II, ou Solvabilité II, réforme le cadre prudentiel applicable aux sociétés d'assurance, en revoyant le mode de calcul de leurs risques et de leurs fonds propres. Le Trésor s'assurera de sa bonne transposition en lien avec les professionnels ; un accord a été trouvé avec les assureurs afin que la norme de capital soit relevée mais adaptée à leurs engagements de long terme, qui participent au financement de l'économie.

Le paquet MIF II relatif aux marchés d'instruments financiers, comprenant une directive et un règlement, adapte la législation pour tenir compte des nouveaux acteurs et des plateformes de négociation d'actions, d'obligation de produits dérivés qui opèrent à côté des bourses traditionnelles.

Un autre texte est relatif aux abus de marché. Je vous proposerai de le retirer du DDADUE pour en reporter l'examen à plus tard.

Enfin l'article 8 du projet de loi transpose le chapitre 10 de la directive comptable. Il s'agit d'un dispositif spécifique qui vise à lutter contre la corruption et le détournement de fonds, en organisant la transparence des entreprises forestières ou extractives, notamment d'hydrocarbures ou de mines, sur les paiements qu'elles effectuent auprès des autorités nationales des pays où elles opèrent. Cette règle, qui a suscité de nombreux débats à l'Assemblée nationale, a été adoptée par le G20 et transcrite en droit interne par les Américains.

Ce projet de loi contient essentiellement des habilitations à légiférer par ordonnance. Le Parlement est toujours sourcilleux face à cette procédure qui le dessaisit de sa compétence de législateur. J'étais a priori réticent devant le nombre d'habilitations demandées. C'est pourquoi je me suis attaché à examiner l'opportunité de chacune et les justifications avancées. Je vous proposerai de réduire voire de supprimer certaines habilitations, ou bien d'en restreindre le délai, malgré les réticences du Gouvernement.

J'estime néanmoins que les demandes sont pour l'essentiel justifiées par la technicité de la matière et le calendrier. La transposition de Solvabilité II doit intervenir avant le 1 er janvier 2016 et plusieurs dizaines de réunions doivent être menées entre le Trésor et les professionnels. De même, pour de nombreux textes, le Gouvernement attend des actes d'exécution, nécessaires pour engager le travail de transposition. Or la négociation de ces actes peut prendre un certain temps alors même que le délai de transposition a commencé à courir. Dans d'autres cas, la transposition consiste en un simple copier-coller des textes européens ou en quelques ajustements à la marge.

La matière bancaire et financière est désormais communautarisée. Nos méthodes de travail doivent évoluer. Il importe de nous tenir au courant des négociations conduites à Bruxelles et de nous inspirer du modèle allemand, c'est-à-dire de montrer que le Parlement a son mot à dire. Ce faisant, nous aiderons nos négociateurs à faire prévaloir nos intérêts.

M. Francis Delattre . - Ce texte comporte des avancées mais soulève des questions. Il touche 120 banques ou établissements financiers à caractère systémique. Les Anglais, eux, sont très peu concernés, puisqu'ils ont essentiellement des hedge funds . Quant aux Allemands, ils comptent une seule banque comparable aux banques françaises, les autres étant régionales - mais pas toujours en bonne forme ! Ainsi la France sera le principal contributeur, alors que le risque systémique est entretenu par les hedge funds : c'est par ce véhicule que transitent les produits structurés. Le MRU ne nous protège pas.

Il s'accompagne d'une nouvelle taxe européenne. Or la France a déjà instauré une taxe de risque systémique. La nouvelle taxe s'y ajoutera-t-elle, ce qui serait une double peine pour les banques françaises ? Perçue par la France, sera-t-elle reversée à l'Union européenne ? Accroître la sécurité est un projet louable, reste à savoir comment la charge en est répartie. Du reste, est-il judicieux que le Parlement se dessaisisse par voie d'ordonnances ?

S'agissant de la transparence financière des entreprises, nous soutenons l'allégement des procédures administratives et l'assouplissement les délais pour la publication des résultats. Le recours aux ordonnances est ici justifié.

La transparence dans le financement des entreprises : je m'en réjouis. La protection du consommateur de crédit immobilier, nous y sommes attachés, car il y a beaucoup d'abus et les procédures judiciaires sont très longues.

Le texte qui organise la médiation est le bienvenu. Mais il faut l'améliorer et écouter les associations de consommateurs, qui ont été à la source de la principale avancée de la réforme de 2013. En effet la séparation entre les activités de banque de dépôt et celles de banque d'affaires a été très peu mise en oeuvre ; en revanche le volet protection des consommateurs a été un vrai progrès. Enfin, nous sommes prêts à travailler avec vous pour améliorer le mécanisme de l'union bancaire qui soulève encore des problèmes de fond.

M. Éric Bocquet . - L'exposé du rapporteur a montré que ce texte n'était pas aussi anodin qu'il le paraissait de prime abord. Il faut toujours être vigilant !

Je voudrais signaler que Wallis-et-Futuna ne compte qu'une seule banque sur son territoire, une filiale de la BNP. Le risque systémique est partout. Une partie des ressources de cette collectivité provient d'une taxe annuelle forfaitaire levée sur les sociétés extraterritoriales, c'est-à-dire off-shore... Le texte renforce la transparence financière et va donc dans le bon sens.

M. Gérard Longuet . - L'article 8 reprend au sein de la directive une proposition du G20 ?

M. Richard Yung . - En effet.

M. Gérard Longuet . - Pourquoi les sociétés qui exploitent des ressources hydrauliques ne sont-elles pas énumérées au paragraphe 11, dans la liste des sociétés qui exploitent des matières premières grâce à un soutien appuyé des autorités locales et sont susceptible de porter préjudice à la population ?

M. Michel Bouvard . - Les banques françaises devront financer 30 % des 55 milliards du nouveau fonds de résolution. Le système bancaire allemand est organisé différemment et beaucoup de grands groupes comprennent une banque intégrée. En France, le financement des entreprises est réalisé par les grandes banques. Il ne faudrait pas que celles-ci supportent à la fois les prescriptions de Bâle II et Bâle III, continuent à verser la taxe destinée à alimenter le fonds français, tout en abondant à hauteur de 30 % le fonds de résolution européen. Cela finirait par peser sur le financement de notre économie. Dispose-t-on de simulations ? Quelles seront les conséquences de cette contribution pour nos banques ? Devront-elles céder des filiales dans des conditions défavorables ? Le financement de l'économie sera-t-il amputé ? Le Gouvernement est-il décidé à faire modifier l'assiette du prélèvement ? Enfin, l'évolution de Solvabilité II constitue une bonne nouvelle ; les assurances pourront participer à l'investissement dans l'économie.

M. Richard Yung , rapporteur . - Les systèmes bancaires allemand et français sont différents. La régulation du shadow banking progresse lentement car ce secteur est difficile à cerner. Le nouveau commissaire britannique, M. Johnatan Hill, a pris l'engagement de mieux réglementer les hedge funds.

La taxe de risque systémique française resterait inchangée, alimentant le budget français. Quant au fonds de résolution européen, il ne sera pas financé par une taxe à proprement parler mais par un versement - ce qui revient au même d'un point de vue économique, j'en conviens. Attendons que le montant soit fixé. Nous débattrons à ce moment-là avec le Gouvernement de l'avenir de la taxe française - qui pour partie alimente un fonds de soutien aux collectivités locales dont les finances sont grevées par des emprunts toxiques. Le crédit immobilier est bien encadré en France. Ce texte renforce la formation des agents immobiliers aux techniques de crédit.

M. Francis Delattre . - Nous préférerions encourager la médiation.

M. Richard Yung , rapporteur . - Beaucoup de progrès ont été réalisés à cet égard en France. Nombre de grandes banques ont leur médiateur et il existe également des médiateurs par secteur. Le texte généralise le recours à la médiation. Les branches qui n'en ont pas devront s'en doter. Le Gouvernement, à l'Assemblée nationale, s'est engagé à créer un groupe de travail sur ce sujet.

Le texte fait référence tantôt la Nouvelle-Calédonie, tantôt à la Polynésie, tantôt à Wallis-et-Futuna. Or ces territoires n'ont pas le même régime juridique.

L'article 8 vise les entreprises extractives et forestières, non l'hydro-électricité, énergie renouvelable et consommée sur place à l'inverse des produits extraits qui sont ensuite exportés. Le but est ici de lutter contre les « dons » aux dirigeants du pays pour obtenir une concession.

Pour répondre à Michel Bouvard, Bâle II et Bâle III vont dans le bon sens. Il était justifié d'accroître les exigences de fonds propres des banques.

M. Michel Bouvard . - C'est le cumul qui peut poser problème.

M. Richard Yung , rapporteur . - Les banquiers ne disent pas qu'ils ne peuvent faire face. Mais 30 % de 55 milliards d'euros, cela représente 16 milliards sur huit ans, soit 2 milliards par an. C'est beaucoup ! Les Allemands s'en sortent très bien. Ils ont fait pression pour exclure les banques intégrées ainsi que les banques régionales. Puis ils ont obtenu de prendre en compte les actifs bruts et non les actifs pondérés par les risques, ce qui avantage les établissements qui abritent des loups dans les placards. Les banques françaises, avec 1 100 milliards d'euros de dépôts, sont désavantagées. Il faut résister. Le PNB allemand est supérieur de 30 % au PNB français. La contribution allemande devrait au moins être du même ordre de grandeur que la nôtre !

EXAMEN DES AMENDEMENTS

Article 1 er

L'amendement rédactionnel n° 1 est adopté, ainsi que l'amendement n° 2 tendant à corriger une erreur matérielle.

L'article 1 er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

L'amendement rédactionnel n° 3 est adopté.

L'article 2 est adopté sans modification.

Article 2 bis

M. Richard Yung , rapporteur . - L'amendement n° 4 dispose que l'ordonnance prévue précédemment « est prise, sous réserve de la promulgation de la loi autorisant la ratification de l'accord concernant le transfert et la mutualisation des contributions au Fonds de résolution unique, dans un délai de huit mois à compter de la promulgation de la présente loi ». J'espère que les députés nous suivront pour contrôler ainsi le résultat de la négociation.

M. François Marc . - Je souscris tout à fait à cette proposition. Les députés, qui ont introduit cet article, n'ont pas pensé à cette précaution nécessaire.

L'amendement n° 4 est adopté.

L'article 2 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 3

L'amendement rédactionnel n° 5 est adopté.

L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 4

L'amendement rédactionnel n° 6 est adopté.

L'article 4 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

L'article 4 bis est adopté sans modification, ainsi que l'article 5.

Article 6

M. Richard Yung , rapporteur . - L'amendement n° 7 est une coordination avec l'amendement n° 14, lequel supprime l'article 23 ter habilitant le Gouvernement à transposer par ordonnance la directive et le règlement relatifs aux abus de marché. Le Gouvernement demande un délai de transposition bien long - 24 mois.

M. Francis Delattre . - Nous nous abstiendrons sur ce point.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Nous pouvons supprimer cet article en attendant d'y revenir ; nous pouvons aussi le conserver et modifier le délai.

M. Richard Yung , rapporteur . - Surtout, la commission des finances a mis en place un groupe de travail qui étudie l'ensemble des sujets relatifs aux sanctions en matière bancaire et financière.

M. Francis Delattre . - Entendu.

L'amendement n° 7 est adopté.

L'amendement de précision n° 8 est adopté.

L'article 6 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

L'article 7 est adopté sans modification, ainsi que les articles 8, 9, 10, 11, 12 et 13.

Article 14

L'amendement n° 9 tendant à rectifier une erreur matérielle est adopté.

L'article 14 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

L'article 15 est adopté sans modification.

Article 16

L'amendement de précision n° 10 est adopté.

L'article 16 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 17

L'amendement de coordination n° 11 est adopté.

L'article 17 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

L'article 18 est adopté sans modification, ainsi que les articles 19 et 20.

L'article n° 21 demeure supprimé.

Les articles n° 22 et 23 sont adoptés sans modification.

Article 23 bis

L'amendement de coordination n° 12 est adopté, ainsi que l'amendement de coordination n° 13.

L'article 23 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 23 ter

L'amendement de suppression n° 14 est adopté.

L'article 23 ter est supprimé.

Article 23 quater

L'amendement de coordination n° 15 est adopté, ainsi que l'amendement de coordination n° 16.

L'article 23 quater est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 23 quinquies

L'amendement de coordination n° 17 est adopté, ainsi que l'amendement de coordination n° 18.

L'article 23 quinquies est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 23 sexies

L'amendement de coordination n° 19 est adopté.

L'article 23 sexies est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

L'article 23 septies est adopté sans modification.

Article 24

M. Richard Yung , rapporteur . - L'amendement n° 20 réduit les délais d'habilitation : de 24 à 15 mois pour la transposition du paquet MIF II, et de 18 à 15 mois pour la transposition des directives OPCVM V et contrôle légal des comptes. Le Gouvernement n'en est pas très heureux, mais le Parlement doit montrer sa capacité de résistance...

L'amendement n° 20 est adopté.

L'article 24 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

L'article 25 est adopté sans modification.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Nous ne sommes pas contre ces mesures - certaines vont dans le bon sens - mais nous regrettons que le Gouvernement procède par voie d'ordonnances. Par conséquent, nous nous abstiendrons.

Le projet de loi est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Mme Michèle André , présidente . - Le texte sera présenté en séance, sous réserve de l'approbation de la conférence des présidents qui se réunira ce soir, jeudi 16 octobre. L'examen des amendements extérieurs aura lieu la veille au matin ; le délai limite pour leur dépôt est fixé à mardi midi.


* 1 Directive BRRD (article 1 er ), directive SGD (article 2), règlement MRU (article 2 bis ), directive Solvabilité II (article 3), directive Transparence (article 6), directive Comptable unique (articles 7 et 8), directive Crédit immobilier (article 10), directive Médiation (article 11), règlement DCT (article 23 bis ), paquet Abus de marché (article 23 ter ), paquet MIF II (article 23 quater ), directive OPCVM V (article 23 quinquies ) et paquet Contrôle légal des comptes (article 23 sexies ).

* 2 Déclaration du sommet de la zone euro du 29 juin 2012 : « Nous affirmons qu'il est impératif de briser le cercle vicieux qui existe entre les banques et les États. (...) Lorsqu'un mécanisme de surveillance unique, auquel sera associée la BCE, aura été créé pour les banques de la zone euro, le MES pourrait, à la suite d'une décision ordinaire, avoir la possibilité de recapitaliser directement les banques. ».

* 3 Règlement (UE) n° 1024/2013 du Conseil du 15 octobre 2013 confiant à la Banque centrale européenne des missions spécifiques ayant trait aux politiques en matière de surveillance prudentielle des établissements de crédit ; Règlement (UE) n° 1022/2013 du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2013 modifiant le règlement (UE) n° 1093/2010 instituant une Autorité européenne de surveillance (Autorité bancaire européenne) en ce qui concerne des missions spécifiques confiées à la Banque centrale européenne en application du règlement (UE) n° 1024/2013

* 4 BNP Paribas, BPCE, BPI France, Confédération nationale du Crédit mutuel, Caisse de refinancement de l'habitat, Crédit agricole SA, HSBC France, La Banque Postale, Société de financement local, Société générale SA.

* 5 Directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d'investissement et modifiant la directive 82/891/CEE du Conseil ainsi que les directives du Parlement européen et du Conseil 2001/24/CE, 2002/47/CE, 2004/25/CE, 2005/56/CE, 2007/36/CE, 2011/35/UE, 2012/30/UE et 2013/36/UE et les règlements du Parlement européen et du Conseil (UE) n° 1093/2010 et (UE) n° 648/2012.

* 6 Règlement (UE) n° 806/2014 du Parlement européen et du Conseil du 15 juillet 2014 établissant des règles et une procédure uniformes pour la résolution des établissements de crédit et de certaines entreprises d'investissement dans le cadre d'un mécanisme de résolution unique et d'un Fonds de résolution bancaire unique, et modifiant le règlement (UE) n ° 1093/2010.

* 7 CJUE, Arrêt Meroni c/ Haute Autorité du 13 juin 1958 (aff. 9/56 et 10/56, Rec. 1958 p. 11).

* 8 Cour des comptes : « Dexia : un sinistre coûteux, des risques persistants », rapport thématique, juillet 2013

* 9 Directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d'investissement et modifiant la directive 82/891/CEE du Conseil ainsi que les directives du Parlement européen et du Conseil 2001/24/CE, 2002/47/CE, 2004/25/CE, 2005/56/CE, 2007/36/CE, 2011/35/UE, 2012/30/UE et 2013/36/UE et les règlements du Parlement européen et du Conseil (UE) n° 1093/2010 et (UE) n° 648/2012.

* 10 Loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires.

* 11 Le bail-in complet, c'est-à-dire y compris sur la dette ordinaire, présenterait un risque juridique d'annulation par le juge, en particulier aux Etats-Unis, où la loi (européenne) n'est pas systématiquement considérée comme supérieure aux contrats.

* 12 Ordonnance n° 2013-544 du 27 juin 2013 relative aux établissements de crédit et aux sociétés de financement.

* 13 Crédit Logement est une société de financement, spécialisée dans le cautionnement pour les crédits immobiliers. Ses fonds propres s'élèvent à 8,15 milliards d'euros pour un encours total de prêts de plus de 245 milliards d'euros (source : rapport annuel 2013).

* 14 Directive 94/19/CE du Parlement européen et Conseil du 30 mai 1994 relative aux systèmes de garantie des dépôts.

* 15 Extraits du site Internet du Fonds de garantie des dépôts et de résolution (http://www.garantiedesdepots.fr/fr/fonds-de-garantie-des-depots-et-de-resolution/histoire-du-fgdr).

* 16 Loi n° 99-532 du 25 juin 1999 relative à l'épargne et à la sécurité financière.

* 17 Règlements du Comité de la réglementation bancaire et financière du 9 juillet 1999 n° 99-05 relatif à la garantie des dépôts ou autres fonds remboursables reçus par les établissements de crédit ayant leur siège social en France ainsi que dans la Principauté de Monaco ; n° 99-06 relatif aux ressources et au fonctionnement du fonds de garantie des dépôts ; n° 99-07 relatif à la garantie des dépôts ou autres fonds remboursables reçus par les succursales d'établissements de crédit.

* 18 Annexe du règlement CRBF n° 99-06 du 9 juillet 1999 relatif aux ressources et au fonctionnement du fonds de garantie des dépôts.

* 19 Par lettre en date du 25 septembre 2014, la Commission européenne a mis en demeure la Bulgarie de se conformer au droit européen.

* 20 Un client peut en effet posséder plusieurs comptes dans un même établissement. Or la garantie de 100 000 euros s'applique en faisant masse de tous ses comptes au sein du même établissement. Il faut donc avoir une vue « unique » du client par établissement.

* 21 Ordonnance n° 2013-544 du 27 juin 2013 relative aux établissements de crédit et aux sociétés de financement.

* 22 Établissements de crédit présentant un total d'actifs supérieur à 30 milliards d'euros ou représentant au moins 20 % du produit intérieur brut de leur pays , ainsi que les banques qui ont sollicité ou obtenu une assistance financière publique du Fonds européen de stabilité financière (FESF) ou du Mécanisme européen de stabilité (MES).

* 23 BNP Paribas, BPCE, BPI France, Confédération nationale du Crédit mutuel, Caisse de refinancement de l'habitat, Crédit agricole SA, HSBC France, La Banque Postale, Société de financement local, Société générale SA.

* 24 Règlement (UE) n° 806/2014 du parlement européen et du conseil du 15 juillet 2014 établissant des règles et une procédure uniformes pour la résolution des établissements de crédit et de certaines entreprises d'investissement dans le cadre d'un mécanisme de résolution unique et d'un Fonds de résolution bancaire unique, et modifiant le règlement (UE) n° 1093/2010.

* 25 Le président, le vice-président et les quatre membres qualifiés sont nommés par le Conseil, sur proposition de la Commission et après approbation du Parlement européen.

* 26 Pour les décisions d'intervention du fonds, majorité simple des membres représentant au moins 30 % des contributions ; pour les décisions d'emprunt du fonds ou de contributions ex post , majorité des deux tiers représentant 50 % (durant la période transitoire) ou 30 % (après la période transitoire) des contributions.

* 27 La ratification en sera proposée au Parlement lors de l'examen du projet de loi n° 798 déposé sur le bureau du Sénat le 10 septembre 2014.

* 28 Règlement (UE) n° 806/2014 du parlement européen et du conseil du 15 juillet 2014 établissant des règles et une procédure uniformes pour la résolution des établissements de crédit et de certaines entreprises d'investissement dans le cadre d'un mécanisme de résolution unique et d'un Fonds de résolution bancaire unique, et modifiant le règlement (UE) n° 1093/2010.

* 29 Commission européenne, «A single resolution mechanism for the banking union», Frequently Asked Questions, Memo/14/295, 15 avril 2014.

* 30 Les exigences actuelles étaient issues de quatorze directives sur l'assurance et la réassurance adoptées à partir de 1973 et connues depuis 2002 sous le nom de « Solvabilité I ». Elles avaient pour objectif principal de favoriser l'émergence d'un marché unique des services d'assurance et la protection des consommateurs.

* 31 Un élément financier est disponible lorsqu'il peut être appelé sur demande pour absorber les pertes subies par l'assureur.

* 32 Un élément financier est subordonné lorsque son remboursement peut être refusé à son détenteur jusqu'à ce que tous les autres engagements d'assurance et de réassurance vis-à-vis des assurés soient honorés.

* 33 En anglais : European Insurance and Occupational Pensions Authority (EIOPA) .

* 34 Ces exigences répondent toutefois à un principe de proportionnalité : elles s'appliquent à tous mais selon des modalités adaptées aux spécificités de chaque type d'organisme d'assurance.

* 35 Montant inscrit au passif du bilan de l'assureur provisions destiné à permettre le règlement intégral des engagements pris envers les assurés et bénéficiaires de contrats.

* 36 Si les variations de la valeur de marché d'une obligation dépendent évidemment du risque de défaut de son émetteur, elles répondent également à d'autres facteurs et leur amplitude excède largement celle des fluctuations du risque de crédit.

* 37 Règlement (UE) n° 1094/2010 du Parlement européen et du Conseil, du 24 novembre 2010, instituant une Autorité européenne de surveillance (Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles).

* 38 Rapport d'information n° 302 (2006-2007) « Maîtriser le ?droit mou communautaire» », 4 mai 2007.

* 39 Directive 2009/138/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 sur l'accès aux activités de l'assurance et de la réassurance et leur exercice.

* 40 Le marché doit être tenu informé lorsqu'un investisseur franchit (à la hausse ou à la baisse) certains seuils de détention, exprimés en pourcentage, du capital ou des droits de vote. La législation sur les « franchissements de seuils » vise à éviter les prises de contrôle dites « rampantes ».

* 41 Section 1 du chapitre 1 er « La transparence des marchés », du titre V « La protection des investisseurs », du libre IV « Les marchés ».

* 42 Cf. article 25 de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l'allégement des démarches administratives ; rapport n° 213 (2011-2012) de Mme Nicole Bricq, fait au nom de la commission des finances, sur la proposition de loi tendant à améliorer l'information du marché financier en matière de franchissements de seuils en droit boursier.

* 43 Une micro-entreprise ne doit pas dépasser au moins deux des trois critères suivant : 350 000 euros de bilan; 700 000 euros de chiffre d'affaires; 10 salariés employés au cours de l'exercice.

* 44 Communiqué de presse de la Commission européenne du 25 octobre 2011.

* 45 Conférence du 17 juin 2003 pour une initiative pour la transparence des industries extractives, Lancaster House : http://collections.europarchive.org/tna/20070701080507/http://www.dfid.gov.uk/pubs/files/eitidraftreportstatement.pdf

* 46 Section 1504 du Dodd-Frank Act.

* 47 Compte rendu de la commission des finances du 1 er juin 2011.

* 48 Commission FAQ - Creating a fair single market for mortgage credit, Memo/13/1127.

* 49 Directive 2014/17/UE du Parlement européen et du Conseil du 4 février 2014 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage résidentiel et modifiant les directives 2008/48/CE et 2013/36/UE et le règlement (UE) n° 1093/2010.

* 50 Durant une période trois ans suivant le terme de son mandat, il sera interdit au médiateur de travailler pour l'entreprise ou pour la fédération professionnelle à laquelle cette dernière appartient.

* 51 Groupe de travail relatif à la médiation et au règlement extrajudiciaire des litiges de consommation, rapport du président et recommandations, mai 2014.

* 52 Ou encore un groupe professionnel représentatif d'employeurs ou une association mentionnée à l'article L. 144-1 du code des assurances ou un groupement défini à l'article 41 modifié de la loi n° 94-126 du 11 février 1994 relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle ou au I de l'article 55 de la loi n° 97-1051 du 18 novembre 1997, d'orientation sur la pêche maritime et les cultures marines.

* 53 Directive 2013/36/UE concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et la surveillance prudentielle des établissements de crédit et des entreprises d'investissement (CRD IV) et Règlement (UE) n° 575/2013 concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d'investissement (CRR).

* 54 Règlement européen n° 648/2012 du 27 juillet 2012 sur les produits dérivés de gré à gré, les contreparties centrales et les référentiels centraux (EMIR).

* 55 Directive 2013/36/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et la surveillance prudentielle des établissements de crédit et des entreprises d'investissement, modifiant la directive 2002/87/CE et abrogeant les directives 2006/48/CE et 2006/49/CE ; et règlement (UE) n° 575/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d'investissement et modifiant le règlement (UE) n ° 648/2012.

* 56 Article 151 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie.

* 57 Décret n° 2009-268 du 9 mars 2009 relatif au contrôle externe de la Caisse des dépôts et consignations et pris en application de l'article L. 518-15-2 du code monétaire et financier ; Décret n° 2010-411 du 27 avril 2010 relatif au contrôle externe de la Caisse des dépôts et consignations et pris en application de l'article L. 518-15-2 du code monétaire et financier.

* 58 Document transmis par la CDC à votre rapporteur.

* 59 Ordonnance n° 2014-158 du 20 février 2014 portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière financière

* 60 Loi n° 2014-1 du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises.

* 61 Directive 2013/37/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 modifiant la directive 2003/98/CE du 17 novembre 2003 concernant la réutilisation des informations du secteur public.

* 62 Étude d'impact annexée au projet de loi garantissant l'avenir et la justice du système de retraites, septembre 2013.

* 63 En matière de règlement/livraison, un suspens est l'échec du dénouement de la transaction, soit que l'acheteur ne dispose pas des espèces pour régler, soit que le vendeur ne dispose pas des titres.

* 64 Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant l'amélioration du règlement des opérations sur titres dans l'Union européenne et les dépositaires centraux de titres (DCT) et modifiant la directive 98/26/CE , 11 Juillet 2012.

* 65 Règlement (UE) n° 909/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 concernant l'amélioration du règlement de titres dans l'Union européenne et les dépositaires centraux de titres, et modifiant les directives 98/26/CE et 2014/65/UE ainsi que le règlement (UE) n° 236/2012.

* 66 Cf. https://www.banque-france.fr/stabilite-financiere/infrastructures-des-marches-financiers-et-moyens-de-paiement-scripturaux/target2-securities.html

* 67 Un abus de marché est un manquement aux règles du marché telles que définies par les dispositions législatives et règlementaires, en particulier par le règlement général de l'AMF. Il existe trois catégories d'abus de marché définies par l'article L. 621-15 du code monétaire et financier : l'opération d'initié (utilisation d'une information confidentielle), manipulation de cours ou diffusion d'une fausse information.

* 68 Règlement (UE) n° 596/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 sur les abus de marché (règlement relatif aux abus de marché) et abrogeant la directive 2003/6/CE du Parlement européen et du Conseil et les directives 2003/124/CE, 2003/125/CE et 2004/72/CE de la Commission.

* 69 Directive 2014/57/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relative aux sanctions pénales applicables aux abus de marché (directive relative aux abus de marché).

* 70 Arrêt CEDH « Grande Stevens c. Italie » du 4 mars 2014.

* 71 Directive 2004/39/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004 concernant les marchés d'instruments financiers, modifiant les directives 85/611/CEE et 93/6/CEE du Conseil et la directive 2000/12/CE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 93/22/CEE du Conseil.

* 72 Commission européenne, Memo, MiFID II, Questions fréquemment posées, 15 avril 2014.

* 73 Pierre Fleuriot, Rapport au ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur la révision de la directive sur les marchés d'instruments financiers , février 2010.

* 74 Sur ce point, cf. rapport n° 422 (2012-2013), 12 mars 2013, fait au nom de la commission des finances sur le projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires, par M. Richard Yung, p. 98 et s.

* 75 Directive 2014/65/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 concernant les marchés d'instruments financiers et modifiant la directive 2002/92/CE et la directive 2011/61/UE.

* 76 Règlement (UE) n° 600/2014 du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 concernant les marchés d'instruments financiers et modifiant le règlement (UE) n° 648/2012.

* 77 Règlement (UE) n° 648/2012 du Parlement européen et du Conseil du 4 juillet 2012 sur les produits dérivés de gré à gré, les contreparties centrales et les référentiels centraux.

* 78 Commission européenne, Memo, MiFID II, Questions fréquemment posées, 15 avril 2014.

* 79 Idem.

* 80 Idem.

* 81 Cf. les commentaires de l'article 6 sur la directive Transparence ou 23 ter sur le paquet « MAD-MAR ».

* 82 Les dépositaires d'OPCVM ont deux missions principales : ils conservent les actifs détenus par les organismes de placement collectifs (OPC) et s'assurent de la régularité des décisions de l'OPCVM ou de sa société de gestion par rapport aux dispositions législatives et réglementaires applicables ainsi que celles figurant dans son prospectus. Peuvent être dépositaire d'OPCVM : la Banque de France, la Caisse des dépôts et consignations, les établissements de crédit et les entreprises d'investissement habilités à exercer l'activité de tenue de compte-conservation d'instruments financiers, les entreprises d'assurances et de capitalisation régies par le code des assurances.

* 83 Alternative Investment Fund Managers.

* 84 Délai porté, sur option, à vingt ans si un appel d'offres est effectué à l'issue de la période initiale de dix ans, et à vingt-quatre ans en cas de co-commissariat aux comptes sans obligation d'appel d'offres.

* 85 En outre, les prestations autres que d'audit qui ne sont pas interdites ne doivent pas dépasser 70 % de la moyenne des honoraires versés par l'EIP auditée ou le groupe auquel elle appartient, au titre du contrôle légal au cours des trois derniers exercices.

* 86 Règlement (UE) n° 575/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d'investissement et modifiant le règlement (UE) n° 648/2012.

* 87 Directive 2013/36/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et à la surveillance prudentielle des établissements de crédit et des entreprises d'investissement, modifiant la directive 2002/87/CE et abrogeant les directives 2006/48/CE et 2006/49/CE.

* 88 Cf. avis n° 164 (2013-2014) de M. François Patriat, fait au nom de la commission des finances, déposé le 21 novembre 2013.

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