Rapport n° 460 (2013-2014) de Mme Claire-Lise CAMPION , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 16 avril 2014
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LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION
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AVANT-PROPOS
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EXPOSÉ GÉNÉRAL
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I. L'ACCESSIBILITÉ : LE RENDEZ-VOUS
MANQUÉ DE 2015
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II. UN NOUVEAU PORTAGE POLITIQUE POUR PROLONGER LA
DYNAMIQUE D'ACCESSIBILITÉ AU-DELÀ DE 2015
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A. LE DÉVELOPPEMENT DE
L'ACCESSIBILITÉ UNIVERSELLE AFFIRMÉ COMME UNE PRIORITÉ
GOUVERNEMENTALE
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B. LE PROCESSUS DE CONCERTATION
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C. LES ARBITRAGES GOUVERNEMENTAUX
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A. LE DÉVELOPPEMENT DE
L'ACCESSIBILITÉ UNIVERSELLE AFFIRMÉ COMME UNE PRIORITÉ
GOUVERNEMENTALE
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III. UN PROJET DE LOI D'HABILITATION POUR METTRE
EN PLACE LES AGENDAS D'ACCESSIBILITÉ PROGRAMMÉE ET ADAPTER
CERTAINES DISPOSITIONS DE LA LOI DE 2005
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I. L'ACCESSIBILITÉ : LE RENDEZ-VOUS
MANQUÉ DE 2015
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EXAMEN DES ARTICLES
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Article 1er - Demande d'habilitation en vue de
mettre en oeuvre les agendas d'accessibilité programmée pour les
établissements recevant du public et de clarifier la
réglementation relative à la mise en accessibilité de ces
établissements ainsi que des bâtiments d'habitation
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Article 2 - Demande d'habilitation en vue
d'adapter les exigences d'accessibilité pour les services de transport
public de voyageurs et de créer le schéma directeur
d'accessibilité - agenda d'accessibilité programmée
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Article 3 - Demande d'habilitation en vue de
mettre en oeuvre diverses mesures proposées par la concertation
nationale sur l'accessibilité et d'adapter certaines dispositions
à l'outre-mer
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Article 4 - Délais d'habilitation et de
ratification des ordonnances
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Article 1er - Demande d'habilitation en vue de
mettre en oeuvre les agendas d'accessibilité programmée pour les
établissements recevant du public et de clarifier la
réglementation relative à la mise en accessibilité de ces
établissements ainsi que des bâtiments d'habitation
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EXAMEN EN COMMISSION
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LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
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ANNEXES
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ANNEXE 1 - LISTE DES PROPOSITIONS DU
RAPPORT « RÉUSSIR 2015 »
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ANNEXE 2 - RAPPORT « AGENDA
D'ACCESSIBILITÉ PROGRAMMÉE » ISSU DE LA
CONCERTATION
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ANNEXE 3 - RAPPORT « AJUSTEMENT DE
L'ENVIRONNEMENT NORMATIF » ISSU DE LA CONCERTATION
N° 460
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2013-2014
Enregistré à la Présidence du Sénat le 16 avril 2014 |
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des affaires sociales (1) sur le projet de loi habilitant le Gouvernement à adopter des mesures législatives pour la mise en accessibilité des établissements recevant du public , des transports publics , des bâtiments d' habitation et de la voirie pour les personnes handicapées (PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE),
Par Mme Claire-Lise CAMPION,
Sénatrice
(1) Cette commission est composée de : Mme Annie David , présidente ; M. Yves Daudigny , rapporteur général ; M. Jacky Le Menn, Mme Catherine Génisson, MM. Jean-Pierre Godefroy, Claude Jeannerot, Alain Milon, Mme Isabelle Debré, MM. Jean-Marie Vanlerenberghe, Gilbert Barbier, Mme Catherine Deroche , vice-présidents ; Mmes Claire-Lise Campion, Aline Archimbaud, MM. Marc Laménie, Jean-Noël Cardoux, Mme Chantal Jouanno , secrétaires ; Mme Jacqueline Alquier, M. Jean-Paul Amoudry, Mmes Françoise Boog, Patricia Bordas, Natacha Bouchart, Marie-Thérèse Bruguière, Caroline Cayeux, M. Bernard Cazeau, Mmes Karine Claireaux, Laurence Cohen, Christiane Demontès, MM. Gérard Dériot, Jean Desessard, Mmes Muguette Dini, Anne Emery-Dumas, MM. Guy Fischer, Michel Fontaine, Mme Samia Ghali, M. Bruno Gilles, Mmes Colette Giudicelli, Christiane Hummel, M. Jean-François Husson, Mme Christiane Kammermann, MM. Ronan Kerdraon, Georges Labazée, Jean-Claude Leroy, Gérard Longuet, Hervé Marseille, Mmes Michelle Meunier, Isabelle Pasquet, MM. Louis Pinton, Hervé Poher, Mmes Gisèle Printz, Catherine Procaccia, MM. Henri de Raincourt, Gérard Roche, René-Paul Savary, Mme Patricia Schillinger, MM. François Vendasi, Michel Vergoz, Dominique Watrin . |
Voir le(s) numéro(s) :
Sénat : |
447 et 461 (2013-2014) |
LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSIONRéunie le mercredi 16 avril 2014, sous la présidence de Mme Annie David, présidente, la commission des affaires sociales a examiné le rapport de Mme Claire-Lise Campion sur le projet de loi n° 447 (2013-2014) habilitant le Gouvernement à adopter des mesures législatives pour la mise en accessibilité des établissements recevant du public, des transports publics, des bâtiments d'habitation et de la voirie pour les personnes handicapées. L'objet du présent projet de loi d'habilitation, pour lequel la procédure accélérée a été engagée, est de permettre - comme l'avait annoncé le Premier ministre lors du comité interministériel du handicap du 25 septembre 2013 - la mise en oeuvre, par voie d'ordonnance, de certaines des préconisations de la concertation nationale sur l'accessibilité , présidée par Mme Claire-Lise Campion d'octobre 2013 à février 2014, appelant une modification de la loi, en particulier la création des agendas d'accessibilité programmée (Ad'AP). Ce nouvel outil de politique publique doit permettre de poursuivre la dynamique d'accessibilité, engagée par la loi du 11 février 2005, au-delà du 1 er janvier 2015. La commission insiste sur le fait que le recours aux ordonnances ne saurait être un mode habituel d'élaboration de la loi . Elle estime toutefois que cette procédure est justifiée dans des domaines précisément circonscrits , comme celui de l'accessibilité . En effet, l'urgence de la situation et la grande complexité technique du sujet imposent d'agir rapidement. A l'issue d'un débat nourri, elle a adopté le projet de loi d'habilitation sans modification . |
AVANT-PROPOS
Mesdames, Messieurs,
Loi ambitieuse, la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a posé un principe fort : l'obligation de mise en accessibilité du cadre bâti et des transports à l'horizon 2015 .
En fixant ce cap, elle a indéniablement permis de lancer une dynamique et d'opérer progressivement un changement d'état d'esprit dans notre société. L'accessibilité ne s'adresse en effet pas uniquement aux personnes handicapées, elle bénéficie à tous, dans un contexte de vieillissement de la population. Des efforts incontestables, qui doivent être salués, ont été déployés par les acteurs concernés pour faire avancer ce chantier. Les progrès sont tangibles tant en matière de logements neufs, d'établissements recevant du public que de transports.
Pour autant, la France ne sera pas au rendez-vous du 1 er janvier 2015 . Ce constat, lucide, votre rapporteure et votre collègue Isabelle Debré l'ont dressé, dès juillet 2012, dans leur rapport sur la loi de 2005 remis à la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois. Il a ensuite été corroboré par les conclusions, rendues publiques en septembre de la même année, d'une mission conjointe du conseil général de l'environnement et du développement durable, du contrôle général économique et financier, et de l'Inspection générale des affaires sociales.
Conscient de la nécessité d'impulser un nouvel élan, le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, a alors confié à votre rapporteure la mission de faire le point sur l'état d'avancement de l'accessibilité et de rechercher les solutions permettant à notre pays de répondre le mieux possible aux attentes légitimes suscitées par la loi de 2005.
C'est sur la base de son rapport intitulé « Réussir 2015 », présenté le 1 er mars 2013, que le Premier ministre a décidé, lors du comité interministériel du handicap du 25 septembre 2013, d'ouvrir, dès le mois suivant, deux chantiers de concertation afin de faire évoluer de manière consensuelle le cadre juridique de l'accessibilité : un premier sur la mise en oeuvre, par voie d'ordonnance, des « agendas d'accessibilité programmée » (Ad'AP), proposition phare du rapport « Réussir 2015 » permettant aux acteurs publics et privés de s'engager sur un calendrier précis et chiffré de travaux d'accessibilité, et de poursuivre ainsi la dynamique engagée par la loi de 2005 ; un second sur les normes d'accessibilité du cadre bâti, de la voirie et des transports pour les adapter à l'évolution des techniques, aux besoins des personnes handicapées et aux contraintes des opérateurs.
A la demande du Premier ministre, votre rapporteure a assuré la présidence de cette concertation , qui s'est déroulée d'octobre 2013 à février 2014, en collaboration avec la déléguée ministérielle à l'accessibilité.
Qualifiée de moment historique par la centaine de participants, dont elle tient à saluer la très grande assiduité et l'esprit constructif, la concertation a permis, grâce à une meilleure compréhension mutuelle, de parvenir à des solutions partagées par tous.
L'objet du présent projet de loi d'habilitation , pour lequel la procédure accélérée a été engagée, est de permettre - comme cela avait été annoncé lors du CIH - la mise en oeuvre, par voie d'ordonnance, de certaines des préconisations de la concertation appelant une modification de la loi, en particulier la création des Ad'AP . D'autres mesures, notamment celles issues des discussions relatives à l'ajustement normatif, seront mises en oeuvre au niveau réglementaire dans le même calendrier resserré que celui des textes d'application des mesures prises par ordonnance.
Si votre commission insiste sur le fait que le recours aux ordonnances ne saurait être un mode habituel d'élaboration de la loi , elle estime toutefois que cette procédure est justifiée dans des domaines précisément circonscrits , comme celui de l'accessibilité . En effet, l'urgence de la situation et la très grande complexité technique du sujet imposent d'agir rapidement.
EXPOSÉ GÉNÉRAL
I. L'ACCESSIBILITÉ : LE RENDEZ-VOUS MANQUÉ DE 2015
A. L'AMBITIEUX CHANTIER DE L'ACCESSIBILITÉ
1. L'accessibilité universelle, une révolution sociétale
La question de l'accessibilité a pris corps dans le débat public lors de l'examen de la loi du 30 juin 1975 d'orientation en faveur des personnes handicapées . Celle-ci affichait déjà des objectifs ambitieux et posait, de façon réaliste, le principe d'une mise en oeuvre progressive de l'accessibilité, tant en matière de cadre bâti que de transport.
Toutefois, la définition même de l'accessibilité souffrait d'emblée d'une vision très restrictive, puisqu'elle demeurait limitée à la question du handicap moteur, et notamment à la question des cheminements en fauteuil roulant.
La traduction concrète des principes affichés par cette loi fondatrice n'a été que tardivement réalisée : la définition précise des obligations d'accessibilité a été renvoyée à des décrets qui ont prévu, faute de « garde-fou » dans la loi, un nombre important d'exceptions et de dérogations. En outre, des délais importants ont été nécessaires pour leur élaboration : ainsi, s'agissant du cadre bâti, leur publication s'est échelonnée jusqu'en 1999 !
Concernant les transports, la loi d'orientation du 30 décembre 1982 sur les transports intérieurs n'a fait de l'accessibilité aux personnes handicapées ou à mobilité réduite qu'un « objectif » parmi d'autres pouvant, le cas échéant, conduire à l'adoption de « mesures particulières » .
Pendant toutes ces années, les personnes handicapées ont donc continué à vivre un véritable parcours du combattant pour se déplacer dans la Cité. Il a fallu attendre la loi de 2005 pour donner une véritable impulsion au chantier de l'accessibilité.
Conformément à la nouvelle définition du handicap, la loi du 11 février 2005 rénove la notion d'accessibilité en l'étendant :
- à tous les types de handicap (mental, sensoriel, psychique, cognitif, polyhandicap...), alors que les textes antérieurs envisageaient l'accessibilité presque exclusivement sous l'angle des personnes à mobilité réduite ;
- à tous les domaines de la vie en société : la chaîne de déplacement (cadre bâti, voirie, espaces publics, transport), la citoyenneté, l'école, les services publics, les loisirs...
On parle désormais d' accessibilité universelle , pour désigner le processus visant à éliminer toutes les barrières qui peuvent limiter une personne dans l'accomplissement de ses activités quotidiennes . Cette démarche considère non seulement les besoins des personnes ayant une déficience (motrice, intellectuelle, visuelle, sensorielle, auditive, liée à la parole ou autres), mais également ceux de toute personne pouvant être confrontée à des situations de handicap, qu'elles soient temporaires (à la suite d'un accident ou d'une maladie) ou durables (dépendance liée à l'âge).
Comme aiment à le rappeler les associations, l'accessibilité universelle, c'est « l'accès de tous à tout » . Au regard de l'allongement de la durée de la vie, cette approche transversale représente un enjeu considérable pour les décennies à venir .
2. Les objectifs fixés par la loi de 2005
La loi de 2005 est assurément une loi ambitieuse et innovante . De fait, l'obligation d'accessibilité s'applique à l'ensemble des lieux publics, à nombre d'espaces privés, à tous les transports publics ainsi qu'à la voirie. Pour la première fois, des objectifs et des dates sont précisément définis et un corpus juridique complet est établi, assorti de sanctions administratives et pénales.
a) L'accessibilité du cadre bâti en 2015
L'article 41 de la loi fixe un principe général d'accessibilité du cadre bâti, dix ans après la publication de celle-ci , dont le champ est largement défini : il s'impose aux locaux d'habitation (à l'exception des travaux réalisés par les propriétaires pour leur propre usage), aux établissements recevant du public (ERP), aux installations ouvertes au public (IOP) et aux lieux de travail.
Les ERP
Tous les ERP, qu'ils soient neufs ou existants, doivent être accessibles aux personnes handicapées, quel que soit leur handicap . L'obligation d'accessibilité porte à la fois sur l'extérieur et l'intérieur du bâtiment.
Aucune dérogation n'est possible pour les ERP neufs, depuis que dans sa décision du 21 juillet 2009, le Conseil d'Etat a supprimé les dérogations initialement prévues, dans la mesure où « le législateur n'avait pas entendu permettre au pouvoir réglementaire d'ouvrir des possibilités de dérogations en ce qui concerne les constructions neuves » .
En revanche, pour les ERP existants, le préfet peut accorder des dérogations dans les cas suivants :
- en cas d'impossibilité technique résultant de l'environnement du bâtiment, et notamment des caractéristiques du terrain, de la présence de constructions existantes ou de contraintes liées au classement de la zone de construction ;
- pour des motifs liés à la conservation du patrimoine architectural, en cas de création d'un ERP par changement de destination dans un bâtiment ou une partie de bâtiment classé ou inscrit au titre des monuments historiques ;
- si les travaux d'accessibilité sont susceptibles d'avoir des conséquences excessives sur l'activité de l'établissement.
La loi confie à la commission consultative départementale de sécurité et d'accessibilité (CCDSA), présidée par le préfet, l'examen de tous les projets de construction, de modification et d'aménagement des ERP et toutes les demandes de dérogation aux règles d'accessibilité.
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Les bâtiments d'habitation
Les logements et leurs abords doivent être construits et aménagés de façon à être accessibles aux personnes handicapées, quel que soit leur handicap , c'est-à-dire qu'elles doivent pouvoir y circuler sans danger et avec la plus grande autonomie possible. Ces obligations s'imposent même si les logements ne comptent pas de personnes handicapées parmi leurs habitants, afin de permettre, d'une part, à des personnes handicapées de s'y installer dans le futur, d'autre part, à des visiteurs handicapés d'y venir.
Ces obligations dépendent de la nature du logement (collectif ou individuel), mais aussi de son caractère neuf ou déjà existant :
- les immeubles d'habitation neufs doivent être accessibles. Les obligations concernent tous les logements, les parties communes, l'accès et les abords des bâtiments ;
- s'agissant des maisons individuelles neuves, seules celles destinées à être louées doivent respecter les règles d'accessibilité ;
- les bâtiments d'habitation existants sont soumis à l'obligation d'accessibilité uniquement s'ils font l'objet de travaux consistant à créer de nouvelles surfaces ou de nouveaux volumes.
Depuis la décision du Conseil d'Etat précitée, les dérogations ne sont plus admises pour les bâtiments d'habitation collective neufs et les maisons individuelles neuves destinées à la location.
•
Un contrôle et des sanctions
renforcés
En application de l'article 41 de la loi, le contrôle du respect des règles d'accessibilité est assuré par l'obligation pour les maîtres d'ouvrage de remettre à l'autorité ayant délivré le permis, à l'issue des travaux, une attestation de conformité aux règles d'accessibilité établie par un contrôleur satisfaisant à des critères de compétence et d'indépendance. En cas de non-production de cette attestation, le remboursement des subventions publiques accordées pour des travaux de mise en accessibilité peut être exigé.
L'article 43 prévoit, quant à lui, que pour « les utilisateurs du sol, les bénéficiaires des travaux, les architectes, les entrepreneurs ou toute autre personne responsable de l'exécution de travaux » , la méconnaissance des obligations imposées en matière d'accessibilité est punie d'une amende de 45 000 euros, portée à 75 000 euros et doublée d'une peine de six mois d'emprisonnement en cas de récidive. Ces peines sont également applicables en cas d'inexécution des travaux dans les délais prescrits.
Cet article précise également que, tout comme les personnes physiques, les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables d'infractions aux règles d'accessibilité .
Ces dispositions ont été codifiées à l'article L. 152-4 du code de la construction et de l'habitation .
•
Une formation obligatoire à
l'accessibilité des professionnels du cadre bâti
Ces objectifs ambitieux constituent un défi pour l'ensemble des propriétaires et exploitants, confrontés non seulement au coût des travaux, mais aussi à la complexité des normes et à la rareté des professionnels pouvant les conseiller dans leurs travaux de mise en accessibilité.
Anticipant ces difficultés, la loi a prévu, à son article 41, l'intégration obligatoire de la formation à l'accessibilité dans la formation initiale des architectes et professionnels du cadre bâti.
b) L'accessibilité des transports et de la voirie
L'article 45 est consacré au développement de l'accessibilité de la chaîne de déplacement. Son ambition réside dans la définition large retenue de la chaîne de déplacement (cadre bâti, voirie, aménagement des espaces publics, système de transport et intermodalité) et dans son objectif d'accessibilité de l'ensemble des services publics de transport collectif, dix ans après la publication de la loi .
La mise en accessibilité des transports et de la voirie s'appuie sur de nouveaux outils de planification et de programmation créés par la loi :
- les autorités organisatrices des transports (AOT) au sens de la loi du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs doivent définir un schéma directeur d'accessibilité des services dont elles ont la responsabilité dans les trois ans suivant la publication de la loi. Cette obligation s'impose aux différentes AOT : autorités organisatrices des transports publics urbains, syndicat des transports d'Île-de-France, autorités responsables de l'organisation des transports départementaux et régionaux, Etat pour ce qui concerne notamment les services ferroviaires d'intérêt national ;
- pour chaque commune, le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale (Epci) doit établir, d'ici le 22 décembre 2009, un plan de mise en accessibilité de la voirie et des aménagements des espaces publics (Pave), intégré au plan de déplacements urbains lorsqu'il existe, fixant des dispositions susceptibles de rendre accessibles aux personnes handicapées les circulations piétonnes et les aires automobiles.
Ces nouvelles obligations doivent bénéficier à toutes les personnes en situation de handicap et, plus largement, à l'ensemble des usagers (femmes enceintes, personnes avec poussette, personnes âgées, etc.) en contribuant à l'amélioration du confort et de la sécurité de tous.
c) La création de commissions communales pour l'accessibilité
La loi prévoit la création de commissions communales et intercommunales pour l'accessibilité aux personnes handicapées (CCAPH-CIAPH) dans les communes de 5 000 habitants et plus, ainsi que dans les Epci compétents en matière de transport et d'aménagement du territoire, dont la population est supérieure ou égale à 5 000 habitants.
Ces commissions, qui associent les représentants des collectivités concernées, les associations d'usagers et les associations de personnes handicapées, ont le double rôle de constituer des observatoires locaux et de mettre en cohérence toutes les initiatives locales, qu'elles soient publiques ou privées.
Elles sont notamment chargées d'établir, à l'attention du conseil municipal, un diagnostic de l'accessibilité du cadre bâti, de la voirie, des espaces publics et des transports, et de formuler des propositions d'amélioration.
B. UN CONSTAT PARTAGÉ : LA FRANCE NE SERA PAS AU RENDEZ-VOUS DE 2015
Dès juillet 2012, à l'occasion de la remise de leur rapport sur l'application de la loi de 2005 à la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois 1 ( * ) , votre rapporteure et votre collègue Isabelle Debré dressent le constat, lucide, que l'échéance du 1 er janvier 2015 pour la mise en accessibilité du cadre bâti et des transports ne pourra être tenue. Elles en appellent alors à un nouvel élan politique.
Ce constat est corroboré quelques mois plus tard par les conclusions d'une mission conjointe du conseil général de l'environnement et du développement durable, du contrôle général économique et financier et de l'Inspection générale des affaires sociales, faisant le constat de difficultés et de retards dans la mise en oeuvre des obligations fixées par la loi de 2005.
A la suite de son travail parlementaire, votre rapporteure est chargée, en octobre 2012, par le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, d'une mission pour faire le point sur l'état d'avancement de l'accessibilité et rechercher, dans la concertation, les solutions visant à garantir le maintien d'une dynamique forte au-delà de 2015. Ses propositions sont remises au Premier ministre, le 1 er mars 2013, sous le titre « Réussir 2015 » 2 ( * ) .
1. Le manque d'outils d'évaluation
Comme l'a souligné l'Observatoire interministériel de l'accessibilité et de la conception universelle (Obiaçu) dès son premier rapport 3 ( * ) , le premier constat concernant la mise en oeuvre de la politique d'accessibilité est celui d'un manque criant d'outils de recensement statistique. La loi de 2005 n'a en effet pas prévu de remontées d'informations obligatoires de la part des acteurs publics ou privés concernés.
Certes, les attentes des associations représentatives des personnes handicapées et la volonté des pouvoirs publics se sont rencontrées pour construire une grande loi sociétale, mais sans aller jusqu'à intégrer les moyens de l'évaluation des objectifs assignés.
Certains acteurs, conscients de ce manque, se sont dotés d'outils 4 ( * ) , mais aucune obligation n'existe en la matière, et encore moins de méthode permettant de synthétiser les chiffres et les observations recueillis.
De plus, l'hétérogénéité des champs couverts par cette politique et la multitude des acteurs y participant sont des facteurs de complexité supplémentaires. Le fait que certains de ces acteurs soient regroupés au sein d'organismes, de fédérations ou d'associations n'a pas pour autant permis que des analyses globales, qualitatives et quantitatives, de niveau national, soient disponibles.
2. Une réelle dynamique, ternie par de sérieux retards
Malgré l'absence de données exhaustives, votre rapporteure a, dans son rapport « Réussir 2015 », esquissé un état d'avancement de la mise en oeuvre de l'accessibilité . Pour ce faire, elle s'est appuyée sur les travaux de l'Obiaçu 5 ( * ) et sur différents documents qui lui ont été remis au cours des auditions.
Extraits du rapport « Réussir 2015 »
? Une réelle dynamique mais un goût d'inachevé
Progressivement, au fur et à mesure de la parution des textes et à l'approche des échéances, nombre d'acteurs se sont mobilisés pour programmer, financer et réaliser les aménagements nécessaires à l'accessibilité des personnes handicapées. Cette dynamique se confirme à l'approche de 2015.
La multiplication des guides, des référentiels de qualité, des remises de trophées et récompenses met en lumière la volonté de nombreux acteurs à être exemplaires en la matière.
Sur un plan plus institutionnel, le rapport de l'Obiaçu rappelle que respectivement 86 % et 73 % des commissions communales et intercommunales d'accessibilité avaient été installées au 1 er juillet 2012. L'effort de rattrapage effectué par les grandes villes est notable, de même que la volonté manifestée par des communes de moins de 5 000 habitants de se doter d'une commission communale alors qu'elles n'y sont pas tenues.
Le fait que plus du quart des établissements publics de coopération intercommunale (Epci), ne se soient pas dotés d'une commission intercommunale s'explique en partie du fait que les Epci en milieu rural, souvent ne gèrent ni équipements publics, ni services de transports, ni voiries.
L'analyse des rapports de ces différentes instances laisse cependant un goût d'inachevé. Selon un document de la délégation interministérielle à l'accessibilité 6 ( * ) , seules 198 commissions d'accessibilité (dont un tiers de commissions intercommunales) ont établi le rapport annuel obligatoire. Si les rapports ayant pu être exploités montrent une bonne implication des élus, une attention particulière des commissions pour les diagnostics, les ERP et les transports, peu d'entre eux présentent l'état d'avancement des diagnostics et des travaux en cours. Il est donc très difficile à ce stade de faire un point précis sur l'état d'avancement de l'accessibilité à travers les rapports des commissions communales ou intercommunales d'accessibilité.
Ainsi, au-delà d'une mobilisation liée aux obligations administratives imposées par la loi, il s'agit de déterminer si dans les faits, l'accessibilité est devenue une réalité.
? Une estimation difficile du nombre de logements accessibles
La mission de recensement du nombre de logements accessibles a été confiée par le législateur aux Commissions communales et intercommunales mais on a vu ci-dessus que les rapports étaient à la fois peu nombreux et incomplets. Il est donc très difficile de connaître le nombre de logements accessibles en France. Selon les données recueillies, sur près de 33,8 millions de logements, 80 % sont soit en rez-de-chaussée (y compris les maisons individuelles), soit desservis par un ascenseur 7 ( * ) . N'ayant pas d'indications sur l'accessibilité et les dimensions des ascenseurs, ces chiffres ne peuvent que donner une estimation du nombre de logements potentiellement accessibles ou adaptables 8 ( * ) .
En ce qui concerne les constructions neuves, les données communiquées à la mission sont les suivantes :
Compte tenu du nombre de logements construits en 2009 et 2010, entre 84 et 99 % des logements nouveaux construits chaque année seraient accessibles. Mais ces données doivent être maniées avec précaution et nécessiteraient d'être vérifiées. De son côté, l'Anpihm conteste en effet la progression du nombre de logements neufs accessibles. Dans une étude de janvier 2013, selon un indicateur qu'elle a construit, le nombre de logements potentiellement accessibles pour 100 habitants serait passé de l'indice 74 en 2006 à 68 en 2009, soit une baisse de 7 %.
En outre, l'essentiel des maisons individuelles construites pour le compte de leur propriétaire ne sont pas accessibles. Une proposition de nature à prendre en compte cette singularité est du reste énoncée dans la partie 3 du rapport.
? Une mise en accessibilité insuffisante des établissements recevant du public (ERP)
En matière de diagnostics tout d'abord, l'Observatoire constate de nets progrès. Plus de la moitié des collectivités avait à conduire des diagnostics d'accessibilité :
- avant la date limite du 1 er janvier 2010 pour les ERP de première et deuxième catégorie ainsi que pour les ERP appartenant à l'État ;
- avant le 1 er janvier 2011 pour les ERP de troisième et quatrième catégorie.
Ne disposant pas de données statistiques systématiques, ce qui crée une vraie difficulté, déjà soulignée dans mon précédent rapport 11 ( * ) , l'Obiaçu a procédé à une collecte statistique de grande envergure et a pu ainsi exploiter les réponses de 21 680 communes (taux de réponse de 60,7 %) et 1 230 Epci (taux de réponse de 48,7 %) sur les ERP publics.
Malgré les progrès, seuls 63 % des ERP intercommunaux de 1 ère catégorie ont été diagnostiqués ainsi que 56 % des ERP communaux. Dans 20 départements, les taux de diagnostic sont supérieurs à 80 % mais ils sont inférieurs à 30 % dans 20 départements. On ne peut se satisfaire de tels résultats, limités aux seuls ERP publics, d'autant que l'Obiaçu relève l'insuffisante qualité des diagnostics.
Néanmoins, les 42 % d'Epci et les 37 % de communes qui ont achevé le diagnostic de tous leurs ERP méritent d'être cités en exemple.
Près de 330 000 ERP ont fait l'objet de travaux d'ensemble ou partiels, y compris des ERP de catégorie 5 (qui ne sont pas tenus d'effectuer un diagnostic). De son côté, l'Association des paralysés de France (APF) estime que seuls 15 % des ERP sont aux normes d'accessibilité. En l'absence de données fiables et vérifiables 12 ( * ) , il est impossible à ce stade de répartir les ERP entre ceux qui sont partiellement accessibles, ceux qui le sont totalement et ceux qui ne le sont pas du tout.
? Des avancées inégales dans le secteur des transports publics
La loi de 2005 a opéré un réel changement culturel au sein des autorités organisatrices de transport (AOT). Ce changement a été obtenu et entretenu par la création de comités consultatifs associant les représentants des personnes handicapées. Cette évolution positive de l'état d'esprit des entités responsables de l'organisation des transports ne se concrétise cependant que progressivement dans la réalité quotidienne.
- Les schémas directeurs d'accessibilité (SDA)
Selon le rapport 2012 de l'Obiaçu, tous types d'autorités organisatrices de transport (AOT) confondus, 61 % des schémas directeurs d'accessibilité (SDA) ont été adoptés. Cependant, 15 % des SDA n'ont pas été initiés. Toutes les régions ont adopté leur SDA, ainsi que 75 % des départements. Pour le reste des SDA départementaux, 20 % restent en phase d'élaboration et 5 % ne sont pas engagés.
Seules 53 % des AOT urbaines ont adopté leur schéma (représentant certes 75 % de la population). Près de 27 % sont en cours d'élaboration, mais 20 % n'ont toujours rien engagé, ce qui est très insatisfaisant 13 ( * ) . Ceci étant, parmi celles qui n'ont rien engagé figurent des petites communes ainsi que les agglomérations qui ont décidé de privilégier le plan de déplacements urbains.
- Les transports urbains
Côté matériel, les progrès sont sensibles puisque en novembre 2012, 90 % des autobus étaient à plancher bas, 69 % étaient équipés d'une palette rétractable, 65 % des véhicules guidés disposaient d'un système d'annonce sonore des arrêts et 72 % d'un système d'annonce visuelle des arrêts 14 ( * ) . Pour la RATP, ces pourcentages sont respectivement de 89 %, 97 % et 85 %.
Ainsi, les avancées sont perceptibles dans les grandes villes, grâce au renouvellement du parc d'autobus et à la réalisation de lignes de tramway, en général accessibles. De multiples arrêts d'autobus ont également été aménagés pour les voyageurs à mobilité réduite. Mais pour la région Ile-de-France par exemple, les progrès sont contrastés.
En Ile-de-France, le SDA a été adopté par le Syndicat des transports d'Ile-de-France (Stif) en 2008. Ce schéma prévoit la mise en accessibilité de 266 gares représentant 90 % du trafic voyageurs. Mais l'atteinte de cet objectif d'ici 2015 se révèle impossible car cela aurait supposé 35 à 40 gares en travaux simultanément chaque année. La réalisation du SDA de la région capitale dépassera donc l'échéance, sachant que toute gare non accessible dispose en principe d'un service de substitution.
Pour le moment, 59 gares du réseau express régional sur 65 gérées par la RATP sont d'ores et déjà accessibles. En ce qui concerne le métro parisien qui, en tant que réseau ferré souterrain, n'est pas soumis à l'échéance de 2015, seule une ligne, réalisée récemment est accessible, ainsi que les stations nouvelles construites en prolongement de ligne. La RATP a examiné la pertinence de la réalisation d'un réseau noyau, mais a constaté l'infaisabilité technique de l'aménagement de 50 % des stations en matière d'accessibilité. L'infrastructure du métro parisien demeure donc peu propice à des progrès en matière d'accessibilité sauf pour les tronçons récents.
Il serait cependant opportun de poursuivre, pour l'avenir, la réflexion portant sur la mise en accessibilité d'une partie du métropolitain autour d'un réseau noyau. En effet, tous les travaux nouveaux et les prolongements de ligne se traduisent par une mise en accessibilité des nouveaux tronçons et aménagements sans que ceux-ci soient officialisés comme tels faute de stations de destination elles-mêmes accessibles. Il n'en demeure pas moins indispensable de poursuivre l'équipement de l'ensemble des lignes pour faciliter le déplacement de l'ensemble des personnes à handicap sensoriel ou intellectuel.
Par ailleurs, le réseau de surface (bus et tramways) est très largement accessible, tout du moins dans Paris intra-muros. Mais si les 63 lignes de bus parisiennes sont accessibles, seules 89 des 274 lignes de banlieue le sont. A noter cependant l'exploitation du service Flexcité qui assure chaque année 360 000 transports à la demande de personnes handicapées.
- Le réseau ferré de la SNCF et Réseau ferré de France
Les projets de la SNCF justifient un développement présenté dans l'encadré suivant.
L'accessibilité à la SNCF et à RFF (Réseau ferré de France) L'accessibilité des gares et des wagons relève de la responsabilité de la SNCF, l'accessibilité des quais incombe à RFF. Le schéma national d'accessibilité de la SNCF commence à être mis en place. Il concerne une partie des gares seulement, soit 418 gares de référence dont 172 sous l'entière responsabilité de la SNCF. Près de 50 d'entre elles sont d'ores et déjà accessibles et les 122 autres le seront d'ici 2015 pour la plupart et 2016 pour quelques-unes. En revanche, le mode d'adaptation des 246 autres gares et connexions du SDA reste à définir avec les AOT. Côté matériel, de nouveaux trains vont être livrés à partir de fin 2013 : les TER Régiolis et les TER Régio2N (deux niveaux) construits par deux sociétés établies en France. Ils seront équipés pour tout type de handicap et proposeront entre 3 et 4 espaces dit UFR (utilisateur de fauteuil roulant) par rame contre 1 ou 2 aujourd'hui. Les rames de TGV livrés à l'avenir vont également offrir ces prestations, les TGV dits « Lacroix » devant quant à eux faire l'objet de réaménagement. La SNCF mise également sur l'accueil ACCES Plus, disponible dans 360 gares et qui commence à faire ses preuves, pour augmenter le nombre d'utilisateurs à mobilité réduite faisant appel à ce service de 700 000 à près d'un million (contre 400 000 en 2004). De nouveaux élévateurs permettant l'accès aux trains vont être progressivement déployés mais l'efficacité de ces nouveaux matériels devra cependant être évaluée. L'impossibilité d'accéder aux offres tarifaires promotionnelles, inacceptable, devrait se résorber progressivement tant pour les offres proposées sur internet que pour l'extension d'ACCES Plus au RER et aux aérogares. Mais dans cette attente, la réservation d'un billet pour une personne handicapée nécessite une patience, une organisation et souvent un surcoût (attente téléphonique) que peu de personnes valides pourraient supporter. Néanmoins, la SNCF, qui était régulièrement pointée du doigt pour ses manquements, a engagé un effort marqué appelé à se prolonger dans les années futures. Cependant, elle continue à être peu adaptée notamment à l'accueil de groupes, sportifs par exemple, de personnes handicapées. |
- Les transports routiers interurbains
Les retards les plus marquants sont cependant enregistrés sur le réseau interurbain. Selon le Groupement des autorités responsables de transports (GART), les causes de ces retards dans la mise en accessibilité des transports publics relèvent de plusieurs facteurs :
- la capacité des réseaux à financer les travaux ;
- la complexité du « millefeuille administratif » qui rend difficile la coordination des travaux entre les différents acteurs ;
- la capacité des industriels (fabricants de matériels roulants) et des cabinets d'ingénierie à couvrir la demande ;
- la distorsion entre les différents calendriers d'application des décrets et des lois ;
- les disparités géographiques, financières et institutionnelles non prises en compte dans les lois, ce qui génère une fracture entre le monde rural et les métropoles. Ce point important sera repris dans la partie 3.
- Les transports aériens
Les transports aériens développent également la démarche d'accessibilité tant en ce qui concerne l'accueil aéroportuaire que les compagnies aériennes. Certaines compagnies à bas coût ont récemment défrayé la chronique en refusant d'accueillir des personnes handicapées, alléguant un motif de sécurité 15 ( * ) .
Tel n'est cependant pas le cas de la plupart des compagnies aériennes.
Ainsi, toute la flotte longs courriers d'Air France est accessible et l'accueil de toute personne handicapée est assuré par l'intermédiaire du réseau Saphir qui permet de préparer une réponse personnalisée à tout besoin spécifique. En revanche, dans certains cas, les personnes handicapées doivent signaler 48 heures à l'avance, tout besoin d'assistance spécifique.
Cette exigence est cependant réduite à quelques cas très ciblés : civière, besoin de raccordement de matériel médical, déficience sévère, prise en charge d'un animal de support émotionnel (les chiens sont très sensibles aux phases de décollage et d'atterrissage).
La multiplicité des intervenants au long de la chaîne de transport 16 ( * ) pose la question d'une cohérence plus globale de la prise en charge. Ainsi, la liaison entre l'aérogare et les moyens de transport de et vers les centres-villes n'est pas toujours correctement prise en compte.
? Voirie et espaces publics
Selon le dernier rapport de l'Obiaçu, 64 % des Plans d'accès à la voirie et aux espaces publics (Pave) sont adoptés ou en cours d'élaboration couvrant 85 % de la population. Mais seuls 13 % de ces plans couvrant 30 % de la population ont été adoptés. A la lecture de ces chiffres, il apparaît clairement que les communes de taille moyenne et petite ne se sont pas engagées dans cette démarche, faute vraisemblablement de capacité technique à le faire, constat sur lequel reviendra le rapport.
De fait, seuls 8 % des communes de moins de 200 habitants ont adopté leur Pave contre 38 % des communes de plus de 50 000 habitants.
Au regard de cet état des lieux, le constat est sans appel : en dépit d'une réelle dynamique, la société française ne sera pas au rendez-vous de 2015 .
1. Les raisons de ce rendez-vous manqué
Votre rapporteure a identifié plusieurs explications à ce retard 17 ( * ) :
« - un délai de parution des décrets d'application plus long que les six mois fixés par le législateur, en raison de leur nombre, de leur complexité et des procédures de concertation ;
- un coût des travaux non évalué . Or, si les surcoûts sont limités pour le logement neuf (de l'ordre de 4%), ils peuvent être plus significatifs pour les ERP et les transports comme le montrent quelques exemples. Les travaux d'accessibilité peuvent aussi parfois entraîner des pertes de surface commerciale et par la même, des pertes d'exploitation significatives ;
- une mauvaise appréciation des délais nécessaires à la réalisation de l'ensemble des travaux . La durée de dix ans est sans doute suffisante pour une majorité des équipements, elle l'est probablement moins dans d'autres cas, par exemple pour les établissements scolaires ou les transports qui connaissent des périodes de renouvellement de matériel s'échelonnant parfois sur plus de vingt ans ;
- la complexité des règles à respecter et un manque d'harmonisation des pratiques des commissions consultatives départementales de sécurité et d'accessibilité (CCDSA).
A ces arguments s'ajoute celui d' un défaut de portage politique . Car après la promulgation de la loi et en dehors des deux conférences nationales du handicap, l'insuffisance de l'impulsion politique n'a pas permis de mobiliser les acteurs de terrain, ni d'assurer une appropriation suffisante sur la durée. »
2. Les propositions du rapport « Réussir 2015 »
Sur la base de cet état des lieux, votre rapporteure insiste sur la nécessité de maintenir l'échéance de 2015 afin de ne pas freiner la dynamiqu e en cours .
Il ne s'agit pas pour autant d'attendre, sans agir, l'approche de cette date butoir et de se limiter à constater les retards accumulés. L'objectif est désormais d'accompagner les maîtres d'ouvrage qui n'auront pas achevé la mise aux normes d'accessibilité des équipements dont ils sont responsables ; tel est le sens des quarante propositions qu'elle formule (cf. annexe).
Parmi elles, deux mesures se distinguent plus particulièrement : la mise en place des agendas d'accessibilité programmée (Ad'AP) , documents de programmation financière des travaux d'accessibilité, et l 'évolution de l'environnement normatif du cadre bâti, de la voirie et des transports .
II. UN NOUVEAU PORTAGE POLITIQUE POUR PROLONGER LA DYNAMIQUE D'ACCESSIBILITÉ AU-DELÀ DE 2015
A. LE DÉVELOPPEMENT DE L'ACCESSIBILITÉ UNIVERSELLE AFFIRMÉ COMME UNE PRIORITÉ GOUVERNEMENTALE
Dès 2012, sous l'impulsion du Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, et de la ministre déléguée en charge des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion, Marie-Arlette Carlotti, le Gouvernement s'est résolument engagé pour une politique du handicap volontariste , comme en témoigne la décision d'inclure dans tous les projets de loi un volet « handicap » et l'élaboration d'un troisième plan autisme.
Ce nouvel élan politique s'est manifesté plus fortement encore à l'occasion du comité interministériel du handicap (CIH) du 25 septembre 2013 , au cours duquel le Gouvernement a présenté sa feuille de route en matière de politique du handicap. « Condition sine qua non d'une société plus égalitaire », l'accessibilité fait partie des cinq grandes priorités retenues (cf. encadré ci-dessous).
Une grande concertation , sous la présidence de votre rapporteure et mobilisant l'ensemble des acteurs concernés, est alors annoncée « pour mobiliser de façon volontariste et pragmatique autour de l'objectif de mise en accessibilité, en s'appuyant sur les préconisations du rapport Réussir 2015 » .
Le comité interministériel du handicap du 25 septembre 2013 Créé en 2009 pour renforcer le pilotage interministériel de la politique du handicap, le comité interministériel du handicap n'avait jamais été convoqué, au-delà de sa réunion d'installation. Sa convocation, le 25 septembre 2013, constitue donc une première . En présence des associations membres du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH), le Gouvernement y a présenté sa feuille de route pour les personnes en situation de handicap, laquelle comprend cinq grands axes : Le premier est celui de la jeunesse . Le Gouvernement a annoncé sa volonté de proposer un contrat à durée indéterminée (CDI) aux 28 000 auxiliaires de vie scolaire (AVS), aujourd'hui employés sur des contrats précaires, et de créer un diplôme d'Etat d'accompagnant. Une consultation des partenaires sociaux et des organisations syndicales de la fonction publique sera également conduite afin d'ouvrir un droit à la formation des parents d'enfants handicapés. Le deuxième axe concerne l'emploi . L'accès et le maintien dans l'emploi des personnes handicapées seront facilités à travers la négociation sur la formation professionnelle, le renforcement de l'obligation de reclassement professionnel des salariés devenus inaptes ou encore la reconnaissance des travailleurs handicapés indépendants. Le troisième axe a trait à l'accessibilité . Le développement de l'accessibilité universelle est affirmé comme une priorité de la politique du handicap. En s'appuyant sur les préconisations du rapport « Réussir 2015 », le Gouvernement a décidé de passer à la vitesse supérieure en mettant en place les agendas d'accessibilité programmée (Ad'AP) par voie d'ordonnance , en mobilisant des fonds de la Caisse des dépôts et consignations et de la Banque publique d'investissement, en recrutant 1 000 ambassadeurs de l'accessibilité (cf. infra ). Le quatrième axe est relatif à l'accompagnement médico-social et à l'accès aux soins . Dans la continuité du plan autisme présenté en mai dernier, l'accompagnement des enfants handicapés sera facilité grâce à la prise en charge intégrale des frais de transport vers les centres d'action médico-sociale précoce (Camps) et les centres médico-psycho-pédagogiques (CMPP). Pour faciliter l'accès des personnes handicapées aux soins courants, une offre de santé sera développée sur chaque territoire à partir de l'identification par les agences régionales de santé (ARS) de lieux de soins accessibles. Le cinquième axe concerne la gouvernance et la mobilisation de la société . Un réseau de référents handicap est actuellement mis en place dans les différentes administrations centrales afin de promouvoir l'approche transversale de la politique du handicap ; il est également prévu de décliner la présente feuille de route dans les territoires via les ARS. Enfin, le Gouvernement souhaite mobiliser l'ensemble de la société, au-delà des seuls pouvoirs publics et des associations représentant les personnes handicapées et leurs familles, pour donner une vision positive de l'inclusion. |
B. LE PROCESSUS DE CONCERTATION
1. Les enjeux de la concertation
Lancée en octobre 2013, la concertation sur l'accessibilité a dû répondre à un triple défi.
Le premier d'entre eux est un défi de crédibilité . Si l'objectif du « tout accessible » en 2015 a constitué un formidable levier pour enclencher une nouvelle dynamique, il est rapidement apparu comme peu réaliste, car ne tenant compte ni des capacités financières des acteurs, ni de la durée d'amortissement du matériel existant, ni du degré de mobilisation de certains secteurs. Tout devait être accessible au même moment, quels que soient la fréquentation, l'opportunité, la faisabilité, le coût, les contraintes techniques, naturelles ou de protection du patrimoine. Face à cette absence de hiérarchie et de gradation dans le processus, une partie des opérateurs s'est mobilisée tardivement, à l'approche de l'échéance de 2015, quelques-uns spéculant même sur un report de la date limite. Au final, l'accumulation des retards donne un sentiment de désintérêt, d'absence de volonté d'inclusion sociale, de recherche de gain de temps et ce, alors que des efforts tangibles ont été accomplis.
Pour l'avenir, il est donc indispensable de mettre en place une autre méthode , qui soit crédible tant aux yeux du monde associatif qu'à ceux des opérateurs qui devront être convaincus de sa faisabilité. Celle-ci doit reposer sur la hiérarchisation et la programmation des travaux, sur leur évaluation à échéance régulière, sur l'obligation de résultats assortie de sanctions financières .
Le deuxième défi est celui de la mobilisation . L'ampleur du chantier de l'accessibilité universelle nécessite en effet une implication accrue de l'ensemble des acteurs, qu'ils soient publics ou privés. Elle suppose également une plus grande sensibilisation des citoyens aux enjeux de l'accessibilité, notamment au regard du vieillissement de la population.
Le troisième défi est celui de la performance . Face à la complexité du sujet, il convient de mettre en place des outils réalistes et pragmatiques qui permettent aux opérateurs de rattraper leur retard, au besoin de manière progressive. Ainsi, si les objectifs les plus prégnants devront être atteints à l'issue d'une période relativement courte, ceux de moindre importance pourront être réalisés en fin de processus. Le défi de la performance suppose aussi de simplifier et d'actualiser certaines normes et dispositions réglementaires afin de tenir compte de l'ensemble des formes de handicap et de faire primer la qualité d'usage sur la seule conformité formelle aux règles.
Au regard de ces nouveaux défis et conformément aux préconisations du rapport « Réussir 2015 », la concertation a porté sur deux thématiques :
- la mise en place des agendas d'accessibilité programmée ou Ad'AP ;
- l'évolution des normes relatives à l'accessibilité .
2. Une démarche inédite
La méthode retenue a été celle préconisée par le CIH du 25 septembre 2013, c'est-à-dire une série de réunions de concertation avec l'ensemble des acteurs concernés par le dossier de l'accessibilité .
Présidée par votre rapporteure et animée par la déléguée ministérielle à l'accessibilité, cette concertation inédite, qualifiée par tous de « moment historique », a permis de faire travailler ensemble toutes les parties prenantes au dossier de l'accessibilité : les associations de personnes handicapées membres de l'Observatoire interministériel de l'accessibilité et de la conception universelle (Obiaçu), les représentants du commerce, de l'hôtellerie-restauration et des professions libérales, les responsables du secteur des transports, les associations d'élus locaux, les maîtres d'oeuvre et d'ouvrage, les techniciens et les experts.
S'agissant du volet « Ad'AP », les 18 réunions, qui se sont échelonnées entre octobre et décembre 2013, ont donné lieu à près de 60 heures de concertation . Chacune d'entre elles a eu pour objectif d'examiner les différentes étapes de la procédure des Ad'AP tant en ce qui concerne le contenu de ce nouvel outil, son mode d'élaboration, que de la programmation financière, des délais et des sanctions.
Votre rapporteure tient à souligner la constante et forte participation de l'ensemble des acteurs , témoignant de leur intérêt pour cet instrument qui se veut cohérent, pragmatique et facilement mobilisable. La richesse des échanges a progressivement permis de dégager des points de consensus, mais aussi des sujets de divergence. Les conclusions de cette concertation ont donné lieu à un rapport , qui figure en annexe de celui-ci.
S'agissant du volet « environnement normatif », les 23 réunions, qui se sont tenues entre octobre 2013 et février 2014 sur une durée totale de 80 heures, avaient pour mission de réajuster l'environnement normatif de l'accessibilité pour le rendre plus lisible, plus simple, et plus juste .
Comme pour les Ad'AP, ce réajustement s'appuie sur un dispositif concerté et équilibré entre les attentes et les contraintes de l'ensemble des acteurs concernés. Grâce là aussi à l'implication de tous les participants , des solutions consensuelles mais aussi des points de divergence ont émergé, retracés dans un rapport annexé à celui-ci.
3. Le premier volet : l'organisation des agendas d'accessibilité programmée (Ad'AP)
La création des agendas d'accessibilité programmée (Ad'AP) repose sur cinq piliers :
- une stratégie patrimoniale : l'Ad'AP est un document de programmation financière des travaux d'accessibilité, qui doit permettre aux opérateurs (Etat, collectivités territoriales, établissements publics, maîtres d'ouvrage privés) n'étant pas en conformité avec les règles d'accessibilité posées par la loi de 2005 de s'engager sur un calendrier précis. Cette programmation est structurée en diverses périodes opérationnelles et adossée à un plan de financement pluriannuel ;
- une démarche volontaire : l'Ad'AP, qui concerne aussi bien les ERP (toutes catégories comprises) que les réseaux de transport, est d'application volontaire. C'est aux maîtres d'ouvrage et aux opérateurs de se saisir de ce nouvel outil pour parvenir à respecter les règles d'accessibilité ;
- un dispositif d'exception : l'engagement dans une procédure d'Ad'AP entraîne la suspension de l'application de l'article L. 152-4 du code de la construction et de l'habitation relatif aux sanctions pénales en cas de non-respect des règles d'accessibilité. En revanche, les opérateurs qui font le choix de ne pas entrer dans une telle démarche restent soumis aux dispositions prévues par la loi de 2005 ;
- une logique partenariale : l'Ad'AP est élaboré dans un cadre concerté, associant le ou les maîtres d'ouvrage et les représentants des usagers (personnes handicapées, personnes âgées...). Le partenariat peut également être d'ordre financier, notamment lorsque plusieurs entités sont amenées à contribuer au financement des travaux d'accessibilité ;
- une procédure commune à tous les secteurs : quel que soit le maître d'ouvrage, la procédure d'élaboration et de suivi d'un Ad'AP est la même et ce, afin de pas imposer au secteur public ou privé des contraintes ou des règles qui ne seraient pas également applicables à l'autre secteur. En revanche, la procédure est allégée pour les ERP de 5 e catégorie (publics ou privés) dans la mesure où ces petites structures ne disposent pas des ressources internes suffisantes pour suivre des démarches administratives complexes.
Les Ad'AP seront signés par les acteurs qui engageront leur responsabilité financière dans les travaux de mise en accessibilité .
Trois situations pourront se rencontrer :
- pour les ERP relevant d'une collectivité publique, c'est le maire, le président de l'assemblée délibérante ou le délégataire de pouvoir qui pourra signer et déposer un Ad'AP ;
- pour les ERP relevant d'une entité privée, c'est l'exploitant qui signera et déposera l'Ad'AP pour la part des travaux qui relèvera de sa responsabilité et/ou le propriétaire du local ;
- en cas de cofinancement des travaux de mise en accessibilité d'un bâtiment, d'un patrimoine ou d'un service de transport de voyageurs, l'Ad'AP sera engagé sous l'animation ou l'autorité d'un chef de file et les différents partenaires cosigneront le document au titre de leur engagement financier respectif.
4. Le second volet : l'évolution des normes relatives à l'accessibilité
La concertation sur l'évolution de l'environnement normatif est parvenue à formuler de nombreuses propositions, qui poursuivent quatre impératifs :
- rendre plus lisibles et plus efficaces certaines dispositions réglementaires , trop souvent perçues comme un frein au progrès et à l'innovation ;
- privilégier la qualité d'usage plutôt que le strict respect de la norme ;
- mieux prendre en compte toutes les formes de handicap , conformément à l'objectif d'accessibilité universelle ;
- améliorer le suivi de la mise en accessibilité de la société, qui a fait défaut à la mise en oeuvre de la loi de 2005.
L'ensemble des propositions est retracé dans le rapport figurant en annexe de celui-ci.
C. LES ARBITRAGES GOUVERNEMENTAUX
Lors de la clôture des travaux de concertation, le 26 février dernier, le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, a confirmé, sur la base des deux rapports de conclusion, que les mesures de niveau législatif, comme la création des Ad'AP, feront l'objet d'un projet de loi d'habilitation à légiférer par ordonnance, comme il l'avait annoncé dès le mois de septembre 2013 à l'occasion du CIH, et que les autres mesures, notamment celles issues du chantier « environnement normatif », seront mises en oeuvre au niveau réglementaire dans le même calendrier resserré que celui des textes d'application des dispositions prises par ordonnance.
1. La mise en place des Ad'AP
a) L'Ad'AP : un outil attractif et crédible pour l'ensemble des parties prenantes
Outil cohérent et opérationnel, l'Ad'AP est le fruit d'un véritable équilibre entre les attentes légitimes des uns et les difficultés à faire rencontrées par les autres .
Pour votre rapporteure, il n'est en effet pas imaginable de retrouver, dans quelques années, la même situation que celle que nous connaissons aujourd'hui. Il faut donc que l'Ad'AP soit attractif et crédible aux yeux de chacun.
Attractif et crédible, l'Ad'AP l'est tout d'abord pour les associations de personnes handicapées en ce qu'il garantit que les objectifs de mise en accessibilité seront tenus :
- les dossiers d'engagement à entrer dans une procédure d'Ad'AP devront être déposés avant le 31 décembre 2014, puis devront être validés par le préfet ;
- l'engagement dans un Ad'AP est irréversible : un dossier validé devra être mené à son terme ;
- en l'absence d'Ad'AP, le non-respect de l'échéance du 1 er janvier 2015 sera, sauf dérogation validée, toujours passible des sanctions pénales prévues par la loi de 2005 ;
- il n'y aura pas d'« année blanche » : la programmation des travaux sera échelonnée sur une, deux ou trois périodes (1 à 3 ans/ 3 à 6 ans/ 6 à 9 ans) et, dès la première année, l'amélioration de l'accessibilité devra être constatée ;
- des points de contrôle régulier jalonneront toute la procédure : à la fin de la première année, puis au terme de chaque période ;
- des sanctions financières graduées seront appliquées en cas de non-respect des engagements pris dans le cadre de l'agenda (mauvaise foi, retard, carence) ;
- dans le domaine des transports, des obligations assorties de sanctions seront fixées en termes d'une part, de formation des personnels et d'information des usagers en situation de handicap, d'autre part, d'accessibilité du parc de matériel roulant routier.
Attractif et crédible, l'Ad'AP l'est ensuite pour les gestionnaires d'ERP et de services de transport en ce qu'il constitue une solution adaptée et réaliste pour se mettre en conformité avec la loi de 2005 :
- l'élaboration d'un Ad'AP permettra de ne pas s'exposer aux sanctions pénales instaurées par la loi de 2005 et de poursuivre au-delà du 1 er janvier 2015, en toute sécurité juridique, les travaux de mise en accessibilité ;
- la procédure d'Ad'AP sera simplifiée pour les ERP de 5 e catégorie, qui constituent la grande majorité des ERP ;
- les dossiers d'Ad'AP pourront être déposés dans un délai d'un an suivant la publication de l'ordonnance, à condition que l'engagement ait été pris avant le 31 décembre 2014 ;
- l'obligation d'accessibilité des points d'arrêt et des gares fera l'objet d'une priorisation ;
- le droit au transport des enfants handicapés scolarisés est réaffirmé autour du projet personnalisé de scolarisation (PPS).
Au final, c'est bien une démarche d'équilibre, de pragmatisme et de confiance raisonnée , ainsi que votre rapporteure le recommandait dans « Réussir 2015 », qui a prévalu.
Non seulement l'échéance du 1 er janvier 2015 n'est pas abandonnée mais, en outre, de nouveaux moyens sont mis en oeuvre pour poursuivre la dynamique au-delà de cette date .
b) L'accompagnement des acteurs dans leur démarche d'accessibilité
Conscient que la mise en oeuvre des Ad'AP va nécessiter un important effort de communication et de pédagogie, tant auprès des professionnels, que des personnes handicapées et de leurs représentants, le Gouvernement a engagé trois actions complémentaires :
- 1 000 ambassadeurs de l'accessibilité seront recrutés, dès cette année, dans le cadre du service civique pour orienter les acteurs et faire connaître la réforme de l'accessibilité ;
- un accompagnement financier sera proposé par la Caisse des dépôts et consignations et la Banque publique d'investissement (Bpifrance) aux collectivités locales et aux entreprises pour leurs travaux d'accessibilité ;
- une campagne de communication , d'abord à destination des professionnels, puis à destination du grand public, sera lancée dans les prochaines semaines pour sensibiliser aux enjeux de l'accessibilité et expliquer le nouveau dispositif des Ad'AP.
2. L'évolution de l'environnement normatif
L'ensemble des propositions issues du volet « environnement normatif » de la concertation ont été retenues par le Gouvernement.
Parmi celles-ci :
Une simplification de la réglementation pour la rendre plus efficace
- Les contraintes du cadre bâti seront prises en compte pour déterminer les normes applicables aux ERP existants en prévoyant dans la réglementation des mesures d'assouplissement (par exemple, une largeur de 1,40 m pour les allées dites « structurantes » et une largeur au moins égale à 1,05 m au sol pour les allées dites « secondaires ») ;
- Des solutions techniques alternatives aux normes réglementaires seront autorisées à condition de la démonstration, par l'ERP existant, que les « solutions équivalentes » proposées offrent le même niveau de service, et de la validation par la commission départementale de sécurité et d'accessibilité (CCDSA) ;
- Dans les commerces , l'installation d'une rampe amovible sera autorisée, en dernier ressort ;
- Dans les hôtels , les normes des chambres non adaptées seront revues pour les rendre en priorité visitables (pour pouvoir ouvrir la porte et entrer dans la chambre), et dans les restaurants, des « sanitaires pour tous » séparés des autres seront autorisés ;
- Les restaurants seront dispensés de la mise en accessibilité des mezzanines aux personnes en fauteuil (à condition qu'elles représentent moins de 25% de la capacité du restaurant et que les prestations soient servies à l'identique dans l'espace principal) ;
- Dans le secteur du logement , les règles d'accessibilité seront simplifiées pour un bâtiment comprenant deux logements superposés et les modifications demandées par l'acquéreur d'un logement acheté sur plan seront rendues possibles, dès lors que les personnes en fauteuil roulant puissent leur rendre visite.
Une meilleure prise en compte de toutes les formes de handicap
- La formation au handicap des personnels chargés de l'accueil et de la sécurité sera généralisée ;
- A l'instar du registre de sécurité, un registre d'accessibilité devra être renseigné par tous les ERP (neufs et existants, toutes catégories) pour préciser les modalités d'accès aux prestations des personnes handicapées, tous handicaps confondus (ainsi que les dérogations obtenues, le détail de l'Ad'AP et les attestations de formation du personnel) ;
- La sécurité des déplacements sera renforcée en rendant détectable le cheminement extérieur des ERP à la canne ou au pied et en la rendant repérable visuellement ou de manière sonore (notamment en développant l'installation de bandes d'éveil de vigilance) ;
- L'adaptation des logements sera facilitée grâce à la prise en charge par les bailleurs sociaux de travaux simples pour aménager les toilettes, et à la mise à disposition de rampes d'accès aux balcons ;
- Le dispositif des chiens guides et d'assistance sera élargi aux titulaires de la carte de priorité (50-79% d'invalidité) qui pourront bénéficier du nouveau certificat national destiné à faciliter leur accès aux lieux publics ;
- L'installation de boucles d'induction magnétique (dispositif permettant aux personnes sourdes ou malentendantes appareillées de mieux percevoir les sons) sera prévue dans au moins une salle de réunion des bâtiments neufs et dans les banques d'accueil des ERP neufs de 1 ère et 2 e catégories. Ces éléments ainsi que la qualité des boucles et de leur installation seront pris en compte dans la réglementation ;
- Le sous-titrage devra être activé sur les téléviseurs dans les lieux publics et un mode d'emploi du sous-titrage sera disponible dans les chambres d'hôtel ;
- Le repérage dans l'espace sera facilité en mettant en évidence les numéros de bâtiments, d'étage, de portes palières des logements et chambres d'hôtel ;
- Les salles de cinéma seront équipées pour diffuser le sous-titrage et l'audio-description des films ;
- Dans les hôtels , la chambre adaptée sera attribuée au dernier client accueilli lorsque l'hôtel est complet, et du matériel portatif sera prévu pour équiper les chambres non adaptées et occupées par des clients sourds ou malentendants et aveugles ou malvoyants (par exemple, un réveil lumineux) ;
- Une longueur des places de stationnement réservées sera déterminée pour les nouveaux emplacements et les places adaptées des nouvelles copropriétés seront plus facilement mises à disposition des personnes handicapées.
L'amélioration du suivi de l'accessibilité
- Les dérogations pour raisons économiques seront limitées dans le temps afin de réexaminer ultérieurement l'évolution du cadre bâti (actuellement, ces dérogations sont accordées à titre définitif) ;
- La réglementation indiquera les besoins des usagers et les objectifs à atteindre en matière de qualité d'usage avant de préciser, le cas échéant, les moyens retenus ;
- Des études et négociations seront poursuivies pour faire évoluer la réglementation, notamment sur les espaces d'attente sécurisée (abri pour protéger les personnes handicapées en cas d'incendie car l'ascenseur ne peut pas fonctionner) - qui représentent un quart des investissements lors des travaux - et sur la qualité acoustique ;
- Les commissions consultatives départementales de sécurité et d'accessibilité (CCDSA) deviennent paritaires : les associations de personnes handicapées et les représentants du secteur des ERP seront à égalité dans les CCDSA. La nomination de suppléants sera autorisée et les demandes de dérogations devront désormais être examinées par les seules sous-commissions départementales devenues paritaires. Les CCDSA pourront également émettre des avis avec des prescriptions.
3. La promotion de l'accessibilité au sein de l'ensemble des politiques publiques
L'accessibilité ne se résumant pas au cadre bâti ou aux transports, un plan d'action plus large a été engagé par le Gouvernement pour garantir aux personnes handicapées le plein exercice de leur citoyenneté et leur autonomie dans la vie de tous les jours.
Plan d'action gouvernemental en faveur de l'accessibilité
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III. UN PROJET DE LOI D'HABILITATION POUR METTRE EN PLACE LES AGENDAS D'ACCESSIBILITÉ PROGRAMMÉE ET ADAPTER CERTAINES DISPOSITIONS DE LA LOI DE 2005
A. LE RECOURS AUX ORDONNANCES
1. Une méthode suscitant traditionnellement la réticence du Parlement...
En application de l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement peut, pour l'exécution de son programme, demander au Parlement l'autorisation de prendre par ordonnance pendant un délai limité, des mesures qui relèvent normalement du domaine de la loi. Il s'agit d'une autorisation - dite habilitation législative - dont le Gouvernement ne doit pas abuser.
En effet, bien que strictement encadrée par le Constitution, la procédure de recours aux ordonnances restreint de facto les prérogatives du Parlement. Le Conseil constitutionnel a d'ailleurs rappelé, dans sa jurisprudence, qu'une habilitation ne peut être d'origine parlementaire, ce qui limite nécessairement la capacité d'initiative du législateur lorsqu'un projet de loi d'habilitation lui est soumis.
2. ... mais justifiée par l'urgence et la technicité du dossier de l'accessibilité
Si le recours aux ordonnances ne saurait être un mode habituel d'élaboration de la loi, il est cependant justifié dans des domaines précisément circonscrits, comme celui de l'accessibilité .
Votre rapporteure y voit quatre raisons :
- premièrement, l'urgence de la situation . A quelques mois de l'échéance du 1 er janvier 2015, seules les ordonnances permettent de rester dans les temps : les Ad'AP doivent être rapidement opérationnels afin de permettre aux acteurs concernés de faire part, avant le 31 décembre 2014, de leur intention de recourir à ce nouvel outil. A défaut, ce sont les sanctions pénales prévues par la loi de 2005 qui s'appliqueront ;
- deuxièmement, la technicité du sujet . La concertation l'a montré, l'accessibilité est un dossier d'une grande complexité, sur lequel il est très difficile de trouver un équilibre entre les positions des uns et des autres. Les participants y sont parvenus, mais la confiance mutuelle demeure fragile ;
- troisièmement, le risque d'atteinte à la loi de 2005 . Plusieurs initiatives passées l'ont malheureusement démontré, la tentation peut être grande de revenir sur les acquis de ce texte ;
- quatrièmement, l'approbation unanime du monde associatif qui voit, dans cette méthode, le seul moyen de mettre rapidement en place les outils nécessaires à la poursuite de la dynamique en cours.
B. LE CONTENU DES HABILITATIONS DEMANDÉES PAR LE GOUVERNEMENT
Le présent projet de loi d'habilitation se compose de quatre articles.
L' article 1 er habilite le Gouvernement à créer, pour les ERP, le nouveau dispositif des Ad'AP .
Au-delà du contenu de l'agenda, l'ordonnance définira les procédures applicables à son dépôt, à sa validation et au suivi de l'avancement des travaux prévus. Elle précisera également les délais de réalisation des actions de mise en accessibilité et le régime des sanctions administratives encourues en cas de non-respect des engagements pris.
L'article 1 er permet également d'adapter, sur la base des recommandations de la concertation, certaines obligations législatives prévues par la loi de 2005 en matière d'accessibilité des ERP et des bâtiments d'habitation.
L' article 2 habilite le Gouvernement à instituer, pour les services de transport public de voyageurs (routier et ferroviaire), un dispositif comparable à celui de l'Ad'AP pour les ERP : le schéma directeur d'accessibilité - agenda d'accessibilité programmée ou SDA/Ad'AP .
Sur le modèle de l'article 1 er , l'ordonnance définira l'ensemble des procédures applicables au SDA/Ad'AP (contenu, dépôt, validation, suivi, délais, sanctions, etc.).
Prenant appui sur les conclusions de la concertation, l'article 2 prévoit aussi une habilitation pour adapter les exigences incombant aux services de transport public de voyageurs en matière de points d'arrêt et d'accessibilité du matériel roulant.
L' article 3 habilite le Gouvernement à prendre diverses mesures relevant du domaine de la loi et correspondant aux préconisations de la concertation , parmi lesquelles :
- l'assouplissement, pour les petites communes, de l'obligation, posée par la loi de 2005, d'élaborer un plan de mise en accessibilité de la voirie et des aménagements des espaces publics (Pave) ;
- l'autorisation plus large des chiens guides d'aveugle et les chiens d'assistance des personnes handicapées dans les transports et les lieux publics ;
- l'élargissement de la composition et des missions des commissions communales et intercommunales pour l'accessibilité aux personnes handicapées, ainsi que le changement de leur dénomination ;
- la création d'un fonds dédié à l'accompagnement de l'accessibilité universelle, dont les ressources proviendront des sanctions financières prononcées dans le cadre des Ad'AP et des SDA/Ad'AP ;
- l'adaptation à l'outre-mer de certaines des mesures prévues aux articles 1 er à 3.
Enfin, l' article 4 fixe à cinq mois , suivant la publication de la loi, le délai dans lequel les ordonnances devront être prises par le Gouvernement . Il fixe également à cinq mois , à compter de la publication de chaque ordonnance, le délai de dépôt du projet de loi de ratification correspondant .
Le Gouvernement a d'ores et déjà fait part de son intention de publier les ordonnances au début de l'été.
EXAMEN DES ARTICLES
Article 1er - Demande d'habilitation en vue de mettre en oeuvre les agendas d'accessibilité programmée pour les établissements recevant du public et de clarifier la réglementation relative à la mise en accessibilité de ces établissements ainsi que des bâtiments d'habitation
Objet : Cet article a pour objet de solliciter plusieurs habilitations en vue de créer les agendas d'accessibilité programmée pour les établissements recevant du public et de clarifier certaines normes relatives à la mise en accessibilité de ces établissements ainsi que des bâtiments d'habitation.
I - Le dispositif proposé
L'article 1 er du projet de loi sollicite plusieurs habilitations en vue, d'une part, de mettre en oeuvre les agendas d'accessibilité programmée (Ad'AP) pour les établissements recevant du public (ERP) et les installations ouvertes au public, d'autre part, de clarifier la réglementation relative à la mise en accessibilité des ERP et des bâtiments d'habitation, conformément aux préconisations issues de la concertation nationale.
La création des agendas d'accessibilité programmée (Ad'AP) pour les ERP et les installations ouvertes au public
Dans son 1° , l'article 1 er du projet de loi sollicite une habilitation pour mettre en place , à destination des propriétaires et exploitants d'ERP et d'installations ouvertes au public 18 ( * ) , ce nouvel outil que constitue l'agenda d'accessibilité programmée ou Ad'AP .
Qu'est-ce qu'un Ad'AP ? ? La loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées fait obligation de rendre accessibles tous les ERP à échéance du 1 er janvier 2015 . ? La loi instaure un régime de sanctions administratives et pénales pouvant être déclenché en cas de non-respect de cette exigence : |
- sanctions administratives : fermeture par l'autorité administrative compétente d'un ERP qui n'aurait pas respecté ses obligations d'accessibilité ; remboursement des aides publiques à la construction à la collectivité qui les a attribuées si elle s'aperçoit qu'a posteriori les règles d'accessibilité n'ont pas été respectées. |
- sanctions pénales : amende maximale de 45 000 euros pour une personne physique et de 225 000 euros pour une personne morale, ainsi que six mois d'emprisonnement en cas de récidive (article L. 152-4 du code de la construction et de l'habitation). Cette sanction est applicable aux maîtres d'ouvrage, aux architectes, aux responsables de l'exécution de travaux. ? L'Ad'AP est un outil qui pourra être utilisé par un propriétaire ou un exploitant d'ERP ou d'installation ouverte au public pour mettre en accessibilité son patrimoine dans un calendrier pouvant aller au-delà de la date butoir du 1 er janvier 2015 . Il décrira les travaux pluriannuels de mise en accessibilité pour un ou plusieurs établissements ou installations et en précisera la programmation financière. ? L'Ad'AP est un acte d'engagement volontaire , qui ne se substitue pas à la loi de 2005 , mais la complète. ? Les dossiers d'engagement à entrer dans une démarche d'Ad'AP devront être déposés avant le 31 décembre 2014 ou, au plus tard, douze mois après la publication de l'ordonnance. Les projets d'Ad'AP devront être validés par le préfet . Cette validation permettra d'entériner l'échéancier pour les travaux de mise en accessibilité. ? L'Ad'AP est un engagement irréversible . Un dossier validé devra être mené à son terme. Pour cela, le dispositif comportera des points de contrôle régulier et une validation à son terme. ? L'Ad'AP sera construit autour d' 1, 2 ou 3 périodes de travaux servant de points d'appui au contrôle. Ces périodes pourront aller de 1 à 3 ans , de 3 à 6 ans , et exceptionnellement de 6 à 9 ans . ? Des sanctions administratives financières graduées seront appliquées en cas de non-respect de l'Ad'AP. Le produit des sanctions sera réinvesti au profit de l'accessibilité universelle. |
L'ordonnance définira les différents aspects de la procédure des Ad'AP, à savoir :
- le contenu des agendas ( a) ) ;
- les modalités et délais de présentation des agendas à l'autorité administrative ( b) ) ;
- les délais de réalisation des actions nécessaires à l'accessibilité avec, le cas échéant, les modalités de suspension ou de prorogation de ces délais (c)) ;
- les obligations du propriétaire ou de l'exploitant en matière d'information de l'autorité administrative et de la commission consultative départementale de sécurité et d'accessibilité (CCDSA) sur la mise en oeuvre de l'agenda ( d) ) ;
- les sanctions administratives encourues ( e) ) par le propriétaire ou l'exploitant en cas de non-respect des obligations qui lui incombent en termes de délais ( b) et c) ) ou d'information ( d) ).
Le régime des sanctions pénales pour non-respect des règles d'accessibilité
Dans son 2° , l'article 1 er du projet de loi sollicite une habilitation en vue de définir les conditions dans lesquelles les propriétaires ou exploitants d'ERP ou d'installation ouverte au public sont soumis aux sanctions pénales prévues par la loi de 2005 en cas de non-respect des règles d'accessibilité 19 ( * ) .
L'élaboration d'un Ad'AP permettra de ne pas s'exposer aux sanctions pénales instaurées par la loi de 2005 et de mettre en oeuvre au-delà du 1 er janvier 2015, en toute sécurité juridique, les engagements pris dans le cadre de l'agenda. En revanche, en l'absence d'agenda, le non-respect de l'échéance du 1 er janvier 2015 sera, sauf dérogation validée, toujours passible des sanctions pénales.
L'ordonnance sera également l'occasion de préciser la rédaction de l'article L. 152-4 du code de la construction et de l'habitation, ainsi que l'a recommandé le Conseil d'Etat, afin de conforter l'intention du législateur de 2005.
La clarification et l'adaptation des règles d'accessibilité applicables aux ERP existants
Dans son 3° , l'article 1 er du projet de loi sollicite une habilitation afin de clarifier et d'adapter les règles d'accessibilité applicables aux ERP existants, conformément aux préconisations de la concertation sur l'environnement normatif de l'accessibilité 20 ( * ) . Il s'agit ainsi de reconnaître les contraintes (architecturales notamment) auxquelles sont confrontés les propriétaires ou gestionnaires d'ERP existants tout en garantissant un niveau d'accessibilité acceptable pour les usagers .
Deux sujets seront traités par l'ordonnance.
Premièrement, la clarification des règles d'accessibilité s'appliquant aux ERP existants. Pour rappel, la loi de 2005 a prévu que des dérogations peuvent être autorisées par le préfet dans trois cas : pour impossibilité technique avérée (ITA), pour des contraintes liées à la préservation du patrimoine architectural, pour disproportion manifeste entre les améliorations apportées et leurs conséquences. La concertation a conclu à la nécessité de mieux prendre en compte les difficultés financières auxquelles peuvent être confrontés les opérateurs, publics ou privés, pour la réalisation des travaux de mise en accessibilité. Dans cet objectif, elle s'est accordée sur la possibilité de suspendre les délais jusqu'à retour à meilleure fortune, sous réserve que cette dérogation soit strictement encadrée. Elle a également proposé d'affiner la notion de « disproportion manifeste » en dégageant trois catégories : l'impossibilité pour un établissement de financer les travaux d'accessibilité ; l'impact des travaux sur la viabilité économique future de l'établissement ; la nécessité d'une approche raisonnée de mise en accessibilité, notamment en cas de rupture de la chaîne de déplacement.
Deuxièmement, l'adaptation de la mise en oeuvre de l'obligation de mise en accessibilité des ERP situés dans des immeubles en copropriété. Certains travaux de mise en accessibilité peuvent en effet nécessiter l'accord de l'assemblée générale des copropriétaires. Aussi, la concertation a considéré qu'un refus argumenté de la copropriété devait être considéré comme justifiant d'une dérogation aux règles d'accessibilité sollicitée par un propriétaire ou un gestionnaire d'ERP.
L'évolution des règles applicables aux travaux modificatifs demandés par l'acquéreur d'un logement vendu en état futur d'achèvement
Dans son 4° , l'article 1 er du projet de loi sollicite une habilitation en vue d' adapter les règles applicables aux travaux modificatifs demandés ou effectués par un acquéreur d'un logement (maison, appartement) vendu en état futur d'achèvement .
Dans le cadre des ventes en état futur d'achèvement (VEFA), les travaux modificatifs de l'acquéreur (TMA) correspondent aux modifications demandées par le client sur son futur logement par rapport au plan d'origine (par exemple, cloisonnement, prises électriques supplémentaires, gamme de carrelage supérieure, etc.).
Or, le panel de TMA est actuellement limité par la réglementation sur l'accessibilité : les TMA envisagés par l'acquéreur, qu'il soit handicapé ou non, doivent en effet respecter les prescriptions techniques d'accessibilité. Dans le cas contraire, l'attestation de conformité aux règles d'accessibilité signalera, à la fin des travaux, des non-conformités et la responsabilité de l'acquéreur pourra être engagée.
Lors de la concertation, il a été recommandé qu'un nouvel équilibre soit trouvé entre, d'une part, le respect de la propriété individuelle, d'autre part, la recherche d'une meilleure intégration sociale des personnes handicapées. En conséquence, le groupe de travail a proposé d'autoriser les travaux modificatifs de l'acquéreur pour autant qu'ils garantissent une « visitabilité » du logement, à savoir une accessibilité de l'entrée, du séjour et de la circulation qui dessert ce dernier, et une adaptabilité du cabinet d'aisance. Tel sera l'objet de l'habilitation demandée.
La gestion des places de stationnement adaptées dans les nouveaux immeubles d'habilitation
Dans son 5° , l'article 1 er du projet de loi sollicite une habilitation afin de prévoir l'obligation d'inclure dans les parties communes des nouveaux immeubles d'habitation tout ou partie des places de stationnement adaptées aux véhicules des personnes handicapées .
Contrairement aux ERP et à la voirie, la réglementation relative à l'accessibilité des logements ne prévoit pas de places de stationnement réservées, mais seulement des places adaptées, c'est-à-dire d'une largeur de 3,30 mètres. Ces dernières peuvent être occupées par n'importe quel automobiliste.
La gestion des places de stationnement adaptées se révèle, au quotidien, particulièrement problématique pour les habitants handicapés. En effet, lorsque dans le cadre d'une opération immobilière, un logement et une place de stationnement adaptée sont vendus dans un lot commun à une personne non handicapée, cela revient à diminuer le nombre de places adaptées disponibles pour les futurs acquéreurs handicapés.
Afin de résoudre ce problème, la concertation a préconisé d'intégrer dans les parties communes de la copropriété au moins une place de stationnement adaptée et de préciser, dans le règlement intérieur de la copropriété, les modalités d'accès et de location de cette place.
II - La position de la commission
Votre commission approuve la demande d'habilitation formulée au présent article, dont le contenu est conforme aux conclusions de la concertation nationale sur l'accessibilité, tant s'agissant de la procédure des Ad'AP que de l'ajustement de l'environnement normatif.
Elle insiste sur le fait que le dispositif Ad'AP est le seul à même de poursuivre la dynamique d'accessibilité au-delà du 1 er janvier 2015.
En conséquence, elle a adopté cet article sans modification.
Article 2 - Demande d'habilitation en vue d'adapter les exigences d'accessibilité pour les services de transport public de voyageurs et de créer le schéma directeur d'accessibilité - agenda d'accessibilité programmée
Objet : Cet article a pour objet de solliciter plusieurs habilitations en vue de modifier les exigences d'accessibilité pour les services de transport public de voyageurs et de mettre en oeuvre, pour ces services, le nouveau dispositif du schéma directeur d'accessibilité - agenda d'accessibilité programmée.
I - Le dispositif proposé
L'article 2 du projet de loi sollicite plusieurs habilitations afin, d'une part, d'adapter les exigences d'accessibilité incombant aux services de transport public de voyageurs (routier et ferroviaire), d'autre part, de créer pour le secteur des transports un dispositif comparable à celui de l'agenda d'accessibilité programmée (Ad'AP) pour les établissements recevant du public (ERP).
L'adaptation des obligations relatives à l'accessibilité des services de transport routier de voyageurs
Dans son 1° , l'article 2 sollicite une habilitation pour redéfinir les obligations en matière de points d'arrêt et d'accessibilité du matériel roulant pour les services de transport public de voyageurs .
L'ordonnance indiquera tout d'abord que les points d'arrêt à aménager sont ceux qui revêtent un caractère prioritaire à l'égard de critères déterminés ( a) ). Les travaux de concertation ont en effet permis de retenir une typologie des arrêts à rendre accessibles par famille de priorités (« opportunité et contexte », « configuration du réseau », « environnement local ») 21 ( * ) .
Elle définira ensuite les impossibilités techniques, mentionnées à l'article L. 1112-4 du code de transports, qui peuvent empêcher la mise en accessibilité de ces points d'arrêt, ainsi que les modalités de fonctionnement des transports de substitution qui doivent alors être mis en place ( c) ). Les échanges lors de la concertation ont permis de dégager deux critères pour caractériser les « impossibilités techniques avérées » : une pente trop forte et une emprise trop étroite 22 ( * ) .
Elle clarifiera également le périmètre d'application des obligations fixées par la loi de 2005 en matière d'accessibilité du matériel roulant routier à l'occasion de son renouvellement, et instituera une nouvelle obligation relative à la proportion du parc de matériel roulant routier devant être accessible, lorsque celui-ci est utilisé dans le cadre d'un service de transport public routier de voyageurs ( b) ).
L'ordonnance permettra en outre une plus grande transparence pour l'exécution de ces obligations en prévoyant, d'une part, qu'une convention de services de transport public (marchés publics ou délégations de service public routier) spécifie la situation de soumissionnaires vis-à-vis de ces obligations, d'autre part, que l'autorité organisatrice des transports (AOT) assure un contrôle effectif sur la manière dont sont mises en oeuvre ces obligations à travers une délibération annuelle sur l'exécution du service de transport public de voyageurs ( e) ).
Elle modifiera, par ailleurs, la dénomination de la procédure de signalement des obstacles à la libre circulation des personnes à mobilité réduite, créée par la loi de 2005 et codifiée à l'article L. 1112-7 du code des transports dite « procédure de dépôt de plainte », afin d'en clarifier la nature ( f) ).
Enfin, elle définira un régime spécifique de mise en oeuvre de l'obligation d'accessibilité du service de transport scolaire ( d) ), qui tiendra compte des dispositions de l'article L. 112-2 du code de l'éducation relatives au parcours scolaire de l'enfant handicapé. Conformément aux conclusions de la concertation, les obligations de mise en accessibilité, tant en ce qui concerne les point d'arrêt que le matériel roulant, seront centrées sur les demandes individuelles d'aménagement formulées par les représentants légaux des enfants handicapés scolarisés à temps plein, compte tenu des préconisations du projet personnalisé de scolarisation.
L'adaptation des obligations relatives à l'accessibilité des services de transport ferroviaire de voyageurs
Dans son 2° , l'article 2 sollicite une habilitation afin d' adapter les obligations d'accessibilité relatives aux gares et autres points d'arrêt ferroviaires , dont certains bâtiments ont le statut d'établissement recevant du public (ERP).
L'ordonnance précisera ceux qui sont à aménager en raison de leur caractère prioritaire au regard de critères déterminés ( a) ) et indiquera les cas dans lesquels l'obligation d'accessibilité pourra être mise en oeuvre par des transports de substitution ( b) ). Elle adaptera, en conséquence, les conditions d'application des sanctions pénales prévues par la loi de 2005 pour non-respect de l'obligation d'accessibilité des ERP ( c) ).
La création du dispositif « schéma directeur d'accessibilité - agenda d'accessibilité programmée » (SDA/Ad'AP)
Dans son 3° , l'article 2 sollicite une habilitation afin de créer, pour les services de transport public de voyageurs, un dispositif comparable à celui de l'agenda d'accessibilité programmée (Ad'AP) pour les établissements recevant du public (ERP) : le schéma directeur d'accessibilité - agenda d'accessibilité programmée ou SDA/Ad'AP .
Qu'est-ce qu'un SDA/Ad'AP ?
? En application de la loi du 11 février 2005, les services de transport routier et ferroviaire de voyageurs sont tenus aux obligations suivantes :
- l'adoption d'un schéma directeur d'accessibilité (SDA) par l'autorité organisatrice de transport (AOT) avant le 12 février 2008 ;
- la mise en accessibilité des infrastructures au plus tard pour le 13 février 2015 et le déploiement, si nécessaire, de transport de substitution ;
- l'acquisition de matériel accessible à l'occasion de son renouvellement.
? La loi de 2005 n'a créé aucune sanction en cas de non-respect de l'obligation d'élaborer un SDA. En revanche, les infrastructures de transport que constituent les gares (routières et ferroviaires) sont, en tant qu'ERP, soumises aux exigences d'accessibilité introduites par la loi et au régime de sanctions applicables aux ERP.
? Sur le modèle de l'Ad'AP prévu pour les ERP, l'Ad'AP appliqué au secteur des transports de voyageurs est un outil qui pourra être utilisé par une AOT pour rendre accessible ses infrastructures dans un calendrier pouvant aller au-delà de la date butoir du 13 février 2015 .
? L'Ad'AP transport est conçu comme un complément au SDA , permettant sa mise à jour (voire son élaboration s'il n'a pas été réalisé) et l'engagement des financeurs sur un échéancier précis. Il est dénommé SDA/Ad'AP.
? Afin d'assurer la cohérence des travaux de mise en accessibilité, une AOT chef de file du SDA/Ad'AP pourra être désignée.
? La procédure de préparation, de dépôt et de validation des SDA/Ad'AP est identique à celle des Ad'AP ERP.
? La mise en oeuvre des SDA/Ad'AP s'inscrit dans le calendrier des Ad'AP ERP, tout en tenant compte des spécificités du secteur des transports :
- une durée maximale de 3 ans pour le transport urbain ;
- une durée maximale alliant deux périodes de 3 ans chacune, pour le transport interurbain ;
- une durée maximale alliant trois périodes de 3 ans chacune, pour le transport ferroviaire .
? Des sanctions administratives financières seront appliquées en cas de mise en oeuvre incomplète des obligations de formation des personnels et d'information des usagers.
Comme pour les Ad'AP prévus pour les ERP (cf. article 1 er du projet de loi), l'ordonnance définira les différents aspects de la procédure des SDA/Ad'AP, à savoir :
- le contenu des SDA/Ad'AP et leur articulation avec les SDA déjà adoptés par les autorités organisatrices des transports ( a) ) ;
- les modalités et délais de présentation des SDA/Ad'AP à l'autorité administrative ( b) ) ;
- le délai maximal de réalisation des mesures prévues par le SDA/Ad'AP et les modalités de suspension ou de prorogation de ce délai ( c) ) ;
- les obligations de l'autorité organisatrice de transport en matière d'information de l'autorité administrative et de la commission consultative départementale de sécurité et d'accessibilité (CCDSA) sur la mise en oeuvre du SDA/Ad'AP ( d) ) ;
- les sanctions administratives encourues par l'autorité organisatrice de transport en cas de non-respect des délais de présentation du SDA/Ad'AP à l'autorité administrative ou en cas de manquement aux obligations en matière de formation du personnel et d'information des usagers figurant dans le SDA/Ad'AP ( e) ).
II - La position de la commission
Votre commission approuve la demande d'habilitation formulée au présent article, dont le contenu est conforme aux conclusions de la concertation nationale sur l'accessibilité, tant s'agissant de la procédure des SDA/Ad'AP que de l'ajustement de l'environnement normatif.
En conséquence, elle a adopté cet article sans modification .
Article 3 - Demande d'habilitation en vue de mettre en oeuvre diverses mesures proposées par la concertation nationale sur l'accessibilité et d'adapter certaines dispositions à l'outre-mer
Objet : Cet article a pour objet de solliciter plusieurs habilitations en vue de prendre diverses mesures correspondant aux conclusions de la concertation nationale sur l'accessibilité et d'adapter certaines dispositions du présent texte à l'outre-mer.
I - Le dispositif proposé
L'article 3 du projet de loi sollicite plusieurs habilitations en vue, d'une part, de mettre en oeuvre diverses mesures relevant du domaine de la loi et correspondant aux conclusions de la concertation nationale, d'autre part, d'adapter certaines dispositions à l'outre-mer.
Le 1° prévoit que l'ordonnance fixe le seuil démographique en dessous duquel l'élaboration par une commune du plan de mise en accessibilité de la voirie et des aménagements des espaces publics (Pave) , mentionné à l'article 45 de la loi du 11 février 2005 23 ( * ) , est facultative . Les participants à la concertation ont en effet pris acte des difficultés des petites communes à élaborer un tel document de programmation et de planification : leurs conseils municipaux ne disposent pas des ressources techniques en interne, ni des crédits suffisants pour recruter des bureaux d'études qui pourraient les assister dans cette tâche. Aussi, le seuil devrait-il être fixé à 500 habitants.
Dans le même esprit, le 2° prévoit que l'ordonnance fixe le seuil démographique en dessous duquel l'élaboration par une commune du Pave peut être circonscrite à la programmation des travaux ou équipements d'accessibilité relatifs aux voies les plus fréquentées . Ce seuil devrait être fixé à 1 000 habitants.
Le 3° habilite le Gouvernement à autoriser plus largement l'accès des chiens guides d'aveugle et des chiens d'assistance des personnes handicapées dans les transports et les lieux publics . Bien que la loi de 2005 réaffirme le principe du libre accès des lieux ouverts au public à ces chiens, de nombreux refus sont encore opposés aux personnes handicapées accompagnées de leurs chiens. Il est donc nécessaire d'aplanir ces difficultés afin de garantir une réelle accessibilité de tous les lieux publics et une liberté de circulation pleine et entière pour ces personnes.
Le 4° prévoit que l'ordonnance modifie la dénomination des commissions communales et intercommunales pour l'accessibilité aux personnes handicapées (CCAPH-CIAPH), créées par la loi de 2005, élargisse leur composition aux représentants des personnes âgées et à des représentants des acteurs économiques, et complète leurs missions afin de tenir compte de la création des Ad'AP et des SDA/Ad'AP.
Le 5° habilite le Gouvernement à créer un fonds dédié à l'accompagnement de l'accessibilité universelle , dont les ressources proviendront des sanctions financières prononcées dans le cadre de la procédure des Ad'AP et des SDA/Ad'AP. Selon les conclusions de la concertation, ce fonds pourra être mobilisé par les maîtres d'ouvrage en grande difficulté financière afin de leur permettre d'engager des travaux de mise en accessibilité. Il pourra aussi, par le biais d'appels à candidatures, favoriser des actions de recherche et de développement en matière d'accessibilité universelle.
Le 6° prévoit que l'ordonnance mette en cohérence l'article 45 de la loi du 11 février 2005, relatif à l'accessibilité de la chaîne de déplacement, avec les modifications qui seront prises sur le fondement des habilitations prévues aux articles 1 er et 2 , notamment celles concernant les exigences d'accessibilité pour les services de transport public de voyageurs.
Enfin, le 7° habilite le Gouvernement à prendre les mesures permettant, d'une part, d'étendre et d'adapter à Mayotte les dispositions du code des transports relatives à l'accessibilité pour les personnes handicapées et celles de la loi n° 87-588 du 30 juillet 1987 portant diverses mesures d'ordre social relatives à l'accès des chiens guides d'aveugle et des chiens d'assistance des personnes handicapées aux transports et lieux publics, d'autre part, de procéder aux adaptations nécessaires des dispositions prises en application des articles 1 à 3 du présent projet de loi concernant le département de Mayotte et les collectivités d'outre-mer de Saint-Martin, de Saint-Barthélemy et de Saint-Pierre-et-Miquelon .
II - La position de la commission
Votre commission approuve la demande d'habilitation formulée au présent article, dont le contenu est conforme aux conclusions de la concertation nationale sur l'accessibilité.
En conséquence, elle a adopté cet article sans modification .
Article 4 - Délais d'habilitation et de ratification des ordonnances
Objet : Cet article a pour objet de fixer les délais d'habilitation et de ratification des ordonnances.
I - Le dispositif proposé
L'article 4 du projet de loi fixe à cinq mois suivant la publication de la loi le délai dans lequel les ordonnances devront être prises par le Gouvernement.
Il fixe également à cinq mois, à compter de la publication de chaque ordonnance, le délai de dépôt du projet de loi de ratification correspondant.
Le Gouvernement a d'ores et déjà fait part de son intention de publier les ordonnances au début de l'été.
II - La position de la commission
Votre commission rappelle qu'à quelques mois de l'échéance du 1 er janvier 2015, il y a urgence à mettre en place le dispositif des Ad'AP. Ceux-ci doivent en effet être opérationnels très rapidement afin de permettre aux acteurs concernés de faire part, avant le 31 décembre 2014, de leur intention de recourir à ce nouvel outil.
En conséquence, elle a adopté cet article sans modification .
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mercredi 16 avril 2014, sous la présidence de Mme Annie David, présidente, la commission examine le rapport de Mme Claire-Lise Campion sur le projet de loi n° 447 (2013-2014) habilitant le Gouvernement à adopter des mesures législatives pour la mise en accessibilité des établissements recevant du public, des transports publics, des bâtiments d'habitation et de la voirie pour les personnes handicapées.
Mme Annie David, présidente . - Nous poursuivons notre matinée de travail par l'examen du projet de loi n° 447 (2013-2014) habilitant le Gouvernement à adopter des mesures législatives pour la mise en accessibilité des établissements recevant du public, des transports publics, des bâtiments d'habitation et de la voirie pour les personnes handicapées.
Mme Claire-Lise Campion, rapporteure . - Ce projet de loi est le fruit d'un long cheminement sur lequel je souhaite insister avant de vous présenter le contenu même de ce texte.
La question de l'accessibilité a pris corps dans le débat public à l'occasion de la loi de 1975 d'orientation en faveur des personnes handicapées qui, certes, avait fixé des objectifs prometteurs mais ne s'était pas donné les moyens d'y parvenir. Il a fallu attendre trente ans et l'adoption de la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées pour qu'une nouvelle étape soit franchie. La notion d'accessibilité est alors étendue à tous les types de handicap (mental, sensoriel, psychique, cognitif, polyhandicap...) et à tous les domaines de la vie en société (cadre bâti, voirie, espaces publics, transport, citoyenneté, école, services publics, loisirs...). Et cela au bénéfice de l'ensemble de la population.
On parle désormais d'accessibilité universelle pour désigner le processus visant à éliminer toutes les barrières qui peuvent limiter une personne dans l'accomplissement de ses activités quotidiennes. Cette démarche s'adresse non seulement aux personnes atteintes d'un handicap, mais aussi à toute personne pouvant être confrontée, un jour ou l'autre, à une difficulté de déplacement, qu'elle soit temporaire ou durable. Au regard du vieillissement de la population, cette approche transversale revêt un enjeu considérable.
Loi ambitieuse, la loi de 2005 a posé un principe fort : l'obligation de mise en accessibilité du cadre bâti et des transports à l'horizon 2015. En fixant ce cap, elle a indéniablement permis d'opérer un changement d'état d'esprit dans notre société, de porter un regard différent sur le handicap. Des efforts incontestables, qui doivent être salués, ont été déployés par les acteurs concernés pour faire avancer l'accessibilité. Les progrès sont tangibles tant en matière de logements neufs, d'établissements recevant du public (ERP) que de transports.
Pour autant, la France ne sera pas au rendez-vous du 1 er janvier 2015. Ce constat, lucide, Isabelle Debré et moi-même l'avons posé dès juillet 2012 à l'occasion de la remise de notre rapport sur l'application de la loi de 2005 à la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois. Quelques mois plus tard, une mission conjointe du conseil général de l'environnement et du développement durable, de l'inspection générale des affaires sociales et du contrôle général économique et financier parvenait à la même conclusion.
Plusieurs raisons expliquent notre retard : un délai de parution des décrets plus long que prévu, un impact financier des travaux à mener mal voire non évalué, une mauvaise appréciation des délais nécessaires à la réalisation de l'ensemble des travaux, une réglementation trop complexe, et un défaut de portage politique. Car après la promulgation de la loi et en dehors des deux conférences nationales du handicap, l'insuffisance de l'impulsion politique n'a pas permis de mobiliser les acteurs de terrain, ni d'assurer une appropriation suffisante des enjeux d'accessibilité.
Cette volonté de suivi et d'accompagnement est désormais au rendez-vous. La nécessité de poursuivre l'adaptation de notre société, en vue de la rendre plus inclusive, a en effet amené le Gouvernement à faire de l'accessibilité l'une de ses priorités. Dès octobre 2012, le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, m'a confié une mission afin de faire le point sur l'état d'avancement de ce dossier et de rechercher, en concertation avec l'ensemble des acteurs, les solutions permettant à notre pays de répondre le mieux possible aux attentes légitimes suscitées par la loi de 2005. Je lui ai remis mon rapport, intitulé « Réussir 2015 », le 1 er mars 2013. Parmi les quarante propositions qu'il contient, deux mesures se distinguent plus particulièrement : la mise en place des agendas d'accessibilité programmée ou Ad'AP, documents d'engagement et de programmation décidés par les maîtres d'ouvrage, et l'ajustement, dans la concertation, des normes d'accessibilité qui se révèlent peu opérationnelles.
C'est sur la base de « Réussir 2015 » que le Premier ministre a décidé, lors du comité interministériel du handicap réuni pour la première fois le 25 septembre 2013, d'ouvrir, dès le mois suivant, deux chantiers de concertation afin de faire évoluer de manière consensuelle le cadre juridique de l'accessibilité : un premier sur la mise en place, par voie d'ordonnance, du nouvel outil Ad'AP pour poursuivre la dynamique engagée par la loi de 2005 ; un second sur les normes d'accessibilité du cadre bâti, de la voirie et des transports pour les adapter à l'évolution des techniques, aux besoins des personnes handicapées et aux contraintes des opérateurs.
A la demande du Premier ministre, j'ai assuré la présidence de cette concertation, qui s'est déroulée d'octobre 2013 à février 2014, en collaboration avec la déléguée ministérielle à l'accessibilité. Permettez-moi de m'arrêter quelques instants sur ce processus inédit, qui constitue le point de départ du projet de loi qui nous est aujourd'hui soumis.
Cette concertation, qualifiée par tous de moment historique, a été l'occasion, pour la première fois et à une telle échelle, de réunir autour d'une même table l'ensemble des parties prenantes au dossier de l'accessibilité : les associations de personnes handicapées membres de l'Observatoire interministériel de l'accessibilité et de la conception universelle (Obiaçu), les représentants du commerce, de l'hôtellerie-restauration et des professions libérales, les responsables du secteur des transports, les associations d'élus locaux, les maîtres d'oeuvre et d'ouvrage, les techniciens et les experts.
Au cours des 140 heures de réunion, j'ai pu mesurer et apprécier le respect qui a prévalu dans les discussions, l'esprit constructif et la très grande assiduité qui ont animé la centaine de participants. Ces échanges nourris ont permis - et c'est là sans doute la plus grande avancée - à tous les acteurs de prendre conscience des attentes, des difficultés, et de la réalité vécues par les uns et les autres, tout en gardant à l'esprit la nécessité de trouver, ensemble, les moyens de faire progresser l'accessibilité. Menée à son terme, cette concertation est parvenue à deux grandes séries de mesures.
La première est l'élaboration d'un cadre national aux Ad'AP, véritable instrument de politique publique.
En quelques mots, qu'est-ce qu'un Ad'AP ? Il s'agit d'un document de programmation et de financement des travaux d'accessibilité, structuré en une ou plusieurs périodes opérationnelles, qui permettra aux acteurs n'étant pas en conformité avec les règles d'accessibilité posées par la loi de 2005 de s'engager sur un calendrier précis et resserré. L'Ad'AP est un acte d'engagement volontaire qui ne se substitue pas à la loi de 2005, mais qui la complète. Il s'adresse aux maîtres d'ouvrage et aux exploitants d'ERP publics et privés, quelle que soit leur catégorie, ainsi qu'aux autorités organisatrices de transport de voyageurs. Cet outil, cohérent et opérationnel, est le fruit d'un véritable équilibre entre les attentes légitimes des uns et les difficultés à faire rencontrées par les autres. Il n'est en effet pas imaginable de retrouver, dans quelques années, la même situation que celle que nous connaissons aujourd'hui ; il faut donc que l'Ad'AP soit attractif et crédible aux yeux de chacun.
Attractif et crédible, l'Ad'AP l'est tout d'abord pour les associations de personnes handicapées en ce qu'il garantit que les objectifs de mise en accessibilité seront tenus : les dossiers d'engagement à entrer dans une procédure d'Ad'AP devront être déposés avant le 31 décembre 2014, puis devront être validés par le préfet ; l'engagement dans un Ad'AP est irréversible : un dossier validé devra être mené à son terme ; en l'absence d'Ad'AP, le non-respect de l'échéance du 1 er janvier 2015 sera, sauf dérogation validée, toujours passible des sanctions pénales prévues par la loi de 2005 ; il n'y aura pas d'« année blanche » : la programmation des travaux sera échelonnée sur une, deux ou trois périodes et, dès la première année, l'amélioration de l'accessibilité devra être constatée ; des points de contrôle régulier jalonneront toute la procédure : à la fin de la première année, puis au terme de chaque période ; des sanctions financières graduées seront appliquées en cas de non-respect des engagements pris dans le cadre de l'agenda (mauvaise foi, retard, carence) ; dans le domaine des transports, des obligations assorties de sanctions seront fixées en termes d'une part, de formation des personnels et d'information des usagers en situation de handicap, d'autre part, d'accessibilité du parc de matériel roulant routier.
Attractif et crédible, l'Ad'AP l'est ensuite pour les gestionnaires d'ERP et de services de transport en ce qu'il constitue une solution adaptée et réaliste pour se mettre en conformité avec la loi de 2005 : l'élaboration d'un Ad'AP permettra de ne pas s'exposer aux sanctions pénales instaurées par la loi de 2005 et de poursuivre au-delà du 1 er janvier 2015, en toute sécurité juridique, les travaux de mise en accessibilité ; la procédure d'Ad'AP sera simplifiée pour les ERP de 5 e catégorie, qui constituent la grande majorité des ERP ; les dossiers d'Ad'AP pourront être déposés dans un délai d'un an suivant la publication de l'ordonnance, à condition que l'engagement ait été pris avant le 31 décembre 2014 ; l'obligation d'accessibilité des points d'arrêt et des gares fera l'objet d'une priorisation ; le droit au transport des enfants handicapés scolarisés est réaffirmé autour du projet personnalisé de scolarisation (PPS).
Au final, c'est bien une démarche d'équilibre, de pragmatisme et de confiance raisonnée, ainsi que je le recommandais dans mon rapport « Réussir 2015 », qui a prévalu. Non seulement nous n'abandonnons pas l'échéance du 1 er janvier 2015, mais nous nous donnons aussi les moyens de poursuivre la dynamique au-delà de cette date.
La seconde série de mesures concerne l'évolution des normes d'accessibilité.
L'objectif de cet autre volet de la concertation était, tout en maintenant le corpus juridique structurant issu de la loi de 2005, d'adapter les dispositions techniques et réglementaires afin de les rendre plus lisibles et plus efficientes. Certaines d'entre elles sont en effet trop souvent perçues comme un frein au progrès et à l'innovation. De même, l'on a trop tendance aujourd'hui à privilégier le respect strict de la norme plutôt que la qualité d'usage. Un autre impératif était de mieux prendre en compte toutes les formes de handicap, conformément à l'objectif d'accessibilité universelle.
Grâce là aussi à une écoute réciproque et à une ferme volonté de trouver des solutions partagées, de nombreuses recommandations ont vu le jour, parmi lesquelles : l'assouplissement de certaines normes pour le cadre bâti ; la simplification et la clarification des exigences dans les secteurs du commerce, de l'hôtellerie et de la restauration ; l'amélioration de la sécurité des déplacements et du repérage dans l'espace ; la généralisation de la formation des personnels d'accueil ; l'obligation d'information des usagers des ERP à travers la création d'un registre d'accessibilité ; le développement du sous-titrage dans les lieux publics.
Sur la base des deux rapports de conclusion de la concertation, le Premier ministre a confirmé, le 26 février dernier, que les mesures de niveau législatif, comme la création des Ad'AP, feront l'objet d'un projet de loi d'habilitation à légiférer par ordonnance, et que les autres mesures, notamment celles issues du chantier « environnement normatif », seront mises en oeuvre au niveau réglementaire dans le même calendrier resserré que celui des textes d'application des dispositions prises par ordonnance.
Comme vous tous, chers collègues, je suis toujours très réservée lorsqu'un gouvernement, quel qu'il soit, décide de recourir à la procédure prévue à l'article 38 de la Constitution pour accélérer la mise en oeuvre de sa politique. Si le recours aux ordonnances ne saurait être un mode habituel d'élaboration de la loi, il est cependant justifié dans des domaines précisément circonscrits, comme celui de l'accessibilité.
J'y vois trois raisons. Premièrement, l'urgence de la situation. A quelques mois de l'échéance du 1 er janvier 2015, seules les ordonnances nous permettent de rester dans les temps. Je vous rappelle que les Ad'AP doivent être opérationnels très rapidement afin de permettre aux acteurs concernés de faire part, avant le 31 décembre 2014, de leur intention de recourir à ce nouvel outil. A défaut, ce sont les sanctions pénales prévues par la loi de 2005 qui s'appliqueront. Deuxièmement, la technicité du sujet. La concertation l'a montré, l'accessibilité est un dossier d'une grande complexité, sur lequel il est très difficile de trouver un équilibre entre les positions des uns et des autres. Nous y sommes parvenus, mais la confiance mutuelle demeure fragile. Troisièmement, l'approbation unanime du monde associatif qui voit, dans cette méthode, le seul moyen de mettre rapidement en place les outils nécessaires à la poursuite de la dynamique en cours.
J'en viens à présent au projet de loi d'habilitation à proprement parler, qui se compose de quatre articles.
L'article 1 er habilite le Gouvernement à créer, pour les ERP, le nouveau dispositif des Ad'AP. Au-delà du contenu de l'agenda, l'ordonnance définira les procédures applicables à son dépôt, à sa validation et au suivi de l'avancement des travaux prévus. Elle précisera également les délais de réalisation des actions de mise en accessibilité et le régime des sanctions administratives encourues en cas de non-respect des engagements pris. L'article 1 er permet également d'adapter, sur la base des recommandations de la concertation, certaines obligations législatives prévues par la loi de 2005 en matière d'accessibilité des ERP et des bâtiments d'habitation.
L'article 2 habilite le Gouvernement à instituer, pour les services de transport public de voyageurs (routier et ferroviaire), un dispositif comparable à celui de l'Ad'AP pour les ERP : le schéma directeur d'accessibilité - agenda d'accessibilité programmée ou SDA/Ad'AP. Sur le modèle de l'article 1 er , l'ordonnance définira l'ensemble des procédures applicables au SDA/Ad'AP (contenu, dépôt, validation, suivi, délais, sanctions, etc.). Prenant appui sur les conclusions de la concertation, l'article 2 prévoit aussi une habilitation pour adapter les exigences incombant aux services de transport public de voyageurs en matière de points d'arrêt et d'accessibilité du matériel roulant.
L'article 3 habilite le Gouvernement à prendre diverses mesures relevant du domaine de la loi et correspondant aux préconisations de la concertation, parmi lesquelles : l'assouplissement, pour les petites communes, de l'obligation d'élaborer un plan de mise en accessibilité de la voirie et des aménagements des espaces publics (Pave) ; l'autorisation plus large des chiens guides d'aveugle et les chiens d'assistance des personnes handicapées dans les transports et les lieux publics ; l'élargissement de la composition et des missions des commissions communales et intercommunales pour l'accessibilité aux personnes handicapées, ainsi que le changement de leur dénomination ; la création d'un fonds dédié à l'accompagnement de l'accessibilité universelle, dont les ressources proviendront des sanctions financières prononcées dans le cadre des Ad'AP et des SDA/Ad'AP ; l'adaptation à l'outre-mer de certaines des mesures prévues aux articles 1 à 3.
Enfin, l'article 4 fixe à cinq mois, suivant la publication de la loi, le délai dans lequel les ordonnances devront être prises par le Gouvernement. Il fixe également à cinq mois, à compter de la publication de chaque ordonnance, le délai de dépôt du projet de loi de ratification correspondant. Le Gouvernement a d'ores et déjà fait part de son intention de publier les ordonnances au début de l'été.
Je souhaite, pour finir, insister sur un point qui me paraît fondamental et sur lequel je suis revenue à plusieurs reprises lors des travaux de concertation : le nécessaire effort de pédagogie et de communication.
Le chantier de l'accessibilité a, jusqu'à présent, assurément pâti d'un manque d'accompagnement des acteurs de terrain. Ne reproduisons pas les mêmes erreurs. Le nouveau dispositif des Ad'AP aura besoin d'être expliqué tant aux professionnels, qu'aux personnes handicapées et à leurs représentants associatifs locaux. Je suis d'autant plus convaincue de l'utilité de cette démarche que j'ai pu constater combien la diffusion d'informations erronées pouvait avoir des effets dévastateurs. Ainsi, en février dernier, lorsque les conclusions de la concertation ont été présentées et que les arbitrages gouvernementaux ont été rendus, les différents délais de mise en oeuvre des Ad'AP ont été présentés par certains médias comme un report de dix ans de l'échéance de 2015, interprétation qui ne repose évidemment sur aucun fondement.
Conscient de cet enjeu de communication, le Gouvernement a décidé d'agir dans trois directions : le recrutement dès cette année, dans le cadre du service civique, de 1 000 ambassadeurs de l'accessibilité qui auront pour tâche de faire connaître la réforme ; la mise en place d'un accompagnement financier des collectivités locales et des entreprises par la Caisse des dépôts et consignations et la Banque publique d'investissement ; le lancement, dans les prochaines semaines, d'une campagne de communication d'abord à destination des professionnels, puis à destination du grand public.
En tant que nouvelle présidente de l'Obiaçu, je m'impliquerai personnellement dans ce combat car il en va de la cohésion et de l'avenir de notre société.
Mme Isabelle Debré . - Il n'est pas acceptable que nous examinions dans une telle précipitation ce projet de loi qui porte sur un sujet majeur pour notre société. Le délai limite pour le dépôt des amendements est fixé au jeudi 24 avril, en pleine suspension de nos travaux, et l'examen en séance publique interviendra le lundi 28 avril, jour de la reprise ! Par ailleurs, nous examinons ce projet de loi alors que notre collègue Jean-Pierre Vial vient de présenter devant la délégation aux collectivités territoriales un rapport sur les normes d'accessibilité ; nous n'avons pu encore prendre connaissance de toutes ses préconisations. Ne disposant pas de toutes les informations, le groupe UMP ne prendra pas part au vote aujourd'hui.
Mme Muguette Dini . - Nous partageons tous cet agacement ; le calendrier qui nous est imposé n'est pas acceptable. Ce projet de loi est issu d'un long travail de notre rapporteure que je tiens à féliciter. Notre groupe s'abstiendra aujourd'hui car il n'a pas eu le temps nécessaire pour examiner le texte en profondeur, mais cela ne préjuge en rien de son vote le 28 avril.
M. Gilbert Barbier . - A mon tour de déplorer la précipitation sur ce dossier tout en félicitant notre rapporteure pour son travail remarquable, sur un dossier compliqué.
Il n'est pas question dans ce projet de loi des monuments historiques, ni des secteurs sauvegardés : devront-ils se mettre aux normes ? L'accès des personnes handicapées devra-t-il se faire obligatoirement par l'entrée principale ? Certains estiment que prévoir une entrée secondaire s'apparente à une forme de discrimination. Dans ce texte, parle-t-on d'accessibilité globale, prenant en compte tous les types de handicap, ou seulement partielle ? Enfin, quels sont les seuils démographiques retenus pour les Pave ? Les maires des petites communes rurales sont impatients de le savoir...
Mme Isabelle Pasquet . - Je remercie Claire-Lise Campion pour son travail considérable. Nous sommes au pied du mur... Et encore loin de l'accessibilité universelle ! Les lois de 1975 et de 2005 ont suscité beaucoup d'espoirs, aujourd'hui déçus. Ce projet de loi prolonge les délais et prévoit des assouplissements, voire des dérogations. Je regrette le recours aux ordonnances car un débat parlementaire aurait été indispensable. Certaines associations craignent que les nouveaux délais ne soient, à leur tour, pas tenus.
Enfin, ce projet de loi ne comporte pas de volet financier, notamment pour les collectivités locales qui sont pourtant dans une situation exsangue. Si le Gouvernement ne les aide pas, un nouvel échec est à craindre.
Mme Jacqueline Alquier . - Merci à notre rapporteure. Le sujet doit être pris très au sérieux, il nous engage, nous qui sommes des élus. Les Ad'AP sont le fruit de la concertation et du volontarisme. Les collectivités aussi devront s'engager financièrement et arrêter une programmation des travaux, sous peine de pénalités. Mon groupe votera ce projet de loi d'habilitation.
M. Jean-François Husson . - Je félicite également Claire-Lise Campion pour son travail approfondi.
L'article 2 institue pour les services de transports publics de voyageurs un schéma directeur d'accessibilité - agenda d'accessibilité programmée. Les ordonnances préciseront la procédure de mise en oeuvre de ce nouvel outil. Mais sachant que plusieurs acteurs seront concernés, des possibilités de mutualisation seront-elles prévues ? Par exemple, dans les gares routières, il faut accueillir non seulement les bus des réseaux publics, mais aussi ceux des réseaux privés. Or nous sommes dans le flou concernant les responsabilités de chacun. Comme l'argent public se fait rare, ces ordonnances devront prévoir les modalités pratiques de contractualisation entre les divers opérateurs.
Par ailleurs, l'Etat va-t-il se montrer exemplaire en matière d'accessibilité de ses propres espaces ?
Le Gouvernement nous demandant de nous prononcer dans un temps très court, je vais transmettre votre communication pour faire réagir les acteurs de terrain, dans mon département.
M. Hervé Marseille . - Je salue le travail de notre rapporteure, mais partage les réserves de mes collègues sur le recours aux ordonnances. Je m'insurge également contre les différences de traitement : les élus locaux pourront être frappés par des sanctions pénales alors que l'Etat n'assume pas ses responsabilités. Qu'il dise quelle part il entend prendre dans ce chantier ! Il annonce une nouvelle ponction de 10 milliards d'euros sur les collectivités, après 4,5 milliards. Dotations en baisse, nouvelles péréquations, calendrier de travaux : de quelles enveloppes disposeront-elles, alors même que l'on parle de disparition des départements ?
J'approuve la remarque de Gilbert Barbier sur le patrimoine : j'ai été confronté à l'accessibilité dans un musée du XVII e siècle, où il a fallu installer des ascenseurs...
Rien n'a été dit sur les professions libérales, souvent installées dans des copropriétés qui refusent de financer les travaux. L'ordonnance devra donc faire l'objet d'une attention toute particulière pour éviter que l'Etat n'impose des sujétions rigoureuses sans donner les moyens correspondants.
M. René-Paul Savary . - Je dis toute ma sympathie à notre rapporteure qui a beaucoup travaillé sans même connaître le contenu exact de ce projet de loi, triomphe de la technocratie sur la démocratie. L'Etat fixe les règles et laisse aux élus locaux le soin... de se débrouiller, sans leur en donner les moyens. Cela me révolte. L'étau se resserre sur les collectivités. Les Pave feront travailler les bureaux d'étude, les conseils généraux valideront les documents à la chaîne : ces dossiers coûteront aux collectivités des milliers d'euros, mais elles en ont besoin pour obtenir des subventions pour leurs voiries.
Vous parlez, madame la rapporteure, d'engagements volontaires. Mais il s'agit d'engagements obligatoires ! J'espère que ces schémas ne seront pas trop compliqués et que nous pourrons éviter de faire appel une fois de plus à des bureaux d'étude.
Mme Aline Archimbaud . - Certes, les débats vont être précipités. Mais pourquoi a-t-il fallu attendre 2012, avec le travail réalisé par Claire-Lise Campion, pour se rendre compte que la loi de 2005 était mal et peu appliquée ? Nous avons un retard énorme à rattraper. Ne faisons pas de mauvais procès au Gouvernement. Le recours aux ordonnances doit être exceptionnel mais nous sommes face à une urgence, que notre rapporteure a rappelée.
Comment les dérogations seront-elles accordées ? Comment éviter que les délais soient allongés au-delà du raisonnable ? Les pénalités seront-elles progressives, tiendront-elles compte du budget des collectivités ? Comment organiser la vigilance démocratique, afin d'éviter de nouveaux retards, que l'on découvrira a posteriori, quand ils se seront accumulés ? Le coût des travaux de l'accessibilité dans les transports publics sera très élevé. Des arbitrages seront nécessaires. Nous devrons nous interroger : les personnes handicapées sont-elles, oui ou non, des citoyens à part entière ?
Mme Catherine Deroche . - Lors de l'évaluation du texte de 2005, tout le monde s'est félicité des avancées. A l'époque, j'avais dit que les délais seraient difficiles à tenir. Certes, beaucoup de collectivités ont engagé des travaux, mais les élus locaux sont confrontés à des impossibilités techniques et à des normes qui défient le bon sens. Comment adapter les rues d'un village de charme ? Faut-il vraiment créer dans les stades des vestiaires pour les arbitres handicapés, qui seront utilisés au mieux une fois par an ? Le pragmatisme doit l'emporter.
M. Jean-Paul Amoudry . - A mon tour, je félicite notre rapporteure. La loi oblige les établissements touristiques à se conformer à de nouvelles normes d'accessibilité. Comment les hôtels installés dans des bâtiments historiques peuvent-ils satisfaire ces normes ? Sans adaptations réglementaires, nous courons à la catastrophe économique et sociale dans ce secteur d'activité. Les représentants de l'hôtellerie ont participé à la concertation nationale : prenons en compte leurs revendications, car ils doivent consentir un effort considérable sur les équipements.
Mme Isabelle Debré . - Je suis déçue que nous soyons forcés d'avancer à la va-vite, alors que nous avions tant travaillé sur notre rapport il y a deux ans. Que deviennent nos propositions ? Pourquoi légiférer par ordonnances alors qu'il fallait remettre à plat toutes les normes d'accessibilité ? Nous savions que le 1 er janvier 2015 serait intenable...
Mme Aline Archimbaud . - Il ne fallait pas voter la loi de 2005 !
Mme Isabelle Debré . - Relisez le compte-rendu de nos débats d'alors. Il est inexact de dire que la loi de 2005 n'a pas été suivie d'effets. Le Gouvernement souhaite publier les ordonnances avant l'été, avez-vous dit. Mais quel Gouvernement ? Celui de Jean-Marc Ayrault ou celui de Manuel Valls ? Qui va procéder aux contrôles ? Comment seront formés les contrôleurs ?
Mme Annie David, présidente . - Je ne reviens pas sur les délais : la conférence des présidents a fixé le cadre des débats.
Mme Claire-Lise Campion, rapporteure . - Ce projet de loi ne comporte aucune nouvelle sanction, ni nouvelle contrainte. Demeurent celles de la loi de 2005, et rien que celles-là, comme l'a rappelé le Premier ministre lors de la conclusion de la concertation. Aujourd'hui, nous voulons éviter un échec qui aurait des conséquences catastrophiques pour les personnes handicapées. En outre, il est temps de prendre en compte le vieillissement de notre société : nos aînés doivent pouvoir continuer à vivre de façon autonome le plus longtemps possible.
La loi de 2005 fixait des objectifs ambitieux. Le délai de dix ans, alors, paraissait long. Des échéances intermédiaires avaient été prévues, 2008 pour les schémas départementaux d'accessibilité des transports, 2011 pour les universités et les services de l'Etat... Deux conférences nationales sur le handicap ont été tenues entre 2005 et 2011. Cependant, nous n'avons sans doute pas suffisamment accompagné les acteurs de terrain dans la mise en oeuvre de la loi.
Je rappelle que celle-ci prévoyait trois dérogations, qui hélas ne sont pas connues sur le terrain. Nous-mêmes, qui les avions votées, les avons presque oubliées ! Ces dispenses s'appliquent aux bâtiments relevant du patrimoine historique, aux cas d'impossibilité technique, et à ceux où la distorsion est trop importante entre la charge financière et le résultat. La dérogation doit être demandée à la commission consultative départementale de sécurité et d'accessibilité (CCDSA) compétente, présidée par le préfet et associant, outre les services de l'Etat, les associations de personnes handicapées, les acteurs économiques, commerçants notamment. J'indique d'ailleurs que la représentativité de cette instance sera améliorée car y siègeront désormais les représentants des personnes âgées.
Aucun parlementaire n'apprécie la procédure des ordonnances. Mais celle-ci intervient à la suite d'un processus de concertation nationale sans précédent. Après les différentes étapes - notre rapport sénatorial en 2012, ma mission en 2013 - il était indispensable que l'ensemble des acteurs aient un temps d'écoute et d'échange. Il fallait comprendre l'attente des personnes handicapées, mais aussi les difficultés à faire des opérateurs publics et privés. La concertation a été la plus large possible, rassemblant hôteliers, restaurateurs, commerçants, professions libérales, collectivités, association des maires de France (AMF), assemblée des départements de France (ADF), association des régions de France (ARF), assemblée des communautés de France (ADCF), association des maires ruraux (ADMF)...
Nous avons veillé à l'égalité de traitement entre acteurs publics et privés : l'Etat a les mêmes responsabilités que le secteur privé et doit se montrer exemplaire. Les représentants de l'hôtellerie, de la restauration et du commerce ont pris une part active dans la concertation, affichant leur volontarisme et formulant de nombreuses propositions, même après la fin de la concertation. Les représentants des collectivités ont également été très constructifs. Nous étions à un tournant, car en 2015 les sanctions pénales prévues par la loi de 2005 s'appliqueront et les premières condamnations interviendront ! Il faut aller vite. Le Gouvernement a choisi de préserver tout le contenu de la loi de 2005 et de chercher des solutions complémentaires pour accompagner les professionnels. Par exemple, la loi impose pour les allées des ERP existants une largeur de 1,40 mètre : cette obligation est maintenue pour les allées principales, non pour les allées secondaires. C'est un détail, mais il est essentiel, car cette norme peut entraîner une perte de chiffre d'affaires, alors qu'un fauteuil électrique passe sans encombre dans une allée un peu moins large.
Les règles relatives aux Pave seront précisément définies dans l'ordonnance. Les communes de 500 à 1000 habitants élaboreront un Pave limité aux sections reliant les pôles générateurs de déplacement dans la commune. Les communes de moins de 500 habitants auront la faculté, mais non l'obligation d'élaborer un tel plan. Nous avons gardé à l'esprit la situation des communes rurales. L'allègement, la simplification, la facilité à faire, tels sont les principes pragmatiques qui ont guidé notre travail.
S'agissant des SDA/Ad'AP, la possibilité de désigner une autorité chef de file est prévue. Bien sûr, je ne sous-estime pas la donne financière. Mais des aides de la Caisse des dépôts et consignations, ainsi que de la Banque publique d'investissement sont bien prévues. Des conventions vont être signées tout prochainement.
J'ai été auditionnée par la délégation aux collectivités territoriales il y a quelques mois. Le rapport de notre collègue Jean-Pierre Vial sur les normes d'accessibilité n'ayant été présenté qu'hier après-midi, je n'ai pas eu le temps d'en prendre connaissance dans le détail.
Enfin, en tant que présidente de l'Obiaçu, je souhaite que cette institution dédiée à l'accessibilité universelle travaille désormais sur des sujets comme la recherche et l'innovation ou l'accompagnement des acteurs de terrain.
Le projet de loi est adopté sans modification.
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
__________
Mardi 8 avril 2014
Union nationale des associations de parents d'enfants inadaptés (Unapei)
Christel Prado , présidente
Mercredi 9 avril 2014
Assemblée des départements de France (ADF)
André Montané , vice-président du conseil général de l'Ariège
Philippe Herscu , chef du service territoire, Anne-Marie Fréderic , conseillère technique transport et Marylène Jouvien , chargée des relations avec le Parlement
Association des maires de France (AMF)
Elisabeth Lamure , sénateur du Rhône, maire de Gleizé, co-présidente du groupe de travail accessibilité
Florence Masson , conseiller technique au département Ville-Urbanisme-Habitat
Jeudi 10 avril 2014
Association des paralysés de France (APF)
Alain Rochon , président et Nicolas Mérille , conseiller national
Association pour adultes et jeunes handicapés (Apajh)
Jean-Louis Garcia , président
Jean-Louis Leduc , directeur général adjoint
Association des accidentés de la vie (Fnath)
Arnaud de Broca , secrétaire général
ANNEXES
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ANNEXE 1 - LISTE DES PROPOSITIONS DU RAPPORT « RÉUSSIR 2015 »
1. Mettre en place des agendas d'accessibilité programmée (Ad'AP) établis après concertation et diagnostic global. L'Ad'AP serait un document de programmation financière des travaux d'accessibilité dont la durée de mise en oeuvre pourrait s'inscrire dans une fourchette de l'ordre de 3 ou 4 ans, pouvant être reconduits 2 ou 3 ans. Ces agendas devraient être adoptés avant le 31 décembre 2014. 2. Organiser une table ronde nationale des acteurs de l'accessibilité afin d'établir une stratégie consacrant un engagement mutuel devant la société par le rappel des priorités, la réalisation des Ad'AP et les garanties associées. 3. Organiser des états régionaux de l'accessibilité sous l'égide des préfets de région. 4. Faire de l'accessibilité la grande cause nationale 2014 et lancer dès 2013 une campagne de sensibilisation pour que le grand public contribue aux états régionaux. 5. Mieux structurer et évaluer le dispositif de formation prévu par la loi de 2005 en l'organisant autour d'un plan des métiers de l'accessibilité 6. Établir une synergie entre l'Observatoire national sur la formation, la recherche et l'innovation sur le handicap (Onfrih) et l'Observatoire interministériel de l'accessibilité et de la conception universelle (Obiaçu) en conférant à cette instance une fonction de référent national en matière d'évaluation, de recherche, d'innovation, de centre ressources et de diffusion de l'information. 7. Engager, à l'initiative de l'Obiaçu et de l'Insee un suivi statistique régulier de la mise en accessibilité des établissements recevant du public et des transports afin que les pouvoirs publics puissent disposer, au plus tard au 1er janvier 2015 de données statistiques fiables. 8. Confier à l'Obiaçu la mission de réaliser tous les deux ans auprès d'un échantillon représentatif de personnes handicapées, une enquête qualitative conçue en partenariat, de façon à apprécier auprès de celles-ci l'évolution de l'accessibilité de la société. 9. Préciser le rôle et les missions de la délégation ministérielle à l'accessibilité (DMA) et la placer en tant que de besoin à la disposition du ministère en charge de la politique du handicap. 10. Prioriser les travaux de mise en accessibilité dans l'attribution des aides du Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et les commerces (Fisac). 11. Accompagner la réalisation de l'accessibilité dans les ERP commerciaux, artisanaux et de services par la mise en place de prêts bonifiés ou d'une garantie d'emprunt s'appuyant sur le fléchage d'une partie des enveloppes gérées pour le compte de l'État par Oséo. 12. Dans le secteur de l'hôtellerie-restauration indépendante, prévoir une exonération totale ou partielle des droits de succession couvrant les travaux d'accessibilité à condition que ceux-ci soient réalisés dans les deux ans suivant la transmission. 13. Pour la composition des sous-commissions d'accessibilité, désigner par arrêté préfectoral une dizaine de représentants des maîtres d'ouvrage tout en ne convoquant que trois d'entre eux pour chaque séance en fonction de l'ordre du jour. 14. Assurer un niveau approprié de formation des représentants bénévoles des CCDSA en s'appuyant sur des ressources nationales d'expertise à consolider. 15. Utiliser les dotations nationales de l'État aux associations afin que chacune d'entre elles puisse assurer, selon les besoins, une prise en charge des déplacements occasionnés pour leurs membres siégeant au sein des CCDSA. 16. Rappeler aux CCDSA qu'il convient de s'inscrire dans le cadre des prescriptions normatives établies. Parallèlement, faire étudier par la DMA, dans le cadre concerté habituel, une simplification des dossiers de demande de dérogation relatifs à l'accessibilité. 17. Élaborer une doctrine globale d'intervention des CCDSA par la pratique d'un dialogue national entre acteurs économiques, associations de personnes handicapées et administration produisant des guides d'interprétation des textes, établis de façon à préparer l'augmentation attendue de demandes de dérogations en 2013 et 2014. 18. Sur la base d'une concertation conduite par les services du ministère en charge du logement, ajuster la réglementation applicable à la construction de logements neufs, notamment sur les points identifiés par la mission, sans exclure que certains aspects détaillés de la réglementation puissent être renvoyés à des normes de type ISO. 19. Dans quelques zones d'aménagement concerté (ZAC) situées dans le périmètre d'un ou deux établissements publics d'aménagement, conduire une expérimentation conférant aux prescriptions détaillées de la construction, le statut de référentiels tout en autorisant les constructeurs à respecter la loi par des moyens alternatifs. 20. Assimiler, pour l'application des règles relatives à l'accessibilité, les constructions dites « en habitat intermédiaire » à des bâtiments d'habitation collectifs. 21. Rendre illégal le refus, par une assemblée de copropriété, d'autoriser l'occupant d'un logement à réaliser à ses frais des travaux de mise en accessibilité dès lors qu'ils sont sans incidence sérieuse sur le gros oeuvre et les parties communes de l'immeuble. De même, lorsqu'un logement ancien en location a été rendu accessible, rendre non obligatoire les travaux de remise en état qui touchent à l'accessibilité. 22. Pour les bâtiments d'habitation destinés à une occupation temporaire ou saisonnière, prévoir un quota de logements accessibles d'au moins 5 %. Ces logements doivent être directement accessibles aux différents types de handicap. Par ailleurs au moins un sanitaire accessible commun doit être prévu à chaque niveau pour permettre les visites. Les parties communes de ces résidences doivent également être accessibles. 23. Modifier l'article L. 111-7-1 du Code de la construction et de l'habitat afin que les maisons individuelles nouvelles construites pour le compte de leur propriétaire soient adaptables. 24. Sous l'égide de l'Obiaçu, procéder à un recensement du nombre d'établissements recevant du public en les classant par catégorie. 25. En lien avec les services du ministère du travail, définir une qualification professionnelle de diagnostiqueur et retenir qu'un diagnostic doit comprendre non seulement l'analyse de travaux d'accessibilité à entreprendre mais aussi une estimation du coût et une proposition de programmation de ces travaux. 26. Inciter les communes petites ou moyennes à utiliser les ressources du Fonds pour l'intégration des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP) pour la partie des aménagements ou des accès communs au public et aux salariés de la collectivité. 27. Sur le fondement d'une démarche concertée, pilotée conjointement par les ministères du logement et de l'intérieur, ajuster la réglementation applicable aux établissements recevant du public notamment dans les domaines suivants : établissements scolaires et universitaires, hôtellerie, restauration et commerces. 28. Sous le pilotage du ministère en charge du tourisme, établir une réglementation relative à l'accessibilité des hébergements légers de loisir et des terrains de camping en recherchant un objectif d'accessibilité par l'application de référentiels s'inspirant des exigences du label Tourisme et Handicap. 29. Après constatations éventuelles des services en charge de la concurrence, rappeler aux organisations professionnelles concernées, l'interdiction de pratiques et de tarifs introduisant toute forme de discrimination directe ou indirecte à l'encontre des personnes en situation de handicap. 30. Sous l'égide de la DMA, organiser une concertation avec l'ensemble des acteurs de la communauté éducative, les associations de personnes handicapées, les organismes de transports et les autorités organisatrices du transport scolaire pour examiner la pertinence du maintien d'une exigence d'accessibilité pour l'ensemble des points d'arrêt ne desservant que les lignes de transports scolaires. 31. Engager sous la responsabilité du ministère des transports un travail de spécification permettant d'assurer une véritable complémentarité entre les transports publics réguliers et les transports à la demande dans les zones peu denses. 32. Pour les transports interurbains, demander au Centre d'études sur les réseaux, les transports, l'urbanisme et les constructions publiques (Certu) d'analyser, de tester et d'évaluer le coût, dans un délai de six mois, les dispositifs existants de type « arrêts accessibles modulaires » et parallèlement, d'engager avec l'Agence française de normalisation (Afnor) un processus de normalisation de ces nouveaux arrêts. 33. Transformer les Autorités organisatrices de transports urbains (AOTU) en Autorités organisatrices de la mobilité durable (AOMD) afin que l'autorité en charge des transports soit également compétente pour l'aménagement des points d'arrêt et de la voirie à leurs abords. En milieu rural, favoriser l'extension de la compétence des AOT à l'aménagement des arrêts et de leurs abords par convention entre les collectivités concernées. 34. Prolonger en 2013 l'aide technique apportée par les services déconcentrés de l'État aux communes de moins de 200 habitants sous la forme de l'Atesat. 35. Pour les communes rurales, prévoir, à l'occasion du projet de loi relatif à la troisième phase de décentralisation, une disposition transférant la compétence « élaboration des plans de mise en accessibilité de la voirie et des espaces publics » à leur établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre. 36. Sous l'égide de l'Agence française de normalisation (Afnor), harmoniser les dispositifs de télécommande permettant aux aveugles et amblyopes de repérer avec certitude les établissements dans lesquels ils veulent être reçus. En lien avec le secrétariat général du comité interministériel du handicap (CIH), étudier les modalités de généralisation de ces nouvelles technologies et obtenir l'application d'une longueur d'onde unique sur le territoire pour ces télécommandes. 37. Étudier l'élaboration d'un statut du chien-guide pour personnes aveugles et malvoyantes, statut qui couvrirait les questions de formation et d'accès des chiens-guides aux sites eux-mêmes accessibles aux aveugles. 38. Promouvoir à l'échelle européenne, une norme de bruit minimum émis par les véhicules électriques, norme qui serait inspirée des travaux du groupe pluridisciplinaire proposé par l'Obiaçu. 39. Prévoir l'installation de boucles magnétiques pour personnes malentendantes, en priorité aux guichets des services publics. 40. Tenir compte dans les ERP existants, les transports ainsi que dans les notices d'accessibilité liées au permis de construire du « guide pratique de la signalétique et des pictogrammes ». |
ANNEXE 2 - RAPPORT « AGENDA D'ACCESSIBILITÉ PROGRAMMÉE » ISSU DE LA CONCERTATION
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ANNEXE 3 - RAPPORT « AJUSTEMENT DE L'ENVIRONNEMENT NORMATIF » ISSU DE LA CONCERTATION
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* 1 Rapport n° 635, « Loi Handicap : des avancées réelles, une application insuffisante », réalisé par Claire-Lise Campion et Isabelle Debré au nom de la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois, juillet 2012.
* 2 Claire-Lise Campion, rapport au Premier ministre, « Réussir 2015 », mars 2013.
* 3 Rapport de l'Observatoire interministériel de l'accessibilité et de la conception universelle, mai 2011.
* 4 Par exemple, l'association des paralysés de France (AFP) a mis en place en 2009 un baromètre de l'accessibilité qui classe quatre-vingt-seize chefs-lieux départementaux selon leur degré d'accessibilité.
* 5 Rapport de l'Observatoire interministériel de l'accessibilité et de la conception universelle, octobre 2012.
* 6 « Point sur les rapports annuels des commissions pour l'accessibilité aux personnes handicapées », DMA 31 décembre 2010.
* 7 Source DHUP. Fichier du logement communal (FILOCOM).
* 8 Soit entre 26,6 millions (hypothèse basse) et 28,8 millions de logements potentiellement accessibles.
* 9 Sources : SITADEL pour les BHC et FILOCOM pour l'ensemble des logements.
* 10 Bâtiments d'habitation collectifs.
* 11 Rapport commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois - n° 635 2011-2012 : Loi Handicap : des avancées réelles, une application insuffisante. Mmes Claire-Lise Campion et Isabelle Debré, sénatrices.
* 12 Y compris sur le nombre total d'ERP, cf. partie 3 du rapport.
* 13 D'où la circulaire interministérielle du 3 janvier 2013 adressée aux préfets leur demandant entre autres, de mobiliser les AOT qui n'ont pas encore approuvé leur SDA. Cf texte de la circulaire en annexe.
* 14 Source : documents remis par l'Union des transports publics et ferroviaires (UTP).
* 15 La Cour d'Appel de Paris a ainsi confirmé en février 2013 une décision de première instance condamnant une compagnie aérienne à bas prix pour avoir refusé l'accès à bord de trois personnes handicapées non accompagnées.
* 16 La mission a ainsi constaté les difficultés.
* 17 Rapport « Réussir 2015 », mars 2013.
* 18 La notion d'« installations ouvertes au public » a été définie par la circulaire interministérielle n o 2007-53 du 30 novembre 2007 relative à l'accessibilité des établissements recevant du public, des installations ouvertes au public et des bâtiments d'habitation. En font notamment partie les espaces publics ou privés qui desservent des ERP ; les aménagements permanents et non rattachés à un ERP, tels que les circulations principales des jardins publics, les parties non flottantes des ports de plaisance, les aménagements divers en plein air incluant des tribunes et gradins, etc. ; les parties non bâties des terrains de camping et autres terrains aménagés pour l'hébergement touristique.
* 19 Dispositions codifiées à l'article L. 152-4 du code de la construction et de l'habitation.
* 20 Cf. rapport en annexe.
* 21 Cf. pages 41 et 42 du rapport sur les Ad'AP.
* 22 Cf. page 42 du rapport sur les Ad'AP.
* 23 En application de cet article, chaque commune, quelle que soit sa taille, est tenue d'élaborer un plan de mise en accessibilité de la voirie et des aménagements des espaces publics (Pave). Celui-ci doit préciser les modalités pour rendre accessibles toutes les aires de stationnement et toutes les sections de la communes où circulent les piétons.