II. ANALYSE PAR PROGRAMME
A. LE PROGRAMME 156 « GESTION FISCALE ET FINANCIÈRE DE L'ETAT ET DU SECTEUR PUBLIC LOCAL »
1. La DGFiP, principale administration de la mission
Le programme 156 « Gestion fiscale et financière de l'Etat et du secteur public » regroupe les crédits alloués à la direction générale des finances publiques (DGFiP) . Cette direction unifiée est issue de la fusion, qui a abouti en 2008, entre la direction générale des impôts (DGI) et la direction générale de la comptabilité publique (DGCP). Le responsable du programme est le directeur général des finances publiques.
Le programme 156 retrace les moyens consacrés aux activités de calcul de l'assiette, de recouvrement et de contrôle des recettes de l'Etat, des collectivités territoriales ou de l'Union européenne, ainsi que le paiement des dépenses publiques et la tenue des comptes publics.
Au 1 er janvier 2013, le réseau de la direction générale des finances publiques était constitué de 4 516 structures, soit : 2 645 trésoreries ; 37 centres des impôts (CDI), 539 services des impôts des entreprises (SIE), 231 centres des impôts fonciers (CDIF), 354 services de publicité foncière (ex-conservations des hypothèques) et 709 services des impôts des particuliers (SIP), ou SIE-SIP.
2. Un programme qui contribue très fortement aux efforts budgétaires
Les crédits demandés au titre de l'année 2014 s'élèvent 8,6 milliards d'euros en AE et 8,4 milliards d'euros en CP, ce qui représente respectivement une légère hausse de 0,2 % en AE (15 millions d'euros) et une forte baisse de 1,8 % en CP (152 millions d'euros) .
La contribution de la DGFiP aux efforts d'économies budgétaires se lit d'abord dans les dépenses de personnel , qui baissent de 1,4 % (soit 98 millions d'euros), pour s'établir à 7,2 milliards d'euros au total. La contribution au CAS « Pensions » baisse quant à elle de 3 % (soit 68,4 millions d'euros), pour s'établir à 2,2 milliards d'euros.
Le plafond d'emplois passe ainsi de 114 417 ETPT en 2013 à 111 990 ETPT en 2014, soit une suppression nette de 2 413 ETPT . La DGFiP est donc de loin le premier contributeur à l'effort de réduction des effectifs de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines ».
Ces suppressions viennent s'ajouter aux plus de 14 000 suppressions intervenues au titre des lois de finances de 2008 à 2013, ce qui représente une réduction totale de plus de 10 % des effectifs. Sur la période 2008-2012, le taux de non-remplacement s'établit à 63,3 % 3 ( * ) .
Toutefois, vos rapporteurs spéciaux rappellent que le titre 2 du programme 156 fait fréquemment l'objet d'un pilotage approximatif , ce qui incite à prendre avec prudence les objectifs affichés. Ceci dit, l'exécution 2013 des crédits du titre 2 est - pour l'instant - la première à ne pas nécessiter l'ouverture de crédits supplémentaires par décret d'avance.
Répartition par titre des crédits du
programme 156
« Gestion fiscale et financière de l'Etat et
du secteur public local »
(en euros)
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
|||||
LFI 2013 |
PLF 2014 |
LFI 2013 |
PLF 2014 |
|||
Titre 2 : personnel |
7 267 997 938 |
7 168 034 490 |
-1,3% |
7 267 997 938 |
7 168 034 490 |
-1,4% |
Autres dépenses : |
1 282 523 617 |
1 398 133 381 |
9% |
1 245 914 066 |
1 193 598 381 |
-4,2% |
Titre 3 : fonctionnement |
1 227 447 513 |
1 363 968 381 |
11,1% |
1 171 259 886 |
1 157 453 381 |
-1,2% |
Titre 5 : investissement |
54 342 604 |
33 250 000 |
-38,8% |
73 920 680 |
35 230 000 |
-52,3% |
Titre 6 : intervention |
733 500 |
915 000 |
24,7% |
733 500 |
915 000 |
24,7% |
Total P. 156 |
8 550 521 555 |
8 566 167 871 |
0,2% |
8 513 912 004 |
8 361 632 871 |
-1,8% |
Source : projet annuel de performances, PLF 2014
Les dépenses hors titre 2 connaissent une programmation plus heurtée , affichant une hausse de 9 % des AE (115 millions d'euros) mais une baisse de 4,2 % des CP (52 millions d'euros).
Cependant, il ne faut pas voir dans la hausse des AE un effort particulier d'investissement. Bien au contraire, les dépenses d'investissement connaissent une baisse substantielle de 39 %, passant de 54 à 33 millions d'euros. Cette baisse des dépenses d'investissement se traduit notamment par un report de travaux d'entretien immobilier, une tendance également sensible dans le programme 309 « Entretien des bâtiments de l'Etat » (cf. infra ).
En réalité, la hausse s'explique d'abord par les dépenses de fonctionnement , qui connaissent une hausse de 11,1 % et s'établissent à 1,4 milliard d'euros. Vos rapporteurs spéciaux s'inquiètent de cette tendance, que les économies réalisées de manière globale sur la mission ne sauraient masquer ou compenser.
Par exemple, les crédits de l'action 8 « Soutien » , qui regroupe les crédits des fonctions transversales de la DGFiP, connaissent une hausse de 4,1 % qui est notamment imputable à la très forte hausse des « moyens de fonctionnement » tels que les frais de déplacement, les achats de fournitures ou encore la location de matériels divers. Ces frais de fonctionnement passent de 71,8 millions d'euros de CP en 2013 à 95,5 millions d'euros de CP en 2014, soit une hausse de 33 % (ou 23,7 millions d'euros).
Les dépenses prévues pour les autres actions affichent en revanche une plus grande stabilité , témoignant d'une répartition plus homogène des efforts entre les différentes missions de la DGFiP. On notera toutefois une baisse plus forte des CP consacrés à la gestion financière de l'Etat hors fiscalité (- 3,4 %) et à la gestion de la fiscalité des PME (- 2,3 %), où les économies de fonctionnement sont plus importantes.
Répartition par action des crédits du
programme 156
« Gestion fiscale et financière de l'Etat et
du secteur public local »
(en euros)
Autorisations d'engagement |
|||
LFI 2013 |
PLF 2014 |
Variation |
|
1 - Fiscalité des grandes entreprises |
100 940 175 |
101 533 639 |
0,6% |
2 - Fiscalité des PME |
1 801 492 227 |
1 759 929 832 |
-2,3% |
3 - Fiscalité des particuliers et fiscalité directe locale |
2 292 995 372 |
2 305 142 609 |
0,5% |
5 - Gestion financière de l'Etat hors fiscalité |
771 245 704 |
744 717 305 |
-3,4% |
6 - Gestion des pensions |
68 882 443 |
67 562 137 |
-1,9% |
7 - Gestion financière du secteur public local hors fiscalité |
1 392 912 614 |
1 382 737 896 |
-0,7% |
8 - Gestion des fonds déposés |
70 100 620 |
67 564 855 |
-3,6% |
9 - Soutien |
2 051 952 400 |
2 136 979 598 |
4,1% |
Total pour le programme 156 |
8 550 521 555 |
8 566 167 871 |
0,2% |
Crédits de paiement |
|||
LFI 2013 |
PLF 2014 |
Variation |
|
1 - Fiscalité des grandes entreprises |
100 940 175 |
101 533 639 |
0,6% |
2 - Fiscalité des PME |
1 802 472 227 |
1 761 599 832 |
-2,8% |
3 - Fiscalité des particuliers et fiscalité directe locale |
2 294 365 372 |
2 308 782 609 |
0,6% |
5 - Gestion financière de l'Etat hors fiscalité |
770 835 704 |
747 777 305 |
-3% |
6 - Gestion des pensions |
68 692 443 |
67 572 137 |
-1,6% |
7 - Gestion financière du secteur public local hors fiscalité |
1 395 492 614 |
1 376 627 896 |
-1,4% |
8 - Gestion des fonds déposés |
70 100 620 |
67 564 855 |
-3,6% |
9 - Soutien |
2 011 012 849 |
1 930 174 598 |
-4% |
Total pour le programme 156 |
8 513 912 004 |
8 361 632 871 |
-1,8% |
Source : projet annuel de performances, PLF 2014
3. Les chantiers à venir : modernisation et performance
La DGFiP poursuivra cette année sa modernisation, déclinée dans le cadre du projet stratégique, « une stratégie de confiance 2013-2018 », présenté en juillet 2013. Dans cette perspective, l'architecture du programme 156 a été refondue et se structure désormais en quatre objectifs :
- « garantir le recouvrement des recettes publiques et lutter contre la fraude » ;
- « payer rapidement et contrôler efficacement les dépenses publiques » ;
- « développer la qualité de service aux usagers » ;
- « améliorer l'efficience de la DGFiP ».
Les indicateurs de performance ont également tous été revus, dont certains en profondeur. Il en est ainsi pour l'indicateur 4.1 relatif aux gains de productivité de la DGFiP : les sous-indicateurs portant sur le taux d'intervention (sur l'impôt, sur les dépenses de l'Etat, sur les dépenses du secteur public local), que vos rapporteurs spéciaux avaient jugés insuffisants, ont cette année été complétés par un « taux annuel d'évolution de la productivité globale », calculés à partir de 12 ratios élémentaires 4 ( * ) .
Parmi les sources principales de gains de productivité figure la dématérialisation des relations avec les usagers , qu'il s'agisse des particuliers, des entreprises ou des collectivités publiques. Le programme 156 comprend essentiellement quatre grands projets informatiques : SIRHIUS (ressources humaines, cf. infra ), Copernic (système fiscal), Hélios (secteur public local) et Gestion des pensions .
Des gains de productivité sont également attendus à la faveur de la réorganisation des services centraux de la DGFiP , de la montée en puissance de l'intercommunalité et de l'évolution de la carte hospitalière .
L'année dernière, vos rapporteurs spéciaux s'étaient intéressés aux résultat du contrôle fiscal sur place , se demandant si la conjonction entre la hausse des droits rappelées d'une part, et la baisse des pénalités appliquées et des contrôles réalisés d'autre part, ne correspondait pas à une stratégie de « rendement » sur des dossiers simples au lieu d'un effort sur les dossiers complexes.
Les résultats de cette année semblent indiquer une tendance différente, qui reste à confirmer : le nombre de contrôles, le montant des droits et le montant des pénalités augmentent tous, quoique dans une proportion différente.
Évolution du nombre de contrôles fiscaux
sur place
ainsi que des droits et pénalités
appliqués
(en nombre de contrôles et en euros)
2008 |
2009 |
2010 |
2011 |
2012 |
Évolution 2011/2012 |
|
Vérification de comptabilité (contrôle sur place) |
47 844 |
47 703 |
47 689 |
47 408 |
48 178 |
1,6% |
Total des droits simples rappelés |
6 734 |
7 194 |
7 485 |
7 792 |
8 498 |
9,1% |
Pénalités appliquées |
2 285 |
2 184 |
2 292 |
2 213 |
2 932 |
32,5% |
Examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle (ESFP) |
4 166 |
3 912 |
3 883 |
4 033 |
4 159 |
3,1% |
Droits simples rappelés |
384 |
412 |
469 |
557 |
579 |
3,9% |
Pénalités appliquées |
160 |
145 |
154 |
253 |
303 |
19,8% |
Total des contrôles sur place |
52 010 |
51 615 |
51 572 |
51 441 |
52 337 |
1,7% |
Source : tome I du fascicule « Voies et moyens » annexé au projet de loi de finances pour 2014
Si certaines dispositions du projet de loi relatif à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière 5 ( * ) , voté par l'Assemblée nationale le 5 novembre 2013, sont hautement contestables, d'autres pourraient cependant donner aux vérificateurs de nouveaux instruments juridiques dans la lutte contre la fraude fiscale : compétence étendue de la brigade nationale de répression de la délinquance fiscale (BNRDF), possibilité d'exploiter des preuves d'origines illicites (telles que la « liste HSBC ») sous réserve d'une transmission régulière, possibilité de saisie des sommes rachetables des contrats d'assurance-vie ou encore copie des fichiers informatiques lors d'un contrôle inopiné.
* 3 Source : questionnaire budgétaire.
* 4 Ces ratios correspondent à diverses missions de la DGFiP : nombre de dossiers professionnels gérés par agent, nombre d'amendes par agent, nombre de titres de recettes et de mandats du secteur public local par agent etc.
* 5 Cf. avis n° 730 fait par François Marc au nom de la commission des finances sur le projet de loi relatif à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière.