IV. EXAMEN DU RAPPORT (6 NOVEMBRE 2013)
Réunie le mercredi 6 novembre 2013, sous la présidence de M. Philippe Marini, président, la commission procède à l'examen des principaux éléments de l'équilibre sur le projet de loi de finances pour 2014 - Tome I du rapport général de M. François Marc, rapporteur général .
M. Philippe Marini, président . - À l'occasion de la présentation ce matin du projet de loi de finances (PLF) et du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), nous disposerons d'une vision de l'équilibre général de l'ensemble des finances publiques. La fusion du PLF et du PLFSS serait souhaitable. Voter deux lois financières chaque année constitue, en effet, une particularité française. Naturellement, certains d'entre nous se persuaderont que les perspectives financières sont clémentes, et d'autres que la situation est exécrable. Je souhaite que nous puissions nous écouter les uns et les autres dans une logique de respect réciproque.
M. François Marc, rapporteur général . - Nous entamons en effet un marathon budgétaire, qui pourrait toutefois être écourté si certains d'entre nous faisaient le choix d'un retour sur leurs terres, ce que je ne souhaite pas. Pour vous mettre en appétit, il est intéressant de s'arrêter sur l'exercice 2014 dans la trajectoire des finances publiques.
Pour la première fois, les prévisions macroéconomiques sur lesquelles reposent les projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale ont été soumises au Haut Conseil des finances publiques (HCFP). Dans son avis du 20 septembre 2013, le HCFP considère que, pour 2014, « les prévisions de croissance sont plausibles ». Par ailleurs, lors de son audition par notre commission le 9 octobre dernier, Didier Migaud a qualifié la prévision pour 2013 de « prudente » et celle pour 2014 de « crédible et réaliste ».
Le Gouvernement retient une hypothèse de croissance de 0,1 % en 2013 et de 0,9 % en 2014. Une légère progression du PIB en 2013 semble désormais acquise ; la prévision de croissance de 0,1 % est partagée par l'ensemble des organismes de prévision. L'OCDE, le FMI et la Commission européenne anticipent même une croissance supérieure. L'hypothèse de croissance retenue pour 2014, soit 0,9 %, est également retenue par la Commission européenne dans ses prévisions d'automne, publiées hier. Elle est, en outre, très proche de celle du Consensus Forecasts d'octobre 2013. Le FMI, quant à lui, se montre plus optimiste en prévoyant une croissance de 1 %. Cette présentation révèle un changement avec les pratiques antérieures consistant à surévaluer les hypothèses macroéconomiques, ce qui permettait de minorer les efforts à réaliser et figurait parmi les critiques les plus récurrentes du Conseil de l'Union européenne.
Pour la première fois, la Commission européenne va examiner les projets de plans budgétaires des Etats membres de la zone euro. Il s'agit d'une nouvelle procédure instituée par le « two-pack », qui est entré en vigueur le 30 mai 2013 et établit un encadrement renforcé des politiques budgétaires au sein de la zone euro. Si la Commission européenne décèle un manquement particulièrement grave aux obligations découlant du pacte de stabilité et de croissance, elle demande qu'un projet de plan budgétaire révisé lui soit soumis dès que possible. Toutefois, cela ne contraindrait pas l'Etat concerné à revoir intégralement son projet de budget : il s'agit seulement d'alerter les Etats dont le projet de budget ne permettrait pas de respecter les règles budgétaires européennes et d'éclairer les travaux des parlements nationaux. La Commission doit rendre ses avis sur les projets de plans budgétaires le 15 novembre prochain.
On notera que le commissaire européen chargé des affaires économiques et monétaires, Olli Rehn, a d'ores et déjà salué « la responsabilité et la prudence » du projet de loi de finances pour 2014 de la France et on peut imaginer que l'avis qui sera rendu d'ici le 15 novembre ne devrait pas être fondamentalement différent.
M. Philippe Marini, président . - Nous sommes entre gens convenables...
M. François Marc, rapporteur général. - J'en viens maintenant à l'analyse de l'article liminaire du projet de loi de finances pour 2014. La loi organique relative à la gouvernance et à la programmation des finances publiques prévoit, en effet, que la loi de finances comporte désormais un tel article, qui permet de disposer d'une vision synthétique de l'évolution du solde structurel. Il s'agit ainsi de s'assurer que les mesures prévues dans le cadre des projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale permettent au solde structurel de suivre la trajectoire définie par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017.
Il apparaît que le solde structurel devrait s'élever à - 2,6 points de PIB en 2013 et à - 1,7 point de PIB en 2014. Lors de l'audition du 9 octobre 2013, le président du Haut Conseil des finances publiques (HCFP) a constaté que « le déficit structurel prévu tant pour 2013 que pour 2014 est significativement supérieur à celui de la loi de programmation des finances publiques » ; en effet, l'écart s'élèverait à 1 point de PIB en 2013 et à 0,6 point de PIB en 2014.
M. Vincent Delahaye . - Quelles sont les mesures exceptionnelles qui impactent le solde ?
M. François Marc, rapporteur général . - Il s'agit en particulier du coût des contentieux fiscaux.
Si l'écart de la course du solde structurel par rapport à la trajectoire de la loi de programmation des finances publiques (LPFP) est indéniable, il doit être examiné à l'aune d'une conjoncture économique beaucoup plus dégradée que prévu. A titre de rappel, l'écart constaté entre le solde structurel et l'objectif de la LPFP en 2012 a principalement résulté d'une révision du déficit structurel pour 2011. Nous héritons là d'un dérapage depuis 2011 qui conduit à une accumulation d'écarts substantiels représentant, au total, un point de différentiel. L'écart a continué à se creuser en 2013, mais principalement en raison du fort ralentissement de l'activité économique. Un examen attentif de l'exercice permet de mettre en évidence le fait que le Gouvernement a, pour l'essentiel, respecté les objectifs d'effort sur lesquels il s'était engagé.
L'effort structurel consenti en 2013 s'élèverait à 1,7 point de PIB, soit un niveau proche de la cible retenue en LPFP (1,9 point de PIB) ; pour autant, le solde structurel ne devrait être réduit que de 1,3 point de PIB, compte tenu d'élasticités des prélèvements obligatoires plus faibles que prévu. On touche là du doigt une réalité qui a un impact tout à fait négatif sur l'exercice 2013. L'effort structurel en recettes atteindrait 1,5 point de PIB, contre un objectif de 1,6 point dans la loi de finances pour 2013.
Toutefois, l'accroissement des recettes serait limité par une faible évolution spontanée des prélèvements obligatoires : leur élasticité serait seulement de 0,5, contre une moyenne de long terme proche de l'unité. Je rappelle ce qu'est l'élasticité des recettes fiscales à l'évolution du PIB : une élasticité de 2 signifie qu'une progression de 1 % du PIB en valeur entraîne une augmentation de 2 % des recettes fiscales. La faiblesse de l'élasticité résulterait principalement du rendement peu élevé de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et de l'impôt sur les sociétés, ainsi que du moindre dynamisme de la masse salariale, sur laquelle est assise la majeure partie des prélèvements sociaux. Cette faible élasticité aurait contribué négativement à l'évolution des recettes, à hauteur de 0,4 point de PIB.
L'effort structurel projeté au titre de l'année 2013 repose également sur un effort en dépenses de 0,2 point de PIB - contre une cible de 0,3 point dans la loi de finances pour 2013. L'effort initialement programmé était fondé sur un objectif de croissance de la dépense publique en volume de 0,9 % ; toutefois, cette dernière devrait finalement atteindre 1,7 %. Cette progression plus rapide que prévu de la dépense publique serait essentiellement liée à des facteurs non maîtrisables. Tout d'abord, l'inflation ne devrait progresser que de 0,8 % en 2013, alors que les dépenses indexées - à l'instar d'un certain nombre de prestations sociales - ont été revalorisées sur la base d'un taux de 1,3 % en avril dernier. Cela a conduit, mécaniquement, à accroître l'augmentation des dépenses concernées en volume. Par ailleurs, plusieurs dépenses non prévues devraient survenir au cours de l'exercice, notamment le vote du deuxième budget rectificatif de l'Union européenne, qui entraînerait une hausse des dépenses de 1,8 milliard d'euros. En tout état de cause, les dépenses maîtrisables seraient bien tenues : la norme « zéro valeur » qui s'applique aux dépenses de l'État hors dette et pensions serait respectée, l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (ONDAM) serait sous exécuté et la charge de la dette serait inférieure à la prévision de la loi de finances initiale pour 2013 d'un montant de 1,9 milliard d'euros en raison de conditions de financement particulièrement favorables.
L'effort structurel prévu pour 2014 est supérieur à la programmation, mais ne comble pas intégralement l'écart avec la trajectoire pluriannuelle de solde structurel. En effet, le Gouvernement a fait le choix de lisser l'effort - et donc l'ajustement structurel - sur la période 2014-2017, afin de concilier poursuite de la consolidation des finances publiques et croissance économique. La conciliation de ces deux objectifs a constitué un souci constant du Gouvernement. Les ajustements successifs de la trajectoire de solde structurel au cours des derniers mois n'ont fait que tirer les conséquences des évolutions de la conjoncture tout au long de l'année 2013, qui ont conduit à répartir la réduction du déficit structurel sur l'ensemble de la période 2014-2017. Cette nouvelle trajectoire pluriannuelle des finances publiques est rendue possible par la prolongation accordée en juin dernier par le Conseil de l'Union européenne, jusqu'à 2015, du délai dont dispose la France pour corriger son déficit excessif, compte tenu de la détérioration de la situation économique.
En tout état de cause, les efforts prévus par le Gouvernement dans le cadre de cette nouvelle trajectoire permettraient, d'une part, d'atteindre l'équilibre structurel en 2016, respectant ainsi l'objectif de moyen terme (OMT) sur lequel la France s'est engagée auprès de ses partenaires européens en application du TSCG et, d'autre part, de mettre fin au déficit excessif en 2015, conformément à la trajectoire recommandée par le Conseil de l'Union européenne.
La Commission européenne a publié, hier, ses traditionnelles prévisions d'automne. Ainsi que je l'ai d'ores et déjà indiqué, celles-ci viennent conforter les hypothèses macroéconomiques retenues par le Gouvernement dans le présent projet de loi de finances. Comme la presse s'en est largement fait écho, la Commission prévoit que le déficit effectif de la France serait de 3,7 % du PIB en 2015 (et pas de 3 % du PIB comme nous l'anticipions), ce qui pourrait laisser croire que notre pays ne respecterait pas les recommandations du Conseil de l'Union européenne formulées dans le cadre de la procédure de déficit excessif.
Toutefois, il est impératif de revenir sur la méthode selon laquelle est construite cette projection. En effet, ainsi que l'indique très clairement le document de la Commission, les projections relatives à l'année 2015 sont réalisées à partir d'une hypothèse de politique inchangée. En bref, faute de mesures en économies et en recettes déjà votées pour cette année, elle fait comme si la France ne réalisait aucun effort supplémentaire en 2015 ; cela ne signifie pas qu'elle estime que la France n'adoptera pas de telles mesures. D'ailleurs, on observe la même divergence, pour l'année 2015, pour plusieurs pays qui n'ont pas déjà adopté des réformes structurelles entraînant des économies certaines à cet horizon, comme l'Espagne et l'Italie notamment. S'agissant des années 2013 et 2014, le commissaire européen chargé des affaires économiques et monétaires, Olli Rehn, a indiqué qu'il se concentrerait sur l'ajustement structurel et non le déficit effectif pour juger des efforts budgétaires réalisés par la France. A cet égard, les économistes de la Commission européenne précisent que leurs prévisions sont cohérentes avec une amélioration cumulée du déficit structurel de 1,75 % sur 2013 et 2014.
L'effort structurel prévu pour 2014 par le présent projet de loi de finances s'élève à 0,9 point de PIB, supérieur de 0,4 point de PIB à la prévision de la loi de programmation des finances publiques. Cela permettrait de réduire en partie l'écart du solde structurel par rapport à la programmation : il s'élèverait à - 1,7 % du PIB, contre une cible initiale de - 1,1 % du PIB (soit un écart de 0,6 point de PIB, contre 1 point en 2013). Le déficit effectif, quant à lui, se réduirait de 0,5 point par rapport à 2013 pour atteindre 3,6 % du PIB. L'effort structurel consenti en 2014 comprend un effort structurel en recettes s'élevant à 0,15 point de PIB et un effort structurel en dépenses à hauteur de 0,75 point de PIB, soit 80 % du total.
S'agissant des recettes, l'effort structurel prendrait la forme de mesures nouvelles d'un montant de 2,7 milliards d'euros, dont 1,8 milliard d'euros au titre de la lutte contre la fraude. Au total, les projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2014 portent des mesures nouvelles dont l'impact est évalué à 8,2 milliards d'euros en 2014. Toutefois, celles-ci sont contrebalancées par les moindres recettes provoquées par les mesures adoptées antérieurement, dont le coût net du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE). A l'inverse, des recettes supplémentaires sont à attendre des mesures adoptées dans le cadre du projet de loi de finances rectificative de juillet 2012 et de la réforme des régimes de retraite. Dans ces conditions, le taux de prélèvements obligatoires serait quasiment stabilisé en 2014, passant de 46 % du PIB en 2013 à 46,1 % du PIB en 2014.
Pour la première fois de la période de programmation, l'effort structurel porterait principalement sur les dépenses : l'effort en dépenses serait de 0,75 point de PIB, soit 80 % de l'effort total. La croissance de la dépense publique en volume passerait ainsi de 1,7 % en 2013 à 0,4 % en 2014, soit une économie de 15 milliards d'euros répartie sur l'ensemble des administrations publiques. L'Etat réaliserait une économie de 8,5 milliards d'euros par rapport à la progression tendancielle de ses dépenses, à laquelle viendrait s'ajouter une économie de 0,5 milliard d'euros sur la charge de la dette liée aux intérêts évités grâce à la réduction du déficit budgétaire depuis 2012. Les dépenses des administrations publiques locales, quant à elles, augmenteraient de 1,2 % en valeur. S'agissant des dépenses des administrations de sécurité sociale en 2014, je laisse le soin à Jean-Pierre Caffet de nous en exposer le détail tout à l'heure, dans la présentation de son avis sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
La nouvelle trajectoire pluriannuelle des finances publiques arrêtée dans le cadre du présent projet de loi de finances repose sur la réalisation d'un effort en dépenses sans précédent sur la période 2014-2017. Alors que sur cette même période, la loi de programmation des finances publiques (LPFP) prévoyait une croissance moyenne en volume des dépenses publiques de 0,5 % par an, l'objectif est désormais une croissance annuelle moyenne de 0,25 %. En d'autres termes, le taux moyen d'évolution initialement inscrit dans la LPFP a été divisé par deux. Ainsi, la dépense publique devrait augmenter de seulement 0,2 % par an entre 2015 et 2017. Cela permettrait une forte réduction du ratio de dépenses publiques sur PIB, qui passerait de 56,6 % du PIB en 2012 à 54 % en 2017.
Il est absolument essentiel que les objectifs de maîtrise de la dépense publique soient respectés, sauf à compromettre la trajectoire de consolidation budgétaire et l'atteinte de notre objectif d'équilibre structurel. Afin de mettre en évidence la sensibilité de la trajectoire des finances publiques au respect de l'effort en dépenses programmé, des projections ont été réalisées à partir de deux scénarii : un scénario dans lequel la croissance des dépenses en volume serait de 1,6 % au cours de la période 2014 2017, ce qui correspond à la moyenne constatée entre 2007 et 2012 et un scénario dans lequel la croissance des dépenses en volume serait de 1 % entre 2014 et 2017 soit une progression intermédiaire entre la moyenne 2007 2012 et la prévision du Gouvernement. Par ailleurs, la trajectoire de l'effort en recettes est supposée rester celle retenue par le Gouvernement.
Les projections font apparaître que le non-respect des objectifs d'évolution de la dépense publique en volume fixés par le Gouvernement dégraderait fortement la trajectoire des soldes structurels et effectifs et de la dette publique. Une progression de la dépense publique de 1,6 % par an en volume entre 2014 et 2017 conduirait en effet à un solde structurel de - 2,8 % du PIB en 2017 (soit un niveau plus dégradé que celui de 2014) et à une dette publique de 98 % du PIB. Le déficit effectif resterait, quant à lui, au-dessus de 4 % du PIB tout au long de la période. Si la progression était de 1 % par an en volume au cours de la même période, le solde structurel serait toujours sensiblement supérieur à l'objectif de moyen terme (OMT) en 2017 atteignant - 1,5 % du PIB. Quant au déficit effectif, il ne reviendrait en-dessous du seuil de 3 % du PIB qu'à l'horizon 2017. Il s'agit de deux scénarii inacceptables pour nos partenaires européens.
Ces projections nous renvoient à celles réalisées par la Commission européenne pour 2015 puisqu'elles montrent, elles aussi, l'impact une réduction, voire d'une absence d'effort sur les dépenses. Elles soulignent l'absolue nécessité de respecter les objectifs de dépenses arrêtés. Le niveau des économies qui doivent être réalisées à cette fin - environ 17,5 milliards d'euros en 2015 par rapport au tendanciel après les 15 milliards d'euros prévus en 2014 - implique que soient engagées des réformes ambitieuses. Il faudra donc que la modernisation de l'action publique (MAP) identifie les leviers d'une transformation en profondeur des administrations publiques. C'est à cette seule condition que la trajectoire pluriannuelle des finances publiques sera respectée.
Par ailleurs, nous avons mesuré la sensibilité de la trajectoire de solde effectif et de dette publique à la conjoncture économique, en retenant deux scénarii conventionnels - dans lesquels la croissance du PIB est supposée supérieure d'un demi-point à la prévision du Gouvernement dans un cas et inférieure d'un demi-point dans l'autre sur la période 2014-2017. Je précise que les projections réalisées ne sont pas des prévisions alternatives et qu'elles reposent sur l'hypothèse que seules les recettes sont sensibles aux variations conjoncturelles.
Il apparaît que la trajectoire de l'ajustement structurel retenue par le Gouvernement ne permettrait pas, en cas de croissance du PIB inférieure d'un demi point aux prévisions, de faire revenir le déficit effectif en deçà de 3 % du PIB en 2015 conformément aux recommandations formulées par le Conseil de l'Union européenne. En effet, le déficit effectif ne passerait sous le seuil de 3 % du PIB qu'en 2016. En outre, le taux d'endettement ne commencerait à se réduire qu'en 2016, avec un an de retard par rapport à la programmation. A l'inverse, une croissance supérieure d'un demi-point aux prévisions - qui correspondrait peu ou prou à un scénario de rattrapage plus rapide du PIB potentiel par le PIB réel - permettrait d'atteindre pratiquement l'équilibre effectif en 2017 (- 0,2 point de PIB). Par ailleurs, la dette publique serait inférieure à la prévision de près de 4 points de PIB en fin de programmation. Nous pouvons donc avoir également un regard un peu plus optimiste.
Selon les prévisions de la Commission européenne, le déficit effectif de l'ensemble de la zone euro s'élèverait à 2,9 % du PIB en 2013 et à 2,8 % du PIB en 2014. Le déficit structurel serait de 1,4 % du PIB en 2013 et de 1,5 % du PIB en 2014. Enfin, concernant l'évolution de la dette publique, celle-ci atteindrait 95,5 % du PIB en 2013 et 96 % du PIB en 2014. La trajectoire de solde structurel de la France apparaît en ligne avec celle de la zone euro. Il faut bien sûr garder à l'esprit que ces trajectoires relèvent avant tout d'un exercice de programmation et peuvent évoluer afin de tenir compte, notamment, des évolutions de la conjoncture économique.
En tout état de cause, les données collectées font clairement apparaître une convergence des trajectoires de soldes effectifs et structurels des principaux Etats membres de la zone euro. Cela tend à démontrer l'effectivité des règles budgétaires européennes instituées au cours de la période récente ; cela explique aussi, compte tenu des effets du multiplicateur budgétaire, le profil de la croissance de la zone euro.
La comparaison des trajectoires de solde structurel avec les principaux pays de la zone euro fait apparaître que nous partons, avec l'Espagne, d'un point de départ assez dégradé en 2012 par rapport aux autres pays, ce qui nous oblige à accomplir, comme elle, un ajustement plus conséquent.
S'agissant du solde effectif et non plus structurel, on constate une très nette convergence des soldes effectifs vers un équilibre en 2017 pour les cinq principales économies de la zone euro (Allemagne, France, Italie, Espagne et Pays-Bas). Un effort considérable doit être accompli par l'Espagne, alors que la situation de la France est proche de celle des Pays-Bas.
Les efforts accomplis permettraient une diminution, au moins en fin de période, de la part des dettes publiques dans le PIB pour les cinq principales économies de la zone euro.
Les principales caractéristiques de la consolidation des finances publiques en France montrent que la trajectoire pluriannuelle des finances publiques retenue par le Gouvernement laisse entrevoir, à l'horizon 2017, une réduction de la dette publique et de la dépense publique ainsi qu'une diminution des prélèvements obligatoires, exprimées en part de PIB.
J'en viens à présent à la deuxième partie de mon exposé : le budget de l'Etat en 2014 et ses principales caractéristiques.
A périmètre courant, les recettes fiscales nettes de l'Etat (soit 284,7 milliards d'euros dans le PLF 2014) diminuent de 3,2 milliards d'euros par rapport à l'évaluation actuelle de ces recettes en 2013. Cette évolution s'explique principalement par l'effet des mesures antérieures au projet de loi de finances, qui réduisent de 11 milliards d'euros les recettes attendues, dont 9,8 milliards d'euros pour le seul CICE. Les mesures nouvelles sont relativement limitées, puisqu'elles ne représentent que 2,3 milliards d'euros. Les recettes d'impôt sur les sociétés croîtraient spontanément de 6,9 % en 2014 et seraient notamment portées par le rétablissement des marges des sociétés. Quant aux recettes de l'impôt sur le revenu, elles augmenteraient spontanément de + 3,7 % ; cette évolution serait portée notamment par la consolidation des marchés financiers et la stabilisation du marché de l'immobilier.
L'évolution des dépenses de l'Etat doit s'analyser au regard des deux normes de dépenses. La norme « zéro volume », la plus large, prévoit que les dépenses ne doivent pas progresser plus rapidement que l'inflation ; en 2014, il est même prévu une baisse de ces dépenses de 1,4 milliard d'euros. La norme « zéro valeur » exclut les dépenses de pensions et la charge de la dette, sur lesquelles le Gouvernement n'a qu'une marge de manoeuvre limitée ; elle diminue également de 1,4 milliard d'euros. Nous allons donc au-delà des deux normes puisque les crédits diminuent sur les deux périmètres, hors investissements d'avenir. Les crédits du deuxième programme d'investissements (12 milliards d'euros) ne sont en effet pas comptabilisés, dès lors qu'il s'agit de dépenses exceptionnelles et par nature, non pérennes. Si ces crédits étaient comptabilisés dans la norme, ils rendraient en pratique impossible son respect en 2014, puis desserreraient totalement la contrainte l'année suivante ; telle n'est pas la philosophie de la norme de dépense.
La répartition des 9 milliards d'économies par rapport à leur évolution tendancielle fait apparaître une participation des opérateurs, des collectivités territoriales et de la contribution française au budget de l'Union européenne.
S'agissant de la contribution des collectivités territoriales, elle s'inscrit dans une concertation avec les acteurs locaux qui a débouché sur un « pacte de confiance et de responsabilité » adopté lors de la conférence des finances publiques locales, le 16 juillet 2013. La situation financière particulièrement dégradée des départements a par ailleurs été prise en compte, et des recettes nouvelles contribueront au financement des allocations de solidarité : des frais de gestion à hauteur de 830 millions d'euros leur sont transférés, qui seront répartis de manière péréquée ; d'autre part, les départements auront la possibilité d'augmenter le taux des droits de mutation à titre onéreux (DMTO). Pour leur part, les régions bénéficient d'une substitution de ressources fiscales relativement dynamiques à des dotations, pour un montant total d'environ 900 millions d'euros. C'est donc sur le bloc communal que reposera l'essentiel de l'ajustement.
Par ailleurs, la péréquation horizontale comme verticale continue de monter en puissance. S'agissant de la péréquation horizontale, les ressources du fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) passent de 360 millions d'euros en 2013 à 570 millions d'euros en 2014, et celles du Fonds de solidarité des communes de la région Ile-de-France (FSRIF) augmentent de 230 millions d'euros en 2013 à 250 millions d'euros en 2014. Pour ce qui est de la péréquation verticale, toutes les dotations à vocation péréquatrice sont augmentées, à un rythme toutefois moins élevé qu'en 2013.
J'en viens à présent à la question des emplois et de la masse salariale.
Les créations d'emplois dans l'éducation nationale, la justice et la sécurité sont plus que gagées par des suppressions d'emplois dans les autres ministères. On observe en effet un schéma d'emplois légèrement négatif, c'est-à-dire 3 280 suppressions de postes de plus que les créations ; si l'on tient compte de 1 771 créations de postes pour les opérateurs, le solde reste négatif à hauteur de 1 509 ETP. En effet, l'objectif de stabilisation des emplois porte sur l'ensemble du quinquennat, et doit prendre en compte les créations d'emplois décidées dans le « collectif » de juillet 2012. Des suppressions nettes d'emplois doivent donc être encore effectuées pour « absorber » ces créations initiales.
Hors pensions, la masse salariale de l'Etat s'élève à 81,4 milliards d'euros dans le projet de loi de finances pour 2014. Sa progression d'une année sur l'autre est de l'ordre de 0,4 %. On rappellera que le Gouvernement a pris l'engagement, dans la loi de programmation des finances publiques, de ne pas faire progresser les dépenses de rémunération de plus de 1 % sur la période 2012-2015. Cet engagement semble être en voie d'être tenu. Au-delà du gel de la valeur du point, cette maîtrise de la masse salariale repose principalement sur une nette décélération des mesures catégorielles. Celles-ci s'établiront en effet à 274 millions d'euros en 2014, soit le plus faible montant depuis 1995 et moins de la moitié de l'enveloppe versée en 2011.
Le projet de loi de finances prévoit que la charge des intérêts de la dette atteindra 46,7 milliards d'euros, soit une diminution de 0,2 milliard d'euros par rapport à la LFI 2013, mais une hausse de 1,7 milliard d'euros par rapport au révisé 2013. Cela traduit l'existence d'un niveau de taux d'intérêt systématiquement inférieur aux prévisions au cours des dernières années, ce qui desserre quelque peu la contrainte sur les finances publiques.
La charge de la dette a progressé ces dernières années de manière moins dynamique que son encours. Nous pouvons nous demander si cette situation va perdurer. En valeur actualisée, l'encours de dette nominale passerait de 1 459 milliards d'euros fin 2013 à 1 531,4 milliards d'euros fin 2014. Un relèvement significatif des taux d'intérêt constitue donc une « épée de Damoclès » pour nos finances publiques. A titre d'illustration, on rappellera qu'une augmentation uniforme de 100 points de base des taux d'intérêt entraîne, à terme, une hausse de la charge d'intérêt de plus de 15 milliards d'euros.
Le besoin de financement de l'Etat s'élèverait à 177 milliards d'euros, dont 174 milliards d'euros d'émissions. La France resterait le deuxième émetteur de la zone euro après l'Italie, dont le seul refinancement de la dette conduit à émettre 194 milliards d'euros de dette. Pour ce qui est des émissions de nouvelle dette au sein de la zone euro, c'est-à-dire l'argent nécessaire pour couvrir le déficit budgétaire, la France en représenterait environ le tiers - 70 milliards sur un total évalué à 215 milliards pour l'ensemble de la zone euro.
M. Philippe Marini, président . - Permettez-moi de lancer la discussion par quelques questions.
Lorsque vous évoquez un taux de croissance de + 0,1 %, n'existe-t-il pas une marge d'erreur statistique susceptible d'être appréciée de différentes façons ? Pour le dire autrement, entre - 0,1 % et + 0,1 %, sommes-nous vraiment capables, du point de vue de la méthodologie statistique, de faire la différence ? Mais, sur le plan psychologique, il est bien préférable d'annoncer + 0,1 %...
Vous indiquez que le déficit structurel est significativement supérieur à la prévision pluriannuelle. Pouvez-vous nous rappeler le jeu des dispositions issues des règles européennes au cas où le Haut Conseil des finances publiques serait amené à constater un décalage significatif par rapport à la trajectoire ? Que peut-il se passer ? Quelle serait la procédure ?
Je constate un écart entre les prévisions du Gouvernement et celle de la Commission européenne. À la fin 2014, le déficit effectif s'établit à 3,6 % selon le Gouvernement et à 3,8 % selon la Commission européenne et, pour 2015, les pourcentages sont respectivement de 2,8 % et 3,7 %.
Vous nous dites, très justement, que la Commission européenne porte son appréciation « toutes choses égales par ailleurs », donc en considérant qu'il n'y aurait pas de mesures correctrices ou, du moins, que les mesures correctrices appropriées ne sont pas annoncées. La Commission européenne a-t-elle, selon vous, raison sur le plan méthodologique ? Le Gouvernement n'a-t-il pas tout dit ? Se serait-il abstenu d'annoncer les mesures qu'il sait devoir prendre pour procéder à des économies plus importantes ou plus efficaces afin de parvenir aux soldes effectifs de 2014 et 2015 ? Quelles peuvent être ces mesures supplémentaires ?
J'aimerais également soulever un point méthodologique - et cela n'a pas de caractère critique - sur la notion de solde stabilisant, c'est-à-dire celui qu'il faut atteindre pour que le ratio dette sur PIB commence à décroître. Il est fonction de la croissance. Nous étions habitués à le fixer autour de 3 %. Je crois comprendre qu'il serait aujourd'hui sensiblement plus bas. Or, il apparaît que la dette publique diminuerait en pourcentage du PIB à partir de soldes sensiblement supérieurs. Il faudrait y voir plus clair.
Enfin, vous évoquez la norme de dépense. Deux dépenses réelles ne semblent pas comprises dans les dépenses totales de l'État. La première, pour un montant de 830 millions d'euros en 2014, représente une compensation attribuée par l'État aux départements, c'est à dire un transfert de l'équivalent des frais d'assiette et de recouvrement des impôts locaux. La seconde est une opération similaire au bénéfice des régions : il s'agit d'une transformation de la dotation globale de décentralisation qui, elle, figurait bien en 2013 dans la norme de dépense. En revanche, sa transformation en un panier de recettes fiscales, pour un même montant de 900 millions d'euros, transféré aux régions, ne serait pas dans la norme de dépense.
Je constate que les habitudes des administrations financières qui s'efforcent, chaque année, de faire un peu « d'habillage » ne sont pas complétement abandonnées. Ce qui peut nous rassurer puisque nous avons toujours connu ce type de pratiques...
En conclusion, les données sur le financement de l'État et de la dette me semblent pouvoir être appelées « celles du meilleur ami » puisque, finalement, le meilleur soutien de la politique budgétaire de ce Gouvernement, ce sont bien les marchés financiers. Ce monde odieux de la finance nous permet d'émettre plus de dettes pour un montant de charges financières maîtrisées, voire en légère décroissance !
M. François Marc, rapporteur général . - Je n'adhère pas à l'idée selon laquelle + 0,1 % ne serait pas significatif, compte tenu de la marge d'erreur. Je constate en effet que certaines prévisions estiment que la croissance française serait de 0,2 % en 2013. L'annonce de 0,1 % ne reflète donc pas un optimisme béat ou une volonté « d'habillage ». C'est une réalité : la France serait sortie de la récession. Telle est l'appréciation des conjoncturistes.
S'agissant des mécanismes de correction, vous posez une question tout à fait légitime. Pour le mécanisme automatique de correction, il est vraisemblable qu'il puisse être déclenché au printemps prochain lors de l'examen du projet de loi de règlement, mais nous devons prendre en compte plusieurs éléments.
Tout d'abord, le mécanisme de correction contraint le Gouvernement à présenter des mesures de correction mais cela ne veut pas dire qu'il faut corriger intégralement et de façon instantanée l'écart constaté.
M. Philippe Marini, présiden t. - Il suffit de faire un discours...
M. François Marc, rapporteur général . - Il suffit de placer la France dans une trajectoire de correction de l'écart. Il ne suffit pas, comme à l'école maternelle, de répondre instantanément à la demande de la maîtresse d'écrire différemment le budget.
Mme Michèle André . - Très bien !
M. François Marc, rapporteur général . - La nouvelle trajectoire pluriannuelle des finances publiques permettra de combler l'écart par rapport à la programmation dans un délai de deux ans. D'ores et déjà, par la correction de trajectoire que nous avons inscrite en arrière-plan de ce projet de loi de finances pour 2014, nous avons, par anticipation, apporté des éléments de réponse. Au printemps prochain, nous pourrons annoncer de quelle façon les efforts qui sont envisagés vont pouvoir se réaliser. Et je pense que l'Union européenne ne pourra que donner acte à la France de sa volonté de se sortir de la difficulté dès lors que cet écart serait effectivement pointé.
Au surplus, une nouvelle loi de programmation des finances publiques sera adoptée à la fin de l'année 2014, ce qui permettra, de façon plus officielle encore, de mieux affirmer notre trajectoire en ayant corrigé et chiffré les étapes aboutissant à une situation assainie en 2017.
En ce qui concerne les appréciations portées hier par la Commission européenne, vous vous demandez si la France n'est pas mise en défaut pour n'avoir pas annoncé ce qu'il faudrait faire. En réalité, la Commission européenne pointe uniquement les mesures qui ont été votées. Par exemple, le projet de loi de réforme des retraites, en cours d'examen par le Parlement, n'a pas encore été voté, il n'est donc pas pris en compte. Il en va de même pour toutes les dispositions de nature structurelle ou les mesures non encore votées, comme, par exemple, celles consistant à réaliser 17 milliards d'euros d'économies en 2015.
S'agissant du solde stabilisant, il faut savoir qu'il se dégrade mécaniquement avec l'accroissement de la dette. Il serait donc supérieur à 3 % du PIB en 2015, lorsque la part de la dette publique dans le PIB commencera à diminuer.
Enfin, je conçois que l'on puisse s'interroger sur le traitement de certaines dispositions du PLF au regard de la norme de dépense. Bien sûr, le Gouvernement doit respecter les règles qu'il s'est lui-même fixé. En tout état de cause, les mesures que vous citez ne sont pas de nature à remettre en cause l'économie générale du projet du Gouvernement.
M. Albéric de Montgolfier . - J'ai deux questions à poser au rapporteur général que je remercie de sa présentation. Premièrement, nous n'avons pas la même conception du mot « économies ». C'est un problème sémantique car, quand on nous dit qu'il y a 8,5 milliards d'euros d'économies dans le budget de l'État, cela devrait se traduire par une baisse des crédits du budget de l'État. Or, on nous parle de moindre progression de l'augmentation naturelle des dépenses. En réalité, les dépenses de l'État, comparées entre le PLF 2013 et le PLF 2014, ne présentent qu'un milliard d'euros d'économies. J'en conclus que les seules économies faites par l'État correspondent au 1,5 milliard d'euros retiré aux collectivités locales, par la baisse de la DGF et que par ailleurs les dépenses progressent.
Comment expliquer la progression du nombre d'emplois des opérateurs de l'État et comment ne peut-on pas mieux contrôler cette évolution inquiétante des effectifs ?
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx . - Je ne poserai pas de question ; quand je vois la manière dont on répond à nos questions, je n'y trouve pas mon compte, c'est pourquoi je m'en tiendrai à des observations.
Je signale que le rapport de la Commission européenne fait apparaître des contrastes importants entre États membres, avec une reprise française qui serait tirée par la consommation intérieure du fait de la baisse du taux d'épargne des ménages. L'investissement des entreprises resterait peu dynamique, la priorité allant à la restauration de leurs marges. En revanche, la croissance sera dynamique en Allemagne en 2014, ainsi qu'en Italie et en Espagne grâce aux bons chiffres du commerce extérieur. Dans le noyau dur de l'Europe, la France est à la traîne. Tout se passe comme s'il y avait une impuissance de la puissance publique. Je ne pense pas qu'on puisse parler de réalisme quant à la politique du Gouvernement, mais d'incapacité à redresser la situation.
M. Vincent Delahaye . - J'ai l'impression que l'on nous abreuve de chiffres et de notions techniques, d'écart structurel ou conjoncturel qui conduisent au final à présenter au citoyen un budget virtuel. Il faut en revenir aux hypothèses de croissance potentielle retenues pour définir le déficit structurel dont on voit que la courbe a tendance à baisser alors que celle du déficit conjoncturel augmente. Sur les économies en dépenses, j'ai l'impression que c'est la période 2007-2012 qui est prise comme référence des économies réalisées en considérant que la croissance a été spontanée durant ces années. Pourquoi ne faisons-nous pas la même chose pour les collectivités locales car, si cette croissance spontanée avait été de 1,6 % comme pour l'État, on aurait pu considérer que, avec 0,4 %, les collectivités ont fait des économies.
Je ne comprends pas non plus le niveau prévu d'économies, en milliards d'euros, alors qu'il avait été annoncé 1,5 milliard d'euros en net.
Le solde de 2013 sera-t-il bien de 4,1 % ? Le chiffre de 4,3 % circule et une différence de 0,2 point de PIB n'est pas anodine. Car une partie de l'effort prévu pour 2014 est repoussée à 2015. L'écart avec la loi de programmation atteint 50 %. Dans une entreprise, un directeur financier affichant de tels résultats serait directement remercié !
Il faudra avoir le courage d'engager des réformes structurelles pour réduire la dépense publique car, pour l'instant, notre planche de salut repose sur les marchés qui nous font encore confiance. Mais combien de temps cela durera-t-il ?
M. Jean-Paul Émorine . - Je demande que la commission des finances prenne en considération les comparaisons faites par l'OCDE dans lesquelles nous voyons que la France est en deuxième position sur le taux de prélèvements obligatoires avec 46 % du PIB jusqu'en 2015 et 2016. Le Gouvernement ne joue pas son rôle sur le ratio de la dépense publique qui représente 56 % à 57 % du PIB. Par rapport à l'Allemagne, dont le taux de prélèvements obligatoires est de 35 % à 36 % et le taux de dépense publique de 46 %, la différence se matérialise par plus de 200 milliards de dépenses publiques de plus pour la France. Ce n'est pas en créant des postes de fonctionnaires que nous allons réduire notre handicap de compétitivité engendré par notre niveau de prélèvements sur les entreprises.
Par ailleurs, les recettes de TVA prévues initialement à 141 milliards d'euros pour 2013 seront inférieures de 11 milliards. Or cette perte de recettes est également attendue pour 2014 et cela doit nous alerter sur le fait que la marge de manoeuvre doit donc porter sur le ratio de dépenses publiques du PIB, dans toutes les administrations publiques, et non sur l'augmentation des recettes.
M. Philippe Marini, président . - Ce propos rejoint la préoccupation de Vincent Delahaye sur l'analyse de l'écart entre le ratio dépenses publiques sur PIB et prélèvements obligatoires sur PIB et nécessite une explication méthodologique.
M. Éric Bocquet . - Mon interrogation, non malveillante, porte sur le réalisme des hypothèses macroéconomiques. L'avis du Haut Conseil des finances publiques du 20 septembre dernier précise que, sauf à modifier la loi de programmation, le mécanisme de correction sera déclenché mi 2014, appelant des efforts supplémentaires pour atteindre l'équilibre structurel en 2016. Ensuite, le ministre de l'économie et des finances indiquait que les règles européennes avaient été intégrées dans le budget et qu'il n'est donc pas nécessaire de le changer. Ces deux discours sont contradictoires. Qui faut-il écouter ?
M. Philippe Marini, président . - Je partage personnellement ces interrogations.
M. Serge Dassault . - On dit que le pire n'est jamais sûr, or ce budget démontre le contraire car il ne présente aucune certitude sur les recettes. Il aurait fallu déposer un projet de loi de finances rectificative ! Quand on fait des prévisions, il faut envisager le pire. Or qu'observe-t-on ? Des faillites d'entreprises, des licenciements, des départs continus à l'étranger de créateurs d'entreprises et de jeunes diplômés. Vous faites état de diminutions de dépenses de personnels, mais vous embauchez plus de 8 000 fonctionnaires pour l'éducation nationale. On ne réduira jamais la dette sans faire d'économies. Cela signifie que nous devons arriver à un stade où les dépenses sont inférieures aux recettes. Nous devrions plafonner, comme le font les Etats-Unis, le niveau de la dette.
Enfin, je répète depuis 10 ans que vous disposez d'un potentiel de 20 milliards d'euros de recettes si vous supprimez les 35 heures. En passant à 39 heures, nous améliorerions la compétitivité des entreprises et disposerions de recettes supplémentaires.
M. Jean Germain . - Je remercie le rapporteur général de son exposé, précis et le plus objectif possible, répondant aux questions que nous nous posons sur la dette, tant en volume qu'en charge de la dette, avec des prévisions de diminution des dépenses publiques.
Comparaison n'est pas raison. Je me souviens que le 16 novembre 2011, François Baroin et Valérie Pécresse déclaraient que, pour la première fois depuis 1945, hors charge de la dette et hors pensions, les dépenses budgétaires diminuaient de 200 millions d'euros. Or, le Gouvernement actuel les diminue de plus d'un milliard d'euros. Comment ce qui était qualifié d'extraordinaire, pour 200 millions d'euros, en 2011, devient, du point de vue de l'opposition, négligeable pour plus d'un milliard d'euros ? Ce sont ces raccourcis de la politique qui font beaucoup de mal au pays.
Par ailleurs, le grand choc pour les collectivités territoriales a été l'annonce inopinée de la suppression de la taxe professionnelle par le Président de la République de l'époque. Cela a déséquilibré l'ensemble des collectivités : régions, départements, établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et communes. Qui l'a fait ? Comment cela a été discuté et combien cela a-t-il coûté ? Il faut que chacun assume sa part de responsabilité.
M. Éric Doligé . - Je souhaite aborder trois sujets. Tout d'abord, je relève que selon le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche, Frédéric Cuvillier, la suspension de l'écotaxe engendre un manque à gagner de 750 millions d'euros pour l'Etat et de 500 millions d'euros pour les collectivités territoriales. Une réflexion est conduite avec le ministre du budget pour savoir comment compenser cette perte de recettes. Comment va se répartir sa prise en charge entre l'Etat, les collectivités territoriales et l'agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) ? Ensuite, la ministre déléguée à la décentralisation, Anne-Marie Escoffier, a affirmé que la poursuite de la baisse des dotations de l'Etat aux collectivités territoriales au-delà de 2015 est probable. Qu'en est-il d'après les informations recueillies par le rapporteur général ? Enfin, comment sera assurée la transition du taux des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) ? Le passage de 3,8 % à 4,5 % sera-t-il optionnel ? Le Gouvernement envisage-t-il d'amender cette réforme ? Et sera-t-il possible à terme d'en revenir au plafond actuel de 3,8 % ? À cette série de trois questions, j'ajoute une information. En effet, je tiens à porter à la connaissance de mes collègues la réponse qui m'a été fournie hier en aparté par le ministre de l'économie et des finances, Pierre Moscovici, à la suite de ma question sur la répartition sectorielle des investissements directs à l'étranger (IDE) sur notre territoire. Contrairement à ce qu'il serait légitime d'espérer, il ne s'agit pas de l'industrie mais essentiellement du secteur immobilier.
M. Jean Arthuis . - Je félicite le rapporteur général pour son éclairage. Cependant, les majorités changent mais les mêmes égarements sont constatés : le Gouvernement témoigne ainsi d'une certaine sérénité et invite à avoir confiance dans l'avenir. Il est vrai que l'utilisation du solde structurel facilite une telle approche. Sa perspective contraste avec celle des Français qui ont les nerfs à vif, ainsi qu'avec nos mille plans sociaux. Pour ma part, je ne vois pas où se trouve le potentiel permettant d'inverser la courbe du chômage. Par ailleurs, je me demande quel serait l'état de notre dette et de notre déficit en l'absence de nos engagements européens. Sans l'Europe, à quelle situation ferions-nous face ? En effet, les marchés financiers se caractérisent par la même intempérance que les gouvernements. Ils ont donc, eux aussi, laissé filer les déficits publics par bêtise et par aveuglement. La confiance mutuelle qui unit les gouvernements aux marchés financiers ne nous rend pas service. Dans la période récente, les taux d'intérêt ont continué à baisser en dépit de nos déficits et de nos endettements publics. Aujourd'hui et à cet égard, les investissements d'avenir sont encore l'occasion de ne pas inscrire des dépenses publiques au budget de l'Etat. Je m'interroge également sur le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) au regard du principe de sincérité des comptes publics. La créance de 10 milliards d'euros des entreprises sur l'Etat en 2013 n'apparaît pas dans nos comptes. À la fin 2014, il s'agira de 20 milliards d'euros, soit un point de PIB. Nous avons besoin d'engager les réformes structurelles qui s'imposent alors que, pour l'instant, nous ne faisons que gagner du temps.
M. Francis Delattre . - Je souhaite prolonger les propos de Jean Arthuis en prenant pour exemple la Réserve fédérale américaine. La politique monétaire des Etats-Unis consiste ainsi à faire marcher la planche à billets, ce qui est facteur d'une financiarisation de l'économie. Au moment où les Français voient que la maison brûle, la majorité nous présente un numéro de « tout va très bien madame la marquise ». Ainsi, en matière de compétitivité, le ministre de l'économie et des finances, Pierre Moscovici, nous assure que les recommandations du rapport Gallois sont quasiment toutes mises en oeuvre. Or, à ma connaissance, seuls 880 millions d'euros ont été engagés au titre du CICE alors que 10 milliards d'euros étaient prévus sur 2013. D'après le Haut Conseil des finances publiques (HCFP), ce dispositif est sous-estimé. Pour moi, ce dernier est également trop compliqué. Par ailleurs, il faut agir en faveur des marges des entreprises, qui se sont détériorées depuis dix-huit mois. Au moins, l'ancienne majorité avait réduit les charges sociales et les taux de TVA, certes trop tardivement pour ces derniers. En outre, le budget des retraites civiles, soit 42 milliards d'euros, reposait jusqu'à maintenant sur un financement à parts égales entre les cotisations et la dotation de l'Etat. Le fait que cette dernière soit appelée à en représenter 75 % doit nous interpeler.
M. Philippe Dallier . - Tout a été dit du côté du réquisitoire contre la majorité actuelle, je n'en rajouterai donc pas, afin de ne pas accabler le rapporteur général. Ma question porte sur les intentions de notre commission à l'égard des finances locales. Nous voyons que les dotations baissent de 1,5 milliard d'euros en 2014 et vont être réparties différemment. Ainsi, les communes subiront une contraction de leurs dotations proportionnelle à l'évolution de leurs recettes réelles de fonctionnement. Ce mécanisme ne prend pas en compte l'effort fiscal des collectivités : une commune caractérisée par une fiscalité lourde sera pénalisée. En outre, notre commission compte-t-elle aborder à nouveau les problématiques de péréquation ? Déposerons-nous des amendements au sujet des dotations versées aux collectivités territoriales, notamment en matière de péréquation ?
M. Philippe Marini, président . - De tels amendements n'impactent pas l'équilibre de la loi de finances et peuvent donc être préparés pour la deuxième partie du projet de loi de finances.
M. Philippe Dominati . - Francis Delattre a relevé les problèmes rencontrés par les entreprises : cet aspect est insuffisamment traité dans le budget proposé par le Gouvernement. J'en arrive à ma question : les hypothèses sur lesquelles repose le projet de loi de finances utilisent de plus en plus une inconnue, à savoir les recettes tirées de la lutte contre la fraude et l'optimisation fiscale. On parle d'un montant compris entre 1,4 milliard d'euros et 2 milliards d'euros. Comment évaluer avec précision le montant de ces recettes ?
M. Edmond Hervé . - Je remercie le rapporteur général pour sa présentation. Pour ma part, j'ai toujours tenu à ne jamais différencier mon discours selon que je suis dans l'opposition ou dans la majorité. J'attire l'attention sur les limites des comparaisons internationales en matière de taux de prélèvements obligatoires (PO). Affirmer que les PO sont trop élevés en France implique de dire quelles conséquences on en tire, y compris pour l'éducation, la santé ou la justice, dont je rapporte les crédits, ce qui me conduit à exiger d'être précis. Entre 2006 et 2012, le nombre de postes dans l'administration centrale des ministères aurait diminué mais ces économies auraient eu pour contrepartie une augmentation des effectifs dans les collectivités territoriales et chez les opérateurs. Il est facile de critiquer notre taux de PO mais il est moins facile de dire où chercher des économies. Dans une vision libérale, l'opposition cherche à transférer aux associations et aux entreprises des missions publiques, à l'instar des politiques de sécurité. J'estime que cette façon de contourner la difficulté est hypocrite. De même, les partenariats public-privé (PPP) vont à l'encontre du principe d'annualité budgétaire et de nos prérogatives de contrôle parlementaire. L'écotaxe en constitue un exemple, je m'interroge d'ailleurs sur le montage du dispositif. Selon moi, la dépense publique forme un tout solidaire et on ne peut plus distinguer entre les dépenses de l'Etat et celles des collectivités territoriales. Dans le pacte de solidarité et de responsabilité entre ces derniers, le principal enjeu est la question fiscale. Par ailleurs, j'estime que la fusion entre l'impôt sur le revenu (IR) et la contribution sociale généralisée (CSG) est devenue une absolue nécessité. Enfin, l'état actuel des valeurs locatives démontre l'injustice fiscale qui frappe les collectivités territoriales. Leur révision est urgente.
M. Philippe Marini, président . - S'agissant des partenariats public-privé (PPP), je rappelle que la commission des finances s'était montrée très critique et en retrait au cours de l'examen des textes instituant ces dispositifs juridiques. Nous avions considéré que les PPP se soutiennent en cas de recettes d'exploitation permettant d'assumer le service des emprunts ; car un PPP est un emprunt qui ne dit pas son nom et qui met à mal le principe d'annualité budgétaire. C'est une facilité que l'on se donne, qui peut se concevoir quand un ouvrage est concédé et engendre ses propres recettes ; en revanche, lorsqu'il porte sur des bâtiments administratifs, c'est une fiction et une facilité. Telle est la ligne que nous avions défendue à l'époque avec le président Arthuis.
M. Jean-Vincent Placé . - Sur la taxe poids lourds, puisque mes collègues de l'opposition ont évoqué le sujet, je me permettrais de dire que le niveau de la redevance allouée à Ecomouv', à hauteur de 21,7 % du produit de la taxe, me paraît invraisemblable et sans précédent. Par exemple, dans le cadre des dispositifs de taxes poids lourds allemand et autrichien, ce niveau est respectivement de 15 % et 10 %, ce qui est déjà élevé. Comment le Gouvernement de l'époque a-t-il pu signer un tel contrat ? La commission d'enquête demandée par nos collègues du groupe socialiste sera utile pour faire la lumière sur ces questions. Pour ma part, j'estime que cette taxe a vocation être nationalisée, et qu'il faut renégocier le contrat avec Ecomouv'.
J'en viens maintenant à la présentation du rapporteur général : y-a-t-il une prise en compte, dans votre analyse de la sensibilité du solde effectif et de la dette publique à la conjoncture, de l'aspect dépenses ? En effet, quand on a peu de croissance, on a un peu plus de dépenses sociales, ce sont les stabilisateurs automatiques. J'ai l'impression que votre analyse ne prend en compte que l'aspect recettes.
M. Yann Gaillard . - Je remercie le rapporteur général, qui a su présenter ce budget déplorable avec une grande loyauté et une grande élégance.
M. François Marc, rapporteur général . - En réponse aux questions d'un certain nombre de mes collègues sur le fait de savoir si l'on peut considérer qu'il y a une réelle baisse des dépenses alors que l'on raisonne par rapport à leur évolution tendancielle, je rappelle que le précédent gouvernement raisonnait de la même façon, notamment pour présenter les économies associées à la révision générale des politiques publiques (RGPP). La Commission européenne se réfère aussi à cette notion quand elle mesure les efforts consentis par les Etats membres.
À Vincent Delahaye, je rappellerai que la RGPP était présentée comme une mesure très efficace, ce qui n'a pas empêché les dépenses publiques d'augmenter de 1,6 % par an en moyenne entre 2007 et 2012, en raison notamment d'un certain nombre d'évolutions automatiques des dépenses calées sur des indicateurs. Dans ce contexte, les 9 milliards d'économies prévues en 2014 relèvent d'un effort conséquent.
Sur le mécanisme de correction automatique, je rappelle que le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) en Europe impose aux Etats membres d'instituer un mécanisme de correction qui se déclenche automatiquement si des écarts importants sont constatés par rapport à l'objectif affiché à moyen terme sur la trajectoire d'ajustement. Le Gouvernement a intégré dans le projet de loi de finances pour 2014 et dans la trajectoire qui y est associée jusqu'en 2017 les corrections nécessaires. Dès lors, si la Commission européenne adresse au printemps une notification à la France, le Gouvernement n'aura pas besoin de recourir immédiatement à une loi de finances rectificative ; il pourra présenter l'effet de plusieurs mesures s'inscrivant dans la nouvelle trajectoire qui sera arrêtée cet automne.
S'agissant des emplois des opérateurs, le chiffre évoqué par Albéric de Montgolfier correspond aux priorités du Gouvernement : la création de 2 000 postes pour Pôle Emploi et de 1 000 postes pour les universités. Hormis ces priorités, le solde d'emplois des opérateurs est négatif. Par ailleurs, l'équilibre global entre créations et suppressions de postes s'apprécie sur le périmètre de l'État et des opérateurs. Le solde de ce périmètre est négatif : 1 509 postes sont supprimés dans le budget 2014.
En ce qui concerne le nombre de fonctionnaires et la masse salariale, j'entends bien les propos de Jean-Paul Emorine qui nous dit qu'il faut adopter un raisonnement global et prendre en compte les emplois des collectivités territoriales dans l'évolution de l'emploi public ; cela dit, comment procéder pour réduire les fonctionnaires territoriaux tout en répondant aux besoins croissants de la population, lorsque l'on est en charge d'un exécutif local ? Une chose est de dire qu'il faut une intégration de l'ensemble des emplois publics dans le raisonnement, une autre est de mettre en oeuvre ces mesures sur le terrain.
En ce qui concerne la dégradation du déficit par rapport à la loi de finances initiale pour 2013, la révision de la prévision de 3,7 % à 4,1 % du PIB à l'occasion de la présentation du projet de loi de finances pour 2014 a pour origine un manque à gagner de l'ordre de 8 milliards d'euros par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale pour 2013, qui pèse lourdement dans la construction du budget 2014 sur les reconductions que l'on peut faire l'année suivante.
Sur la notion d'évolution tendancielle, il faut rappeler que celle-ci correspond notamment à l'impact de l'inflation sur les prestations sociales, les exonérations de cotisations sociales, les contrats aidés, les crédits de paiement des programmes d'investissement pluriannuels, l'évolution de la masse salariale, ainsi que sur la progression des recettes versées au profit de l'Union européenne.
Sur le taux de prélèvements obligatoires, si l'on veut le réduire, il faut de la croissance. Les dépenses publiques baisseront dès 2015. J'attire votre attention sur le fait que le taux de dépenses publiques rapporté au PIB était de 52,6 % en 2007 et de 55,9 % en 2011. C'est cette dérive que le Gouvernement actuel s'emploie à corriger, mais elle est difficile à endiguer.
Le montant des recettes de TVA intègre une baisse de 3 milliards d'euros en raison d'un transfert à la sécurité sociale. Mais il est vrai que cet impôt est relativement peu dynamique en période de croissance atone.
Serge Dassault a regretté l'absence d'un collectif budgétaire en cours d'année, mais je porte à son attention sur le fait que la mise en réserve des crédits a permis d'éviter jusqu'à présent le dépôt d'une loi de finances rectificative, en dehors du traditionnel collectif de fin d'année qui sera déposé prochainement.
En ce qui concerne la taxe poids lourds, l'AFITF perdra 700 à 800 millions d'euros et les départements 160 millions d'euros. La question des compensations n'est pas encore tranchée, à supposer que la recette ne vienne pas, ce qui n'est pas certain puisque la taxe est suspendue. Le Gouvernement considère que ce sont des économies supplémentaires qui viendront financer le manque à gagner, en attendant que la situation soit définitivement tranchée. Je ne reviens pas sur Ecomouv' et les autres aspects du sujet. Je voudrais cependant rappeler que la taxe poids lourds a été adoptée fin 2008, dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2009. J'avais voté contre, comme mes collègues socialistes bretons, avec lesquels nous avions à l'époque attiré l'attention du Gouvernement sur les distorsions de concurrence que le dispositif était susceptible d'induire. Nous avions en conséquence présenté trois amendements visant à moduler la taxe en fonction des territoires et des secteurs, mais ils n'avaient pas été pris en compte. Cette taxe n'a pas été votée à l'unanimité au Sénat, comme je l'entends parfois.
S'agissant des collectivités territoriales, le Gouvernement s'est engagé à réformer la dotation globale de fonctionnement (DGF) en 2014. Nous engagerons donc début 2014 une réflexion au sein de la commission des finances sur la réforme de la DGF, dans le cadre d'un groupe de travail. Sur les valeurs locatives et la péréquation, les travaux se poursuivent.
En ce qui concerne le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), Jean Arthuis estime que ce dispositif constitue une anomalie d'un point de vue comptable ; je souligne cependant qu'une moindre recette d'impôt sur les sociétés à ce titre sera bien constatée dans les comptes de l'Etat en 2014. Je rappelle par ailleurs à Francis Delattre que 2013 constitue une année de préfinancement du CICE.
Enfin, s'agissant de la fraude et de l'optimisation fiscales, de nombreux dispositifs ont été adoptés depuis 2011, et les recettes ont sensiblement augmenté dès 2012. L'article 14 du projet de loi de finances pour 2014 porte sur la lutte contre l'optimisation fiscale au titre des produits hybrides et de l'endettement artificiel. Certains de nos collègues ont également fait part de leurs propositions pour lutter contre certaines pratiques : Jean Arthuis sur les marges arrière de la grande distribution, Éric Bocquet sur la notion d'abus de droit. Il y a des recettes importantes à la clef, mais le chantier demeure important.
La commission a donné acte au rapporteur général de sa communication.