EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. UNE PRÉVENTION ENCORE INSUFFISANTE

Les dépenses et les recettes de la branche AT-MP varient en fonction du nombre de sinistres recensés et de leur gravité, l'objectif premier étant bien sûr de réduire la fréquence et la gravité des accidents du travail et des maladies professionnelles.

En 2012, 1,138 million de sinistres ont été reconnus pour le seul régime général, en nette régression par rapport à 2011 (1,215 million) qui marquait un décrochage heureusement ponctuel par rapport à une tendance longue de réduction du nombre de sinistres. Les données de 2012 sont de ce point de vue plutôt à comparer à celles de 2010 (1,204 million). Un peu plus de 69 % de ces sinistres ont donné lieu à un arrêt de travail, soit 1 point de plus qu'en 2011 et 2 points de plus qu'en 2010. La fréquence des accidents connaît une baisse significative, passant de 36,2 à 35 accidents déclarés de 2011 à 2012 pour 1 000 salariés. Le nombre de maladies professionnelles décroît par rapport à 2011 mais reste, faiblement, supérieur au niveau de 2010. Sur les cinq dernières années, le taux de maladies professionnelles croît de 5 % par an en moyenne : cela correspond à une croissance réelle, même une fois prise en compte l'amélioration du taux de reconnaissance des maladies professionnelles.

A. UN TAUX DE FRÉQUENCE HISTORIQUEMENT BAS DES ACCIDENTS DU TRAVAIL

Les accidents du travail représentent la très grande majorité des sinistres observés en matière professionnelle (82,4 % du total). Le solde se partage entre les accidents de trajet (11 %) et les maladies professionnelles (6,6 %).

1. Des tendances contradictoires

Le nombre d'accidents du travail a nettement régressé au cours des sept dernières années, baissant en moyenne de 3,3 % par an. Le nombre des accidents varie autour de cette tendance, augmentant en 2006-2007, baissant à partir de 2008 malgré une nouvelle augmentation en 2011. Le niveau atteint en 2012 apparaît comme historiquement bas. Il marque en effet une baisse de 6 % par rapport à 2011 mais aussi de 5,4 % par rapport à 2010.

Tableau n° 2 : Nombre d'accidents du travail déclarés

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012*

1 155 300

1 165 000

1 132 400

1 021 400

996 900

1 001 500

943 000

* données estimées

Source : Cnam

2. Une analyse nécessairement multifactorielle
a) Par degré de gravité

Pour ce qui concerne le régime général, l'année 2012 renoue avec l'orientation à la baisse connue en 2008 et 2009, après deux années de hausse.

L' indice de fréquence (IF) atteint ainsi un niveau historiquement bas , inférieur à celui de 2009 et 2010, soit trente-six accidents pour 1 000 salariés : il s'établit à trente-cinq .

Les accidents ayant entraîné un arrêt de travail, dont le nombre avait nettement baissé en 2009 avant de remonter, ont atteint en 2012 leur niveau le plus bas, avec 640 900 cas ; le taux de fréquence des accidents de travail ayant entraîné une incapacité permanente baisse pour sa part de manière régulière sur la longue période.

Tableau n° 3 : Evolution du nombre des accidents de travail avec arrêt pour les années 2007 à 2012

(en italique, taux d'évolution annuelle)

2007

2008

2009

2010

2011

2012(e)

Nombre d'accidents avec arrêt

720 150

703 976

651 453

658 847

669 914

640 900

2,8 %

-2,2 %

- 7,5 %

1,1 %

1,1 %

-4,3%

Source : Cnam, direction des risques professionnels - Statistiques technologiques

b) Par secteurs d'activité

Le nombre et la gravité des accidents varient selon les activités professionnelles.

Les secteurs d'activité qui regroupent le plus grand nombre d'accidents du travail avec arrêt sont, de manière stable : les activités de services et le travail intérimaire (22 %), le BTP (17 %), les services, commerces et industries de l'alimentation (17 %) et les transports, eau, gaz et électricité, livre et communication (14 %).

L'analyse de la fréquence des accidents du travail par secteur d'activité permet de préciser les données qui découlent des chiffres bruts. Le secteur avec le plus haut indice de fréquence (soixante-huit accidents avec arrêt pour 1 000 employés) reste celui du BTP, même si l'indice connaît une légère baisse en comparaison avec 2011. Viennent ensuite l'industrie de l'alimentation et les services, commerces, les secteurs des industries du bois, ameublement, papier carton.

Le fait que le secteur du BTP apparaisse systématiquement comme le plus « accidentogène » montre l'ampleur du travail de prévention à fournir pour ses entreprises. Il convient néanmoins de souligner que le taux de fréquence des accidents de travail avec arrêt a diminué de manière sensible sur les douze dernières années (- 34 %).

3. La nécessité d'une vision globale

Si la Cnam fournit 82,2 % du total des prestations légales versées par les régimes de base au titre de l'indemnisation des accidents du travail et des maladies professionnelles, l'analyse de la sinistralité des seuls salariés affiliés à ce régime ne peut donner qu'une vision imparfaite de la situation des AT-MP. La situation des agriculteurs salariés ou exploitants (7,4 % des prestations servies) et celle des fonctionnaires des différentes fonctions publiques (3,7 % des prestations) demandent une analyse régulière et approfondie en raison des risques importants qui pèsent sur les professions concernées. Une nouvelle étude épidémiologique de l'Institut de veille sanitaire (InVS) pointe ainsi la surmortalité par suicide des agriculteurs exploitants de 22 % à 29 % par rapport à la population générale 1 ( * ) . Or les données statistiques globales demeurent quasiment inexistantes. Les derniers résultats disponibles sur le nombre d'accidents du travail avec arrêt dans la fonction publique d'Etat et dans la fonction publique hospitalière ont cinq ans. Depuis la synthèse sur la période 2000-2010 effectuée par l'Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des maladies professionnelles et des accidents du travail en 2012, aucune nouvelle analyse n'a été faite de l'évolution de la situation pour les salariés du secteur public. Par ailleurs la mise en commun des données disponibles dans trois des principaux régimes de sécurité sociale : régime général, MSA et CNRACL, afin de construire un certain nombre d'indicateurs de surveillance des risques professionnels, telle qu'elle a été étudiée par l'InVS, reste lettre morte.

Le projet semble toujours achopper sur la question du financement. Ceci est d'autant plus regrettable que, comme l'a indiqué l'année dernière votre rapporteur, la France doit répondre aux exigences du règlement n° 349-2011 de la Commission européenne relative à la transmission des statistiques sur les accidents du travail qui prendra effet pour la France en 2016 (pour l'année de référence 2014) et que la mise en place du dispositif doit, selon l'étude de faisabilité, prendre dix-huit mois.

Votre commission regrette cette situation et appelle à nouveau le ministre du travail et les caisses de sécurité sociale à trouver rapidement une solution.


* 1 « Surveillance de la mortalité par suicide des agriculteurs exploitants. Premiers résultats », Bossard C, Santin G, Guseva Canu I, Institut de veille sanitaire, 10/10/2013.

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