Rapport n° 368 (2012-2013) de Mme Muguette DINI , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 20 février 2013
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AVANT-PROPOS
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I. LA « TECHNICISATION » DE
L'ACCOUCHEMENT EST SOUVENT EXCESSIVE POUR LES GROSSESSES PHYSIOLOGIQUES
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II. L'EXPÉRIMENTATION DE MAISONS DE
NAISSANCE : OFFRIR LA POSSIBILITÉ, POUR LES FEMMES QUI LE
SOUHAITENT, DE CHOISIR UNE MÉDICALISATION RAISONNÉE EN
CAS DE GROSSESSE PHYSIOLOGIQUE
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III. LES MAISONS DE NAISSANCE : UNE
RÉPONSE CONCRÈTE ET SÛRE AUX DEMANDES DE
CERTAINES FEMMES
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1. Le souhait d'un accompagnement global et
personnalisé de la grossesse et de l'accouchement : une
femme - une sage-femme
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2. Aujourd'hui, les sages-femmes prennent
déjà en charge 80 % des accouchements par voie
basse
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3. Le collège national des
gynécologues-obstétriciens est favorable à
l'expérimentation
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4. Des maisons de naissance fonctionnent à
l'étranger dans des conditions pleinement satisfaisantes
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5. L'engagement personnel de sages-femmes et de
parents a permis le fonctionnement de projets pilotes, dont les
résultats sont très encourageants
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1. Le souhait d'un accompagnement global et
personnalisé de la grossesse et de l'accouchement : une
femme - une sage-femme
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I. LA « TECHNICISATION » DE
L'ACCOUCHEMENT EST SOUVENT EXCESSIVE POUR LES GROSSESSES PHYSIOLOGIQUES
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TRAVAUX DE LA COMMISSION
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LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
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LISTE DES DÉPLACEMENTS
N° 368
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2012-2013
Enregistré à la Présidence du Sénat le 20 février 2013 |
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des affaires sociales (1) sur la proposition de loi autorisant l' expérimentation des maisons de naissance ,
Par Mme Muguette DINI,
Sénatrice
(1) Cette commission est composée de : Mme Annie David , présidente ; M. Yves Daudigny , rapporteur général ; M. Jacky Le Menn, Mme Catherine Génisson, MM. Jean-Pierre Godefroy, Claude Jeannerot, Alain Milon, Mme Isabelle Debré, MM. Jean-Louis Lorrain, Jean-Marie Vanlerenberghe, Gilbert Barbier , vice-présidents ; Mmes Claire-Lise Campion, Aline Archimbaud, Catherine Deroche, M. Marc Laménie, Mme Chantal Jouanno , secrétaires ; Mme Jacqueline Alquier, M. Jean-Paul Amoudry, Mmes Natacha Bouchart, Marie-Thérèse Bruguière, M. Jean-Noël Cardoux, Mme Caroline Cayeux, M. Bernard Cazeau, Mmes Karine Claireaux, Laurence Cohen, Christiane Demontès, MM. Gérard Dériot, Jean Desessard, Mmes Muguette Dini, Odette Duriez, Anne Emery-Dumas, MM. Guy Fischer, Michel Fontaine, Mme Samia Ghali, M. Bruno Gilles, Mmes Colette Giudicelli, Christiane Hummel, M. Jean-François Husson, Mme Christiane Kammermann, MM. Ronan Kerdraon, Georges Labazée, Jean-Claude Leroy, Gérard Longuet, Hervé Marseille, Mmes Michelle Meunier, Isabelle Pasquet, M. Louis Pinton, Mmes Gisèle Printz, Catherine Procaccia, MM. Henri de Raincourt, Gérard Roche, René-Paul Savary, Mme Patricia Schillinger, MM. René Teulade, François Vendasi, Michel Vergoz, Dominique Watrin . |
Voir le(s) numéro(s) :
Sénat : |
548 (2010-2011) et 369 (2012-2013) |
AVANT-PROPOS
On se doit adonner aux meilleures règles, mais non
pas s'y asservir,
si ce n'est à celles - s'il y en a quelqu'une -
auxquelles l'obligation
et la servitude soient utiles.
Michel de Montaigne,
De l'expérience, Les
essais.
Mesdames, Messieurs,
Les maisons de naissance, lieux où des sages-femmes suivent la grossesse et réalisent des accouchements physiologiques dans un cadre raisonnablement médicalisé, existent dans de nombreux pays. Elles permettent un accompagnement global et personnalisé, puisqu'un même professionnel de santé suit l'ensemble du parcours de la parturiente du début de la grossesse à la fin du post-partum , ce qui permet de créer une relation de confiance particulièrement utile tant sur le plan physique que psychologique, pour la femme et pour le couple.
La présente proposition de loi vise à expérimenter, en France, cette modalité de prise en charge de la maternité qui a fait ses preuves à l'étranger. Elle fixe des conditions de sécurité strictes et en pratique identiques à un accouchement en unité d'obstétrique classique : la maison de naissance doit en effet être attenante à une maternité et conclure avec elle une convention pour organiser leurs relations de travail, notamment les transferts de la première vers la seconde en cas de complication à un moment quelconque. Les maisons de naissance apportent ainsi une solution intermédiaire sûre entre le domicile et l'hôpital.
De nombreux pays ont connus ces vingt ou trente dernières années un processus de « technicisation » de l'accouchement. La France est particulièrement concernée, au point que le collège national des gynécologues-obstétriciens, qui est favorable à l'expérimentation des maisons de naissance, évoque lui-même, dans un avis publié en décembre 2012, « un risque iatrogène de la surmédicalisation et du surtraitement », en plus d'un « gaspillage de moyens ».
Le renforcement progressif des normes applicables aux maternités, conjugué aux évolutions des conditions de vie et au développement général du système de santé, a permis une baisse impressionnante du taux de mortalité infantile : il est passé de 52 décès pour 1 000 naissances en 1950 à 18 en 1970, 7,3 en 1990 et 3,5 en 2010. L'ensemble des pays occidentaux a connu cette formidable évolution et il ne saurait être question de la remettre en cause - ou même de risquer de la remettre en cause - par une quelconque réforme hasardeuse.
En France, le réseau des maternités s'est profondément transformé, en particulier depuis leur classification en trois catégories à partir de 1998 : elles sont moins nombreuses (1 370 en 1975 ; 535 en 2010), donc de plus grande taille, et mieux équipées. Ces restructurations hospitalières doivent être évaluées avec attention, notamment en termes d'accès aux soins mais aussi d'amélioration de la sécurité et de la qualité. On ne peut cependant reprocher aux maisons de naissance d'en être à l'origine puisqu'elles n'existent pas encore... Qui plus est, ces nouvelles structures ne peuvent pas, par définition, être créées sans une maternité attenante. Elles offrent une modalité de prise en charge complémentaire par rapport aux maternités, pour les femmes volontaires et qui poursuivent une grossesse sans pathologie.
Certaines femmes souhaitent vivre leur grossesse et leur accouchement sans médicalisation excessive mais dans de complètes conditions de sécurité pour leur bébé et pour elles-mêmes. Nul ne peut critiquer ce choix même s'il ne le partage pas. En outre, sans que cela soit lié dans un sens ou dans un autre au tempérament des professionnels, l'accompagnement en maison de naissance est par nature plus approfondi et personnalisé qu'en maternité, ne serait-ce qu'en raison de la taille des structures.
La maternité, que douleur et risque accompagnent indubitablement, n'est pas une maladie et ne doit pas être appréhendée comme telle. Pour cela, retenons les meilleures règles mais sans nous y asservir.
I. LA « TECHNICISATION » DE L'ACCOUCHEMENT EST SOUVENT EXCESSIVE POUR LES GROSSESSES PHYSIOLOGIQUES
A. UN RISQUE IATROGÈNE DE SURMÉDICALISATION
Depuis le début des années 1970, les normes applicables aux maternités ont été continûment renforcées et la médicalisation de la prise en charge de la grossesse s'est accentuée.
Selon l'enquête nationale périnatale 2010 1 ( * ) , « l'augmentation parallèle des consultations et des échographies suggère une augmentation générale de la surveillance médicale, qui serait la poursuite des tendances observées au cours des enquêtes précédentes. Un nombre important de consultations prénatales et d'échographies pose la question d'un risque de surmédicalisation ».
Dans le même esprit, le collège national des gynécologues-obstétriciens a indiqué, dans un avis qu'il a adopté en décembre 2012 :
« Il y a aujourd'hui des travaux qui démontrent que la règle « qui peut le plus, peut le moins » ne s'applique pas bien en obstétrique. En effet, les facilités offertes par un plateau technique organisé pour faire face aux pathologies graves voire gravissimes, conduit à en faire aussi usage dans des situations qui le justifient moins.
Il ne s'agit pas seulement d'un gaspillage de moyens , mas aussi du risque iatrogène de la surmédicalisation et du surtraitement .
S'ajoute également la frustration de certaines patientes qui estiment qu'elles auraient peut-être pu accoucher plus simplement ».
Concrètement, entre 2003 et 2010, le nombre moyen d'échographies, déjà élevé par rapport aux pratiques des pays européens, a légèrement augmenté, passant de 4,5 à 5,0 et la prise en charge de la douleur par une péridurale ou une rachianesthésie est devenue plus fréquente, puisqu'elle a concerné 82 % des femmes en 2010, au lieu de 75 % en 2003.
Le taux de césariennes a beaucoup augmenté jusqu'en 2007, date à partir de laquelle il se stabilise à environ 21 % ; or, l'organisation mondiale de la santé (OMS) a fixé à 15 % le taux « raisonnable », en terme statistique, de recours aux césariennes, niveau qui est dépassé dans 90 % des maternités françaises. En outre, le taux de déclenchement des accouchements (environ 20 %) est supérieur en France à celui des pays voisins.
Dans une étude 2 ( * ) publiée par l'Inpes en 2007, Madeleine Akrich, directrice du centre de sociologie de l'innovation, indique : « la politique [de médicalisation] s'est aussi traduite par des interventions techniques toujours plus envahissantes : échographies, outils de diagnostic prénatal, analyses biologiques ponctuent le suivi de la grossesse ; le monitoring en continu du rythme cardiaque foetal, la perfusion d'hormones accélérant l'accouchement, l'analgésie péridurale, l'épisiotomie sont devenus quasi incontournables pendant l'accouchement. A peine né, le bébé est enlevé très vite des bras de sa mère et soumis à toute une batterie de gestes invasifs : administration de vitamine K et d'un collyre dans les yeux, mesure, pesée et prise de température, aspiration gastrique, test de perméabilité anale et test à la seringue... »
A contrario , les Pays-Bas présentent une situation atypique : le taux de césariennes s'élève à 15 %, le taux de déclenchement à 10 % et, surtout, moins de 10 % des femmes bénéficient d'une analgésie péridurale au moment de la dilatation 3 ( * ) .
B. DES MATERNITÉS DE PLUS GRANDE TAILLE, MOINS NOMBREUSES ET MIEUX ÉQUIPÉES
Dans l'objectif de sécuriser la prise en charge de la mère et de l'enfant, l'offre de soins en maternité n'a cessé de se concentrer depuis quarante ans. Le réseau est moins dense mais d'un meilleur niveau d'équipement : en 1975 , la métropole comptait 1 370 maternités , 1 128 en 1981, 814 en 1996, 679 en 2001 et 535 en 2010 , soit une baisse de 61 % en quarante ans .
Les décrets du 9 octobre 1998 relatifs aux conditions techniques de fonctionnement des maternités 4 ( * ) ont accéléré cette concentration de deux manières :
- un seuil de 300 accouchements par an a été fixé pour autoriser l'activité d'obstétrique. En 2010, 14 maternités réalisent encore moins de 300 accouchements par an ;
- les établissements sont classés en trois catégories pour permettre une prise en charge adaptée au niveau du risque évalué. Les maternités de niveau I sont équipées de la seule unité d'obstétrique, celles de niveau II d'une unité d'obstétrique et d'une unité de néonatologie et celles de niveau III disposent en outre d'une unité de réanimation néonatale.
Entre 2001 et 2010, le nombre de maternités de niveau I est passé de 415 à 263 alors que le nombre de celles de niveau II et III progressait légèrement. En 2001, les maternités de niveau I représentaient environ la moitié du nombre de lits ; elles n'en représentent plus que 34 % en 2010 et ce sont celles de niveau II qui regroupent 45 % des lits.
Evolution de l'offre de soins en
maternités
|
||||||
Nombre
|
Répartition du nombre de lits |
Répartition du nombre d'accouchements |
||||
2001 |
2010 |
2001 |
2010 |
2001 |
2010 |
|
Type I |
415 |
263 |
48 % |
34 % |
42 % |
28 % |
Type II |
208 |
212 |
36 % |
45 % |
40 % |
48 % |
Type III |
56 |
60 |
16 % |
21 % |
18 % |
24 % |
Total |
679 |
535 |
19 025 lits |
16 986 lits |
751 186 |
789 508 |
Source : Etudes et résultats, Drees, n° 814, octobre 2012 |
On constate ainsi une certaine « pression » sur les maternités de niveau III : elles réalisent 24 % des accouchements en 2010, tout en ne représentant que 21 % des lits et 11 % des structures, et alors même qu'elles devraient accueillir principalement des grossesses difficiles susceptibles de nécessiter un accueil en néonatologie et/ou en réanimation néonatale.
Cette pression se ressent aussi en termes de qualité de l'accueil : si seule une petite minorité de maternités déclarent avoir souvent des difficultés pour accueillir des femmes par manque de place, un quart des maternités de niveau III sont dans ce cas contre 2 % pour celles de niveau I et 5 % pour celles de niveau II.
Selon l'enquête périnatale 2010, les accouchements ont lieu plus souvent en secteur public et dans des services de très grande taille de type II ou III , ce qui est en partie le résultat des fermetures et des fusions de maternités. Ainsi, la proportion d'accouchements dans des maternités de moins de 1 000 accouchements est passée de 25,3 % en 2003 à 17,4 % en 2010, alors que la proportion d'accouchements dans celles de plus de 3 000 et plus est passée de 8,0 % à 18,8 %.
Les auteurs de l'enquête indiquent d'ailleurs : « Il va falloir s'interroger sur l'impact éventuel de la concentration des naissances dans des maternités de grande taille sur la prise en charge les femmes au moment de l'accouchement, par exemple sur la fréquence des césariennes ou des déclenchements ».
Au total, les décrets de 1998 ont eu des conséquences qu'il est nécessaire d'évaluer : la présentation par les pouvoirs publics de la classification des maternités peut avoir eu tendance à attirer des femmes soucieuses d'accoucher dans des structures fournissant à la fois l'obstétrique, la néonatologie et la réanimation néonatale, sans d'ailleurs que les femmes soient clairement conscientes de ce qui distingue effectivement ces niveaux de maternités. Votre rapporteure se réjouit en conséquence que la présidente de la commission ait commandé à la Cour des comptes une étude sur les maternités, qui devrait être transmise durant le premier semestre 2014.
C. LA MORTALITÉ INFANTILE ET MATERNELLE : DES INDICATEURS À NUANCER
1. Les résultats français se situent dans la moyenne européenne
La mortalité infantile 5 ( * ) en France est en baisse depuis le début du XX e siècle, époque où 15 % des enfants mouraient avant leur premier anniversaire. Ce mouvement s'est fortement accéléré après la deuxième guerre mondiale, avec d'abord des progrès enregistrés principalement dans la période postnéonatale puis, à partir de la fin des années soixante, un recul rapide de la mortalité des premiers jours.
Taux de mortalité infantile (pour 1 000 enfants nés vivants)
Evolution en France depuis 1901
Source : Insee
Taux de mortalité infantile (pour 1 000 enfants nés vivants)
Comparaisons internationales (2011)
Source : Eurostat et ONU
Aujourd'hui, la France se situe dans la moyenne des grands pays européens en ce qui concerne la mortalité infantile , à un niveau proche de celui de l'Allemagne, de l'Italie, de l'Espagne, à un niveau légèrement plus favorable que le Royaume-Uni ou les Pays-Bas, mais assez loin derrière la Suède et la Finlande.
Toutefois, il est nécessaire de prendre en compte de manière spécifique les départements d'outre-mer, où le taux de mortalité infantile reste deux fois plus élevé qu'en France métropolitaine , principalement du fait d'affections dans la période périnatale : 7,8 pour mille contre 3,8, mais ce taux atteint 11,8 en Guyane 6 ( * ) .
Par ailleurs, selon l'Institut national de veille sanitaire (Invs) 7 ( * ) , « si la mortalité maternelle situe la France dans la moyenne des pays européens, elle reste en-deçà des meilleurs, et très loin de la Suède dont les taux sont deux fois plus faibles ». En France, le taux de mortalité maternelle est de 9,6 pour 100 000 naissances. Surtout, 50 % de ces décès seraient « évitables » ou présumés tels, car le plus souvent liés à des mesures thérapeutiques inappropriées. Les taux de mortalité maternelle sont particulièrement élevés en Ile-de-France et outre-mer.
2. Des statistiques à prendre avec précaution
Les pratiques en matière d'enregistrement des naissances prématurées peuvent différer sensiblement selon les Etats : ainsi, la plupart des pays n'appliquent pas de critère d'âge gestationnel ou de poids pour enregistrer la mortalité. Autre exemple, la France a modifié en 2001 et 2008 les règles d'enregistrement à l'état-civil pour les enfants morts-nés, la Drees estimant que ces changements ont pu avoir un impact sur le niveau des indicateurs, d'autant que, en raison du faible nombre d'enfants concernés, l'imprécision éventuelle a un effet sensible sur le taux final.
Certains écarts statistiques peuvent ainsi s'expliquer en partie par des différences dans les définitions et dans la méthodologie utilisées pour élaborer les indicateurs .
Par ailleurs, les modes de prise en charge de la maternité sont également très variés, à la fois en termes de lieu d'accouchement et de professionnels de santé qui suivent la grossesse et l'accouchement (sage-femme, médecin).
Le système néerlandais est ainsi très différent des autres prises en charge obstétricales en Europe , notamment du fait que les grossesses physiologiques sont a priori séparées des situations à risque plus élevé. Les premières sont suivies en soins « primaires » par une sage-femme, à domicile, en centre de naissance ou à l'hôpital ; les secondes le sont en soins « secondaires » par un obstétricien à l'hôpital. Au fur et à mesure de l'avancement de la grossesse, le nombre de femmes suivies en soins secondaires augmente. Au total, 33 % des femmes sont accouchées par une sage-femme, dont 27 % à domicile .
II. L'EXPÉRIMENTATION DE MAISONS DE NAISSANCE : OFFRIR LA POSSIBILITÉ, POUR LES FEMMES QUI LE SOUHAITENT, DE CHOISIR UNE MÉDICALISATION RAISONNÉE EN CAS DE GROSSESSE PHYSIOLOGIQUE
A. UNE PREMIÈRE TENTATIVE LÉGISLATIVE EN 2010, QUI N'A PAS ABOUTI POUR UNE RAISON DE FORME
Dès 1998, Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé, annonce sa volonté de voir ouvrir des maisons de naissance. Le plan Périnatalité 2005-2007 , approuvé en 2004, a adopté une nouvelle orientation de la politique périnatale en s'appuyant sur quatre axes : humanité, proximité, sécurité et qualité. Il prévoyait notamment l'expérimentation de « maisons de naissance » . Un groupe de travail est alors constitué sous l'égide du ministère de la santé afin de définir un cahier des charges, mais aucun accord n'a pu être trouvé entre les différentes parties prenantes.
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, décide en conséquence de proposer le lancement d'une expérimentation dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 8 ( * ) . Les débats furent animés et ont transcendé la plupart des groupes politiques.
La commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a d'abord adopté des amendements de suppression de cet article du PLFSS pour 2011, mais les débats en séance publique permirent d'aboutir à une rédaction renforçant l'encadrement juridique du dispositif. Au nom du groupe socialiste, Marisol Touraine, députée, précisait : « si ces maisons de naissance sont adossées à des établissements présentant toutes les garanties de sécurité et possédant tous les moyens d'intervention chirurgicale rapide, nous ne nous opposerons pas à une expérimentation ». Plus tard dans les débats, Marisol Touraine résumait la position du groupe socialiste : « Je dis très rapidement que, la discussion faisant progresser notre réflexion, nous avons modifié notre position : la majorité de notre groupe votera le dispositif, tandis que certains s'abstiendront ».
Au Sénat, la commission des affaires sociales a elle-même déposé un amendement, voté en séance publique, de suppression de l'article.
A l'initiative de Bérengère Poletti, députée, la commission mixte paritaire a approuvé l'expérimentation des maisons de naissance dans une rédaction légèrement modifiée pour accroître le rôle de la Haute Autorité de santé. Lors de la commission mixte paritaire, une nette majorité de parlementaires s'est en définitive exprimée en faveur de l'expérimentation, dont votre rapporteure, Marisol Touraine et Bernard Cazeau.
Marisol Touraine s'exprimait ainsi :
« La position du groupe SRC a évolué pendant les débats. Nous n'avons jamais été opposés au principe des maisons de naissance, mais étions très inquiets sur leur encadrement . Au terme de ces débats, nous avons obtenu des garanties sérieuses dans plusieurs domaines. Tout d'abord sur la sécurité : il fallait éviter que l'on ne distingue a priori des grossesses qui seraient ? à risque » et des grossesses qui ne le seraient pas ; l'adossement obligatoire des maisons de naissance à une maternité évitera ce travers. La deuxième crainte que nous avions portait sur le risque de fermeture de maternités de proximité ; à cet égard, la comptabilisation de l'activité des maisons de naissance au titre de leur maternité d'adossement évitera ce risque. Enfin, il s'agit d'une expérimentation qui sera surveillée et évaluée. Dans ces conditions, nous pouvons l'accepter . »
En définitive, l'expérimentation des maisons de naissance fut bien votée par l'Assemblée nationale et le Sénat dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, mais le Conseil constitutionnel a estimé que cette mesure avait « un effet trop indirect sur les dépenses » de l'assurance maladie.
B. LES DISPOSITIONS DE LA PRÉSENTE PROPOSITION DE LOI
La proposition reprend, sans aucun changement de fond, la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale et le Sénat dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 mais censurée par le Conseil constitutionnel pour une raison de forme.
1. La définition des maisons de naissance
L' article 1 er permet au Gouvernement d'autoriser, à titre expérimental, la création de structures dénommées « maisons de naissance », où des sages-femmes réalisent l'accouchement des femmes enceintes dont elles ont assuré le suivi de grossesse .
Ce suivi et cet accouchement sont réalisés dans les conditions d'exercice de la profession de sage-femme fixées d'ores et déjà par les articles L. 4151-1 et L. 4151-3 du code de la santé publique. Ainsi, en cas de pathologie maternelle, foetale ou néonatale pendant la grossesse, l'accouchement ou les suites de couches, et en cas d'accouchement difficile (« dystocique »), la sage-femme doit faire appel à un médecin .
Par ailleurs, la maison de naissance, qui n'est pas un établissement de santé ( article 2 ), doit être attenante à une structure autorisée pour l'activité de gynécologie-obstétrique, avec laquelle elle passe obligatoirement une convention . Cette convention permet notamment d' organiser les transferts entre la maison de naissance et la maternité en cas de complication ou, par exemple, lorsque la femme souhaite finalement bénéficier d'une analgésie péridurale qui ne peut être pratiquée en maison de naissance en l'absence de médecin anesthésiste.
En outre, l'activité de la maison de naissance sera comptabilisée avec celle de la maternité partenaire, pour éviter aux maternités qui seraient proches du seuil des 300 accouchements par an, nécessaire pour être autorisé à fonctionner, de passer en-dessous de ce seuil (article 1 er ).
2. Le déroulement de l'expérimentation
Les conditions de l'expérimentation , notamment celles de prise en charge par l'assurance maladie de la rémunération des professionnels et les conditions spécifiques de fonctionnement des maisons de naissance seront fixées par décret en Conseil d'Etat ( article 5 ).
La Haute Autorité de santé (HAS) devra adopter un cahier des charges ( article 3 ). Ce cahier des charges fixera notamment les recommandations de prise en charge (critères d'accueil des parturientes...).
En conformité avec ce cahier des charges et après avis conforme de la HAS , les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale pourront alors, pendant une période de deux ans (article 1 er ), arrêter la liste des maisons de naissance autorisées à fonctionner à titre expérimental (article 3).
En pratique, les agences régionales de santé (ARS) joueront un rôle déterminant dans l'accompagnement et la préparation des dossiers, ainsi que dans le contrôle du bon déroulement de l'expérimentation, mais celle-ci sera pilotée et décidée au niveau national avec un engagement ministériel.
Ces autorisations porteront sur une durée maximale de cinq ans (article 1 er ).
Pour la mise en oeuvre de l'expérimentation, le Gouvernement pourra déroger à certaines règles législatives (article 2) :
- relatives à la planification sanitaire (articles L. 1434-2 et L. 1434-7 du code de la santé publique) et aux compétences des ARS en matière d'autorisation d'exercice (article L. 6122-1 du même code) ;
- relatives aux règles de prise en charge par l'assurance maladie de certains actes inscrits sur une liste prévue à l'article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale ;
- relatives aux modalités de répartition de la dotation nationale de financement des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation (Migac).
Enfin, l' article 4 concerne l'évaluation de l'expérimentation : un rapport sera remis au Parlement par le Gouvernement au moins un an avant le terme de la dernière autorisation attribuée.
3. Le financement des maisons de naissance
Les modalités de financement des maisons de naissance, durant la période d'expérimentation, seront définies dans le décret en Conseil d'Etat que devra prendre le Gouvernement.
Le « modèle » est à inventer puisqu'il n'existe pas en France aujourd'hui de cadre juridique pour de telles structures.
Dans le cas où la maison de naissance est complètement intégrée à un établissement de santé (public ou privé), la prise en charge peut être assurée de la même manière que si la parturiente accouche dans une unité classique d'obstétrique, notamment grâce au tarif hospitalier (GHS) relatif aux accouchements par voie basse sans complication. La maison de naissance de Pontoise ( cf . ci-après) est actuellement financée de cette manière.
Pour autant, il sera certainement nécessaire de dégager une enveloppe pour financer certains frais, notamment de structure, qui ne seraient pas couverts par ce GHS ; c'est pourquoi la proposition de loi prévoit une possibilité, le cas échéant, d'utiliser les Migac.
Dans les autres cas que les maisons de naissance strictement hospitalières, l'expérimentation devra justement permettre d'évaluer les besoins et de définir un financement adapté pour les professionnels et pour la structure.
Aujourd'hui, les sages-femmes libérales réalisent très peu d'accouchements, à la fois du fait d'une rémunération trop faible (313,60 euros pour l'ensemble du suivi de l'accouchement, soit plusieurs heures de travail) et d'une impossibilité pour elles de s'assurer au titre de la responsabilité civile professionnelle. Qui plus est, la possibilité qui est dorénavant ouverte d'accéder aux plateaux techniques des maternités est rarement mise en oeuvre.
On pourrait donc envisager que l'assurance maladie, en accord avec la HAS et le ministère en charge de la sécurité sociale, révise la liste des actes et prestations pour prendre en compte la nouvelle modalité de prise en charge de l'accouchement que constituent les maisons de naissance.
Plus généralement, votre rapporteure rejoint les conclusions de la Cour des comptes 9 ( * ) mettant en avant la nécessité de reconfigurer la tarification des sages-femmes au profit d'un suivi global, y compris postnatal.
Au total, il ne peut pas y avoir un système unique de financement ; tout dépend du projet local qui est à la base de la maison de naissance.
4. La prise en charge de la femme enceinte par l'assurance maladie reste inchangée
La proposition de loi ne modifie en aucune façon les modalités de remboursement par l'assurance maladie des frais médicaux destinés aux femmes enceintes et à l'accouchement, qui sont fixées à l'article L. 331-2 du code de la sécurité sociale.
Du début de la grossesse jusqu'à la fin du cinquième mois , les frais médicaux sont remboursés aux tarifs habituels ; en revanche, les examens médicaux qui s'inscrivent dans le « parcours maternité » décrit en page suivante sont pris en charge à 100 % (sur la base et dans la limite des tarifs de l'assurance maladie), notamment :
- les consultations prénatales dites obligatoires (une avant la fin du 3 e mois de grossesse, puis une par mois à partir du 4 e mois jusqu'à la date de l'accouchement) ;
- huit séances de préparation à la naissance et à la parentalité ;
- les examens biologiques complémentaires (y compris ceux du futur père).
Si nécessaire, le caryotype foetal et l'amniocentèse pour la recherche de certaines maladies génétiques sont pris en charge à 100 %. Une échographie par trimestre est prévue pour surveiller la croissance et la santé de l'enfant. Les deux premières échographies réalisées avant la fin du cinquième mois de grossesse sont prises en charge à 70 %. A partir du sixième mois de grossesse, la 3 e échographie est prise en charge à 100 %. En cas de grossesse pathologique ou de pathologie foetale, d'autres échographies peuvent être prescrites et être prises en charge.
A partir du début du sixième mois de grossesse et jusqu'au 12 e jour après l'accouchement , le suivi médical de la grossesse, ainsi que l'ensemble des frais médicaux remboursables (pharmaceutiques, d'analyses, d'examens de laboratoire, d'hospitalisation) sont pris en charge à 100 %, qu'ils soient en rapport ou non avec la grossesse (sur la base et dans la limite des tarifs de l'assurance maladie).
Durant cette période, la future mère est exonérée de la participation forfaitaire de 1 euro, des franchises sur les médicaments, les actes paramédicaux et les transports sanitaires, ainsi que du forfait journalier à l'hôpital (18 euros) et du forfait hospitalier (également 18 euros).
III. LES MAISONS DE NAISSANCE : UNE RÉPONSE CONCRÈTE ET SÛRE AUX DEMANDES DE CERTAINES FEMMES
1. Le souhait d'un accompagnement global et personnalisé de la grossesse et de l'accouchement : une femme - une sage-femme
Si une enquête 10 ( * ) réalisée en 2006 par la Drees sur la satisfaction des usagères des maternités dresse un tableau positif, les attentes des femmes se portent en priorité sur l'écoute et l'accompagnement, puis le dialogue et les explications reçues, avant la qualité technique de la prise en charge. En outre, environ 6 % des femmes interrogées se déclarent pas du tout ou plutôt pas satisfaites en ce qui concerne le déroulement de l'accouchement.
On peut donc estimer que les maternités accueillent les femmes de manière satisfaisante pour la grande majorité d'entre elles mais qu'un certain pourcentage souhaiterait une prise en charge différente qui n'existe pas aujourd'hui. Selon une enquête Ipsos de décembre 2010, 2 % des femmes enceintes déclarent qu'elles préfèreraient accoucher à domicile et un groupe minoritaire souhaitant pouvoir bénéficier d'un accouchement peu médicalisé a été identifié lors de la préparation du plan Périnatalité 2005-2007.
En 2010, l'Union nationale des associations familiales (Unaf) a réalisé une enquête auprès de 952 femmes : 15 % d'entre elles estiment que leur projet de naissance ou leur choix pour l'accouchement n'a pas été respecté et 36 % déclarent ne pas avoir été libres de bouger ou de se positionner lors de l'accouchement .
L'ensemble des acteurs de la périnatalité mettent d'ailleurs en avant la nécessité de retrouver « l'humain », alors même que les maternités sont de plus grande taille qu'auparavant et que les personnels sont en situation de contraintes importantes. Il s'agissait d'ailleurs d'un axe fort du plan Périnatalité 2005-2007 mais les résultats sont nettement insuffisants : quelques espaces physiologiques ont été créés dans certaines maternités mais le plus souvent sans personnel dédié et sans changement réel de prise en charge.
Les maisons de naissance permettent d'apporter aux femmes et aux couples qui le souhaitent et qui remplissent les conditions d'une grossesse physiologique un accompagnement global et personnalisé , c'est-à-dire qu'il associe une femme, un couple et une sage-femme du début de la grossesse à la fin du post-partum .
Cet accompagnement autorise une écoute particulière, sur la durée , et crée une relation de confiance qui facilite grandement l'accouchement et le suivi postnatal.
2. Aujourd'hui, les sages-femmes prennent déjà en charge 80 % des accouchements par voie basse
En France, la profession de sage-femme est une profession médicale , réglementée par le code de la santé publique (article L. 4151-1 et suivants) et un code de déontologie, que l'ordre est chargé de faire respecter. Spécialistes de la grossesse physiologique, c'est-à-dire celle qui ne présente aucun trouble pathologique, les sages-femmes interviennent à toutes les étapes de la grossesse : en consultation pour assurer son suivi, en salle de naissance lors de l'accouchement puis en suites de couches pour surveiller le rétablissement de la mère et le bon développement de l'enfant. Depuis la loi HPST 11 ( * ) , elles peuvent effectuer des consultations de suivi gynécologique de prévention et de contraception auprès de toutes les femmes en bonne santé.
Le nombre de sages-femmes a quasiment doublé entre 1990 et 2010 et devrait continuer à augmenter jusqu'en 2030. Début 2011, 18 800 sages-femmes exercent en France 12 ( * ) .
Elles exercent majoritairement à l'hôpital public : elles y assurent la majorité des accouchements, les médecins n'intervenant que pour ceux difficiles ou à risque. Dans le secteur privé, c'est le médecin qui est le plus souvent en charge de l'accouchement, la sage-femme étant chargée de la préparation et de l'accompagnement de la femme.
Selon l'enquête Périnatalité 2010, les accouchements sont réalisés, dans plus de la moitié des cas, par une sage-femme , et ce pourcentage est en nette augmentation puisqu'il est passé de 47,5 % en 2003 à 55,8 % en 2010 . En cas d'accouchement par voie basse non opératoire , le pourcentage d'accouchements par sage-femme est passé de 69,1 % en 2003 à 79,7 % en 2010 . Dans le secteur public, les accouchements par voie basse non opératoire sont réalisés presque systématiquement par des sages-femmes (91,8 % en 2010).
Dans son rapport précité sur le rôle des sages-femmes dans le système de soins, la Cour des comptes souligne l'intérêt d'une plus large prise en charge des grossesses à bas risque par les sages-femmes . Ainsi, une méta-analyse citée par la Cour et relative à la comparaison des modèles de soins obstétricaux effectués par les sages-femmes par rapport à d'autres modèles de soins conclut à des bénéfices importants pour ce qui concerne la réduction du nombre de péridurales, d'extractions instrumentales, d'hospitalisation des nouveau-nés et en termes de mise en place de l'allaitement. Selon cette analyse, la satisfaction relative aux différents aspects des soins semble plus élevée dans les modèles de pratique de sages-femmes.
3. Le collège national des gynécologues-obstétriciens est favorable à l'expérimentation
Malgré la position d'un certain nombre de gynécologues-obstétriciens, le collège national fut d'abord opposé, en 2008, à la création de maisons de naissance en France.
Il y est aujourd'hui favorable. Dans un document relatif à l'accouchement physiologique publié le 5 décembre 2012, il estime que « les progrès réalisés pour la prise en charge du haut risque obstétrical sont tels que personne, raisonnablement, ne songerait à revenir en arrière. Mais dans le même temps, de nombreuses voix se sont élevées pour préconiser une prise en charge moins médicalisée de l'accouchement normal, ce qui avait été espéré dès 2001 puis en 2005 par l'annonce par le ministère de la santé d'un projet d'expérimentation de maisons de naissance ».
Le collège considère ainsi que la simplification de la prise en charge obstétricale de l'accouchement physiologique pourrait aussi s'envisager selon les modalités suivantes : lieu spécifique aménagé en dehors du plateau technique médicalisé (mais à proximité immédiate et en lien fonctionnel avec lui pour des raisons de sécurité), prise en charge par des sages-femmes dans les limites de leurs compétences reconnues.
Le dispositif retenu dans la proposition de loi entre pleinement dans le champ approuvé par le collège national des gynécologues-obstétriciens , ce qui a été confirmé à votre rapporteure durant l'audition des représentants de ce collège.
Plusieurs personnalités, dont le professeur René Frydman, gynécologue-obstétricien, ont en outre publié une tribune 13 ( * ) en mars 2012 qui se concluait ainsi : « Il est difficilement compréhensible que malgré les résultats des expériences européennes et les approbations successives des autorités de tutelle au cours des dix dernières années, une expérimentation ne puisse enfin être réalisée en France ».
4. Des maisons de naissance fonctionnent à l'étranger dans des conditions pleinement satisfaisantes
Les premières maisons de naissance sont apparues aux Etats-Unis dans les années 1970. En Europe, un premier « centre de naissance librement choisie » a été ouvert à Berlin en 1987. Des maisons de naissance existent dans de nombreux pays : Australie, Canada, Allemagne (150 structures), Suisse (22) Suède (8), Belgique, Pays-Bas, Italie, Espagne, Autriche, Royaume-Uni (« Birth centers »)...
Au Québec, 76 % des accouchements ont lieu en maison de naissance , 1,5 % à 2 % en Allemagne et en Suisse et 0,3 % aux Etats-Unis.
Les maisons de naissance qui existent à l'étranger présentent certaines caractéristiques communes. Elles sont tout d'abord gérées de façon autonome par des sages-femmes . Celles-ci effectuent un suivi global des patientes, tout au long de leur grossesse, au cours de l'accouchement et jusqu'à trois heures après celui-ci. Une aide natale, profession qui existe par exemple aux Pays-Bas, peut alors prendre le relais pour assurer un suivi dans les jours qui suivent l'accouchement.
Contrairement aux dispositions de la proposition de loi, les maisons de naissance ne sont pas nécessairement « attenantes » à une maternité, mais elles se situent à proximité d'un plateau technique obstétrical avec laquelle elles ont une relation de collaboration. Ce dispositif permet d'assurer le transfert des parturientes en cas de complication durant le travail. Au Québec, il est prévu que les maisons de naissance doivent pouvoir transférer leurs patientes dans une maternité en moins de trente minutes dans les pires conditions climatiques.
Ce sont enfin des structures de taille modeste , qui assurent un nombre limité d'accouchements chaque année (au plus 350). Elles n'assurent pas l'hébergement des femmes, qui n'y séjournent pas au-delà de 24 heures après l'accouchement, un suivi à domicile prenant ensuite le relais.
Les bénéfices de ces structures sont reconnus à la fois par la littérature médicale internationale et par les pouvoirs publics nationaux qui les intègrent dans l'organisation du système de santé et dans la sécurité sociale.
Une étude 14 ( * ) anglaise publiée le 24 novembre 2011 a ainsi établi que, pour les femmes multipares 15 ( * ) ayant eu une grossesse simple à bas risque, le taux d'incidents périnataux ne différait pas significativement selon le lieu d'accouchement . Ces travaux, qui ont porté sur un total de 64 583 enfants nés à terme, se fondaient sur une comparaison des résultats périnataux et des interventions pendant le travail selon le lieu d'accouchement planifié à travers le réseau du National Health Service britannique.
Aux Etats-Unis, une large étude 16 ( * ) publiée en 2013 a porté sur 15 574 femmes ayant prévu d'accoucher dans une maison de naissance gérées par des sages-femmes (« birth center ») , dans 79 centres répartis dans 33 Etats et sur la période 2007-2010 : 84 % d'entre elles ont bien accouché dans la maison de naissance, 4 % ont été transférées à l'hôpital avant leur admission dans la maison de naissance et 12 % l'ont été durant le travail. Au total, 93 % ont connu une « naissance vaginale spontanée » (« spontaneous vaginal birth »), 1 % une « naissance vaginale assistée » (« assisted vaginal birth ») et 6 % une césarienne. Il n'y a pas eu de mortalité maternelle. Le taux de mortalité du foetus au moment de l'accouchement s'est élevé à 0,47 pour 1 000 et le taux de mortalité néonatale à 0,4 pour 1 000.
Selon cette étude, diverses analyses ont démontré que les maisons de naissance pouvaient assurer la prise en charge de la maternité pour les femmes dont la grossesse est à « bas risque », de manière sûre, efficace, en déployant moins de ressources et avec un haut niveau de satisfaction des patientes.
5. L'engagement personnel de sages-femmes et de parents a permis le fonctionnement de projets pilotes, dont les résultats sont très encourageants
Dans le cadre des travaux du plan Périnatalité 2005-2007, qui prévoyait l'expérimentation des maisons de naissance, plusieurs projets ont émergé et certains ont abouti malgré l'absence de cadre juridique établi. Votre rapporteure en a visité deux. Plusieurs autres projets sont en cours d'élaboration ou fonctionnent : Rennes, Thonon, Remiremont, Marseille, Lyon... Depuis trois ans existe également la maison de naissance de la polyclinique Bordeaux Rive droite, dite « Maison arc-en-ciel », où se sont déroulées cinquante-huit naissances en 2012.
a) Maison de naissance de l'hôpital de Pontoise
Un projet a démarré à Pontoise en 2006, dans un cadre strictement hospitalier et sous l'impulsion du chef de service de la maternité, le docteur Jean-Michel Muray : la maison de naissance se situe à un étage du bâtiment femme-enfant de l'hôpital René Dubos de la ville, elle est inscrite dans le schéma régional d'organisation des soins (Sros) d'Ile-de-France et s'insère dans un réseau périnatal. Les deux sages-femmes qui l'animent sont salariées de l'hôpital. Une association de parents, Pamana, participe pleinement à ce projet.
Chaque sage-femme assure le suivi global et personnalisé de ses patientes : le premier entretien, les consultations prénatales, les séances de préparation à la naissance et à la parentalité, l'accouchement physiologique et la consultation postnatale.
Depuis 2007, une centaine de femmes sont suivies chaque année et autant d'accouchements sont pratiqués. Depuis 2010, la maison de naissance est obligée de refuser environ 150 femmes chaque année par manque de place . La maternité, de type III, a réalisé au total 4 200 accouchements en 2010. La maison de naissance constitue donc, du point de vue de la maternité, un moyen de mieux répartir la prise en charge de l'accouchement et d'alléger quelque peu le travail de l'équipe dédiée au plateau technique.
Environ 20 % des femmes sont transférées vers l'unité classique d'obstétrique, située dans le même bâtiment. La moitié de ces transferts ont lieu « pré-partum » (c'est-à-dire durant la grossesse), en raison d'une complication ou par choix personnel de la parturiente, et l'autre moitié « per-partum ». Seules 10 % des femmes sont donc transférées en maternité durant le travail .
b) Comme à la maison (CALM), association pour la maison de naissance des Bluets (Paris)
En 2008, un autre projet a vu le jour, à Paris, au rez-de-chaussée de la maternité des Bluets. Il est porté par une association de parents (le CALM) et les sages-femmes y exercent en libéral.
Contrairement à Pontoise où tout l'accouchement se déroule dans une salle de la maison de naissance, le travail commence dans les locaux de l'association mais la femme et la sage-femme se déplacent dans une salle de la maternité un peu avant l'accouchement pour des raisons d'assurance de la professionnelle. Ce déplacement n'entraîne pas de mobilisation du personnel de la maternité ; c'est la sage-femme du CALM qui continue le travail et l'équipe médicale de la maternité n'intervient qu'en cas de complication.
Depuis la création de l'association, 220 bébés sont nés au CALM.
c) Des structures difficilement pérennes en l'état actuel du droit
Ces projets pilotes n'existent que par la bonne volonté des individus, notamment les chefs d'établissement et de service des maternités concernées. Un cadre juridique leur assurerait donc une pérennité et un mode de fonctionnement plus clair.
Il permettrait notamment aux sages-femmes libérales de contracter une responsabilité civile professionnelle adaptée permettant effectivement de pratiquer les accouchements dans la maison de naissance.
Il permettrait également de trouver des modalités de financement équilibrées et durables .
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Réunie le mercredi 20 février 2013, sous la présidence de Mme Annie David, présidente, la commission a adopté la proposition de loi sans modification.
TRAVAUX DE LA COMMISSION
Réunie le mercredi 20 février 2013 , sous la présidence de Mme Annie David, présidente, la commission examine le rapport de Mme Muguette Dini sur la proposition de loi autorisant l' expérimentation des maisons de naissance .
Mme Muguette Dini , rapporteure . - En décembre 2010, l'Assemblée nationale et le Sénat adoptaient le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 dont l'article 67 entendait ouvrir une expérimentation relative aux maisons de naissance. Vous vous en souvenez, nos débats sur cette question ont été animés, tant dans cette salle qu'en séance et en commission mixte paritaire.
Nous avions abouti à une rédaction de compromis, assez largement approuvée dans chacun de nos groupes, mais qui a malheureusement été censurée par le Conseil constitutionnel pour une raison de forme, celui-ci estimant en effet que cette expérimentation avait « un effet trop indirect sur les dépenses » de l'assurance maladie.
Convaincue de l'intérêt de ce projet, j'ai déposé en mai 2011 la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui et qui reprend très largement la rédaction que nous avions adoptée dans la loi de financement.
Que prévoit ce texte ?
A titre expérimental, le Gouvernement pourra autoriser le fonctionnement de « maisons de naissance », qui sont des structures où des sages-femmes réalisent l'accouchement des femmes enceintes dont elles ont assuré le suivi de grossesse. Les maisons de naissance permettent donc un suivi global de la grossesse, de l'accouchement et des suites de couches par une même sage-femme ou un binôme de sages-femmes.
Ces structures sont destinées à accueillir des femmes qui souhaitent accoucher dans des conditions moins médicalisées que dans une unité d'obstétrique classique.
Comme il est déjà prévu à l'article L. 4151-3 du code de la santé publique auquel renvoie explicitement l'article 1 er de la proposition de loi, la sage-femme doit faire appel à un médecin en cas de pathologie maternelle, foetale ou néonatale ou en cas d'accouchement difficile. De ce fait, les femmes concernées sont celles dont la grossesse et l'accouchement se déroulent de manière physiologique, c'est-à-dire normalement, sans pathologie particulière.
Pour autant, nous savons très bien que peuvent survenir des complications durant le travail. La proposition de loi pose donc deux éléments essentiels en termes de sécurité :
- les maisons de naissance devront être « attenantes à une structure autorisée pour l'activité de gynéco-obstétrique » ;
- elles devront conclure une convention avec cette maternité qui organisera notamment les conditions des transferts des parturientes en cas de complication.
En outre, l'ensemble des modalités de mise en oeuvre de l'expérimentation, notamment les conditions spécifiques de fonctionnement des maisons, seront définies par décret en Conseil d'Etat. Le Gouvernement pourra donc affiner encore l'encadrement de l'expérimentation, notamment en termes de sécurité de la prise en charge.
Dans le même temps, la Haute Autorité de santé rédigera un cahier des charges et, durant les deux années suivant la promulgation de la loi, les ministres en charge de la santé de la sécurité sociale arrêteront, après avis conforme de la HAS, la liste des maisons de naissance autorisées à fonctionner à titre expérimental.
Les maisons de naissance autorisées pourront alors fonctionner durant un maximum de cinq années et, un an avant la fin de l'expérimentation, le Gouvernement adressera au Parlement un rapport d'évaluation. L'autorisation de fonctionnement pourra être suspendue à tout moment par l'ARS en cas de manquement à la sécurité.
Pourquoi examiner ce texte aujourd'hui ?
Tout d'abord, le contexte a évolué. Le collège national des gynécologues-obstétriciens, que nous avons auditionné, a changé d'avis par rapport à 2010 et il est maintenant complètement favorable à l'expérimentation, dans les conditions prévues ici : il l'a formalisé officiellement dans un document publié en décembre dernier. Ce point est évidemment essentiel.
Plus généralement, un débat est né en France, depuis plusieurs années, sur la « technicisation » de l'accouchement.
Le plan Périnatalité 2005-2007 en fait le constat dès 2004 et le rapport préparatoire à ce plan, rédigé par un épidémiologiste, un gynécologue-obstétricien et un pédiatre, est explicite : « si la nécessité de soins intensifs ne fait aucun doute dans les situations à haut risque, le débat est beaucoup plus ouvert dans les situations à faible risque. Dans ces situations, il a été montré que l'excès de surveillance pouvait être iatrogène. Les données disponibles laissent à penser qu'il faudrait à la fois faire plus et mieux dans les situations à haut risque et moins (et mieux) dans les situations à faible risque ».
Le taux de césarienne (20 %) et le taux de déclenchement des accouchements (environ 20 % aussi) est supérieur en France à ce qui est observé dans la plupart des pays européens ; le nombre d'échographies est également élevé. En outre, environ 80 % des femmes bénéficient aujourd'hui d'une péridurale.
Il est évident que la meilleure prise en charge des grossesses, notamment sur le plan médical, a permis de diminuer fortement les taux de mortalité infantile et maternelle. Rappelons-nous que le taux de mortalité infantile s'élevait à 151 décès pour 1 000 naissances vivantes il y a un siècle, qu'il se situait autour de 50 pour 1 000 dans les années 1950, 10 pour 1 000 dans les années 1980 et qu'il est de 3,4 pour 1 000 en 2011.
Pour autant, l'ensemble des pays occidentaux a évolué dans le même sens avec des modèles de prise en charge variés et la France se situe aujourd'hui dans la moyenne des pays européens, mais à un taux qui reste supérieur d'un point à ceux de la Suède ou de la Finlande.
Or, il n'y a pas un lien automatique et direct entre les modalités de prise en charge et le taux de mortalité ; de très nombreux facteurs interviennent. Une illustration en est la situation particulière de la Guyane, où malgré des maternités organisées sur le même modèle qu'en métropole, le taux de mortalité infantile atteint 11,8 pour 1 000, soit presque quatre fois le taux constaté en métropole !
En outre, l'approche française de l'accouchement, très technique on l'a vu, ne correspond pas à celle de la plupart de nos partenaires. Aux Pays-Bas, qui se situent certainement à l'exact opposé de la France de ce point de vue, moins de 10 % des femmes bénéficient d'une analgésie péridurale !
De nombreux pays ont ainsi mis en place des structures du type « maisons de naissance » : il en existe en Allemagne, en Belgique, en Suisse, en Suède, en Australie, aux Etats-Unis, au Québec... Le taux de mortalité infantile est quasiment identique en Allemagne, en Belgique et en France, alors qu'en Allemagne existent 150 maisons de naissance et 12 en Belgique. Au Québec, les trois quarts des accouchements ont lieu en maison de naissance.
Ces maisons ont été mises en place, selon des modèles divers, pour organiser au mieux le système de santé et pour répondre à la volonté d'un certain nombre de femmes de bénéficier d'un accompagnement global de leur maternité dans des conditions sanitaires satisfaisantes mais qui ne soient pas invasives.
On assiste au même phénomène en France : certaines femmes et certains couples souhaitent vivre la grossesse de manière différente, sans se focaliser d'abord sur la douleur et en se réappropriant le caractère foncièrement naturel de la maternité. Sans nécessairement le partager, je ne crois pas que nous soyons légitimes à critiquer ce choix, qui relève de l'intime, mais nous devons l'accompagner pour que les conditions de sécurité soient maximales.
Les accouchements à domicile restent marginaux dans notre pays mais la demande n'est pas négligeable et elle croît. L'ordre des sages-femmes a réalisé une enquête en 2008 : parmi l'échantillon des 1 615 sages-femmes ayant répondu, on dénombre 1 052 accouchements réalisés à domicile, mais 4 500 demandes non satisfaites. Les maisons de naissance peuvent offrir une alternative satisfaisante et sûre à ce type d'accouchement, dont on doit se prémunir contre le développement.
Face à cette demande réelle des femmes, plusieurs projets pilotes se sont mis en place malgré l'absence de cadre juridique défini. Pour préparer ce rapport, j'ai visité deux maisons de naissance, une à Pontoise avec notre collègue Dominique Gillot qui soutient cette initiative, et une à Paris. Je voudrais prendre quelques instants pour expliquer la manière dont les choses s'y déroulent.
Je dois d'abord dire que j'ai été marqué par la grande sérénité qui y règne, ainsi que par l'engagement des parents et des professionnelles. Les projets sont en effet soutenus à la fois par une maternité, des sages-femmes et une association dynamique de parents. Ce « triptyque » est essentiel à l'émergence d'un projet viable.
Un projet a démarré à Pontoise en 2006, dans un cadre strictement hospitalier et sous l'impulsion du chef de service de la maternité : la maison de naissance se situe à un étage du bâtiment femme-enfant de l'hôpital de la ville, elle est inscrite dans le Sros Ile-de-France et les deux sages-femmes qui l'animent sont salariées de l'hôpital.
Chaque sage-femme assure le suivi global et personnalisé de ses patientes : le premier entretien, les consultations prénatales, les séances de préparation à la naissance et à la parentalité, l'accouchement physiologique et la consultation postnatale.
Les statistiques parlent d'elles-mêmes :
- depuis 2007, une centaine de femmes sont suivies chaque année et autant d'accouchements sont pratiqués. Depuis 2010, la maison de naissance est obligée de refuser environ 150 femmes chaque année par manque de place.
La maternité, qui est de type III, a réalisé au total 4 200 accouchements en 2010. La maison de naissance constitue donc, du point de vue de la maternité, un moyen de mieux répartir la prise en charge de l'accouchement et d'alléger quelque peu le travail de l'équipe dédiée au plateau technique ;
- environ 20 % des femmes sont transférées vers l'unité classique d'obstétrique, située dans le même bâtiment. La moitié de ces transferts ont lieu « pré-partum » (c'est-à-dire durant la grossesse), en raison d'une complication ou par choix personnel de la parturiente, et l'autre moitié « per-partum ». Seules 10 % des femmes sont donc transférées en maternité durant le travail.
En 2009, un autre projet a vu le jour, à Paris, au rez-de-chaussée de la maternité des Bluets. Il est porté par une association de parents très active (le CALM) et les sages-femmes y exercent en libéral.
Contrairement à Pontoise où tout l'accouchement se déroule dans une salle de la maison de naissance, le travail commence ici dans les locaux de l'association mais la femme et la sage-femme se déplacent dans une salle de la maternité un peu avant l'accouchement pour des raisons d'assurance de la professionnelle. Ce déplacement n'entraîne pas de mobilisation du personnel de la maternité ; c'est la sage-femme du CALM qui continue l'accompagnement et l'équipe médicale de la maternité n'intervient qu'en cas de complication.
Dans ces deux maisons de naissance, le profil des femmes et des couples accueillis est très divers. Contrairement à ce que certains pourraient imaginer, l'envie d'un accouchement médicalisé de manière raisonnable ne signifie pas être « baba-cool » ou « bobo ». Les sages-femmes de Pontoise, qui ont cette pratique depuis plus de cinq ans maintenant, ont insisté auprès de nous sur cet aspect.
Les sages-femmes ne peuvent évidemment pas pratiquer de péridurale, mais elles disposent de l'équipement médical standard pour assurer le monitoring ou des perfusions. Si la femme souhaite une péridurale, elle est transférée en obstétrique ; grâce à un accompagnement permanent par une sage-femme connue de la femme et avec laquelle s'est nouée une relation de confiance et grâce à une préparation à l'accouchement adaptée, très peu de transferts sont effectués pour cette raison (2 en six ans à Pontoise).
Ces projets pilotes n'existent que par la bonne volonté des individus, notamment les chefs d'établissement et de service de ces maternités. Un cadre juridique leur assurerait donc une pérennité et un mode de fonctionnement plus clair. Il permettrait également aux sages-femmes libérales de contracter une responsabilité civile professionnelle adaptée permettant effectivement de pratiquer les accouchements dans la maison de naissance.
Je voudrais conclure cette présentation sur trois points qui me semblent essentiels.
Tout d'abord, le réseau des maternités a profondément changé depuis une vingtaine d'années : elles sont moins nombreuses, de taille plus importante et mieux équipées. La restructuration hospitalière et la classification des maternités en trois niveaux ont eu des conséquences que je crois indispensable d'évaluer ; je soutiens d'ailleurs la demande que notre présidente a faite auprès de la Cour des comptes allant dans ce sens.
Pour autant, il serait injuste de faire un lien entre la fermeture des « petites » maternités et la création de maisons de naissance : elles n'existent pas aujourd'hui ; surtout elles seront nécessairement attenantes à une maternité. S'il n'y a plus de maternité, il ne peut pas y avoir de maison de naissance !
En outre, par essence même, ces maisons resteront des petites structures, autour de 200, voire au maximum 300 naissances. Elles ne pourront, en pratique, être créées que dans des zones urbaines pour deux raisons : les femmes volontaires et susceptibles de pouvoir y entrer, c'est-à-dire qui remplissent les conditions d'absence de pathologie, et les sages-femmes prêtes à s'engager dans un tel projet doivent être suffisamment nombreuses pour que le projet soit viable. Cependant, afin d'éviter tout effet de seuil pour les maternités proches des 300 accouchements annuels, la proposition de loi prévoit explicitement que l'activité de la maison de naissance est comptabilisée avec celle de la maternité.
Ensuite, les conditions de sécurité, qui ont été améliorées lors du débat parlementaire de 2010, sont en définitive exactement les mêmes que la femme soit prise en charge en maternité ou en maison de naissance, puisque celles-ci sont attenantes à une unité d'obstétrique et concluront une convention organisant leur travail en commun, notamment les transferts de patientes.
Enfin, est-il nécessaire de rappeler que la maternité et l'accouchement touchent à l'intime et à la conviction personnelle des femmes et des couples ? Ouvrir des maisons de naissance à côté des maternités permet d'élargir l'offre de prise en charge par une approche complémentaire, pour celles qui le souhaitent et qui sont en état de conduire une grossesse physiologique.
Lors de mes déplacements, les parents m'ont beaucoup parlé de la notion d'accompagnement global, c'est-à-dire au fond de la relation de confiance qui s'établit au fil des mois entre la femme et sa sage-femme. Cette approche permet une prise en charge personnalisée, sur mesure en quelque sorte, qui n'est guère possible dans une structure telle qu'une maternité, où les sages-femmes enchainent des gardes de douze ou vingt-quatre heures.
C'est au nom de cette démarche, au nom de toutes ces femmes et de tous ces couples, que je vous demande d'approuver l'expérimentation en France des maisons de naissance.
M. Alain Milon . - Nous voudrions tout d'abord remercier Mme Dini pour sa constance et sa persévérance sur le sujet des maisons de naissance. Par cette proposition de loi, elle revient sur un point dont nous avions débattu en octobre 2010 à l'occasion du projet de loi de financement de la sécurité sociale, et contre lequel j'avais alors voté. Les sages-femmes, qui constituent une profession paramédicale et non une profession médicale, s'étaient à l'époque prononcées pour le texte tandis que les gynécologues-obstétriciens, à l'exception du Professeur Frydman et de quelques autres personnalités, s'étaient déclarés contre. Le contexte a aujourd'hui évolué, puisque le collège national des gynécologues-obstétriciens a changé d'avis et soutient ce projet sous certaines conditions. A ce titre, le fait que les maisons de naissance soient attenantes à une maternité me paraît essentiel. Par ailleurs, vous n'avez pas évoqué les critères de sélection des femmes ou le niveau de médicalisation. Je suppose que ces structures n'accueillent pas de primipares et qu'elles ne pourront pratiquer les péridurales ni administrer d'ocytociques. Qu'en sera-t-il précisément ? Des conditions devront être observées par les sages-femmes qui tiendront les maisons de naissance.
Par ailleurs, dans certains départements, l'ouverture d'une maison de naissance et la fermeture par l'ARS d'une maternité qui réalise moins de 300 accouchements pourraient être concomitantes. La maison de naissance attenante à une maternité plus importante pourra alors récupérer les accouchements de la maternité qui aura été fermée. Comment de telles situations pourront-elles être expliquées par les élus à leurs populations ? Bien que je ne conteste pas l'utilité des maisons de naissance, elles me paraissent délicates à mettre en place sur certains territoires.
Quelles seront les incidences sur l'équilibre du budget des hôpitaux ? Les accouchements réalisés par les sages-femmes, qu'elles soient libérales ou fonctionnaires, seront payés par la sécurité sociale comme un acte et non comme une activité. Il s'ensuivra une diminution de l'activité et donc des recettes de l'unité d'obstétrique de la maternité attenante dans le cadre de la T2A.
Quels seront les effets sur la répartition des naissances selon leur degré de complexité entre les maisons de naissance et les hôpitaux ? Il existe un risque que les maisons de naissance attenantes à des cliniques privées ne réalisent que des naissances faciles et laissent aux hôpitaux, et notamment aux maternités de niveau III, le soin d'assurer la plupart des accouchements compliqués.
En conclusion, le groupe UMP se prononcera en faveur de cette expérimentation, dans les territoires qui ne connaissent pas de fermetures de maternités, et à condition que l'équilibre des budgets des hôpitaux puisse être préservé.
Mme Catherine Génisson . - J'adresse également mes remerciements à Mme Dini qui nous soumet un sujet passionnant. Le thème des maisons de naissances concerne aussi la question de la relation entre les professionnels de santé et les patients. C'est là un sujet central que nous devrions pouvoir remettre en débat ultérieurement.
Il est important de rappeler que la grossesse et l'accouchement ne sont pas des maladies. Il faut cependant souligner, comme vous l'avez fait dans votre rapport, que les femmes souffrant de pathologies ou celles qui accouchent prématurément ont largement bénéficié des progrès de la médecine.
Je souhaite reprendre certaines des interrogations qui viennent d'être soulevées par Alain Milon. L'accouchement assuré par les sages-femmes, qui appartiennent bien au personnel médical, sera-t-il reconnu comme un acte médical et valorisé comme tel ? L'expérimentation permettra certainement de répondre à cette question.
Sur la problématique de la fermeture des maternités, nous devons avoir une communication claire. Il me semble que ce sujet n'est pas le même que celui des maisons de naissance, puisque notre rapporteure nous propose de mettre en place des structures attenantes à une maternité. Il faut cependant aussi insister sur le fait qu'il faut arrêter de fermer des maternités, quitte à les transformer en des lieux de consultations prénatales, postnatales et de suivi, même s'il ne s'y pratique plus d'accouchements. Il est nécessaire de maintenir un lien très fort et très étroit entre la population et les maternités.
La question centrale sur ce sujet est celle de la sécurité. Les deux expériences de maisons de naissance que vous nous avez présentées sont situées à l'intérieur de maternités. Je m'interroge sur le terme « attenante », qui signifie « à côté ». Il faudrait faire en sorte que les maisons de naissance puissent à la fois être parfaitement autonomes et fonctionner à l'intérieur des maternités.
Par ailleurs, comment l'examen de l'enfant né en maison de naissance est-il assuré ? La consultation pédiatrique, qui permet de vérifier que le développement de l'enfant est normal, est fondamentale et doit être assurée.
Je voudrais signaler que le ministère de la santé s'est déclaré intéressé par cette proposition. Il a cependant indiqué qu'un texte de loi n'était peut-être pas nécessaire, la question pouvant être réglée au niveau réglementaire. Je ne suis pas totalement convaincue par cette assertion, qui mérite d'être vérifiée. En l'état actuel des choses, le groupe socialiste s'abstiendra aujourd'hui sur la proposition.
Mme Catherine Deroche . - J'adresse tout d'abord mes félicitations à Mme Dini. Vous nous avez fait part des demandes des femmes et des couples d'avoir une relation privilégiée avec les sages-femmes. Je pense qu'il peut aussi exister une relation de confiance entre une femme et le gynécologue-obstétricien ou le gynécologue médical qui la suit pendant sa grossesse. La question est davantage celle des rapports humains que celle de la qualification de sage-femme ou de médecin.
J'aimerais vous poser quelques questions pratiques. Dans les maisons de naissance que vous avez visitées, y avait-il des primipares ? Parmi celles-ci, quelle est la part de celles qui optent pour une péridurale au dernier moment ? Combien de temps les femmes restent-elles dans la maison de naissance après l'accouchement ? Comment se déroule l'examen de l'enfant ? Comment la structure en elle-même est-elle financée, s'agissant notamment de sa construction et de son fonctionnement ? Comment la responsabilité civile est-elle répartie entre l'hôpital et la sage-femme qui pratique l'accouchement ?
M. Marc Laménie . - Je m'associe aux interventions de mes collègues qui soulignent la qualité du travail de Mme Dini. On a observé une amélioration significative au fil des années de la mortalité infantile, ainsi que vous le rappelez à raison dans votre rapport. Il existe cependant encore aujourd'hui des risques d'accidents, dans une société qui est de plus en plus procédurière, et c'est pourquoi vous avez raison d'insister sur la sécurité de ces structures.
Concernant le problème des petites maternités qui ont été fermées, peut-on vraiment affirmer qu'il y a une relation de complémentarité et non de concurrence entre les maisons de naissance et les maternités ?
Vous nous avez parlé des exemples étrangers, en Allemagne ou en Belgique par exemple, pays pionniers en matière de santé. J'aimerais souligner que dans les départements frontaliers, et en particulier dans les Ardennes, beaucoup d'accouchements ont déjà lieu en Belgique dans le cadre de partenariats.
Pour ma part, je soutiendrai la proposition de loi.
M. Gérard Roche . - Nous sommes ici saisis d'un sujet difficile. Dans la vie d'une femme, un accouchement est un événement physiologique et non pathologique. Mais quand il devient pathologique, toutes les réponses médicales doivent pouvoir être mobilisées dans l'urgence et en même temps, de la réanimation néonatale à l'intervention chirurgicale et à la transfusion sanguine.
Je pense qu'il ne faut pas faire d'amalgame entre les maisons de naissance et la fermeture des petites maternités de campagne. Je fais partie de ceux qui se sont battus, malgré les oppositions que nous rencontrons naturellement sur le terrain, pour faire fermer ces petites structures, pour des raisons de sécurité.
Le projet proposé me semble intéressant sur le plan éthique : il permet de prendre en compte le fait qu'un accouchement n'est pas un événement pathologique tout en assurant la sécurité des patientes et des enfants lorsqu'il le devient.
J'aimerais qu'il soit explicitement indiqué dans le texte que les maisons de naissance doivent être non pas attenantes à une maternité, mais placées sous l'autorité médicale d'un service d'obstétrique.
Il est essentiel de souligner que la présente proposition de loi a pour objet non de créer des maisons de naissance mais de mener une expérimentation. Il me semble que c'est une très bonne démarche avant une éventuelle institutionnalisation définitive de ces structures dans quelques années.
Mme Laurence Cohen .- Je remercie à mon tour Mme Dini pour son rapport, qui illustre bien l'humanisme de son auteure. Nous n'examinons pas aujourd'hui cette proposition de loi sous un ciel serein en ce qui concerne la politique de santé. Le gouvernement précédent, par exemple avec la loi HPST, a mené un mouvement massif de fermeture d'hôpitaux et notamment de maternités de proximité, parfois pour des raisons de sécurité, souvent au détriment des populations. Or la logique de la proposition de loi est d'apporter une amélioration et un renforcement de l'offre médicale là où existent déjà des structures, et non pas dans les déserts médicaux.
Les maternités continuent aujourd'hui à fermer, comme l'illustre la bataille menée en ce moment à Vire. Je ne vois pas la logique qui nous conduirait à adopter l'expérimentation des maisons de naissance dans des conditions de financement et de responsabilité qui ne sont pas encore définies, alors qu'aucune réponse ne sera apportée aux maternités qui se trouvent en grande difficulté du fait d'un manque de financements.
Il faut en revanche réfléchir à ce que les maisons de naissance puissent être constituées sous forme de services à l'intérieur des maternités. De très nombreuses maternités de proximité, qui permettaient l'écoute des patientes, ont été fermées tandis que des maternités de niveau III ont été créées et se sont développées. On a ainsi détricoté un savoir-faire, comme nous en voyons l'exemple dans nos régions. Je pense qu'une expérimentation de ce type peut être menée dans un cadre sécurisé, en assurant la possibilité d'une intervention sur le plateau technique dans l'enceinte de la maternité, et avec la possibilité d'un choix des patientes.
Par ailleurs, le seuil de 300 accouchements au maximum dans les maisons de naissance nous semble en contradiction avec les critères qui président à la fermeture des maternités de proximité.
Il nous semble donc y avoir de très nombreux points de contradiction dans ce texte, et pour ces raisons le groupe CRC y est défavorable.
Mme Catherine Procaccia . - J'aimerais vous poser quelques questions précises. Nous avons eu l'occasion de nous pencher à de nombreuses reprises sur le problème de la responsabilité civile des professionnels de santé. Il est indiqué dans votre rapport que les sages-femmes pourraient contracter une responsabilité civile professionnelle adaptée. Avez-vous pu entendre, au cours de vos auditions, des spécialistes en matière d'assurance ? Il me semble qu'il s'agit d'un élément essentiel.
80 % des femmes accouchent aujourd'hui sous péridurale, ce qui constitue un progrès important. N'y a-t-il pas une ambiguïté à proposer des accouchements sans péridurale dans les maisons de naissance, alors que de plus en plus de femmes en sont demandeuses ? Je m'interroge sur les risques liés à un éventuel changement d'avis à la dernière minute d'une parturiente, puisqu'il faut avoir vu un anesthésiste à l'avance pour qu'une péridurale puisse être pratiquée. D'ailleurs, disposez-vous d'une typologie sociale des femmes qui seraient susceptibles de faire le choix d'un accouchement en maison de naissance ?
Pour ma part, je voterai cette proposition de loi. Je la trouve cependant très restrictive puisque, si j'ai bien compris vos explications, les maisons de naissance n'ouvriront pas en milieu rural ni dans les territoires où des maternités ont été fermées, et elles devront être attenantes à une maternité.
Mme Aline Archimbaud . - J'adresse mes remerciements à la rapporteure pour l'important travail qu'elle a accompli et le rapport précis qu'elle nous soumet. Le groupe écologiste soutient les initiatives qui visent à limiter la surmédicalisation. Une femme qui accouche n'est pas, en général, une femme malade et redonner à cet acte une vision naturelle nous paraît une bonne chose. Comme l'a expliqué Fernand Lamaze, l'accouchement dans la douleur correspond à une vision philosophique particulière et on peut en avoir une autre. Laisser la possibilité à celles qui souhaitent accoucher sans douleur de bénéficier d'une péridurale comme à celles qui ne souhaitent pas surmédicaliser leur accouchement de mettre leur enfant au monde dans une maison de naissance me semble aller dans le bon sens.
Notre groupe pose cependant quelques conditions à cette expérimentation. Celle-ci doit d'abord être très encadrée sur le plan de la sécurité. Nous pensons que les maisons de naissance doivent être rattachées à des hôpitaux, de manière à pouvoir intervenir immédiatement en cas de problème durant l'accouchement - et c'est souvent une question de minutes dans ce cas. On ne peut pas transiger sur ce point.
Concernant le financement des maisons de naissance, il serait d'abord intéressant de voir quelles économies peuvent être faites en évitant la surmédicalisation. N'y a-t-il pas actuellement des actes inutiles qui sont pratiqués ? Ensuite, une femme qui accoucherait dans une maison de naissance paierait-elle le même tarif qu'une femme qui accouche dans un hôpital public ? Cette question me paraît importante du point de vue de l'égalité et de l'accès aux soins.
Nous sommes favorables à cette expérimentation, à condition qu'elle soit très encadrée. Face à la crise du système de santé public, expérimenter pendant cinq ans d'autres façons de prendre en charge la grossesse et l'accouchement peut permettre de faire avancer les choses. Le ministère aurait indiqué qu'il mène une réflexion en ce sens ; nous, parlementaires, pouvons également progresser. Nous voterons aujourd'hui cette proposition de loi afin qu'elle puisse avancer, mais notre position dans l'hémicycle dépendra de la réponse aux questions et aux conditions que nous avons posées.
Mme Marie-Thérèse Bruguière . - Je m'associe aux félicitations qui ont été adressées à Mme Dini pour la qualité de ce rapport. La grossesse et l'accouchement ne sont pas, en effet, une maladie ; ce sont les complications qui peuvent survenir avant et après l'accouchement qui peuvent nécessiter une prise en charge particulière.
Je vous propose d'insérer explicitement la notion de « maison de naissance hospitalière » dans le texte afin de lever toute ambiguïté et d'indiquer clairement que ces structures, tenues par des sages-femmes, doivent être dépendantes de l'hôpital, notamment s'agissant de la responsabilité.
Je voudrais préciser que l'accouchement ne peut être réalisé sous péridurale que lorsqu'on le prévoit à l'avance. On ne peut pas décider de faire une péridurale au dernier moment, lorsque le travail est largement engagé.
Cette expérimentation va permettre d'alléger le travail de l'équipe médicale, qui pourra rester auprès des malades qui en ont besoin. Je voudrais souligner que dans les maternités publiques, ce sont déjà souvent les sages-femmes, et même les élèves sages-femmes, qui réalisent les accouchements - sous l'oeil vigilant des médecins.
A condition qu'elles soient à proximité des maternités, et à condition qu'une attention particulière soit portée à la prévention des maladies nosocomiales, l'expérimentation des maisons de naissance me paraît tout à fait acceptable. Ces structures permettront d'offrir plus de confort et d'intimité et une moindre médicalisation. Pour ma part, je voterai pour cette proposition de loi.
M. Jean-Pierre Godefroy . - Vous indiquez dans votre rapport que ce sont les sages-femmes qui réalisent les accouchements en maison de naissance, un médecin n'intervenant qu'en cas de complication. Comment les responsabilités seront-elles partagées, tant au plan civil que pénal ? Ne risque-t-on pas de voir se développer des problèmes de conflits de responsabilités, si par exemple le médecin estime qu'il n'a pas été alerté suffisamment tôt par la sage-femme ?
M. Claude Jeannerot . - Je tiens à remercier la rapporteure. J'ai beaucoup appris à vous écouter dans ce domaine que je connais mal. Même si je ne partage pas tout à fait sa conclusion, je me suis pleinement reconnu dans la position exprimée par Laurence Cohen. Il faut faire droit à la volonté exprimée par les femmes et les couples de se réapproprier « le caractère foncièrement naturel de la maternité », selon la formule qui figure dans le rapport de Mme Dini. C'est pourquoi une offre de services doit exister de manière intégrée dans les maternités. Je ne comprends pas pourquoi on ne peut pas trouver ce type de services directement dans les maternités. Est-il nécessaire d'inventer une nouvelle structure qui vienne se surajouter aux autres ?
Cependant, votre proposition ne me semble pas éloignée des propositions que nous formulons et je pense que nous pourrions, moyennant quelques ajustements, nous retrouver sur un texte commun.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe . - Il me vient une idée en vous écoutant. Puisqu'il s'agit de mettre en place une expérimentation, pourquoi ne pas essayer deux formules : on pourrait expérimenter à la fois des structures indépendantes, attenantes à des maternités, et des services dédiés, qui seraient proposés au sein même de certaines maternités. Nous pourrions ensuite évaluer l'intérêt et les coûts associés à chacune de ces structures et ainsi les comparer.
Mme Annie David , présidente. - Il s'agit certes de mener une expérimentation, mais je vous rappelle que tout cela nécessite des financements, dans un contexte où l'équilibre budgétaire de nos maternités est très fragile.
Le point le plus important de ce texte me semble être celui de la sécurité des accouchements. Si nous sommes aujourd'hui heureux d'observer des progrès dans la mortalité infantile, c'est grâce aux maternités qui se sont développées sur l'ensemble du territoire. Je ne comprends pas pourquoi on souhaiterait aujourd'hui proposer de réaliser des accouchements hors de ces structures sécurisées. Une surmédicalisation est peut-être observée dans les grands centres urbains, mais on peut encore accoucher de manière simple dans nombre de nos maternités, comme par exemple à Grenoble. Je suis inquiète à l'idée que l'on va permettre à certains territoires de bénéficier de maisons de naissance au détriment d'autres territoires, dont les maternités sont en difficulté et n'offrent pas toutes les conditions de sécurité en raison de problèmes de financement.
Mme Catherine Génisson . - Cette proposition de loi s'inscrit évidemment dans un contexte de difficultés de fonctionnement pour l'ensemble des maternités présentes sur le territoire.
Je pense que cette expérimentation ne peut être conduite que si elle est effectuée à l'intérieur des services hospitaliers, pour deux raisons importantes. On ne peut tout d'abord transiger sur les conditions de sécurité, puisqu'une femme dont l'accouchement se passe mal doit pouvoir être prise en charge en quelques minutes de manière adéquate. Ensuite parce que cette proposition de loi met à égalité les hôpitaux publics et les cliniques privées - dans lesquelles le taux de césariennes est par ailleurs souvent plus élevé.
Cette demande de placer les maisons de naissance à l'intérieur d'établissements hospitaliers est corroborée par les deux exemples que vous nous avez présentés : au CALM comme à Pontoise, la maison de naissance se situe à l'intérieur d'une maternité. Plutôt que d'autonomiser certaines structures, il faudrait faire évoluer l'ensemble des maternités afin qu'elles puissent proposer une offre graduée aux femmes selon leur état clinique.
M. Jean Desessard . - Je soutiens Mme la rapporteure dans son projet d'expérimentation. Je trouve que c'est une idée formidable. Nous avons en France une idéologie sécuritaire, que je peux comprendre ; mais nous voyons pourtant que ces maisons de naissance existent dans d'autre pays sans que cela ne pose de problèmes incommensurables.
Pour le débat en séance, il serait intéressant de voir dans quelle mesure les maisons de naissance pourraient entraîner un surcroît de dépenses ou, au contraire, permettre de réaliser des économies. Nous pourrions aussi examiner les résultats des audits menés dans le cadre des expériences étrangères. Les maisons de naissance fonctionnent par exemple très bien au Québec. Le taux d'accident en maison de naissance à l'étranger est-il plus important que celui que l'on constate dans les maternités françaises ? Il faut garder à l'esprit que des accidents surviennent aussi dans les maternités très médicalisées. Je trouve que nous nous montrons très frileux sur ce sujet, d'autant qu'il ne s'agit à ce stade que d'une expérimentation qui peut être arrêtée à tout moment.
Mme Chantal Jouanno . - Je voudrais remercier Mme Dini, qui fait preuve de constance et de proposition. Nous partageons le constat de la surmédicalisation et des problèmes financiers qui touchent nos maternités. Nous avons ici une proposition qui vise à répondre à l'enjeu de la surmédicalisation tout en permettant de dégager des économies. On peut discuter des conditions de cette expérimentation, mais il serait dommage que le législateur refuse d'en adopter le principe alors que cela se fait ailleurs et que le dispositif serait très encadré.
M. Alain Milon . - Je voudrais faire une réponse à Mme la Présidente sur un point soulevé précédemment. La diminution de la mortalité infantile, qui est associée à une diminution de la mortalité maternelle, n'est pas due à la multiplication des maternités. Elle résulte des progrès de la surveillance faite au cours de la grossesse et au pronostic délivré avant l'accouchement.
Mme Annie David , présidente. - Vous avez raison, ce n'est pas uniquement la multiplication des maternités qui a permis ces progrès. Mais le fait que le suivi des femmes et les accouchements se déroulent maintenant dans des lieux tout à fait sécurisés explique tout de même cette amélioration.
Mme Muguette Dini , rapporteure. - Je vais essayer d'apporter une réponse à l'ensemble de vos questions.
Tout d'abord, la profession de sage-femme est une profession médicale au sens du code de la santé publique et je rappelle qu'elle nécessite cinq années de formation.
Ensuite, il n'y a pas de corrélation entre l'expérimentation des maisons de naissance et la fermeture des maternités. Je ne vous propose pas d'ouvrir des maisons de naissance à la place de maternités. Il s'agira d'une simple expérimentation, ce qui signifie que cinq ou six maisons de naissance seulement devraient ouvrir dans les prochaines années si nous adoptons ce texte, dix au maximum. Il suffit de comparer ce chiffre avec celui des 535 maternités qui existent en France pour constater que les maisons de naissance n'ont pas vocation à se substituer aux maternités. On estime en outre à environ 3 % à 5 % le nombre de femmes enceintes qui pourraient souhaiter accoucher dans ces structures, ce qui est peu par rapport aux 800 000 accouchements qui ont lieu chaque année en France.
S'agissant du problème de la diminution de l'activité hospitalière qui serait induite par le fonctionnement d'une maison de naissance, il est bien évident qu'à la diminution du nombre d'actes pratiqués à l'hôpital sera associée une diminution de ses charges. En outre, l'ouverture d'une maison de naissance pourrait permettre à l'hôpital de concentrer les moyens sur les grossesses pathologiques. Si plusieurs centres hospitaliers, Pontoise ou certains CHU comme Nancy ou Marseille, ont de tels projets, le bilan en termes d'activité ne doit pas être si déséquilibré...
M. Jean-Marie Vanlerenberghe . - L'expérimentation devrait en effet permettre de le mesurer.
Mme Muguette Dini , rapporteure. - Il est certain qu'un accouchement en maison de naissance est moins onéreux qu'un accouchement à l'hôpital. Un accouchement par voie basse sans complication est facturé au total environ 2 000 euros à l'hôpital, hors prise en charge du nouveau-né, tandis qu'on estime son coût à 600 euros en maison de naissance. Je pense personnellement que cette estimation est trop basse et ne permettrait pas de couvrir l'ensemble des charges, mais je ne fais pas de cette expérimentation une affaire économique. Ce qui est certain, c'est qu'elle n'entraînera pas un surcroît de dépenses. Il faut trouver un équilibre, mais il n'y a pas de raison que ça ne fonctionne pas.
Je passe à la question relative à la répartition des accouchements entre les secteurs public et privé selon leur complexité. Le texte prévoit que les maisons de naissance soient accolées soit à une maternité publique, soit à une maternité privée, à laquelle elles sont liées par une convention. Les transferts qui interviendront en cas de complication seront faits vers la maternité à laquelle la maison de naissance sera accolée, qu'elle soit publique ou privée, et non pas seulement vers l'hôpital public.
Sur la question de la qualité de la relation entre les professionnels de santé et les patients, les sages-femmes et les mères que nous avons rencontrées nous ont dit apprécier la globalité du suivi pratiqué en maison de naissance. Lorsqu'un problème est décelé par la sage-femme, la patiente est bien sûr immédiatement transférée vers un obstétricien. Mais lorsque la grossesse se déroule normalement, le suivi est assuré par la même sage-femme du début de la grossesse à la fin de l'accouchement. Actuellement, et sans mettre en cause la qualité des personnels, les femmes voient le plus fréquemment une sage-femme différente à chacune de leurs visites à l'hôpital. L'organisation du travail et du temps n'est tout simplement pas la même entre les deux structures, ce qui contribue à l'intérêt des maisons de naissance.
S'agissant de la question des primipares, les deux maisons de naissance que nous avons visitées ont opté pour des solutions différentes. La maison de naissance de Pontoise ne prend en charge que des multipares. Ce critère objectif a été posé en raison du manque de places offertes par rapport à la demande. De son côté, le CALM accueille aussi des femmes qui accouchent pour la première fois. Ce point pourra être réglé dans la convention qui sera passée entre la maison de naissance et la maternité, être imposé par la réglementation ou figurer dans le cahier des charges qui sera défini par la Haute Autorité de santé. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de l'inscrire dans la loi.
L'examen du nouveau-né après l'accouchement n'est pas modifié par le texte de la proposition de loi. Il n'y a pas actuellement d'examen pratiqué en maison de naissance, mais le nouveau-né est transféré dans un service pédiatrique par la sage-femme si le moindre problème survient. Le cahier des charges de la HAS pourra là aussi prévoir certains éléments.
S'agissant du temps passé par les mères à la maison de naissance après l'accouchement, l'objectif affiché par les structures qui fonctionnent est qu'il ne dépasse pas douze heures. La situation est particulière à l'heure actuelle à Pontoise, puisque la maison de naissance ne dispose que de 1,8 ETP de sage-femme pour 100 accouchements par an. Cet effectif ne permet pas à la structure d'assurer le suivi post-naissance à domicile ; les mères peuvent s'adresser à des sages-femmes libérales ou choisir de passer un ou deux jours à la maternité. Au CALM en revanche, les femmes sortent dans les douze heures qui suivent l'accouchement. Celles qui accouchent dans ces structures sont volontaires, informées et préparées et peuvent par ailleurs rester plus longtemps si elles ressentent des difficultés.
Il n'y a pas, à proprement parler, de salles d'accouchement dans les maisons de naissance. On y trouve des chambres équipées d'un lit double et de baignoires, qui permettent aux femmes d'accoucher en présence de leur conjoint, dans la position qu'elles souhaitent, et éventuellement d'effectuer le travail dans l'eau. Ce cadre, qui offre la possibilité d'un accouchement « comme à la maison », permet de répondre aux attentes de certaines femmes qui souhaiteraient pouvoir accoucher à domicile en toute sécurité. Il permet également aux femmes de se mouvoir, de changer de position, ce qui est un point faible dans les enquêtes de satisfaction des maternités.
A propos de la mortalité infantile, l'évolution des chiffres est très intéressante. Dans les années 1960, on observait encore en France un taux de 50 décès pour 1 000 naissances ; ce taux est passé aujourd'hui à 3,4. Voici les chiffres des autres pays européens : 3,3 en Belgique, 3,4 en Espagne et en Italie, 3,5 en Allemagne et au Danemark, 3,6 en Autriche, 2,1 en Suède, 2,4 en Finlande, 2,7 en République tchèque, 3,1 au Portugal.
M. Claude Jeannerot . - Comment explique-t-on les mauvais chiffres constatés en Guyane ?
Mme Muguette Dini , rapporteure. - Dans le cas des femmes qui traversent le fleuve en provenance du Surinam pour venir accoucher à Saint-Laurent du Maroni par exemple, le suivi de grossesse est quasi inexistant et les hémorragies sont très fréquentes. En outre, il s'agit souvent d'adolescentes ou de très jeunes femmes.
En réponse à la question de Marc Laménie, je rappelle, comme je l'ai expliqué précédemment, que les maisons de naissance constituent une offre complémentaire à celle des maternités, et non une offre de substitution.
Je passe maintenant aux questions qui m'ont été posées par Gérard Roche. Mon souci comme le vôtre est d'assurer la sécurité en cas de grossesse ou d'accouchement pathologique, ce qui suppose que la maison de naissance soit à proximité immédiate de la maternité. Si le terme de maison de naissance « attenante » doit être amélioré, je n'y suis pas opposée.
Cependant, il n'est pas possible que la maison de naissance se trouve à l'intérieur d'une maternité et soit rattachée à un service d'obstétrique. Si nous options pour cette solution, l'expérimentation que je vous propose de conduire n'aurait plus de sens, puisqu'il est déjà possible à un chef de service de mettre en place une offre de ce type aujourd'hui. Depuis la mise en oeuvre du plan périnatalité 2005-2007, les pouvoirs publics ont en effet tenté de développer des espaces physiologiques à l'intérieur de certaines maternités. Les résultats sont très inégaux selon les établissements. Surtout, ces espaces sont très nettement différents d'une maison de naissance : ils ne permettent pas un suivi global par une sage-femme et ne disposent pas de personnels dédiés. La pérennité de ces espaces n'est pas assurée, puisqu'ils peuvent être réaffectés et puisque les personnels associés peuvent être redéployés à tout moment selon les besoins du service.
Prenons l'exemple du CALM. Lors de la construction du nouveau bâtiment de la maternité des Bluets, une maison de naissance a été intégrée au projet. Celle-ci occupe seule le rez-de-chaussée de l'établissement et bénéficie d'une entrée dédiée. Elle est gérée de manière indépendante par une association de parents et de sages-femmes, qui a conclu une convention avec la maternité. Pour autant, toutes les conditions de sécurité sont réunies. Lors de ma visite, j'ai emprunté le passage qui permet d'accéder à la maternité depuis la maison de naissance : une porte, un ascenseur et quelques mètres séparent les chambres de naissance du plateau technique de la maternité !
Si la maison de naissance se trouve à l'intérieur d'un établissement, elle est obligatoirement rattachée à un service d'obstétrique et il n'y a aucune possibilité de gestion et d'exercice autonomes par des sages-femmes libérales.
Le fonctionnement du CALM est assuré par les honoraires perçus par les sages-femmes et une adhésion à l'association. Le tarif de la sécurité sociale s'élève à 313 euros pour un accouchement et les visites sont au tarif de 21 euros.
Mme Laurence Cohen . - L'expérience du CALM est extrêmement intéressante. Je ne suis pas étonnée qu'elle ait été menée à la maternité des Bluets, qui est une maternité très symbolique. Elle se bat actuellement contre une fermeture éventuelle.
Mme Muguette Dini , rapporteure. - Si l'on souhaite intégrer les maisons de naissance à l'intérieur des maternités, ma proposition de loi ne présente plus aucun intérêt. Il suffirait alors de créer un service particulier et la question relèverait à peine du niveau réglementaire...
Sur la question de la responsabilité professionnelle, l'ordre des sages-femmes a pris contact avec des sociétés d'assurance ; elles sont prêtes à proposer des contrats pour les accouchements pratiqués en maison de naissance alors qu'elles s'y refusent pour les accouchements à domicile. Une sage-femme exerçant dans une maison de naissance qui aura commis une erreur, par exemple en n'effectuant pas le transfert d'une parturiente suffisamment tôt ou en n'alertant pas le médecin de la maternité en cas de complication, pourra toujours voir sa responsabilité engagée, comme toute sage-femme à l'intérieur de l'hôpital.
Nous recherchons une sécurité absolue des maisons de naissance, mais il faut garder en tête qu'il sera difficile de descendre en dessous d'un certain taux de mortalité périnatale. Il existera toujours des risques associés à la naissance. Il est d'ailleurs intéressant de constater que dans les autres pays où le taux de mortalité constaté se situe entre 3,3 et 3,6 pour mille, les maisons de naissance ne sont pourtant pas accolées aux services des maternités, mais peuvent se situer jusqu'à trente minutes d'un plateau technique comme au Québec.
Mme Catherine Génisson . - Sur le sujet de la responsabilité civile, je voudrais amoindrir l'enthousiasme de notre rapporteure. Les sages-femmes qui pratiquent des échographies doivent contracter une assurance à un tarif très élevé. Je pense sincèrement que le prix de l'assurance va être très important pour les sages-femmes libérales qui exerceront à temps plein en maison de naissance.
Par ailleurs, si on définit un cahier des charges précis qui reprend vos conditions, je ne vois pas pourquoi il ne serait pas possible de développer des maisons de naissance à l'intérieur des services hospitaliers. Au-delà du principe de sécurité, j'y vois la question de l'égalité entre les structures publiques et privées.
M. Dominique Watrin . - Comment le financement d'une maison de naissance sera-t-il assuré ? Je pense à sa construction et au matériel dont elle a besoin.
Mme Muguette Dini , rapporteure. - J'ai répondu à la question du financement en ce qui concerne le fonctionnement de la structure. S'agissant des dépenses d'investissement, il ne faut pas oublier qu'une maison de naissance est avant tout une maison, et non un hôpital ; l'investissement est donc moindre. Dans le cas du CALM, il n'y a pas eu d'investissement : les locaux du rez-de-chaussée sont loués à la clinique par l'association. Il n'existe pas juridiquement de maison de naissance en France ; le modèle économique et financier est à inventer, ce que permettra justement l'expérimentation.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe . - J'ai l'impression que nous voulons trancher toutes les questions avant même la mise en place de l'expérimentation. Mais la question du coût et du financement des maisons de naissance, comme celle de leurs relations avec les services des maternités, sera examinée dans ce cadre.
Mme Muguette Dini , rapporteure. - Le texte de ma proposition de loi prévoit que le Gouvernement organisera par décret en Conseil d'Etat le financement des maisons de naissance. S'agissant de l'assurance des sages-femmes qui pratiquent l'échographie, il n'est pas question qu'elles le fassent dans le cadre des maisons de naissance.
M. Jacky Le Menn . - J'ai pu observer la formule juridique, qui a existé un temps, de la clinique ouverte dans un cadre hospitalier. Elle reposait sur un système de convention et permettait d'associer des médecins, des sages-femmes et des infirmières libéraux. Cette formule a maintenant disparu.
Mme Muguette Dini , rapporteure. - Il existe toujours la possibilité d'ouvrir les plateaux techniques aux professionnels libéraux mais elle n'est pas mise en pratique.
Enfin, pour répondre à la question de Jean Desessard, plusieurs études ont été publiées à l'étranger pour évaluer les maisons de naissance, notamment au Royaume-Uni et aux Etats-Unis : elles ne montrent pas de différences entre ces structures et les hôpitaux en ce qui concerne les complications ou les résultats sanitaires.
La commission adopte la proposition de loi sans modification, les groupes UDI-UC, UMP et écologiste votant pour, le groupe CRC votant contre et le groupe socialiste s'abstenant.
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
Francis Puech, président sortant, et Philippe Deruelle , secrétaire général du Collège national des gynécologues obstétriciens (CNGOF)
Natacha Lemaire , sous-directrice « Régulation de l'offre de soins » (SDR), et Julie Barrois , chargée de mission « Mère Enfant » au bureau R3 « Plateaux techniques et prises en charge hospitalières aigües », de la Direction générale de l'offre de soins (DGOS)
Marie-Josée Keller , présidente, Marie-Cécile Moulinier , secrétaire générale, Marianne Benoit Truong Canh , vice-présidente, Anne-Marie Curat , trésorière, Lucas Pisani , chargé des relations institutionnelles, du Conseil national de l'Ordre des sages-femmes
Catherine Bernard , présidente de l'Association CALM (Comme à la maison), porte-parole du Collectif maisons de naissance, et Anne Morandeau , sage-femme
LISTE DES DÉPLACEMENTS
Maison de naissance de Pontoise, centre hospitalier René Dubos (24 janvier 2013)
Participants : Muguette Dini et Dominique Gillot, sénatrices, Marie-José Keller (Ordre national des sages-femmes), Isabelle Chevalier et Isabelle Georgel, sages-femmes de la maison de naissance, Docteur Jean-Michel Muray, gynécologue-obstétricien, chef du service femme-enfant et président de la commission médicale d'établissement, Christophe Kassel, directeur du centre hospitalier, des parents et usagères (association Pamana).
CALM - Maternité des Bluets, Paris 12 e (11 février 2013)
Participants : Muguette Dini, sénatrice, Catherine Bernard, présidente de l'association, Anne Morandeau, sage-femme, Marie-José Keller (Ordre national des sages-femmes), parents et usagères de l'association.
* 1 « Les naissances en 2010 et leur évolution depuis 2003 », rapport rédigé par Béatrice Blondel et Morgane Kermarrec, unité de recherche épidémiologique en santé périnatale et santé des femmes et des enfants, Inserm - U. 953, mai 2011.
* 2 Dossier « Périnatalité et parentalité : une révolution en marche ? », revue La santé de l'Homme, Institut national de prévention et d'éducation pour la santé, n° 391, septembre-octobre 2007.
* 3 « Le rôle des sages-femmes dans le système de soins », rapport sur la sécurité sociale, Cour des comptes, septembre 2011.
* 4 Décret n° 98-900 du 9 octobre 1998 relatif aux conditions techniques de fonctionnement auxquelles doivent satisfaire les établissements de santé pour être autorisés à pratiquer les activités d'obstétrique, de néonatologie ou de réanimation néonatale et modifiant le code de la santé publique. Décret n° 98-899 du 9 octobre 1998 modifiant le titre I er du livre VII du code de la santé publique et relatif aux établissements de santé publics et privés pratiquant l'obstétrique, la néonatologie ou la réanimation néonatale.
* 5 Mortalité infantile : décès intervenu après la naissance et avant l'âge d'un an. Mortalité foetale : décès intervenu entre la conception et vingt-deux semaines d'aménorrhée (ou un poids d'au moins 500 grammes). Mortinatalité : décès intervenu après vingt-deux semaines d'aménorrhée (ou un poids d'au moins 500 grammes) et la naissance.
* 6 « La mortalité infantile dans les départements français d'outre-mer », Etudes et résultats, Drees, n° 808, septembre 2012.
* 7 Rapport du comité national d'experts sur la mortalité maternelle 2001-2006.
* 8 Dossier législatif sur le site internet du Sénat à l'adresse : http://www.senat.fr/dossier-legislatif/plfss2011.html (voir l'article 40 du projet de loi, devenu article 67 du texte adopté par le Parlement).
* 9 Rapport 2011 sur la sécurité sociale, « Le rôle des sages-femmes dans le système de soins ».
* 10 « Satisfaction des usagères des maternités à l'égard du suivi de grossesse et du déroulement de l'accouchement », Etudes et résultats, Drees, n° 660, septembre 2008.
* 11 Loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires.
* 12 « La profession de sage-femme : constat démographique et projections d'effectifs », Etudes et résultats, Drees, n° 791, mars 2012.
* 13 Huffington Post, 8 mars 2012.
* 14 P. Blockehurst (Université d'Oxford), « Perinatal and maternal outcomes by planned place of birth for healthy women with low risk pregnancies : the Birthplace in England national prospective cohort study », British medical Journal, 24 novembre 2011.
* 15 Femmes ayant déjà eu un enfant auparavant.
* 16 Susan Rutledge Stapleton, Cara Osborne et Jessica Illuzi : « Outcomes of care in birth centers : demonstration of a durable model », in Journal of Midwifery and Women's Health, janvier-février 2013.